\ HAL open science Le nantissement de créance et les procédures collectives Johanna Bennephtali > To cite this versio Johanna Benephtali. Le nantissement de ‘ance et les procédures collectives. Droit. Université Paris-Est, 2019. Francais. NNT: 2019PESC0004 . tel-02397076 HAL Id: tel-02397076 https: //theses.hal.science/tel-02397076 Submitted on 6 Dec 2019 HAL is a multicdisciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. Larchive ouverte pluridisciplimaire HAL, est, destinée au dépat et a la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d'enseignement et de recherche frangais ou étrangers, des laboratoires publics ou privé,UNIVERSITE PARIS-ES ECOLE DOCTORALE ORGANISATION, MARCHE ET INSTITUTION LE NANTISSEMENT DE CREANCE ET LES PROCEDURES COLLECTIVES ‘Thése pour lobtention du grade de docteur en droit Thése dirigée par Monsieur Augustin AYNES Soutenue le 16 avril 2019 Johanna BEN NEPHTALI fembres du jury Mme Manuella BOURASSIN, Professeur agrégé a I’ Université Paris-Nanterre (Rapporteur) M. Maxime JULIENNE, Professeur agrégé a I’ Université d’ Angers (Rapporteur) Mme Bénédicte FRANCOIS, Professeur a l'Université Paris-Est (Examinateur) M. Augustin AYNES, Professeur agrégé & I'Université Paris-Est (Directeur de thése)La Faculté n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions emises dans cette thse ; ces opinions doivent étre considérées comme propres A leur auteur.REMERCIEMEN Je tiens tout d’abord a adresser mes plus sincéres remerciements 4 Monsieur Aynés, mon Directeur de thése, pour sa gentillesse, sa disponibilité, ses remarques toujours pertinentes et Vintérét qu’il a montré 4 mon travail tout au long de ces années. Merci également aux membres du jury d’avoir accepté de consacrer du temps et de Iattention 4 mon travail, et dont les écrits m’ont beaucoup aidée 4 construire ma réflexion. Je tiens par ailleurs a remercier ma famille et mes amis qui m’ont sans cesse soutenue et motivée dans le cadre de ce projet trés personnel pour lequel il est nécessaire ’étre bien entouré. Je voudrais en outre remercier Maitre Korchia de la compréhension et de la gentillesse dont il a fait preuve au cours de ces années et dont il fait preuve chaque jour. Mes remerciements vont également 4 mon beau-pére, Gérard, pour le temps qu'il a consacré & mon travail. Je tiens a remercier tout particuligrement mon mari, Thierry, pour m’avoir supportée et soutenue au quotidien et, d’une fagon générale, de toujours me tirer vers le haut. Enfin, je souhaite avoir une pensée pour mon grand-pére, Léon, qui m’a mise sur le chemin du Droit avant méme que je ne sache lire.A celle qui arrive, et d celui grace & qui tout est possible,‘ABLE DES MAT INTRODUCTION 14 PARTIE I: LA NOTIFICATION : CLE DE VOUTE DE L’EFFICACITE DU NANTISSEMENT DE CREANCE EN PROCEDURE COLLECTIVE vrssitsseneseneens 30 TITRE I: L'INEFFICACITE DU NANTISSEMENT DE CREANCE NON NOTIFIE EN PROCEDURE COLLECTIVE vsssssseteueses reseneenee 31 CHAPITRE 1: LA FAIBLESSE DU DROIT DE PREFERENCE DU CREANCIER NANT sssssststnssnen Section 1: Nantissement de créance non notifié: le nanti assujetti au classement des ceréanciers 34 234 Sous-seetion 1 : Le droit de préférence faible du créancier nanti..... A) Faiblesse du droit de préférence du créancier nanti face un débiteur in bonis..35 B) Un droit de préférence faible en cas de procédure collective wn. 38 Sous-section 2 : Paralysie des modes alternatifs de réalisation en procédure collective 45 A) La réalisation impossible du pacte commissoire en procédure collective. 46 B) L’attribution judiciaire : une solution inefficace pour le eréancier nant... 53 Section 2 : Le nanti face aux priviléges des créanciers de rang préférable 57 Sous-Section 1 : Le régime de faveur accordé aux eréanciers postérieurs méritants.... 57 A) Les cri 57 B) Le privilége de la conciliation 1 68 2B ‘es d’attribution du statut de créancier postérieur méritant Sous-seetion 2 : Le créancier nanti face aux privileges des salariés.. A) Les salariés : une préférence de premier rang et un superprivilége 4 B) Le paiement des créances salariales garanties par les avances de 'AGS «sce. 79 CHAPITRE 2: LE FONCTIONNEMENT DU NANTISSEMENT DE CREANCE NON NOTIFIE EN PROCEDURE COLLECTIVE 85 Section : | : L’efficacité du nantissement de créance non notifié entre les parties ....... 86 Sous-section 1 : L’effet immédiat du nantissement de créance non notifié. 86 A) La portée de I’effet immédiat du nantissement de eréance entre les parties .......87 90 93 93 B) Le mode de réalisation spécifique du nantissement de créance ....croroneeeners 96 B) Les droits sur les sommes versées en paiement avant la notification..... Sous-section 2 : La réalisation du nantissement de créance non notifié...... A) Les modes de réalisation classique inadaptés au nantissement de créanceSection 2: L’opposabilité restreinte des droits du créancier nanti en cas de procédure collective 99 Sous-seetion 1 : Les actions du eréancier nanti paralysées par ’ouverture de la procédure collective 99) A) Le eréancier nanti soumis a l’arrét des poursuites du constituant 100 B) L’arrét des procédures d'exécution .. 103 Sous-Section 2 : Un risque pour le maintien de la garantie 105 A) L’absence de pouvoir de blocage du créancier nanti avant notification 106 B) La concurrence des autres créanciers du constituant 108 TITRE Il : L’EFFICACITE DU NANTISSEMENT DE CREANCE NOTIFIE 114 CHAPITRE 1 : LE DROIT DE NOTIFIER EN COURS DE PROCEDURE. us Section 1 : La notification et le nouveau droit au paiement direct du nanti essen 116 Sous-section | : La notification : lien direct entre le débiteur nanti et le créancier.... 116 A) Une mesure permettant de rendre le nantissement opposable au débiteur nanti 116 120 123 123 B) La poursuite du paiement de la créance nantie 4 l’encontre de la caution du débiteur nanti 128 Section 2 : La notification autorisée aprés le jugement d’ouveTtUte...nnnnnnnnseeeee 134 B) Le nouveau droit au paiement du eréancier nanti Sous-seetion 2 : La poursuite du paiement de la créance nantie par le eréancier ... A) La nature de I’action du créancier nanti a l"encontre du débiteur Sous-section 1: La notification: une mesure d'information sans incidence sur la procédure collective 134 A) La notification face 4 ’arrét des poursuites du constituant en procédure collective 135 B) La notification face 4 l’interdiction des procédures d’exécution 138 Sous-seetion 2 : L’incidence du moment de la notification sur les droits sur la eréance nantie 140 140 B) L’ineidence de I’échéance de la créance nantie en cours de procédure .. 142 CHAPITRE 2: LES EFFETS DE LA NOTIFICATION CONSERVES EN PROCEDURE COLLECTIVE 147 A) L’incidence de la notification sur les relations entre les parties.. Section 1 : L’absence de transfert de propriété des sommes versées par le débiteur nanti 148 148 A) Le paiement auprés du créancier nanti : seul paiement libératoire aprés la notification. 148 151 10 B) La sanction du paiement effectué auprés d’un mauvais bénéficiaiiSous-section 2: Le nantissement de créance : une sfireté non translative de propriété 156 A) L’absence de cession de la créance nantie au bénéficiaire par I'effet de la notification 156 B) La notification sans effet direct sur le droit a la réalisation du nantissement.... 159 Section 2 : Le droit au paiement direct conservé en procédure collective... 161 Sous-section 1 : Les effets de la notification face aux interdictions du droit des procédures collectives 162 A) Les effets de la notification face aux mullités de la période suspecte rn 162 B) Les effets de la notification face & interdiction du paiement di antérieures ou assimilées .... créances 167 Sous-section 2: Le droit au paiement direct en cours de procédure face au principe @égalité des créanciers 172 A) Le principe d’égalité des eréanciers..... 172 B) L’opposabilité du droit au paiement direct aux autres créanciers aprés le jugement ouverture, 175 PARTIE I : L'EFFICACITE DU NANTISSEMENT DE CREANCE FACE AUX ORGANES DE LA PROCEDURE. 181 ‘TITRE I: LA PROTE 182 CHAPITRE 1 : L’OPPOSABILITE DU DROIT DE RETENTION DU CREANCIER NANTI EN PROCEDURE COLLECTIVE vssnsssstteneneutananentusananenetasesens 183 ION DES DROITS DU CREANCIER .. Scction 1 : Une exclusivité au paiement conférant un droit de rétention au eréancier nanti 184 Sous-section 1 : La spécificité du droit exclusif au paiement du créancier nant ...... 184 A) Le droit exclusif au paiement du eréancier .. 184 .. 188 B) Un avantage notable en cas de réalisation de la streté Sous-section 2 : Les fondements de la reconnaissance d’ un droit de rétention au eréancier nanti.. 190 A) La connexité : une notion essentielle du droit de rétention... 190 B) La connexité : un fondement indifférent la nature du bien 195 Section 2 : Le droit de rétention réel du eréancier nanti 201 Sous-section 1 : Le droit de rétention réel du eréancier nanti opposable en procédure collective 201 A) L’hypothése de la fictivité du droit de rétention du eréancier nanti noes 201 B) Le pouvoir de blocage effectif de la créance nantie 205 Sous-section 2 : Le droit de rétention du eréancier nanti : un moyen de pression efficace en procédure collective... 210 A) L’efficacité reconnue du droit de rétention au-dela du jugement d’ouverture... 210 ulB) La rétention d’une créance : un moyen de pression favorable pour le créancier nanti 216 CHAPITRE 2: LA COMPENSATION : UNE SOLUTION EFFICACE POUR LE CREANCIER NANTI swsssssensnnseennnnes enn snsnennnnnsees DO Section 1 : Le principe de la compensation 222 Sous-section 1 : Les différents types de compensation... 222 A) La compensation légale 222 B) La compensation judiciaire et conventionnelle . 227 Sous-section 2 : La compensation face au droit des procédures collectives... 230 ‘A) La compensation avant le jugement d’ouverture. 231 B) La compensation aprds le jugement d0UVErtUTE ..eenenennnnneesnnnne 294 Section 2 : La compensation des dettes connexes en procédure collective 237 Sous-seetion 1 : Les conditions de la compensation des dettes connexes en procédure collective 238 A) La compensation des dettes connexes : exception au principe d’arrét des paiements des créances antérieures... 238 B) La compensation des dettes connexes conditionnée a la déclaration de eréance240 Sous-section 2 : La compensation : risques et bénéfices pour le créancier nanti.......243 A) L’opposabilité de la compensation de la créance nantie par le débiteur nanti... 243 B) La compensation de la eréance garantie : une solution pour le eréancier nanti .246 TITRE II : LE CREANCIER NANTI SOUMIS AUX REGLES DE LA PROCEDURE renee setaneneutananenemnanananenunnnaneneenananesene 250 CHAPITRE I: LE CREANCIER NANTI FACE A L’OBLIGATION DE DECLARER SA CREANCE wo. Section 1 : La déclaration de la créance garantie... 252 Sous-section | : Les modalités de déclaration de la créance garantie 252 A) L’avertissement personnel du créaneier nanti 252 B) Le contenu de la déclaration du créancier nanti 258 Sous-seetion 2 : Le risque de forclusion du eréaneier nanti.....nn0nnnneennn 261 A) La forelusion du créancier nanti 262 B) La liste des eréances établie par le débiteur : une déclaration par 1-265 Section 2 : Les incidences de la non admission de la créance garantie 267 Sous-section | : le sort du nantissement de créance face a la forclusion du créancier nanti 267 A) L’inopposabilité de la eréance garantie non déclarée & la procédure..... 267 B) Les conséquences de la forclusion du créancier nant... 269Sous-section 2 : Le nantissement de créance face au rejet de la créance a A) Le nantissement de eréance face au rejet prononeé par le juge-commissaire.... 272 B) L’opportunité de ne pas déclarer sa eréance.. 275 CHAPITRE 2: LES DROITS DES ORGANES DE LA PROCEDURE svnsssensnee 280 Section 1 : Les atteintes aux droits du créancier nanti par les organes de la procédure en sauvegarde ou en redressement.... 281 Sous-section | : Le risque d’extinetion de la créance garantie 281 A) La résiliation unilatérale des contrats.... 1281 B) Le risque de prescription de la créance garantie. 285 Sous-section 2 : Les droits due sauvegarde ou de redressement... \cier nanti face & a mise en ceuvre d'un plan de 0289 A) Le eréancier nanti face a la réussite du plan de sauvegarde ou de redressement289 B) Le eréancier nanti face a I’échee du plan de sauvegarde ou de redressement....292 Section II : Le créancier nanti face aux régles de la liquidation judiciaire.... 295 Sous-section 1 : La procédure de liquidation judiciaire : Le paiement des eréanciers 295 A) La cléture pour extinction du passif exigible.... 296 B) La réouverture de la liquidation judiciaire 298 Sous-section 2 : Les responsabilités de la liquidation pour insuffisance d°actifs.....301 A) La responsabilité du débiteur pour insuffisance d’actif 302 B) La responsabilité du créancier mati ...ssnenmnnnnennnnesnnnsnsnne 304 CONCLUSION GENERALE. 311 BIBLIOGRAPHIE 314 INDEX 327“TERENCE, INTRODUCTION « Par le temps qui court, on en est venu ce point que, quand un homme paye ses dettes, il faut lui en savoir beaucoup de gré! », Cette réplique est issue du Phormion, pigce comique écrite par Térence en 161 avant notre ére. Elle semble pourtant tout aussi vraie aujourd’hui qu’elle pouvait l’étre il y a plus de 2000 ans, En tout temps et en tout lieu, la relation débiteur - créancier a été difficile. Les créanciers ont cherché des moyens de s’assurer du paiement de leur créance ou, a défaut, d’obtenir une satisfaction suffisante pour pallier ce non-paiement, De méme, il a été nécessaire d’établir des régles applicables a l’encontre du débiteur défaillant. Ainsi, le droit romain connaissait déja un droit des garanties de paiement et un droit de la faillite. Ces deux matigres ont da évoluer en fonction de la situation économique et notamment des différentes crises que la France a pu connaitre, Le erédit a un réle prépondérant dans l'économie d’un pays. C’est un levier financier qui permet aux particuliers comme aux entreprises de pouvoir bénéficier d’un capital dont ils ne disposent pas*. Ils peuvent ainsi développer et financer des projets. L’accés, au crédit par les entreprises est stable en 2018, 95% des PME et 85% des TPE ont obtenu le crédit d’investissement souhaité*, En ce qui conceme les particuliers, le taux de croissance annuel des crédits se maintient également a un niveau élevé en France. Le recours important au erédit va de pair avec le développement des moyens de se prémunir contre le non-paiement de leur eréance par les créanciers. La crainte de non- paiement des eréanciers a mené a un développement des sGretés. Cela étant, toutes les sietés n’offrent pas 4 leur bénéficiaire la méme sécurité juridique. Une sdreté personnelle n’est efficace que tant que le garant est solvable, Dans le cas contraire, la .¢ Phormion, 161 av, JC, Acte I, Seéne 2 2F. DERRIDA, « Le crédit et le droit des procédures collectives », mel. R. RODIERE, Paris, Dalloz, 1981, p.67 Banque de France, année 2018, hitps:/iwww-banque-france.fr/statistiques/eredit/credit/acces-des centreprises-au-eredit 14stireté n’a aucune valeur. En ce qui concemne les stiretés réelles, la valeur de celles-ci dépend notamment de la valeur du bien dom en garantie. L’hypothe considérée comme « Ja reine des stiretés* ». Le débiteur n’est pas dessaisi de son bien et peut méme le vendre. Le créancier est quant & jue a longtemps é lui bénéficiaire d’une sGreté portant sur un bien dune valeur importante, aisément identifiable et localisable. En revanche, pour pouvoir réaliser la sireté, le bien doit étre saisi et vendu, ce qui est un processus long et cofiteux. La formalité d’inscription nécessaire pour que le créancier puisse bénéficier d’un rang privilégié engendre également des charges fiscales importantes qui ont nui a lattractivité de cette sireté. 3. L’hypothéque subit aujourd’hui la concurrence d’autres sGiretés dont la constitution et la réalisation sont plus simples’, Le nantissement de eréance est l'une de ces sire Les eréances sont des éléments d’actifs dont l"importance économique est croissante et des objets de sfiretés intéressants, notamment car leur valeur peut étre déterminée de fagon objective et instantanée. La créance est le droit au paiement que détient un a ancier sur son débiteur. La question primordiale concernant le nantissement de créance était done de déterminer si la eréance étant un droit, pouvait-elle étre aussi un bien ? La propriét des ergances a longtemps &é un sujet de controverses. Le Conseil constitutionnel a fait référence dans plusieurs décisions au « droit de propriété » des éanciers®. or auteur’ a toutefois souligné que le Conseil constitutionnel n’ avait jamais visé l'article 178 de la Déclara mn des droits de I’ Homme et du citoyen qui consacre le caractére inviolable du droit de propriété, Cet article dispose : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en étre privé, si ce n'est lorsque la nécessité “A, FOURNIER, « Hypothéque », Rep. Civ, avr. 2007 5 A. CERLES, « La fiducie, nouvelle reine des sliretés », JCP. E 2007.2054 ; M. BOURASSIN, V. BREMOND, Droit des stiretés, LGDI, 6° éd.,n°1105, p. 712 : « Som efficacité risque de patir du renforcement des droits des ceréanciers bénéficiaires de siretés conférant une situation d'exelusivité » © Cons, Const, 2010-607 DC, 20 janvier 2011 - Cons, Const. 99-425 DC, 29 déc. 1999, T. REVET, «La cconséeration de la proprité des eréances par le Conseil Constitutionnel », RTD. Civ., 2010, p.584 & suiv, 7 $, MILLEVILLE, « Propriété des eréances : le point sur I'argumentsupralégal », RDLF 2013, chron. n°22 "DDHC, art. 17. « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en étre privé sice n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, Vexige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité ». C. NIVARD, « Le régime de propriété », RFDA, 2012, p.632 ets. spéc. p. 63publique, légalement constatée, 'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité». Dans les décisions précédemment citées, le Conseil constitutionnel visait les articles 2° et 4"° de la Déclaration des droits de I'Homme et du citoyen, Si ces articles reconnaissent la propriété en tant que « droit naturel » de 1’Homme, ils ne consacrent pas la protection du droit de propriété, contrairement a Varticle 17 de la Déclaration des droits de I' Homme et du citoyen. La Cour européenne des droits de Homme!" a quant & elle jugé que devaient aire protégés en vertu de article 1 du protocole additionnel n°1 de la Convention européenne des droits de "Homme « certains droits et intéréts constituant des actifs'” ». La Cour a done une appréciation plus large de l’assiette du droit de propriété. Cette conception est également conforme a une réalité économique actuelle dans laquelle les a sont des actifs dont la valeur économique est de plus en plus importante, La 1c Cour de C ation s’est quant a elle plusieurs fois fondée sur l'article 1 du protocole additionnel n°1 de Convention européenne des droits de I’Homme pour rendre des décisions concernant des créances'* 4, L’intérét des créanciers pour les garanties portant sur des créances a favorisé le développement de ces sGretés. Le Iégislateur a di adapter les dispositions légales 4 cette nouvelle réalité économique pour permettre d’assurer I’efficacité des garanties portant sur des eréances. Cette évolution s'est faite progressivement par la mise en place de régimes spécifiques 4 certains secteurs dans un premier temps, avant d’élaborer un régime général du nantissement de créance. Un décret-loi du 30 octobre 1935 a créé un. régime particulier au nantissement de marché public, c’est-d-dire portant sur les ° DUG, art. 2, «Le but de toute association politique est a conservation des droits naturels et imprescriptibles de 'Homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la stireté, et la résistance a Voppression. » " DDHC, art 4, « La liberté consiste & pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas @ autrui : ainsi, lexercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mémes droits. Ces bornes ne peuvent étre déterminées que par la Loi. » " CEDH, Sud Parisienne de Construction’ France, n°33704/04, 11 fév. 2010, considérant n°30 ~ CEDH, Prince Hans-Adam I de Liechtenstein / Allemagne, 1°42527/98, 12 juil. 2001, considérant n°83 "9 Civ.2™, 3 mai 2007, n°0S-19439 ; P. BERLIOZ, « L'insaisissabilité d'une chose peut porter atteinte au droit de propriété de son propristaire », LPA, 9 janv. 2008, n°7, p.10 ets, DL, 30 octobre 1935, relatifau financement des marchés de I'Etatet des collectivtés publique. Bull. soc. ét. Jeg, 1937, p361 ets 16ceréances nées a l’occasion des marchés publics conclus avec I’Etat ou les collectivités, territoriales . La eréation de cet outil juridique a été le sultat du constat de I’importance des marchés publics dans le cadre du financement des entreprises La sfireté qui a été un véritable modéle pour I’élaboration du régime du nantissement de eréance de droit commun est la cession de eréance professionnelle & titre de garantie"®. Cette siireté a ét6 eréée par la loi du 2 janvier 1981!” qui a doté les entreprises de crédit d'une garantie portant sur les eréances professionnelles. L'efficacité de cette garantie résidait dans son caractére fiduciaire. Celui-ci fit renaitre le débat doctrinal quant 4 I’introduction de la fiducie en droit frangais!®. Cette garantie est constituée par la remise par le eédant professionnel I’établissement de erédit d’un bordereau mentionnant les créances garanties et les créances cédées, sans que le débiteur des créances cédées ne soit informé de l’existence de la sfireté. L’établissement de erédit peut a tout moment notifier la sdreté auprés du débiteur cédé afin d’étre payé directement”, Si le constituant rembourse sa dette auprés du cessionnaire a l'échéance de la créance garantie, la créance cédée lui sera restituée”®. En revanche, s’il n’exécute pas son obligation, ’établi -ment de erédit pourra rester titulaire de la eréance qui avait été c&dée A titre de garantie, Cette stireté s’est révélée efficace en pratique dans la mesure oi sa constitution ne nécessite aucune mesure de publicité, qu'elle est opposable aux "SO, LAFFITTE, Contrats publics, juil.-aoat 2015, 56 “6H, SYNVET, « Le nantissement de meubles incorporels », Dr. & pat, n°140, sept, 2005, p.64, spée. p. 68, 2*col "Loi n° 81-1, du2 janvier 1981 facilitant le erédit aux entreprises ~ B. SOINNE, « Le nantissement de marché ddepérissement définitif ou rémission », JCP 1981, 1, 13637 '*P, MARINI, « La fiducie bient6t reconnue en droit frangais ? », LPA ler mars 2005, p.3 s.; F. FRESNEL, « La fiducie et les personnes vulnérables », LPA ler mars 2005, p. 8s. ; F. BARRIERE et J-P LE GALL, « Fiducie «ee que pourrait changer la proposition de loi du 8 février 2005 », Option Finance, 7 mars 2005, p. 38. ; F. HOH Une seule fiducie, ga suit !, Gaz. Pal. 3 juin 2005, doctr.p. 2's 8’ M, CABRILLAC p.592n°794 MoU CABRILLAG, P. PETEL, Droit des siretés, Lexis Nexis Manuel, 10 éd, 2 V, Com, 22 nov, 2005, n°03-15.669, Bull. civ. IV, no 230 ; D. 2005, AJ 3081, abs. X. DELPECH ; D. 2007, 753, obs, D. R. MARTIN ; D. 2006. 2855, obs. P. CROCQ ; RTD com, 2006, 169, obs. D. LEGEAIS ; Defiénois 2006. 601, abs. E. SAVAUX — Com. 4 juill. 2006, no 011,688, D. 2006. AJ 2028, obs. X. DELPECH ; RTD ‘com. 2006, 894, obs. D, LEGEAIS ~ Com, 22 mars 2017, no 15-15.361 7tiers 4 la date de I’acte*! et surtout, que la jurisprudence lui a également reconnu une opposabilité 4 la procédure collective” 5. Avant ordonnance du 23 mars 2006” relative aux siretés, le régime applicable au nantissement de eréance était inadapté. Les dispositions issues du Code civil qui régissaient la constitution, le fonctionnement et la réalisation du nantissement de eréance aient celles relatives au gage. L’ancien article 2075 du Code civil prévoyait que le nanti ne pouvait bénéficier du privilége conféré par la garantie que si le contrat revél it 1a forme d’un acte authentique ou sous-seing privé enregistré™, La signification du nantissement de créance matérialisait la remise du titre au créancier car la stireté était congue comme un gage avec dépossession’s. La signification n’était pas seulement considérée comme une condition d’opposabilité mais aussi comme une condition de constitution de la sireté?*, Le mode de réalisation prévu était celui du gage, c*est-dedire la vente aux enchéres, ce qui ne convenait pas a la nature de la créance”’, Tant les formalités de constitution que de réalisation étaient inadaptées au nantissement de créance** et ne permettaient pas d’en faire une siireté efficace et attractive. * Com. 14 juin 2000, Bull. civ, IV, n° 121 ; D. 2000, AJ 372 ; JCP E 2001. 518, note G. VIRASSAMY ; RTD com. 2000. 992, obs. M. CABRILLAC ; RD bane. fin. 2000, n® 186, obs. FJ. CREDOT ET Y. GERARD 2 M, BOURASSIN, V. BREMOND, Droit des stiretés, préc., n°742, p.489 ; Com, 8 mars 2011, n° 10-13.988, Bull. civ. IV, n® 33 ; D. 2011. Jur, 919, note P.-M. LE CORRE ; Chron. 1441, obs. L- ARCELIN LECUYER ; Rev. sociétés 2011, 404, étude B. GRELON ; RTD civ. 2011. 351, obs. B. FAGES ; RTD com. 2011. 420, obs. J- L. VALENS. ® Ord. n° 2006-346, du 23 mars 2006, ratifiée par la L. 2007-212, du 20 fev. 2007 Ccciv. anc, art 2075 : « Le prvilége énoncé en l'article précédent, ne s'éablit sur les meubles incorporels, tls que les créances mobiliéres, que par acte public ou sous seing privé, aussi enregistré, et signifé au débiteur de la eréance donnée en gage. » 2D, LEGEAIS, Droit des suretés et garanties du exédit, L * Com, 28 janv. 1997 : Bull. civ. IV, n°35, p31 ; D. 1997, Somm., P.214, obs. A. HONORAT ; JCP G 1998, I, 103, n°26, obs. P, DELEBECQUE ; D.1998, somm. p.140, obs. M-N. JOBARD-BACHELLIER » P. SIMLER, P. DELEBECQUE, Les stiretés, la publicité fonciére, Précis DALLOZ, Téme éd., n°661, p.611 « Les régles du droit commun déterminaient les droits du créancier nant. Ces régles étaient inadaptées : procéder la vente d'une eréance est pour le moins bizarre » * D. LEGEAIS, Droit des siretés et garantie du erédit, préc.,n°514, p.374 « Ce gage était concu comme un gage avec dépossession. Deux formalités permettaient de réaliser la mise en possession [...]. Cependant la doctrine Gtait unanime pour considérer qu'il s'agissait d'artfices. L‘inadaptation de notre droit a constitué un frein au développement du gage sur eréances. » 186. La refonte du Droit des siiretés par l’ordonnance du 23 mars 2006” a profondément réformé le régime du nantissement de eréance. En effet, au sein du Code civil, seuls deux articles régissaient le nantissement qui était assimilé & un gage avant l’ordonnance. Cette réforme du 23 mars 2006 a permis de définir la conception modeme de la notion qui a évolué au fil des réformes successives. D’un point de vue formel, le nantissement se voit consacrer un chapitre distinct de celui du gage™, Sur le fond, les articles 2333 et 2355 du Code civil précisent la distinction entre ces deux catégories de stiretés qui différent par la nature de l’objet sur lequel elles portent. Aux termes de l'article 2333 in ‘fine du Code civil, «le gage est une convention par laquelle le constituant accorde a un créancier le droit de se faire payer par préférence a ses autres créanciers sur un bien mobilier ou un ensemble de biens mobiliers corporels, présents ou futurs* ». L’alinéa 1* de Varticle 2355 du Code civ dispose que: «Le nantissement est Vaffectation, en garantie d'une obligation, d'un bien meuble incorporel ou d'un ensemble de biens meubles incorporels, présents ou futurs*® ». Ainsi, le gage porte sur ensemble des meubles corporels tandis que le terme « nantissement » est réservé aux meubles incorporels. Cette distinction devenait de plus en plus nécessaire au regard de Vimportance que les biens incorporels ont acquis, et done de lintérét pour les eréanciers de bénéficier de stiretés portant sur ces biens. Elle est d’autant plus importante que le régime du nantissement est Iui-méme complexe du fait des différents types de nantissements®. ® Ord, n°2006-346, du 23 mats 2006, op. cit ; A. RAYNOUARD, « Les gages de ites et les nantissements de créance aprés l'ordonnance du 23 mars 2006, RIC 2006, p.196 ; D. LEGEAIS, « Le nantissement de eréance » Dr. ct patr. Sept. 2007; L. AYNES « Le nantissement de eréance, entre gage et fiducie », Dr. & patr. Sept. 2007 % J, STOUFFLET, «Le nantissement de biens incorporels », JCP 2006, n® spécial, 5; P. CROCQ, «Le nantissement de eréance », RLDC 2006, n°29 suppl. p.13 °C. civ. art 2333 © C. civ. art. 2355 al. 5 3 H, SYNVET, « Le nantissement de compte », Dr & patr. uil-aoiit 2007, n°161 p, 62; D. MARTIN, D, 2006, pA et s. - B. SAINTOURENS, « Le nantissement du fonds de commerce constitue une garantie et non une ‘modalité d'exécution d'un prét », RTD com. 2007. 326 15 juin 2007 - D. LEGEAIS, « Nantissement d'un compte- titres », RTD com. 2009. 426 - Ord. n* 2009-15 du 8 janv. 2009, M. DUBERTRET et D. MANGENET, D. 2009. Chron. 448 ; Rev. sociétés 2009. 37, obs. J.-J. DAIGRE et P. PAILLER ; T. BONNEAU, Commentaire de Tordonnance du 8 janvier 2009 relative aux instruments financiers, JCP E 2009. 1105 197. L’ordonnance du 23 mars 2006 relative aux siretés a permis de contérer au nantissement de eréance un régime plus adapté™. Le Iégislateur s’est cantonné a Vélaboration d’un régime propre au nantissement de eréance sans développer celui des autres meubles incorporels, outre les dispositions spéciales. En effet, I’alinéa 5 de Particle 2355 du Code civil dispose que le nantissement « qui porte sur d'autres meubles incorporels est soumis, & défaut de dispositions spéciales, aux régles prévues pour le gage de meubles corporels* ». 8. En ce qui conceme le nantissement de eréance, les formalités de constitution sont réduites, Seul un écrit est exigé comme condition de validité dans lequel est uniquement A titre de validité du nécessaire la mention des créances garanties et nantis nantissement, La forme authentique ou sous-seing privé enregistré n’est plus imposée pour la validité de I'acte de nantissement contrairement aux dispositions de l'ancien article 2075 du Code civil’, La connaissance de la streté par le débiteur nanti n’est pas requise. En revanche, tant que celui-ci n'est pas tenu informé de son existence par le créancier nanti, le nantissement de eréance ne lui est pas opposable. 9. La réforme a pris en compte les particularités inhérentes aux sdretés portant sur des biens incorporels et a supprimé obligation de signification imposée par l'ancien article 2071 du Code civil. L’article 2361 du Code civil dispose désormais que « le nantissement d'une créance, présente ou future, prend effet entre les parties et devient opposable aux tiers dla date de Vacte”” ». L’obligation de signification du nantissement de créance auprés du débiteur a &€ supprimée en tant que condition de validité de la stireté, le créancier peut toutefois notifier l'existence du nantissement de eréance auprés du débiteur. Cette prérogative offerte mais non imposée au créancier est nécessaire pour que Je nantissement de créance soit opposable au débiteur. L’article 2363 du Code civil dispose qu’« aprés notification, seul le créancier nanti recoit valablement paiement de 4 M, JULIENNE, Le nantissement de eréance, th, Economica, 2012, préf. L. AYNES civ. art, 2355 al, $ % Caciv, ane. art. 2075 « Le privilége énoncé en Varticle précédent, ne sétablit sur les meubles incorporels, tels que les créances mobiliéres, que par acte public ou sous seing privé, aussi enregistré, et signifié au débiteur de la ceréance donnée en gage. » * Civ. art, 2361 20Ja créance donnée en nantissement tant en capital qu'en intéréts** ». Le créancier nanti peut done recevoir les sommes versées en paiement de la eréance nantie directement entre ses mains a compter de la notification. II dispose A ce titre dun droit au paiement direct™ qui est plus approprié a la nature de la ci 10. Le nantissement de eréance n'est pas une streté fondée sur le transfert de propriété du bien, Le eréancier nanti ne peut pas devenir titulaire de la créance nantie avant Véchéance de la eréance garantie et tant que le constituant n'est pas défaillant. L’ordonnance du 23 mars 2006 relative aux sfiretés® a adapté le mode de réalisation du nantissement & la particularité de objet sur lequel il porte, la créance nantie. Plusieurs modes de réalisation sont désormais offerts au créancier en fonction de la chronologie des échéances de la créance nantie et de la créance garantie“. Lorsque la créance garantie est exigible aprés la créance nantie, le eréancier qui a notifié la sGreté auprés ituant du débiteur nanti regoit les sommes versées en paiement entre ses mains. Le cons n’étant pas défaillant, le créancier nanti doit conserver les sommes regues a titre de garantie sur un compte ouvert dans un établissement habilité a les recevoir, & charge pour lui de les restituer si obligation garantie est exécutée. Il n’est pas imposé que ce compte soit un compte bloqué, ce qui n’est pas sans incidence si le créancier nanti devient insolvable*. Si le constituant n’exécute pas son obligation a l’échéance de la créance garantie, le créancier nanti pourra affecter les fonds au remboursement de la or éance garantie aprés avoir mis en demeure le constituant de procéder & I’exécution. Si le eréancier nanti n’a pas notifié sa streté auprés du débiteur nanti, ce dernier paie sa dette auprés du constituant. Ce paiement éteint la eréance nantie, objet du nantissement, Toutefois, il faut considérer que la stireté se reporte sur les sommes versées par le iv. art. 2363 M, JULIENNE, « Le nantissement de créance : un outil efficace ? » In L’attractivité des stiretés 10 ans apris la nme, dit. N, BORGA et 0, GOUT. LGDI, coll. « Grands colloques », 2006, p.133 ; M-E. MATHIEU, « Le nantissement de eréance notifié : une sireté devenue absolue ? Réflexions pratiques autour de la décision de la Chambre commerciale du 26 mai 2010 », RD. Bane. fin., sept. 2010 - n° 5 “© Ord, n° 2006-346, du 23 mars 2006, ratiiée par la L. 2007-212, du 20 fev. 2007 *\ M, BOURASSIN, V. BREMOND, Droit des siretés, préc., n°991, p.650 ; M. CABRILLAC, C. MOULY, 8. CABRILLAG, P. PETEL, Droit des stiretés, préc., 0°802, p.596 © Avant-projet de réforme du droit des stiretés, M. GRIMALDI, dir, Association Henri Capitant, 2017 2débiteur nanti et reconnaitre un droit au créancier nanti sur ces sommes en cas de défaillance du constituant®, Si la eréance garantie est exigible avant la eréance nantie et en cas de défaillance du débiteur, plusieurs possibilités sont offertes au eréancier. Il peut attendre I’échéance de la eréance nantie puis en percevoir le paiement. Le nanti n'est toutefois pas tenu dattendre I’échéance de la eréance nantie et peut demander la réalisation d’un pacte commissoire“ ou I’attribution judiciaire de la créance qui a été donnée en garantie. Tl devient done titulaire de la créance nantie. Si le montant de la créance nantie est supérieur & celui de la créance garantie, le eréancier est tenu de restituer la différence au constituant. 11. Si Vordonnance du 23 mars 2006 relative aux sGretés*® a permis I’élaboration d’un régime adapté au nantissement de créance, la pratique a mis en lumiére des lacunes concemant les dispositions relatives & cette stireté auxquelles il est nécessaire de remédier. De nombreuses modifications ont donc été proposées dans le cadre de l’avant- projet de réforme du droit de ‘ireté établi par la commission présidée par Monsieur Michel Grimaldi. Le gouvernement a présenté un projet de loi le 18 juin 2018 relatif 4 la croissance et la transformation des entreprises se fondant sur cet avant-projet en ce qui concerne les dispositions relatives au droit des siretés‘”. En ce qui conceme le nantissement de eréance, les modifications proposées ont surtout pour but de rendre les dispositions plus précises concernant les droits et obligations du constituant, du © Lrabsence d’obligation du constituant de déposer les sommes regues en paiement de la eréance nantie avant la notification sur un compte bloqué erée également une insécurité pour les droits du eréancier nanti, Si le débiteur nanti ne dispose pas des fonds nécessaires pour payer sa dette envers le créancier nanti, on comprend mal qu'il puisse verser les sommes nécessaires au paiement de la eréance nantie, & part si celles-ci ont ét€ placées sur un compte bloqué, Sur cette question V. infra n°106 ets. “'§, HEBERT, « Le pacte commissoire aprés lordonnance du 23 mars 2006 », D. 2007. 2052 , 6 sept.2007 “© Ord, n® 2006-346, du 23 mars 2006, ratifige parla L. 2007-212, du 20 fév. 2007 “Aavant-projet de réforme du droit des stretés, M, GRIMALDI, dit, Association Henri Capitant, 2017 ; M. GRIMALDI, D. MAZEAUD, P. DUPICHOT, « Présentation d'un avant-projet de réforme du droit des siretés », D. 2017. 1717 * R, DAMMANN et M. GUERMONPREZ, « Pour une réforme du droit des siretés en adéquation avec le droit des entreprises en difficulté » D. 2018. 1160 ; Y. BLANDIN, « De la réforme des stiretés aprés adoption par Assemblée nationale du projet de loi PACTE », D. act, 24 octobre 2018 2212. 13. # Loin DU PONTAVICE, « Les con: comptes, Versailles, 1985, E, ALFANDARI, « Les entreprises relevant dela | des difficultés », RJ com. 1986. 1986, n° spéc., p33 créancier nanti, du débiteur mais également des tiers. L’avant-projet de réforme du droit des sfiretés propose également des modifications concemant les questions importantes cn pratique relatives 4 l'opposabilité des exceptions du débiteur nanti ou encore la question de la preuve de la date de I’acte qui n’avaient pas s lors de la réforme de 2006. En ce qui conceme les tiers, l’avant-projet de réforme propose de ‘mettre en place une disposition permettant de régler les conflits entre eréanciers dans le cas de nantissements successifs. La commission a pris en considération les difficultés pratiques rencontrées par les acteurs économiques et a proposé des modifications pertinentes permettant de rendre les dispositions relatives au nani plus complete afin que la sdreté soit plus efficace. Les conditions de constitution, de fonctionnement et de réalisation ont fait du nantis: ement une sdreté appréciée des acteurs économiques, dont usage s’est développé au cours des demniéres années", mais dont le régime est encore perfectible. La simplicité de constitution et de réalisation d’une streté n’ est pas suffisante pour étre une garantie intéressante pour les créanciers. Pour qu’une sireté soit efficace, il est nécessaire que le créancier bénéficiaire puisse opposer ses droits a la procédure collective dont les réformes successives ont considérablement restreint les droits des eréanciers, y compris des eréanciers privilégiés. Initialement créé pour assurer les paicments des créanciers de la maniére la plus égalitaire possible et sanctionner les débiteurs défaillants, le droit de la faillite est devenu progressivement un droit des entreprises en difficulté. Sous cette dénomination transparait un nouvel objectif de la matiére vi A-vis du débiteur. $’il est toujours nécessaire d’ organiser le paiement des créanciers, le débiteur doit quant & lui étre accompagné dans les difficultés qu'il traverse et non plus uniquement puni pour son incapacité a honorer ses engagements, Les lois du 1* mars 1984 et du 25 janvier 1985 marquent les premiers grands changements dans le traitement du débiteur défaillant, La premiére avait pour objet la ® M, BOURASSIN, V. BREMOND, Droit des siretés, préc., n°991, p.650 84-148 du | mars 1984 relative & la prévention et au réglement amiable des difficultés des entreprises. E. es pratiques de la loi du I** mars 1984 », Cie Reg. Des Commissaires aux i du 1° mars 1984 sur la prévention © Loi n® 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et a la liquidation judiciaires des entreprises ; A 23«prévention et le réglement amiable des difficultés des entreprises », tandis que la seconde a créé la procédure de redressement judiciaire qui a pour objectif de « permettre la sauvegarde de Uentreprise, le maintien de activité et de V’emploi et Vapurement du passif >. ILs’est avéré que la loi de 1985 ne protégeait pas suffisamment les débiteurs pour les inciter a se placer sous la protection des juges. Ils craignaient qu’en faisant connaitre leur état de cessation de paiement, ils ne soient sanctionnés sévérement, Quant aux eréanciers, leur pouvoir était considérablement affaibli‘', qu'il s’agisse de eréanciers chirographaires ou privilégiés, puisque la masse des créanciers qui avait la personnalité morale avait é& supprimée™ et qu’il était interdit de reprendre les poursuites a ’encontre du débiteur, méme en cas de liquidation judiciaire. 14, La loi du 10 juin 194°, relative a la prévention et au traitement des difficultés des entreprises, avait pour double objectif d'inciter 4 l’ouverture des procédures collectives plus en amont des difficultés de l’entreprise tout en améliorant le sort des créanciers™, Pour ce faire, le Iégislateur a a la fois assoupli les régles relatives au traitement amiable des difficultés et celles applicables & leur traitement judiciaire, Cette loi n’a pas permis de résoudre les lacunes des lois de 1984 et 1985 du fait du manque de cohérence des nouvelles dispositions mises en places 15. La loi du 26 juillet 2005°* de sauvegarde des entreprises avait pour but d’inciter les débiteurs 4 faire connaitre au plus tét au tribunal les difficultés économiques de Ventreprise et ce, avant méme de se trouver en état de cessation des paiement, c’est-a- BRUNET ct M. GERMAIN, « L'information des actionnaires et du comités d’entreprise dans les sociét anonymes depuis les lois du 28 oct, 1982, du I** mars 1984 et du 25 janv, 1985 », Rev, Sociétés 1985, p.1, n° spéc., 47 5, PEROCHON, Entreprises en difficult, LGDJ, 10* é4,,n°13, p.24 © Com, 17 janv. 1956, D. 1956, 265, n. RHOUIN ; JCP 1956. Il. 9601, n. RGRANGER 5 Loi n°94-475 du 10 juin 1994 relative & la prévention et au traitement des dfficultés des entreprises » Loi n® 2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises 55 R, PEROCHON, Droit des entreprises en difficulté, préc.,n°17, p.26 % Loi n°2005-845 du 26 juil. 2005 (1.2005) J. DEHARVENG, « Philosophie de Ia réforme des procédures collectives et présentation du nouveau cadre juridique », Bull, actual. Lamy comm, N°182, nov. 2005, p.1 ; Jel VALLENS, «La réforme du droit frangais des entreprises en difficulté », RLDA, n°85, sept. 2005 ; PM. LE CORRE, « Premiers regards sur la loi de sauvegarde des entreprises », D. 2005, 2299 24dire avant que le débiteur ne puisse plus faire face au passif exigible avec son actif disponible, L’absence de sation de paiement a des conséquences importantes sur le régime de la procédure de sauvegarde qui la rend trés différente de celle du redressement ou de la liquidation judiciaire, Le débiteur reste maitre de la gestion de V'entreprise et de toutes les décisions qui y afférent. Les droits des eréanciers sont quant & eux a nouveau réduits. En effet, article 1.622-21 du Code de commerce prévoit que le principe d’interruption ou d’interdiction de toute action en justice soit applicable méme dans le cadre de ouverture d'une procédure de sauvegarde*”, La procédure de conciliation est également mise en place par la loi du 26 juillet 2005. Alors méme que le débiteur se trouve en état de cessation de paiement depuis moins de 45 jours, le législateur lui offre la possibilité de tenter de passer un accord de conciliation avec certains de ses fin d’obtenir des délais ou remises. Les inci eréanciers de la conciliation bénéficieront d’un privilege si une procédure judiciaire est ouverte a I'encontre du débiteur par la suite. Cette procédure affecte considérablement les droits des créanciers antérieurs, et surtout privilégiés, puisque de nouveaux a fanciers bénéficient d'un rang plus élevé dans I'ordre des créanciets alors que les créanciers antérieurs privilégiés s*étaient constitués une sireté afin d’obtenir un rang favorable et étre payés en priorité, 16. L’ordonnance du 18 décembre 2008% portant réforme du droit des entreprises en difficulté a modifié certaines dispositions de la précédente réforme tout en conservant 5 C. com, art, L.622-21 : «1, - Le jugement d'ouverture interrompt ou interdit route action en justice de la part de tous les eréanciers dont la eréance n'est pas mentionnée au I de Vartiele L, 622-17 et tendant 1°A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent 2° la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent HL, Iarréte ou interdit également toute voie d'exécution de la part de ces eréanciers tant sur les meubles que sur les immeubles. IIL - Les délais imparts 4 peine de déchéance ou de résolution des droits sont en conséquence suspendus. » % L. AYNES, P. CROCQ, Droit des siretés, LGDJ, 120 6d. n°411 p.239 « Micux vaut éire wn eréancier ««postercur », méme chirographaire, qu'un créancier antricurttulaire d'une siretéréelle » 5 Ordonnance n° 2008-1345 du 18 dée. 2008 portant réforme du droit des entreprises en difficulté ; P. PETEL, «Le nouveau droit des entreprises en difficuté : acte II - Commentaire de l'ordonnance du 18 décemibre 2008 » JCP E 2009, n°3, 1049 » ; C, SAINT-ALARY-HOUIN, Le droit des entreprises en difficult, une réforme arriv maturité » Dr. et patr. Mars 2009, p.32 ; J.-B. DRUMMEN, Enttetien, RLDA, juin 2008, p. 19 ; comp., plutot favorable : G. TEBOUL, La nouvelle réforme du droit des entreprises en difficulté: le projet d’ordonnance, Gaz. Pal, 6-8 avr. 2008, p.2, spéc. p.3 25Vobjectif d’efficacité économique. Elle a permis de rendre plus attractive la procédure de sauvegarde en assouplissant ses critéres d'accés afin qu'un plus grand nombre dlentreprises en difficulté puissent y recourir avant que leur situation économique ne se soit trop dégradée. La conclusion d'accords de conciliation entre l'entreprise et ses créanciers est facilitée et confére un privilége. Par conséquent, la position des eréanciers privilégiés antéricurs est affaiblie. A la suite de cette ordonnance, plusieurs réformes se sont succédées en 2010, 2012 et 2014. L’ordonnance du 12 mars 2014% portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives apporte des modifications significatives au droit des entreprises en difficulté®., La prise en charge anticipée des difficultés est encouragée et facilitée notamment par I’affinement des régles concernant I droit frangais vers des solutions préventives plutét que curatives est conforme a procédures amiables comme la conciliation ou le mandat ad hoc. Cette évolution du Vévolution des autres droits européens et a lobjectif défini par le réglement du Conseil de I’Union européenne du 29 mai 2000 d’uniformisation des procédures insolvabilité en Europe. Les réformes successives ayant introduit de nombreuses dispositions en faveur du débiteur en procédure collective n'ont pas été sans conséquence sur les droits des créanciers, et notamment ceux des eréanciers antérieurs munis de sdretés. Des mesures telles que linterdiction des poursuites du © Loi n® 2010-1249 du 22 octobre 2010 de régulation bancaire et financiére, A. PIETRANCOSTA ct S. VERMEILLE, Le droit des procédures collectives 4 I"épreuve de analyse économique du droit, perspectives avenir ? RIDE, mars 2010, p.5 n°94 ; B. GRELON, Rev. Sociétés 2010.244, n°34 ets, © Loi n® 2012-347 du 12 mars 2012 relative a 'aceés & 'emploi titulaire et A Tamélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, & la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives a la fonction publique ; D. DEMEYERE, « La loi du 12 mars 2012 relative aux mesures conservatoires dans la sauvegarde et leredressement judiciaire », RLDA juil-aoat 2012, n°73, p.26 ; P, ROUSSEL- « La loi Petroplus : quelques réflexions...avec un peu de recul », Rev. Proc. Coll, 2012, étude 16 © Ord. n° 2014-326 du 12 mars 2014 portant réforme de Ia prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives. P-M. LE CORRE, « En avant pour une nouvelle réforme de fa loi de sauvegarde », LPA, 9 déc. 2013, p.3 ; P. ROUSSEL-GALLE, « Le réforme du droit des entreprises en difficulté par l'ordonnance du 12 mars 2014, des outils plus performants pour une meilleure sécurité juridique et des équilibres renouvelés », Rev, Sociétés, 2014, p.351, F-X. LUCAS et M, SENECHAL, « La procédure @’enquéte pour le rétablissement professionnel », D. 2013, Chron, 1852 © C. SAINT-ALARY-HOUIN, Droit des entreprises en difficulté, LGDJ, Précis Domat, Léme éd.,n°112, p.70 Réglement n°1346/2000 du 29 mai 2000 relatif aux procédures d’insolvabilité. Le traitement des difficultés des entreprises dans le marché européen, Colloque Bruxelles, 10 nov. 2005, LPA 19 oct. 2006, n° 209 26débiteur prévue par l'article L.622-21 du Code de commerce ou I'interdiction de toute procédure d'exécution 4 compter du jugement douverture conformément a larticle L.622-17 du Code de commerce sont autant d'atteintes graves aux droits des accordant notamment un privilege de tout premier rang aux salariés, le législateur a relégué les créanciers antéricurs privilégiés & un rang inféricur. Plusicurs mesures ont 66 mises en place afin d’assurer le paiement de leurs eréances. Le superprivilége des salariés garantit le paiement des 60 demiers jours de salaires, les congés payés et les préavis. Le privilége des salaires est deuxiéme dans l'ordre des priviléges généraux, portant sur l'ensemble des biens du patrimoine du débiteur. L'AGS est charg davancer ces sommes afin que les salariés puissent étre payés dans de meilleurs délais par rapport aux autres créanciers. L’AGS bénéficie ensuite d'une subrogation personnelle pour certaines eréances salariales au détriment des créanciers antérieurs privilégiés. Quelle que soit la force du droit de préférence octroyé par une siireté, le ceréancier sera & un rang inférieur aux salariés, au fisc ainsi qu‘aux eréanciers postérieurs ou ayant participé & une conciliation cas de procédure collective, ilarrive que le droit de préftrenee des créanciers antéricurs ne leur permettent pas d'obtenir le paiement de leur créance. Les droits de préférence des créanciers privilégiés ne pouvant plus assurer aux eréanciers le paiement de leur eréance ou a défaut d'obtenir satisfaction en cas de non-paiement, les créanciers pourraient privilégier des mécanismes de garantic leur conférant non pas une 66 préférence mais une exclusivité sur le bien®*. Cette évolution pourrait s‘apparenter & un retour en arrigre® dans histoire des stretés. En effet, les mécanismes permettant de © M, BOURASSIN, V. BREMOND, Droit des siretés, préc., n°1393 p.951: «La régle interdiction des oursuites individuelles, qu'énoncent le droit des entreprises en difficulté et le droit du surendettement, empéche les créanciers impayés de réaliser librement leurs stiretés réelles en vendant les biens grevés du débiteur, afin d'etre payés par préférence sur le prix de vente. Lieficacité des siretés réelles s'en trouve d'autant plus affectée que le champ de cette régle est extrémement vaste. » © L, BOUGEROL-PRUD'HOMME, Exclusivité et garanties de paiement, th. LGDI, 2010, pref. P. n°7 «La seule chose certaine d ce stade est que le recours croissant aux droits exclusifs participe d'un mouvement iréductible et contemporain consistant & trouver des garanties efficaces parle biais de techniques » © B. OPPETIT, « Les tendances régressives de I'évolution du droit contemporain », Mélanges D. HOLLEAUX, Litec, 1990, p. 317 ets. spée. p.321 2719. 20. garantir une exclusivité au créancier, traditionnellement fondés sur le transfert de la propriété ou la rétention du bien, sont historiquement les premidres techniques de garanties connues. Les réformes de droit des sdretés ont toutefois su affiner les régles relatives S garanties conférant des droits exclusifs afin d'encadrer leur fonctionnement et de tenter de limiter les effets négatifs relatifs a ces techniques. Eu égard 4 augmentation du nombre de procédures collectives ouvertes & l’encontre entreprises frangaises durant les derniéres décennies®, l'efficacité d'une sareté se mesure désormais en fonction des droits qu’elle confére au eréancier et qui peuvent étre opposés aux organes de la procédure. A priori, le nantissement de eréance, efficace entre les parties et opposable aux tiers & la date de lacte ne semble pas étre une sfireté qui confére une exclusivité au créancier nanti, Dés lors, le nant une sireté efficace en cas d’ouverture d'une procédure collective 4 lencontre du constituant ? Dans quelle mesure le eréancier nanti, soumis aux interdictions et obligations de la procédure collective, peut-il se constituer un moyen de pression & Vencontre des organes de la procédure en dépit de son rang défavorable dans l’ordre des a anciers ? Il est & noter qu’aprés notification, seul le eréancier nanti regoit valablement paiement de la créance donnée en garantie. Il se trouve alors dans une situation Wexclusivité. Or, le bénéficiaire d’un droit au paiement direct peut-il le conserver en procédure collective et malgré la paralysie imposée aux créanciers 4 compter du jugement d’ouverture, la notification est-elle possible ? Autant de questions auxquelles il faut tenter d’apporter des réponses afin de déterminer I’efficacité du nantissement de créance dans le cas ou une procédure collective serait ouverte 4 l’encontre du constituant. Si le nantissement de créance a fait l'objet d’une étude par Monsieur Maxime Julienne dans le cadre de sa thése intitulée : « Le nantissement de créance® », la question du régime de cette sireté dans les procédures collectives n'a pas encore été étudiée de fagon approfondie. % Fin octobre 2018, 18.346 affaires ouvertes auprés de I'AGS depuis le I*janvier 2018. hups://www.ags-garantie- © M. JU fonctionnement mais aussi de I’assictte du nantissement de créance. Dans le cadre de son étude, Monsicur Maxime TULIENNE s’attache notamment a expliciter Ie fonctionnement particulier de cette streté et souligner les failles ddu régime et les conflits qui pourraient exister entre les différents acteurs de cette garantie salaires.org/Statistiques. html ILIENNE, Le nanmtissement de créance, th. préc., L’auteur propose une analyse compléte de la nature, du 2821. lest essaire de s'interroger sur les conséquences de l’ouverture dune procédure collective sur le fonctionnement du nantissement de créance et sur les droits des cance n'est différents protagonistes. Depuis que la signification du nantissement de eré plus une condition de constitution de la sireté, les prérogatives et les droits du eréancier nanti peuvent évoluer aprés la constitution de la sdreté, Tant que le eréancier n’a pas procédé a la notification de la stireté auprés du débiteur nanti, ce demier est tenu de payer sa dette auprés du constituant. Le prisme de la procédure collective dévoile de nouvelles problématiques concernant le nantissement de créance. L’étude du fonctionnement du nantissement de eréance en procédure collective permet de souligner 'importance du droit au paiement direct du a cité de la sGreté, Le nanti est en concours avei \cier nanti pour déterminer l’effic: les autres créanciers jusqu’a la notification qui lui confére un droit au paiement direct de la eréance nantie et est de ce fait la clé de voute de efficacité du nantissement de créance en cas de procédure collective (Premiere partie), méme si le nanti reste soumis aux régles du droit des entreprises en difficulté (Seconde partie). 29PARTIE 1: LA NOTIFICATION : CLE DE VOUTE DE L’EFFICACITE DU NANTISSEMENT DE CREANCE EN PROCEDURE COLLECTIVE 22. Le régime applicable au nantissement de eréance allie souplesse et efficacité. La sireté peut rester inconnue aux yeux du débiteur et des autres créanciers - ce qui peut étre un risque pour les tiers — mais représente également un avantage indéniable dans les relations commerciales. Le nantissement de créance n’est pas efficace lorsqu’il n’est pas notifié mais il révéle une efficacité remarquable suite & la notification, Cette streté permet done au créancier de concilier la discrétion d’une garantie occulte tout en conservant la possibilité de mettre en ceuvre un droit direct au paiement auprés du débiteur nanti si la situation économique du constituant se détériore. Si la situation économique de ce demier devient si précaire qu’une procédure collective est ouverte & son encontre, la situation est plus grave pour le eréancier dans la mesure oi le nantissement de créance est inefficace s’il n’est pas notifié (Titre I), il est done indispensable qu'il puisse notifier sa streté pour qu'elle retrouve son efficacité pour protéger les droits du créancier nanti (Titre 11), 30TITRE 1: L’INI OTIFIE E FICACITE DU NANTISSEMENT DE CREANCE NON PROCEDURE COLLECTIVE 23. Lorsque le constituant n'est pas en procédure collective, les régles souples de constitution du nantissement de créance tant en ce qui concerne le formalisme de I’a te que les modalités de publicité sont un attrait pour les partenaires commerciaux, Si le nantissement de créance est une sfireté réelle, cette opération porte sur trois personnes”, I est intéressant pour le constituant de pouvoir éviter que son débiteur ait connaissance de la sdreté qui porte sur son obligation envers son eréancier. Pour conférer plus d’attractivité a cette stireté, le législateur en a fait une siireté qui fonctionne en deux temps. Le nantissement prend effet entre les parties. D'un formalisme extrémement éger, Pacte n’a ni a étre enregistré, ni faire l'objet d’une publicité. Il est pourtant dés sa constituant pleinement opposable aux tiers. ‘Néanmoins, si le constituant fait l'objet d'une procédure collective, le régime libre du nantissement de créance va dévoiler des faiblesses lorsqu’il n’est pas notific. Soumis 4 la discipline collective imposée 4 tous les eréanciers du constituant, le nanti ne peut plus réaliser sa sireté méme si la eréance garantie est échue. Le droit des entreprises en difficulté met en place un classement des créanciers afin d’organiser leur paiement. Au sein de ce classement, le droit de préférence que confére le nantissement de créance & son bénéficiaire est faible (Chapitre 1). De plus, le fonctionnement du nantissement de © nee non notifié ne lui permet pas d’étre efficace lorsque le constituant est soumis a une procédure collective (Chapitre 2), ®L, AYNES, P. CROCQ, Droit des siretés, LGDI, 12e €d,, n°525, p. 331 31CHAPITRE 1 : LA FAIBLESSE DU DROIT DE PREFERENCE DU CREANCIER NANI 24, Le titulaire d’une créance certaine, liquide et exigible est en droit d’exiger l'exécution e LN-7 de obligation de son débiteur”!, En cas de défaillance de ce demier, arti du Code de Procédure Civile d’Exécution dispose que : « Le créancier a le choix des mesures d’exécution propres & assurer I'exécution ou la conservation de sa créance. » Dés lors, le créancier peut choisir de procéder au recouvrement amiable” de sa créance cn s‘adressant directement a son débiteur, ou par lintermédiaire d’un tiers qui peut étre une société de recouvrement. Le eréancier peut également choisir option de Vexécution foreée en ayant recours & un huissier de justice (ou en faisant une demande devant le Juge de I’exécution™ en matiére immobiliére). Cette procédure permet Wobtenir la saisie de biens du débiteur, et dans le cas d'une saisie-vente, de faire procéder & leur vente Si d'autres créanciers sont titulaires d'une créance certaine, liquide et exigible sur le méme débiteur, ils pourront revendiquer leur droit au paiement au cours de la méme instance que le premier eréancier saisissant”*, Le eréancier saisissant ne se voit conférer aucune priorité de paiement sur le produit de la vente. Les créanciers opposants bénéficieront méme des poursuites qu'il engagera 4 l'encontre du débiteur’®, Cette ” §. PIEDELIEVRE, Procédures civiles d’exécution, Economica, 2016, n°97, p103. « L ‘article L.111-2 du Code des procédures civiles d'exécution prescrit que le eréancier « soit muni d'un titre exécutoire conslatant une créance liquide et exigible, Méme si Varticle 1111-2 ne Uindique pas, il est en outre nécessaire qu'elle soit certain » 7 R. PERROT, P, THERY, Procédure civiles d’exécution, DALLOZ, n°S4, p.55 ” Sur la compétence du Juge de I'exécution, Voir S. PIEDELIEVRE, Procédures civiles des p78 ccution, prée., 0°74, 4S, GUINCHARD, T. MOUSSA, Droit et pratique des voies d'exécution, DALLOZ, Teme éd., n°714-T1, p.714. «Le eréancier qui a recours d la saisie-vente doit subir la lai du concours avec les eréanciers opposants qui se sont manifestés apres lui. Larticle L. 221-1 C. pr. exée. permet en effet @ tout autre eréancier de se joindre aux ‘opérations de saisie par voie d'opposition sur le prix et selon des formes définies par les articles R. 221-41 a R. 221-48 C. pr. exée, Ce droit dintervention leur est ouvert jusqu'a la verification de la nature et de la consistance des biens qui doit précéder la vente (C. pr. exéc., art. L. 221-5 et R. 221-41, al. 2) » *C. pr. exée., art, R. 221-42, al. 3 « Le eréancier premier saisissant poursuit seul la vente. » 32situation d’ égalité entre les créanciers est conforme au principe posé par l'article 2285, du Code eivil’’ qui dispose que : «Les biens du débiteur sont le gage commun des créanciers, et le prix sen distribue entre eux par contribution ». En application de cette régle, il n'y a done pas de classement entre les eréanciers qui sont payés au prorata de leurs créances. L’article 2285 du Code civil prévoit toutefois que les créanciers bénéficiant de « causes légitimes de préférence » puissent se voir appliquer un régime dérogatoire du fait de leur privilege. 25. Ain il est intéressant pour un eréancier de pouvoir constituer une sireté afin de bénéficier d'une priorité de paiement, et de ne pas tre soumis au traitement égalitaire imposé & tous les eréanciers chirographaires. Cela étant, si le créancier privilégié est désintéressé de fagon prioritaire par rapport aux créanciers chirographaires, il sera soumis & la concurrence des autres eréanciers privilégiés. Un classement est établi entre eux pour déterminer leur ordre de paiement en fonction de la nature de leur privilege. Le rang que confére le législateur au eréancier en fonction de sa sireté est un élément important pour déterminer I'efficacité d'une garantie, Le classement du créancier nanti dans ordre des paiements des créanciers est défavorable (Section 1). A contrario, le législateur confére des avantages considérables & d’autres eréanciers : les salarigs et les créanciers ayant consentis des faveurs au débiteur (Section 2) >. civ. art. 2285 33Section 1: Nantissement de créance non notifié : le nanti assujetti au classement des eréanciers 26. Les sdiretés traditionnelles sont celles qui permettent & leur titulaire de bénéficier d°un droit de préférence”’, Cet attribut est essentiel aux siiretés réelles dont la fonction est de réduire le risque de non-paiement du eréancier «par loctroi au eréancier d'une garantie supplémentaire, procurant a son bénéficiaire un avantage par rapport aux autres créanciers’ Cette préférence détermine la place du titulaire au sein du classement des a Certaines garanties bénéficient d'un droit de préférence favorable, alors que inci autres ont un droit de préférence faible, Le eréancier nanti est titulaire d'une sireté dont le droit de préférence est faible (Sous-section 1). De sureroit, les modes de paiements alternatifs qui permettraient au créancier nanti d’échapper au classement sont paralysés en eas de procédure collective (Sous-section 2). Sous-section 1 ; Le droit de préférence faible du créancier nanti 27. Le droit de préférence conféré a chaque stireté permet d’organiser Vordre de paiement des créanciers en fonction de leur privilege. L’article 2325 du Code civil” prévoit que « la préférence se régle par la qualité du privilege ». I1s’agit donc la catégorie & laquelle 2326 du appartient la stre qui détermine le classement de chaque eréancier, L’artiel Code civil impose une égalité de traitement entre les eréanciers qui ont un privilége de ” J, FLOUR, Cour de Droit civil, Licence 3me année, Les cours du droit, 1962-1963, p.19, « Le propre d'une telle sreté est le droit de préférence : élément sans lequel elle ne saurait pas exister » " P. SIMLER, P. DELEBECQUE, Les siretés, la publicité fonciére, Précis DALLOZ, Téme éd. pS ® C. civ, art 2325 : « Entre les eréanciers privilégiés, la préference se régle par les diférentes qualités des privileges.» 3428. 29. méme rang, ils seront donc payés « par concurrence™ », Pourtant, ces deux articles ne permettent pas de régler les nombreux conflits qui peuvent apparaitre entre créanciers privilégiés. Messieurs Laurent Aynés et Pierre Crocq ont parfaitement souligné a ce sujet: «Les directives de ces textes sont & la fois insuffisantes et trop générales. Insuffisantes parce qu'elles ne prévoient pas le conflit entre les priviléges généraux et priviléges spéciaux. Trop générales, parce que dans le conflit entre privileges spéciaux, elles ne s'attachent qu’é la qualité de la créance, alors que d'autres éléments, telles la date de la créance ou l'existence d'une possession, ne peuvent pas ne pas étre pris en considération"! ». Il est important de préciser que l'une des difficultés inhérentes a l'étude de Vorganisation des paiements des créanciers provient de la multiplication des priviléges créés par le législateur®?, De ce fait, il semble plus pertinent, eu égard a la problématique envisagée, de concentrer I’étude sur le classement des priviléges et siretés portant sur des biens meubles du débiteur, et sur les conséquences de ces préférences sur le oréancier nanti. Ce dernier se trouve relégué un rang bas, tant lorsque que le débiteur est in bonis (A) que lorsqu’il est placé en procédure collective (B). A) Faiblesse du droit de préférence du eréancier nanti face 4 un débiteur in bonis L’article 2324 du Code civil définit les privileges comme étant « un droit que la qualité de la créance donne @ un créancier d’étre préféré aux autres créanciers™ ». Le ceréancier nanti peut se trouver face a de nombreux concurrents du fait du nombre et de la variété des priviléges. Les priviléges sont des sdretés mises en place par le législateur ©. civ. art. 2326 : « Les eréanciers privilégiés qui sont dans le méme rang sont payés par concurrence. » ® p, SIMLER, P. DI les siiretés doivent étre classées » ; C. GUISBERS, Siretés réelles et droit des biens, Economica, Recherches Turidiques, 2016, 1°293, p.286 « la loi civile n’a pas dressé une liste claire et exhaustive fixant le rang respectif de toutes les causes de préférence (tiche sans doute impossible au regard de leur nombre) » "L, AYNES, P. CROCQ, Droit des sietés, préc.. n°608 p.360 BECQUE, Les siretés, La publicité foncitre, , préc, n°757 « Nombreuses et disparates *C.civ, an, 2324 35afin de favoriser le paiement de certains créanciers eu égard a leur qualité**. D'origine égale, les priviléges doivent étre appréhendés de maniére restrictive aux seuls cas définis par la loi, sans que puisse étre appliqué de raisonnement par analogie*’. Le privilége ne peut pas étre étendu a des créances non désignées expressément® par les textes. L’avant-projet de réforme du droit des sdretés de 2017°? propose une modification de l'article d’ouverture du chapitre portant sur les priviléges mobiliers au sein du Code civil afin d’insister sur Vorigine légale des privileges. La formulation proposée de I’alinéa | de l'article 2330 du Code civil est la suivante : « Les priviléges mobiliers sont accordés par la loi. » 30, L’article 2330 du Code civil distingue deux grandes catégories de privileges mobiliers, les priviléges généraux et les priviléges spéciaux™. La distinction provient de l’assiette de biens sur laquelle ils portent, Les privileges généraux grévent l'ensemble d meubles constituant le patrimoine du débiteur. Les priviléges spéciaux sont ceux concernant un ou plusieurs bien(s) déterminé(s) du patrimoine du débiteur. Les dispositions relatives au classement des priviléges sont prévues aux articles 2331 et suivants du Code civil. L’article 2331 du Code civil organise le classement interne des privileges généraux. L’ordre de paiement des créanciers titulaires de priviléges spéciaux est prévu a l'article 2332, tandis que les articles 2332-1 et suivants du Code civil ont été mis en place afin d’organiser le classement des privileges généraux et spéciaux. En ce qui concerne le désintéressement des créanciers aprés la vente, la préférence du titulaire d’un privilége spécial mobilier ne sera reconnue que sur le produit de la vente du bien concemé, il sera assimilé a un eréancier chirographaire lors de la répartition des sommes issues de la réalisation des biens restants, Pour assurer le ™ §, PIEDELIEVRE. Droit des siretés, Ellipses, 2° 6d. p.194, n°295 : « il s‘agit d'une stireté légale sans dépossession qui sera conférée par le législateur & certains eréanciers » "© Application de l'adage : « Pas de privilége sans texte », V. P. SIMLER, P. DELEBECQUE, Les siretés, la publicitéfoncigre, préc. n°764, p.715 « ils ne peuvent exister qu autant qu’ils ont été formellement prévus par un texte et les dispositions qui les organisent doivent étre appliquées strictement. » ™L. AYNES et P-Y. GAUTIER, « De l'interprétation stricte des priviléges » D. 1994, chron, p. 13 ets. © Avant-projet de réforme du droit des sOretés, M. GRIMALDI, dir, Ass ciation Henri Capitant, 2017 * C.civ.art.2330 : « Les privileges sont ou généraus, ou particuliers sur certains meubles. » 36