Coupeau-La Metaphysique Du Bijou
Coupeau-La Metaphysique Du Bijou
Coupeau-La Metaphysique Du Bijou
Remerciements .......................................................................................................... 7
Introduction ........................................................................................................... 11
Première partie
Objet d’histoires
Deuxième partie
« La Métaphysique du bijou », Charline Coupeau
Parure du corps
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L A M É T A P H Y S I Q U E D U B I J O U
Troisième partie
Matériau de l’œuvre d’art
ISBN 978-2-7535-8163-0 Presses universitaires de Rennes, 2022, www.pur-editions.fr
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T A B L E D E S M A T I È R E S
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Introduction
Pierres et métaux précieux, foyers de tous les désirs et de tous les mystères
forment des spécimens singuliers, énigmatiques et emblématiques d’une époque,
d’un temps donné. Objet d’une vive émulation dans la sphère muséale, le bijou
abonde aujourd’hui dans de nombreux ouvrages. L’engouement actuel qui l’im-
pose comme un terrain artistique reconnu amène à repenser son intrigue, son
lexique et sa poétique. Le bijou du XIXe siècle, fortement connoté, possède
une signification esthétique, sociale, géographique, politique, économique et
culturelle qui lui est propre. On a souvent pensé que le bijou était un objet vain,
que sa fonction n’est autre qu’agrémenter la personne qui le porte, d’embellir de
façon factice son apparence, voire marquer son appartenance sociale. Ne relève-
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Pour des raisons thématiques, cette étude ne se limite pas à des bornes
temporelles trop sévères. Loin d’être étroit, ce travail se focalise sur les années
allant de 1830 à 1908. L’ensemble de cette recherche débute sous le règne de
Louis-Philippe et se clôture au tout début du XXe siècle. Pourquoi débuter ce
discours en 1830 ? Un tel découpage chronologique a été motivé par la réou-
verture durant cette période des industries de luxe faisant ainsi la fortune des
classes dirigeantes pour qui la bijouterie-joaillerie est un grand signe de richesse
et de pouvoir. Bijoutiers et joailliers, tous styles confondus, sont ainsi sensibles
aux chancellements économiques et politiques qui règnent sur toute la période.
Par ailleurs, l’émergence d’une véritable révolution romantique permet de ques-
tionner le champ de la création en bijouterie. S’étant imposée en France dès
le XVIIIe siècle grâce aux écrits de Jean-Jacques Rousseau, la sensibilité roman-
tique imprègne l’ensemble des productions artistiques de toute la première
moitié du XIXe siècle. Sous la plume de Théophile Gautier, Gérard de Nerval
ou encore Gustave Flaubert le mouvement connaît un succès qui retentit sur les
nombreuses créations des artistes-bijoutiers comme François Désiré-Froment-
Meurice* (1802-1855) ou Alexis Falize* (1811-1898) 8.
Le bornage chronologique choisi culmine jusqu’en 1908. Cette année
est marquée par l’Exposition de la parure précieuse de la femme au musée
Galliera à Paris. Lors de cet événement de nombreux bijoutiers comme Maurice
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aux images sont capitales pour l’avancée des travaux émis ici. Elles mettent en
évidence l’idée que les images sont efficaces, qu’elles sont dotées de forces et de
qualités qui transcendent le quotidien. Le bijou, considéré comme une image à
part entière, comme une langue est donc un stimulateur. Il active la vue. Il parle
à la pensée. Dans cette optique, cette étude sonde les rapports à l’objet 17. Nous
parle-t-il 18 ? Est-il une quête d’identité 19 ? En quoi est-il une œuvre d’art ? À ces
questionnements s’ajoutent ceux tirés des enseignements de Thomas Golsenne 20,
et de l’anthropologue britannique Alfred Gell 21. Comment agit le bijou ? Quels
pouvoirs attribuons-nous à cet objet ? Face à ces interrogations, le travail de
l’historien de l’art peut consister en autre chose qu’un simple décryptage de la
signification. Le discours élaboré par plusieurs chercheurs en anthropologie sur
l’approche des objets, des images et de leur intentionnalité propose une démarche
qu’il semble juste de rapprocher du propos sur la bijouterie.
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à cette dynamique, cet ouvrage s’appuie sur trois grands axes de réflexion qui
s’apparentent notamment aux notions clarifiées par la métaphysique : objet,
corps et matière. Moins divergentes qu’il n’y paraît, ces trois pistes directives
semblent pouvoir couvrir cet examen d’une manière singulière tout en montrant
la richesse artistique de la bijouterie du XIXe siècle. En accord avec ce découpage
déjà développé dans les travaux de Sophie Pelletier 22, il est pertinent d’intégrer
au discours sur le bijou, ces trois concepts qui répondent de manière explicite et
directe à l’amorce ontologique fixée ici. Chaque partie de cette recherche bénéficie
ainsi de l’éclairage de la précédente. Ces trois grandes pistes de réflexions : Objet
d’histoires, parure du corps et matériau de l’œuvre d’art, se recoupent continuelle-
ment et placent le bijou, motif commun, au cœur même de cette interprétation.
À travers diverses directives, la dialectique proposée n’a pas pour effet de frustrer
un lecteur égaré par toutes les pistes à couvrir mais elle tente de démontrer bien
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Notes
1. SOULIER Gustave dans la préface de BEAUCLAIR René, Bijoux Modernes, Paris, Charles
Schmidt éditeur, [s. d.].
2. POINTON Marcia, Brilliant Effects: A Cultural History of Gems Stones and Jewellery, New
Haven/Londres, Yale University Press, 2009, p. 2.
3. M. Victor Champier dans la préface de FONTENAY Eugène, Les bijoux anciens et
modernes, Paris, Quantin, 1887.
4. GLORIEUX Guillaume (dir.), Le Fabuleux destin des diamants de Tavernier. Du Grand
Moghol au Roi-Soleil, Paris, École des Arts Joailliers avec le soutien de Van Cleef & Arpels,
2018.
5. FONTENAY Eugène, op. cit.
6. Ibid., p. 2.
7. DUNCAN Alastair, Art nouveau, Paris, Thames & Hudson, 2000 (éd. anglaise 1994).
8. DURET-ROBERT François, « Bijoux, l’époque romantique », Connaissance des Arts,
no 352, juin 1981, p. 89-96.
9. DUFRÊNE Maurice, Les bijoux, Paris, Librairie des Arts Décoratifs, A. Calavas, 1900.
10. GUERRAND Roger-Henri, L’Art nouveau en Europe, Paris, Librairie académique Perrin,
coll. « Tempus », 2009.
11. « Paragone » vient de l’italien « comparaison ». La comparaison des arts proposée par
Giorgio Vasari au XVIe siècle dans son recueil biographique de référence Les Vies des
meilleurs peintres, sculpteurs et architectes, oppose les arts libéraux aux arts dits mécaniques.
12. DE SCHLOEZER Boris, Introduction à J. S. Bach, Paris, NRF, 1947, p. 24.
13. GELL Alfred, L’art et ses agents : une théorie anthropologique, Dijon, Les Presses du Réel,
19. Il faut pour répondre à cette question se rapprocher des études de VON SCHELLING
Friedrich, Philosophie de l’art, 1802-1805, publié posthumément, Paris, Éditions Jérôme
Million, 1999.
20. GOLSENNE Thomas, La performance des images, Bruxelles, Éd. Alain Dierkens, 2010.
Pour Thomas Golsenne, les hommes considèrent les images comme des agents d’où
le terme « agentivité » qui fait écho à celui développé par son homologue britannique
Alfred Gell « agency » que l’on peut facilement traduire comme un synonyme d’activité,
animation ou intentionnalité.
21. GELL Alfred, op. cit.
22. PELLETIER Sophie, Le Roman du bijou fin de siècle : Esthétique et Société, thèse de
doctorat en littérature française, faculté des arts et des sciences, université de Montréal
et université de Paris VIII, 2011.
23. De Calder à Koons, bijoux d’artistes. La collection idéale de Diane Venet, Paris, musée des
Arts décoratifs, du 7 mars au 9 septembre 2018.
24. PELLETIER Sophie, op. cit., p. 455.
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