De Blanche-Niaise À Blanche-Neige
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Pierre-Marie Bonnaud
Le Mans
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4
« elle se piqua le doigt avec son aiguille et trois gouttes de sang tombèrent dans la neige. » Grimm, Contes,
op. cit. p. 144.
5
Ici Erik Pigani ne fait que reprendre ce que Bruno Bettheleim avait signalé dans sa fondamentale
Psychanalyse des contes de fées, Paris, Robert Laffont, 1976, p. 268 : « Le conte prépare la petite fille à accepter ce
qui, autrement, serait un événement bouleversant : le saignement sexuel, la menstruation et, plus tard, la rupture de
l’hymen. En écoutant Blancheneige, l’enfant apprend qu’une petite quantité de sang (trois gouttes, le chiffre trois
étant celui qui, dans l’inconscient, est le plus étroitement relié au sexe) est la condition première de la conception :
ce n’est qu’après ce saignement que nait l’enfant. Ici donc le saignement (sexuel) est étroitement relié à un «
heureux » événement ; le jeune auditeur apprend, sans explication superflues, que sans le saignement, aucun enfant,
pas même lui, ne pourrait naitre.»
6
Ibid.
7
En effet, elle ne parvient à vaincre sa belle-mère que lorsqu’elle est mariée et que protégé par son mari elle
peut forcer sa marâtre à enfiler les « mules de fer ». Ou en d’autres termes, lorsqu’elle parvient à user de sa beauté
comme arme de séduction et d’influence.
8
Il nous paraît intéressant de signaler que la seule description du prince est « fils d’un roi » (p. 155). Jamais
on ne le lit décrit, nous ne savons donc pas s’il est jeune ou / et s’il est beau.
9
Dans l’édition des Contes de Grimm de Marthes Robert, Blanche-Neige est d’ailleurs comparée à un
« enfant » incapable de résister à un jouet (p. 152 « Il plut tellement à l’enfant qu’elle se laissa tenter et ouvrit la
porte. »), un « enfant » qui « ne se méfiait de rien » (p.152).
10
« Petit miroir, petit miroir chéri,
Quelle est la plus belle de tous le pays. » Grimm, Contes, op. cit. p. 145.
2
temps terni et amoindri son pouvoir de séduction, seule chose qu’elle possède11. Et elle, femme
narcissique et obsessive refuse cette fatalité. C’est ce que Erik Pigani appelle la « notion
morale12 » du conte initiatique : la mère, même si elle souhaite conserver sa beauté, doit céder la
place à sa fille pour que se construise l'identité féminine.
Et dans son refus de voir sa fille prendre sa place, ne supportant pas la rivalité, la
méchante reine incarne la mauvaise mère. Elle est décrite comme « une belle femme, mais fière
et hautaine »13 qui « ne pouvait pas souffrir que quelqu’un la surpassât en beauté14.». La seule
source de la méchanceté de la marâtre est son narcissisme œdipien.
de son cerveau, sa vision, son sommeil et donc la sécrétion nocturne de l'hormone de croissance, ainsi que le
développement de son intelligence. », Ibid.
27
« C’est un nanisme harmonieux auquel sont généralement associés des troubles fonctionnels et
comportementaux, en particulier des troubles du sommeil, une potomanie, une polyphagie. La reprise de la
croissance, spectaculaire au bout de quelques jours d’hospitalisation, permet d’établir le diagnostic. Cet arrêt de
croissance est dû à un blocage fonctionnel de la sécrétion de S.T.H. (ou hormone de croissance) et de la
somatomédine, avec la participation éventuelle d’une carence nutritionnelle.» objectif de module : Maltraitance et
enfant en danger, D. Sibertin-Blanc, C. Vidailhet. Université de Rouen, p. 6.
28
Ibid.
29
Bormans Christophe, « Blanche-neige et les sept nains : L’Œdipe de la petite fille et la rivalité avec la
mère », Psychanalyse des contes et dessins animés (Walt Disney expliqué aux adultes) disponible en fragments sur
http://www.psychanalyste-paris.com.
30
Freud Sigmund, « Quelques conséquences psychiques de la différence anatomique entre les sexes » (1923),
La Vie sexuelle, PUF, Bibliothèque de Psychanalyse, Paris, 1969, p. 125-132.
31
Annexe 2
32
« D’emblée elle a jugé et décidé. Elle a vu cela, sait qu’elle ne l’a pas et veut l’avoir » (Sigmund Freud,
« Quelques conséquences psychiques de la différence anatomique entre les sexes » (1923), La Vie sexuelle, PUF,
Bibliothèque de Psychanalyse, Paris, 1969, pp. 125-132.
33
Annexes 2 et 3
5
Neige dans le dessin animé34 et ce substitut sera évidemment le prince charmant. Cependant
Lorsque le prince escalade le mur35 et vient la retrouver, Blanche-Neige s’enfuit : elle n’est pas
prête pour l’acte sexuel que symbolise l’escalade : elle est encore une petite fille en plein
développement de sa recherche sexuelle et d’une activité onaniste. Pour conforter cette idée
Bormans remarque que lors de sa première scène, Blanche-Neige lave les marches36 (en y
prenant un manifeste plaisir) ce qui est un évident symbole de masturbation37.
Le personnage de Blanche-Neige selon le psychanalyste est tout entier guidé par ses
pulsions et sa libido, rien n’importe plus, au premier abord, pour la jeune fille que son activité
onaniste. Cependant, après avoir balayé la maison des nains (comprendre son psychisme), cette
libido évolue et Blanche-Neige va se réveiller face à un nouveau désir : les nains. Représentants
du pénis, ils apportent un plaisir libidinal à la princesse ainsi que nous le montre la scène dite de
la tyrolienne des nains38. Constation à laquelle Bormans ajoute :
Travailleurs infatigables comme le membre masculin idéal, ils piochent inlassablement dans la terre. Au
fond de la mine et ses galeries, ils découvrent des pierres précieuses : diamants et rubis qui serviront à
faire les plus beaux bijoux et parures féminines, constituant autant de trésors symbolisant la jouissance
féminine qui découle de cette activité souterraine. 39
34
« Je souhaite (écho)
Voir celui que j’aime.
Et qu’il vienne (écho)
Bientôt. (écho)
Je l’attends, (écho)
Je rêve aux doux mots,
Je souhaite (écho)
Voir celui que j’aime.
Qu’il me trouve (écho)
Bientôt. »
35
Annexe 4.
36
Annexe 5.
37
« Marches, échelles, escaliers, en l’occurrence le fait de s’y déplacer, et ce aussi bien vers le haut que vers
le bas, sont des présentations symboliques de l’acte sexué. » Freud Sigmund, L’Interprétation du rêve, Œuvres
complètes, Psychanalyse, volume IV : 1899-1900, PUF.
38
Annexe 6
39
Bormans Christophe, op. cit.
6
Puis il note que Blanche-neige « prend en charge de manière active sa féminité40 » en
faisant les travaux ménagers chez les nains, elle surmonte en quelque sorte le motif de la jalousie
maternelle et en profite pour reconnaître le pouvoir séductif inhérent à sa qualité de femme.
Enfin la fin de la période de latence où Blanche-Neige, dans le coma (elle est glacée,
symbole clair de la frigidité) se réveille grâce à un baiser du prince symbole l’éveil de la jeune
fille à la puberté, l’acception pleine et entière de sa sexualité et de l’objet désir. Ainsi que le dit
Freud : « la pulsion sexuelle se met à présent au service de la fonction de reproduction ; elle
devient pour ainsi dire altruiste41 », ou en d’autres termes : ils se marièrent et eurent beaucoup
d’enfants.
La vision du psychanalyste freudien, Christophe Bormans, quant au personnage de
Blanche-Neige de Blanche-Neige et les sept nains de Walt Disney nous paraît être un parti pris
réducteur. En effet, il nous semble que réduire le personnage de Disney à son unique sexualité,
laquelle ne semble d’ailleurs se résumer qu’à l’interrogation de la vie libidinale sans pénis, au
travers d’analyses touchant parfois au sexisme n’est pas représentatif de sa complexité. La
mutliplicité interprétative de notre étude l’illustre d’ailleurs fort bien.
40
Ibid.
41
Freud Sigmund, « Les métamorphoses de la puberté », Trois essais sur la théorie sexuelle (1905), Paris,
Gallimard, Coll. « Folio-essais », 1987, p. 143
42
Texte librement inspiré de Salome Charlene, « Bon vent Blanche-Neige. Blanche-Neige Et Le Chasseur :
trahir pour mieux servir ? », www.vodkaster.com, 21.06.2012.
43
Annexe 9.
44
C.f. 3.3 pour plus d’information sur le caractère guerrier de cette vision du personnage de Blanche-Neige.
45
Sanders Rupert, Snow White and the Huntsman, , Etats-Unis, Universal pictures, 2012.
46
On remarquera d’ailleurs que le mariage est remplacé par une scène de couronnement symbole évident de
la consécration de Blanche-Neige comme femme de pouvoir.
7
ressentir les choses comme elle les ressent, elle est femme et cela étant, elle est à la fois libre et
l’égale de l’homme mais différente de par sa sensibilité.
Enfin On remarque l’ajout d’un symbolisme féministe très fort au conflit
intergénérationnel primaire 47 . Ravenna 48 , la seconde-mère prend le statut d’une femme
vengeresse, punissant par projection le seigneur qui abusait des femmes de son village49. On peut
y voir sans aucun doute la lutte féministe contre le droit de cuissage. Cependant, le sortilège50 de
protection qui la rend si puissante et lui permet de rester la plus belle (comprendre jeune), en
aspirant la beauté, est maternel, ses pouvoirs sont autant un don qu’une malédiction. Son combat
est vicié car sa lutte semble lui être imposée par une mère revancharde. Son choix du mal n’est
en réalité qu’un mal / mâle subit. Un passage de ce sortilège retient particulièrement notre
intention : lorsque la mère entaille la main de sa fille, trois gouttes de sang en tombent51. Ainsi la
mère de Ravenna créée non-seulement une femme maléfique mais aussi le double négatif de
Blanche-Neige : tandis que le trois gouttes de sang de la mère de la princesse sont tombés par
hasard dans la neige52 pour faire naître l’amour, les trois gouttes de sang sont prises à Ravenna
pour faire naître la haine. L’une est née de la nature et du hasard, l’autre de l’homme et du
destin.
Quelle que soit l’époque qui le réactualise, la psychanalyse fera toujours du personnage
Blanche-Neige une femme-vagin. Or la réduction de ce personnage à son attribut sexuel voire
reproductif peut selon nous s’apparenter à une objectivation et en autoriser une encore plus
flagrante.
54
Grimm, Contes, Marthes Robert, Paris, Gallimard, Folio, 1986, p.144.
55
Ibid. p.144.
56
Ainsi que le développe Pierre Michel Menger dans son ouvrage Portrait de l’artiste en travailleur, Paris,
Seuil, La République des idées.
57 Dans Inside the White Cube : The Ideology of the Gallery Space, San Francisco, First University of
California press edition, 1999 Brian O’Doherty explique que le « white cube » est une présentation de l’espace
d’exposition moderniste censé refléter l’idéal de ce dernier dans sa quête de pureté et surtout d’autonomisation de
l’œuvre d’art. Le « white cube », est l’opportunité pour l’œuvre de s’exprimer sans les entraves de la contingence
imposée par le monde « extérieur ».
58
Les nains lui dirent : « Si tu veux t'occuper de notre ménage, faire la cuisine, les lits, la lessive, coudre et
tricoter, tu peux rester chez nous, tu ne manqueras de rien. » Grimm, Contes, op.cit. p. 148-149.
59
C.f note 5. Cependant, si la scène traitée précedemment était une réduction utilitariste de la jeune fille,
cette scène-ci, est encore pire en cela qu’elle réduit Blanche-Neige à une gemme dans un écrin. Blanche-Neige
morte devient chef-d’œuvre des nains comme si ces derniers avaient détérré une pierre tellement extraordinaire
qu’elle ne pouvait retourner à la terre (n’oublions pas que Blanche-Neige est née de la neige) et devait être exposée,
dans une considération égoïste exclusivement esthétique et artistique, au yeux du monde
9
Le prince fini d’objectiver Blanche-Neige lorsqu’il dit aux nains : « Laissez-moi
ce cercueil je vous donnerai tout ce que vous voulez en échange.» Devant le premier refus des
nains à vendre60, il se comporte alors comme un collectionneur obsessif et se met à négocier à la
manière d’un acheteur d’art en déclarant aux nains qui ne veulent pas se défaire de l’artefact
Blanche-Neige 61 : « En ce cas, faites-m’en cadeau, car je ne peux pas vivre sans voir
Blancheneige, je le vénérerai et le tiendrai en estime comme mon bien62 le plus cher63 ».
Le drame survient alors lors du transport de l’œuvre qui se brise. Blanche-Neige
se réveillant redevient une mortelle, c’est-à-dire une non-œuvre d’art, une simple princesse. La
réaction du prince est immédiate, il va nier de nouveau la qualité d’individu à part entière de la
princesse et à Blanche-Neige qui demande « Ah Dieu, où suis-je64? » il répond mécaniquement65
« Je t’aime plus que tout au monde ; viens avec mo au chateau de mon père, tu seras ma
femme66. » Cependant, il n’est pas certain qu’un mariage avec un ex-chef-d’œuvre (re)devenu
princesse67 puisse parvenir à combler le souvenir du premier choc esthétique du prince.
70
C.f note 66.
71
Annexe 7.
72
Annexe 8.
73
“Snow White is young, virginal, pretty, sweet-natured and obedient. Domestic drudgery doesn’t faze her
since she is sure that a handsome owning-class chap will, someday soon, come and save her.”, Kathi Maio, op. cit.
74
Nous nous sommes aussi aidé de la novélisation du film de ce dernier par Blake Lily, Snow White and the
Huntsman, Hachette UK, 2012
75
Texte librement inspiré de l’analyse “Snow White and huntsman : an analysis” disponible en ligne sur
http://fairyweekly.tumblr.com, 10.07.2012.
76
Et non du mythe qui remonte selon toute vraisemblance bien plus loin.
11
protectrice 77 , Ravenna quand à elle est constamment entourée de métal et de pierre, de
construction froide et vide78. Si la jeune fille devient une sorte d'héroïne écologique c’est parce
qu’elle est chargée par la Nature d'éliminer une sorcière qui a tout d'un promoteur immobilier.
Quand à la symbolique pré-chrétienne elle est évidente : la Blanche Neige de Sanders
charrie à la fois une croyance chrétienne qui lui fait réciter une prière à Dieu dans sa cellule et
une croyance ancestrale païenne lui permettant d’accéder à la forêt des fées (on remarquera
l’influence celtique) puis faire face a un cerf79 qui était associé au culte de Cernunnos80 le dieu
païen symbolisant la mort et la résurrection des gaulois81.
77
La forêt des fées en est l’exemple flagrant. Annexe 12.
78
Annexe 13.
79
Annexe 14.
80
Annexe 15.
81
On peut signaler pour mémoire qu'à l'époque protohittite il existait déjà dans la civilisation du Hatti un
culte du cerf.
82
On ne fait mention du roi (et non du père) qu’une unique fois : « Un an plus tard, le roi prit un autre
épouse. », Grimm, Contes, op.cit. p. 144.
12
3.2. La simplification puritaine de Disney : Blanche-Neige,
une ravissante idiote chrétienne.
Le 9 août 193483 un note interne aux studios précise que le scénario version Disney devra
être : « une romance avec une héroïne attirante et un héros, la menace d'un horrible méchant ; la
comédie et la bonté des nains, une fin heureuse, une histoire éternelle du folklore familière du
public mondial »84. Ce qui est une simplification terriblement manichéiste du conte quand même
bien plus complexe des Grimm : pour Walt Disney, ce qui compte est la jalousie de la Reine
envers une Blanche-Neige innocente 85 . Ce qui permet d’expliquer par exemple le choix
d’individualiser les nains comme autant personnalités86 stéréotypées87.
En septembre de la même année un autre script précise:
‐ « La reine ne se déguisera plus en vendeuse mais se transformera en
88
sorcière . » Cette transformation de la reine en sorcière au lieu d’un déguisement de
sorcière s’explique non seulement de par l’influence capitalistique américaine (dans le
monde du « Dieu Dollar89 » un vendeur ne peut pas être maléfique) de plus le choix de la
sorcière permet de caractériser et de caricaturer le mal dans une vision manichéiste
inspirée du puritanisme ambiant.
‐ « On assistera à une seule tentative de meurtre par le chasseur et une
d'empoisonnement avec la pomme90. »Ces deux tentatives de meurtres sont autant de
choix desservant le personnage de Blanche-Neige, si elle comprend que le chasseur veut
la tuer dans le conte des frères Grimm. En revanche dans le dessin animé éponyme c'est
le chasseur qui est obligé de lui expliquer ce qu'il se passe. L’empoisonnement unique
avec la pomme (plutôt que le choix de trois tentatives) permet aux studios d’accentuer la
figure chrétienne de pécheresse cédant à la tentation de façon plus explicite que dans le
conte (dans lequel elle est davantage perçue comme narcissique).
‐ « La léthargie de la princesse sera achevée dans un baiser donné par prince
et non par le rejet du morceau de pomme lors de la chute du cercueil91. » Ce dernier
83
« Aux origines de l'œuvre : La production du film », texte disponible sur le DVD 2 de Blanche-Neige et les
Sept Nains - édition collector Zone 2, David Hand, Walt Disney Production, 2001 (date originale 1938).
84
Bob Thomas, Disney's Art of Animation : From Mickey Mouse to Beauty and the Beast, New York,
Hyperion Books éd., 1991, p.65.
85
Frank Thomas et Ollie Johnston, The Illusion of Life : Disney Animation, New York, Hyperion Book,
1995, p. 233.
86
A propos de la personnalité des nains, le pédopsychiatre Marcel Rufo écrit dans L’express culture daté du
18 août 2009 : « Quant aux sept nains, ils ont tous les défauts ou les qualités enfantines. Le gamin introverti se
rapprochera de Timide, l'aîné se prendra pour Prof... Simplet, personnage fédérateur, est un cas à part : il incarne le
doute de soi, propre à tous les enfants. »
87
Allan Robin, Il était une fois…Walt Disney : Aux sources de l'art des studios, Paris, Réunion des musées
nationaux, 2006, p.178.
88
Lambert Pierre, Girveau Bruno, Walt Disney, l'âge d'or, Démons et merveilles, 2006, p. 50.
89
« (...) les Américains en fait de Dieu n’en connaissent qu’un seul : Le Dieu Dollar ! qui de tout temps a été
le seul adoré par les pirates de toutes les contrées. », Gustave Aimard, Les Trappeurs de l’Arkansas, Éditions De
L'érable François Beauval, Genève, 1973, p.118.
90
Walt Disney, l'âge d'or, op. cit., p. 50
91
Ibid.
13
choix opéré par l’équipe du dessin animé de Disney rend Blanche-Neige et les sept nains
encore plus sexiste que le conte. En effet, si dans le conte, Blanche-Neige renaît, à cause
de la maladresse des serviteurs92. Dans le dessin animé, pas de maladresse, la pomme qui
tue Blanche Neige disparaît grâce au baiser du prince : c'est l'homme qui sauve la femme
et non la contingence.
Dans le dessin animé, Blanche Neige rencontre les sept nains après avoir fait le ménage
dans leur maison. Ce qui signifie que Blanche Neige commence son aventure dans un milieu où
sa qualité de femme, de mère93 et de ménagère sont mêlées, en d’autre terme elle devient femme
en faisant le ménage (la première scène qui présente la jeune fille la montre d’ailleurs entrain de
nettoyer les marches du chateau [et fredonnant comme si c’était un véritable bonheur!]94).
Blanche-Neige se couche ensuite dans le lit dans des sept nains, ce qui indique une
tranquillité d'esprit qui confine à la stupidité. En effet, entrer par effraction dans une maison
inconnue, voler de la nourriture et se coucher dans un lit qui n'est pas le sien est peu raisonnable.
Ce comportement aurait pu s'expliquer de par la qualité royale de la jeune princesse (bien que
dans le dessin animé, son enfance se résume davantage à une vie de domestique). Cependant un
élément nous en empêche d'admettre cette excuse. Il nous paraît en effet absolument illogique
que l'on puisse se coucher en toute quiétude (le conte ne dit-il pas : « Ensuite, elle était tellement
lasse qu'elle se coucha (…) 95 », « lasse », mais ni inquiète, ni angoissée) tout en sachant
pertinemment que l'on vient d'échapper à un meurtre et que l'on est certainement poursuivie par
des assassins. Et, bien que le conte et le dessin animé 96 proposent une réponse à cette
interrogation, « elle y resta, se recommanda à Dieu et s'endormit97. », cette dernière ne semble
aller sans une négation de la capacité réflexive de la jeune fille : sa foi, jamais évoquée
auparavant, semble si forte qu'elle permet à Blanche-Neige de s'endormir et de mettre sa vie
entre les mains d'inconnus.
Enfin, le conte est légèrement moins sexiste que le dessin animé car dans le conte ce sont
les sept nains qui invitent Blanche-Neige (laquelle accepte bien volontiers) à s'occuper de leur
ménage, cuisine, lessive98… tandis que chez Disney c’est Blanche-Neige elle-même qui propose
ses services aux nains inquiets de recueillir chez eux une fugitive : « Si vous me gardez, je
m’occuperai de tout : je ferai la lessive, la couture, le ménage et la cuisine. » lesquels à la
92
« Il advint alors qu'ils trébuchèrent contre un buisson et que, par suite de la secousse, le trognon de pomme
empoisonné dans lequel Blancheneige avait mordu lui sortit du gosier. » Op. cit., Contes, p. 156
93
En découvrant la maison, elle pense les nains comme des enfants et agit alors comme la mère qu’elle pense
qu’ils n’ont pas.
94
Annexe 1
95
op. cit., Contes, p. 147.
96
Afin de bien comprendre le caractère puritain du dessin-animé, il nous faut signaler que ce dernier sort
durant l'application du Motion Pictures Producers and Distributors Association. Les États-Unis traversent alors
dans une période de rigueur morale qui durera jusqu'en 1968 et l’instauration du Motion Picture Association of
America film rating system.
97
op. cit., Contes, p. 147.
98
C.f. note 5.
14
mention du dernier acceptent avec joie99. Le personnage de Blanche-Neige du film de Walt
Disney est pensé pour transmettre des valeurs de femme soumise à la petite fille, Blanche-Neige
est ainsi dépeinte comme une ravissante idiote dont le bonheur est de faire celui de l’homme
tandis que la reine qui « représente la femme redoutée par les hommes dans une société dominée
par les hommes (…) est à la fois la femme fatale et un personnage inquiétant issu d'un monde
plus ancien100 »et simplifié pour être « froide, cruelle, malicieuse et extrême101 » ainsi sa mort
n’en sera que plus justifiée.
16
ANNEXES
17
Snow White and the Seven Dwarfs, David Hand,
Etats‐Unis, Walt Disney Productions, 1937.
1 et 2
18
Snow White and the Seven Dwarfs, David Hand,
Etats‐Unis, Walt Disney Productions, 1937.
3 et 4
19
Snow White and the Seven Dwarfs, David Hand,
Etats‐Unis, Walt Disney Productions, 1937.
5 et 6
20
Snow White and the Seven Dwarfs, David Hand,
Etats‐Unis, Walt Disney Productions, 1937.
Snow White and the Seven Dwarfs Cottage Play Set,
Disney Store, 2009.
7 et 8
21
Snow White and the Huntsman, Rupert Sanders,
Etats‐Unis, Universal pictures, 2012.
9 et 10
22
Snow White and the Huntsman, Rupert Sanders,
Etats‐Unis, Universal pictures, 2012.
10 et 11
23
Snow White and the Huntsman, Rupert Sanders,
Etats‐Unis, Universal pictures, 2012.
12 et 13
24
Snow White and the Huntsman, Rupert Sanders,
Etats‐Unis, Universal pictures, 2012.
Détail d'un panneau intérieur du chaudron de Gundestrup.
14 et 15
25
Snow White and the Huntsman, Rupert Sanders,
Etats‐Unis, Universal pictures, 2012.
The Messenger: The Story of Joan of Arc, Luc Besson,
Etats‐Unis, Gaumont Buena Vista Internationl, 1999
16 et 17
26