Manon Lescaut Dissertation Manon Diff À Cerner Définitif

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L’ABBÉ PRÉVOST, Manon Lescaut, 1751.

DISSERTATIONS

SUJET :
À votre avis, pourquoi le personnage de Manon Lescaut est-il difficile à cerner ?
Vous répondrez à cette question en vous appuyant sur votre lecture de Manon Lescaut de
l’Abbé PRÉVOST.

Construction de la dissertation à partir de 3 SENS du verbe « cerner » :

- « Cerner » (latin « cernere ») = voir.


 « difficile à cerner » en ce sens = difficile à voir. L’apparence physique
de Manon reste floue, elle n’est vue que de l’extérieur…
- « Cerner » = comprendre.
 « difficile à cerner » en ce sens = difficile à comprendre. Manon reste
un mystère, ne cesse de nous surprendre, de nous dérouter… Et
déroute aussi DG. Manon échappe à toute définition (définir= tracer
des frontières), à toute réduction (Manon, prostituée, Manon femme
fatale, Manon amoureuse, Manon sentimentale, Manon rouée et
libertine, Manon friponne et catin….)
- « Cerner » (latin « circinare », parcourir en formant un cercle) = entourer.
 « difficile à cerner » en ce sens = difficile à entourer, à saisir, à
posséder. Un personnage qui ne cesse de se dérober, de fuir,
s’échapper, que personne ne peut posséder, y compris (et surtout !)
Des Grieux. Une femme foncièrement libre ! Elle échappe aussi à son
lecteur, à ceux qui voudraient la réduire à un type de personnage (la
femme libertine par ex). Une incarnation de la liberté !

Problématique : en quoi est-il impossible de « cerner » Manon, dans tous les sens du
terme ?

I. Un personnage qu’il est difficile de « voir ».


II. Un personnage qui cultive son mystère (difficile à comprendre).
III. Un personnage qui échappe à toute tentative de possession, une femme qui
incarne la liberté.
I. Un personnage qu’il est difficile de « voir ».

1. Manon n’est pas ou peu décrite, elle reste une abstraction, une
incarnation de la beauté et du charme, sans contours précis. Pour le
lecteur, elle est à proprement parler difficile « à voir »…

- Ainsi, la scène de rencontre est un mystère dans la mesure où nous n’avons pas les traits de Manon :
« elle me parut si charmante, que (…) je me trouvai enflammé tout d’un coup jusqu’au transport.  »
(26) Manon devient aussitôt, et sans qu’on la connaisse davantage, « la maîtresse de (son) cœur. » ;
un peu plus loin, elle est « la souveraine de mon cœur » ; « la douceur de ses regards, un air charmant
de tristesse en prononçant ces paroles (…) ne me permirent pas de balancer un moment sur ma
réponse. » Le personnage se métamorphose immédiatement : « on ne ferait pas une divinité de
l’Amour, s’il n’opérait souvent des prodiges. » ; Manon appelée « ma belle inconnue ». DG n’apprend
son nom qu’après le coup de foudre ! « Mademoiselle Manon Lescaut, c’est ainsi qu’elle me dit qu’on
la nommait. »
- Les descriptions de Manon par DG restent souvent floues : « son esprit, son cœur, sa douceur et sa
beauté formaient une chaîne si forte et si charmante, que j’aurais mis tout mon bonheur à n’en sortir
jamais. » (33) Manon reste une sorte d’abstraction.
- Lors de leurs retrouvailles à Saint-Sulpice : « je ne vois que trop que vous êtes plus charmante que
jamais. » (52)
- Les périphrases pour désigner Manon sont toujours abstraites et parlent finalement plus de l’amour
que lui porte DG que de Manon elle-même : « je reverrai donc l’idole de mon cœur, l’objet de tant de
pleurs et d’inquiétudes ! » (109) ; « toute puissante Manon ! » (147) ; « ma chère reine » (159) ;
« une créature si charmante » ; « l’idole de mon cœur » (197) ; « ce qu’elle (la terre) avait porté de
plus parfait et de plus aimable » (197).
- DG fait à M. le Lieutenant général de Police l’ « éloge de sa douceur et de son bon naturel. » (162)

2. Manon n’est décrite que de l’extérieur, et par des hommes (et non des
femmes !).

- Le lieutenant de Police
- Le père de DG
- Tiberge
- M. de T
- Lescaut
- Les cochers, émus par le couple.
- Les gardes
- Le capitaine
- Le gouverneur de la Nouvelle-Orléans
- Renoncour

3. Manon n’est décrite qu’à travers de Des Grieux.

- Lors de la scène de rencontre, nous n’avons que le point de vue du chevalier qui devine les sentiments
de Manon : « Je crus apercevoir qu’elle n’était pas moins émue que moi. » (28) ; on note la
modalisation ! De même, Manon semble plus intéressée par le statut social de son prétendant :
« flattée d’avoir fait la conquête d’un amant tel que moi. » (28)
- DG ne découvre souvent les tromperies de Manon que peu à peu, il ne connaît pas Manon, ne la
comprend pas :
 Ainsi, lors de sa première tromperie, il constate que leur table est mieux servie, sans comprendre
que c’est grâce à un amant de Manon et non à l’« affection de quelques parents. » : « Je lui
marquai mon étonnement de cette augmentation apparente de notre opulence . » C’est dans un
café que DG est en proie à toutes les questions à propos de son amante dont il ne peut imaginer
qu’elle le trompe : « Quelle raison aurait-elle eue de me tromper ? » 36 Au sens propre, DG ne
« comprend » pas Manon ! « J’avais peine à donner à tant d’ÉNIGMES un sens si favorable que
mon cœur le souhaitait. » ; « il fallait nous dire sans cesse que nous nous aimions. (…) Je ne
pouvais donc m’imaginer presque un seul moment où Manon pût s’être occupée d’un autre que
moi. » (37) ; « je crus avoir trouvé le dénouement de ce MYSTÈRE. » (37). De même, lorsque les
laquais de son père viennent l’arrêter, DG ne comprend pas ce qui lui arrive, il n’ose soupçonner
Manon de l’avoir trahi : « j’y trouvai d’abord tant d’obscurité, que je ne voyais pas de jour à la
moindre conjecture. J’étais trahi cruellement ; mais par qui ? » ; Tous les gestes affectueux de
Manon avant l’arrestation lui « paraissaient bien une énigme. » (39)
 Le père du chevalier se moque de la crédulité de son fils : « Il me demanda d’abord si j’avais
toujours eu la simplicité de croire que je fusse aimé de ma maîtresse. » (41) ; « Tu es une jolie
dupe. » ; « il ajouta mille railleries sur ce qu’il appelait ma sottise et ma crédulité. ». / « Vous êtes
un enfant (…) Comment pouvez-vous vous aveugler jusqu’à ce point, après ce que je vous ai
raconté d’elle ? »
 DG refuse de voir qui est Manon, il veut qu’elle l’aime et refuse de la croire inconstante ou
infidèle : à propos de M. de B… : « Il n’a pas gagné le cœur de Manon ; il lui a fait violence ; il l’a
séduite par un charme ou par un poison. » (43) « Il l’aura menacée, le poignard à la main, pour la
contraindre de m’abandonner. »
 Le chevalier découvre aussi la deuxième trahison de Manon, avec M. de G… M…, avec retard, à
la lecture de la lettre qu’il lui laisse.
 Le valet révèle à DG une supposée relation de Manon avec un « seigneur étranger ». (124) (le
prince italien)
 Crédulité de DG quand Manon rencontre le jeune G… M… : « Je ne me sentais aucun penchant à
la jalousie. J’avais plus de crédulité que jamais pour les serments de Manon. (…) J’étais ravi de
l’effet de ses charmes et je m’applaudissais d’être aimé d’une fille que tout le monde trouvait
aimable. » (132) ; « Je ne la crois pas capable de m’abandonner pour un autre. » (à M. de T…, 133)
 Lors de l’épisode du jeune G… M… : « La résolution fut prise de faire une duper de G… M…, et par
un tour bizarre de mon sort, il arriva que je devins la sienne. » (134)
 Lorsque le jeune G… M… déclare ses sentiments à Manon à l’occasion d’un souper chez eux : « Je
m’aperçus, à mon retour, qu’on ne l’avait pas désespéré par un excès de rigueur. » (135) ; DG
devient le complice de la trahison de Manon, sous couvert de projet de vengeance commune,
mais très vite le jeu lui échappe et de complice, il devient le mari cocu.
 Quand DG prend conscience de la nouvelle trahison de Manon avec le jeune G… M… Découverte
progressive, dramatisation du récit. DG se rend au point de rendez-vous (l’entrée de la rue Saint-
André-des-Arcs), et découvre peu à peu que rien ne se passe comme prévu : « Je fus surpris de
n’y pas trouver Marcel. » (138) ; puis c’est l’épisode de la jeune femme dans le carrosse : « une
jolie demoiselle m’attendait depuis une heure dans le carrosse. » (138) ; nous suivons pas à pas les
découvertes (et déconvenues) de DG : « Je me figurai aussitôt que c’était Manon. J’approchai.
Mais je vis un joli petit visage qui n’était pas le sien. » ; puis c’est la lettre.
 Et pourtant, DG dit parfois avoir des certitudes sur Manon, ne doute pas fondamentalement de
son amour : « J’en connaissais si bien les endroits sensibles ! (de son cœur) » ; « J’étais si sûr
d’être aimé d’elle ! » (142)
- DG est toujours « surpris » par Manon, comme lors de leur deuxième rencontre, à Saint-Sulpice :
« Quelle apparition surprenante ! » ; « C’était elle, mais plus aimable et plus brillante que je ne l’avais
vue. » (51) ; « Ses charmes surpassaient tout ce qu’on peut décrire. » ; « toute cette figure me parut
un enchantement. » ; « je demeurai interdit à sa vue. » Manon reste un point d’interrogation :
« Étrange fille ! » s’exclame DG au moment de l’épisode du Prince italien (126) ; « le caractère de cette
étrange fille » (144)
- DG passe d’une extrême à l’autre avec Manon, oscillant sans cesse entre amour passion et haine  :
selon ce qu’il ressent pour Manon, elle apparaît comme « perfide » ou l’ « idole de son cœur ».
Lorsqu’il s’agit d’exalter la passion, Manon est idéalisée ; elle est comme à Saint-Sulpice « l’air de
l’Amour même ». C’est la raison pour laquelle il ne faut pas chercher de description physique de
Manon ; son être est dans ce qu’elle suggère, dans les émotions qu’elle suscite en DG.
À l’inverse, lorsqu’il s’agit pour DG de plaider sa cause, de s’innocenter, Manon est l’objet d’une
certaine mauvaise foi du narrateur qui multiplie les signes d’équivoque et rejette la responsabilité sur
les autres : après l’incendie de Chaillot, c’est parce qu’ « il ne fallait pas compter sur elle dans la
misère », que DG s’autorise après un raisonnement curieux à voler les riches et les grands en profitant
de leur sottise.

II. Un personnage qui cultive son mystère (difficile à comprendre).

1. Manon est toujours entourée d’un halo de mystère.

- Première rencontre du narrateur avec Manon, dramatisation de la rencontre, effet de retardement :


« J’entrai avec peine, en perçant la foule, et je vis en effet quelque chose d’assez touchant. » ;
étonnement du narrateur devant ce personnage « inclassable », à la fois prostituée et femme de
condition.
- Le narrateur cherche immédiatement à connaître Manon : « Je demandai quelques lumières sur le
sort de cette belle fille. Il ne put m’en donner que de fort générales. »
- De façon symétrique, la rencontre du chevalier avec Manon, à Amiens, est marquée par le même
mystère : « Nous n’avions pas d’autre motif que la curiosité. »
- Manon se découvre alors qu’elle a déjà tout un passé : « elle était bien plus expérimentée que moi » ;
« c’était malgré elle qu’on l’envoyait au couvent, pour arrêter sans doute son penchant au plaisir, qui
s’était déclaré, et qui a causé dans la suite tous ses malheurs et les miens.  » (26) Mais ce passé reste
flou, les parents de Manon n’apparaîtront plus (si ce n’est son frère, mais il ne se souciera pas
d’envoyer Manon au couvent, bien au contraire, il est lui-même un marginal !) ; on peut d’ailleurs se
demander si ce que dit Manon à DG lors de leur rencontre est vrai !
- Le père de DG appelle Manon « une inconnue » : « il me dit que j’avais bien mérité ce qui venait de
m’arriver, en me livrant à une inconnue. » (40)
- Un portrait (un premier portrait !) de Manon n’advient qu’à la page 67 et il est sous le signe de son
mystère : « Manon était une créature d’un caractère EXTRAORDINAIRE. Jamais fille n’eut moins
d’attachement qu’elle pour l’argent, mais ne pouvait être tranquille un moment avec la crainte d’en
manquer. » (67) ; « C’était une chose si nécessaire pour elle d’être ainsi occupée par le plaisir. » ;
« Quoiqu’elle m’aimât tendrement, et que je fusse le seul (…) j’étais presque certain que sa tendresse
ne tiendrait point contre de certaines craintes. »
- Un personnage double, qui conjugue les extrêmes : prostituée et traitée comme une « princesse »
(l’image revient souvent) : « Il (M. de G… M…) l’avait reçue effectivement comme la première
Princesse du monde. » (148) ; parmi les prostituées, les « gens sans aveu » (cad sans foi ni loi)
déportés en Amérique, pour le Mississippi. (166) ; un tout autre visage de Manon est donné lors de sa
déportation : « Mais figurez-vous ma pauvre maîtresse enchaînée par le milieu du corps, assise sur
quelques poignées de paille, la tête appuyée languissamment sur un côté de la voiture, le visage pâle
et mouillé d’un ruisseau de larmes qui se faisaient au travers de ses paupières, quoiqu’elle eût
continuellement les yeux fermés. » (179) (…) « Son linge était sale et dérangé, ses mains délicates à
l’injure de l’air. »

2. Manon est un personnage contradictoire, double, ambivalent.

- PURE ET IMPURE : Il y a qqc de pur qui émane de Manon, dès la première rencontre du narrateur avec
elle, bien qu’elle se trouve au milieu de prostituées : « Parmi les douze filles, qui étaient enchaînées six
à six par le milieu du corps, il y en avait une dont l’air et la figure étaient si peu conformes à sa
condition, qu’en tout autre état je l’eusse prise pour une personne du premier rang. » (p.16) ; « sa vue
m’inspira du respect et de la pitié. » ; « cette belle personne, qui ne me paraît point faite pour le triste
état où je la vois. »
Concluant l’épisode de la rencontre, voici ce qu’affirme le narrateur : « elle me répondit avec une
modestie si douce et si charmante, que je ne pus m’empêcher de faire, en sortant, mille réflexions sur
le caractère incompréhensible des femmes. »
- Image double de Manon dans l’esprit de DG, après la première tromperie : « Il est certain que je ne
l’estimais plus : comment aurais-je estimé la plus volage et la plus perfide de toutes les créatures  ?
Mais son image, les traits charmants que je portais au fond du cœur, y subsistaient toujours. » (44)
« Tous mes sentiments n’étaient qu’une alternative perpétuelle de haine et d’amour, d’espérance ou
de désespoir. » (45)

- FIDÈLE ET INFIDÈLE, AMOUREUSE ET LIBERTINE : Une femme qui trahit une première fois, et qui
déclare sa flamme à DG à Saint-Sulpice : « Je prétends mourir, répondit-elle, si vous ne me rendez
votre cœur. » (52)/ « au milieu même des plaisirs qu’il lui procurait sans cesse (M. de B…), elle portait
au fond du cœur le souvenir de mon amour et les remords de son infidélité. »
- Manon est capable de duplicité, de trahison, d’infidélité, mais aussi de noblesse et de sacrifices au
nom de son amour : elle finit par « sacrifier » (55) tous ces amants : M. de B…, le prince… Mais là
aussi, c’est toujours avec ambiguïté : elle laisse les meubles, mais emporte les bijoux et 60000 francs
de M. de B… ! / De même avec M. de G… M… : Manon demande au chevalier : « Laissez-moi
seulement le temps (…) de recevoir ses présents. » (84)
- DG est peu à peu lucide sur la dualité de Manon et son goût pour le luxe, comme il l’avoue après
l’incendie de Chaillot : « quelque fidèle et quelque attachée qu’elle me fût dans la bonne fortune, il ne
fallait pas compter sur elle dans la misère. » (59) « Elle aimait trop l’abondance et les plaisirs pour me
les sacrifier. » ; à propos du jeune G… M… : « Elle ne pouvait supporter le nom de la pauvreté. » (132)
- Toute la dualité de Manon est résumée dans cette formule de DG : « Elle pèche sans malice. » (151).
Manon avoue toutes ses fautes, mais avec « ingénuité ». « Elle est légère et imprudente ; mais elle
est droite et sévère. » (151)

3. Un personnage dont les actions sont difficiles à suivre.

- Pourquoi tant de trahisons ? Premier épisode, première trahison : avec M. de B…


Le fait que Manon rende visite au chevalier à Saint-Sulpice : « ne pouvant conjecturer quel était le
dessein de cette visite. » (51)
La deuxième trahison de Manon, avec M. de G… M… (75), inspirée par son frère.
La troisième supposée relation de Manon, qui n’en est pas une, avec un Prince italien : 124, 125
- L’épisode des cheveux de DG et du Prince italien : DG vit cet épisode en « spectateur », sans rien
comprendre des intentions de Manon, qui manipule tous les personnages de cette saynète  :
« L’indignation et la surprise me lièrent la langue. » ; le prince lui aussi est stupéfait, quand Manon
saisit une mèche de cheveux de DG pour lui déclarer son amour et blesser le prince («  Tous les prince
d’Italie ne valent pas un des cheveux que je tiens ») : « un spectacle qui ne dut pas lui causer peu
d’étonnement. » (128) ; « pendant cette folle harangue, qu’elle avait apparemment méditée… » (129)
- Avec le jeune G… M… : « je m’aperçus de l’impression que les charmes de Manon faisaient sur lui. »
(131) ; se met en place un jeu dangereux qui très vite échappe à DG. Pourtant, jusqu’au dernier
moment, elle continue de clamer sa fidélité : « Elle me protesta que son cœur était à moi pour
toujours. » (135) 
- Le projet échafaudé entre DG et Manon et qui doit être mis à exécution à la Comédie (DG parle tout
de même de « dessein extravagant », de « folle imprudence », 137) Puis… Manon s’enfuit !
- C’est avec le jeune G… M… que l’aspect insaisissable de Manon apparaît le plus  : elle abandonne de
façon brutale DG, le trompe de façon assumée, ET, comble de bassesse, croit qu’une jeune
prostituée pourra la remplacer : « elle avait trouvé le moyen de me procurer une des plus jolies filles
de Paris, qui serait porteuse de son billet. Signé, votre fidèle amante, MANON LESCAUT. » Cette
signature n’est-elle pas le comble du cynisme ? (139) ; DG parle plus loin de « cette bizarrerie, de
m’avoir envoyé une si jolie fille pour me consoler » (142), mais DG affirme cependant que cela ne
l’étonne pas venant d’elle : « j’aurais parié qu’elle était de son invention » ; il y voit paradoxalement
une preuve d’amour : « C’était l’effet de sa compassion pour elle (mes peines). » (142)
- Une femme qui est l’allégorie de l’infidélité, de l’inconstante, et donc difficile ou même impossible à
cerner : « Inconstante Manon, repris-je encore, fille ingrate et sans foi, où sont vos promesses et vos
serments ? » (145) « Amante mille fois volage et cruelle, qu’as-tu fait de cet amour que tu me jurais
encore aujourd’hui ? »
- De façon énigmatique, Manon prend autant de plaisir à tromper DG avec le jeune G… M… que de
tromper ce dernier avec DG : « Elle ne trouvait rien de si joli que ce projet. Vous aurez son couvert à
souper (…) vous coucherez dans ses draps, et demain de grand matin vous enlèverez sa maîtresse et
son argent. Vous serez bien vengé du père et du fils. » (152)

4. Manon est un personnage qui évolue au fil du roman, qui change, ce qui la
rend d’autant plus difficile à saisir.

- L’image de Manon ne tarde pas à se troubler, voire à s’inverser : « Terrible changement ! Ce qui fait
mon désespoir a pu faire ma félicité. » (33)
- Différentes trahisons de Manon.
- Un tout autre visage de Manon est donné lors de sa déportation : « Mais figurez-vous ma pauvre
maîtresse enchaînée par le milieu du corps, assise sur quelques poignées de paille, la tête appuyée
languissamment sur un côté de la voiture, le visage pâle et mouillé d’un ruisseau de larmes qui se
faisaient au travers de ses paupières, quoiqu’elle eût continuellement les yeux fermés. » (179) (…)
« Son linge était sale et dérangé, ses mains délicates à l’injure de l’air. » ; dégradation physique de
Manon : « cette figure capable de ramener l’univers à l’idolâtrie, paraissait dans un désordre et un
abattement inexprimables. » (179) ; Manon « retenue par sa chaîne » ; « elle était si languissante et
affaiblie, qu’elle fut longtemps sans pouvoir se servir de sa langue, ni remuer ses mains. Je les
mouillais pendant ce temps-là de mes pleurs. » (179) ; « cette pauvre fille » (180)
- L’image de Manon change radicalement après la déportation et en Amérique : son attachement au
luxe et aux biens matériels semble avoir disparu, comme lorsqu’ils découvrent la « misérable cabane,
composée de planches et de boue » (185) qu’ils vont habiter en Amérique : Le narrateur nous dit que
« Manon parut effrayée à la vue d’une si triste demeure », mais c’est pour préciser : « C’était pour moi
qu’elle s’affligeait, beaucoup plus que pour elle-même », « elle ne considérait dans nos malheurs
communs que ce que j’avais à souffrir. » (186) Une Manon sur la voie de la rédemption, du salut,
détachée des biens matériels et tournée vers autrui ? Déclaration d’amour de Manon : « il est
impossible aussi d’être aimé plus tendrement que nous l’êtes. » et LA phrase clé de cette fin de
roman : Mais vous ne sauriez croire combien je suis CHANGÉE ». La clé du roman serait-elle dans ce
renoncement si moral à tous les biens matériels ? « Je me couchai avec ces charmantes idées, qui
changèrent ma cabane en un palais digne du premier roi du monde. » (187) ; « L’Amérique me parut
un lieu de délices après cela. » ; « C’est ici qu’on s’aime sans intérêt, sans jalousie, sans inconstance. »
(187) « Nos compatriotes y viennent chercher de l’or ; ils ne s’imaginent pas que nous y avons trouvé
des trésors bien plus estimables. » ; les deux héros sur la voie de l’édification : DG travaille (un comble
pour un aristocrate !) : « J’étais réglé dans ma conduite. Manon ne l’était pas moins. » ; ils vivent en
bonne intelligence avec leurs voisins, sont estimés de la colonie, reviennent à « des idées de religion »
(188) (« Manon n’avait jamais été une fille impie » lit-on !). Des héros plus matures : « L’amour et la
jeunesse avaient causé tous nos désordres. » ; il est question désormais d’ « amour vertueux » et ils
aspirent alors au mariage.
- Toutefois, PRÉVOST « refuse » cette fin trop édifiante et un ultime coup du destin nous replonge
dans l’énigme de Manon. La demande en mariage de DG ne trouve pas, contre toute attente, un écho
favorable, et surgit, in extremis, un nouveau prétendant en la personne de son neveu Synnelet. (190)  ;
« les occasions sans nombre qu’il avait eues de la voir (Manon) (…) avaient tellement enflammé sa
passion, qu’il se consumait en secret pour elle. » ; l’argent et ses nécessités se rappellent cruellement
à eux : « Il eût fallu de l’argent ; j’étais pauvre. » (191)
- Une fin sublime ET sordide : la mort de Manon. C’est d’abord l’image d’une Manon maternelle que
nous découvrons, changeant le linge de la blessure de DG : Une image christique. « Je reçus ses soins
en silence et avec honte. » (196) ; de son côté, le chevalier veille sur elle : « J’échauffai ses mains par
mes baisers. ». Le récit de la mort de Manon touche au sublime par la sobriété du récit tragique  : « Je
la perdis ; je reçus d’elle des marques d’amour, au moment même qu’elle expirait.  » (197) ; puis c’est
la mise en terre de Manon. « J’y plaçai l’idole de mon cœur. »
- Par une dernière ironie (tragique) du sort, la mort de Manon est finalement absurde, puisque Synnelet
n’est pas mort. La fuite n’était donc pas nécessaire. Est-ce là une façon de «  punir », à la façon d’une
punition divine, Manon ? Mais pourquoi la punir au moment où elle se convertit ? En réalité, sa mort,
loin de « résoudre » le personnage, comme cela pourrait être le cas dans une tragédie classique, ne
fait que renforcer son mystère absolu !
III. Un personnage qui échappe à toute tentative de possession, une femme qui
incarne la liberté.

1. Un personnage qui ne cesse de fuir.

- Première rencontre du narrateur avec elle : « pour dérober son visage aux yeux des spectateurs. » ;
« l’effort qu’elle faisait pour se cacher. » (p.16) ; l’archer dit au narrateur : « Je l’ai interrogée
plusieurs fois sur la route ; elle s’obstine à ne me rien répondre. » (17)
- Un personnage qui semble se dérober sans cesse au mariage, dès les premiers jours ou semaines de
leur rencontre. La raison en est toujours assez mystérieuse, le mariage résoudrait pourtant toutes
leurs difficultés ! Jusqu’en Amérique, la perspective du mariage échoue. La première fois que DG lui
soumet cette proposition, « Manon la reçut froidement. » (34)
- Un personnage incapable de s’en tenir à des résolutions, comme lors de leur installation à Chaillot :
« Mais nos résolutions ne durèrent guère plus d’un mois. Manon était passionnée pour le plaisir. »
(57)
- Manon se dérobe à DG lors de sa première trahison, avec M. de B., en faisant attendre DG alors
qu’elle est avec son amant ; lors de sa deuxième trahison, avec M. de G… M… ; elle reste enfermée
dans son appartement et s’enfuit le lendemain matin, avant le réveil de DG (75) ; « Je ne parle point à
présent des alarmes où votre fuite imprévue m’a jeté, ni de la cruauté que vous avez eue de
m’abandonner sans un mot de consolation. » (83)
- Il y a en Manon quelque chose d’inaccessible, une sorte d’ennui profond et existentiel, qui fait de
toute sa vie une sorte de divertissement, qui explique son appétit insatiable de plaisirs. Qqc de très
moderne dans ce personnage désenchanté, un aspect que personne ne peut comprendre, pas même
elle peut-être, un aspect que DG ne fait qu’entrevoir : « Manon trouva des ressources contre l’ennui. »
(124)
- La fuite rocambolesque et imprévisible (pour le lecteur aussi ?) de Manon avec le jeune G… M…, lors
de la soirée à la Comédie !
- Même lorsque Manon s’est « convertie » à une vie réglée en Amérique et que DG lui propose le
mariage, sa réponse ne va pas sans ambiguïté : « J’y ai pensé mille fois depuis que nous sommes en
Amérique. La crainte de vous déplaire m’a fait renfermer ce désir dans mon cœur. Je n’ai point la
présomption d’aspirer à la qualité de votre épouse. » (189)

2. Un personnage qui aspire à la liberté, ne se laisse enfermer par personne, y


compris DG.

- Manon est essentiellement une femme libre, ou en tout cas qui aspire à la liberté, en un siècle où
cette dernière est interdite aux femmes. Tous les hommes, DG compris, tentent de la posséder, de la
faire leur, mais Manon résiste : « Je la tiens du moins, disais-je, elle m’aime, elle est à moi. »,
« Tiberge a beau dire, ce n’est pas là un fantôme de bonheur », pense DG dans le carrosse, après
l’évasion de l’Hôpital. (115) // avec l’héroïne de l’Histoire d’une Grecque moderne, Cléophée,
prisonnière d’un sérail, délivrée, libérée par le narrateur, mais lui échappant également pour ne pas
retomber dans un nouveau sérail. En tout libérateur sommeille un geôlier, finalement : libérer
Manon, c’est en même la faire sienne pour DG ! Tous veulent « posséder » Manon, comme ils
possèdent de l’argent, des bijoux, des hôtels particuliers : « G… M… était plus fin que son père ; il
voulait tenir sa proie avant que de compter ses espèces. » (136)

3. Un personnage qui renvoie DG à sa propre complexité, le pousse à


s’interroger sur lui-même, comme c’est le cas aussi pour le lecteur.

- Ce personnage évolue aussi, devient de plus en plus complexe et riche au fur et à mesure du récit :
jeune homme naïf et crédule, il se confronte aux épreuves de la passion et de la vie : « Mais je ne me
formais point des idées romanesques par rapport aux besoins communs de la vie. J’avais éprouvé trop
souvent qu’il y a des nécessités insupportables, surtout pour une fille délicate qui est accoutumée à
une vie commode et abondante. » (181)
DG devient lui aussi, à la faveur de la passion amoureuse et de son destin tragique un personnage
ambivalent et complexe, comme il le suggère lui-même à son interlocuteur : « je suis sûr qu’en me
condamnant, vous ne pourrez pas vous empêcher de me plaindre. » (24)
- DG s’interroge à maintes reprises sur la violence de sa passion, qui le fait renoncer à tout : à
l’honneur, à la carrière ecclésiastique, à son père…. « J’ai pris le parti de la suivre, dût-elle aller au bout
du monde. » (18)
- DG, un personnage que la passion métamorphose et rend insondable : sa jeunesse brillante est
marquée par « une aversion naturelle pour le vice. » (24) ; aux antipodes de ce qu’il sera à la fin du
roman. « Ma naissance, le succès de mes études et quelques agréments extérieurs m’avaient fait
connaître et estimer de tous les honnêtes gens de la ville. » ; (à propos de Tiberge) : « si j’avais du
moins profité de ses reproches dans le précipice où mes passions m’ont entraîné, j’aurais sauvé
quelque chose du naufrage de ma fortune et de ma réputation. » (25) ; de même DG dit : « Mon cœur
s’ouvrit à mille sentiments de plaisir, dont je n’avais jamais eu l’idée. » (28)
- Manon entraîne DG dans l’univers du mensonge, de secret : lors de la rencontre avec Tiberge à
Amiens, le narrateur évoque « (son) secret ». 31 ; pour la première fois, DG trompe son ami en
prenant la fuite alors qu’il avait donné rendez-vous à son ami pour lui présenter Manon.
- DG ne cesse de déplorer son malheur qui l’a mené à l’abyme, ET de clamer son amour , ce qui rend
son récit ambigu. Quel regard porte-t-il sur son destin ? Regrette-t-il ? « J’avais marqué le temps de
mon départ d’Amiens. Hélas ! Que ne le marquais-je un jour plus tôt ! » (25)
- Le père ne comprend plus son fils et attribue tout ce qu’il vit à « un penchant général pour les
femmes. » : « Tu aimes les jolies femmes. » (44)
- DG devient une énigme à lui-même : après la première trahison de Manon, il rêve de solitude, d’une
« maison écartée », de renoncer au monde, de carrière ecclésiastique, « mais je sentais que mon cœur
attendait encore quelque chose ; et que pour n’avoir rien à désirer dans la plus charmante solitude, il
fallait être avec Manon. » (48)
- Autre élément énigmatique dans le comportement de DG, la rapidité avec laquelle il renonce à sa
« conversion » lorsqu’il revoit Manon. Un tel revirement est totalement incompréhensible pour un
Tiberge, qui est un personnage univoque, comme l’allégorie de la piété et du renoncement au monde.
À l’inverse, DG est un personnage qui peu à peu révèle toute sa complexité, un personnage « difficile à
cerner », ce qui fait toute sa richesse. « Je suis effrayé de la facilité avec laquelle j’ai pu les rompre »
(les passions qui l’ont conduit à Saint-Sulpice). « Je me croyais absolument délivré des faiblesses de
l’amour. (…) Cependant un instant malheureux me fit retomber dans le précipice. » (50)
- DG effrayé de ses propres revirements, à Saint-Sulpice, lorsqu’il retombe immédiatement dans les
bras de Manon : « J’en étais épouvanté. Je frémissais, comme il arrive lorsqu’on se trouve la nuit dans
une campagne écartée : on se croit transporté dans un nouvel ordre des choses ; on y est saisi d’une
horreur secrète. » (52)
- Ce qui rend DG insaisissable, c’est qu’il court à sa perte en toute conscience, sans pouvoir résister :
« Je vais perdre ma fortune et ma réputation pour toi, je le prévois bien ; je lis ma destinée dans tes
beaux yeux. » ; « La vue de Manon m’aurait fait précipiter du ciel. » (67) / Après l’épisode de la lettre :
« Par quelle fatalité, disais-je, suis-je devenu si criminel ? » (81) / « Mais j’étais né pour les courtes
joies et les longues douleurs. » (84) / « Je me croyais si heureux, avec l’amitié de M. de T… et la
tendresse de Manon, qu’on n’aurait pu me faire comprendre que j’eusse à craindre quelque nouveau
malheur. » (130) / (lors de la déportation de Manon) « Adieu, je vais aider mon nouveau sort à
consommer ma ruine, en y courant moi-même volontairement. » (177) ; « asservi fatalement à une
passion que ne pouvais vaincre. » (189)
- DG toujours étonné de la violence que produit la passion en lui, comme après la lecture de la lettre
de Manon : « j’ignore encore aujourd’hui par quelle espèce de sentiments je fus alors agité. Ce fut une
de ces situations uniques auxquelles on n’a rien éprouvé qui soit semblable. » (76) ; Cela « ne peut
même être rapproché d’aucun sentiment connu. » / À l’entrée à Saint-Lazare, après leur arrestation :
« la passion dominante de mon âme était la honte et la confusion.  » (90) / « J’étais disposé à la suivre
jusqu’à l’extrémité du monde, pour prendre soin d’elle. » (180)
- La violence de DG étonne aussi lorsque DG se jette furieusement sur M. de G… M… à Saint-Lazare :
« Je l’étranglais » (93) ; « Je fis des choses si étonnantes que tous les assistants, qui en ignoraient la
cause, se regardaient les uns les autres avec autant de frayeur que de surprise. » (94) ; sa violence
étonne aussi le Supérieur lors de son évasion de Saint-Lazare : Ah ! Mon fils ! Qui l’aurait cru ? » (104) ;
coup de pistolet au garde, qui est tué par DG. / Nouvel accès de violence à l’égard du vieux G… M…
quand il vient l’arrêter pour retrouver son fils : « je le ferai étrangler avant qu’il soit demain » ; « Ce
vieux monstre d’incontinence voulut prendre quelques familiarités avec elle. Garde-toi de la toucher !
m’écriai-je. » / Après l’échec de toutes les tentatives de DG auprès de son père et du jeune G… M…  :
« il ne me restait donc que la voie de la violence. » (173) / le duel avec Synnelet.
- On note de grands moments d’interrogation intérieure du chevalier : après la première trahison de
Manon, puis après la lettre de Manon.
Après la lettre et son entrevue avec le frère de Manon : « je me trouvai dans un partage de
sentiments, et par conséquent dans une incertitude si difficile à terminer, que je demeurai longtemps
sans répondre à quantité de questions que Lescaut me faisait l’une sur l’autre. » (81) ; s’ensuivent
toutes sortes de questions : « Qui m’empêchait de vivre tranquille et vertueux avec Manon ? Pourquoi
ne l’épousai-je point avant que d’obtenir rien de son amour ? » (81)
On retrouve ce « partage de sentiments » lorsqu’il retrouve Manon : « Je ne pus m’empêcher de
laisser échapper les noms de perfide et d’infidèle, que j’accompagnai d’autant de soupirs. » (83)
Après l’épisode de l’évasion, DG va à Paris et cherche un moyen de refaire sa fortune : « j’entrai dans
une mer de raisonnements et de réflexions. » (117)
Après la révélation du valet à propos du Prince italien : « cruels doutes » (125)
Après la trahison de Manon avec le jeune G… M… : « à force de me tourmenter, mes transports
diminuèrent assez pour faire place à quelques réflexions. » (141)
Après l’épisode Synnelet : « Je roulais toutes ces pensées dans ma tête. » (191) ; « après une infinité
de réflexions » (192)
- Ce qu’apprend peut-être DG, grâce à Manon et des épreuves qu’il traverse, c’est la liberté , en ce
siècle des Lumières où cette idée devient si importante. Ainsi, lorsqu’il se promène à pied dans Paris,
DG dit : « Je me fis un plaisir de marcher fièrement à pied en allant chez M. de T… Je trouvais de la joie
dans cet exercice de ma liberté. » (120) : se libérer de la tutelle paternelle (il lui dit « un éternel
adieu », « adieu, père barbare et dénaturé », 173), de l’Église, de la morale austère que porte son ami
Tiberge… ; seule obsession de DG quand surgit le vieux G… M… : « si vous me faites la grâce de nous
accorder la liberté. » (159) ; « Je m’occupai aussitôt des moyens de hâter ma liberté. » (161) ; cette
liberté devient le sens de sa vie, lorsqu’il s’agit de délivrer Manon (de l’Hôpital) : « Manon avait besoin
de ma vie pour la délivrer, pour la secourir, pour la venger. » (167)
En ce sens, l’Amérique, « Nouveau monde », est l’écrin parfait pour deux amants en quête de liberté :
« Si les relations qu’on en fait sont fidèles, ils suivent les lois de la nature. » ; « ils ne troubleront point
deux amants qu’ils verront vivre avec autant de simplicité qu’eux. » (181) / Quête du bonheur !
- Finalement, Manon et DG partagent les mêmes contradictions, les mêmes paradoxes, ils sont tous
deux des êtres à la fois supérieurs et maudits, c’est en tout cas ce que pense DG : « Nous avons reçu
de l’esprit, du goût, des sentiments. Hélas ! Quel triste usage en faisons-nous, tandis que tant d’âmes
basses et dignes de notre sort jouissent de toutes les faveurs de la fortune ! » (160)

CONCLUSION :
Manon, un personnage verrouillé !
À chaque lecteur « sa » Manon finalement, c’est ce qui fait la grande richesse de ce
personnage. Percer le mystère de Manon est ce qui fait tout le PLAISIR et la RICHESSE de la
lecture de ce roman !
Élargissement : la passion des Romantiques pour Manon et tous ses mystères : voir le
poème de MUSSET (Manon comparée au « Sphinx », à une « Cléopâtre en paniers » !.... / Le
roman explorant la complexité de l’âme humaine : voir L’Étranger de CAMUS, paru en 1942:
Les motivations de Meursault, qui tue « un Arabe », restent totalement obscures lors de son
procès, tout comme son insensibilité lors de la mort de sa mère (voir le titre du roman).

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