Rene Descartes Bibliographie Chronologiq
Rene Descartes Bibliographie Chronologiq
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INTRODUCTION
Cette bibliographie des œuvres de Descartes en ordre chronologique tient compte aussi des
publications non comprises dans l'édition Adam-Tannery; dans les citations l'orthographe, qu'à la fin
du XVIIe siècle n'était pas encore totalement fixée, est modernisée; pour chaque texte je donne la
référence aux suivant éditions:
B Op. II = Giulia Belgioioso (éd.), René Descartes, Opere postume 1650-2009, con
la collaborazione di I. Agostini, F. Marrone, M. Savini, Testo francese e latino a
fronte, Milano: Bompiani, 2009.
CO = Vincent Carraud, Gilles Olivo (éds.), René Descartes, Étude du bon sens, La
recherche de la vérité et autres écrits de jeunesse (1616-1631), Paris: Presses
Universitaires de France 2013.
Pour la Correspondance, je donne les réfèrences aux éditions Adam-Tannery (AT, volume et pages),
Armogathe (O VIII, 1 et 2, volume et pages), Belgioioso (B, et le nombre de la lettre).
Pour la liste des éditions de références et des abréviations voir René Descartes. Outils de recherche:
Biographies, Dictionnaires et Lexiques des Ses Œuvres
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BIBLIOGRAPHIE
1. Armogathe, Jean Robert, Carraud, Vincent, and Feenstra, Robert. 1616. "La Licence
en droit de Descartes : un placard inédit de 1616." Nouvelles de la République des
Lettres no. 2 (1988):123-145.
Retrouvée en 1981 à Poitiers, manque dans AT.
Édition critique du texte latin (pp. 125-131) avec la traduction en français, (pp.
131-133) de la thèse en droit soutenue à Poitiers le 21 décembre 1616.
Première édition : Jean-Robert Armogathe et Vincent Carraud, "Texte original et
traduction française d'un inédit de Descartes: Dédicace du placard de la licence en
droit", Archives de Philosophie, 50, 1987, Bulletin Cartésien XV, pp. 1-4.
Texte latin et traduction française, CO, pp. 21-29; texte latin et traduction italienne,
B Op. II, 1454-1461; nouvelle traduction par Jean-Marie Beyssade et Michelle
Beyssade avec la collaboration d'André Laingui, O I, 46-49.
Traduction anglaise dans : Kurt Smith, "Descartes' Life and Works", The Stanford
Encyclopedia of Philosophy, Edward N. Zalta (ed.), (URL =
plato.stanford.edu/entries/descartes-works/).
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"Les écrits authentiques du jeune Descartes sont rares : la lettre d'un jeune Descartes,
«collégien à La Flèche», devant être attribuée à son frère Pierre, les premiers textes
repérés remontent aux manuscrits décrits dans l'inventaire de Stockholm; ils ne nous
sont parvenus que par les extraits traduits par A. Baillet dans sa Vie ou dans les
textes, aujourd'hui perdus, publiés et traduits par Foucher de Careil.
Le document que nous présentons est donc important à double titre: par les
renseignements biographiques nouveaux fournis sur une période encore mal connue
de la vie de René Descartes, d'une part; par le texte lui-même, d'autre part. Nettement
plus longue que les dédicaces habituelles des placards de thèses, la dédicace de 1616
se présente comme une autobiographie intellectuelle, et même comme une «histoire
de [mon] esprit» (pour reprendre, en anticipant, l'expression de Guez de Balzac):
c'est ce qui nous a autorisé, dans l'annotation, à citer fréquemment la première partie
du Discours de la Méthode. « Le philosophe qui dit 'je' » est d'abord celui qui
«représente sa vie» et écrit l'histoire de ses études jusqu'à ce qu'il fût «reçu au rang
des doctes», l'histoire de son esprit. De cette dédicace, Descartes aurait déjà pu dire :
«ne proposant cet écrit que comme une histoire»." (p. 123).
2. Descartes, René. 1618-19?; 1628? L'art de l'escrime (Extraits de Baillet).
Baillet I 35, II 407; AT X, 535-538; B Op. II, 916-917.
"Descartes passa l’hiver de la fin de 1612 et du commencement de 1613 dans la ville
de Rennes, à revoir sa famille, à monter à cheval, à faire des armes, et aux autres
exercices convenables à sa condition. On peut juger par son petit traité d'Escrime s’il
y perdit entièrement son temps." Baillet I, VIII, 35.
"Nous trouvons aussi parmi les manuscrits de M. Descartes un petit traité touchant la
manière de faire des armes sous le titre de l'Art d'escrime, où il paraît que la plupart
des leçons qu’il y donne sont appuyées sur sa propre expérience. Après avoir dit
quelque chose en général de la qualité de l'épée et de la manière de s’en servir, il
divise son traité en deux parties.
Dans la première il fait « voir comme on peut s’assurer contre tous les efforts de
l’adversaire, et en tirer de l'avantage pendant qu’on est en mesure longue, et comme
on peut le mettre sûrement en mesure courte ». Dans la seconde il examine comment
étant entré en mesure courte, on peut infailliblement vaincre. Et pour cela il suppose
deux hommes d'égale grandeur, d’égale force, et d’armes égales, se réservant à
marquer ensuite ce qu’il y a à faire en cas d’inégalité."
Baillet II, XX, 407 ; Abrégé 23 et 326.
Selon Paul Adam la date de composition de ce petit traité (aujourd'hui perdu) serait
le 1628 ; selon Carraud et Olivo, 1618-1619 (CO, pp. 35-36) .
3. Beeckman, Isaac. 1618-19. Extraits du Journal tenu par Isaac Beeckman.
Le Journal tenu par Isaac Beeckman de 1604 à 1634, (abrégé CDW) a été publié en
quatre volumes par Cornelis de Waard, La Haye: Martinus Nijhoff, 1939-1953.
Texte latin AT X : I. Varia, 44-66; B Op. II, 1316-1335; II. Physico-mathematica,
67-78; B Op. II, 1336-1351; traduction par Frédéric de Buzon, O I, Notes du Journal
(1618-1619), 85-97; Opuscules de Descartes insérés dans le Journal de Beeckman
98-106.
AT X, I. Varia : Angulum nullum esse male probavit Des Cartes 46 ; II. Turbo
puerorum, id est een worptop, cur erectus flet, cùm vertitur 51 ; III. Chordae majores
intactas minores et consonantes tactae movent 52 ; IV. Physico-mathematici
paucissimi 52 ; V. Fistula fortius inflata cur in octavam abeat 53 ; VI. Testudinis (een
lute) chordas disponere 53 ; VII. Quartâ à consonante chorda remota non tremit. —
Quarta à quintâ dignoscere 54 ; VIII. Quadratum radici aequale datum 54 ; IX. Mr.
Duperon 56 ; X. Bisectio in musicis facillima et gratissima 56 ; XI. Lapis cadens in
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vacuo cur semper celerius cadat 58 ; XI bis. Lapidis cadentis tempus supputatum 58 ;
XII. Modi non dulces et iclus testimonio probati 61 ; XIII. Modi modorum
argumento probati 62 ; XIV. Modi modorum ab objeftione defensi 63 ; XV. Ars Lulli
cum Logicâ collata 63-66.
AT X, II. Physico-mathematica : I. Aquae comprimentis in vase ratio reddita à D.
Des Cartes 67 ; II. Lapis in vacuo versus terrae centrum cadens quantum singulis
momentis motu crescat, ratio Des Cartes 72-74.
"Une des découvertes les plus importantes pour la compréhension de l'évolution de
la pensée cartésienne fut celle du Journal tenu par Isaac Beeckman de 1604 jusqu'à
sa mort, survenue le 19 mai 1637 (*). C. de Waard retrouva ce manuscrit à la
bibliothèque de Middelburg en juin 1905; immédiatement avisé, Ch. Adam en tint
compte dans le tome X des Œuvres de Descartes. Cela suppose une grande rapidité
de travail : le tome X parut en 1908, mais l'Avertissement d'Adam est daté du 15
décembre 1905. D'autres fragments du Journal, beeckmaniens cette fois, paraissent
dans l'édition que le même C. de Waard donne de la Correspondance de M.
Mersenne à partir de 1933. On peut remarquer qu'à mesure que les textes de
Beeckman sont connus, se modifie favorablement l'image de leur auteur ; il est vrai
qu'elle était d'assez mauvaise qualité au rapport de certaines lettres de Descartes, et
surtout de Baillet. Un témoin de cette évolution est A. Koyré, qui écrivait en 1939
dans les Études Galiléennes, p. 108-9 que « la publication par M. Cornelis de Waard
de nouveaux fragments du Journal de Beeckman (...) a modifié sensiblement l'image
que l'on se faisait, ou plus exactement que l'on ne se faisait pas du Physicien
hollandais. En effet, Beeckman, on s'en rend compte maintenant, mérite pleinement
l'appellation de vir ingeniosissimus dont l'avait gratifié Descartes ; et, ce qui plus est,
il nous apparaît désormais comme un chaînon de première importance dans l'histoire
de l'évolution des idées scientifiques ; enfin, son influence sur Descartes semble
avoir été beaucoup plus profonde que l'on n'a pu le supposer jusqu'ici (...). » A
fortiori, cette image s'améliore encore davantage grâce à la publication de la quasi
intégralité du Journal par, encore et toujours, C. de Waard. Les quatre tomes de cette
édition paraissent à La Haye entre 1939 et 1953 ; ils renferment avec l'indication du
foliotage l'essentiel des notes scientifiques, à l'exception très notable de la copie que
Beeckman fit faire du Compendium Musicae vers 1628, de quelques notes d'intérêt
divers: détails familiaux, observations météorologiques, informations maritimes etc.
(...)
Le Journal est décrit avec une grande exactitude dans le premier tome de l'édition,
pp. XXV-XXXIV ; il se compose d'environ cinq cents feuilles contenant de brèves
notes de lecture, de pensées propres, et de remarques concernant les rencontres que
faisait Beeckman. Les notes relatives à Descartes ont en premier attiré l'attention, et
ceci justement. L'intérêt des renseignements fournis par Beeckman est en effet
capital. Les textes cartésiens consignés sont les premiers que nous connaissons, et il
apparaît invraisemblable que l'on en découvre d'antérieurs. D'autre part, ils occupent
une position critique dans la vie du philosophe ; ils terminent les années d'étude, et
débutent une production propre. Descartes rencontra Beeckman (1) le 10 novembre
1618 à Breda. Très rapidement une estime mutuelle s'installe : « Ce Poitevin a
fréquenté beaucoup de Jésuites et autres hommes de science. Il dit cependant n'avoir
jamais rencontré personne, à part moi, qui use, ce dont je me réjouis, de ce mode
d'étude, et joigne exactement la physique avec la mathématique. Et moi, je n'ai
jamais parlé qu'à lui de ce mode d'étude (2) ». A de nombreuses reprises les suites de
cette rencontre ont été décrites (3); en particulier, les commentateurs mettent en
relation les fragments cartésiens du Journal avec les Cogitationes Privatae. C'est le
cas de l'ensemble des Premières Pensées de Descartes, que M. H. Gouhier publia en
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1958 (Paris, Vrin). D'une façon générale, on peut dire cependant que les historiens
des sciences ont fait porter l'accent sur des problèmes « nobles » tels celui de la chute
des graves; en revanche, sauf exceptions, ont été négligés les problèmes relatifs à
l'acoustique, que nous voudrions décrire avec quelques détails." (pp. 1-3; Frédéric de
Buzon, Descartes, Beeckman et l'acoustique, Archives de philosophie, 44, 1981, pp.
1-8).
(1) La rencontre est racontée par Lipstorp puis Baillet, cités dans A-T, X, p. 47-51.
Voir G. Rodis-Lewis, L'œuvre de Descartes, Paris, Vrin 1971, p. 25 et note p. 435.
(2) Nous reprenons la traduction de Mme Rodis-Lewis (op. cit., p. 26) en
rétablissant, contre une suggestion d'A-T X, p. 52, le texte original: le g de gaudeo
est parfaitement lisible sur le ms.
(3) Voir les notes bibliographiques de Mme Rodis-Lewis, op. cit., et C. L. Thiss-
Schoute, Nederlands cartesianisme, Amsterdam 1954, pp. 557-560.
(*) [Beeckman était né le 10 décembre 1588]
"Examinons, dans cette masse énorme de documents, ceux qui se rapportent sans
conteste à Descartes, puisqu'il y est nommé. Ils se trouvent en quatre endroits
différents :
[1618-1619]
1. — Fol. 97 verso, à fol. 1 18.
2. — Fol. 160 recto, à fol. 178 verso.
3. — Fol. 287 verso, à fol. 290 verso.
[1628-1629]
4. — Fol. 333 recto, a fol. 334 recto, 1. 34. — Fol. 338 recto, 1. 9, à fol. 340 recto, 1.
24. — Fol. 341 verso, 1. i6-3o. — Fol.* 352 recto, 1. 8-24." (Charles Adam, AT X,
Avertissement, p. 22).
4. Descartes, René. 1618. Musicae Compendium.
AT X, 89-141; B Op. II, 30-105; traduction française par Frédéric de Buzon, O I,
149-189.
Le manuscrit original est perdu ; première édition posthume: Musicae compendium,
Trajecti ad Rhenum: Gisberti a Zyll & Theodori ab Ackersdijck, 1650.
Traduction française sur le manuscrit originel par Nicolas-Joseph Poisson
(1637-1710) publiée dans : Traité de la mechanique composé par Monsieur
Descartes. De plus l’abrégé de musique du mesme autheur mis en françois. Avec les
éclaircissemens nécessaires (l'Abrégé est à pp. 53-98 ; les Elucidationes physicae in
Cartesii musicam de N.-J. Poisson à pp. 101-127), Paris, 1668 (reprint: Abrégé de
musique, suivi des Eclaircissements physiques sur la musique de Descartes, Paris,
Méridiens Klincksieck, 1990, introduction et notes par Pascal Dumont, préface de
Joseph-François Kremer).
Édition critique avec traduction, présentation (pp. 5-49) et notes par Frédéric de
Buzon, Abrégé de Musique. Compendium Musicae, Paris: Presses Universitaires de
France, 1987.
C'est la première œuvre de Descartes, rédigée du 10 novembre au 31 décembre 1618
pour son ami Isaac Beeckman.
Le Journal de Beeckman contient "la copie du Compendium Musicae que Descartes,
à Bréda, remit à Beeckman pour ses étrennes de 1619. Celui-ci le confia en 1627 au
copiste qui écrivait en gothique et qui copia encore d'autres documents de la même
époque (...). Lorsque Beeckman fit relier ses papiers en 1628, cet écrit et ceux du
même lot devaient interrompre l'ordre chronologique des notes. Beeckman restitua
l'original à Descartes en 1629. Depuis lors divers savants hollandais en prirent des
copies : Constantin Huygens en 1637 et Van Schooten vers 1640, dont les
exemplaires sont conservés respectivement à la Bibliothèque de l'Université de
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laquelle on considère que quelque sujet est mesurable » (46), ou bien une nature
simple. Autre nature simple, le temps, et ses divisions qui correspondent aux
passions du corps ; l'Abrégé ainsi se borne à étudier les paramètres par lesquels la
musique est mesurable, en négligeant les qualités (timbres, nuance forte / piano,
etc.), laissés aux physiciens (47).
Enfin il est remarquable que Descartes réduise la connaissance de la nature réelle du
son et de sa perception par l'oreille au minimum nécessaire à une théorie de l'art. Il y
a d'ailleurs une continuité au plan même des exemples avec les textes ultérieurs ; la
Règle XIII évoque la question discutée vers 1628 par Mersenne et Beeckman relative
aux cordes de grosseur et de tension différentes; comme il l'avait fait en 1618,
Descartes met entre parenthèses toute référence à la vibration de la corde, cette
donnée n'étant pas conçue comme nécessaire (48).
Ainsi, l'écrit de circonstance qu'est le Compendium Musicae a des résonances
précises dans l'œuvre ultérieure, tant du côté de l'application de la mathématique à la
réalité physique que du côté de la physiologie et de la théorie des passions. C'est sur
ce double registre que joue constamment Descartes ; si l'art a pour fin d'émouvoir les
passions, définition commune à Descartes et à Caccini (49), il reste la tâche
philosophique de connaître ces passions; les silences de Descartes sur les passions
forment ainsi l'indication d'un programme (50).
Il resterait à définir la musique de Descartes après le Compendium ; elle est connue
par la correspondance, et l'on sait le talent de critique déployé par Descartes dans la
querelle de Boësset et de J. A. Ban; mais l'ensemble paraît inachevé: « Si je ne meurs
que de vieillesse, j'ai encore envie quelque jour d'écrire de la théorie de la musique »
(51)." (Frédéric de Buzon, Abrégé de Musique, cit., Présentation, pp. 16-18).
[*] Discours de la Méthode, plus Dioptrique, les Météores, la Mécanique et la
Géométrie, qui sont des essais de cette méthode, Paris: Ch. Angot, 1668.
(43). Descartes indique ne pas se rappeler certaines propriétés, AT X, p. 133 et p.
140.
(44). Dans une bibliographie abondante, on relèvera ici que W. C. Printz, dans
l'Historische Beschreibung der Sing- und Klingkunst, Dresde, 1690, chap. XII, § 72,
fait gloire à Descartes d'avoir le premier considéré la tierce majeure comme une
consonance parfaite ; que Rameau, Traité de l'harmonie, Paris, 1722, dérive du
Compendium la plupart des concepts initiaux. V. aussi les appréciations de H.
Riemann, Geschichte der Musiktheorie, Berlin, 1921, p. 419-420.
(45). Le Descartes et la musique d'A. Pirro (Paris, Fischbacher, 1907, rééd. Genève,
Vlinkoff, 1973) est un brillant exemple de mésinterprétation du projet cartésien, en
ce qu'il néglige les enjeux physico-mathématiques, et favorise exagérément
l'interprétation des règles de composition.
(46). Règles pour la direction de l'esprit, AT X, p. 447, trad. J.-L. Marion, La Haye,
Nijhoff, 1977, p. 67.
(47). AT-X, p. 89.
(48). V., dans l'édition citée supra des Règles, l'Annexe v du P. Costabel sur la loi des
cordes vibrantes.
(49). G. Caccini, Le nuove musiche, Florence, 1601. L'analogie des formules
caccinienne et cartésienne est signalée par G. Rodis-Lewis, "Musique et Passions au
XVIe siècle (Monteverdi et Descartes)", Dix-septième siècle, 1971, n° 92 (cette étude
portant essentiellement sur la querelle Ban-Boësset, à partir du tome X de la
Correspondance de M. Mersenne).
(50). AT-X, p. 111 et 140.
(51). Descartes à Constantijn Huygens (4 février 1647), AT IV, 791 [O VIII 2, 162; B
601).
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l'original latin. Il s'agit du morceau qui ouvre le « discours » écrit sous le titre
Olympica sur le « petit registre en parchemin ». Les pages qui nous le font connaître
laissent supposer un récit bien conduit et rédigé avec un certain souci littéraire, non
une suite de notes hâtivement griffonnées.
Baillet ouvre donc le cahier de Descartes et écrit : « Il nous apprend que le dixième
de Novembre mil six cent dix-neuf, s'étant couché tout rempli de son enthousiasme,
et tout occupé de la pensée d'avoir trouvé ce jour-là les fondements de la science
admirable, il eut trois songes consécutifs en une seule nuit, qu'il s'imagina ne pouvoir
être venus que d'en hauts (80). » (Gouhier, op. cit., pp. 32-33).
(80) Baillet, t. I, p. 81; AT t. X, p. 181. Remarquons que « ce jour là » semble ajouté
par Baillet qui traduit le texte latin donné plus haut, p. 32.
"Les historiens de Descartes parlent comme s'il n'y avait qu'un seul texte sur les
rêves de novembre 1619 : le récit des Olympica tel que Baillet nous l'a transmis (86).
Or il y en a deux. Ceci résulte de la comparaison entre un fragment lu dans la copie
de Leibniz et les passages des Olympica qu'il rappelle.
Voici le fragment tel que Foucher de Careil l'a présenté (87) :
Anno 1620, intelligere coepi fundamentum inventi mirabilis.*
Somnium 1619, nov. in quo carmen 7 cujus initium:
Quod vitae sectabor iter?...
Auson
*[En marge :] Olympica, X nov. coepi intelligere fundamentum inventi mirabilis.
Ce fragment ne vient pas des Olympica.
1° La première ligne avec sa note rappelle évidemment le début des Olympica :
X novembris 1619, cum plenus forem enthousiasmo, et mirabilis scientiae
fundamenta reperirem (88)... Baillet nous dit qu'en marge, « d'une encre plus récente,
mais toujours de la même main de l'Auteur », on lisait: XI Novembris 1620, coepi
intelligere fundamentum inventi mirabilis (89).
La première ligne du fragment n'est pas exactement semblable à celle que Baillet a
lue dans la marge des Olympica et qu'il déclare être de la main de Descartes. C'est
même pourquoi quelqu'un a transcrit en face la phrase lue dans les Olympica,
substituant involontairement X à XI: est-ce Descartes? ne serait-ce pas plutôt
Leibniz? Peu importe : que ce soit l'un ou l'autre, le fragment est tiré d'une page du
petit registre qui n'est pas celle où commence le récit des songes.
2° La seconde ligne rappelle l'épisode final du troisième songe : là aussi le rêveur lit
le vers d'Ausone. Mais, dans notre fragment, il s'agit d'une simple note sans verbe : «
Songe, nov. 1619, là, poème 7 qui commence : Quel chemin de la vie suivrai-je ?
Auson. » Ces lignes n'ont pu être découpées dans le récit visiblement rédigé que suit
Baillet, même en tenant compte des enjolivements.
Le vers du poète latin, d'ailleurs, n'apparaît lié à une date dans aucun des trois
passages où le traducteur le cite ; la première fois, le rêveur « tombe » sur lui en
ouvrant au hasard un corpus poetarum, la seconde, il essaie vainement de le
retrouver dans le même recueil; la troisième, il y reconnaît un « bon conseil » (90).
On ne voit vraiment pas comment l'un de ces morceaux pourrait bien être le contexte
du fragment.
Le fragment ne vient pas des Olympica. D'où vient-il ?
La série B du registre est faite de trois groupes de textes sous les rubriques :
Praeambula, Experimenta, Olympica. Ces lignes se trouvent sur la copie avant le
premier fragment incontestablement extrait des Olympica, mais séparées de celui-ci
par deux autres « pensées ». Si, comme c'est vraisemblable, Leibniz suit l'ordre du
registre, cette situation porte à croire qu'elles viennent des Experimenta.
(...)
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époque : Ce sont des considérations sur le désir que nous avons de savoir, sur les
sciences, sur les dispositions de l'esprit pour apprendre, sur l'ordre qu'on doit garder
pour acquérir la sagesse, c'est-à-dire la science avec la vertu, en joignant les
fonctions de la volonté avec celles de l'entendement. Son dessein était de frayer un
chemin tout nouveau ; mais il prétendait ne travailler que pour lui-même et pour
l'ami à qui il adressait son traité sous le nom de Museus, que les uns ont pris pour le
sieur J. Beeckman, principal du collège de Dordrecht, d'autres pour M. Mydorge ou
pour le P. Mersenne (A. Baillet, t. II, p. 406 ; AT X, p. 191). Ces identifications de
personnages sont purement conjecturales et il n'y a pas à en tenir compte, d'autant
moins que Museus pourrait fort bien n'avoir été qu'un interlocuteur imaginaire ; mais
tout le reste s'accorde avec l'élaboration de la méthode et de la morale provisoire que
Descartes situe entre novembre 1619 et mars ou avril 1620."
Gilson, Discours de la méthode. Texte et Commentaire, Paris: Vrin, 1925 (deuxième
édition revue 1926), p. 181 (note a AT VI, p. 17, l. 8 ".. l'ouvrage..." [O III, 92]).
(*) J'ajoute la traduction et les notes de Fernand Hallyn : "D'autre part, je terminerai
complètement mon traité avant Pâques, et si j'ai matière à livres (1) et si le traité en
paraît digne, je le publierai, comme je l'ai promis aujourd'hui, le 23 septembre (2)
1620".
(1) Leçon de Foucher de Careil (« librorum »). AT corrige en « librariorum » en se
fondant sur la version de Baillet (« libraires »). Gouhier, La pensée religieuse de
Descartes, Paris: Vrin 1979, p. 105 (première édition 1924) traduit par « copistes ».
Aucune des traductions proposées jusqu'à présent (« livres », au sens courant, pour «
librorum », « libraires » ou « copistes » pour « librariorum ») n'est vraiment
satisfaisante dans le contexte. Je propose de maintenir « librorum », mais de
comprendre le mot au sens de « parties d'un ouvrage », les « livres » dont devrait se
composer le traité projeté.
(2) « Février » chez Baillet. Cf. l'introduction (p. 25), où est adoptée la leçon de
Baillet mais aussi, ici-même, la contribution de G. Rodis-Lewis, qui maintient «
septembre ».
"« La vraie philosophie dépend de l'entendement. » Le Studium ne institue pas
seulement, comme Étienne Gilson l'avait remarqué, un petit traité De la philosophie;
il est le premier traité de philosophie de Descartes, ouvrant la voie au traité de «
vraie philosophie » que seront les Regulae ad directionem ingenii. Libérant ce champ
inédit pour Descartes est la philosophie, le Studium bonae mentis s'avère donc être
un texte décisif, en dépit de son inachèvement et de son démembrement — décisif
dans son échec même. C'est pourquoi il constitue la pierre de touche la présente
édition. C'est un texte difficile aussi, puisque seules les Regulae délivrent pleinement
le sens de cet échec : à ce titre, le Studium et les Regulae constituent véritablement
un tout indissociable. En charge de li présenter et de l'exploiter tant qu'il restait
inédit, Baillet aura baissé les bras, alors même que l'intelligence du Studium lui eût
ouvert de tout autres perspectives sur le jeune Descartes. Nous osons espérer que les
propositions avancées ici pour en restituer le projet parviendront à esquisser la figure
d'un Descartes devenant philosophe.
Observons cependant d'emblée que l'ordre et les objets des considérations qui suivent
sont encore manifestement d'origine aristotélicienne. Descartes commence en
philosophie en répétant à sa manière le livre A de la Métaphysique, c'est-à-dire en
faisant un De philosophia — ce qu'Étienne Gilson avait vu, moyennant un
rapprochement avec la Lettre-préface aux Principes (AT IX-2, 2-8 et 4, 23): Baillet
«aurait dû traduire [Studium Bonae mentis] par: Étude de la sagesse, ou même, plus
simplement, De la philosophie » Commentaire, p. 82, selon AT IX-2, 3 qui reprend
en français l'Epistola dedicatoria des Principia, AT VIII-1, 4, 24, studium
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sapientiae), suivi à juste titre par Jacques Sirven : «Il y avait là [sc. dans les
considérations sur le désir que nous avons de savoir du Studium] comme un
ressouvenir du premier livre des Métaphysiques d'Aristote » (Les Années
d'apprentissage de Descartes (1596-1628), Albi: 1928 p. 293). Il ne sera donc pas
étonnant que peu après Descartes écrive sa propre Peri tès alètheias theoria, De
veritate quidem theoria (Aristotle, Métaphysique α 1993 a 30), protreptique qui
deviendra recherche de la vérité, veritatis inquisitio. Dans la mesure où la Lettre-
préface obéit à une terminologie scolaire, conformément au genre du manuel, on
peut considérer qu'elle reprend le projet du Studium comme commencement de la
philosophie — à quelque vingt-cinq ans de distance, ces deux textes se répondent
silencieusement : c'est pourquoi le livre A y est présent, quoique différemment."
Vincent Carraud, note 2 à l'Étude du bon sens, dans CO, p. 141.
Dans une lettre à Beeckman du 26 mars 1619 Descartes expose son projet :
"Je suis arrivé ici [à Bréda] il y a six jours, et je me suis remis au culte des Muses
avec plus de zèle que jamais. J'ai établi en ce court laps de temps, à l'aide de mes
compas (2), quatre démonstrations remarquables et tout à fait neuves.
(...)
C'est autre chose que je cherche maintenant pour l'extraction des racines d'une
somme (de plusieurs quantités incommensurables entre elles); si j'y parviens, comme
je l'espère, je mettrai bien en ordre toute cette science, à condition de vaincre mon
indolence et si le destin m'en donne le loisir.
Pour ne rien vous cacher de ce que j'entreprends, je voudrais donner au public non
pas un Ars brevis comme Lulle (7), mais une science toute nouvelle (8), par laquelle
on puisse résoudre tous les problèmes possibles, en n'importe quel genre de quantité,
continue or discontinue."
(...)
C'est une entreprise infinie, et qui dépasse un seul homme, projet incroyablement
ambitieux mais j'entrevois un je-ne-sais-quoi de lumineux dans l’obscur chaos de
cette science et je pense pouvoir par ce moyen dissiper les ténèbres les plus
épaisses."
(AT X, 156-158, O VII, 2, 321-322; B 2).
(2) Les compas sont ceux que Descartes décrira dans la Géométrie II et III (AT VI
391 et 443 [O III, 430 et 471]).
(7) R. Lull, Artificium sive Ars brevis ad absolvendam omnium artium
encyclopœdiam, ou encore Ars brevis, quae est imago Artis generalis, écrit en 1308,
imprimé à Barcelone, 1481, souvent réimprimé ensuite (voir sa mention dans
Beeckman = AT X 63-65).
(8) Note en marge : « méthode générale [ars generalis] pour résoudre toutes les
questions » (Beeckman IV 59, n. 7).
12. ———. 1619-20 ou 1623?-1625 - hiver 1627-28. Regulae ad directionem ingenii.
Rédaction initiée en Allemande en 1619-1620 où à Paris en 1623, interrompue et
reprise en France en 1626-1628 et jamais complétée.
AT X 359-469; B Op. II, 684-815; traduction et notes par Jean-Marie Beyssade et
Michelle Beyssade, avec la collaboration de Frédéric Buzon et Denis Kambouchner,
O I, 324-497.
Une copie (non autographe) du texte latin avec les seize premières Règles (*), a étée
découverte à la Cambridge University Library en 2011 par Richard Serjeantson, qui
en prépare une édition.
(*) manque la deuxième partie de la Règle IV [sur la mathesis universalis].
Je donne en parenthèse les abréviations communément utilisées pour les manuscrits
et les éditions anciennes.
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Méthode, dont ce que nous avons d'imprimé à la tête de ses Essais, ne fait qu'une
petite partie. »
(Baillet I, p. 282.)
« Parmi ceux (les ouvrages de M. Descartes) que les soins de M. Chanut ont fait
échoir à M. Clerselier, il n'y en a point de plus considérable ni peut-être de plus
achevé, que le traité latin qui contient des Règles pour conduire nôtre esprit dans la
recherche de la vérité. C'est celui des manuscrits de M. Descartes, à l'impression
desquels il semble que le Public ait le plus d'intérêt. On est déjà prévenu sur sa
valeur et son prix par la lecture que M. Clerselier en a communiquée à quelques
curieux, et par le témoignage que le célèbre Auteur de l'Art de penser (en marge :
Part. 4, chap. 2) a rendu du bon usage qu'on en peut faire. »
(AT X, 477).
Clerselier a montré le manuscrit aux auteurs de la Logique de Port Royal qui l'ont
utilisé pour la deuxième édition : "La Logique de Port-Royal contient un long
passage, qui correspond à une partie des Règles XIII et XIV. Comme nous l'avons
expliqué dans l'Avertissement (p. 351-2), ce passage a pour nous la valeur d'un
témoin : il atteste l'existence d'un texte original, que nous n'avons plus, mais que
Clerselier avait encore et qu'il a communiqué à Arnauld pour le traduire. On
chercherait d'ailleurs en vain cette traduction dans la première édition : La Logique
ou L'Art de penser contenant, outres les règles communes, plusieurs observations
nouvelles propres à former le jugement. (A Paris, chez Jean de Launay, sous le
Porche des Escoles de Sorbonne, M,DC.LXII. In-12, pp. 473, plus 5 p. Extrait du
Privilège, 1er Avril 1662: Permis au sieur Le Bon... Achevé d'imprimer, 6 juillet
1662.) Le passage qui nous intéresse n'apparaît que dans la seconde édition : La
Logique ou L'Art de penser: contenant etc. (comme précédemment). Seconde
édition, revue et augmentée. (A Paris, chez Charles Savreux, au pied de la Tour de
Nostre Dame, à l'enseigne des Trois Vertus, M.DC.LXIV.) C'est aussi un in-12; le
passage en question s'y trouve, p. 391-397, avec cette note: « La plus grande partie
de ce que l'on dit ici des questions, a été tirée d'un manuscrit de M. Descartes, que
M. Clerselier a eu la bonté de prester. » Cette note et le passage visé se retrouvent
dans toutes les éditions postérieures de la Logique de Port-Royal, à partir de la
deuxième, Partie IV, chapitre II." (AT X 470).
Voir l'édition critique : Antoine Arnauld et Pierre Nicole, La logique ou l’art de
penser (dite Logique de Port-Royal), édité par Dominique Descotes, Paris:
Champion, 2011.
"Le passage suivant du P. Poisson atteste aussi l'existence d'un texte des Regulae,
autre que celui que nous avons donné ; et cet autre texte était l'original, tandis que le
nôtre n'est qu'une copie.
Observation sur la troisième règle de la Méthode de Descartes : Conduire par ordre
mes pensées, etc. (Tome VI de la présente édition, p. 18, l.27) :
«... j'ay rencontré dans un Manuscrit, qu'il avait commencé dés les premières années
qu'il s'appliqua sérieusement à l'étude, que pour venir à bout de toutes les difficultés
qu'on propose, il faut:
1, les connaître distinctement chacune en particulier ;
2, les dépouiller de tout ce qui ne leur est point essentiel dans le sens auquel on les
considère ;
3, les réduire et les diviser en petites parties ;
4, examiner avec attention chacune de ces parties, commençant par les plus simples ;
5, il faut rapporter toutes ces parties, en les comparant les unes aux autres.
Voilà à quoi aboutit toute la finesse des méthodes qu'on a trouvées et qu'on trouvera
jamais. Elle est également nécessaire dans la Physique et dans la Géométrie. L'article
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de ces règles le plus difficile à mettre en pratique, c'est ce dernier : tant parce qu'on
ne connait pas assez les termes qu'on doit comparer, qu'à cause qu'on a besoin d'un
Moyen, qu'on appelle Medium dans l'École, qui n'est pas aisé à trouver. »
(Commentaire ou Remarques sur la Méthode de René Descartes, par L. P. N. I. P. P.
D. L., à Vendôme, M.DC.LXX. Partie II, 6e observation, p. 76.)
(AT X, 476).
En 1676 Leibniz rencontrait Clerselier : "J'ai été aujourd'hui avec Mons. de
Tschirnhaus, pour lui donner la connaissance de Mons. Clerselier, et pour lui faire
voir les relies de Mons. des Cartes.
Il nous montra un discours de Mons. des Cartes de la recherche de la vérité; il y
avait environ 22 règles expliquées e illustrées. En Latin." (AT X, 208).
Leibniz et Ehrenfried Tschirnhaus (1651-1708) transcrivirent tous les deux des
manuscrits : "en particulier Tschirnhaus qui entre 1676 et 1682 en fit parvenir des
copies en Hollande à des amis qui appartenaient au cercle spinoziste, et à Hanovre à
Leibniz qui avait quitté Paris en novembre 1676. Durant cette période, le projet d'une
édition des mss. à dû mûrir chez les deux amis sous l'impulsion ou du moins avec les
encouragements de Clerselier. Nous suivons la trace de ce projet, qui en définitive
n'aboutit pas, d'abord à Paris, puis à Amsterdam. Ce dont nous sommes en tout cas
certains c'est que Leibniz s'est trouvé dès novembre 1676 en possession d'une copie
des Regulae et que Tschirnhaus dès 1678 montre qu'il a pris connaissance
directement du texte.
(...)
A partir des premières années du XVIIIe siècle nous ne possédons plus de
renseignements au sujet des mss. cartésiens, passés des mains de Legrand à celles de
Marmion, professeur de philosophie au Collège des Grassins, et nous perdons par
conséquent la trace du ms. original des Regulae." (Giovanni Crapulli, Introduction à
l'édition critique, René Descartes, Regulae ad directionem ingenii, La Haye:
Martinus Nijhoff, 1966, p. XIII)
13. ———. 1619-20. De Solidorum Elementis (Ms. de Leibniz).
Le texte originel de Descartes "Environ seize feuillets in octavo sous ce titre :
Progymnasmata de solidorum elementis" (Inventaire succinct des écrits, lettre M, AT
X 10), est perdu, mais nous possédons la copie faite par Leibniz à Paris en
1672-1676 et publiée pour la première fois par Foucher de Careil, vol. II, pp.
214-226.
AT X 265-276; Additions in AT XI 690-692; nouvelle édition par Pierre Costabel
dans la Nouvelle présentation de AT (1966) X 276 et 687-689; B Op. II, 1224-1237;
traduction par André Warusfel, O I, 221-231.
Nouvelle édition avec traduction en anglais par Pasquale Joseph Federico, Descartes
on Polyhedra. A Study of the De Solidorum elementis, New York, Springer, 1982.
Édition critique, avec introduction, traduction, notes et commentaires par Pierre
Costabel, René Descartes. Exercices pour les éléments des solides. Essai en
complément d'Euclide. Progymnasmata de solidorum elementis, Paris, Presses
Universitaires de France, 1987.
"Le présent ouvrage est le résultat d'une longue histoire.
Le manuscrit mathématique de Descartes qui est ici l'objet d'une restitution a eu un
sort tourmenté. Conservé dans les papiers de l'auteur pendant plus d'un demi-siècle,
il a disparu peu de temps après avoir eu la chance d'être lu par Leibniz à Paris. Mais
la transcription effectuée par ce lecteur exceptionnel a connu le silence des pièces
d'archives jusqu'au milieu du XIXe siècle, et elle n'est sortie de l'ombre que pour
tomber entre les mains de lecteurs plus avertis de la mathématique de leur temps que
des précautions à prendre avec des textes anciens. Elle a ainsi davantage retenu
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Premières publications :
1) Le Monde de Mr. Descartes ou le Traité de la Lumière, et des autres principaux
objets des Sens. Avec un Discours du Mouvement local, et un autre des Fièvres
composez selon les principes du même Auteur, Paris: Jacques Le Gras, 1664 (le texte
est basé sur un copie de l'original, les deux Discours placés à la suite ne sont pas de
Descartes).
2) Clerselier 1677, pp. 405-511.
Édition critique : Le Monde, l'Homme, Introduction de Annie Bitbol-Hespériès;
textes établis et annotés par Annie Bitbol-Hespériès et Jean-Pierre Verdet, Paris:
Seuil, 1996.
Titres de chapitres introduits par Clerselier dans son édition du Traité du monde : I.
De la différence qui est entre nos sentiments et les choses qui les produisent ; II. En
quoi consiste la chaleur et la lumière du feu ; III. De la dureté et de la liquidité ; IV.
Du vide, et d'où vient que nos sens n'aperçoivent pas certains corps ; V. Du nombre
des éléments, et de leurs qualités ; VI. Description d'un nouveau monde, et des
qualités de la matière dont il est composé ; VII. Des lois de la nature de ce nouveau
monde ; VIII. De la formation du soleil et des étoiles de ce nouveau monde ; IX. De
l'origine et du cours des planètes et des comètes en général, et en particulier des
comètes ; X. Des planètes en général, et en particulier de la terre et de la lune ; XI.
De la pesanteur ; XII. Du flux et du reflux de la mer ; XIII. De la lumière ; XIV. Des
propriétés de la lumière ; XV. Que la face du ciel de ce nouveau monde doit paraître
à ses habitants toute semblable à celle du nôtre ; XVI-XVII [Ces Chapitres n'ont pas
été retrouvés] ; Pour le XVIII Chapitre, voir L'Homme.
"Le plan du Monde décrit dans le Discours
La cinquième partie du Discours est consacrée, à un résumé du Monde, à la faveur
duquel Descartes brosse à larges traits les principaux chapitres et le mouvement
général de ce livre où il comptait déposer ses connaissances en physique. De manière
schématique, voici la table des matières reconstituée de ce Monde qui n’a jamais vu
le jour, sinon plus tard dans les Principes.
1. Description de la matière.
2. Les lois de la nature.
3. Description des différentes combinaisons possibles de cette matière originelle
selon les lois dégagées au deuxième paragraphe, ce qui donne les différents éléments
: cieux, terre, planètes, comètes, soleil, étoiles fixes, lumière, etc.
4. Description du monde visible, en général de tous les phénomènes qui sont au-
dessus de la terre (mouvements et qualités des Cieux).
5. Description des phénomènes terrestres : pesanteur, flux et reflux des océans,
origine des mers, montagnes, etc., métaux, plantes, sable, feu, verre —
métamorphose apparente des éléments.
6. Les êtres animés : les animaux, l’homme, ses fonctions, son anatomie. (*)
7. La conclusion est centrée sur l’immortalité de l’âme humaine que Descartes établit
par la différence entre l’homme et l’animal-machine.
Ce plan est guidé par un mouvement ascendant qui, trouvant son origine dans la
matière inanimée, s’achève par révocation de l’immortalité de l’âme. L’esprit
reconstruit probablement l’univers, en partant de l’évidence fournie par le spectacle
de la matière elle-même régie par les lois de la mécanique, et achève son chemin en
affirmant sa différence, c’est-à-dire son immortalité.
Une étroite correspondance peut être établie entre cette organisation et celle des
Principes : à la deuxième partie des Principes (« Des principes des choses
matérielles ») correspondent les chapitres que nous avons numérotés 1, 2 et 3; à la
troisième partie (« Du monde visible ») le chapitre 4; et à la quatrième partie (« De la
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prêter son concours ordinaire à la nature, et la laisser agir suivant les lois qu'il a
établies » (AT VI, 43).
Dans la lettre à Mersenne du 15 avril 1630, après avoir exposé sa théorie de la
création des vérités éternelles, Descartes écrit: "J'espère écrire ceci, même avant qu'il
soit 15 jours, dans ma Physique ;" (AT I, 146; O VIII 1, 73; B 30); on trouve un écho
de ces pensées à la fine du chapitre VI et dans le chapitre VII: "Si j'y mettais la
moindre chose qui fût obscure, il se pourrait faire que parmi cette obscurité il y aurait
quelque répugnance (**) cachée dont je ne me serais pas aperçu, et ainsi que, sans y
penser, je supposerais une chose impossible; au lieu que, pouvant distinctement
imaginer tout ce que j'y mets, il est certain qu'encore qu'il n'y eût rien de tel dans
l'ancien monde, Dieu le peut toutefois créer dans un nouveau, car il est certain qu'il
peut créer toutes les choses que nous pouvons imaginer.
(...)
Et il est facile à croire que Dieu, qui comme chacun doit savoir est immuable, agit
toujours de même façon. Mais, sans m'engager plus avant dans ces considérations
métaphysiques, je mettrai ici deux ou trois des principales règles suivant lesquelles il
faut penser que Dieu fait agir la nature de ce nouveau monde et qui suffiront, comme
je crois, pour faire connaître toutes les autres." (AT XII, 36-38).
(**) Au XVIIe siècle, répugnance signifie déjà dégoût, mais aussi contrariété,
opposition et contradiction, et c'est le sens qu'il faut ici retenir. (Note de A. Bitbol-
Hespériès, Le Monde, l'Homme, cit., p. 24).
Le Chapitre VII donne la définition de Nature : "Sachez donc, premièrement, que par
la Nature je n'entends point ici quelque Déesse, ou quelque autre sorte de puissance
imaginaire, mais que je me sers de ce mot pour signifier la Matière même en tant que
je la considère avec toutes les qualités que je lui ai attribuées comprises toutes
ensemble, et sous cette condition que Dieu continue de la conserver en la même
façon qu'il l'a créée. Car de cela seul qu'il continue ainsi de la conserver, il suit de
nécessité qu'il doit y avoir plusieurs changements en ses parties, lesquels ne pouvant,
ce me semble, être proprement attribués à l'action de Dieu, parce qu'elle ne change
point, je les attribue à la Nature ; et les règles suivant lesquelles se font ces
changements, je les nomme les lois de la Nature." (AT XI, 36-37).
La "fable" du Monde.
C'est dans la lettre à Mersenne du 25 novembre 1630 que Descartes use pour la
première fois cette expression : "Et je ne pense pas après ceci me résoudre jamais
plus de faire rien imprimer, au moins moi vivant : car la fable de mon Monde (10)
me plaît trop pour manquer à la parachever". (AT I, 179; O VIII 1, 83; B 36).
(10 Voir à Mersenne, 13 novembre 1629 (AT I, 70; [O VIII 1, 33] B 23).
Au terme du chapitre V et au débout du Chapitre VI Descartes écrit : "Il me reste ici
encore beaucoup d'autres choses à expliquer, et je serais même bien aise d'y ajouter
quelques raisons pour rendre mes opinions plus vraisemblables. Mais afin que la
longueur de ce discours vous soit moins ennuyeuse, j'en veux envelopper une partie
dans l'invention d'une fable, au travers de laquelle j'espère que la vérité ne laissera de
paraître suffisamment, et qu'elle ne sera pas moins agréable à voir que si je l'exposais
toute nue.
Chapitre VI
Permettez donc pour un peu de temps à votre pensée de sortir hors de ce monde pour
en venir voir un autre tout nouveau que je ferai naître en sa présence dans les espaces
imaginaires (*). Les Philosophes nous disent que ces espaces sont infinis, et ils
doivent bien en être crus puisque ce sont eux-mêmes qui les ont faits. Mais afin que
cette infinité ne nous empêche et ne nous embarrasse point, ne tâchons pas d'aller
jusqu'au bout ; entrons-y seulement si avant que nous puissions perdre de vue toutes
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les créatures que Dieu fit il y a cinq ou six mille ans, et après nous être arrêtés là en
quelque lieu déterminé, supposons que Dieu crée de nouveau tout autour de nous tant
de matière que, de quelque côté que notre imagination se puisse étendre, elle n'y
aperçoive plus aucun lieu qui soit vide." (AT XI, 31-32).
(*) ...espaces imaginaires... "dans la philosophie scolastique, où le monde est
considéré comme fini, les espaces fictifs que l'imagination seule conçoit au-delà des
limites du monde et de l'espace réels. Cf. Index scolastico-cartésien, pp. 96-97."
(Etienne Gilson, Discours de la méthode. Texte et commentaire, Paris: Vrin, 1925, p.
383); voir aussi Francisco Suárez, Disputationes metaphysicae, XXX, 7, 28: "extra
hunc autem mundum nihil est, nam spatium imaginarium non est, sed imaginatione
fingitur (au-delà de ce monde, il n'y a rien; car l'espace imaginaire n'existe pas, mais
est forgé par l'imagination)."; voir aussi Disputationes metaphysicae, LI, De "ubi",
passim.
"... je vous prie me mander s'il n'y a rien de déterminé en la religion, touchant
l'étendue des choses créées, savoir si elle est finie ou plutôt infinie, et qu'en tous ces
pays qu'on appelle les espaces imaginaires il y ait des corps créés et véritables ; car
encore que je n'eusse pas envie de toucher cette question, je crois toutefois que je
serai contraint de la prouver." (lettre à Mersenne du 18 décembre 1629, AT I, 86; O
VIII 1, 41; B 25).
Descartes a renoncé à la publication après la condamnation de Galilée (cfr. la lettre à
Mersenne 28 novembre 1633: "Mais comme je ne voudrais pour rien au monde qu’il
sortît de moi un discours, où il se trouvât le moindre mot qui fut désapprouvé de
l’Eglise, aussi aimé-je mieux le supprimer, que de le faire paraître estropié. (10)" (AT
I, 270-271; O VIII 1, 108; B 60).
(10) Rapprocher du récit de la sixième partie du Discours (dont la rédaction se
poursuivit jusqu'en mars 1636, AT VI, 60 l. 4-61 l. 2 [O III, 121]) Il est peu crédible
de mettre en doute la sincérité de Descartes : le protestant Claude Saumaise écrivait
le 7 mars 1638 à l’abbé Ismaël Bouillard à propos du Monde que si Descartes « était
moins bon catholique, il nous l’aurait déjà donné, mais il craint de publier une
opinion qui n'est pas approuvée à Rome » (ce qui, de surcroît, aurait été contre-
productif pour l'adoption de son système en France et chez les jésuites), texte inédit
cité par Henk J. M. Nellen, « Ismaël Boulliaud (1605-1694) : astronome, épistolier,
nouvelliste et intermédiaire scientifique; ses rapports avec les milieux du libertinage
érudit », in Études de l'Institut Pierre Bayle, Nimègue, 24, APA-Holland University
Press, 1994, p. 70.
"Pendant l'été 1634, Descartes écrit à Beeckman au sujet de la propagation de la
lumière. Aucune lettre connue de Descartes ne date du début de l'année 1635. Mais
le 16 avril 1635, Descartes écrit à Golius qu’il a lu à M. de Zuilichem, c’est-à-dire à
Constantin Huygens qu’il vient de rencontrer, « une partie de sa Dioptrique (282) ».
En mai, il réfléchit à «la cause de la lumière (283) » et évoque les couronnes et les
parhélies. Puis, dans les mois qui suivent, il écrit que, « depuis la condamnation de
Galilée », il a « entièrement séparé de son Monde le traité sur “les lunettes” », et
qu’il l'a « revu et entièrement achevé ». Il se « propose de le faire imprimer seul dans
peu de temps ». Il ajoute également qu’il « juge maintenant hors de saison» de « faire
voir son Monde avec le mouvement défendu » (284).
Ces indications sont très précieuses parce qu’elles montrent d’une part que Descartes
abandonne l’idée de publier Le Monde, et d’autre part qu’il se consacre maintenant à
La Dioptrique, en vue de sa publication. De sorte que la composition de La
Dioptrique a alors évolué, et qu’elle s’est notamment augmentée d’un
approfondissement des réflexions inaugurales du Monde sur la lumière, mais plus
encore des analyses du chapitre XVIII du Monde consacré à L’Homme. En effet, les
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scienziati. Filosofia e scienza tra testo, libro e biblioteche, Firenze, Olschki, 2011, p.
165-204.
25. ———. 1630. [La théorie de la création des vérités éternelles].
La théorie de la création des vérités éternelles comme fondement métaphysique de la
physique.
Cette théorie est formulée pour la première fois dans une lettre à Mersenne : le débat
commence le 15 avril 1630, en posant comme thème, en réponse à des lettres
perdues de Mersenne, “les vérités mathématiques que vous appelez éternelles”. La
même année, le philosophe en discute aussi bien avec lui dans deux autres lettres,
qu'avec Beeckman dans une lettre du 17 octobre de la même année. Le débat se
prolonge jusqu'en 1649 : il est présent dans la correspondance avec Arnauld, dans la
lettre à Mersenne du 27 mai 1638 et, surtout, dans celle à Mesland du 2 juin 1644.
On peut considérer que le débat se termine le 5 février 1649 avec la discussion
entamée avec More sur les vérités contradictoires. Dans les œuvres imprimées, la
théorie ne sera publiée que dans les Responsiones (AT VII, 380 et 435-436). Vagues
allusions dans le Discours de la méthode, V (AT VI 41 ll. 12-13 [O III, 108]) et dans
les Principia philosophiae (I, §§ 22 et 24; AT VIII-1, 13-14).
26. ———. 1630-31 (?). La recherche de la vérité par la lumière naturelle.
AT X, 495-527; B Op. II, 826-871; CO 249-341; dialogue (incomplet) écrit en
français, dont l'original est perdu.
Les sources existant sont :
1) une copie (partielle) en français, conservée à Hanovre (H) faite par Ehrenfried
Walther von Tschirnhaus (1651 - 1708) sur le manuscrit en possession de Clerselier,
datée 16 novembre 1676 et envoyée à Leibniz en février 1677 (AT X pp. 495-514).
2) la traduction néerlandaise complète (N): Amsterdam 1684.
3) la traduction latine complète (A): Inquisitio veritatis per lumen naturale, in
Opuscola posthuma, physica et mathematica, Amsterdam 1701, pp. 67-90 (AT X,
514-527).
CO donne le texte française pour la partie existante, la traduction latine et le texte
néerlandaise avec la première traduction française de cette version (par Corinna
Vermeulen).
Édition critique : René Descartes, La Recherche de la vérité par la lumière naturelle,
sous la direction de Ettore Lojacono, textes établis par Erik Jan Bos, lemmatisation et
concordances du texte français par Franco A. Meschini, index et concordances du
texte latin et néerlandais par Francesco Saita, Milano: Franco Angeli, 2002, avec un
essai de Ettore Lojacono. Pour une interprétation et une datation de La Recherche de
la vérité par la lumière naturelle de René Descartes, (pp. VII-XL) et une note "La
présente édition", par Erik-Jan Bos (pp. XLI-LXV).
Ettore Lojacono donne un bilan complet des débats consacrés à la datation du texte
(pp. 161-201).
Traductions :
La recherche de la vérité par la lumière naturelle, Introduction, Appendices, Notice
biographique et bibliographique par Ettore Lojacono, Introduction et commentaire
historique et conceptuel, textes revus par Massimilano Savini, Paris: Presses
universitaires de France, 2009.
La recherche de la vérité par la lumière naturelle, traduction et notes par Emmanuel
Faye, Paris: Librairie Générale Française, (Le Livre de Poche), 2010.
"La première édition de la Recherche de la vérité fut publiée à Amsterdam, en 1684,
dans une traduction néerlandaise. Sous le titre de Onderzoek der waarheit door 't
naturelijk licht (N) le texte fut ajouté, avec une traduction des Regulae, à l'édition
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plaisir à lire vos diverses aventures dans la moyenne et dans la plus haute région de
l'air ; à considérer vos prouesses contre les Géants de l'École, le chemin que vous
avez tenu, le progrès que vous avez fait dans la vérité des choses, etc." (AT I 570; B
15).
La Deuxième partie (AT VI, 11-22 [O III, 88-95]) est une adaptation et une
rectification des certain thèmes des Règles pour la direction de l'esprit: "Pendant les
dix années qui s'écoulèrent entre les deux ouvrages, Descartes a très sensiblement
modifié ses vues méthodologiques: les Regulae proposaient une mathématique
universelle qui assimilait à des segments de droite — soit à une dimension spatiale
— tout ce qui est susceptible de mesure, alors que la Géométrie achemine le lecteur
vers une notion de mathématiques pures, vers une « géométrie qui est avant tout une
algèbre ». Un pas décisif a été franchi, et Léon Brunschvicg (*) montre sans peine
que le deuxième chapitre du Discours s'en trouve par là même éclairé : certains
développements sont si étroitement liés qu'ils ne s'expliquent que l'un par l'autre. De
même que la sixième partie est une introduction à la Dioptrique et aux Météores, la
deuxième est une introduction à la Géométrie." (Gilbert Gadoffre, La chronologie
des six parties, in : Nicolas Grimaldi et Jean-Luc Marion (éds.), Le Discours et sa
méthode, Paris: Presses universitaires de France, 1987, p. 21.)
(*) Léon Brunschvicg, Mathématiques et métaphysique chez Descartes, Revue de
Métaphysique et de Morale, juillet 1937, [pp. 277-324; repris dans: L. Brunschvicg,
Écrits philosophiques, tome I, Paris, Presses Universitaires de France, 1951, pp.
11-54].
La Troisième partie (AT VI 22-31 [O III, 96-101]) contient la morale provisoire; sur
les raison de cette inclusion, voir la lettre à Henricus Reneri pour Alphonse de Pollot
d'avril ou mai 1638 : "Au reste j'ai été obligé de parler de cette résolution et fermeté
touchant les actions, tant à cause qu'elle est nécessaire pour le repos de la conscience,
que pour empêcher qu'on ne me blâmât de ce que j'avais écrit que, pour éviter la
prévention, il faut une fois en sa vie se défaire de toutes les opinions qu'on a reçues
auparavant en sa créance : car apparemment on m'eût objecté que ce doute si
universel peut produire une grande irrésolution et un grand dérèglement dans les
mœurs. De façon qu'il ne me semble pas avoir pu user de plus de circonspection que
j'ai fait, pour placer la résolution, en tant qu'elle est une vertu, entre les deux vices
qui lui sont contraires, à savoir l'indétermination et l'obstination.
Il ne me semble point que ce soit une fiction, mais une vérité, qui ne doit point être
niée de personne, qu'il n'y a rien qui soit entièrement en notre pouvoir que nos
pensées ; au moins en prenant le mot de pensée comme je fais, pour toutes les
opérations de l'âme, en sorte que non seulement les méditations et les volontés, mais
même les fonctions de voir, d'ouïr, de se déterminer à un mouvement plutôt qu'à un
autre etc., en tant qu'elles dépendent d'elle, sont des pensées. Et il n'y a rien du tout
que les choses qui sont comprises sous ce mot, qu'on attribue proprement à l'homme
en langue de philosophe : car pour les fonctions qui appartiennent au corps seul, on
dit qu'elles se font dans l'homme, et non par l'homme." (AT II, 35-36; O VIII 2, 542;
B 164).
Voir aussi l'Entretien avec Burman :
"III. Texte 64. AT VI 22, l. 29 [O III, 96] une moral par provision, qui ne consistait
qu'en trois ou quatre maximes, DONT JE VEUX BIEN VOUS FAIRE PART (que je
veux bien AJOUTER À MON ÉCRIT).
L'auteur n'écrit pas volontiers touchant la morale (6), mais les Régents et autres
pédants l'on contraint d'ajouter à son écrit ces règles parce que, autrement, ils
prétendraient qu'il n'a ni religion ni foi, et que, par le biais de sa méthode, il veut les
renverser (7)." (Burman 144; AT V, 178).
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La Quatrième partie (AT VI, 31-40 [O III, ]102-108) est dédiée à la métaphysique et
utilise le Petit traité de métaphysique (perdu) de 1629 : "Descartes présente lui-
même la Quatrième Partie du Discours comme un abrégé par rapport à ce manuscrit
latin qui, au contraire, semble être une sorte de première rédaction par rapport aux
Méditations ou du moins par rapport à celles qui ouvrent l'ouvrage». Ainsi il y avait
dans la pensée de Descartes plus que dans son texte lorsqu'il écrivait la Quatrième
Partie du Discours. Quant à savoir quel est ce « plus », des hypothèses différentes
sont permises : ce qui est certain, c'est que, en ce qui concerne l'épreuve critique du
commencement, l'évolution de la pensée n'est pas seule en cause." (Henri Gouhier,
La pensée métaphysique de Descartes, Paris: Vrin, 1962, p. 67).
Cette partie a été ajouté au moment de l'impression : "Il est vrai que j'ai été trop
obscur en ce que j'ai écrit de l'existence de Dieu dans ce traité de la Méthode, et bien
que ce soit la pièce la plus importante, j'avoue que c'est la moins élaborée de tout
l'ouvrage ; ce qui vient en partie de ce que je ne me suis résolu de l'y joindre que sur
la fin, et lorsque le libraire me pressait. Mais la principale cause de son obscurité
vient de ce que je n'ai osé m'étendre sur les raisons des sceptiques, ni dire toutes les
choses qui sont nécessaires ad abducendam mentem a sensibus: car il n'est pas
possible de bien connaître la certitude et l'évidence des raisons qui prouvent
l'existence de Dieu selon ma façon, qu'en se souvenant distinctement de celles qui
nous font remarquer de l'incertitude en toutes les connaissances que nous avons des
choses matérielles; et ces pensées ne m'ont pas semblé être propres à mettre dans un
livre, où j'ai voulu que les femmes mêmes pussent entendre quelque chose, et
cependant que les plus subtils trouvassent aussi assez de matière pour occuper leur
attention. J'avoue aussi que cette obscurité vient en partie, comme vous avez fort
bien remarqué, de ce que j'ai supposé que certaines notions, que l'habitude de penser
m'a rendu familières et évidentes, le devaient être aussi à un chacun; comme par
exemple, que nos idées ne pouvant recevoir leurs formes ni leur être que de quelques
objets extérieurs, ou de nous-mêmes, ne peuvent représenter aucune réalité ou
perfection, qui ne soit en ces objets, ou bien en nous, et semblables; sur quoi je me
suis proposé de donner quelque éclaircissement dans une seconde impression. (8)"
(lettre à Antoine Vatier du 22 février 1638, AT I, 560; O VIII 1, 574-575; B 149).
(8) C'est dans les Méditationes (1641) que Descartes pourra préciser sa définition des
idées.
Descartes était bien conscient des limites de sa première publication sur la
métaphysique: "Pour votre seconde objection, à savoir que je n'ai pas expliqué assez
au long, d'où je connais que l'âme est une substance distincte du corps, et dont la
nature n'est que de penser, qui est la seule chose qui rend obscure la démonstration
touchant l'existence de Dieu (3), j'avoue que ce que vous en écrivez est très vrai, et
aussi que cela rend ma démonstration touchant l'existence de Dieu malaisée à
entendre. Mais je ne pouvais mieux traiter cette matière, qu'en expliquant amplement
la fausseté ou l'incertitude qui se trouve en tous les jugements qui dépendent du sens
ou de l'imagination, afin de montrer ensuite quels sont ceux qui ne dépendent que de
l'entendement pur, et combien ils sont évidents et certains. Ce que j'ai omis tout à
dessein, et par considération, et principalement à cause que j'ai écrit en langue
vulgaire, de peur que les esprits faibles venant à embrasser d'abord avidement les
doutes et scrupules qu'il m'eût fallu proposer ne pussent après comprendre en même
façon les raisons par lesquelles j'eusse tâché de les ôter, et ainsi que je les eusse
engagés dans un mauvais pas, sans peut-être les en tirer. Mais il y a environ huit ans
que j'ai écrit en latin un commencement de Métaphysique (4), où cela est déduit
assez au long, et si l'on fait une version latine de ce livre, comme on s'y prépare, (5)
je l'y pourrai faire mettre. Cependant je me persuade que ceux qui prendront bien
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garde à mes raisons touchant l'existence de Dieu, les trouveront d'autant plus
démonstratives, qu'ils mettront plus de peine à en chercher les défauts, et je les
prétends plus claires en elles-mêmes qu'aucune des démonstrations des géomètres en
sorte qu'elles ne me semblent obscures qu'au regard de ceux qui ne savent pas
abducere mentem a sensibus, suivant ce que j'ai écrit en la page 38 (6).". (lettre à
Mersenne du 20 avril 1637, AT I, 349-350; O VIII 1, 139; B 104).
(4) En 1629 (à Gibieuf, 18 juillet 1629, AT I, 17 l. 7, B17; à Mersenne, 15 avril 1630,
AT I, 144 l. 19, B30).
(5) La traduction latine du Discours et des Essais (sauf la Géométrie), œuvre
d'Étienne de Courcelles, n’apparut qu’en 1644. CM suggère qu’un projet a pu se
constituer dès 1637 avec le jeune Van Schooten, qui publia en 1649 une traduction
latine de la Géométrie.
(6) AT VI, 37 [O III, 105] (« qu’ils n’élèvent jamais leur esprit au-delà des choses
sensibles »). Voir les objections soulevées par Petit (lettre des 17-27 mai 1638, AT II,
144, l. 13-21; [O VIII 1, 187] B 167).
La Cinquième partie (AT VI 40-60 [O III, 108-121])est un résumé du Monde et de
ses études de physiologie, "particulièrement l'explication du mouvement du cœur"
(AT VI, 1 [O III, 81]) commencés en 1629 ("je veux commencer à étudier
l'anatomie", lettre à Mersenne du 18 décembre 1629, AT I, 102), après la découverte
par William Harvey de la circulation du sang (Exercitatio anatomica de motu cordis
et sanguinis in animalibus, Francfurt 1628), cfr. la référence au "médecin
d'Angleterre" (AT VI, 51 [O III, 115]).
"La première mention d'un «médecin», dans la correspondance de Descartes, figure
dans la lettre au Père Mersenne du 8 octobre 1629, [AT I, 25; O VIII 1, 30; B 19] où
Descartes écrit: «Pour la raréfaction, je suis d'accord avec ce médecin (27), et (28) ai
maintenant pris parti touchant tous les fondements de la Philosophie ; mais peut-être
que je n'explique pas l'œther comme lui. (29)»".
(27) Selon AT (I 30n), il s'agirait du médecin Christophe Villiers (1596-1661/70);
mais CM (II 302 n. 2) propose Sébastien Basson, qui introduisit dans une physique
corpusculaire l'hypothèse de l'éther pour expliquer les phénomènes de raréfaction et,
de façon plus générale, le vide (Philosophiae naturalis adversus Aristotelem librì
XII, Genève, 1621). Il fut lu par Beeckman (au printemps 1623, Beeckman II 243), et
par Merline (Quaestiones in Genesim, 1623, col. 1838 ; Impiété des déistes, 1624, I,
p. 238) ; Descartes le cite (parmi les novatores, entre Giordano Bruno (Giulio Cesare
Vanini) dans une lettre à Beeckman (lettre du 17 octobre 10, AT I, 158, B 34). Dans
les Regulae (AT X, 424 1. 13), Descartes envisage au-delà de l'air un éther très pur
sur le modèle de Basson. Descartes nie le vide dans le Monde (il y travaille à partir
de la fin de 1629) et dans ses lettres de février-avril 1630. C'est probablement de lui
que Descartes écrit à Huygens : « Il n’est vaillant qu'à détruire les opinions d'Aristote
» 8 mars 1636, AT I, 603; [O VIII 2, 20] B 84).
(28) Clerselier Lettres : « ai pris parti là-dessus, comme sur presque tous les
fondements de la Physique ».
(29) Clerselier Lettres : « Lorsque j'aurai l'honneur de vous voir, nous aurons moyen
de nous en entretenir plus particulièrement », add.
La Sixième partie (AT VI 40-78 [O III, 121-133]) a été rédigée dans les derniers
mois du 1635, comme préface de la Dioptrique et des Météores.
"Or comme ce n'est pas des racines, ni du tronc des arbres, qu'on cueille les fruits,
mais seulement des extrémités de leurs branches, ainsi la principale utilité de la
Philosophie dépend de celles de ses parties qu'on ne peut apprendre que les
dernières. Mais, bien que je les ignore presque toutes, le zèle que j'ai toujours eu
pour tâcher de rendre service au public est cause que je fis imprimer, il y a dix ou
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douze ans, quelques essais des choses qu'il me semblait avoir apprises. La première
partie de ces essais fut un Discours touchant la Méthode pour bien conduire sa
raison et chercher la vérité dans les sciences, où je mis sommairement les
principales règles de la Logique et d'une Morale imparfaite, qu'on peut suivre par
provision pendant qu'on n'en sait point encore de meilleure. Les autres parties furent
trois traités : l'un de la Dioptrique, l'autre des Météores, et le dernier de la
Géométrie." Lettre-Préface aux Principes de philosophie (AT IX-2, 15).
28. ———. 1637. La Dioptrique.
AT VI, 81-226; B Op. I, 118-311; O III, 148-262.
La Dioptrique est le premier essai composé par Descartes : les premières notes sur
l'optique et la réfraction sont dans les Cogitationes privatae de 1619-20 (AT X,
242-247); en 1632 Descartes écrit à Golius "je fis tailler un verre, il y a cinq ans"
lettre du 2 février 1632 (AT I, 239, note; O VIII 1, 1023, n. 36; B 50) ; la
composition de la Dioptrique pourrait donc être initiée en 1628. (Sur les relations de
La Dioptrique avec Le Monde et L'Homme voir les notes à ces textes).
Dans le XVII siècle avec le terme Dioptrique était utilisé pour la théorie de la
réfraction: "La troisième [partie de l'Optique] enseigne comment nous voyons par
rayons qui sont rompus, comme quand nous regardons un bâton qui est partie dans
l'eau, partie dans l'air et se nomme Dioptrique, ou Mesoptrique, parce qu'elle
considère la façon par laquelle les rayons passent par les milieux divers, comme
quand il traversent l'air, l'eau, et le verre en même instant: on pourrait ainsi nommer
cette partie Anaclastique, ou Diaclastique. L'art de la peinture dépend de ces 3
parties." Marin Mersenne, La Vérité des sciences contre les Septiques [sic] ou
Pyrrhoniens, Paris: 1625, pp. 229-230 (édition moderne: La Vérité des sciences
contre les Sceptiques ou Pyrrhoniens. Édition et annotation par Dominique Descotes,
Paris: Champion, 2003.
Descartes la cite dans une lettre à Mersenne du 25 novembre 1630: "J'y veux insérer
un discours où je tâcherai d'expliquer la nature des couleurs et de la lumière, lequel
m'a arrêté depuis six mois, et n'est pas encore à moitié fait ; mais aussi sera-t-il plus
long que je ne pensais, et contiendra quasi une physique tout entière (8) ; en sorte
que je prétends qu'elle me servira pour me dégager de la promesse que je vous ai
faite, d'avoir achevé mon Monde dans trois ans (9), car c'en sera quasi un abrégé. Et
je ne pense pas après ceci a me résoudre jamais plus de faire rien imprimer, au moins
moi vivant : car la fable de mon Monde (10) me plaît trop pour manquer à la
parachever, si Dieu me laisse vivre assez longtemps pour cela; mais je ne veux point
répondre de l'avenir. Je crois que je vous enverrai ce Discours de la lumière, sitôt
qu'il sera fait, et avant que de vous envoyer le reste de la Dioptrique" (AT I, 179; O
VIII 1, 83; B 36).
(8) Voir à Mersenne, 13 novembre 1629 (AT I, 70 l. 6-11, B 23) et 18 décembre 1629
(AT I, 85 l. 6-86 l. 1; [O VIII 1, 33] B 25).
(9) Voir à Mersenne, 15 avril 1630 (AT I 137 l. 15-17; [O VIII 1, 68] B 30).
(10) Voir à Mersenne, 13 novembre 1629 (AT I 70; [O VIII 1, 33] B 23).
"En fait, il semble que Descartes, loin d'avoir envoyé ce Discours de la lumière «
avant le reste de la Dioptrique », en ait ajourné la mise au point ; car au cours de
l'année 1632, il qualifie à deux reprises de « première partie » ce qui, dans la
rédaction définitive, constitue le Discours second, consacré à la réfraction (15). Par
contre, ce Discours de la lumière, qui devait être un abrégé du Monde, prend de telles
proportions qu'il devient bientôt un Traité de la Lumière appelé à couvrir tout le
champ de la Physique (16).
Dernière remarque enfin : le Monde est « presqu'achevé » en juillet 1633 (17), la
Dioptrique « entièrement », dans le courant de 1635 (18), les Météores, repris en
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main une fois la Dioptrique terminée, en 1636 (19). Ces détails chronologiques un
peu vétilleux, pour ne pas dire fastidieux, permettent d'affirmer qu'entre 1629 et
1636, Descartes a mené de front les trois traités, quitte à interrompre l'un pour se
consacrer à tel autre (20)." (pp. 290-291), Simone Martinet, "Rôle du problème de la
lumière dans la construction de la science cartésienne", XVIIe siècle, n° 136, 1982,
pp. 285-309.
(15) Voir [à Golius], [janvier 1632], I, p. 235 [O VIII 1, 644-645; B 49], et à
Mersenne, [juin 1632], I, p. 255 [O VIII 1, 102-103; B 55].
(16) Voir à Mersenne, 23 décembre 1630 : « Je vous dirai que je suis maintenant
après à démêler le chaos pour en faire sortir de la lumière, qui est l'une des plus
hautes et plus difficiles matières que je puisse jamais entreprendre, car toute la
physique y est presque comprise (5)», I, p. 194 [O VIII 1, 88; B 40].
(5) Descartes est en train de rédiger son Monde, ou Traité de la lumière : Il insiste sur
son importance à plusieurs reprises (à Mersenne, 13 novembre 1629, AT I, 70 l. 6-11,
[O VIII 1, 33] B 23; 25 novembre 1630, AT I, 179 l. 10, [O VIII 1, 83] B 36, et au P.
Vatier, 22 février 1638, AT I 562 l. 10 sq., [O VIII 1, 576] B 149).
(17) À Mersenne, 22 juillet 1633, AT I, p. 268 [O VIII 1, 107] B 59].
(18) Voir à Mersenne, date difficile à préciser [mars 1635 ?], AT I, p. 322 [O VIII 1,
121; B 75], et à Huygens, 1 novembre 1635, AT I, p. 591 [O VIII 2, 14; B 77].
(19) Voir à Huygens, 1 novembre 1635, AT I, p. 591 [O VIII 2, 14; B 77], et
Météores, Disc. VI, p. 298, qui relate une observation personnelle « faite l'hiver
passé 1635 ».
(20) De telle sorte qu'il n'est pas étonnant qu'il soit fait référence à la Dioptrique,
dans le Monde, achevé pourtant antérieurement (cf. Traité de la Lumière ou Monde,
ch. II, p. 9, ch. XIV, p. 102, ch. XV, p. 106) et dans les Météores, commencés, sinon
terminés plus tôt (Météores, Disc. I, p. 233 et p. 234 ; Disc. V, p. 279; Disc. VIII, p.
331 et p. 337). Et que, inversement, Descartes se retranche volontiers derrière le «
Traité qui contient tout le corps de [sa] Physique », soit pour justifier le statut des «
suppositions « qui sont avancées au début de chacun des Essais (cf. Discours de la
méthode, VI partie, p. 76), soit pour répondre à des questions ou à des objections qui
lui sont adressées après la publication des Essais, cf. [à Vatier], [22 février 1638], AT
I, p. 562 [O VIII 1, 575; B 149] ; à Ciermans, [23 mars 1638], AT II, p. 71 et p. 74 [B
159] ; à Morin, [13 juillet 1638], AT II, p. 201 [O VIII 2, 466-467; B 172] ; à
Mersenne, 9 janv. 1639 et 19 juin 1639, AT II, p. 483 [O VIII 1, 310-311; B 200] et
p. 564 O VIII 1, 336-337; B 216].
En janvier 1632 la première partie (Discours I et II) est terminée : "Au reste pour ce
que vous me mandez, et que M. H[ortensius] (4) me témoigne que vous désirez voir
de ma Dioptrique, je vous en envoi la première partie (5), ou j'ai tâché d'expliquer la
matière des réfractions, sans toucher au reste de la philosophie." (lettre à Golius du
janvier 1632, AT I 235; O VIII 1, 644-645; B 49).
(4) Clerselier-Lettres: "H." ; AT complète par le nome de Martin Van de Hove
(Hortensius, 1605-1639), mathématicien et astronome.
(5) Dioptrique I et II (AT VI 81-105 [O III, 148-262])
Dans l'automne 1635 Descartes écrit : "Pour les lunettes, je vous dirai que depuis la
condamnation de Galilée (4), j'ai revu et entièrement achevé le Traité que j'en avais
autrefois commencé (5) ; et l'avant entièrement séparé de mon Monde, je me propose
de le faire imprimer seul dans peu de temps (6)." (lettre à X (Mersenne?), AT I 322
[O VIII 1, 121; B 75).
(4) Descartes est souvent revenu dans ses lettres à Mersenne sur la condamnation de
Galilée (1633) : fin novembre 1633 (AT I 270-273, [O VIII 1, 107-109] B 60);
février 1634 (AT I 281-282, [O VIII 1, 109-110] B 63); 15 mai 1634 (AT I 298-299,
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assez fort, pour l'employer en même temps à plusieurs choses différentes, et comme
je ne trouve jamais rien que par une longue traînée de diverses considérations, il faut
que je me donne tout à une matière, lorsque j'en veux examiner quelque partie. Ce
que j'ai éprouvé depuis peu, en cherchant (4) la cause de ce phénomène duquel vous
m'écrivez (5) ; car il y a plus de deux mois (6) qu'un de mes amis (7) m'en a fait voir
ici une description assez ample, et m'en ayant demandé mon avis, il m'a fallu
interrompre ce que j'avais en main (8), pour examiner par ordre tous les Météores,
auparavant que je m'y sois pu satisfaire. Mais je pense maintenant en pouvoir rendre
quelque raison, et suis résolu d'en faire un petit traité (9) qui contiendra la raison (10)
des couleurs de l'arc-en-ciel (11), lesquelles m'ont donné plus de peine que tout le
reste, et généralement tous les phénomènes sublunaires." (lettre à Mersenne du 8
octobre 1629, AT I, 22-23; O VIII 1, 29-30; B19).
(4) Clerselier-lettres : "pour trouver".
(5) Le jésuite romain Scheiner avait observé quatre parhélies (faux soleils) à Frascati
le 20 mars 1629. Ces observations ont été connue de toute l'Europe savante par le
relais de Peiresc, à qui le cardinal Barberini avait fait parvenir une copie. Gassend,
informé par les frères Dupuy, s'employa à les expliquer, en particulier auprès de
Peiresc, et au cours de son voyage en Flandres et aux Pays-Bas (été 1629), de
Beeckman et de Reneri. La « description assez ample » dont parle Descartes peut
être son explication Phaenomenon rarum et illustre Romæ observatum, dont le texte
imprimé semble n'avoir été diffusé qu'en novembre-décembre 1629, mais qui fut
remis par Gassend à Reneri le 14 juillet (voir lettre de Gassend à Peiresc, 21 juillet
1629, CM II 244 et 247n).
(6) Clerselier-lettres : « trois mois ».
(7) Henri Reneri, en juillet 1629. Il s'inscrit comme étudiant à Leyde le 13 octobre
1629.
(8) Le « petit traité de métaphysique », « commencé en Frise », dont Descartes parle
à plusieurs reprises (à Mersenne, 15 avril 1630; AT I 136, [O VIII 1, 67] B 30; 25
novembre 1630, AT I 182, [O VIII 1, 85] B 36; vers le 20 avril 1637 AT I 350, [O
VIII 1, 139] B 104; à Gibieuf, 18 juillet 1629, AT I 17, [O VIII 2, 790] B 17) est soit
une première version des Meditationes, soit un « traité sur la divinité » (Baillet I,
170-171 et 190).
(9) Le huitième discours des Météores (qui paraîtra dans les Essais de 1637) ; le
dixième discours porte sur les parhélies.
(10) Clerselier-lettres : « l'explication ».
(11) Descartes avait pu voir en Italie les arcs-en-ciel artificiels des fontaines de
Tivoli.
Descartes retourne sur le sujet dans une lettre à Mersenne du 13 novembre 1629 : "Je
suis bien marri de la peine que je vous ai donnée de m'envoyer ce phénomène (2),
car il est tout semblable à celui que j'avais vu. Je ne laisse pas de vous en avoir très
grande obligation, et encore plus de l'offre que vous me faites de faire imprimer ce
petit traité que j'ai dessein d'écrire ; mais je vous dirai qu'il ne sera prêt de plus d'un
an. Car depuis le temps que je vous avais écrit il y a un mois, je n'ai rien fait du tout
qu'en tracer l'argument, et au lieu d'expliquer un phénomène seulement, je me suis
résolu d'expliquer tous les phénomènes de la nature c'est-à-dire toute la physique. Et
le dessein que j'ai me contente plus qu'aucun autre que j'aie jamais eu, car je pense
avoir trouvé un moyen pour exposer toutes mes pensées en sorte qu'elles satisferont à
quelques-uns et que les autres n'auront pas occasion d'y contredire." (AT I 70; O VIII
1, 32-33; B 23).
(2) Sur les parhélies, comme sur le « petit traité », voir la lettre 4 (AT I, 23; [O VIII
1, 29] B 19.
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binômes", Revue d'histoire des sciences, 22, 1969, pp. 97-116 (texte au pp. 99-102);
repris dans P. Costabel, Démarches originales de Descartes savant, Paris, Vrin,
1982, pp. 122-126.
"Le document illustre la phase ultime du débat engagé en 1639 entre Stampioen et
Waessenaer, celui-ci agissant pour le compte de Descartes. "(p. 97).
35. ———. 1641. Meditationes de prima Philosophia in qua Dei existentia et animae
immortalitas demostrantur. Parisiis: Michaelem Soly.
AT VII : Epistola 1; Praefatio ad Lectorem 7; Synopsis sequentium sex
Meditationum 12; Meditatio I-VI 17-90; Objectiones Primae 91; Responsio Authoris
101; Objectiones Secundae 121; Responsio 128; Rationes Dei existentia et animae a
corpore distinctionem probantes, more geometrico dispositae 160; Objectiones
Tertiae cum Responsionibus Authoris 171; Objectiones Quartae 196; Objectiones
Quintae 256; Responsio 347; Disquisitio metaphysica Gassendus Sorberio 392;
Objectiones Sextae 412; Responsio 422; Objectiones Septimae cum Notis Authoris
464; Epistola ad patrem Dinet 563-603.
B Op. I, 680-799; Objectiones cum Responsionibus, 800-1395.
Les VII Objectiones et l' Epistola ad patrem Dinet sont ajoutées dans la deuxième
édition.
Date de composition : octobre 1639 - mars 1640.
Première édition : 28 août 1641.
Deuxième édition revue avec le titre : Meditationes de prima philosophia, in quibus
Dei existentia, et animae humanae a corpore distinctio, demostrantur. Amstelodami:
Ludovicum Elzevirium, 1642 (réimpression anastatique Lecce, Conte Editore, 1992).
Après le Traité de métaphysique de 1628-29 (qui n'a pas été conservé) et la
Quatrième partie du Discours de la méthode c'est le premier texte publié par
Descartes sur la métaphysique (La Recherche de la Vérité a été publié seulement en
1684).
La première mention de l'œuvre est dans la lettre à Mersenne du 13 novembre 1639 :
"Les opinions de vos Analystes, (*) touchant l'existence de Dieu et l'honneur qu'on
lui doit rendre, sont, comme vous écrivez, très difficiles à guérir ; non pas qu'il n'y ait
moyen de donner des raisons assez fortes pour les convaincre, mais parce que ces
gens-là, pensant avoir bon esprit, sont souvent moins capables de raison que les
autres. Car la partie de l'esprit qui aide le plus aux mathématiques, à savoir
l'imagination, nuit plus qu'elle ne sert pour les spéculations métaphysiques. J'ai
maintenant entre les mains un discours, où je tâche d'éclaircir ce que j'ai écrit ci-
devant sur ce sujet ; il ne sera que de cinq ou six feuilles d'impression; mais j'espère
qu'il contiendra une bonne partie de la métaphysique. Et afin de le mieux faire, mon
dessein est de n'en faire imprimer que vingt ou trente exemplaires, pour les envoyer
aux vingt ou trente plus savants théologiens dont je pourrai avoir connaissance, afin
d'en avoir leur jugement, et apprendre d'eux ce qui sera bon d'y changer, corriger ou
ajouter, avant que de le rendre public." (AT II, 622; O VIII 1, 351-352; B 224).
(*) [Les géomètres de Paris]
La rédaction est terminée en mars 1640 : "Je ne ferai point imprimer mon essai de
Métaphysique (14) que je ne sois à Leyde, où je pense aller dans cinq ou six
semaines (15)" lettre à Mersenne, 11 mars 1640 (AT III, 35-36; O VIII 1, 367-368; B
246).
(14) Ls Meditationes seront imprimés à Paris en 1641, puis à Amsterdam en 1642.
(15) Descartes date de Leyde toute une série de lettres écrites entre le 7 mai 1640 et
le 18 mars 1641.
En novembre 1640 le livre est envoyé à l'imprimeur: "Le peu que j'ai écrit de
métaphysique est déjà en chemin pour aller à Paris (5), où je crois qu'on le fera
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imprimer, et il ne m'en est resté ici qu'un brouillon si plein de ratures, que j'aurais
moi-même de la peine à le lire, ce qui est cause que je ne puis vous l'offrir ; mais
sitôt qu'il sera imprimé, j'aurai soin de vous en envoyer des premiers, puisqu'il vous
plaît me faire la faveur de le vouloir le lire, et je serai fort aise d'en apprendre votre
jugement." Lettre à Colvius du 14 novembre 1640, AT III, 248; O VIII 2, 586; B
287).
(5) Voir à Mersenne, 11 novembre 1640 (AT III 238-239, [O VIII 1, 424] B 285) «
[...] je vous envoie enfin mon écrit de Métaphysique... »
Descartes envoie une copie du manuscrit à Huygens et Mersenne :
- Constantin Huygens : "J'ai envoyé dès hier ma Métaphysique à Monsieur de
Zuylichem pour vous l'adresser ; mais il ne l'enverra que dans huit jours, car je lui ai
donné ce temps pour la voir. Je n'y ai point mis de titre, mais il me semble que le
plus propre sera de mettre Renati Descartes Meditationes de prima Philosophia; car
je ne traite point en particulier de Dieu et de l'âme, mais en général de toutes les
premières choses qu'on peut connaître en philosophant. Vous verrez assez, par les
lettres que j'y ai jointes, quel est mon dessein; et je n'en dirai ici autre chose, sinon
que je crois qu'il n'y aura pas de mal, avant que de la faire imprimer, de stipuler avec
le libraire qu'il nous en donne autant d'exemplaires que nous en aurons de besoin, et
même qu'il les donne tout reliés ; car il n'y a pas plaisir d'acheter ses propres écrits, et
je m'assure que le libraire pourra bien faire cela sans y perdre. Je n'aurai besoin ici
que d'environ trente exemplaires ; pour Paris, c'est à vous de juger combien il nous
en faudra." Lettre à Mersenne du 11 novembre 1640 (AT III, 235-236; O VIII 1, 424;
B 283).
- Marin Mersenne : "Je vous envoie enfin mon écrit de Métaphysique, auquel je n'ai
point mis de titre, afin de vous en faire le parrain, et vous laisser la puissance de le
baptiser (2). Je crois qu'on le pourra nommer, ainsi que je vous ai écrit par ma
précédente, Meditationes de prima Philosophia ; car je n'y traite pas seulement de
Dieu et de l'âme, mais en général de toutes les premières choses qu'on peut connaître
en philosophant par ordre. Et mon nom est connu de tant de gens que, si je ne voulais
pas le mettre ici, on croirait que j'y entendrais quelque finesse, et que je le ferais
plutôt par vanité que par modestie (3).
Pour la lettre à Messieurs de Sorbonne (4), si j'ai manqué au titre, ou qu'il y faille
quelque souscription, ou autre cérémonie, je vous prie d'y vouloir suppléer, et je crois
qu'elle sera aussi bonne, étant écrite de la main d'un autre, que de la mienne. Je vous
l'envoie séparée du traité, à cause que, si toutes choses vont comme elles doivent, il
me semble que le meilleur serait, après que le tout aura été vu par le P. Gibieuf (5),
et, s'il vous plaît, par un ou deux autres de vos amis, qu'on imprimât le traité sans la
lettre, à cause que la copie en est trop mal écrite pour être lue de plusieurs, et qu'on le
présentât ainsi imprimé au Corps de la Sorbonne, avec la lettre écrite à la main; en
suite de quoi il me semble que le droit du jeu sera qu'ils commettent quelques-uns
d'entre eux pour l'examiner (6) ; et il leur faudra donner autant d'exemplaires pour
cela qu'ils en auront besoin, ou plutôt autant qu'ils sont de docteurs (7), et s'ils
trouvent quelque chose à objecter, qu'ils me l'envoient, afin que j'y réponde ; ce qu'on
pourra faire imprimer à la fin du livre. Et après cela il me semble qu'ils ne pourront
refuser de donner leur jugement, lequel pourra être imprimé au commencement du
livre, avec la lettre que je leur écris. Mais les choses iront peut-être tout autrement
que je ne pense ; c'est pourquoi je m'en remets entièrement à vous et au P. Gibieuf,
que je prie par ma lettre (8) de vouloir vous aider à ménager cette affaire : car la
Vélitation que vous savez (9) m'a fait connaître que, quelque bon droit qu'on puisse
avoir, on ne manque pas d'avoir toujours besoin d'amis pour le défendre.
L'importance est en ceci que, puisque je soutiens la cause de Dieu, on ne saurait
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rejeter mes raisons, si ce n'est qu'on y montre du paralogisme, ce que je crois être
impossible, ni les mépriser, si ce n'est qu'on en donne de meilleures, à quoi je pense
qu'on aura assez de peine." Lettre du 11 novembre 1640 (AT III, 239-240; O VIII 1,
424-425; B 285).
(2) Voir à Mersenne, 18 mars 1641 (AT III 340, [O VIII 1, 457] B 305) : « vous en
serez, s'il vous plaît, le parrain ».
(3) L'ouvrage, comme on sait, parut sous le titre Renati Descartes Meditationes de
prima philosophia, in qua Dei existentia et animae immortalitas demonstratur.
(4) L'Epistola dedicatoria (AT VII 680-686) : en se tournant vers la faculté de
théologie, Descartes montrait avoir renoncé à attendre un soutien de ses anciens
maîtres jésuites.
(5) Clerselier Lettres : « Le P. G. », et ailleurs.
(6) Ce qui fut fait le 1er août 1641, avec la nomination de quatre docteurs («
commissaires »), Chastelain, Potier, Hallier et Cornet, « pour examiner la
Métaphysique de Monsieur Descartes ». Il n'en est plus question par la suite,
l'assemblée du 2 septembre se bornant à approuver les conclusions de l'assemblée
précédente (l'achevé d'imprimer des Meditationes est du 28 août) ; voir J.-R.
Armogathe, « L'approbation des Meditationes par la faculté de théologie de Paris
1641 », Bulletin cartésien XXI-XXII, p. 1-3, Archives de philosophie 57, 1, 1994.
(7) C’était la procédure habituelle, qu'on trouve par exemple appliquée au livre de
Pierre Dabillon, De la divinité défendue contre les athées, Paris, 1642, approuvé
quelques semaines plus tôt par la Faculté.
(8) À Gibieuf, 11 novembre 1640 (AT III, 238 l. 8-9, [O VIII 2, 792] B 284).
(9) Sur l'affaire des thèses du P. Bourdin, voir lettre 76, n. 2, p. 940 et dossier
Jésuites, lettre 6, [O VIII 1, 582-591] B 261.
36. ———. 1641. Propositio demonstrata.
Première édition: Clerselier, III, 1667, 475-479.
AT III, 708-714 (CCXLIII bis); O III, 519-524.
La proposition démontrée est la suivante : "Étant donné une section conique
quelconque et un point situé comme on veut hors de son plan, on cherche un cercle
qui soit une base du cône que décrit une droite tournant, à partir du point donné
comme sommet, autour de la section conique donnée; car il n'est pas douteux que la
surface ainsi décrite ne soit conique, et une fois qu'on a trouvé le cercle qui est une
base, cela peut se démontrer facilement."
"Entre avril et septembre 1641, Descartes rédigea (ou fit rédiger) en latin une
solution à un vieux problème géométrique qui aurait été reproposé à la communauté
mathématique par Desargues. Mydorge et Roberval sont censés avoir donné
également chacun la leur (dont on ne sait rien aujourd’hui).
Notre Annexe X montre que Fermat s’est aussi intéressé à la question.
Le texte de cette Propositio a été publié pour la première fois, sous le titre indiqué
plus haut, par Claude Clerselier en 1667 dans le volume III de la Correspondance de
Descartes, pages 475-479 (en annexe à la lettre LXXXIII du 12 octobre 1648. Le
manuscrit semble perdu, et nul ne sait si, par exemple, les six figures qui y sont
insérées sont plus ou moins de la main de Descartes, ou fortement interprétées - et
dégradés - par son éditeur.
(...)
Une nouvelle traduction française de ce texte figure dans l’Annexe I. "
André Warusfel, L’œuvre mathématique de Descartes dans La Géométrie: de la
résolution des équations algébriques à la naissance de la géométrie analytique,
thèse de doctorat, 2010, disponible en ligne à l'adresse: philosophie.ac-creteil.fr/IMG
/pdf/Geometrie.pdf (pp. 576-577, notes omises).
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pièces qui le composent (et de nombreuses lettres pourraient s’y adjoindre), mais
aussi au temps que lui consacre Descartes — pourtant si soucieux de son loisir et de
son repos : pendant près de six ans, tout son temps de travail (et il s'agit des
Principia puis des Passions de l'âme) sera conquis sur la distraction et l'inquiétude
d’une polémique de plus en plus âcre et dangereuse. Il paraît donc impossible, au
simple vu de ces titres et de ces dates, de sous-estimer, encore plus d'ignorer, un
épisode aussi important et importun de la vie de Descartes. Le travail de Theo
Verbeek se justifie donc entièrement, ne fût-ce que d’un point de vue historique ; il
contribuera, comme un document indispensable, à la connaissance du premier
cartésianisme hollandais."
(Jean-Luc Marion, Préface à La Querelle d'Utrecht, p. 8).
"Les Jésuites semblaient être un peu plus partagés que les pères de l’Oratoire sur la
philosophie de M. Descartes ; et la diversité des opinions était grande dans leur
Compagnie sur ses Méditations métaphysiques. Les uns se contentaient de goûter ses
principes et ses raisonnements, ou de louer ses bonnes intentions et ses efforts, sans
aller au-delà, comme le P. Noël, le P. Fournier, le P. J. François, le P. Grandamy, le P.
Dinet, qui était provincial de France à Paris, le P. Charles son parent, qui était
assistant du général de la Compagnie de Rome. Le P. Dinet qui avait été autrefois son
préfet à La Flèche, ayant fait un voyage à Rome sur la fin de la même année [1642],
ne manqua point d’entretenir le P. Charlet du livre de ses Méditations ; et il voulut
donner avis au philosophe de tout ce qui s’était dit de plus obligeant entre eux à son
sujet, par une lettre qu’il lui en écrivit de Rome vers le commencement de l'avent. M.
Descartes crut devoir faire part de la joie qu'il en reçut au P. Mersenne dans le même
temps des étrennes de l’année suivante. Il lui marqua aux termes du P. Dinet l’estime
que le P. Charlet faisait de ses études, et qu’il avait pour sa personne ; croyant que ce
père n'attendait à se déclarer ouvertement pour sa philosophie qu'après la publication
de ses Principes."
Baillet II, chapitre VIII, 159-160.
"De plus, je ne voudrais pas qu'on me croie sur parole lorsque je parle de la vérité
des écrits que je promets, mais qu'on en juge par les Essais que j'ai déjà donnés. Car
loin d'y avoir expliqué une ou deux questions, j'en ai discuté des centaines qui
auparavant n'avaient pas été traitées de la sorte. Et quoique beaucoup de personnes
aient lu mes écrits d'un œil jaloux et aient fait de leur mieux pour les réfuter,
personne, autant que je sache, n'a été à même d’y trouver autre chose que de la
vérité. Qu'on fasse la liste de toutes les questions qui, depuis tant de siècles où il y a
des philosophies, ont été résolues par leur moyen : on n'en trouvera probablement ni
beaucoup, ni de très importantes. J'ose même prétendre qu'il n'y a jamais eu de
question dont je ne pourrais montrer que la solution qu'on en a donnée à partir des
principes propres à la philosophie péripatéticienne est fausse et mal fondée. Qu'on en
fasse l'épreuve : qu'on les propose, non pas toutes il est vrai, car je ne crois pas
qu'elles vaillent la peine d'y employer beaucoup de temps, mais quelques-unes des
plus spéciales. On verra que je tiendrai mes promesses (42). Ma seule restriction, que
je fais pour prévenir tout sujet de chicane, est que si je dis "principes propres à la
philosophie péripatéticienne", je ne veux pas parler de ces questions dont la solution
est tirée soit de l’expérience commune de tous les hommes, soit de la considération
des figures et du mouvement qui est le fait des mathématiciens, soit enfin de ces
notions métaphysiques qui sont généralement reçues et que j'admets comme les
autres : on les trouvera dans mes Méditations.
Qu'on me permette encore ce qui paraîtra un paradoxe : en tant que cette philosophie
est jugée péripatéticienne, et différente des autres, elle ne contient rien qui ne soit pas
nouveau ; et la mienne rien qui ne soit pas ancien. Car en ce qui concerne les
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principes, je n'admets que ceux qui, jusqu'ici, ont été partagés par tous les
philosophes et qui de ce fait sont les plus anciens de tous. Et en ce qui concerne ce
que j'en déduis par après, je ne fais que montrer ce que contenaient ceux-là d'une
façon implicite, mais cela d'une façon tellement claire qu'on voit que cela aussi, se
trouvant naturellement dans l'esprit des hommes, est en réalité très ancien. D'autre
part, les principes de la philosophie ordinaire étaient de toute façon nouveaux à
l'époque où ils furent inventés par Aristote ou par d'autres. Ils ne sont pas maintenant
meilleurs qu'ils n'étaient jadis. On n'en déduit rien qui ne soit pas controversé, et qui
ne puisse être changé ou adapté à la façon d'une École ou au gré du premier
philosophe venu. Par conséquent il n'y a rien qui soit plus nouveau, puisqu'on la
renouvelle tous les jours (43)." (Lettre à Dinet, traduction de Theo Verbeek, La
Querelle d'Utrecht, cit., p. 140, AT VII, 580).
(42) Voir le commentaire de Schoock, Admiranda Methodus, section II chap. 4.
(43) Voir pour tout ce passage, d’une part ce que dit Descartes dans son Discours
(VI, AT VI, 77 ; [O III, 132-133]), d'autre part le commentaire mordant de Schoock
dans l'Admiranda Methodus, section Π, chap. I. C'est à partir d'une notion pareille
que certains cartésiens amorceront la "philosophia novantiqua", synthèse originale
d'aristotélisme et de cartésianisme ; voir A. Heereboord, Meletemata Philosophica
(Lugd. Bat., 1654) ; Philosophia Naturalis cum commentariis Peripateticis (Lugd.
Bat., 1663) ; J. de Raei, Clavis Philosophiae Naturalis Aristotelico-Cartesianae
(Lugd. Bat., 1654) ; De Sapientia Veterum (Amstel., 1669) ; et en général J. Bohatec,
Die Cartesianische Scholastik in der Philosophie und reformierten Dogmatik des 17.
Jahrhunderts, Leipzig, 1912.
39. ———. 1642. Excerpta P. Kircher, De magnete.
AT XI, 635-639; B Op. II 1386-1389.
Annotations à l'œuvre d'Athanasius Kircher (1602-1680) De magnete sive de arte
magnetica Romae: L. Grigarani, 1641.
Lettre du 5 janvier 1643 à Constantin Huygens : "... j'espère qu'elle ne retardera point
l'impression de ma Philosophie, en laquelle j'approche de l'endroit où je dois traiter
de l'aimant (8). Si vous jugez que le gros livre que vous avez de cette matière, duquel
je ne sais point le nom (9), m'y puisse servir, et qu'il vous plaise de me l'envoyer, je
vous en aurai obligation" (AT III 801; O VIII 2, 107; B379)
(8) Il s'agit des §§ 133-183 des Prìncipia IVa (AT VIII-1 275-311).
(9) Le Magnes d'Athanase Kircher (Rome, 1641, 916 p. in-4° ; Cologne, 1643, 797
p. in-4°); Huygens l’envoie à Descartes avec sa réponse du 7 janvier 1643 et un
commentaire acerbe contre les jésuites : « Voici d'ailleurs l'Aimant de Kircherus, où
vous trouverez plus de grimace que de bonne étoffe, qui est l’ordinaire des jésuites.
Ces écrivasseurs pourtant vous peuvent servir en des choses quœ facti sunt, non jurìs
[qui sont d’ordre du fait et non du droit]. Ils ont plus de loisir que vous à se pourvoir
d’expériences : on se peut prévaloir au besoin de leurs rapports » (AT III 802, B380).
40. ———. 1643. Epistola Renati Des-Cartes Ad celeberrimum Virum D. Gisbertum
Voetium. Amstelodami: Ludovicum Elzevirium.
La première édition est suivie de la traduction néerlandaise : Brief van Rene Des
Cartes aen den vermaerden D. Gisbertus Voetius, Amsterdam 1643.
AT VIII-2, 1-194; B Op. I 1493-1691.
Traduction de Victor Cousin dans son édition des Œuvres de Descartes, vol. XI,
Paris: Levrault, 1825, pp. 3-198 ; cette traduction a été reprise par Theo Verbeek
dans La Querelle d'Utrecht, Paris: Les impressions nouvelles, 1988, pp. 327-399,
avec l'omission de la sixième partie.
"C'est ainsi que, croyant écrire une lettre, l'abondance de la matière a produit un
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livre. Je l'ai divisé en neuf parties, afin que chacune pût se lire à part, et peut-être
avec moins d'ennui.
Dans la première, je réponds à l'introduction du livre sur la Philosophie Cartésienne
[1], dans laquelle l'auteur a voulu faire l'énumération sommaire de mes vices.
Dans la seconde, je récompense M. Voet en racontant quelques-unes de ses actions
qui m'ont d'abord fait connaître ses vertus.
Dans la troisième, je parcours le premier et le second chapitre du même livre sur la
Philosophie Cartésienne.
Dans la quatrième, j'expose mon sentiment sur l'usage des livres et la doctrine de
Voet.
Dans la cinquième, je traite brièvement des autres chapitres de ce livre, c'est-à-dire
du reste des deux premières sections.
Dans la sixième, j'examine le livre de la Confrérie de la Vierge.
Dans la septième, je considère les mérites de M. Voet, et l'exemple de charité
chrétienne et de probité qu'il a donné dans cet ouvrage.
Dans la huitième, je reviens au livre sur la Philosophie Cartésienne, et j’en réfute la
préface (que je n'avais pas encore vue) et la troisième section.
Dans la neuvième, je réponds à la quatrième et dernière section du même livre, et je
montre en même temps que ses auteurs sont coupables de la calomnie la plus odieuse
et la plus inexcusable."
(AT VIII-2, 11-12; La Querelle d'Utrecht, cit., p. 330).
[1] Martin Schoock (1614-1669, élève de Voetius), Admiranda Methodus Novae
Philosophiae Renati De Cartes, Ultrajecti [Utrecht] : ex officina Joannis van
Waesberge, 1643 (traduction française par Theo Verbeek, dans La Querelle
d'Utrecht. cit., pp. 157-320).
"Il paraît d'abord incontestable que, dans ses trois textes polémiques, Descartes
retrouve et parfois développe certaines des thèses caractéristiques de sa philosophie.
1. Il invoque, contre Voet, la bona mens (AT VIII-1, 45, ll. 12-13), pour la mettre en
équivalence avec l'humana sapientia (43, ll. 15-17), sur le modèle de la Regula I (AT
X, 359, l. 6 - 360, l. 15).
2. Cette bona mens définit à son tour le domaine de la lumière naturelle, où la
théologie révélée ne peut intervenir (AT VII, 598, ll. 5-11), conformément à une
distinction déjà fixée par la Regula III (AT X, 370, ll. 16-25) et le Discours de la
Méthode (AT VI, 28, l. 16 [O III, 100]) : ce départ entre les deux lumières, naturelle
(raison) et révélée (foi, volonté), devient d’ailleurs aussitôt un argument contre ceux
qui prétendent censurer des thèses philosophiques au nom de l'autorité religieuse ;
car Voet passe d’une facultas (théologie) à une autre (médecine ou philosophie) par
une faute de méthode, avant tout abus de pouvoir : "... censuram tuam theologicam
absque ullo rationis praetextu ad quaestiones pure philosophicas extendere
volueris..." (*) (VIII-2, 132, ll. 17-19). La ratio naturalis (51, l. 31) régente
absolument le domaine qu'elle suffit à définir (3). Ainsi, face au décret de
l'Université qui impose aux professeurs en débat théorique d'être "...contentos
modica libertate disserendi in singularibus nonnullis opinionibus...” (AT VII, 593, ll.
11-12), de se contenter d'une liberté restreinte de discussion sur plus d'une opinion, il
faut revendiquer sans concession la liberté philosophique, absolue dans les limites de
la raison : "... liberum enim semper fuit philosophari." (AT VIII-2, 3, ll. 11-12).
3. Par suite, Descartes mentionne aussi ici sa Methodus ad quaerendam veritatem
(53, 4-5), dans les termes mêmes de la Regula IV, qu'il oppose, comme le faisaient
les Regulae III et X, à la logique de l’Ecole : la bona mens ne peut s’exprimer en
syllogismes (43, 17 sq.), sauf à sombrer dans la Sophistarum Dialectica (46, 16),
"...puerilis illa Dialectica, cujus ope olim Sophistae, nulla scientiam habentes, de
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ne serait-ce, par exemple, que la célèbre définition marginale de l'idée comme «...
omni re cogitata, quatenus habet tantum esse quoddam objectivum in intellecto » [AT
VI, 559]. L'étude systématique des variantes entre le texte français et sa version en
latin n'a été, jusqu'ici, qu’esquissée ( en particulier par E. Gilson ) ; elle seule
déterminera quel texte a effectivement été lu par le public philosophique." (Jean-Luc
Marion, Ouverture, dans: Henry Méchoulan (éd.), Problématique et réception du
Discours de la méthode et des Essais, Paris: Vrin 1988, pp. 18-20)
(2) Nous suivons ici les indications fournies par A. J. Guibert, Descartes.
Bibliographie des œuvres de Descartes publiées au XVIIème siècle, Paris, C.N.R.S.,
1976. Sur ces questions, on tiendra compte des remarques de P. Costabel, ” Propos
de bibliographie matérielle. Editions et émissions des œuvres de Descartes de 1657 à
1673 ", in Bulletin Cartésien V, Archives de Philosophie, 1976, p. 445-456.
42. ———. 1644. Cartesius (Ms. de Leibniz).
Bibliothèque Royale de Hanovre. MS. de Leibniz. Catalogué par Eduard Bodemann,
p. 54 de son ouvrage cité p. 549 ci-avant (*), note a avec l'indication : « Bl. 19-22,
ohne Uebersch., fehlerhafte, z. Th. von L. corrig. Abschr. ».
(*) [Die Leibniz-Handschriften der Kôniglichen ôffentlichen Bibliothek zu Hannover,
von Dr. Eduard Bodemann (Hannover und Leipzig, 1895)]
AT XI, 647-653; B Op. II, 1394-1405.
Édition critique par Vincent Carraud: "Cartesius", Bulletin Cartésien XV, Archives
de Philosophie, 1985, 3, pp.1-6; "Cartesius, ou les pilleries de Mr. Descartes"
présentation, traduction et annotation par Vincent Carraud, Philosophie, mai 1985,
pp. 3-19.
Cette copie MS. remplit deux grandes feuilles, dont chacune est pliée en deux : soit
en tout quatre feuillets, ou huit pages d'écriture. Elle comprend deux parties bien
distinctes, dont la seconde seule porte un titre : Annotationes quas videtur D. des
Cartes in sua Principia Philosophiae scripsisse. Cette seconde partie commence au
tiers environ de la 6e page, et continue jusqu'à la fin de la 8e. Tout ce qui précède,
pp. 1, 2, 3, 4, 5 et 6 (premier tiers de celle-ci), se compose de pensées ou réflexions
détachées, dont chacune est séparée de la suivante par un signe : deux petits traits
horizontaux, barrés de deux petits traits verticaux. (Le même signe sépare encore la
seconde partie de la première.) Cette première partie porte seulement en tête le nom,
écrit après coup et au crayon, de Cartesius. Les huit pages sont de la même écriture,
qui n'est plus celle de Leibniz ; mais celui-ci a fait, de sa main, quelques corrections
à des endroits fautifs. Le fait qu'il ait corrigé lui-même ce texte, montre qu'il y
attachait une certaine importance, et qu'il le croyait sans doute de Descartes.
Est-ce bien cependant un texte authentique de notre philosophe ? Nous n'oserions
l'assurer. Toutefois, dans la première partie, la date d'une observation astronomique,
20 sept. 1642 (p. 65o), serait un argument favorable, et de même quelques renvois
aux Principes, dans la seconde partie. (Voir ci-avant, p. 545.)" (AT XI, p. 647).
"Cette série de notes, découverte tardivement, constitue une énigme pour les
chercheurs. Geneviève Rodis-Lewis a plaidé énergiquement en faveur de son
authenticité (166), verdict que Pierre Costabel confirme sans hésitation (167), alors
que Vincent Carraud y voit un assemblage éclectique et semble incliner à croire à
une série de notes de lecture que Descartes aurait prise sur d’autres auteurs (168),
plutôt que vers un ensemble de pensées appartenant au corpus philosophique
cartésien." (Vlad Alexandrescu, Croisées de la Modernité. Hypostases de l’esprit et
de l’individu au XVIIe siècle, Bucarest: Zeta Books 2012, p. 110)
(166) G. Rodis-Lewis, « Cartesius », Revue philosophique, 2, 1971, p. 211-220.
(167) P. Costabel, Recension sur l’article de G. Rodis-Lewis cité ci-dessus, 1973, p.
444-446.
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comparaison de ces deux philosophies (9). Mais je vous supplie de ne rien encore
dire à personne de ce dessein, surtout avant que ma Métaphysique soit imprimée ; car
peut-être que, si les Régents le savaient, ils feraient leur possible pour me donner
d'autres occupations, au lieu que, quand la chose sera faite, j'espère qu'ils en seront
tous bien aises. Cela pourrait aussi peut-être empêcher l'approbation de la Sorbonne,
que je désire, et qui me semble pouvoir extrêmement servir à mes desseins : car je
vous dirai que ce peu de métaphysique que je vous envoie contient tous les principes
de ma physique.
(...)
Je verrai aussi le cours de philosophie de Monsieur de Raconis (12), qui, je crois, se
trouvera ici : car s'il était plus court que l'autre (13), et aussi bien reçu, je l'aimerais
mieux. Mais je ne veux rien faire en cela sur les écrits d'un homme vivant, si ce n'est
avec sa permission, laquelle il me semble que je devrais aisément obtenir, lorsqu'on
saura mon intention, qui sera de considérer celui que je choisirai, comme le meilleur
de tous ceux qui ont écrit de la philosophie, et de ne le reprendre point plus que tous
les autres. Mais il n'est point temps de parler de ceci, que ma Métaphysique n'ait
passé." (AT III, 230-234; OT VIII, 1, 421-423; B 283)
(7) Eustache de Saint-Paul Asseline, religieux feuillant (1573 - 26 décembre 1640),
est l'auteur d'une Summa philosophica quadripartita (Paris, 1609) (*). Sur lui, voir
l'article de M. Standaert (Dictionnaire de spiritualité, t. 4-2, Paris, 1961, col.
1701-1705).
(9) On sait que le projet, considérablement modifié, donnera en 1644 les Principia
philosophiae.
(12) Charles-François Abra de Raconis [1580 - 16 juillet 1646], Totius Philosophiae
hoc est Logicae, Moralis Physicae et Metaphysicae : brevis & accurata tractatio,
Paris, 1637 [première édition 1617].
(13) La Summa d'Eustache de Saint-Paul.
(*) [Le premier volume de la Summa philosophica quadripartita, de rebus
Dialecticis, Moralibus, Physicis et Metaphysicis, contenait la logique et l'éthique, le
second la physique et la métaphysique.]
"En réalité, les Principia, annoncés dans cette lettre pour la première fois, seront un
livre d’une conception totalement différente. Il ne s’agit pas d’une brève série de
thèses, mais d’un grand livre de 300 pages (in-4°) (2); il ne contient pas un texte de
philosophie scolastique comme point de comparaison; et, par conséquent, sa
composition était un travail d’au moins trois années (3). Nous n’avons aucune idée
de la raison qui conduisit Descartes à abandonner son premier projet ; sa
correspondance reste silencieuse sur ce point (4). Mais sa première déclaration reste
très importante, parce qu’elle nous rappelle qu’on doit lire les Principia comme un
livre de classe, un manuel. C’était une aide-mémoire d’instruction, qui portait
comme un défi à une légion (toujours croissante) de publications scolastiques
contemporaines et notamment, en France, aux deux manuels dont la correspondance
de Descartes signale la lecture à l’automne de 1640, avant de se mettre à écrire les
Principia: celui du feuillant Eustache de Saint-Paul (1573-1640), et celui d’un client
de Richelieu, évêque de Lavaur, François d’Abra de Raconis (mort en 1646) (5)."
(Lawrence W.B. Brockliss, "Rapports de structure et de contenu entre ls Principia et
les cours de philosophie des collèges", dans : Jean-Robert Armogathe, Giulia
Belgioioso (éds.), Descartes: Principia philosophiae (1644-1994), Napoli, Vivarium
1996, pp. 491-492)
(2) Dans l’édition latine de 1644 in-4°.
(3) Les Principia ont été écrits au château d’Endegeest près de Leyde.
(4) Selon sa correspondance, il avait abandonné ce projet en décembre 1641, mais il
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est possible qu’il ait pris la décision beaucoup plus tôt : voyez A.T., n, p. 470: à
Mersenne 22 décembre 1641.
(5) Eustache Asseline dit Eustachius de Sancto Paulo, Summa philosophiae
quadrapartita, Paris, C. Chastellain, 1609; De Raconis, Totius philosophiae brevis
tractatio, 4 parties en deux volumes, Paris, De la Noue, 1622. Il y avait des éditions
de tous les deux à Paris jusqu’en 1640. Ils furent lus par Descartes en novembre
1640 : voyez AT III, pp. 233, 251: correspondance avec Mersenne, 11 novembre et 3
décembre [O VIII 1, 424-425; B 283; O VIII 1, 427-429; B 289].
"En résumé : les Principia appartiennent à une tradition bourgeonnante, une tradition
toujours relativement neuve, celle du manuel de philosophie. Cependant aux mains
de Descartes, cette tradition fut développée dans une direction nouvelle. Les sciences
de la philosophie étant réduites à deux, la physique devenait une science
inorganique, et la méthode syllogistique, scolastique et historique était remplacée par
une méthode quasi-euclidienne. Donc, les Principia n’étaient pas un manuel de type
traditionnel. Mais, en revanche, il s’agissait certainement d’un manuel dont la
structure, le contenu et la méthode d’argumentation étaient déterminés par le besoin
de produire un ouvrage manifestement nouveau, mais suffisamment traditionnel pour
retenir l’intérêt des lecteurs aristotéliciens et susceptible de gagner leurs esprits
comme un travail plus solide et plus moderne que ses concurrents. C’est-à-dire, pour
comprendre les Principia comme texte, on doit réaliser qu’il s’agit d’un livre
étroitement associé avec la philosophie des écoles, et pas simplement parce que
Descartes restait dans une certaine mesure sous l’influence d’Aristote.
Il est en effet possible qu’un événement dans l’enseignement de la philosophie
puisse expliquer pourquoi Descartes a composé les Principia au début des années
quarante. Il semble qu’il prit la décision d’écrire un manuel pendant le mois
d’octobre 1640, à la suite d’une première décision de lire des livres de philosophie
scolastique, annoncée à Mersenne le 30 septembre. Cependant la décision de
composer un manuel n’était pas une conséquence inévitable de sa lecture d’Eustache,
parce que son dessein original était seulement de se préparer mieux pour répondre à
une attaque lancée par les jésuites de Paris contre sa Dioptrique et ses Météores de
1637, attaque que Descartes avait du reste provoquée (52). Il est probable que cette
seconde décision peut être attribuée aux activités du médecin mécaniste à l’université
d’Utrecht, Henri Regius (1598-1679). Regius se disait disciple de Descartes : il avait
été autorisé à expliquer les problèmes de physique à Utrecht en mai de 1640 et le 10
juin il organisa une soutenance publique où on discuta des mérites d’une physiologie
mécaniste. Son enthousiasme lui gagna l’hostilité des autres professeurs, surtout du
théologien Voetius, qui croyait que la philosophie mécaniste menaçait la foi :
Descartes, pendant l'été, fut obligé de défendre son acolyte devant les autorités
universitaires (53). On ne peut pas douter que Regius fût un esprit fort, qui
développait le mécanisme dans une direction matérialiste et anti-cartésienne (54). En
conséquence, on peut suggérer que Descartes se trouva forcé de préparer son manuel
pour révéler au monde (hollandais d’abord) quelle était en réalité sa physique et pour
démontrer sa compatibilité avec la foi chrétienne (calviniste ou catholique). On doit
rappeler que les Principia furent publiés d’abord à Amsterdam en latin et que dans le
paragraphe final Descartes soumettait son livre au jugement de l’Eglise, pas
spécifiquement l’Eglise catholique (55)." (Lawrence W.B. Brockliss, op. cit., pp.
508-510)
(52) Un jésuite parisien, Bourdin, avait organisé une soutenance au collège de
Clermont à Paris où les idées de Descartes étaient critiquées, et Descartes, par
Mersenne, avait demandé que la Société lui communiquât ses objections directement
: voyez AT III, pp. 160-85: lettres à Mersenne, 30 août, 15 et 30 septembre [1640; O
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de continuer à chercher ce que j’ignore." (AT III, 773; O VIII 2, 95; B 323)
(6) Descartes écrivait déjà à Mersenne le 11 novembre 1640 (AT III 233, [O VIII 1, ]
B 283) : « Mon dessein est d’écrire par ordre tout un Cours de ma philosophie en
forme de Thèses, où, sans aucune superfluité de discours, je mettrai seulement toutes
mes conclusions, avec les vraies raisons d'où je les tire, ce que je crois pouvoir faire
en fort peu de mots », et encore : 31 décembre 1640 (AT III 276, [O VIII 1, 441] B
293) : « J’ai résolu d’employer à écrire ma Philosophie en tel ordre quelle puisse
aisément être enseignée. »".
Lettre à Constantin Huygens du 31 janvier 1642 : "Peut-être que ces guerres
scolastiques seront cause que mon Monde se fera bientôt voir au monde (24), et je
crois que ce serait dès à présent, sinon que je veux auparavant lui faire apprendre à
parler latin; et je le ferai nommer Summa Philosophiæ (25), afin qu'il s'introduise
plus aisément en la conversation des gens de l'École, qui maintenant le persécutent et
tâchent à l'étouffer avant sa naissance, aussi bien les Ministres (26) que les jésuites".
(AT III, 782; O VIII 2, 99-100; B 342)
(24) Le jeu de mots est de Huygens : voir à Descartes, 15 (AT II, 679, B 212) et 28
mai 1639 (AT II, 680, B 214).
(25) Voir à Mersenne, 22 décembre 1641 (AT III 465, [O VIII 1, 480-481] B 333).
(26) Les pasteurs calvinistes.
44. ———. 1645? Annotationes quas videtur D. Des Cartes in sua Principia
philosophiae scripsisse.
Première édition dans Foucher de Careil, vol. I, 59-71.
AT XI, 654-657; B Op. II, 1096-1103.
Traduction française de P. et M. Testard, Remarques que Descartes semble avoir
écrites sur ses Principes de la Philosophie (titre de Leibniz), AT IX-2, pp. 361-362 :
"Dans ce tome IX-2 de la réédition de la publication Adam-Tannery, consacré à la
version française des Principes, nous pensons être utile au lecteur en lui donnant une
traduction du texte latin dont Leibniz avait conservé la copie par Tschirnhaus et qui
se trouve au tome XI p. 654-657."
"Leibniz n’a pas douté que ce texte émanait de Descartes lui-même. Il a seulement
hésité sur l’affirmation de la relation de ce texte avec une volonté de l’auteur de
commenter la version latine imprimée de la première partie des Principia.
Les remarques de Descartes sur les Principes de philosophie sont de simples notes,
mais elles forment un appendice précieux à l'ouvrage qu'elles commentent. On n'en
discutera pas l’authenticité après le témoignage de Leibniz, qui a de sa main ajouté la
mention suivante : Annotationes quas videtur D. Cartesius in sua Principia
philosophiæ scripsisse. Mais si ce videtur laissait planer quelque doute (1), il
suffirait, pour convaincre les plus incrédules, de l’étude du texte et de la collation
avec les Principes. Descartes y parle en son nom : « On peut voir, dit-il, le
paragraphe 21 de la première partie de mes Principes de philosophie. » Que veut-on
de plus ? Si le témoignage de Leibniz ne suffit pas, nous avons celui de Descartes."
(Foucher de Careil, vol. I, p. LXXXI)
(1) Nous renvoyons du reste, pour les preuves de l'authenticité, à la préface, ou elles
sont établies d'une manière spéciale.
45. ———. 1645. Lettre apologétique aux Magistrats de la ville d'Utrecht Contre
Messieurs Voëtius, Père et Fils.
Première publication : traduction latine Querela apologetica ad amplissimum
Magistratum Ultrajectinum, Vristadium: L. Misopodem, 1656; texte français dans:
Claude Clerselier (éd.), Lettres de Mr. Descartes ( 3 vols.) Paris : Charles Angot, III :
1667, pp. 1-49.
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qui avait déclaré la Lettre à Voet un "écrit diffamatoire", un jugement des trois
professeurs de droit de Leyde sur le procès de Groningue, et le jugement de la Cour
d'Utrecht sur le procès de Voetius et de Dematius contre Schoock (4). C'est pour
répondre à ces accusations "des Voet et des Voetiens", dont il est dit dans la Préface
qu'ils semblent vouloir "surpasser les flammes éternelles de l'Etna et du Vésuve",
qu'on publie maintenant ce petit ouvrage inconnu du public. D'après le préfacier, on
satisfait ainsi un désir de Descartes qui, en quittant les Pays-Bas pour la Suède, en
avait laissé une copie chez des amis avec l'intention de la faire publier, au cas où il
serait impossible d'obtenir sans éclat la réparation qu'il cherchait. Cette Préface pose
par ailleurs un problème de critique textuelle, en avançant que le texte original avait
été écrit en français et que le texte latin était une traduction faite par un ami. Sur ce
point, cependant, les Actes de la Municipalité sont formels : la première missive était
en latin. Dès lors, ou bien l'éditeur, qui est d'ailleurs inconnu (5), se trompe, ou bien
il a travaillé sur la traduction française que Descartes avait fait faire et qui se trouvait
également parmi les papiers décrits dans l'inventaire. Ainsi le texte latin pourrait bien
ne pas être celui envoyé par Descartes à Utrecht.
Quant au texte français, il a été publié par Clerselier en 1667, dans le cadre de son
édition des Lettres de Descartes, où la Lettre Apologétique aux Magistrats d'Utrecht
figure dans le vol. III. C'est ce texte que nous avons retenu." (Theo Verbeek (éd.),
René Descartes et Martin Schoock, La Querelle d'Utrecht, Paris: Les impressions
nouvelles, 1988, pp. 403-405)
(1) C'est-à-dire Gysbertus Voetius et son fils Paul.
(2) Il s'agit du jugement du 16 mars 1642 (voir notre "Introduction" et Narration, p.
121-122).
(3) C'est effectivement ce qui est suggéré dans la brochure néerlandaise
Aengevangen Proceduuren et qui a conduit Descartes à insister auprès des Etats de
Groningue en 1644.
(4) Officiellement l'action contre Descartes n'a jamais été arrêtée ; on l'a étouffée
pour complaire aux Etats, au Stathouder et à l'ambassadeur de France.
(5) Reneri était mort le 16 mars 1639 ; l’oraison funèbre avait été prononcée le 18
mars suivant par le professeur d'histoire Antonius Æmilius. Le texte avait été
imprimé par l'imprimeur de l'Académie (des exemplaires se trouvent dans la
Bibliothèque Universitaire d'Amsterdam et dans la British Library de Londres) et
réimprimé dans le recueil des Orationes d'Æmilius [Antonius Æmilius, Orationes,
quarum pleraeque tractant argumentum politicum: Accedunt nonnulla eiusdem in
utraque lingua Poemata. Utrecht 1651.]
46. ———. 1647. Les Méditations métaphysiques de René Des-Cartes touchant la
première philosophie dans lesquelles l'existence de Dieu, et la distinction réelle entre
l'âme et le corps de l'homme, sont démontrés. Paris: Chez la Veuve Jean Camusat et
Pierre Le Petit.
AT IX, 1 : Le Libraire au Lecteur 1 ; [Épitre] à Messieurs les Doyen et Docteurs de
la Sacrée Faculté de Théologie de Paris 4 ; Abrégé des six méditations suivantes 9 ;
Méditations touchant la première philosophie 13 ; Premières Objections 73 ;
Réponses 81 ; Secondes Objections 96 ; Réponses 102 ; Exposé géométrique 124 ;
Troisièmes Objections et Réponses 133 ; Quatrièmes Objections 153 ; Réponses 170
; Avertissement de l'Auteur touchant les Cinquièmes Objections 198 ; Avertissement
du traducteur 200 ; Lettre de Descartes à Clerselier 202 ; Sixièmes Objections 218 ;
Réponses 225 ; Privilège 245-246.
B Op. I: Avertissement de l'Auteur touchant les Cinquièmes Objections, 1396-1397;
Lettre de Monsieur Descartes à Monsieur C.L.R., 1398-1411; Avertissement du
traducteur, 1412-1413; Le Libraire au Lecteur, 1414-1417.
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elle fut jugée propre à faire beaucoup honneur à notre Philosophe et à donner un
grand relief à sa Philosophie, et Monsieur le Duc de Luynes son auteur fut prié d'en
souffrir la publication (5).
Peu de jours après Monsieur Clerselier, l'un des plus zélés et des plus vertueux amis
de Monsieur Descartes entreprit de traduire aussi en notre langue les objections faites
à ces Méditations avec les réponses de Monsieur Descartes. Cette traduction était
excellente aussi bien que celle de Monsieur le Duc de Luynes. Mais l'un et l'autre
jugèrent que si elles devaient voir le jour, il fallait qu'elles fussent revues auparavant
par l'auteur même des Méditations, afin qu'en les confrontant avec ses pensées il pût
les mettre le plus près de leur original qu'il serait possible et leur en imprimer le
caractère. Monsieur Descartes fut obligé de se rendre à un avis si important. Mais,
sous prétexte de revoir ces versions, il se donna la liberté de se corriger lui-même, et
d'éclaircir ses propres pensées. De sorte qu'ayant trouvé quelques endroits (6) où il
croyait n’avoir pas rendu son sens assez clair dans le Latin pour toutes sortes de
personnes, il entreprit de les éclaircir dans la traduction par quelques petits
changements, qu'il est aisé de reconnaître à ceux qui confèrent le Français avec le
Latin. Une chose qui semblait avoir donné de la peine aux traducteurs dans tout cet
ouvrage, avait été la rencontre de plusieurs mots de l'art, qui paraissant rudes et
barbares dans le Latin même, ne pouvaient manquer de l'être beaucoup plus dans le
Français, qui est moins libre, moins hardi, et moins accoutumé à ces termes de
l'École (7). Ils n'osèrent pourtant les ôter partout, parce qu'ils n'auraient pu le faire
sans changer le sens dont la qualité d'interprètes devait les rendre religieux
observateurs. D'un autre côté Monsieur Descartes témoigna être si satisfait de l'une et
de l'autre version, qu'il ne voulut point user de la liberté qu'il avait pour changer le
style, que sa modestie et l'estime qu'il avait pour ses traducteurs lui faisait trouver
meilleur que n’aurait été le sien. De sorte que par une déférence réciproque qui a
retenu les traducteurs et l'auteur, il est resté dans l'ouvrage quelques-uns de ces
termes scolastiques, malgré le dessein qu'on avait eu de lui ôter le goût de l'école en
le faisant changer de langue. Cet éclaircissement touchant la traduction des
Méditations et des Objections est nécessaire, non seulement pour justifier les
traducteurs sur les changements dont l’auteur est le seul responsable, mais pour faire
voir aussi que la traduction Française vaut mieux que l’original Latin, parce que
Monsieur Descartes s'est servi de l'occasion de la revoir pour retoucher son original
en notre langue. C'est un avantage qu'a eu aussi dans la suite la version française des
Principes de Monsieur Descartes faite par l’Abbé Picot (8). De sorte que tous ses
ouvrages Français tant originaux que traduits sont préférables à ceux qui sont Latins.
C'est-à-dire que toutes les traductions qu'il a revues valent mieux que ses originaux
mêmes.
Pour ne rien omettre de ce qui peut regarder la traduction des Méditations, il suffit de
remarquer qu'encore qu'elle ait été faite en 1642, néanmoins la révision ou la
correction par Monsieur Descartes ne s’en fit qu'en 1645, et que la première
impression qui en fut faite à Paris ne fut en état de paraître que pour les étrennes de
l'an 1647." (Baillet II 171-173; AT IV 193-195; O VIII 2, 715-716; B 490)
(4) Note en marge dans Baillet : « Lettr(es) et Disc(ours) de Sorb(ière) ».
(5) Il est souvent question de cette traduction des Meditationes dans la
correspondance : voir à Picot, 11 septembre 1644 (AT IV 138, [O VIII 2, 507] B464)
et 9 février 1645 (AT IV 177, [O VIII 2, 508-509] B484); à Clerselier, 10 avril 1645
(AT IV 192-195, [O VIII 2, 714-716] B490), 20 décembre 1645 (AT IV 338-339, [O
VIII 2, 716-717] B531), 12 janvier 1646 (AT IV 357-358, [O VIII 2, 717] B539), 23
février 1646 (AT IV 362, [O VIII 2, 718] B542) et 9 novembre 1646 (AT IV
563-564, [O VIII 2, 725] B585); et enfin à Picot encore, 8 juin 1647 (AT V 63-64, [O
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dans sa dernière qu'il avait déjà traduit les deux premières parties de ses Principes, et
il lui marqua que pour lui il n'avait pas encore su trouver depuis son départ de Paris
le temps de lire la traduction française de ses Méditations faite par Monsieur le duc
de Luynes (5), qu'il avait apportée dans la pensée de s'en faire une occupation
agréable dans le cours de son voyage." (Baillet II, 219-220; AT IV, 138; O VIII 2,
507; B 464)
(2) Note en marge de Baillet : « sans figures ».
(5) Voir à Clerselier, 10 avril 1645 (AT IV, 193; [O VIII 2, 714-716] B 490).
Lettre à Picot du 8 novembre 1644 : "Après la fête de saint Simon (2), le P. Mersenne
délivré de l'impression du gros recueil de pièces physiques et mathématiques qu'il
intitula Cogitata Physico-Mathematica, et n'ayant plus rien au départ de Monsieur
Descartes qui pût le retenir à la Ville, partit pour un voyage de huit ou neuf mois en
Italie (3) ; et Monsieur Descartes, ayant le reste des exemplaires de ses Principes,
sous la disposition de Picot, chez la veuve Pelé, libraire de la rue Saint-Jacques (4),
prit la route de Calais pour retourner en Hollande (5). Il fut arrêté par les vents dans
cette ville pendant près de quinze jours, où il ne put s'occuper d'autre chose que de la
lecture de la version français que l'abbé Picot son hôte avait faite de son livre des
Principes et dont il avait apporté les deux premières parties avec lui. Il en écrivit au
traducteur le 8 de novembre pour lui marquer qu'il la trouvait excellente, et qu'il ne
pouvait la souhaiter meilleure." (Baillet II, 246-247; AT IV 147; O VIII 2, 508; B
468)
(2) Le 28 octobre.
(3) Constantin Huygens recommande Mersenne à Jean-Louis Calandrini à Genève, le
30 août 1644 (Brwg [De Briefwisselìng van Constantjin Huygens, (1608-1687), 6
voll., ‘s-Gravenhage, Martinus Nijhoff, 1911-1917] 55, vol. 4, n. 3723) et le même
jour (n. 3724) à J. Van Santen, lieutenant du prince d'Orange, pour lui laisser visiter
le château d'Orange.
(4) Sur la veuve Pelé et ses relations avec les Elzevier, voir H.-J. Martin, Livre,
pouvoir et société à Paris au XVII siècle, 3e éd., Genève, éd. 1999, t. I, p. 315.
(5) Note en marge dans Baillet : « lettre à Picot du 8 novembre 1644 ».
Lettre à Picot du 9 février 1645 : "L'abbé Picot ne lui [à Descartes] envoya la
troisième partie (2) que le mois de Février de l'année suivante, et il n'en parut pas
moins satisfait (3). L'abbé l'ayant accompagnée de quelques difficultés dont il de
demandait l’explication, Monsieur Descartes en lui envoyant cette explication lui
manda que ces difficultés mêmes, de la manière dont il les lui a proposées, faisaient
honneur à sa traduction et montraient que le traducteur entendait parfaitement la
matière ; parce qu'elles n'auraient pu tomber dans l'esprit d'une personne ne l'aurait
entendue que superficiellement (4)." (Baillet II, 246-247; AT IV 147; O VIII 2, 508;
B 468)
(2) De la traduction française des Prìncipia.
(3) Note en marge dans Baillet : « t. 3 des Lettres p. 612 du 17 février [c’est la lettre
suivante]; item lettre MS de Descartes à Picot du 9 février 1645 ».
(4) Note en marge dans Baillet : « lettre MS à Picot du 1er juin 1645 ».
Changements dans la traduction française :
"L'historique de cette traduction se trouve a sa place dans la Vie de Descartes, [de
Paul Adam] au dernier volume de l'ancienne édition. (*) On ne donnera donc ici que
les renseignements relatifs au texte même.
L'édition française de 1647, comparée a l'édition latine de 1644, offre d'abord une
particularité importante. Entre l'Épitre ou la Dédicace a la princesse Elisabeth, placée
en tête dans l'une comme dans l'autre, et les Principes proprement dits, Descartes a
inséré, dans la traduction, une Lettre de l'Auteur à celui qui a traduit le Livre,
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français du philosophe (1). De fait, nous savons que quelques parties peut-être, ne
fut-ce que celle qui est relative à l'aimant, ont été au moins résumées par lui en
français pour son ami Pollot, qui ne savait pas le latin (2). Et nous savons aussi que
la traduction française contient de nombreuses additions, lesquelles sans doute Picot
n’eût point osé faire de son autorité, et qui, par conséquent, sont de Descartes. C'est
même ce qui permet de résoudre le problème. Qui donc, en effet, pouvait insérer,
chacune à sa place, toutes ces additions dans le texte déjà traduit, sinon l'auteur, et
nul autre que lui ? Et il l'aura fait en recopiant le tout de sa main, travail délicat que
lui seul encore pouvait faire, ce qui explique qu'il en ait pris la peine. C'est ainsi que
nous avons deux textes pour les Principes de la Philosophie : le texte latin, publié
d’abord en 1644, et un texte français, publié en 1647, traduction du premier pour la
plus grande part, et pour le reste addition de Descartes lui-même. Il ne sera pas sans
intérêt de noter, chemin faisant, en quel sens ont été faites ces additions : quelle
préoccupation ou arrière-pensée ne révèlent-elles pas ça et là ? »
On ne peut qu’être surpris de la différence de ton que cet « historique » (publié en
1910) présente avec les p. X a XVIII du présent Avertissement qui porte la signature
de Ch. Adam à une date (décembre 1904) toute proche de la mort de P. Tannery (27
novembre).
Tandis que ces pages aboutissent à des conclusions très nuancées en raison des
constatations concernant la traduction des règles du choc, l' « historique » se fait
affirmatif pour l'attribution à Descartes lui-même de toutes les additions par rapport
au texte latin. C'est donc un fait qu'entre 1904 et 1910 Ch. Adam n’a pas cru devoir
conserver la prudence qui s’exprime si remarquablement à la fin de l'Avertissement
p. XX.
Le lecteur qui suivrait l’invitation de ce premier paragraphe de l'Avertissement et se
fierait a la version de l' « historique » telle qu'elle apparait dans le tome XII de la
précédente édition Adam-Tannery, risquerait d'être induit en erreur. Les nuances et la
prudence que nous soulignons comme les qualités majeures de l'Avertissement sont à
observer soigneusement.
Conformément à la suggestion de la page XVIII et à l’attention portée par Paul
Tannery aux règles du choc, la comparaison attentive du texte latin et de la version
française pour les articles 43 à 52 de la IIe partie est révélatrice. Mais, tandis que
pour les articles 46 à 52 les corrections et additions sont pertinentes, pour les articles
43 à 45 les modifications par rapport au texte latin introduisent des non-sens
flagrants que l'on ne saurait en aucune manière attribuer à Descartes. Cf. Pierre
Costabel « Essai critique de quelques concepts de la mécanique cartésienne »,
Archives Internationales d'Histoire des Sciences, t. XX, N° 80, 1967, p. 235-252.
La critique interne impose au moins pour le passage indiqué la certitude d’une
situation étrange : à savoir la juxtaposition, dans l’édition française des Principes,
d’éléments corrigés et d’éléments abandonnés par l’auteur au jugement infirme de
son traducteur.
L’histoire de la traduction est donc encore à faire et garde ses secrets.
Pour Picot, traducteur des Principes, voir la notice biographique au tome IV de la
Correspondance de Descartes par Adam et Milhaud p. 402 et pour Pollot la notice au
tome I de la même publication p. 459.
Notons encore que les remarques relatives au style de Picot, que le présent
Avertissement contient p. VIII et IX, sont confirmées par la récente découverte d’une
lettre de Picot a Carcavi, du 5 août 1649. Cette lettre ou Picot est consulté en tant que
commentateur autorisé des Principes est actuellement en cours de publication par les
soins de J. Beaude pour le dernier numéro du tome XXIV (1971) de la Revue
d'Histoire des Sciences (P.U.F.). [*]" (Appendice de Bernard Rochot à la nouvelle
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"Le MS. est paginé seulement au recto des feuilles ; f. 27 à f. 43 inclus. Il comprend
trois parties : objections et réponses, 1° sur les Méditations, 2° sur les Principes, 3°
sur le Discours de la Méthode.
Les passages sont indiqués avec renvois aux pages de la seconde édition latine des
Méditations (Amsterdam, Louis Elsevier, 1642), aux articles de chaque livre des
Principes, et aux pages de la traduction latine du Discours de la Méthode, etc.
(Amsterdam, Louis Elsevier, 1644). Après l'indication de chaque passage se trouve
ordinairement une objection, puis la réponse de Descartes, puis une nouvelle
objection, puis une nouvelle réponse, etc. Les réponses sont le plus souvent
annoncées par la lettre R, tandis que rien n’annonce les objections. Cela n’a pas
d’inconvénient, lorsqu’il n’y a qu’une objection et aussi qu’une réponse à la suite.
Mais, s’il y a deux, ou trois, ou même quatre objections successives, il a fallu trouver
l'endroit où chacune d’elles commence et se détache de la réponse qui précède. Nous
avons indiqué cet endroit par la lettre O entre crochets (O désignant les objections,
comme R les réponses). (Charles Adam, AT V, 150).
[*] "Le cahier catalogué à Göttingen Cod. Ms. philol. 264, fit partie de la
bibliothèque d’un Crusius (on lit au verso du premier feuillet : « Ex Bibl. M. Crusii
»).
"Adam (2), suivi par John Cottingham (3) et Jean-Marie Beyssade (4), estime qu’il
doit s’agir de Christian August Crusius (1715-1775), adversaire de Leibniz et Wolff,
qui devint professeur de théologie à Leipzig en 1750. Mais en réalité, comme
l’indique Hans Werner Arndt (5), il doit plus vraisemblablement s’agir de Magnus
Crusius (1697-1751), le livre paraissant être entré dans l’actuelle Niedersächsische
Staats und Universitätsbibliothek où M. Crusius était théologien, l’année même de sa
mort, comme l’atteste la date 1751 inscrite sur le premier feuillet où apparaît
également un cachet Ex Bibliotheca Acad. Georgiæ Augustæ - George Auguste étant
le nom de l’Université, fondée en 1737." (Xavier Kieft, "L'Entretien de Descartes
avec Burman : un malentendu historico-philosophique", Klesis. Revue
philosophique, 11, 2009, pp. 108–134)
(2) Édition de 1896, p. 1 et Adam [1937], p. VIII.
(3) Descartes’ Conversation with Burman, translated with introduction and
commentary by J. Cottingham, Oxford, Clarendon, 1976 (désormais cité «
Cottingham »), p. XII.
(4) Beyssade [1981], p. 5.
(5) R. Descartes, Gespräch mit Burman, Übersetzt und herausgegeben von H. W.
Arndt, Hambourg, Meiner, 1982 (désormais cité « Arndt »), p. I et pp. XXVII-
XXVIII. Arndt pense même avoir identifié l’écriture du dit Magnus Crusius.
Johannes Clauberg cite un passage de l'Entretien avec Burman (AT V 177) dans le
chapitre XVIII de sa Defensio cartesiana, Amstelodami, 1652 (repris dans Opera
Omnia Philosophica, Amstelodami 1691, p. 1000, réedition Hildeshein: Georg Olms
1968)
53. ———. 1648. [Traité de l'érudition].
Dans une lettre à Descartes du 5 décembre 1647 Élisabeth de Bohême, princesse
Palatine, écrivait :
"Cela vous montre combien le monde a besoin du Traité de l'Érudition, que vous
avez autrefois voulu faire. Je sais que vous êtes trop charitable pour refuser une
chose si utile au public, et que, pour cela, je n'ai pas besoin de vous faire souvenir de
la parole que vous [m']en avez donnée." (AT V 97, 4-19 = Baillet II, 337; B636).
Le 31 janvier 1648 Descartes répond :
"J'ai reçu les lettres de votre Altesse du 23 décembre presque aussitôt que les
précédentes, et j'avoue que je suis en peine touchant ce que je dois répondre à ces
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précédentes, à cause que votre Altesse y témoigne vouloir que j'écrive le Traité de
l'Érudition, dont j'ai eu autrefois l'honneur de lui parler. Et il n'y a rien que je
souhaite avec plus de zèle, que d'obéir à vos commandements ; mais je dirai ici les
raisons qui sont cause que j'avais laissé le dessein de ce traité, et si elles ne satisfont
à votre Altesse, je ne manquerai pas de le reprendre. (2) La première est que je n'y
saurais mettre toutes les vérités qui y devraient être, sans animer trop contre moi les
gens de l'École, et que je ne me trouve point en telle condition que je puisse
entièrement mépriser leur haine (3). La seconde est que j'ai déjà touché quelque
chose de ce que j'avais envie d'y mettre dans une préface qui est au-devant de la
traduction française de mes Principes, laquelle je pense que votre Altesse a
maintenant reçue. La troisième est que j'ai maintenant un autre écrit entre les mains,
que j'espère pouvoir être plus agréable à Votre Altesse : c'est la description des
fonctions de l'animal et de l'homme." (AT V, 111-112 = Baillet II, 337-338; O VIII 2,
292; B642).
(2) On peut se demander s'il ne s'agit pas ici des Regulae (voir Descartes, Écrits de
jeunesse, éd. V. Carraud, Paris, 2013).
(3) Allusion à ses démêlés à Leyde (avec Revius) et à Utrecht (avec Voet).
54. ———. 1649. Les passions de l'âme. Paris: Henry Le Gras.
AT XI, 301-488; B Op. I, 2300-2527.
Traduction latine : Passiones animae per Renatum Des-Cartes: Gallice ab ipso
concriptae, nunc autem in exterorum gratiam Latina civitate donatae ab
H.D.M.I.V.L., Amstelodami apud L Elzevirium, 1650 (la traduction est de Henricus
Des-Marets, fils de Samuel Desmarets (1599-1673); voir : Paul Dibon, "La
Traduction latine des Passions de l'âme", dans Regards sur la Hollande du siècle
d'or, Napoli, Vivarium, 1990, pp. 523-550.)
Premières références au thème des "passions de l'âme" dans les écrits de Descartes :
"En ce qui concerne la variété des passions que la musique peut exciter par la variété
de la mesure, je dis qu’en général une mesure lente excite en nous également des
passions lentes, comme le sont la langueur, la tristesse, la crainte, l’orgueil, etc., et
que la mesure rapide fait naître aussi des passions rapides, comme la joie, etc. Il faut
en dire autant des deux genres de battue : la mesure carrée, qui se résout toujours en
membres égaux, est plus lente que celle qui est battue en triplât, c’est-à-dire celle qui
se compose de trois parties égales. La raison en est que celle-ci occupe davantage le
sens parce qu’il y a en elle plus de membres à remarquer — à savoir trois —, tandis
qu’il n’y en a que deux dans l’autre. Mais une recherche plus exacte de cette
question dépend d’une excellente connaissance des mouvements de l’âme, et je n’en
dirai pas davantage." (AT X 95; traduction du latin par Frédéric de Buzon, Abrégé de
Musique. Compendium Musicae, Paris: Presses Universitaires de France, 1987, 62).
"A la suite de cela, il faudrait maintenant parler des diverses vertus des consonances
à exciter les passions ; mais une recherche plus exacte de cette manière peut être tirée
de ce qui a été dit, et dépasserait les limites d’un abrégé. Car ces vertus sont si
variées et dépendent de circonstances si légères qu’un volume entier ne suffirait pas
à épuiser la question." (AT X, 111; Abrégé de Musique cit., 88)
"De là, et d’autres choses semblables on pourrait déduire plusieurs choses concernant
la nature des degrés, mais cela serait long. Il suit que je devrais traiter maintenant de
chaque mouvement de l’âme qui peut être excité par la musique, et je pourrais
montrer par quels degrés, consonances, rythmes et choses semblables ils doivent être
excités ; mais cela dépasserait les limites d’un abrégé." (AT X, 140; Abrégé de
Musique, cit., 138)
"Il y a dans tout esprit certaines parties qui, touchées même légèrement, excitent des
passions fortes.
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avant de me les envoyer, qu'ils ne contenaient rien de fort exquis, et que j'avais
d'autres occupations, je les ai laissé reposer, après avoir lu deux ou trois heures dans
le premier, sans rien y trouver que des paroles."
(9) Peut-être les Caractères de Marin Cureau de La Chambre, dont il est déjà
question dans à Mersenne, 11 juin 1640 (AT III 87, [O VIII 1, 383] B 255) et 28
octobre 1640 (AT III 207, [O VIII 1, 415-416] B 278).
(10) Le Traité des quantités de J.-A. Le Tenneur.
En 1645 Descartes suggère à la princesse Élisabeth de lire le De vita beata de
Sénèque (lettre du 21 juillet, (AT IV 253; O VIII 2, 208; B511) ; voir aussi les lettre
du 4 août 1645 : "Lorsque j'ai choisi le livre de Sénèque De vita beata, pour le
proposer à Votre Altesse comme un entretien qui lui pourrait être agréable, j'ai eu
seulement égard à la réputation de l'auteur et à la dignité de la matière, sans penser à
la façon dont il la traite, laquelle ayant depuis considérée, je ne la trouve pas assez
exacte pour mériter d'être suivie." (AT IV, 263, [O VIII 2, 209] B 514), et du 18 août
1645 : "J'ai dit ci-devant ce qu'il me semblait que Sénèque eût dû traiter en son livre ;
j'examinerai maintenant ce qu'il traite." (AT IV, 271-272; O VIII 2, 224; B 517).
Descartes expose les premières esquisses de sa théorie des passions dans trois lettres
à Élisabeth : 1 septembre 1645 (AT IV 281-287; O VIII 2, 219-223; B 524) ; 15
septembre 1645 (AT IV, 290-296; O VIII 2, 225-2231; B 519) ; 6 octobre 1645 (AT
IV, 304-317; O VIII 2, 231-239; B526).
Le commencement du livre est annoncé dans la lettre à la princesse du 3 novembre
1645 : "J'ai pensé ces jours au nombre et à l'ordre de toutes ces passions, afin de
pouvoir plus particulièrement examiner leur nature ; mais je n'ai pas encore assez
digéré mes opinions, touchant ce sujet, pour les oser écrire à Votre Altesse, et je ne
manquerai de m'en acquitter de plus tôt qu'il me sera possible." (AT IV, 331; O VIII
2, 242; B 529).
Un première version du livre est terminée au début de 1646 (lettre d'Élisabeth du 25
avril) : "Cela m'a empêché jusqu'ici de me prévaloir de la permission, que vous
m'avez donnée, de vous proposer les obscurités que ma stupidité me fait trouver en
votre Traité des passions (3), quoiqu'elles sont [sic] en petit nombre, puisqu'il
faudrait être impassible, pour ne point comprendre que l'ordre, la définition et les
distinctions que vous donnez aux passions, et enfin toute la partie morale du traité,
passent tout ce qu'on a jamais dit sur ce sujet." (AT IV 404; O VIII 2, 252; B 554).
(3) Descartes s'était rendu le 7 mars à La Haye (à Chanut, 6 mars 1646, AT IV, 376 l.
11, [O VIII 2, 252] B 545) et avait pu y laisser à la princesse une copie manuscrite de
son Traité des passions de l'âme.
Voir aussi la lettre à Élisabeth du mai 1646: "Je reconnais, par expérience, que j'ai eu
raison de mettre la gloire au nombre des passions (2) ; car je ne puis m'empêcher
d'être touché, en voyant le favorable jugement que fait Votre Altesse du petit traité
que j'en ai écrit (3) Et je ne suis nullement surpris de ce qu'elle y remarque aussi des
défauts, parce que je n'ai point douté qu'il n'y en eût en grand nombre, étant matière
que je n'avais jamais ci-devant étudiée, et dont je n'ai fait que tirer le premier crayon
(4), sans y ajouter les couleurs et les ornements qui seraient requis pour la faire
paraître à yeux moins clairvoyants que ceux de Votre Altesse." (AT IV 407; [O VIII
2, 254] B 556).
(2) Passions de l'âme III § 204 (AT XI, 482).
(3) Voir lettre à Élisabeth, 25 avril 1646 (AT IV, 404; [O VIII 2, 252] B 554).
(4) Au sens d' « esquisse ».
Le 20 novembre 1647 Descartes envoi une copie manuscrite de son livre à la Reine
Christine de Suède : "J'ai appris de Monsieur Chanut (2) qu'il plaît à Votre Majesté
que j'aie l'honneur de lui exposer l'opinion que j'ai touchant le Souverain Bien,
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L'authenticité de cet écrit a été déniée par Richard A. Watson, "René Descartes n'est
pas l'auteur de la Naissance de la paix", Archives de Philosophie, 53, 1990, pp.
389-401 et Descartes's Ballet. His Doctrine Of the Will and His Political Philosophy,
St. Augustine's Press, South Bend, 2007 (avec la traduction du texte) et par Matthijs
van Otegem, A Bibliography of the Works of Descartes (1637-1704), Utrecht:
Proefschrift Universiteit, 2002, vol. II, pp. 731-735.
Geneviève Rodis-Lewis a défendu l'authenticité de l'œuvre (contra Watson) dans:
"Gli ultimi scritti di Descartes", traduit en italien par Leon Ginzburg, Discipline
Filosofiche, 1993, pp. 15-42, version française dans : G. Rodis-Lewis, Le
développement de la pensée de Descartes, (recueil d'articles), Paris: Vrin, 1997, pp.
203-223.
56. ———. 1649. Projet de comédie (Extraits de Baillet).
Baillet II, 407-408 (le texte est perdu); AT XI 661-662; B Op II, 922-923.
"Nous avons pareillement une espèce de Comédie française, qu'il fit en prose mêlée
de quelques vers, pendant son séjour à la Cour de Suède. Ce fut l'un des fruits de
l'oisiveté où la Reine le retint durant l'absence de l'Ambassadeur de France, dont elle
attendait le retour. La pièce est imparfaite, et le quatrième Acte ne paraît pas même
achevé. Elle a tout l'air d'une Pastorale ou Fable bocagère. Mais quoiqu'il semble
avoir voulu envelopper l'amour de la Sagesse, la recherche de la Vérité, et l'étude de
la Philosophie, sous les discours figurez de les personnages ; on peut dire que tous
ces mystères seront assez peu importants au Public, tant qu'il jouira des autres écrits,
où M. Descartes s'est expliqué sans mystères. » (Baillet II, 407)
57. ———. 1650. Projet d'une académie à Stockholm (Extraits de Baillet).
AT XI 663-665; Baillet II, 411-413; B Op. II, 925-929.
C'est le dernier écrit de Descartes (1 février 1650).
"...La Reine, qui ne songeait à rien moins qu'à l'incommoder, l'obligea, dans le fort
de la maladie de M. l'Ambassadeur, de retourner encore au Palais après-midi pendant
quelques jours, pour prendre avec elle la communication d'un dessein de Conférence
ou d'Assemblée de Savants, qu'elle voulait établir en forme d'Académie, dont elle
devait être le chef et la protectrice. Elle regarda M. Descartes comme l'homme du
meilleur conseil qu'on put écouter sur cet établissement, et elle le choisit pour en
dresser le plan et pour en faire les règlements. Il lui porta le mémoire qu'il en avait
fait, le premier jour de Février, qui fut le dernier qu'il eut l'honneur de voir la Reine."
(Baillet II, p. 411).
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Bibliographie des études sur les Regulae ad directionem ingenii et la recherche de la mathesis
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