L'atitude Paradoxale
L'atitude Paradoxale
L'atitude Paradoxale
1
L’attitude paradoxale de Voltaire envers la femme dans ses contes.
by
Amreeta.B.Chumbhit (Jheengut)
(3375-739-9)
MASTER OF ARTS
In the subject
FRENCH
at the
2017-2018
2
TABLE DES MATIÈRES Page
Remerciements 5
Introduction 6
Chapitre 1: 11
Chapitre 2.
2.3 Les femmes dans la vie de Voltaire qui lui ont servi de modèle
ou de muse. 26
Chapitre 3.
3.1 La femme- figure déterminante dans les contes de Voltaire. 31
3
Chapitre 4 : La Sensualité. 46
4.1 La sensualité. 46
Conclusion. 78
Appendice. 81
Bibliographie. 82
4
REMERCIEMENTS
A mon mari qui m’a soutenue tout le long de ce parcours et qui m’a toujours
poussée à aller de l’avant. Je ne le remercierai pas assez pour avoir toléré mes sautes
d’humeur et pour s’être occupé des enfants afin que je puisse me plonger dans mes
recherches.
Une mention spéciale à mes amies qui m’ont aidée à trouver les livres de
références et qui m’ont encouragée d’une manière ou d’une autre.
Je ne pourrais oublier mes parents sans qui je ne serais pas de ce monde et qui
m’ont encouragée à continuer mes études.
Je remercie aussi Mme Helene du Preez pour m’avoir conseillée dans mon
travail.
Cette dissertation est dédiée aux trois hommes qui occupent ma vie : A mon
époux Soudesh, mes deux enfants chéris, Ian et Ioan, qui sont les prunelles de mes
yeux et sans qui ma vie n’aurait plus de sens.
5
INTRODUCTION.
Les hommes de lettres se réunissaient ainsi dans des endroits qu’on appelait les
foyers de la vie intellectuelle. Les clubs, les cafés et les salons devinrent une vogue
extraordinaire et en 1715 on en comptait déjà trois cents à Paris. Parmi les salons
connus, le salon de la Duchesse Du Maine (1699-1753), le salon de la Marquise De
Lambert (1710-1733) et le salon de Madame De Tencin (1726-1749) accueillaient des
poètes, des hommes de lettre, des gens de qualité entre autres. Pendant la seconde
moitié du siècle, d’autres salons s’affirment avec une grande hardiesse; l’esprit
philosophique est ainsi répandu grâce à ses salons et à ses dames.
En général la femme a été un objet d’écrits littéraires depuis peut-être la nuit des
temps. Elle a été décrite sous forme de femme tout simplement: « femme mythique,
femme-ange, femme-démon, femme séductrice, femme protectrice et femme
destructrice »(1).
Elle est bien moins forte que l’homme, moins grande, moins capable de longs travaux.
Son sang est aqueux, sa chair moins compacte, ses cheveux plus longs, ses membres
plus arrondis, ses bras moins musclés, sa bouche plus petite, ses fesses plus relevées
et son ventre plus long. Ces caractères distinguent la race féminine sur toute la terre,
chez toutes les espèces, « depuis La Laponie jusqu’au Soudan, en Amérique comme
en Chine»(2).
Certainement les femmes ont largement figuré dans les œuvres de Voltaire, que
ce soit dans ses poèmes, dans ses pièces de théâtre, même dans une épopée, ainsi
que dans ses nombreuses correspondances. La femme sera donc le centre d’intérêt
proposé dans ce mémoire. Les quatre contes étudiés sont: Zadig (1748), Candide
(1759), L’Ingénu (1767) et La Princesse de Babylone (1768), car ce sont les contes les
plus connus de Voltaire et ceux dans lesquels la figure féminine occupe une place
centrale ou secondaire mais elle reste tout de même pertinente.
1
S. Paddia. La représentation de la femme dans l’œuvre Romanesque de Marcelle Lagesse, L’Ile
Maurice, 1997.
2
http://www.neoprofs.org/t26203-question-sur-voltaire-et-les-femmes
7
Les contes ont valu à Voltaire jusqu’à aujourd’hui la plus grande part de sa gloire
littéraire, tant ils semblent donner la meilleure image de son génie et de son talent
d’écrivain. La forme du conte philosophique est celle que l’on associe le plus
spontanément au XVIIIème siècle(3), car les compositions sont courtes, pleines d’esprit
et de fantaisie(4). Notre analyse sera divisée en plusieurs grandes parties: la sensualité,
l’influence politique et l’éducation de la femme. Au fil de l’écriture, le but sera de
déterminer les images et la peinture que l’auteur offre de la femme.
On retrouve plusieurs autres salons tenus par les dames, tels que ceux de Mme
de Prie de Chantilly, la Duchesse de Villars à Vaux, la Marquise de Lambert et du
Deffand où le grand homme était Voltaire(6).
3
M. Kerautret, Histoire de la Littérature Française du XVIIIe, Presses Universitaires de France, 1983,
p. 23
4
D. Rince, Textes Franҫais et histoire littéraire: XVIIIe siècle, Edition Fernand Nathan, 1984, p.147
5
Ibid, p.188
6
Ibid, p.9
8
Mais, en revanche, ce même siècle réservait traditionnellement à la femme une
place en retrait. Ce siècle développait chez elle l’humilité et la réserve. Ainsi, il existait
aussi des femmes à cette même époque qui étaient traitées en objets, enfermées dans
des couvents ou mariées contre leur gré et souvent conquises par ruse(7).
De plus, l’éducation des filles était bien négligée, en comparaison de celle des
garçons. Il semble même qu’il y ait eu un recul de l’éducation des filles au XVIIIème
siècle, de l’ancienne monarchie. Il y avait cette peur d’instruire les filles la littérature
romanesque car cela risque de leur ouvrir l’imagination. Les jeunes femmes dans les
couvents étaient éduquées pour être femmes du monde, vertueuses le plus possible,
habiles à la pratique des arts(8). Par conséquent, les femmes étaient strictement
confinées dans les soins de ménage où elles exerçaient les vertus domestiques.
Voltaire reflète la réalité de son époque dans ses contes. Il montre sa sensibilité
à la détresse des jeunes filles sans défense, qui sont enfermées très jeunes dans des
couvents dans le but de les couper du monde extérieur. Soumises à des disciplines très
strictes, ses personnages féminins sont, en effet, des marionnettes et deviennent tout
simplement des porte-paroles qui véhiculent ses idées. Il avait pour but de montrer
comment certaines catégories de femmes étaient traitées à cette époque. Certes dans
ces êtres féminins se dessinent de manière frappante les traits de la femme au
XVIIIème siècle.
7
D.Rince, op.cit., p.188
8
B.Didier, Histoire de la Littérature Franҫaise du XVIIIe siècle, Edition Nathan, 1992, p.55
9
Dans ses contes, Voltaire nous présente plusieurs classes de femmes, que nous
allons découvrir dans cette rédaction, à savoir des aristocrates telles qu’Astarté,
Formosante, La Vieille et Cunégonde; des bourgeoises notamment Mlle de St. Yves et
des femmes de la classe ouvrière, comme Paquette. Malgré leur diversité, elles
subissent le même traitement dans les contes de Voltaire. Pour lui, la classe n’a rien à
voir avec les comportements des femmes. Ainsi, la nature des femmes reste la même.
Durant sa vie, Voltaire écrivit presque 20,000 lettres et une grande quantité de
ces écrits était adressée à des femmes comme la Marquise du Deffand, à Mme
Graffigny, à Mme Geoffrin, à Mme de Châtelet, à Mme de Pompadour entre autres.En
tenant compte de ses nombreuses relations avec les femmes, on ne peut plus soutenir
l’hypothèse qui veut qu’il fût misogyne. De plus, il ne fréquentait que les grandes dames
qu’il considérait comme des êtres exceptionnels telles que Madame de Pompadour, la
Marquise du Châtelet, Catherine II, et d’autres princesses allemandes qui l’aidaient en
période de crises.
9
J.Adams. 1974. La femme dans les contes et les romans de Voltaire, A.G.Nizet, Paris, p.18
10
Ibid, p.23
10
Au cours de notre recherche, nous avons perçu l’ambiguïté qui entoure les idées
de Voltaire. Nous essaierons d’analyser l’attitude paradoxale de Voltaire envers la
femme car malgré ses nombreuses relations amoureuses, il continue à railler le sexe
féminin dans ses contes et témoigne un certain mépris à leur égard. Valorisant la
femme à un moment donné et négligeant la femme à un autre moment, la décrivant de
façon dégradante quelque fois et lui donnant une position respectable une autre fois,
était-ce le style de Voltaire pour faire de ses textes un succès à cette époque où était-
ce vraiment ce qu’il ressentait envers la femme ?
CHAPITRE 1
Il fait son entrée dans la société mondaine et libertine où il séduit les gens nobles
et les poètes par sa finesse. Toutefois craignant ses fréquentations, son père l’envoie
chez le marquis de Châteauneuf. En raison d’une relation tapageuse avec une fille de
petite vertu, il est chassé de son poste. Il passe alors les vacances au château de Saint
Ange chez un homme riche, M.de Caumartin, où il se consacre à la lecture, et écoute
et écrit les récits de ce dernier. Il se fait une place dans le monde littéraire.
11
Par la suite Arouet fils s’installe à Sully sur Loire en 1716 où il profite des bals et
des festins grandioses. Il vit dans le confort et son esprit rebelle ne tarde pas à récidiver
et à vingt-trois ans, il compose de nouveaux ouvrages de vers satiriques contre le
Régent et est envoyé à la Bastille durant onze mois. En 1718, à vingt-quatre ans, il
devient célèbre grâce au succès d’Œdipe suivi du poème épique La Henriade en 1723.
A partir de cet instant, il donne un nouveau cours à sa vie et à ses talents. Il exprime
avec puissance la tragédie et la poésie épique.
Il fréquente les grands seigneurs et triomphe dans les châteaux et les salons, et
pour effacer son passé, il prend le pseudonyme de Voltaire. En 1726, Voltaire subit une
humiliation qui donnera à sa vie une autre tournure. A cause d’une réponse
impertinente que Voltaire donne au chevalier de Guy-Auguste de Rohan-Chabot, il est
frappé à coups de gourdin et voulant obtenir réparation, Voltaire se rend compte
qu’aucun de ses amis aristocrates ne prend son parti. Même le Duc de Sully refuse de
l’accompagner chez le commissaire de police. Voulant se venger par les armes et se
faire justice lui-même, le chevalier donne l’ordre de le faire enfermer à la Bastille le 17
avril. Il est libéré deux semaines après à condition qu’il s’exile, et son séjour en
Angleterre de 1726 à 1729 lui fera découvrir son goût pour la philosophie. Il mène une
vie agréable et s’introduit dans un monde élégant de grands personnages, de Lords et
de ducs, et est même reçu à la Cour par le prince de Galles.
Parmi les tragédies de Voltaire, Zaïre (1732) reste la tragédie qui remporta un
triomphe exemplaire. Il écrit d’autres tragédies avec moins de succès et il critique la
guerre dans L’Histoire de Charles XII en 1731.
12
Toutefois en condamnant les institutions françaises dans les Lettres
Philosophiques, Voltaire est menacé d’emprisonnement. Il cherche refuge chez Mme
du Châtelet au Château de Cirey. Pendant dix ans, il va vivre le grand bonheur et
recevoir des amis et admirateurs; il écrit de nouvelles tragédies et pratique des
expériences scientifiques avec Mme du Châtelet qui jouera un rôle essentiel dans
l’évolution de Voltaire.
En 1744, Voltaire retourne à Paris grâce à son ancien condisciple Argenson qui
est nommé ministre des Affaires étrangères. Il est reçu à l’Académie française grâce à
ses poèmes officiels et il devient historiographe du roi en 1746 ; mais toutefois sa
rencontre avec la Reine ne sera pas fructueuse. Il s’exile alors à Potsdam chez Fréderic
II de Prusse. Ensuite il s’installe définitivement à Ferney et il finit par composer Zadig
en 1747 où il dénonce la société et la religion. 1749 reste une année tragique et
douloureuse pour Voltaire car Mme du Châtelet meurt et il en est très affligé. En 1752,
il écrit Micromégas et en 1756, après vingt années de recherches, Voltaire publie
L’essai sur les mœurs. En 1759, apparaît Candide ou l’Optimisme, son chef d’œuvre
où il dénonce l’absurdité de la vie.
Dans la littérature du XVIII siècle, on trouve des contes de fées, des contes
galants, des contes moraux, des contes allégoriques et des contes philosophiques. Le
conte philosophique est un genre littéraire né au XVIII ème siècle dont le but est de
13
critiquer la société et la condition féminine. Le conte philosophique est une histoire
fictive basée sur des cultures, des sociétés, la noblesse, les régimes politiques et la
religion. Certains auteurs de l’époque trouvaient ce genre littéraire comme un moyen
pour transmettre leurs idées sans subir la censure qui sévissait à cette époque. Le
conte philosophique pouvait être un court récit allégorique s’inspirant des personnages
fictifs, d’un monde imaginaire dont on pouvait tirer à la fin une morale.
14
1.3 La philosophie, les idées, le style et l’esprit de Voltaire
Avec Candide, Voltaire a inventé un nouveau genre pour évoquer les vices de la
société et ce genre sera connu comme le conte philosophique. Voltaire adopte le style
qui lui est propre, le schéma de la narration et du conte. En mélangeant les aventures
imaginaires de ses personnages, Voltaire peut dire des choses qui ne sont pas toujours
acceptables, et peut faire des réflexions philosophiques sur la société et sur les grands
de son temps.
15
Sa façon de décrire la femme provient de son esprit et de son style d’écriture. Il
est le seul à décider de l’image qu’il donnera à son personnage féminin. Les contes
philosophiques de Voltaire sont les plus appréciés de ses écrits car ils illustrent les
pensées de l’auteur.
Voltaire avait un style qui lui était propre. Il utilise le cadre oriental pour fasciner
et plaire aux lecteurs et en même temps il se sert de ces histoires orientales pour
critiquer avec hardiesse des sujets actuels comme la religion, la société et la place de
la femme. Il finit toujours ces récits de la façon la plus attendue des lecteurs, par une
fin galante ou une fin facile. Le dénouement se termine par une fin heureuse comme
dans les contes classiques. Zadig devient roi de Babylone et épouse Astarté, Candide
rachète Cunégonde et l’épouse, c’est la fin idéale que tous les lecteurs attendent.
Voltaire écrit ses contes comme d’autres contes traditionnels. Dans Candide,
l’histoire commence dans le Château de M. le baron de Thunder-Ten-Tronckh à une
époque indéterminée et le dénouement est fluide, rempli d’aventures. Toutefois,
Voltaire ajoute sa touche unique en la modifiant à sa façon en ajoutant une analyse
philosophique afin de véhiculer ses idées et de tirer une morale pour conclure.
16
Le château du Baron Thunder-Ten Tronckh rappelle le château de Cirey qu’il
décrit comme le « paradis terrestre » où il avait passé des moments magnifiques avec
Mme du Châtelet qu’il avait tant aimée.. On voit clairement les traits traditionnels et
philosophiques du conte présent car, mis à part le château, les personnages sont
presque tous nobles.
Par ses écrits philosophiques Voltaire nous fait découvrir les sentiments vécus
par le personnage: les sentiments d’amour, la description de la société et les difficultés
subies par les femmes. La vie de Voltaire est dévoilée dans plusieurs de ses œuvres.
Plusieurs des pièces écrites par Voltaire sont dédiées à la vie des femmes et au pouvoir
dans les civilisations orientales. En examinant les idées orientales des contes de
Voltaire on réalise que comme ses personnages, Voltaire cherche le bonheur suite à
de multiples épreuves dans sa vie.
12 http://www.ebooksgratuits.com/blackmask/voltaire_zadig.pdf.p28
17
Ainsi, les femmes sont maîtresses dans la maison. Elles influencent la société à
travers le mari. N’ayant pas de pouvoir elles utilisent la ruse et la séduction. Dans
l’espace public les hommes sont prépondérants. Les femmes qui sortent sont voilées.
Elles cachent leurs visages devant les étrangers. Après on voit qu’Astarté est obligée
de se voiler en étant l’esclave d’Ogul. Le voile reste un élément de la tenue imposée à
la femme Orientale de l’époque. La femme est même condamnée à être brûlée vive
après le décès de son mari comme dans le cas d’Almona qui fut délivrée par Zadig.
Le destin de la femme est décidé par les autres. Les prêtres ne veulent pas
perdre l’occasion d’avoir les biens de cette dernière quand elle sera brûlée:
« Les pierreries et les ornements des jeunes veuves ……. leur appartenaient de droit. » (13)
Il est obligé de fuir et Voltaire illustre par les images et les situations de ce conte
la tyrannie et les caractères stéréotypés ainsi que le pouvoir des Sultans orientaux au
XVIIIème siècle. L’exemple du roi Moabdar exprime la colère, le pouvoir et la violence
d’un roi de l’époque qui, aveuglé par simple jalousie, décide de faire tuer la reine en
l’empoisonnant. Astarté représente les femmes de cette époque qui subissaient la
tyrannie et la persécution des maris violents.
Par cette même occasion, Voltaire nous montre aussi comment certaines
femmes, comme Missouf, arrivent à séduire un roi comme Moabdar par simple ruse.
Le royaume devient par la suite la propriété du prince d’Hyrcanie car Moabdar est châtié
et devient fou, et Missouf se débarrasse de sa rivale Astarté.
13
https://www.ebooksgratuits.com/blackmask/voltaire_zadig.pdf
18
De reine, Astarté devient l’esclave d’Ogul et ensuite son peuple doit choisir un
époux digne d’elle. En aucun cas la femme est libre de faire le choix. La description des
traditions orientales dans ce texte reste pour Voltaire le moyen de décrire comment la
femme était considérée à cette époque.
L’apparition de l’eunuque et du nain muet dans Zadig sont deux autres aspects
des personnages purement orientaux et le roi Moabdar, mari violent et jaloux qui
impose la peine capitale à sa femme et à Zadig, complètent la description du monde
oriental.
Mais Voltaire se sert de l’image d’Astarté pour montrer que le Bonheur existe et
malgré les difficultés dont souffre Zadig, « la Providence» existe. Voltaire est perçu
dans le personnage de Candide car comme l’écrivain, le personnage a connu des pires
moments dans sa vie, des mésaventures cruelles mais les deux restent positifs et
Candide garde le courage de “cultiver son jardin”. On constate que Voltaire avait une
connaissance approfondie du genre oriental en passant par le décor du lieu et en allant
jusqu’à voiler la femme. Il nous rappelle cette atmosphère Orientale des Mille et Une
Nuits.
Il utilise les contes pour dénoncer des cas de souffrance extrême des femmes
au XVIIIème siècle. En tant que prostituée Paquette a subi des humiliations et Voltaire
nous montre la souffrance de ces femmes:
« … si vous pouviez vous imaginer ce que c'est que d'être obligée de caresser
indifféremment un vieux marchand, un avocat, un moine, un gondolier, un
abbé………vous concluriez que je suis une des plus malheureuses créatures du
monde. »(14)
14
Voltaire, Candide ou L’Optimisme, Ed. René Pomeau, Oxford : The Voltaire Foundation, 1980, p.28
19
Pourquoi dénigrer cette femme qui n’est pas devenue prostituée pour son propre
plaisir ? Voltaire condamne ces hommes qui profitent de ces prostituées et il dénonce
la religion et les hommes qui se servent de leur autorité de l’église pour bafouer la
femme. Dans L’Ingénu, Mademoiselle de Saint-Yves est menacée par le dévot avec
qui elle vit à Paris :
15
Robert Niklaus, « Etude comparée de la situation de la femme en Angleterre et en France, » Studies
on Voltaire and the Eighteenth century, v.193 (1980) : 1909-1910, p157
16
SADE, Justine ou les malheurs de la vertu, Edition présentée et commentée par Béatrice Didier,
Collection Librairie Générale Français 1972, p.20
20
Montesquieu a également critiqué la tradition des héritages à l’époque dans Les
Lettres Persanes par le truchement d’Usbek. Certainement Voltaire avait aussi une
aversion pour l’église car dans La Princesse de Babylone, il fait mention que dès que
les prêtres découvrent que Formosante a des diamants en sa possession, ils la traitent
de sorcière: La Princesse de Babylone doit courir le monde et parcourir l’Orient et
l’Occident pour retrouver son prince. Voltaire décrit tout ce que Formosante voit lors de
son passage à travers les pays qu’elle découvre: les terres anciennes d’Orient en
passant par Babylone, Bassora, l’Arabie, les Indes et la Chine.
«…femme égorgée…des filles éventrées après avoir assouvi les besoins naturels de
quelques héros….d’autres à demi brûlées… »(17).
17
Voltaire Contes Librairie Hachette 1947 p.39
21
Voltaire nous dépeint d’autres scènes plus émouvantes dans Candide au
moment d’une famine:
«Ils (les soldats) résolurent de manger les femmes…coupez, dit-il, seulement une fesse
à chacune de ces dames. »(18)
Les contes de Voltaire demeurent comme une tentative authentique pour faire
revivre la souffrance des hommes, des femmes abusées, violées, martyrisées et
mutilées dans le passé et de leur aveugle destin dont ils ne peuvent échapper. Il suffit
de lire quelques œuvres de Voltaire pour se rendre compte le caractère complexe de
ce dernier. Mais peut-on lui attribuer l’étiquette de misogyne ou de défenseurs de la
femme ? Ou peut-être son objectif n’était-il que pour dénoncer la religion et toutes les
absurdités ? On ne peut nier que Voltaire se sert du conte oriental pour propager ses
idées. Ces contes étaient très populaires à cette époque mais les personnages étaient
vus et examinés selon des critères et stéréotypes européens. Ce sont des personnages
fictifs que Voltaire utilise pour porter un message.
CHAPITRE 2.
Cette thèse explore l’existence des femmes dans la vie de Voltaire ainsi que
dans ses contes philosophiques au XVIIIème siècle. Pour étudier l’existence des
femmes que Voltaire a connues et qu’il a mentionnées dans ses contes, il est primordial
d’analyser la situation de la femme au XVIIIème siècle.
18
http://www.lecoindesmots.com/recueil/candide-chapitre-12_884/
22
Cependant, on assiste à une floraison de chefs-d’œuvre au début du XIX siècle
qui lui donne le nom de génération romantique. L’histoire philosophique de la France
est passée de la Renaissance au Romantisme. Pour interroger l’image de la femme au
XVIIIème siècle, il est important d’analyser sa place à l’époque et son évolution dans la
société et dans la littérature orientalisante car elle est une figure déterminante dans les
contes de plusieurs auteurs de l’époque.
Au dix-huitième siècle, les femmes intellectuelles étaient très rares, car elles
n’avaient pas accès à l’enseignement supérieur. L’éducation des filles bourgeoises se
faisait dans des couvents mais pour les aristocrates, c’était une gouvernante qui venait
enseigner les filles chez elles. Mais ce n’était pas l’éducation académique qui aurait fait
d’elles des philosophes, mais plutôt une formation de leurs qualités sociales, leurs
grâces sociales et leur éducation sexuelle, car la place des femmes de la haute société
à cette époque était de gérer la maison, élever les enfants et bien recevoir les invités.
19
www.thucydide.com/réalisations/comprendre/femmes/femmes1.htm
23
Les textes bibliques décrivent la femme comme étant une créature fragile et
tentatrice. La curiosité est l’âme de la femme. Elle est tenue comme responsable des
malheurs de l’homme et ce concept a eu une forte influence sur les sociétés depuis.
Son rôle s’est restreint à porter les enfants et à s’en occuper. Elle a une éducation
limitée au couvent et les mariages sont arrangés. D’ailleurs Rousseau dira :
«…… l’éducation des femmes doit être relative aux hommes…. »(20).
Des femmes se sont battues à cette époque contre cette inégalité et ont prouvé
que la femme n’était pas différente des hommes. La situation change graduellement au
cours du siècle. Dans la première moitié du XVIIIème siècle, les salons sont surtout des
lieux où les grandes dames accueillent chez elles les grands philosophes. Nombreux
sont les salons qui ouvrent leurs portes et les hommes ainsi que les femmes s’y rendent
afin d’exposer leurs connaissances et leur talent intellectuel.
Dans la haute société les femmes tiennent des salons littéraires et artistiques.
Beaucoup de moralistes et de philosophes ont présenté les femmes dans des salons,
dans des fêtes, à recevoir du monde, à danser ou à jouer un instrument de musique.
Parmi elles figure Emilie du Châtelet qui marqua l’histoire philosophique car elle
deviendra la figure singulière du Siècle des Lumières en étant la seule femme à se
lancer dans les sciences à côté de Voltaire. D’autres femmes ont lutté pour l’égalité des
droits des femmes comme Olympe de Gouge (1748-1793) qui reste très connue car
elle a publié une violente dénonciation de l’esclavage en 1785 et elle a dénoncé le
mariage forcé des filles à cette époque.
20
J.J.Rousseau, Emile, Œuvres Complètes, eds.Bernard Gagnebin et Marcel Raymond Paris :
Bibliothèques de la Pléiade, 1969 4 vols. / v.4, p.703
24
Les femmes commencent à s’y rendre pour assouvir leur soif de savoir ou pour
s’entretenir avec les hommes et pour s’ouvrir sur le monde en discutant de la galanterie,
des sciences, des beaux-arts et surtout de la littérature. Les thèmes comme la religion,
la politique ou les puissances de ce monde ne sont pas à discuter.
Dans la deuxième moitié du siècle, les salons sont multiples et même des
femmes dévotes comme La Marquise de Castellane ou pieuses comme Mme Necker
sortent de leur cocon. Elles accueillent des auteurs et des philosophes. Nombreuses
sont les femmes comme Mme Helvétius, Mlle de Lespinasse, Mme de la Briche, La
Duchesse de Choiseul et la comtesse de Ségur qui s’intéressent à découvrir le monde
de la littérature et de la philosophie. Certes le temps consacré à la dévotion diminue et
est remplacé par la philosophie.
Avec la libéralisation des mœurs, la femme n’est plus perçue comme l’esclave
de l’homme. Elle est plus épanouie et se sent libérée. Elle sait comment se procurer du
plaisir et à l’époque du libertinage elle découvre les plaisirs et les jouissances. Il y a la
transgression de l’interdit et à partir des années 1750 la liberté touche à la licence. La
femme prend conscience de la valeur de la liberté et se procure du plaisir tout en
préservant l’image de la femme passive. Les Françaises furent certes les premières
femmes en Europe à se lancer dans les salons littéraires et la vie mondaine.
« Mon enfance avait été nourrie de mythes forgés par les hommes…. »(21).
21
G.Décote, H.Sabbah, B.Alluin, Y.Baudelle, J.Deguy, P.Renard, D.Viart, Itinéraires Littéraires, XXe
Siècle Tome I 1900-1950, Hatier, 1991, p 394.
25
2.3 Les femmes dans la vie de Voltaire qui lui ont servi de muses.
Il est rare pour l’époque de trouver des hommes qui avaient de la considération
pour les femmes. Voltaire est choyé par la marquise du Châtelet mais elle le trompe et
il se sent abandonné. Toutefois il était chanceux car il a été soutenu par Madame de
Pompadour en dépit de sa relation avec le Roi Louis XV qui se méfiait tant de lui. On
peut dire que Voltaire a aussi connu la déception ce qui peut être une des raisons de
son esprit si unique quand il s’agit de ses contes.
On découvre une place intéressante accordée aux femmes dans la vie et les
œuvres de Voltaire. Il eut l’idée d’écrire les contes philosophiques dans les soirées
mondaines à Sceaux, chez la Duchesse du Maine. La femme a été l’instrument de son
inspiration pour écrire et pour réussir dans la vie. Selon l’histoire c’est dans les fourgons
de la Marquise de Bernières que les exemplaires de la « Henriade » entraient la nuit à
Paris à cause de la censure royale. Il recevait même une pension sur la cassette de
Marie Leczinska, qui sans doute l’adorait tellement pour l’appeler « mon pauvre
Voltaire ». On dit aussi que les premiers romans que Voltaire écrivit étaient pour amuser
la Duchesse du Maine.
26
La liste des femmes qu’a connues Voltaire reste longue. Il s’éprend vite d’une
autre dame, la Duchesse de Villars grâce à laquelle il fréquente des gens du grand
monde comme Charles Louis Hector et le Maréchal de Villars, au château de Vaux-Le-
Vicomte. Toutefois leurs sentiments ne seront pas réciproques. Par la suite il connait
d’autres liaisons avec des actrices qui ne dureront pas, notamment Suzanne de Livry
et Adrienne Lecouvreur. Voltaire aura d’autres liaisons qui seront plus sérieuses avec
Emilie Le Tonnelier de Breteuil, marquise du Châtelet-Lomont. Il lui écrivait des poèmes
d’amour et on constate bien que Voltaire était sensible et émotif. Cette femme occupera
toutes ses pensées et c’est avec elle qu’il passera les plus belles et les plus heureuses
années de sa vie. C’est bien cette femme qui le protègera quand il sera menacé après
avoir publié les « Lettres Philosophique » en 1734. La mort d’Emilie l’affectera
longtemps. En 1749, Voltaire dira à un de ses amis que la mort de cette femme est la
perte de la moitié de lui-même.
Une autre figure féminine qui s’ajoute à cette liste de femmes que Voltaire a
connues est certainement Françoise de Graffigny. Elle est l’un des plus importants
visages de la littérature à cette époque et Voltaire adorait sans doute les femmes de
lettres. Leur amitié était connue de tous et elle fut témoin de la vie théâtrale à Cirey.
Mais Voltaire, philosophe avec un esprit redoutable, traverse les infortunes de la vie
avec grand courage.
Voltaire admirait et respectait Émilie du Châtelet qui était perçue comme une
femme intellectuelle qui avait accompli beaucoup dans le domaine de la physique et de
la géométrie. Par exemple, lorsque Voltaire rencontra Émilie au printemps 1733, il fut
rapidement convaincu qu’il avait trouvé une âme sœur. Voltaire était en extase devant
ses connaissances étendues.
27
Voltaire la considérait comme un ‘grand homme’ et pour lui, elle était la seule
femme en France avec qui, il pouvait discuter philosophie et sciences. Il la flattait même
dans ses lettres.
Il existait une certaine collaboration entre les deux. Par exemple, dans son
introduction aux Eléments de la philosophie naturelle de Newton publié en 1737,
Voltaire et Émilie ont tous deux collaboré à l’écriture de cet ouvrage.
Mme de Châtelet voulait être acceptée en tant que philosophe dans le monde
de la science mais elle ne sera jamais admise à l’Académie des Sciences car elle n’était
qu’une femme. Voltaire respectait ses très grandes connaissances et la considérait
comme une femme exceptionnelle dotée d’un certain degré d’humilité. Dans son Éloge
historique de Madame la Marquise du Châtelet, composé après sa mort, publié en
1752, Voltaire flattait sa modestie en déclarant « qu’elle ne parlait jamais pour attirer
l’attention sur elle » (24).
22
http://www.visit Voltaire, op.cit.
23
Ibid
24
M.S.Rivière, Voltaire: Reader of women’s Memoirs and women Readers of Voltaire: Mutual Admiration
or Suspicion? HRC Seminar: Friday 24 October, 2001.
28
Voltaire était satisfait qu’elle connaisse sa place et ses limites. Il s’induit que
Voltaire aussi la considérait moins comme une philosophe qu’une femme désireuse
d’apprendre mais qui gardait une certaine distance l’empêchant de devenir un
scientifique complet. Il la considérait comme un grand homme et c’est sûrement le plus
grand hommage que Voltaire ait accordé à Émilie, mais en faisant cela, il avouait que
pour que Mme du Châtelet soit acceptée en tant que philosophe dans la société
française, elle devrait être un homme (25).
Voltaire éprouvait aussi de l’admiration pour Mme Dacier. Il était fasciné par ses
écrits, « illustre par sa science […] ses traductions de Terence et d’Homère lui font un
honneur immortel»(26)
De même pour Madame de Sévigné dont Voltaire trouvait que les « lettres,
remplies d’anecdotes, écrites avec liberté, et d’un style qui peint et anime tout, sont la
meilleure critique des lettres étudiées où l’on cherche l’esprit ». (27)
Pour rédiger ses travaux, Voltaire avait recours à des travaux de femmes, témoin
l’utilisation des écrits de Mme de Motteville (29) et de Mme de La Fayette pour Le Siècle
de Louis XIV. Comme dans ses contes, où les femmes sont des marionnettes ou des
porte-parole, dans la vie réelle aussi, Voltaire empruntait à des écrits des femmes pour
critiquer la société et décrire la situation féminine dans la société.
25
Ibid.
26
M.S.Rivière, ‘Women’s responses to Voltaire’s writings in the eighteenth century: A silencing of the
Feminin” in New Zealand of French Studies, Vol.22 no.1, 2001, p.32
27
Ibid.p.30.
28
Ibid.p.31.
29
Ibid.p.35.
29
Pourtant, Voltaire utilisait les articles de Mme de La Fayette(30), une figure
précieuse parmi les femmes avant-gardistes et qui a contribué à la naissance des
femmes des lettres. Il les utilisait pour critiquer l’archevêque de Reims dans Le Siècle
de Louis XIV. Voltaire, qui était contre l’église catholique, était enclin à insérer cette
citation qu’écrit Mme de La Fayette dans son œuvre qui visait Jacques II ;
« L’archevêque de Reims » :
« Frère de Louvois, le voyant sortir de la messe, dit avec un ton ironique : voilà un fort
bonhomme, il a quitté trois royaumes pour une messe »(31).
Il est aisé de constater l’injustice de Voltaire envers les écrits des femmes qu’il
avait sûrement exploités pour arriver à écrire Le Siècle de Louis XIV, mais qu’il n’avait
pas mentionnés. Comment expliquer cette image si divergente que Voltaire projette sur
la femme ?
« La plupart des femmes et des courtisans n’observèrent autre chose dans cette reine
philosophe, sinon qu’elle n’était pas coiffée à la française et qu’elle dansait(35).
30
Ibid.p.37
31
Ibid.p.39.
32
I bid.p.26
33
Ibid.p.37
34
Ibid.p.29
35
Ibid.p.37
30
Toutefois il la plaça au même rang que d’autres femmes frivoles (36). L’attitude
de Voltaire envers les femmes intellectuelles reste toujours paradoxale, car pour lui, les
écrits de la femme étaient à la fois des sources importantes, tout en restant des
‘ bagatelles’, remplies d’historiettes (37).
CHAPITRE 3.
3.1 La femme- figure déterminante dans les contes de Voltaire.
La femme est une figure déterminante dans les contes de Voltaire. C’est en 1704
avec la traduction des Milles et une nuits par Galland qu’on assiste à une vraie
ouverture de l’Orientalisme dans les contes. Sa présence orientale s’affiche dans
plusieurs autres contes de l’époque: Les lettres persanes en 1721 de Montesquieu,
Fleur d’épine en 1730 de Hamilton, Le Sopha en 1739 de Crébillon, Les contes
orientaux en 1743 de Caylus, Zadig en 1748 de Voltaire, Les bijoux indiscrets en 1748
de Diderot, La princesse de Babylone en 1768 de Voltaire, Nourmahal en 1806 de Mme
de Genlis, etc. Nombreux sont les auteurs qui ont voulu identifier la valeur significative
de la présence de la femme dans leurs récits.
L’exotisme de ces femmes est en effet la source de leur charme. Elles font partie
des intrigues amoureuses ou sont éprises d’un homme ou d’un prince charmant.
Toutefois elles sont subordonnées à un homme qui les aidera à retrouver leur liberté.
Dans les contes de Voltaire les actions et les pensées des femmes sont limitées. Même
si Voltaire se montre le défenseur des droits de la femme, il semble admettre son
infériorité physique et morale dans les personnages de la princesse Astarté,
Formosante ou même Cunégonde.
36
Ibid.p.29
37
Ibid.p.29
31
3.3 Résumé de Zadig.
Zadig est écrit en 1747 à Sceaux. Voltaire présente les aventures d’un jeune héros
babylonien qui rêve de trouver le bonheur. Il est comblé d’honneurs et devient le favori
du roi Moabdar ainsi que du premier ministre. Il a la sagesse de gouverner mais cette
vie qui le comble d’honneurs lui réserve aussi bien des surprises. En voulant découvrir
l’amour il éprouve aussi des déceptions. Il tombe amoureux de la reine Astarté ; l’amour
est réciproque mais à cause de cet amour compromettant qu’il a pour la reine, il doit
s’enfuir. Le conte retrace les mésaventures de ce jeune homme qui subit des injustices
car il est accusé à tort et doit échapper à la punition du roi.
Sa vie bascule car durant ses longs voyages et les expériences qu’il va vivre, il
devient esclave en Egypte pour avoir sauvé Missouf, une femme battue, de son amant
brutal. L’agresseur attaque Zadig et en se défendant, Zadig finit par le tuer. Voltaire
poursuit en racontant comment en remplissant une mission auprès du roi Serendip,
Zadig est obligé de fuir de nouveau après avoir critiqué la religion. Son sort tragique
l’amène à tomber au pouvoir des brigands et sur la route de Babylone, il retrouve
Astarté, la reine qui n’est plus qu’une esclave et il la délivre. Durant son voyage, il
découvre plusieurs sentiments tels que la souffrance et le désespoir, mais Zadig ne
baisse pas les bras.
Zadig est destiné à une sultane, Sheraa, une femme intellectuelle qui ne fait pas
partie des aventures de Zadig. La présence de la femme est presque envahissante
dans les contes de Voltaire mais elle reste au centre, le personnage principal, bien que
le titre du conte porte le nom d’un homme. Voltaire présente Zadig comme un jeune
homme beau et généreux qui ne méprisait pas les femmes.
32
Astarté est le personnage féminin qui joue un grand rôle dans le conte. Astarté
est l’épouse du roi Moabdar et elle est décrite comme “jeune, belle, sage, douce” et
par-dessus tout, elle est « fidèle ». Toutefois comme dans les autres contes
philosophiques, le destin de la femme reste tragique et Astarté dont le mari est mort se
retrouve comme esclave d’Ogul. Encore une fois, la femme est subordonnée à un
homme qui l’aidera à retrouver sa liberté.
Dans ce cas Zadig devient cet homme puissant qui trouve un stratagème pour
libérer la sultane Astarté. Zadig accepte de s’offrir en esclave pour guérir Ogul en
échange de la libération d’Astarté.
Astarté n’est pas toutefois la seule femme qui entre dans la vie de Zadig. Si
Astarté représente la femme fidèle qui sera aimée par Zadig, Sémire est celle qui
trompera Zadig. Azora est capricieuse, Missouf a ses défauts et Almona malgré qu’elle
soit sage va séduire Zadig. Certainement Astarté est décrite par Voltaire comme
différente des autres femmes de ce conte philosophique. Voltaire prêche l’émancipation
intellectuelle des femmes en démontrant son admiration pour la femme savante, qu’il
décrit comme la sultane de Sheera dans Zadig.
Malgré la belle description que Voltaire réserve à Astarté, elle est cependant
perçue à un moment donné comme la cause des malheurs de Zadig. Elle tombe
amoureuse de Zadig et elle affiche ses sentiments pour ce dernier sans se rendre
compte des conséquences. Elle manifeste ses sentiments par: « ses regards et son
34
langage » et certes la femme en général est critiquée comme la cause des soucis dans
la vie des hommes:
« Astarté est femme; elle laisse parler ses regards avec d’autant plus
d’importance……Malheureusement, rassurée sur son innocence, elle néglige des
dehors nécessaires »(38).
« Je les vends cher quand elles sont belles, sans m’informer de ce qu’elles sont… »(39).
Voltaire se sert des femmes pour faire progresser l’action dans Zadig. Elles vont
aider Zadig dans sa quête de sagesse et vers la réalisation de son destin. Toutefois
Voltaire nous amène à comprendre que la femme a un prix et quand elle est jolie, elle
a plus de valeur. Finalement la beauté d’une femme devient la source de son malheur.
38
https://www.ebooksgratuits.com/blackmask/voltaire_zadig.pdf.p14
39
https://www.ebooksgratuits.com/blackmask/voltaire_zadig.pdf.p.25
35
3.4. Résumé de La Princesse de Babylone.
Voltaire essaie de montrer que Formosante est différente et unique et bien sûr
elle mérite mieux, mais en précisant que « ...le plus généreux doit l’emporter » elle se
retrouve dégradée, elle devient une femme à valeur marchande, un trophée que le
meilleur gagnera, et on constate même que cette belle jeune fille n’a pas son mot à
dire. Est-ce qu’elle accepte son rôle de victime ou est-ce qu’elle a appris à écouter un
père qui n’hésite pas à l’envoyer à l’autre bout du monde à la recherche de cet homme
unique qui a pu tendre l’arc de Nemrod? Par la suite, on constate que les rois d’Egypte
36
et de l’Inde ont accepté de se réunir afin de détrôner le roi Bélus et qu’ils: « tireraient
au sort la belle. »
Formosante traverse des pays pour retrouver cet amant, cet amour qu’elle désire
tant, mais Voltaire décrit ce scénario de façon très triste car malgré tous les efforts de
celle-ci, quand elle arrive à un endroit, elle apprend qu’Amazan vient de partir. La
femme reste fidèle jusqu’à la fin du récit. Elle lutte, elle voyage, elle utilise la ruse pour
échapper aux avances du roi d’Egypte et elle lui promet son amour juste pour gagner
du temps. Cependant Amazan finit par tomber sous les charmes d’une jeune fille et
Formosante triste décide de partir loin de son amour et de continuer à parcourir le
monde.
40
Voltaire, La Princesse de Babylone. Paris: Les Classiques d’aujourd’hui, 1994.
37
Astarté subit des changements et Voltaire la dégrade au fur et à mesure que le récit
avance. De reine elle se retrouve esclave durant ses déplacements tandis que
Formosante reste forte et garde sa position de princesse. Si l’on compare les quatre
contes de cette analyse on peut conclure que Voltaire a donné à Formosante un peu
plus d’ouverture d’esprit, une intelligence remarquable et plus de chance aussi. Si
Zadig, Candide ou l’Ingénu restent les personnages principaux de leur histoire, Voltaire
a renversé les rôles cette fois-ci car c’est Formosante qui garde la position principale
pendant un bon moment de la narration. C’est elle qui entreprend le voyage, et ce n’est
qu’au chapitre sept qu’on constate que le rôle est inversé et que c’est Amazan qui se
lance à la recherche de sa bien-aimée.
Toutefois on constate aussi que comparée aux autres personnages féminins des
quatre contes étudiées, Formosante est celle qui profite d’une liberté qui lui est
accordée par son propre père tandis qu’Astarté malgré son statut de reine est sous
l’emprise du roi Moabdar, son époux et elle devient esclave du riche seigneur Ogul.
Dans Candide Cunégonde subit les pires maltraitances et humiliations qu’une femme
puisse subir et elle erre comme les autres personnages féminins. Néanmoins on
constate que seule Formosante a pu voyager autant et a eu la chance de découvrir ce
monde loin de son univers, et à aucun moment Voltaire ne nous montre qu’elle était
voilée, bien qu’étant princesse de Babylone. Formosante profite d’une liberté absolue
dont Voltaire nous fait part.
Fidèle et dévouée, Formosante est aussi vertueuse mais tout aussi curieuse et
optimiste. Elle est convaincue de voir renaître le phénix et aucun obstacle ne peut
38
l’empêcher de poursuivre ce qu’elle a en tête. Elle se démarque par sa fidélité et cette
fois-ci Voltaire nous montre que l’homme aussi peut faillir dans ses démarches et
Amazan qui a pu résister à tant de femmes comme l’Anglaise, la dame Parisienne, les
Allemandes entre autres tombe finalement sous le charme d’une fille d’Opéra à Paris,
à qui il offre des diamants.
Sans doute Astarté et Formosante sont les instruments discursifs grâce auxquels
Voltaire arrive à exposer ses idées. Astarté nous fait vivre le périple de Zadig et
Formosante nous emmène découvrir le monde au cours de son voyage. La fin est
magnifique car Formosante et Amazan se retrouvent et se pardonnent et continuent
leur vie maritale dans le bonheur.
Dans les contes de Voltaire, la responsabilité de la femme reste entre les mains
des hommes. Il peut être le frère, le mari ou le père. Dans le cas de Mademoiselle de
Saint Yves, c’est son frère qui est responsable d’elle et elle prononce ces mots quand
il s’agit de vouloir se marier ou pas:
« On veut me forcer ainsi à épouser le fils ridicule d’un homme ridicule et méchant... »(41)
41
Voltaire, L’Ingénu : Histoire véritable, ed.William R.Jones, Geneva : Librairie Droz, 1957, p.143.
39
C’est ce même cas que Voltaire nous montre dans l’exemple d’Aldée dans La
Princesse de Babylone car cette dernière est prise en charge par le roi Bélus.
Finalement la femme n’a pas le droit de faire son choix et d’épouser l’homme qu’elle
aime et elle est privée de son droit d’aimer et de se sentir aimée.
Si l’on analyse les raisons qui poussent certaines femmes à la trahison dans les
textes de Voltaire, alors on peut conclure que l’unique raison est que ces femmes ont
été forcées à se donner à des hommes qu’elles n’ont jamais aimés. L’exemple de la
femme de Milord dans La Princesse de Babylone est un cas bien remarquable. Elle
n’est ni aimée ni respectée par son mari et dans ce cas on peut comprendre l’attirance
que cette femme finit par avoir pour Amazan. Certes, l’infidélité de certaines femmes
peut être considérée comme le fruit d’un mariage forcé auquel Voltaire répugnait tant.
Certaines femmes dans ce conte de Voltaire arrivent à se libérer de toute soumission.
D’autres s’émancipent mais il reste toutefois des femmes qui resteront soumises.
Finalement on restera plonger dans une incertitude en ce qui concerne la question sur
le modèle féminin que Voltaire nous propose.
Dans L’Ingénu (1767), Voltaire raconte les aventures d’un Huron innocent et naïf
qui arrive en France et s’engage dans une histoire d’amour. L’histoire se passe à
l’époque où la société est confrontée à beaucoup de difficultés sous le règne de Louis
XIV. Voltaire a utilisé l’ingénuité de ce héros pour dénoncer certains abus sociaux.
40
Mlle de Saint Yves tombe sous le charme du jeune Indien, mais c’est un amour
impossible car elle est déjà promise et en plus la religion proscrit le mariage entre une
marraine et son filleul. Mlle de Saint Yves est envoyée au couvent par son père. Durant
la guerre entre la France et l’Angleterre l’Ingénu part à Versailles et est emprisonné à
la Bastille ; il devient ami avec Gordon, le janséniste. Ce dernier lui enseigne la
philosophie, les genres littéraires ainsi que l’histoire et les mathématiques.
Candide s’engage par la suite dans l’armée du roi des Bulgares. Il s’enfuit vers
la Hollande et est recueilli par un certain Jacques l’anabaptiste. Par la suite il retrouve
Pangloss qu’il croyait mort et qui est rongé par la vérole. Il apprend que le baron et sa
famille sont morts. Le château a été brûlé et tous les habitants ont été massacrés. Avec
Pangloss, il arrive ensuite à Lisbonne et assiste au tremblement de terre. Les autorités
de Lisbonne décident de rouer de coups Candide et de pendre Pangloss Candide est
ensuite pris en charge par une vieille femme qui le soigne. Chez elle, Candide retrouve
Cunégonde qu’il croyait morte. Cette dernière raconte son histoire tragique à Candide.
Elle a été violée par des soldats bulgares et vendue à un juif. Elle a aussi été prêtée
par ce dernier à un Grand Inquisiteur et elle est devenue le jouet de ces deux hommes.
Elle a aussi perdu sa beauté. Candide doit tuer le juif ainsi que le Grand Inquisiteur pour
protéger celle qu’il aime.
Ils prennent tous le chemin du nouveau monde et arrivent à Buenos Aires mais
encore une fois Candide doit se séparer de Cunégonde car il est recherché par
l’Inquisition. Candide gagne le royaume imaginaire d’Eldorado connu comme la terre
d’abondance et de bonheur. Candide retrouve Pangloss qui fut mal pendu à
Constantinople. Cunégonde est devenue, hélas, vieille et laide. Candide accepte de se
marier avec Cunégonde malgré sa laideur et ils s’installeront dans une métairie où ils
vivront paisiblement.
42
3.6.1 Les femmes dans Candide.
Candide ou L’Optimisme est considéré comme le chef-d’œuvre de Voltaire et
c’est l’un des contes de Voltaire qui fait mention d’un grand nombre de personnages
féminins. Toutefois les femmes dans Candide sont considérées comme des objets de
raillerie. Certains passages ridiculisent l’identité de la femme:
« Madame la baronne, qui pesait environ trois cent cinquante livres….. »(42).
Voltaire fait des descriptions ridicules sur cette femme mais il utilise l’ironie par
la suite pour décrire cette même femme:
« …faisait les honneurs de la maison avec une dignité qui la rendait encore plus
respectable » (43).
La description physique de cette jeune fille n’est certes qu’une exagération par
rapport à cette déformation corporelle comparable à de la nourriture fraîche.
Cunégonde est la fille du baron de Thunder-Ten-Tronckh et elle est aimée de Candide
car elle est très belle. A travers cette description ironique Voltaire avait pour but
d’attaquer le monde aristocratique. Cependant les moyens qu’utilise Voltaire donnent
de la femme une image dégradante et humiliante.
42
https://www.ebooksgratuits.com/blackmask/voltaire_candide.pdf.p2
43
Ibid.p.2
44
Ibid.p.2
43
Certes à la fin de l’histoire, elle devient laide et elle perd cette beauté. Voltaire
a voulu démontrer le sort de la femme en faisant référence à la nature de la beauté
transitoire lorsqu’il parle de la dégradation physique de Cunégonde. Le corps de la
femme reste sans doute la raison du succès de ce conte.
La femme est certes considérée comme un objet dans ce conte de Voltaire car
elle est victime de l’homme. Dans le chapitre huit, Voltaire décrit des scènes horribles
auxquelles assiste Cunégonde et les mauvais traitements qu’elle subit:
Ce viol est décrit de façon très sensuelle, très tentante pour celui qui lit le texte
et les mots employés comme « je me débattis, je mordis, j’égratignai….. » ne laissent
pas le lecteur insensible vis à vis de cet acte. La souffrance de Cunégonde n’apparaît
pas ici, mais c’est bien la sensualité dégagée dans cette scène agressive qui prend
toute la place mettant dans l’ombre l’acte de viol. On voit bien comment la femme est
ridiculisée, animalisée, objetisée et ensuite rejetée.
La vieille femme qu’on découvre au chapitre sept sauve Candide et lui donne
des soins. Elle lui donne à manger et des vêtements. C’est bien cette vieille femme qui
présenta Cunégonde à Candide. La vieille n’est autre que la fille du pape Urbain X et
de la princesse de Palestine. Elle vivait dans le bonheur et son mariage était prévu avec
le prince souverain de Massa Carrara. Mais le malheur frappe et son fiancé meurt lors
de l’attaque d’un corsaire et elle est ruinée. Elle est laissée pour morte, mais elle survit
à la peste et devient esclave. On lui coupe une fesse en pleine famine pour nourrir les
soldats turcs. Même la vieille femme a subi un viol et elle raconte:
« …j’étais pucelle…cette fleur qui avait été réservée pour le beau prince de Massa
Carrara, me fut ravie par le capitaine corsaire… »(46).
45
Ibid.p.9
46
https://www.ebooksgratuits.com/blackmask/voltaire_candide.pdf.p1
44
De plus la femme est décrite comme soumise, passive et pire encore comme
une victime qui accepte sa situation. Cunégonde devient un objet sexuel qui est partagé
entre deux hommes en une semaine. Elle porte une attention extrême à celui qui la
détient comme prisonnière de guerre. Au lieu d’avoir du dégoût pour ce dernier, elle le
trouvait « … très bien fait…. ». Elle sera rattachée aux rôles que la société de l’époque
réserve d’habitude à la femme. Elle sera blanchisseuse, cuisinière et fera le ménage
entre autres. La belle jeune fille de dix-huit ans, grasse et appétissante sera violée,
battue, menacée, enfermée et tenue prisonnière, et vendue à un Juif, Don Issachar.
Voltaire met l’accent sur la haine qu’il ressent pour les juifs. Il parle d’eux de
façon récurrente, comme un peuple pitoyable. D’ailleurs dans Candide, Voltaire attribue
un aspect négatif et détestable dans le rôle de Don Issachar. Peut-on ainsi dire que
Voltaire était un antisémite ? Voltaire était plutôt un antijuif pas pour autant dire un
antisémite car l’antisémitisme de la persécution raciale est apparu une centaine
d’années après la mort de Voltaire.
45
Ce chapitre nous a amené à examiner les femmes dans les contes de Voltaire
et les raisons qui l’ont poussé à décrire la femme soumise et victime d’une part et la
femme indépendante d’autre part. Même si ce conte de Voltaire est pessimiste et
montre le triomphe du mal, il renferme aussi une leçon de sagesse car l’histoire prend
fin sur les conseils d’un sage vieillard qui leur conseille tous de travailler afin d’éviter les
trois grands maux : le vice, le besoin et l’ennui.
CHAPITRE 4
4.1 La sensualité.
Ce chapitre portera sur la sensualité des femmes qui a longtemps été un sujet
que Voltaire a traité dans ses œuvres. Les quatre contes choisis ne font pas exception
à cette règle. En mettant en scène différents types de femmes, Voltaire essaie de nous
montrer que la sensualité joue un rôle important dans la vie des femmes et des hommes
et qu’elle peut aussi avoir un impact négatif sur les personnages.
46
Voltaire a su utiliser beaucoup de réalisme burlesque pour tourner en dérision
l’absurdité de certains comportements. La bassesse d’un personnage est toujours
caricaturée par l’expression d’un détail physique. Voltaire se moque, bien sûr, de la
dame qui admire L’Ingénu malgré son âge avancé et de son physique :
« La courte et ronde demoiselle le regardait de tous ses petits yeux ….. »(47).
Voltaire veut nous faire voir que la femme est attirée par l’autre sexe à n’importe
quel stade de sa vie. Nous remarquons d’autres exemples où Voltaire fait allusion à la
sensualité, comme lorsque Mademoiselle de Kerkabon est vexée de la galanterie du
Huron envers Mademoiselle de St-Yves(48). D’autre part, la Vieille veut rappeler à tout
le monde qu’elle était belle et gracieuse et plaisait aux hommes pendant sa jeunesse
(49).
47
Par conséquent, elle laisse tomber son mouchoir pour que Candide le ramasse
et quand il le lui remet, elle « lui prit innocemment la main, le jeune homme baisa
innocemment la main de la jeune demoiselle avec une vivacité, une sensibilité, une
grâce toute particulière, leurs bouches se rencontrèrent, leurs yeux s’enflammèrent, [...]
(53) ». Le baron qui les aperçoit chasse Candide du château et ce dernier se retrouve
seul et erre longtemps subissant toutes sortes d’atrocités.
« Fuyez dans l’instant même, ou l’on va vous arracher la vie. Fuyez, Zadig, je vous
l’ordonne au nom de notre amour et de mes rubans jaunes »(54).
Bref, nous pouvons conclure que les malheurs de Candide et de Zadig ont
comme source principale, les femmes.
« J’ai goûté dans ses bras les délices, qui ont produit ces tourments de l’enfer dont vous
me voyez dévorer ; elle en est été infectée, elle en est peut-être morte » (56).
53
Ibid. p.28.
54
Voltaire, Zadig et autres contes, Edition Gallimard, 1979, p.110
55
Voltaire, Candide, op.cit., p111-112.
56
Ibid. p.44.
48
Certes, Voltaire présente Pangloss comme la première cible de la satire, représentant
le bouffon philosophique.
La sensualité est une source de malheur non seulement pour les hommes, mais
aussi pour les femmes. Dans Candide (57), le fiancé de la Vieille sera empoisonné par
sa maîtresse. La vie de la Vieille deviendra un cauchemar par la suite. Elle se
transformera de princesse en esclave. Dans La Princesse de Babylone (58), nous
remarquons la même chose. Pendant son voyage, lorsqu’Amazan succombe à une fille
de l’opéra, cette dernière devient responsable des malheurs de Formosante et
d’Amazan, car la Princesse, les trouvant ensemble, s’enfuit. Amazan et Formosante
seront malheureux suite à cet incident. Voltaire présente ici la fille comme une tentation,
une femme sensuelle qui a provoqué Amazan.
Mais, d’un autre côté, nous pouvons aussi dire que Voltaire fait une critique des
hommes qui se laissent entraîner par les femmes sensuelles. Il insiste sur le fait que la
femme sensuelle peut amener n’importe qui à succomber à ses charmes. Voltaire fait
voir que malgré la résistance d’Amazan de succomber à d’autres femmes, il n’a pas pu
résister. Le fait qu’Amazan succombe à la fille d’opéra est considéré comme un
privilège car ce dernier a refusé à plusieurs reprises les faveurs des grandes dames.
Donc, les femmes sont parfois les agents des événements qui ne valent que des
tracasseries à l’héroïne et au héros. Ce sont les plaisirs de la femme qui amènent
toujours la perte des autres et l’homme est faible car il succombe à la femme fatale.
57
Ibid. p.80
58
Voltaire, La Princesse de Babylone, op.cit., p.104
49
En conclusion de ce point, nous pouvons affirmer qu’il n’est pas question
d’idéaliser les personnages féminins de Voltaires. Ces femmes possèdent un bon
nombre de qualités ainsi que des défauts. Voltaire certainement n’a pas voulu
personnifier ces caractères féminins comme des créatures célestes mais plutôt comme
des êtres humains ordinaires.
Nous pouvons dire qu’en mettant en scène ces femmes Voltaire fait allusion à
Madame du Châtelet qui à l’âge de quarante ans, allait s’éprendre du jeune Saint-
Lambert en 1745 et aussi à Madame Denis qui l’a maintes fois trahi. Est-ce la raison
principale pour laquelle on retrouve dans ses textes plusieurs exemples où Voltaire
raille le sexe féminin et sa conception de l’amour ? Etant lui-même un homme qui avait
eu plusieurs liaisons amoureuses avec des femmes mariées, Voltaire ne condamne
pas l’adultère comme un pêché.
50
et, ne comptant pas sur la guérison de Zadig, elle épouse Orcan. Zadig l’a sauvée
d’Orcan mais elle épouse ce dernier. L’esprit de Voltaire se manifeste ici par l’humour
dans sa critique de la sensualité des femmes qui préfèrent un amant à un autre pour
des raisons puériles. Il y a aussi l’épisode de la Veuve Cousrou qui fait détourner le
ruisseau afin de ne plus rester auprès du tombeau de son mari (61). Voltaire nous conte
cette histoire pour montrer la frivolité de l’amour des femmes pour leurs époux.
Il en est de même pour Azora, l’épouse de Zadig, qui se vante d’être fidèle mais
qui ne sera pas capable de le rester longtemps. Elle ne peut pas résister aux charmes
du jeune Cador (62) car elle a du goût pour les jeunes gens bien bâtis. Elle est vite
consolée de la mort de son mari. De plus, Azora, épouse infidèle et volage, devient
ridicule car elle n’hésite pas à couper le nez de son défunt époux pour guérir Cador
d’un mal de rate.
Un autre exemple sera la veuve Almona (63) qui veut s’immoler sur le bûcher, non
pas par amour pour son mari, mais pour ne pas perdre sa réputation. Zadig n’a pas
besoin d’insister beaucoup pour la persuader de renoncer à la mort. Il loue d’abord sa
beauté, et la Veuve ne tarde pas à remarquer les charmes de ce dernier.
Voltaire fait ici la satire de la femme qui a un amant tout de suite après la mort
de son mari. Il satirise l’amour. On a l’impression qu’il ne croit guère en un amour
éternel, car il a connu beaucoup de trahisons dans sa vie avec Emilie et Madame Denis.
Donc, nous pouvons ainsi dire que les contes ont un lien direct avec la vie de Voltaire.
Il présente la femme selon ses expériences dans sa vie.
61
Voltaire, Zadig et autres contes, op.cit., p.89.
62
Ibid. p.119.
63
Ibid. p.119.
51
De plus, il rend comique certaines situations pour ridiculiser la volupté de la
femme. Dans Zadig, il énonce,
« Il ne serait permis à une veuve de se brûler qu’après avoir entretenu un jeune homme
en tête-à-tête pendant une heure entière [….]. Depuis ce temps, aucune dame ne se
brûle en Arabie »(64).
De plus, à travers ces deux femmes infidèles, Voltaire nous présente l’amour
face aux effets maléfiques du temps qui détruit l’idéal. Ceci montre son point de vue sur
l’amour le plus absolu, celui qui repose sur la communion parfaite entre deux êtres qui
n’échappe pas à la dégradation et à l’évolution inévitable des individus.
64
Ibid. p 119
65
Ibid. p.158-159.
52
Voltaire veut nous montrer que les femmes sont, avant tout, sensibles à l’argent,
et puis à la beauté physique, non pas à l’amour. Il nous présente d’autres femmes qui
sont attirées par l’argent et le prestige et même certaines qui auront abandonné leur
mari, telle que la femme du pêcheur dans Zadig qui trahit son mari pour le plaisir du
luxe et le confort.
Par le biais de ces exemples-là, Voltaire porte un jugement négatif sur l’amour
des femmes. Il insiste sur le fait que l’amour idéal n’existe pas. De plus, en dénonçant
les illusions amoureuses, Voltaire contribue à affaiblir la théorie optimiste de Pangloss
et grossit celle de Leibniz, qui designe que le monde est le meilleur des mondes
possibles. Voltaire s’attaque à la théorie de Pangloss qui prétend que « Tout est au
mieux dans le meilleur des mondes. »
« Le cœur fait tout, disait-elle ; je ne céderai jamais ni à l’or d’un bossu, ni aux grâces
d’un jeune homme, ni aux séductions d’un bonze ; j’aimerai uniquement Nabussan, fils de
Nussanad, et j’attendrai qu’il daigne m’aimer »(68).
66
Ibid. p.131.
67
Ibid. p.133-134.
68
Ibid. p.159.
53
Astarté est très attachée à Zadig. Ses sentiments ne changent pas et elle ne
succombe même pas à la tentation. Elle a la possibilité de devenir l’épouse du Seigneur
Ogul, ce qui changera sa vie d’esclave en maîtresse de maison, mais elle n’en fera
rien :
« Vous voyez que je les laisse s’empresser à mériter ce bonheur, et je n’ai jamais eu
moins d’envie de trouver ce basilic que depuis que le ciel a permis que je vous
revisse. »(69)
La présence de ces deux femmes fidèles dans ces contes vient confirmer l’idée
que Voltaire éprouve un sentiment paradoxal envers la femme. A travers ses
personnages féminins, il critique et ridiculise leur amour en les présentant parfois
comme trompeuses, frivoles et infidèles, mais il montre aussi la sincérité des femmes
à travers certains de ses personnages par leur amour pour leur époux.
« Elle n’eut d’autre ressource que de se permettre de ne penser qu’à L’Ingénu, tandis
que le cruel jouirait impitoyablement de la nécessité où elle était réduite »(70).
Elle sera tellement affligée par cette trahison qu’elle a faite à son amant, qu’elle
mourra à la fin. Son amour pour L’Ingénu la pousse à bout, même jusqu’à la mort :
69 Ibid. p.139.
70 Voltaire, L’Ingénu, Micromégas, op.cit., p.79.
71 Ibid. p.93.
54
La mort de ce personnage plein de délicatesse apporte au conte une tonalité
sentimentale et émouvante. Voltaire nous laisse apercevoir ici qu’il est sensible à
l’amour et ressent de la compassion pour Mademoiselle de Saint-Yves. Voltaire
sympathise ici avec Mademoiselle de Saint-Yves car elle perdra la vie en sauvant son
amant. En d’autres mots, nous pouvons dire que Voltaire admire et glorifie l’amour de
cette dernière. Elle a fait le plus grand sacrifice au nom de l’amour.
Ainsi Bref, nous pouvons dire que Voltaire critique l’amour mais en même temps
il nous rappelle comment l’amour pousse les gens à faire des choses inimaginables qui
peuvent même entraîner la mort.
Cette partie sera consacrée aux femmes qui sont attirées par la beauté physique
et veulent en savoir plus sur la sexualité masculine. Voltaire nous montre aussi que la
femme se sert de son corps pour s’enrichir, pour sauver son amant ou pour influencer
les personnes influentes. Chez Voltaire, les femmes s’intéressent souvent davantage à
la beauté masculine qu’aux vertus morales.
« Je vous dirai, avec vérité, que votre peau est encore plus parfaite que celle de mon
Capitaine des Bulgares »(73).
Un autre exemple qui qualifiera bien l’attirance des femmes envers les hommes
est lorsque Zadig devient ministre de Moabdar. Il est entouré de femmes car il est beau.
Les dames applaudissent le choix de Moabdar car Zadig est fort séduisant. Toutes les
femmes se groupent autour de lui pour goûter les plaisirs de l’amour;
« Jamais homme en place ne fut obligé de donner tant d’audiences aux dames. La plupart
venait lui parler d’affaires qu’elles n’avaient point pour en avoir une avec lui »(74).
72
Voltaire, Candide, op.cit., p.67.
73
Ibid. p.67.
74
Voltaire, Zadig et autres contes, op.cit., p.105.
55
Même la femme de l’envieux va se présenter au ministre que son mari déteste :
« elle jura par Mithra, par le Zend-Avesta, et par le feu sacré, qu’elle avait détesté la
conduite de son mari ; elle lui confia ensuite que ce mari était un jaloux, un brutal »(75).
Enfin, elle va jusqu’à dire que son époux ne la satisfait pas en amour et finira par laisser
tomber sa jarretière pour séduire Zadig. La façon dont Voltaire présente l’adultère dans
le cas de la Princesse de Babylone est comme justifiée car l’homme n’accorde pas
assez d’attention à la beauté et à la sensibilité de la femme. Nous constatons que dans
La Princesse de Babylone, la beauté d’Amazan le rend célèbre parmi les femmes et
chacune veut le séduire.
Par ces exemples, Voltaire veut nous montrer que les femmes ont une faiblesse :
la beauté du corps masculin, et que la sensualité est un grand mobile de la conduite
des femmes à la cour et dans la société. Voltaire laisse ici entendre que les dames
s’intéressent davantage au physique d’un homme qu’à ses qualités politiques.
Voltaire raille avec humour l’attirance des femmes pour le corps masculin.
L’exemple parfait est lorsque Mademoiselle de Kerkabon et Mademoiselle de St-Yves
sont toutes éblouies par L’Ingénu. Elles le regardent même dormir (76). Voltaire veut
nous faire voir que quel que soit leur âge, les femmes seront toujours attirées par l’autre
sexe.
Voltaire fait aussi une critique des femmes qui utilisent leur corps pour s’enrichir.
Par exemple, Candide rencontre la Marquise de Parolignac à Paris. Cette dernière
remarque que Candide est un homme riche et finit par le conduire dans sa chambre.
Elle feint d’aimer Candide pour s’enrichir ;
« La belle, ayant aperçu deux énormes diamants aux mains de son jeune étranger, les
loua de si bonne foi que des mains de Candide ils passèrent aux doigts de La
Marquise »(77).
5
Ibid. p.105.
76
Voltaire, L’Ingénu, Micromégas, op.cit., p.30.
77
Voltaire, Candide, op.cit., p.162.
56
En mettant sur scène cet épisode, Voltaire montre du doigt les femmes qui
pratiquent le commerce du sexe pour les biens matériels. Il veut nous convaincre que
ces femmes n’ont aucune valeur morale car elles ne se soucient pas de leur vertu, et
se laissent dominer par leur attirance pour l’argent.
Mais, il ne faut pas croire que Voltaire était toujours contre les femmes. Il
dénonce comment la femme devient victime à cause de son corps. Il critique les effets
des guerres sur les femmes. Par exemple, dans Candide, Cunégonde sera violée par
des soldats (78), et la Vieille sera un objet de dispute entre deux hommes (79). Dans Zadig,
Zadig est blessé à l’œil et Sémire épouse Orcan car elle ne veut pas d’un mari
borgne(80).
Voltaire fait aussi la satire de l’inutilité des guerres causées pour des femmes et
dénonce aussi comment la femme souffre à cause de cette beauté qui attire les
hommes. Nous pourrons ainsi dire que Voltaire essaie de nous montrer que c’est la
beauté de la femme qui l’entraîne vers sa propre perte.
78
Ibid. p.65.
79
Ibid. p.34.
80
Voltaire, Zadig et autres contes, op.cit., p.87.
57
CHAPITRE 5. La femme et son influence politique.
Dans ce chapitre, nous allons faire une analyse de comment la femme parvient
à influencer les hommes pour son intérêt personnel ou pour sauver son amour. En
attribuant une place considérable à ces types de femme dans ses contes, Voltaire fait
sans doute allusion à Madame de Pompadour, maîtresse favorite de Louis XV, car elle
était très connue pour son influence sur le Roi.
Madame de Pompadour avait un très grand pouvoir sur le Roi. Par ailleurs, Louis
XV ne portait pas beaucoup d’intérêt à la littérature et n’aimait même pas les
intellectuels. Pourtant, on avait besoin d’un talent littéraire à la cour. C’est grâce à la
pression de Madame de Pompadour que Le Roi nomma Voltaire historiographe royal
en avril 1745, avec un salaire de deux mille livres par an. De plus, sur les conseils de
Paris-Duvernay, Madame de Pompadour (81) va convaincre Le Roi de faire construire
L’Ecole Militaire dont L’architecte sera Gabriel.
Nous pouvons ainsi dire que ce chapitre a un lien direct avec la vie de Voltaire,
car pendant toute sa vie, il a utilisé la femme (82) à son avantage.
81
http;//www.madamedepompadour.com.
82
M.S.Rivière, ‘Women’s responses to Voltaire’s writings in the eighteenth century: “A silencing of the
Feminine” in New Zealand of French Studies, Vol.22 (no.1, 2001), p.5.
58
Dans ses correspondances ou dans ses écrits, Voltaire critique vivement les
femmes et leur frivolité, et elles sont souvent l’objet de satire sans ses contes. Mais
toutefois, il ne laissait pas apparaître ses sentiments négatifs en ce qui concerne sa
relation avec Madame de Pompadour, Catherine II, Madame du Châtelet et plusieurs
princesses prussiennes et allemandes, car son motif principal était de gagner la
confiance de ces grandes dames qui faisaient la propagande de ses œuvres dans leurs
pays respectifs. Par exemple, Voltaire entretenait des relations avec les sœurs de
Frédéric II de Prusse car cela l’aidait à jouir d’une place favorable après 1750 à la cour
de ce dernier, de concrétiser son rêve de devenir l’historiographe du Roi, et d’être logé
dans le palais en tant qu’écrivain.
Voltaire voyait très bien que les grandes dames de la cour pourraient venir à son
aide et par conséquent il les flattait et les respectait. Par exemple, dans sa lettre à la
Reine Ulrique il écrit :
83
M.S.Rivière, ‘Voltaire, Reader of Women’s Memoirs: The difference of value’, in Studies and the
Eighteenth Century, 371 1999, p.10.
84
Ibid. p.4
59
Il choisissait avec soin ses correspondantes et son choix ne se limitait qu’à des
princesses ou à des femmes puissantes qui pourraient influencer les grands hommes.
Par ailleurs, Voltaire n’envoyait ses manuscrits aux femmes puissantes que pour avoir
accès aux hommes puissants comme Louis XV et Frédéric II, ou pour contredire les
activités subversives de ses ennemis et censurer les travaux de piratage de ses écrits.
Par exemple, en 1755, il envoya Orphelin de la Chine à Madame de Pompadour, en
août 1749, Rome Sauvée et en 1750, il envoya Micromégas à la comtesse Bentinck (85).
Ainsi il fit circuler ses œuvres par le truchement de ces dames-là.
« Ce que Voltaire attend de Madame de Pompadour, comme de tous les grands qu’il
fréquente, c’est de favoriser ses ouvrages et de le protéger contre ses ennemis. […]
Pour prix de ses services, il est prêt à chanter les mérites de la maîtresse et les victoires
du monarque. Son attitude est très claire » (87).
« Elle était moins fraye, elle n’avait pas une naissance égale à la vôtre » (88).
Ce sont les paroles de Voltaire sur la comtesse de Bentinck. Il la glorifie et la place au-
dessus de Madame de Maintenon.
85
M.S.Rivière, New Zealand of French Studies, op.cit. p.10.
86
D.J. Adams. op.cit.p.102
87
J.Sareil, Voltaire et les Grands, (Geneva, Droz, 1978), p.107.
88
M.S.Rivière, New Zealand of French Studies, op.cit. p.11.
60
Voltaire comptait lourdement sur les femmes de sa connaissance pour récolter
de l’argent pour ses nombreuses causes célèbres, connues aussi comme « ses
engagements courageux»(89). Par exemple, en juillet 1766, il écrit à Marie-Thérèse
Geoffrin pour l’inciter à lui procurer de l’argent du Roi Stanislas Poniatowski, de qui il
avait reçu 200 ducats (90). Il y a aussi l’exemple de Catherine II qui va l’aider
financièrement dans l’affaire de Sirven.
Bref, nous pouvons ainsi dire que les femmes ont énormément contribué aux
succès de Voltaire. C’est grâce à elles et à leurs influences auprès des grands de ce
monde que Voltaire a pu maintenir sa position de grand écrivain de son siècle et le
XVIIIème siècle fut connu comme « Le Siècle de Voltaire » (93).
89
J.Goldzink, Histoire de la Littérature Franҫaise, (Bordas, Paris, 1988).
90
M.S.Rivière, New Zealand of French Studies, op.cit, p.8.
91 Ibid. p.21
92 Ibid. p.13
93 J.Goldzink, op.cit
61
Nous allons conclure cette partie par une citation de Voltaire qui rend hommage
à ses disciples féminins :
« C’est vous qui avez honoré la fin de ma vie, et qui m’avez consolé de toutes les
tribulations attachées à la littérature et que j’ai éprouvées pendant environ cinquante
ans »(94).
5.1 La femme dans les contes et son influence à la cour et auprès des hommes
religieux.
Dans cette partie, nous discuterons l’influence des femmes auprès des ministres,
des prêtres et des courtisans à la cour du Roi. Voltaire a bien fait ressortir dans ses
contes que les belles femmes peuvent très facilement influencer les hommes pour leur
propre cause.
Dans l’analyse qu’on a faite de ses textes, on remarque que Voltaire raille encore
une fois le sexe féminin. Pour lui, la femme n’a pas d’autre ressource que son corps
pour influencer les hommes de la cour. Il ridiculise la femme qui se livre aux hommes
mais fait aussi une critique des hommes qui profitent de la situation de faiblesse des
femmes. Par exemple, dans Zadig, Yébor veut empaler Zadig pour avoir critiqué les
griffons. Mais Cador apaise la colère du grand prêtre au moyen d’une fille d’honneur à
qui Cador a fait un enfant, et qui a beaucoup de crédit dans le collège des mages(95).
62
Pour continuer à peindre son tableau noir du sexe féminin, il met en scène des
femmes sans vertus qui se donnent aux hommes puissants de la cour pour procurer
des emplois à leur mari ou pour améliorer leur situation financière.
« Je vous avouerai que si j’avais été aussi difficile que vous l’êtes, mon mari réjouirait
pas du petit poste que le fait vivre ; il le sait, et loin d’être fâché, il voit en moi sa
bienfaisance, et il se regarde comme ma créature »(97)
Voltaire fait une critique virulente contre les femmes qui se servent de leur corps
pour améliorer leur sort financièrement. De plus, il se moque aussi des hommes qui
passent sur l’infidélité de leur épouse pour leur propre intérêt.
« Pensez-vous que tous ceux qui ont été à la tête des provinces, ou même des armées,
aient dû leurs honneurs et leur fortune à leurs seuls services ? Il en est qui en sont
redevables à mesdames leurs femmes »(98).
Voltaire veut nous faire entendre que c’est grâce à l’influence des femmes
auprès des ministres et des hommes puissants que leurs époux peuvent jouir des
positions favorables.
La femme utilise ses charmes et la ruse pour obtenir la place au soleil que les
hommes et la société lui refusent. Elle n’a pas d’autre moyen que de se servir de sa
sexualité comme outil de combat. Cependant, il critique aussi les hommes de la cour
qui profitent de leur supériorité et de leurs situations favorables pour exploiter la
faiblesse des femmes.
« Elle était si belle que le Saint-Pouange, perdant toute honte, lui insinua qu’elle
réussirait si elle commençait par lui donner les prémices de ce qu’elle réservait à son
amant »(99).
97
Voltaire, L’Ingénu, Micromégas, Bordas, 1980, p.77.
98
Ibid. p.77
99
Ibid. p.73
63
Nous pouvons dire que Voltaire critique la femme tout en sympathisant avec elle
car la seule façon de libérer son amant, c’est de sacrifier sa vertu et son honneur.
Encore une fois, nous remarquons l’attitude paradoxale de Voltaire envers le sexe
féminin car d’un côté, il nous présente les femmes comme des êtres faibles à cause
de leur corps mais de l’autre côté, la femme se sert de ce même corps à son propre
avantage soit pour dominer les hommes soit pour leur soutirer de l’argent. Elle ne peut
influencer le ministre qu’en lui succombant. Ainsi, on constate que les écrits de Voltaire
foisonnent d’injustices subies par la femme et insistent sur le fait que la femme a dû
prendre le pouvoir sur les hommes pour se libérer du poids de la tradition, de la religion
et de la société.
5.2 Les femmes qui utilisent leur intelligence, leur habilité et la ruse pour
atteindre leur but.
« La jeune Veuve Almona, qui avait pris beaucoup de goût à la vie et qui en avait
l’obligation à Zadig ; résolut de le tirer du bûcher…. »(100).
Voltaire montre ici des femmes qui sont foncièrement vertueuses et capables et
qui savent employer leur intelligence et leur charme à des fins louables. Almona se
parfumera, se fera plus belle et séduira les prêtres qu’elle livre après aux juges. Nous
pouvons voir la même chose dans La Princesse de Babylone lorsque le Prince d’Egypte
enlève Formosante et lui donne rendez-vous pour souper. Sachant qu’elle n’est pas la
plus forte, elle décide de se conformer à sa situation.
100
Voltaire, Zadig et autres contes, op.cit., p. 124-125.
64
Elle essaie de le séduire et tente de l’influencer en utilisant ses charmes. Son
discours séduit le Roi d’Egypte et ainsi, Formosante réussit à échapper à ce dernier.
« [….] elle prit le parti de se délivrer du roi D’Egypte par une innocente adresse :….elle
lui parla avec une modestie, une grâce, une douceur…et une foule de charmes qui
auraient rendu fou le plus sage des hommes….» (101).
Donc, nous pouvons ainsi dire que Voltaire met en valeur des femmes qui savent
utiliser leur intelligence et leur beauté pour se tirer d’une situation difficile. Autrement
dit, nous pouvons dire qu’il ne célèbre et glorifie ici pas que la beauté de la femme mais
aussi son intelligence. Voltaire éprouve de l’admiration devant ces grandes dames qui
ont pu sortir vainqueur, sans se laisser dominer par le sexe masculin.
Nous remarquons aussi que la femme peut non seulement influencer les
hommes, mais aussi d’autres femmes. Dans L’Ingénu, on voit la belle St-Yves qui tente
d’avoir des renseignements auprès d’une dame de la cour :
Mais Voltaire nous présente aussi des femmes qui influencent des hommes
puissants pour leur propre avantage. Par exemple, dans La Princesse de Babylone, le
roi Scythe avoue à Aldée qu’il la préfère à Formosante. Profitant de cette situation,
Aldée finira par avoir le Prince de son côté pour combattre pour elle et pour son droit
au trône ; «…. et je reviendrai soutenir vos droits avec une armée de trois cent mille
hommes »(103).
101
Voltaire, La Princesse de Babylone, Les Classiques D’aujourd’hui, 1994, p.52.
102
Voltaire, L’Ingénu, Micromégas, op.cit. p.68.
103
Voltaire, La Princesse de Babylone, op.cit., p.37
65
On en retrouve un autre exemple dans Zadig où la Reine Astarté fera de son
mieux pour que Zadig devienne le Roi et son époux. Donc, nous pouvons dire que
Voltaire a su montrer que la femme joue un rôle important dans la décision des
hommes. Si elle le veut, elle peut très facilement contrôler les hommes. Mais de l’autre
côté, il montre clairement la faiblesse des hommes qui se laissent influencer.
Par exemple, dans Zadig, Voltaire met en scène la belle et capricieuse Missouf
qui va causer une catastrophe dans le royaume de Babylone. Le Roi Moabdar qui la
trouve très belle, est tellement épris d’elle que c’est elle qui gouverne le pays (cf. Mme
de Pompadour);
« Elle plut à Moabdar. Elle le subjugua au point de se faire déclarer […] alors son
caractère se développa tout entier ; elle se livra sans crainte à toutes les folies de son
imagination »(104).
En mettant le Roi Moabdar en scène, Voltaire veut nous montrer que même les
hommes puissants sont sensibles à la beauté des femmes, ce qui cause leur propre
ruine. Reste à savoir si nous pouvons rattacher la peinture de Missouf à la vie
personnelle de Voltaire.
Il est possible que Missouf incarne les défauts de Madame de Pompadour et que
par Missouf Voltaire critique l’influence de Madame de Pompadour sur le règne de
Louis XV. Il critique aussi les dépenses inutiles de cette dernière tolérées par le Roi.
104
Voltaire, Zadig et autres contes, op.cit., p.24.
66
Voltaire montre des hommes qui se laissent facilement entraîner et hypnotiser
par la beauté des femmes. Dans La Princesse de Babylone, la beauté de Formosante
influencera tellement les trois prétendants, qu’ils seront prêts à affronter des épreuves
difficiles et à combattre pour elle :
« Les deux rois dépêchèrent chacun dans leur pays un ordre exprès d’assembler une
armée de trois cent mille hommes pour enlever Formosante »(105).
Dans L’Ingénu, on voit comment Mlle de St-Yves utilise son charme pour
convaincre le Huron. Lors du baptême de L’Ingénu, ce dernier veut être baptisé dans
une rivière, mais c’est contre l’usage. Il n’accepte pas d’autre forme de baptême.
Remarquant l’attachement de L’Ingénu pour Mlle de St-Yves, Mlle de Kerkabon
demande son aide :
« Elle le pria d’interposer son crédit pour engager le Huron à se faire baptiser de la
même manière que les Bretons »(106).
« Est-ce que vous ne ferez rien pour moi ! lui dit-elle ; et en prononçant ces mots elle
baissait les yeux, et les relevait avec une grâce attendrissante »(107).
L’occasion se présentera encore une fois lorsque la belle St-Yves utilisera son
charme pour influencer le Huron. Ce dernier veut épouser la fille sans le consentement
de ses parents mais cette dernière va le persuader de ne pas le faire :
« On peut juger que la belle Bretonne employa toute la délicatesse de son esprit à
réduire son Huron aux termes de la bienséance »(108).
Un autre exemple sera lorsque le Huron ne voudra plus retourner chez lui après sa
visite chez Mlle de St-Yves :
«On eut une peine extrême à le renvoyer chez ses parents. Il fallut encore employer le
crédit de la belle Saint-Yves; plus elle sentait son pouvoir sur lui, et plus elle l’aimait.
Elle le fit sentir»(109).
105
Voltaire, La Princesse de Babylone, op.cit., p.24.
106
Voltaire, L’Ingénu, Micromégas, op.cit., p.32.
107
Ibid. p.32.
108
Ibid. p.37.
109
Ibid. p.41.
67
En nous présentant tous ces exemples, Voltaire veut nous montrer le pouvoir
des femmes sur les hommes et le plaisir qu’éprouve la femme à contrôler les hommes.
Dans cette analyse, j’ai remarqué que Voltaire veut nous convaincre que la femme ne
peut influencer les autres que par sa sexualité, par ses attraits et non par des
arguments. Il nous laisse entendre très clairement ses opinions sur les femmes. La
femme ne jouit d’une situation favorable qu’en se livrant aux hommes.
Il fait aussi une critique virulente des hommes qui se laissent dominer par la
beauté et exploitent les femmes pour assouvir leurs désirs sexuels. Par exemple,
Paquette qui ne sera pas emprisonnée car le juge sera attiré physiquement par elle :
« Mon innocence ne m’aurait pas sauvée si je n’avais pas été un peu jolie. Le juge
m’élargit à condition qu’il succède au médecin »(110).
Pour conclure cette partie, nous pouvons dire que l’attitude de Voltaire envers la
femme reste toujours paradoxale. Dans sa vie réelle, il a utilisé à maintes reprises
plusieurs femmes pour son intérêt personnel. Cependant, dans ses contes, il ridiculise
les femmes qui peuvent influencer les hommes. Tout ceci montre clairement l’attitude
ambivalente de Voltaire envers la femme :
«Les femmes ressemblent aux girouettes : elles se fixent quand elles se rouillent »(111).
(cf. aussi la boutade de François Ier : « Souvent femme varie, bien fol qui s’y fie »
110
Voltaire, Candide Larousse, 1990, p.175.
111
M.S.Rivière, The Irish Journal of French Studies, op.cit, p.4.
68
CHAPITRE 6 : La femme et l’éducation.
6.1 L’Intelligence innée, l’instinct, la ruse et l’habileté des femmes.
Depuis Eve, la femme a toujours été considérée comme inférieure aux hommes,
physiquement ainsi que moralement. Cependant, Voltaire mettra en lumière une autre
facette de la femme : l’intelligence des femmes à laquelle cette partie sera consacrée,
mais ce n’est pas une éducation dans son sens propre mais plutôt une intelligence
innée et une preuve de l’adresse des femmes.
Voltaire nous présente des femmes motivées d’en savoir plus sur la vie. Il
présente le personnage de Saint-Yves comme méritant véritablement le titre
de femmes émancipées. En nous présentant une Formosante fort curieuse dans La
Princesse de Babylone(112), Voltaire veut montrer la motivation des femmes pour élargir
leurs connaissances générales.
112
Voltaire, La Princesse de Babylone, Les Classiques d’Aujourd’hui, op.cit. p.56.
69
Elle veut aussi savoir la différence entre l’âme de son oiseau et celle de son
amant :
« Qu’est devenue votre âme pendant que je vous portais dans ma poche après votre
mort (113) ?»
« Dès qu’elle fut en Scythie, elle vit plus que jamais combien les hommes et les
gouvernements diffèrent »(114).
Par cet exemple-là, Voltaire démontre le désir chez la femme d’augmenter ses
connaissances. Bref, nous pouvons conclure que Voltaire éprouve une certaine
admiration pour ce type de femme. Dans ses contes, nous remarquons plusieurs
exemples où Voltaire démontre le savoir-faire des femmes. En premier lieu, dans Zadig,
Almona sait s’y prendre pour parvenir à ses fins. Lorsque Zadig est condamné à être
brûlé, Almona le sauve. Elle est belle et se fait encore plus désirable en se donnant
tous les ajustements nécessaires.
Pour flatter le grand prêtre, elle lui rappelle que les membres de son illustre
famille descendent des étoiles. Elle joue à la femme modeste et scrupuleuse qui craint
d’avoir péché en ayant accepté de ne pas être brûlée. À la fin, elle arrive à délivrer
Zadig (115).
113
Ibid. p.57.
114
Ibid. p.68.
115
Voltaire, Zadig et autres contes, op.cit. p.125.
70
Elle le flatte et, tout en se conformant aux bienséances, ne laisse aucun doute
quant à ses intentions de le droguer, et s’enfuit :
« Elle prit le parti de se délivrer du roi d’Egypte par une tombée innocente adresse »(116).
De plus, elle se déguise pour s’échapper plus facilement. Cet exemple démontre
parfaitement la finesse des femmes. La femme réussit à vaincre le destin par son
instinct et son intelligence pure. Bref, pour Voltaire, l’éducation de la femme se limite
plutôt à l’instinct féminin ou tout simplement à sa capacité de réussir dans une situation
difficile. Mlle de St-Yves fera aussi la même preuve d’adresse lors de sa fuite vers
Versailles :
« Ayant appris au troisième jour qu’ils n’étaient pas loin, elle prit une route différente, et
eut assez d’habilité et de bonheur pour arriver à Versailles tandis qu’on la cherchait
inutilement dans Paris » (117).
De plus, une fois arrivée à Versailles, elle donne l’exemple du bon sens et de la
bonne moralité. En présence du ministre St-Pouange, elle affirme qu’elle respecte la
liberté des hommes et insiste pour connaître la raison de l’emprisonnement de l’Ingénu :
Par ces femmes-là, Voltaire essaie de nous montrer de quoi elles sont capables
lorsqu’elles sont prises dans des situations difficiles ou veulent attirer l’attention. Malgré
leur compétence, Voltaire n’hésite pas à les faire se comporter en coquettes. Il le fait
aussi dans le cas de Cunégonde dans Candide.
116
Voltaire, La Princesse de Babylone, op.cit., p.52.
117
Voltaire, L’Ingénu, Micromégas, Bordas, 1980, p.67.
118
Ibid. p.73.
119
Ibid. p.30.
71
Le fait que cette dernière laisse tomber son mouchoir afin que Candide ait
l’occasion de l’embrasser montre son intelligence mais aussi qu’elle est peut-être
coquette (120). Pour Voltaire, la femme a la capacité de surmonter des problèmes, mais
ne le fait qu’en utilisant ses attraits et la ruse.
Voltaire nous présente d’autres femmes habiles telles que La Vieille dans
Candide. Elle sait profiter des circonstances. Elle conseille à Cunégonde d’accepter la
proposition de mariage qu’elle reçoit du gouverneur de Buenos-Aires car Cunégonde
pourra ainsi faire la fortune de Candide :
Pour continuer à nous présenter des femmes qui savent utiliser des procédés
pour parvenir à leurs fins, Voltaire met en scène Astarté dans Zadig. Lorsqu’elle est
empoisonnée avec Missouf dans un sérail, elle fait preuve d’une compétence
exceptionnelle. Elle sait profiter de la situation pour s’échapper :
« Belle Missouf, lui dis-je, vous êtes beaucoup plus plaisante que moi, vous divertirez
bien mieux que moi le prince d’Hyrcanie. Facilitez-moi les moyens de me sauver ; vous
règnerez seule, vous me rendrez heureuse en vous débarrassant d’une rivale » (123).
120
Voltaire, Candide, Classiques Larousse, p.28.
121
Ibid. p.92-93.
122
Ibid. p.208.
123
Voltaire, Zadig et autres contes, op.cit., p.138
72
Bref, Voltaire nous montre ici comment la ruse a enfin aidé la femme à
s’échapper d’un monde enfermé. Il insiste sur le fait que c’est l’instinct féminin et
l’intelligence innée qui l’ont aidée et non pas une formation académique. On y retrouve
aussi des femmes qui ont réussi à empêcher des guerres par des ruses. Par exemple,
dans La Princesse de Babylone, quand tout le monde rentre à Babylone où, à l’aide de
deux mille Espagnols et du roi d’Ethiopie, Amazan bat le roi d’Egypte et le roi des Indes.
Par la suite, des disputes s’élèvent entre les alliés. Formosante les apaise « par
sa prudence et par ses discours enchanteurs » (124). Elle montre la fonction conciliatrice
de la philosophie. Elle allie à son expérience du monde des qualités personnelles, qui
l’élèvent au-dessus du commun des femmes de ses contes.
Voltaire nous démontre à travers Formosante, l’habilité des femmes qui peuvent
empêcher une dispute qui pourrait sans doute entraîner la mort de plusieurs hommes
et pourrait aussi faire souffrir l’économie.
Dans sa vie comme dans ses contes, Voltaire utilise la femme pour censurer ou
critiquer les travaux de ses rivaux. Ces femmes sont intelligentes et peuvent saisir les
différentes qualités des textes. Par exemple, dans Candide, chez la Marquise de
Parolignac, la conversation roule sur les nouveaux livres, dont Les Mélanges de
L’archidiacre T. Mme de Parolignac n’hésitent pas à qualifier cet auteur « d’ennuyeux
mortel ! Comme il vous dit curieusement ce que tout le monde sait [….] » (125)
Il y a fort à parier que Voltaire fait allusion à l’abbé Trublet dont Les Mélanges
(126) venaient de paraître, qui avait l’habitude de critiquer les œuvres de Voltaire. Nous
rencontrons un autre exemple dans La Princesse de Babylone, lors du voyage de
Formosante en Germanie où elle passe son temps à lire des romans tels que Le Sopha
de Crébillon et La Paysanne Parvenue(127) de Mouhy.
124
Voltaire, La Princesse de Babylone, op.cit., p.122
125
Voltaire, Candide, op.cit., p.160.
126
D.J. Adams, op.cit.p.191.
127
Voltaire, La Princesse de Babylone, op.cit., p.81.
73
Voltaire laisse entendre, par les réactions de Formosante, que la lecture de ces
livres est ennuyeuse, opinion qu’il a déjà émise dans ses lettres et ses ouvrages. (128).
En mettant des femmes intellectuelles sur scène, Voltaire critique ses ennemis. Donc,
nous pouvons ainsi dire que ces femmes lui permettent de cibler ses ennemis.
Toutefois, l’attitude paradoxale de Voltaire envers les femmes ne peut être négligée
dans cette partie. Même s’il croit au potentiel des femmes, il ne perd pas l’occasion de
reprendre ses railleries habituelles du sexe féminin. D’une part, il célèbre l’esprit des
femmes mais d’un autre côté, il les critique, les présentant comme des manipulatrices
déloyales.
Voltaire excelle dans la satire des femmes, dans le portrait de certaines femmes
curieuses telles que Cunégonde, Mlle de Kerkabon et Mlle de St-Yves, qui toutes
voulaient en savoir plus sur la sexualité. Voltaire nous donne une image des femmes
qui ne veulent qu’agrandir leurs connaissances sur un tel sujet. Par exemple,
Cunégonde ne laisse tomber son mouchoir que pour en savoir plus sur
l’expérimentation physique (130).
128
D.J.Adams, op.cit, p.245
129
Voltaire, Zadig et autres contes, op.cit., p.89.
130
Voltaire, Candide, op.cit., p.28.
131
Voltaire, L’Ingénu, Micromégas, op.cit., p.19.
132
Ibid. p.20.
74
Ces exemples montrent que Voltaire tient à indiquer que la femme désire
apprendre plus sur la sexualité. Le seul exemple dans ses contes qui démontre la
motivation de la femme envers l’éducation, c’est d’en savoir plus sur la sexualité, et non
pas d’avoir une éducation académique. Ceci démontre bien l’attitude de Voltaire envers
la femme qui montre clairement la place de la femme.
Par elle, Voltaire nous fait voir que l’expérience apporte une certaine
connaissance chez la femme qui la fait vivre dans ce monde dominé par les hommes.
L’attitude de Voltaire envers la femme reste toujours un paradoxe car il critique et
admire simultanément l’intelligence de cette dernière. C’est ce sentiment paradoxal qui
le rend ambigu et complexe, et il est très difficile de comprendre ses vrais sentiments
envers les femmes.
Pour prouver l’attitude paradoxale de Voltaire envers la femme, dans cette partie,
nous analyserons le revers de l’intelligence : la naïveté des femmes. Voltaire prend
plaisir à railler la naïveté des femmes. Directement ou indirectement, il se moque des
femmes car pour lui, quel que soit sa naissance ou quel que soit son âge, la femme ne
fait pas usage de son cerveau.
75
Voltaire se montre peu tendre pour le sexe féminin. Il présente Mlle Kerkabon
comme une femme peu intelligente (133). Par exemple, lorsque cette dernière songe à sa
belle-sœur :
«Il est certain que si elle n’avait pas été mangée, elle serait revenue au pays. Je la
pleurerai toute ma vie …….. et notre frère, qui avait beaucoup d’esprit, aurait fait
assurément une grande fortune »(134).
«Est-il possible ? s’écria Mlle de Kerkabon’ j’avais toujours cru que le français était la
plus belle de toutes les langues après le bas-breton » (136).
La jeune St-Yves paraît faire l’objet des mêmes critiques que Mlle de Kerkabon.
Lorsque L’Ingénu montre aux invités réunis chez l’abbé des portraits de ses parents :
« Mademoiselle de St-Yves, qui n’avait jamais vu le père ni la mère, assura que L’Ingénu
leur ressemblait parfaitement »(137).
Voltaire la rend plus ridicule en faisant d’elle quelqu’un qui a une connaissance
limitée. Elle est très surprise de constater que L’Ingénu n’est pas catholique ;
«Eh ! Mon Dieu, disait Mademoiselle de Saint-Yves, comment se peut-il les Hurons ne
soient pas catholiques ? (138).
133
D.J.Adams, op.cit, p.204.
134
Voltaire, L’Ingénu, Micromégas, op.cit., p.16.
135
D.J.Adams, op.cit, p.205.
136
Voltaire, L’Ingénu, Micromégas, op.cit., p.19.
137
Ibid. p.25.
138
Ibid. p.22.
76
Tous ces exemples montrent que Voltaire se moque de la naïveté et de
l’innocence des femmes. Voltaire fait un portrait satirique de l’infidélité des femmes.
Pour prouver que l’amour n’est pas éternel, il se sert de la naïveté d’Azora pour
critiquer l’infidélité. Azora se laisse facilement convaincre qu’un nez pourra guérir un
homme (139). Il se sert de la crédulité d’une femme pour donner son point de vue sur
l’amour.
Dans les quatre contes que nous avons analysés, Voltaire nous a présenté
seulement des philosophes masculins tels que Gordon, Pangloss et Martin même si
ces deux derniers n’étaient que des caricatures. On remarque l’absence totale des
femmes intellectuelles ce qui démontre clairement l’avis de Voltaire concernant la place
de l’éducation dans la vie des femmes.
139
Voltaire, Zadig et autres contes, op.cit., p.90
77
CONCLUSION.
Au cours de cette étude, nous avons remarqué que Voltaire nous a présenté des
personnages féminins assez divers. Dans ses contes, nous trouvons des femmes
orientales, telles que Formosante et Astarté et des femmes européennes du dix-
huitième siècle, telles que Cunégonde, la vieille, Mlle de St-Yves, etc. Voltaire semble
avoir des idées contradictoires à leur sujet car ces femmes ne viennent pas du même
milieu et elles ne sont pas issues des mêmes classes. D’autre part ces femmes n’ont
pas reçu la même éducation et ne suivent pas toutes les mêmes traditions. Ces femmes
de différents milieux n’ont pour but que de faire progresser l’action dans le récit dans
lequel elles apparaissent.
Tout au long de notre analyse, nous avons remarqué que Voltaire se délecte à
railler et ridiculiser les femmes dans ses contes. Il nous présente différentes femmes
de différentes classes sociales telles que Formosante (Princesse), La Vieille
(Princesse), Astarté (Reine), Cunégonde (Baronette), Mlle de St-Yves (Bourgeoise) et
Paquette (Servante). Voltaire veut nous montrer que toute femme, qu’elle que soit sa
naissance, risque de finir dans le malheur comme les hommes. Ainsi, La Vieille se
transforme de princesse en servante, Cunégonde en pâtissière, et Mlle de St-Yves
meurt de chagrin ayant perdu sa vertu. A travers elles, nous pouvons apercevoir la
noirceur de la destinée féminine que nous présente Voltaire.
78
De plus, l’absence presque totale de femmes vertueuses dans les contes
examinés vient confirmer que Voltaire avait une opinion pessimiste de la femme. On y
trouve que deux femmes fidèles, à savoir Astarté et Falide. Par les infidélités des
personnages féminins, Voltaire essaie de nous convaincre que l’amour idéal n’existe
pas, que la femme sera toujours tentée par l’adultère et trompera son époux. Des
éléments divergents entourent la question sur l’attitude personnelle de Voltaire envers
la femme. En examinant les quatre contes de Voltaire, nous parvenons à constater que
Voltaire est ambigu car tantôt il encourage la femme intelligente à s’épanouir et tantôt
il se prononce sur l’infériorité du genre féminin.
Donc, nous pouvons dire que Voltaire éprouve un certain mépris à l’égard des
femmes trompeuses ce qui était dû en partie aux mariages arrangés et forcés.
Toutefois, Voltaire essaie de nous montrer comment les femmes sont prisonnières de
leur sort et doivent subir une accumulation de malheurs dont le fil directeur est constitué
par les hommes qui jouissent successivement de la femme. Par le biais de Mlle de St-
Yves, Voltaire nous dépeint des femmes sympathiques et pitoyables; il est conscient
des problèmes auxquels les femmes sont confrontées dans une société masculine.
D’un côté, nous venons de montrer que l’auteur se base partiellement sur les mœurs
de son époque qu’il n’accepte pas. D’un autre côté, quand à l’adultère féminin, Voltaire
semble ne pas être d’accord pour n’accuser que la femme.
Ceci nous amène à conclure que Voltaire est sensible aux problèmes
qu’affrontent les femmes. Il critique les hommes qui exploitent les femmes, qui les
asservissent à leurs besoins sexuels ce qui a des conséquences tragiques telles que
la vérole de Pangloss, la mort de Mlle de St-Yves et la servitude de La Vieille.
Même si Voltaire se moque des défauts des femmes, il éprouve, quand même,
une certaine admiration pour celles qui se sont surpassées, qui se sont montrées
intelligentes et qui ont su utiliser leur habilité pour sortir indemne d’une situation critique.
Pour confirmer ce qu’on vient de dire, Adams (140), dans son analyse, fait ressortir que
Voltaire réservait un accueil chaleureux aux femmes qui, comme Emilie du Châtelet ou
140
D.J. Adams, op.cit. p.300
79
Catherine II, s’affranchissaient des contraintes pesant sur leur sexe, pour donner
un exemple de vertu et de sagesse pratiques. D’un côté, Voltaire critique la femme mais
de l’autre côté, il fait son éloge. Il nous présente deux visages de la femme; celles qui
donnent du bonheur aux hommes et les autres qui sont des victimes et sombrent dans
le malheur. Ce double rôle de la femme démontre l’attitude paradoxale de Voltaire
envers les femmes.
De plus, Voltaire les tient pour vicieuses d’une part, mais d’autre part, il montre
abondamment son estime pour les femmes qui se sont montrées intelligentes et sont
restées fidèles. Tout ceci contribue à renforcer notre opinion sur Voltaire, qu’il était un
être ambivalent, de par son attitude ambiguë envers la femme dans ses contes. Voltaire
présente les femmes comme des êtres qui ont des qualités aussi bien que des défauts
car elles sont des êtres humains.
Les études se rapportant à l’image de la femme selon Voltaire ne sont pas très
nombreuses, surtout pas en ce qui concerne les Contes philosophiques. Toutefois en
analysant les Contes de Voltaire, nous trouvons des indices qui nous permettent de
déterminer ce que Voltaire pensait des femmes.
Ce mémoire traite l’image de la femme comme elle est décrite dans les contes
philosophiques de Voltaire. Malgré le tableau sombre et pessimiste que Voltaire nous
a présenté des femmes dans ses contes, nous pouvons cependant dire qu’il aimait et
respectait la femme. C’est peut-être pour cela que Marcelo Wesfreid lui attribue le titre
de « Champion du deuxième sexe » dans l’express. Fr et Elizabeth Badinter le qualifie
comme « Un grand féministe ».
« Le bonheur doit se construire sur terre, ici et maintenant. Il n’est de paradis que d’ici-
bas… » Voltaire
80
Appendice :
Correspondances féminines de Voltaire
81
Bibliographie :
Adams, D.J. 1974. La femme dans les contes et les romans de Voltaire. Paris:
A.G.Nizet.
Charpentier, Jeanne et Michel. 1991. Voltaire (les écrivains, balises). Paris, Nathan.
Debailly, P. 1992. Profil (10 textes expliqués), Candide, Voltaire. Paris, Hatier.
Didier, SADE. 1972. Justine ou les malheurs de la vertu, Collection Librairie Générale
Français.
Goldzink, J. 1988. Histoire de la littérature française du XVIIIe Siècle. Paris, Bordas.
Najwa Wadih Daou. 2012. Représentation de la femme dans les récits orientalistes
français du 18e siècle. University of Toronto.
Rivière,M.S. 1999. Studies in Voltaire and the Eighteenth Century. UK, University of
Oxford.
83
Rousseau, J.J.E. 1969. Œuvres complètes. éditions. Bernard Gagnebin et Marcel
Raymond (Paris : bibliothèques de la pléiade,) 4 vols. / v.4.
Articles en Ligne.
Najwa Wadih Daou, La représentation de la femme dans les récits orientalistes français
du 18e siècle, consulté le 12/02/2018.
https://tspace.library.utoronto.ca/bitstream/1807/32694/6/Daou_Najwa_W_201206_Ph
D_thesis.pdf
https://www.lexpress.fr/culture/livre/voltaire-un-champion-du-deuxieme-
sexe_909212.html - consulté le 06/11/2019
https://brunorigolt.org/2009/03/07/les-representations-de-la-femme-dans-candide-de-
voltaire/ - consulté le 04/11/2019
https://www.jstor.org/stable/383707?seq=1#page_scan_tab_contents - consulté le
04/11/2019
https://journals.openedition.org/rde/4515 - consulté le 08/11/2019
https://fr.wikipedia.org/wiki/Dictionnaire_philosophique - consulté le 08/11/2019
https://kadnax.pagesperso-orange.fr/couvent.htm
84
L’ATTITUDE PARADOXALE DE VOLTAIRE ENVERS LA FEMME DANS SES CONTES
(ZADIG, CANDIDE, L’INGENU ET LA PRINCESSE DE BABYLONE)
by
the degree of
MASTER OF ARTS
In the subject
FRENCH
at the
29th of January2018
85
DECLARATION
Degree: MA FRENCH
Exact wording of the title of the dissertation or thesis as appearing on the copies submitted for
examination:
I declare that the above dissertation/thesis is my own work and that all the sources that I have
used or quoted have been indicated and acknowledged by means of complete references.
A.B.CHUMBHIT 29/03/18
________________________ _____________________
SIGNATURE DATE
1980 MAURITIAN
Do not write in
4. Present Mailing Address this space
Abstract no.
Street address:
MA FRENCH 2018
TITLE/SUBJECT AREA
8. Enter the title of thesis. If thesis is written in a language other than English, please specify which language and
Title: THE PARADOXICAL ATTITUDE OF VOLTAIRE TOWARDS WOMAN IN HIS WORKS (ZADIG,
CANDIDE,
9. Subject category of thesis. Please enter four-digit code from “Subject Categories” on following page.0298
10. Please append an abstract of no more than 150 words describing the contents of your thesis. Your completion
and submission of this form through your graduate school indicates your assent to UMI publication of your
abstract. Formulas, diagrams and other illustrative materials are not recommended for abstracts appearing in
Masters Abstracts International.
Key terms
88
TITLE:
La recherche montre Voltaire comme un auteur très connu du « Siècle des Lumières ».
Voltaire a pu démontrer la véritable situation de la femme à l’époque. Les romans de
Voltaire bien que courts, sont pleins d’esprit et lui ont valu jusqu’à aujourd’hui la plus
grande part de sa gloire dans la littérature. Les propres expériences de Voltaire avec
les femmes qu’il a rencontrées dans sa vie sont dépeintes dans ses romans. Il a mis
l’accent sur l’exploitation des femmes dans les années 1800 à travers ses romans. Il
dépeint la sensualité des femmes qui a longtemps été un sujet qu’il aimait exprimer
dans ses œuvres. Voltaire critique et ridiculise la sensualité des femmes. Pour
comprendre l’’attitude paradoxale de Voltaire envers la femme dans ses œuvres, il est
important de connaître les relations qu’il a partagées avec les femmes tout au long de
sa vie. Son attitude sceptique est dépeinte dans beaucoup de ses romans.
KEY TERMS
89