Rapport Complet Maraichage RCI CIRAD FIRCA VF 2019
Rapport Complet Maraichage RCI CIRAD FIRCA VF 2019
Rapport Complet Maraichage RCI CIRAD FIRCA VF 2019
RAPPORT D’EXPERTISE
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Rapport d’expertise
Février 2019
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PS n°009/FIRCA/DCARA/PRO2M/2018
Ce rapport comprend un résumé exécutif (rapport de synthèse) de la page 3 à la page 13 puis le rapport
complet avec la table des matières, le corps du texte suivi d’annexes.
Résumé exécutif
Méthodologie
L’équipe constituée de 4 consultants a fait une mission de terrain –du 21 au 30 octobre 2019 - dans 4
zones de la Côte d’Ivoire au nord, centre, sud, sud-est où se situent les principaux bassins de production
maraichère. A la fin de la mission de terrain, deux de restitutions ont eu lieu au FIRCA puis à la
représentation de l’Union européenne. Ensuite, le rapport provisoire a été présenté le 7 février 2019
au FIRCA qui avait rassemblé un auditoire de trente personnes choisies parmi celles rencontrées
pendant la mission de terrain : bureaux d’études, administrations, organisations paysannes. Elle a
complété ses informations par des entretiens téléphoniques pour la zone Ouest et Sud-Ouest. L’équipe
a aussi rencontrée les institutions publiques et privés impliquées dans la filière « maraîchage »
(MINADER, ANADER, OCPV, ADCVI, INADES) et des rencontres dans les régions avec les acteurs de
cette filière aussi bien publics (ANADER) que privés (Agro fournisseurs) et les responsables des projets
de développement (2PAI-Bélier, PROPACOM).
Problématisation
Pour les services publics il est difficile d’évaluer de façon fiable les quantités produites. Selon les
données du MINADER publiée par FAOSTAT, la production de légumes serait de 637 000 t en 2016,
d’autres sources l’évaluent à 750 000 t/an. La production a presque doublé (+ 91%) depuis 1998 alors
que la population totale de Côte d’Ivoire a augmenté de 49%. Mais si cette offre nationale en légumes
progresse, elle ne suffit toujours pas à satisfaire la quantité consommée actuellement estimée à
920 000 t/an. L’offre nationale en légumes serait donc complétée par des importations enregistrées
dans les ports d’environ 100 000 t/an (à 95% de l’oignon) auxquelles s’ajouteraient 86 000 t/an de
légumes frais importées des pays sahéliens (36 000 t d’oignon et le reste en tomate, aubergine violette,
chou pommé etc.). Cependant, la FAO et l’OMS considèrent que la consommation journalière en
légumes devrait être de 205 gr par habitant et de ce fait, les besoins globaux du pays pour une
alimentation de qualité atteindraient 1 800 0000 t/an. Ces quelques chiffres montrent qu’il existe une
grande marge de manœuvre pour les maraîchers de Côte d’Ivoire pour augmenter les mises en marché
dans le pays et en amont les quantités produites. Mais pour cela, ils doivent être plus compétitifs
(produire à moindre coût et vendre moins cher ou à même prix) que leurs concurrents de la sous-
région et des zones de production plus lointaines (Europe, Maroc, …).
par unité de production, type d’organisation, degré de proximité à la ville, système de culture. Les
maraîchers spécialisés ont pour seul revenu agricole le maraîchage. Cette typologie a permis de relever
cinq types de maraichers comme décrits ci-dessous.
1- Les maraîchers spécialisés traditionnels de pleine terre de petite superficie sont dans les bas-
fonds aménagés, sur de petites surfaces (<0,2 ha/an), des femmes, des jeunes ou des
allochtones, en général locataires, en général urbains ou périurbains. Ces maraîchers sont
présents dans le Sud-est, le Sud, le Centre et dans toutes les grandes villes (Abidjan, Bouaké,
Yamoussoukro, Korhogo, etc.). Dans le Nord, les superficies par exploitant sont encore plus
petites (<0,1 ha). En zones urbaine et péri-urbaine, ces producteurs sont en insécurité foncière
due à l’urbanisation rapide des terres non inondables ou pouvant être remblayées (cas autour
des grandes villes dans le Sud, le Centre et au Nord). Dans le Sud, les cultures dominantes
sont : tomate, aubergine africaine, piment, gombo, amarante et laitues en proximité
immédiate de la ville. Dans le Centre et le Nord, les cultures sont très diversifiées avec
notamment le chou, la laitue, le haricot, l’aubergine, le gombo, l’amarante et divers autres
légumes indigènes. Je pense qu'il faut mentionner l'oignon et le piment au nord.
4- Les maraîchers bénéficiant d’aménagements collectifs, en général éloignés de la ville. Ils sont
équipés de systèmes d’irrigation avec motopompe. Dans le Centre, les superficies individuelles
sont < 0,2 ha/an, les maraîchers combinent cette activité avec des cultures traditionnelles
vivrières, comme dans le Nord où les superficies peuvent être supérieures à 2 ha/an. Ce type
comprend aussi des maraichères dans la région Nord qui produisent collectivement sur des
petites surfaces (<< 0,1 ha/an/personne)
5- Les agro-entrepreneurs maraîchers des différentes régions du pays. Soit ils combinent du
maraîchage irrigué de plein champ avec d’autres activités dont le maraichage sous abri hors-
sol, soit ils se spécialisent en maraichage hors-sol sous abri-serre. . Ils disposent de sources de
revenu non agricoles qui leur permettent d’investir sans l’appui de projets. Les expériences
réussissent plus ou moins en fonction des moyens mis en œuvre pour assurer un équipement
complet (abris, pompage, irrigation, pépinière) et un fonctionnement rigoureux (main
d’œuvre, irrigation, fertilisation, protection phytosanitaire, gestion de l’interculture,
recrutement d’un technicien compétent). Les superficies commencent à 1000m², jusqu’à 1 ha.
Les contraintes au développement des maraîchers ont été regroupées en contraintes agro-climatiques,
contraintes économiques et socio-organisationnelles, contraintes foncières, et contraintes à la
commercialisation.
Les contraintes liées à l’accès aux intrants concernent les engrais et les matières
organiques, les semences et les pesticides. Elles sont communes à toutes les grandes zones agro-
climatiques.
Les engrais chimiques sont chers, non spécifiques et non subventionnés (en dehors de quelques
actions ponctuelles de projets) en comparaison des grandes filières d’exportation. Des engrais
chimiques mieux adaptés aux cultures maraichères et subventionnés permettraient (i) d’améliore les
rendements du fait d’une nutrition des cultures mieux adaptées et (ii) de limiter les baisses de fertilité
dans la mesure où leur utilisation est combinée à celle de fumures organiques de qualité. Pour cela il
faut nécessairement faciliter les productions de ces fumures dans les unités de production d’engrais
de synthèse. Dans les villages et villes, la création d’entreprises de fabrication de fumures organiques
permettrait d’offrir une gamme de fertilisants organiques à partir des gisements locaux.
Les semences de qualité sont difficiles d’accès et considérées comme trop coûteuses. Une meilleure
utilisation de ces semences par des techniques de pépinières adaptées (pépinières protégées et isolées
du sol, et subventionnées dans certaines conditions) permettrait de diminuer les quantités utilisées et
d’obtenir des plants de meilleure qualité. L’extension des réseaux de distribution des entreprises
privées est à encourager par les services de l’état. Enfin, concernant les espèces et variétés
sélectionnées par le CNRA, la collaboration avec les distributeurs privés est à développer car leurs
réseaux sont bien développés.
L’accès aux pesticides est souvent difficile. Il s’ensuit des usages détournés de pesticides homologués
pour d’autres cultures (en particulier le cotonnier) mais non autorisés sur les cultures maraîchères. La
formation des vendeurs de pesticides, des conseillers techniques et des agriculteurs est une priorité.
Elle doit être ciblée non seulement sur les aspects réglementaires mais aussi sur les risques pour la
santé humaine et l’environnement. Simultanément, l’emploi de produits biologiques ou peu polluants
pour l’environnement est à développer.
La création d’organisation de producteurs pourrait permettre de mieux faire reconnaître leurs activités
et de pouvoir discuter avec les autorités. Ces organisations sont à construire ou à renforcer au niveau
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local d’abord sous la forme de groupements ou de coopératives. Ensuite des unions pourraient se
former afin de faciliter les échanges au niveau régional avec les Projet/programmes et les services
publics et les collectivités locales pour gérer l’insécurité foncière par exemple. Une autre forme
d’organisation régionale à promouvoir est celle de la plateforme multi-acteurs qui permet le dialogue
et la contractualisation entre les coopératives de producteurs et celles de commerçant(e)s, les agro-
fournisseurs, les programmes de développement, etc. De même, de telles organisations (coopératives,
groupements, associations ou unions régionales) pourraient permettre d’accroître les capacités
d’investissements individuel et collectif pour améliorer les infrastructures des périmètres maraîchers
ou l’acquisition d’équipements motorisés par de subventions publiques, des projets et des accès au
crédit facilités. Si les diverses formes d’organisation collective des maraîchers sont fonctionnelles et
performantes, il sera alors possible d’envisager de créer une organisation faitière des maraîchers de
Côte d’Ivoire et une Interprofession.
Les contraintes de commercialisation sont communes aussi à toutes les zones quand
les maraîchers orientent leurs productions sur les marchés d’Abidjan et des grandes villes (Bouaké, San
Pedro). L’offre trop abondante de légumes et en conséquence l’effondrement des prix à certaines
périodes pourraient être jugulé par l’étalement de la production dans l’année (donc un accès plus large
à l’eau d’irrigation et un programme de R-D dédié à cette question). De plus, l’absence d’organisation
de producteurs solide les met en position de faiblesse par rapport aux acheteurs et aux transporteurs.
Le renforcement de plateformes de groupages couvertes et des dispositifs de contractualisation
(producteurs – grossistes) permettrait de rassembler les producteurs dans des organisations
véritablement professionnelles et durables et de diversifier leurs activités : couplage crédit intrants et
vente groupée, conseil technique avec recrutement d’un technicien spécialisé, coaching pour la
création d’autres plateformes dans les autres régions.
Mais pour cela il faut réduire les asymétries entre les grossistes et les maraîchers (i) en organisant plus
de formations de base (alphabétisation, bases de la gestion économique et financière), (ii) en formant
les producteurs sur les intérêts et limites de la vente groupée, (iii) en réalisant des séances de
sensibilisation auprès des commerçant(e)s et enfin (iv) en finançant des dispositifs d’accompagnement
d’expériences de vente groupée pour des collectifs de maraîchers et des grossistes qui souhaitent
collaborer.
Enfin, la promotion de techniques innovantes de culture (choix des variétés, irrigation raisonnée), de
récolte (date, triage), de conditionnement (cageot), de conservation et de transformation des légumes
permettrait de limiter les pertes observées dans les différents maillons de la filière depuis la récolte
jusqu’aux consommateurs.
pour former les producteurs et les techniciens et diffuser largement les informations sur les
innovations (iii) en responsabilisant les OP et encadrant la politique du don des projets.
Plus globalement, il convient de développer les échanges entre acteurs de la filière maraîchère. Sur la
base du travail de capitalisation des projets, de la recherche et des services publics dont l’ANADER, et
des expériences des producteurs, il serait possible à faible coût de développer les échanges entre les
acteurs. Pour cela, le modèle des plateformes multi-acteurs maraîchages régionales apparait
prometteur si elles sont en capacité d’organiser des ateliers de travail, des visites de terrain ou encore
des échanges via internet.
Recommandations
Améliorer la gestion de l’eau. Il nous semble tout d’abord utile de tirer les leçons des programmes
d’aménagement de périmètres maraîchers irrigués avant de lancer de nouveaux travaux très coûteux.
Ensuite nous recommandons De privilégier les investissements dans les situations où les producteurs
ont déjà acquis une bonne expérience en limitant la surface des périmètres aménagés, en privilégiant
les systèmes d’irrigation rustiques (semi-californien + motopompe) pour un usage collectif.
Améliorer la gestion collective intégrée des périmètres aménagés (gestion des déprédateurs, des sols,
de l’assolement, drainage. Souvent les techniciens et les producteurs sous-estiment les autres
composantes de la gestion des périmètres (sol, déprédateurs dans le sol ou dans la végétation
périphérique, excès d’eau …). Pour cela nous recommandons de mettre au point une méthode de
gestion intégrée des périmètres maraîchers irrigués qui pourra se décliner en un manuel de gestion
accessible aux producteurs et agents de vulgarisation, un film vidéo et un module de formation à
destination du même public. Cette méthode abordera le drainage (actions collectives et individuelles),
la gestion de la fertilité des sols, la gestion des maladies et déprédateurs (actions collectives et
individuelles), les activités collectives (pépinières protégées, gestion de la pompe et du système
d’irrigation…)
Faciliter l’accès aux semences de qualité et rationaliser leurs utilisations. Il est possible de favoriser les
relations contractuelles entre les fournisseurs d’intrants reconnus pour leur sérieux et de grosses
coopératives ou mieux des Unions de groupements/coopératives. Le développement d’une filière
semencière « alternative », gérée par des structures publiques ou des coopératives ne nous semble
pas souhaitable actuellement car la profession n’est pas suffisamment organisée hormis pour ce qui
concerne l’oignon. Vu le coût élevé des semences de qualité nous recommandons qu’un programme
d’appui conseil à la production de plants de qualité en pépinière soit développé
Améliorer l’utilisation des pesticides et prévenir les risques. Globalement sont mal informés des usages
et des dangers des pesticides. Il est nécessaire de renforcer le niveau d’information, de formation et
de compétences des boutiquiers, techniciens ou conseillers agricoles et des maraîchers dans ce
domaine. Pour cela il faut établir (i) une liste des pesticides utilisables en cultures maraîchères,
actualisée chaque année et facilement accessible par tous les acteurs de la filière et (ii) publier un
Guide pratique d’utilisation des pesticides homologués pour le maraîchage dans un langage facilement
accessible pour les producteurs alphabétisés (en mettant l’accent sur les dates d’épandage possible
avant récolte). La mise en place d’une coalition d’acteurs de la filière maraîchage engagés avec des
associations de consommateurs doit être favorisée pour réduire l’usage des pesticides chimiques et
mieux contrôler leurs usages.
Etaler la production en culture pluviale. En culture pluviale, il serait possible dans le sud du pays de
mieux étaler la production dans le temps en avançant la période des premières récoltes. Cela nécessite
toutefois de commencer très tôt les pépinières et de repérer les variétés qui supportent bien les pluies
en période de floraison puis de maturation. Pour cela nous recommandons, la mise en place d’un
programme de R-D sur l’étalement de la production maraîchère pluviale.
Faut-il investir dans de nouvelles plateformes de collecte ? Nous recommandons d’abord d’engager
une étude comparant les 3 plateformes « OCPV » et de comprendre les causes des
disfonctionnements. Ensuite on pourra favoriser un investissement progressif en infrastructures (un
petit magasin avec un quai de chargement extensible …) uniquement quand les collectifs de maraîchers
sont suffisamment sûrs des quantités de produits qu’ils peuvent commercialiser.
Coupler l’achat d’intrants à crédit à la vente groupée des légumes. La vente groupée permet à une
coopérative de disposer d’un capital financier qui peut ensuite être (i) soit prêté pour partie aux
membres comme prêt de campagne, (ii) soit considéré comme une garantie pour qu’une banque fasse
du crédit de campagne aux membres de la coopérative qu’ils le souhaitent. Parallèlement il y a lieu de
développer un dispositif expérimental de conseil de gestion spécifique aux maraichers et aux
coopératives afin qu’ils puissent préparer leur plan de gestion annuel.
Améliorer les conditions de transport des produits maraîchers. Nous recommandons d’expérimenter le
transport des légumes fragiles en cageots (plastique, bois) afin d’établir une analyse coût/bénéfice
lorsque l’on passe du système traditionnel de transport avec les cartons jetables au système de
transport avec cageots plastiques ou bois.
Fournir des informations fiables et actualisées aux acteurs de la filière. Pour cela nous recommandons
de réaliser une étude précisant avec les acteurs de la filière leurs besoins en informations (prix, gamme
de qualité, quantités mises en marché, coûts de production, rendement). Sur cette base
l’expérimentation d’un dispositif d’informations partagées est envisageable pour quelques produits
maraîchers d’importance économique
zones à fort potentiel productif en maraîchage/vivrier pouvant être sécurisées par rachat du foncier
par les collectivités locales ou l’Etat. Dans les périmètres aménagés par des projets/programmes,
l’établissement d’un contrat foncier entre les propriétaires terriens et le groupement de producteurs
sera systématisé. Dans le Nord du pays il conviendrait de systématiser l’établissement d’une chartre
de gestion du point d’eau et des terres périphériques entre éleveurs et maraichers et d’améliorer la
qualité des clôtures.
Accroitre les capacités de production des exploitations maraîchères traditionnelles. Différentes voies
sont à étudier puis à expérimenter, comme l’usage en commun du motoculteur et des petits engins
motorisés et le conseil en gestion pour les groupements afin qu’ils améliorent leurs choix et la gestion
des équipements en commun
Améliorer la gestion des entreprises de production maraîchère. Dans la mesure où ces entreprises
bénéficient d’un appui des projets, il est normal que leurs gestionnaires soient redevables vis-à-vis des
projets en acceptant (i) de participer à un suivi-évaluation de leurs activités subventionnées et (ii) de
recevoir les conseils des techniciens et experts mandatés par les Projets/programmes.
Faire face au déficit de compétences techniques en aménagement, irrigation et culture hors sol. Ceci
implique de former dès 2019, 5 à 8 spécialistes experts pour chacun de ces domaines (à repérer parmi
la centaine d’experts en maraîchage que le PRO2M va former). Ces experts seront déjà salariés de
structures publiques ou privées.
Développer un système de R-D-F spécifique aux productions maraîchères. Pour cela il est nécessaire
d’engager un programme de formation d’une centaine d’experts afin qu’ils constituent le socle du
développement de la filière (prévu par PRO2M). Dans un deuxième temps ces experts pourraient
constituer un réseau « maraîchage de Côte d’Ivoire » et contribuer à réviser les cursus de formation
en production végétale en créant des options horticulture (niveau BEP, Technicien, TS et ingénieur).
Les maraîchers experts – des producteurs alphabétisés et ayant des capacités de communication -
seraient aussi repérés, mobilisés et mis en réseau. Le renforcement du programme maraîchage du
CNRA est aussi indispensable tout comme la coordination des recherches sur le maraîchage à l’échelle
nationale.
De plus nous proposons d’étudier la faisabilité de la création d’un centre de ressources dédié au
maraîchage ou à l’horticulture (incluant l’arboriculture fruitière) qui pourrait se nommer Centre de
Développement de L’Horticulture.
Mettre à disposition des acteurs de la filière les savoirs et savoir-faire, les acquis des projets. Il s’agira
de faire un inventaire des ressources disponibles (fiche, manuel, poster, vidéo, enregistrement radio…)
utiles aux maraîchers et aux techniciens du conseil d’abord en Côte d’Ivoire puis dans la sous-région et
en suite les zones écologiquement similaires autres. Ensuite il faut développer une capacité nationale
à produire des analyses techniques et économiques sur les performances des innovations dans le
domaine du maraîchage. Pour ces différentes activités les maraîchers experts seraient mobilisés pour
donner leurs points de vue sur la façon de présenter les innovations ou plus simplement apporter leurs
propres savoir-faire.
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Besoin de renouveler les démarches d’appui et de mieux organiser les producteurs maraîchers. Il y a
lieu de renforcer les capacités des producteurs et leur rôle dans la filière (alphabétisation fonctionnelle,
nouvelles technologies de l’information et de la communication dans les formations des producteurs,
…)
Conclusion
Pour atteindre l’objectif d’accroissement de la production nationale de légumes, les maraîchers
doivent s’organiser entre eux, engager des relations de confiance avec l’aval et l’amont mais aussi
bénéficier d’un appui plus conséquent de la part des services publics. Cet appui ne doit pas se limiter
à la mise à disposition de périmètres maraîchers clé en main. Il doit aussi comprendre un
accompagnement dans la durée dans différents domaines : formation de base, appui à la gestion
durable des sols et des infrastructures, appui technique pour la production, appui organisationnel pour
la mise en marché et l’acquisition des intrants.
Nous ne recommandons pas de s’adresser qu’à une ou deux catégories de producteurs (par exemple
les plus dotées en capitaux). La professionnalisation de la filière pourrait s’adresser à 3 grandes
catégories de maraîchers : (i) les producteurs spécialisés en maraîchage pluvial pour les amener à
produire toute l’année en les aidant à accéder à l’irrigation ; (ii) les maraîchers spécialisés déjà bien
engagés dans la culture irriguée en leur proposant une gamme d’innovations techniques et
organisationnelles dont la culture sous abri si besoin, et (iii) les agro-entrepreneurs dans la mesure où
ils apportent des compétences éprouvées en production maraîchère. Il parait toutefois difficile de
supprimer l’appui aux maraîchers urbains/périurbains et surtout aux femmes très investies dans le
maraîchage même s’ils/elles ne produisent que de petites quantités. Dans ces situations, le maraîchage
contribue à résoudre beaucoup de problèmes sociaux.
Il convient donc de faire des choix et des priorités d’intervention. Cet exercice n’est pas du ressort de
consultants mais des décideurs publics en concertation avec les acteurs de la filière. Il s’agit bien sûr
de trouver le bon équilibre entre le renforcement de capacités des producteurs et d’interventions des
services d’appui d’une part, et les investissements matériels très coûteux pour la production et la
commercialisation des cultures maraîchères d’autre part.
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Remerciements
Cette étude repose en grande partie sur la visite de sites de production maraîchère et des entretiens
avec des experts du maraîchage et des acteurs de la filière (producteurs et productrices, agents de
vulgarisation, agro-fournisseurs, coordonnateurs de projet, commerçants…). Ces visites et entretiens
ont pu se dérouler dans de très bonnes conditions grâce au soutien constant de l’équipe de
coordination du PRO2M/FIRCA et de la coordination nationale de l’ANADER ainsi que des agents de
terrain de cette structure. Nous remercions toutes ces personnes ainsi que les producteurs et
productrices qui ont bien voulu prendre de leur temps pour nous faire visiter leurs sites de production
et répondre à nos questions.
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Introduction
En Côte d’Ivoire, la production maraîchère est en augmentation ; elle représente environ 678 000 t en
2010 correspondant à 161 000 ha de cultures pluviales et irriguées1, mais le pays continue d’importer
régulièrement environ 100.000 t/an. Pour dynamiser et transformer le secteur du maraîchage, le
Ministère de l’Agriculture a lancé le projet PRO2M (Projet d’Appui au Développement des filières
Manioc et Maraîchers en Côte d’Ivoire) financé par l’UE dans le Cadre du 11° FED et dans lequel s’inscrit
cette étude. Ce rapport présente les résultats du contrat PS n°009/ FIRCA/ DCARA/ PRO2M/ 2018
passé entre le FIRCA et le CIRAD.
L’équipe chargé de l’étude était constituée de 4 consultants : Hubert de Bon agronome (PhD) Cirad,
Lassina Fondio agronome (PhD) CNRA, Patrick Dugué agroéconomiste (PhD) Cirad, Zana Coulibali
(Ingénieur) agro-socio-économiste Université de Korhogo. Un appui est apporté par Yannick Biard,
spécialiste de l’Analyse du Cycle de Vie au Cirad.
Méthodologie
La méthodologie retenue pour cette étude a compris une revue bibliographique, des rencontres avec
les institutions publiques et privés impliquées dans le secteur du maraîchage (MINADER, ANADER,
OCPV, ADCVI, INADES), des entretiens et visites dans les principales zones de production, des
rencontres dans les régions avec les acteurs du secteur maraîcher aussi bien publics (ANADER) que
privés (Agro-fournisseurs).
La revue bibliographique a commencé dès le début de l’étude (septembre 2018) aussi bien à
Montpellier qu’en Côte d’Ivoire avec des recherches sur internet et en bibliothèque. La recherche a
permis de constituer une base de travail étoffé (cf. la liste des documents consultés en fin de rapport).
Elle a ensuite été renforcée par des rapports d’études notamment conduites par le MINADER, ANADER,
OCPV, FAO, et des rapports d’étudiants. Cependant, les données les plus pertinentes proviennent des
rapports de projets les plus récents, notamment ceux financés via le FIRCA.
A partir du 20 octobre 2018, des visites de terrain ont été réalisées pour rencontrer les acteurs des
filières maraîchères, en particulier les producteurs et productrices et les techniciens/conseillers de
1
Le Recensement National Agricole de 2001 estimait à 18 399 ha les superficies de cultures maraichères pures
et à 107 969 ha les superficies sur lesquelles des cultures maraichères sont présentes en association avec des
cultures vivrières.
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l’ANDER, des ONG et des projets. La diversité des systèmes maraîchers en Côte d’Ivoire est fonction de
la diversité des climats, des sols, des techniques de culture (pluvial, irrigation, cultures sous abri,
mécanisation), de la localisation des productions et de la diversité des espèces maraîchères. Aussi pour
appréhender cette diversité, l’équipe après avoir organisé les rencontres institutionnelles à Abidjan,
s’est séparée en 2 groupes pour visiter plusieurs régions de la Côte d’Ivoire, celles les plus importantes
en termes de productions maraîchères. Les visites des sites de production et de mise en marché à
Abidjan et dans ses environs ont été faites par l’équipe complète.
Les consultants ont rencontré sur le terrain des agriculteurs et des associations, des services d’appui,
des ONG et l’administration du 22 au 31 octobre 2018 dans 4 zones agro-climatiques de Côte d’Ivoire :
au Nord (Niakaramadougou, Tafiré, Korhogo, Karakoro, Sinématiali et Ferkessédougou), dans le Centre
(Djébonoua, Bouaké, Yamoussoukro et Bouaflé), dans l’Est (Abengourou, Agnibilékro, Bongounaou) et
dans le Sud (Abidjan, Dabou, Songon, Azaguié). Ces visites ont été faites en deux groupes : Hubert de
Bon et Zana Coulibali dans le Nord et une partie du centre (Djébonoua et Bouaké), Patrick Dugué et
Lassina Fondio dans l’Est et l’autre partie du Centre (Bouaflé, Yamoussoukro).
A la fin des visites de terrain, un compte-rendu à chaud de la mission a été fait auprès du FIRCA et de
de la commission européenne (le 30 octobre 2018).
La rédaction du rapport a débuté le 15 novembre 2018 avec des échanges réguliers entre les
consultants pour arriver à la remise d’un rapport provisoire le 21 janvier 2019. La rédaction s’est
appuyée sur des recherches bibliographiques supplémentaires et des entretiens téléphoniques afin de
prendre en compte les spécificités et les besoins des zones de production secondaire (San Pedro et
dans la zone Sud-Ouest, Man, Odienné à l’Ouest et au Nord-Ouest).
A l’issue de la réunion de restitution du 7 février 2019, des compléments ont été apportés au rapport
provisoire sur la forme générale, la méthodologie, les tableaux FFOM/SWOT et les recommandations
pour être utilisables par le PRO2M et les acteurs de la filière maraîchage.
Les priorités d’intervention pour remédier à ces contraintes sont présentées à la fin de chaque
chapitre, zone par zone ou par chaque type de contraintes transversales. Elles sont ensuite
synthétisées dans un plan d’action global.
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serres). Ce type de producteur est très connecté au marché des intrants/équipements (goutte
à goutte, engrais de fertigation, semences améliorées), au marché de gros et parfois aux
centrales d’achat des grandes surfaces d’Abidjan, au marché du travail (main d’œuvre salariée)
et dans une moindre mesure au marché bancaire.
- Ces dernières années de nombreux projets de développement mis en œuvre par l’Etat ont
comporté des composantes sur le maraîchage avec des aménagements de sites maraîchers et
la formation des producteurs et contrôleurs semenciers. Il s’agit notamment du Projet d’Appui
aux Petits Producteurs des Savanes (PPMS) conduits entre 2008 et 2012, du Projet d’Appui à
la Relance des Filières Agricoles (PARFACI) et entre 2013 et 2017 et du Projet d'Appui à la
Production Agricole et à la Commercialisation (PROPACOM OUEST) en cours depuis 2014.
Il s’avère que ce sont les projets de développement avec l’appui des agents de terrain de l’ANADER et
d’ONG qui ont surtout œuvré ces vingt dernières années à la promotion du maraîchage et à sa
professionnalisation. Mais le manque de continuité entre les projets, les différences de modalités
d’intervention entre eux et le faible niveau de formation des maraîchers n’ont pas permis d’asseoir
une filière bien organisée. Dans bien des cas, les producteurs ont adhéré aux projets uniquement dans
le but de bénéficier d’appuis matériels (aménagement, équipement, intrants). Tout cela se traduit
aujourd’hui par deux contraintes majeures que nous développerons ensuite :
- Une dispersion des compétences techniques (protection des cultures, variétés, agronomie)
et socio-économiques (suivi des prix et des flux, action collective, plan d’investissement…)
concernant le maraîchage dans diverses structures : bureaux d’études, CNRA, Universités,
ONG, ANADER, MINADER,… sans compter des producteurs experts dans le secteur de la
production de base et de semences, de la commercialisation, etc. Mais globalement nous
faisons le constat qu’il manque des compétences en nombre et en qualité, par exemple des
experts en aménagement et irrigation, des agronomes généralistes à la fois dans la R-D et le
conseil et des experts en culture hors sol sous abri ;
- Une très faible organisation des maraîchers. Seuls quelques groupements de base constitués
pour gérer des périmètres et des équipements en commun (exhaure et irrigation) ou pour faire
de la commercialisation groupée émergent ou se maintiennent. Certains ont plus de 20 ans
d’existence. Deux organisations de producteurs de plus grande envergure sont à signaler :
o La plateforme maraîchage multi-acteurs de Yamoussoukro initiée par l’ANADER
permet d’associer plusieurs groupements de producteurs de la région du Bélier avec
d’autres acteurs de la filière (surtout des fournisseurs d’intrants) ;
o L’interprofession oignon qui concerne toutes les zones de production ainsi que le suivi
et la régulation des importations (Europe, Maroc, sous-région).
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Hormis ces deux cas récents, il n’existe pas d’OP faîtière dans les régions ou à l’échelle
nationale en capacité de dialoguer avec les pouvoirs publics, les coopératives de commerçants,
les agro-fournisseurs et la recherche. Ceci explique entre autres, que la commercialisation des
légumes reste aux mains de collectifs de commerçants (les femmes Gouro, les commerçants
nigériens d’oignon, …) et qu’aucun fonds dédié au maraîchage n’a pu être mis en place. Ainsi
la filière, faute de représentation nationale et de mécanisme de cotisation, n’abonde pas au
FIRCA.
Les données disponibles sur FAOSTAT et fournies par le Ministère de l’agriculture ivoirien permettent
d’évaluer la production maraichère nationale en 2016 (Tableau 1)
1998 15,9 0,41 22 069 4 875 30 981 61 021 38 930 88 833 0 87 086 333 795
- -
2012 21,4 0,48 33 528 7 600 22 822 88 346 144 000 134 000 4 761 140 000 575 057
+34% +72%
2016 23,7 0,50 38 000 7 700 21 314 96 000 174 000 153 000 4 617 142 810 637 441
+49% +91%
Source : FAOSTAT
Pour les services agricoles il est très difficile d’évaluer les quantités produites surtout depuis que
l’OCPV ne fait plus l’évaluation des quantités transportées. L’ANADER a une assez bonne vision des
activités des maraîchers qu’elle encadre dans les périmètres aménagés mais pas de l’ensemble des
producteurs (maraîchers isolés, légumes associés aux autres types de vivrières, …). Les enquêteurs du
MINADER se focalisent surtout sur les grandes productions vivrières : riz, manioc, igname, maïs…. De
ce fait il faut prendre ces données avec prudence.
Selon les données FAOSTAT, la production de légumes en 2012 et même en 2016 serait en deçà des
750 000 t annoncées dans le diagnostic 2014 du PARFACI/FIRCA. Selon cette étude, cette offre
nationale en 2012 comprenait les légumes produits par des maraîchers spécialisés pour 450 000 t
(30 000 t de tomate, 8 à 20 000 t d’oignon (selon les sources citées), 100 000 t d’aubergines, 100 000
24
25
t de piment, 100 000 de gombo, 100 000 t de chou) et environ 300 000 t de légumes issus des systèmes
vivriers pluviaux (aubergine africaine, tomate, gombo, piment…). Il est évident qu’il est très difficile de
d’évaluer les quantités de légumes pluviaux produites dont une partie est consommée dans les villages
et une autre approvisionne de plus en plus les marchés urbains d’août à novembre. Par ailleurs la
production en légumes feuilles n’est pas pris en compte car très difficile à estimer (production locale,
vente de proximité en circuit court, …). Seules les données de production des maraîchers spécialisés
sont assez cohérentes entre les diverses sources sauf pour le chou (100 000 t dans le diagnostic de
2014, non répertorié de façon spécifique dans la base FAOSTAT, dans ce dernier cas la production de
choux entre dans la rubrique « autres légumes frais »)
Néanmoins la production présentée par FAOSTAT a presque doublé (+ 91%) depuis 1998 alors que la
population totale de Côte d’Ivoire a augmenté de 49%. De ce fait, on peut être sûr que la production
maraichère a cru plus vite que la population et donc que la demande (à consommation par habitant
constante). De ce fait on peut conclure que l’offre nationale en légumes par habitant s’est améliorée
mais ne suffit toujours pas à satisfaire les besoins estimés à 920 000 t pour l’ensemble du pays.
Toujours selon le diagnostic PARFACI/FIRCA 2014 « les 3 produits les plus consommées sont la tomate,
l’oignon et le gombo (entre 4 et 5 kg par personne selon les estimations), ils constituent donc à eux seul
plus de 50% des légumes consommés. Ces estimations sont plus élevées que celles de la FAO. L’oignon
présente une forte disparité entre le milieu urbain et rural. Nous évaluons la consommation d’oignon
en milieu urbain entre 6 et 8 kg/an/personne tandis qu’elle est en moyenne inférieure à 2
kg/an/personne en milieu rural ».
La consommation actuelle de légumes en Côte d’Ivoire est estimée par la FAO à 38 kg de légumes par
an (poids frais) soit un peu plus de 100 g par jour (Diagnostic PARFACI/FIRCA 2014). Cela correspond
à une consommation globale d’environ 900 000 t/an. La différence entre l’offre nationale et les besoins
du pays serait comprise entre 150 000 t et 250 000 t selon les données disponibles, quantités
importées d’Europe, du Maroc et d’autres pays méditerranéens, et de la sous-région (Burkina Faso,
Mali et Niger plus particulièrement) (Tableau 2). L’oignon représente environ 90% de ces importations
officielles.
Total
Pomme
Tomate Carotte 0ignon Autres légumes légumes
de terre
frais
Total Tomate
Tomate Tomate en Tomate
équivalent frais surgelés conserve
concentré frais conserve
frais
1998 3 056 87 261 21 740 0 19 680 121 92 1 655 21 896 15 821
2012 23 337 3 712 639 167 710 3 600 108 462 55 229 3 659 120 356 33 407
2016 38 915 210 243 272 858 3 800 87 672 124 258 6 071 98 378 38 789
25
26
Mais les importations de légumes depuis la sous-région ne semblent pas prises en compte dans
FAOSTAT. Par exemple la Côte d’Ivoire doit importer plusieurs dizaines de milliers de tonnes de tomate,
de chou et de divers légumes pendant la période de pleine production dans les pays sahéliens (de
janvier à avril). Selon le diagnostic de 2014 ces importations atteindraient 50 000 t/an. De même les
importations d’oignon du Niger et des autres pays sahéliens n’apparaissent pas dans ces statistiques
officielles. Selon la même étude elles sont estimées à 36 000 t/an (20 000 t du Niger2 et le reste du
Burkina Faso et du Mali) pour une production nationale évaluée entre 8 000 et 20 000 t/an.
L’offre nationale en légumes serait donc complétée par des importations enregistrées dans les ports
d’Abidjan et San Pedro d’environ 100 000 t/an auxquelles s’ajouteraient 86 000 t/an de légumes frais
importées des pays sahéliens. Grosso modo on arrive aux 900 000 t/an correspondant aux besoins des
consommateurs ivoiriens évalués à ce jour. Dans ce bilan offre-demande il est probable que les
importations de légumes de la sous-région soient sous estimées.
Il convient de noter la progression très importante des importations de concentré de tomate entre
1998 et 2016 (multipliées par 10) et non pris en compte dans ce bilan, et dans une moindre mesure,
des conserves de légumes (petits pois, haricot vert surtout utilisés par les restaurants d’hôtel)
(multipliées par 4).
Dans d’autres études, la FAO et l’OMS considèrent que la consommation journalière en fruits et
légumes devrait être de 400 g par habitant avec 5 rations réparties entre les 3 repas principaux et les
collations. De ce fait si on considère que cette ration comprend à part égale fruits et légumes, il
conviendrait de recommander une consommation journalière en légumes de 200 g plutôt que de 100
g comme relevé précédemment. Cela modifie notablement les besoins d’accroissement de la
production nationale et/ou des importations. Les besoins globaux du pays doubleraient pour atteindre
1 800 0000 t/an sans tenir compte de la possible substitution du concentré3 de tomate importé qui
nécessiterait de produire en plus 272 000 t de tomate par an, ce qui est totalement impossible à court
ou moyen terme. De même, il n’est pas envisageable à court et moyen terme de réduire notablement
les importations d’oignon (plus de 110 000 t/an) en augmentant la production locale qui peine à
atteindre 20 000 t/an.
Ces quelques chiffres montrent qu’il existe une grande marge de manœuvre pour les maraîchers de
Côte d’Ivoire pour augmenter les quantités produites et mises en marché dans le pays. Mais pour cela
il faudrait que la filière ivoirienne soit plus compétitive par rapport à celles de la sous-région surtout
en contre saison (chou pommé, tomate …). Pour l’oignon il n’est pas envisageable que la filière
ivoirienne concurrence les filières lointaines (Europe, Maroc) du fait de la différence de période de
mise en marché respective. Par contre elle peut tenter de réduire les importations d’oignon issues de
2
« Le Niger est clairement le plus grand exportateur d’oignon avec près de 300 000 tonnes exportées dans la
sous-région, notamment vers le Nigeria (150 000 t), le Ghana (80 000t), le Bénin (15 000 t), le Togo (10 000 t)
et la Côte d’Ivoire (20 000 t) ». Source : Diagnostic de la filière oignon, Rongead & Chigata, 2014.
3
En considérant qu’il faut 7 kg de tomate pour obtenir 1 kg de concentré de tomate. Ce calcul est approximatif
car la teneur en pulpe de tomate dans des concentrés importés de Chine ou d’Italie est très variable et dépend
de la quantité d’additifs ajouté aux tomates (soja, amidon, dextrose, colorant, …).
26
27
A.6 En Conclusion
La production maraîchère de Côte d’Ivoire est réalisée par une diversité de producteurs et
productrices. Elle se développe grâce à la spécialisation d’une partie d’entre eux qui s’équipent de plus
en plus en motopompe et au développement du maraîchage de saison des pluies en plein champ qui
ne nécessite pas d’équipement d’irrigation ni d’aménagement spécifique. Malgré ce dynamisme, le
déficit de production en légumes en Côte d’Ivoire reste très important et augmente avec la croissance
démographique. Cela constitue une contrainte pour le pays en termes de sortie de devise mais aussi
un challenge pour la filière maraîchage ivoirienne pour réduire ce déficit.
Du point de vue de la sécurité alimentaire des ivoiriens et en particulier des couches de populations
les plus pauvres, il faut distinguer deux situations :
- En ville les consommateurs pauvres pourront améliorer la qualité de leur régime alimentaire
s’ils peuvent acheter des légumes à prix attractifs. Dans ce cas le recours aux importations de
produit standard n’est pas forcément un mauvais choix, tant que la qualité sanitaire est
garantie ;
- En milieu rural, les quantités de légumes consommées sont souvent moindres que dans les
familles urbaines car les marchés locaux sont moins bien approvisionnés sauf dans les zones
de forte production maraichère. Dans ce cas, il est préférable d’encourager la production
locale et si possible dans le plus grand nombre de familles afin d’assurer leur
approvisionnement en légumes. Une plus grande attention peut aussi être accordée à la
conservation par séchage des légumes produits en fin de saison des pluies en très grandes
quantités (période à fortes pertes).
Pour définir les contenus des politiques d’appui à la filière maraichère il convient :
- De bien connaitre la diversité des producteurs et de leurs systèmes de production (pluviaux
et/ou irrigués, pluriactif ou spécialisé, homme ou femme, organisé ou non en groupement,
etc.) ;
- De caractériser l’ensemble des contraintes que les maraîchers rencontrent depuis la
production jusqu’à la mise en marché.
27
28
Afin de répondre à ces objectifs le Projet PRO2M géré par le FIRCA a sollicité l’appui du Cirad et de ses
partenaires afin de réaliser une étude à l’échelle nationale et plus particulièrement dans les grands
bassins de production maraîchers.
Dans un premier temps, les contraintes rencontrées par les maraîchers seront présentées pour chaque
grande zone de production. Dans une seconde partie, nous traiterons des contraintes transversales
non liées au contexte de production mais à l’organisation des services et de la filière au niveau national
(contraintes d’accès aux intrants et semences, contraintes de commercialisation, contraintes en
ressources humaines et d’organisation de la filière).
28
29
La principale contrainte liée au climat est la variabilité de plus en plus forte de la pluviométrie dans
cette Zone Sud-Est pourtant réputée comme pluvieuse (moyenne 1300 mm/an). Les producteurs et
agents de développement rencontrés n’ont pas fait cas d’autres perturbations majeures comme la
hausse de température ou la plus grande fréquence de vents dévastateurs.
Le régime pluviométrique est bimodal avec deux saisons sèches décembre – mars (saison sèche
principale) et mi- juillet août (petite saison sèche). L’année comprend :
- des mois à faible pluviométrie (hauteur moyenne mensuelle inférieure à 80 mm) : décembre, janvier,
février. Le nombre de jours de pluie durant ces mois reste faible, ne dépassant pas 4. Au cours de ces
mois, les événements pluviométriques journaliers enregistrés sont également insignifiants. La hauteur
journalière maximale pour chacun des mois n’atteint pas les 20 mm. Le mois d’août est habituellement
aussi un mois à faible pluviométrie dans le Sud-Est de la Côte d’Ivoire avec moins de 8 jours
enregistrées en moyenne ;
- Les mois à pluviométrie intermédiaire (hauteur moyenne mensuelle entre 100 et 200 mm) : mars et
avril annonçant l’arrivée de la grande saison pluvieuse et les mois de septembre et d’octobre qui
correspondent à deuxième saison des pluies (ou petite saison des pluies) dans le Sud-Est forestier
ivoirien.
- Les mois de forte pluviométrie (hauteur moyenne mensuelle entre 200 et 400 mm) : mai, juin et
juillet, sont les plus pluvieux. Pour la zone forestière, ces hauteurs de pluies diminuent
progressivement suivant un axe Nord Sud. Le caractère très pluvieux de ces trois mois ainsi que
l’étendue de la période, comparativement à la saison pluvieuse de septembre-octobre, permet de
qualifier cette première saison pluvieuse de " grande saison pluvieuse ". Le record est détenu par le
mois de juin, mois le plus pluvieux de l’année, où l’on observe un nombre d’événement pluvieux allant
de 14 dans l’arrière-pays forestier à plus de 20 sur la côte.
29
30
Selon nos interlocuteurs, le régime pluviométrique a été très perturbé une année sur deux en
moyenne sur la période récente. Par exemple :
- 2015 : une installation très chaotique des pluies entre mars et juin, avec plusieurs épisodes
secs longs et de grandes difficultés pour les cultures sensibles au stress hydrique et aux fortes
températures (tomate, légumes feuilles) ;
- 2016 et 2017 : globalement des pluviométries acceptables avec une répartition des pluies
plutôt favorable aux cultures maraichères ;
- 2018 : de la pluie pendant 8 mois avec peu de répits, des cumuls trop importants certains
mois. En pluvial beaucoup de maladies et en zones basses des inondations fréquentes.
Habituellement les maraîchers calaient deux périodes de production en pluvial correspondant aux
deux saisons des pluies. A cela s’ajoutait un 3° cycle de production en grande saison sèche en bas-
fonds et avec irrigation. La petite saison sèche de juillet facilitait le murissement (tomate) et la récolte
et surtout la réalisation des pépinières pour les cultures de 2° cycle, cycle le plus important en volume
de production.
Les conséquences de ce dérèglement pluviométrique sur le maraîchage sont bien expliquées par les
producteurs :
- Les poches de sécheresse réduisent la production par stress hydriques des cultures qui peut
aller jusqu’à la destruction des fleurs et une faible nouaison (plantation en sol profond, paillage
et variétés tolérantes au stress hydrique, s’il en existe, sont les seules stratégies d’adaptation);
- La trop forte pluviométrie surtout entre septembre et octobre entraine des pertes de récolte
par pourrissement ou un mauvais développement végétatif par engorgement des sols et
asphyxie des cultures. La destruction de la culture est aussi rapportée du fait d’inondation
dans les plaines et zones basses. Seule la culture sur petits billons sur les glacis et sur gros
billons dans les zones basses permet de limiter la contrainte d’excès d’eau (mais elle accroît la
sensibilité des cultures aux poches de sécheresse).
- Enfin, de trop fortes pluies en un temps limité et les poches de sécheresse affectent le
remplissage des nappes et le débit régulier des cours d’eau dans la durée, ressources
susceptibles d’assurer l’irrigation de contre-saison.
30
31
Pour les producteurs de la zone d’Agnibilékrou, l’année 2018 a été marquée par une pluviométrie
constante durant tous les mois depuis avril sans discontinuer et en relative abondance. « L’excès
d’eau n’est pas un cadeau pour nous maraîchers, la tomate ne se comporte pas comme du cacao ».
L’un d’entre eux, après avoir obtenu une mauvaise récolte de tomate en octobre 2018 a pris le risque
de repiquer un 3° cycle en pluvial durant le même mois considérant qu’il pouvait bien pleuvoir en
novembre et même en décembre. « Je tente ma chance car on sait plus quand il pleut maintenant »)
Les cultures maraîchères peuvent être produites dans de nombreux types de sols si elles font l’objet
d’amendements et de fertilisation minérale bien raisonnés et d’une rotation avec des cultures vivrières
(des graminées ou légumineuses, manioc.) ou avec un temps de jachère herbacée ou arbustive assez
long.
Dans la zone Sud-Est les maraîchers utilisent quasi-exclusivement de l’engrais minéral sur leurs cultures
maraichères quelle que soit la saison car l’élevage villageois est peu développé et la fiente de volaille
est disponible surtout aux abords des villes secondaires où se sont développés des poulaillers
« modernes » de grande capacité. Même dans ce cas le prix de la fiente a augmenté notablement car
cette fumure est de plus en plus exportée vers les zones cacaoyères de cette région mais surtout du
Sud-Ouest. Pour le transport de la fiente dans les périmètres de groupements les maraîchers
considèrent que la mobilisation d’un camion est indispensable. Généralement les producteurs n’ont
pas adopté les techniques de production de compost à partir de biomasses végétales (de brousse,
bordure de champ, résidus de cultures) et d’un peu de déjections animales car ils jugent cette
technique non mécanisée très coûteuse en temps de travail et très pénible.
L’entretien de la fertilité des sols maraîchers se pose de façon différente selon l’unité de paysage
considérée :
- Sur les glacis, en maraîchage exclusivement pluvial, les sols ne sont pas toujours profonds,
souvent gravillonnaires parfois sableux donc avec une faible CEC (Capacités d’échange
cationique) et une faible réserve en eau utile. Par contre ils sont bien drainants et permettent
aux plantes d’échapper à l’engorgement et l’asphyxie. Dans ces conditions la seule façon pour
le producteur d’entretenir la fertilité du sol est de pratiquer une jachère de moyenne (5-10
ans) ou mieux de longue durée (10 – 20 ans). En l’absence d’usage de plantes de service
fertilisantes (principalement des légumineuses herbacées ou arbustives) permettant de
fournir de la matière organique au sol, il est illusoire de vouloir maintenir la fertilité du sol avec
des jachères courtes (> 5 ans) sauf si les agriculteurs s’engageaient dans une forte
production/valorisation de fumures organiques d’origine végétale et/ou animale ;
- Dans les zones basses les sols sont généralement plus fertiles car plus riches en argile
(complexe argilo humique plus conséquent et CEC plus élevée). Ils bénéficient des apports de
nutriments (minéraux) et de matières organiques fines transportés par le ruissellement. Si le
taux d’argile est élevé le travail est difficile mais la fertilité du sol plus durable. Nous avons pu
constater souvent que les sols de bas-fonds contenaient des taux de limon et sable assez
élevés. Dans ce contexte on distingue deux situations :
Les zones basses cultivées uniquement en contre saison, en saison pluvieuse (avril à
octobre) le terrain porte du riz ou la végétation naturelle car l’engorgement y est
31
32
important. Dans ce cas la fertilité du sol décroit plus lentement du fait (i) de cette
alternance annuelle de types de végétation et (ii) de l’exportation de nutriments par
un seul cycle de culture maraichère ;
Les zones basses cultivables en maraîchage toute l’année (sauf peut-être en
septembre et octobre, car trop engorgées). La confection de billons de grande hauteur
(80 cm au moins) permet cela. Dans ce cas il s’agit d’une exploitation presque continue
du sol par les cultures maraichères avec de fortes exportations de nutriments du sol
et surtout de développement de parasites telluriques (du sol) si les rotations sont mal
raisonnées (dans l’année et si besoin sur plusieurs années).
Les conditions pédoclimatiques de la zone Sud-Est permettent de cultiver un grand nombre d’espèces
maraîchères, les plus fréquentes sont : tomate, choux, piment, aubergines africaine et violette
(européenne). Les espèces secondaires sont la laitue (en périphérie des grandes villes), haricot vert,
concombre, courgette, oignon vert (l’oignon bulbe de conservation n’a pas vocation à être développé
dans cette zone Sud-Est).
La tomate reste la culture importante de ce bassin de production mais perd au fil des ans de son
importance. Les rendements obtenus baissent régulièrement du fait du flétrissement bactérien, des
insectes (la chenille Tuta absoluta est présente), des maladies fongiques et virales.
Les producteurs rencontrés remplacent la tomate par le chou pourtant très sensible aux chenilles. Dans
les plus anciennes zones de production (début des années 90’) la tomate a quasiment disparu toujours
au profit du chou et dans une moindre mesure de l’aubergine africaine plus résistante selon les
producteurs. Ce déclin de la tomate est surtout remarquable pour la culture de saison des pluies « la
tomate n’aime pas l’eau, elle préfère qu’on l’arrose ». Face à ces contraintes les producteurs accusent
un manque d’offres en variétés adaptées à la saison des pluies et à leur région.
A noter la relative spécialisation des maraîchers rencontrés qui peut s’expliquer par la vente de leurs
récoltes presque uniquement à Abidjan et dans une moindre mesure à Bouaké. Ils sont globalement
bien connectés au marché. Mais vu la distance il leur faut obtenir des produits qui résistent au
transport. Ceci explique que les légumes feuilles, pourtant reconnus pour leur forte qualité
nutritionnelle, sont quasiment absents sauf dans les périmètres urbains comme à Bongouanou.
d) Contraintes phytosanitaires
Il est difficile en fin de saison des pluies de repérer les maladies et dégâts aux cultures car les plantes
sont soit en voie de flétrissement (maraîchage pluvial) soit on a affaire à un cortège de dégâts sur la
même culture.
Selon les producteurs, la pression parasitaire est très forte dans cette région du fait :
- De conditions climatiques favorables aux déprédateurs : humidité de l’air importante toute
l’année, hausse de température durant les épisodes de sécheresse, absence de période froide ;
- Des faibles possibilités des maraîchers à pratiquer la jachère de longue durée qui a un effet
« assainissant » du sol et pour certains nuisibles, de rupture du cycle de reproduction ;
Le flétrissement bactérien sur tomate et dans une moindre mesure sur aubergine est probablement la
raison majeure du déclin de ces cultures dans les systèmes maraîchers du Sud-Est du pays. La
32
33
prévalence de cette maladie est liée à la densification de la culture de la tomate et donc la moindre
possibilité de faire des jachères suffisamment longues ou des rotations de longue durée (avec par
exemple, un retour de la tomate tous les 5 ou 8 ans sur le même terrain). Cette pression parasitaire
est plus forte dans les bonnes terres comme à Nianda où les producteurs de tomate ont dû arrêter
cette culture en zone basse fertile, zone trop souvent cultivée en tomate. Ils ont dû déplacer cette
culture sur des sols gravillonnaires moins productifs mais disponibles sur de grandes superficies.
A noter la présence de courtilières qui attaquent les jeunes plants nouvellement repiqués et font des
dégâts dans les pépinières. Dans ce dernier cas, cela augmente les charges de culture par ressemis ou
augmentation de la quantité de semences achetée surtout quand le producteur utilise des semences
Hybrides F1
Du fait de la forte pression parasitaire et vu l’importance des dégâts observés, les producteurs ont
développé trois stratégies :
- Traiter régulièrement 1 fois par semaine à partir de la floraison ou en début de formation du
produit commercialisé (choux) avec un mélange d’insecticide + fongicide ;
- Essayer de nouvelles variétés, en particulier pour la tomate, en espérant trouver celle qui sera
tolérante aux principaux nuisibles ou maladies ;
- Changer de culture, comme c’est le cas avec le chou qui remplace progressivement la tomate
(sachant qu’à moyen terme, ce début de monoculture de chou favorisera certains
déprédateurs).
A noter que les producteurs ont globalement une bonne connaissance des noms commerciaux des
pesticides disponibles chez leurs fournisseurs locaux mais seulement une minorité d’entre eux peuvent
préciser le nom des matières actives. Les plus organisés (coopérative de Nianda) sont en relation avec
les agro-fournisseurs d’Abidjan.
Par contre l’ensemble des maraîchers rencontrés accordent peu d’intérêt aux pesticides organiques
de substitution4 que les projets ont vulgarisés depuis une décennie au moins (décoction de feuilles,
piment et ail écrasés et dilués …). Ils considèrent globalement ces bio-pesticides comme très peu
efficaces et coûteux en travail. De plus les fournisseurs ne proposent pas de bio-pesticides dans les
boutiques locales comme des insecticides Bt, de l’huile de neem etc. Ces bio-pesticides du commerce
peuvent être onéreux et pas nécessairement suffisamment efficaces en cas de une forte pression
parasitaire. Enfin, leurs connaissances des processus biologiques impactant leurs cultures sont
limitées, en particulier dans le domaine des dégâts aux cultures, et cela faute de formation de base.
Très peu de maraîchers ont suivi dans leur jeunesse un enseignement technique agricole, encore moins
un cursus universitaire. Tout ceci explique que les producteurs font d’abord confiance :
À la protection chimique des cultures en testant des pesticides plus efficaces/puissants voire
en augmentant la dose et la fréquence d’application, ce qui peut entrainer l’apparition de
résistance de déprédateurs à certaines matières actives ;
À l’amélioration génétique en pensant qu’il existe des variétés tolérantes voire résistantes
aux déprédateurs, le mythe de la variété miracle en quelque sorte.
4
Un producteur rencontré utilise un mélange de savon noir et d’alcool local (koutoukou) contre certains insectes,
une recette personnelle non issue de la vulgarisation
33
34
Tomate en pluvial sur sol gravillonnaires de milieu de pente Tutta absoluta sur tomate
Choux et concombre deux cultures en progression dans le Sud Est (périmètre d’Assoumokro)
34
35
Avec l’accroissement de la population rurale et des villes secondaires, les disponibilités en terres
fertiles aptes pour le maraîchage se sont amenuisées :
- En périphérie ou dans les villes, les zones basses dédiées aux cultures maraichères (comme à
Bongouanou) sont totalement cultivées, parfois en rotation avec du riz de saison des pluies.
Le maraîchage constitue alors une source de revenu modeste (vu la faible surface
cultivée/actif) mais régulier tout au long de l’année surtout pour une population féminine et
d’allogènes qui a peu de moyens de subsistance ;
- En milieu rural, la population aussi a augmentée, les terres disponibles et fertiles aptes au
maraîchage pluvial sont de plus en plus éloignées. Du fait que les transports ne sont guère
motorisés les producteurs ne peuvent pas trop s’éloigner de leur lieu de résidence.
A cette faible disponibilité foncière il faut ajouter la contrainte d’insécurité foncière qui concerne les
producteurs allochtones originaires surtout du nord du pays et du Burkina Faso. Cette situation
d’insécurité foncière relative se rencontre principalement en bas-fond. Malgré des arrangements avec
les propriétaires autochtones comme le paiement d’un loyer par cycle de culture (20 000 FCFA/ha pour
4 mois en moyenne à Agnibilékrou) les maraîchers allochtones ne sont pas sûrs de pouvoir cultiver la
même parcelle plusieurs années de suite faute d’un bail de moyen terme officialisé. Cette situation ne
les incite pas, s’ils en avaient les moyens, à investir dans des aménagements (canaux, tuyaux
d’amenée) ni même dans la bonne gestion de la fertilité du sol.
En plus des allochtones ivoiriens et étrangers, les jeunes et les femmes sont aussi concernés par cette
insécurité foncière car le droit de propriété est généralement entre les mains des chefs de ménage ou
de famille ou chefs de terre
L’insécurité foncière est bien moindre dans les périmètres aménagés par l’Etat et les projets lorsqu’un
accord écrit a été passé entre les propriétaires terriens et les producteurs installés sur le périmètre
après aménagement. Toutefois ce type d’accord correspond à un droit d’usage qui est donné le plus
souvent à un groupement de producteurs et plus rarement aux producteurs individuellement. La
sécurité foncière et la bonne gestion des terres (valorisation optimale, entretien de la fertilité) et des
aménagements dépendent alors de la capacité du collectif à gérer leur bien commun - le périmètre
maraîcher.
- Le matériel aratoire est quasi-exclusivement manuel en particulier pour le travail du sol qui
demande beaucoup de temps. Le recours au tracteur et à la charrue est possible uniquement
à certaines périodes et dans les situations sans arbre ni souche (donc dans les plaines
aménagées). Pour la confection de buttes très hautes en zone hydromorphe il n’existe pas de
35
36
- Le matériel d’irrigation avec motopompage est de plus en plus présent chez les producteurs
qui ont un accès à l’eau en saison sèche sécurisée mais une partie des maraîchers pratiquent
toujours l’exhaure manuelle et l’irrigation à l’arrosoir surtout les femmes et les jeunes en
manque de capital. Le coût du pompage à l’année n’est guère important dans cette région du
fait de la faible durée de l’irrigation dans l’année (un seul cycle de culture qui peut bénéficier
de quelques pluies précoces (mars) ou tardives (novembre - décembre). Toutefois il faut que
le producteur ou le groupement dispose de la trésorerie pour acheter le carburant. De plus,
beaucoup de motopompes6 sont vieillissantes (don ou forte subvention apportée par un
projet) ou mal adaptées (trop grosses, coût d’entretien élevé, …) ce qui dénote d’une faible
capacité des producteurs à assurer le remplacement de cet équipement individuellement ou
collectivement.
- Le manque de main-d’œuvre occasionnelle est souvent relevé par les plus gros producteurs
maraîchers du fait de la concurrence pour l’accès à cette ressource entre gros maraîchers et
les autres secteurs d’emploi plus attractifs (emploi en ville, cacaoculture, élevage de volaille).
Dans ce cas les maraîchers sont obligés d’augmenter les rémunérations à la journée ou de
passer des contrats avec des jeunes pour un cycle de culture (donc d’engager des frais pour
les loger, les nourrir, les soigner…). Dans les petites structures de production le travail est
assuré uniquement par le maraîcher ou la maraichère avec parfois l’aide d’un actif familial.
Dans le secteur de la production, l’action collective concerne deux domaines où nous avons relevé
des contraintes spécifiques :
5
Mis au point et produit par les japonais et les coréens à partir des années 1960’. Les chinois et les indiens
produisent une large gamme de petits matériels motorisés à prix moindre depuis quelques années.
6
Il est probable que dans cette région peu ensoleillée, le pompage solaire soit guère envisageable car il
nécessiterait un investissement trop coûteux en batteries de stockage de l’énergie pour plusieurs jours.
36
37
(ii) Des périmètres aménagés il y a plusieurs décennies, qui aujourd’hui sont en très
mauvais état (comme celui d’Assoumoukro aménagé par la Sodefel). Dans ce cas le
barrage est à rehausser ce que le groupement de producteurs est dans l’incapacité de
financer. Faut-il aménager de nouveaux sites ou mettre surtout l’accent sur la
réhabilitation d’anciens périmètres où des maraîchers sont déjà installés et disposent
d’une bonne expérience et des savoir-faire de production et de commercialisation ? ;
Deux contraintes spécifiques aux périmètres maraîchers collectifs dans toutes les régions
L’aménagement de périmètres maraîchers est coûteux et la demande en terres irrigables est forte
quelle que soit la région. De ce fait la pression des cultures sur les terres est toujours forte car il n’est
pas socialement envisageable d’affecter une grande surface pour chaque maraîcher volontaire ou
désigné. Cette grande surface leur permettrait de pratiquer des jachères améliorées dans les
périmètres aménagés. De ce fait on peut observer une culture continue en maraichage durant toute
l’année si les conditions hydrauliques le permettent (conditions de drainage et d’irrigation
satisfaisantes). Cette culture continue entraine deux contraintes majeures ;
- Une baisse progressive de la fertilité des sols. La faible prise en compte du besoin
d’entretenir la fertilité du sol dans la durée a été notée sur tous les sites. Ce manque
d’entretien révèle une faible connaissance des mécanismes d’entretien de la fertilité des sols
maraîchers qui implique, surtout en sols sableux, une plus grande utilisation de fumures
organiques (animales et végétales). S’agit-il d’un manque de connaissance des producteurs
car les techniciens ont toujours privilégié la vulgarisation des engrais minéraux ou d’un
manque de capacités d’intervention (force de travail, équipement de transport, piste non
carrossable…) pour produire et utiliser ces fumures organiques ?
- Dans ces conditions il est difficile de gérer le parasitisme tellurique car les maraîchers
veulent toujours mettre l’accent sur la culture la plus rémunératrice : la tomate et plus
récemment le chou dans le Sud-Est. Faute de jachère améliorée, de plantes de service
nettoyantes et du fait de la faible diversification des cultures, la pression parasitaire dans le
sol ne cesse de progresser ce qui peut amener les producteurs à utiliser toujours plus
d’intrants chimiques puis à abandonner le site si le sol est trop fortement infesté. Cela
constitue un gros déficit de revenu pour la région et une sous valorisation des
investissements consentis par l’état.
L’ensemble des producteurs et productrices rencontrés se plaint de la faiblesse des prix de vente
surtout en période de surproduction de légumes (septembre – octobre) du fait de l’arrivée sur le
marché de grandes quantités de produits issus du maraîchage pluvial. Pour faire face à ces méventes
et suite à la forte progression de la production de tomate durant plusieurs décennies dans la région,
plusieurs groupements devenus coopératives ont mis en place des dispositifs de commercialisation
groupés (Cas de Nianda). Dans cette coopérative ce type de commercialisation en camions de 500
cartons (plus de 20 t/camion) permet d’acheminer dans les temps de grosses quantités de tomates et
37
38
d’autres légumes. Mais faute de trésorerie la coopérative n’est pas en mesure de financer la location
des camions et c’est l’acheteur à Abidjan qui règle le transporteur directement lorsqu’il rentre en
possession du produit.
Là encore les producteurs sont à la merci des commerçants. Seuls les transporteurs jouent le jeu de la
collaboration pour garder ce marché, ils s’engagent à reverser après paiement du transport, 15 000
FCFA par camion à la coopérative. Ceci constitue une ressource pour elle pour payer les manœuvres
du chargement, les cartons …. Les autres ressources de la coopérative sont le prélèvement d’une petite
somme d’argent sur chaque carton commercialisé et le prélèvement fait sur la vente des intrants
achetés7 aussi par la coopérative.
La durabilité de ces mécanismes d’achat et de ventes groupés mis en œuvre par la coopérative de
Nianda dépend aussi des performances technico-économiques des producteurs : une coopérative ne
fonctionne bien dans la durée que si :
Elle met en marché (légumes) ou achète (intrants) des quantités importantes et suffisamment
stables pour construire la confiance avec les acheteurs et les agro- fournisseurs. Avec les
problèmes rencontrés sur la tomate cette coopérative est fragilisée ;
Les producteurs dégagent des marges suffisantes pour continuer à produire suffisamment et
à investir dans leur outil de travail.
Mais au stade actuel ce sont les producteurs qui prennent tous les risques en particulier lors de la
commercialisation car les acheteurs ne donnent le prix d’achat des légumes que lorsque la
marchandise est arrivée à Abidjan et qu’ils peuvent apprécier la qualité et l’état de la demande. Ces
acheteurs peuvent toujours faire du chantage et menacer de ne pas prendre la marchandise livrée
malgré le fait que des représentants de la coopérative soient présents. Nous reviendrons dans le
chapitre B.2 sur les limites du mécanisme régulateur du marché : le rapport offre demande – qui
concernent les grands bassins de production qui commercialisent nécessairement via les grands
marchés d’Abidjan.
La plateforme de Kotobi est l’une des 3 plateformes de collecte de produits vivriers installés par l’Etat
en milieu rural en Côte d’Ivoire (avec Méagui et Sinementali). Les acteurs concernés (producteurs,
commerçants, transporteurs) ont bénéficié de l’appui de l’OCPV et de l’ANADER pour sa mise en
œuvre. La plateforme devait faciliter la mise en marché de l’aubergine africaine, fortement cultivée
en saison pluvieuse dans le Sud-Est, en particulier dans la zone de Bongouanou et des autres cultures
maraichères et vivrières de la région.
7
Il s’agit d’un achat groupé qui permet d’obtenir de bons prix de la part des fournisseurs d’intrants. La
coopérative ne vend pas à crédit ces intrants et tous les producteurs demandeurs doivent les payer d’avance à
la commande.
38
39
Malgré la finalisation des bâtiments, de la clôture et de l’accès au site, la plateforme n’est plus
fonctionnelle aujourd’hui du fait (i) de l’absence d’engagement des commerçants et (ii) de la faible
organisation des maraîchers : peu de groupements fonctionnels, très peu de coopératives bien
gérées, absence d’Union de groupements et de coopératives, structure indispensable pour cogérer
une plateforme de collecte.
- Les producteurs pris individuellement n’ont pas les moyens de financer le transport motorisé
des produits maraîchers de leurs champs vers la plateforme. A l’ouverture de la plateforme
ils ont tenté de le faire mais sans organisation collective du transport, les coûts
d’acheminement se sont avérés élevés ramenés au kg de marchandise ;
- Les commerçants n’ont pas joué le jeu de la collaboration. Après quelques semaines de
fonctionnement de la plateforme ils ont préféré revenir à l’achat bord champ qui leur est
plus profitable en termes de prix. Dans ce cas chaque producteur doit accepter le prix
proposé par le commerçant qui assure le transport.
La durée des visites de terrain a été trop courte pour établir avec précision et fiabilité une typologie
des systèmes maraîchers de la zone Sud-Est. Par exemple nous n’avons pas rencontré d’entreprise8
basée sur le maraîchage de plein champ ou sous serre et hors-sol9. Ce qui ne veut pas dire que ce type
de système de production n’existe pas dans cette région. Nous présentons donc uniquement la
diversité des systèmes relatifs à l’agriculture familiale traditionnelle. La typologie des systèmes à base
ou comprenant du maraîchage (Tableau X) est basée sur deux critères : (i) l’unité de paysage concerné
par le maraîchage et (ii) le degré de spécialisation en maraîchage.
8
Telle que définis par le PRO2M : surface en maraîchage d’au moins 5 ha/an, irrigation « moderne » (goutte à
goutte, aspersion), capacité de l’entrepreneur à investir dans l’équipement (subventionné ou non) et à fournir la
trésorerie de façon optimale (en temps opportun)
9
Les producteurs familiaux les plus engagés dans le maraichage connaissent la culture hors sol, ils l’ont
rencontrée lors de visites et de formations dans leur région ou vers Abidjan. Aucun d’entre eux ne l’a mise en
pratique par contre avec l’appui de la firme SEMIVOIRE le groupement maraicher d’Assoumokro a testé le goutte
à goutte sur 500 m² sans extension et adoption ensuite
39
40
Tableau 3. Diversité des systèmes de production familiaux comprenant du maraîchage dans la région Sud-Est
Zones basses, bas-fond Petite unité de production (< Unité de moyenne taille
aménagés ou avec 0, 2 ha/an), maraîchage de combinant le maraîchage en
aménagement sommaire femmes, de jeunes ou zone basse (< 0,2 ha) avec
(combinaison culture pluviale d’allochtones plus âgés, en parfois du maraîchage pluvial
et irriguée) ville ou en proche périphérie et toujours des cultures
vivrières de base
Moyenne à grande unité de
Zones exondés non irriguées production combinant
(Pluvial seulement) maraîchage pluvial (0,5 – 3 ha)
et les cultures alimentaires
pour la famille et du petit
élevage (parfois des cultures
pérennes)
40
41
41
42
a) Climat (Pluviométrie)
La pluviosité dans cette région est plus abondante que celle décrite ci-dessus pour la région Sud-Est,
puisqu’en moyenne la périphérie d’Abidjan reçoit entre 1600 et 1800 mm/an (période 1971 -2010)
avec une baisse de 200 mm/an du cumul annuel par rapport à la période 1951 -1980. Comme à
42
43
Abengourou la répartition des pluies est normalement bimodale avec une petite saison sèche entre le
15 juillet et la fin aout et une saison sèche plus longue de décembre à février.
Les aléas pluviométriques se sont renforcés depuis 20 ans : poches de sécheresse avec hausse de la
température, période avec des excès d’eau. Mais les maraîchers rencontrés à Songon considèrent que
ce sont les excès d’eau à certaines périodes de l’année qui affectent le plus leurs cultures. Cet excès
est d’autant plus préjudiciable que dans cette région, le maraîchage est surtout pratiqué dans les zones
basses où l’écoulement de l’eau est lent en cas de forte pluviosité. Les terres des glacis et plateaux
étant soit plantées en cultures pérennes soit destinées à la construction.
La réduction de la durée de la période culturale est évaluée en moyenne entre les deux périodes de
références (cf. infra) à une vingtaine de jours / an. Comme le maraîchage est pratiqué en zone basse
les maraîchers souvent équipés de motopompe n’ont pas de mal à faire face à cette évolution. Ce qui
n’était pas le cas en maraîchage pluvial sur les terres exondées et séchantes du Sud-Est
Selon nos interlocuteurs de Songon l’excès d’eau est plus préjudiciable que l’arrêt des pluies qui n’est
jamais très en long en saison des pluies. « En petite saison sèche ou lorsque la première saison des
pluies arrive tardivement, on se débrouille avec nos motopompes ». « Quand il tombe tous les jours
de grosses quantités de pluie on ne peut rien faire, les fossés et drains sont totalement engorgés10,
certaines portions de parcelles sont régulièrement inondées, les cultures donnent mal ».
« Nous évitons de faire du maraîchage durant le mois le plus pluvieux, surtout dans les parcelles les
plus basses. Habituellement la période mi-août mi-septembre est à éviter »
« Un maraîcher professionnel essaye de cultiver 3 fois l’an sur le même terrain : un 1° cycle durant la
petite saison des pluies, un 2° cycle entre mi-septembre et novembre et enfin un 3° cycle qui demande
d’utiliser toujours la motopompe (décembre – février). Mais avec le climat d’aujourd’hui de fortes
pluies peuvent toujours arriver, de ce fait on cultive presque tout le temps, à nos risques ».
Ce régime pluviométrique est aussi favorable aux maladies et à la destruction de feuilles en cas de
forte intensité. De ce fait c’est dans cette région que se concentrent les essais de culture sous abris
serres. (cf. § B.3.3) qui concernent surtout des entreprises de production. Les producteurs rencontrés
à Songon n’avaient pas connaissance de cette technologie, ni de la culture hors sol.
Dans les sites de production urbains ou périurbains, les terres réservées au maraîchage se situent
surtout en zones basses et donc inondables les mois les plus pluvieux. Ces sols relativement riches en
matière organique initialement (avant le développement du maraîchage par les allochtones)
s’appauvrissent au fil du temps du fait du faible apport de fumures organiques. Ils bénéficient toutefois
des apports venant des plateaux (nutriments minéraux, matières organiques fines). La contrainte
foncière très forte dans ces situations ne permet pas d’envisager la pratique de la jachère et rend
difficile l’insertion de plantes fertilisantes car les maraîchers sont spécialisés et ne vivent, eux et leur
famille, que des revenus de cette activité. Toute surface consacrée à une plante de service11 entraine
à court terme une baisse de revenu.
10
Une bonne partie du maraichage à Songon se fait sur d’anciennes parcelles de banane dessert délaissées par
la société de production qui les louait. De ce fait ces parcelles présentent encore des drains et ados facilitant la
culture malgré l’excès d’eau.
11
Culture qui fournit des services écosystémiques : fourniture de matière organique et de nutriments au sol
(plantes fertilisantes) et/ou réduction des parasites par différents processus (antagonisme avec des parasites du
sol comme les nématodes).
43
44
L’utilisation de litières de poulailler n’est pas inconnue des maraîchers même s’ils la considèrent
comme trop contraignante s’ils ne peuvent pas mobiliser facilement un petit camion ou un tricycle
motorisé. Par ailleurs, les doses utilisées sont faibles. Lors de la visite à Songon, la quantité de fientes
de volaille mélangées à la sciure de bois a pu être estimée à un sac de 50 kg sur une superficie de 100
m² soit 0,5 kg/m². Cet apport de matière organique est complété par des apports d’engrais complet
12-22-22. On peut aussi s’interroger sur la qualité fertilisante et humifère de ces fientes mélangées à
une grande proportion de sciure de bois sachant que la sciure met plusieurs mois à évoluer par
fractionnement de la lignine par des champignons du sol.
Le choix des cultures est surtout dépendant de leur adaptation aux conditions climatiques particulières
de cette région, proches du climat équatorial : forte humidité de l’air permanente et forte
pluviométrie.
Les principales cultures de ce bassin de production sont le gombo, le chou pommé, le piment, les
aubergines douces et amères, la tomate auxquels il faut ajouter des légumes feuilles toujours présents
en zone urbaine (laitue, oignon vert, légumes feuilles africains).
Les cultures de piment et poivron sont affectées par de nombreuses maladies virales et probablement
le flétrissement bactérien. Les producteurs ajoutent que les aubergines sont aussi attaquées par des
viroses ; c’est peu probable, mais l’aubergine est sensible à l’anthracnose, aux jassides, au
flétrissement bactérien entre autres. A l’inverse des producteurs du Sud Est, ceux de Songon
considèrent que la tomate n’est pas plus touchée par ces maladies que les autres cultures. La variété
Cobra leur donne satisfaction mais sa semence est très onéreuse (semence F1 20 000 FCFA les 250 gr).
Inversement le technicien maraîcher d’une entreprise de production agricole à 30 km au Nord
d’Abidjan considère que la tomate est bien plus « compliquée » à cultiver que le piment, le gombo,
l’aubergine violette sélectionnée et le concombre. Le chou à cause des maladies et insectes ravageurs
ainsi que l’aubergine africaine à cause d’une forte mortalité des jeunes plants sont aussi considérés
comme difficile à cultiver et ces choix constituent une prise de risque économique importante (non
rentabilité de l’investissement en intrants et en travail, immobilisation de la terre).
Si des pépinières soignées (hors-sol, substrat sain, protection contre les pluies) peuvent permettre de
limiter les pertes de jeunes plants, la création de variétés résistantes aux ravageurs est plus
hypothétique quoique Technisem propose une variété de chou pommé offrant une résistance partielle
à Plutella xylostella, teigne du chou. Contre les ravageurs des fruits des aubergines des moyens de lutte
biologiques existent avec des trichogrammes et des champignons Metarhizium sp. Le greffage des
solanacées (tomate, aubergine) sur des portes greffes résistants aux maladies du sol pourrait être une
alternative à la portée des maraîchers.
Unanimement la période de production de contre saison (décembre à mars) est considérée par les
maraîchers rencontrés comme techniquement la plus facile et la plus rentable :
- Les maladies fongiques font moins de dégâts à cette période et les traitements sont plus
efficaces ;
- Le prix de vente est toujours plus élevé à cette période car le maraîchage pluvial, très présent
dans le Centre-Sud et surtout le Sud-Est, n’est plus productif depuis le mois de novembre.
Certes le marché peut être approvisionné par des produits importés du Burkina Faso et
d’autres pays sahéliens (tomate, chou).
44
45
Des sites de production urbaine subsistent dans Abidjan, celui de Port-Bouet est le plus grand. Nous
avons aussi rencontré du maraîchage en pleine ville de Yamoussoukro, s’appuyant sur les nombreuses
ressources en eau de cette ville (lacs, petits cours d’eau ou exutoires).
45
46
L’insécurité foncière est toujours plus forte pour les maraîchers dès que l’on se rapproche des villes.
L’urbanisation rapide et la valeur financière élevée du terrain poussent les propriétaires terriens à
vendre leurs terres agricoles qu’ils ont loués ou prêtés aux maraîchers. La situation topographique des
terres et le risque d’inondation limitent ce phénomène mais on voit de plus en plus d’opérations de
remblaiement en bordures de zones basses qui permettent de rendre constructible d’anciennes
parcelles de maraîchage.
46
47
Par exemple dans le cas de Songon, la coopérative bien qu’ancienne n’apporte pas de service à la
centaine de ses membres hormis la mise à disposition d’un magasin au bord de la route nationale pour
stocker les produits avant leur vente sur place ou leur acheminement sur des marchés d’Abidjan
La proximité de la ville et l’offre importante en transport réduisent les coûts de transport des
marchandises et des personnes. Mais la seule situation où le producteur peut vraiment tirer profit de
la proximité de la ville est quand il commercialise lui-même ses produits sur les marchés de gros ou de
détails ou lorsqu’il confie cette activité à sa femme ou un parent. Mais cette situation est rarissime car
elle est coûteuse en temps de travail. De ce fait seule une action collective aurait du sens pour
partager les coûts de commercialisation et négocier plus facilement des prix intéressants avec les
acheteurs et aussi les vendeurs d’intrants.
Vue la proximité des marchés et agro-fournissers, la coopérative avec un grand nombre de membres
n’est probablement pas la forme d’organisation la mieux adaptée. On pourrait proposer des
groupements d’achat et de vente de plus petite taille et plus fonctionnels. Ensuite il conviendrait
d’accompagner ces groupements d’achat/vente pour qu’ils définissent leurs modalités de
fonctionnement (fonds de roulement, emprunt, crédit fournisseur, prélèvement pour services rendus
etc.)
Plus globalement les décideurs considèrent que l’agriculture périurbaine et urbaine n’est pas un
secteur d’investissement souhaitable car elle serait condamnée par l’urbanisation à court terme et
qu’elle occasionnerait des risques pour les consommateurs (usage abusif des pesticides) et les citadins
(résidus d’épandage de pesticides dans l’air). Dans le cas de Songon les risques pour les
consommateurs sont les mêmes que ceux rencontrés en milieu rural dès lors que le maraîchage est
47
48
conduit de façon intensive. Cependant, les avantages de l’agriculture urbaine ne sont pas à oublier:
emploi, verdissement du paysage, agriculture biologique, circuit court, espace de formation et de
sensibilisation des populations aux questions environnementales.
Malheureusement nous n’avons pas pu visiter l’entreprise la plus avancée en culture sous serre de la
région faute d’un accord préalable avec son gestionnaire du fait d’une prise de rendez-vous trop
tardive.
a) Contraintes techniques
L’équipement en serre de la seconde entreprise et projeté par la première entreprise repose sur du
matériel importé de qualité et donc onéreux. Il permet de cultiver les légumes hors-sol dans des pots.
La principale contrainte est la gestion de la température dans la serre car à l’origine ce modèle de serre
n’a pas été conçu pour les zones tropicales humides où il n’y a pas une baisse de température durant
la nuit mais une hygrométrie toujours élevée et des températures diurnes souvent au-dessus de 30°C.
L’aération de la serre se fait en relevant les bords inférieurs de la bâche plastique. Son efficacité
dépend du régime des vents, de l’espacement entre serres, … dans tous les cas l’air chaud toujours
montante, est piégée dans le tiers supérieur de la serre. Par contre ce modèle de serre isole bien les
cultures des pluies et de leurs effets négatifs sur les plantes, la floraison… Il facilite ainsi la gestion de
l’eau et des nutriments et rend plus efficace les traitements phytosanitaires. Par contre la serre n’est
pas hermétique et ne limite pas les déplacements des insectes.
48
49
Certains problèmes techniques (irrigation, choix de variétés, gestion du parasitisme…) peuvent être
résolus avec l’appui d’experts mais ils ne sont pas nombreux dans le domaine du maraîchage en
général et de la culture sous serre en particulier. Un technicien supérieur agricole et responsable de la
production d’une entreprise visitée soulignait qu’il ne pouvait pas compter sur des experts compétents
et que les conseillers et TS de l’ANADER ne lui étaient d’aucun secours.
b) Contraintes économiques
Une autre contrainte est commune aux deux entreprises visitées : le coût élevé de production du fait
des investissements consentis (serres, groupe électrogène, forages, bureau, logements…) et surtout
des charges importantes en salaire (technicien, ouvriers, gardiens). De ce fait la rentabilité de telles
entreprises ne sera assurée que si les rendements obtenus sont élevés. Généralement ces
entrepreneurs bien introduits dans le monde des affaires à Abidjan cherchent à vendre directement
leurs légumes aux supermarchés ou aux grossistes que se chargent d’approvisionner ces grandes
surfaces. Les prix obtenus sont généralement supérieurs à ceux des marchés traditionnels de gros.
c) Contraintes de gestion
La présence épisodique du propriétaire ou du pool d’investisseurs sur les lieux de production constitue
une contrainte majeure dans la gestion de ces entreprises. Certes la gestion courante (des cultures, du
personnel, des finances…) est déléguée à du personnel qui peut être compétent mais qui n’est pas
nécessairement apte à gérer beaucoup de salariés. Ces entreprises font souvent appel à des experts12
mais de façon ponctuelle qui fournissent des recommandations mais ils n’ont pas en charge la gestion
quotidienne ni la définition d’une stratégie. Enfin, les propriétaires viennent d’autres horizons
professionnels autres que le secteur agricole et ne maitrisent pas les bases de la production
maraichère. Les conflits ou incompréhensions entre les gestionnaires salariés et les propriétaires,
responsables de l’entreprise, sont fréquents surtout en termes de mobilisation de la main d’œuvre
(toujours trop coûteuse) et de mobilisation de capitaux en cas d’ajustement/changement
d’équipements.
d) Quelques recommandations
La spécialisation de l’entreprise comme dans le second cas est-elle un atout ? En cas d’accident
sanitaire, de panne de forage… le risque de perte économique est élevé. La combinaison d’activités
complémentaires au sein de l’entreprise est-elle un gage de succès et d’atténuation des risques. Par
exemple, les cultures pérennes fournissent un revenu assez stable et la fumure tirée des ateliers
d’élevage permet d’entretenir la fertilité des sols des cultures de plein champ. D’autres synergies entre
ateliers sont possibles. Mais la réussite de cette combinaison d’activités nécessite plus de terre, de
main d’œuvre et surtout une bonne maitrise technique dans différents domaines.
A ce stade, il est difficile de donner des recommandations précises sur le choix des équipements et la
combinaison de production pour ces entreprises. La réussite de ces entreprises dépendra évidemment
du niveau de compétence technique et gestionnaire du personnel salarié mais l’on note un fort déficit
de techniciens supérieurs spécialisés en maraîchage et plus encore en culture hors-sol sous abri,
technologie récente en Côte d’Ivoire.
Sur la base de ce premier diagnostic, le PRO2M pourrait réaliser un bilan plus précis des expériences
réalisées par les entreprises de production maraichère (ou comprenant un volet maraîchage
12
C’est souvent le cas pour l’atelier d’élevage qui a toujours besoin des conseils d’un vétérinaire zootechnicien.
49
50
significatif), qu’il s’agisse de cultures hors sol sous serre ou de plein champ. La revue des acquis
obtenus en Côte d’Ivoire pourrait être complétée par des retours d’expériences dans des pays proches
(Ghana, Sénégal) ou ayant des écologies comparables en particulier dans des zones humides (Gabon,
Nigéria, La Réunion/France).
Tableau 6. Diversité des systèmes de production comprenant du maraîchage dans la région Sud
50
51
Tableau 7. Analyse Forces, Faiblesses, Opportunités, Menaces des systèmes maraîchers de la zone Sud
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Dégâts occasionnés par les Promouvoir de façon progressive des modèles de culture sous abri
fortes pluies compatibles avec les capacités d’investissement des producteurs (un pour les
agro-entrepreneurs, un autre pour les maraichers spécialisés disposant d’un
petit capital)
Evaluation par un projet de R-D des gisements de matières organiques
composables issues des agro-industries et des poulaillers industriels (suivi des
Baisse de la fertilité du sol éléments indésirables : métaux lourds, antibiotiques)
Définition et mise en œuvre d’un projet de R-D sur l’usage de bio pesticides
autoproduits ou disponibles dans le commerce
Faible capacité de Mise en relation des producteurs organisés pratiquant la vente groupée avec
financement les banques et IMF pour obtenir des prêts garantis par la vente groupée
52
53
Les situations visitées se situent dans la zone II (Figure 3) caractérisée par un climat tropical avec
normalement 2 saisons de pluies et 2 saisons sèches. Mais d’une année à l’autre, cette répartition peut
changer. La pluviométrie moyenne est de 1200 mm/an. Il y a entre 80 et 100 jours de pluie13 par an.
On y distingue :
- Une grande saison sèche chaude de novembre à février-mars, caractérisée par l’harmattan,
vent sec et frais qui souffle de décembre à février ;
- Une saison chaude pluvieuse de mars à juin ;
- Une saison plus fraîche, peu pluvieuse en juillet et août
- Une saison des pluies de septembre à octobre.
53
54
Les variations de températures sont très faibles et les saisons sont surtout déterminées par les
variations de pluviométrie. Cependant, le cumul de pluies varie beaucoup de 800 et 1 300 mm/an et
la répartition des pluies est très variable d'une année à l'autre tant du point de vue des dates de début
que de fin de la saison pluvieuse. L’extrême variabilité de la pluviosité rend difficile la caractérisation
des saisons de cette région Centre.
La région présente en outre un important réseau hydrographique avec de nombreuses rivières (le Kan,
le M’bé, la Loka, le Segbono, le Niaco, le Béré et le Kohoué). Trois principaux cours d’eaux existent dans
la région : le Bandama blanc, la Comoé, le N’zi (Koffi et Dugué, 2001). Ces cours d’eau permettent une
irrigation à partir de barrages (périmètre visité irrigué à partir d’un barrage sur la Loka) et de pompage
dans les cours d’eau (sans barrage). A cela s’ajoute le pompage dans les lacs naturels (maraîchage
urbain à Yamoussoukro, périmètre visité au sud de Toumodi).
Mesures J F M A M J Jt A S O N D Tot
Température 26,3 27,4 27,5 27,2 27,4 26,0 24,6 24,5 25,9 26 26,7 26,3 26,2
moyenne °C
Température 19,9 20,6 21,2 21,2 21,7 21,1 20 20,1 20 20,1 20,6 19,9
moyenne
mensuelle
minimale
Précipitations 11 43 87 133 142 140 104 116 194 122 30 17 1139
mensuelles
moyennes (mm)
Les sols des régions de Bouaké, Yamoussoukro et Bouaflé sont généralement peu profonds et légers.
Ils correspondent à un môle cristallin dépassant 280 m d’altitude surmonté de collines. Les sols
ferralitiques ou ferrugineux sont médiocres dans l’ensemble. Ils présentent un horizon superficiel
fortement gravillonnaires sur les hauts de toposéquence, plus sableux ensuite et sont souvent
appauvris en argile. Les plus profonds, à bonne structure physique et plus riche en argile, se situent à
54
55
l’ouest sur les migmatites. A l’est, sur les schistes, des sols bruns de bonne qualité se développent sur
les pentes mais les cuirasses prennent de l’extension (Chaléard, 1996). En périphérie immédiate de
Bouaké, les cultures sont faites dans des bas-fonds avec des cultures sur billons haut.
Comme au Nord, les caractéristiques de ces sols impliquent la nécessité d’amendements organiques
complémentaires de la fertilisation minérale habituelle et l’apport de calcium, élément très important
pour la production de tomates.
L’entretien de la fertilité du sol et la fertilisation des légumes reposent majoritairement sur des apports
d’engrais minéraux de synthèse, des rotations et lorsque la disponibilité en terre le permet et la
jachère. Mais dans cette zone, les terres aptes au maraîchage – essentiellement en zone basse et en
bas-fonds - sont limitées en surface. Les jachères sont de courte durée entre 6 mois et deux ans. Par
contre, les rotations sont connues notamment avec légumineuses (haricot vert), et la tomate peut
suivre un manioc culture très épuisante pour le sol.
Les fertilisants les plus utilisés sont les engrais minéraux, urée et engrais complet 15-15-15. La fumure
organique apportée est la fiente de poulet, le plus souvent additionnée de balle de riz ou de sciure de
bois. Les doses sont très faibles : 0,12 à 0,24 kg/m² à Allokokro (Koffi et Dugué, 2001). Outre le fumier,
les doses d’engrais sont très variables : 40 g/m² 15-15-15 + 60 g/m² nitrate de potassium pour la tomate
(Koffi et Dugué, 2001), 60 g/m² 15-15-15 à Djebonoua.
Un rapide bilan de fertilisation indique des apports suffisants pour N, P et K pour la tomate avec les
rendements mesurés, mais insuffisants pour le calcium et le magnésium
Dans la région de Bouaké nous n’avons pas été interpelés sur la baisse de fertilité des sols. Mais, si le
maraîchage se poursuit avec les doses apportées de fertilisation minérale et sans beaucoup de fumure
organique, ce problème risque d’émerger en plus du problème de maladies telluriques, notamment
pour le calcium et le magnésium.
Dans la région de Yamoussoukro, les sols cultivés sont très sableux (site proche de l’aéroport, sites14
PARFACI et PUA-PV de Balakro), très blancs et contiennent peu de matière organique. Pour restaurer
la fertilité de ces sols il faudrait apporter de grandes quantités de fumures organiques (20 à 40 t/ha/an
pendant plusieurs années de suite) ou cultiver des engrais verts en saison pluvieuse (des légumineuses
comme la crotalaire qui devront recevoir une fumure P-K adaptée sinon la biomasse produite et
enfouissable dans le sol sera très faible). Une partie des maraîchers essaye d’apporter de la FO mais à
des doses très faibles (< 5 t/ha/an), il s’agit souvent de fientes de volaille mélangées à de la balle de riz
ou de la sciure de bois. Ce mélange n’est pas systématiquement composté. La charge de travail et le
coût de transport sont les contraintes avancées par les maraîchers pour expliquer ces faibles
amendements organiques.
14
Avant l’aménagement des deux périmètres maraichers contigus, les producteurs cultivaient en bordure du lit
du bas-fond sur des petites parcelles et irriguaient manuellement. La fertilité du sol était meilleure du fait d’une
teneur en argile un peu plus importante et surtout des apports de nutriments par les inondations et le
ruissellement en nappe. Pour sécuriser les équipements et créer deux périmètres collectifs (2ha et 5 ha) la zone
de production est remontée dans la toposéquence et sur des sols moins fertiles.
55
56
Les conditions pédoclimatiques de la zone Centre permettent de cultiver les espèces maraîchères les
moins sensibles aux conditions chaudes et humides une fois le problème de l’irrigation résolue en
périodes sèches. Tomate, aubergine, haricot vert, courgette, concombre et piment sont fréquents.
Mais on trouve aussi en période sèche des espèces plus difficiles à conduire comme le chou pommé,
la carotte. Enfin, les légumes feuilles et indigènes sont aussi très présents.
Pour la tomate, le maraîcher rencontré à Djébonoua fait 4 semis chaque année en janvier, avril, juillet
et septembre. Elle présente une bonne adaptation aux conditions climatiques de cette région. Les
meilleurs rendements sont obtenus avec des récoltes en saison sèche pour les semis de septembre.
Dans le chapitre sur la zone Nord précédent, les différentes contraintes aux principales cultures sont
détaillées.
Nous revenons sur la tomate (Lycopersicon esculentum) qui est très cultivée dans la zone Centre pour
approvisionner le marché d’Abidjan. Le problème principal est le flétrissement bactérien causé par
Ralstonia solanacearum, le producteur rencontré utilise donc essentiellement la variété résistante
Cobra F1 (Technisem) qui présente des fruits très fermes et peut donc résister aux conditions de
transport rustiques (en carton de 40 kg). Il a essayé aussi les variétés Lindo F1, Ndira F1, UC 82 et Rio
Tinto F1. Outre le choix de variétés résistantes, la rotation est une autre méthode de lutte contre le
flétrissement. Si parfois, deux cultures de tomates se suivent sur la même parcelle, le plus souvent une
alternance entre deux périodes de production de tomate de deux années minimales est respectée. Le
Tomato Yellow Leaf Curl (TYLCV) semble moins présent bien que des expérimentations sur la station
du CNRA de Bouaké avaient montré sa présence toute l’année (Nzi et al. 2010).
Les rendements de tomate indiqués par le maraîcher de Djébonoua peuvent atteindre 20 t/ha en 7 à
8 récoltes hebdomadaires. Ils sont plus élevés que les rendements des maraîchers de la région donnés
dans la littérature (entre 10 et 15 t/ha). A la station CNRA de Bouaké le rendement moyen en tomate
varie de 15 à 22 t/ha de tomate, avec l’itinéraire technique recommandé (Fondio et al., 2013). Cet
agriculteur fait une application hebdomadaire de pesticides qu’il arrête au début de la floraison, soit
au total 4 à 5 traitements pour la culture. Les produits utilisés sont Cypercal (cyperméthrine) et Absolu
80 EC, mélange d’emamectine benzoate, abamectine et acétamipride.
Pour la tomate, l’exemple de ce maraîcher de Djébounoua montre qu’un bon contrôle des maladies et
ravageurs permet d’obtenir des rendements satisfaisants, les causes des faibles rendements ailleurs
sont dues à : des fertilisations insuffisantes et un contrôle insuffisant des maladies et ravageurs.
Tableau 11. Rendements observés en t/ha à Allokokro en 2000 (Koffi et Dugué, 2001) comparées à données PARFACI (2017)
Dans la région de Bouaflé les 4 cultures majeures sont la tomate, les aubergines africaine et
européenne, et le gombo. Ensuite viennent le chou, le piment, le concombre. Le maraîchage pluvial
est prépondérant comme dans le Sud-Est, il est installé en mai ou juin après l’installation des cultures
vivrières autoconsommés (racines et tubercules, arachide, maïs...). Un 2° cycle de cultures maraichères
(tomate surtout) est implanté en septembre. En saison des pluies l’aubergine africaine (variétés Kotobi
et CNRA) s’avère bien adaptée à l’intensité des pluies et au parasitisme mais son prix de vente est bien
inférieur à celui de la tomate. La tomate reste dans toute la zone Centre l’espèce phare mais de plus
56
57
en plus sujet au parasitisme malgré le recours aux nouvelles variétés dites tolérantes. Le renforcement
des attaques parasitaires est abordé dans la partie du rapport traitant de la zone Sud-Est.
Parcelle de tomate à côté d’une cacaoyère Irrigation d’appoint avec « bassin bricole » et motopompe
57
58
Figure 6. Périmètre collectif de Balakro sur sol sableux, équipement d’irrigation en commun mais trop faible débit à la parcelle
a) Contraintes foncières
Les contraintes foncières sont doubles : (i) manque de terres aptes au maraîchage pluvial mais surtout
au maraîchage irrigué, (ii) insécurité foncière du fait d’un accord verbal, non sécurisé par un écrit, entre
les propriétaires terriens et les producteurs.
La région Centre (telle que définie en début de chapitre) dispose de grandes surfaces cultivables en
pluvial du fait de l’exode rural ancien à partir du pays Baoulé et d’une moindre pression des cultures
pérennes que dans les régions Sud et Sud-Est traitées dans ce rapport. Ainsi le maraîcher de
Djébounoua n’a pas eu de difficulté à trouver du foncier. Etant sans emploi, il a voulu s’installer comme
maraîcher en demandant de cultiver des terres familiales qu’il a facilement obtenues. Depuis lors Il a
pu accroître sa surface cultivable en fonction de ses besoins annuels. D’installation récente, il apparait
avoir suffisamment de superficies disponibles pour faire rotations et jachères.
La contrainte est plus forte en milieu urbain et périurbain. Ainsi à Yamoussoukro et en périphérie, les
bonnes terres irrigables et libres sont difficiles à trouver. En ville le maraîchage (salade, choux, légumes
feuilles africains) se fait jusqu’aux bords des rues et des lacs, le long des ruisseaux pollués. L’insécurité
foncière est forte car le maraîchage est réalisé par des allochtones et étrangers sans droit d’usage ni
de droit foncier. Non loin de la Basilique les maraîchers déclarent avoir reçu le droit de cultiver en
bordure du lac de feu le Président F. Houphouët Boigny.
Les groupements de maraîchers rencontrés s’inquiètent de la durabilité des droits d’usage des terres
des périmètres aménagés par les projets qui leurs ont été attribuées. Ils recommandent qu’il faut
associer dès le repérage des sites et la conception des périmètres, les propriétaires terriens, les chefs
coutumiers et les collectivités locales à la rédaction des contrats entre ces acteurs et les représentants
58
59
des maraîchers, souvent des allochtones. Ils souhaitent que les projets étudient les façons d’intégrer
plus largement des producteurs autochtones dans la filière maraichère locale.
Tableau 12. Entrepreneurs en maraîchage de plein champ rencontrés dans la zone Centre
Localité Superficie
Cultures par Modalités de Contraintes par Intrants
cultivée
ordre commercialisation ordre
d’importance d’importance
Djébonoua 4 x 0,5 ha Tomate, Vente individuelle Flétrissement
(3 ha de manioc par expédition en bactérien mais Engrais +
terre carton vers les Rdt tomate > = fumier de
disponible) grands marchés 20 t/ha volaille (très
d’Abidjan peu) +
Toumodi 3,5 ha/an Tomate, Vente à la grande Sol sableux très pesticides
en 3 cycles aubergine distribution peu fertile chimiques+
piment (commande Maladies et semences
(5 ha de haricot vert quelques jours déprédateurs commerciales
terre gombo avant livraison) sur tomate (Rdt
disponible) > 10 t/ha)
Lorsque les surfaces en maraîchage sont plus petites (moins de 1 ha par an) l’exhaure et l’arrosage
se fait généralement manuellement. Les producteurs sont alors plutôt orientés sur le maraîchage
pluvial comme c’est le cas dans la région de Bouaflé : 5% seulement des agriculteurs faisant du
maraîchage posséderaient une motopompe15 selon l’ANADER, le goutte à goutte est presque
inexistant. Par contre le maraîchage urbain à Yamoussoukro conduit par d’anciens maraîchers
présente un taux d’équipement en petite motopompe remarquable (plus des 2/3 des maraîchers sont
équipés).
Comme dans les autres régions visitées, le manque de trésorerie affecte la préparation des cycles de
culture et les maraîchers sans épargne recourent au crédit auprès des commerçantes de légumes pour
acheter les semences et autres intrants. A la récolte elles se remboursent en nature lorsqu’elles
achètent la production. D’une certaine façon cela oblige les commerçantes à acheter la production (du
moins une partie) mais elles sont en position de force pour imposer leurs prix d’achat.
Au niveau des groupements et coopératives de producteurs
Les groupements et coopératives sont créés pour répondre à 3 objectifs :
15
Le village de Pangbankouamekro , non loin de Bouaflé, compte un groupement de 12 maraîchers hommes qui
cultivent en saison des pluies et en contre saison, tous irriguent avec l’arrosoir , la motopompe n’a jamais été
utilisé dans ce village.
59
60
- Obtenir des prix de vente plus élevés et un coût de transport moindre : coopérative de
commercialisation (COVIMA à Bouaflé), groupements de vente, associations informelles de
quelques producteurs (cf. paragraphe suivant) ;
- Négocier des prix d’achat d’intrants moindres et une garantie de leur qualité : plateforme
multi-acteurs maraîchage de Yamoussoukro (cf. encadré 1). L’action des groupements pour
l’achat groupé d’intrants est indispensable et doit être encouragée pour ces deux raisons. Elle
permet aussi de créer une coalition d’acteurs – producteurs, agro-fournisseurs – pour que les
services publics fassent respecter les normes du commerce et de l’usage des pesticides16 ;
- Gérer un périmètre aménagé pour le maraîchage par un projet (cf. encadré 2). Lorsque le point
d’eau est éloigné des parcelles maraichères il est nécessaire que les producteurs se regroupent
autour d’équipements communs comme des motopompes puissantes et des conduites d’eau
de qualité pour limiter les fuites et donc réduire les coûts de pompage.
Dans tous les cas, malgré l’appui technique et organisationnel de l’ANADER et des Projets, ces
groupements et coopératives manquent de trésorerie pour fonctionner efficacement et ne sont pas
connectés au secteur bancaire ou des IMF.
Cette plateforme a été créée à l’initiative de l’ANADER en 2017 et de quelques jeunes producteurs
maraîchers entreprenants. Elle associe plusieurs groupements de productrices (AFAGRI à Toumodi)
et de producteurs des périmètres PARFACI et PUAPV ainsi que des producteurs indépendants. A ce
jour la plateforme associe des producteurs et productrices, des représentants des services publics
(ANADER, CNRA, Projets) et des fournisseurs d’intrants représentés par leurs délégués régionaux ou
leur siège d’Abidjan. Les commerçants ne sont pas montrés actifs dans la plateforme jusqu’à
maintenant bien qu’ils aient été conviés plusieurs fois. De même pour les transporteurs mais leur
rôle est moins central dans le développement de la filière.
Après deux années d’existence la plateforme n’a pas pu engager de relation contractuelle avec les
commerçants locaux ou des grands marchés d’Abidjan. Elle bénéficie aussi du soutien du Projet 2PAI
- Agropole de la région Bélier (Projet de pôle agro-industriel dans la Région du Bélier). Ce projet
préfigure la mise en place d’une agropole et envisage d’aménager 335 ha de cultures irriguées (riz
et maraîchage)
16
Plusieurs responsables d’OP maraichères ont dit combattre l’usage des insecticides coton sur les légumes. Dans
ce cas ce ne sont pas les petits détaillants qui vendent des pesticides frauduleux (l’insecticide est bien homologué
mais uniquement pour le cotonnier). C’est une partie des producteurs qui ne respectent pas les règles en vigueur
soit par facilité et cupidité (ces insecticides coton sont peu chers) soit par ignorance.
60
61
A l’avenir la plateforme voudrait imposer des représentants de producteurs dans les commissions
de dépouillement des appels d’offres des projets, représentants avec de fortes compétences et
une longue expérience dans différents secteurs : choix des sites à aménager (sol, hydraulique),
évaluation de la compétence des entreprises de prestations en aménagement, choix des intrants et
matériels pour la constitution des kits etc.
Par ailleurs, elle étudie la possibilité que les fournisseurs d’intrants avec l’appui des OP de
maraîchage mettent en place une filière de collecte des emballages de pesticides pour un
traitement groupé voir leur recyclage.
Si les inconvénients l’emportent sur les avantages, les producteurs essayent d’améliorer leur
situation par leur acharnement au travail (apport de fientes de volaille mais en trop petite quantité
à Balakro). Souvent ils se découragent et abandonnent le périmètre aménagé.
L’organisation collective des maraîchers, en particulier leur regroupement sur des sites partagés19 de
production ont toutefois l’avantage de développer les échanges de savoir-faire, de variétés voire de
tisser de liens de solidarité et d’entraide par le travail. Cela facilite leur
17
En ceci est théorique car il est possible avec quelques moyens de transport de déplacer des tuyaux, une
installation goutte à goutte, une motopompe. C’est plus délicat pour les châteaux d’eau qu’il faut reconstruire à
grand frais.
18
En maraichage pluvial ou irrigué individuel, le producteur peut changer de lieu de production s’il a accès à un
foncier assez large et cultiver sur des terres plus fertiles et indemnes de parasites. Il lui suffit de déplacer sa petite
motopompe sur sa moto voire son vélo et ses tuyaux souples bricolés.
19
Mais où chaque maraîchers et maraîchères disposent d’une parcelle personnelle. Dans toute le région Centre
nous n’avons pas eu écho de production collective (tous les membres du groupement travaillent ensemble sur
une parcelle, vendent puis se partagent le bénéfice après avoir abonder une caisse commune, comme cela existe
toujours dans le Nord avec des groupements féminins)
61
62
Des pratiques individuelles de commercialisation à la vente groupée. Les petits producteurs vendent
leurs légumes préférentiellement bord champ aux commerçantes qui ensuite les acheminent sur
Abidjan et les marchés secondaires du pays. Cela leur économise l’organisation et le coût du transport.
Mais dès que les volumes produits deviennent plus conséquents (grands et moyens producteurs) et
lorsqu’ils ne se trouvent pas trop éloignés des gares routières, les maraîchers privilégient la vente sur
Abidjan, San Pedro et parfois Bouaké en confiant les cartons de légumes à des compagnies de transport
en commun (bus). Pour cela il faut entretenir des relations de confiance avec des commerçantes
basées en ville et se déplacer de temps en temps avec la marchandise pour rencontrer de nouveaux
acheteurs.
Dans ces situations il peut exister 4 intermédiaires qui chacun prélèvent leur marge, entre le
producteur et le consommateur. Le groupage de la vente ne permet pas forcément de réduire ce
nombre mais facilite pour les producteurs la négociation du prix et du coût de transport avec les
autres acteurs. Mais il existe peu de collectifs de producteurs et productrices capables d’organiser cela
dans la Région Centre probablement du fait que l’offre en transport y est très importante (axe
Yamoussoukro Abidjan). Djébonoua dispose d’un centre de collecte et deux coopératives de
commercialisation sont actives à Bouaflé, la COMIVA et SODEVIMA qui vendent d’autres vivriers
(plantain, manioc) et même du cacao, produit moins périssable et leur procurant une meilleure marge.
La faible demande des marchés les plus rémunérateurs. La vente des légumes aux grandes surfaces
(marques Casino, Carrefour implantées à Abidjan et bientôt Auchan) ou à leurs intermédiaires
(centrales d’achat Prosuma, Océane et Vivr’Ivoire) apparait comme la solution idoine pour nombre de
producteurs qui pensent ainsi bénéficier de prix d’achat plus élevés que ceux octroyés par les
commerçantes Gouro. Mais en fait ces acheteurs sont plus exigeants en terme de qualité et il faut bien
trier la marchandise avant de leur livrer (d’où une perte de revenu car les légumes déclassés se
vendront à très faible prix). De plus les volumes achetés par ces acteurs du commerce « moderne »
sont aujourd’hui très limités car la grande majorité des urbains achètent toujours leurs légumes dans
les marchés de détail traditionnels. 0,5% des légumes achetés par les consommateurs abidjanais
proviendrait des Grandes surfaces (Hyper et supermarché) selon nos estimations20. D’autres lieux de
vente sont plus rémunérateurs comme le marché Carena Plateau spécialisé21 dans la courgette, le
poivron mais là aussi la capacité d’absorption de ce marché est très faible comparée à celles des grands
marchés populaires.
Couplage commercialisation groupée des légumes et approvisionnement à crédit des intrants. Il est
difficile d’expliquer la stratégie actuelle de commercialisation groupée car il y a trop peu d’expériences
20
Le premier groupe, PROSUMA commercialise environ 900 t de fruits et légumes par an dont 50% de légumes.
Toutes sociétés confondues, les super et hypermarchés ne commercialisent pas plus de 1000 t de légumes frais
par an. La consommation de la population d’Abidjan en légumes se situe entre 230 000 et 280 000 t/an et la
consommation nationale à 916 000 t/an (Neveu Tafforeau, 2017).
21
Ainsi que les légumes importés d’Europe, du Maroc et d’Asie (oignon, pomme de terre, ail, carotte hollandaise)
vu sa proximité avec le port
62
63
Mais le crédit intrant que les banques pourraient octroyer ne sera remboursé et durable que s’il est
connecté à une opération de vente groupée de légumes coordonnée par le même collectif de
producteurs : un groupement, une coopérative. L’obligation de vendre une partie de sa production via
son OP permet à celle-ci de s’assurer que le crédit bancaire pris au nom de tous les producteurs
emprunteurs sera effectivement remboursé. Ce mécanisme existant dans d’autres filières (coton22 par
exemple) sera apprécié des producteurs que si tous les maillons sont fonctionnels et performants, et
si le secteur bancaire joue le jeu (taux d’intérêt raisonnable, frais de gestion des dossiers limités). En
particulier il faut veiller :
- En amont, à la bonne qualité des intrants, à leur livraison à temps et surtout à des prix de
cession raisonnables si le volume d’achat groupé est important (cf. encadré sur la plateforme
multi-acteurs) ;
- A l’obtention par les producteurs de bonnes performances technico-économiques ce qui
implique (i) une limitation des effets dus aux aléas climatiques (irrigation d’appoint mobile
avec petite motopompe et/ou points d’eau suffisants, drainage des parcelles basses) et (ii) un
conseil technique pointu et réactif en cas de pullulation de déprédateurs ;
- En aval, à la mise en place d’un système de vente de groupé qui aboutit (i) à des prix de vente
bord champ pour le producteur, égaux et si possible supérieurs à ceux proposés par les
commerçants en vente individuelle et (ii) à une bonne régularité des enlèvements ce qui réduit
les pertes et préserve la qualité marchande des légumes transportés vers les grands marchés ;
- A favoriser un système de gouvernance transparent qui limite les possibilités d’enrichissement
illicite des dirigeants de la coopérative ou du groupement d’achat/vente ;
- Et bien sûr, obtenir des membres du groupement/coopérative le respect des quantités à livrer
nécessaires au remboursement de leur prêt.
Encadré 3 : La transformation des légumes, une voie de valorisation des récoltes en période de
surproduction
La question de la transformation des légumes en produits conservables sur une longue durée
(plusieurs mois) a été peu évoquée lors de nos entretiens dans les diverses régions. L’humidité de
l’air et le faible ensoleillement dans la moitié sud du pays ne sont pas favorables au séchage par
exemple. La concurrence des concentrés de tomate importés (Chine, Italie) rend très difficile le
développement d’une filière de transformation ivoirienne de tomate rentable. Enfin les habitudes
alimentaires des ivoiriens font que la gamme des légumes transformés utilisés régulièrement est
très limitée : gombo sec, piment séché en poudre, gombo sec en rondelle. L’ONG ADVCI spécialisée
en cultures irriguées intensives, considère qu’il n’y pas de demandes nouvelles pour des légumes
transformés autres.
Plusieurs associations et coopératives de femmes ont rapporté leurs expériences dans ce domaine
(par exemple, la COVIMA avec le séchage d’aubergine n’droa en plus de la production de poudre de
piment et de gombo). Le séchage est la technique23 la plus facile d’accès pour les OP et le secteur
22
A la différence près que le producteur de coton ne peut pas vendre sa production à un autre acheteur que la
société cotonnière de sa zone de production, société qui lui a fourni les intrants à crédit.
23
Au Ghana la production de conserves d’aubergine s’est développée surtout pour le marché de la diaspora en
Europe et Amérique du Nord
63
64
privé car peu onéreux. Il existe un bon référentiel technique avec des séchoirs peu coûteux basés
sur l’énergie solaire combinée éventuellement avec le chauffage au gaz. Les produits obtenus se
conservent bien. Il existe aussi un créneau pour la production de purée de piment, de gingembre
etc. Une action dans ce domaine visera d’abord à valoriser certains légumes aux périodes où leurs
prix sont très bas et rémunèrent très mal le travail de récolte et de transport. Pour que les unités
de transformation soient rentables il faut :
- Que les légumes à transformer24 soient très peu chers pour mettre sur le marché des
produits transformés abordables pour tous les types de consommateurs25 (à moins de
privilégier des marchés de niche voire l’exportation mais cela concernera alors de petits
volumes de production) ;
- Que les coûts d’investissement soient limités et si possible, que les équipements puissent
fonctionner toute l’année » (par exemple, servir au séchage de plusieurs types de légumes
à des périodes différentes dans l’année, alors que le pic de production de la plupart des
légumes est en septembre octobre novembre) ;
- Qu’il existe suffisamment de main d’œuvre disponible et pas trop onéreuses pour la
préparation des produits transformés (les productrices elles-mêmes ?)
- Qu’un appui en terme de marketing/publicité et de recettes culinaires, soit apporté aux
unités et acteurs de la transformation.
Nous ne disposons pas de données suffisantes pour faire des recommandations plus précises dans
ce domaine. Il serait intéressant que le FIRCA finance une étude spécifique sur la faisabilité de la
transformation de certains légumes en relation avec l’initiative FAO pour le développement des CTA
(Centre de Transformation Agricole). De même l’agropole Bélier promue par le Projet 2PAI n’a pas
envisagé à ce jour l’appui à une firme privée de transformation des légumes car aucun acteur privé
ne s’est positionné sur ce créneau.
24
La 1° transformation des légumes par épluchage, découpage et conditionnement en sachet plastique est
possible (principe de la légumerie). Elle peut intéresser les cantines scolaires, des hôpitaux, des casernes, etc.
mais cela ne permet pas de valoriser des excédents de production à certaines périodes de l’année. Le produit
sous sachet ne se conserve que quelques jours et nécessite une chaine du froid
25
La perception des prix des produits séchés par les consommateurs, considérés toujours comme très élevés,
limite cette filière de transformation. C’est le cas de la tomate séchée dont le prix est élevé car le produit frais
est très riche en eau.
26
Telle que définis par le PRO2M : surface en maraichage d’au moins 5 ha/an, irrigation « moderne » (goutte à
goutte, aspersion), capacité de l’entrepreneur à investir dans l’équipement (subventionné ou non) et à fournir la
trésorerie de façon optimale (en temps opportun)
64
65
Tableau 13. Diversité des systèmes de production comprenant du maraîchage dans la région Centre
Maraîchage loin de la ville hors Entreprise de production de Maraîchage pluvial dominant (< 0,5
aménagement collectif plus de 3 ha/an, autonome du ha/an) combiné ou non avec un peu
point de vue de l’irrigation de maraîchage irrigué de contre
(grosse motopompe, forage) saison en arrosage manuel (< 0,2
ha/an), des cultures vivrières et
quelques cultures pérennes familiales
Maraîchage loin de la ville dans Production maraichère sur des petites
un aménagement collectif surfaces en irrigué (< 0,5 ha/an)
combinée avec du maraîchage pluvial
et/ou des productions vivrières
traditionnelles familiales (manioc,
arachide, …)
Tableau 14. Analyses Forces, Faiblesses, Opportunités, Menaces des systèmes maraîchers de la zone centre
65
66
Saison sèche marquée et de durée Réhabiliter des périmètres dans les situations où les producteurs
très variable sont mobilisés/organisés
Dégradation des aménagements : Diversifier les cultures (pas seulement du maraîchage), améliorer
Infestation du sol par des parasites les connaissances des producteurs pour mieux raisonner les
assolements
66
67
Forte pression du parasitisme Formation des producteurs au bon emploi des pesticides : choix
aérien des produits, connaissance de leurs modes d’action, doses,
dates, protection de l’applicateur
La pluviométrie est le principal facteur déterminant les grandes zones climatiques en Côte d'Ivoire. On
observe une décroissance des hauteurs annuelles et du nombre de jours de pluie annuelle du littoral
au Sud vers le Nord, suivant un gradient Sud-Ouest/Nord-Est. De plus, la présence de reliefs
prépondérants dans l’Ouest du pays crée un second axe de décroissance Ouest-Est. En effet, à latitude
égale, les régions montagneuses et de plaine de l’Ouest reçoivent plus de pluie (de l’ordre de quelques
67
68
centaines de millimètres) que celles situées à l’Est. Deux grandes régions pluviométriques peuvent être
distinguées de part et d’autre de l’isohyète 1 400 mm qui marque généralement la limite Nord des
climats tropicaux pluvieux.
Le Nord est donc caractérisé par une pluviosité moyenne annuelle inférieure ou égale à 1200 mm,
suivant un rythme monomodal à deux saisons : une saison sèche et une saison humide.
- Une saison sèche de novembre à mars, des pluviosités moyennes mensuelles comprises
entre 7 et 50 mm.
Deux mois intermédiaires avril et octobre avec des pluviosités entre 50 et 100 mm par 6 à 8 jours de
pluie.
- Une saison humide de mai à septembre avec des mois à forte pluviométrie juillet, août,
septembre surtout autour d’Odienné, Korhogo, Tengrela et Boundiali.
A Odienné, la pluviométrie est un peu plus élevée : 1620 mm avec 127 jours pluvieux de avril à octobre.
Le bilan hydrique (pluie – ETP) est donc déficitaire 8 mois par an en moyenne. L’irrigation y est donc
indispensable pour les cultures maraîchères pendant cette période (en gros d’octobre à mai). Pendant
la période la plus pluvieuses (de mi-mai à fin-septembre) des productions maraîchères sont faites sans
irrigation comme le piment, l’aubergine n’drowa, le gombo, l’oignon (cv. Arès) et la tomate. Elles se
prolongent dans la saison sèche en fonction des sources d’eau disponibles sur les périmètres (puits de
faible profondeur –céanes- alimentés par les nappes phréatiques). En cas de déficit de ressources en
eau d’irrigation la mise en place d’une seule culture par an par parcelle est envisageable durant la
saison des pluies.
Les températures en Côte d’Ivoire suivent un gradient Sud-Nord. Les plus élevées sont observées dans
le Nord à Korhogo. Les mois les plus chauds sont février, mars et avril (moyennes mensuelles de 28,9°C,
29,3°C, 28,7°C respectivement). L’insolation annuelle est la plus longue dans le Nord, jusqu’à 2700
heures à Odienné, par rapport à 2100 heures à Abidjan. La durée d’insolation est maximale de janvier
à avril. Les valeurs de l’évapotranspiration sont maximales en mars (176 mm) et avril (173mm).
L’humidité relative de l’air diminue du Sud vers le Nord. Les valeurs moyennes annuelles varient de 90
% au Sud à 55 % au Nord. Au niveau mensuel, le maximum est atteint au cours des mois de juin, juillet
et août avec des valeurs dépassant 75 % au Nord Ces valeurs diminuent considérablement au cours
des mois de décembre, janvier et février, où, en dehors de l’extrême Sud, elles sont inférieures à 70 %.
Celles-ci descendent jusqu’à 35 % dans les confins Nord. Pour les cultures maraîchères, les humidités
excessives supérieures à 90% dans la journée perturbent la pollinisation de la tomate due au fait que
le pollen s’alourdit et n’est plus assez mobile pour être déplacé sur le pistil de la fleur. Les humidités
relatives élevées entrainent aussi facilement le développement de maladies foliaires fongiques ou
bactériennes, d’autant plus que les températures de l’air sont élevées ; c’est le cas de l’oignon pour la
production de bulbe, et la tomate.
Les cultures maraîchères peuvent être produites dans de nombreux types de sols car elles font l’objet
d’amendements organiques et de fertilisation minérale importante vu leur haute valeur ajoutée. Dans
la zone du Nord de la Côte d’Ivoire, les périmètres visités étaient tous des périmètres irrigués à partir
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69
de petits barrage, ou de pompage dans des cours d’eau (Bandama). Les cultures hors-sol étaient
irriguées à partir de forages profonds (105 m à Karakoro).
Situées à proximité de cours d’eau, les sols sont de type alluvionnaire. Les textures semblent très
variables avec souvent une texture sablo-argileuse ou sablo-limoneux en surface avec une bonne
porosité. Comme la plupart des sols tropicaux, ils présentent en général des pH acides. Ils ont aussi des
teneurs en matière organique faibles, avec des rapports C/N relativement élevés comme ceux observés
à Lataha de l’ordre de 20 à 25. Ils présentent parfois en surface des éléments ferrugineux. Les analyses
pédologiques à Korhogo ont montré des sols pauvres en phosphore et potassium (Godefroy, 1993).
Nous n’avons pas rencontré de sols ferralitiques très acides pouvant entrainer des toxicités
aluminiques bien que dans cette région les sols ferralitiques gravillonnaires soient fréquents. Les sols
reposent souvent sur un sous-sol granitique dur proche et sont donc peu épais. Ces sols impliquent
donc la nécessité d’amendements organiques et l’apport de calcium, éléments très importants pour la
production de tomates.
L’entretien de la fertilité est fait par des apports d’engrais minéraux et de synthèse, des amendements
organiques, des rotations et des jachères. L’apport de matière organique sous forme de fumier semble
généralisé sur toutes les cultures maraîchères avec des apports faibles : 0,3 à 1 kg/m² sur oignon, mais
parfois à des doses plus élevées jusqu’à 3 kg/m². Les apports d’engrais sont systématique mais à des
doses très faibles : 150 g/10 m² de 15-15-15 (RONGEAD et CHIGATA, 2014), soit des apports de N=22,5,
P=22,5 K=22,5 ce qui ne couvrent pas les exportations des cultures maraîchères. Cela correspond donc
à 150 kg/ha d’engrais, valeur supérieure aux données moyennes de consommation d’engrais par ha
de terre arable en Côte d’Ivoire. Le coût des engrais pour une culture pour 1 ha était estimé à : 350 000
FCFA pour la tomate, 100 000 FCFA pour l’aubergine, 90 000 FCFA pour le gombo, 250 000 FCFA pour
le chou pommé, 300 000 FCFA pour le piment. Si on se fixe à un prix moyen de 300 000F CFA la tonne
d’engrais, les apports d’engrais varient de 300 kg/ha pour le gombo à 1,2 t/ha pour la tomate. Ces
quantités sont plus proches des besoins des cultures.
Les conditions pédo-climatiques de la zone Nord permettent de cultiver globalement toutes les
espèces maraîchères une fois le problème de l’irrigation résolue moyennant quelques réserves.
Les caractéristiques climatiques limitent le développement de certaines espèces d’origine plus
tempérée comme betterave rouge, carottes, pomme de terre sauf durant les mois où les températures
minimales moyennes sont inférieures à 20°C. Par ailleurs, les températures les plus élevées pendant
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les mois les plus humides limitent le développement des cultures très sensibles aux maladies comme
l’oignon.
La tomate (Lycopersicon esculentum) : Le problème principal est le flétrissement bactérien causé par
Ralstonia solanacearum, maladie d’origine tellurique. Les bactéries pénètrent dans la plante par les
racines et ensuite colonisent l’ensemble du système vasculaire provoquant le flétrissement de la
plante puis sa mort. Mais ce n’est pas la seule maladie pouvant provoquer une mortalité des plantes
et donc des baisses de rendement drastiques. Les travaux d’amélioration de cette espèce depuis 60
ans ont permis de disposer de variétés résistantes aux principales maladies dans les catalogues des
maisons semencières (Technisem…) mais le CNRA a aussi 3 variétés de petites tomates. Cependant,
ces résistances ne sont pas le seul critère, il faut que dans les conditions ivoiriennes les fruits soient
fermes pour pouvoir résister à des conditions de transport assez rustiques. La variété de tomate UC82
– tomate pour l’industrie à fruit ferme – a été essayée dans plusieurs périmètres, mais elle ne présente
pas de résistance au flétrissement bactérien. Par contre, cv. Cobra F1 (Technisem) présente une
résistance moyenne comme cv. Buffalo F1, cv. Lady Nema, cv. Lindo F1, cv. Mongal F1 mais qui
présentent des fruits de fermeté inférieure à Cobra. L’autre maladie très présente est le Tomato Yellow
Leaf Curl (TYLCV) pour laquelle il existe aussi des variétés résistantes. Les variétés diffusées du CNRA
présentent une résistance intermédiaire à ces maladies.
Outre le développement des maladies, l’excès d’humidité de l’air gêne beaucoup la pollinisation
entomophile. La culture en saison des pluies nécessite des variétés bien adaptées (résistance au
flétrissement bactérien, à la galle bactérienne) et si possible une aide à la pollinisation artificielle
(manuelle, vibrage …).
L’oignon (Allium cepa L.): avec une nouvelle variété supportant mieux chaleur et humidité (cv. Ares),
le calendrier cultural habituel a été allongé pour une culture de saison des pluies avec des semis à
partir de juin. Cependant nous n’avons pas vu de parcelles d’oignons cultivés de cette variété. La
principale saison de culture est la saison sèche : semis, dans le nord, en octobre, suivis de
transplantations au champ en décembre, pour des récoltes en avril. Fumier, engrais et pesticides
chimiques (Furadan, manèbe, mancozèbe, Decis, Cypercal) sont utilisés. Les rendements recalculés
pendant les discussions (Nangonikaha) sont estimés entre 16 et 20 t/ha. Si Violet de Galmi était la
variété la plus citée, d’autres ont été mentionnées comme Julio, Damani, Sirocco –(RONGEAD et
CHIGATA, 2014 ; Fiches techniques oignon). Dans la zone d’Odienné, l’ANADER indique un rendement
moyen de 10 t/ha.
Le piment (Capsicum annuum L. (=C. chinense Jacq.)): les parcelles visitées étaient en fin de production.
Le choix des variétés est imposé par le marché qui demande essentiellement le Jaune du Burkina. Les
semences sont souvent importées du Burkina, mais sont aussi des semences fermières. Des variétés
commerciales comme Safi (rouge, forme lanterne) ou Habanero sont aussi cultivées. Le pili-pili ou
piment oiseau est aussi cultivée mais de cycle plus long, avec des prix de vente beaucoup plus élevés
commercialisés après séchage. Les cultures de plein champ semblaient plutôt extensives, alors qu’une
parcelle hors-sol cv. Habanero présentait un développement végétatif nettement plus important.
L’origine des semences est importante. Le piment est sensible à 6 virus, dont certains transmis par les
semences. Il est aussi très sensible à l‘anthracnose et à la mouche des fruits Ceratitis capitata en saison
humide. Sur le marché, plusieurs types sont commercialisés suivant la couleur et la forme, mais tous
sont très piquants. Il y a 2 cycles de culture en irrigué de septembre à avril, et pluvial d’avril à août.
Le gombo (Abemsochus esculentus L.) est une plante très bien adaptée à cette zone. Elle est cultivée
pour ses fruits consommés frais ou séchés. La période la plus favorable est la saison des pluies. L’espèce
est surtout sensible aux nématodes à galles (Meloïdogyne spp.), au virus de la frisolée de la feuille du
gombo (OLCV), et à plusieurs ravageurs : chenilles (Earias sp. ) sur les fruits et fleurs, et les jassides
(Empoasca spp.) sur les feuilles.
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L’aubergine africaine n’drowa (Solanum aethiopicum L.) est une plante très bien adaptée aux
conditions de cultures de Côte d’Ivoire. Elle peut être cultivée en toutes saisons. Les principales
maladies sont le flétrissement bactérien, la pourriture du collet due à Sclerotium rolfsii et les
nématodes à galles. La plante est aussi sensible aux acariens. L’aubergine, Solanum melongena est
aussi cultivée mais de façon moins importante dans toute la zone.
Le chou pommé (Brassica olercea var. Capitata) est très cultivé dans toute l’Afrique. Il a été vu dans
deux périmètres irrigués avec un bon développement. Il existe un large choix de variétés en fonction
de la longueur de leur cycle, de la forme de la pomme et de l’adaptation aux saisons. Si le choix est
relativement large en saison sèche et fraiche, par contre en saison des pluies, il faut des variétés
présentant une bonne tolérance à la maladie de la nervation noire due à Xanthomonas campestris et
apte à pommer sous hautes températures. Ce sont en général des hybrides F1 comme Tropica Cross.
Le principal facteur limitant reste la teigne des Crucifères Plutella xylostella surtout en saison sèche
contre laquelle les applications de pesticides sont nécessaires.
Par ailleurs, les données observées dans divers documents sur les rendements indiquent des
rendements de faibles à très faibles. La carotte, le concombre, le haricot vert, la laitue et la tomate
présentent dans le Nord des rendements particulièrement faibles. Les causes en sont multiples, soient
dues à une mauvaise adaptation des espèces (carotte), soit à des variétés mal adaptées (concombre,
tomates), soit à des méthodes de culture peu maitrisées (haricot vert, laitue).
Tableau 17. Superficie et rendement moyens de différentes cultures maraîchères (rapport ANADER, 2014)
NORD (PORO ET CENTRE (BELIER ET CENTRE EST
TCHOLOGO) GBEKE) (GONTOUGO) Moyenne
Cultures Superficie* Rendement** Superficie* Rendement** Superficie* Rendement** Superficie* Rendement**
moyenne moyen moyenne moyen moyenne moyen moyenne moyen
(ha) (T/ha) (ha) (T/ha) (ha) (T/ha) (ha) (T/ha)
Haricot vert 0,10 2,00 0,10 3,48 0,10 3,72 0,10 3,07
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Pour la zone d’Odienné, les superficies cultivées en maraichage sont de 5 722 ha donnant une
production totale de 5 745 t. Les valeurs de rendement évaluées par l’ANADER de la zone d’Odienné
sur l’ensemble des superficies encadrées par ses conseillers sont aussi très faibles.
Tableau 18. Superficies encadrées par l’ANADER et rendements moyens des principales espèces maraîchères dans
la zone d'Odienné (ANADER, 2018)
Principales cultures maraîchères Superficies mises en valeur (ha) Rendement moyen (t/ha)
Chou pommé 48,4 15
Piment 18,5 6
Aubergine 17,6 10
Gombo 16,6 5
Oignon 10 10
Tomate 9,3 10
Autres légumes 57,6 10
a) Contraintes foncières
Dans les périmètres maraîchers gérés par des groupements de producteurs, les terres gérées par les
communautés villageoises sont « prêtées » pour le temps des cultures sauf si les Projets ont prévu de
mettre en place des contrats fonciers. Dans ce cas le groupement a la garantie de pouvoir valoriser les
terres du périmètre identifié et souvent aménagé, tant qu’il est fonctionnel et qu’il respecte les termes
du contrat (conserver la vocation maraichère, entretenir les aménagements, …). La mise en valeur de
terres et leur exploitation, par exemple l’installation de système d’irrigation, impliquent un accord du
chef des terres au niveau de la localité. Cet agrément peut être remis en question en cas de désaccord
entre les personnes et surtout en l’absence de contrat foncier. Il peut aussi y avoir des positions
dogmatiques, comme on nous l’a dit à Nanghorigo où le chef des terres interdisait la culture de
l’oignon. Ce prêt implique donc de « rentabiliser » la superficie cultivée pour chaque cycle cultural. Il
doit y avoir au moins un cycle de culture par an, si ce n’est deux avec une double saison culture pluviale
– saison sèche avec irrigation.
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l’abreuvement des troupeaux. Il n’y a pas de vraie clôture des périmètres irrigués pour : 1) les protéger
de l’envahissement des troupeaux alors qu’il n’y a plus de végétation pour les alimenter en saison
sèche, 2) empêcher leurs passages pour accéder à l’eau pour les faire boire.
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Les trois agro-entrepreneurs rencontrés disposaient de leurs propres systèmes de pompage avec des
petites motopompes thermiques puisant l’eau dans des forages (Karakoro et Tafiré), cours d’eau et
barrages (Sinematiali). A Sinematiali, le producteur utilisait un système goutte-à-goutte avec une
citerne de reprise et donc un filtre à nettoyer tous les jours. Mais, la superficie irrigable par le système
mis en place était très faible, de l’ordre de 1500 m².
Les équipements de travail du sol. Le travail du sol –labour- préalable à l’installation des cultures est
un problème aussi bien pour les périmètres gérés par les groupements féminins que pour les agro-
entrepreneurs. Ces exploitations n’ont pas de tracteur. Son absence pour faire un labour en début de
saison de culture et la préparation des sols est une contrainte forte. Si le GIE Lomanagnon utilisait un
tracteur reçu en don, nécessaire en raison de la superficie totale du périmètre (50 ha), la remise en
culture après la saison des pluies, est faite dans les petits périmètres à la main ou avec un labour avec
des bœufs après l’application d’un herbicide total (glyphosate).
Les exploitations hors-sol visitées ont montré des difficultés à poursuivre leurs investissements
jusqu’au bout, ayant sous-estimés les coûts d’installation et de fonctionnement. Par exemple, chez M.
K., seulement une partie des installations hors-sol (film plastique, pots, substrats de coco, irrigation) a
été couvert par un film polyéthylène transparent pour protéger des pluies. La production de la partie
non couverte a été arrêtée quand les pluies ont commencé à tomber. L’eau vient de forages profonds
(105 m). Elle est stockée dans une citerne en hauteur, puis filtrée et distribuée par gravité par des
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gaines. Les systèmes utilisés sont des gaines avec goutteurs d’arrosage ou goutteurs incorporés auto-
régulants. La pépinière était très soignée.
A Tafiré, le système adopté a été le toit en double pente. Le schéma d’installation était le même qu’à
Korhogo. Cependant, le système de forage ayant été très coûteux, toutes les surfaces prévues en
cultures hors-sol n’ont pu être couvertes faute de trésorerie, le coût des investissements ayant été
sous-estimés.
L’accès aux investissements collectifs est encore très insuffisant et ils posent ensuite des problèmes
de bonne gestion. Les projets portés par l’Etat ivoirien et l’aide internationale réalisent des
aménagements maraichers facilitant l’accès à l’eau d’irrigation (PROPACOM, PARFACI,…). La poursuite
des investissements complémentaires (tracteur ou motoculteur, charrues) et de l’entretien des
équipements communs (barrages, matériel de pompage, matériel d’irrigation) par les groupements
qui exploitent les périmètres aménagés n’est pas faite ou de façon insuffisante. Si parfois des tontines
sont mises en place ainsi que des carnets de comptes dédiés à la COOPEC, les sommes accumulées ne
sont pas suffisantes pour réaliser de gros investissements comme la réhabilitation du système
d’exhaure et d’irrigation. Les sommes épargnées par les groupements n’arrivent pas, en général, à
reconstituer les fonds de roulement pour acquérir tous les intrants pour la campagne suivante. Suivant
les règles initiales, ces comptes communs sont alimentés par un prélèvement au kg sur les ventes. Les
producteurs donc achètent les intrants qu’ils estiment nécessaires à leurs cultures individuellement.
Dans les groupements, la mise en place d’une trésorière / un trésorier et d’un(e) président(e) permet
de gérer les comptes et en particulier les fonds de roulement donnés par les projets. Mais le coût du
crédit bancaire est trop élevé pour pourvoir emprunter même pour les intrants nécessaires à un cycle
cultural. De plus la constitution des dossiers est une tâche trop exigeante au regard des montants
demandés.
Les investisseurs individuels, aussi bien pour les systèmes hors-sol que pour les cultures de plein champ
sous-estiment les besoins en investissements et souhaitent démarrer tout de suite la production.
Les productions par ordre d’importance dans la zone de Ferkéssédougou sont : le piment, l’aubergine
n’drowa, le gombo, l’oignon et la tomate. A Korhogo, la production principale est l’oignon. La
commercialisation est faite soit sur les grandes villes du Nord (Korhogo, Ferkessédougou..), mais
75
76
surtout les produits sont expédiés sur Abidjan. Les producteurs hors-sol nous ont dit qu’ils n’avaient
pas de problème pour écouler leurs productions localement.
Un centre de collecte a été mis en place à Sinematiali en utilisant un bâtiment hangar construit du
temps de la Sodefel. Au moment de la visite, en fin de journée, un camion réservé par un producteur
rassemblait sa production d’aubergines n’drowa et de piments, avec en plus de l’igname et des oranges
et celles d’autres producteurs et se préparait à l’emporter sur Abidjan. Les légumes sont conditionnés
en grands sacs par producteur et identifiés en inscrivant un signe de reconnaissance pour leurs
acheteurs sur les marchés de semi-gros d’Abidjan. Le trajet est d’environ 600 kms entre ce centre de
collecte et le marché d’Abidjan.
Evolution moyenne des prix dans les zones PARFACI depuis 2010
1800
1600
1400
1200
1000
800
600
400
200
0
Janv Fev Mars Av Mai Juin Juil Aout Sept Oct Nov Dec
Figure 7. Evolution des prix dans la zone Nord (2010-2017 (FIRCA-BVP-AFD, 2018)
Les prix ont été collectés sur les principaux marchés de la zone Nord par le BVP (figure 7). L’observation
des courbes de prix montrent une baisse des prix notables d’août à novembre indiquant l’importance
des récoltes de légumes de culture pluviale. Par contre, les pics en avril et mai, en fin de saison sèche,
traduisent des productions beaucoup plus faibles alors que les approvisionnements des cultures
irriguées maraîchères décroissent et que les marchés locaux et de toute la Côte d’Ivoire sont
principalement approvisionnés par des importations de la sous-région.
Tableau 22. Diversité des systèmes de production comprenant du maraichage dans la région Nord
Modalité de production Degré de spécialisation en maraîchage
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Le Nord est la région de Côte d’Ivoire où l’on observe encore fréquemment une production maraichère
collective réalisée par des groupements de femmes. Elles sont souvent réalisées en début de saison
sèche tant que l’eau d’irrigation est disponible. Cette forme d’organisation permet à ces femmes sans
beaucoup de capitaux (terre, finance, etc.) de s’adonner à cette activité qui leur procurent un
complément de revenu et une alimentation de haute qualité nutritionnelle à leur famille. Il faut voir
aussi dans cette organisation un signe de reconnaissance et une volonté des femmes de disposer d’un
lieu où elles peuvent se rencontrer et partager les soucis de la vie quotidienne. Il semble que les
femmes qui s’adonnent au maraîchage dans la région soient très attachées à ce mode d’organisation
qui n’est peut-être pas le plus performant d’un point de vue économique.
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Tableau 23. Analyses Forces, Faiblesses, Opportunités, Menaces des systèmes maraîchers de la zone Nord de Côte d’Ivoire
78
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Contraintes foncières :
propriétés des terres, passage des Mettre en place des baux ruraux
troupeaux et accès à l’eau Ne pas oublier les clôtures dans les aménagements de périmètres
irrigués : mettre au point un système de clôture durable mixte
combinant grillage et arbustes/arbres (effet brise vent)
Contraintes liées au capital Besoin d’investissement important pour les systèmes hors-
Capacités d’investissements sol (pompage, abri) et faciliter l’accès au crédit bancaire par la
individuels et collectifs faibles garantie apportée par les projets et l’Etat
Equipements motorisés pour le travail du sol
Aide à l’investissement : prêts, subventions
Contraintes de
commercialisation spécifiques à Renforcement des organisations actuelles, création de nouvelles
la zone Nord coopératives
Transport sur Abidjan Plateforme de groupage
essentiellement Organisation des producteurs pour transport
Expéditions dans des conditions
très rustiques : cartons de 20 à 40
kg (tomate) ou en gros sac de 30 à
50 kg (gombo, aubergine
africaine, piment..)
Le relief de cette zone est très accidenté avec un tiers des superficies dépassant 1000 m d’altitude, et
aussi la plus humide du pays. Le climat de Man est de type tropical. Les hauteurs de pluie varient entre
80
81
1300 et 2400 mm par an avec un gradient décroissant d’Ouest en Est et de Sud au Nord avec une saison
des pluies de mars-avril à octobre. Août et septembre sont les mois les plus pluvieux. La pluviosité dans
cette région est une des plus élevées de la Côte d’Ivoire. L'hygrométrie oscille entre 80 et 85 %. La
saison sèche est relativement courte de novembre à février. L’ensoleillement à Man et sa région est
faible.
A Touba, le climat est de type soudano-guinéen, pluviométrie à deux saisons : saison sèche de
novembre à mars, des pluies maximales en août, et une pluviométrie moyenne annuelle 1350 mm,
souvent orageuses (souvent supérieurs à 70 mm/h à Touba). L’insolation est de 2200 heures/ an.
Les températures sont douces avec une moyenne de 25°C. Les températures minimales basses d’août
à février sont favorables aux cultures maraîchères exotiques. Mais la forte pluviométrie étant aussi
favorable aux maladies et à la destruction de feuilles, limite les potentialités.
La région du Tonkpi est irriguée par les fleuves Sassandra à l’est et Cavally à l’ouest avec chacun, de
nombreux affluents qui favorisent une végétation constituée à 80 % de forêt humide. Elle accueille
aussi de nombreux bas-fonds en partie déjà aménagés.
Mesures J F M A M J Jt A S O N D Moy/
Tot
Température 24,1 26,2 26,7 26,3 26,0 25,0 24,1 23,9 24,4 24,9 24,7 23,5 25,0
moyenne °C
Température 15,7 19,2 20,4 20,7 20,7 20,4 20 19,9 19,9 19,9 18,8 16,2
moyenne
mensuelle
minimale
Précipitations 13 53 98 148 145 197 199 256 302 157 47 17 1632
mensuelles
moyennes (mm)
La plupart des versants des montagnes, abrupts et fracturés ainsi que les vallées encaissées, sont
exposés à un risque élevé d'érosion. Les sols de type ferralitique désaturé à fertilité chimique faible à
moyenne sont dominants et présentent, d'une manière générale, un faible couvert végétal. Ils
présentent globalement une bonne structure et peuvent répondre donc à une fertilisation adaptée. Il
y existe également des sols développés sur des roches basiques, des sols hydromorphes dans les bas-
fonds et des sols minéraux en région montagneuse. L’origine de la culture basée sur un défrichement
de la forêt avec des fertilisations faible ou inexistantes a entrainé des baisses de fertilité importantes
des sols. L’absence d’intégration agriculture-élevage est un deuxième facteur conduisant à la faible
fertilité des sols.
Dans la zone de Touba, on observe des Ilôts de forêt dense, alternant avec des savanes à Imperata sp.
et Pennisetum sp… Les sols sont ferralitiques fortement et moyennement désaturés, souvent profonds
gravillonnaires. Malgré des apports de matière organique animale plus importants, dus à un plus grand
développement de l’élevage, la baisse de la fertilité des sols maraîchers est aussi constatée.
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- Le maraîchage de saison pluvieuse en milieu rural ne nécessite pas de matériel d’irrigation. Les
principales espèces maraîchères sont le gombo, piment et l’aubergine africaine. Les semis sont en
mars et avril. Ils sont faits après défriche, écobuage si nécessaire et labour. Aucune culture
maraîchère ne succède à une autre culture maraîchère sur le même terrain. L’intervalle entre
cultures maraîchères sur la même parcelle est au minimum de 2 ans. Très peu d’intrants (engrais
organiques, engrais de synthèse, pesticides de synthèse) sont appliqués sur les cultures, ce qui
conduit les agents de l’ANADER à considérer ce système de culture comme très proche de
l’agriculture biologique. Il est conduit principalement par les femmes et des populations
allochtones. Les productions arrivent sur les marchés locaux de juillet à octobre.
- Le maraîchage de cultures irriguées est conduit principalement en saison sèche avec une irrigation
d’appoint. Les surfaces sont petites entre 0,25 et 0,5 ha. Les intrants sont plus utilisés qu’en culture
pluviale, mais toujours en petite quantité. La matière organique est le plus souvent de la sciure
décomposée ou du fumier de volailles. Outre les légumes cités précédemment, les cultures les plus
fréquentes dans ce système sont : le chou pommé, la tomate, le concombre et la laitue. Les 2
espèces mentionnées par l’ANADER en légumes-feuilles sont la laitue et l’amarante.
Le choix des cultures est surtout dépendant de leur adaptation à la forte pluviométrie. L’oignon n’est
pas cultivé, la tomate est très peu cultivée, et la pomme de terre y est anecdotique.
Tableau 26. Superficies et rendements des principales cultures maraîchères du département de Man (source ANADER)
Les contraintes phytosanitaires sont importantes, notamment en saison des pluies : flétrissement
bactérien sur piment, aubergine, tomate ; anthracnose sur tomates ; la teigne du chou (Plutella
xylostella) ; chenilles sur tomates. En cas de nématodes à galles, fréquents sur les parcelles
maraichères cultivées de façon continue, le maraîcher abandonne la parcelle pour un autre champ.
Cette forte pression sanitaire et le peu de fertilisants apportés sur les cultures se traduisent par les
faibles rendements moyens observés (Tableau 2). Ce constat a aussi été fait dans la région du Bafing.
La contrainte est l’absence d’aménagement de périmètres spécifiques pour les cultures maraîchères
donc avec irrigation et clôture. Les producteurs maraîchers n’ont pas les capacités financières
82
83
d’aménager eux-mêmes les terrains qu’ils soient propriétaires ou locataires. Des projets
d’aménagements des sites maraîchers sont prévus dans le cadre du projet PROPACOM-Ouest
(Biankouma, Man, Touba, Bangolo, Guiglo, Koulbli,..). Ils n’ont pas encore commencé. Dans le
département de Man, il est prévu que le projet aménage 5 sites dans 5 localités pour un total de 16
ha. Ces aménagements se feront le long de cours d’eau. Dans la zone de Touba, l’aménagement de
périmètres dédiés au maraichage permettra aussi de mieux contrôler les feux de brousse qui sont un
facteur limitant dans cette zone.
Une autre contrainte est la faible disponibilité en intrants spécifiques en maraichage. Cependant, le
distributeur Semivoire de semences maraîchères a ouvert une boutique à Man. S’il est souvent
considéré que ces semences sont chères, elles seront de fait beaucoup plus faciles à obtenir et leur
qualité est assurée. L’appui-conseil en maraichage est aussi très déficient faute de personnel spécialisé.
Les services de l’ANADER suivent chaque année un certain nombre de maraîchers, et assurent
quelques formations. Il n’y a eu aucun essai de cultures sous abri dans cette zone.
La mise en marché des légumes, ne semble pas être un problème pour le moment. La
commercialisation se fait d’abord sur le marché local de Man. Ensuite il y a aussi des débouchés sur
Daloa et Abidjan. Des acheteuses de ces villes viennent sur le marché de Man (le vendredi). La grande
production a lieu de septembre à décembre donc issue des cultures pluviales. Cependant, les
maraîchers sont peu organisés et leurs possibilités de négociations vis-à-vis des acheteurs est faible
83
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Les contraintes majeures relevées sont (i) la faible capacité d’investissement et l’inexistence de
périmètres maraîchers aménagés, (ii) le faible niveau de formation de base et technique des
maraîchers, (iii) l’accès très limité à des intrants de qualité et à prix acceptables (du fait de leur faible
nombre et de l’absence d’agro-fournisseurs spécialisés dans cette filière) et (iv) une pluviométrie à la
fois abondante et avec de plus en plus d’aléas entrainant une pression phytosanitaire élevée.
En saison des pluies, des cultures sous abri permettraient d’allonger la période de production
notamment pour la tomate et la laitue.
La pluviosité dans cette région est comparable à celle de la région d’Abidjan (§ A.2 ). Les données de
Climate-org indiquent un cumul annuel de 1414 mm . Par ailleurs, une baisse de 200 mm/an des cumuls
annuels a été observé entre les périodes 1971-2010 par rapport à la période 1951 -1980. La répartition
des pluies est normalement bimodale avec une petite saison sèche entre le 15 juillet et la fin août et
une saison sèche plus longue de décembre à mars.
Les aléas pluviométriques se sont renforcés depuis 20 ans : poches de sécheresse, périodes avec des
excès d’eau. De ce fait il apparait deux contraintes majeures liées à ces aléas :
- Une trop forte concentration de pluies à certaine période entrainant un engorgement du sol
surtout que les maraîchers ont surtout accès aux terres basses délaissées par les cultures
84
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pérennes. Cet excès peut aller jusqu’à l’inondation des zones maraichères avec destruction
totale des cultures ;
- Une raréfaction d’eau de surface ou à faible profondeur durant la saison sèche longue
(décembre – avril) limitant l’irrigation traditionnelle à l’arrosoir, la forme d’irrigation la plus
courante dans cette région. Dans cette région, très pluvieuse dans le passé, il n’existe pas de
pratique traditionnelle de creusement de puits profonds ni de construction de retenues d’eau.
Ce régime pluviométrique est aussi favorable aux maladies et à la destruction de feuilles en cas de
forte intensité des pluies. C’est pourquoi la FAO y avait positionné un projet de culture sous abris-
serres mené avec un groupement de producteurs de San Pedro et des environs.
Mesures J F M A M J Jt A S O N D Moy/
Tot
Température 26,4 26,8 27,1 27,3 26,6 25,6 24,5 24,3 24,8 25,6 26,2 26,2 26,0
moyenne °C
Température 22,7 22,3 23,0 23,2 22,9 22,8 21,6 21,8 22,1 22,4 22,7 22,8 22,5
moyenne
mensuelle
minimale
Précipitations 21 28 59 96 275 368 114 74 67 117 136 59 1414
mensuelles
moyennes (mm)
Les sols de cette zone sont souvent profonds très évolués, ferralitiques, moyennement désaturés avec
une granulométrie plus ou moins grossière. Ils présentent souvent de nombreux alluvions limono-
sableux.
- Le maraîchage spécialisé en périphérie des villes est conduit plutôt par les hommes
(autochtones et étrangers) durant toute l’année et nécessairement avec une irrigation durant
4 à 5 mois par an et parfois une irrigation d’appoint en cas d’arrêt des pluies. Les surfaces sont
en souvent en deçà d’un ha, le plus grand maraîcher de la région produirait 4 ha de légumes
par an mais sur plusieurs sites. Aubergines, gombos et piments sont les plus cultivés. On y
retrouve donc les légumes cités précédemment ainsi que la laitue, le haricot vert, le
concombre (très bien adapté à la région), la tomate27 (si pas trop près du littoral car sensible à
la salinité) plus rarement le chou. Ces producteurs approvisionnent toute l’année les marchés
locaux.
27
Les avis divergent selon nos interlocuteurs. A proximité de San Pedro, seule la variété Lindo réussit alors qu’à
35 km dans les terres la variété Cobra peut réussir.
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Le choix des cultures est surtout dépendant de leur adaptation aux conditions climatiques
particulières de cette région : forte humidité de l’air permanente et forte pluviométrie. L’oignon y
est exclu du fait du faible ensoleillement.
Nos deux interlocuteurs ne mentionnent pas de problème aigu de baisse de fertilité des sols peut
être du fait que les sols dédiés au maraîchage dans cette région sont le plus souvent situés en
zones basses donc relativement fertiles. Le recours à la fertilisation minérale est systématique et
certains maraîchers valorisent la fiente de volaille et le fumier de moutons en périphérie de San-
Pedro.
Les contraintes phytosanitaires ont été peu relevées car l’activité maraichère est peu développée
et les sites de production relativement récents ce qui entrainent une moindre pression parasitaire
surtout dans les sols. Pour le maraîcher enquêté, le contrôle des maladies et des nuisibles est facile
si on peut acheter des pesticides de qualité et si on alterne les matières actives. Seul le poivron
rencontre des contraintes phytosanitaires significatives ce qui justifie de développer cette culture
en hors sol selon notre interlocuteur.
La contrainte majeure dans cette région est la faible offre de service en crédit, conseil agricole et
fourniture d’intrants de qualité. Les agro-fournisseurs sont eux aussi focalisés sur la vente des intrants
pour les cultures pérennes et ils accordent peu d’intérêt aux intrants pour le maraîchage car le
nombre de maraîchers est faible. Il est difficile de trouver dans la région les intrants vraiment adaptés
au maraîchage (engrais et pesticides spécifiques). La gamme de semences est limitée et les boutiquiers
connaissent peu les différences entre variétés et surtout celles bien adaptées à cette région. Les
maraîchers les mieux informés préfèrent passer commande auprès de boutiques spécialisées des
grands bassins de production (Yamoussoukro, Bouaké) ou à Abidjan.
La mise en marché des légumes, par contre, n’est pas un problème pour le moment car le prix de
vente des légumes aux grossistes ou détaillants est bien supérieur à San Pedro que dans les grandes
régions de production ou sur les marchés de gros d’Abidjan. Ceci est vrai pour les légumes périssables
comme la laitue, les légumes feuilles… qui ne peut guère venir de loin mais aussi pour des légumes
transportables. Ainsi le prix de vente de la tomate par les maraîchers varie de 400 à 700 FCFA/Kg alors
qu’il peut chuter en dessous de 100 FCFA/kg dans la région de Yamoussoukro en pleine période de
production. Le prix de vente du chou est aussi à certaines périodes, très rémunérateur, de 450 à 700
FCFA/kg. Ces prix très attractifs entrainent toutefois des flux de légumes à certaines périodes de
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l’année venant du Centre et du Nord du pays mais aussi du Burkina Faso (choux et tomate en
particulier). La demande des expatriés et des libanais de San Pedro tire les prix vers le haut ou oriente
les maraîchers vers des espèces spécifiques comme la laitue ou le poivron.
Selon les espèces l’attractivité des légumes produits aux environs de San Pedro est variable selon nos
interlocuteurs. Pour certains, les légumes produits localement sont plus frais et plus présentables que
ceux qui ont parcouru une longue distance en camion et dans les transports en commun. D’autres
considèrent que la tomate venant d’ailleurs est plus ferme et se conserve mieux que la tomate locale.
Le faible nombre de maraîchers et leur dispersion dans la région de San Pedro ne facilitent pas leur
organisation. Globalement les maraîchers ne peuvent pas compter sur un grand nombre de
techniciens spécialisés en maraîchage ni sur un conseil de proximité. Le dispositif de conseil de
l’ANADER est plutôt tourné vers les cultures pérennes. Toutefois quelques projets ont intégré à leurs
activités le développement du maraîchage spécialisé de plein champs et plus récemment le
maraîchage sous abri-serre et hors sol (Projet FAO achevé).
Le modèle d’abri-serre est assez simple et peut mobiliser des matériaux locaux comme du bois, du
bambou. Le coût de la bâche de qualité est un frein à la reconduction de l’expérience si elle devait
être intégralement prise en charge par les producteurs.
- Le coût des intrants et équipements fournis par le prestataire de service (une société
spécialisée en culture hors sol) est considéré comme très élevé : les fertilisants de la
fertigation, le substrat produit à base de déchets de coco, les semences, etc. Tous ces
intrants sont importés depuis la région d’Abidjan ce qui accroit leurs prix. Selon nos
interlocuteurs, il faudrait chercher à réduire les coûts de production en mobilisant des
matériaux et intrants disponibles localement (bois, bambou, déchet de coco, sciure de bois,
fiente de volaille, engrais minéral à diluer dans l’eau) ;
- La valorisation des abris serres par un groupement de maraîchers n’est probablement pas
le meilleur modèle organisationnel et économique. Il a été très utile dans une première
phase pour former dans la durée et sur le tas les maraîchers qui avaient constitué le
groupement comme demandé par le Projet FAO. Mais la dispersion des maraîchers aux
environ de San-Pedro (parfois à plus de 30 km du site de production) a entrainé des frais de
transport et de nourriture très élevés qui ont fortement impacté à la baisse la marge
dégagée à la fin de chaque cycle de production. De ce fait le fonds de roulement du
groupement n’a pas pu être renouvelé et risque de disparaitre rapidement. Il serait
intéressant de renouvelé l’expérience :
En réduisant la taille du groupement (à 3 ou 4 maraîchers proches les uns des
autres) voire en accordant la subvention à un seul maraîcher ayant fait ses preuves
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Tableau 29. Analyses Forces, Faiblesses, Opportunités, Menaces du Sud-ouest de Côte d’Ivoire
88
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fait de leur faible nombre et de l’absence d’agro-fournisseurs spécialisés dans cette filière) et (iii) une
pluviométrie à la fois abondante et avec de plus en plus d’aléas.
De plus, en périphérie de San Pedro, le maraîchage fournit des revenus et des emplois et ces
maraîchers spécialisés pourraient bénéficier d’appuis pour se professionnaliser d’abord avec un choix
bien raisonnés de légumes de plein champ adaptés à la région. Dans un second temps si la R-D a fait la
preuve de la rentabilité des abris-serres, la culture hors sol pourrait être inséré dans leurs systèmes de
production ou proposée à des agro-entrepreneurs.
S’il y a eu des investissements dans les cultures hors-sol depuis plus d’une décennie, les expériences
que nous avons visitées sont récentes et encore imparfaites (non achevées). Par ailleurs, il y a eu
des essais de culture hors sol dès les années 90’, mais ces systèmes de production n’ont pas été
poursuivis sans doute pour manque de rentabilité et par conséquence de défaut d’entretien et de
renouvellement des équipements et de fonds de roulement. Nous avons vu deux systèmes :
- Un système avec toit en double pente, armature en bois, avec aération au faitage et filet
ou sans filet
Pour ces deux types d’abris, la culture peut être en pleine terre ou hors-sol en pots individuels le
plus souvent, un pot accueillant en général un plant de tomate ou de poivron.
Le rendement en fruits frais est l’indicateur le plus pertinent pour avoir une évaluation de la
rentabilité des investissements (exhaure, irrigation, abri) et de la culture (main d’œuvre, intrants).
Le CNRA (Djidji et al, 2010) a conduit en 2009 dans le Sud à Anguédédou une expérimentation de
culture en pleine terre sous abri s avec toit en double pente. La récolte a eu lieu en novembre et
décembre avec des rendements faibles dus à des pertes de plants dues au flétrissement bactérien
(Ralstonia solanacearum). En 2018, le CNRA a apporté son appui à un projet pour le développement
de ce type de systèmes dans la région de San Pedro. Le rendement de la culture du poivron a été de
2,0 kg/m² pour 5,6 mois de récolte alors que la culture de tomate a été arrêtée au bout de 30 jours
par manque d’eau.
A Tafiré quelques chiffres nous ont été donnés et sont très encourageants.
89
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Tableau 30. Rendements en cultures sous abri pleine terre et hors-sol dans différentes situations en Côte d'Ivoire
Au moment de la visite, il y avait 4 personnes travaillant sur l’exploitation. Le coût des intrants ne
nous a pas été communiqué.
90
91
L’utilisation des matières organiques en maraichage permet de couvrir un large spectre d’éléments
minéraux principaux et d’oligo-éléments nécessaires au bon développement des espèces maraîchères
surtout dans les sols acides ferralitiques ou ferrugineux tropicaux. Malheureusement, les gisements de
matière organique d’origine animale sont limités dus au faible développement de l’élevage dans de
nombreuses zones de Côte –d’Ivoire. De plus la pratique du compostage de débris végétaux est très
peu développée en zone rurale. Les maraîchers qui utilisent le compost n’ont pas généralement une
bonne maîtrise de la technique du compostage. Ils apportent souvent les déchets de fermes
directement aux cultures sans compostage ou après un assemblage des déchets en tas pendant un ou
2 mois sans opérations de retournement afin d’aboutir à un compost mûr sans germe de maladie et
sans odeur nauséabonde. Il est très fréquent de se confronter à ces odeurs de déchets de fermes non
décomposés dans les périmètres maraîchers urbains. Cependant, il existe en zone périurbaine à
Abidjan, des jeunes entreprises qui développent des produits à partir de déchets domestiques ou
d’industries agro-alimentaires.
Par ailleurs, les risques de carence en oligo-éléments peuvent être couverts par des apports d’engrais
foliaires contenant des oligo-éléments. Cela a été fait dans des opérations d’appui-conseil PARFACI.
91
92
Figure 9. Sac de fumier pour pépinière à Djebonoua et traitement des déchets à Abidjan (Green country)
Ces semences Hybrides F1 importées sont chères car : elles sont plus coûteuses à produire bien que
ce soit fait dans des zones spécialisées, avec des climats très favorables (longue période sèche) avec
des producteurs très efficaces (Inde, Chine, USA, Europe, Israël...), elles traduisent un long travail
d’amélioration, nécessitent un conditionnement soigné, et permettent aux entreprises de dégager des
profits. En Côte d’Ivoire, la société Semivoire, la filiale nationale de la firme française Technisem, est
le plus grand fournisseur de semences maraîchères comprenant aussi bien des semences hybrides que
des variétés fixées. Une grande partie de ces semences sont produites à Dakar au Sénégal par
Tropicasem (filiale Sénégalaise de Technisem) qui dispose d’une station de production de semences
dans ce pays.
Simultanément à ces semences hybrides, les entreprises semencières vendent du matériel traditionnel
de variétés multipliées en pollinisation libre parce que les espèces les y obligent (haricot vert...) ou
l’utilisation de variétés hybrides n’apportent pas de gain de rendement suffisant, comme pour l’oignon
de jour court. Enfin, les firmes spécialisées en espèces tropicales ont entrepris de multiplier et diffuser
des espèces africaines traditionnelles comme l’amarante, la baselle, la célosie, la cléomé ou
l’aubergine africaine. Elles mettent à la disposition de ces espèces leur savoir-faire en matière de
production de semences, de conditionnement et de distribution. Ces semences d’espèces africaines
peuvent être multipliées dans d’autres pays du monde, parfois à partir de de semences de pré-base
92
93
venant du CNRA. A côté de ces semences vendues par les firmes internationales, de nombreux
maraîchers utilisent leurs propres semences qu’ils produisent eux-mêmes dans leurs champs. Les
espèces concernées sont les espèces traditionnelles notamment le gombo, les aubergines africaines,
le piment et les légumes feuilles traditionnels (amarante, célosie, corète potagère, morelle noire,
oseille de guinée, etc.) et même la laitue (nous avons rencontré des producteurs de semences de laitue
à Yamoussoukro).
Pour valoriser au mieux ces semences de qualité et chères, mais pas uniquement celles-là, il est
nécessaire de mieux maîtriser la production de plants maraîchers. En effet, nous avons vu une
pépinière de pleine terre de tomates avec la variété F1 Cobra où les ¾ des plants n’étaient pas utilisés.
La production de plants maraîchers peut être faite par des producteurs de plants spécialisés. Nous
n’avons pas rencontré ce type de producteurs de plants maraîchers. Cette profession peut émerger
soit à partir de pépiniéristes ornementaux, soit à partir de producteurs maraîchers. Dans le cas de
plants traditionnels transplantés à racines nues, cette filière nécessite une proximité entre les
producteurs de plants et les utilisateurs. Cependant, la production des plants en godets ou plaques
alvéolées peut permettre de transporter de plants sur de plus longues distances et de s’affranchir de
cette proximité entre producteurs et utilisateurs de plants.
L’autre solution est d’améliorer les pépinières chez les producteurs : pépinières couvertes, sur
tablettes si risque d’inondation, avec arrosage, avec semis graine par graine, éventuellement un
repiquage au stade plantule en pépinière pour les solanacées, élevage des plants en mottes ou en
godets, possibilité de greffer sur des plantes résistantes. L’utilisation d’un substrat de plants de
pépinières sain indemne des maladies transmises par le sol est une nécessité dès que l’on pratique des
pépinières hors-sol. Un producteur hors-sol du Nord maitrise cette technique. Il peut être une
référence pour diffuser son savoir-faire.
93
94
La richesse d’une entreprise semencière est son germplasme (ressources génétiques). Il est donc
important si un pays ne veut pas complètement dépendre d’un approvisionnement semencier en
provenance d’entreprises étrangères, il doit préserver son patrimoine génétique et développer
quelques ressources génétiques nationales. Le CNRA a ainsi des variétés de piments, de tomates, de
gombos qu’il a sélectionnées, qu’il multiplie et distribue. Mais, il est évident que le CNRA ne peut pas
tout faire. La mise en place de filières nationales de semences maraîchères nationales formelles en
Afrique sub-saharienne a toujours échoué depuis plus 50 ans. L’activité nationale de production de
semences maraîchères doit continuer à être promue, mais elle ne pourra pas approvisionner tous les
maraîchers ivoiriens et concerner toutes les espèces. Par ailleurs, l’ANADER nous a décrit un projet de
production de semences d’oignons à Sinematiali qui avait produit 30 kg de semences de la variété
Violet de Galmi. Ces semences avaient été finalement vendues à la société Technisem (Semivoire) pour
être distribuées aux agriculteurs. C’est aussi le cas de semences maraîchères produites par le CNRA.
Généralement, elles sont conditionnées et distribuées par les sociétés locales Semivoire et Callivoire.
La variété de piment « bec d’oiseau » est très prisée par ces firmes.
Par contre, elles ne recherchent pas les semences d’aubergines africaines car elles sont généralement
produites par les maraîchers eux-mêmes. L’utilisation des semences fermières, c’est-à-dire produites
par les maraîchers eux-mêmes est une pratique qui nous a été mentionnée à Man pour aubergine,
piment et gombo. C’est le cas aussi de nombreuses espèces de légumes-feuilles. Elle élimine le coût
d’achat des semences. Indépendamment des problèmes de faculté germinative, une auto-production
peut entrainer des transmissions de virus par les semences ou de pertes de résistance existant au
départ dans les semences commerciales en quelques générations. Cette pratique existe. Elle n’est pas
à encourager.
Une production locale de semences maraîchères est donc à envisager, mais à une échelle réduite avec
une implication forte des distributeurs privés pour utiliser leurs réseaux de distribution déjà existant
en Côte d’Ivoire.
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95
L’utilisation de produits phytosanitaires pour la culture du coton sur les cultures maraîchères montre
le besoin d’une meilleure gestion des intrants. Les traitements chimiques systématiques contre une
gamme de ravageurs souvent peu identifiés, sont généralisé dès que les moyens le permettent. Le
rythme usuel est le traitement hebdomadaire. Cependant, un producteur nous a dit qu’il arrêtait les
traitements sur les tomates quand les fleurs commençaient à nouer pour éviter de détruire des
insectes utiles. Il y a donc une prise de conscience de certains producteurs quant aux risques de
pollution de l’environnement et de toxicité sur les organismes vivants liés à l’usage des pesticides
chimiques. En effet, les pesticides (spécialités phytopharmaceutiques) de synthèse sont des biocides.
Ils ont des effets néfastes sur de nombreux organismes vivants. Leur accumulation dans le sol et le
lessivage dans les eaux de ruissellement polluent non seulement les sols mais aussi les eaux de surface
et souterraines.
Certes, les producteurs en Côte d’Ivoire n’ont pas à leur disposition les derniers produits de lutte
chimique contre les ravageurs et maladies. Mais la gamme disponible est assez large et doit permettre
de couvrir l’ensemble des problèmes phytosanitaires des cultures. Une gestion raisonnée des intrants
chimiques passe par une formation des distributeurs, des conseillers techniques de développement et
des producteurs. Dans l‘état actuel des connaissances, la lutte chimique est encore nécessaire, mais
une lutte plus raisonnée combinant en plus de la lutte chimique, des techniques complémentaires
(rotation culturale, choix des variétés, protection physique avec des filets, techniques de pépinières)
est à développer.
Une juste utilisation des produits homologués par le service phytosanitaires, produits
phytopharmaceutiques de synthèse ou produits de bio-contrôle, comme Bacillus thuringiensis, permet
de diminuer les impacts sur l’environnement et de produire un légume de qualité. Par ailleurs, cela
permet de ralentir l’apparition des résistances des insectes, maladies et acariens aux produits
chimiques.
Au total, une prise en compte de tous les aspects et risques d’usages incorrects des pesticides
chimiques permet de s’orienter vers une agriculture agroécologique plus respectueuse de
l’environnement.
Alors que maintenant les travaux scientifiques mettent en évidence l’intérêt nutritionnel des légumes
– feuille indigènes (Agbo et al., 2009), il est essentiel de les garantir sans résidus de pesticides alors
que de nombreux travaux dans la région en montrent les excès détectables sur les marchés (Bempah
et al., 2012). L’application de la réglementation au champ (choix des pesticides, doses d’utilisation,
délai d’emploi avant récolte) doit permettre de respecter les exigences en termes de limites maximales
de résidus en cours et de redonner confiance aux consommateurs, notamment ceux des grands
centres urbains.
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Semences de qualité trop Valorisation des semences par formation à des techniques de
coûteuses pépinières
Subvention pour la construction de pépinières protégées
Semences de variétés
locales Interactions CNRA- distributeurs privés locaux
Mauvaise utilisation des Etablir une liste des pesticides utilisables en cultures maraîchères
pesticides Guide d’utilisation des pesticides
Formation des vendeurs de pesticides à l’utilisation des pesticides et
aux risques environnementaux
Formation des agriculteurs maraîchers à l’utilisation des pesticides et
aux risques environnementaux
Laboratoire d’analyse des résidus
Les contraintes de commercialisation du point de vue des producteurs ont été développées pour
chaque zone de production. Dans ce chapitre, nous les présenterons différemment en confrontant les
attentes des producteurs dans ce secteur à ceux des commerçants et de leurs organisations
respectives. Nous aborderons aussi les pistes de remédiation en considérant la mise en place de
dispositifs de régulation au niveau national et des marchés de gros.
96
97
car les surfaces maraîchères irriguées en Côte d’Ivoire restent modestes et le coût de transport
des légumes depuis le Burkina Faso, le Mali et surtout le Niger peut être le double de celui des
productions ivoiriennes.
En culture pluviale il serait possible dans le sud du pays de mieux étaler la production dans le temps
et d’avancer la période des premières récoltes. Cela nécessite toutefois de commencer très tôt les
pépinières et de repérer les variétés qui supportent bien les pluies en période de floraison puis de
maturation. Dans le Nord, il est beaucoup plus difficile de commencer plus tôt le maraîchage pluvial
car la saison des pluies est plus courte et les producteurs accorderont toujours la priorité à leurs
cultures alimentaires de base, les céréales et l’igname.
En culture irriguée, le décalage des périodes de production n’est possible qu’à deux conditions :
- Réaliser les pépinières précocement en octobre ou novembre afin de repiquer dès la fin des
pluies dans de bonnes conditions ;
- Sécuriser l’accès à l’eau afin d’assurer l’irrigation durant les mois les plus secs où le déficit en
eau dans les sols et les points d’eau est la plus forte. C’est aussi à cette période que la demande
en eau des cultures est la plus élevée du fait d’une forte ETP. Durant ces périodes de chaleur
la production pourrait être améliorée par le paillage systématique du sol et l’installation
d’combrières pour les cultures peu héliophiles (piment, poivron, concombre). Mais ces
techniques ne peuvent concerner que des surfaces réduites.
Dans les deux cas ces préconisations permettent aussi d’allonger la durée de production d’une culture
donnée, du moins pour les cultures à cycle indéterminé. Mais ceci nécessite d’améliorer les techniques
de pépinière surtout en période chaude ou pluvieuse : pépinière sur table protégée par des filets,
pépinière sous combrière ou sous petit abri serre facilement réalisable par les producteurs, bonne
densité de semis, semis échelonné, etc.
En étalant la production les maraîchers peuvent bénéficier de prix de vente bien supérieurs mais il faut
que les rendements ne chutent pas trop. Il y a là une prise de risque pour les producteurs. De ce fait
nous recommandons de mettre en place pour les 3 grandes zones de production (Sud et Sud-Est,
Centre et Nord) un programme de R-D sur 3 années afin d’étudier pour quelques cultures les
potentialités d’étalement de la production avec les meilleures techniques existantes à ce jour.
La filière maraîchère (et plus largement celles des vivriers) se caractérise par une forte organisation
des commerçants et commerçantes face à des producteurs très peu organisés. Ainsi depuis plusieurs
décennies des coopératives de commerçants et commerçantes (comptant plusieurs centaines de
membres chacune) sont fonctionnelles et ont un poids économique et politique important pour la mise
en marché des légumes et des autres produits vivriers. La principale activité de ces coopératives est la
gestion des marchés vivriers des grandes villes, et en premier lieu ceux d’Abidjan.
Cette coopérative comprend environ 2000 membres et a pour mission de gérer le marché d’Adjamé-
Roxi en assurant les services suivants :
- La sécurité dans le marché et en périphérie, de jour comme de nuit ;
97
98
Pour cela la COMAGOA dispose de 23 salariés et de bureaux mais pas de véhicule de transport. Elle
paye un impôt à la commune. Il n’y a pas obligation pour les commerçants de déclarer les quantités
qu’elles font transiter par le marché, néanmoins le directeur de la COMAGOA enregistre
manuellement les principales entrées de produit. Ce registre n’est pas utilisé par la coopérative ni
les services publics mais il est souvent valorisé par des étudiants et des chercheurs pour leurs
travaux de recherche.
Le principal objectif de la coopérative est de maintenir l’activité commerciale sur ce site car il est
bien situé au Nord de la Ville. Pour cela la COMAGOA entretient des relations étroites avec la mairie.
Malgré les difficultés d’accès au marché pour les gros camions surtout, les embouteillages
permanents dans la journée et les difficultés à évacuer les eaux pluviales et les déchets, la
coopérative ne cherche pas à s’installer sur un autre terrain où il serait possible de construire des
magasins fermés voire des chambres froides. Elle ne pense pas qu’il existe un projet de ce type au
niveau des mairies de la métropole. Si cela se faisait, les commerçants n’y seraient pas favorables
car les nouveaux marchés de gros se situeraient alors en périphérie d’Abidjan et éloignés des
commerçants de détails.
Alors que la grande majorité des maraîchers rencontrés considèrent que la contrainte de
commercialisation est la contrainte majeure pour eux depuis longtemps, peu d’entre eux se sont
organisés pour vendre collectivement (comme par exemple la coopérative de Nianda dans le Sud-Est).
La majorité des maraîchers vendent bord champ en faisant appel aux services des commerçantes qui
viennent chercher les productions. Une minorité d’entre eux qui vendent de plus grosses quantités,
ont l’habitude d’expédier leurs produits vers des commerçants basés dans les grands marchés urbains.
Pour cela ils font recours aux transports en commun ou partagent28 avec d’autres maraîchers les frais
de location des camions.
28
Il ne s’agit pas dans ce cas d’une vente groupée car chaque maraîcher s’adresse le plus souvent à des
commerçants acheteurs différents.
98
99
De ce fait, il apparait clairement que la vente groupée implique une très bonne organisation de la part
des producteurs qui se décline en :
- Une bonne capacité de négociation pour établir des contrats de vente avec les grossistes. Ces
contrats doivent permettre aux collectifs de producteurs d’obtenir des garanties de la part des
grossistes en termes de prix plancher et de quantités. Trop souvent les commerçants réduisent
de façon inopinée le prix d’achat arguant que la demande s’est soudainement réduite ;
- Une bonne capacité de gestion interne afin que les producteurs membres du collectif ne
fassent pas défaut quand il faut honorer une commande tant pour les quantités que la qualité
du produit.
Pour réduire les asymétries entre les grossistes et les maraîchers il convient de renforcer les capacités
individuelles et collectives des producteurs en termes de mise en marché. Cela peut se décliner :
- en formations de base (alphabétisation, calcul, règles économiques de base) précédées par des
voyages dans le pays pour échanger avec les coopératives de producteurs qui ont réussi à vendre
durablement à bon prix collectivement ;
- en formation spécialisées des producteurs sur les intérêts et limites de la vente groupée et sur des
thématiques complémentaires (rôle du crédit, gouvernance de la coopérative, couplage entre
l’approvisionnement en intrants et la vente groupée…). Ces formations doivent amener les
producteurs à comprendre les devoirs et engagements des coopérateurs et la contractualisation dans
la durée29 avec les grossistes ;
- en séances de sensibilisation auprès des commerçants et commerçantes afin qu’ils prennent mieux
en considération les revendications légitimes des coopératives de producteurs (Qu’ont-ils à gagner en
coopérant avec les collectifs de producteurs ?)
- en dispositifs d’accompagnement d’expériences de vente groupée pour des collectifs de maraichers
(financement de conseillers spécialisés) en associant des grossistes qui souhaitent jouer le jeu.
Les maraîchers qui commercialisent eux-mêmes procèdent à un tri du produit après récolte afin de
contenter leurs clients. Les emballages habituels sont les sacs et les cartons qui sont ensuite empilés
dans les camions ou les bus, ce qui entraine des pertes si les légumes ne sont pas suffisamment fermes.
De plus les producteurs considèrent l’emballage carton comme très coûteux car il est à usage unique.
Quelques expériences de transport en cageot ont été tentées sans suite. Bien que cette technique est
reconnue comme limitant les pertes et préservant la qualité du produit, son adoption se heurte à deux
contraintes majeures :
- Le manque de trésorerie dans les coopératives de producteurs pour réaliser l’investissement
(un cageot plastique coute au minimum 3 500 FCFA alors que le carton revient à 800 FCFA mais
il est à usage unique). Pour lever cette contrainte les coopératives devraient pouvoir
29
La vente groupée contractualisée dans la durée (un an minimum) ne permet pas d’obtenir pour chaque vente
le meilleur prix du marché. Il faut amener les producteurs à raisonner dans la durée : obtenir une moyenne de
prix de vente annuels supérieure à celle qu’ils connaissaient avant (quand ils vendaient chacun pour soi) et
réduire au maximum les cas de non vente ou de rejet de leurs produits.
99
100
emprunter car la rentabilité d’un tel investissement est évident : un cageot peut être
opérationnel pour plus de 10 transactions ;
- Mais cela demande une gestion des cageots par l’ensemble des acteurs de la filière et en
particulier l’implication des grossistes : lieux de stockage des cageots dans les grands marchés,
retour en camion/bus des cageots vides vers les sièges des coopératives de producteurs, tout
ceci a un coût financier et en travail.
En toute logique la fraicheur des légumes produits en Côte d’Ivoire par rapport à ceux transportés sur
une longue distance devrait être un argument de vente. Cet avantage est évident pour des légumes
rapidement périssables mais moins évident pour la tomate et surtout l’oignon qui se conserve
longtemps. Quoiqu’il en soit aucune information et forme de publicité permet de distinguer dans les
marchés de gros et de détails (hormis les supermarchés) les lieux de production des légumes. Nous
faisons l’hypothèse que les consommateurs de Côte d’Ivoire seraient plus enclins à acheter des
produits maraîchers venant des différentes régions du pays qu’à acquérir des produits importés. La
mention de la provenance des produits sur les emballages pourrait être insérée dans les contrats entre
coopératives de producteurs et grossistes, sinon imposée par une réglementation publique.
Par ailleurs, nous avons été surpris par l’absence de reconnaissance de la qualité des légumes à l’image
du label « légumes propres »30 développé au Vietnam ou du label ASD (Agriculture Saine et Durable)
promu par une ONG et des groupements de producteurs à Dakar. Il existe bien quelques initiatives de
production et de vente à Abidjan de légumes bio mais le grand public ne les connait pas alors qu’il est
de plus en plus inquiet quant à la qualité des légumes au regard de l’usage abusif des pesticides par
certains maraîchers. Il est aussi regrettable que certains supermarchés importent des légumes bio
d’Europe sans chercher à promouvoir une production locale AB.
Par définition, un marché de niche concerne toujours un petit volume de produit ayant des
caractéristiques précises et qui intéresse une catégorie de consommateurs spécifique et peu
nombreuse. Ainsi certains consommateurs aisés préfèrent acheter leurs légumes dans les
supermarchés en combinant produits locaux et produits importés (par avion le plus souvent). Ils font
confiance dans ce circuit de distribution à la qualité sanitaire des légumes. Mais d’autres
consommateurs aisés, et probablement en grande majorité, préfèrent toujours acheter leurs légumes
dans les marchés de détails donnant ainsi la priorité aux produits locaux et à un approvisionnement
journalier gage de fraicheur. Dans le Chapitre A.3 relatif à la zone Centre, nous avons évalué à 1 000
t/an le volume de légumes commercialisé par les grandes surfaces. Même si ce secteur est en plein
développement à Abidjan et bientôt dans des villes secondaires, la demande des supermarchés reste
très modeste au regard des 300 000 tonnes environ, de légumes qui transitent par les marchés de gros
d’Abidjan.
Néanmoins les marchés de niche et les filières alternatives qui en découlent, peuvent être utiles à la
filière « maraîchage » dans son ensemble, par exemple :
- En accélérant la conception de nouveaux systèmes de culture ou de systèmes améliorés puis
en facilitant la diffusion des pratiques culturales moins consommatrices d’intrants chimiques.
Par exemple les acquis obtenus par les rares maraîchers bio pourraient intéresser tous les
30
Ce label (RAT Rau An Toan en vietnamien) mis en place en 1998 par la municipalité d’Hanoï est toujours présent
sur les marchés avec d’autres labels comme VietGAP et Organic. Il ne s’agit pas d’agriculture biologique mais
d’une garantie que les pesticides ont été utilisés selon la réglementation en vigueur (bonne dose, bonne date) et
uniquement en cas de besoin.
100
101
maraîchers. Pour cela, il faudrait faciliter les échanges entre types de maraîchers, ce qui est
difficile sans organisation de producteurs représentative ni interprofession ;
- En vulgarisant largement les bases de la contractualisation entre producteurs et acheteurs
comme c’est le cas avec la grande distribution ;
- En innovant dans le secteur du conditionnement et du transport des légumes.
Les SIM mis en place dans le cadre de projet sont opérationnels tant que le financement apporté par
le projet est là. Mais ensuite ils périclitent. Par ailleurs, ces SIM n’ont pas fait l’objet d’évaluation
précise (sauf dans le cas de l’anacarde) et l’on ne sait pas bien s’ils sont utiles et largement utilisés par
les producteurs. Un SIM opérationnel qui donne des informations actualisées rapidement est coûteux
et il serait logique de créer une coalition de structures pour en faire vivre un seul qui soit performant.
Actuellement l’OCPV, l’ANADER et le BVP (Bouaké) demandent à leurs agents de relever les prix des
produits maraîchers sur les marchés de gros et de détail. 3 dispositifs fonctionnent en parallèle et ne
donnent pas rapidement les informations aux acteurs de la filière faute de moyens humains et
matériels pour traiter les données. Par contre le BVP répond à la demande quand il est sollicité par des
producteurs et des commerçants en fournissant des informations sur les prix surtout et les tances en
termes d’offres et demandes de production maraîchères.
L’information fiable la plus difficile à obtenir est relative aux quantités produites dans le pays pour les
principaux légumes consommés et aux quantités importées (cf. Partie 1). Il est encore plus difficile de
connaitre les surfaces de cultures maraîchères et le nombre et la localisation des maraîchers. Il serait
bien trop coûteux de mettre en place un dispositif statistique pour toutes les cultures maraîchères tant
elles sont nombreuses et diverses (légumes feuilles difficiles à quantifier, circuits long et de proximité).
Dans un premier temps, il conviendrait d’étudier la faisabilité d’un dispositif focalisé sur les produits
essentiels et stratégiques comme l’oignon et la tomate, le chou pommé qui font l’objet d’importations.
Ce dispositif sur les prix et les quantités produites, pourrait être complété par un observatoire des
principales productions maraichères basé sur le suivi d’un échantillon représentatif de maraichers. Il
fournirait des informations par cycle de culture sur le rendement, les types de variétés et les coûts de
production.
Toutefois un tel investissement n’a d’intérêt que si les données fournies par le SIM (Prix, flux) dédié à
quelques productions et l’observatoire des pratiques sont réellement utilisées par les acteurs de la
filière et les décideurs publics. Ces données devraient permettre dans un premier temps d’améliorer
les politiques publiques et le contenu des projets et programmes de développement et de R-D relatifs
au maraîchage. Ensuite il faudrait étudier la faisabilité d’un système de régulation de la production qui
doit valoriser les avantages comparatifs de chacune des grandes régions de production en vue de
gagner des parts de marché vis-à-vis des pays d’importation de légumes. Pour cela il faudrait :
- Inciter les producteurs à étaler la production selon les spécificités des régions,
101
102
- Accorder des quotas de production pour les OP reconnues de chaque région et des périodes
de mise en marché vers les grands marchés urbains,
- Spécialiser les régions selon leurs avantages comparatifs.
Ce système de régulation de la production est très ambitieux et demande une très forte coordination
entre des organisations de producteurs des différentes régions, organisations qui mettront
certainement plusieurs années à émerger. C’est pourquoi nous n’avons pas retenu ce système de
régulation de la production dans les priorités d’intervention.
Production concentrée à certaine période de Décaler les périodes de production en améliorant les
l’année entrainant une chute des prix et une techniques de pépinière
mévente des produits (abandon/perte au
champ) Mettre en place un projet de R-D d’étude de
l’étalement de la production pour quelques cultures
ciblées
Faible organisation des maraichers pour Concevoir et mettre en place un programme d’appui à
commercialiser collectivement la commercialisation groupée comprenant :
Faible capacité des OP à contractualiser avec les - des formations de base et voyages d’échange
grossistes - des formations spécialisées en vente groupée
-des séances de sensibilisation des grossistes
- des dispositifs d’accompagnement de collectifs de
maraichers
Mauvais conditionnement des légumes et coût Expérimenter pour des produits périssables la
des emballages périssables commercialisation en cageots
Promotion d’un dispositif d’affichage de la provenance
Absence de signe de provenance des légumes (Région et pays) pour inciter les consommateurs à
dans marchés de gros et de détail acheter ivoirien
Absence de signe de qualité et de marché de Etude de l’intérêt de segmenter le marché et des signes
niche valorisant la production locale de qualités dans des pays similaires en Afrique
subsaharienne (benchmarking)
Informations parcellaires, peu fiables et peu Dispositif de suivi des prix et des flux (importations
accessibles les prix et les quantités de légumes surtout) pour quelques produits et quelques grands
commercialisés marchés
102
103
Dans les régions, les agents les plus expérimentés en maraîchage sont des anciens salariés de la
SODEFEL ou des conseillers qui ont acquis une expérience au fil des années, sur le terrain et dans des
zones où cette filière est bien présente depuis longtemps. L’expérience de ces agents s’acquière aussi
au travers des projets vivriers ou dédiés au maraîchage qui organisent des formations spécialisées en
mobilisant des chercheurs du CNRA et des Universités et des experts du Ministère de l’Agriculture et
de Développement Rural (MINADER).
Les agents de l’ANADER (ADR, TS, cadres des directions régionales) rencontrés reconnaissent leurs
faible niveau d’expertise en maraîchage (surtout en protection des cultures) ainsi que dans le domaine
de l’irrigation et de la gestion durable des sols. Ce constat est partagé par les maraîchers expérimentés
qui ne trouvent pas les réponses à leurs questions auprès de l’ANADER.
Les centres de formation agricoles de base comme supérieures ne proposent pas de cursus en
horticulture. Tous les agents des structures privées et publiques rencontrés évoquent leur formation
en productions végétales, une formation assez polyvalente qui accorde peu de place aux cultures
maraîchères. A notre connaissance, il n’existe en Côte d’Ivoire aucune école de formation de technicien
supérieur ou de niveau supérieur (publique ou privée) dédiée au maraîchage quel que soit le modèle
31
Inversement dans les zones fortement orientées sur la production du cacao, l’ANADER déploie des agents de
terrain (ADR) dont l’activité principale est de former les cacaoculteurs et de vulgariser les innovations techniques
prometteuses. Par exemple, dans la zone de Bouaflé 50% des ADR sont dédiés à l’appui aux cacaoculteurs, 10%
aux producteurs d’anacardes et 40% interviennent dans tous les secteurs confondus (vivriers, élevage,
maraîchage, fruitiers) mais un bon nombre d’entre eux sont bientôt à la retraite. L’ANADER privilégie la
cacaoculture car elle reçoit des financements des projets et de la filière pour cela. Il y a aussi des conseillers
agricoles dédiés à l’anacarde dans la zone nord dans le cadre d’un contrat tripartite entre ANADER, FIRCA et
Conseil Coton Anacarde. En dehors de ces deux filières en Côte d’Ivoire, les autres filières sont gérées par les
mêmes ADR dits polyvalents.
103
104
Les Universités proposent des masters en production végétale, en amélioration des plantes,
biosécurité, en protection des cultures ou en écologie des écosystèmes anthropisés. Ces masters
abordent les principes généraux du fonctionnement des agrosystèmes sous pression parasitaire et les
grandes familles de déprédateurs. Ces formations sont utiles pour faire émerger de futurs chercheurs
mais n’ont pas vocation à former des conseillers en maraîchage, ni les futurs entrepreneurs. En plus
de l’INPHB dédié à la formation agronomique supérieure (mais sans cursus optionnel en horticulture),
certaines universités souhaitent développer des cursus de masters spécialisés proche du cursus
d’ingénieur agronome (Université Nangui Abrogoua d’Abidjan, Université Jean Lorougnon Guédé de
Daloa et l’Université Péléforo Gon Coulibaly de Korhogo). Mais à ce jour les formations de ce type ne
sont pas focalisées sur l’horticulture et restent trop généralistes et loin du terrain.
La filière maraîchère ivoirienne ne comportant pas d’interprofession (hormis celle dédié à la culture
de l’oignon) ni d’OP faîtière, n’a pas été en mesure de créer son propre dispositif de formation et de
R-D comme cela peut exister pour d’autres filières bien structurées en Côte d’Ivoire et dans d’autres
pays comparables (Maison des éleveurs, Maison du Paysan, centre de formation associatif géré par la
profession…).
c) Peu de moyens dédiés à la recherche pour la filière maraîchère, un dispositif de R-D-F dispersé.
Le nombre de chercheurs dédiés à plein temps aux cultures maraîchères est très limité, 2 permanents
(un agro-physiologiste et un généticien) actuellement au CNRA qui doivent aussi aborder les
légumineuses à graines (soja, niébé, arachide). Les perspectives de recrutement dans ce domaine au
CNRA sont limitées et au mieux vont compenser les départs à la retraite ou les mobilités internes pour
changement de fonction. Cette équipe est appuyée à temps partiel par un entomologiste du coton et
un phytopathologiste spécialisé en plantes à racines et tubercules. Deux techniciens supérieurs de
recherche de niveau Bac+2 constituent leur personnel d’appui.
Le nombre d’enseignants-chercheurs dans les universités a beaucoup augmenté ces dix dernières
années avec la création des universités des villes secondaires, certaines d’entre elles traitent des
productions végétales, d’écologie, de zoologie … mais ces enseignants-chercheurs sont très spécialisés
et ne comptent pas parmi eux d’agronomes des cultures maraîchères capables d’aborder l’ensemble
des problèmes techniques relatifs à ces productions, de plus très diverses (légumineuses, solanacées,
cucurbitacées, etc.). Par contre la gestion intégrée des déprédateurs et la conception de systèmes de
protection des cultures alternatifs avec des bio-pesticides sont de plus en plus abordées par les
universitaires et pourraient déboucher sur des innovations vulgarisables à court terme. Ces chercheurs
des universités conduisent surtout leurs activités de recherche dans le domaine des défenses des
cultures notamment l’identification et la caractérisation des ravageurs, des agents pathogènes. A la
différence du CNRA qui dispose d’un programme de recherche bâti sur des plans d’actions de 4 ans
élaborés, les équipes des universités semblent conduire les recherches de façon disparate selon
l’intérêt des enseignants et la disponibilité des financements. En conséquence, il est difficile de
percevoir un plan ou un schéma directeur national de recherche en maraichage.
Ces initiatives de chercheurs et les dispositifs de R-D promus dans les projets, les ONG et le secteur
privé de l’agrofourniture manquent d’un cadre de coordination et d’échanges. La plupart des
chercheurs interviennent comme consultants ou experts auprès des projets de développement du
maraîchage. Mais les résultats de ces travaux ponctuels et de ces études sont rarement capitalisés,
partagés et discutés faute d’un cadre d’échanges permanent qui relèverait de la responsabilité d’une
interprofession.
104
105
Les productions pédagogiques destinées au monde agricole (fiche technique, manuel, guide pour la
gestion d’exploitation maraîchère, guide pour la gestion de périmètres collectifs…) sont peu
nombreuses et peu accessibles sauf celles relatives aux techniques de production par culture
disponibles (cf. fiches techniques sur le site web du CNRA). Ce manque de production est lié au fait
que les chercheurs des Universités et du CNRA sont d’abord évalués sur la base des articles publiés
dans des revues scientifiques dont une bonne partie est rédigée en anglais. La mise à disposition
d’informations scientifiques « vulgarisées » produites en Côte d’Ivoire et ailleurs, utiles aux techniciens
des projets, de l’ANADER, des ONG, etc. nécessiterait l’intervention d’agents spécialisés faisant le lien
entre la recherche, le développement et la formation... mais ce personnel32 n’existe pas.
Des entretiens avec les entrepreneurs en maraîchage, les responsables d’OP et les agents de
développement (ANADER, ONG, Projets) nous retenons le besoin de renforcer deux domaines de
compétence au niveau national et dans les régions :
- La conception des aménagements pour gérer l’eau d’irrigation et la fertilité du sol des
périmètres maraîchers. Beaucoup de responsables de projets et d’OP considèrent qu’il y a un
déficit de compétence dans ce domaine surtout dans les entreprises privées chargées de
réaliser les aménagements. De plus, les conseillers agricoles sont peu formés dans la gestion
des équipements d’irrigation surtout ceux mobilisant la technologie du goutte à goutte
(gestion des filtres, de la pression, des goutteurs). Ces déficits de compétence entrainent
beaucoup de dysfonctionnements ensuite et parfois l’abandon des périmètres aménagés ou
du système (cas de Kafalovogo à Ferkéssédougou).
- La conception et la gestion des systèmes de culture sous abri serre et hors-sol. En Côte
d’Ivoire, les compétences en conception d’abri-serre et en culture hors-sol sont peu
nombreuses et constituées surtout de jeunes agronomes qui ont créé de petites entreprises
de conseil ou sont employés par des entreprises de production. La majorité des équipements
sont importés mais des ajustements peuvent être nécessaires pour réduire la température et
le taux d’humidité dans ces abris. Les entrepreneurs peuvent avoir recours à de l’expertise
internationale mais cela accroît les coûts d’investissement et de production. De plus il serait
intéressant que la filière maraîchère ivoirienne dispose de compétences locales pour
développer des abris serres moins coûteux et mobilisant des matériaux locaux33 (bois,
bambou) pouvant intéressés une plus large gamme de producteurs. Les expériences menées
dans ce domaine ont montré des limites. En effet, les bois ou matériaux locaux utilisés se sont
révélés peu durables (moins d’une année à cause de la forte pluviométrie dans les régions où
ils ont été expérimentés). A Abidjan, les bois sont aussi coûteux que certains matériels
importés. En conséquence, les populations se sont détournées de cette option de matériaux
locaux.
Dans les zones maraîchères anciennes, des producteurs ont acquis au fil du temps beaucoup de savoir-
faire et de connaissances grâce à la pratique quotidienne, aux échanges avec leurs collègues et via les
formations organisées par les projets et les services publics. Selon nos entretiens, il ne semble pas que
32
La Chambre nationale d’Agriculture à travers ses Chambres régionales pourrait jouer ce rôle d’interface
Recherche Développement formation mais elles sont quasi absentes sur le terrain.
33
Comme cela se fait en Asie du Sud-Est (Laos, Thaïlande...)
105
106
ces producteurs expérimentés soient connectés à des réseaux socio-professionnels via internet
(groupe Whatsapp) et dédiés au maraîchage mais cela reste à confirmer. De même nous n’avons pas
rencontré de producteurs allant chercher des informations sur des sites Web spécialisés étrangers
comme le font couramment les techniciens salariés des entreprises de production maraîchère et les
cadres des projets. Nous avons rencontré un jeune maraicher relativement bien formé et outillé
(smartphone, accès au web..) issu d’un master d’université qui a fait le choix de devenir producteur.
Cas isolé ou émergence d’une nouvelle génération de maraichers issus des formations supérieurs (BTS
et autres) ?
Malgré leurs connaissances imparfaites des modalités d’action des pesticides, des noms des matières
actives ou encore, des bases du maintien de la fertilité des sols, ces maraîchers experts pourraient à
l’avenir jouer plusieurs fonctions dans le développement de la filière :
- Fournir des informations aux décideurs et chercheurs sur l’état des cultures, du parasitisme
et sur le comportement de nouvelles variétés ou nouveaux intrants (biofertilisants,
biopesticides) et de ce fait être associé au dispositif R-D de la filière ;
- Apporter des connaissances locales et des innovations paysannes découlant de leurs
pratiques d’expérimentation, qui ne résultent peut-être pas d’une démarche scientifique
expérimentale mais peuvent donner des solutions concrètes et robustes à d’autres
maraîchers ;
- Contribuer à la circulation et à la diffusion des innovations techniques et organisationnelles
soit en étant responsable d’OP soit en position de « maraîcher-relais » ou d’animateurs
endogènes au sein d’OP ou de Projets (cf. infra).
Figure 12. Illustrations des ressources humaines impliquées dans la production maraîchère
Des maraîchers âgés en périphérie de Yamoussoukro Mais de plus en plus de jeunes producteurs
Un secteur pourvoyeur d’emplois : chantier de récolte de tomate, jeune technicien dans une agro-entreprise
106
107
Chercheur, producteur et ingénieur d’une entreprise de Agent ANADER et producteurs en recherche d’un appui
conseil en culture hors sol pour un aménagement (retenue d’eau et drainage)
- D’insérer dans les projets des dispositifs d’alphabétisation fonctionnelle dans la langue de
leur choix, surtout pour les productrices maîtrisant rarement l’écrit et l’oral. Cela élargira la
base de producteurs/productrices pouvant tenir des postes de responsabilité ;
107
108
Plusieurs responsables d’OP rencontrés ont suggéré que la politique de subvention des projets pourrait
être révisée. Par exemple la fourniture de quelques kits de matériels et de semences par les projets
pour un groupement de 30 producteurs (ou plus) a peu d’intérêt : selon eux, les équipements sont peu
adaptés ou fragiles (bottes, pulvérisateurs) et les intrants ne sont pas toujours adéquats surtout en
termes de choix de variétés. D’autres projets fournissent aux groupements un fonds de roulement
conséquent sous la forme d’un stock d’intrants et de semences, mais faute de suivi le fonds de
roulement n’est pas remboursé et disparait rapidement.
Ces différents types de dons entretiennent la culture de l’assistanat et du clientélisme alors que pour
ces leaders d’OP, il faudrait plutôt développer la culture d’entreprise et l’autonomie des producteurs.
Ils seraient plus intéressés à pouvoir accéder à des prêts bancaires.
Certes aucun responsable n’irait à l’encontre d’une politique d’investissement de l’Etat dans les
équipements d’irrigation34 car leur OP ne sont pas en mesure de mobilier le capital nécessaire pour
cela. Mais ils souhaitent d’une part, être mieux associés au choix des sites et des équipements et
d’autre part, participer aux commissions de réception des aménagements.
Ces objectifs sont ambitieux car actuellement beaucoup d’OP n’offrent pas de services à leurs
membres hormis l’accès à l’eau d’irrigation et à une parcelle dans le périmètre aménagé. Dans bien
des cas les leaders d’OP n’arrivent pas à mobiliser les membres pour entretenir les aménagements et
les équipements de base (fossé, motopompe, pulvérisateur) et abonder un compte bancaire pour les
renouveler. Le renforcement des capacités des OP est donc tout aussi prioritaire que celui des
producteurs et productrices. Pour mener à bien ce programme il serait utile de capitaliser les réussites
dans ce domaine, de les faire connaitre afin de susciter de nouvelles initiatives (cf. Coopérative de
Nianda dans le Sud-Est, contractualisation entre les producteurs et les agro-fournisseurs d’intrants via
la plateforme multi-acteurs de Yamoussoukro dans le Centre).
Le service d’achat groupé d’intrants apparait le plus facile à mettre en œuvre mais implique de
développer des relations de confiance avec les fournisseurs. Il en est de même pour le partage de
l’équipement d’irrigation et de transport qui peut se raisonner pour tous les producteurs d’un
34
Si la subvention à 100% leur parait logique pour les aménagements de base pour des petits maraîchers ils s’interrogent sur
le bien-fondé de subventionner des entreprises dont les propriétaires peuvent mobiliser du capital à partir de leurs autres
activités (hors agriculture) ou grâce à un prêt bancaire qu’ils peuvent facilement obtenir.
108
109
périmètre ou par petits sous-groupes selon le type de ressources en eau. L’exemple de la coopérative
de Nianda montre que la vente groupée de grosses quantités de légumes est aussi possible mais cette
activité est probablement plus difficile à mettre en œuvre car elle demande une bonne coordination à
tous les niveaux (entre producteurs pour fournir la quantité demandée et assurer un tri minimal ; entre
l’OP, le transporteur et le commerçant). Tout cela implique un engagement constant et désintéressé
des leaders d’OP.
Il conviendrait d’étudier finement plusieurs expériences d’actions collectives réussies pour en évaluer
les impacts pour les producteurs, les charges en travail pour les responsables ainsi que définir avec eux
les pistes d’amélioration.
Comme la grande majorité des actions d’appui à la filière est assurée par des projets, le suivi-évaluation
de ces actions est limité à la durée des projets. De ce fait, il est difficile pour les décideurs d’apprécier
les impacts des projets et les évolutions des systèmes de production à base de maraîchage.
Alors que d’autres filières disposent d’un arsenal d’outils pour établir des statistiques, réaliser des
études et déployer des activités correctrices dans différents domaines (production, qualité,
organisation collective) la filière maraîchère faute d’organisation reste dans l’informel et les décideurs
ont des difficultés à comprendre comment évaluer la production (sa quantité, sa qualité et ses impacts
socio-environnementaux), quelles sont les nouvelles questions à traiter en priorité. Les Projets se
succèdent mais ne permettent pas aux décideurs d’avoir plus de visibilité. Les statistiques de
production et de surface sont très difficiles à obtenir pour ce type de cultures du fait de la rotation
rapide des cycles, de la grande diversité des espèces. Les quantités produites seraient plus faciles à
obtenir par déclaration des producteurs (en nombre de cartons, de cuvettes.) mais il faudrait qu’ils y
trouvent un intérêt. Les quantités réceptionnées dans les grands marchés de gros ne font pas l’objet
de déclaration ; de plus, l’OCPV a arrêté de suivre les flux de marchandises depuis que la déclaration
de transport n’est plus obligatoire.
D’autres données sont difficiles à obtenir comme les coûts de production et les marges par culture car
les producteurs notent rarement ces données ainsi que les volumes commercialisés. Quelques projets
et ONG (comme ADVCI) mettent en place ce suivi de base de l’économie du maraîchage mais sans en
partager les résultats avec les autres acteurs. Seuls les prix dans les marchés de gros et de détails sont
bien suivis par l’OCPV et l’ANADER bien que ces données ne soient pas disponibles sur leur site internet
mais simplement affichées dans leurs locaux dans les régions.
Vu le niveau d’organisation des acteurs de la filière (OP faîtière ou interprofession), il semble illusoire
de mettre en place des outils de suivi et d’analyse de la production et du commerce des légumes
communs à tous, du moins à court terme. Il serait plus pragmatique de commencer à développer les
échanges entre les acteurs sur la base de leurs acquis ou de leurs constats des nouvelles difficultés.
Pour cela il faudrait s’orienter d’abord sur le modèle des plateformes multi-acteurs maraîchage dans
les principales régions de production. En plus de la mise en place d’accords entre acteurs pour l’achat
d’intrants et d’équipements, et la vente des légumes, ces plateformes pourraient se doter d’un
dispositif d’échanges d’expériences sous la forme d’ateliers de travail et d’échanges, de visites de
terrain ou encore via internet (groupe WhatsApp).
109
110
Tableau : Synthèse des contraintes relatives aux ressources humaines et priorités d’intervention
110
111
Figure 13 : Représentation simplifiée des éléments pris en compte dans l'évaluation environnementale par ACV de
produits maraîchers (De Oliveira et Biard, 2019)
Si l’on estime que 20% des produits sont perdus entre le champ (pertes avant récolte) et le
consommateur (pertes post récolte dans les marchés et lors du transport), alors les impacts
environnementaux du produit réellement consommé sont directement augmentés de 83% (au
minimum, sans prendre en compte la chaine logistique aval jusqu’aux consommateurs en passant par
les marchés de gros et de détail). Par exemple les légumes qui se dégradent dans les marchés urbains
et ne sont plus consommables (pertes) ont bien étaient transportés depuis leur lieu de production. Ce
transport a bien eu un effet négatif sur l’environnement du fait de son émission de GES.
111
112
La diminution des pertes à toutes les étapes logistiques est donc un des leviers majeurs de
l’amélioration des performances environnementales des filières maraichères, afin que chaque produit
puisse être consommé et qu’aucun intrant ne soit consommé en vain.
112
113
113
114
PARTIE E : RECOMMANDATIONS
Cette dernière partie développe nos recommandations suite à la réalisation des diagnostics par zone
agro-climatique et pour les grands domaines d’intervention (production, commercialisation,
organisation des acteurs de la filière, appui-conseil). Il s’agit bien d’une première approche des
recommandations dont certaines pour être mise en œuvre nécessiteront des études complémentaires.
Cette partie a été rédigée suite à l’atelier d’échanges tenu avec des acteurs de la filière qui regroupait
des représentants des maraîchers professionnels du Nord, de l’Est, du Centre et de l’Ouest, des
représentants des coopératives de commercialisation d’Abidjan, des ONG et structures publiques
d’appui-conseil à la filière.
E.1.1 Améliorer la fertilisation des cultures maraîchères et l’entretien de la fertilité des sols
La priorité pour rendre plus compétitive la filière maraîchère est d’accroitre les rendements sans
augmentation majeure des coûts de production. Pour cela il faut augmenter notablement la
production et la valorisation adéquate des fumures organiques (FO), bases d’une utilisation durable
des sols maraîchers, en particulier ceux des périmètres aménagés (pour lequel il n’est guère possible
de faire de longue jachère) :
- Dans la partie Nord il faut favoriser la production de fumier de ruminants et dans les zones où les
ruminants sont en moins grand nombre, il est nécessaire de combiner déjections de volailles et de
porcs avec des végétaux bruts facilement fermentescibles ;
- Pour cela il faut poursuivre le travail de formation au champ, dans les fermes et habitations des
maraîchers (gestion des ordures ménagères). Les techniques de compostage doivent être apprises
ainsi que les bases de la biologie des sols (un fumier trop riche en Carbone ou avec un rapport C/N
élevé est préjudiciable au développement des cultures). Il faut trouver les bons mots pour
expliquer cela aux maraîchers et maraîchères.
- Mais la formation ne sera pas suffisante et il est indispensable de développer :
Des champs écoles focalisés sur la fertilisation organo-minérale des cultures maraîchères
(avec des témoins sans FO, des compostières de démonstration pour l’apprentissage des
techniques …).
Des subventions à des groupements pour acquérir à faible prix les matériels de transport
adéquats.
Un appui aux groupements et aux individus pour développer des relations contractuelles
avec les éleveurs pour l’approvisionnement garantie et à prix discuté en déjections
animales.
Des travaux de R-D sur le broyage mécanisé des résidus de culture (en zone Nord) ou de
graminées sauvages pérennes (en zone Sud). Dans tous les cas le besoin de matières
carbonées/cellulosiques est indispensable à un bon compost riche en humus stable.
Des recherches sur les durées de compostage et sur l’intérêt des activateurs de
compostage (bactéries, champignons de type Trichoderma) afin d’apprécier leurs intérêts
technico-économiques.
La production de FO35 par des entreprises privées ou coopératives n’a de sens qu’à proximité des
gisements importants de déchets organiques et donc en périphérie des villes où se trouvent des
industries agroalimentaires, des élevages intensifs de grande taille, les sites de stockage des déchets
35
Il existe plusieurs ONG ou associations spécialisées dans ce secteur comme GEVALOR basé à Lyon et Orléans
(France) https://www.gevalor.org/fr
114
115
verts des communes…Il faut aussi veiller à composter les déchets organiques des marchés de gros et
de détails (bien que pas très riches en C et en cellulose). Par contre il apparait beaucoup moins rentable
de recycler les déchets ménagers organiques dans les grandes villes car leurs coûts de transport et de
triages sont très chers. La production de biogaz36 peut alors améliorer le bilan économique de
l’installation de production de compost mais l’investissement reste onéreux et pas encore
envisageable à court terme.
Lorsque la contrainte « organique » est levée il est nécessaire de travailler avec la recherche, les
vulgarisateurs et les producteurs les apports d’engrais minéraux et de savoir les combiner avec les
apports organiques de fond (en début d’implantation des cultures). Cela implique :
- De discuter avec les fournisseurs d’engrais afin qu’ils proposent une gamme de fertilisants
minéraux spécifiques aux grandes familles de cultures maraîchères (solanacée, légumes feuilles,
oignon).
- D’étudier la possibilité de subventionner ces types d’engrais maraîchers au même titre que
l’engrais coton, ou dans beaucoup de pays, les engrais céréales. A l’inverse des cultures
précédentes, les quantités en jeu qu’il faudrait subventionner pour le maraîchage sont moindres.
L’engrais minéral subventionné serait accordé uniquement à des groupements qui s’engagent
dans une opération de fertilisation « mixte » organo-minérale où les apports de FO seraient
contrôlés en interne (enregistrement sur des carnets individuels) et par des techniciens de façon
aléatoire.
Pour un impact à moyen terme qui se traduira par la baisse du nombre de périmètres irrigués en
difficulté, nous recommandons un investissement de 2 ou 3 années en formation pour des futurs
experts en irrigation, aménagement hydraulique, gestion des sols en culture continue. (cf. E.4.1)
Mais il faut aussi agir à court terme car les attentes des producteurs sont très importantes dans ce
secteur de l’irrigation. Pour cela nous recommandons :
- De privilégier les investissements dans les situations où les producteurs ont déjà acquis une bonne
expérience de base en maraîchage (maraîchage pluvial et maraîchage irrigué sur de petites
surfaces bien maîtrisés, anciens périmètres aménagés devant être réhabilités…)
- De limiter la surface des périmètres aménagés (moins de 5 ha si possible, pas au-delà de 10 ha)
afin d’en améliorer l’efficacité et la maintenance. Dans le cas de grandes plaines aménageables il
36
Cette technique permet aussi de réduire les émissions de GES émanant des déchets organiques entassés et
non traités.
115
116
Les échecs en matière de périmètres irrigués ne proviennent pas seulement d’une mauvaise maîtrise
des techniques d’irrigation et d’exhaure de l’eau. Souvent les techniciens et les producteurs sous-
estiment les autres composantes de la gestion des périmètres (sol, déprédateurs dans le sol ou dans
la végétation périphérique, excès d’eau …). Pour cela nous recommandons :
- De mettre au point une méthode de gestion intégrée des périmètres maraîchers irrigués qui
pourra se décliner en un manuel de gestion accessible aux producteurs et agents de vulgarisation,
un film vidéo et un module de formation à destination du même public. Cette méthode abordera
le drainage (actions collectives et individuelles), la gestion de la fertilité des sols, la gestion des
maladies et déprédateurs (actions collectives et individuelles), les activités collectives (pépinières
protégées, gestion de la pompe et du système d’irrigation…)
- De tester cette méthode dans le cadre de projets et sur quelques sites aménagés
- D’évaluer les effets et impacts de cette méthode et d’en diffuser les acquis.
Les acteurs de la filière en particulier les pouvoirs publics via les projets, ont tout intérêt à faciliter
l’installation de boutiques proposant des semences de bonne qualité (surtout germinative). La
question se pose aujourd’hui dans les nouvelles zones de production où le secteur privé trouve peu
d’intérêt à ouvrir des boutiques de détail. Pour qu’une firme privée s’implante dans une région encore
peu maraîchère, il faut que les groupements, l’ANADER, les projets facilitent les relations entre les
maraîchers et les fournisseurs de semences et d’intrants. Cela implique d’organiser des journées
d’échanges et de formation sur le bon usage de ces intrants (pris en charge pour moitié entre secteur
privé et les projets).
Le développement d’une filière semencière « alternative », gérée par des structures publiques ou
des coopératives ne nous semble pas souhaitable actuellement car la profession n’est pas
116
117
suffisamment organisée hormis pour ce qui concerne l’oignon37. Des projets ont tenté récemment de
promouvoir une production semencière via des maraîchers semenciers, membres de coopératives ou
groupements connus. Si la production de semences n’a, semble-t-il, pas posé problème (grâce à l’appui
du CNRA et de l’ANADER) par contre la commercialisation des semences a été laborieuse car ces
coopératives n’avaient pas de circuit de distribution. De ce fait pour des obtentions nationales (variétés
locales ou sélectionnées du CNRA), il semble préférable dans un premier temps d’amener le CNRA à
passer des contrats avec des semenciers privés disposant d’un bon réseau de distribution dans le pays.
Les maraîchers considèrent que les semences vendues par les firmes privées sont chères et pas
toujours bien adaptées à leurs conditions de production (sols infestés de maladies telluriques). Face à
ces constats nous recommandons :
- Que les groupements ou coopératives de maraîchers dans chaque région engagent des
collaborations avec les firmes semencières pour tester dans leurs conditions de production les
nouvelles variétés proposées à la vente (ce travail sera logiquement financé par ces firmes avec
un appui éventuel des projets) ;
- Qu’un programme d’appui conseil à la production de plants de qualité en pépinière soit
développé dans toutes les zones de production suite à nos constats de terrain montrant une
grande perte en semence (pépinières non protégées, trop denses, plants trop âgés). Encourager
l’émergence d’entreprises38 spécialisées dans la production de plants, comme cela existe au Maroc
et en Tunisie, apparait prématuré vu l’hétérogénéité des maraîchers (calendrier cultural,
dispersion géographique, petites surfaces…). A la rigueur, cela peut se faire à petite échelle au
niveau des périmètres aménagés.
Globalement les boutiquiers, les techniciens ou conseillers agricoles et les maraîchers sont mal
informés des usages et des dangers des pesticides. Il est nécessaire de renforcer le niveau
d’information, de formation et de compétences de ces agents dans ce domaine. Certes la plupart des
agents vulgarisateurs connaissent les précautions à prendre, mais peu de maraîchers disposent des
équipements adéquats de protection. Nous recommandons donc :
D’établir une liste des pesticides39 utilisables en cultures maraîchères, actualisée chaque
année et facilement accessible par tous les acteurs de la filière (techniciens, producteurs).
Cette liste doit comporter les noms des matières actives et des noms commerciaux ;
Ce document pourrait être complété’ au moins pour diffusion aux techniciens et conseillers,
par :
- Une liste non exhaustive de pesticides homologués en Côte d’Ivoire pour d’autres
cultures que le maraîchage mais qui sont dangereux à utiliser en maraîchage et surtout
pour les consommateurs de légumes ;
- Une liste de pesticides non homologués dans le pays quel que soit la culture mais que
l’on peut encore trouver dans les boutiques.
37
L’interprofession oignon a en projet de développer une production locale de semences d’oignon et de faciliter
l’autoproduction de semences. Dans tous les cas il serait difficile de se passer totalement de l’approvisionnement
par les semenciers privés
38
Cela implique des conditions de transport rapides en particulier. Cela augmente les coûts de production et n’a
des sens que pour les grands producteurs.
39
Il existe une liste des pesticides approuvés par le Comité Sahélien des Pesticides (CSP) dont fait partie la Côte
d’Ivoire (dernière version mai 2018 voir http://www.reca-niger.org/IMG/pdf/-4.pdf document de 48 pages
concernant toutes les cultures et sans mention des noms commerciaux .
Voir aussi le site http://www.pan-afrique.org/fr
117
118
Le nombre de sites de culture hors-sol visités lors de la mission de terrain a été trop faible pour établir
des recommandations précises. Selon nos constats, il y a une marge importante de progrès en Côte
d’Ivoire en matière de cultures sous abri pour atteindre des rendements supérieurs, par exemple en
tomate de 12 kg/m² de fruits frais en 2 cycles de production. Ce potentiel de développement des
cultures hors-sol sous abri permettrait d’obtenir un produit de qualité toute l’année et en particulier
en saison des pluies. Cependant, de nombreuses mises au point techniques restent à faire : abri,
pépinières, désinfection des substrats, solution nutritive, protection phytosanitaire, variétés. Il
conviendrait aussi de développer avec les producteurs concernés des évaluations technico-
économiques précises et sur plusieurs cycles de production des premières expériences de cultures
hors-sol. Nous recommandons donc de développer progressivement ce système de production en
l’appuyant sur un programme de R-D ambitieux qui aurait pour mission de co-concevoir les systèmes
de culture hors sol, d’évaluer ces systèmes et d’accompagner les promoteurs de cette technologie.
A moyen terme, le programme de renforcement des capacités des experts en maraîchage hors-sol et
sous abri devrait permettre à la Côte d’Ivoire de trouver les solutions adaptées aux différents contextes
40
Il existe bien ce document de 2010 en français James, B., Atcha-Ahowé, C., Godonou, I., Baimey, H., Goergen,
G., Sikirou, R., et Toko, M., 2010. Gestion intégrée des nuisibles en production maraîchère : Guide pour les agents
de vulgarisation en Afrique de l’Ouest. Institut international d’agriculture tropicale (IITA), Ibadan, Nigeria. 120 p.
Mais il fait peu cas de l’usage des pesticides. Quelle que soit notre position d’expert, l’usage de pesticides
chimiques n’est pas prête de s’arrêter malgré les progrès du biocontrôle. Il est donc important d’accompagner
au mieux cet usage au profit de la santé des consommateurs, des producteurs et des écosystèmes.
41
Voir aussi le répertoire des sources d’information en agriculture sur le site d’Inter-Réseaux http://www.inter-
reseaux.org/IMG/pdf/Recueil_supports_formation_et_animation_production.pdf ainsi que le Document
d’information sur la gestion des pesticides au Sénégal du PAN Africa https://docplayer.fr/10470283-Document-
d-information-sur-la-gestion-des-pesticides-au-senegal.html
42
Cette transition vise à la réduction d’usage des pesticides chimiques sans nécessairement les bannir totalement
comme c’est le cas en Agriculture Biologique
118
119
agro-climatiques : les zones du Sud très pluvieuses mais aussi chaudes, où les abris serres doivent être
très bien ventilés, les zones Nord pour lesquelles ce modèle de production doit être validé.
Globalement les expériences de maraîchage hors-sol en Côte d’Ivoire et dans la sous-région (Ghana,
Nigéria43) mériteraient d’être étudier finement tant du point de vue technique qu’économique. Il faut
en particulier bien définir les seuils de rendement et de coût de production au-delà desquels ce modèle
technique devient rentable.
Par ailleurs, les expériences de culture sous abri-serre dans d’autres zones tropicales sont à prendre
en compte. Pour cela, on peut se référer à :
- Langlais C., Ryckewaert P. 1998. Guide des cultures sous abri en zone tropicale
humide. Le Lamentin, Martinique : CIRAD-FLHOR, 46 p.
- Simon S., Minatchy J. 2009. Guide de la tomate hors sol à la Réunion. Montpellier :
CIRAD, 186 p.
- Van Heurn Kees , Van Der Post K., 2004. Agriculture sous abri Structure, conditions
requises et usage des serres sous différents climats. CTA Agromisa, Wageningen,87 p.
Cependant, il faut faire attention à un trop rapide transfert de technologie car chaque situation a des
caractéristiques climatiques spécifiques. Par exemple, dans les Antilles françaises et à l’Ile de La
Réunion les vents sont très forts (besoin de structures très solides) mais la température est moindre
qu’en Afrique sub-saharienne. De même, les modèles techniques issus des pays méditerranéens
(Israël, Maroc) ne sont pas adaptés aux zones tropicales car ils sont conçus pour produire en période
froide (entre 5° et 15 °c) en hiver au nord de la zone tropicale
43
Voir https://www.agenceecofin.com/innovation/0205-37766-dfk-ces-serres-qui-pourraient-revolutionner-la-
culture-de-la-tomate-au-nigeria
44
Mais à Abidjan l’utilisation des matériaux locaux n’a pas eu de succès car ils sont souvent aussi chers
que certains matériaux importés et moins durables que ces derniers (un an maximum) obligeant les
utilisateurs à des fréquents remplacements ou réfections. Par exemple, les bois ou les bambous
préconisés pour le montage des abris étaient vendus pratiquement aux mêmes prix que les bois
menuisiers. Généralement ces bois et bambous sont utilisés pour le montage des dalles des immeubles
à Abidjan.
119
120
120
121
Il est aussi important de bien distinguer l’appui et les dispositifs de vente groupées des vivriers de
base avec ceux destinés aux produits maraîchers. Dans le premier cas, hormis le plantain, les produits
alimentaires sont peu périssables tant qu’ils ne sont pas transformés (riz, maïs, manioc racine, igname
tubercule...). Par contre les produits maraîchers sont tous rapidement périssables sauf pour l’oignon
en conditions sèches.
E.2.3 Faut-il investir dans de nouvelles plateformes de collecte ?
Les difficultés rencontrées par les 3 plateformes de collecte des produits vivriers mis en place dans le
pays par l’OCPV nous amène à recommander la plus grande prudence quant à l’extension de ce type
de dispositifs. Les investissements relatifs à ce type de plateforme sont très coûteux (clôture, magasin,
route…) alors que des plus petites structures de collecte au niveau de coopératives opérationnelles
font défaut. Par exemple un simple quai de chargement au bord d’une route et dans le village (pour
faciliter le gardiennage). De ce fait nous recommandons :
D’engager une étude comparant les 3 plateformes « OCPV » et de comprendre les causes des
disfonctionnements. Dans cette étude seraient intégrés des dispositifs de collecte ou de mise
en marché groupé gérés par des coopératives déclarées ou des groupements informels. Il
s’agirait de comparer les performances respectives : coûts de collecte et de mise en marché
(en FCFA/kg de produit), quantités concernées, prix pratiqués selon les saisons…
De favoriser un investissement progressif en infrastructures (un petit magasin avec un quai de
chargement extensible …) uniquement quand les collectifs de maraîchers sont suffisamment
sûrs des quantités de produits qu’ils peuvent commercialiser. Inversement il est inutile
d’investir dans une plate-forme de collecte si les producteurs ne sont pas bien organisés et s’ils
n’ont pas fait la preuve de leurs capacités de gestion de services à leurs membres.
Ces appuis à la commercialisation devront évidement prendre en compte les recommandations de
l’étude sur les pertes dans la filière maraîchage
E.2.4 Coupler l’achat d’intrants à crédit à la vente groupée des légumes
121
122
L’étude sur les pertes en produits maraîchers du champ aux marché de détails affinera ce type de
recommandations. Les contacts avec quelques collectifs expédiant de la tomate sur Abidjan
souhaiteraient tester le transport en cageots rigides qui leur semble plus économique que celui en
carton double non réutilisable. Nous recommandons d’expérimenter ce type de transport mais avant
cela une étude de faisabilité technico-économique doit être réalisée et comprendra les activités
suivantes :
Faire une analyse du marché du cageot plastique voire de la caisse en bois45 réutilisable ;
Evaluer la réduction des pertes des légumes candidats au transport en cageot, pour la tomate
en particulier lorsqu’on les transporte en cageots plastiques ;
Calculer le coût du km par kg transporté, il devrait augmenter car un camion transportera une
moindre quantité avec des cageots comparé à un chargement de cartons en vrac (attention le
camion transportant moins consommera moins de carburant, aura moins de panne...)
Tester et évaluer le coût du retour des cageots vides sur les lieux de production/collecte. Ce
ne sera pas possible en mobilisant des camions vides, il faut imaginer cela en complément d’un
chargement pondéreux mais de faible volume (ciment, fer, planches)
Etablir une analyse coût/bénéfice lorsque l’on passe du système traditionnel de transport avec
les cartons jetables au système de transport avec cageots plastiques ou bois.
Le consommateur aura d’autant plus tendance à acheter un légume à un prix plus élevé et rémunérant
mieux le producteur, s’il est bien informé de sa provenance et de sa qualité. Pour cela nous
recommandons :
D’étudier la faisabilité de l’étiquetage de la provenance des produits maraîchers (Pays et
région pour la Côte d’Ivoire). Ce système de reconnaissance est déjà en place dans les
Grandes surfaces et l’on peut penser qu’une réglementation pourrait s’appliquer à tous
les produits passant par les marchés de gros d’Abidjan et des grandes villes. L’étiquetage
serait ensuite transmis aux commerçants de détails qui aurait obligation d’en faire cas sur
leurs étals. Le transport en cageots réutilisable faciliterait ce système de traçabilité ;
De mener une étude comparative dans des pays similaires de label de qualité des
légumes. Le label le plus courant est celui de l’Agriculture Biologique et certains pays
africains mettent en place leur label « bio » national qui ne nécessite pas nécessairement
une certification par un tiers (ce qui est coûteux) mais expérimentent pour le marché local
des systèmes participatifs de garantie (SPG)46 (Exemple au Burkina Faso, Sénégal, Bénin
45
Système traditionnel de transport encore utilisé en Europe et au Maghreb
46
Lire : Lemeilleur S., Allaire G. 2018. Système participatif de garantie dans les labels du mouvement de
l'agriculture biologique. Une réappropriation des communs intellectuels. Economie Rurale (356) : p. 7-27.
122
123
…). Au Vietnam il existe deux labels pour les légumes : le label AB ou Organic pour le
marché national et le label « légumes propres » qui garantit que les pesticides chimiques
autorisés en maraîchage ont été utilisés à bon escient.
Quand ces systèmes de reconnaissance sont établis par des lois ou règlements ou des
organisations de producteurs et de consommateurs suffisamment structurées et vigilantes
(les SPG), il convient de les faire connaitre. L’objectif n’est pas de labelliser toute la
production maraîchère à court et moyen terme mais surtout de faire émerger des filières
alternatives/novatrices pour des marchés de niche et des consommateurs exigeants. Ainsi
la coexistence de plusieurs filières maraîchères favorise l’innovation technique et
organisationnelle (par exemple les produits pesticides biologiques mis au point par l’AB
sont rapidement adoptés par les maraîchers traditionnels, c’est le cas avec le bio-
insecticide Bt).
Dans la cadre du Programme d’appui au secteur vivrier (PASV) soutenu par l’UE, le MINADER a comme
objectif de redynamiser l’OCPV. Actuellement cette structure publique rencontre des difficultés à
analyser les données de prix et des quantités de produits maraîchers circulant dans le pays ou depuis
les pays limitrophes. Par ailleurs, il existe d’autres Systèmes d’Information qui ne communiquent pas
entre eux comme celui des prix de vente bord champ mis en place par l’ANADER, celui des prix de gros
du BVP de Bouaké et d’autres intégrés dans les dispositifs de suivi-évaluation des projets de soutien
au maraîchage. Suite à ce constat nous recommandons :
- De réaliser une étude faisant le point sur les SIM passés et actuels relatifs aux produits
maraîchers (à toujours bien différencier des produits vivriers qui se dégradent beaucoup moins
vite) et de prendre en compte les expériences réussies de SIM dans d’autres pays ou sur d’autres
types de production en Côte d’Ivoire ;
- De préciser avec les acteurs de la filière leurs besoins en informations (prix, gamme de qualité,
quantités mises en marché). Cela concerne d’abord les coopératives de vente groupée mais aussi
les coopératives gérant les marchés de gros d’Abidjan et d’autres villes secondaires (ce sont les
seules à être en capacité de relever de façon assez précise les quantités déchargées sur leurs sites
de vente)
- De tester un dispositif d’informations partagées (où chaque acteur met des moyens humains)
pour quelques produits maraîchers d’importance économique combinant le suivi des prix le long
de la chaine de valeurs et les quantités mis en marché (en particulier les quantités importées des
pays voisins. On peut penser à la tomate, le chou, l’aubergine violette etc. Le suivi des prix et des
quantités d’oignon s’il n’est pas suffisamment bien assuré par l’interprofession Oignon pourra être
intégré à ce SIM pilote.
- Après 6 à 12 mois d’opérationnalisation, le fonctionnement du SIM pilote « maraîchage » sera
évalué ainsi que ses usages. Il s’agira de savoir qui l’utilise et pourquoi. Le soutien (des pouvoirs
publics et des programmes sur aide extérieure) à ce système d’information n’a de sens que si les
acteurs de la filière contribuent à son fonctionnement47 et si les données sont utilisées pour
améliorer la gestion des différents maillons de la filière.
47
En particulier sous la forme de personnel de terrain dont une partie du temps sera consacrée à alimenter le
SIM (relevé des prix et des quantités dans les marchés, les plateformes de collecte, les lieux de contrôle des
camions…)
123
124
Les pouvoirs publics, les structures d’appui-conseil et les grosses coopératives de maraîchers ont par
ailleurs, besoin de mieux connaitre les résultats au champ (rendements, pertes,) et plus globalement
les performances technico-économiques à l’échelle de la parcelle maraîchère (marge brute,
rémunération de la journée de travail familial, retour sur investissement, état de la trésorerie, capacité
d’emprunt à court et moyen terme…). Ces données doivent permettre de mieux conseiller les
producteurs et de négocier de façon transparente les prix avec les acheteurs. Le calcul des coûts de
production pour les principales cultures selon les grandes régions est à la base de la contractualisation
entre producteurs et acheteurs. Pour cela nous recommandons :
D’évaluer la faisabilité et les intérêts d’un observatoire des pratiques des maraîchers et de
leurs performances technico-économiques. Il concernerait un échantillon représentatif de
producteurs des grands bassins de production et des types de maraîcher (depuis les
productrices en périurbain jusqu’aux producteurs hors sol)
D’identifier les personnes ressources en capacité de consacrer un peu de leur temps à cet
observatoire, sur le terrain (ANADER, agents du MINADER, salariés des Coopératives …) et au
niveau régional et national (MINADER, ANADER filière, OCPV …). La connexion de ce projet
d’Observatoire avec les services statistiques du MINADER et du Ministère du commerce
(Douanes) est impérative pour limiter les doublons. Il faudra aussi associer les services de suivi-
évaluation des programmes et projets sous tutelle de ces ministères. Les coopératives bien
structurées seront aussi partenaires de l’observatoire en tant que fournisseurs mais aussi
utilisateurs des données produites et synthétisées.
Dans ces situations, les groupements de maraîchers ne sont pas suffisamment organisés pour
défendre leurs droits à produire dans la durée. Nous considérons que ce type de systèmes maraîchers
peut être très utile aux citadins et aux villes (espaces verts, légumes frais à proximité surtout pour leurs
feuilles, emplois, recyclage des déchets organiques de la ville…). Sur cette base nous recommandons :
• De sensibiliser les autorités locales et nationales sur l’importance de l’agriculture urbaine et
périurbaine, proche des consommateurs et des citadins ;
• De mener une étude pour repérer des zones à fort potentiel productif en maraîchage/vivrier
pouvant être sécurisées par rachat du foncier par les collectivités locales ou l’Etat.
48
Comme il en existe dans les grandes villes d’Amérique latine et plus récemment en Afrique (Rabat, …)
124
125
Dans les périmètres aménagés par des projets/programmes, l’établissement d’un contrat foncier
entre le ou les propriétaires terriens et le groupement de producteurs sera systématisé. Dans ce cadre
nous recommandons de mieux intégrer les producteurs et propriétaires autochtones dans la gestion
du périmètre et de leur montrer les intérêts de la production maraîchère.
Dans le Nord du pays et toujours dans les périmètres aménagés avec un accès à l’eau de surface, la
concurrence entre éleveurs et maraîchers pour la valorisation de l’eau est très forte et parfois
conflictuelle. Il conviendrait alors :
- De systématiser l’établissement d’une chartre de gestion du point d’eau et des terres
périphériques entre ces deux catégories d’usagers ;
- De bien délimiter les accès (passage du bétail, zones cultivables, pistes agricoles) et d’améliorer la
qualité des clôtures en combinant grillage et haie vive.
L’accroissement des capacités d’intervention individuelles des maraîchers « familiaux »49 repose
d’abord sur leurs capacités à s’organiser collectivement pour produire, acheter les intrants et vendre
leurs productions. Par exemple il semble difficile de promouvoir un accès au crédit sans la garantie
apportée par une organisation de producteurs ou un cautionnement solidaire (cf. E.4
Recommandations pour la commercialisation). Pour cela différentes voies sont à étudier puis à
expérimenter, comme :
• Etudier l’usage en commun du motoculteur50 pour le travail du sol et le transport des
fumures organiques et des productions ;
• Proposer à des petits groupes de maraîchers d’utiliser en commun des outils avec une petite
motorisation comme la pompe branchée sur une moto courante, le tricycle, le mini tracteur
(moins de 15 cv, peu lourd, < 1,5 m de largeur) ; des équipements courants en Asie et qui
apparaissent en Afrique anglophone.
• Développer un dispositif de conseil en gestion pour les groupements afin qu’ils améliorent
leurs choix et la gestion des équipements en commun (motopompe, aménagement).
La présence épisodique des propriétaires /investisseurs sur les lieux de production rend délicate la
gestion rigoureuse d’une entreprise de production maraichère d’autant plus que ces personnes n’ont
pas forcément de formation ni d’expérience dans le secteur agricole. La gestion est alors déléguée à
du personnel dont la compétence technique et managériale est variable. Dans la mesure où ces
entreprises bénéficient d’un appui des projets sur fonds publics (de R-D ou de financement
d’investissement), il est normal que leurs gestionnaires soient redevables vis-à-vis des projets en
acceptant (i) de participer à un suivi-évaluation de leurs activités subventionnées en fournissant les
données demandées et (ii) de recevoir les conseils des techniciens et experts mandatés par les
Projets/programmes.
49
En maraichage intensif de 0,2 à 1,5 ha/an
50
C’est l’équipement motorisé le plus fréquent en Asie et plus récemment à Madagascar et en Afrique de l’Est
125
126
E.4.1 Faire face au déficit de compétences techniques en aménagement, irrigation et culture hors
sol
Du fait de la dispersion des chercheurs spécialisés en productions maraîchères entre le CNRA et les
Université, nous recommandons d’une part de mettre en réseau ces ressources humaines et d’autre
part, de développer des actions de Recherche-Développement et Formation spécifiques à cette filière.
Cela pourraient se concrétiser par les activités de court terme suivantes :
Recenser les chercheurs et experts nationaux souhaitant apporter ou développer leurs
compétences au bénéfice des acteurs de la filière. Il convient aussi de repérer les experts du
51
Par exemple il est important qu’un expert en hydraulique agricole est aussi une connaissance des besoins en
sol et en nutriments des cultures maraîchères afin de choisir les situations à aménager pas seulement selon des
critères topographique et hydrauliques. Beaucoup de périmètres aménagés ont échoué car leurs sols étaient
bien trop sableux.
126
127
secteur privé comme les cabinets de conseil qui s’intéressent de plus en plus au maraîchage
hors-sol.
Engager un programme de formation pour ces experts afin qu’ils constituent le socle du
développement de la filière (prévu par PRO2M). Dans un deuxième temps ces experts
pourraient constituer un réseau « maraîchage de Côte d’Ivoire » qui serait animé par le
MINADER ou l’ANADER ou le CNRA dans un premier temps puis par l’interprofession quand
elle sera créée et fonctionnelle. Un atelier technique annuel de 1 ou 2 jours à l’occasion du
Salon de l’agriculture pourrait donner la visibilité à ce réseau
Réviser les cursus de formation en production végétale en créant des options horticulture
(niveau BEP, Technicien, TS et ingénieur)
Mobiliser les maraîchers experts – des producteurs alphabétisés et ayant des capacités de
communication - dans ces options pour les enseignements au champ
Renforcer le programme maraîchage du CNRA en constituant une équipe composée des
diverses disciplines ce qui implique au moins la création de 3 postes de chercheurs ou
ingénieurs et de l’équivalent en techniciens
Mise en place d’une coordination des recherches sur le maraîchage par une structure
indépendante de la recherche (MINADER ou ANADER) puis par la profession lorsqu’elle sera
organisée. Celle-ci permettra d’avoir une connaissance des projets de recherche en cours et
passés, des personnes impliquées et aura comme objectif de coordonner les actions de
recherche en maraîchage (Universités, au CNRA, privés et les ONG nationales et
internationales œuvrant dans le pays).
Afin d’asseoir la légitimité et la professionnalisation des acteurs de la filière maraîchage et de
coordonner leurs interventions, nous proposons d’étudier la faisabilité de la création d’un centre de
ressources dédié au maraîchage ou à l’horticulture (incluant l’arboriculture fruitière) qui pourrait se
nommer Centre de Développement de L’Horticulture. Ce centre de ressources serait à moyen terme
co-géré par la profession et les acteurs de la filière. A court terme, il pourrait être créé avec l’appui
d’un ou plusieurs programmes de développement du maraîchage (comme PRO2M, 2PAI-Bélier,
PROPARCOM …) et géré par le CNRA et l’ANADER. Il combinerait une offre de services
diversifiés comme par exemple :
- Un lieu de démonstration d’innovations techniques en production, conservation,
conditionnement et transformation des produits …;
- Un centre d’informations en maraîchage (bibliothèque, vidéos, connexion internet.) capable aussi
d’éditer des guides, manuels et fiches techniques
- Un centre de formation pratique (avec des parcelles, une diversité de systèmes d’irrigation) et
d’échanges à la disposition des projets mais surtout des coopératives de maraîchers et de
commerçantes ;
- Un lieu d’expérimentation pouvant accueillir des chercheurs des structures publiques mais aussi
des organismes privés ;
- Une capacité à fournir des petites quantités de semences pour que les Groupements puissent
conduire des essais d’évaluation variétale (en partenariat avec les obtenteurs publics et privé)
-
Le modèle économique52 d’un tel centre devra être défini rapidement dans les 2 premières années de
fonctionnement : location des salles et du centre d’hébergement, formations payantes, établissement
d’une taxe parafiscale53 sur les produits maraîchers dans les marchés de gros, contribution des
coopératives et Unions de coopératives.
52
En s’inspirant du modèle centre de ressource en agroforesterie promu par l’ICRAF
53
0,5% du prix d’un camion de tomates correspond entre 20 000 et 40 000 FCFA selon les périodes de l’année
127
128
E.4.3 Mettre à disposition des acteurs de la filière les savoirs et savoir-faire, les acquis des projets
et programmes
L’approche projet privilégiée par les Partenaires Techniques et Financiers de la Côte d’Ivoire rend
difficile la capitalisation des acquis des projets d’appui au maraîchage. Par exemple, il n’existe aucun
lieu de stockage (physique ou numérique) des documents techniques et économiques relatifs à la
production maraîchère en Côte d’Ivoire alors que des dizaines d’études voir plus d’une centaine ont
été réalisées depuis 30 ans (sans compter les nombreux rapports de fin d’études d’étudiants). Cette
déperdition d’informations est préjudiciable à la filière alors qu’il existe une diversité d’outils
numériques sous-valorisés par les services d’appui-conseil et les OP dont le coût de fonctionnement
est très peu élevé. Dans ce contexte nous recommandons :
- De faire un inventaire des ressources disponibles (fiche, manuel, poster, vidéo, enregistrement
radio…) utiles aux maraîchers et aux techniciens du conseil d’abord en Côte d’Ivoire puis dans la
sous-région et en suite les zones écologiquement similaires d’Afrique subsaharienne, d’Asie et
d’Amérique latine (mais attention à ne pas faire appliquer des références sahéliennes ou des
tropiques d’altitude aux zones humides et subhumides de Côte d’Ivoire) ;
- Développer une capacité nationale de valorisation des acquis des projets et programme de R-D et
de développement (cf. centre de ressources en maraîchage, supra) : éditeur/communicant,
experts en maraîchage ayant une longue expérience et qui se dédieraient à ce type de travail ;
- Développer une capacité nationale à produire des analyses techniques et économiques sur les
performances des innovations dans le domaine du maraîchage (dont la culture sous abri-serre, le
conditionnement en cageots rigides, le couplage crédit intrants/ vente groupée des légumes). Des
binômes agronome maraîchage et agro-économiste pourraient être constitués et mis en
concurrence dans le cadre d’appels d’offre restreints et organisés par les acteurs de la filière
(MINADER/ANADER dans un premier temps, interprofession ensuite) ;
- Mettre en place un cadre d’échanges ou un réseau d’experts en maraîchage (un atelier annuel,
forum web ou site internet d’information) qui faciliterait la circulation d’informations pertinentes
(validées par les experts) mais aussi leur mise en dispositions aux producteurs de base (en français
et langues locales de grande audience) par des émissions de radio régionales. Pour ces différentes
activités les maraîchers experts seraient mobilisés pour donner leurs points de vue sur la façon
de présenter les innovations ou plus simplement apporter leurs propres savoir-faire. La mise en
réseau des maraîchers experts selon quelques grandes zones agro-climatiques en utilisant les
réseaux sociaux ou applications comme WhatsApp. Un appui aux coopératives et groupement
pour l’usage des smartphones serait à prévoir (subvention pour l’acquisition du matériel de
communication, de vidéoprojecteurs …).
E.4.4 Besoin de renouveler les démarches d’appui et de mieux organiser les producteurs
maraîchers
Au stade actuel, l’appui à l’organisation des producteurs maraichers doit se focaliser sur le niveau de
base (groupement, coopérative) et ensuite dans un second temps, sur les niveaux supérieurs (Union,
faitière régionale ou nationale). Pour cela nous recommandons de renforcer les capacités des
producteurs et leur rôle dans la filière :
• En insérant dans les projets des dispositifs d’alphabétisation fonctionnelle en langue
vernaculaire. Cela permettra d’élargir la base de producteurs/productrices pouvant tenir des
postes de responsabilité ;
• En mobilisant les nouvelles technologies de l’information et de la communication dans les
formations des producteurs en particulier la vidéo qui rend plus attractives ces séances et
permet de découvrir ce qu’il se fait dans d’autres pays ;
128
129
• En mettant en débat dans les OP, les outils et méthodes d’intervention des projets afin de
responsabiliser54 les OP : Comment encadrer la politique du don ? Comment associer les OP
à la sélection des prestataires d’aménagement et les fournisseurs de matériels d’irrigation
CONCLUSION
La filière « maraichage » en Côte d’Ivoire se développe principalement du fait de l’augmentation de la
demande en légumes de la part des consommateurs urbains et dans une moindre mesure des
consommateurs ruraux. Pour cela le nombre de producteurs augmentent ainsi que les surfaces en
légumes dans les grands bassins de production, en périphérie des villes et dans une moindre mesure
dans des régions peu reconnues pour ce type de production. Ce développement tout azimut, tiré par
le marché, montre les capacités d’adaptation des producteurs ivoiriens. Il bénéficie aussi du regain
d’intérêt des jeunes pour cette activité. Le secteur privé de l’agrofourniture accompagne aussi cette
dynamique en proposant une large gamme de semences et de pesticides homologués mais plutôt dans
un objectif d’accroitre son chiffre d’affaire sans déployer des dispositifs de formation et de conseil
conséquents.
Les producteurs peuvent trouver un appui dans ce domaine auprès de l’ANADER ; mais cette structure
ne dispose pas de techniciens et cadres spécialisés en maraîchage, ni des moyens suffisants pour
intervenir à la demande. L’appui majeur apporté aux producteurs vient des projets mais répond à leur
logique de fonctionnement : appuis de courte durée, intervention pour un grand nombre mais sans
gage de qualité, multiplicités des intervenants, peu d’actions de renforcement de capacités techniques
et organisationnelles dans la durée.
Cette situation s’explique premièrement par la fait que la filière « maraîchage » n’est pas une filière
stratégique pour la Côte d’Ivoire car elle n’est pas en mesure d’exporter des légumes. De plus les
commerçants peuvent facilement importer des légumes des pays voisins (traité CEDEAO de libre-
échange) ou plus lointains (accords commerciaux). Deuxièmement les producteurs maraîchers ne
constituent pas une force organisée qui pourraient peser sur les choix des décideurs publics et des
agences de coopération pour le développement.
Dans ce contexte et bien que la demande globale en légumes augmente, le risque est que les
producteurs maraîchers des pays voisins et lointains prennent encore plus de parts de marché en Côte
d’Ivoire et donc qu’ils produisent pour exporter toujours plus de légumes de qualité acceptable pour
les consommateurs ivoiriens. Le développement de la filière ivoirienne implique donc que les
maraîchers améliorent leurs performances technico-économiques, c’est-à-dire produisent à moindre
coût et/ou améliorent leurs rendements tout en fournissant des légumes de bonne qualité sanitaire et
gustative.
54
Pour certains responsables d’OP, les dons entretiennent la culture de l’assistanat alors qu’il faudrait plutôt
développer la culture d’entreprenariat et l’autonomie des producteurs
129
130
Pour atteindre cet objectif d’accroissement de la production nationale de légumes, les maraîchers
doivent s’organiser entre eux, engager des relations de confiance avec l’aval et l’amont mais aussi
bénéficier d’un appui plus conséquent de la part des services publics. Cet appui ne doit pas se limiter
à la mise à disposition de périmètres maraichers clé en main et pourvus d’équipements d’exhaure de
l’eau et d’irrigation. Il doit aussi comprendre un accompagnement dans la durée dans différents
domaines : formation de base, appui à la gestion durable des sols et des infrastructures, formation en
gestion collective, appui technique pour la production, appui organisationnel pour la mise en marché
et l’acquisition des intrants...
Sans revenir sur les différentes contraintes largement développées dans ce rapport, il apparait qu’une
des difficultés majeures de la professionnalisation de la filière est la diversité des unités de production
(encadré : les cinq types d’unités de production ou de maraichers). Cette diversité implique soit de
disposer d’un ensemble de dispositifs et méthodes d’intervention adaptés à chaque type de
producteur (ce qui peut être complexe et coûteux), soit de faire des priorités dans la programmation
des appuis. Quoiqu’il en soit, nous considérons risquer de s’adresser qu’à une ou deux catégories de
producteurs (par exemple les plus dotées en capitaux). La professionnalisation de la filière pourrait
s’adresser à 3 grandes catégories de maraîchers :
- Les producteurs spécialisés en maraichage pluvial pour les amener à produire toute l’année
en les aidant à sécuriser leur accès à l’eau d’irrigation ;
- Les maraîchers spécialisés déjà bien engagés dans la culture irriguée en allongeant et en
décalant les périodes de production surtout en fin de saison sèche (là encore l’accès sécurisé
à l’eau est crucial)
Il parait toutefois difficile de supprimer l’appui aux maraîchers urbains/périurbains et surtout aux
femmes très investies collectivement ou individuellement dans le maraichage même s’ils/elles ne
produisent que de petites quantités et s’adonnent à d’autres activités rémunératrices. Dans ces
situations, le maraichage créé du lien social et contribue à résoudre beaucoup de problèmes sociaux
dans les couches les plus pauvres de la société.
130
131
1- Les maraîchers spécialisés ou s’adonnant à la polyculture de pleine terre sont dans les bas-fonds
aménagés ou non, sur de petites surfaces (<0,2 ha/an). Il s’agit de femmes, de jeunes ou
d’allochtones, en général locataires, en général urbains ou périurbains. Ces maraîchers sont
présents dans le Sud-est, le Sud, le Centre et dans toutes les grandes villes (Abidjan, Bouaké,
Yamoussoukro, Korhogo, etc.). Dans le Nord, les superficies par exploitant sont encore plus
petites (<0,1 ha). L’irrigation se fait encore souvent à l’arrosoir. En zones urbaine et péri-urbaine,
ces producteurs sont en insécurité foncière due à l’urbanisation rapide des terres non inondables
ou pouvant facilement être remblayées.
2- Les maraîchers spécialisés de pleine terre dont la superficie annuelle en maraichage est
d’environ 2 ha. Ces exploitations ont un équipement d’irrigation avec motopompe (Centre, Sud,
Nord) et privilégient les intrants et les semences vendus par les agro-fournisseurs. A proximité
des villes, ils sont aussi en insécurité foncière. Ils ont aussi des cultures vivrières et quelques
cultures pérennes dans le Centre.
3-Les producteurs pratiquant le maraichage pluvial le combinent généralement avec des cultures
vivrières traditionnelles. Les superficies maraîchères sont plus importantes (0,5 – 3 ha). Ils ont
parfois aussi un petit élevage, un peu de cultures pérennes dans le Sud et aussi une activité de
maraichage de bas-fond de contre –saison, avec arrosage à l’arrosoir. Les terres sont exondées et
non irrigués. Ce type est présent dans le Sud-est, le Centre et le Nord.
4-Les maraîchers bénéficiant d’aménagements collectifs, en général éloignés de la ville. Ils sont
équipés de systèmes d’irrigation avec motopompe collective ou individuelle. Dans le Centre, les
superficies individuelles sont < 0,2 ha/an, les maraîchers combinent cette activité avec des cultures
traditionnelles vivrières, comme dans le Nord où les superficies sont, en général, supérieures à 2
ha/an. Ce type comprend aussi des maraichères dans la région Nord qui produisent collectivement
sur des petites surfaces (<< 0,1 ha/an/personne)
5-Les agro-entrepreneurs maraîchers des différentes régions du pays. Soit ils combinent du
maraîchage irrigué de pleine terre avec d’autres activités dont le maraichage sous abri hors-sol, soit
ils se spécialisent en maraichage hors sol sous abri serre. Ils disposent de sources de revenu non
agricoles qui leur permettent d’investir sans l’appui de projets. Les expériences réussissent plus ou
moins en fonction des moyens mis en œuvre pour assurer un équipement complet (abris, pompage,
filtration, irrigation, pépinière) et un fonctionnement rigoureux par le recrutement d’un technicien
compétent et une bonne gestion des salariés. Les superficies commencent à 1000m², jusqu’à 1 ha.
Enfin, vu la diversité des contraintes caractérisées au niveau régional et national, il convient de les
hiérarchiser afin d’orienter les choix prioritaires d’intervention. Cet exercice n’est pas du ressort de
consultants mais des décideurs publics en concertation avec les acteurs de la filière. Néanmoins, et en
reprenant le dicton « il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs », nous recommandons
d’accorder plus de moyens au renforcement des compétences à tous les niveaux (recherche,
formation, R-D, services de vulgarisation, appui aux OP, concertation entre producteurs, grossistes et
agro-fournisseurs) (le software, figure suivante) et d’investir avec prudence dans l’accroissement des
131
132
surfaces de périmètres aménagés et dans l’installation d’abri serres de culture hors sol du fait de leurs
coûts très élevés (le hardware).
Il s’agit donc de trouver le bon équilibre entre ces renforcements de capacités et d’interventions des
services d’appui, et les investissements matériels pour la production et la commercialisation des
cultures maraîchères.
132
133
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136
137
Personnes rencontrées
Jean-Paul LORGN, FIRCA Abidjan, Directeur Département Cultures Annuelles et Ressources Animales
(DCARA), Coordonnateur du PRO2M, [email protected] +225 07 31 11 88
EDI Edi Janequin, FIRCA Abidjan, Chargé des programmes Transformation et Valorisation des Produits
Agricoles, Membre de PRO2M [email protected] 07 89 97 78 / 40 95 95 00 / 22 52 81 81
BERI Bi Djo Michel, FIRCA, Expert Génie Rural, Membre du PRO2M, [email protected] 22 52 81 81 / 47
01 54 40
Bertin ANON, directeur des productions vivrières et de la sécurité alimentaire, MINADER, Abidjan
[email protected] Tel : 225 20 22 24 81
Bah BONI, Chef Service Agréments Phytosanitaires, MINADER, Abidjan, 225 20 24 23 23
Mme APHING-KOUASSI Nicole, DGA, ANADER [email protected] 07 08 51 52
COULIBALY AMADOU, Directeur des Productions vivrières, ANADER
KANGOU Ignace, CDGR, ANADER, [email protected] 01 05 03 31
Mme AFIAN, ANADER, CNFH [email protected] 01 37 90 34
Yandaki KOUAME, secrétaire exécutif ADCVI, 225 05 09 45 44 – [email protected]
KESSE Fabrice, Ingénieur agronome, [email protected] 47 81 83 96
Mme ZEI Pauline, Directrice INADES Formation Côte d’Ivoire, 07 86 73 74 [email protected]
SIKELI Jean Paul, INADES-FORMATION, Abidjan 05 92 50 06
Bernard GNENYE ADOU, Directeur Central, OCPV, Tel : 225 24 39 18 74 / 08 81 08 16
Noël KOUABLE, OCPV
GNENYE Adou Bernard, Directeur Central, OCPV Abidjan , [email protected]
[email protected] 08 81 08 16 / 05 04 10 05
N’GUESSAN N’Goran Joel, Chef d’Exploitation au 48 79 84 91
AGUIA Joseph, Chef d’exploitation, Domaine de BADO Moussa Bonahouin (Akoupé) 01 29 59 42 /
44 46 95 5924/10/2018
BONI Narcisse, ANADER, Agnibilékrou, Technicien Spécialisé en Cultures pérennes/Anacarde
Mme AWE Adjoua Blandine, ANADER, NIANDA, ADR 40 29 98 05
KABLAN Adolphe, Coopérative des Producteurs des Vivriers et Maraîchers de Nianda (PROVIMANI)
Nianda KOUAKOU, Président, Coopérative des Producteurs des Vivriers et Maraîchers de Nianda
(PROVIMANI)
Mme GORE Brigitte, ANADER, Bongouanou, Cheffe de Zone 57 41 41 00 / 01 05 08 49
KONE Adama, Technicien Spécialisé en Cultures pérennes, ANADER, Bongouanou,
ABI Roméo, Technicien Spécialisé en Organisation Professionnelle Agricole, ANADER, Bongouanou
GOULIVAS-CALLE, coordinatrice PROPACOM, Tel 07 52 94 95
N’TAME BIAN Isaac, Niakara au 48 98 99 03 / 45 81 13 27
KONE Bazoumana, Ingénieur Marketing, Chef de Zone, ANADER, Yamoussoukro, [email protected]
[email protected] 30 64 35 44 / 02 50 75 05 /59 09 44 92
Mme ACKA Valérie, Coordonnatrice, 2PAI-Bélier, Yamoussoukro, [email protected]
Mme Hélène ASSOUMAN, Présidente, AFAGRIB Yamoussoukro, [email protected]
KOUADIO Kan, Plateforme de commercialisation des produits maraîchers de Yamoussoukro,
Yamoussoukro, Agro-Entrepreneur, Président de la Plateforme [email protected]
137
138
07 51 32 83/ 02 26 65 43 /27/10/2018
TOURE Zié Abdoulaye, Site hors sol de Tafiré, Chef d’exploitation hors-sol
KRAH N’Guessan, ANADER, Bouaflé, Chef de Zone, [email protected] 57 58 32 44 / 02 03 53 47
KETTE Yapi, ANADER Bouaflé, Technicien Spécialisé en Cultures Annuelles et Productions Végétales
Mme N’GORAN née BROU Oussou, COOP-GA-COVIMA Bouaflé, Présidente du Conseil
d’Administration (PCA) [email protected] 3068 83 93 / 07 71 61 97 / 46 81 58 33
Kifori OUATTARA, agronome semences du BFCD
Sériba TUO, directeur Bureau de formation et de conseil au développement, Korhogo, www.bfcd.fr.tc
[email protected] – Tel : 225 08 62 36 66
YEO YACOUBA, Responsable ONG CHIGATA Korhogo, 07 32 17 81 / 01 27 55 50
OUATTARA MAMADOU, Chef de Zone ANADER Ferké, 07 75 12 37
N’GUESSAN Kouadio Alexis, Directeur BVP, 08 08 38 22
TRA BI Goli Matthieu, Responsable région du Poro BVP, 47 32 40 48
KONE Elisé, Chef d’Exploitation du site hors sol de Karakoro, 58 78 17 70
SEKONGO à Nakourgokaha (Sinematiali) , chef d’exploitation au 59 60 60 73
N’GUESSAN SERGES, Technicien ADCVI chargé de l’appui conseil sur le périmètre de Nangorigoh, 57
53 73 88
Mireille GNAHORE épouse COULIBALY, Directrice ORCHIDEE HORIZON, Toumodi,
[email protected] 08 19 34 83 / 04 84 09 71
ABOUBAKAR Karim, INVESTIV Côte d’Ivoire, Toumodi, Directeur 88 35 21 86
KOFFI Vincent, AGROVISION, Elibou PK80, Technicien Agricole 48 44 00 08
BERTE Brahima, Coopérative des Maraîchers de Songon, Président 08 69 92 59
YOUAN Bi Lei Alexis, COMAGOA Adjamé, Directeur Général, [email protected] 20 38 01 56 /
05 33 95 77
Alban KOUASSI, SEMIVOIRE, Zone 4C Marcory, Responsable du Développement
[email protected] 21 24 38 02 / 21 35 86 13 / 58 92 79 92
Mme Sylviane Elodi KRAMO, Délégation Union Européenne, Plateau, Cellule de Coordination de la
Coopération Côte d’Ivoire-Union Européenne [email protected] 20 30 33 00 / 08 99 12 39
Mme TANGUILA Nabindou, Délégation Union Européenne, Plateau, Cellule de Coordination de la
Coopération Côte d’Ivoire-Union Européenne 07 10 40 23
N’GORAN Antoine KOUADIO, Délégation Union Européenne, Plateau, Cellule de Coordination de la
Coopération Côte d’Ivoire-Union Européenne 07 92 57 04
Equipes 1 et 2
Lundi 22 octobre 2018
Réunion de concertation FIRCA consultants au FIRCA
Entretiens au MINADER (Direction des productions vivrières et de la sécurité alimentaire) et à la DG de
l’ANADER
138
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139
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Equipes 1 et 2
Lundi 29 octobre 2018
Visite d’un périmètre maraîcher péri-urbain à Songon
Visite du marché d’Adjamé Roxi
Entretien avec le directeur la coopérative COMAGOA gérante du marché Adjama Roxi
Visite d’un supermarché Casino à Cocody
Entretien avec un agent du magasin SEMIVOIRE Marcory
Réunion de travail au bureau CIRAD, préparation de la restitution
140