Théorie Des Semigroups
Théorie Des Semigroups
Théorie Des Semigroups
Département de Mathématiques
15 juin 2020
TABLE DES MATIÈRES
1 Introduction 3
2 Rappels 4
2.1 Opérateurs linéaires bornés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
2.2 Différents types de Convergence dans L(E, F ) . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
2.2.1 Convergence en norme (uniforme) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
2.2.2 Convergence ponctuelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
2.3 Théorèmes de l’application ouverte et du graphe fermé . . . . . . . . . . . . 8
2.4 Opérateurs inversibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
2.5 L’opérateur exponentiel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
2.6 Résolvante et spectre d’opérateurs linéaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
2.7 Fonctions à valeurs dans un espace de Banach (Fonctions abstraites) . . . . . 12
2.7.1 Limite et continuité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
2.7.2 Différentiabilité et analycité des fonctions abstraites . . . . . . . . . . 13
2.7.3 Intégration des fonctions abstraites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
2.8 Espaces Lp . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
3 Semi-groupes 18
3.1 Semi-groupes d’opérateurs bornés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
3.2 Semi-groupes fortement continus (C0 -semi-groupes) . . . . . . . . . . . . . . 28
3.3 Théorème de Hille-Yosida . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
1
TABLE DES MATIÈRES
2
CHAPITRE 1
Introduction
3
CHAPITRE 2
Rappels
Dans le but de faciliter à l’étudiant la lecture et la compréhension des preuves des princi-
paux théorèmes du chapitre 3, nous rappelons ici quelques notions de l’analyse fonctionnelle,
en particulier, des opérateurs, mais sans aller loin dans les détails, vu que ces notions ont
été déjà enseignées dans des modules prérequis.
Soit (E, k · kE ) et (F, k · kF ) deux espace vectoriels normés sur le même corps K = R ou
C, et soit A : E −→ F un opérateur. Pour x ∈ E, nous adoptons la notation Ax au lieu de
A(x), pour son image. On note par D(A) le domaine de définition de A, i.e.,
¦ © ¦ ©
D(A) = x ∈ E : Ax ∈ F = x ∈ E : Ax existe .
Définition 2.1.1. L’opérateur A : D(A) ⊂ E −→ F est dit linéaire si D(A) est un sous
espace vectoriel de E et pour tous x, y ∈ D(A), et tous α, β ∈ K, A(αx + βy) = αAx + βAy.
¦ © ¦ ©
Im(A) = Ax : x ∈ D(A) et ker(A) = x ∈ D(A) : Ax = 0 .
Définition 2.1.2. L’opérateur linéaire A : E −→ F est dit borné, si pour tout sous ensemble
borné M de E, A(M ) est un borné de F .
Par cette dernière proposition, on voit bien que les notions d’opérateur linéaire borné et
d’opérateur linéaire continu sont équivalentes.
On note par L(E, F ) l’ensemble des opérateurs linéaires continus (bornés) définis sur E
à valeurs dans F . Si E = F , on note cet espace L(E) au lieu de L(E, E) et si F = K, on
note E 0 = L(E, K), appelé le dual de E.
kAxkF ¦ ©
sup kAxkF = sup kAxkF = sup = inf c ≥ 0 : kAxkF ≤ ckxkE ∀x ∈ E ,
x∈B E x∈SE x∈E\{0} kxkE
et
kAxkF ≤ kAkL kxkE ∀x ∈ E.
5
2.2. Différents types de Convergence dans L(E, F )
Définition 2.2.1. On dit que (An ) converge en norme (ou uniformément) vers A sur E si
Définition 2.2.2. On dit que (An ) converge ponctuellement vers A si pour tout x ∈ E,
(An x) converge fortement dans F vers Ax, ie., pour tout x ∈ E
lim kAn x − AxkF = lim k(An − A)xkF ≤ lim kAn − AkL kxkE = kxkE lim kAn − AkL = 0.
n→∞ n→∞ n→∞ n→∞
Proposition 2.2.1. Si (F, k · kF ) est un espace de Banach, alors (L(E, F ), k · kL ) l’est aussi.
c’est à dire, qu’à partir d’estimations ponctuelles pour les opérateurs Aj , on peut en dégager
une estimation uniforme.
Preuve.
Soit k ∈ N et soit
¦ ©
Ok = x ∈ E : sup kAi xkF > k ,
i∈J
i.e., x ∈ Ok . Montrons la deuxième inclusion. Soit x ∈ Ok , c’est à dire, supi∈J kAi xkF > k,
ceci implique l’existence de δ > 0 tel que supi∈J kAi xkF > k + δ. Par la caractérisation de la
borne supérieure, nous avons
S
en particulier, pour ε = δ, nous obtenons kAiδ xkF > k, i.e., x ∈ Vikδ ⊂ Vik .
i∈J
D’autre part, pour tout i ∈ J et pour tout k ∈ N, Vik est un ouvert de E. En effet, soit
gi : E −→ R
On sait que les applications Ai et y 7→ kykF sont continues, et don leur composition gi et
continue, de plus remarquons que
¦ © ¦ ©
Vik = x ∈ E : gi (x) > k = x ∈ E : gi (x) ∈]k, +∞[ = gi−1 (]k, +∞[),
comme ]k, +∞[ est un ouvert de R, on conclut que Vik est un ouvert de E et par suite
S
Ok = Vik est un ouvert de E.
i∈J
Montrons maintenant qu’il existe un indice k0 ∈ N tel que Ok0 n’est pas dense dans E.
7
2.3. Théorèmes de l’application ouverte et du graphe fermé
Supposons le contraire, i.e., pour tout k ∈ N, Ok est dense dans E, par le théorème de
T T T
Baire1 , Ok = E, il s’ensuit que Ok 6= ∅. Soit alors, x0 ∈ Ok , ce qui est équivaut à
k k k
et ceci implique que supi∈J kAi x0 kF = +∞, ce qui contredit notre hypothèse. On conclut
alors, l’existence de k0 ∈ N tel que Ok0 6= E.
Ok0 6= E ⇐⇒ ∃ x1 ∈ E et x1 ∈
/ Ok0 ⇐⇒ ∃ x1 ∈ E et ∃ r1 > 0 tel que BE (x1 , r1 ) ∩ Ok0 = ∅,
Soit A : D(A) ⊂ E −→ F , avec D(A) un sous espace vectoriel de E. On note par Gr(A)
le graphe de A, i.e., le sous ensemble de E × F défini par
¦ ©
Gr(A) = (x, Ax) : x ∈ D(A) .
1
Théorème de Baire. Soit (E, d) un espace métrique complet. Alors toute intersection dénombrable
d’ouverts denses dans E est dense dans E.
8
2.4. Opérateurs inversibles
Définition 2.3.1. On dit que A est un opérateur fermé si son graphe est fermé dans E × F .
Autrement dit, pour toute suite (xn , yn )n ⊂ Gr(A) tel que xn −→ x et yn = Axn −→ y nous
avons x ∈ D(A) et y = Ax.
Le théorème suivant concerne les opérateurs linéaires définis sur E tout entier.
Théorème 2.4.1. Si F est un espace de Banach et A ∈ L(E, F ) est bijectif, alors A−1 est
continu.
Preuve.
Conséquence du théorème de l’application ouverte. ¤
A0 = I, A1 = A, A2 = AA, . . . , An = AAn−1 ,
avec
D(An ) = {x ∈ D(An−1 ) : An−1 x ∈ D(A)} ∀n ≥ 1.
9
2.5. L’opérateur exponentiel
Preuve.
Nous avons
∞
∞ ∞
X n
X X
A
≤ kAn kL ≤ kAknL ,
n=0 L n=0 n=0
P∞ n
comme kAkL < 1, alors la série numérique n=0 kAkL est convergente, et par suite la série
P∞
n=0 An est absolument convergente, et donc elle est convergente puisque L(E) est complet.
On conclut alors que limn→∞ An = 0. D’autre part, nous avons
∞
P
par suite, (I − A) est inversible et (I − A)−1 = An . ¤
n=0
Remarque 2.4.1. Par la proposition précédente, il est clair que si kI − AkL < 1, alors A
∞
P
est inversible et A−1 = (I − A)n .
n=0
Preuve.
Par la formule du binôme de Newton, nous avons par un simple calcul
∞
X 1 X∞
1 Xn
n! X∞ X n
1 k 1
eA+B = (A + B)n = Ak B n−k = A B n−k
n=0 n! n=0 n! k=0 k!(n − k)! n=0 k=0 k! (n − k)!
X
0
∞
1 k 1 X∞
1 k 1 2 X∞
1 k 1 n X∞
1 k
= A B + A B + A B + ... + A B + ...
k=0 k! 1! k=0 k! 2! k=0 k! n! k=0 k!
= eA (eB ) = eA eB .
¦ ©
σ(A) = λ ∈ C : (A − λI) n’est pas inversible .
¦ ©
ρ(A) = λ ∈ C : (A − λI) est inversible et (A − λI)−1 ∈ L(E) .
Si A ∈ L(E), alors (A−λI) ∈ L(E) et donc si (A−λI) est inversible, son inverse appartient
aussi à L(E), dans ce cas l’ensemble résolvant de A sera donné par
¦ ©
ρ(A) = λ ∈ C : (A − λI) est inversible ,
11
2.7. Fonctions à valeurs dans un espace de Banach (Fonctions abstraites)
RA : ρ(A) −→ L(E)
λ 7−→ RA (λ) = (A − λI)−1
s’appelle la résolvante de A.
1. ρ(A) est un ensemble ouvert, et donc σ(A) est fermé, et RA est une application ana-
lytique sur ρ(A).
Théorème 2.6.2. Soit E un espace de Banach complexe et soit A ∈ L(E). Alors l’ensemble
¦ ©
B = λ ∈ C : |λ| > rσ (A) ⊂ ρ(A),
tions abstraites)
En Analyse, nous sommes bien familiariasés avec les fonctions définies sur R à valeurs
réelles, néanmoins, nous sommes souvent amenés à travailler avec des fonctions à valeurs dans
un espace de Banach, appelées fonctions abstraites. Dans cette section, on expose quelques
propriétés de ces fonctions, en particulier leurs dérivation et intégration.
Soit (E, k · kE ) un espace de Banach et J un intervalle de R, et considérons une application
u : J −→ E.
12
2.7. Fonctions à valeurs dans un espace de Banach (Fonctions abstraites)
Définition 2.7.2 (Continuité). On dit que u est continue au point t0 si lim u(t) = u(t0 ),
t→t0
i.e.,
∀ε > 0, ∃ δ > 0, ∀t ∈]t0 − δ, t0 + δ[, ku(t) − u(t0 )kE < ε.
Définition 2.7.3 (Dérivée). On dit que u est dérivable au point t0 ∈ J (resp. dérivable à
droite de t0 ) (resp. dérivable à gauche de t0 ) si
existe dans l’espace E. Dans ce cas, cette limite qui est un élément de E, est appelée dérivée
(resp. dérivée à droite) (resp. dérivée à gauche) de u au point t0 et est notée par u0 (t0 ) =
du d+ u d− u
(t )
dt 0
(resp. dt
(t0 )) (resp. dt
(t0 )).
Ici la notation h ↓ 0 veut dire que h tend vers 0 et h > 0, et h ↑ 0 veut dire que h tend vers
0 et h < 0.
Remarque 2.7.1. Comme u0 (t) ∈ E, de la même manière, on peut définir les dérivées
dun
d’ordre supérieur de u, qu’on note u(n) (t0 ) = dt
(t0 ), n ≥ 1.
Définition 2.7.4. Si u est définie sur un certain domaine D du plan complexe C à valeurs
dans E. Alors u est dite analytique dans ce domaine si elle est dérivable en tout point de D.
Définition 2.7.5. On dit que la fonction θ : J −→ E est une fonction simple si elle est
mesurable, et prend un nombre fini de valeurs.
n
P
Remarque 2.7.2. La fonction simple θ peut s’écrire sous la forme θ = xk 1Jk , où les
k=1
éléments xk ∈ E sont distincts deux à deux, les ensembles Jk ⊂ J sont mesurables et deux à
13
2.7. Fonctions à valeurs dans un espace de Banach (Fonctions abstraites)
deux disjoints, et pour tout k fixé, nous avons Jk = θ−1 ({xk }).
1Jk est la fonction caractéristique de Jk .
Définition 2.7.7. On dit que la fonction f : J −→ E est mesurable s’il existe une suite de
fonctions simples (θn )n , qui converge µ-presque partout vers f .
Définition 2.7.8. Une fonction mesurable f : J −→ E est dite intégrable au sens le Bochner,
s’il existe une suite de fonctions simples (θn )n qui converge vers f µ-presque partout et tel
que
Z
lim kθn (x) − f (x)kE dx = 0.
n→∞ J
R R
Dans ce cas, on note J f (x)dx = lim θn (x). La suite (θn ) est appelée suite approximante
n→∞ J
pour f .
R
Remarque 2.7.4. La valeur n→∞
lim J θn (x) est indépendante de la suite approximante (θn )n .
Proposition 2.7.1. Soit f : J −→ E une fonction mesurable, alors f est intégrable au sens
R
de Bochner si et seulement si J kf (x)kE dx < +∞.
1 Z t0 +h
lim f (s)ds = f (t0 ).
h↓0 h t0
14
2.8. Espaces Lp
Nous terminons cette section par cette propriété de l’intégrale d’un opérateur à valeurs
dans l’espace de Banach L(E, F ), E et F étant deux espaces de Banach.
Soit A : [a, b] −→ L(E, F ) un opérateur intégrable au sens de Bochner. Pour tout t ∈
[a, b], on pose
Z t
B(t) = A(s)ds.
a
Si pour tout x ∈ E, l’opérateur t 7−→ A(t)x est continu, alors pour tout t ∈ [a, b], B(t) est
défini par
Z t
B(t)x = A(s)x ds ∀x ∈ E.
a
Si l’opérateur t 7−→ A(t) est continu, alors pour tout t ∈ [a, b], B(t) ∈ L(E, F ).
2.8 Espaces Lp
¦ Z ©
p n n
L (R ) = f : R −→ R : f est mesurable et n
|f (x)|p dx < +∞ ,
R
et
¦ ©
L∞ (Rn ) = f : Rn −→ R : f est mesurable et ∃ c ≥ 0 tel que |f (x)| ≤ c p.p .
et
¦ ©
kf k∞ = inf c ≥ 0 : |f (x)| ≤ c p.p ∀f ∈ L∞ (Rn ).
Définition 2.8.1. On définit Cc (Rn ) comme l’espace des fonctions réelles continues à sup-
port compact, i.e.,
¦ ©
Cc (Rn ) = f : Rn −→ R : f est continue et Supp(f ) est compact ,
¦ ©
Supp(f ) = x ∈ Rn : f (x) 6= 0 .
15
2.8. Espaces Lp
Théorème 2.8.2. L’espace Cc (Rn ) est dense dans Lp (Rn ) pour tout p ∈ [1, +∞[, c’est à
dire que toute fonction de Lp (Rn ) on peut l’approximer par une fonction continue à support
compact.
Preuve.
Commençons par montrer la relation (2.8.1) pour une fonction continue à support com-
pact. Soit ϕ ∈ Cc (R), et pour tout h ∈ R, considérons la fonction Th : Lp (R) −→ Lp (R) tel
que pour tout f ∈ Lp (R), Th (f ) est définie, pour tout x ∈ R, par Th (f )(x) = f (x + h).
Comme ϕ est à support compact, il existe r > 0 tel que Supp(ϕ) ⊂ B(0, r) (car un compact
de R est borné fermé). Donc, pour tout h ∈ R tel que |h| < 1, supp(Th (ϕ)) ⊂ B(0, r + 1)
(car x ∈ supp(Th (ϕ)) ⇒ x + h ∈ Supp(ϕ)). D’autre part, comme ϕ est continue, on a pour
tout x ∈ B(0, r + 1)
p p p
|ϕ(x + h) − ϕ(x)|p ≤ |ϕ(x + h)| + |ϕ(x)| ≤ 2 sup |ϕ(y)| = 2kϕkC ,
y∈R
et
lim |ϕ(x + h) − ϕ(x)|p = |ϕ(lim (x + h)) − ϕ(x)|p = 0.
h→0 h→0
Ici, k · kC est la norme de la convergence uniforme (norme de l’epace de Banach des fonctions
réelles continues C(R)).
Maintenant, on suppose que ϕ ∈ Lp (R), par le théorème de densité, on sait que pour tout
ε > 0, il exsite ϕε ∈ Cc (R) tel que kϕ − ϕε kp < 2ε , et donc par le changement de variable
ε
(y = x + h), on trouve facilement que kTh (ϕ) − Th (ϕε )kp < 2
, et par la première étape
limh→0 kTh (ϕε ) − ϕε kp = 0. Par conséquent, utilisant l’inégalité de Minkowski, nous avons
lim kTh (ϕ) − ϕkp ≤ lim kTh (ϕ) − Th (ϕε )kp + kTh (ϕε ) − ϕε kp + kϕ − ϕε kp
h→0 h→0
ε étant arbitraire, on conclut que limh→0 kTh (ϕ) − ϕkp = 0. D’où le résultat cherché. ¤
16
2.8. Espaces Lp
Théorème 2.8.4. Soit p ∈ [1, +∞[. Alors l’espace C ∞ (Rn )∩L∞ (Rn ) est dense dans Lp (Rn ).
Ici, C ∞ (Rn ) est l’espace des fonctions f : Rn −→ R qui sont indéfiniment différentiables.
17
CHAPITRE 3
Semi-groupes
Dans toute la suite, on note par E un espace de Banach muni de sa norme k · kE , par
L(E) l’espace des opérateurs linéaires continus (opérateurs bornés) définis de E à valeurs
dans E, muni de sa norme k · kL . Par I, on note l’identité de E, et par B E sa boule unité
fermée. La composition de deux opérateurs A, B ∈ L(E) sera notée AB au lieu de A ◦ B.
Définition 3.1.1. Soit T : [0, +∞[−→ L(E) un opérateur. On dit que la famille {T (t) :
t ≥ 0} est un semi-groupe si les propriétés suivantes sont satisfaites :
1. T (0) = I ;
Si de plus
lim T (t) = I, i.e., lim kT (t) − IkL = 0, (3.1.1)
t↓0 t↓0
18
3.1. Semi-groupes d’opérateurs bornés
Exemple 3.1.1. Soit a ∈ R et considérons l’opérateur T : [0, +∞[−→ L(R), où pour chaque
t ≥ 0, l’opérateur linéaire continu T (t) est défini par
T (t) : R −→ R
x 7→ T (t)x = x eat .
Nous avons pour chaque x ∈ R, T (0)x = x = I(x), et donc T (0) = I. D’autre part, pour
tous s, t ∈ [0, +∞[, et pour chaque x ∈ R,
c’est à dire T (t + s) = T (t)T (s). Par suite {T (t) : t ≥ 0} est un semi-groupe. Montrons
qu’il est uniformément continu. En effet, nous avons
lim kT (t) − IkL = lim sup |T (t)x − Ix| = lim sup |xeat − x| ≤ lim |eat − 1| = 0.
t↓0 t↓0 t↓0 t↓0
x∈B R x∈B R
Exemple 3.1.2. Soit B ∈ L(E) et soit T : [0, +∞[−→ L(E), tel que pour tout t ≥ 0,
P∞ (tB)k
T (t) = etB , où etB = k=0 k!
. Alors {T (t) : t ≥ 0} est un semi-groupe uniformément
continu. En effet, nous avons par la linéarité de B, pour tous x, y ∈ E, α, β ∈ R,
∞ k
X t
T (t)(αx + βy) = etB (αx + βy) = B k (αx + βy)
k=0 k!
∞
X k X∞ k
t k t k
= α B (x) + β B (y)
k=0 k! k=0 k!
= αetB (x) + βetB (y) = αT (t)x + βT (t)y.
et donc
∞ k
∞ k
X t k
X t
kT (t)xkE =
B (x)
≤ kBkkL kxkE = etkBkL kxkE .
k=0 k! E k=0 k!
19
3.1. Semi-groupes d’opérateurs bornés
Par conséquent, T (t) ∈ L(E) pour tout t ≥ 0. D’autre part, pour tout x ∈ E, nous avons
T (0)x = e0B (x) = x = I(x), d’où, T (0) = I, et pour tous s, t ∈ [0, +∞[
On conclut que {T (t) : t ≥ 0} est un semi groupe. Montrons maintenant, qu’il est unifor-
mément continu. Nous avons pour tout t ≥ 0,
∞ k
∞ k
∞ k
X t
X t
X t
kT (t) − IkL =
Bk − I
=
B k
≤ kBkkL
k=0 k! L k=1 k! L k=1 k!
∞ k−1 ∞
X t X tk−1
= tkBkL kBkk−1
L ≤ tkBkL kBkk−1
L = tkBkL etkBkL ,
k=1 k! k=1 (k − 1)!
par conséquent,
lim kT (t) − IkL ≤ lim tkBkL etkBkL = 0.
t↓0 t↓0
D’où le résultat.
et soit T : t ∈ [0, +∞[7→ T (t) ∈ L(E) tel que pour tout t ≥ 0, l’opérateur T (t) est défini par,
T (t) : ϕ ∈ E 7→ T (t)ϕ ∈ E avec
T (t)ϕ : R −→ R
Montrons que {T (t) : t ≥ 0} est un semi-groupe. Il clair que pour tout t ≥ 0, T (t) est un
opérateur linéaire continu. D’autre part, pour tout ϕ ∈ E et pour tout s ∈ R, (T (0)ϕ)(s) =
ϕ(s), ceci implique que T (0)ϕ = ϕ, et donc T (0) = I. Pour voir la deuxième propriété,
soient t, t0 ∈ [0, +∞[, alors pour tout ϕ ∈ E et pour tout s ∈ R, nous avons
− p1
< t− p si s ∈ [0, t]
ϕt (s) = t 1[0,t] (s) = >
: 0 sinon.
20
3.1. Semi-groupes d’opérateurs bornés
Nous avons
Z 1 Z t 1
p 1 p 1
kϕt kE = |ϕt (s)|p ds = (t− p )p ds = t = 1, (3.1.2)
R 0 t
i.e., ϕt ∈ B E . D’autre part,
Z 1 Z +∞ 1
p p p p
kT (t)ϕt − ϕt kE = |T (t)ϕt (s) − ϕt (s)| ds = |ϕt (t + s) − ϕt (s)| ds
R −∞
Z 0 Z t 1
p 1
= |ϕt (t + s)|p ds + |ϕt (s)|p ds = 2p . (3.1.3)
−t 0
1
sup kT (t)ϕ − ϕkE ≥ kT (t)ϕt − ϕt kE = 2 p ,
ϕ∈B E
par conséquent,
1
lim kT (t) − IkL = lim sup kT (t)ϕ − ϕkE ≥ 2 p ,
t↓0 t↓0
ϕ∈B E
i.e., limt↓0 kT (t) − IkL 6= 0, et ceci montre que le semi-groupe {T (t) : t ≥ 0} n’est pas
uniformément continu.
Preuve.
Comme le semi-groupe {T (t) : t ≥ 0} est uniformément continu alors,
D’où,
∀ε > 0, ∃δ > 0, ∀t ∈ [0, δ], kT (t) − T (0)kL < ε.
En particulier pour ε = 1, kT (t) − IkL < 1. Par la Remarque 2.4.1, on conclut que T (t) est
inversible pour tout t ∈ [0, δ]. Soit maintenant t > δ, on peut toujours trouver t1 ∈ [0, δ[ et
n ∈ N∗ tel que t = nδ + t1 , on aura alors
et comme T (δ) et T (t1 ) sont inversibles, on conclut que T (t) est inversible pour tout t ∈
[0, +∞[. ¤
21
3.1. Semi-groupes d’opérateurs bornés
Montrons maintenant que {S(t) : t ≥ 0} est uniformément continu. Comme dans la preuve
de la proposition précédente, on sait par la Remarque 2.4.1, que pour tout t ∈]0, δ[,
∞
X ∞
X ∞
X
S(t) = (I − T (t))n = I + (I − T (t))n =⇒ S(t) − I = (I − T (t))n ,
n=0 n=1 n=1
d’où
∞
X
kS(t) − IkL ≤ kI − T (t)kL ,
n=1
Preuve.
Soit t ∈ [0, +∞[. Montrons que limh→0 kT (t + h) − T (t)kL = 0.
Si h ↓ 0, alors
22
3.1. Semi-groupes d’opérateurs bornés
d’où
Preuve.
Comme le semi-groupe {T (t) : t ≥ 0} est uniformément continu alors,
D’où,
∀ε > 0, ∃δ > 0, ∀t ∈]0, δ[, kT (t) − T (0)kL < ε.
1 Rδ
En particulier pour ε = 1. Remarquons alors que l’opérateur δ 0
T (s)ds est inversible. En
effet, nous avons
1 Z δ
1 Z δ
1Z δ
T (s)ds − I
=
T (s) − T (0) ds
≤ kT (s) − T (0)kL ds < 1,
δ 0 L δ 0 L δ 0
le résultat découle directement de la Remarque 2.4.1. Comme nous avons, pour tous t ≥ 0
1Z δ 1Z δ Z δ
1
T (t + s)ds = T (t)T (s)ds = T (s)ds T (t),
δ 0 δ 0 δ 0
alors
1Z δ
−1 Z δ
1 Z δ −1 Z δ
T (t) = T (s)ds T (t + s)ds = T (s)ds T (t + s)ds ,
δ 0 δ 0 0 0
23
3.1. Semi-groupes d’opérateurs bornés
ainsi, sachant que l’opérateur T est continu, par le Lemme 2.7.1, on aura
Z δ
T (t + h) − T (t) −1
1 Z h+δ 1Zh
lim = T (t) T (s)ds lim T (s)ds − lim T (s)ds
h↓0 h 0 h↓0 h δ h↓0 h 0
Z δ −1
= T (t) T (s)ds [T (δ) − T (0)],
0
par conséquent,
Z δ −1
0 dT (t)
T (t) = = T (t) T (s)ds [T (δ) − T (0)].
dt 0
Posons
Z δ −1
B= T (s)ds [T (δ) − T (0)].
0
dT (t)
Il est clair que B ∈ L(E), et par la relation dt
= T (t)B et T (0) = I, on obtient T (t) = etB .
D’où le résultat. De plus, remarquons que dans ce cas nous avons
dT (t) d(etB )
= = BetB = BT (t),
dt dt
c’est à dire que le semi-groupe uniformément continu {T (t) : t ≥ 0} satisfait la relation
dT (t)
= BT (t) = T (t)B, (3.1.5)
dt
ce qui montre que l’opérateur t 7→ T (t) est de classe C 1 . ¤
et pour x ∈ D(A)
T (t)x − x (T (t) − T (0))x
Ax = lim = lim .
t↓0 t t↓0 t
Exemple 3.1.4. Considérons le semi-groupe {T (t) : t ≥ 0}, où pour tout t ≥ 0, T (t) = etB ,
P∞ tk k
B ∈ L(E) et etB = k=0 k! B , et cherchons son générateur infinitésimal A. Soit x ∈ E,
nous avons
T (t)x − x etB x − x 1 X
∞ k
t k
1X ∞ k
t k X∞ k−1
t
= = B x−x = B x= Bkx
t t t k=0 k! t k=1 k! k=1 k!
∞ k−1
X t
= B k x + Bx,
k=2 k!
par suite
T (t)x − x
lim = Bx,
t↓0 t
donc cette limite existe pour tout x ∈ E, i.e., D(A) = E et
T (t)x − x
Ax = lim = Bx ∀x ∈ E,
t↓0 t
T (t)ϕ(x) − ϕ(x)
lim = ϕ0 (x).
t↓0 t
25
3.1. Semi-groupes d’opérateurs bornés
T (t)ϕ−ϕ
Par suite, une condition nécessaire pour que limt↓0 t
existe dans E, est que ϕ0 existe
et appartient à E. Par conséquent
Montrons que cette condition est suffisante, c’est à dire montrons l’inclusion inverse dans
(3.1.6). Soit ϕ ∈ E tel que ϕ0 existe et ϕ0 ∈ E, et donc ϕ0 est uniformément continue, ce qui
équivaut à
ε
∀ε > 0, ∃δ > 0, ∀x, s ∈ R+ , |s − x| ≤ δ ⇒ |ϕ0 (s) − ϕ0 (x)| < . (3.1.7)
2
Donc, pout tout t ∈ [0, δ[, et pour tout x ∈ R+ , si s ∈ [x, x+t] ceci implique que |s−x| ≤ t < δ,
et par la relation (3.1.7), on obtient |ϕ0 (s) − ϕ0 (x)| < 2ε , et donc
ε
sup sup |ϕ0 (s) − ϕ0 (x)| ≤ < ε.
x∈R+ s∈[x,x+t] 2
Ceci se traduit par
i.e.,
lim sup sup |ϕ0 (s) − ϕ0 (x)| = 0. (3.1.8)
t↓0 x∈R+ s∈[x,x+t]
Preuve.
Soit A : D(A) ⊂ E −→ E le générateur infinitésimal d’un semi-groupe uniformément
continu {T (t) : t ≥ 0}. Comme dans la preuve du Théorème 3.1.2, on sait qu’il existe δ > 0
Rδ
tel que l’opérateur 0 T (s)ds est inversible. Soit t > 0, nous avons
Z δ
1 1Z δ 1Z δ
(T (t) − I) T (s)ds = (T (t) − I)T (s)ds = (T (t)T (s) − T (s))ds
t 0 t 0 t 0
1Z δ 1Z δ
= T (t + s)ds − T (s)ds,
t 0 t 0
par un changement de variable dans la première intégrale du côté droit, on obtient
Z δ
1 1 Z t+δ Z δ
(T (t) − I) T (s)ds = T (s)ds − T (s)ds .
t 0 t t 0
par suite,
1 1 Z t+δ Z δ Z δ −1
(T (t) − I) = T (s)ds − T (s)ds T (s)ds
t t t 0 0
1 Z t+δ Z t Z δ −1
= T (s)ds − T (s)ds T (s)ds .
t δ 0 0
c’est à dire que cette limite existe pour tout x ∈ E, et donc D(A) = E et
Z δ −1
A = T (δ) − T (0) T (s)ds ∈ L(E).
0
Remarque 3.1.3. Par la preuve du théorème précédent, on voit bien que si A est le géné-
rateur infinitésimal d’un semi-groupe uniformément continu {T (t)}t≥0 , alors
T (t) − I
lim
− A
= 0.
t↓0 t L
Remarque 3.2.1. Tout semi-groupe uniformément continu est un C0 -semi-groupe mais l’in-
verse est faux.
c’est à dire
lim kT (t)y − ykE = 0 ∀y ∈ B E .
t↓0
x
Soit x ∈ E \ {0}, et soit y = kxk
∈ B E , donc limt↓0 kT (t)y − ykE = 0, i.e.,
x x
1
lim
T (t) −
= 0 ⇐⇒ lim kT (t)x − xkE = 0 ⇐⇒ lim kT (t)x − xkE = 0,
t↓0 kxk kxk E kxk t↓0 t↓0
28
3.2. Semi-groupes fortement continus (C0 -semi-groupes)
Preuve.
On commence par montrer l’existence de δ > 0 et M ≥ 1 tel que
D’autre part, comme {S(t) : t ≥ 0} est un C0 -semi-groupe, nous avons pour tout x ∈ E,
limn→∞ S(tn )x = x, et donc l’ensemble {S(tn )x : n ∈ N∗ } est borné. Par le théorème de
Banach Steinhaus, il s’ensuit que l’ensemble {S(tn ) : n ∈ N∗ } est aussi borné, ce qui est en
contradiction avec (3.2.3). D’où, l’existence de de δ > 0 et M ≥ 1 tel que (3.2.2) est vérifiée.
Soit maintenant t ∈ [0, +∞[. Alors, il existe n ∈ N et t0 ∈ [0, δ[ tel que t = nδ + t0 , et donc
kT (t)kL = kT (nδ)T (t0 )kL = k(T (δ))n T (t0 )kL ≤ kT (δ)knL kT (t0 )kL ≤ M n M,
t−t0
mais comme n = δ
≤ δt , nous obtenons
t
t ln M
kT (t)kL ≤ M M δ = M eln M δ = M et δ = M eωt ,
ln M
avec ω = δ
≥ 0. Ainsi nous avons démontré la relation (3.2.1). ¤
29
3.2. Semi-groupes fortement continus (C0 -semi-groupes)
Remarque 3.2.2. 1) On dit que {T (t) : t ≥ 0} est un C0 -semi-groupe de type (M, ω).
2) Si {T (t) : t ≥ 0} est uniformément continu et A est son générateur infinitésimal, on
sait que pour tout t ≥ 0, T (t) = etA , alors la relation (3.2.1) est vérifiée pour M = 1 et
ω = kAkL , c’est à dire que le semi-groupe uniformément continu est de type (1, kAkL ).
kT (t)kL ≤ 1 ∀t ≥ 0.
Corollaire 3.2.1. Soit {T (t) : t ≥ 0} un C0 -semi-groupe de type (M, ω). Alors l’application
(t, x) 7−→ T (t)x définie de [0, +∞[×E à valeurs dans E, est continue.
Preuve.
Soit (t0 , x0 ) ∈ [0, +∞[×E. Pour tout (t, x) ∈ [0, +∞[×E, nous avons :
Si t > t0
lim kT (t − t0 )x0 − x0 kE = 0,
t↓t0
par conséquent
lim kT (t)x−T (t0 )x0 kE ≤ lim M etω kx−x0 kE +M et0 ω lim kT (t−t0 )x0 −x0 kE = 0.
(t,x)→(t0 ,x0 ) (t,x)→(t0 ,x0 ) t↓t0
30
3.2. Semi-groupes fortement continus (C0 -semi-groupes)
Si t < t0
d’où le résultat. ¤
Dans la suite, nous allons donné quelques propriétés des C0 -semi-groupes.
3) Pour tout x ∈ D(A) et tout t ≥ 0, nous avons T (t)x ∈ D(A). De plus, la fonction
t 7−→ T (t)x est de classe C 1 sur [0, +∞[ et
d
(T (t)x) = AT (t)x = T (t)Ax.
dt
4) Pour tout x ∈ D(A) et tous s, t ∈ [0, +∞[ (s ≤ t),
Z t Z t
AT (τ )x dτ = T (τ )Ax dτ = T (t)x − T (s)x.
s s
Preuve.
1) est conséquence immédiate du Corollaire 3.2.1 et Lemme 2.7.1.
2) Soient x ∈ E, t > 0 et h > 0. Nous avons
T (h) − I Z t
1 Z t
1Zt
T (s)x ds = T (h) T (s)x ds − T (s)x ds
h 0 h 0 h 0
Z t Z t
1 1
= T (h + s)x ds − T (s)x ds
h 0 h 0
Z t+h Z t
1 1
= T (s)x ds − T (s)x ds
h h h 0
Z t+h Z h
1 1
= T (s)x ds − T (s)x ds,
h t h 0
31
3.2. Semi-groupes fortement continus (C0 -semi-groupes)
3) Soit x ∈ D(A) et t ≥ 0. Pour montrer que T (t)x ∈ D(A), on doit montrer que
T (t + h)x − T (t)x
lim = T (t)Ax,
h↓0 h
c’est à dire
d+
(T (t)x) = T (t)Ax = AT (t)x.
dt
D’autre part,
T (t + h)x − T (t)x
lim = T (t)Ax,
h↑0 h
c’est à dire
d−
(T (t)x) = T (t)Ax = AT (t)x.
dt
On conclut que la fonction t 7−→ T (t)x et de classe C 1 et
d
(T (t)x) = T (t)Ax = AT (t)x.
dt
4) Soit x ∈ D(A) et s, t ∈ [0, +∞[ (s ≤ t). Nous avons
Z t Z t Z t
d
AT (τ )x dτ = T (τ )Ax dτ = T (τ )x dτ = T (t)x − T (s)x.
s s s dτ
32
3.2. Semi-groupes fortement continus (C0 -semi-groupes)
¤
Deux propriétés importantes du générateur infinitésimal d’un C0 -semi-groupe est la den-
sité de son domaine et la fermeture de son graphe.
Preuve.
Montrons dans un premier temps que D(A) = E, i.e.,
1Z ε 1Z ε
T (s)x ds ∈ D(A) et lim T (s)x ds = T (0)x = x.
ε 0 ε↓0 ε 0
1 Rε
En posant yε = ε 0
T (s)x ds, nous retrouvons la relation (3.2.4), et donc D(A) = E.
Montrons maintenant que A est fermé. Soit (xn , yn ) une suite du graphe de A, c’est à dire
(xn ) ⊂ D(A) et yn = Axn , tel que xn → x et yn → y. On doit montrer que (x, y) est dans le
graphe de A. Nous avons par 4) du Théorème 3.2.2,
Z t
T (s)Axn ds = T (t)xn − xn ,
0
d’où
Z t
lim (T (t)xn − xn ) = lim T (s)Axn ds,
n→∞ n→∞ 0
or, on sait par le Théorème 3.2.1 que pour tout s ∈ [0, +∞[ et pour tout n ∈ N,
et comme (Axn ) est une suite convergente donc (kAxn kE ) est bornée. Par suite, on peut
untiliser le théorème de la convergence domminée de Lebesgue, pour conclure que
Z t Z t
lim (T (t)xn − xn ) = lim T (s)Axn ds = T (s)y ds,
n→∞ 0 n→∞ 0
i.e.,
Z t
T (t)x − x = T (s)y ds,
0
33
3.3. Théorème de Hille-Yosida
T (t)x − x 1Z t
lim = lim T (s)y ds = T (0)y = y.
t↓0 t t↓0 t 0
Preuve.
Soient x ∈ D(A), t > 0 et soit f : [0, t] −→ E la fonction définie par
d d d
f 0 (s) = S(t − s)T (s)x = − (S(t − s)(T (s)x) + S(t − s) T (s)x
ds ds ds
= −A(S(t − s)T (s)x) + S(t − s)AT (s)x
ceci implique que f est constante sur [0, t], et donc f (0) = f (t), i.e., S(t)x = T (t)x pour tout
x ∈ D(A) et pour tout t ≥ 0. Mais pour avoir l’égalité des deux semi-grroupes, cette relation
doit être vérifiée pour tout x ∈ E. En effet, par le théorème précédent, on sait que D(A) = E.
On aura alors, pour tout x ∈ E, il existe une suite (xn ) ⊂ D(A) tel que limn→∞ xn = x.
Alors S(t)xn = T (t)xn , et donc limn→∞ S(t)xn = limn→∞ T (t)xn , i.e., S(t)x = T (t)x pour
tout x ∈ E. On conclut que S(t) = T (t) pour tout t ∈ [0, +∞[. ¤
Le théorème de Hille-Yosida est connu comme le plus important résultat dans la théorie
des C0 -semi-groupes, il donne une condition nécessaire et suffisante pour qu’un opérateur
linéaire engendre un C0 -semi-groupe de contractions.
Rappelons que pour un opérateur linéaire A : D(A) ⊂ E −→ E, on note par ρ(A)
l’ensemble résolvant de A et par RA sa résolvante, i.e., pour λ ∈ ρ(A), RA (λ) = (λI − A)−1 .
34
3.3. Théorème de Hille-Yosida
1
kRA (λ)kL ≤ .
λ
Preuve.
1) Condition nécessaire. On suppose que A est le générateur infinitésimal d’un C0 -semi-
groupe de contractions, et on montre qu’il vérife (i) et (ii). Par le Théorème 3.2.3, on sait
que D(A) = E et A est fermé. Donc, il nous reste à montrer (ii). Soit λ > 0 et soit x ∈ E.
Posons
Z +∞
J(λ)x = e−λt T (t)x dt, (3.3.1)
0
en fait, J est la transformée de Laplace de la fonction T . Vérifions tout d’abord que J(λ)
est bien définie, c’est à dire que l’intégrale dans la relation (3.3.1) est convergente. Soient
a, b ∈ [0, +∞[ (a ≤ b), comme notre semi-groupe est de contractions, nous avons
Z b
Z b Z b
e−λt T (t)x dt
≤ e−λt kT (t)kL kxkE dt ≤ e−λt kxkE dt
a E a a
Z b
e−λa − e −λb
= kxkE e−λt dt = kxkE ,
a λ
d’où
Z b
kxkE
lim
e−λt T (t)x dt
≤ .
a→0, b→∞ a E λ
Par conséquent, J(λ) est bien définie. D’autre part, il est clair que J(λ) ∈ L(E) car T (t) ∈
kxkE
L(E). De plus, comme kJ(λ)xkE ≤ λ
, il s’ensuit que kJ(λ)kL ≤ λ1 .
Dans la suite on va montrer que J(λ) = RA (λ). En effet, soit h > 0 et soit x ∈ E, nous avons
1 1 1
(T (h) − I)J(λ)x = T (h)J(λ)x − J(λ)x
h h h
Z +∞
1 1 Z +∞ −λt
= T (h) e−λt T (t)x dt − e T (t)x dt
h 0 h 0
Z +∞ Z +∞
1 1
= e−λt T (t + h)x dt − e−λt T (t)x dt
h 0 h 0
1 λh Z +∞ −λt 1 Z +∞ −λt
= e e T (t)x dt − e T (t)x dt
h h h 0
Z +∞ Z h
1 λh 1
= (e − 1) e−λt T (t)x dt − eλh e−λt T (t)x dt,
h 0 h 0
35
3.3. Théorème de Hille-Yosida
par suite
Z +∞
1
lim (T (h) − I)J(λ)x = λ e−λt T (t)x dt − T (0)x
h↓0 h 0
= λJ(λ)x − x.
D’autre part, soit x ∈ D(A), en utilisant 3) du Théorème 3.2.2 et une intégration par parties,
nous avons
Z +∞ Z +∞
d
J(λ)Ax = e−λt T (t)Ax dt = e−λt (T (t)x) dt
0
Z +∞
0 dt
+∞
= e−λt T (t)x 0
+λ e−λt T (t)x dt
0
= −x + λJ(λ)x,
d’où
i.e.,
J(λ)(λI − A) = I. (3.3.3)
Par (3.3.2) et (3.3.3), on conclut que J(λ) = (λI − A)−1 = RA (λ), c’est à dire λ ∈ ρ(A) et
donc ]0, +∞[⊂ ρ(A), de plus kRA (λ)kL ≤ λ1 .
Condition suffisante. Pour montrer la suffisance, on a besoin de la définition et lemmes
suivants.
Lemme 3.3.1. Soit A : D(A) ⊂ E −→ E un opérateur linéaire vérifiant les propriétés (i)
et (ii) du Théorème 3.3.1. Alors
1c limλ→+∞ λRA (λ)x = x, pour tout x ∈ E.
2c Aλ x = λ2 RA (λ)x − λx, pour tout x ∈ E.
3c limλ→+∞ Aλ x = Ax, pour tout x ∈ D(A).
Preuve.
1c Soit x ∈ D(A) et λ > 0. Montrons que λ(λI − A)−1 x = x + (λI − A)−1 Ax. En effet,
posons y = (λI − A)−1 x, et donc x = (λI − A)y = λy − Ay. D’où,
= λy − Ay + Ay = λy = λ(λI − A)−1 x,
1
kλ(λI − A)−1 x − xkE = k(λI − A)−1 AxkE ≤ k(λI − A)−1 kL kAxkE ≤ kAxkE ,
λ
comme yε ∈ D(A), alors lim kλRA (λ)yε −yε kE = 0, il s’ensuit que lim kλRA (λ)x−xkE < ε
λ→+∞ λ→+∞
pour tout ε > 0, i.e., lim kλRA (λ)x − xkE = 0.
λ→+∞
2c Soit x ∈ E et λ > 0. Nous avons par définition, Aλ x = λA(λI − A)−1 x. Posons y =
(λI − A)−1 x, i.e., x = λy − Ay et donc Ay = λy − x, on obtient alors
37
3.3. Théorème de Hille-Yosida
D’où le résultat.
3c Soit x ∈ D(A) et λ > 0. Nous avons
ketAλ kL ≤ 1 ∀t ≥ 0,
Preuve.
On sait que Aλ ∈ L(E) et D(Aλ ) = E, donc par le Théorème 3.1.3, Aλ est le générateur
¦ ©
infinitésimal du semi-groupe uniformément continu etAλ : t ≥ 0 . D’autre part, utilisant
2c du Lemme 3.3.1, nous avons
2
tAλ
tλ RA (λ)−tλI
2 R (λ)
−tλI
e
=
e
≤
etλ A
e
L L L L
1
tλ2 kRA (λ)kL −λt tλ2 λ −λt
≤ e e ≤e e = 1,
i.e.,
ketAλ kL ≤ 1 ∀t ≥ 0.
38
3.3. Théorème de Hille-Yosida
Soit x ∈ E et soient λ, µ ∈]0, +∞[, par un calcul simple, et utilisant cette dernière estimation,
nous avons
Z 1
tAλ
d stAλ (1−s)tAµ
e x − etAµ x
=
e e x ds
E 0 ds E
Z 1
stAλ (1−s)tAµ stAλ (1−s)tAµ
=
tAλ e e x − tAµ e e x ds
0 E
Z 1
≤
tA estAλ e(1−s)tAµ x − tA estAλ e(1−s)tAµ x
ds
λ µ
0 E
Z 1
stAλ (1−s)tAµ
= t
e e (Aλ x − Aµ x)
ds
0 E
≤ t
Aλ x − Aµ x
.
E
D’où,
tAλ
e x − etAµ x
≤ t
Aλ x − Aµ x
.
E E
¤
On revient maintenant à la preuve de la condition suffisante de notre théorème, c’est à
dire on suppose que A vérifie les hypothèses (i) et (ii) et on montre qu’il est le générateur
infinitésimal d’un C0 -semi-groupe. Par le Lemme 3.3.3, on sait que pour tout x ∈ D(A) et
λ, µ ∈]0, +∞[, nous avons
tAλ
e x − etAµ x
≤ t
Aλ x − Aµ x
≤ t
Aλ x − Ax
+ t
Aµ x − Ax
,
E E E E
ceci implique que la suite (etAλ x)λ est une suite de Cauchy dans E, et donc elle converge
dans E, i.e., il existe un opérateur linéaire continu T (t) : D(A) −→ E tel que pour tout
x ∈ D(A),
lim etAλ x = T (t)x,
λ→∞
et cette convergence est uniforme sur les sous ensembles compacts de [0, +∞[. De plus,
toujours par le Lemme 3.3.3, nous avons
i.e.,
kT (t)xkE ≤ kxkE ∀x ∈ D(A).
39
3.3. Théorème de Hille-Yosida
et
T (t)T (s)x = lim etAλ (T (s)x) = lim etAλ ( lim esAλ x) = lim etAλ (etAλ x)
λ→∞ λ→∞ λ→∞ λ→∞
(t+s)Aλ
= lim e x = T (t + s)x. (3.3.5)
λ→∞
Par la densité de D(A) dans E, on peut prolonger l’opérateur T (t) à E tout entier. En effet,
on considère l’opérateur S(t) : E −→ E défini comme suit :
Si x ∈ D(A), S(t)x = T (t)x.
Si x ∈ E \ D(A), on utilise le fait que D(A) = E, donc il existe une suite (xn ) ⊂ D(A)
tel que lim xn = x. Alors, on prend S(t)x = lim T (t)xn . Il est clair que S(t) ∈ L(E). De
n→∞ n→∞
plus, par les relations (3.3.4) et (3.3.5), il est clair que S(0)x = x pour tout x ∈ E, c’est à
dire S(0) = I, et pour s, t ∈ [0, +∞[, S(t + s)x = S(t)S(s)x pour tout x ∈ E, c’est à dire
¦ ©
S(t + s) = S(t)S(s). On conclut alors que S(t) : t ≥ 0 est un semi-groupe. D’autre part,
si x ∈ D(A)
kS(t)xkE = kT (t)xkE ≤ kxkE .
Si x ∈
/ D(A)
kS(t)xkE = k n→∞
lim T (t)xn kE = n→∞
lim kT (t)xn kE ≤ n→∞
lim kxn kE
i.e.,
kS(t)xkE ≤ kxkE ∀x ∈ E,
De plus, si x ∈ D(A),
lim etAλ x = T (t)x = S(t)x.
λ→∞
40
3.3. Théorème de Hille-Yosida
Si x ∈
/ D(A), alors S(t)x = limn→∞ T (t)xn avec (xn ) ⊂ D(A) et xn → x. D’où
Or,
ε
∀ε > 0, ∃n0 > 0, ∀n ∈ N, n ≥ n0 ⇒ kxn − xkE < .
2
Par conséquent, pour n ≥ n0 ,
¦ ©
On montre dans la suite que S(t) : t ≥ 0 est un C0 -semi-groupe. Soit t ≥ 0 et soit
x ∈ E, alors
¦ ©
d’autre part, comme etAλ : t ≥ 0 est un semi-groupe uniformément continu, alors
c’est à dire
lim kS(t)x − xkE = 0.
t↓0
41
3.3. Théorème de Hille-Yosida
¦ ©
Ceci montre que S(t) : t ≥ 0 est un C0 -semi-groupe.
En fin, il nous reste à montrer que son générateur infinitésimal est égal à A.
¦ ©
Soit B : D(B) ⊂ E −→ E le générateur infinitésimal du C0 -semi-groupe S(t) : t ≥ 0 .
Nous allons montrer que A = B. Soit x ∈ D(A) et t > 0. Nous avons
D’où,
Z t
S(t)x − x = lim (etAλ x − x) = lim esAλ Aλ x ds
λ→∞ λ→∞ 0
Z t Z t
= lim esAλ Aλ x ds = S(s)Ax ds,
0 λ→∞ 0
il s’ensuit que
S(t)x − x 1Z t
lim = lim S(s)Ax ds
t↓0 t t↓0 t 0
⇒ Bx = S(0)Ax = Ax et x ∈ D(B),
c’est à dire, Ax = Bx et D(A) ⊂ D(B). Pour conclure, il nous reste à montrer que D(B) ⊂
D(A). Comme B est le générateur infinitésimal d’un C0 -semi-groupe de contractions, par la
condition nécessaire du Théorème de Hille-Yosida, 1 ∈ ρ(B), i.e, (I − B) est inversible et
(I − B)−1 ∈ L(E) et nous avons (I − B)−1 (E) = D(B). D’autre part, comme Ax = Bx
pour tout x ∈ D(A), on obtient (I − B)(D(A)) = (I − A)(D(A)), et par (ii), nous avons
(I − A)(D(A)) = E, et donc (I − B)(D(A)) = E, i.e., (I − B)−1 (E) = D(A). Par conséquent,
D(A) = D(B), c’est dire A = B. Ceci termine la preuve du Théorème de Hille-Yosida. ¤
Remarque 3.3.1. En utilisant les mêmes arguments dans la preuve de la condition néces-
saire du Théorème de Hille-Yosida, on peut montrer que si A est le générateur infinitésimal
d’un C0 -semi-groupe de contractions, alors
¦ ©
D = λ ∈ C : Re(λ) > 0 ⊂ ρ(A),
42
3.3. Théorème de Hille-Yosida
et pour tout λ ∈ D,
1
kRA (λ)kL ≤ ,
Re(λ)
où Re(λ) est la partie réelle de λ.
Dans la suite, nous allons donner une généralisation du théorème de Hille-Yosida carac-
térisant le générateur infinitésimal d’un C0 -semi-groupe de type (M, ω). Nous commençons
par le lemme suivant qui va nous être utile dans la preuve du théorème principal.
Lemme 3.3.3. Soit A : D(A) ⊂ E −→ E un opérateur linéaire tel que ]0, +∞[⊂ ρ(A) et
n n
λ (RA (λ))
≤ M ∀n ∈ N∗ , ∀λ > 0. (3.3.7)
L
et
λRA (λ)x ≤ |x| ∀x ∈ E, ∀λ > 0. (3.3.9)
Preuve.
Soit α > 0. Définissons la fonction
| · |α : E −→ [0, +∞[
x 7−→ |x|α = sup
αn (RA (α))n x
.
n∈N E
et
|x|α ≥
α0 (RA (α))0 x
= kIxkE = kxkE .
E
D’où,
kxkE ≤ |x|α ≤ M kxkE ∀x ∈ E. (3.3.10)
D’autre part,
αRA (α)x = sup kαn (RA (α))n αRA (α)xkE = sup kαn+1 (RA (α))n+1 xkE ≤ |x|α ,
α n∈N n∈N
43
3.3. Théorème de Hille-Yosida
i.e.,
αRA (α)x ≤ |x|α . (3.3.11)
α
RA (λ)x = RA (α)x + (α − λ)RA (α)RA (λ)x = RA (α) x + (α − λ)RA (λ)x ,
et donc
RA (λ)x = RA (α) x + (α − λ)RA (λ)x ,
α α
c’est à dire
λ
1
RA (λ)x ≤ |x|α ,
α α α
par conséquent,
λRA (λ)x ≤ |x|α ,
α
par suite,
sup
λn (RA (λ))n x
≤ |x|α ,
n∈N E
i.e.,
|x|λ ≤ |x|α ∀x ∈ E, ∀λ ∈]0, α],
44
3.3. Théorème de Hille-Yosida
on conclut que la suite réelle (|x|α )α es croissante, et donc elle est convergente. Définissons
alors la fonction
| · | : E −→ [0, +∞[
On peut vérifier facilement que | · | est une norme sur E. De plus, nous avons par la relation
(3.3.10)
kxkE ≤ lim |x|α ≤ M kxkE ∀x ∈ E,
α→+∞
i.e,
kxkE ≤ |x| ≤ M kxkE ∀x ∈ E,
Preuve.
X On suppose dans un premier temps que ω = 0.
1) Condition nécessaire. Considérons la fonction
k| · |k : E −→ [0, +∞[
45
3.3. Théorème de Hille-Yosida
¦ ©
Clairement, k| · |k est une norme sur E. D’autre part, comme T (t) : t ≥ 0 est de type
(M, 0), alors kT (t)kL ≤ M pour tout t ≥ 0, ceci implique que pour tout x ∈ E,
De l’autre côté,
k|x|k ≥ kT (t)xkE ∀t ≥ 0,
c’est à dire k · kE et k| · |k sont deux normes équivalentes sur E. De plus, pour tout t ≥ 0,
k|T (t)x|k = sup kT (s)(T (t)x)kE = sup kT (t + s)xkE ≤ sup kT (τ )xkE = k|x|k,
s≥0 s≥0 τ ≥0
1
kλn (RA (λ))n xkE ≤ k|λn (RA (λ))n x|k ≤ λn k|(RA (λ))n |kL k|x|k ≤ λn k|x|k ≤ M kxkE ,
λn
i.e.,
M
k(RA (λ))n kL ≤ .
λn
Comme la norme k| · |k est équivalente à la norme k · kE , on conclut que A est fermé et D(A)
est dense dans (E, k · kE ). D’où la nécessité dans le cas ω = 0.
2) Condition suffisante. Supposons que (i) et (ii) sont satisfaites et montrons que A est le
46
3.3. Théorème de Hille-Yosida
générateur infinitésimal d’un C0 -semi-groupe de type (M, 0). Par le Lemme 3.3.3, il existe
une norme | · | sur E équivalente à la norme k · kE , i.e.,
et
1
λRA (λ)x ≤ |x| =⇒ RA (λ) ≤ ∀x ∈ E, ∀λ > 0.
L λ
Donc sur (E, | · |), A satisfait les hypothèses du théorème de Hille-Yosida, par suite, il est le
¦ ©
générateur infinitésimal d’un C0 -semi-groupe de contractions T (t) : t ≥ 0 , mais comme
¦ ©
on conclut que kT (t)kL ≤ M , c’est à dire que T (t) : t ≥ 0 est de type (M, 0) sur (E, k·kE ).
D’où le résultat.
X Supposons maintenant que ω > 0.
¦ ©
On sait que si T (t) : t ≥ 0 est un C0 -semi-groupe de type (M, ω) et A son générateur
¦ ©
infinitésimal alors T (t)e−ωt : t ≥ 0 est un C0 -semi-groupe de type (M, 0) et A − ωI est
son générateur infinitésimal. Donc par la première étape, A − ωI est fermé, à domaine dense
dans E, ]0, +∞[⊂ ρ(A − ωI) et
M
n
(RA−ωI (λ))
≤ ∀λ > 0,
L λn
Mais, remarquons que A−ωI est fermé si et seulement si A est fermé, que D(A−ωI) = D(A)
et que
RA−ωI (λ) = (λI − (A − ωI))−1 = ((λ + ω)I − A)−1 = RA (λ + ω),
et donc
RA−ωI (λ − ω) = RA (λ − ω + ω) = RA (λ),
Il reste à montrer que ]0, +∞[⊂ ρ(A − ωI) ⇐⇒]ω, +∞[⊂ ρ(A). En effet, soit λ ∈]ω, +∞[,
i.e., λ − ω ∈]0, +∞[ et donc λ − ω ∈ ρ(A − ωI), ceci équivaut à ((λ − ω)I − (A − ωI)) est
inversible, i.e., (λI − A) est inversible et donc λ ∈ ρ(A). Ceci termine la preuve du théorème.
¤
Soit (E, k·kE ) un espace de Banach (réel ou complexe) et (E 0 , k·kE 0 ) son dual topoloqique.
On note par h·, ·i, leur produit de dualité, i.e., pour tout f ∈ E 0 et tout x ∈ E, hf, xi = f (x).
L’application de dualité entre E et E 0 , J : E −→ P(E 0 ), est définie par
¦ ©
J(x) = x0 ∈ E 0 : hx0 , xi = kxk2E = kx0 k2E 0 ∀x ∈ E.
Nous commençons par une proposition qui nous sera utile par la suite. Sa preuve se base
sur des propriétés de la topologie faible∗ , une notion qui est, pour le moment, inconnue pour
les étudiants du master 1, donc ils peuvent ne considérer dans leur lecture que le résultat de
la proposition.
Preuve.
1
Théorème de Hahn-Banach. Soit (E, k · kE ) un espace vectoriel normé. Soit x0 ∈ E tel que x0 6= 0.
Alors il existe f ∈ E 0 tel que kf kE 0 = 1 et f (x0 ) = kx0 kE
48
3.4. Théorème de Lumer-Phillips
Supposons que A est dissipatif, pour tout x ∈ D(A), il existe x0 ∈ J(x) tel que Rehx0 , Axi ≤
0. Alors pour tout λ > 0, nous avons en utilisant la définition de J,
il s’ensuit que
et donc
λkxkE ≤ k(λI − A)xkE .
Si λx−Ax = 0, par la relation (3.4.1), on déduit que x = 0, et donc Rehx0 , Axi = Rehx0 , 0i =
0 pour tout x0 ∈ J(x), c’est à dire que A est dissipatif.
yλ0
Si λx − Ax 6= 0, par (3.4.2), yλ0 6= 0. Soit zλ0 = 0 k
kyλ
(zλ0 ∈ B E 0 ). Alors nous avons, une autre
E0
et que
i.e.,
1
Rehzλ0 , xi ≥ kxkE − kAxkE . (3.4.4)
λ
Comme (zλ0 )λ ⊂ B E 0 , et sachant que B E 0 est faiblement∗ compacte, on peut extraire une
sous suite (zλ0 k )k convergeant faiblement∗ vers un élément z 0 ∈ B E 0 , c’est à dire pour tout
ζ ∈ E,
lim hzλ0 k , ζi = hz 0 , ζi,
k→∞
en particulier,
lim hzλ0 k , xi = hz 0 , xi,
k→∞
Rehz 0 , Axi ≤ 0
et
Rehz 0 , xi ≥ kxkE .
D’autre part,
Rehz 0 , xi ≤ kz 0 kE 0 kxkE = kxkE ,
Si on note par Im(w), la partie imaginaire d’un nombre complexe w, alors par ce qui précede,
nous avons
2
|hz 0 , xi|2 ≤ kz 0 kE 0 kxkE = kxk2E ,
i.e.,
2 2
Rehz 0 , xi + Imhz 0 , xi ≤ kxk2E ,
hz 0 , xi = Rehz 0 , xi = kxkE .
50
3.4. Théorème de Lumer-Phillips
et
kx0 kE 0 = kxkE kz 0 kE 0 = kxkE .
En conclusion
hx0 , xi = kxk2E = kx0 k2E 0 ,
ceci montre que x0 ∈ J(x). Nous avons obtenu l’existence de x0 ∈ J(x) tel que
ce qui montre que A est dissipatif. La preuve de la proposition est ainsi terminée. ¤
par suite
1
Rehx0 , T (t)x − xi ≤ 0,
t
51
3.4. Théorème de Lumer-Phillips
c’est à dire
Rehx0 , Axi ≤ 0,
D’un autre côté, par (b), on sait qu’il existe α > 0 tel que (αI − A) est surjectif et par la
relation (3.4.6),
i.e.,
1
k(αI − A)−1 xkE ≤ kxkE ,
α
on conclut que (αI − A)−1 est un opérateur borné et donc il est fermé, et par suite A est
fermé.
Montrons dans la suite que (λI − A) est surjectif pour tout λ > 0. Posons
¦ ©
K = λ ∈]0, +∞[: (λI − A) est surjectif ⊂]0, +∞[.
Il est clair que K est un ensemble non vide car il contient α. Pour notre but, on doit montrer
que K =]0, +∞[. Soit λ ∈ K, c’est à dire (λI − A) est surjectif, et en utilisant la relation
(3.4.6), il vient que
1
k(λI − A)−1 xkE ≤ kxkE , (3.4.7)
λ
i.e., (λI − A)−1 ∈ L(E), ce qui implique que λ ∈ ρ(A) et donc K = ρ(A)∩]0, +∞[. Par
la Propostion 2.6.1, on sait que ρ(A) est un sous ensemble ouvert de C, d’où, pour tout
λ ∈ K, λ ∈ ρ(A), et donc il existe un voisinage Vλ ⊂ C de λ tel que Vλ ⊂ ρ(A), i.e.,
Vλ ∩]0, +∞[⊂ ρ(A)∩]0, +∞[= K. Clairement, Uλ = Vλ ∩]0, +∞[ est un voisinage de λ dans
52
3.4. Théorème de Lumer-Phillips
On doit montrer que λ ∈ K. Comme pour tout n ∈ N, (λn I − A) est surjectif, on aura
i.e.,
1
kxn kE ≤ kykE .
λn
Comme (λn )n est convergente dans ]0, +∞[, donc elle est bornée, il existe une constante
k > 0, tel que λn ≤ k, pour tout n ∈ N, il s’en suit
1
kxn kE ≤ kykE = c.
k
En utilisant alors les relations (3.4.6) et (3.4.8) une deuxième fois, nous avons pour tous
n, m ∈ N,
53
3.5. Un exemple d’application du théorème de Hille-Yosida
sous ensembles ouverts et fermés à la fois dans ]0, +∞[ sont ]0, +∞[ lui même et lensemble
vide et sachant que K 6= ∅, on conclut que K =]0, +∞[, et donc ]0, +∞[⊂ ρ(A) et par (3.4.7)
1
k(λI − A)−1 kL ≤ .
λ
Exemple 3.5.1. Considérons l’espace L2 (]0, π[, R) muni de son produit scalaire
Z π
hf, giL2 = f (x)g(x)dx ∀f, g ∈ L2 ([0, π], R),
0
et de sa norme
Z π 1
2 2
kf kL2 = |f (x)| dx ∀f ∈ L2 ([0, π], R).
0
Soit l’opérateur linéaire A : D(A) ⊂ L2 (]0, π[, R) −→ L2 (]0, π[, R) défini par
Au = u00 ∀u ∈ D(A).
Pour montrer que A est le générateur infinitésimal d’un C0 -semi groupe de contractions sur
L2 (]0, π[, R), on va utiliser le théorème de Hille-Yosida, donc on doit montrer que le domaine
de A est dense, A est fermé, ]0, +∞[⊂ ρ(A) et k(λI −A)−1 kL ≤ λ1 . En effet, par le Théorème
3.2.2, on sait que pour tout h ∈ L2 (]0, π[, R), il existe (hn ) ⊂ C ∞ (]0, π[) ∩ L∞ (]0, π[) tel
que hn −→ h. Mais, on sait que C ∞ (]0, π[) ∩ L∞ (]0, π[) ⊂ H01 (]0, π[) ∩ H 2 (]0, π[) et donc
(hn ) ⊂ H01 (]0, π[) ∩ H 2 (]0, π[) = D(A), et par suite D(A) est dense dans L2 (]0, π[, R).
Maintenant, on va montrer que pour tout λ > 0, l’opérateur (λI − A) est bijectif, c’est à
dire on doit montrer que pour tout f ∈ L2 (]0, π[, R), il existe un unique u ∈ D(A) tel que
f = (λI − A)(u) = λu − Au = λu − u00 . Comme u ∈ D(A) ⊂ H01 (]0, π[) ceci implique
54
3.5. Un exemple d’application du théorème de Hille-Yosida
que u(0) = u(π) = 0. Donc, ceci revient à montrer que pour tout λ > 0 et pour tout
f ∈ L2 (]0, π[, R), le problème 8
>
< λu − u00 = f
>
: u(0) = u(π) = 0
admet une solution unique u ∈ D(A). On sait que la solution générale de l’équation diffé-
rentielle λu − u00 = f est de la forme
√ √ 1 Zx √ 1 Zx √
u(x) = c1 ex λ
+ c2 e−x λ
+ √ f (y)e λ(x−y) dy − √ f (y)e λ(y−x) dy.
2 λ 0 2 λ 0
Par les conditions aux limites, on obtient c1 + c2 = 0 et
√ √ 1 Zπ √ 1 Zπ √
c1 eπ λ
+ c2 e−π λ
+ √ f (y)e λ(π−y) dy − √ f (y)e λ(y−π) dy = 0,
2 λ 0 2 λ 0
et donc c1 et c2 sont déterminées d’une façon unique, par suite la solution u est unique, i.e.,
(λI −A) est bijectif et u = (λI −A)−1 f . D’autre part, sachant, que pour tout f ∈ L2 (]0, π[, R)
et tout x ∈]0, π[, λu(x)−u00 (x) = f (x), avec u = (λI −A)−1 f , alors on obtient, en multipliant
cette équation par u(x),
λ(u(x))2 − u00 (x)u(x) = f (x)u(x),
Z π Z π Z π
λ (u(x))2 dx + (u0 (x))2 dx = f (x)u(x)dx,
0 0 0
i.e.,
λkuk2L2 + ku0 k2L2 = hf, uiL2 ,
par conséquent
λkukL2 ≤ kf kL2 ,
1 1
sup k(λI − A)−1 f kL2 ≤ sup kf kL2 = ,
f ∈B L2 λ f ∈B 2 λ
L
i.e.,
1
k(λI − A)−1 kL ≤ .
λ
En conclusion, comme (I − A)−1 est continu, alors (I − A) est continu et donc A est fermé.
De plus, comme pour tout λ > 0, (λI − A) est bijectif et (λI − A)−1 est continu, alors
]0, +∞[⊂ ρ(A). Ceci finit la preuve.
56
BIBLIOGRAPHIE
[3] A. Pazy, Semigroups of linear operators and applications to partial differential equations.
Springer Verlag, New York, Berlin, (1983).
57