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Etymologiquement le mot "éthique" vient du grec ethikos, moral, de ethos, mœurs ; ce mot
est donc un synonyme d'origine grecque de "morale".
L'éthique est la science de la morale et des mœurs. C'est une discipline philosophique qui
réfléchit sur les finalités, sur les valeurs de l'existence, sur les conditions d'une vie heureuse, sur
la notion de "bien" ou sur des questions de mœurs ou de morale.
L'éthique peut également être définie comme une réflexion sur les comportements à adopter
pour rendre le monde humainement habitable. En cela, l'éthique est une recherche d'idéal de
société et de conduite de l'existence. C’est une réflexion sur les valeurs qui orientent et motivent
nos actions. Cette réflexion s’intéresse à nos rapports avec autrui. Il s’agit de penser l'action (que
dois-je faire?) du professionnel dans le domaine de mon métier tant dans la rencontre que dans
la société. Ce qui fait le métier de l’entrepreneur et sa spécificité est d’accumuler les profits en
exploitant le travail de salariés libres (ils ont signé un contrat) au sein d'entreprises où ce travail
est organisé rationnellement. La rencontre nécessite une éthique en plus du savoir, une réflexion
sur le « que dois-je faire? ».
Le but de la réflexion éthique est de déterminer non pas les valeurs les plus motivantes, sur
le plan subjectif, mais celles qui peuvent justifier rationnellement notre action, celles qui
constituent de bonnes raisons d’agir dans un sens ou dans l’autre. Dans le domaine éthique
comme dans le domaine technique, les ingénieurs ne sont pas guidés par leurs préférences
personnelles. Ils font des choix rationnels et sont capables de les justifier en donnant des raisons
telles que l’intérêt du client, la qualité de l’environnement, la sécurité du public.
La réflexion éthique permet de déterminer les valeurs qui constituent des raisons d’agir
acceptables par l’ensemble de la société, par les personnes qui partagent l’idéal de pratique et,
au niveau particulier, par les personnes et les groupes touchés par une décision.
Au niveau le plus général, la réflexion éthique porte sur les conceptions du bien, du juste et
de l’accomplissement humain. Elle répond alors à des questions comme :
qu’est-ce qui est le plus important dans la vie?
que voulons-nous accomplir?
quels types de rapports voulons-nous entretenir avec les autres?
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Les valeurs deviennent ainsi des objectifs à atteindre, des idéaux à réaliser. À l’échelle
individuelle, nos actions sont autant de moyens d’actualiser nos valeurs. À l’échelle collective,
l’imposition de règles est aussi un moyen de réaliser l’idéal partagé; les actions qui vont dans le
sens de l’idéal deviennent des devoirs, des obligations. Les règles, cependant, sont générales et
ne peuvent couvrir toutes les situations où des choix d’actions sont nécessaires.
C’est pourquoi la réflexion éthique porte aussi, au niveau particulier, sur les cas embarrassants
et les dilemmes. Elle répond alors à des questions comme :
Quelle est la valeur la plus importante dans cette situation?
quelle est la meilleure décision éthique dans ces circonstances?
L’éthique se prête en confusion avec plusieurs notions voisines, mais qui ne sont pas
identiques.
Les frontières entre éthique, déontologie et loi par exemple sont poreuses. Pour faire simple :
la loi énonce des principes, d'application obligatoire sur le territoire où elle s'exerce. Elle
définit des crimes et délits et l'échelle des sanctions ;
la déontologie, au sens strict, désigne des règles et devoirs qui régissent une profession,
exigeant souvent une prestation de serment. Elle est réglementée par un ordre
professionnel qui applique des sanctions en cas de manquement. C'est le cas chez les
avocats, magistrats, notaires, médecins, journalistes, architectes, etc.
l'éthique désigne l'ensemble des comportements vertueux, respectueux de la loi, des
personnes et de l'environnement. Les recommandations éthiques (d'une charte par
exemple) sont généralement incitatives.
Certains comportements peuvent ainsi être légaux, mais non éthiques :
- des montages fiscaux autorisés mais moralement répréhensibles car ils permettent
d'échapper au devoir de contribution au budget national ;
- ou bien une atmosphère de travail conflictuelle et délétère qui génère un stress
chronique des équipes.
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II.1. Ethique et droit
Différence éthique/ droit, qui relève du domaine social ou public ; application du droit
fondée sur crainte de répression, alors que éthique est dictée par sens du devoir . Mais les deux
sont proches, car dans l'idéal la loi ne devrait pas contredire l'éthique, et souvent l'éthique sert à
interpréter la loi. Mais si l'éthique était développée à tous niveaux il n'y aurait sans doute pas
besoin de droit.
Du latin mores (pluriel de mos), mœurs, conduite, manière d'agir, genre de vie, habitude,
la morale est un ensemble de principes de jugement, de règles de conduite relatives au bien et au
mal, de devoirs, de valeurs, parfois érigés en doctrine, qu'une société se donne et qui s'imposent
autant à la conscience individuelle qu'à la conscience collective. Ces principes varient selon la
culture, les croyances, les conditions de vie et les besoins de la société. Ils ont souvent pour
origine ce qui est positif pour la survie de l'ethnie, du peuple, de la société. Si de tels principes
sont en outre positifs pour l'ensemble des ethnies, des peuples ou des sociétés de la Terre, on
peut les considérer comme faisant partie de la morale universelle.
Les termes "éthique" et "morale" ont des sens proches et sont souvent confondus.
L'éthique est plutôt la science et l'étude de la morale.
On distingue en général deux grandes conceptions de la morale :
Objectiviste. Les lois morales ne dépendent pas de l'homme mais des lois de la nature, de
"commandements divins" ou des lois de la raison. Elles ont un caractère universel, éternel,
absolu, normatif. Elles ne peuvent être ni changées, ni supprimées.
Relativiste. Les valeurs morales ont une origine humaine. Elles sont définies par la société ou
par l'individu lui-même et varient donc d'une société à une autre.
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L’éthique et la morale sont tantôt confondues, tantôt différenciées, on ne sait plus toujours très
bien le sens qu’il faut mettre sous ces termes, ce qui les spécifie et les rapports qu’ils
entretiennent.
De manière usuelle, l’éthique est très souvent assimilée à la morale.la différence entre les
deux notions réside dans le fait que la morale est liée à la contrainte personnelle des individus,
tandis que se réfère aux principes de base de l’acte juste et aux règles de conduite. La morale est
régie par des valeurs relatives comme le bien le mal la justice… et varient selon les individus,
les sociétés alors que l’éthique est la définition des comportements acceptables ou non à travers
un raisonnement.
Il faut faire la différence entre la morale, qui renvoie aux mœurs telles qu'elles sont pratiquées
(connotation pratique) et la notion d'éthique, qui est le souci de fonder une morale, ce qui fait
plutôt référence à la théorie, aux règles et aux principes.
Ethique est donc la science de la morale ou un ensemble de principes moraux qui sont à la base
du comportement d’un individu.
L'éthique d'un individu est ce qui sous-tend ses comportements vis-à-vis d'autrui, ou vis-à-vis de
son environnement.
L ’éthique est une démarche visant, face à un problème donné à adopter la meilleure
solution en s’appuyant sur des valeurs apprises, admises et intégrées et en tenant compte
du contexte dans lequel le problème se pose factuellement.
C’est une démarche et non une science ; une démarche face à un problème pour adopter une
solution concret, une démarche contextualisée et non uniformisée, une démarche qui s’appuie
sur des valeurs et non sur la morale, une démarche personnelle qui s’appuie sur des valeurs
intégrées plus qu’apprises (différence avec l’éducationnel)
La philosophie morale aborde, avec la seule autorité de la raison, la question de la finalité de
l'action humaine et cherche à éclairer les choix pratiques et en particulier la prise de décision :
Que dois-je faire ?
Qu'aurais-je dû faire ?
Y a-t-il des limites à mes actions ?
Les philosophes divisent la morale en trois domaines dont les limites ne sont pas toujours
parfaitement fixées :
Méta-éthique : entendue comme la recherche des origines et du sens de nos concepts
moraux ;
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Morale ou éthique normative, qui concerne les critères de nos comportements
(habitudes, devoirs, conséquences de nos actes) ;
Morale ou éthique appliquée, application des deux premières à des problèmes
spécifiques et controversés (par exemple, avortement, environnement, droits des animaux, etc.).
De nos jours, une connotation moins péjorative que "morale" car plus théorique ou
philosophique. Tandis que la morale est un ensemble de règles ou de lois ayant un caractère
universel, irréductible, voire éternel, l'éthique s'attache aux valeurs et se détermine de manière
relative dans le temps et dans l'espace, en fonction de la communauté humaine à laquelle elle
s'intéresse.
Dans "Le capitalisme est-il moral ?" (Albin Michel), le philosophe André Comte-Sponville
distingue l'ordre moral de l'ordre éthique. Pour lui, la morale est ce que l'on fait par devoir (en
mettant en œuvre la volonté) et l'éthique est tout ce que l'on fait par amour (en mettant en œuvre
les sentiments).
La déontologie porte ces considérations au champ plus restreint de la profession (les devoirs
professionnels,). Un code de déontologie est un ensemble de principes, valeurs, règles et devoirs
qui régissent une profession. Du grec deontos, ce qu’il faut faire, ou ce que l’on doit faire, et
logos (discours sensé) ; c’est étymologiquement « la science des devoirs ». La déontologie fait
explicitement référence aux plus hautes valeurs sociales, elle s’inscrit dans un cadre plus large
(comme la Déclaration universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948, nommée en
tête par nombre de codes de déontologie.
La déontologie : c’est l’ensemble de règles reconnues dans une profession de façon à
défendre les intérêts des clients ou faciliter les relations entre professionnelles. Plus generalement
ces valeurs et principes sont regroupés dans un code appelé code de deontologie.axiologie est la
science et théorie des valeurs morales.
La raison a pris une place prépondérante dans le fondement de l’éthique au siècle des
Lumières et c’est de principes rationnels qu’étaient déduits les comportements des individus.
On comprend mal l'évolution de la philosophie en Allemagne au cours des dernières
décennies si l'on n'aperçoit pas la préoccupation éthique au cœur de ses manifestations les plus
significatives. Le souvenir douloureux du Nazisme aura forcé une bonne partie de l'intelligentsia
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germanique à entreprendre une révision des éléments de sa tradition (métaphysique,
l'historicisme et du relativisme moral, l'irrationalisme pur et simple) pour abandonner le plus
souvent aux seules sciences exactes et à la réflexion épistémologique le monopole de la
rationalité .
Pourquoi éthique ET responsabilité et pas VERS, MALGRE, POUR, MAIS… ? Ils sont liés
car l’éthique peut servir dans la responsabilité.
L’éthique peut être un repère. On va pouvoir s’appuyer dessus. On prend conscience qu’on
est face à de nouveaux défis.
Deux mots qui s’utilisent souvent l’un pour l’autre : éthique et morale. La morale s’impose
à l’homme, l’éthique est une démarche plus personnelle car elle est unique, liée à la personne.
La morale fait plus penser à des règles qu’on applique, l’éthique c’est plutôt un
questionnement, un cheminement. C’est une attention forte qui s’applique aux pratiques.
L’éthique est questionnée face à des discussions ou des actions qui viennent la percuter.
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La notion de responsabilité est d’ordre moral philosophique avant d’être d’ordre légal.
Il n’existe pas de domaines dans le quotidien dans lequel nous n’avons pas de
responsabilités, après il y a des degrés.
Notion de section sociale par rapport à la loi et dans le regard des autres ou alors une section
de type psychologique qui se traduit par la culpabilité.
Le droit qui règle notre responsabilité est issu d’une histoire séculaire a cours de laquelle on
a empilé les choses.
Plus la liberté augmente plus la responsabilité augmente.
Plus on a de responsabilité, plus on a de liberté.
Plus on a besoin de règles pour assumer sa responsabilité et d’éthique.
Plus on a de liberté plus il faut que chacun ait ses propres règles fondées sur des
valeurs incontournables.
Liberté et éthique sont incontournables pour gérer sa responsabilité.
Ce droit-là est structuré sur le principe de la faute, jusqu’à récemment la responsabilité
n’était engagée qu’en cas de faute, et toute faute engage la responsabilité. Aujourd’hui (depuis
une dizaine d’années) on passe à une responsabilité fondée sur le risque.
Le manager, quelle que soit sa fonction, est confronté à un moment ou à un autre à des
problématiques d’éthique qui engagent ses valeurs personnelles.
Exercer avec exemplarité, indépendance et courage ses responsabilités de « manager
éthique » peut s’avérer une véritable gageure.
Pression commerciale sous forme de cadeaux et d’invitations, dénigrement de la
concurrence, conflits d’intérêt, tentatives de corruption, pratiques discriminatoires, …
Le monde de l’entreprise n’est pas toujours pavé de bonnes intentions. Certains sont prêts à
tout pour gagner des parts de marché, d’autres bafouent les principes élémentaires du respect de
la personne humaine…
L'éthique en entreprise propose au manager de s'interroger sur les valeurs et principes moraux
qui devraient orienter ses actions, dans différentes situations professionnelles. Elle fixe les
limites que la morale collective rencontre au quotidien et propose un cadre de fonctionnement,
souvent matérialisé dans une charte ou un code d’éthique.
Face à des manquements aux règles d’éthique, comment s’y prendre ?
On retiendra quelles bonnes pratiques :
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1. Tout d’abord vérifier la conformité ou non de la situation par rapport aux lois, et au
code d’éthique de l‘entreprise s’il en existe un.
2. Prendre du recul et s’accorder le temps nécessaire à la réflexion. Mieux vaut
s’interdire d’agir à chaud et dans la précipitation, ne serait-ce que pour prendre la
mesure des implications auprès de tous les acteurs.
3. Partager ses interrogations en interne et recueillir l’avis des personnes de son
entourage professionnel qui seront un gage d’objectivité et d’impartialité dans la
prise de décision.
4. Vérifier soigneusement les sources et les informations disponibles, même si elles
paraissent a priori évidentes ou incontestables.
5. Prendre l’avis des experts de l’entreprise : éthique, risques, sécurité, juridique, RH,...
en fonction de la problématique.
6. Assurer la confidentialité et la sécurité des données personnelles des protagonistes.
Le manager pourra alors prendre sa décision en confiance, en accord avec ses valeurs
personnelles, et l’assumer auprès de sa hiérarchie, de ses pairs et collaborateurs, et même de ses
proches.
Mais alerter, faire remonter les dysfonctionnements, voire les délits, reste encore difficile
pour des raisons historiques et culturelles. Dénoncer une situation est souvent assimilé à de la
délation et regardé avec suspicion.
L’insécurité psychologique qui en résulte handicape fortement l’efficacité des systèmes
d’alerte.
C’est pourquoi les dirigeants et managers doivent veiller à instaurer dans l’entreprise un
climat de confiance propice à l’expression des doutes et à la libération de la parole.
Maintenir une cohérence entre valeurs et actions. L’éthique résulte d’une construction intime
intérieure.
Le manager éthique saura-t-il pour autant, en pleine tourmente, trouver toute la force
intérieure nécessaire pour incarner et faire vivre une éthique engagée ?
Dans le monde impitoyable de l’entreprise où la réalité économique et financière prend le
dessus sur les considérations morales, il aura toutes les peines du monde à maintenir une
cohérence entre ses valeurs et ses actions.
Face à des pratiques d’affaires peu recommandables d’un client ou fournisseur, le dirigeant
éthique aura à cœur de rechercher des solutions alternatives qui ne heurteront pas sa conscience
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morale. Cette position reste aisée tant que la dimension économique ou financière ne vient pas
interférer dans la prise de décision.
Réconcilier éthique personnelle des salariés et pratique des affaires permet d’éviter les
situations de souffrance éthique, ce mal-être d’un manager ou salarié contraint de renier ses
valeurs, de faire taire sa morale dans l’exercice d’activités qu’il réprouve.
Ne pas se renier
Face à tout dilemme éthique, il y a un risque de renier ses propres convictions.
Les exigences contradictoires auxquelles se trouve confronté, à un moment ou à un autre, un
manager soucieux de « bien faire son travail » ont parfois raison de son éthique.
Manager sans trahir ses valeurs oblige à prendre du recul par rapport à ses pratiques et celles
de l’entreprise. C’est accepter une démarche d’analyse et de questionnement pour pouvoir mettre
en cohérence ses actes avec les valeurs sur lesquelles on décide de fonder son activité
managériale.
Manager sans trahir ses valeurs passe par la capacité à faire vivre au quotidien des valeurs
symboles d’une authentique éthique managériale.
Deux qualités sont essentielles pour cela :
- L’exemplarité : se cramponner à ses valeurs profondes, revisiter régulièrement ses
actions de manager pour questionner son exemplarité, et gagner ainsi la confiance et
l’adhésion de ses collaborateurs.
- Le courage : celui d’affirmer son point de vue, de dire non, d’alerter, de dénoncer,
voire de se démettre plutôt que de se soumettre… Autant d’actes de courage qui
témoignent d’un sens des responsabilités.
Manager sans trahir ses valeurs nécessite de bien connaître ses limites sous tension. Anticiper
et s’entraîner à défendre des positions délicates quand tout va bien permet de renforcer sa
capacité de résistance… et peut permettre, par exemple, de prévenir l’aveuglement souvent de
mise en situation de stress.
Manager sans trahir ses valeurs, c’est aussi permettre à ses collaborateurs de se prendre en
main pour agir selon une ligne éthique que l’on trace pour eux, et leur permettre ainsi de ne pas
se renier à leur tour.
Les dirigeants gagnants de demain seront ceux qui ont compris qu’une de leurs missions
essentielles est de veiller à préserver et faire fructifier le capital réputationnel, ou capital
confiance, de leur entreprise.
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En plaçant les préoccupations éthiques au cœur de leur agenda, ils œuvrent en ce sens et
contribuent ainsi à créer de la valeur au service de la performance durable et de la pérennité de
leur activité.
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Cours d’éthique et d’éducation à la citoyenneté
Chapitre 2 : Objet de l'éthique.
L’éthique générale établit les critères pour juger si une action est bonne ou mauvaise, et
pour juger les motifs et les conséquences d’un acte : ce qui fait d’elle une science pratique.
Il ne s’agit pas d’acquérir un savoir pour lui-même mais de nous rendre à même d’agir de
manière responsable.
Elle est donc considérée de nos jours comme une discipline au carrefour de l’éthique
appliquée, de l’éthique individuelle, de l’éthique sociale et des différentes formes d’éthiques
spécialisées qui se confrontent aux problèmes normatifs de leur domaine particulier.
Il est difficile de déterminer avec exactitude les rapports entre morale et éthique car la
distinction entre ces deux termes eux-mêmes est délicate.
Dans un sens « ordinaire », le terme éthique est synonyme de morale, et désigne une
pratique ayant pour objectif de déterminer une manière de vivre conforme aux fins de la vie
humaine (recherche du bonheur ou moralité). Mais une distinction courante consiste à
entendre par « morale » l’ensemble des normes propres à un groupe social ou à un peuple à
un moment précis de son histoire.
Aujourd’hui, de manière générale, on emploie le terme « éthique » pour qualifier des
réflexions théoriques portant sur des pratiques et sur les conditions de ces pratiques : ainsi on
parle de « comité d’éthique » au sein d’institutions scientifiques.
L’éthique aurait ainsi ses fondements non dans les traditions d’un pays, mais dans une
décision rationnelle.
Chaque secteur affirme son aspiration à l'autonomie en incluant, dans son ethos
professionnel, un souci de défense contre les intrusions abusives venues d'ailleurs. Mais au
cours de la modernité occidentale, le processus de séparation s'est produit de manière trop
sectaire, en tendant à exclure les considérations éthiques de la politique et de la science. Ainsi
s'impose désormais de trouver un moyen de concilier le maintien des démarcations légitimes
entre secteurs avec un retour de l'éthique (permettant d'assurer cohérence globale et respect
du 'principe responsabilité'). La description peut sembler anodine, mais les implications
suivantes ne le sont pas.
1 - L'éthique ne constitue pas un secteur additionnel. Autrement dit, les secteurs existants,
toujours sur leurs gardes, n'ont pas à s'inquiéter de menaces d'empiètement ou d'atteinte à
leurs prérogatives propres, venant d'un nouveau prétendant avide de se tailler un domaine.
2 - En revanche, aucun secteur n'est à l'abri du questionnement éthique, et nul ne peut, à cet
égard, se targuer d'une position de surplomb, ou d'un statut d'impunité.
Dès les débuts de l’ère moderne, les pionniers de la science nouvelle furent conscients de
l’ampleur des bouleversements apportés par leurs découvertes. Celui de Thomas S. Kuhn, La
Structure des révolutions… qui s’est attaché à repérer les traits communs aux transitions
majeures, d’origine théorique ou instrumentale, associées souvent à des noms célèbres (tels
que Copernic, Galilée, Newton, Lavoisier, Lyell, Maxwell, Darwin, Planck, Einstein, etc.).
La notion de révolution scientifique et technique revient désormais fréquemment dans le
langage commun, et la réalité perçue des changements observés dans les modes de vie
confirme sa pertinence.
Le registre des révolutions politiques (coup d’État, insurrection, émeute) ayant beaucoup
perdu de son acuité et de ses anciens attraits (dans les démocraties assagies du moins), le
moment semble venu de porter une attention renouvelée à la notion de réévaluation morale.
L’accent est mis ainsi sur une transformation des mœurs par la persuasion et la délibération,
plutôt que par la violence et la contrainte. Comme les révolutions scientifiques, ces
réévaluations morales peuvent accompagner des mutations sociales vastes et diffuses.
Quelques exemples suffiront pour fixer les idées : abolition de l’esclavage, libération des
femmes, décolonisation, remplacement de la guerre par le droit.
Cependant, il existe aussi une expérience intime, vécue, de processus de réévaluation morale :
les passages de l’enfance à l’adolescence, et à la maturité, s’accompagnent de révisions,
parfois de conversions. Les images pieuses des légendes enfantines (sur la famille, la caste ou
la classe, la nation), les visions idéales qui président au choix d’une profession ou d’un
engagement de jeunesse sont soumises à l’épreuve ultérieure de multiples chocs et tests, au
cours d’une existence humaine.
Qu’en sera-t-il pour le siècle présent ? Les nouvelles découvertes et techniques associées
poseront à l’évidence de nouveaux défis éthiques. Ceux-ci devront-ils être relevés à l’aide de
principes universels et stables, ou bien ces principes eux-mêmes seront-ils remis en cause par
les progrès scientifique et technique ?
En somme, ce n’est pas parce qu’un problème passe par des phases de prise en charge
politique, ou juridique, qu’il cesse pour autant de relever d’un questionnement et d’une
réflexion éthiques.
Entre éthique et science, il y a des parentés de démarche. La science, c’est se donner les
moyens d’approcher la vérité. L’éthique, c’est se donner les moyens d’approcher l’agir juste.
Éthique des sciences et recherche scientifique participent d’un même projet rationnel :
rapporter les effets à leurs causes réelles et véritables. Causalité naturelle, responsabilité
sociale : même si la tâche d’élucidation s’avère difficile, une même exigence est en jeu.
Le questionnement éthique est source de créativité pour les sciences. Car il soulève quantité
de problèmes importants qui appellent des compléments d’étude et ouvrent ainsi de nouvelles
voies à la recherche.
À vrai dire, l’inventeur Nobel, en créant le prix de la paix, dans le sillage des trois prix
scientifiques (physique, chimie, médecine), avait déjà ouvert une piste en cette direction. Et
la vie du physicien Andrei Sakharov (lauréat du prix Nobel de la paix en 1975) constitue un
exemple fondateur. Ayant mené, sans compromission ni complaisance, un processus de
révaluation morale de magnitude inouïe, Andrei Sakharov fut réduit à la solitude d’un exil à
demi carcéral. Mais il a survécu (tout ce qui lui a permis de survivre mérite attention) et la
postérité lui a rendu justice.
En science, on peut avoir raison tout seul. Et, seul d’abord, parvenir à convaincre par la
persuasion. Tout chercheur ayant fait ne fût-ce qu’une contribution à la fois originale et
inattendue sait la fragilité de la vérité naissante, et son besoin de protection. Après avoir pu
traverser certaines de ces adversités, on ressent émerveillement et gratitude, pour ces mœurs
de la communauté savante qui permettent (quelquefois, du moins) convergence de l’attention,
discernement de la qualité et juste reconnaissance du mérite.
Le paradoxe d’Andrei Sakharov est que son génie scientifique, portant sur des domaines
ésotériques de la physique théorique, fut tôt reconnu par ses confrères académiciens qui, dans
leur majorité, n’en avaient pas une compréhension directe (mais une chaîne de confiance
fonctionnait de proche en proche), tandis que sa rectitude morale, à propos de thèmes dont
chacun pouvait appréhender la pertinence et le bien-fondé, lui valut un isolement grandissant,
quinze ans durant (jusqu’au temps de la perestroïka de Gorbatchev). Le mouvement éthique
dans les sciences ne serait pas ce qu’il est aujourd’hui sans l’exemple donné par la vie
héroïque d’Andrei Sakharov.
En somme, il s’agit d’aborder l’éthique des sciences avec l’esprit de sérieux (au sens propre :
continuité dans le temps) qui fut si fécond pour le progrès des connaissances : effort
intellectuel, recherche persévérante de la qualité, attention aux travaux et talents originaux.
Enfin la métaéthique, portant sur les conditions de possibilité d'une réflexion éthique
collective et d'une argumentation dotée de sens, appartient pleinement au domaine de la
philosophie morale. La spécificité de cette composition ternaire (éthique normative, méta-
éthique, éthique descriptive) peut être signalée dans cet abrégé: l'éthique est une science, pas
comme les autres.
Cours d’éthique et d’éducation à la citoyenneté
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Les questions éthiques relatives aux relations entre plusieurs entreprises : par exemple
une offre publique d'achat (OPA) amicale ou hostile, l'espionnage industriel…
Les questions de modes de fonctionnement et de direction : gouvernance d'entreprise.
Le financement illégal de parti politique ou d'élection politique, par les entreprises.
L'évolution de la loi, avec par exemple aux États-Unis un débat législatif sur l'homicide
par personne morale (Corporate manslaughter (en)).
L'instrumentalisation de codes éthiques d'entreprise comme pure façade à visée
marketing.
Il y a aussi des cas de crimes ou abus dont l'auteur est en réalité une entreprise ((en)corporate
abuse, corporate crime).
Une éthique se disant plus « réaliste » et moins « normative » peut se résumer en trois points :
positive, personnelle, pratique ; l'éthique normative pouvant être définie par opposition.
1 – L'éthique réaliste est positive
De façon très complémentaire à la morale, l’éthique est dite positive car elle vise ce
qu’il convient de faire et s’énonce sous forme de recommandations positives.
Cela signifie que l’éthique ne doit pas être confondue avec la morale qui se préoccupe
de ce qu’il ne faut pas faire et qui s’énonce sous forme d’interdictions (ne pas).
De ce point de vue, la plupart des philosophes anglo-saxons qui sont à l’origine
des business ethics sont fautifs d’avoir confondu éthique et morale. Ce que les anglo-
saxons nomment éthique (ethics) est en fait de la morale : une version de l'éthique à
caractère normatif. Cette confusion a failli atteindre le vieux continent mais la
publication d’un article de référence de Paul Ricœur paru en 1992 a contribué de façon
décisive à rétablir la justesse des termes et des concepts utilisés. Voir : « Éthique et
morale » in Soi-même comme un autre,
2 – L'éthique réaliste est personnelle
Le principe et la finalité d’une éthique réaliste est l’être humain. L’idée que les
entreprises puissent être qualifiées d’éthiques est erronée car seuls les individus sont
capables d’un réel discernement et engagement éthique. L'éthique réaliste ne saurait
être pratiquée par des personnes morales (entreprises ou autres institutions) mais
uniquement par des personnes physiques, seules dotées de conscience individuelle.
En ce sens, L'éthique réaliste se situe à l’opposé des business ethics normatives de type
anglo-saxon, lesquelles visent l’énonciation de normes contraignantes pouvant
s’appliquer au fonctionnement institutionnel des entreprises. L’éthique réaliste estime
que cette prétention est abusive sur un plan intellectuel, irréaliste sur un plan pratique,
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et qu’elle a été la cause de graves fourvoiements éthiques au cours des 3 dernières
décennies.
3 – L'éthique réaliste est pratique
L'éthique réaliste débouche sur une sagesse pratique car elle doit être une ressource
vitale pouvant être pratiquée au quotidien par des professionnels. En tant que sagesse
pratique appliquée au monde professionnel, elle doit viser un « vivre-ensemble »
professionnel de qualité. Elle poursuit cette visée par certains moyens privilégiés tels
que : la recherche du bien commun, la pratique du discernement, etc. Là encore, Paul
Ricœur fait office de référence : dans l’article sub-cité, il remet en valeur le concept
aristotélicien de phronesis (Éthique à Nicomaque) qu’il traduit par sagesse pratique et
qu’il localise en aval d’une éthique fondamentale nécessairement théorique, elle-même
située en amont.
L'éthique réaliste souhaite se dégager des vues spéculatives vaines ou ineptes, propres
aux bulles universitaires où elle est née. À ce titre, elle se fonde sur une première
distinction fondamentale qui consiste à ne pas la confondre avec le domaine des normes
morales ou des critères déontologiques.
II. Éthique professionnelle
L'éthique professionnelle couvre le vaste ensemble des questions et phénomènes éthiques qui
sont soulevés par l'exercice concret de fonctions ou métiers particuliers dans l'entreprise :
l'éthique de l'informatique, l'éthique de l'environnement, etc.
L'éthique de l'informatique est une branche de l'éthique appliquée qui traite de la façon dont
les usagers et les professionnels de l'informatique font un usage de l'information et prennent
des décisions au regard de critères éthiques en commençant, par exemple:
par se protéger soi-même, par exemple en adoptant un logiciel antivirus;
par mieux protéger et respecter les autres;
et également par respecter l'environnement, en adoptant notamment des règles
de sobriété numérique.
L'éthique de l'informatique s'intéresse tant à la gouvernance (décision du management) qu'au
comportement individuel des utilisateurs et des professionnels de l'informatique.
En 2009, l'utilisation massive de courriers électroniques nécessite par exemple la définition de
règles éthiques pour l'usage de l'information.
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II.2. L'éthique des mathématiques
L'éthique des mathématiques est l'une des formes de l'éthique appliquée à un domaine
concret qui examine :
les règles et les principes de l'éthique dans le contexte des mathématiques appliquées;
les diverses questions morales ou éthiques qui apparaissent dans le contexte de
la recherche mathématique ;
les obligations pour une personne se livrant aux mathématiques appliquées, en
particulaire les mathématiciens qui travaillent dans les domaines qui ont des
conséquences importantes pour la société, par exemple, la loi, la finance, les affaires,
l'économique, l'armée et l'environnement.
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national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE) a été créé en 1983
après la première naissance par Fivete en 1982 ;
La contraception ;
L'avortement ;
Le don et l'usage d'éléments et produits ou sous-produits du corps humain (don de
gamètes ou d’embryons ; don de sperme, don d'ovules dans le champ de la
reproduction) ;
la privatisation de banques d'organes ou de greffons (de sang de cordon par exemple) ;
L'hypothèse d'une gestation de l’embryon humain par des espèces non humaines ;
Les questions de clonage humain (thérapeutique ou non) ;
Le diagnostic prénatal ou préimplantatoire ;
La connaissance de caractères génétiques et la thérapies géniques ;
L'eugénisme (stérilisation de handicapés mentaux et de personnes à risque
génétique...) ;
statut juridique de l'embryon et du fœtus (lié en droit français à la « dignité de la
personne humaine ») ;
la recherche sur l'embryon et l'utilisation d'embryons surnuméraires ;
les cellules-souches. La recherche sur les cellules-souches humaines est autorisée, en
France, à titre exceptionnel, et uniquement à partir des embryons surnuméraires7.
les neurosciences, dont les progrès permettent peu à peu de lire, voire de modifier
l'activité du cerveau ;
les nanobiotechnologies
Aujourd'hui, l'attitude générale en sciences repose sur l'a priori des déterminismes,
quelle que soit leur forme. La pensée humaine, dans ses rapports au monde, est une
confrontation permanente aux systèmes complexes qui nous habitent et dans lesquels nous
habitons. Chacun d'eux possède une histoire propre qui le rend singulier et source continue de
surprises. On se prend à le penser comme système autonome avec ses lois propres et ses degrés
de liberté interne.
Quand il s'agit de penser l'être humain, la tentation est encore plus forte de lui prêter un libre
arbitre. La question fondamentale est donc celle de la compatibilité entre la pensée scientifique
en quête de déterminismes, et la compréhension des complexités, sources continues
d'indéterminismes. Comment obtenir une conciliation quand, de la physique à l'éthique, en
passant par la cellule biologique, les êtres multicellulaires et les sociétés, on remonte les
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niveaux d'organisation ? Peut-on y parvenir quant à l'être humain et la société sans remettre en
question certains aspects cruciaux comme la responsabilité et l'éthique ?
Ce domaine de l'éthique des affaires traite pour une entreprise de son devoir de s'assurer
que ses produits et ses processus de productions ne sont pas nuisibles. Certains des dilemmes
les plus criants dans ce domaine proviennent du fait que tout produit ou processus de production
comprend généralement un certain degré de danger, et qu'il est difficile de définir un degré de
permissivité, ou encore que ce degré de permissivité peut dépendre d'éléments changeants
comme l'état des technologies de prévention, ou le niveau (évolutif) du type de risque
acceptable ou non.
Produits et services défectueux, créant une dépendance, ou par nature dangereux ;
relations éthiques entre l'entreprise et son milieu naturel : pollution, éthique de
l'environnement, droits à polluer au CO2 ;
problèmes éthiques posés par de nouvelles technologies : alimentation à base
d'organisme génétiquement modifié, et autres applications du principe de précaution ;
éthique relative aux essais des produits : droits des animaux et utilisation d'animaux
dans des expérimentations de produits, appel à des populations en position économique
précaire (tels des étudiants par exemple) comme objets de tests de médicaments.
Exemples : Catastrophe de Bhopal, Amiante.
Les connaissances et les compétences ont de la valeur, mais ne sont pas des objets faciles
à « posséder ». Il n'est pas simple non plus de décider qui devrait avoir le plus de droits sur une
idée :
l'entreprise qui a formé son salarié ou le salarié lui-même ?
le pays dans lequel pousse une plante à caractère médicinal ? l'entreprise qui a
« découvert » et développé le potentiel médical de cette plante ?, la communauté des
prescripteurs et praticiens qui l'utilisent pour soigner ? les patients dont la santé, le bien-
être et peut être la vie en dépendent ?
Tout cela donne donc lieu à des tentatives de revendication de propriété et à des conflits relatifs
à cette propriété :
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intelligence économique : dans quelle mesure doit-on placer l'intérêt d'un État au-
dessus de celui d'un autre, les méthodes d'intelligence économique respectent-elles
toujours les lois, ou ne dérivent-elles pas souvent vers l'espionnage industriel, ce qui
est rendu plus facile par l'ouverture du réseau internet et les sources ouvertes ;
violation de brevet, de copyright ou de marque déposée ;
utilisation abusive du système de propriété intellectuelle pour étouffer la compétition
(patent misuse (en), copyright misuse (en), patent troll, submarine patent (en)) ;
la notion même de propriété intellectuelle a été critiquée sur le terrain éthique ;
Employee raiding (en) : la pratique consistant à attirer les employés clés de chez
un concurrent, pour tirer un avantage injuste des connaissances ou compétences qu'ils
possèdent ;
le fait d'employer toutes les personnes les plus talentueuses dans un domaine précis,
indépendamment du besoin réel que l'entreprise a de leur talent, dans le but d'empêcher
les concurrents de recruter ces talents ;
bioprospection (éthique) et biopiraterie (éthiquement répréhensible).
Exemple : les intérêts privés versus les intérêts publics dans le projet Génome Humain.
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Les codes de déontologie peuvent aussi être une aide lorsqu’un membre de la profession
est accusé d’avoir commis une faute professionnelle ou qu’il fait même l’objet de poursuites
judiciaires. S’il peut prouver qu’il a respecté le code de déontologie de la profession, il est
probable que l’on considérera qu’il a exercé sa profession conformément aux normes
applicables en la matière. Si, dans l’exercice de la profession, il porte préjudice à quelqu’un, il
risquera moins d’être déclaré fautif s’il peut prouver qu’il s’est conformé à ces normes.
Toutefois, au nom du principe de la confiance (Pellegrino, Veatch et Langan, 1991), le public
est en droit d’attendre la meilleure décision professionnelle possible pour l’intérêt général.
C’est au nom de ce même principe que, dans le cas de la relation médecin-patient, le patient
est en droit d’attendre que le médecin agisse au mieux de ses intérêts. Toutefois, il peut surgir
un dilemme d’ordre moral lorsque le bien commun est menacé, alors qu’individuellement le
patient est traité au mieux de ses intérêts. En pareil cas, c’est normalement le bien commun qui
prime sur celui de l’individu. De toute manière, les codes de déontologie ne remplacent pas les
dispositions juridiques sur la responsabilité civile au sujet de laquelle le gouvernement a
promulgué des lois destinées à protéger l’intérêt public (Cohen, 1982).
Quelle que soit la profession considérée, la nécessité d’élaborer un code de déontologie lui
est presque invariablement inspirée par des problèmes ayant un impact direct sur celle-ci. Aussi
ces codes sont-ils en général étroitement axés sur les préoccupations propres à cette profession.
Ils ne sauraient ignorer pour autant des problèmes sociaux plus généraux (Fawcett, 1993).
Lorsqu’on sait l’influence considérable qu’ont certaines professions, il est sûr que, si leurs
codes de déontologie prenaient en considération des questions sociales plus générales,
plusieurs des domaines de l’activité humaine qui, pour le moment, échappent aux efforts
déployés en faveur du bien commun de l’humanité bénéficieraient largement de la conjonction
de ces efforts et de l’émulation provoquée par des codes ainsi conçus. Cet effort concerté
contribuerait sûrement à limiter certains des dangers qui menacent l’humanité, tels que le
militarisme ou la destruction de l’environnement.
La plupart des organisations professionnelles ont établi leurs codes de déontologie à partir
d’une approche descendante, c’est-à-dire du sommet vers la base, d’après laquelle ce sont les
représentants élus de la profession qui se chargent de cette tâche. Or, les codes de déontologie
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sont généralement mieux respectés lorsqu’ils sont élaborés à partir d’une approche ascendante,
c’est-à-dire de la base vers le sommet, car le fait d’associer au processus les membres de la
profession donne à ceux-ci un sentiment d’appropriation qui les incite davantage à se
conformer au code qui en résulte.
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Cours d’éthique et d’éducation à la citoyenneté
« Citoyen » est sans doute un mot très à la mode (entreprise citoyenne, attitude citoyenne,
consommation citoyenne...). Que signifie « éducation à la citoyenneté », affublée de deux autres
adjectifs tout aussi tendance, active et responsable ? La citoyenneté est d’abord un statut
juridique qui octroie un certain nombre de droits et de devoirs et qui est, au moins depuis la
modernité, attachée à la nationalité. Selon cette acception, il n’est nul besoin d’être éduqué à être
pleinement citoyen camerounais, il suffit d’être de nationalité camerounaise, d’avoir dix-huit ans
et de n’être pas déchu de ses droits civiques. Mais le mot « citoyen » véhicule aussi une lourde
charge morale : être citoyen en démocratie nécessiterait un certain nombre de capacités sans
lesquelles la démocratie se mettrait elle-même en danger. À partir de cette charge morale,
l’acception de « citoyenneté » s’étend au terme parent de « civilité », à l’idée d’un «
adoucissement des mœurs qu’est censée produire la vie dans une cité ». « Citoyenneté » est un
terme qui fait consensus au contraire de « civilisation » qui crispe plus depuis les expériences
coloniales et avec la remise au goût du jour du « choc des civilisations ». Pourtant, « citoyen »,
« citoyenneté », « civique », « civilité » et « civilisation » sont tous des dérivés du latin civis,
citoyen, qui est en latin le terme primaire qui forme civitas, la cité, donc on est avant tout citoyen
vis-àvis d’un autre citoyen avant d’appartenir à la cité ; la cité est formée des concitoyens
(traduction qu’Emile Benvéniste préfère à citoyen pour cette raison).
I. Définition
La citoyenneté, dérive du Latin, civitas, ensemble des citoyens et aujourd'hui elle peut se définir
selon quelques axes qui recouvrent ce qu'il convient d'appeler, les anciennes et les nouvelles
citoyennetés.
Ainsi, elle est, statut juridique conférant des droits égaux (civils et politiques, sociaux,
économiques) et des obligations égales pour tous dans une communauté politique donnée avec
la participation au pouvoir, à la décision et au contrôle.
Elle est aussi un ensemble de qualités morales, de devoirs civiques considérés comme nécessaires
à la bonne marche de la cité, lieu où chaque personne doit accepter la règle commune (le
civisme).
Aujourd'hui la citoyenneté se définit de manière plus large comme un ensemble de rôles sociaux
spécifiques où la personne a la possibilité de participer à des groupes qui défendent ses intérêts,
ses idées comme les associations écologiques, associations de consommateurs, de défense des
droits de la personne, associations de quartier etc. Donc, être citoyen, c'est être partenaire de
plusieurs responsabilités communes auxquelles on participe en s'informant, en informant, en
travaillant, en consommant, en produisant. En conséquence la citoyenneté, c'est la capacité de
reconnaître les valeurs éthiques requises pour la vie en commun, d'effectuer et d'agir avec la
conscience d'appartenir à un corps social organisé.
Il faut enfin signaler qu'elle est nationalité, mais elle peut constituer un statut transnational qui a
le monde comme cadre d'expression, cela signifie une interdépendance entre nations entre les
personnes ; ainsi les citoyens du monde accordent une importance au mondialisme, l'ensemble
des idées et des actes exprimant la solidarité des populations du globe.
Les axes que l'école doit privilégier si elle veut s'engager dans une éducation à la
citoyenneté sont les suivantes selon le BIT (bureau internationale du travail).
C'est l'axe organisateur de l'éducation à la citoyenneté; ce sont des règles qui organisent
les rapports entre les hommes, ils permettent un mieux vivre ensemble, rendent possiblement
réalisable la relation entre l'éthique personnelle de chacun et les lois qui régissent les rapports
sociaux ; ce sont donc les valeurs vers lesquels tendent les volontés humaines. Le citoyen doit
connaître les concepts et le contenu des droits de l'homme dans les textes juridiques, les valeurs
de justice, de liberté, de solidarité, etc.…Il doit les promouvoir à travers le respect de soi, de
l'autre, à travers le règlement intérieur dans la vie associative à l'école; assumer, ses
responsabilités, user de la liberté d'expression à travers le journal scolaire, le conseil de classe,
le conseil de coopération, le conseil d'étudiants ou le foyer socio-éducatif, les clubs comme les
clubs E I P, Environnementaux…
III.2. La démocratie:
C'est un ensemble de valeurs que chaque peuple peut s'approprier, les transformer selon
son génie propre, les adapter: c'est une pratique. C'est un système social, politique, qui restitue
libertés et pouvoirs de décisions l'ensemble des acteurs sociaux, qui reconnaît les décisions
émanant du dialogue institutionnalisé, prônant l'initiative et l'exemplarité c'est-à-dire mettre en
pratique la théorie en somme l'action. Elle suppose les libertés publiques et la séparation de
pouvoirs, des élections libres et périodiques. C'est une façon de vivre ensemble avec le respect
de l'autre avec un débat et une culture du dialogue. Elle est liée aux droits humains, leur offre un
cadre, mais le respect des droits humains entraîne aussi la démocratie.
José BENGOA, sociologue chilien, fait la distinction entre différentes manifestations de
la démocratie :
- la démocratie "formelle", qui légitime les partis politiques, repose sur le droit de vote
pour tous, la liberté d'expression et la division des pouvoirs;
Une approche plus récente, fondée sur l'analyse stratégique, part de présupposés
différents :
Les relations stables entre individus sont donc vues comme une coopération conflictuelle,
qui n'est donc pas exempte de tensions et d'orientations diverses. C'est une vision plus systémique
des relations humaines.
Au campus, en salle de cours la participation des élèves doit être effective dans toutes les
structures citées avant comme les clubs, les associations, etc.…
III.3. Le développement
Il est nécessaire à l'exercice de la démocratie, des droits de l'homme; ces derniers sont des
conditions de réalisation du développement, un développement durable. L'éducation: la
citoyenneté doit offrir aux citoyens des compétences utiles aux besoins du développement.
III.4. La paix
C'est plus que l'absence de guerre, c'est une situation où les conflits sont réglés par la non-
violence; elle est liée aux droits de l'homme et à la démocratie; c'est la résultante d'un ensemble
de conduites démocratiques inspirées de droits humains; elle naît du respect de droits humains,
du développement, du respect de l'environnement. En cours, à l'école, certaines activités
devraient la favoriser comme la coopération, les séances de résolution non violente des conflits
etc.…
Comment faire de l'éducation à la citoyenneté une réalité dans nos écoles ou bien
comment renforcer les acquis, si l'on sait que l'éducation à la citoyenneté est global
s'adressant non seulement aux activités de cours mais aussi à l'organisation scolaire et à
l'ouverture de l'école sur le monde.
L'éducation à la citoyenneté passe par le développement de l'autonomie de l'enfant, sa
responsabilisation, quelle relation pédagogique privilégier, quel dispositif mettre en
place ?
Quelles approches pour que l'éducation à la citoyenneté soit prise en charge par le projet
d'école?
Quelles disciplines prendront en charge cette éducation? L'Éducation civique, l'histoire,
la géographie etc.…Interdisciplinarité, Transdisciplinarité?
La prise de parole est essentielle dans l'éducation à la citoyenneté, comment l'organiser
avec beaucoup d'efficience, comment initier les élèves au débat démocratique?
Une école qui éduque à la citoyenneté doit s'ouvrir sur la vie, collaborer avec les ONG,
les parents d'élèves, les partenaires, comment renforcer cet acquis?
Dans une école qui éduque à la citoyenneté, les élèves doivent être au service de leur
communauté, quels projets allez-vous développer avec vos élèves?
La Citoyenneté c'est un mieux vivre ensemble adhérer à des valeurs, comment les
promouvoir à l'école?
L'éducation à la citoyenneté c'est aussi l'éducation dans une perspective planétaire,
comment ouvrir les jeunes à la dimension mondiale? Comment préparer les jeunes à
prendre des décisions, par quels projets peuvent-ils s'ouvrir au monde sans perdre leur
âme?
Une école qui éduque à la citoyenneté doit être une école intégratrice, une école qui lutte
contre les déperditions scolaires, quelle pédagogie?
Toutes ces questions exigent quelques changements au plan institutionnel, quels
changements, quels obstacles, quelle évaluation?
Chapitre 5 : Nécessité de l'éducation à la citoyenneté à l’université.
Dans ce contexte, « sciences » est utilisé au sens large et comprend les sciences de la
nature, les sciences humaines et sociales, et les arts et lettres. Les défis auxquels les sciences sont
confrontées aujourd’hui et les relations complexes entre science et société font apparaître toute
l’importance d’une sensibilisation aux responsabilités des scientifiques. À la lumière des récents
évènements et débats, l’éducation à l’éthique de la recherche doit être renforcée pour assurer une
confiance dans la recherche scientifique. Les scientifiques ont divers rôles : recherche,
encadrement, évaluation et expertise de leurs pairs. Parfois il leur est demandé de conseiller les
gouvernements et institutions. Les principes éthiques s’appliquent à tous ces rôles.
I. Les principes éthiques à l’égard des hommes de sciences.
I.1. Principe 1 : Les défis auxquels les sciences sont confrontées aujourd’hui et les relations
complexes entre science et société mettent en lumière les responsabilités des scientifiques.
I.2. Principe 2 : Une éducation à l’éthique en sciences clarifie les responsabilités des
scientifiques et explore les façons d’y faire face.
L’éthique des sciences devrait faire partie intégrante de l’éducation et de la formation des
scientifiques. Une attitude positive de réflexion, d‘éveil et de sensibilisation aux dilemmes
éthiques que les chercheurs pourraient rencontrer au cours de leur vie professionnelle est
importante dès les débuts de leur carrière. Par ailleurs, les scientifiques expérimentés, directeurs
de recherche ou chercheurs chevronnés, se doivent de promouvoir et d’intégrer à leur
enseignement une sensibilisation à l’éthique de la recherche. Il s’ensuit que la formation à
l’éthique doit faire partie de la carrière d’un scientifique du début à la fin. Les normes changent,
les méthodes changent, les responsabilités changent – tout le monde a l’obligation de se tenir au
courant.
L’étude de l’éthique peut être un guide utile non seulement dans la vie de tout un chacun
mais également pour le développement des idées et des compétences dont les communautés
d’individus ont besoin pour faire face aux défis du futur.
L’éducation à l’éthique en sciences doit couvrir les deux aspects de la responsabilité
éthique des scientifiques : la conduite responsable de la recherche elle-même ; et le contexte
socio-éthique de la recherche, tout particulièrement les questions éthiques concernant les
relations entre les sciences et la société. Etant donné la complexité et la sensibilité des problèmes
éthiques dans les sciences de la vie (qui marqueront ce siècle), il faut souligner les problèmes
d’éthique les plus importants liés à la recherche biomédicale sur les êtres humains, qui
comprennent la protection des personnes, le problème du consentement libre et informé, ainsi
que la primauté de la personne humaine qui doit prévaloir sur les intérêts de la science ou de la
société.
Les normes pertinentes sont définies et établies par la communauté scientifique elle-
même, l’idéal de l’intégrité de la recherche ayant ses racines dans l’autonomie des sciences. Il
convient de dire ici que la protection des lanceurs d‘alerte relève de l’éthique interne – ainsi que
les recommandations sur la procédure à suivre pour signaler un cas de manquement présumé.
L’éthique externe de la recherche par contre est confrontée à d’autres types de questions
déontologiques liées à la recherche, en particulier celles qui concernent la relation entre le
chercheur et le sujet de la recherche et entre le chercheur et la société (individus et institutions)
en dehors de la communauté des chercheurs. Les problèmes concernent ici spécifiquement, par
exemple, les risques et les avantages associés aux protocoles d’essais cliniques et à leur mise en
œuvre lorsque ceux-ci incluent des expériences sur des êtres humains, sur des matériaux
biologiques d’origine humaine, ou des expériences sur les animaux, qui sont réglementés
différemment dans divers pays. Elle couvre des questions telles que la mise en oeuvre et
l’utilisation responsable des résultats des projets de recherche, la possibilité de limiter la
recherche en se fondant sur des objections d’ordre éthique, voire en se fondant sur les
conséquences anticipées des intuitions de recherche (double utilisation de la recherche).
L’éthique externe de la recherche couvre également le cadre juridique qui définit les normes
spécifiques à chacun des domaines, ainsi que la protection des valeurs et des droits fondamentaux
comme les droits humains.
I.3. Principe : Les responsabilités des scientifiques incluent une sensibilisation aux questions
concernant l’intégrité de la recherche et l’éthique de la recherche au sens large, et une capacité à
faire face à ces questions.
I.4. Principe : L’éducation à l’éthique des sciences doit porter essentiellement sur une
clarification de ces responsabilités et doit promouvoir une conduite responsable de la recherche.
I.5. Principe : Les responsabilités éthiques des scientifiques doivent être intégrées au cursus des
études scientifiques et leur apprentissage doit être considéré comme participant à la maîtrise du
domaine spécifique de recherche lui-même.
Ces principes s’appliquent à la science au sens large, c’est-à-dire aux sciences de la nature, aux
sciences sociales et humaines, et aux arts et lettres. Tout le monde est conscient que tout ne peut
être exprimé par des principes et des règles. Il y a une culture, un éthos, en science qui fait que
l’on apprend par exemples paradigmatiques et en côtoyant des personnalités modèles. Les
mentors ont un rôle important dans la formation des jeunes chercheurs.
I.6. Principe : L’éducation à l’éthique des sciences vise à incorporer une sensibilisation à
l’ensemble des aspects éthiques liés aux décisions et aux choix auxquels les scientifiques – au
sens large – ont à faire face dans la pratique de leur travail.
I.9. Principe : Des cas spécifiques au domaine devront être identifiés et partagés avec d’autres
enseignants et régulièrement actualisés.
Par ailleurs, sans une connaissance de base de l’éthique et une formation leur permettant de
développer leurs compétences argumentatives, les chercheurs débutants seront incapables de
remettre en question certaines pratiques problématiques qu’ils pourraient rencontrer au cours de
leur carrière.
I.10. Principe : L’éducation à l’éthique des sciences permettra aux chercheurs débutants de
comprendre la différence entre ce qui est et ce qui n’est pas acceptable du point de vue éthique,
et les empêchera de faire des erreurs qu’ils pourraient regretter plus tard en raison de
conséquences néfastes pour les autres, pour la science et pour leur propre carrière.
Dans certains cas, l’éthique fait déjà partie des cursus de formation à la recherche, mais ceci n’est
pas général. Il faut prendre ce fait en considération lorsqu’on examine les façons d’introduire et
de développer l’éthique dans les cursus qui comportent de la recherche. L’éducation à l’éthique
préparera aussi les chercheurs débutants à prendre une place active dans les débats sur les
conséquences de leur activité scientifique, et à répondre à ceux qui se posent des questions à son
sujet. Avec une formation plus approfondie, les scientifiques pourraient également servir la
communauté scientifique en participant aux comités d’éthique et comités de contrôle interne. La
compétence scientifique et l’intégrité personnelle des directeurs de thèse est un facteur décisif
pour la recherche mais aussi pour l’éducation à l’éthique des chercheurs débutant leur carrière.
Après avoir précisé le sens donné ici au concept de citoyenneté, mettons-le en relation avec
la construction des droits de l’homme qui, dans nos démocraties, en fixe certains caractères,
certains contenus, certains horizons.
Au centre de toute réflexion sur la citoyenneté se place le couple que celle-ci forme avec la
nationalité. Remarquons d’abord que les textes internationaux utilisent généralement le terme de
nationalité pour désigner l’appartenance à une communauté politique organisée par un État, et
très peu celui de citoyenneté. Toutefois, si nationalité est le plus souvent employée, notamment
pour affirmer que « tout individu a droit à une nationalité » (article 15.1 de la Déclaration
universelle, 1948), ce terme se décline lui-même de façon multiple.
Il est bien des États où les nationalités sont diverses et reconnues, ou non, comme telles.
Généralement, une nationalité est dominante car majoritaire, tandis que les autres sont qualifiées
de minorités, ce qui pose le problème des droits spécifiques à leur accorder. Avec cela se profilent
les assimilations nationalité-minorité-culture, assimilations qui portent à la fois la reconnaissance
des différences mais également les risques d’enfermement. Cet enfermement est ambigu car
parfois, souvent, souhaité autant par ceux qui enferment que par ceux qui sont enfermés. Les
identités sont en cause avec le jeu complexe entre « je », « nous », « les autres ». Entre « nous »,
on défend mieux une ou des identités héritées ; on est aussi bien au chaud pour se protéger du
mouvement actuel vers des identités plurielles et mobiles. À ce risque d’enfermement s’ajoute
ceux de l’essentialisation de la culture et de la réduction de la culture à la religion. L’usage de la
langue naturelle pour parler des sociétés présentes et passées en témoigne. Les mots sont les
choses, les choses sont comme cela parce que c’est ainsi. Seul un travail de mise à distance,
complexe mais nécessaire, peut ici construire une distance critique indispensable pour toute
ouverture à l’autre.
Ainsi approchée dans sa relation avec la nationalité, la citoyenneté est un statut qui
confère à son titulaire un ensemble de droits et d’obligations par ce qu’il est membre d’une
communauté politique. À cela s’ajoute une dimension affective plus délicate à appréhender
qu’exprime l’idée d’un sentiment d’appartenance à une communauté de destin qui lie présent,
passé et avenir. Dans une démocratie, les droits spécifiques du citoyen-national sont les droits
politiques, qui lui confèrent une participation à la souveraineté collective, au peuple politique,
ainsi que certains droits spécifiques dont ne bénéficient pas les étrangers. Pendant longtemps, il
y a eu dissociation entre citoyenneté et nationalité dans la mesure où ces droits politiques
n’étaient accordés qu’à une partie des nationaux. Il en est ainsi des femmes en France jusqu’en
1944, ou en Suisse jusqu’en 1971 pour les élections fédérales. Les mineurs nationaux, soit la
majeure partie de nos élèves, sont donc des citoyens potentiels, à venir. Les autres sont citoyens
d’ailleurs, de par leur nationalité qui les fait appartenir à une communauté politique différente.
Mais le fait qu’ils soient citoyens d’une autre communauté politique ne signifie pas qu’ils sont
ou seront privés de droits à leur majorité s’ils restent dans l’État d’accueil. Simplement, mais
c’est essentiel, ils n’auront pas la totalité des droits des citoyens de cet État, en particulier les
droits politiques. On peut effectivement l’ignorer, mais c’est aussi un déni de reconnaissance de
la différence.
Comme toute construction générale, celle des droits de l’homme est l’objet d’interprétations
diverses. Depuis quelque temps, une tendance lourde s’affirme pour mettre en avant les seuls
droits civils, pensés comme autant de libertés liés à l’individu, reléguer au second plan les droits
politiques et tenter de dépecer les droits économiques et sociaux. Cette tendance est accentuée
par la crise du politique et ses recompositions, provoquée en partie par l’extension de la logique
marchande à des domaines de plus en plus vastes de la vie personnelle et sociale, extension qui
s’accompagne d’une augmentation des inégalités et des processus complexes de désaffiliation et
de délitement du lien social. Ainsi, au mouvement historique qui a construit comme solidaires
ces différentes catégories de droits, s’affirme aujourd’hui un mouvement contraire qui s’efforce
de les séparer. Le politique mis de côté, il reste les droits de la personne humaine affirmés
indépendamment de toute appartenance et donc de la citoyenneté.
Appuyée sur ce mouvement et prise par les urgences du vivre ensemble, l’éducation civique peut
dès lors laisser de côté ce qui relève du politique et réduire le juridique aux règles du vivre
ensemble, remplacer la loi par le contrat.
Les textes officiels et les proclamations des autorités scolaires, qu’ils soient généraux sur
l’École ou plus précisément sur l’éducation à la citoyenneté, témoignent à la fois des finalités
ambitieuses qui lui sont attribuées et des injonctions souvent contradictoires dont elle est l’objet.
Toutefois, au-delà des ambitions généreuses qui affirment la formation d’un individu libre et
responsable, critique et participant à la vie publique, l’accent est mis très souvent sur
l’apprentissage des règles du « vivre ensemble ». Le souci de la pacification scolaire dont on
espère le transfert dans la vie sociale témoigne d’abord d’une priorité accordée à la construction
de comportements et d’attitudes conformes à ce qu’attend la société.
Cette priorité accordée au « vivre ensemble » laisse de côté une grande partie de ce qui fait la
citoyenneté. Outre la dimension proprement politique, le « vivre ensemble » se décline avant tout
sur la base d’une sorte de consensus, d’accord sur quelques évidences : « ne pas parler tous en
même temps, ne pas exercer de violence sur ses camarades, arriver à l’heure, faire son travail,
etc. ». Il laisse de côté ce qui serait une initiation plus systématique à l’univers juridique à la fois
comme référence pour le quotidien, par exemple, sur les règles de vie ou sur la résolution des
conflits, et comme travail d’ouverture à un univers qui structure et organise notre vie sociale, les
rapports avec les autres.
Cette inscription comme discipline scolaire va généralement de pair avec l’affirmation selon
laquelle cette éducation intéresse toute la communauté scolaire, bien au-delà de la seule
discipline. Cette extension prend au moins deux formes :
il y a tout ce qui relève du « vivre ensemble » et qui touche des comportements sociaux
et donc concerne tous les adultes ; cette forme se traduit souvent par la mise en place de
dispositifs de parole et de participation;
d’autre part, dans la mesure où parmi les compétences citoyennes figure la participation
aux débats publics et la capacité de choisir en connaissance de cause, le citoyen doit être
formé et informé de ce qui est débattu dans cet espace public ; dès lors, les approches
poly-disciplinaires sont fortement recommandées.
Toutefois, même si le lien entre éducation à la citoyenneté et expérience est ancien, force est de
constater que, dans beaucoup d’Écoles, les savoirs et leur transmission ont tenu très largement
la première place.