Fibrillation Auriculaire

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2-0230

2-0230
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

Fibrillation auriculaire

H Lardoux, F Schaison, L Jacq, M Habis, M Pezzano

L es nombreux travaux consacrés à la fibrillation auriculaire ces dernières années ont permis une meilleure
appréhension de ses complications et une rationalisation des indications des traitements antithrombotiques.
© 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.


électrophysiologiques auriculaires et la mise au point
Introduction de nouvelles thérapeutiques médicamenteuses. Tableau II. – Pronostic de la fibrillation auri-
culaire.


• La FA multiplie par 2 la mortalité cardiovascu-
L’irrégularité du pouls et du cœur, « delirium cordis », Physiopathologie laire
est restée longtemps mal comprise. Le terme de • La FA augmente le risque d’AVC
fibrillation a été proposé en 1874 par Vulpian et, en - par 17, en cas de FA valvulaire (atteinte mitrale)
1883, l’Écossais Mackensie documente la perte de La FA (tableaux I, II) résulte de la dépolarisation - par 5, en cas de FA non valvulaire
l’activité auriculaire par la disparition de l’onde A du anarchique des cellules du myocarde auriculaire. De • La FA majore le risque de défaillance cardiaque
jugulogramme. multiples troubles conductifs intra-auriculaires et une • La FA, dans le cas particulier du syndrome de
Définie par l’absence de contraction auriculaire Wolff-Parkinson-White, expose à un risque de fi-
dispersion des périodes réfractaires auriculaires
brillation ventriculaire et donc de mort subite
coordonnée, la fibrillation auriculaire (FA) est, en caractérisent la FA. Plus la longueur d’onde (produit de
pratique clinique, la plus commune des arythmies la vitesse de l’influx par la durée de la période
FA : fibrillation auriculaire ; AVC : accident vasculaire cérébral.
cardiaques. Sa fréquence est grande, intéressant 0,4 % réfractaire) est courte, plus le risque de FA est élevé, car
d’une population générale. Prévalence de la FA et âge de nombreux « courts-circuits » focaux peuvent se
sont étroitement liés, celle-ci passant de 0,5 % pendant remplissage télédiastolique des deux ventricules et par
produire et coexister, responsables de l’entretien de la
la sixième décade à près de 10 % au cours de la réduction de la durée de la diastole, surtout en cas de
dépolarisation anarchique des cellules auriculaires.
neuvième décade. rythme ventriculaire rapide. Le retentissement
L’irrégularité et la cadence du rythme ventriculaire
hémodynamique est d’autant plus marqué que
Arythmie faussement banale, la FA expose à un dépendent à la fois de l’irrégularité des ondes
coexistent des anomalies myocardiques et/ou
« sur-risque » cardiovasculaire, dominé par les auriculaires et de l’état de perméabilité du nœud
auriculoventriculaire (état réfractaire transitoire selon le valvulaires, et qu’un effort est demandé (la baisse du
accidents emboliques, essentiellement accidents
vasculaires cérébraux (AVC) (regroupant accidents degré de pénétration des influx auriculaires). Le nœud débit cardiaque peut atteindre 30 % des valeurs de
ischémiques et hémorragiques cérébraux) et plus auriculoventriculaire joue donc le rôle de filtre. La référence). En amont, l’altération de la vidange
rarement systémiques, risque significativement réduit « qualité » du filtre conditionne le type de la réponse ventriculaire a une double conséquence :
par un traitement anticoagulant efficace. ventriculaire (cadence ventriculaire) (fig 1) : rapide, si la – aiguë : augmentation de la pression capillaire
conduction nodale est normale ; lente, si la conduction pulmonaire (œdème pulmonaire) ;
La prise en charge « moderne » de cette arythmie
fréquente nécessite donc une démarche clinique est spontanément altérée ou surtout modifiée par les – chronique : dilatation progressive du massif
rigoureuse, impliquant une évaluation précise de la thérapeutiques agissant au niveau nodal (par auriculaire dont le corollaire est la baisse des vitesses
tolérance hémodynamique, une enquête étiologique exemple, les digitaliques). de vidange auriculaire, l’agrégation érythrocytaire
(le plus souvent négative) et la mise en route d’un Les conséquences hémodynamiques de la FA sont (responsable du phénomène échographique du
traitement dont les orientations essentielles ont pour directement liées à la perte de la systole auriculaire : contraste spontané), la mise en jeu des facteurs de
objectif la prévention du risque embolique, le contrôle baisse du débit cardiaque, à la fois par perte du coagulation (plaquettes, thrombine), véritable cercle
de la cadence ventriculaire et secondairement la
restauration du rythme sinusal. L’avènement de
Tableau I. – Étiologies de la fibrillation auriculaire.
l’échocardiographie transthoracique (ETT), et plus
encore de l’échocardiographie transœsophagienne, Cardiaques • Valvulopathies : mitrale, aortique, tricuspide
ont conduit à des attitudes pragmatiques de • Cardiopathies ischémiques : infarctus du myocarde, coronaropathie chronique
« cardioversion rapide », encadrées par une • Hypertension artérielle
anticoagulation efficace, permettant une restauration • Cardiomyopathies : dilatée, hypertrophique
rapide de la fonction contractile de l’oreillette. Quant • Péricardites aiguë et chronique
aux choix thérapeutiques visant au maintien du • Embolie pulmonaire
rythme sinusal, qu’ils soient pharmacologiques • Cardiopathie congénitale : communication interauriculaire
(antiarythmiques) ou électrophysiologiques faisant
• Troubles du rythme : maladie rythmique auriculaire, syndrome de préexcitation
ventriculaire
appel aux méthodes modernes d’ablation (chirurgie,
• Chirurgie cardiaque postopératoire
radiofréquence) actuellement en cours d’évaluation,
les résultats restent encore globalement décevants Extracardiaques • Hyperthyroïdie, phéochromocytome
avec un taux de rechute de la FA, à 6 mois, avoisinant • Pathologies thoraciques : cancer, surinfection, épanchement pleural
50 %. • Infections aiguës
• Intoxication éthylique aiguë
Ainsi, la FA constitue, par sa fréquence, un véritable
• Hémorragies intracrâniennes, tumeur cérébrale
problème de santé publique. Ceci explique les
multiples travaux cliniques et expérimentaux pour une Idiopathiques
meilleure compréhension des mécanismes

1
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dépasse 48 heures. Ce critère peut apparaître


arbitraire, car il est souvent difficile, a posteriori, de
déterminer avec précision le début exact de la FA.
Parfois, la distinction entre ces deux formes de FA
(paroxystique et permanente) est délicate, ce d’autant
que la régularisation spontanée d’une FA permanente
n’est pas rare.
‚ Données cliniques
La FA peut être totalement asymptomatique,
découverte par l’ECG. Habituellement, la symptomato-
logie est dominée par des palpitations, le plus souvent
irrégulières, et parfois plus nettement ressenties à
l’effort.
D’autres symptômes, banals, vont en fait guider
l’examen :
– dyspnée pour des efforts modérés ;
– lipothymie non liée à l’effort ;
– fatigabilité inhabituelle ;
– poussée d’insuffisance cardiaque inexpliquée ;
1 Tracé de fibrillation auriculaire. Cadence ventriculaire rapide (140/min). Cupule digitalique. – plus rarement, douleurs angineuses typiques,
qu’il s’agisse d’un coronarien connu ou non,
vicieux facteur de thrombose, expliquant le risque secondaires à la tachyarythmie, celle-ci induisant une
thromboembolique de la FA chronique. Tableau III. – Facteurs cliniques de risque véritable « épreuve d’effort ».
embolique de la fibrillation auriculaire. Une telle symptomatologie, peu spécifique, voire


absente, explique la difficulté habituelle à dater avec
• Antécédents d’hypertension artérielle précision l’ancienneté de la FA.
Épidémiologie • Femme > 75 ans L’examen cardiovasculaire confirme (ou bien
• Antécédents d’AVC découvre) l’irrégularité du rythme cardiaque et
• Dysfonction ventriculaire gauche
Parmi l’ensemble des troubles du rythme, aussi bien s’attache à préciser les points suivants :
• Diabète
supraventriculaires que ventriculaires, la FA constitue – la tolérance hémodynamique : cadence
l’arythmie la plus fréquente. D’après l’étude de ventriculaire (comptée au stéthoscope sur
AVC : accident vasculaire cérébral.
Framingham, son incidence est de 40 % dans une 30 secondes au minimum), pression artérielle (basse :
population générale. Des données identiques sont le risque embolique cérébral. Après ajustement de en faveur d’un bas débit ; élevée : témoin d’une
rapportées par Godtfredsen : incidence de 4 ‰ dans l’âge, du sexe et de l’hypertension artérielle, le risque poussée hypertensive, possible facteur déclenchant de
une population générale, mais atteignant 4 % dans vasculaire cérébral est multiplié par un facteur 5 pour l’épisode actuel), la présence de signes d’insuffisance
une population avec cardiopathie connue et les FA non valvulaires et par un facteur 18 pour les FA cardiaque gauche (crépitants bilatéraux) ou droite
avoisinant 50 % chez l’insuffisant cardiaque au stade valvulaires (sténose mitrale essentiellement). Le risque (hépatomégalie sensible, reflux hépatojugulaire,
IV de la New York Heart Association (NYHA) (étude vasculaire cérébral est aussi directement lié à l’âge, œdèmes bilatéraux des membres inférieurs) ;
consensus I). Toutefois, l’incidence réelle de la FA est passant de 1,5 % à 23,5 % pour les tranches d’âge – l’absence d’anomalie de l’examen vasculaire
probablement sous-estimée par les études précédemment désignées. Dans la FA non valvulaire, périphérique (pouls présents) et de signes
épidémiologiques, car celle-ci est appréciée à partir les essais thérapeutiques récents comparatifs (placebo neurologiques déficitaires ;
d’électrocardiogrammes (ECG) systématiques ne versus warfarine et/ou aspirine) ont montré, qu’en – des éléments d’orientation étiologique :
prenant en compte que les FA permanentes ou des FA l’absence de traitement, le taux moyen annuel valvulopathie (en fait souvent difficile à étiqueter avec
avec paroxysmes fréquents. d’accident ischémique cérébral était d’environ 5 % par précision en raison de la rapidité de l’arythmie),
L’incidence de la FA est directement liée à l’âge. an (4,6 à 5,8 %) et que celui-ci atteignait près de 20 % frottement péricardique, antécédents de coronaropa-
Plusieurs études, dont celle de Framingham, confortent par an après un premier AVC. Ainsi, la FA peut être thie, d’infarctus du myocarde, de bronchopathie
cette relation : sur un suivi de 38 ans (2 090 hommes tenue pour responsable d’environ 15 % des AVC, tous chronique.
et 2 641 femmes), l’incidence bisannuelle s’accroît, mécanismes confondus, tout en sachant que nombre L’électrocardiogramme est indispensable pour
avec l’âge, d’un facteur 2 environ pour chaque d’entre eux sont totalement silencieux. De fait, la affirmer le diagnostic de FA (fig 2) :
décennie supplémentaire. De même, le sexe masculin pratique du scanner cérébral permet d’estimer leur – activité auriculaire : les ondes P d’origine sinusale
est le plus souvent concerné. L’étude de Framingham prévalence de 17 à 41 %. disparaissent et sont remplacées par une trémulation
montre, après ajustement des facteurs cardiovasculai- de la ligne de base, correspondant à des ondes
res usuels (âge, sexe, pression artérielle, diabète, irrégulières : les ondes « f » de FA, dont la fréquence est


intoxication tabagique, antécédent d’infarctus du comprise entre 400 et 600/min, plus ou moins
myocarde ou d’insuffisance cardiaque), que les Prise en charge apparentes (petite ou grosse « mailles »), mieux
hommes présentent un risque 1,5 fois plus élevé par enregistrées dans les précordiales droites (en regard
comparaison à celui des femmes de développer une des oreillettes) ;
FA. Dans la grande étude du CASS (Coronary Artery Deux situations cliniques peuvent être schémati- – activité ventriculaire : les ventriculogrammes sont
Surgery Study) concernant des patients atteints de quement opposées : FA paroxystique et FA fins et totalement irréguliers entre 120 et 160/min. En
coronaropathie, l’incidence est 5,4 fois supérieure chez permanente. cas de bloc de branche préexistant ou lié à la
l’homme. La FA paroxystique se caractérise par des crises de tachycardie, les QRS sont larges et irréguliers.
La FA est responsable d’une majoration de la palpitations, survenant à intervalles plus ou moins Certains aspects particuliers peuvent être observés :
mortalité (facteur 2) et de la morbidité cardiovasculaire. réguliers, de durée variable (quelques minutes à – une alternance de complexes fins et larges,
Les données des études de prévention primaire (SPAF plusieurs heures), cédant spontanément, ayant faisant discuter l’existence d’extrasystoles
et BAATAF) montrent que les patients du groupe progressivement tendance à augmenter en fréquence ventriculaires sur tracé de FA ou d’une aberration
placebo (c’est-à-dire ne recevant ni antivitamines K et en durée. Un facteur déclenchant catécholergique ventriculaire intermittente ;
[AVK], ni aspirine) ont une mortalité annuelle de 6 % (effort) ou vagal (horaire nocturne, postprandial) peut – un syndrome de Wolff-Parkinson-White,
en moyenne. Chez l’insuffisant cardiaque, la présence être retrouvé par un interrogatoire minutieux. donnant un aspect très particulier d’empâtement initial
d’une FA est habituellement considérée comme un La FA permanente peut survenir d’emblée ou bien du QRS en le déformant, associé à une tachyarythmie
facteur pronostique défavorable. faire suite à une FA paroxystique. Le caractère souvent très rapide (250 à 300/min), puisque court-
Le risque embolique constitue la complication permanent est habituellement retenu lorsque la durée circuitant le nœud auriculoventriculaire par la voie de
majeure de la FA (tableau III). Ce risque est dominé par de la FA (documentée par au moins deux ECG) préexcitation ;

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– anomalies valvulaires mitrale, aortique et/ou


tricuspide (régurgitation, sténose) ;
– mesure des pressions pulmonaires ;
– détection d’un épanchement péricardique.
L’échographie transœsophagienne (ETO)
(fig 4, 5) ne peut être, en aucun cas, un examen de
routine. Examen semi-invasif, ses indications doivent
être réservées à des situations précises :
– accident embolique systémique récent ;
– mauvaise tolérance hémodynamique de la FA,
avant cardioversion ;
– décision d’une « stratégie de cardioversion rapi-
de » (cf infra) ;
– éventuellement, appréciation du niveau du
risque embolique en cas d’indication délicate du
traitement anticoagulant (sujet âgé, accidents des
AVK).
En revanche, l’apport diagnostique de l’ETO est
décisif :
– étude du massif auriculaire et de l’auricule
gauche (quasi inexplorable par voie transthoracique) :
détection de thrombus, mise en évidence de contraste
spontané (réalisant de véritables volutes intra-
auriculaires gauches correspondant à la rétrodiffusion
des ultrasons par les agrégats d’érythrocytes induits
2 Électrocardiogramme. par les faibles vélocités intra-OG) et appréciation de la
A. Avant cardioversion, tracé de fibrillation auriculaire permanente. fonction de l’auricule gauche (planimétrie et mesures
B. Après cardioversion, rythme sinusal, trouble de conduction intra-auriculaire (onde P bifide) et bloc des vélocités de vidange) ;
auriculoventriculaire du premier degré (PR = 0,24 s). – examen du septum interauriculaire, des valves
et/ou des prothèses essentiellement en position
mitrale (versant auriculaire), de l’orifice aortique ;
– étude de l’aorte thoracique dans ses différents
segments (ascendant, portion terminale du segment
horizontal et descendant), pour préciser la présence ou
VD non d’un athérome aortique.
L’enregistrement Holter ECG n’est pas justifié en
AP cas de FA permanente.
En revanche, il est utile en cas de FA paroxystique,
AO montrant soit de brefs lambeaux de FA, soit des
extrasystoles auriculaires isolées ou en salves. Il précise
AG le mode de déclenchement de l’arythmie diurne
(précédée d’une accélération du rythme sinusal) ou
nocturne, voire postprandiale, ou en phase de
OG récupération d’un effort (avec allongement préalable
des cycles sinusaux).
Le Holter ECG peut aussi documenter des
VPSG alternances de phases de bradycardie sinusale et
d’hyperexcitabilité supraventriculaire (extrasystoles,
FA), permettant de mettre en évidence une maladie
rythmique de l’oreillette.
Cependant, dans tous les cas, l’interprétation de
l’enregistrement Holter doit impérativement tenir
3 Échographie transthoracique : auricule gauche et veines pulmonaires gauches. AO : aorte ; AP : artère compte de l’âge (une hyperexcitabilité supraventricu-
pulmonaire ; VO : ventricule droit ; AG : auricule gauche ; OG : oreillette gauche ; VPSG : veine pulmonaire laire modérée devient banale après 70 ans) et des
supérieure gauche. traitements antiarythmiques prescrits.
Quant aux examens électrophysiologiques
endocavitaires, leur indication est réservée à quelques
– à l’inverse, un rythme ventriculaire lent et L’ETT ( fi g 3 ) constitue, en fait, l’examen
patients. Ils ont pour objectifs de déclencher, par
parfaitement régulier sur un tracé de FA doit faire complémentaire indispensable. Les renseignements
stimulation auriculaire (par voie œsophagienne ou par
évoquer le diagnostic de bloc auriculoventriculaire fournis sont essentiels :
voie endocavitaire), des accès de FA, de documenter
complet.
– fonction ventriculaire gauche globale ainsi l’arythmie parfois difficile à mettre en évidence,
‚ Examens complémentaires (habituellement exprimée sous forme de « fraction de mais aussi de mesurer les périodes réfractaires et les
raccourcissement », comprise normalement entre 30 et temps de conduction en différents sites de l’oreillette
Le cliché thoracique reste utile, permettant pour apprécier sa « vulnérabilité », à partir du rapport
33 %) et segmentaire ;
d’apprécier le volume cardiaque et en particulier la période réfractaire-temps de conduction, reflet de la
dilatation du massif auriculaire. Il renseigne aussi sur le – degré de dilatation des oreillettes, en particulier longueur d’onde et donc de la vulnérabilité auriculaire.
retentissement hémodynamique : de l’oreillette gauche (OG). Ainsi, pour l’OG, les valeurs Le bilan biologique (en dehors de toute recherche
– redistribution vasculaire vers les sommets ; normales sont de 40 mm pour le diamètre transversal étiologique) est obligatoirement simple :
– lignes de Kerley ; et de 15 cm2 pour la planimétrie. L’ETT est en – dosage de la thyroid stimulating hormone (TSH),
– dilatation des artères pulmonaires. revanche de médiocre valeur pour la détection des pour ne pas méconnaître une dysthyroïdie (en
Enfin, il fournit d’éventuelles informations thrombus intra-auriculaires, habituellement situés dans particulier une hyperthyroïdie, contre-indiquant
étiologiques : plèvre, poumon, péricarde. l’OG ; formellement la prescription de Cordaronet) ;

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– deux facteurs échocardiographiques transthora-


4 Échographie transœso- ciques indépendants [9] : dilatation de l’OG supérieure à
phagienne : auricule gau- 2,5 cm2/m2 et altération de la fonction systolique du
che et étude des flux dop- ventricule gauche (FR < 25 %) ;
pler à codage couleur – en combinant facteurs de risque cliniques et
(vidange, codé en rouge ; échocardiographiques, il est possible :
remplissage, codé en bleu). – de reconnaître une population à faible risque
(sans aucun des facteurs de risque) : soit 1 % par an,
correspondant à 25 % de la population ;
– de « corriger » le niveau du risque : 38 % des
patients classés à faible risque à partir des données
cliniques sont, en fait, à risque plus élevé si les critères
échocardiographiques sont associés.
L’étude SPAF III (786 patients), la plus récente, a
précisé l’apport de l’ETO dans la stratification du risque
embolique de la FA non valvulaire. Plusieurs paramètres
sont des facteurs indépendants du risque embolique :
– un thrombus de l’auricule gauche ;
– un contraste spontané intra-auriculaire gauche
dense ;
– une vitesse de vidange de l’auricule gauche
< 20 cm/s ;
– la présence de plaques aortiques complexes
(épaisseur > 4 mm).
Surtout, l’association de plaques aortiques
complexes et d’un contraste spontané intra-auriculaire
gauche individualisent des patients à haut risque
embolique incomplètement contrôlé malgré un
traitement anticoagulant efficace (INR 2-3). À l’inverse,
un tiers des patients « cliniquement » à haut risque,
sans aucun des facteurs précités, sont en réalité à
risque faible (1,3 % par an).


Données thérapeutiques récentes

‚ Traitement anticoagulant
L’utilité du traitement anticoagulant par AVK, dans
la FA non valvulaire avec facteurs de risque
embolique, est démontrée de façon formelle par les
essais thérapeutiques récents. Ces essais, réalisés avec
tirage au sort des patients [7 à 12], comparant placebo et
traitements antithrombotiques (warfarine
[Coumadinet]et/ou aspirine) ont montré qu’en
l’absence de traitement le taux moyen annuel
d’accident ischémique cérébral était d’environ 5 % par
an (4,6 à 5,8 %) et que celui-ci atteignait près de 20 %
par an après un premier AVC.
À ce jour, huit études contrôlées concernant la
prévention du risque embolique (tableau V), en
Tableau IV. – Taux annuel d’événements emboliques selon la présence ou non de facteurs de ris- particulier cérébral, dans la FA non valvulaire, sont
que cliniques (étude SPAF I). disponibles : six en prévention primaire (AFASAK, SPAF
I et II, BAATAF, CAFA, SPINAF), une seule en prévention
Accident embolique : secondaire (EAFT) et la plus récente, SPAF III, associant
Facteurs de risque Nombre de patients Nombre d’événements ces deux objectifs. Ces études, malgré des disparités
taux annuel
(niveau de l’International Normalized Ratio (INR),
Aucun 241 8 2,5 % comparaison warfarine et/ou aspirine, critères de
1 facteur 259 24 7,2 % jugement « AVC ischémiques et/ou hémorragiques »),
ont largement contribué à préciser les modalités du
2 ou 3 facteurs 68 14 17,6 % traitement antithrombotique dans cette indication.
Le traitement anticoagulant (warfarine), à posologie
– kaliémie et créatininémie pour permettre la thérapeutiques dans la FA non valvulaire. Les données
efficace (INR 2-3), est impératif.
prescription d’éventuels traitements antiarythmiques ; du groupe placebo (568 patients suivis pendant 1,3
En effet :
– tests de coagulation de référence : taux de an) de l’étude SPAF I ont permis d’identifier
– il réduit de façon importante et significative le
prothrombine. (tableau IV) :
risque relatif d’AVC ischémique de 64 %. En valeur
– trois facteurs cliniques indépendants, définissant


absolue, la réduction est de 4,7 %, ce qui correspond à
un sous-groupe à haut risque embolique (7 % par an) : traiter en moyenne 21 patients pendant 2,2 ans pour
Risque embolique insuffisance cardiaque récente (< 3 mois), antécédents éviter un AVC ischémique ;
d’hypertension artérielle et d’AVC ; – le traitement anticoagulant majore, de façon
L’identification des facteurs de risque embolique est – l’association de deux ou trois facteurs cliniques fait modérée mais significative, le risque d’hémorragie
récente et réalisée grâce aux grands essais croître le risque de façon exponentielle (17,6 % par an) ; cérébrale (2,7 %) ;

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Fibrillation auriculaire - 2-0230

grande simplicité thérapeutique (absence de contrôle


de l’INR). Pari non tenu, car l’essai a été interrompu
après un suivi de 13 mois. Une analyse intermédiaire a
montré un « sur-risque » de l’association fixe par
rapport aux AVK seuls : 7,9 % par an d’AVC et embolie
systémique contre 1,9 % par an. L’incidence des
hémorragies importantes était identique dans les deux
groupes.

✔ Actuellement, pour les patients


présentant une FA avec facteurs de
risque, le traitement anticoagulant
par AVK, à posologie efficace (INR
entre 2 et 3), est recommandé. Ces
données, issues d’études ayant inclus
des patients « hypersélectionnés »,
sont parfois difficiles à appliquer à
des patients âgés (les plus de 80
ans…, et pourtant les plus à risque)
ou après accident des anticoagulants
(tableau VI).
✔ En pratique quotidienne, ces
difficultés peuvent expliquer les
résultats apparemment déroutants
d’une récente enquête anglaise en
5 Échographie transœsophagienne : flux doppler (avant cardioversion : chaotique ; après cardioversion : médecine générale : le traitement
organisé avec ondes de faible amplitude du fait de la sidération auriculaire).
anticoagulant n’était effectivement
prescrit que chez seulement 23 % des
Tableau V. – Essais de prévention primaire et/ou secondaire pour la prévention du risque emboli- patients en FA qui justifiaient
que de la fibrillation auriculaire non valvulaire. pourtant, au moins théoriquement,
ce traitement.
Nombre Durée du suivi
Essais randomisés Traitements INR recherché
de patients (années)
AFASAK (1989) 1 007 1,2 Warf/Asp 2,8 - 4,2 Le traitement anticoagulant par héparine non
75/Placebo fractionnée conserve toute sa justification pour la
BAATAF (1990) 420 2,2 Warf/aucun 1,5 - 2,7 prise en charge des patients à la phase aiguë de
l’arythmie.
SPAF I (1991) 1 330 1,3 Warf/Asp 2 - 4,5
325/Placebo L’objectif est triple :
– assurer dans les meilleurs délais une
CAFA (1991) 383 1,3 Warf/Placebo 2-3
anticoagulation efficace (temps de céphaline
SPINAF (1992) 525 1,8 Warf/Placebo 1,4 - 2,8 activateur activé [TCA] compris entre le double et le
triple du témoin), pour prévenir le risque embolique ;
SPAF II (1994) 1 100 2,3 Warf/Asp 325 2 - 4,5
– permettre ainsi une éventuelle régularisation
SPAF III (1996) 1 044 1,3 Warf + Asp 1,2 - 1,5/2 - 3 médicamenteuse et/ou par cardioversion (en cas de
325/Warf mauvaise tolérance hémodynamique) en évitant le
EAFT (1993) 1 007 2,3 Warf/Asp 2,5 - 4 risque embolique lié à la régularisation ;
75/Placebo – initier simultanément le traitement par AVK, dont
l’efficacité ne sera obtenue que quelques jours plus
INR : International Normalized Ratio ; Warf : warfarine ; Asp : aspirine ; 75 : 75 mg/j ; 325 : 325 mg/j.
tard.
– le traitement anticoagulant réduit le risque relatif une association fixe de warfarine avec INR bas (1,2- Certains, à la place de l’héparine, proposent le
de décès, toutes causes confondues, de 28 % ; 1,5) et d’aspirine (325 mg/j) à une anticoagulation recours aux héparines à bas poids moléculaire [HBPM],
– surtout, la majorité des AVC observés dans les efficace et adaptée (INR 2-3) afin d’assurer une de maniement plus simple et de plus grande stabilité
groupes « warfarine » sont le fait de patients ayant prévention comparable du risque embolique, tout en quant à l’anticoagulation. Toutefois, cette attitude
arrêté le traitement anticoagulant au moment de minorant le risque hémorragique et en privilégiant une « pragmatique » n’est pas encore validée.
l’AVC.
En revanche, l’aspirine seule, aux posologies Tableau VI. – Recommandations pour la prescription d’un traitement antithrombotique dans la
étudiées (75 et 325 mg/j), n’apparaît pas efficace : fibrillation auriculaire non valvulaire (d’après Laupacis).
– le risque d’AVC est diminué de façon non
Âge Facteur(s) de risque absent Facteur(s) de risque présent(s)(1)
significative de 22 % (p < 0,054) ;
– l’aspirine favorise une augmentation non < 60 Aucun traitement (ou aspirine) AVK (warfarine)
significative de la fréquence des hémorragies
60 à 75 Aspirine AVK (warfarine)
cérébrales.
L’association warfarine-aspirine (325 mg/j) a été > 75 AVK (warfarine) AVK (warfarine)
évaluée dans l’étude SPAF III. Le « pari » de l’étude SPAF
(1) Antécédents d’accident ischémique transitoire (AIT) ou d’accident vasculaire cérébral (AVC), d’hypertension artérielle, d’insuffisance cardiaque, de
III était de comparer, chez des patients porteurs d’une diabète, de coronaropathie.
FA non valvulaire avec facteur de risque embolique, AVK : antivitamines K.

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‚ Cardioversion Le choc électrique interne (une électrode interne La fréquence de la rechute nécessite donc une
L’objectif de la régularisation, médicamenteuse ou quadripolaire utilisée comme cathode et une électrode surveillance régulière pendant les premiers mois après
par choc électrique d’une FA, est de restaurer une externe utilisée comme anode) peut se justifier après cardioversion :
activité auriculaire coordonnée. Cependant, une échec des deux méthodes précédentes. D’autres – la poursuite d’un traitement anticoagulant
régularisation spontanée est fréquente, observée chez modalités, utilisant deux électrodes internes (oreillette efficace est justifiée dans le mois suivant la
48 % des patients présentant une FA paroxystique ou droite et sinus coronaire) permettent de recourir à de cardioversion ;
une FA récente (< 24 heures). La restauration du faibles énergies (< 20 J). La restauration du rythme – les contrôles ECG et/ou Holter ECG sont indiqués
rythme sinusal sera d’autant plus fréquente que la FA sinusal est obtenue dans 70 à 89 % des cas. Cette dans les 6 premiers mois, puis à 1 an, pour dépister les
est récente. technique, encore en évaluation, possède l’avantage rechutes souvent asymptomatiques, les épisodes de
En cas de FA permanente (> 48 heures), quelles que d’éviter l’anesthésie générale FA paroxystiques (pouvant amener à modifier ou
soient les modalités pratiques de la cardioversion, une renforcer le traitement), les dysfonctions sinusales
anticoagulation efficace (héparine ou AVK depuis 3 Cardioversion « échoguidée » favorisées par le traitement antiarythmique (indication
semaines) est un préalable formel. En effet, l’absence de stimulateur définitif), un éventuel effet
Toutefois, l’essor et la pertinence de l’information
ou la brièveté de l’anticoagulation avant cardiover- proarythmique du traitement (flutter auriculaire 1/1
fournie par l’ETO ont progressivement remis en
sion, chez des patients présentant une FA permanente, avec les molécules de classe IC, torsades de pointes
question cette attitude thérapeutique dite
expose à un risque embolique estimé de 5 % à 7 %, avec ceux de la classe III).
conventionnelle. Plusieurs arguments militent en
qui devient pratiquement nul après anticoagulation Les rechutes semblent, en définitive, surtout liées à
faveur d’une stratégie de « cardioversion échoguidée »
orale, efficace et prolongée. l’ancienneté de la FA, au degré de dilatation de l’OG, à
rapide :
l’existence d’une atteinte valvulaire mitrale
Cardioversion médicamenteuse – les études comparatives ETO versus chirurgie ont
rhumatismale.
ou par choc électrique ? démontré l’excellente sensibilité et la valeur prédictive
Dans ce contexte d’options thérapeutiques
Il s’agit en fait d’un faux débat. Seules importent la de l’ETO pour l’identification et/ou l’exclusion des
délicates, parfois décevantes et souvent complexes
rapidité et l’innocuité de la cardioversion. thrombus de l’OG et de l’auricule gauche. Les
pour le non-spécialiste, une étude multicentrique
Classiquement, le choc électrique n’est justifié que si meilleures corrélations sont obtenues avec les sondes
(AFFIRM : 5 300 patients) vient de débuter, comparant
l’arythmie est mal tolérée sur le plan hémodynamique, multiplan ;
deux options thérapeutiques : maintien du rythme
ou en cas de syndrome de préexcitation ventriculaire – la cardioversion s’accompagne d’une « sidéra-
sinusal par antiarythmiques (classes I et/ou III) ou
(risque de fibrillation ventriculaire et de mort subite). tion » transitoire de l’OG, correspondant à une
contrôle de la cadence ventriculaire (par digitaliques,
– Schématiquement, la cardioversion médicamen- altération de sa fonction contractile. La restauration de
bêtabloquants ou inhibiteurs calciques). Le traitement
teuse constitue donc la première démarche. la fonction contractile de l’OG (onde A du flux
anticoagulant est conservé pendant au moins
L’amiodarone, antiarythmique de classe III, est transmitral) est inversement proportionnelle à la durée
12 semaines après le retour en rythme sinusal.
souvent utilisée en première intention par voie orale, de la FA : récupération quasi immédiate (< 24 heures)
Mortalité totale (hypothèse d’équivalence) et
en dose de charge initiale comprise entre 15 et pour les FA récentes (< 2 semaines) et récupération
événements cardiovasculaires constituent les
30 mg/kg le premier jour, puis dose intermédiaire différée (> 1 mois) pour les FA anciennes
éléments d’appréciation. Ainsi, dans un avenir proche,
(5-15 mg/kg) pendant 3-5 jours et dose d’entretien de (> 6 semaines). Ces données expliquent le risque
les choix thérapeutiques, après cardioversion,
1 g par semaine. embolique de la cardioversion et l’impérative nécessité
devraient donc probablement se simplifier.
En milieu hospitalier, l’amiodarone peut être utilisée d’un traitement anticoagulant encadrant la
par voie intraveineuse, habituellement sous forme de cardioversion ; Stimulateur cardiaque définitif
bolus (15 mg/kg). Le taux d’efficacité est compris, selon – ces différents arguments ont conduit plusieurs La justification d’un stimulateur cardiaque définitif
les auteurs, entre 25 à 83 %. auteurs à proposer une stratégie de cardioversion chez un patient présentant une FA peut correspondre
Ce schéma « usuel » aussi bien ambulatoire « rapide » de la FA non valvulaire, après une brève à différentes situations cliniques :
qu’hospitalier, n’a cependant pas été validé par une anticoagulation (48 heures) et vérification de l’absence – maladie rythmique auriculaire correspondant à
étude contrôlée. de thrombus au niveau du massif auriculaire par ETO. une alternance d’épisodes de tachyarythmie le plus
D’autres antiarythmiques ont démontré leur À ce jour, quatre études prospectives rapportent souvent par FA et de bradycardie symptomatique. Les
efficacité : une dose de charge unique de 600 mg de l’innocuité de la méthode : aucun accident embolique études comparant les stimulateurs « double-chambre »
propafénone (Rythmolt) ou de 300 mg de flécaïnide systémique secondaire à la régularisation n’est aux stimulateurs monochambre (ventriculaires), ont
(Flécaïnet) permet d’obtenir une réduction de la FA survenu parmi les 300 patients inclus dans ces études. montré le bénéfice des premiers dans la prévention de
chez environ 50 % des patients 3 heures après la prise L’étude ACUTE (3 000 patients), actuellement en cours, la FA (1,5 % contre 12 % par an, respectivement) ;
et, pour 70 à 80 % d’entre eux, 8 heures après. devrait permettre de trancher ce débat. Toutefois, – bradyarythmie, quelle soit « spontanée » ou
Toutefois, l’utilisation de ces antiarythmiques de classe certains ont souligné que l’absence de thrombus en induite par les traitements antiarythmiques
IC se heurte à deux sortes de problèmes : d’une part, ETO, chez des patients non ou mal anticoagulés, était dépresseurs du nœud auriculoventriculaire ;
leur contre-indication formelle en cas d’antécédent insuffisante pour éliminer le risque embolique lié à la
– plus exceptionnellement, l’indication est rendue
d’infarctus du myocarde (étude CAST), de dysfonction cardioversion.
nécessaire après induction d’un bloc auriculoventricu-
ventriculaire, d’insuffisance cardiaque et de troubles de laire thérapeutique pour contrôle de la cadence
conduction intraventriculaires, et d’autre part, le risque,
Prévention des rechutes
ventriculaire (FA paroxystique non contrôlée après de
rare mais grave, de conversion de la FA en flutter En l’absence de traitement antiarythmique, la FA multiples essais d’antiarythmiques) ;
auriculaire 1/1 (environ 3-5 % des patients). récidive dans un grand nombre de cas (45 à 85 %) à – d’autres indications sont encore en cours
En cas d’hyperthyroïdie, l’objectif est seulement de 1 an. Le traitement préventif reste décevant, car la d’évaluation : prévention de la FA ou terminaison
ralentir la cadence ventriculaire par un traitement rechute survient le plus souvent dans le mois suivant la d’une FA par une stimulation atriale rapide.
bêtabloquant et simultanément de contrôler cardioversion et, au total, dans environ 50 % des cas à
l’hyperthyroïdie. 6 mois. Plusieurs classes d’antiarythmiques sont ‚ Autres thérapeutiques
– Le choc électrique est le plus souvent requis en disponibles pour prévenir la rechute : en priorité, le Celles-ci relèvent du domaine du spécialiste et
cas d’échec de la cardioversion médicamenteuse (en flécaïnide (Flécaïnet), la propafénone (Rythmolt), la peuvent être regroupées sous trois rubriques :
dehors de la stratégie de « cardioversion échoguidée »). cibenzoline (Cipralant), tous appartenant à la classe IC, – le défibrillateur atrial dont le principe est basé sur
Il s’agit en règle d’un choc électrique externe, délivré les bêtabloquants (classe II), mais préférentiellement le la détection de la FA (algorithmes complexes), puis la
par deux électrodes (idéalement antéropostérieures), sotalol (Sotalext), appartenant à la classe III, ou encore délivrance de chocs électriques internes de faible
d’intensité variable (50-400 J), qui peut être renouvelé l’amiodarone (Cordaronet) appartenant aussi à la énergie (< 6 J) pour rétablir un rythme sinusal avec une
au maximum trois fois lors d’une même séance, réalisé classe III. Cette molécule donne les résultats les plus gêne modeste, et est aussi réglé pour éviter le
sous anesthésie générale. Le niveau initial favorables (60 % de non-rechute à 1 an), mais au prix déclenchement de tachycardies ventriculaires. Les
recommandé est de 200 J (75 % de succès). Le taux de d’effets secondaires potentiels, cutanés, oculaires et résultats sont encore très préliminaires ;
succès est compris, selon les études, entre 65 et 90 %. surtout thyroïdiens (dont l’hyperthyroïdie est la plus – les techniques chirurgicales faisant appel à deux
Cette technique simple et efficace ne connaît que peu grave). Toutefois, il semble qu’une posologie de modalités principales : la procédure de « Maze »
de complications, sous réserve de vérifier le niveau de 1 g/semaine soit un compromis satisfaisant entre modifiée par Cox et la technique d’isolement de l’OG.
l’anticoagulation et la kaliémie. efficacité et rareté des effets secondaires. L’objectif du traitement chirurgical est d’« isoler », par

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Fibrillation auriculaire - 2-0230


des incisions multiples, les circuits de réentrée intra- d’hypertension artérielle, d’insuffisance cardiaque. En
auriculaires, de façon à éviter l’éclosion et la Conclusion l’absence de contre-indication aux AVK, le traitement
pérennisation des épisodes de FA. Cette chirurgie anticoagulant à posologie efficace (INR entre 2 et 3)
« cardiaque » n’est pas anodine, car grevée d’une constitue la thérapeutique de référence, pour la
mortalité opératoire estimée à 2 %. Les résultats sont Par sa grande fréquence dans la population âgée et prévention du risque cérébral et embolique
cependant à prendre en compte, car le taux de en raison du risque thromboembolique essentielle- systémique de la FA permanente, non valvulaire, à
restauration du rythme sinusal à 8 mois est supérieur à ment cérébral, la FA, paroxystique ou permanente, haut risque, au prix d’une majoration modérée, mais
60 %. En aucun cas, il ne peut s’agir d’une méthode de constitue un réel problème de santé publique. non significative, du risque hémorragique. L’aspirine
routine ; De découverte fortuite, ou dépistée à la faveur seule s’avère insuffisante pour contrôler ce risque.
– les méthodes ablatives : elles concernent en d’une symptomatologie souvent peu spécifique, la L’association AVK (INR < 2) et aspirine est inférieure
priorité l’interruption ou la dégradation de la constatation d’une arythmie auscultatoire justifie le aux AVK seuls. Quant à la place éventuelle d’autres
conduction auriculoventriculaire. L’ablation de la recours large à l’ECG, qui seul authentifie formellement antithrombotiques (agents antiplaquettaires de
jonction auriculoventriculaire, qui impose la FA. L’enquête étiologique reste indispensable, même deuxième génération), elle est inconnue.
l’implantation d’un stimulateur cardiaque définitif, ne si celle-ci est souvent décevante, car la FA non
traite pas l’arythmie auriculaire et nécessite donc la valvulaire est actuellement de loin la situation la plus Si la restauration du rythme sinusal (cardioversion
poursuite d’un traitement anticoagulant. Certains fréquente. L’échocardiogramme transthoracique est médicamenteuse ou par choc électrique) est encore
proposent l’ablation sélective du canal « lent » de la indispensable. La place de l’ETO est plus limitée, même actuellement l’objectif thérapeutique essentiel, son
jonction nodale, évitant ainsi pour 65 à 75 % des si l’apport diagnostique et pronostique de cet examen maintien à moyen terme est aléatoire, malgré de
patients une implantation définitive. est indiscutable. multiples possibilités médicales (antiarythmiques) ou
Plus récemment, des méthodes reprenant, par voie Des progrès décisifs ont été réalisés depuis 10 ans interventionnelles (chirurgicales, ablatives, stimulation),
endocavitaire, les procédures chirurgicales ont été grâce aux grands essais randomisés (prévention ces dernières restant du domaine de l’évaluation. La
proposées. Enfin, l’ablation de foyers atriaux situés à primaire et secondaire). Ils ont contribué tout d’abord à prévention de l’altération anatomique et fonctionnelle
proximité de l’émergence des veines pulmonaires individualiser des facteurs de risque embolique de l’oreillette (remodelage) apparaît donc essentielle
semble une voie de recherche importante. cliniques : âge supérieur à 75 ans, antécédent d’AVC, pour retarder la survenue de la FA.

Hervé Lardoux : Professeur associé des Universités, chef de service.


Frédéric Schaison : Praticien hospitalier.
Laurent Jacq : Assistant spécialisé.
Michel Habis : Praticien hospitalier.
Michel Pezzano : Praticien hospitalier.
Service de cardiologie (Pr Lardoux), groupe hospitalier sud-francilien, 59, boulevard Henri-Dunant, 91106 Corbeil-Essonnes, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : H Lardoux, F Schaison, L Jacq, M Habis et M Pezzano. Fibrillation auriculaire.
Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 2-0230, 2000, 7 p

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