La Generation Y FrenchPDF
La Generation Y FrenchPDF
La Generation Y FrenchPDF
com
Bénéficiez de nos offres à chaque
instant et à tout endroit, le site
FrenchPDF vous invite à réinventer le
plaisir de la lecture et découvrir les
nouveautés de vos auteurs préférés.
Souhaitez-vous avoir un
accès illimité aux livres
gratuits en ligne ?
Désirez- vous les télécharger
et les ajouter à votre
bibliothèque ?
French .com
À votre service!
frenchpdf.com
Illustrations du cahier central : Melody Cappello
Maquette de couverture : Marine Clorson, Marc Fouchard, Vincent Gaillot,
Stéphane Bal
Photographie de couverture : James Bort
Modèle : Anaïs Duquesne
Photographie Darkplanneur : James Bort
Consultez nos parutions sur www.dunod.com
© Dunod, 2014
ISBN 978-2-10-071076-8
frenchpdf.com
PREFACE
Janvier 2013. Une fois de plus, des hoax ont annoncé l’hiver le plus rude jamais vécu depuis 1947. Ni
l’envie, ni le temps de vérifier la véracité de l’information, mais une chose est sûre : la ville est livide, nos
tenues et équipements peu adaptés et le froid cannibale. Deux trentenaires parisiennes, perdues dans des
bureaux trop grands, sont en ligne continue avec le service informatique pour initialiser leurs nouveaux
Mac. On se refile nos microbes de saison avec générosité. Et on réfléchit. On vient de nous confier une
mission plutôt délirante. Créer un magazine féminin hebdomadaire gratuit, adapté de sa version originale
anglaise : Stylist. Un mois pour recruter, trois pour penser et fabriquer le bébé.
Toutes les deux formées à l’école de la presse féminine traditionnelle, on est convaincues d’une seule
chose : le prochain qui osera nous parler de sujets psycho/sexe, d’interview promo de people, d’« initiatives
féminines », de coaching, de sujets de « proximité/pense-à-ta-cousine-de-Grenoble », de mode et de culture
accessible, sera traité avec un mépris aussi absolu qu’éternel. Car nous le savons, nous sommes parvenus au
bout d’un système d’information et d’expression qui s’essouffle. Au lieu de se laisser tenter par un massage
cardiaque de corps vieillissants et trop familiers, on décide de tenter de réinventer les choses.
Au début, on construit notre discours et notre vision contre, à rebours. On se dit alors qu’il serait bon de
sortir prendre la température et capter la qualité de l’air ambiant. On se balade dans les rues, on épluche la
presse nationale et internationale et on passe nos journées à rencontrer des gens entre 20 et 35 ans. La
fameuse génération Y. Et chez les uns et les autres, certains vocables surgissent de manière spontanée et
récurrente. Transversalité. Horizontalité. Sur-connexion. Sur-information. Reboot. Pointu. Créatif. Shuffle.
Ludique. Chacun se pose comme miroir réfléchissant notre époque et son langage. Chacun véhicule notre
rapport au monde, nos aspirations et nos moteurs. Nous prenons conscience qu’au-delà de notre rébellion
individuelle, nos intuitions semblent en phase avec les mutations actuelles. Nous ne sommes donc plus
seulement un projet de magazine mais peut-être le porte-voix d’une génération. En tout cas, nous sommes le
lecteur à qui on s’adresse. Même âge, même désillusions, même système digestif, même énergie, même
besoin de réinventer la donne. Nous nous devons donc de construire un magazine en écho avec cette
jeunesse qui bouge, s’informe, se réinitialise en permanence. Très vite, l’équipe est constituée. Une
quinzaine de jeunes gens modernes entre 20 et 30 ans, pleins de ras-le-bol, de blagues douteuses, de
transgression contrôlée et de culture hybride et mutante. Au fil des semaines, l’objet prend forme, la voix
s’ajuste. Une fois le premier numéro esquissé, l’heure est venue de sortir de la cave. Il faut rencontrer les
agences, les communicants, la presse.
frenchpdf.com
On se retrouve à défendre une série de paradoxes, relevés à l’occasion d’échanges avec la génération du
dessus. « Gratuit et haut de gamme ? » : oui. À l’image de la génération qui ne paye plus son accès à
l’information mais est capable d’économiser des mois pour un sac de luxe, s’il n’a pas été troqué, loué ou
déniché sur ventesprivees.com. « 450 000 exemplaires et des sujets pointus ? » : oui. Chez les Y, la notion
de « branché » n’existe plus. Tout le monde l’est. Voyages low cost, prolifération des sites d’infos, des
prises de paroles via blogs et Tumblr validant ce qui doit être et ne doit pas être, concerts et défilés en
ligne…
De Paris à Roubaix, les 20-35 sont sur-éduqués et développent une capacité phénoménale à digérer une
tendance à peine émergée pour mieux l’oublier dès qu’il s’agit de faire de la place pour la suivante. « Une
grande diffusion et une mode exigeante ? » : oui. La lectrice sait parfaitement identifier le placement de
produit pur et simple sans effort de créativité et est à la recherche d’inspiration, de narration, de fantasme
dans lequel elle peut se projeter, même si c’est en Zara ou Topshop qui singe Balmain ou Kenzo.
Forcés par la résistance et la frilosité de certains décideurs, nous nous sommes retrouvés à porter haut et
fort les couleurs de cette génération. Aujourd’hui, chaque cover, chaque sujet, chaque news est traité de
manière événementielle. Le seul baromètre valable ? La singularité. Une question : « Est-ce qu’on l’a déjà
vu ailleurs ? »
Une préoccupation parfaitement en phase avec la vision de cette génération par les auteurs de cet ouvrage,
qui eux aussi ont su voir et glorifier la singularité comportementale de cette jeunesse, celle-là même qui
requiert un traitement également particulier. Je connais d’ailleurs Darkplanneur et ses travaux depuis des
années. Et c’est avec un vif intérêt que je me penche sur son travail de décryptage et ses interviews
percutantes dans le Cabinet de Curiosités. L’équipe de Stylist et les penseurs de ce livre partageons la même
conscience aiguë de l’importance stratégique des Y pour l’industrie du luxe. Nous menons le même combat
pour qu’ils soient entendus et considérés à leur juste mesure. Un livre qui brise les clichés qui pleuvent sur
cette cible était nécessaire. Afin de pouvoir ouvrir le champ de perception de tous les publics
(professionnel, étudiant et journalistique) et d’offrir une vision prospective juste sur les maisons de mode et
de luxe de demain, un travail titanesque de recherches encyclopédiques a été déployé. Sans oublier d’y
mêler la parole et les couleurs si singulières des Y, là pour donner du cœur et de la voix. Avec la même
puissance que les visuels créés par l’artiste Y, Melody Cappello, en exclusivité pour la mini-exposition qui
se trouve au centre de l’ouvrage. Je suis sûre que la rencontre entre les Y et le reste du monde sera aussi
festive, riche, dense, créative, lumineuse que ce livre-ci.
AUDE WALKER
Rédactrice en chef du magazine Stylist
frenchpdf.com
INTRODUCTION
Lorsque les pères s’habituent à laisser faire les enfants, lorsque les fils ne
tiennent plus compte de leurs paroles, lorsque les maîtres tremblent devant leurs
élèves et préfèrent les flatter, lorsque les jeunes méprisent les lois, parce qu’ils
ne reconnaissent plus, au-dessus d’eux, l’autorité de rien et de personne, alors,
c’est là, en toute beauté et toute jeunesse, le début de la tyrannie.
PLATON, vers 427 – 348/347 av. J.-C.
À lire ces quelques lignes on pourrait croire que les générations de jeunes se
suivent et se ressemblent. Ces mots pourtant vieux de plus de deux millénaires,
semblent d’une étonnante actualité. Ce n’est pas ici que vous apprendrez que les
jeunes sont des rebelles, des oisifs, qu’ils détestent l’autorité ou qu’ils sont
souvent très difficiles à supporter pour les autres (les plus âgés bien sûr car, entre
eux en général, tout va bien). Non, cela vous le savez déjà.
Ce livre va s’intéresser à la génération Y et à ses liens avec l’industrie du luxe,
de la mode et de la beauté. L’industrie du luxe, tout le monde voit de quoi il
s’agit : les marques, les podiums, les vêtements, les bijoux… mais que cache le
frenchpdf.com
vocable génération Y ? Qu’est-ce qu’une génération ? En quoi la Y est différente
des autres ? Et pourquoi l’avoir choisi ?
Qu’est-ce qu’un Y ?
Quand on s’intéresse à la jeunesse, il faut délimiter un âge. Qui est jeune ? Qui
ne l’est pas ? Pour les besoins de ce livre et par soucis de convention nous avons
délimité les jeunes comme allant de 14 à 34 ans c’est-à-dire les personnes nées
entre 1980 et 2000.
Mais cela ne permet pas de les définir comme étant une « génération ». Nous
n’avons pas la prétention des sociologues, des ethnologues et des démographes
dont c’est le métier de définir ce mot. En revanche, comme nous allons l’utiliser
et l’exploiter tout au long de cet ouvrage, il est normal et crucial de vous donner
les contours de la définition de génération que nous avons choisis.
Nous ne croyons pas à une génération spontanée mais nous croyons à un effet
de contexte. Selon les travaux de Claudine Attias-Donfut[1], on peut parler de
génération dans 3 dimensions différentes.
La génération dans sa dimension démographique est un ensemble de personnes
ayant vécu un événement précis au même âge et en même temps. L’événement
choisi est habituellement la naissance mais peut aussi être le mariage, l’obtention
d’un diplôme, la retraite, etc.
La génération dans sa dimension ethnologique (ou généalogique) englobe les
individus classés à un même niveau dans la lignée de la parentèle ou d’un groupe
plus large. La notion de génération renvoie alors uniquement aux rapports de
filiation.
La génération dans sa dimension sociologique regroupe un ensemble de
personnes qui ont à peu près le même âge et qui ont vécu des expériences ou des
événements historiques communs, dont résultent une vision du monde semblable
et un mode de pensée commun. C’est cette dimension qui nous intéresse car
nous pensons, tout comme les scientifiques qui la défendent, que c’est un
concept explicatif de notre société au même titre, par exemple, que la classe
frenchpdf.com
sociale.
Mais un autre critère est requis afin que l’on puisse parler de génération : la
conscience qu’ont les individus d’appartenir à un même groupe social et par là
même de se distinguer des autres générations. Ainsi certains individus peuvent
appartenir à la même génération selon 3 points de vue différents.
D’un point de vue culturel, les individus ayant vécu au même âge un
événement historique à portée symbolique et culturelle identique font partie
d’une même génération.
D’un point de vue social les individus ayant vécu, dans ce contexte culturel
partagé, des conditions de vies similaire (en terme de revenu, de chômage,
de formation, etc.) font partie d’une même génération.
Enfin, d’un point de vue subjectif, on peut penser que des individus faisant
partie d’un groupe se distinguant de leurs aînés font eux aussi partie d’une
même génération.
Nous précisons aussi que nous englobons dans cette génération des jeunes
français, mais pas seulement. Nous intégrons les jeunes vivant dans des sociétés
développées ou en fort développement (la Chine notamment). Notre génération
Y n’est donc pas qu’une élite cosmopolite, aisée, très diplômée, centrée sur son
mobile. Ce n’est pas une minorité.
Mais les limites d’âges restent floues et identifier des « événements
historiques » marquants qui les réuniraient tous est aujourd’hui moins évident
que par le passé. De même, mettre en avant et identifier une vision du monde
commune est de moins en moins simple.
Alors à quelles conditions et sur quelles bases peut-on considérer que tous ces
jeunes font partie d’une même génération et considérer ce terme comme un
concept pertinent et utile ?
Premier critère nécessaire : une « génération » se crée lorsque se combinent
plusieurs « effets » :
l’effet de cycle de vie : l’âge impose un type de comportement plutôt qu’un
autre. Avoir 10 ans implique bien sûr une toute autre vie que d’avoir 15 ans,
25 ans ou 40 ans ;
l’effet de cohorte : le fait d’être né à peu près au même moment et de vivre
des expériences au cours de la jeunesse (que des plus vieux n’ont pas
frenchpdf.com
vécues) peut être déterminant ;
l’effet de périodes : les circonstances historiques particulières à une époque
(guerre, crise, etc.) peuvent expliquer certains comportements
générationnels.
Outre la combinaison de ces effets, un dernier critère est requis pour définir
une génération : la conscience qu’ont les individus de se distinguer des autres
générations (distinction, opposition).
Nous ne pensons pas qu’il existe un événement unique et fondateur commun à
tous ces jeunes qui marquerait à coup sûr tous ces membres comme faisant
partie, indéniablement d’une génération, mais nous remarquons qu’il existe des
tendances historiques fortes qui pèsent lourdement sur ces jeunes.
Ces faits englobants sont pour nous les suivants : la mondialisation
économique et financière, la mondialisation culturelle (qui fait que les goûts, les
modèles et les valeurs surtout occidentales se diffusent plus rapidement que par
le passé) et la diffusion massive des technologies de l’information et de la
communication ainsi que le chômage de masse.
Nous ne reviendrons pas ici sur la mondialisation économique et financière,
dont chacun se représente assez bien les conséquences et l’impact quotidiens.
Nous ne nous pencherons pas non plus sur la mondialisation culturelle
(l’occidentalisation principalement) qui structure très fortement les
représentations réelles et symboliques des individus du monde entier. Mais nous
allons approfondir un peu l’explosion technologique ainsi que le chômage de
masse.
Les nouvelles technologies ont révolutionné bien plus que les usages. Quand
on touche un écran pour lancer son morceau préféré sur son téléphone mobile,
on ne se rend plus forcément compte du coup infligé par ce geste à de (très ?)
anciennes habitudes de consommateurs.
Le « World Wide Web » propose aujourd’hui sous forme de flux (c’est là toute
sa force) la quasi-totalité du savoir (et des délires) humains. Autrement dit, en
ligne, il est possible à chacun de consulter la totalité des livres du monde, ce qui
serait bien sûr impossible matériellement parlant… Mieux, c’est tout le monde
frenchpdf.com
matériel que nous connaissons qui se liquéfie dans la toile chaque jour un peu
plus avec le numérique.
La technologie bouleverse durablement le champ des possibles et la maîtrise
initiale de notre environnement commun. Hors ce bouleversement technologique
est partagé par cette génération que d’autres nomment les Digital Natives.
Mais tous connaissent également un autre phénomène qui impacte d’autant
leurs agissements et leur manière d’appréhender le monde : le chômage de
masse. Dans un article fort intéressant, Louis Chauvel affirme : « L’avènement
du chômage de masse concentré sur les jeunes est un événement historique
moins visible que mai 1968, mais il pourrait être en revanche plus massif,
démographiquement voire culturellement. »[2]
Le chômage de masse que connaît depuis quelques années la France est un
chômage qui dure et il structure fortement les représentations que les jeunes se
font du marché du travail, de la vie dans l’entreprise, de l’utilité (et de
l’efficacité) de l’école et surtout de leur (in)capacité à obtenir un emploi qui leur
conviendra.
Ce constat-là entraîne de fait une rupture franche de ces jeunes (entre 16-25
ans) avec leurs aînés puisque ce sont les premiers à avoir massivement vu leurs
parents vivre la crise économique (depuis les chocs pétroliers de 1973-1975), le
chômage et la précarité.
Ainsi alors que la précédente génération (la X) a grandi dans l’idée que son
insertion professionnelle serait compliquée, sans doute longue, mais qu’elle
pouvait, en faisant les efforts demandés et en s’adaptant, accéder tant bien que
mal à des postes stables, avec une trajectoire professionnelle et sociale linéaire ;
la génération Y, elle, ne se fait plus aucune illusion.
En ayant intégré que la stabilité professionnelle n’était plus pérenne, que le
numérique bousculait les barrières du temps et de l’espace, ces jeunes
entretiennent un nouveau rapport au temps et plus profondément à l’avenir. Pour
eux l’avenir est profondément incertain, difficilement maîtrisable, la situation
d’aujourd’hui ou même de demain peut-être obsolète après-demain… Ils en font
frenchpdf.com
l’amer constat tant au niveau sentimental (le divorce est passé par là) qu’au
niveau professionnel (fin programmée de la notion de CDI). C’est ce qu’ils
ressentent et c’est ce qu’ils voient.
Ces représentations nouvelles des jeunes (du progrès économique et social de
leur société, de la possibilité d’action qu’ils ont sur leur société) ont des
conséquences sur leurs valeurs, sur leurs attentes et sur leur façon d’envisager
leur vie au travail.
Voilà tout ce qui, pour nous, nous permet de parler de « génération » lorsque
nous parlons de ces jeunes.
frenchpdf.com
famille et les capacités d’utilisation des nouvelles technologies sont
extrêmement variables au sein de cette population « jeune » (entre 15 et 30 ans
donc).
En fait si on en croit Jean-Noël Lafargue[3], interviewé par Astrid Girardeau,
dans le journal Libération du 10 mars 2010, cette génération ne maîtrise pas
totalement cette technologie : « la question, c’est de savoir si cette génération va
être en mesure de maîtriser le développement des technologies. Je crains que
non. On est loin du mythe des fictions cyber-punk avec des gamins qui savent
programmer des satellites depuis leur montre à quartz. Ils ne sont pas plus armés
que la génération d’avant, voire moins que les trentenaires ou quarantenaires
intéressés par l’informatique. »
S’il reste un doute sur leur maîtrise réelle de l’outil et de la technologie, il n’en
subsiste aucun sur la facilité qu’ils ont à intégrer toutes les modifications que
cela entraîne et qui sont vertigineuses.
Premièrement nous l’avons vu, le digital a transformé notre rapport au temps.
Avec les nouvelles technologies, le traitement de l’information ainsi que l’accès
à l’information et aux gens sont quasi-instantanés. Les jeunes de cette génération
n’ont donc pas appris à être patients et ils s’attendent à ce que tout bouge
rapidement. Leur concept du temps est donc caractérisé par l’instantanéité ou
l’immédiateté et cela est valable pour tout.
C’est précisément ce nouveau rapport au temps et à l’avenir qui nous semble
expliquer les comportements, surprenants pour les autres générations, de ces
jeunes au travail, dans le cadre des entreprises.
Ils ont tendance à être davantage opportunistes, à être en permanence sur un
registre donnant-donnant, à vouloir tout, tout de suite. Ils ont intériorisé et
totalement accepté les règles du jeu du capitalisme. Nulle intention (pour la très
grande majorité) de remettre en cause frontalement ces règles. Bien au contraire
ils s’appuient sur les impératifs de flexibilité, de réactivité, de disponibilité
exigés par les entreprises pour, dans la mesure du possible, les retourner à leur
compte.
frenchpdf.com
Dans un cadre de travail ils sont flexibles mais peuvent très rapidement décider
de changer d’entreprise. Ils sont réactifs mais veulent aussi en contrepartie
pouvoir articuler comme ils le souhaitent leur temps privé (aller sur Facebook,
regarder les horaires de ciné, voire jouer sur internet) et leur temps professionnel
pendant leurs heures de travail. Ils sont disponibles et peuvent s’impliquer
fortement dans leur travail mais ils exigent en contrepartie un bon salaire, des
RTT et des petits à-côtés.
Ils ont intégré le fait de devenir une force de travail instrumentalisée par
l’entreprise pour faire davantage de profits, mais ils cherchent en contrepartie à
obtenir le maximum de l’organisation en un minimum de temps car ils sont
conscients qu’ils peuvent être éjectés rapidement. C’est une relation beaucoup
plus instrumentale aux organisations de travail et à un système dont ils
connaissent la froideur et le cynisme.
La génération Y c’est aussi la génération Why (Y en anglais) la génération qui
demande « pourquoi ? » et qui se posent sans cesse des questions. Ce sont des
jeunes qui remettent en cause bon nombre de ce que nous prenons pour des
certitudes.
L’origine de ce nom (« génération Y ») a d’ailleurs plusieurs attributions.
Premièrement, ce Y serait une représentation du fil de leurs écouteurs lorsqu’ils
profitent de leur musique numérique. Le fil de leurs écouteurs branchés à
chacune de leurs oreilles, forme alors un Y sur leur poitrine.
On parle aussi de génération Y comme suite logique de la génération
précédente : la X. Troisièmement ce serait une traduction de la locution « why »
en anglais qui veut dire à la fois Y et pourquoi. Pourquoi étant un des mots que
prononcerait le plus cette génération. On peut trouver également des diminutifs
de « génération Y » souvent issus du monde anglo-saxon comme GenY et Yers.
En mai 2013, Time a titré « The Me Me Me Generation » pour qualifier
toujours les mêmes jeunes mais pour mettre en avant cette fois leur dimension
égotiste.
Finalement, quel vocable choisir pour parler d’eux. Nous avons choisi le terme
frenchpdf.com
génération Y parce qu’il nous semblait être le plus juste (notamment par rapport
à la génération X) mais aussi le plus riche de sens, en ne nous limitant pas au
Digital Natives ou à la génération Me Me Me. Nous avions besoin de quelque
chose de plus « grand » que des spécificités.
Nous sommes conscients qu’il s’agit là d’une étiquette et que s’il y a bien un
groupe de personnes pour qui les « étiquettes » ne veulent rien dire, ce sont bien
les jeunes dont nous parlons ici.
Vous qui nous lisez, acceptez nos plus plates excuses pour ce « label » qui est
plus pour nous une manière de vous appréhendez dans votre globalité plutôt
qu’une étiquette.
Tout au long de ce livre, vous serez appelés tantôt « les jeunes », tantôt « les
Y », ou encore la génération Y. Ces vocables généralistes ne sont pas là pour
gommer vos personnalités, vos individualités et vos spécificités individuelles,
mais il nous est utile pour pouvoir souligner et dimensionner à sa juste mesure,
ce qui vous unit et ce que vous partagez.
Les Y et le luxe
frenchpdf.com
depuis chaque année, prouve que les jeunes de 15 à 35 ans, raffolent du luxe et
ce un peu partout dans le monde.
Le luxe fait rêver la génération Y. C’est particulièrement vrai en Grande-
Bretagne (80 % de jeunes, contre 72 % pour l’ensemble de la population), en
Chine (75 %, contre 74 %), aux États-Unis (71 %, contre 67 %) et en Allemagne
(69 %, contre 59 %). Nettement moins au Brésil et en Espagne (54 %).
Non seulement les jeunes aiment le luxe, mais ils l’aiment plus que leurs aînés,
même si l’écart est plus réduit en France et au Japon. « Dans ces deux pays
existe une culture du luxe plus prégnante qu’ailleurs, ce qui explique sans doute
un rapport plus distant, plus raisonné, plus expert aux marques, même chez les
jeunes », argumente Rémy Oudghiri, directeur du département Tendances et
Prospective au sein d’Ipsos Public Affairs.
Et pour accéder à ce luxe ces jeunes utilisent tous les moyens mis à leur portée
continue Rémy Oudghiri : « Pour résoudre cette histoire d’amour contrariée avec
les grandes marques du luxe, la génération Y utilise toutes les ressources
d’Internet ».
Le périmètre du luxe s’est élargi, allant jusqu’à englober des marques
(essentiellement des griffes textiles) auxquelles leurs aînés n’auraient sans doute
pas pensé comme Calvin Klein, Hugo Boss, Lacoste, ou Ralph Lauren qui sont
citées comme les marques les plus portées par la génération Y, en Europe
comme en Chine ou en Amérique.
Pour clore cette introduction sur la génération Y, nous voulions ajouter que
pour écrire ce livre sur la génération Y et le luxe, nous nous sommes longuement
interrogés sur la façon la plus légitime que nous allions devoir trouver pour
traiter du sujet sans que des boucliers se lèvent. Des boucliers venant de toute
part, dont les propriétaires pourraient nous dire : « La génération Y n’existe
pas ! », « La génération Y n’est qu’un concept marketing que vous nous sortez à
toutes les sauces », « Vous parlez de choses que vous ne connaissez pas, vous
n’êtes ni des sociologues ni des démographes », ou encore « Je ne suis pas un
Y ! » ou bien « Vous surfez sur un buzzword marketing ! No bullshit ! », etc.
frenchpdf.com
Mais d’autres comme Raphaël Turcat[4] de Technikart penseront comme nous
que de ne pas reconnaître les Y finalement : « C’est un réflexe de vieux schnock
et de gens qui refusent de lâcher le pouvoir – ce qui est compréhensible, vu
qu’ils ont eu du mal à y parvenir. Mais ce qui est étonnant, c’est que ceux qui
nient la génération Y sont souvent des X qui ont connu le même problème avec
les baby boomers. Sous leur aspect cool, les baby boomers ont castré la Gen X
en la niant, au mieux, en la dévalorisant, au pire avec un discours du genre : vous
êtes des nuls, vous n’avez pas fait la révolution, vous n’existez pas. » Nul doute
que certains à la lecture de ce livre, penseront toujours le contraire, qu’ils soient
X ou non, (« haters gonna hate » comme on dit sur les internets) mais nous
croyons avoir trouvé une manière très Y d’y répondre : la démonstration.
Car pour faire taire les Cassandre, nous avons intégré les jeunes dont nous
parlons à chaque étape de notre réflexion.
Nous sommes deux auteurs mais cet ouvrage n’aurait pas pu voir le jour sans
le concours de 21 autres collaborateurs. Ainsi Yutii Lau, Aristide Douroux, Peter
Dona, Jean-Noël Chantreuil, Stéphane Bal, Christel Van Isacker, Estelle
Giraudeau, Geoffrey Bruyère, Allan Ricardo Joseph, Florian Deveaux, Thomas
Verstrepen, Sidney Auffret-Debaque, Benoît Wojtenka, Camille Mercier,
Laurent-Julien Monfils, Camille Broussin, Yoan N. Dorny, Manon-Mélody
Quantin et Anaïs Duquesne ont participé à ce livre.
Ces jeunes, étudiants, ou professionnels, en stage ou en apprentissage,
entrepreneurs, blogueurs, se sont passionnés pour le sujet et ont effectué un
travail remarquable. Nous les avons intégrés dans le projet, de sa genèse jusqu’à
sa conclusion. Ils nous ont aidés à réfléchir, à chercher, à collecter, à prouver, à
interroger, à illustrer, à démontrer, à penser, à révéler, à trouver, à approfondir et
à questionner les liens qui existent aujourd’hui entre leur génération et le luxe.
Ils ont été les muses de notre ouvrage.
Car finalement qui mieux que la génération Y pour parler de la génération Y ?
Pour explorer ce qui les touche, ce qui les fait vibrer, ce qui les intéresse et ce
qu’ils apprécient ? C’est pourquoi nous leur avons confié le soin de nous exposer
leurs études de cas et ce qu’ils considéraient, eux, génération Y, comme étant
frenchpdf.com
des best practices dans la manière de les cibler, de répondre à leurs attentes ou
simplement de les comprendre et de les appréhender de la meilleure manière et il
y a des surprises !
18 études de cas ont donc été gardées pour cet ouvrage. 18 cas qui leur tenaient
à cœur et qui les ont touchés personnellement. Ces cas ils les ont aimés car ils ne
les caricaturaient pas. Ce sont pour eux des best practices et il nous semblait
normal pour nous de leur donner la place qu’ils méritaient.
Vous tenez donc entre vos mains un livre co-écrit avec des jeunes issus de la
génération Y. Cette task force Y comme nous l’avons baptisée c’est la plus belle
preuve que nous avons trouvée pour prouver et légitimer non seulement leur
existence, mais aussi leur pertinence.
Exposition « Gen Y, pourquoi ils ne s’interdisent rien »
Nous avons décidé de vous offrir une respiration artistique, une pause esthétique, au sein de ce livre, à
travers une exposition en 15 tableaux permettant de visualiser des insights stratégiques, pour bien
comprendre la génération Y.
Cette illustration artistique en 15 insight-tableaux a été réalisée par une artiste issue de la génération Y,
Melody Cappello, avec la complicité conceptuelle d’Aristide Duroux et de Matthieu Parelon. Voici, le
catalogue de cette « exposition papier ».
frenchpdf.com
NOTRE MANIFESTE Y
Nous croyons que la génération Y existe, car nous l’avons rencontrée et
nous avons travaillé avec elle.
Nous croyons qu’il faut briser une somme d’incompréhensions sur cette
génération.
Nous croyons qu’elle est fascinante par son énergie, son dynamisme, sa
créativité et sa maturité.
Nous croyons que la génération Y est consumériste, communicante,
entrepreneuriale, planétaire et que les changements qu’elle initie touchent
tous les aspects de nos sociétés modernes.
Nous croyons que cette génération a moins besoin de nous que nous
n’avons besoin d’elle.
Nous croyons que ces jeunes inventent chaque jour une nouvelle rébellion,
non politisée, une rébellion créatrice qui ne se définit pas par l’opposition.
Nous croyons que leur résilience, leur optimisme et leur optimisation
permanente fabriquent un nouveau monde.
Nous croyons que leur rébellion est stratégique et qu’ils préfèrent utiliser le
système pour mieux le rebooter.
Nous croyons que le « Vous ne comprenez pas » qu’ils nous assènent est
plus lourd de sens que le traditionnel « Vous ne nous comprenez pas »
répété par les générations précédentes.
Nous croyons que la génération Y résiste au modèle traditionnel pour nous
démontrer que les règles du jeu actuelles sont devenues inadaptées au
monde dans lequel ils vivent.
Nous croyons que la génération Y bouscule les entreprises quand elle est
plus exigeante qu’elles.
Nous croyons que cette génération bouscule ceux qui les encadrent pour
construire sur de meilleures bases la société de demain.
Nous croyons que les jeunes peuvent être de véritables moteurs, des forces
de propositions et des pros actifs si nous arrêtons de les disqualifier, de les
montrer du doigt ou de les déresponsabiliser.
Nous croyons qu’ils construisent chaque jour un meilleur équilibre entre vie
professionnelle et vie personnelle.
Nous croyons que les Y obligent la société à s’améliorer, en s’ouvrant
d’avantage sur le monde, en redéfinissant son organisation à l’aune des
frenchpdf.com
évolutions technologiques, en vivant dans l’instantané et en dimensionnant
ces projets de vie de manière collective.
Nous croyons qu’en bousculant les conventions, la génération Y construit
un management moins hiérarchique, plus transversal, moins directif et plus
collaboratif, pour que chacun puisse avoir un rôle moins ennuyeux et plus
épanouissant.
Nous croyons que la génération Y redéfinit les contours du mérite de
chacun en privilégiant l’efficacité à l’ancienneté.
Nous croyons que les jeunes d’aujourd’hui ont besoin de ressentir la
compétence pour accepter l’autorité.
Nous croyons que cette génération à besoin d’être entendue pour
commencer à écouter.
Nous croyons que cette génération est plus efficace parce qu’elle est
connectée.
Nous croyons que cette génération exige son bien-être et qu’elle ne le
négociera pas.
Nous croyons que ces jeunes profitent de la révolution technologique
pendant que nous la subissons.
Nous croyons que leur vision sur les questions digitales peut être source
d’enseignements significatifs pour ceux qui les écoutent.
[2] « Les nouvelles générations devant la panne prolongée de l’ascenseur social », Revue de l’OFCE,
janvier 2006.
[3]
Expert en technologies et maître de conférences depuis 1996, notamment à l’université Paris 8 et à
l’École supérieure d’art du Havre.
[4] Rédacteur en chef du magazine Technikart.
frenchpdf.com
CHAPITRE 1
Quand nous avons commencé à nous interroger sur la génération Y et que nous
avons posé des questions autour de nous, nous n’avons pas été déçus des
réponses. Que ce soit dans le domaine, économique, politique, sociologique ou
éducatif, tout ce qui nous revenait était principalement négatif. Tour à tour
impatient, procrastinateur, autiste (car hyper-connecté), individualiste, fainéant,
le jeune semblait être une plaie pour tout le monde. Alors pourquoi tant de
haine ?
Bien sûr, ces adjectifs pourraient aussi qualifier toutes les générations
précédentes et les jeunes en général, mais pas aussi systématiquement.
Aujourd’hui, quelle que soit la sphère, la jeunesse fait peur. Elle est soit trop
ceci, soit pas assez cela. Il semble que personne ne lui reconnaisse une place
voire un rôle. Alors pourquoi ? Pourquoi ces nouveaux rebelles semblent-ils
faire si peur ? En travaillant avec eux, en les observant, en les incluant dans le
process de travail qui a donné lieu à ce livre, nous nous sommes aperçus que
s’ils font si peur c’est parce qu’ils sont déterminés et ils sont déterminés parce
qu’ils n’ont rien à perdre… c’est-à-dire tout à gagner. La génération Y possède
la capacité (et pour la première fois dans l’histoire les moyens) de changer le
monde et elle le sait.
Notre concept « rebel with a cause » fait directement référence au film Rebel
frenchpdf.com
Without A Cause[1] dans lequel le mythique James Dean campe un héros blond,
beau, lumineux qui porte en lui la souffrance de la jeunesse mais aussi le
changement qu’elle engendre. À l’époque déjà, cette jeunesse rebelle était mal à
l’aise avec le monde ancien, celui des pesanteurs, des conservatismes et du
matérialisme séduisant. Son personnage oscille en permanence entre l’ancien
schéma et les espoirs d’une société nouvelle. Le rebelle de notre génération Y,
lui, n’hésite plus et à l’inverse de Jim Starck (le personnage joué par James
Dean) vit ce choix sans violence, mu par une profonde conviction. Alors rebelle
oui mais pas sans cause ni buts à atteindre. Le rebelle d’aujourd’hui sait que le
monde lui appartient, il connaît sa puissance, son influence, son poids
démographique. Il mesure son avance technique et digitale. Il capte les enjeux
auxquels la société doit faire face. En questionnant sans cesse les institutions et
l’ordre établi, ce rebelle refuse les diktats et lui préfère le create, le share et le
search auxquels bien souvent il passe ses journées.
Aujourd’hui ce jeune rebelle, par son humour, sa capacité à tout partager, sa
formidable croyance en l’avenir, son aptitude à toujours contourner les obstacles
et son auto promotion constante oblige le cadre préétabli à se transformer, à se
reconfigurer. Le « rebel with a cause » pose les questions qui font sens. Il ouvre
la société au monde, aux évolutions technologiques et à la collaboration. Il mise
sur l’horizontalité et la fin des hiérarchies préétablies par l’âge. Il révolutionne
l’économie que nous connaissons. Il crée et risque quand les autres se
complaisent dans le conformisme et les règles. Tous ces chamboulements ont
cours à l’heure actuelle et nous allons voir en quoi c’est lui qui les initie.
frenchpdf.com
contingences de sa vie quotidienne. Ils abordent la comédie et l’humour comme
un moyen (efficace) de casser le quotidien en le dynamitant à coup de LOL. Aux
partis politiques ils préfèrent le parti d’en rire. Dans un monde globalisé, sur
lequel personne, ni l’individu ni les politiques, ne semble avoir de prise, ils
optent pour une réjouissante stupidité.
frenchpdf.com
plus disent pouvoir accomplir ce qu’ils désirent s’ils travaillent suffisamment
dur.
De cet optimisme ils en ont fait un credo et 65 % des plus de 15 ans pensent
que « Winning » est un bon slogan pour leur génération
60 % d’entre eux se sentent plus malins que les autres et 83 % pensent qu’ils
sont créatifs.
En France, plus de 7/10 restent optimistes quant à leur carrière à venir.
Résultat, ce qui prime pour les jeunes d’aujourd’hui, c’est « l’épanouissement
personnel », le « confort » et la « sécurité de l’emploi ». Plus des 3/4 se disent
« épanouis » et ont le « sentiment d’être utiles », même s’ils estiment que leurs
« efforts ne sont pas suffisamment reconnus »[4].
« On veut être optimiste même si ça nous inquiète quand même. Nous, à la
différence de nos parents on n’y a jamais cru, on nous a toujours dit que de toute
façon on allait en chier, qu’on n’aurait pas de boulot, qu’on travaillerait tard…
Donc on n’est pas traumatisé par la déception. Le futur nous interroge et cela
crée de nouveaux sujets de réflexion pour nous » nous avoue Judith Amsallem,
blogueuse.
En se posant des questions sur leurs futurs, ces jeunes se posent des questions
sur leurs buts ultimes et sur leur définition du bonheur.
Comme nous le confie Nicolas Bordas[5] : « Cette génération n’est pas
seulement artificielle ou superficielle, elle possède un profond sens de
l’efficacité. Avec mes enfants je vois à quel point ils développent une sorte
d’économie de l’efficacité générale de la vie, un pragmatisme glacial pour toutes
les choses qui les entourent. »
Joseph Ghosn, rédacteur en chef du magazine Obsession, fait le même constat
« Le contexte est tellement plus difficile pour eux aujourd’hui qu’ils sont
forcément plus pragmatiques. »
Ne croyant plus vraiment à la société, la génération Y ne désire pas non plus la
changer. « Elle porte indéniablement en elle de nouvelles valeurs et donc une
frenchpdf.com
nouvelle société, mais sans que cela passe par un quelconque esprit de révolte »,
pense Olivier Rollot[6].
frenchpdf.com
d’avoir des commentaires en retour.
L’humour développe la créativité personnelle. 4 personnes sur 10 déclarent
avoir déjà créé un clip humoristique ou parodique. L’humour est le premier
connecteur social, il passe avant le style, avant les goûts musicaux avant le sport
et avant l’opinion politique.
frenchpdf.com
comédie. C’est pour cela que MTV parlent de comedy natives pour souligner
cette dimension « comique » chez les Y, première génération à produire du
comique de façon quasi naturelle. Ces jeunes sont actifs dans la production de
matériel comique (vidéo, clip, parodies…). Ils sont 4 sur 10 à avoir déjà publié
une vidéo en ligne. C’est 2 fois plus que les X. L’humour est devenu le plus fort
connecteur social de cette génération.
Ce nouveau comique cristallise 2 tendances fortes chez les Y : la mise en scène
de soi et la créativité. Ce fantasme de célébrité légitime à lui seul la place qu’a
pris l’humour au sein de cette génération et par là même la culture du LOL.
Pour eux, l’humour joue un rôle fondamental dans la construction de leur
identité. 9 jeunes hommes sur 10 déclarent que leur sens de l’humour est ce qui
définit leur personnalité. « Tu es ce que tu postes », « Tu exprimes ton sens de
l’humour sur les réseaux sociaux » sont leurs nouveaux credos.
Bref, pas étonnant que les marques s’y mettent ! Dans la consommation, si le
bien-être arrive en tête de liste des bénéfices attendus (pour soi, pour ses
proches), le fun est assurément le moteur émotionnel pour conquérir dans la
durée. Les marques peuvent augmenter leur pouvoir d’attraction en utilisant
l’humour comme levier, peu importe ce qu’elles vendent. Cette importance
grandissante de l’humour est analysée comme un véritable lifestyle par Vincent
Grégoire[8] : « C’est pas les punks qui cassent tout, ou alors les punks, ils les
prennent au dixième degré, pas au premier degré. Mais à l’intérieur, il y a ce
sourire, cette façon de saboter la planche et c’est vachement plus violent même
si la formalisation, la stylistique, elle, est très cute. »
En conclusion, il ne faut pas croire que cette LOL génération n’a rien dans la
tête et que tout n’est qu’amusement parce que « finalement ce ne sont que des
ados ». Non. Derrière l’apparente promotion de la bêtise et du régressif, il y a la
dérision assumée du bric-à-brac du monde marchand et globalisé. Le LOL c’est
une réponse à trop de rationalité, d’obligations, de carcans, que les Y font voler
en éclat comme on éclate de rire. Chez eux, l’ironie a remplacé l’utopie.
frenchpdf.com
La société du share : la nouvelle économie Y
Le rebelle que nous décrivons dans ce chapitre n’a que faire de la hiérarchie y
compris du pouvoir qu’elle peut permettre d’obtenir. Dans son fonctionnement à
lui, hérité de sa pratique digitale, chacun doit pouvoir avoir accès à la même
chose, en même temps et sans déficit d’information. L’influence et, dans une
certaine mesure, le pouvoir proviennent du partage de l’information (Wikipédia,
les blogs, etc.), et non plus de sa rétention. Pour la génération Y il est naturel de
partager et de s’échanger l’information. Mais cela va bien plus loin que la simple
information. Aujourd’hui les Y ont fait du partage un mode de pensée, rebelle,
un mode de vie optimiste et une économie alternative.
La puissance du réseau
À l’heure d’internet et des réseaux sociaux, des milliards de personnes
s’informent, s’éduquent, découvrent comment vivent leurs voisins, tandis que la
quasi-totalité des recherches scientifiques, des créations artistiques, des livres, du
matériel politique deviennent accessibles. La mondialisation, tant décriée, est
d’abord celle de l’accès à la connaissance.
Chez les Y cette puissance inhérente à la toile et au réseaux sociaux se traduit
par un partage constant de milliards d’informations traitées en temps réel. À
l’économie de la rareté se substitue la loi du partage, celle qui définit que tout ce
qui est désirable se partage et tout ce qui est partagé a de la valeur (le contraire :
ce qui ne se partage pas n’est pas désirable, est vrai aussi).
Ainsi, les opérations de communication sont aujourd’hui construites comme de
véritables « spectacles » qui doivent séduire des « audiences ». Le cas le plus
probant de cette puissance du partage et de sa valeur est sans doute l’opération
Red Bull Stratos[9]. Cet événement est devenu un véritable sujet d’actualité
mondiale. Les chiffres sont impressionnants :
8 000 reportages télé dans 60 pays ;
77 partenaires télé exclusifs dans le monde, dont BFMTV en France ;
1,7 million de spectateurs sur BFM TV ;
730 676 likes ;
frenchpdf.com
88 000 fans engagés ;
2 000 tweets/seconde ;
41 300 000 résultats sur Google à J+8 ;
1 live stream à 2 millions puis 8,5 millions (au bout de 5 minutes) ;
8 millions de spectateurs sur YouTube, soit 16 fois le nombre de
spectateurs de l’ouverture des JO ;
20 000 photos sur Instagram avec le hashtag #RedBullStratos.
Le share et son pouvoir incroyable se retrouvent totalement dans cette
aventure humaine et marketing qui a repoussé les limites du spectacle. On y
retrouve toutes ces dimensions : l’instantanéité, l’échelle planétaire, la puissance
et l’identification.
Plus un événement est partagé plus il devient digne d’être partagé. Chacun se
change en médium et le diffuse. C’est cette puissance-là de partage à l’infini qui
donne aux Y ce sentiment d’appartenir à une génération, à un même groupe
clairement identifié et transnational.
frenchpdf.com
manière dans le monde réel avec les bien physiques. 68 % partagent des médias
physiques tels que les livres ou les DVD. Ce qu’ils partagent le plus dans la vie
matérielle, ce sont les espaces physiques (58 %), les espaces de travail (57 %) et
la nourriture (57 %).
frenchpdf.com
s’installe tranquillement dans nos habitudes. Effet positif de la crise, ce nouveau
commerce n’a pas fini de faire parler de lui.
La possession est en train de devenir un élément secondaire dans l’esprit du
consommateur et cette nouvelle économie est un véritable bouleversement de
l’économie mondiale et des mœurs. Un changement qui peut mener dans les
prochaines années à un véritable bouleversement de l’économie mondiale et des
mœurs au travers de nouveaux modes de consommation. Loïc Le Meur,
fondateur de la conférence internationale LeWeb précise : « On ne peut éviter la
sharing economy ! Elle est dans tous les médias et il s’agit non pas d’une mode
mais d’un mouvement. Un mouvement optimiste qui va générer des millions
d’emplois dans le monde et même devenir un vrai contre-pouvoir. »
La sharing economy refuse également le gaspillage et présuppose l’amitié
entre les gens. Ainsi, partager un repas peut devenir un excellent moyen de
rencontrer de nouvelles personnes. C’est tout le principe de sites comme
Voulezvousdiner, ou LiveMyFood pour partager en tant que touriste un repas
chez l’habitant.
Selon une étude réalisée par Altimeter Group[11], la sharing economy est sur le
point de transformer le monde. Si elle n’est pour l’instant que balbutiante et non
quantifiable, l’institut d’étude note l’existence d’un échantillon de 200 start-up
qui ont reçu 2 milliards de dollars de financements en capital-risque depuis leur
création.
Parmi les nouvelles tendances de consommation qui se sont développées ces
dernières années, la consommation collaborative est certainement l’une des plus
impressionnantes. Impulsée par l’énergie collectiviste des Y, elle a même été
désignée par le très sérieux Time comme l’une des dix idées qui peuvent changer
le monde et cela est impulsé par l’énergie collectiviste des Y comme le précise le
publicitaire Jacques Séguéla[12] : « C’est une génération collective, une
génération du co : colocataire, co-voiturage, co-parrainage… Ils aiment tout ce
qui peut se faire ensemble. »
L’empathie mondiale
frenchpdf.com
Grâce au réseau, la nouvelle génération prend son indépendance et échafaude
spontanément un réseaucialisme : c’est leur stratégie de survie et leur meilleure
riposte comme le pense Thomas Jamet[13] : « La génération Y c’est la première à
profiter de cette capacité à se connecter à un grand tout, à quelque chose qui
dépasse la simple communauté et la lie au village global, fortement connectée à
l’universel, bien plus que la génération d’avant qui vivait dans un monde de
sphère/zones régionales. »
Cette immédiateté mondialisée inclue des changements que nous n’avons pas
forcément encore identifiés. Ainsi, Jérémy Rifkin[14] explique que nous sommes
sortis de l’ère égoïste de la fin du XXe siècle et que début XXIe nous nous
découvrons tous reliés, interdépendants. Notre interconnexion est totale. Le
retentissement mondial de la tragédie de Fukushima nous le confirme, de même
que la priorité donnée aux enjeux humanitaires, écologiques et énergétiques dans
tous les agendas politiques, ou encore le succès extraordinaire des réseaux
sociaux de toutes sortes.
En même temps, comme l’analysait déjà le sociologue canadien Marshall
McLuhan[15], les réseaux de communication (téléphone, médias électroniques)
constituent désormais un « village global ». Nous sommes connectés en
permanence aux autres. Le tissu électronique mondial en quelque sorte
« extériorise » notre système nerveux, déploie nos capteurs sensoriels, nos
capacités d’écoute tout autour du monde.
Mais cette civilisation interdépendante, où chaque pays apprend à s’écouter et
développe des actions d’entraide, se déploie à tous les niveaux de l’activité
humaine et l’empathie mondiale s’étend au rythme des réseaux sociaux.
frenchpdf.com
Le « rebel with a cause » possède une arme, qui est à la fois le fruit d’une
intuition, du hasard et du travail, aussi universelle qu’une autre et sans doute
plus « fun », plus joyeuse, plus créative : la sérendipité[16]. Cette confiance en un
hasard heureux change tout. Avec une bonne pioche sur Google ou Facebook, on
peut résoudre la plus grande difficulté ou retrouver l’introuvable, le hasard est
devenu intelligent. Cela conforte les Y dans leur idéologie communautaire qui
veut que chacun ait le même pouvoir que les autres et qu’en unissant les forces
de tous on arrive à changer les choses. L’idée c’est que les moyens techniques
d’aujourd’hui remettent finalement tout le monde au même niveau, en se
concentrant sur un dénominateur commun, l’humanité, dont nous faisons tous
partie et en abolissant la hiérarchie.
frenchpdf.com
Narcissiques oui, mais ils continuent de s’investir dans des causes…
Dans ce contexte qui fait la part belle à la recherche de réussite individuelle,
les 20-30 ans semblent accorder une attention particulière au monde qui les
entoure[18].
Leur représentation de la société moderne idéale repose ainsi sur des valeurs
telles que la solidarité et la diversité (61 % et 23 %), et ce, de manière bien plus
prononcée que les générations antérieures (52 % et 14 %). Ils attachent
également beaucoup d’importance à la justice (57 %) et à l’ordre (29 %), comme
leurs aînés.
À force d’entendre toute la journée s’exprimer l’inquiétude des Français, leur
défiance vis-à-vis du pouvoir politique, leur critique de la mondialisation, leur
constat d’échec basé sur le moral en berne des Français, les jeunes ne semblent
plus croire à l’efficacité du pouvoir politique.
Bien que tous ces indicateurs leur démontrent le contraire, les jeunes ont
quelques leçons d’optimisme à donner. Ils se déclarent plus confiants en
l’avenir, moins pessimistes que l’ensemble des Français et surtout nettement
moins désabusés.
Un constat démontré par différentes études réalisées par Mediaprism tout au
long de l’année 2012 et particulièrement sur une des dernières enquêtes, fin
décembre : puisque plus d’un sur deux (52 %) avait plutôt confiance en l’avenir.
Ce moral est même encore plus positif sur un plan qui pourtant incarne tous les
défis : le plan professionnel.
Ils ne sont pas désenchantés ni méfiants, donc pour changer les choses et
espérer trouver leurs places, ils n’optent pas pour la révolte. Ils créent de
nouvelles socialisations, alternatives, en utilisant la force de leur réseau. Avec
des stratégies collaboratives de partage, de débrouille et d’échange gérées sur
internet, ils créent de nouvelles chaînes de valeur et investissent une couche
virtuelle multiforme qui échappe à l’emprise des vieux modèles.
frenchpdf.com
Pour la génération Y, la motivation succède à la vocation ou à la conviction. Il
ne faut plus tant chercher les raisons transcendantes de l’engagement, mais la
force intérieure de la motivation, reposant sur le libre arbitre, justifié par la
sincérité et l’authenticité que cette génération a gardé et revendique.
L’engagement, quelle que soit sa forme, connaît un bouleversement : de
collectif, il devient individuel. L’intérêt général ou supérieur est subordonné à
l’épanouissement personnel, allant même parfois jusqu’au combat, comme celui
de Jérémie Zimmermann pour la légalisation du partage et les licences
publiques : « Si je me bats pour légaliser le partage avec La Quadrature du Net,
c’est parce qu’aujourd’hui le partage représente 95 % de ma culture musicale,
cinématographique, de ma culture en général. À aucun moment je ne me suis dit
que c’était mal. Au contraire, ça n’a été que bénéfique, facteur de culture et de
partage pour moi et tous ceux avec lesquels j’ai partagé des trucs. »
De ce fait, l’engagement des jeunes passe très souvent par la constitution de
groupes informels, hors contrainte, à durée de vie limitée, mais aux
revendications immédiates, en prise directe avec une expérience appelant à une
mobilisation.
Avant, l’engagement des jeunes dans les milieux associatifs, reposait sur une
forme de présupposé de la supériorité morale de valeurs collectives. Les Y eux,
considèrent l’association au mieux comme un moyen mais jamais comme une
finalité. Le modèle des relations entre les individus et le collectif qui émerge de
cette vision repose sur la supériorité de la morale individuelle sur la morale
collective, c’est ainsi le projet personnel de l’individu qui oriente ses choix
d’engagement collectif. Il s’agit là d’une logique de contractualisation où
l’association offre un cadre à l’action personnelle de l’individu qui apporte
disponibilité et compétence.
D’un engagement militant, on passe à une logique d’épanouissement
personnel, les Y cherchent dans leurs actions au sein d’association le retour sur
investissement.
Pour que les Y s’engagent il est impératif que leur action prenne la forme de
projets concrets et d’actions de proximité afin que les jeunes puissent en voir les
frenchpdf.com
effets de manière directe et immédiate. Ils veulent apprendre mais agir de
manière autonome. Ils veulent des responsabilités variées. Pour la génération Y,
le don de son temps est plus significatif d’une intention solidaire qu’un simple
don financier.
Ainsi, dans cette génération l’engagement résulte de l’adéquation entre la
volonté d’œuvrer pour le bien, de former sa personnalité et de mieux connaître
un domaine intéressant. Ils se joignent et se rejoignent pour donner le meilleur
de leur individualité au sein d’un collectif fort. C’est ce que souligne Mélinda
Triana[19] : « Eux ont une autre conscience du monde. C’est l’union fait la force.
À la différence de nous, nous, on nous a élevé en nous disant qu’il fallait être
hyper individualistes pour s’en sortir dans la vie. Eux, ils ont compris que la vie
c’était la galère, que tout seul on ne s’en sortait pas et qu’on était plus costauds
ensemble. Ils ont compris qu’il fallait s’entourer, du coup ils forment des vrais
groupes, ils sont plus dans le collectif que nous. »
Aujourd’hui les Y croient à leur destin tout en s’intéressant aux autres.
frenchpdf.com
l’alpha et l’oméga des rapports humains. Ce pragmatisme à l’égard de la
hiérarchie se traduit notamment dans la façon dont les Y appréhendent les
décisions qui ont été prises « au-dessus » d’eux.
Ils éprouvent moins de difficulté que leurs aînés à questionner des décisions
prises à des niveaux très supérieurs à ceux auxquels ils évoluent. Qu’il s’agisse
de stratégie d’entreprise, ou d’organisation du travail, les Y n’hésitent pas à
donner leur avis (même si on leur demande rarement) et à afficher leur
perplexité voire leur désaccord.
Souvent perçues à tort comme relevant d’un complexe de supériorité, ces
prises de position des Y révèlent en réalité un mode de pensée naturellement
plus horizontal que leurs aînés. Spontanément, les Y pensent, travaillent, et
interagissent sur un mode plus collaboratif. Ils sont à l’aise avec les travaux de
groupe et autres « brainstorming ». Les nouveaux outils de l’ère internet sont
pour beaucoup une évidence car ils collent à cette philosophie horizontale. En
témoigne le succès des wikis, popularisés par le site internet Wikipédia. Sur
Wikipédia, il n’y pas de chef, ni de leader, chacun augmente la base de
connaissance en y posant sa pierre. Chaque voix compte et a le même poids.
Les jeunes cherchent l’horizontalité des rapports plutôt que la verticalité et la
centralité, ils cherchent à s’affranchir des appartenances et des modalités de
fonctionnement de la démocratie participative.
frenchpdf.com
verticalité est la pyramide avec un chef ou un groupe de chefs à sa tête prenant
toutes les décisions et ayant une vision globale des choses. À cela s’ajoute une
suite de personnes hiérarchiquement organisées, chacun ayant un rôle bien
précis. Dans cette structure, les couches inférieures de la pyramide participent à
l’ensemble sans avoir une vue globale et claire du projet.
L’horizontalité des Y est plus compliquée à concevoir sous une forme
géométrique. Nous pouvons imaginer un réseau complexe au sein duquel chaque
élément est en communication avec plusieurs autres. L’horizontalité est plus
difficile à réaliser car toute décision nécessite au préalable un consensus qui sera
difficile à trouver, surtout si le nombre de participants est élevé. Cependant avec
le développement exponentiel des technologies de l’information avec lesquelles
ils ont grandi, ce type d’organisation devient de plus en plus envisageable au
niveau national voire international.
Portée par les Y et leur importance croissante au sein des entreprises,
l’horizontalité est devenu leur norme avec le web 2.0. Les réseaux sociaux et
leurs connexions multiples participent de cette communication où le refus
hiérarchique est érigé en principe. Encore une fois, des réussites telles que
Wikipédia sont fondées sur la mise à égalité des contributeurs. De même dans
les organisations, le knowledge management s’appuie fréquemment sur la mise
en œuvre de communautés de pratique permettant la capitalisation des savoirs
informels.
Maxime Verner, 22 ans, a été le plus jeune candidat aux dernières élections
présidentielles de 2012 et pousse encore plus loin cette horizontalité : « Cette
génération est avant tout celle d’une époque où l’on se sent plus en commun
avec un jeune du Togo ou de l’Indonésie qu’avec un grand-père du fin fond de la
Creuse. »
Cette horizontalité serait donc aussi celle de la jeunesse.
frenchpdf.com
Le Y met en application ses principes de vies, en hackant les principes existant
en mode digital. En bon rebelle, il pirate les institutions, trouve des plans B, des
alternatives, esquive et finalement crée de nouvelles façons d’envisager les
choses et de voir le monde. Ces jeunes assemblent collectivement des solutions
rapides, contournent les problèmes par l’utilisation des ressources disponibles,
auxquelles ils ajoutent leur créativité et leur énergie débordante.
Un hacking créatif
À l’instar de ce qu’avait imaginé Andy Warhol dans sa Factory, les Y créent
en fusionnant les choses, en collant, en reproduisant à l’infini…
Chaque nouvelle image produite par les médias, la publicité ou les industries
de l’entertainment peut tomber entre leurs mains et se voir enrichie d’une
hybridation personnelle pour créer autre chose. Chacun se crée sa mosaïque
personnelle, construit son petit monde qui s’assemble et s’ajoute à l’autre.
Chez eux la création est synonyme de divertissement et il ne peut y avoir de
création, sans récréation.
Dans cette culture du hacking permanent émerge ainsi une stylistique nouvelle,
production collective générée par des milliers d’interactions. Ils créent et co-
créent un « bricolage esthético-identitaire » issu de l’agrégation et de la
manipulation des images et des textes sous de multiples formes : pastiches,
sampling, remix, customisation, tuning…
Ces productions, bien sûr, ne sont pas toutes des bijoux d’esthétique mais elles
représentent toutes un flux incessant. Puisant abondamment dans les thèmes des
films fabriqués pour eux, (surnaturel, violence, dérision), les Y usent aussi
souvent de références qui renvoient tantôt à l’enfance (animaux en peluche,
animaux favoris, junk food), tantôt au monde adulte (fantasmes sur la sexualité et
la pornographie notamment). Ces références multiples oscillent entre délices de
la régression et excitation de la transgression et fonctionnent instantanément.
Ces contenus, qu’ils soient qualitatifs ou non, développent une véritable culture
technico-relationnelle symptomatique des usages que les internautes font du
frenchpdf.com
numérique.
Ces figures expressives, celles des amateurs et celles d’artistes confirmés,
entretiennent par certains traits des complicités. On observe un acharnement à
casser les codes esthétiques ou narratifs classiques. La texture précise et
lumineuse de l’image numérique intensifie cette esthétique nette.
Il faut aussi du talent pour juxtaposer par des montages successifs ce qui
n’apparaît pas d’évidence avec des sujets sans liens apparents entre eux et des
formes culturelles ou des personnages parfois très éloignés l’un de l’autre. Bien
plus que des métissages, ce sont de véritables dépareillages qui alternent les
émotions, avec une sexualisation onirique où les identités de genres s’exacerbent
et même s’entremêlent. Ces hackers ont une prédilection pour les objets ou les
personnages fétiches issus de la galaxie people (comme Michael Jackson, Lady
Gaga, Paris Hilton ou encore Britney Spears).
On remarque aussi une glorification de la culture otaku : androïds, clones,
figurines enfantines issues des mangas et des jeux vidéo. Le GIF (graphics
interchange format), animation saccadée répétée à l’infini est une résurgence de
l’internet des années 1980. Ces nouveaux créateurs sont également des artistes
de la récupération de tout élément visuel, une technique utilisée intensément
dans l’art vidéo. Dans cette nouvelle culture visuelle, la prédilection pour le
détournement est portée à son paroxysme, comme si toute réalité était plus
intéressante par les projections et les délires qu’elle engendre que par sa densité
même.
Pour Mélinda Triana[20], ces nouveaux créateurs de contenus utilisent tous les
moyens mis à leur disposition pour développer leurs univers : « Aujourd’hui ils
ont tout les moyens techniques à leur portée pour créer leurs propres contenus,
pour faire leurs propres choses, pour faire ce qu’ils ont envie de faire et créer ce
qu’ils ont envie de faire […] c’est-à-dire de décider de faire les choses par eux-
mêmes et finalement, de créer leur propre monde. »
Ainsi le célébrissime mème s’enracine dans ces valeurs de hacker. Il y puise sa
culture contestataire, son désintérêt apparent et irrévérence sans limite.
frenchpdf.com
Le mème contient et met en branle toutes les modalités possibles du
détournement d’un contenu : la transformation de l’image et/ou du texte (par
substitution ou adjonction d’éléments), la fabrication d’une nouvelle image en
imitant le code d’une ancienne (le pastiche), le détournement du référencement
d’un site pour renvoyer, en clin d’œil, vers un sujet non prévu (Google
bombing) ; piratage d’un formulaire de recherche d’un site (comme en a été
victime l’Assemblée nationale fin août 2013) ; le détournement des résultats des
divers sondages sur le Net (les sites de popularité, les émissions de téléréalité à
base de votes).
Il y a aussi les hackers en mode « beta permanent ». Ce sont ceux qui
améliorent constamment leur création. Dans le jargon informatique, le beta est
une première version d’un programme que vous placez entre les mains des
utilisateurs, vous vous concentrez attentivement sur les retours et vous
recommencez frénétiquement. Ainsi pour 72 % des Y[21], la vie est comme une
application de smartphone : il y a toujours une nouvelle version pour améliorer
celle en cours.
frenchpdf.com
ce hacking est aussi contaminant : « Cette génération, c’est une génération de
virus : ils ne sont pas en dehors du système, ils sont dans le système, ils le
piratent, ils le contaminent de l’intérieur, ils l’obligent à produire des anticorps
de l’intérieur. Ils sont dans le système. Ils ne sont pas contre lui, ils l’utilisent. Ils
en ont besoin car ils savent très bien qu’ils ont besoin d’une source
d’information ».
Ce processus entraîne des changements, recrée des énergies, des choses
originales et différentes qui sont redistribuées. Pour Emmanuel Vivier[22] ce
hacking c’est la mort de la rébellion classique : « Ils ne sont plus rebelles comme
nos parents, à dire “On va faire péter le système, on va faire la révolution”, c’est
juste dire “ça sert à rien de monter contre le système, il n’y a pas de tête, tu vas
perdre ton temps à faire des manifs et tout le monde s’en fout” non c’est “Sois
malin, pète le système tout en étant dedans, prends ce qu’il y a à prendre, ne suis
pas les règles mais profite des bons côtés du système”. Ils font leur révolution à
l’échelle de l’individu : leur rébellion, ce n’est pas pour des grands idéaux. »
Ces Y ne sont pas dans une rébellion classique, ils sont dans l’utilisation
maligne et créative de ce qu’ils ont. Ils prennent tout ce qu’il y a à prendre pour
l’utiliser à leur profit. Ils ne sont pas contre, ils sont alter. En hackant le monde
actuel, ils en programment un autre. En luttant, en se détournant de ce qui existe,
ils trouvent leur chemin à eux. Ils ne cherchent pas à renverser l’ordre, ils en
trouvent les failles. Ils les trouvent puis passent à travers. Ils hackent,
remodèlent, reconfigurent et se mettent en avant par tous les moyens.
Le publicitaire Jacques Séguéla exprime la même chose : « Maintenant, t’as
une idée, tu la mets sur le net et tu deviens publicitaire. Il y a un fils de pub qui
sommeille au fond de chaque fils de cette génération de mutants. »
frenchpdf.com
explosent. Pour Guillaume Salmon, RP du concept store Colette, le fait de tout
mélanger et de brouiller les cartes est intrinsèquement lié à cette génération :
« De toute façon, toute cette culture-là n’a plus de barrière et c’est pour ça que
c’est une vraie génération : que tu viennes des quartiers riches de L.A., des
quartiers pauvres de New York, de l’Ouest parisien ou de Massy Palaiseau ; il y
a des valeurs communes, mais il y a surtout une grande uniformisation. Donc
c’est extrêmement générationnel, ils ont tous les mêmes codes. Ils se
connaissent, se comprennent, alors parfois évidemment il y a des déviances
mais, si t’as la casquette Supreme ou le T-shirt HUF, ils vont tous la connaître,
ils vont savoir de quoi il s’agit. »
Pour plaire à cette génération sans « frontières », les marques ont muté pour
devenir des marques médias, à l’instar de Redbull. Une marque qui aux yeux des
Y est aussi crédible qu’un média lorsqu’elle diffuse du contenu et qui sait à la
fois produire du soda et produire des shows extraordinaires (clip sportif,
performance incroyable…).
Cette propension à abattre les murs chez les marques est particulièrement vraie
dans le premium. Ainsi une marque comme ACNE née en 1996, est l’œuvre de
Jonny Johansson qui fonde avec trois associés l’entreprise ACNE (Ambition to
Create New Expressions). Après quelques tâtonnements, la marque finit par se
concentrer autour de 5 pôles d’activité (mode, conseil en communication,
production, édition, animation) dont la branche mode, baptisée Acne Studio,
compte maintenant pour 70 % dans le chiffre d’affaires de la griffe, estimée à
50 millions d’euros, avec une croissance d’environ 25 % par an. Un concept
venu de nulle part pour une marque, finalement plutôt à part dans l’univers
premium, devenue en quelques années la référence absolue en matière de
coolitude et de bien propre sur soi, toujours stylé, mais avec son petit sens du
confort.
frenchpdf.com
D’un point de vue économique le « rebel with a cause » est une aberration pour
les générations précédentes. En effet il a trop vu ses parents s’user au travail
pour à son tour vénérer l’argent. Il consomme bien sûr mais nous l’avons vu, il
le fait de manière alternative. Il rejette en bloc l’idéologie néolibérale telle
qu’elle lui est imposée. Le fait de vivre dans un monde de contenus, liquides,
déboulant au moindre clic lui a fait reconsidérer la propriété et son moyen
l’argent. Il est plus important pour lui d’avoir accès aux choses (quitte à ne pas
en avoir besoin d’ailleurs) plutôt de les posséder (et ne pas en jouir). Le rebelle
Y remet en cause les valeurs sur lesquelles les générations précédentes se sont
doucement reposées. Nous allons voir comment.
frenchpdf.com
monde de la communication : « Pour moi aujourd’hui l’argent, ça ne correspond
pas à de la liberté. Je ne veux pas posséder, parce que j’estime que plus tu
possèdes et plus ça te possède : t’as l’assurance, les frais… Je préfère l’investir
sur ce que je connais ou le garder volatil. »
La jouissance instantanée, éphémère par essence mais activable de suite c’est
la consécration de la culture du streaming.
Les Y ont vu leurs parents passer leurs vies à essayer de posséder pour au final
ne pas être heureux. Eux se disent qu’ils ne feront pas la même erreur. Ils sont
nombreux à penser qu’ils n’ont pas besoin d’être riches s’ils arrivent à s’entourer
d’amis qui le sont.
Ainsi, même en en ayant les moyens, les Y se refusent à l’achat de voiture ou
de biens immobilier, ils préfèrent des alternatives comme le leasing ou la
location.
Aux États-Unis, si le marché automobile américain va si mal c’est à cause des
Y qui n’achètent pas de voiture. En 2010, alors qu’ils représentent une large part
de la population active, les Y ne sont que 27 % à avoir acheté un véhicule neuf
tandis qu’ils étaient 38 % en 1985[24].
frenchpdf.com
L’argent : un autre moyen d’être libre
Le fun marxisme c’est aussi la nouvelle identité de l’argent au sein des valeurs
Y. Ils ne le sacralisent pas. Ils savent qu’il est bon d’en avoir mais ne feront pas
tout pour et surtout rien ne sert d’en avoir sans avoir une bonne idée de ce qu’on
va en faire. Les Y remettent l’argent à son juste niveau. Pour eux, c’est un
moyen ; nombreux sont ceux qui privilégient ce qu’ils peuvent faire avec plutôt
que son accumulation. Ce constat est également fait par Jacques Séguéla :
« Cette génération a remis l’argent à sa place, son slogan c’est “l’argent n’a pas
d’idée, seule les idées font de l’argent”. Elle aime l’argent comme moyen, elle
ne fait pas l’erreur d’en faire une fin. En plus, le dernier milliardaire français
connu a 18 ans et ce dernier a dit “je vais d’abord donner ma part aux œuvres et
deuxièmement je vais refaire fortune.” Et d’ajouter “Si à 18 ans je vis comme un
milliardaire, je ne connaîtrais pas la vie, je vais m’ennuyer”. »
Chez les Y la valeur intrinsèque de l’argent n’existe pas. C’est un faire-valoir,
un autre moyen de se mettre en avant. Un moyen de montrer qu’on a réussi
quelque chose et surtout une preuve de liberté. Ce que les Y fuient ce sont toutes
les obligations, les carcans, tout ce qui les empêche de faire ce qu’ils veulent et
quand ils le veulent. Vis-à-vis de la consommation, la limite c’est l’argent, en
avoir ou pas, qui permet ou non d’accéder aux choses. Or cette limite n’existe
pas sur internet…
frenchpdf.com
produites ou récupérées est une pratique courante. En revanche, les auteurs de
contenus innovants se font plus rares. Ces flux culturels inspirent et décuplent
l’imagination de chacun. Les jeunes se laissent bercer par cet environnement.
L’articulation entre expérience concrète et projection imaginaire ne cesse de se
déployer et de se reformuler, accordant pleinement son sens à la formule
d’Edgar Morin d’un environnement « animé par ce double mouvement de
l’imaginaire mimant le réel et du réel prenant les couleurs de l’imaginaire ».
Chacun peut réfléchir et construire sa vie, en puisant dans l’océan des images et
des informations qu’elles transmettent, fournissant des points de comparaison,
des sources d’effroi ou de réjouissance, des modèles et des valeurs – ou le
contraire, des éléments de rejet.
L’individu circule mentalement dans un paysage d’image produit de la
complexité des flux qui l’assaillent. Ainsi posséder du Vuitton, du Gucci ou du
Prada est aussi simple qu’un clic et le fantasme est devenu leur pratique sociale.
L’esthétique de leurs blogs traduit ainsi cette sédimentation des influences
culturelles sur la subjectivité contemporaine, cette ivresse à vivre ici et ailleurs,
dans le passé et dans l’avenir, dans la réalité du quotidien et sa représentation
parodique ou sublimée.
frenchpdf.com
sensibles à toute discrimination en raison de l’origine. La langue anglaise est
plus utilisée que chez leurs aînés. Si l’on ajoute à cela un profond désir
d’entreprendre, le Y est le candidat parfait à l’émigration.
frenchpdf.com
jeunes hommes… Depuis les années 1970, beaucoup des rites anciens et très
codifiés ont progressivement disparu et laissé place à une sorte de vide sur le
rôle de la jeunesse dans la société.
Aujourd’hui la nouvelle génération n’est qu’une variable d’ajustement de la
crise. Plusieurs années peuvent s’écouler entre le premier stage et le premier
CDI. C’est la première génération depuis longtemps qui vivra moins bien que
ses parents. Leur culture, leur musique, leurs paroles, leurs écrits, leur style,
leurs risques et leurs rêves sont souvent mal compris voire ignorés. La
génération Y, on l’a vu, a le droit à tous les préjugés : trop ceci ou trop cela… En
fait, ils sont trop souvent absents de la vie publique, des entreprises et trop de
barrages sont mis pour que les plus âgés gardent le pouvoir le plus longtemps
possible. Cette dénonciation a été rendue publique et a eu un fort poids
médiatique lorsque des personnalités comme Félix Marquardt, fondateur des
Dîners de l’Atlantique et des Submerging Times Diners, Mokless, rappeur,
auteur interprète, membre du groupe Scred Connexion et Mouloud Achour,
journaliste, ont publié une tribune dans Libération, le 3 septembre 2012 intitulé
« Jeunes de France, votre salut est ailleurs : barrez-vous ! ».
frenchpdf.com
Le succès des jeunes qui réussissent est un modèle pour le Y. Ainsi, ces
nouveaux entrepreneurs deviennent des figures héroïques, à l’image de Mark
Zuckerberg fondateur de Facebook, ou d’Alexandre Malsch[26] à l’échelle
française. Le Y qu’il soit entrepreneur, auto-entrepreneur, ou tout simplement
freelance, voit dans cette alternative, la meilleure façon de répondre à un monde
du travail qui ne lui fait pas confiance, tout en prenant en compte son profond
désir de liberté. Comme l’analyse Emmanuel Vivier « Je pense qu’ils croient en
leur capacité à changer le monde. Ils ont confiance en eux. On retrouve, comme
en 2000, une revalorisation du statut d’entrepreneur. Cela ne transparaît pas
forcément dans tous les médias traditionnels, mais pour eux, c’est très valorisant
de dire “j’ai monté ma boîte”. D’un côté, c’est un passage à l’âge adulte. C’est
aussi surtout choisir entre l’entreprenariat ou l’assistanat. En résumé, ils peuvent
être chômeur/employé, mais à la merci du système, autrement dit, victime et ils
détestent être dans cette position. Il vaut mieux être un entrepreneur pauvre,
mais libre, qui peut dire “fuck” à qui il veut que d’être une victime, même riche,
du système. » Pour le Y, l’entreprenariat devient l’arme ultime lui permettant de
ne plus subir le système, mais au contraire de le hacker de l’intérieur.
frenchpdf.com
vivent leurs multiples identités individuelles dans un mode de partage,
d’échanges et de dialogue.
frenchpdf.com
donne et que l’on donne à voir à la communauté. Elle diffère selon le lieu où on
la poste. La plus grosse angoisse de ces Y est de la rater ; ils tentent tous de
maîtriser leur image, d’être autant dans les groupes auxquels ils s’intègrent que
dans ceux dans lesquels ils désirent être.
Cette image personnelle est préparée avec autant de soin que celle que l’on
entend faire valoir lors d’une soirée qui brasse intimes et inconnus. Pour eux ces
réseaux représentent de véritables plateformes de lancement dans l’orbite du
monde – plus modestement d’une grappe d’amis – d’un mini-scénario sur soi.
Car ces jeunes s’aiment et aiment leurs images comme nous le confirment les
propos de Danielle Gerkens du magazine Elle : « Ils sont persuadés d’avoir une
valeur absolue en tant que telle […] Ils sont jusqu’au-boutistes dans leurs
valeurs. Il n’y a aucun doute sur leur estime d’eux-mêmes. »
Ils constituent une mise à l’épreuve du pouvoir magnétique de chacun, de sa
capacité à capter l’attraction de ses semblables ou des groupes qu’il entend
séduire. C’est particulièrement visible dans une série comme Girls[27], comme
nous l’explique Katia Pecnik[28] : « Girls, c’est aussi une façon de mettre en
scène sa vie jusqu’à l’exhibition comme on le fait dans les réseaux sociaux.
C’est vraiment la série du réseau social avec pleins de gens et pleins de manières
de se montrer, de se remontrer, de faire des blagues sur soi et d’afficher sa
personnalité. Toutes les soirées dans les lofts, dans des lieux atypiques… »
Ainsi des applications, telles Instagram, ont créé une dictature de la mise en
scène de soi-même, de l’instantanéité, dont les marques doivent s’inspirer. Un
clip peut être partagé des millions de fois dans les 4 heures suivant sa
publication. Le partager 72 heures après est un aveu de défaite dans cette course
perdue d’avance pour des marques aux processus de décision datant du
XXe siècle. Elles doivent être en update permanent et dans l’idéal, au cœur du
processus créatif et non à sa périphérie.
Ces photos sont primordiales pour eux car elles drivent toute la dynamique de
recommandations. Dès lors chacun tente de se valoriser, voire de s’améliorer.
Ainsi lorsqu’ils sortent ils prennent toujours des photos qui directement
frenchpdf.com
indiqueront aux autres où ils étaient, avec qui et dans quelle ambiance. L’idée
c’est de démontrer leur coolitude par tous les moyens même si la définition du
cool n’est plus tout à fait la même pour les Y comme nous le révèle Anaïs
Duquesne, Y évoluant dans le monde de la nuit et des RP : « Moi je pars du
principe que quelqu’un est cool quand il existe aux yeux des gens. À partir du
moment où il existe aux yeux des gens, ça veut dire qu’il a une légitimité et que
du coup, en tant que personnage “public” il peut aspirer au cool. S’il n’est
personne, ou si personne ne le connaît, même avec les meilleurs goûts musicaux
du monde ou les fringues les plus cool de la terre, il ne pourra pas être cool,
parce qu’il n’existera pas et qu’il ne pourra donc pas être reconnu en tant que
tel. »
frenchpdf.com
Y dans leur carrière de recourir à une stratégie utilitariste de personal branding.
Il faut qu’ils soient visibles sur les réseaux sociaux. On leur dit maintenant dans
les écoles qu’il faut se démarquer, avoir un CV vidéo, éventuellement un blog,
une qualité éditoriale… »
Mais tandis que les médias de masse incarnaient l’autorité en diffusant un
message descendant, du diffuseur au récepteur, le système du moi-média fédère
tout le monde et au final restructure la société. Dès lors, l’enjeu pour chacun est
de sortir du lot pour mieux briller comme le confirme Christian
Radmilovitch[30] : « Au-delà des interactions qu’ils ont entre eux, on est souvent
dans une course à l’ego, c’est une compétition du meilleur même si cette
tendance n’est avouée qu’à demi-mot. »
Chacun veut devenir LE référent, le premier au courant de telle ou telle
actualité. Il faut participer à l’événement, devenir incontournable pour pouvoir à
un moment donné, se l’approprier et le driver en son nom.
Autrement dit, pour se faire repérer, se faire connaître, se faire aimer et,
éventuellement, se faire embaucher, les adolescents disposent d’une vaste
panoplie de langages dont ils sont inventeurs et véhicules. Les jeunes se laissent
guider par cette aspiration à l’expression de soi et la tentation est forte de passer
d’une valeur sociale en hausse à un projet professionnel, notamment dans les
industries de l’image ou des musiques électroniques ou numériques. Ils se rêvent
tous artistes.
frenchpdf.com
licences globales, l’acte créateur ne semble plus réservé à quelques artistes mus
par une vocation précoce ou un don. Il dévoile l’aspiration à exprimer sa
sensibilité, à exister comme individu particulier au sein de son propre
microcosme.
Émerger sur les réseaux sociaux est plus facile quand on peut s’illustrer auprès
de stars, artistes déjà adoubés par la communauté. Voilà pourquoi des millions
de fans de rap sont devenus obsédés par la mode et collent maintenant une
vingtaine de hashtags (le signe # permettant aux moteurs de recherche d’indexer
les mots suivants pour les faire remonter dans les résultats) de marques couture
en légende de chacune de leurs photos, alors que sur ces photos on ne les voit
porter que deux ou trois vêtements à la fois et non vingt, vêtements qui la plupart
du temps n’ont d’ailleurs pas de lien avec les marques citées.
Ils signifient ainsi leur appartenance à un groupe et augmentent du même coup
leur nombre de followers. Ce sont les fameux #team quelque chose. Ces
hashtags qui sont toujours les mêmes (Vuitton, Givenchy, Balmain, Balenciaga,
Margiela, Zanotti, Pyrex, etc.) sont tous liés à ce que portent les rappeurs les plus
en vue, qui eux-mêmes bien souvent copient Kanye West.
Ainsi, on assiste à un paradoxe incompréhensible en voyant tant de fans rêvant
de réussite et de célébrité, espérant devenir hors norme, tout en singeant l’allure
et l’attitude de quelqu’un qui trace sa propre route en ne ressemblant à personne
d’autre qu’à lui-même
Créer un fan-club autour de soi, voilà ce à quoi rêvent les Y. La popularité se
gagne via la mise en ligne de son roman personnel, de son portrait, de ses
productions musicales et autres performances… L’étalon de la réussite c’est le
nombre d’interactions. Chacun scrute les notifications de ses contacts, les
réactions de son petit monde par rapport à ce qui vient d’être envoyé sur le
réseau. Dès lors chacun sculpte son identité subtilement et met toutes les chances
de son côté pour émerger.
Les marques l’ont bien compris, parfois jusqu’à la caricature comme
l’explique Frédéric Raillard[31], « Le “You You You” est devenu un genre de
frenchpdf.com
communication en soi […] développé par les social networks aux États-Unis,
donc là-bas, jusqu’il y a peu de temps, une campagne sur deux était à base de
“You”. C’est la première grande caricature, pour séduire les Y il faut dire “You”
et pas “We”. La seconde grande caricature c’est qu’il faut leur dire qu’ils sont
importants et qu’il n’y a qu’eux. On est passé de la marque nombriliste aux
consommateurs nombrilistes. »
Pour conclure ce chapitre, les jeunes ont besoin de garanties sur leur
participation à la société de demain. Un rêve d’intégration qui ressemble
finalement à celui des générations précédentes mais leurs moyens d’y parvenir
eux diffèrent totalement. Ils s’adaptent sans cesse à leur environnement pour
mieux le changer et c’est définitivement cette adaptation qui rend si
passionnante cette génération. Les jeunes d’aujourd’hui sont à la fois
hypermodernes et conservateurs. Leur hyper-modernité se traduit par le désir
qu’on leur parle un langage clair, simple, et direct. La culture des réseaux
sociaux a assoupli leurs relations aux autres. Ils veulent avoir des réponses
rapides et personnalisées face aux problèmes qu’ils rencontrent et avoir accès
facilement à des gens qui les conseillent, voire directement aux solutions. Leur
conservatisme se réfugie dans le besoin d’avoir encore des cadres qui les
structurent.
Mais conscient de sa puissance, le « Rebel with a cause » a décidé de prendre
son destin en main. Ainsi, il reconfigure toutes les strates de la société. Il ne
cesse de questionner l’utilité et la cohérence entre le discours et les actes. Or, les
réponses de ses aînés installés se heurtent à ce que lui vit chaque jour. Dès lors,
il remet en cause leur pouvoir et s’affranchit de leur autorité. Par son ingéniosité
et sa maîtrise des outils de l’ère de la communication, le rebelle Y contourne les
barrages, se débrouille, échange, se met à jour, se défend et invente un monde
échappant à l’emprise des vieux modèles. La nouvelle génération prend peu à
peu son indépendance.
Dès lors, le discours qui s’adresse à lui, surtout lorsqu’il est de nature
commerciale, doit lui aussi radicalement changer et évoluer. Par bien des
aspects, le luxe (et le piédestal sur lequel il a l’habitude de se mettre) entre en
frenchpdf.com
contradiction frontale avec ce nouveau consommateur, qui dans ce domaine
aussi, ne s’interdit rien.
[1]
En français La Fureur de Vivre est un film américain réalisé par Nicholas Ray et sorti en 1955. Il
dresse le portrait de la jeunesse des classes moyennes durant les années 1950.
[2] US departure of Labor 2012.
[3]
National Statistic of Spain.
[4]
Sondage effectué par Opinion Way pour le compte de KPMG en 2010.
[5] Président Being Worldwide, vice-président de TBWA Europe. Enseignant à Sciences Po et auteur du
livre L’Idée qui tue, Eyrolles, 2009.
[6] Rédacteur en chef au magazine l’Étudiant de 1991 à 2008 et auteur de Génération Y, PUF, 2012.
[7] Source : Viacom International Media Networks « Comedy across borders », 2013.
[8]
Directeur du département « Art de vivre » du bureau de style Nelly Rodi.
[9] Red Bull Stratos est un projet de la marque Red Bull impliquant le parachutiste autrichien Felix
Baumgartner. Dans le cadre de cette opération, le 14 octobre 2012, Baumgartner est monté à 39,45 km
dans la stratosphère au-dessus du Nouveau-Mexique (États-Unis) dans un ballon à hélium avant
d’exécuter sa chute libre dans une combinaison pressurisée et d’atterrir en parachute. Cette opération
sans précédent a illustré la signature de la marque « Red Bull donne des ailes ».
[10] Source : « Affluence in America: The new consumer landscape », Digitas US, 2011.
[13]
Président de Moxie, (groupe Publicis – Zenith Optimedia), président de la commission Brand content
de l’Union des Entreprises de conseil et d’achats média (Udecam), auteur de Renaissance mythologique,
François Bourin Éditeur, 2011.
[14] Une nouvelle conscience pour un monde en crise, Les liens qui libèrent, 2011
[15]
Sociologue canadien, théoricien de la communication. Il est l’un des fondateurs des études
contemporaines sur les médias.
[16] La sérendipité est, depuis les années 2000, l’art de trouver autre chose que ce que l’on cherchait avec
comme exemples : l’Amérique, le Coca-Cola ou la tarte Tatin.
[17] Couverture de Time de mai 2013.
[19]
Réalisatrice des documentaires Les ados, métro, boulot, dodo et Forever Young pour Lalala
Productions.
[20]
Réalisatrice des documentaires Les ados, métro, boulot, dodo et Forever Young pour Lalala
Productions.
[21] Études Médiaprism, 2012.
frenchpdf.com
[23]
Co-fondateur de Wizee et directeur de la communication de l’agence Buzzman.
[24]
Source : Dan Schawbel.
[25] Source : Dan Schawbel.
[26]
CEO et co-fondateur et directeur général de MeltyGroup. Il est également le vice-président du
Conseil national du numérique chargé des startups et de l’entrepreneuriat.
[27] Série américaine de Lena Dunham diffusée aux États-Unis sur HBO et sur le bouquet OCS en
France.
[28]
Journaliste.
[29] Docteur en sciences de gestion, professeur de marketing à Kedge Business School.
[31]
Co-fondateur de Fred&Farid Group.
frenchpdf.com
CHAPITRE 2
Le luxe et la génération Y
frenchpdf.com
beauté et du digital. Ces enseignements sont au cœur de ce chapitre, ils ont été
enrichis par la centaine d’interviews que nous avons menées tout le long de notre
travail, avec des membres influents de cette génération, des professionnels
internationaux de la question, des hommes de communication, des sociologues et
enfin par des journalistes, sans oublier les précieux enseignements apportés par
le département étude de Meltygroup, MeltyMetrics.
frenchpdf.com
récompense, elle ne veut pas de la culpabilité quand elle consomme du luxe. »
Ce rapport à l’acte de posséder du luxe, expurgé de tout jugement moral, se
retrouve dans la fascination pour le quotidien de la jeunesse dorée. Cette
dernière s’exhibe tant sur les médias sociaux visuels comme Rich Kids of
Instagram, dans les frasques de Cara Delevingne et ses copines top models, ou
dans les programmes de téléréalité mettant en scène Kim Kardashian. Cette tribu
de « fils de » au pouvoir d’achat sans limite est paradoxalement matière à
moqueries et un authentique objet à inspiration. Un rêve portant sur un lifestyle
hyper luxe mis en scène dans le film Bling Ring de Sofia Coppola, avec sa bande
de jeunes de la classe moyenne supérieure, cambriolant notamment la maison de
Paris Hilton, pour avoir le privilège l’espace d’un instant, de vivre son mode de
vie… Paradoxale génération Y dont nos groupes qualitatifs nous ont révélé que
leurs deux séries préférées étaient Gossip Girl et Girls, deux visions opposées,
navigant entre fantasme et naturalisme.
Les luxophages Y
Nous nous sommes permis de jouer avec un mot provenant du cinéma :
cinéphage. Le cinéphage est un amateur érudit du septième art, qui aime exhiber
son savoir encyclopédique. On retrouve chez les Y, la même soif de
connaissance, mais concentrée sur l’univers du luxe et de la mode. Nous les
avons appelés les luxophages.
Patricia Romatet[3] confirme le phénomène, en s’appuyant sur l’étude « Junior
Génération », la mode des 15-25 ans (IFM, septembre 2012), « Les jeunes sont
capables de développer un niveau absolument phénoménal de connaissances et
d’expertises. Ils vont décrypter les campagnes, décoder les différentes
communications, tous supports confondus, analyser les sites, la présence sur les
réseaux sociaux, les applications, les campagnes print… » La luxophage Y
s’illustre par sa profonde connaissance technique du vêtement. Sa soif
d’apprendre les codes des marques de luxe est sans limite car elle conditionne sa
frenchpdf.com
capacité à bâtir son look singulier. Les archives des maisons sont ses lieux de
fantasme. Paradoxalement, la luxophage se passionne davantage pour les égéries
et moins pour la grande histoire de la marque (origines, vie du créateur…). Nos
groupes qualitatifs ont eu des débats passionnés autour du choix d’une égérie,
avec un vrai point de vue mature et « anti-bullshit » : « Natalie Portman et
Marion Cotillard qui répètent qu’elles mangent bio, qu’elles n’aiment pas le cuir,
puis elles sont égéries de Dior et posent avec un sac en cuir Dior. Il y a une
incohérence qui dérange et ça donne une mauvaise image de la marque, mais
aussi des célébrités. »
frenchpdf.com
comment à la fois premiumiser et GenYfier les marques ? Parce que les
consommateurs dominants ce sont eux. »
La première matérialisation de ce monde Y, gouverné par l’exigence premium,
réside dans l’exigence du beau, du design généralisé à toute chose, en toute
accessibilité. Le moindre objet du quotidien doit répondre à cette éthique
esthétique. Katia Hersard[5] l’observe au quotidien dans les magasins Fnac : « Le
design et l’apparence sont des valeurs clés pour la génération Y. Ils font partis
du statut que recherche cette génération. Design, mais accessible, pour pouvoir
changer rapidement ». Tous les univers en publicité sont également touchés par
cette exigence du beau, comme dans le caritatif, avec en symbole la campagne
d’affichage de l’Armée du Salut de novembre 2013, qui n’a rien à envier aux
codes employés (mannequin parfaitement éclairé, réécriture du logo en
esthétique geek…) par une marque premium high-tech.
Finalement les frontières entre luxe et premium s’effacent.
À l’origine, le premium n’est pas le luxe comme l’ont clairement établi
Vincent Bastien et Jean-Noël Kapferer[6] : « L’idéologie dominante de la
stratégie premium est celle de la preuve : rien de magique ici… Le luxe n’est pas
le premium en mieux », pourtant comme le soulignent les auteurs, il y a une
confusion de plus en plus grande entre le premium et le luxe.
Pour le Y, les digues entre luxe et premium ont implosé, tel un mur de Berlin
marketing, comme l’observe Natacha Dzikowski[7] « Leur définition du luxe est
extrêmement large. C’est-à-dire que le premium a une large place dans leur
définition. » Nous voyons deux grands responsables à ce mélange des genres qui
mène à un grand flou : les stratégies des années 2000 de « Masstige » des
marques de luxe gracieusement mises en avant en communication et les
politiques généralisées d’offres « ultra premium », nous pensons par exemple
aux incroyables « Genuine Python Red October Nike Air Yeezy 1 », qui
reprennent tous les codes du luxe (imaginés par Kanye West, dans une matière
rare le python, réalisées à 4 exemplaires, pour 2 000 $). Parallèlement, il ne faut
pas oublier un facteur psychologique et sociologique, qui n’est en rien de la
responsabilité du marketing, à savoir que le Y a été consacré enfant roi par ses
frenchpdf.com
parents, on ne lui refuse rien et on lui offre le meilleur et depuis sa tendre
enfance !
frenchpdf.com
La génération Y aspire à un nouveau luxe pluriel
et libre
La génération Y sort de toute forme de pensée unique, elle n’adhère plus à une
sacro-sainte définition du luxe, avec ses quelques marques élues à vie et sa
démarche défensive arc-boutée sur ses fondamentaux, refusant d’évoquer toute
forme d’ouverture et encore moins de métissage. Si nous prenions une
métaphore tirée de l’histoire des religions, les Y proposent au monde du luxe son
concile Vatican II[9]. Thomas Jamet, résume cet état d’esprit « Par rapport au
luxe, la génération Y est libre de décider de sa définition et le statutaire est mis
un peu entre parenthèses. »
Afin de mieux vous faire comprendre cette évolution culturelle radicale, nous
avons réalisé un outil simple qui permet de comparer le luxe traditionnel et le
luxe Y, dans un mode d’affiche, en phase avec ses codes.
Pour terminer cette section, une note d’esprit avec Jacques Séguéla, que nous
avons rencontré et qui nous a fait une confidence sur son rapport à la jeunesse :
« Elle est déjà sans complexe, ni de supériorité ni d’infériorité. Ainsi après mon
malheureux slogan sur la Rolex, les bobos ne me parlaient plus. J’étais
l’abjection faite homme, les jeunes, eux, venaient à moi en se marrant et en me
disant : “moi j’en veux une avant 50 ans”. J’ai vu des titis de banlieues venir
avec une Rolex qu’ils s’étaient auto-tatouée à coup de Bic et dire : “Regarde,
j’en ai une et un jour je la recouvrirai par la vraie”. Eux ont intégré l’idée que le
luxe s’assume pour ce qu’il doit être, un signe extérieur de vie, pas de fric, un
signe créatif, pas marchand, un signe extérieur d’imaginaire, pas de
matérialisme. »
Outil n° 1 – Luxe tradition vs. Luxe Y
frenchpdf.com
© Éric Briones/Stéphane Bal/Melody Cappello
Le premier élément visible est l’idée d’atomisation du luxe vu par les Y, en comparaison avec le luxe
traditionnel totalement concentré sur des piliers. Le Y ne s’interdit rien quand il pense luxe. Le luxe Y
est à la fois matériel et immatériel, technologique et artisanal, local et global et intégrant quantité de
nouvelles marques. Par essence, nous sommes plus près d’un instantané que d’une définition figée, il y
a néanmoins une idée qui rassemble cet ensemble hétéroclite, celle du plaisir pour soi, d’une recherche
individuelle du bonheur, loin devant la recherche d’un rattachement à une classe sociale. Notre étude
quantitative l’a confirmé, en révélant que 90,3 % des Y achètent du luxe pour leur propre plaisir. C’est
donc le triomphe du luxe pour soi. Cependant, nous ne sommes pas dans une recherche purement
égoïste. L’autre n’est pas exclu, bien au contraire, le plaisir est d’autant plus grand si ce luxe Y est
partagé, d’où l’importance croissante de sa dimension immatérielle, expérientielle et festive. Mathieu
Lebreton, figure de la blogosphère Y mode, porte un point de vue libertaire sur le luxe : « Pour ce qui
est des frontières entre les marques de mode et de luxe, il y a des marques qui ne sont vraiment pas des
marques de luxe, mais qui pour moi le sont comme par exemple Nike. C’est une marque de luxe dans
le sens où c’est l’innovation avant tout. Je me suis acheté un bracelet Nike+ que je considère comme
un produit de luxe, même si c’est un produit qui est en centaine de milliers d’exemplaires sur tous les
étages des Apple Store. Ils réussissent à créer un besoin que l’on n’avait jamais imaginé et dont on ne
pourrait plus vraiment se passer, avec un quelque chose qui est beau et simple. »
frenchpdf.com
Nous l’avons exploré dans le chapitre 1, chaque membre de la génération Y a
le devoir d’exceller dans le personal branding. Les difficultés économiques
croissantes obligent le Y à développer une marque personnelle, à la fois claire et
singulière. Cette compétence n’est apprise dans aucune école, elle est pourtant
fondamentale. Elle a été décryptée dans l’étude ZenithOptimedia «Generation
we are, Generation affirmation» Panel Propriétaire ZenithOptimedia – Volet
quantitatif 600 individus 15-24 ans couplé à une semaine de conversations
online impliquant un échantillon mixte de 60 individus 15-24 ans – 2012, dont
nous reprenons en exclusivité les principaux résultats dans un outil et ce tant en
terme de chiffre, que d’insight. Cet outil est commenté par la responsable de ces
recherches Wanessa Dali[10].
Le verdict est tombé, le Y qui veut voir sa self brand performer est condamné
à devenir son propre styliste de soi, le luxe devient alors son meilleur allié dans
cette mission. Encore une fois, le film Bling Ring a vu juste en présentant une
partie de cette jeunesse, qui rêve de célébrités par la reconnaissance de leur style
et d’atteindre le niveau red carpet.
frenchpdf.com
Outil n° 2 – Fit in & Stand out
frenchpdf.com
que l’on croisera dans la rue. L’achat d’une pièce de luxe participe à cette différenciation derrière
laquelle on court. »
Cette aspiration à la singularité est amplifiée par internet. Selon Jean-Jacques Picart[12] : « Internet a
développé d’une manière incroyable le sentiment de communauté présent chez les jeunes
consommateurs. Mais aussi, et c’est logique, dans le même temps un besoin très fort de différenciation,
de dépersonnalisation. Les jeunes se sentent reliés au monde entier et en même temps ils se veulent
uniques. Cette dualité que ressentent très fortement tous les jeunes du monde entier aujourd’hui a
donné naissance à une génération de consommateurs à la fois pas du tout sectaire et très individualiste.
Dans le domaine de la mode cette dualité fait que chacun se sent plus ou moins son propre styliste :
chacun se veut à la fois à la mode, dans l’air du temps et des tendances en achetant les marques ».
Pour les Y, le luxe est responsable d’une crise de la rareté. Olivier Altmann[13]
va plus loin dans l’analyse : « Je lisais une interview de Bernard Arnault sur
Vuitton qui disait «Moi je ne veux pas faire du chiffre d’affaires à tout prix et
augmenter les volumes, il faut peut-être qu’on soit parfois moins visible, mais
d’une meilleure manière parce que ce qui compte c’est la valeur de la marque».
Il a compris que Louis Vuitton, qui est devenue une marque culte, allait
s’épuiser si on continuait à vouloir trop la vendre. On voit le travail qu’effectue
Hermès sur ce terrain. La marque se positionne sur des valeurs d’excellence et
de rareté. »
frenchpdf.com
prennent en photo c’est la qualité de ses textes. Ce n’est pas forcément la plus
jolie des blogueuses (enfin moi je la trouve parfaite), mais elle a tellement
d’humour, tellement de cran et de brio quand elle dézingue les marques, qu’elle
réussit à plaire. Côté style, elle arrive à mélanger des trucs très chers avec des
trucs pas chers, elle adore Zara qu’elle mélange avec des chaussures type Pierre
Hardy et d’autres pièces très luxe… Elle s’est même amusée à créer des parodies
hyper drôles sur YouTube qu’elle a diffusées juste avant la Fashion Week l’an
dernier, pour se moquer du street styling et de son pouvoir de prescription
redoutable ! »
Il n’y a pas de rareté sans esprit transgressif, c’est le sujet de notre prochaine
colonne.
frenchpdf.com
de l’attachement Y pour la fameuse maison au trench mythique : « Je suis
convaincue que quand ils abordent le digital, ils n’attendent pas d’avoir quelque
chose à dire pour se lancer dans la communication. Ils n’attendent pas d’avoir un
nouveau trench ou un nouveau produit pour dire “OK, qu’est-ce qu’on va faire
au niveau du digital ?”. Ils se disent d’abord “Quelles seront les occasions, les
momentum, où je vais pouvoir créer quelque chose et établir une relation ?”.
Mais il n’y a pas de contingence commerciale, pas directement. Je trouve que les
marques aujourd’hui sont encore dedans. Il y a un truc hyper smart de
s’intéresser petit à petit, de construire quelque chose qui est une vraie
innovation. »
frenchpdf.com
aiment bien et à tenter, soit de le trouver pas cher, soit de se le faire eux-mêmes.
C’est frappant chez les filles. Elles remarquent une tendance, par exemple celle
du sweatshirt imprimé, et elles vont trouver le moyen de se faire des
impressions, en trouvant un joli motif sur Pinterest, en regardant du côté des
marques de luxe… » À une époque, Marc Jacobs avait montré la voix chez
Vuitton, en rebootant totalement le monogramme LV, l’offrant à l’imagination
sans limite d’artistes contemporains comme Takashi Murakami ou Yayoi
Kusama. Cependant attention à ne pas transformer un code en logo de
megabrand, du fait d’une utilisation intensive, il perd sa notion de rareté et donc
sa désirabilité.
frenchpdf.com
Colonne n° 6 : le luxe est un passeur d’histoires
Pour la génération Y, l’objet de luxe porte en lui une histoire, elle doit être
clairement transmise par sa communication, en laissant la liberté à son futur
possesseur de s’approprier cette histoire et de se transformer à son tour en
messager.
L’histoire d’un objet de luxe permet à cette génération de sortir de son
présentéisme épuisant et de se connecter enfin à un temps long. Pour Julia
Tissier « Ce qui est particulièrement appréciable dans le luxe, c’est justement
l’histoire racontée par une pièce qui a été dessinée il y a des dizaines d’années et
qui pourtant, reste d’actualité. Cette capacité du luxe à créer des intemporels est
extrêmement séduisante, notamment dans cette société du tout-jetable. On sait
que l’on achète quelque chose qui va durer et dont finalement, il sera difficile de
se lasser puisque, justement, il est intemporel. » L’histoire est source de petits
bonheurs pour le Y, mais plus encore, il sert sa marque personnelle, il inspire et
valorise ses conversations comme le décrypte Maria Gallieru : « Aujourd’hui, je
suis capable de partager en ligne d’autant plus ce que je possède. C’est ce qu’on
appelle la social currency, c’est ça qui va me valoriser socialement auprès de
mon public, ma capacité à être celui qui identifie le plus rapidement. La marque
de luxe, c’est sa capacité à fournir un contenu, du matériel et une marque comme
Burberry, c’est d’ailleurs pour ça qu’elle est l’emblème de cette génération, a su
proposer un langage conversationnel hyper puissant avec cette génération. »
Cette colonne distille un double enseignement : un objet de luxe doit toujours
être enrichi d’une belle histoire et l’histoire du luxe laisse place à la participation
comme le souligne Jean Jacques Picart « Les jeunes disent : “donnez moi des
créations que je peux m’approprier et je raconterai ma propre histoire.” »
frenchpdf.com
bien plus immatériel que matériel, il réside dans le privilège de vivre des
expériences extraordinaires (avec un niveau de service hors du commun) et de
les faire partager à ses amis. Nous sommes clairement face à un hédonisme
contemporain, qui prend le parti d’utiliser l’expérience au sens large comme
antidépresseur de crise et comme catalyseur de socialisation.
Nos groupes qualitatifs ont délivré le même message : « Le luxe, c’est le rêve,
l’expérience. On a besoin de ces plaisirs, c’est quelque chose d’intime, on a
besoin de se sentir valorisé pour se détourner de cette crise ». Cette quête
hédoniste se retrouve également dans les observations de Nicolas Bordas :
« Même s’ils ont développé une conscience universelle, les « e-gos » ont été
éduqués au culte de l’hédonisme absolu, à la recherche de l’expérience
permanente et au diktat du plaisir immédiat. Le partage de l’expérience et donc
l’expérience connectée devient un must. Les bars se doivent d’avoir du Wifi et
les hôtels de luxe une tablette pour piloter la connectique de la chambre. D’où le
succès des applications qui concentrent à la fois l’utilité et l’immédiateté. Les
marques de luxe doivent donc s’adapter en proposant une expérience renouvelée
et un véritable service autour de leur offre, tout en racontant une histoire crédible
non seulement sur le produit, mais aussi sur l’entreprise dont le produit est issu.
La relation au luxe de cette génération est donc différente de celle de leur
parent ».
frenchpdf.com
Hypebeast, Fubiz…) de cette génération.
frenchpdf.com
Avis d’expert
Baptiste FRANCESCHINI, docteur en études françaises, consultant en sémiologie
frenchpdf.com
Si la rareté du produit est fondamentale, il en est de l’inverse de sa
communication. Le Y est un luxophage et l’une de ses caractéristiques est son
insatiable soif de contenu et aussi son zapping chronique dès que l’absence de
contenu se fait sentir. Le contenu est lien, relation pour le luxophage, comme le
souligne Olivier Altmann « il y a une nourriture permanente de signes, de
contenus, parce qu’en effet si on sort du radar de la génération Y, on n’a plus de
relation avec eux. Cette génération-là est toujours en quête de nouveautés, elle
aime être dans le coup et cela signifie aussi faire partie de ceux qui sont un peu
dans l’esprit, dans cette dimension un peu culturelle de la marque. »
frenchpdf.com
un sport de combat. Du fait de la mise en scène de soi sur les médias sociaux, à
chaque achat, le smart shopper met son titre d’acheteur intelligent en jeu,
comme le souligne Alexandre Malsch : « Si vous êtes dans le luxe bling-bling,
dans l’achat de luxe justifié par le prix, vous vous faites lyncher. Par contre vous
devez être capable de justifier votre achat. C’est la logique d’un investisseur. »
frenchpdf.com
d’essence mathématique et même « geek » par son goût pour la déconstruction,
l’obsession quelque peu maniaque du détail et au-delà sa peur chronique du
complot, de l’arnaque. Le client Y est clairement un investisseur, il a un besoin
de rationaliser son désir, c’est pourquoi il exige des marques de luxe, un devoir
de transparence. La célèbre blogueuse Deedee[19] nous l’explique : « Le
consommateur est prêt à payer cher mais il se refuse à le faire s’il n’a pas un
retour sur son investissement. Aujourd’hui, vous n’avez plus envie d’être une
carte bleue sur pattes. Le consommateur veut bien dépenser, par contre il n’est
pas prêt à se faire avoir et s’il se tourne vers une maison de luxe, il n’a pas envie
de découvrir que ce n’est pas fait en France ou en Europe et que finalement, il a
contribué à payer une pleine page dans un magazine et ça, ça l’agace ». Le client
Y dépasse la dimension aspirationnelle apportée par la marque, pour se
concentrer sur la valeur du produit, comme l’ont observé Regis Pennel et Anaïs
Soucanh, de la boutique en ligne L’Exception : « Les gens vont chercher de la
valeur dans les marques, la valeur avec un grand V. Ce que la marque vaut :
c’est parce que je le vaux bien, parce que la marque vaut quelque chose et donc,
elle a un historique, une belle histoire, une dimension culturelle,
philosophique… À présent, les gens quand ils prennent un produit, ils veulent
savoir “Quelle est la valeur de ce produit ? Est-ce que c’est un bon cuir ? Moi je
ne veux pas payer parce que c’est du logo, je veux payer parce que c’est un
produit qui va durer, que je vais pouvoir donner à mes enfants…”. En tout cas, à
18-30 ans, on va se dire “La qualité du produit est-elle bonne ? Est-ce que ça
vaut l’argent que je mets dedans ?” et plus seulement “Super, c’est Versace”. »
frenchpdf.com
internet) et en même temps ils s’en méfient. Ils sont surinformés. Ils réclament
des marques (et c’est devenu une exigence) le maximum de sincérité, d’intégrité
et d’honnêteté. »
frenchpdf.com
physique, qui est la touche magique finale. Mais l’intégralité du processus de
vente est définitivement omni canal. Le luxe s’apprend d’abord sur internet,
comme le souligne Patricia Romatet[20], de nombreux jeunes hommes de
province n’ayant pas d’accès aux flagships apprécient de « se faire par soir, la
visite complète d’un site internet de luxe », promesse d’une connexion au beau.
Le Y va explorer, comparer et va devenir expert du produit par l’ensemble des
devices connectés (ordinateur, mobile, tablette), c’est là que la minutieuse
décision d’achat se fera. Ensuite l’achat s’effectuera en boutique, uniquement
pour l’expérience car il saura avant d’entrer en boutique quel produit il désire
acheter. Toujours aussi prospectif, Alexandre Michelin1 dépasse la vision
d’omni-canal : « Il faut aller très loin pour être capable aussi de dématérialiser la
distribution et la rendre cool comme le fait Ventes Privées, les codes du luxe
sont là. Les marques sont à l’aise, mais tout se fait en ligne sans complexe, le
paquet cadeau est “luxe”. Le bouche à oreille se fait par une sorte d’élitisme
communautaire. Il y a des codes à inventer pour la distribution qui respectent le
luxe à la fois physique et virtuel pour pouvoir exister de manière naturelle et
numérique. »
Au-delà le challenge de l’omni-canal de luxe est de recréer l’achat d’impulsion
qui semble proscrit du vocabulaire associé au smart shopping.
frenchpdf.com
notre étude quantitative sur « La génération Y et le luxe » par MeltyGroup,
regroupés dans une infographie.
Outil n° 4 – Le Temple du luxe Y
frenchpdf.com
© Éric Briones/Stéphane Bal
frenchpdf.com
frenchpdf.com
© Éric Briones/Estelle Giraudeau/Stéphane Bal/MeltyGroup
frenchpdf.com
L’homme Y, le geek du vêtement
Après des siècles d’immobilisme, l’homme enfin évolue dans son
comportement face à la mode et au luxe.
frenchpdf.com
L’art geek de la déconstruction du vêtement
« On aime raconter sur une veste : le coût des boutons, du tissu, où ça a été
fabriqué, les épaulettes à l’intérieur… On explique tout ça avec une histoire pas
chiante. Je prends beaucoup l’exemple d’Apple et de l’iPhone 5, ils ont fait une
page sur le site internet où ils arrivent à te parler du chanfrein en disant “Ça a été
taillé grâce à une pierre à diamant” ». Voici en quelques lignes, le contrat de
lecture du blog Bonne Gueule avec son lectorat, soit une philosophie de
transparence totale de la valeur, qui cherche à disséquer le moindre élément
constitutif du vêtement, pour mieux le connaître. Évolution naturelle, le blog est
devenu créateur de vêtement en remettant au goût du jour l’idée de tailleur.
frenchpdf.com
© Éric Briones/Stéphane Bal
Le « GSSS » intègre les composantes de la valeur recherchée dans un vêtement par un homme Y, à
savoir :
l’expérience omni-canal vécue ;
le style présenté ;
la qualité globale du vêtement dans toutes ses composantes ;
la value for money estimée ;
la réputation de la marque du vêtement (branchitude, connexion avec des communautés de
style) ;
la générosité de la marque, son intégration du développement durable dans ses actes.
Après avoir passé au crible ces six critères sous l’œil mode avisé d’Aristide Douroux, quatre profils
d’hommes particulièrement représentatifs en ressortent :
Le geek du vêtement est l’avatar le plus exigeant de notre graphique. Il a depuis longtemps
intégré tous les codes mode et acquis une profonde connaissance produit, des matières, des
coupes, des marques et surtout des prix comme le montre ses aptitudes optimales sur la qualité,
l’expérience et la valeur. Il développe ainsi un style sûr et personnel se souciant peu du regard
des autres et sa barre de réputation restant très faible. Il est particulièrement attiré par les
marques qui entretiennent une philosophie de bonté et de développement durable au-delà du
frenchpdf.com
produit auquel il attache beaucoup d’importance.
Le fashionista est l’avatar le plus instable de notre graphique. En effet ce sont les tendances et
l’air du temps qui dictent ses choix. Il change donc extrêmement souvent. Il mise l’essentiel de
ses capacités sur le style et la réputation. L’important pour lui étant de briller socialement à
travers des achats essentiellement statutaires.
Le no-style est l’avatar le plus faible de notre graphique. Son expérience est réduite et le peu
d’intérêt qu’il porte à la mode l’amène à privilégier la « value for money » sans se soucier des
autres données de l’équation. La réputation et/ou la générosité par exemple n’entrent
absolument pas dans sa réflexion d’achat.
Le bobo est l’un des avatars les plus actifs. Fort d’une longue expérience de la mode masculine,
il cultive son style en s’attachant particulièrement à la qualité des produits, tant dans les coupes
que dans les matières. Ce qui le différencie clairement reste son attachement à des marques qui
prônent des valeurs de générosité et d’engagement. Ce dernier point joue un rôle clé dans son
processus d’achat, le prix restant un facteur très secondaire.
Le traditionnel est l’avatar « référent » dans l’univers de la mode masculine. Il possède une
bonne expérience dans les achats mode, dans une optique très statutaire et construite autour d’un
style classique, mais soigné. Il considère l’achat de produits mode comme essentiel et se soucie
peu du prix.
La femme Y et la beauté
S’il existe un secteur qui a bien compris l’importance de la cible Y, il s’agit
bien du monde de la beauté. Le numéro spécial beauté Y de la revue Women
Wear Daily du 6 septembre 2013 en témoigne, on y retrouvait des points de vue
forts : « Ils sont le présent et notre futur » (Julie Bornstein excutive vice
president et chief marketing and digital officer de Sephora) ; « C’est la
prochaine grande génération, c’est une cible difficile, mais absolument
stratégique » (Mark Brooks, senior vice president of consumer and market
intelligence de l’Oréal USA). Ces déclarations témoignent d’un marché, qui est
en train de créer une place réservée à cette cible, avec le lancement pour l’année
2013, de gammes de soins spécialement dédiées, comme Ibuki chez Shiseido, ou
la XYY Collection chez Dr Brandt Skincare. Précurseur, Clarins avait montré la
voie, avec sa gamme Éclat du jour, il y a des années. Plongeons-nous donc au
cœur de la beauté Y.
frenchpdf.com
La beauté Y est dans le regard de l’autre
« Être belle, c’est être reconnue comme belle par les autres, leur regard est
important et le besoin de se mettre en scène très souvent (#selfie) renforce cette
idée. » témoigne Julie Ceccaldi[23]. Même son de cloche chez la blogueuse
incontournable Capucine Piot[24] : « La jeune fille Y elle se cherche, elle veut
plaire… On ne se maquille pas pour soi quand on est jeune. On le fait pour les
autres, pour renvoyer une image positive, pour être acceptée dans un groupe
d’amies. »
frenchpdf.com
© Stéphane Bal/Shiseido
Avis d’expert
Guillaume Cappon, Communication et PR Manager de Shiseido Europe
Pour creuser ces questions qui associent lifestyle et beauté, nous sommes allés à la rencontre de
Guillaume Cappon, communication et PR manager de Shiseido Europe, qui nous parle de la réponse
apportée par la gamme Ibuki. Ibuki est né à la suite d’une étude internationale menée sur plusieurs
années impliquant l’analyse du lifestyle de la génération Y. Le mode de vie de la génération Y a des
répercussions sur la peau et la fragilise. Shiseido a découvert que l’enzyme de la cohésion cellulaire
(récompensée d’un prix IFSCC) joue un rôle déterminant dans le facteur naturel d’hydratation. Quand
l’activité de l’enzyme BH est basse, le FNH est défaillant, à l’inverse quand elle augmente, le FNH
retrouve ses propriétés hydratantes et protectrices. Grâce à Ibuki la perte en eau est donc stoppée et
l’effet barrière renforcé.
Le lifestyle singulier de la femme Y semble avoir été la muse d’Ibuki ?
Les agresseurs quotidiens générés par le lifestyle contemporain et très souvent urbain de la génération
Y ont une incidence sur la peau. C’est en effet la première découverte majeure de la recherche
Shiseido et l’origine du développement de la gamme Ibuki. Le manque de sommeil, l’alimentation, la
frenchpdf.com
pollution, la cigarette et en très grande partie le stress d’une vie (over)bookée ont un impact sur la
physiologie et l’équilibre cutané. Grâce à cette découverte, un nouveau souffle, une nouvelle ère
d’investigation dans l’industrie cosmétique est née, ouvrant alors de nouveaux champs de recherche de
biologie cutanée. Le tout plaçant le lifestyle de cette génération au cœur de tout le développement
produit pour Shiseido.
La valeur clé à combattre est le stress Y, se retrouve-t-il dans tous les pays que vous avez
étudiés. Avez-vous observé des différences ?
En France, la génération Y est la plus importante depuis la génération baby-boom ! 21 % de la
population française est Y, soit 13 millions de personnes. 70 millions aux États-Unis et 200 millions en
Chine composent les digital natives, ou la Net génération. Sur l’ensemble de cette population, le stress
Y reste le facteur prépondérant de nuisance et d’agressions quotidiennes. En France notamment, 91 %
des 20-30 ans déclarent être tout simplement « stressés ». Des résultats similaires observés par notre
Centre de recherche ont été constatés aux quatre coins du globe. À noter également le fait que
l’individu et le genre Y traversent les années…
Quel est le comportement beauté de la femme Y ? Avez-vous des insights singuliers,
stratégiques ?
Il est important de comprendre que la traduction concrète de ce lifestyle Y et de son impact beauté est
la sensibilité cutanée, observée sur l’ensemble des régions du monde. Le lifestyle Y demande
aujourd’hui de repousser toujours plus loin les forces de défense cutanée. 70 % des 20-30 ans
déclarent avoir la peau très sensible contre 57 % des quinquagénaires… Contradictoire, n’est-ce pas ?
Une sensibilité qui se retrouve également dans les émotions de la vie quotidienne. C’est une approche
de la beauté globale, intégrant haute technologie, praticité et simplicité du rituel de soin. À la force des
résultats les plus immédiats possibles sur la surface cutanée, s’allient la douceur, le plaisir tactile des
textures et la féminité des parfumages. Contradiction d’une génération où le « tout-immédiat » se
complémente d’un comportement beauté holistique… En somme, le vestiaire cosmétique de la
working generation se compare au vestiaire de mode. Aux pièces maîtresses, intemporelles, apaisantes
et symboles de longévité et bien-être, s’entremêlent des pièces colorées, véritables boosters d’énergie
en surface…
Comment avez-vous répondu au caractère rebelle des Y face au marketing traditionnel, et en
particulier aux argumentaires overselling propre au secteur beauté ?
Je pense que cette génération est une génération de rêveurs fous, sans limite, mais également très
ancrés à la réalité quotidienne.
Le back to basics fut clé pour une génération extrêmement aware, ultra-connectée, abreuvée, voire
« saoulée » par trop d’informations et de sur-promesses (souvent vécues comme déceptives). À une
cible spécifique, un marketing produit innovant et exclusif. Simple, cohérent, sans tricherie. À une
cible spécifique, une communication cohérente sur l’ensemble des points de contact et notamment des
points de contact digitaux, premiers contacts auprès de la marque. Et avant tout, du rêve alliant
technologie et storytelling puissant et cohérent. No overselling.
La beauté holistique Y
« Être belle c’est être bien en tous points, d’où la recherche de messages de
frenchpdf.com
beauté intérieure et extérieure. Cela implique cependant pour les marques
de réfléchir plus loin que dans leur simple domaine et d’apporter des solutions
de beauté globale pour se démarquer et fidéliser ses clientes. », déclare Julie
Ceccaldi[25]. Là encore, la génération Y reboote des mots qui se vidaient de leur
sens. Après le développement durable, c’est au tour de la beauté holistique de
revenir au centre des exigences. Épurée de tout bullshit décoratif, elle exige une
transformation digitale et quotidienne, des marques de cosmétiques, en véritable
marque de service beauté, bien au-delà de quelques instituts ou zones spa,
comme l’imagine Julie Ceccaldi.
Pour y voir plus clair, nous avons imaginé un outil simple, le triangle de la
beauté holistique Y (outil n° 8).
Outil n° 8 – Le triangle de la beauté holistique Y
frenchpdf.com
Targaryen, l’héroïne blonde platine de Games of Thrones.
frenchpdf.com
© Éric Briones/Stéphane Bal
Droit n° 1 au Lifestyle
La génération Y n’attend pas des marques qu’elles lui imposent des produits
magiques, tout droit sortis de labos. La démarche est inverse, elle est mise en
action par Shiseido et Dr Brand de faire partir la recherche de l’analyse de leur
lifestyle, afin de leur apporter des solutions beauté totalement fluide avec leur
quotidien. C’est la définition du consumer centric, plus que jamais indispensable
pour séduire cette cible, une vraie leçon d’humilité marketing. Cela ne se limite
pas à une philosophie produit, mais également dans une philosophie retail,
comme la vision cross-canal de Sephora, aussi à l’aise dans le web to store, que
dans le store to web, avec la possibilité offerte à une cliente n’ayant pas trouvé le
produit recherché en magasin de le recevoir chez elle via une commande prise
directement par sa conseillère beauté, gommant ainsi tout risque de frustration et
donc d’infidélité. La femme Y peut s’engager à condition qu’elle trouve des
marques dans lesquelles elle se reconnaît et qui s’intègrent en toute fluidité à son
lifestyle.
Droit n° 2 au « De-stress »
C’est l’insight le plus fondamental. Il conditionne l’épanouissement réel de la
Y. La beauté est tout à la fois créatrice ou anticorps du stress, la marque doit se
muer en partenaire de cette libération, Julie Ceccaldi : « La clé pour une marque
de soin va être de se positionner comme une partenaire pour justement affronter
ce stress. Être un facilitateur de vie plutôt qu’une contrainte supplémentaire. Une
marque de beauté peut aussi se positionner comme une proposition de
frenchpdf.com
parenthèse, de pause pour soi en rupture avec le rythme effréné de ses
journées. »
Droit n° 3 à la Simplicité
Le droit à la simplicité est de quatre ordres.
« Clarté » : la matérialisation concrète d’une vision intelligente de la
beauté, guidée par le désir de comprendre, de ne pas être manipulé par un
nuage de chiffres et de molécules illisibles. Cela implique aux marques « un
devoir d’infographie », c’est-à-dire de clarification de l’effet produit, dans
une histoire simple et inspirante, à l’image du souffle de vie d’Ibuki.
« Immédiateté » : le bénéfice beauté peut se permettre d’avoir une double
temporalité, mais tout d’abord temps court, puis temps long. La femme Y
n’est pas patiente. Son lifestyle lui permet quelques rares poses, mais
l’essentiel se fait dans l’urgence, d’où la nécessité de proposer des rituels
simples et rapides, qui peuvent néanmoins s’ajuster dans des protocoles
plus longs, à condition d’être dans une réelle dimension plaisir.
« Transparence » : le point le plus important, en phase avec l’obsession
générationnelle du « no bullshit ». La transparence est là pour combattre
toute arnaque, le meilleur allié est bien sûr internet, à la fois comme
organisme de validation des promesses de la marque mixant le fact
checking au partage d’expériences provenant d’autres consommatrices. La
conclusion de Guillaume Cappon est limpide : « L’univers d’Ibuki semble
tout à fait retranscrit par ces consommatrices. No overselling. No bullshit. »
Exemplaire dans la valeur transparence, Sephora US a montré l’exemple
dès 2011, en offrant l’accès via mobile, à des millions d’avis de
consommateurs, pour simplifier le smart shopping de ses clientes.
« Le Tout en un » : c’est la philosophie du couteau suisse beauté, avec
pour première matérialisation la fameuse BB Cream inventée en Corée, aux
multiples fonctionnalités, et qui représente pas moins de 13 % de
l’ensemble du marché local. Le « tout en un » est une promesse magique
pour la cible, synonyme de générosité, gain de temps, efficacité et surtout
value for money. Shiseido US a employé judicieusement cet angle lors du
lancement d’Ibuki, en utilisant le claim « Ready for Anything Skin Kit ».
frenchpdf.com
à une exigence low-cost, intégrée par les marques, via une politique de pricing
de gamme, d’une très grande cohérence des gammes dédiées aux Y, que cela soit
pour Ibuki crème autour de 50 euros et nettoyant 30 euros. La beauté coréenne
(appelée aussi K-beauty) applique pour séduire cette cible, une approche de prix
agressive, elle est particulièrement bien représentée, par le site marchand
SokoGlam, qui distribue uniquement des produits coréens, mais dont 80 % de la
clientèle, ne provient pas d’Asie.
Droit n° 6 à l’Inspiration
L’inspiration n’est pas que créative, c’est la mission de l’Ovni, elle installe la
marque de beauté en véritable coach, qui aide la femme Y à prendre plus
confiance en elle, à sublimer son naturel, pour mieux affronter les lumières des
médias sociaux. C’est donc une inspiration de confiance qui est demandée,
comme le décrypte Capucine Piot « Ce qui m’a parlé dans Girls, c’est le côté
bareMinerals : “Vous êtes des forces de la beauté, vous êtes telles que vous êtes
et vous devez vous aimer telles que vous êtes”. » Cette recherche de l’inspiration
pour l’ego est le pilier de la marque Em créée par la star de YouTube Michelle
Phan, en partenariat avec L’Oréal Luxe. Tout est ici une question d’ego, le nom
de la marque signée par « A reflection of me », le rôle joué par Phan, celui d’une
grande sœur, qui a tout essayé pour vous et qui sait expliquer simplement, sans
jamais vous écraser. Ses résultats sont étonnants, elle affiche un bénéfice de
5 millions de dollars après moins d’une année d’activité. La structure de son
audience est singulière et démontre que ses contenus, nourrissant l’inspiration de
la femme, sont de formidables sources de trafic, puisque 42 % de l’audience du
site d’Em Cosmetic provient des médias sociaux, alors que la moyenne du
secteur est 3 fois moins élevée d’après le think tank L2.
frenchpdf.com
Droit n° 7 à la Personnalisation
La personnalisation est dans l’ADN Y. Ainsi le désir de « do it yourself » est
omniprésent dans le maquillage et ses univers connexes (ongles et tatouages).
L’univers du soin s’initie au vrai sur-mesure, par la prise en compte de l’ADN
de la cliente, dans la création de son produit. Plus pragmatique, c’est une fois de
plus Sephora qui montre l’exemple, en armant ses conseillères beauté du
programme MY SEPHORA sur iPod Touch, qui leur permettent d’accéder à
l’intégralité de l’historique d’achat de la cliente, à son profil, ainsi qu’à un
algorithme au pouvoir de suggestion redoutable, offrant une vraie relation one-
to-one en magasin et en temps réel. Autre initiative de Sephora, la
personnalisation dans la promotion, avec un programme dédié.
Droit n° 9 à la Convergence
C’est un sujet qui nous tient particulièrement à cœur car à nos yeux le futur de
la beauté se construit tous les jours en Corée. La K-Beauty est déjà un pilier du
soft power coréen, au même titre que la K-Pop. Son impact est encore peu
visible, même si M, le magazine du Monde, lui a consacré une couverture en
2013. Sa puissance est sans conteste en Asie où elle donne un sacré coup de
vieux aux marques occidentales. Ainsi 89 % des Chinoises entre 20-30 ans sont
satisfaites de la qualité des marques coréennes (un résultat remarquable quand
on connaît l’exigence chinoise en matière de produits importés), 62 % trouvent
ces produits bien adaptés à leurs besoins et seulement 4 % les trouvent chers.
frenchpdf.com
Comment comprendre un tel engouement ? Tout d’abord ne pas caricaturer la
femme coréenne (qui utilise en moyenne 17 produits de beauté par jour) en une
addict à la chirurgie esthétique, creuser plus loin et saisir le concept beauté de
convergence.
Le mot convergence est apparu à nos yeux en 2012, dans une étude de la
Samsung Economic Research Institute (SERI), qui révéla les deux forces
motrices de la beauté coréenne : les biotechnologies et la convergence. La
convergence rend le fantasme de la beauté holistique réalité en mobilisant un
ensemble de moyens, bien au-delà du simple produit de beauté pour atteindre
cette ambition.
frenchpdf.com
© Éric Briones/Stéphane Bal
frenchpdf.com
Comprendre les évolutions du luxe vu par la génération Y chinoise dépasse le
simple cadre marketing, il touche à des éléments plus essentiels : la
reconnaissance du moi, le féminisme, le rapport aux autres générations et au
monde, les contradictions de l’hypermatérialisme dans le cadre de la République
populaire de Chine…
La vitesse chinoise
« Les générations marketing sont plus rapides qu’à l’ouest. Les sociologues le
disent. On considère maintenant qu’une génération c’est 10 ans et ce mouvement
s’accélère. Les modes de pensée d’une génération à l’autre sont très différents. Il
faut aussi intégrer les notions de générations. L’âge étant essentiel dans le mode
de pensée des Chinois… L’esprit chinois adoptant tout, tout de suite. On est
probablement déjà en pleine Gen Z. » Frédéric Raillard, de Fred&Farid Group,
aujourd’hui installée à Shanghai. Le luxe a vu cette vitesse d’évolution chinoise
lui arriver en pleine face ; coupler à une taxation gouvernementale de plus en
plus sévère, cela a remis en cause le paysage idyllique qu’il se faisait de ce
marché sans limite de croissance.
frenchpdf.com
Échos du 2 septembre 2013, afin de combattre la trop grande visibilité des
fractures sociales – accélérées par le ralentissement économique, puis
l’expression libérée des aspirations de la génération Y.
frenchpdf.com
mêmes aprioris, l’étude confirme qu’ils sont bien plus sophistiqués que ces
stéréotypes et qu’ils dessinent une nouvelle forme d’individualisme.
Pour aller plus loin dans cette exploration identitaire de la jeunesse chinoise,
nous avons eu la chance d’accéder en exclusivité à l’étude de Nelly Rodi « The
Chinese Youth » 2013, nous en avons réalisé un nouvel outil, une infographie
inspirée de l’étude, qui :
retrace les formes d’affirmation de soi exercées par la société chinoise,
depuis l’arrivée de Mao au pouvoir. Soit trois temps majeurs : l’affirmation
par l’acquisition de produits occidentaux, puis par la consommation de
masse, à aujourd’hui l’individualisme ;
définit les 4 communautés clés de la génération Y chinoise (les
« néonationalistes », les « business », les « technos », les « alternatives ») ;
donne quatre chiffres clés provenant de la partie qualitative de l’étude,
cernant avec précision l’intensité du désir de reconnaissance, de liberté, et
leur rapport contrarié au luxe.
Outil n° 11 – L’infographie GenY chinoise Nelly Rodi
frenchpdf.com
Insights traduits en français dans les commentaires ci-après
© Nelly Rodi/Stéphane Bal
Avis d’expert
frenchpdf.com
Avis d’expert
Agathe Dementhon, directrice des études Nelly Rodi
frenchpdf.com
Néo-nationalistes : ce sont ceux qui sont les plus proches des valeurs familiales et
traditionnelles chinoises. Ils se sentent proches des gens et en particulier de leurs parents. Ils se
préoccupent de questions d’environnement. Ils apparaissent moins anxieux, de manière
générale, que l’ensemble des jeunes chinois. Dans ce contexte, ils sont moins attirés par la vie à
l’étranger que les autres jeunes chinois. On peut dire que c’est le type le moins en recherche de
distinction, de valorisation de soi-même. Ils sont peu attirés par les marques internationales et
par l’argent et ne sont pas du tout fashion victims.
Business : comme les Néo-nationalistes, les Business sont proches de leur famille et des règles,
mais la différence fondamentale est qu’ils sont également très individualistes, dans le sens où ils
affirment n’avoir besoin de personne et sont très motivés par la quête de succès social. Ils sont
toujours à la recherche de nouveaux challenges, d’une vie nouvelle, d’une success story, qui ne
passe pas forcément par la fortune, d’ailleurs, mais surtout par la reconnaissance sociale. Ils sont
très attirés par l’étranger. Ce sont les moins anxieux de tous les jeunes chinois. Ils ont une
confiance en eux incroyable et affirment, plus que les autres, se sentir bien dans leur peau.
D’ailleurs, ils prennent davantage soin de leur corps et de leurs performances physiques que les
autres.
frenchpdf.com
une mise à nu totale de chaque pièce de vêtement, tant économique,
qu’écologique.
La jeunesse chinoise marche à l’unisson avec la génération Y occidentale, elle
ne s’interdit rien, pas même de hacker les archaïsmes sociétaux, ou de dicter leur
propre définition d’un luxe utile à leur construction identitaire. La génération Y
semble être un formidable vivier, pour des jeunes marques de luxe, en particulier
chinoises, à condition d’avoir un point de vue et une matérialisation de celui-ci
en tout point innovant.
frenchpdf.com
tête aux pieds et toutes ses données sont intégralement rentrées dans le logiciel),
d’autres encore repensent le retail et maximisent l’espace de leur boutique pour
offrir la meilleure expérience possible. C’est également cette recherche
d’expérience qui les pousse à digitaliser le lifestyle. Avec leurs comptes
YouTube, ils mettent en ligne des conseils sur l’entretien, l’assortiment et des
tutoriels vidéo qui décodent le style et le vêtement. De cette façon ils apportent
un service supplémentaire et des innovations qui augmentent d’autant
l’expérience et la relation que leurs consommateurs peuvent avoir avec leur
marque.
Cette nouvelle philosophie vis-à-vis des anciens métiers ne doit pas être vue
comme une simple nouveauté marketing, il s’agit sincèrement d’une vision du
luxe différente qui se réapproprie les traditions de la confection de luxe pour les
adapter aux aspirations et aux envies de la jeune génération. Ce sont des
néoclassiques du luxe qui réinventent et corrigent l’ancien luxe avec les outils et
les mentalités de la jeunesse d’aujourd’hui.
frenchpdf.com
vie actif et urbain de celles et ceux qui les achètent. Leurs collections sont faites
pour être portées au quotidien. Elles sont résolument urbaines et comportent
plusieurs pièces iconiques. Elles sont également toutes pourvues d’un large
panel de détails distinctifs qui créent le désir. À cet effet les collections Kenzo
sont remplies de symboles et de signes créant ainsi un univers de marque très
fort. Carven de son côté crée des pièces iconiques chaque saison (le manteau
Rose star des podiums cet hiver en est un exemple). Toutes leurs créations créent
des vestiaires volontairement orientés lifestyle qui mettent en lumière la capacité
de ces jeunes créateurs à décrypter parfaitement les tendances, car ils savent
pertinemment ce qui va se vendre. En effet, ils possèdent une connaissance aiguë
des codes du marketing et n’hésitent pas à les adapter à leurs collections. Le duo
DA de Kenzo est d’ailleurs formé de deux anciens acheteurs internationaux.
Leur inspiration, ces nouveaux créateurs la puisent dans la rue et infusent leurs
collections de streetwear et de sportswear dans des cadres multiculturels, qui
rappellent le « cool new-yorkais » bien loin de la tradition des Maisons. Cela
leur permet de décliner leur propre style à travers de nouvelles coupes, de
nouvelles matières et de nouvelles silhouettes, contemporaines et urbaines qui
s’inspirent de la rue et du melting pot de cultures. Ces créateurs-là sont sans
cesse dans l’expérimentation de nouvelles idées et tentent régulièrement de
nouvelles collaborations (comme Kenzo avec Vans, Kenzo avec New Era,
Carven avec Colette ou encore JW Anderson avec TopShop), ainsi que de
nouveaux décloisonnements.
Enfin, ces créateurs premium, sont également très connectés. Ils profitent de la
puissance de médiatisation des réseaux sociaux pour faire parler d’eux et de leur
travail. Leurs connexions sont internationales et le web relaie leur notoriété à
travers le monde.
frenchpdf.com
Jonathan Anderson (29 ans), ou encore Damir Doma (33 ans) se sont rebellés
contre la tendance néobourgeoise, le « coté couture » du prêt-à-porter du luxe
qui dominait depuis plusieurs saisons. Ils lui ont substitué leur vision d’une
mode moderne, pratique, dynamique, faite par des jeunes pour des jeunes. Ils
créent des silhouettes que les jeunes femmes d’aujourd’hui ont envie de porter.
Ils sont devenus les nouvelles stars du monde de la mode et révolutionnent le
luxe des grands groupes en dynamitant les traditions. Ils se démarquent
naturellement, tant dans leurs mots que dans leurs revendications. Ils donnent un
nouveau souffle à la mode.
Avec eux, s’effectue un véritable virage et même une rupture dans la stratégie
des leaders du luxe. Ces nouvelles stars de la couture se nourrissent
d’innovations high-tech et se détournent de l’esthétique précédente. Leurs
collections sont créées pour être portées. Ce sont des vêtements du quotidien qui
s’inspirent des nouvelles technologies. Dans le style progressiste de Maxime
Simoens, on retrouve une parenté avec la mode avant-gardiste imaginée par
Thierry Mugler ou Montana dans les années 1980. Comme eux à l’époque, ce
luxe nouvelle vague ose se confronter au futur. Ces créateurs nouvelle
génération vont de l’avant. Ils brisent le rétroviseur des marques « installées ».
La priorité devient l’innovation et l’expérimentation constantes. C’est leur
manière de dessiner et de créer des vêtements résolument « out of the box ». Ils
recherchent de nouvelles formes, créent de nouvelles silhouettes. Avec eux,
l’histoire de la mode s’écrit au futur.
Ils utilisent de nouvelles matières, modifient les lignes, innovent en simplifiant
les formes, les coupes, les traits. Ils inventent une nouvelle silhouette plus en
phase avec les lifestyles contemporains. Bien dans leur temps, ces nouveaux
créateurs témoignent du monde dans lequel ils vivent. Ils l’observent et le
côtoient, loin des tours d’ivoire des master brands du luxe dont ils ne s’inspirent
d’ailleurs pas. Ces créateurs possèdent une force de style qui tranche net et qui
surprend, ce sont des curiosités qui fascinent. Ils expérimentent, visent l’ellipse,
l’épure, la prouesse, le « never seen before ». Architectures fictionnelles, design
morphing, présentations futuristes, simplification extrême des formes,
frenchpdf.com
exagération des volumes, noir et blanc obsessionnels, graphismes hypnotiques
inspirés du pop art, minimalisme coloré, lumières laboratoire… quelle que soit la
nouveauté, ils lui donnent vie et corps. C’est dans cette intelligence radicalement
nouvelle du monde comme vaste champ d’expérimentations que s’invente
véritablement la mode de demain. De plus, ils ont parfaitement intégré que les
clients du luxe souhaitent aujourd’hui acheter des produits authentiques avec une
véritable histoire et non des produits marketés, ornés de logos apparents. Cette
évolution de la demande est encore plus forte chez les jeunes générations qui
désirent constamment se démarquer des précédentes.
Fait nouveau, on assiste désormais à la consécration de ce phénomène en
dehors des « cercles fashion » de New York, Paris ou Londres, à tel point
qu’aujourd’hui tous les grands groupes ont en leur sein des « experts » chargés
d’identifier, d’analyser et de suivre les jeunes créateurs susceptibles de faire
l’objet d’investissement observe l’expert du luxe Nicolas Boulanger. Ce luxe
« nouvelle vague » pousse les grands du luxe à agir. Leurs valeurs sûres et
établies ne suffiront plus à tirer leur croissance et ils le savent, en particulier sur
les marchés émergents, où une frange croissante de la clientèle du luxe, de plus
en plus éduquée et de plus en plus jeune, cherche à se différencier des
précédentes générations. Aujourd’hui la problématique du luxe n’est plus de
réveiller de vieilles Maisons grâce à un mercato des designers les plus
médiatisés, mais bien de construire une base solide de jeunes griffes qui
incarnent une mode neuve, plus connectée, plus cool et énergique, loin de la
pesanteur du luxe classique. Les majors du luxe ont souvent et longtemps
confondus luxe et classique. À présent, sous l’impulsion de ces créateurs
« nouvelle vague », elles changent et écoutent les avis alternatifs de ceux qui
n’imitent pas ni ne rabâchent les vieilles recettes. Elles regardent du côté de ceux
qui innovent, imposent leurs coups de crayon, leurs univers street,
technologiques, musicaux et arty. Les grands du luxe se mettent donc à investir
très tôt dans ces petites maisons afin de les soutenir et de les développer aux
côtés des poids lourds déjà présents.
Les liens qui unissent aujourd’hui la génération Y et le luxe sont forts et
frenchpdf.com
sincères. Ce serait une énorme erreur pour les marques de ce secteur, que de
passer à côté des bouleversements que la jeunesse produit déjà dans cette
industrie. Car ces jeunes créateurs ne sont plus des jeunes chargés de rajeunir les
marques endormies. Eux construisent des griffes ex nihilo avec la jeune
génération et préparent de nouveaux lendemains. Nous sommes dans ce domaine
en présence d’investissements de long terme. Il s’agit pour les groupes de luxe
de parier sur de nouvelles marques plus sélectives, plus confidentielles dans un
contexte d’évolution de clientèles qui recherchent aujourd’hui des produits et des
marques différentes.
En conclusion et avant de rentrer dans notre dernier chapitre, qui se veut une
boîte à outils au service de vos stratégies de recrutement vers la cible Y, nous
vous présentons, un nouvel outil qui propose une relecture de la pyramide de
Maslow, en regard de ses insights fondamentaux.
Outil n° 12 – La pyramide de Maslow en mode Y
frenchpdf.com
Besoin de sécurité en mode Y : survivre à la crise, par une position radicale et raisonnée le
smart shopping, entraînant une priorisation des achats premium et authentiques, à un prix low-
cost.
Besoin d’appartenance en mode Y : la confiance en soi se construit dans le regard critique de
l’autre, qui se transforme en rouage essentiel de validation permanente, de ses choix.
Besoin d’estime en mode Y : construire son unicité, bâtir la singularité de sa marque
personnelle, pour avoir le luxe de choisir le statut de célébrité qui convient.
Besoin d’accomplissement en mode Y : avoir le courage d’entreprendre, jouir d’un lifestyle
luxe, à la fois matériel et immatériel, et le faire partager.
[1]
Julia Tissier et Myriam Levain ont co-signé en 2012, le livre La Génération Y par elle-même aux
éditions François Bourin et lancé en 2013 le site Cheek Magazine.
[2]
Directeur du département « art de vivre » du bureau de style Nelly Rodi.
[3] Directeur études et conseil à l’IFM.
[4] Directeur général d’Ionis Education Group, organisme d’enseignement supérieur privé qui regroupe
notamment les écoles ISG, ISEG, EPITA, EPITECH, IPSA et Sup’biotech, depuis 2005.
[5] Directrice de la marque et du marketing de la Fnac.
[7]
Créatrice et présidente de Luxury Arts chez TBWA Paris.
[8] Conseiller groupe média, blogueur français historique sur ChosesVues « le webzine au masculin
singulier d’mry »
[9] Concile Vatican II : « Le 11 octobre 1962 Jean XXIII ouvrait à Rome le concile œcuménique Vatican
II. Dans son discours d’ouverture, le Pape donna le ton et l’esprit des travaux : “Notre devoir n’est pas
seulement de garder ce précieux trésor comme si nous n’avions souci que du passé, mais nous devons
nous consacrer, résolument et sans crainte, à l’œuvre que réclame notre époque, poursuivant ainsi le
chemin que l’Église parcourt depuis vingt siècles”. De 1962 à 1965, ce concile rassemblant tous les
évêques du monde fut un événement considérable par le nombre et l’importance de ces propositions. »,
source ; Église Catholique de France.
[10] Strategic Planning and Insights Director à Zenith Optimedia.
[12] Conseiller auprès de jeunes créateurs d’entreprises de mode et de maisons de luxe dans le domaine de
la création, de la communication, du développement ou de l’image.
[13] Co-président en charge de la création Publicis Conseil.
[17] Julia Tissier et Myriam Levain ont par co-signé en 2012, le livre La Génération Y par elle-même aux
frenchpdf.com
[19]
Blogueuse « certifiée conforme » depuis 2005, responsable éditoriale du site de Cosmopolitan depuis
2008.
[20]
Directeur Études et Conseil à l’IFM.
[21] Rédacteur mode de Commeuncamion.com, « Le blog mode des mecs », qui enregistre plus de
300 000 lecteurs par mois.
[22] Créateur de la marque de prêt à porter haut de gamme pour homme Husbands.
[23]
International Digital Axe Director chez Biotherm.
[24]
Capucine Piot tient le blog beauté référent Babillages depuis avril 2007.
[25] International Digital Axe Director chez Biotherm.
frenchpdf.com
CHAPITRE 3
frenchpdf.com
Diesel : campagne de communication intégrée « Reboot » (2013)
« Diesel Reboot est un projet initié par le directeur artistique de la marque, Nicola Formichetti qui
invite la communauté créative à donner libre cours à son inspiration autour des valeurs de l’ADN de
Diesel : originalité, courage et liberté. Cette initiative présente la particularité d’être axée sur un Tumblr
participatif dieselreboot.tumblr.com où Nicola Formichetti propose, à travers ses vidéos, de répondre à
certaines missions : mission 1 : Qu’est-ce qui t’inspire aujourd’hui ? Mission 2 : Qu’est-ce qui fait une
icône aujourd’hui ? Le Tumblr Diesel Reboot se veut une véritable vitrine d’exposition des expressions
artistiques de chacun. La plateforme permet ainsi de révéler certains talents comme le photographe
Michael Mayren dont les œuvres ont été exposées à Londres dans une « pop gallery » conçue
spécialement pour lui.
Facteurs Y
Le projet #DieselReboot révolutionne le concept même de réinvention en impliquant directement sa
cible dans le processus de « renaissance » de la marque. À travers son Tumblr participatif, l’ADN de
marque devient un territoire d’expression créative pour la GenY.
Le reboot : la réinvention de la marque est un concept nécessaire dans un contexte de crise et
d’hyper-concurrence. Le reboot est un principe qui ravit la génération Y car il conjugue son attrait
pour la tradition, l’historicité (ADN de marque) et son goût immodéré pour l’innovation. Il sert
également à assouvir son désir de renouveau.
“Power to People” : le power to people permet d’attribuer aux Y le pouvoir de réinventer la
marque. Le projet Diesel Reboot constitue un laboratoire d’idées émises par les créatifs de la GenY
pour réinjecter du neuf et de la modernité dans l’ADN de la marque. Le Tumblr Diesel Reboot
représente un espace de liberté créatif qui correspond à leur désir de rébellion. Ainsi les jeunes Y
deviennent les agents clés de la réinvention de la marque.
Le brainstorming créatif : le directeur artistique challenge la créativité des Y en leur proposant des
missions inspirantes. Le Tumblr Diesel Reboot devient alors un atelier d’artistes, un espace
d’émulation créative à l’instar d’une factory digitale qui fait directement appel à l’inclination
participative des digital natives et à leur sens créatif.
Une nouvelle race de cabinet de curiosités : pour la GenY, le Tumblr Diesel reboot est une galerie
d’art. La collection d’œuvres, enrichie en permanence, répond à leur besoin insatiable de curation et
à leur exigence exacerbée en matière de beau et d’originalité. Cet espace d’exposition met en
exergue une culture artistique underground captivant les Y, les esthètes d’aujourd’hui.
Enseignements pour les marques
#DieselReboot livre deux principes clés pour une communication à même de capter la GenY :
Le crowdsourcing compatible avec le luxe : le Tumblr participatif est un choix impertinent pour
une marque de luxe qui a pour habitude de mettre à distance ses consommateurs afin de préserver
son aura de rareté et de mystère. Or, Diesel démontre que le participatif s’avère tout à fait possible
sans émousser l’essence luxe de la marque. Le crowdsourcing convient dans la mesure où il est régi
par une forte exigence esthétique et artistique. Il permet ainsi de renforcer les liens entre le luxe et
l’art grâce aux œuvres de jeunes créatifs talentueux qui viennent nourrir le potentiel de rêve et
d’imaginaire de la marque de luxe.
Faire des Y les forces vives du reboot de la marque : Diesel crée un espace de créativité et
d’intelligence collective dans lequel l’individu Y devient un maillon puissant et indispensable dans
frenchpdf.com
le processus de réinvention de la marque. »
Charlotte TISSERANT
Le crowdsourcing : anti-luxe ?
Le crowdsourcing ou la créativité participative est une pratique fondamentale
des arts numériques et il est devenu une pratique associée à la génération Y.
Nous sommes ici dans la gestion d’un paradoxe particulièrement complexe à
résoudre : d’un côté, une cible qui exige des marques, un droit à la participation,
tant dans la conception des produits, que dans leur communication, sous peine de
désintérêt violent ; de l’autre, le monde du luxe, construit depuis ses origines
historiques (le luxe en tant que garantie à l’accès à « l’autre vie », vecteur
spirituel, remplissant les tombeaux royaux de l’Égypte antique) autour d’un
modèle pyramidal avec une marque planant au-dessus de ses disciples (les
clients) capturant un morceau d’éternité (l’objet de luxe). On voit donc
apparaître une claire opposition frontale entre ces deux modèles horizontaux et
verticaux.
Faut-il pour autant renoncer à l’arme du participatif ? Nous ne le pensons pas.
Il faut savoir la doser et surtout lui donner un rôle qui ne nuise pas à la
perception de l’authenticité de la marque, ce qui serait bien plus dommageable
qu’un délit passager de modernité. De notre point de vue, le crowdsourcing avec
les consommateurs ne doit pas être activé dans le cadre de la conception d’un
produit. En effet la co-création n’est pas adaptée aux marques de luxe. En
voulant mettre leur produit iconique dans une logique sociale, les marques du
secteur de la mode ont d’ailleurs abusé de ce processus. Prenons pour exemple la
collection de 2010 « Quand les blogueuses s’en mêlent… » de la marque André,
collection imaginée par 6 blogueuses de mode. Nous pensons que le produit doit
rester un domaine sacré du créateur et de son studio de création, aux yeux de nos
Yers passés maîtres dans l’art du décryptage, de l’arnaque marketing et de la
science du shopping intelligent.
À la différence de la conception produit, le participatif appliqué à la
communication d’une marque ne peut pas nuire s’il est bien pensé. C’est une
frenchpdf.com
preuve d’ouverture au monde, un souffle de vitalité offerte, une arme
d’émergence immédiate pour les marques luxe et premium, à condition de lui
donner un vrai rôle concret, parfaitement défini, visible et de savoir l’animer le
temps de l’opération.
frenchpdf.com
amoureuse. Le cœur de l’expérience digitale (site web et mobile) réside dans
l’invitation au partage de belles histoires amoureuses et de mots d’amours qui se
retrouveront dans tous les médias Tiffany, les médias sociaux (Facebook,
Twitter, Instagram…), mais bien au-delà. Symboliquement on les retrouve au
cœur des vitrines des magasins Tiffany & Co., par l’intermédiaire de post-its au
code couleur de la marque (le vert) délicatement posés. Tiffany & Co. offre un
souvenir vrai et inoubliable, facteur et symbole d’engagement, qui trouve sa
matérialisation produit naturellement : la bague qui scelle une union.
Presque trois ans après, le coup de communication « What makes love true »
est devenu un des piliers de la marque, qui a su ainsi s’approprier la valeur
amour si stratégique dans l’univers du bijou, il est même devenu un service
cadeau pour la Saint-Valentin.
L’intelligence de la marque a été de rendre romantique le service de
crowdsourcing, d’un réseau de contenus amoureux dans un style chic
traditionnel et typiquement Tiffany : une liste de films et de chansons d’amour
indispensable pour tomber amoureux et pour raviver les cœurs endormis, ou
encore une série de photos très WASP signées par le couple magique de la
blogosphère Garance Dorée et Scott Schumann, un guide des endroits les plus
romantiques de New York et sans oublier quelques fabuleux placements de
produit de la marque, en particulier dans la série Newsroom.
L’ambition dans le déploiement de cette campagne va bien au-delà du digital,
qui pérennise et enrichit l’expérience de partage par du bon entertainment. Voilà
les recettes simples d’une opération réussie de crowdsourcing. « What makes
love true » est la meilleure campagne intégrée de ces dix dernières années dans
son univers et une ode poétique à l’amour courtois « made in New York ».
Hermès, Tiffany & Co. ont su répondre au désir participatif, sans pour autant
mettre en danger la distance naturelle entre une grande maison et ses
admirateurs. En effet, ils ont su conditionner le crowdsourcing à des actions de
communication « below the line » ou hors média, sans jamais toucher au produit
et en jouant un rôle nouveau, celui de bon génie réalisateur des rêves, de passeur
d’amour vrai, ou de nouveau mécène au service du désir de célébrité de la cible.
frenchpdf.com
Ces trois cas représentent l’excellence en matière de communication.
Cependant n’oublions pas le nombre de campagnes 360° qui se limitent à une
belle image creuse, le participatif pourrait alors agir en remplissant le vide d’un
storytelling balbutiant, voire parfois faire des miracles.
frenchpdf.com
Avis d’expert
Samir Boutamdja, directeur de Mindshare Luxury, agence en charge du Tumblr Diesel Reboot
Quelles sont les grandes tendances qui se dessinent en terme de contenu proposé par les
internautes, quelle est leur vision du reboot ?
Les internautes se sont rapidement emparés du Tumblr Diesel Reboot parce que, pour la première fois,
une marque fait le pari de se mettre en retrait par rapport à ses adeptes. Diesel devient une plateforme,
un média mis à la disposition de l’internaute pour exprimer son individualité. C’est un peu comme si
Le Monde ouvrait ses colonnes à un apprenti journaliste ou écrivain. Nicola Formichetti[1] fait même
profiter ces internautes de son carnet d’adresses et permet à certains d’entre eux d’exposer leurs
créations dans des galeries d’art parisiennes. Les adeptes du reboot travaillent différents formats
visuels (photo, dessin, vidéo) qui sont, après sélection, postés sur le Tumblr de la marque.
Le Tumblr reboot est-il juste une arme de communication ? Quelle valeur ajoutée pour la
marque Diesel ?
Tumblr est LA plateforme des « young and influential creatives ». Avec Instagram, c’est la plateforme
la plus visuelle, ce qui accroît considérablement le potentiel viral des contenus : une étude Ipsos
récente montre que le contenu le plus partagé au monde est la photo, avec 43 % des interrogés
indiquant qu’ils ont partagé au moins une photo au cours du dernier mois. Diesel, qui souffre d’un
déficit d’image dans cette jeune audience, utilise le Tumblr Reboot pour devenir de nouveau
« relevant » d’un point de vue culturel. Grâce à son Tumblr, Diesel n’est plus la marque de vieux
trentenaires qui achètent ses jeans parce qu’elle était cool dans les années 1990, mais celle d’une jeune
classe ultra-créative menée par un talentueux Nicola Formichetti.
Quel est le futur du Tumblr Reboot Diesel ?
Je le perçois comme le fer de lance d’une stratégie digitale qui sera appelée à se diversifier pour
communiquer la « doctrine reboot » à une audience beaucoup plus large. Le Tumblr Reboot va
rayonner sur les autres plateformes mais perdra, à terme, de son importance au profit de « mass social
media » comme Instagram, qui vient de lancer une offre « native advertising » particulièrement
prometteuse.
Diesel nous montre la voie vers une autre fonction du crowdsourcing qui est
celle de source d’informations marketing précieuse, sans le parasitage inhérent
aux études. Le Y est un être de désir, il a trouvé dans les médias sociaux visuels
comme Instagram, Pinterest ou Tumblr le moyen de les exprimer, il serait
frenchpdf.com
aberrant de ne pas utiliser une telle source d’information. La chaîne de grands
magasins de luxe Bergdorf Goodman l’a parfaitement compris, en mettant en
place une veille, autour des comptes Instagram de ses magasins locaux,
analysant scrupuleusement les commentaires et photos postés par les clients. Ces
informations sont transformées en recommandations directement transmises aux
forces de ventes des magasins, impactant les prévisions des stocks, la politique
promotionnelle. Elles enrichissent également le discours commercial de la force
de vente. Le crowdsourcing peut se transformer en arme d’intelligence
marketing au service de la connexion des magasins.
frenchpdf.com
planétaire et communautaire.
Facteurs Y
Engager la jeunesse dans une cause réelle et sérieuse. Benetton s’érige en porte-voix des jeunes
chômeurs (100 millions de jeunes de moins de 30 ans à la recherche d’un emploi dans le monde en
2013) qui veulent s’affranchir d’une étiquette « jeune » qui leur colle injustement à la peau :
égoïstes, instables, refusant l’autorité, pas suffisamment impliqués, manquant d’ambition, etc. C’est
un rapport au travail différent qu’ils défendent ardemment : interaction intellectuelle (échange
quotidien), cadre de travail agréable, intérêt et sens du travail, liberté d’action, équilibre entre vie
privée et professionnelle.
La solution pragmatique : un catalyseur de carrière. Benetton a compris l’intérêt de cibler cette
partie de la population en organisant un concours mondial pour les jeunes de 18 à 30 ans sans
emploi : vidéo, site dédié et affiches publicitaires à l’appui. Tout au long du concours, les internautes
votaient pour leurs profils préférés. Ainsi, les 100 projets qui ont récolté le plus de votes, à savoir
nos 100 meilleurs chômeurs de l’année, ont reçu 5 000 euros chacun pour financer leurs projets.
Des valeurs partagées GenY. Solidarité, participation active, responsabilisation, engagement,
éducation, créativité, changement, sont autant de valeurs véhiculées dans cette campagne qui ont
favorisé la reconnaissance, l’adhésion et l’engagement des Millenials envers la marque.
Enseignements pour les marques
S’ancrer dans le monde réel pour mieux le transformer. Benetton prend position sur la société et
plus particulièrement sur la place de la valeur du travail au sein de celle-ci. Identifier un point
d’ancrage réaliste en lien avec l’écosystème de la marque démontre sa capacité à prendre du recul, à
véhiculer du sens et créer un lien durable avec son public. La finalité (5 000 euros pour financer les
meilleurs projets) donne des moyens tangibles pour affirmer cette volonté d’instituer une évolution
concrète et positive : un changement durable.
Cultiver un « idéalisme réaliste » : le nouveau rôle des marques. Benetton se mue en médiateur
entre la marque prophète et la marque sociale. Trouver un juste équilibre, parmi les valeurs
institutionnelles (ADN et héritage) et les valeurs sociétales et externes (liées à l’évolution
technologique et à l’éthique), devient un enjeu stratégique pour le luxe afin de se pérenniser dans un
environnement très mouvant tout en conservant sa hauteur. En l’espèce, Benetton délivre un
message fort : osez affronter le réel. En d’autres termes, c’est un authentique appel à l’élévation à la
fois personnelle et collective.
Le pouvoir de changer la société. Fédérer cette génération à travers une projection dans le réel peut
s’avérer comme une formidable opportunité pour les marques de rayonner qualitativement et
durablement. La jeunesse veut être maîtresse de son destin. Elle comprend très rapidement le monde
et ses nouveaux enjeux avec en toile de fond les profonds changements sociaux et numériques qui ne
cessent de se nourrir mutuellement. Plus qu’une aspiration à un monde meilleur, c’est un véritable
devoir selon eux. »
Florian DEVAUX
Le cas soulevé par Florian Devaux est passionnant dans le sens où il illustre
parfaitement la volonté qu’ont les Y de voir les marques de luxe/mode/premium
s’affirmer et se confronter à la réalité. C’est une attente nouvelle demandée au
luxe qui a le talent inné de poser des lifestyles fantasmés en quelques visuels
frenchpdf.com
publicitaires, de l’univers d’une haute société WASP chez Ralph Lauren, à une
aristocratie éternelle chez Bottega Venetta.
frenchpdf.com
luxe, mais une magie qui tord le réel, le transforme, pour évoquer un accès vers
un ailleurs meilleur, on retrouve encore ici les racines spirituelles du luxe.
Derrière cette tendance qui peut sembler anecdotique, se cache la question
éminemment stratégique du développement durable dans le luxe. Jean-Noël
Kapferer prévoit une accélération exponentielle de la question dans les années à
venir. Nous pensons que demain le critère développement durable deviendra un
élément moteur de la notion de qualité. Il sera porté par la génération Y, qui
pense que l’achat intelligent a plus d’efficacité pour protéger le monde, que
l’exercice du pouvoir politique. C’est un point de vue radical, dépouillé de
cynisme et déjà mis en pratique aujourd’hui. La marque de luxe n’a plus pour
seule mission que le beau, d’« agent culture », elle doit aujourd’hui « luxifier le
réel » en le rendant plus vivable. C’est une ambition à la hauteur des plateformes
de marques qui se multiplient, autour de l’idée extrême de croisade.
Si les grands groupes de luxe français ont intégré la question du
développement durable dans leur stratégie depuis des années, ce sont les États-
Unis et la Chine qui nous montrent la voie, dans l’intégration concrète de cette
exigence, dans la value for money du produit.
La marque de lunettes américaine, furieusement tendance et 100 % Y, Warby
Parker s’est donnée pour mission d’être une « bonne entreprise » où ses
employés sont choyés, où l’entreprise tient un rôle de bienfaiteur de sa
communauté locale et, au-delà, parfaitement encapsulé par la promesse
fondatrice faite à tout client : « Buy a pair, give a pair », ou pour toute paire de
lunette achetée, une seconde lunette de vue neuve est offerte à une personne qui
en a besoin au bout du monde.
Cette offre a permis de distribuer plus de 500 000 paires de lunettes à travers le
monde et ainsi rendre concrètement, le monde un peu meilleur. La marque
exhibe également fièrement sa certification « B Corp », label regroupant plus de
800 entreprises, qui se sont engagées à suivre des objectifs extra-financiers sans
l’aval de leurs actionnaires, une révolution du capitalisme, au nom du sacro-saint
principe d’interdépendance.
frenchpdf.com
Selon la société de veille stratégique Dynvibe, Warby Parker après trois ans
d’existence, est la marque d’optique la plus visible sur les médias sociaux, avec
51 % de part de voix, dont 71 % de commentaires positifs voire même très
positifs.
L’emprise de cette exigence consumériste est perceptible même dans des
vénérables institutions, comme Tiffany, où l’argumentaire online d’un diamant
de la maison, intègre à un même niveau d’importance, le style, la qualité des
pierres, le service client ou la rubrique « ethical sourcing », véritable cahier
d’exigence environnemental.
La Chine n’est pas en reste, en prise avec une angoisse écologique de chaque
instant, la marque de luxe locale Useless se revendique inutile aujourd’hui… car
notre présent aveuglé par la recherche permanente de profits décide de sacrifier
des artisanats ancestraux sur l’autel de la rentabilité immédiate. A contrario,
Useless cherche à protéger ses artisanats en voie de disparition, en les mettant au
cœur de ses vêtements ; au-delà d’une qualité exceptionnelle, une promesse de
transmission vivante pour les prochaines générations.
frenchpdf.com
Tendance 3 : Expérimenter le gonzo brand
journalisme
Vice : magazine digital Vice.com
« Autrefois simple fanzine, Vice est aujourd’hui un média qui produit de nombreux contenus vidéo :
Vice, le magazine originel, Motherboard sur le high-tech, Fightland sur les sports de combats, The
Creators Project sur l’art numérique et Noisey sur la musique. À l’origine, il s’agit d’un magazine
irrévérencieux, “déconneur”, cynique et déroutant, qui fait figure de proue en matière de journalisme
gonzo. Parmi les sujets traités en vrac : la guerre en Syrie, la vie d’un oligarque russe, le voyage d’une
île japonaise déserte, la Corée du Nord, ou encore les effets du venin de serpent sur le corps humain. Le
ton improbable, aventureux, mais toujours pointu est la marque de fabrique du magazine.
Dans la veine du journalisme gonzo, le point de vue d’un article Vice n’est jamais neutre et objectif,
c’est tout l’inverse de la déontologie du journalisme. Le journaliste s’exprime à la première personne,
impliquant au lecteur de faire appel à son sens critique afin de distinguer ce qui est objectif de ce qui ne
l’est pas. Étant donné le point de vue très personnel, le récit comporte beaucoup d’anecdotes et de
tranches de vie. C’est un gimmick journalistique récurrent chez Vice.
Facteurs Y
Si Vice touche autant la génération Y (son fondateur dit souvent qu’il “possède la GenY”), c’est grâce à
un ton très cool et déconneur. Tout est raconté comme si c’était un pote qui s’adressait à un autre pote.
À l’heure de l’“infobésité”, Vice offre un regard très rafraîchissant sur l’actualité, en dénichant
l’improbable.
Recommandations pour les marques
Oser créer du contenu subjectif, orienté, avec une vraie prise de position et encourager
l’utilisation du “je”.
Oser le “brand journalisme gonzo” hyper subjectif et personnel.
Se concentrer sur un vrai storytelling qui raconte une histoire colorée, aventureuse, pleine de
rebondissements. Il s’agit d’abandonner le trop conceptuel et les grandes photos qui ne veulent rien
dire pour revenir à un storytelling de la nuit des temps : un héros, des épreuves, une résolution finale.
Toujours communiquer au nom d’une personne (présence du “je” dans de nombreux articles), à
travers vos propres yeux et ceux du lecteur : ses émotions, ses peurs, ses joies et ses doutes. Là est la
vraie subjectivité.
Avoir un aspect divertissant qui traverse toute la communication de marque. Autrement dit, la
notion d’entertainment dans le contenu est primordiale. L’intention est de divertir plutôt que de
convertir en masse.
Ne pas avoir peur de l’insolite et de l’improbable, même si cela repose sur quelque chose
d’insignifiant. L’important est le traitement du sujet. Il s’agit de découvrir des pépites insolites et de
les mettre en scène.
Ne pas chercher à enjoliver sa communication. Le langage parlé, très méprisé et sous-estimé par
les marques, est plus humain et spontané. La marque doit développer la création de contenus
frenchpdf.com
déroutants et pointus comme BMW qui a financé un reportage de Vice ou encore Intel et l’immense
succès de son partenariat avec Vice pour le site The Creators Project.
Et enfin, sous l’apparence d’une histoire contée, il est nécessaire d’être intraitable sur la qualité de
l’information et du contenu. »
Benoît WOJTENKA
Il y a une double analyse qu’on peut apporter au cas Vice, présenté par Benoît
Wojtenka : une interprétation du réel en mode porn et le point de vue narcissique
au monde.
frenchpdf.com
terriblement datées, à la fois par leur caractère totalement fabriqué
(immédiatement décrypté comme un leurre par la cible, qui aspire à une « vérité
full frontal », autre expression venant du X) et son absence totale d’autodérision.
L’accueil pour le moins glacial du clip de la collection automne-hiver 2013 de
Vuitton par Love Magazine, où Cara Delevingne interprète sans nuance une
prostituée attendant son client dans les rues de Paris, dans une ambiance
douteuse de glamourisation symbolique de la prostitution, est là pour nous le
confirmer.
frenchpdf.com
normes avec une femme et son addiction pour les vidéos X consommées sur les
tubes.
Le fait que les marques adoptent ce style gonzo dans leurs contenus permet de
créer une proximité immédiate avec la cible, qui retrouvera dans ce « je »
assumé une complicité réelle. C’est sur Twitter que certaines marques nous ont
montré clairement la voie, avec les Twitters officiels de marques tenus par des
« filles des RP » comme pour la marque DKNY et sa DKNY PR Girl, ou plus
connue Erika Bearman aka @OscarPrGirl, qui offrent chacune un point de vue
de la maison, avec légèreté et un point de vue subjectif totalement assumé.
Bearman a donné une vision radicale du contenu qu’elle produit
quotidiennement, lors de l’événement Flow 2012 « Les réseaux sociaux, ce n’est
pas sérieux. Ça doit être fun… Les gens ont envie de parler avec une personne et
pas avec une marque. D’ailleurs, aujourd’hui, les gens connaissent la musique
que j’aime, le type de yoga que je pratique. Tout ça donne davantage de
personnalité à la marque. »
Provenant de leur désir d’une société plus horizontale, cette proximité avec les
marques est désirée par la jeunesse, à condition que cette incarnation soit réelle,
légère et conditionnée à des médias sociaux de conversation, la communication
devient alors organique, la marque devient individu.
L’un des exemples les plus marquants de communication organique nous vient
d’Hollywood, la série Scandals, numéro 1 selon le baromètre Nielsen en octobre
2013, a été popularisée par plus de 713 000 tweets pour le premier épisode de la
saison 3, soit plus de 2 200 tweets par minute.Ce résultat impressionant est le
fruit d’une stratégie digitale rondement menée par les équipes d’ABC. À
l’inverse des autres séries télé, qui abusent de l’utilisation des faux comptes
Twitter de personnages, Scandals a choisi de miser sur la vérité, avec une
multitude de points de vue, des acteurs principaux, aux seconds rôles, jusqu’à la
maquilleuse. Tout le monde converse sur son expérience du show, et le partage
au plus grand nombre. Cette communication organique joue naturellement avec
les codes propres à Twitter. C'est devenu une référence dans l’art des hashtags,
créant le déjà culte #AskScandal et jouant avec les #holyfitz, #freehuck,
frenchpdf.com
#whoshotfitz comme de véritables outils buzz et de fluidification de la
communauté des fans.
Le gonzo brand journalisme ne se limite pas à Twitter, Vine ou Instagram, il
peut se développer demain à tous les points de contact du brand content, par sa
dimension naturellement humaine, il donne une voix audible aux marques, en
particulier dans la jungle des médias sociaux.
frenchpdf.com
à la fin.
Dans un milieu où toutes les marques se prennent au sérieux, ne s’autorisant l’humour que dans des
périmètres très balisés, Kenzo fait ici très fort en embrassant complètement un spot implacablement
ringard. Ce clip est une parodie des vidéos promotionnelles des autres grandes maisons de prêt-à-porter.
La génération Y apprécie car elle est peu sensible aux directions artistiques travaillées à l’extrême et
aseptisées.
Kenzo est une des rares marques qui leur dit : « on vous a compris et on est bien d’accord », en
reléguant très subtilement les autres maisons à une autre époque, pré-Y.
On retrouve enfin des codes que les Y aiment : un traitement graphique délicieusement vintage, un
perfectionnisme qui rappelle American Psycho et l’humour décalé mais surtout l’open space avec sa
win-attitude que le Y ne supporte plus.
Quelques éléments radicalement absurdes ôtent tout doute au public sur le caractère second degré de la
vidéo. La photographie et le stylisme léchés laissent tout de même la part belle aux coupes et aux belles
matières des vêtements.
Recommandations pour les marques
L’humour est un élément qui manque cruellement aux marques de luxe, trop préoccupées par la volonté
d’être aspirationnelles et craignant qu’un côté drôle et sympathique décrédibilise leur essence luxe.
Pour autant, il est possible pour une marque de luxe d’être à la fois rafraîchissante et hautement
désirable, comme l’a prouvé Lanvin en faisant danser Alber Elbaz, entouré de mannequins longilignes,
sur du raggaeton-house.
À l’inverse, une communication trop léchée peut être perçue comme hypocrite : nous, Y, attendons
aujourd’hui qu’une marque soit sincère et transparente, humaine avec ses faiblesses. Nous savons bien
que le monde de Watermarked n’existe pas.
La perfection graphique n’est plus un but à atteindre. Ou alors il faut la contrebalancer par des éléments
qui montrent que votre marque ne se prend pas trop au sérieux : humour, références Y sans clichés, ou
message alternatif.
Et amusez-vous ! »
GEOFFREY BRUYÈRE
frenchpdf.com
câble sur AMC) et les sorcières féministes et glamour d’American Horror
Story (plus de 5 millions de téléspectateurs pour le début de la saison 3 sur
FX) sans parler des arrivées prochaines des reboot télévisuels de
l’Exorciste, Dracula, American Psycho, mais aussi au cinéma avec les deux
champions de la rentabilité en 2013 The Conjuring et Insidious 2 de James
Wan. Le succès de ses créations s’explique par leur capacité à séduire un
nouveau public, en particulier féminin, appartenant à la génération Y, alors
que le genre horrifique ne dépassait pas le cercle des geeks masculins. Le
territoire de la peur commence à être exploré par le secteur de la mode,
avec une première expérience réalisée par Marc Jacobs, avant Halloween
2013, avec une vidéo directement inspirée de la saga horrifique Paranormal
Activity, intitulé judicieusement « Paranormal Activity Caught on Camera »
où l’on voit un spectre se baladant dans l’espace accessoire (chaussures et
sacs) de la marque, une tendance à surveiller donc.
À la différence de l’effroi, l’expérience de dérision, l’esprit LOL est
certainement le registre le plus facile à activer pour créer une empathie
immédiate avec cette cible, ce lien est d’autant plus fort que ce registre de
communication a la particularité de faire naître des ovnis créatifs qui ne
ressemblent pas à des publicités.
Le luxe, la mode et la beauté ont développé un LOL compatible avec leurs
ADN, en le gommant de toute forme de vulgarité et en lui insufflant une énergie
poétique tant dans la narration, que dans un souci esthétique de tous les instants.
Pour garder son principe de distance, la maison de luxe ou de mode, se moque
rarement d’elle-même, préférant avec malice concentrer son ironie douce sur son
créateur (Karl Lagerfeld est une expérience vivante de LOL Légèreté, depuis les
années 1990) et ses clients fantasmés, comme le montre brillamment Geoffrey
Bruyère.
Deux belles maisons se sont particulièrement illustrées dans l’exercice de la
LOL Légèreté, construisant dans le temps une véritable écriture singulière en
communication, il s’agit de Lanvin, porté par un Albert Elbaz osant se moquer
de lui-même et des travers du marketing de la mode. L’histoire commence avec
les films internet accompagnant la collection automne-hiver 2011, où Elbaz
casse son image d’artiste lunaire romantique en nous offrant une danse endiablée
avec ses mannequins sur I know you want me de Pitbull. En 2013, le créateur va
frenchpdf.com
plus loin, incapable de se rendre au shooting de la campagne printemps-été du
fait de l’ouragan Sandy, il enregistre un Skype plein de second degré où il se
pâme avec des « I’m in a dream » ou « very, very poétique » devant chacun des
éléments de sa collection shootée, qu’il surveille de loin. La deuxième maison
est Longchamp, qui depuis 2011 avec ses campagnes construites autour de l’idée
du mouvement créateur, avec toujours plus de grain de folie, avec un fil rouge
avec le mannequin Coco Rocha qui se transforme tour à tour en danseuse new-
yorkaise avec un chien géant en bandoulière, puis fin 2013, en « King Kong
Woman » dans le « Cocotown », un LOL Légèreté en forme d’ode stylée
optimiste.
frenchpdf.com
passé.
Pour cette saga, un site introspectif et interactif est créé. Ces web-séries sont diffusées sur le net et sur
le grand écran. L’ensemble des 9 épisodes a rassemblé plus de 20 millions de vues sur YouTube en
novembre 2013.
Facteurs Y
Le Y a un goût pour les codes spécifiques des marques et des produits de luxe. À vrai dire, c’est un
“luxophage”, un “geek du luxe” et son obsession du code résonne avec sa culture geek. Aujourd’hui, le
digital permet aux marques de répondre à ce besoin fondamental.
Les codes de la marque doivent s’inspirer des codes narratifs propres au Yers :
code de forme “le film” : multiplication des séances, inspiration du docu-fiction, bande-son. On
apprécie en particulier le graphisme qui mélange documentaires, images d’archives à des animations
très modernes, le tout sur un fond sonore composé d’une voix nous racontant très pédagogiquement
l’histoire de la marque et d’une musique électro.
code de storytelling : à travers neuf épisodes, Inside Chanel se transforme en une série télévisée,
format le plus désirable aux yeux des Yers.
La mise en exergue des codes entraîne l’addiction sans en tuer le mystère. Elle est un formidable
carburant narratif, constructif en termes de brand content. La saga Inside Chanel charme les Yers en
leur offrant une relecture moderne des archives de la maison avec des codes en prise avec la génération
Y.
Enseignements pour les marques
Aujourd’hui, il s’avère indispensable pour une marque de définir “à l’image de ce qui est fait par la
Maison Chanel” une véritable encyclopédie de codes communicables auprès de tout public. Pour éviter
le piège muséal, la marque doit savoir faire un mix and match entre passé et contemporain. Le passé est
“code”. Le contenu, lui, se reflète par les différentes formes narratives digitales.
La veille indispensable et permanente de la culture digitale d’aujourd’hui permet aux marques de
répondre au besoin du public et de rester ainsi séduisant et désirable.
Christel VAN ISACKER
Cher lecteur, vous l’avez compris, nous sommes ici bien au-delà d’une
tendance, mais devant une clé de lecture fondamentale de la génération Y, soit
son obsession pour les codes clairement établis, craftés par les marques. Le code
rassure, le code crée un lien de connivence immédiat, le code est histoire comme
l’a analysé Christel Van Isacker. Enfin le code est un signe distinctif envoyé à la
communauté des connaisseurs de marque, ceux qui ne se retrouvent pas devant
ses marques jouant la présence logo à outrance, même déguisé sous des
partenariats artistiques.
frenchpdf.com
L’obsession du code est geek
Cette obsession du code est clairement connectée à la culture du geek qui a su
s’infuser au plus profond de nos sociétés. Le geek d’internet, au-delà de son
érudition technologique, aime s’adonner à son sport préféré, le délire
interprétatif de petits détails curieux d’une œuvre, utilisant une grille d’analyse
totalement personnelle, une grille d’ego plutôt qu’universitaire, laissant aux
autres l’analyse globale de celle-ci. Cela laisse place à une conversation
communautaire sans limite, où chacun a la possibilité de bâtir un raisonnement,
pour au final se distinguer par son sens aiguisé du décryptage, pour au-delà son
savoir-faire est là pour faire surgir des complots virtuels. Cette folie analytique
du code est le sujet du fascinant documentaire Room 237 de Rodney Ascher. Ce
dernier illustre cinq interprétations psychanalytiques, cinq théories de
« spécialistes » du chef-d’œuvre de Stanley Kubrick, Shining, véritable boîte de
pandore de codes, fascinant « Da Kubrik Code » (motif hypnotique de la
moquette, les jumelles, chiffre 237, la silhouette de l’hôtel Overlook, déco style
bucheron, la machine à écrire Adler, le jardin, les tapis Navajo…), qui se sont
engouffrés dans l’absence totale de discours analytique du maître, qui ne s’est
jamais prêté à l’exercice de l’auto-commentaire. Shining n’est pas la seule
création à susciter ce culte analytique du code, plus récemment, la série Lost, ou
le film Inception ont provoqué la même hystérie analytique.
frenchpdf.com
passage égratigne son concurrent frontal, Dior J’adore, qui avait osé utiliser
l’icône dans son dernier film publicitaire. Cette réussite unique n’est en rien due
au hasard : rappelons que les premières semaines de l’arrivée de Karl Lagerfeld
chez Chanel ont été marquées par la complète immersion de celui-ci dans les
archives de la rue Cambon.
Chanel, comme bien d’autres marques (Dior, Vuitton, Hermès, Cartier,
Burberry, Saint Laurent…) a réalisé le tour de force, de transformer peu à peu
cette génération Y, en geek du luxe, fille comme garçon, les hommes étant moins
porté sur le symbolique, mais plus dans la déconstruction analytique et
économique des vêtements clés de son vestiaire (éléments constitutifs d’une
chemise, détaillé dans chacune de ses parties constituantes, avec en point
d’orgue le coût réel facturé au client).
La génération Y invente un nouveau client du luxe, qui marie les cultures geek
et pop, naturellement obsédé par les codes de la marque, qui se retrouvent tant
dans sa communication et ses boutiques, que sur l’objet. Nous avons appelé ce
client « luxophage », à l’image des passionnés du cinéma « cinéphages ».
frenchpdf.com
chez Veuve Clicquot autant de codes parfaitement orchestrés à tous les niveaux
(communication, retail, événement…) par les marques. Pour les Y, cette
répétition à l’infini de ses attributs, avec plus ou moins de réinvention graphique,
est communication.
La notion de code de marque n’est pas figée, elle peut s’enrichir dans le temps
par la simple magie d’une communication réussie. Nous pensons bien sûr au
succès de la Petite Robe Noire de Guerlain, qui s’est approprié une figure clé du
vestiaire féminin dans l’inconscient collectif planétaire, alors que Guerlain n’est
en rien un créateur de mode : c’est un véritable hold-up de code à la barbe des
grands créateurs ! La marque a même créé le buzz en faisant découvrir l’univers
de la Petite Robe Noire en avant-première pendant la Fashion Week parisienne.
En même temps quoi de plus percutant et de plus naturel pour un parfum qui tire
toute son ADN de l’univers de la mode ? Et par l’intermédiaire d’un rouleau
compresseur publicitaire, infusé de codes narratifs Y (son univers graphique, le
parti pris dessin animé, le caractère du féminin représenté… qui ne s’interdit
rien) parfaitement bien accueilli par les Y. Autre travail remarquable de création
de code, avec les communications de la marque Vichy. Depuis 2011, la marque
met en scène systématiquement et en majeur le V symbole d’un optimisme
beauté. Notons enfin que la recherche des codes n’est pas l’apanage des grandes
maisons, les jeunes maisons sont dans cette même quête, en particulier Maxime
Simoens (LVMH) littéralement fasciné par le pied-de-poule, qu’il met non
seulement dans ses collections, mais aussi dans ses collaborations (cf. la
chambre décorée par le créateur de l’hôtel des Sources de Caudalie) ; sans
oublier le logo de sa marque, qui réinterprète le code ultime : le code-barres !
Dans un souci de pragmatisme, nous avons imaginé deux outils simples de
pilotage des codes d’une maison, intégrant des inspirations extérieures, dans le
but d’optimiser la communication auprès des Y. Nous les avons appelés les « 10
règles d’or d’un code » et la « Marelle des codes Y ».
frenchpdf.com
Régulièrement ces intuitions finissent mal et disparaissent aussi rapidement
qu’elles sont apparues. Pour tenter d’éviter ces erreurs de sélection, nous avons
analysé des milliers de codes de marque, afin de définir les 10 règles d’or d’un
code de marque. C’est une règle d’analyse immédiate et impitoyable, que voici.
Outil n° 13 – Les 10 règles d’or d’un code de marque
La « Marelle des codes » est inspirée du jeu de la marelle de notre enfance, il est constitué de trois
parties, invitation au métissage des codes, il est un carburant propre à créer de nouvelles histoires, tout
en restant cohérent avec l’ADN de marque et juste avec les fondamentaux culturels de notre cible.
frenchpdf.com
La première partie est la Terre, elle regroupe les codes tangibles d’une marque, ses codes
graphiques et plus rare, ses codes narratifs (ex : les leçons de séduction d’Aubade, l’Odyssée
pour Cartier). C’est un véritable droit d’inventaire particulièrement douloureux pour les
responsables de marque qu’il amène à faire des sacrifices, à ne garder que l’essentiel, pour
concentrer ses investissements sur ses atouts. Cette liste n’est pas définitive, elle évolue avec le
temps, des codes peuvent sortir, des anciens être réinjectés et des nouveaux arriver.
Le centre de la marelle est lui en évolution permanente, il représente un cahier de tendance,
qui référence à la fois les codes Y déjà exploités par la marque et d’autres codes inspirants,
infusant potentiellement dans tous les moyens de communication.
La troisième partie est le ciel : le lieu où sont rassemblés les fondements culturels qui inspirent
la marque au quotidien, intelligibles pour les fans de la marque, catalyseur de singularité face à
la concurrence. C’est la danse pour Repetto, les arts équestres pour Hermès, la littérature
américaine et particulièrement l’œuvre de Jack Kerouac (le nom de la marque provient d’un des
personnages des mythiques journaux intimes de l’auteur) pour les lunettes Warby Parker –
parfaitement mise en scène dans le flagship de la marque à Soho, plus proche d’une
bibliothèque pointue que d’un magasin de lunettes. De nouvelles cultures peuvent être
introduites, bien après les origines, la réussite de Givenchy dans son métissage avec le
mouvement hip-hop est exemplaire. A contrario des cultures peuvent se greffer à des marques
sans leur assentiment, comme par exemple l’influente culture des cités sur Lacoste ; la naissance
de la marque fille Lacoste Live étant vue par de nombreux observateurs comme une
échappatoire à cette affiliation.
frenchpdf.com
deuxième étage, appelé « Crafted for Lexus » où sont exposées des entreprises
locales amies de Lexus, comme les chaussures Blue Over, ou les meubles Bsize,
ou encore les vêtements Oslow, qui ont tous crée pour l’occasion des séries
spéciales inspirées par le fleuron du groupe Toyota ; la marque est ici tout à la
fois agent culturel et muse culturelle.
Pour aller plus loin dans la découverte des éléments culturels des marques,
nous vous invitons à lire Brand culture de Daniel Bô (Dunod, 2013), qui
décrypte précisément comment la marque s’inscrit comme agent culturel.
frenchpdf.com
pendant son entretien d’embauche : « Strikes a pose » ;
au bureau : « Working 9.5 » ;
à la réception : « Ring ring ring goes the telephone » ;
en boutique : « Express yourself » ;
au bar martini : « Shake it » ;
au show room : « Material Boy ».
Cette opération se décline en un compte Twitter @IWork4DG, sur une chaîne YouTube et à travers un
jeu sur Facebook.
Facteurs Y
La génération Y est à la recherche perpétuelle de valorisation de sa marque personnelle « me
branding » !
À travers cette web-série, la griffe italienne Dolce & Gabbana a su séduire les Yers par :
la LOL Légèreté : le ton comique du blogueur, les situations, la musique, etc. ;
le blogueur « Bryan Boy » non pas une égérie mais un employé starifié ;
le dispositif média social : Twitter (@IWork4DG), Chaîne YouTube, the Dolce & Gabbana Luxury
Magazine online : www.swide.com, Bryan Boy blog (www.bryanboy.com) ;
le participatif : dispositif Facebook pour élire la vidéo la plus appréciée.
Enseignements pour les marques
Passer d’un brand content narcissique de marque, à un brand content mis au service du désir
de starification du Y. Enfant de la transparence digitale, le GenY est un control freak de son image.
Paradoxe ultime, il veut être connu sans devenir une star : le « me branding ».
Utiliser le brand content pour rendre désirable la marque employeur. À l’image de Dolce &
Gabbana, la mode invente, grâce à un brand content starifiant ses employés, un atout puissant pour
recruter des Y au sein de l’entreprise. »
Christel VAN ISACKER
Cette tendance est symptomatique de notre époque, elle associe une catégorie
d’individu incarnation parfaite de la « Me, Me, Me Generation » alias le
blogueur Y passant maître dans l’égotisme, via la mise en scène de son style de
vie et de l’autre côté le brand content, qui par essence est totalement concentré
sur sa marque et ses produits, soit un mélange détonnant de narcissismes,
parfaitement assumés.
frenchpdf.com
en leur garantissant une plus grande visibilité à leurs blogs, par des budgets
publicitaires. En contrepartie, les marques ont gagné une crédibilité digitale, un
gain en sympathie, sans pour autant menacer leur statut. Pour celles qui
s’offraient les meilleurs plumes de la blogosphère, elles se construisaient même
en accéléré une voix désirable dans les médias sociaux.
Ces mouvements de fonds ont pérennisé la blogosphère comme média
publicitaire, sans pour autant décrédibiliser les blogueuses auprès de leur public
– à condition, que celles-ci ne tombent pas dans le piège de l’autosatisfaction et
de l’absence d’humilité. La blogueuse pérenne est quelque part l’exact opposé
d’une marque de luxe. Au moment où elle fabrique par son contenu une distance
avec son public, elle signe l’arrêt de mort de son business et les marques qui
seraient complices de cet éloignement, en subiraient des effets collatéraux, de la
part de ses fans fidèles.
La blogosphère est désormais entrée dans un âge de raison publicitaire, marqué
par deux types de blogueurs.
frenchpdf.com
journalisme pour le « je » en majeur et surtout en développant un univers
photographique à la fois de qualité (indispensable pour séduire les annonceurs)
et personnel. « Derrière chaque grande blogueuse, se cache un grand street style
photographe », cet adage, est un bon résumé des grandes success stories de la
blogosphère. Kayture & James, Betty (du blog de Betty) et Mathieu Lebreton,
sans oublier les mythiques Garance Doré et Scott Schumann, démontrent
qu’avoir un compagnon photographe est un atout déterminant dans la vie d’une
blogueuse, puisqu’il permet par ses clichés d’illustrer le sacro-saint lifestyle de
« l’influente », il la glamourise sans pour autant nuire à sa proximité, mais plus
encore il lui donne une patte, une cohérence.
Une partie du succès des blogueuses s’explique par la tendance que nous avons
mise en avant dans notre première grande partie : le droit à la célébrité. La
lecture quotidienne de leurs blogs, est une forme de prolongement digitale et
interactive du film Bling Ring de Sofia Coppola, soit une promesse claire :
« Ouvrez le journal intime d’une fille comme moi, vivant dans le monde rêvé
des red carpets, des soirées luxueuses de marques de luxe, portant les plus beaux
vêtements et accessoires de la planète mode ». Nous sommes donc en plein
phénomène de transfert, bien avant le contrat de lecture originel d’un blog :
trouver un avis libre, poil à gratter, nullement influencé par la publicité.
frenchpdf.com
Toujours dans cette logique d’enracinement local de la blogueuse, Louis
Vuitton a fait tourner un film digital totalement surréaliste à Kristin, à l’occasion
de l’ouverture de la boutique Vuitton à Gstaad (2012), qui semble tout droit
sortie de l’imagination de David Lynch. Seule à l’écran, elle y joue pleinement
son rôle de « mini-égérie ».
Kristin Bazan joue également les ambassadrices d’un soir, le temps d’un
événement mondain, comme avec Lancôme pour le lancement de la ligne de
maquillage (2013) d’Albert Elbaz, où la belle ne manqua pas de poser de
nombreuses fois au bras du créateur, fournissant à son blog, un parfait contenu
mondain et viral.
Enfin, en écho avec le cas exposé, autour du programme Bryan Boy & Dolce
& Gabbana (maison qui a toujours considéré les blogueurs comme de véritables
créatifs et pas simplement des hommes-sandwich), Kayture officie en tant que
reporter pour Mango, sur le site Mango Insider, où l’on peut trouver des
contenus autour des Fashion Weeks internationales, écrits par l’élite de la
blogosphère fashion.
Le cas Bazan, totalement Y, démontre à quel point les blogueuses et le brand
content font bon ménage. Les deux associés rendent le contenu remarquable,
singulier et tout simplement humain, à condition de privilégier la pérennité à
l’expérimentation.
frenchpdf.com
French »), elle a intégré minutieusement dans ses contributions, une énorme
dose de proximité, frôlant la fausse naïveté, comme avec son mythique compte-
rendu du shooting de la campagne Net-A-Porter, tout en fraîcheur et en
modestie, avec son style écrit inimitable, ponctué de « Patriiiiick » (le grand
photographe auteur de la campagne Patrick Demarchelier), et se terminant par
cette expression « ils [Net-A-porter] m’ont offert une campagne ».
Au cœur de notre tendance, Garance Doré a joué un rôle original dans
l’univers du brand content, en étant au cœur du lancement digital du groupe
Keiring. Véritable marraine 2.0 du groupe, elle a joué les intervieweuses
candides face à François-Henri Pinault, lui permettant d’exposer en toute
convivialité, les fondamentaux stratégiques de Keiring.
frenchpdf.com
Les points clés de la tendance Starification du blogueur Y par le brand content
La marque personnelle d’une blogueuse est à l’opposé d’une marque de luxe, elle nourrit sa
désirabilité de sa proximité avec son public.
L’expérience recherchée d’un blog de mode est un prolongement digital du film de Sofia
Coppola Bling Ring, soit vivre par procuration le frisson d’un style de vie « red carpet »… style
de vie inaccessible par la blogueuse sans l’aide des marques de luxe et de mode.
Le brand content de marque est à la fois le meilleur allié et le pire ennemi de la blogueuse, il
peut la faire devenir une véritable célébrité (cf. Garance Doré), comme entacher sa crédibilité ou
lui faire commettre le péché mortel d’orgueil.
Le blog mode est un couteau suisse marketing, il est tour à tour vecteur de buzz, arme RP, égérie
digitale, brand journaliste et enfin créateur de collection capsule.
Une nouvelle catégorie de blogueurs de mode se développe dès 2013 : les blogueurs
entrepreneurs, qui créent leur propre marque, avec l’appui de grands groupes, ou sous forme
indépendante, totalement libres et inféodés aux marques.
frenchpdf.com
réflexion. Hermès permet donc à la GenY de choisir son niveau de concentration en termes de temps
ou de difficultés.
La recherche du lien : le jeu, lieu de socialisation, permet « d’être ensemble », de partager un
moment. Malgré la virtualité du jeu, les relations entre le joueur et la marque sont fortes. C’est une
relation qui possède sa propre sincérité. Le jeu permet de vivre une expérience avec la marque et
génère des émotions positives : même si la marque reste maître du jeu, ces souvenirs et émotions
seront liés et associés à la marque.
L’échappée belle : dans un monde où tout est rationalisé, la GenY a besoin de « romancer » ce
monde jugé ennuyeux. La GenY veut enjoliver la vie quotidienne : tout va être prétexte à se raconter
des histoires, à travers les réseaux sociaux et les jeux. Le jeu permet de produire des illusions, de
détourner la rationalité : Hermès surfe sur cette tendance et offre les moyens à la GenY de rêver, de
s’échapper du monde réel.
L’engagement ludique : les jeux proposés par Hermès permettent finalement de créer
l’engagement, c’est une soumission librement consentie. En effet, l’internaute est d’abord acteur du
jeu, il participe en quelque sorte à l’action de communication (ce qui favorise l’engagement envers la
marque). Ensuite, l’internaute se sent libre, il choisit finalement d’être exposé ou non : jouer ou ne
pas jouer. L’individu a l’impression d’être auteur de certaines décisions, d’être responsable. La
gamification permet donc de construire une relation privilégiée avec les joueurs, d’être associé à une
émotion, à un souvenir positif, de léguer une part de rêve. Le jeu permet une échappatoire au monde
réel tout en créant de l’engagement envers la marque.
Enseignements pour les marques
Dans un monde où la GenY demande de la gamification, il est important que le jeu :
ne soit pas uniquement basé sur le produit et sollicite les qualités du joueur pour créer de
l’engagement. Il faut que le joueur se sente acteur du jeu ;
soit poétique, esthétique et design pour correspondre aux attentes qu’a la GenY envers le luxe ;
soit en cohérence avec les codes et l’ADN de la marque pour justifier son authenticité ;
soit accessible : en temps et difficulté. Cette gamification permettra à la marque de créer un lien
favorable avec son public, agrémenté de souvenirs et d’émotions positives, d’être une échappatoire
et d’insuffler du rêve pour le consommateur. »
Estelle GIRAUDEAU
frenchpdf.com
Encore aujourd’hui, à quelques rares exceptions (cf. Hermès parfaitement
guidé par une de ses valeurs piliers, l’enfance) le luxe s’inscrit dans une pensée
unique du jeu, par l’utilisation systématique du registre nostalgique. Ainsi, le jeu
vintage, madeleine de Proust potentielle de la génération Y, ne serait que la seule
voix politiquement correcte possible.
Le retrogaming
Le retrogaming est aujourd’hui tendance, bien au-delà de la communauté geek,
il consiste à rediffuser les premiers jeux vidéo, en gardant leur esthétique
originelle, celui des consoles 8 bits, des années 1990. Lacoste à l’occasion de
son 80e anniversaire a mis en ligne avec un grand succès, une série de 4 jeux
totalement addictifs, inspirés des grands mythes de l’histoire du videogaming
(Pac Man, Pong, casse-briques…) avec pour héros les codes de la marque (le
Crocodile, le Polo Lacoste, la Raquette). Ferrari est coutumière de l’exercice,
avec sa série de jeu d’arcade sur mobile, comme « Scuderia Ferrari Race 2013 »,
reprenant l’esprit du jeu mythique Pole Position, de Namco, sorti en
1982. Longchamp s’est essayé à l’exercice, pour sa campagne « bigger than
life », avec toujours un jeu vidéo rétro intitulé « Quadritown » où la femme
Longchamp joue à King Kong dans les rues de Paris, New York, ou encore
Shanghai. Le but du jeu ? Attraper le plus d’hommes en parachute à l’aide d’un
sac Quadri de la nouvelle collection automne-hiver 2013 de Longchamp.
frenchpdf.com
La poésie au service de la gamification
Il serait condescendant de résumer les jeux vidéo à une collection
d’expériences d’arcades primaires. Ces dernières années ont montré une prise de
conscience créative du secteur, s’imposant comme un nouvel art, au même titre
que le cinéma, ou la fiction télé. Des titres totalement disruptifs, ont montré la
voie, vers un art vidéo ludique empreint de maturité et de poésie, à l’image de
« The Journey » (réinventant le lien social du jeu en réseau, au nom de
l’humanisme) ou plus proche de nous, le bestseller « Last of Us » (redéfinissant
l’attachement du joueur à son personnage). Stratégiquement audacieuses, des
marques ont suivi le même chemin.
frenchpdf.com
dispositif transmédia « Scarecrow », dont la mission était de faire partager au
public, son combat contre les pesticides et autres toxiques dans notre
alimentation. Scarecrow narre les aventures d’un épouvantail, ennemi de la
corporation du mal « Crow Food », qui vise le monopole de la production et la
distribution alimentaire sur la ville de Plenty, par l’utilisation à haute dose
d’hormones synthétiques de croissance et autres antibiotiques illégaux.
Ce dispositif transmédia s’articule autour d’un court-métrage (vu plus de
7 millions de fois sur YouTube) sombre, réalisé par les Moonbot Studios, sur la
reprise de la chanson « Pure Imagination » tirée du film Charlie et la
Chocolaterie de 1971, chantée par Fiona Apple, et de son prolongement ludique,
via une application, qui nous fait partager les combats de Scarecrow à travers 4
niveaux, qui permettent d’accéder à un coupon prêt à consommer dans la chaîne
Chipotle.
Le cas Chipotle montre la force d’engagement du jeu sur le public Y. Le jeu a
la capacité, presque magique, de rendre intelligible et amusant ce qui semble
difficilement communicable : une grande complication horlogère, la mécanique
cellulaire influencée par une solution cosmétique, une croisade de marque, etc.
frenchpdf.com
vente magasin
Burberry : 121 Regent Street, flagship, Londres, 2013
« Le nouveau flagship de Burberry, inauguré au 121 Regent Street à Londres, donne vie au monde
digital de la maison grâce au contenu multimédia immersif qui fait découvrir pour la première fois aux
consommateurs toutes les facettes de la marque. Cette révolution appelée « Burberry World Live »,
installée sur plus de 2 500 mètres carrés, entremêle expérience shopping avec événementiel et digital.
Burberry donne du sens au spectacle : un sens commercial.
Facteurs Y
Wow technologique : le Y adore le brand content digital. Ici, il est au cœur du magasin, un
dispositif qui se fait rare chez les concurrents. En étant à la pointe de la technologie, prenant
exemple sur Apple, Burberry a prouvé que le luxe pouvait être technologique. Et cette digitalisation
du magasin séduit incontestablement la GenY.
Le code : force d’inspiration scénographique : on retrouve un mélange subtil des codes anciens (la
marque a tout de même 157 ans !) et nouveaux de la maison à travers une mise en scène
sophistiquée. La technologie de la boutique permet par exemple de donner aux visiteurs l’impression
qu’il pleut à l’intérieur de la boutique : une idée pertinente pour une marque dont l’héritage british et
trench-coat la lie intimement à la météo.
Smart shopping : il ne peut pas y avoir de vente sans contenus. Le consommateur étudie l’histoire de
la marque, la qualité, déconstruit la science du produit. Le shopping devient ainsi un loisir culturel.
En développant une dimension lifestyle (à travers la musique notamment), en permettant une
meilleure connaissance des produits et en favorisant l’innovation digitale permanente, Burberry
donne du sens au brand content. Celui-ci favorise l’acte d’achat et crée de l’engagement. La
recherche de “value for money” du Y a favorisé l’émergence du magasin brand content centric.
Service sur mesure : c’est un service plus intime qui s’appuie pour cela sur la technologie (la
signalisation numérique sur mesure à tous les étages, l’identification par radio fréquence
intelligent/RFID). À cela s’ajoute, la suppression des caisses au profit des vendeurs équipés de
tablettes tactiles permettant d’effectuer directement l’encaissement, mais aussi de conserver
l’historique des achats et les préférences de chaque client.
Enseignements pour les marques
Le triomphe du luxe vu par les Y, le « Phygitalism » : donner un cap au « phygitalism », c’est
mettre le contenu digital au service de la vente par un jeu à 3 bandes : lifestyle, ludique,
pédagogique. Le luxe est digital mais aussi technologique. La haute technologie s’inscrit dans le
luxe. Burberry invente une nouvelle génération de boutiques qui mixe les nouveaux codes afin de
créer une expérience singulière qui ne soit ni un « me-too » digital, ni un magasin classique enrichi.
Le Y évoluant dans un monde digital parfait réclame désormais un niveau de perfection similaire
dans le monde réel.
L’entertainment stratégique : une nouvelle vision du brand content inventée par Burberry : un
brand content vraiment stratégique qui transforme le magasin.
Le brand content digital sur le point de vente physique est mis au service de la vente en magasin. »
LAURENT-JULIEN MONFILS
frenchpdf.com
Le brand content : meilleur allié du vendeur en magasin
Le point de vue de Laurent-Julien Monfils est original, en effet l’écrasante
majorité des analyses lors du lancement du flagship de Regent Street de
Burberry se résumait à une seule idée : le magasin le plus connecté du monde.
La vision de Burberry est bien plus subtile, elle pose de notre point de vue les
bases du brand content stratégique, au-delà de la vision donnée par Daniel Bô
(qui distingue le brand content stratégique du brand content classique, par deux
éléments fondamentaux : sa pérennité et par le fait qu’il soit condamné à terme à
être produit directement par les marques elles-mêmes et non plus sous-traité à
des agences). Le contenu digital habilement intégré dans l’intégralité des étages
du 121 Regent Street ne se limite pas à autocélébrer la culture connectée de
Burberry, il est mis clairement au service de la vente immédiate du produit. Il
démontre la valeur du produit, sans arrogance, par un travail de déconstruction
des savoir-faire artisanaux de la maison, qu’il s’agisse du département mode,
avec ses miroirs écrans présentant avec panache ses défilés, complétés par une
série de programmes courts sur la confection réalisée par les ateliers, ou encore
au rayon horlogerie où des hologrammes 3D accompagnent systématiquement
les montres de la marque, faisant pénétrer de manière magique le visiteur au
cœur des garde-temps, réalisant un travail de persuasion fondamental, quand on
connaît la légitimité et la désirabilité de l’horlogerie suisse.
La maturité digitale de Burberry transforme le très à la mode brand content en
meilleur allié de la force de vente en magasin, qui doit trouver sa place dans ce
nouveau contexte informationnel.
Le pionnier Net-A-Porter
Mais, le premier acteur du luxe à avoir associé vente et brand content n’est pas
Burberry. Il s’agit naturellement d’un pure player, Net-A-Porter qui, dès son
origine, a placé le contenu lifestyle au centre de l’expérience de vente digitale, en
exhaussant le fantasme partagé par tous les grands magasins de la planète : le
magasin magazine.
Le magasin digital Net-A-Porter est construit autour d’une colonne vertébrale
frenchpdf.com
de contenus, qui porte le nom de The Edit, un magazine interactif multi-écrans
hebdomadaire de 35 pages, qui n’a rien à envier aux magazines de mode
traditionnel. Tout y est présent : un éditorial inspiré (signé Lucy), une
iconographie qui fait rêver, une mise en scène des contenus hybrides autant
inspirée du web que de la presse écrite, des interviews intimistes de célébrités,
des décryptages de style, tendance, et codes qui transmettent un savoir style
solide en quelques minutes. Mais attention, rien n’est placé là gratuitement, tout
est lié à la vente d’un produit, de façon naturelle, quasi organique, renforçant par
la qualité du décryptage journalistique, le smart shopping de la cliente ou du
client. Dans le cas Net-A-Porter, le journaliste ou le brand journaliste se
transforme en une nouvelle force de vente, en totale adéquation avec les
spécificités du commerce multicanal. Cela fait grincer des dents, mais les
étudiants futurs journalistes Y l’ont déjà parfaitement intégré.
Le contenu de Net-A-Porter ne se limite pas au magazine The Edit, il se
décline également en une série de web émissions, toujours aussi connectée à la
vente de produit de luxe, comme « Fit and Fashion » (ou l’art du fitness pour
rentrer dans les belles robes achetées sur le site ; une forme de service après-
vente, proposé par le distributeur, toujours aussi généreux pour combler les
désirs de ses clientes), « Runway to real life », sans oublier les indispensables
leçons d’élégance masculine de Mr Porter.
Net-A-Porter a réinventé le retail de luxe, en plaçant le contenu lifestyle au
centre, il est aujourd’hui un repère incontournable, dans l’expérience luxe des Y
les plus fortunés. En 2012, Karl Lagerfeld l’a compris et a accordé à Net-A-
Porter l’exclusivité du lancement de sa marque Karl.
Net-A-Porter, Burberry, nouvelles normes du retail contemporain ? Hélas, la
réalité est bien différente, l’étude WWD & Berglass, d’octobre 2013, sondant les
acteurs retail aux États-Unis (des grands magasins, aux responsables des
magasins de luxe, en passant par les vépécistes) témoigne d’un profond retard
tant dans l’utilisation commerciale du brand content, que dans la connaissance
de la cible GenY.
Ainsi, seulement 37 % d’entre eux utilisent en magasin du « branded
frenchpdf.com
entertainment », et même 27 % ne pensent pas en faire dans les deux prochaines
années ! Le constat pour la cible Y est en trompe l’œil, 93 % pensent que la cible
des Y est importante pour leur business actuel, pourtant 60 % ne conduisent pas
d’étude spécifique sur cette cible, alors qu’ils sont 50 % à ne pas savoir que les
Y dépasseront le pouvoir d’achat des baby-boomers d’ici 5 ans. Il y a encore du
chemin…
frenchpdf.com
sociaux. Ils peuvent ainsi devenir des ambassadeurs de la marque. L’application se base sur la
colorimétrie des photos et des baskets, positive ou négative, extrêmement désirable pour la GenY.
De la personnalisation à la possession virtuelle : cette application pousse encore plus loin la
personnalisation. La customisation de la paire de baskets grâce à Instagram suivie du partage sur les
réseaux sociaux est l’occasion pour le consommateur de s’approprier sa création qui est un vecteur
identitaire et reflète ses aspirations. C’est une manière de posséder autrement tout en assurant la
promotion de la marque.
Enseignements pour les marques
La plateforme Nike Photo ID offre :
le meilleur du digital au service d’un retail créatif, playful et social ;
l’unicité de chaque création qui stimule le désir d’achat et répond à l’envie de se différencier à
travers le principe de “color blocking” entre photo et basket ;
un buzz : une collaboration entre deux “super brands”, totem parfaitement dans l’air du temps ;
l’appropriation de l’objet et la mise en valeur des aspirations du consommateur via le partage et la
création sur Instagram et sur les autres réseaux ;
un aspect social extrêmement fort suscité par le leitmotiv “creative sharing” des Yers, très
communautaires sur la Toile. »
Aristide DOUROUX
frenchpdf.com
terrain d’exploration personnelle, afin de trouver ses premiers codes personnels,
mix and match des codes de marque.
frenchpdf.com
consécration d’un idéal technologique attendu mais peu compris. Ce qui semble en effet susciter le
désir n’est pas seulement l’appropriation d’un tel produit et son design, mais bel et bien son cœur
algorithmique, conçu pour permettre à ses utilisateurs de faire de nombreuses actions plus simplement
(se diriger, filmer, appeler, partager, obtenir des informations en réalité augmentée…).
Facteurs Y
La génération Y s’est construite inconsciemment autour des principes fondamentaux de l’algorithme et
de ses applications dans tous les domaines. De l’informatique traditionnelle aux applications
smartphones, de l’ascenseur à la machine à café en passant par l’air conditionné, cette génération se
confronte depuis longtemps à l’algorithme : ses instructions, ses instances et ses résultats (résolution
d’un problème donné). Ce fonctionnement logique (constitué d’étapes, de blocs, de sous blocs et de
choix) a engendré un raisonnement nouveau et des usages plus hiérarchisés.
L’algorithme évolue avec son temps, s’inspire de ce qui est fait, de la nouveauté et de ce dont
l’utilisateur a besoin afin d’apporter des réponses plus individualisées, évidemment plus efficaces. Dans
ce sens, la complexité de l’algorithme et du traitement de l’information (big data) perd de l’importance
face au bénéfice subjectif qu’il permet de matérialiser. Le GenY, dans sa quête de rationalité et de prise
de recul, s’appuie sur l’algorithme pour apporter une réponse ou exposer un regard critique.
Les algorithmes, pour être plus efficaces, promeuvent le partage et la collaboration, des valeurs fortes
de cette génération.
À l’instar de l’algorithme de Shazam qui va bientôt permettre d’identifier des vêtements grâce à une
simple reconnaissance visuelle (on imagine bien la portée sociale que cela peut engendrer chez les
fashionistas) ; les Google Glass ne peuvent aujourd’hui que faire main basse sur la GenY.
Cette génération a également un lien émotionnel beaucoup moins évident qui la lie à ces algorithmes :
sa part de magie. Les réponses imprévisibles apportées par l’algorithme, renforcent son rapprochement
idéologique avec la GenY, comme l’ont montré des centaines d’algorithmes tels que les moteurs de
recherche ou les jeux du type Akinator, un jeu en ligne dans lequel un génie essaie de deviner à quoi ou
à qui le joueur pense.
Une chose est sûre, l’algorithme est devenu cool et sexy.
Enseignements pour les marques
Aujourd’hui, tout se pose en équation, tout peut se traduire en une exécution d’instances, aussi fines
soit-elles. Ainsi tout peut devenir un algorithme. Les marques de luxe et de mode auraient tort de croire
que leurs valeurs ne sont pas en accord avec les principes de l’algorithme :
la relation client individualisée avec un outil CRM transcendant pourrait renforcer un lien affectif et
émotionnel avec la marque ou les forces de vente en boutique ;
l’expérience digitale interactive pourrait s’appuyer sur la magie de l’algorithme pour proposer des
découvertes sensorielles inattendues en se basant sur des informations et des requêtes pragmatiques ;
l’offre marketing s’enrichirait à proposer de nouvelles formes de fidélisation ou de pricing, basées
sur une antériorité avec la marque (historique d’achats, interactions avec la marque sur les réseaux
sociaux, etc.) ;
la création du produit basée sur des goûts et des intérêts renforcerait le rêve individuel de posséder
frenchpdf.com
un produit à son image ne feraient qu’accentuer leur suprématie. À vrai dire, elles auraient même
tout intérêt à s’approprier l’algorithme rapidement. »
Camille BROUSSIN
frenchpdf.com
fantasmes pantagruéliques de contenus. Chez Netflix, l’abonné n’attend plus son
épisode hebdomadaire, il a la possibilité de voir tous les épisodes d’une saison,
dès le premier jour de diffusion, c’est ce qu’on appelle la tendance « binge
viewing ». C’est l’algorithme qui a détecté ce désir clé inassouvi du
consommateur et là encore le succès est au rendez-vous, tant en termes de
recrutement de nouveaux abonnés qu’en termes d’usage, puisque selon Nielsen,
en septembre 2013, 88 % des abonnés Netflix regardaient plus de 3 épisodes
d’une série, en une journée.
L’algorithme Netflix exerce une véritable fascination chez les Y, grâce à sa
capacité à les servir comme de véritables pachas. Dernier exemple en date, le
service lancé par la marque, afin d’éviter à ses abonnés toute forme de
« spoiler » diffusée sur Twitter… si l’Algorithme le dit, Netflix le fait !
L’influence de l’algorithme touche également les productions Netflix. Depuis
2013, Netflix propose ses propres séries télévisées, atteignant en une année le
niveau qualitatif du mythique HBO. C’est la série House of Cards, qui a donné
ses lettres de noblesse aux productions Netflix, avec 9 nominations aux Emmy
Awards. La genèse de House of Cards est riche en enseignement marketing. Le
duo mythique et oscarisé, composé par l’acteur Kevin Spacey et le metteur en
scène David Fincher, avait depuis quelques années en tête le concept d’une série
sur les arcanes du pouvoir à Washington. Naturellement, ils firent le tour des
networks (ABC, CBS, NBC et Fox) pour présenter leur projet. Toutes les
chaînes donnèrent une réponse positive, mais conditionnée au tournage d’un
pilote afin de tester la force du projet. Pour ces deux grands noms, il était hors de
question de dépenser de l’énergie dans le tournage d’un pilote, qui avait de fortes
chances de finir aux oubliettes, comme bon nombre de pilotes à Hollywood,
représentant pour les télévisions, un manque à gagner de plus de 200 millions de
dollars annuels. Fincher et Spacey approchèrent Netflix qui donna presque
immédiatement leur feu vert, pour le tournage de 8 épisodes sans pilote.
Pourquoi une telle prise de risque de la part de Netflix ? Toutes les composantes
de la série (pitch, casting, mode narratif…) ont été validées préalablement par les
algorithmes Netflix. Le résultat ne se fit pas attendre, la série a permis à la
frenchpdf.com
marque de recruter des centaines de milliers d’abonnés, générant un buzz
retentissant. Mieux l’algorithme enrichit le scénario en idées ; à n’en pas douter
il a joué un rôle important dans la conception du personnage de la journaliste
Zoé, incarnation parfaite de la génération Y.
Le fantasme hollywoodien de l’algorithme, ne se limite pas à l’univers des
séries, il contamine également le cinéma, avec le film Her (2013), du très
influent Spike Jonze. Cette œuvre d’anticipation a pour sujet un amour
impossible, entre un homme maladivement timide et une voix provenant d’un
algorithme, comblant tous ses désirs de vie à deux, en totale harmonie.
L’algorithme et le luxe
L’algorithme porte en lui, les racines d’un nouveau luxe. Un luxe intelligent,
totalement personnel, évolutif, avec un temps d’avance sur tous les désirs de son
client. L’algorithme représente une technologie « luxe compatible », dans le sens
frenchpdf.com
où il est totalement invisible, à la frontière du magique par ses effets, tout en
étant parfaitement respectueux de l’ADN des marques.
Le champ d’intervention de l’algorithme est sans limites, ses premières
applications apparentes touchent l’univers des services.
Toujours à la pointe de l’innovation, Burberry a lancé en 2013, le concept de
« smart personalisation », en intégrant des puces RFID, à l’intérieur des plaques
métalliques gravées avec le nom des propriétaires de vêtements ou de sacs
Bespoke.
Ces puces permettent au client d’être directement reconnu par les écrans du
flagship de Regent Street et d’activer des vidéos exclusives du précieux objet,
sur son mobile, ou, plus magique encore, sur les miroirs du magasin, devenus
par enchantement à son passage, des écrans digitaux.
Nouveau paradoxe : l’algorithme, symbole de la culture Y, vient de poser les
bases d’une réinvention complète du service le plus ancestral et le plus désirable
du monde du luxe : le Bespoke (ultra sur-mesure et donc objet unique).
frenchpdf.com
dans l’habillement.
Le 8 juin 2013, Kate Spade en partenariat avec eBay réinvente le concept de pop-up stores. Ces vitrines
boutiques sont situées dans quatre endroits de New York : 154 Spring Street, 7 West 18th Street, 175
Orchard Street and 30 Gansevoort Street.
Elle nous offre une campagne de publicité en mode crowdsourcing, un concept store 100 % Y qui
propose du : wow, de la technologie, du playful et du service. Les vitrines Kate Spade Saturday de ces
pop-up stores sont des écrans tactiles jaunes vifs proposant des articles de la marque. Quelle que soit
l’heure, les passants peuvent « scroller » l’écran tactile et choisir les produits. Pour acheter il leur suffit
de rentrer leur numéro de téléphone. Un SMS leur est envoyé pour planifier la livraison qui se fera dans
l’heure. L’offre de service va jusqu’à un suivi en temps réel de la commande par l’intermédiaire d’une
caméra sur le coursier.
Facteurs Y
La vitrine se réinvente pour charmer la génération Y, elle devient pop-up store. Les digital natives sont
à la recherche perpétuelle d’une expérience d’achat surprenante correspondant à leur lifestyle.
À travers ces vitrines, l’association des deux marques (Kate Spade et eBay) a su mettre le digital au
cœur du processus d’achat et offrir à cette génération du :
“Happiness Design” : façade colorée en jaune vif accentuée de lumière et musique.
“Gamification” : la vitrine se transforme en une gigantesque tablette qui rend ludique l’achat aux
yeux des Yers : le meilleur du digital dans les rues de New York, une présentation des produits née
sur l’idée de panoplie.
“Big Brother” : la réassurance par la transparence : les Yers peuvent suivre en temps réel le coursier
de l’usine au point de livraison.
“Service luxe +++” : pour répondre à leur addiction au shopping et à leur intolérance à la lenteur et
à l’attente Kate Spade Saturday leur offre un service en soixante minutes maximum 24/24.
Enseignements pour les marques
Le désir pour une marque d’avoir un réseau de distribution 100 % Y.
Le pop-up store Y – la windows shop ou vitrine boutique – offre :
le meilleur du digital dans la vraie vie ;
l’éphémère qui éveille ? fait naître ? vivre ? les désirs ;
l’hyper sélection des Yers répond à cette anti-infobésité de produits ;
la dimension playful ;
le postulat de « pacha » du Y : son exigence en termes de service ;
l’existence d’un vrai réseau parallèle, plus événementiel plus économique, qu’est la vitrine boutique.
Cette tendance est bien la preuve d’un virage des marques prenant de plus en plus en considération les
avancées technologiques dans le domaine du retail.
Christel VAN ISACKER
frenchpdf.com
distribution, celle-ci est corroborée par l’étude WWD & Berglass d’octobre
2013. C’est une forme d’avertissement pour le retail de considérer que la forme
optimale de distribution physique pour les Y, est le pop-up store, loin devant les
onéreux flagships.
Le désir de longévité des pop-ups s’explique fort logiquement. Hier encore
considéré comme un phénomène de mode, il incarne aujourd’hui quatre idées
stratégiques :
Le pop-up store est par sa conception totalement consumer centric.
Le pop-up store est un repère et un curateur de lifestyle.
Le pop-up store sert la valeur perçue de la marque et de ses produits.
Le pop-up store réenchante l’acte d’achat.
La génération Y qui veut inscrire son shopping dans une dimension à la fois
lifestyle, personnalisée et intelligente, voit dans le pop-up store le lieu de
réalisation de ses fantasmes consuméristes.
Nous avons cherché à déconstruire l’expérience des plus beaux pop-ups
internationaux de luxe (Hermès, Comme des Garçons, Selfridges, Barneys…) et
nos conclusions ont permis la création d’un outil, la Matrice pop-up.
Outil n° 15 : La Matrice pop-up
frenchpdf.com
La dimension Valeur perçue : la somme des expériences d’un pop-up nourrit la valeur perçue de la
marque et de ses produits. Le magasin se transforme en écrin événementiel, la rareté est signifiée de
toute part (taille réduite de la boutique, sélection exclusive et limitée à peu de pièces…).
La dimension Émotionnelle : nous sommes face à une expérience ovni, tant dans sa scénographie,
que dans son atmosphère. Une bulle d’expérimentation boostée par l’excitation née du sentiment
d’urgence propre à l’éphémère.
La dimension Lifestyle : tous les éléments du mix sont vecteurs de lifestyle dans un pop-up store
réussi : le personnel véritable miroir de la communauté visée, la localisation géographique, la sélection
(la curation) de marques invitées emblématiques du style de vie recherché.
La dimension Digital augmenté par le réel : voici une nouvelle dimension inventée pour les Y. Le
pop-up est recherché comme un prolongement de l’expérience digitale, mieux il propose sa version
améliorée, plus que parfaite.
frenchpdf.com
radicalement Hermès.
La dimension Lifestyle : le pop-up store met en scène un lifestyle « country
club », le personnel est à l’image de celui-ci. À l’étage une jeune femme
souriante, totalement dans le style Hermès, vous invite à jouer une partie de
mini-golf ou vous prendre en photo dans le photomaton. De plus le lieu
choisi pour héberger le magasin fait sens, à savoir le Colombus Circle
centre commercial le plus « smart » de NYC. La curation de produits et de
marques partenaires est également le reflet d’un lifestyle emblématique,
sublimée par des produits icônes de la maison, véritable porte d’entrée de
l’univers Hermès.
La dimension Digital augmenté par le réel : prolongement d’une
application smartphone et tablette à succès, ce pop-up trouve sa source dans
une opération digitale et se concrétise physiquement à travers un pop-up
store éducatif, social, ludique et expérientiel encore plus extraordinaire. En
déclinant un concept digital sur une boutique physique, la maison va plus
loin dans la réflexion sur le retail et les possibilités de communication
cross-canal.
Culte de l’éphémère
La marque se renouvelle entièrement tous les 6 mois, du logo au produit, en
passant par les points de vente. La rareté est donc signifiée continuellement, les
collections sont réduites, mais l’offre est extrêmement large, elles couvrent une
multitude de catégories de produits, vêtements, sacs, accessoires, déco
auxquelles s’ajoutent des sélections exclusives et des collections capsules. Urban
Outfitters capture l’éphémère du pop-up par son sens de la transformation quasi
continuelle et crée un sentiment d’urgence fort chez ses clients.
frenchpdf.com
Lifestyle
À l’image des pop-up stores, le contrat de confiance entre la marque et ses
clients repose sur la transmission d’un lifestyle parfaitement ciselé. Urban
Outfitters articule toujours son offre mode avec des sélections déco et culture
pointues. De même, à l’image du mythique Dover Street Market de Comme des
Garçons à Londres, Urban Outfitters fait acte de curation, en commercialisant
des marques amies (Vivienne Westwood, Franklin & Marshall, Ray-Ban,
Doc Martens, etc.), autant d’éléments tangibles qui permettent à la chaîne de
s’affirmer en tant que force d’inspiration d’un mode de vie.
Enfin, les magasins Urban Outfitters sont des lieux à vivre infusés par les
cultures urbaines, toujours singuliers dans leur scénographie, et les performances
y ont une place privilégiée. Ce qui colle parfaitement avec les Y qui voient le
shopping comme une expérience culturelle à part entière.
Consumer centric
Urban Outfitters est très claire, elle a une cible et elle l’affirme avec fierté : les
jeunes urbains de 18 à 30 ans, la génération Y. Consciente de la nature
fondamentalement évolutive de cette cible, elle a mis en pratique un ambitieux
programme d’écoute de la cible, nourrissant les algorithmes de la maison. Ainsi,
Facebook est considéré bien plus comme un laboratoire d’observations qu’un
vecteur de buzz. Sans parler de l’ambitieux programme mobile « Urban On »,
présenté dans notre précédente tendance. Le terme « consumer centric »,
tellement utilisé à tort en marketing, n’est donc nullement usurpé pour Urban
Outfitters ; il est le fruit d’un investissement constant dans l’étude du
consommateur.
Richard Hayne, créateur de la marque, ancien hippie, aime tenir un discours
provocant, anti publicitaire, mais qui résiste à l’épreuve des faits : « Nous
dépensons l’argent que les autres entreprises dilapident en budget publicitaire
pour magnifier l’expérience de nos magasins ».
Digital augmenté
frenchpdf.com
La marque propose un système de pick-up entre son e-shop et ses boutiques en
dur. Les clients peuvent passer commande directement de chez eux et passer
récupérer en boutique leurs achats pour un contrôle total de la réception. Résultat
commercial de l’opération, en quelques mois, 9 millions de dollars de vente
supplémentaire provenant de ce service. Urban Outfitters innove en offrant à ses
clients, le meilleur des deux mondes : digital et boutiques physiques.
Des vitrines hebdomadaires de colette, à la curation lifestyle du Dover Street
Market, en passant par l’expérience magasin d’Urban Outfitters, autant de
réussites qui démontrent que le pop-up est bien plus qu’une curiosité marketing,
c’est irrémédiablement un esprit retail qui peut souffler en permanence dans un
point de vente et se transformer en une arme de désirabilité massive Y.
frenchpdf.com
Facteurs Y
Une démarche premium dans tous ses aspects : en phase avec l’exigence de premium des Y,
Fubiz opère une premiumisation de sa charte en s’attachant à avoir une qualité visuelle maximum.
Une approche régie par un dogme. La désirabilité de Fubiz passe par une expérience chartée dans
la manière dont le contenu s’offre au lecteur : l’hyperstructuration, c’est une cohérence visuelle et
une fluidité dans la répartition texte et images. La part belle est faite aux visuels, le texte étant réduit
à sa plus simple expression (la légende).
Une inspiration issue de la culture du zapping et du keynote : le contenu Fubiz est vite
consommé, vite compris. Sous cette forme « snackée », l’information devient divertissement. En
opérant une sélection hebdomadaire pointue (à la manière d’un Slideshare), la plateforme a su
trouver un format et des outils adaptés au penchant pour le zapping de cette génération.
Enseignements pour les marques
Les changements apportés par le « content snacking » imposent 5 devoirs aux marques :
Un devoir de codification et de cohérence stylistique : les maisons de luxe doivent trouver leur
propre façon de charter et codifier leurs contenus digitaux tout en demeurant visuellement
cohérentes à chaque nouvelle publication.
Un devoir d’économie du temps introduit par la « value for time » : tout temps est
irrémédiablement compté par les Y. Les marques de luxe se doivent donc de leur fournir du contenu
qu’ils consommeront et intégreront en un minimum de temps pour une consommation efficace.
Un devoir de garantie de l’accessibilité : la forme et le fond du contenu doivent être accessibles
aux initiés comme aux néophytes.
Un devoir de sophistication du contenu par la simplicité : le contenu doit pouvoir être digéré
avant publication afin de trouver une manière aisée et fluide de l’introduire auprès des Y.
Une exigence de fraîcheur : les marques doivent combattre le #old en apportant une fraîcheur
permanente (indissociable du web) dans leurs contenus. C’est la condition sine qua non pour occuper
efficacement les esprits Y et les rendre sensibles aux storytelling des marques.
Allan JOSEPH
frenchpdf.com
Outil n° 16 – Les 10 exigences clés pour satisfaire « l’Homo Zappiens Y »
Après de nombreuses et minutieuses observations, le contenu optimisé pour les Y obéit à 10 exigences
clés :
Exigence n° 1 : L’étiquetage du contenu, réponse aux quatre questions essentielles « Qui, Quoi,
Quand, Comment », garantissant sa traçabilité pour « l’Homo Zappiens Y ».
Exigence n° 2 : Le devoir de simplicité, car le manque de clarté entraîne le zapping immédiat.
Exigence n° 3 : La codification, « l’Homo Zappiens Y » aime consommer des programmes
structurés par des codes narratifs, et visuellement forts et répétitifs.
Exigence n° 4 : L’intra fluidité, « l’Homo Zappiens Y » doit pouvoir en toute simplicité
naviguer à l’intérieur du contenu, passer d’un chapitre à l’autre, sans pour autant perdre de vue
le chapitrage général de la création.
Exigence n° 5 : L’esprit trailer, c’est une loi initiée par YouTube, les 10 premières secondes
clés, celles-ci dictent l’engagement du spectateur sur la vidéo.
Exigence n° 6 : L’art du cliffhanger, condamné par un pouvoir d’attention décroissant,
« l’Homo Zappiens Y» exige des retournements narratifs fréquents, hérité des cliffhanger des
séries télévisées et avant elles des serials au cinéma.
Exigence n° 7 : L’Ovni, car l’attention de « l’Homo Zappiens Y » est flattée par l’inattendu, le
contenu non identifié, qui sort du cadre.
Exigence n° 8 : L’interactivité, car « l’Homo Zappiens Y » se distingue par son endurance
limitée à supporter la passivité devant ses écrans.
Exigence n° 9 : L’exigence esthétique, car le beau fascine « l’Homo Zappiens Y » dans une
photo, comme dans une vidéo.
Exigence n° 10 : Le voyage, car le contenu reste plus que jamais une invitation à la curiosité, à
la découverte de l’universalité.
frenchpdf.com
Avis d’expert
Romain Colin, créateur de Fubiz.net
Quel est le contrat de lecture d’une personne qui va régulièrement chez Fubiz ?
Qu’est-ce qu’on va écrire pour que la personne qui est très spécialisée comprenne et se dise qu’elle a
appris quelque chose aujourd’hui et que la personne qui n’y comprend rien, qui voit juste les images
sans avoir une info poussée ne soit pas complètement larguée et puisse comprendre ce qu’elle est en
train de regarder en lui situant la fameuse règle du Qui, Quoi, Quand, Comment qui répond à la fois à
la personne qui connaît et à celle qui ne connaît pas. Le vrai contrat de lecture c’est ça, on essaie quand
même de trouver des choses inspirantes pour nous, mais aussi pour le marché. La cohérence est surtout
visuelle, on met très peu de texte et très peu d’information, on essaie d’être très efficace et de choisir
de belles images.
Quels sont les fondamentaux du contenu Fubiz ?
En fait, on essaie de traiter chaque thème de la même manière. Que ce soit de la photo, de la vidéo, un
clip de Kanye West ou des photos d’une guerre en Irak, on essaie d’avoir une même approche : qui l’a
fait, pourquoi il l’a fait, comment il l’a fait et après de le montrer sous la même forme avec 5 images et
une vidéo. J’essaie d’avoir une cohérence à travers la forme dans laquelle le contenu va apparaître et
on a décidé que c’était titre-texte-image-photo/vidéo. C’est notre code. Le style Fubiz, c’est ce code-là
que les gens retiennent, ils savent qu’en venant sur Fubiz, ils auront ce code. C’est parce qu’on a pris
cette forme à chaque fois, peu importe le thème, les gens retiennent ce code.
Le luxe ne doit pas trop se laisser bercer par la passionnante étude réalisée en
2012 par l’IFM, sur la « jeunesse et la mode » qui révélait que des jeunes
français, vivant en province, donc dans l’incapacité géographique de fréquenter
au quotidien les flagships des grandes maisons, aimaient « s’offrir » le temps
d’une soirée, une visite en immersion d’un site web de marque de luxe vivant
cette expérience comme une véritable parenthèse esthétique de déconnexion des
stress digitaux, en particulier ceux provenant des médias sociaux.
Il ne faut pas se leurrer, le contenu provenant du luxe peut-être zappé avec la
même violence que celui des autres secteurs. C’est pourquoi, il est indispensable
frenchpdf.com
de considérer le public Y comme un véritable investisseur dont la monnaie est le
temps : son temps est compté et il en veut pour son temps, c’est « l’Homo
Zappiens » comme il a été défini en 2007, par Win Veen et Ben Vrakking dans
leur ouvrage Homo Zappiens : Growing up in a digital age (Network
Educational Press).
frenchpdf.com
La mort de la rareté en communication : l’éloge de la rareté a été un paradigme du siècle dernier
en communication. Il est devenu aujourd’hui un suicide marketing. Plus les messages sont nombreux
et répétés, plus la désirabilité du produit grandit, à condition de garantir pour chaque message diffusé
une exigence qualitative maximale.
Ouvrir les vannes du “liquid content” : le miracle Daft Punk est de s’être transformé en une
véritable distillerie à contenus produisant des messages parfaitement adaptés à l’ensemble des
canaux de communication actuels, d’un plateau TV à une chaîne YouTube. Le contenu produit fut
totalement fluide, à la fois parfaitement remarquable et visualisable.
Éviter la contingence commerciale : il est dorénavant fondamental de dépasser les lancements
maronnés, de ne plus avoir quelque chose à dire au niveau du seul produit pour se lancer dans la
communication digitale. Pour cela, les marques de luxe doivent s’attacher à trouver les occasions, les
momentum où elles vont pouvoir créer du contenu, interagir avec leurs audiences et établir une
relation. Le liquid content est une manière pour elles d’attirer l’attention de cette génération rodée au
marketing qui l’influence pour mieux le changer. »
Allan JOSEPH
frenchpdf.com
Après la plateforme de marque, place à la plateforme de contenus
Un temps de plus en plus important du métier de planneur stratégique est dédié
à la rédaction de plateformes de marque. Les entreprises ayant constaté que les
plateformes construites par les agences de communication étaient plus
fonctionnelles que celles peut-être plus érudites pensées par les cabinets de
conseil.
Personne ne doutera de l’utilité d’une plateforme de marque, outil de « brand
bureaucracy » indispensable car totalement adapté à la transmission du savoir en
temps de mondialisation et de fort turn-over interne.
La plateforme de marque a néanmoins ses limites, elle est un pilier de
cohérence, gravée dans le marbre, inflexible au changement et aux
environnements extérieurs. Elle ne suffit plus à vaincre les exigences de la
communication d’aujourd’hui. La co mmunication est passée de « 360° »
(formulation devenue désuète) à « 365 » – c’est-à-dire 365 jours par an.
C’est pour aider nos clients, que nous avons développé un outil additif au
modèle plateforme, nous l’avons appelé la plateforme des contenus de marque
(outil n° 17). Cet outil a été grandement inspiré par la tendance du « contenu
liquide », et au-delà des exigences initiées par la génération Y.
Naturellement, cet outil se nourrit de la plateforme de marque originelle, en
capturant son élément le plus radical, sa substantifique moelle, le « credo » de
marque, la parfaite formulation de la mission qu’à la marque sur son secteur, sa
raison d’être, ou comme le formule parfois Jean-Noël Kapferer « sa croisade ».
Le credo donnant le « la » en matière de sens, il faut maintenant définir des
éléments tangibles pour guider les productions futures.
Quel meilleur point de départ que l’ensemble des codes structurants de
marques : ses codes visuels, sonores, littéraires et au-delà sensoriels que nous
regroupons dans la « plateforme des codes structurants ». Ce travail de
référencement exhaustif est plus qu’une colonne vertébrale, c’est une muse pour
tous créatifs travaillant sur le brand content.
L’outil gagne encore en profondeur, en sondant le patrimoine culturel – mais
frenchpdf.com
attention pas de culture morte ici, des inspirations vivantes, à la fois artistiques et
intellectuelles, jusqu’aux personnalités (fondateurs, créateurs, clientes
mythiques, égéries…), c’est « l’encyclopédie culturelle ».
Il est temps de cesser les travaux historiques, pour passer à un premier acte de
création fondamentale, la définition de la « grande histoire de marque ». C’est le
berceau du storytelling à venir, il devra s’y référencer, pour former un grand
tout, puissant et singulier.
Prenons pour exemple Vuitton qui a réactivé en 2013, sa grande histoire de
marque, par le récit de voyage, ou encore Cartier qui a inventé la sienne, avec
l’Odyssée.
La force de « la grande histoire de marque » est son pragmatisme. Toutes les
marques doivent se transformer en machine magique à histoire. Rares sont celles
comme par exemple Red Bull qui se donnent les moyens de devenir une vraie
marque média. Dans le cas précis où la marque décide cette mutation, la
« grande histoire » se transforme en « positionnement éditorial », comme un
véritable magazine, ou une véritable chaîne de télévision, ou encore un site
internet média.
Outil n°17 – La plateforme des contenus de marque
frenchpdf.com
Il est temps de ne plus être « brand centric » et de s’intéresser au contexte au
sens large, de réaliser un « audit environnemental des contenus ». Nous nous
sommes inspirés de la méthode dite du « story planning » définie par la société
Moxie Paris, en particulier dans sa phase préalable à toute action, appelée
« Story insight », qui comme l’écrit Thomas Jamet « mixe le planning
stratégique avec le social média » afin d’avoir une photographie inspirante des
contenus qui circulent autour de la marque : les conversations entre
consommateurs, l’environnement des moteurs de recherche et bien sûr le
frenchpdf.com
benchmark brand content des concurrents. Cette analyse permet de détecter des
thèmes de contenus à exploiter, à la fois laissés vierges par la concurrence et
certifiés crédibles par les audits de conversation.
Puis vient le temps de définir les modes de storytelling que pourra utiliser la
marque dans l’expression de sa grande histoire. Ces modes de storytelling sont à
la fois narratifs et intemporels (l’odyssée, le conte, la leçon, le jeu de piste), mais
également purement numériques, comme le participatif, la gamification, la web
série… L’ensemble de ces modes narratifs se retrouve dans la section intitulée
« audit des storytelling » de notre plateforme des contenus de marque.
Forte d’une grande histoire structurante, enrichie par une analyse réaliste des
flux de contenus, il est temps de poser la dernière pierre à cette plateforme, en
donnant une mission stratégique à chacun des points de contacts, le tout dans un
souci de complémentarité, afin de nourrir un écosystème intelligent et évolutif,
au-delà de liquide, vivant car taillé pour les défis du 365.
La plateforme des contenus n’est pas un outil magique, il donne le cadre pour
enraciner l’ensemble des actions de brand content dans un réalisme stratégique
et un pragmatisme éclairé. Il doit s’enrichir de plateformes limitées dans le
temps, dédiées aux produits, intégrant les spécificités culturelles de chaque
marché international visé.
frenchpdf.com
villes (New York, Londres, Paris, Tokyo…). L’ensemble est supporté par la
plateforme éphémère de contenus additifs dknyartworks.com.
La marque a fait un travail d’orfèvre dans son utilisation de Twitter, en
diffusant et en promouvant publicitairement un flux de tweets géomarketés,
parfaitement adaptés à chacune des 10 villes, et ce pendant les trois semaines de
l’opération, créant pour le public la sensation d’un événement à la fois global,
local et « liquide ».
Quelles sont les qualités fondamentales pour réussir sa démarche de liquid content ?
La première des qualités serait de transcender le plan marketing annuel en grille de programme continu
autour d’une politique de contenus conçus et produits pour l’usage de chaque plateforme sociale. Le
copier-coller du packshot produit ou de la dernière campagne sur les différents médias sociaux, c’est
terminé. Il faut atomiser cette communication en une myriade de contenus capables de nourrir
l’écosystème en continu, mais surtout durablement dans l’esprit du consommateur.
frenchpdf.com
Être intéressant plutôt qu’intéressé.
La génération Y est le véritable maître des lieux dans son environnement digital. Son attention à la
marque coûte cher. Il vit dans l’instant mobile et dans l’échange social, souvent passionnel avec ses
pairs. Il n’a ni le temps ni la patience pour s’arrêter sur un contenu qui ne l’accroche pas
immédiatement. Le message de marque doit faire mouche à chaque coup, avec une forme de créativité
spontanée et régulière.
Une logique “short and sharp”.
Un slogan ? 140 caractères et un hashtag ! Un spot ? Pas plus de 6 secondes pour Vine et 15 secondes
pour Instagram ! Un visuel print ? Plutôt une boucle .gif à se partager sur Tumblr, fascinante de
poésie, ou une infographie à épingler sur Pinterest…
Opter pour une écriture digitale
La marque doit maîtriser les codes de langage de la génération Y, sa culture du mix. Hybridation de
l’image, mélange des genres… Le film ultra léché de luxe « coûteux » aura moins d’impact que le petit
film d’animation stop motion, plus enfantin, plus créatif, plus artisanal. L’esprit spontané du « home
made » ou fait maison, rend la marque plus humble et humaine, donc plus émotionnelle pour le Y.
Transformer les temps morts en temps forts.
Il ne s’agit plus de publier un post ou un tweet de temps en temps sur les différentes prises de parole de
la marque, mais de ré-enchanter le quotidien des digital natives, avec panache et créativité, autour
d’une promesse de contenu à venir, d’une distraction offerte par la marque, d’un élan créatif inattendu
qui ravi la vedette à une campagne concurrente du moment, plus fade.
Le contenu liquide doit toujours être connecté à l’univers de marque parce qu’il s’immisce dans le
quotidien de nos vies digitales et sociales. Les efforts menés sur la stratégie de contenus liquides
doivent être payants, c’est-à-dire toujours référents à l’univers et aux codes de marque, à ses produits
ou à son actualité. Le liquid content n’est jamais gratuit, il nourrit la marque durablement.
frenchpdf.com
La fin de la rareté, c’est apprendre à penser comme un média et à rentabiliser chaque action par
la refonte des stratégies publicitaires et l’attachement à la qualité la plus parfaite possible dans la
réalisation.
La communication digitale des marques doit dépasser le seul produit, la seule contingence
commerciale, afin de décupler ses prises de parole et de s’inscrire dans des momentums pour
s’attacher l’affection des Y.
frenchpdf.com
d’engagement de la cible pour une marque. Il ne peut y avoir dorénavant de crédibilité sans générosité.
L’innovation luxe ne peut-être qu’human centric.
En mettant la technologie au cœur de sa stratégie, Burberry a prouvé que le luxe s’adapte à merveille
aux nouvelles technologies. Une culture connectée qui place l’humain au cœur de la stratégie. Comme
le précise Angela Ahrendts : « tout commence et se termine avec des personnes ».
Laurent-Julien MONFILS
frenchpdf.com
de chat, où l’information peut librement circuler et le brainstorming s’épanouir.
Ces armes de communication internes ont permis à Christopher Bailey de
diffuser un désir d’innovation, rythmé par deux événements mensuels
stratégiques, eux aussi totalement connectés :
Le Strategic Innovation Council, forum mensuel au nom de l’innovation
supervisé par Christophe Bailey regroupant les meilleurs éléments de la
jeunesse Burberry, appelés les « great thinkers » afin d’échanger sur la
vision innovante de Burberry.
Le Senior Executive Council, constitué des meilleurs managers seniors dont
le but est de mettre en application les nouvelles stratégies de la marque.
Chez Burberry, aucune forme de condescendance provenant de l’âge, bien au
contraire, c’est un lieu où la jeunesse est heureuse. Plus de 70 % des employés
ont moins de 30 ans, et tous sont choyés par des avantages, qui n’ont rien à
envier au management de Google : congés annuels supplémentaires, une cantine
gratuite, un bol de fruits quotidien et des activités sportives.
frenchpdf.com
une distribution internationale : auparavant on trouvait difficilement la
marque aux États-Unis par exemple, à l’heure actuelle des magasins comme
Barney’s, Nordstrom, Saks distribuent la marque.
Cette philosophie d’acheteurs internationaux et de chasseurs de tendances est
au cœur de la réussite commerciale de Kenzo à travers le monde : des pièces
pensées pour devenir iconiques, la multiplication de codes pour rendre la marque
désirable, des symboles forts (tigre, œil, jungle, nuage) sur imprimé (la marque
possédant le plus gros studio d’imprimés du secteur), la multiplication de
produits de culture street (sweats, t-shirts ou les sneakers et accessoires). Tout
ceci est accompagné par un fort développement dans le masculin et la
multiplication des collaborations avec des marques icônes Y (Van’s/New Era).
frenchpdf.com
Les points clés de la tendance Innovation permanente
L’innovation est la valeur clé pour séduire la génération Y.
L’innovation doit s’inscrire dans un cycle long, sous peine d’être cataloguée par la cible, comme
un simple coup marketing.
Le passage à une culture connectée d’entreprise est la garantie d’être en phase avec la génération
Y, et plus tard la génération Z.
L’innovation commence par le profil de ses décideurs, en mutation depuis 2012, avec l’arrivée
de profil d’acheteurs, ou de créatifs cumulant les fonctions de création et de management.
Au regard des Y, l’innovation est une énergie cohérente qui doit irriguer tous les départements
de l’entreprise, du commercial à la communication, en passant par le service client.
frenchpdf.com
La force de la convivialité, de la tribu : c’est en s’imposant comme socle social à travers une
ambiance conviviale et très “famille” que le Mama séduit les Y en stimulant leur désir
d’appartenance à une communauté «cool» codifiée. C’est un lieu qui véhicule un esprit “Mama” qui
fédère une communauté de plus en plus importante.
Enseignements pour les marques
Le Mama Shelter est une parfaite incarnation d’une expérience luxe 100 % Y :
le meilleur du luxe utile (design, technologie, label célèbres…) en restant dans un esprit “cool” très
éloigné d’un luxe traditionnel et guindé.
une expérience pragmatique, incarnation d’un rapport qualité prix ciselé.
une expérience qui excelle dans la mixologie des codes, pour mieux créer un nouvel ensemble
identifiable.
une expérience “playful”, conviviale, “hype” pour mieux exciter le désir chez les Y.
une expérience tribu qui répond parfaitement au besoin naturel d’appartenance des Yers. »
Aristide DOUROUX
frenchpdf.com
le gril de la valeur, avec une sympathie naturelle pour le luxe qui fait l’effort de
se rendre accessible, sans pour autant renier la qualité.
Ainsi, Guillaume Salmon responsable des relations publiques pour le magasin
Colette, nous parle des Y : « Je pense qu’ils aiment cette approche d’un luxe
abordable, d’avoir un bon rapport qualité/prix… lorsqu’ils viennent l’après-midi
manger un gâteau ou prendre un café en salle, c’est moins cher que la plupart des
cafés de Paris, qui sont à 2 €. Vous avez le Wifi donc vous pouvez travailler, être
en phase avec votre génération, réseauter »… Par exemple, vous allez vous faire
un bon plat de pâtes, concocté par Ducasse, chez Colette, pour 17 €. D’un point
de vue expérientiel, vous pouvez dire « J’ai mangé les pâtes de Ducasse chez
Colette ».
frenchpdf.com
confection renfermés dans un costume de la marque à 1 295 $. Un véritable
écorché contemporain dédié à la construction de la valeur perçue. Burberry
réinvente les codes de communication de l’élégance masculine, en se
rapprochant plus de l’ingénieur, que du tailleur ; le geek de luxe triomphe !
frenchpdf.com
façonner le logiciel Android de son téléphone pour qu’elle corresponde exactement à la forme qu’il
souhaite (pour peu qu’il soit un peu informé). La smartwatch permet de faire passer cette
personnalisation à un niveau supérieur, du software au hardware, du logiciel au matériel.
L’utilisateur peut répartir les différentes fonctionnalités de la montre et du téléphone comme il
l’entend (par exemple répondre au téléphone avec la montre et restreindre l’utilisation du téléphone à
des usages spécifiques comme prendre des notes ou regarder une vidéo). La Galaxy Gear permet
plus de personnalisation, donc plus de contrôle de l’utilisateur sur les produits.
Recommandations pour les marques
Apporter plus de personnalisation en utilisant les objets connectés : en créant une gamme de
produits et services connectés, complémentaires et capables de s’enrichir mutuellement, Samsung
réussit à proposer davantage de services à ses utilisateurs, démultipliant les fonctionnalités de chaque
appareil et donc les possibilités d’usages en fonction des désirs de chacun. Cette logique peut
s’appliquer à d’autres secteurs. Pourquoi ne pas imaginer par exemple un malletier capable de proposer
un service de conciergerie avec chaque bagage qu’il vend ? C’est à la fois un moyen de proposer une
expérience produit unique et surtout de renforcer le lien de la marque avec ses consommateurs. »
Pierre DE LA SAUSSAY
Nous sommes ici plus dans la prospective que dans la tendance, mais nous ne
pouvions pas passer sous silence, cette aspiration pour un luxe connecté, qui
dessine l’avènement d’un nouveau luxe, ou l’objet prend vie par l’utilisation
d’une technologie invisible et magique, le dotant d’une dimension service
inédite.
La réalité des marchés veut que naturellement les univers sportwear et high-
tech proposent les premiers produits de « wearable technology » aux
consommateurs – avec comme premier segment celui des montres connectées,
les lunettes connectées suivront en 2014.
Déjà, nous pouvons tirer des premières conclusions : la forte désirabilité de
cette nouvelle gamme de produits auprès des consommateurs. Ainsi, l’étude
Google&Ipsos Media CT « Holiday Shopping intention 2013 » montre que les
« wearable tech » sont la catégorie de produits qui suscite le plus de curiosité
auprès des consommateurs américains, avec en référence la Samsung Galaxy
Gear, Fitbit Flex, Nike Move, Nike Fuel Band et Nimy Bracelet. On est au tout
début des remises en question stylistique de ces objets de la part des influenceurs
de mode. L’intervention de Coco Rocha durant l’événement Flow 2013 a
d’ailleurs été symptomatique, avec cette déclaration « J’espère que Ray-Ban va
frenchpdf.com
améliorer les Google Glass, car elles ne sont pas encore stylées ». Si nous
suivons les prévisions de Scott Gallaway, fondateur du cabinet de recherche L2,
qui voit l’arrivée prochaine d’Apple dans le monde du luxe, nous pouvons
facilement imaginer, que le premier chantier de la marque crée en 1976, à
Cupertino sera la « luxification » des « wearable tech ».
Il nous paraît évident que non seulement les Yers seront les premiers clients de
ces nouveaux objets, mais plus encore qu’ils en seront les créateurs.
frenchpdf.com
Enseignements pour les marques
La génération Y est très friande des achats impulsifs et rapides pouvant être réalisés via le support web
et/ou mobile ce qui semble être en contradiction des modes traditionnels de consommation des produits
de luxe, ces biens étant vendus en collections limitées et s’adressant à un public très restreint. Le succès
du site et de l’application Net-A-Porter résident dans leur capacité à proposer de manière à la fois
simple et qualitative des milliers de produits de luxe accessibles via une application mobile optimisée, à
la pointe de la technologie en matière de fonctionnalité e-commerce et mobile. Ceci est agrémenté d’un
aspect plus pratique, notamment via l’intégration de news sur la mode et d’outils tels que les
wishlists. »
Peter DONA
frenchpdf.com
tiers d’entre eux ne seront jamais téléchargés et finiront déréférencés[4].
La génération Y est grande consommatrice d’applications, 46 % en achètent, et
42 % y passent plus de 6 heures par semaine[5].
Pour la séduire, il faut un mot d’ordre parfaitement capturé par Peter Dona
dans le cas Net-A-Porter : l’utilité, le pragmatisme. Nous avons tenté de capturer
cette idée simple, dans un outil, qui pourra guider vos créations mobiles Y : les 9
bénéfices clés d’une App et/ou site mobile
Outil n°18 – Les 9 bénéfices clés d’une App et/ou site mobile
frenchpdf.com
plus loin en enrichissant le jeu d’une dimension événementielle magasin. C’est le cas des
vitrines de Noël 2013 du flagship Saks Fifth Avenue, dont le thème était la découverte du yéti
habitant sur les toits du magasin, comme la légende le prétend. Les mobinautes étaient invités à
créer des flocons virtuels magique et à imaginer un nom au fameux yéti, puis à les diffuser
directement sur la vitrine interactive du magasin développée spécifiquement pour l’événement.
Leçon de pragmatisme mobile n° 2 : Faire rentrer dans le jeu !
Bénéfice n° 3 : Émerveillement en mode réalité augmentée. Un smartphone a la capacité de
montrer un monde surréaliste à son propriétaire, par l’intermédiaire de sa caméra et de son
écran. C’est l’effet wow poétique de la réalité augmentée, une expérience se sophistiquant de
plus en plus avec les technologies, mais aussi la promesse d’une parenthèse enchantée enfantine.
La maison de haute joaillerie Boucheron a fait de l’utilisation de la réalité augmentée, un de ses
codes numériques. À travers ses fameuses applications interactives pour iPhone, où le public est
notamment invité à essayer virtuellement une partie de sa collection et ce dès 2010. Il suffit de
photographier sa main ou son poignet, puis de choisir les bijoux convoités et enfin de l’ajuster à
sa main ou poignet. Un vrai luxe.
Leçon de Pragmatisme Mobile n° 3 : Inventer un monde en mode réalité augmentée !
Bénéfice n° 4 : Tutoriaux express. La forme optimale d’un contenu pédagogique sur mobile
est le tutorial. Sa conception met en valeur un savoir précis et court, sous-entendant une
transmission à la fois active et express. Les applications iPad développées pour Mr Porter sont
un modèle d’efficacité, en particulier The Tux où le mobinaute apprend en quelques vidéos
l’histoire et les éléments remarquables d’un smoking, sans oublier un « call to action », appelé
fort judicieusement « Shop me »
Leçon de pragmatisme mobile n° 4 : Transmettre un savoir clair et court, en mode Tutorial !
Bénéfice n° 5 : Networking. Le mobile se transforme en clé, qui donne accès au club privé
virtuel, à des médias sociaux exclusifs, loin de la foule de Facebook, où s’échangent des avis
exclusifs d’influents à suivre. Net-A-Porter a mis en pratique cette aspiration au réseau, dans
son application sur invitation uniquement. « The Netbook » permet aux blogueurs stylistes
d’échanger leurs sélections, dans un environnement totalement chic, où les mots employés font
particulièrement sens, ici on ne suit pas l’autre (comme sur Twitter), on « l’admire ».
Leçon de pragmatisme mobile n° 5 : Recréer le rituel et l’expérience du club privé
Bénéfice n° 6 : La boutique est partout. La maturité prise par le commerce sur le mobile en
quelques mois est stupéfiante. Plutôt que d’être en compétition avec les points de vente
physiques, le mobile enrichit l’expérience du magasin traditionnel, en réalisant le rêve de tout
shopping addict en transférant la boutique chez soi ! Saks a proposé cette expérience de
« boutique chez soi » par la tablette, via son application développée en partenariat avec
Stylewhile, où le shopping addict peut créer un avatar recréant son corps le plus
authentiquement possible. Après, tout est une histoire de jeu, où le fashion addict peut s’amuser
avec l’expérience grisante de l’essayage infini… mieux qu’une cabine en magasin !
Leçon de pragmatisme mobile n° 6 : Proposer l’expérience Boutique « Wherever, Whenever »
Bénéfice n° 7 : Promotion sur-mesure. La promotion se veut intelligente sur mobile, dans le
sens où elle doit exploiter l’une de ses forces singulières : la géolocalisation. Le luxe tient, avec
cet atout, un moyen d’activer l’arme promotionnelle sans mettre en danger sa valeur perçue, en
pensant la géolocalisation comme une offre de service étonnante, une arme d’interception
magique. L’utilisation principale du géomarketing se résume d’ailleurs majoritairement à des
campagnes publicitaires utilisant ces principes, ce qu’on retrouve par exemple sur la Weather
Channel App, par les annonceurs Saks Fifth Avenue et Tiffany & Co.
Leçon de pragmatisme mobile n° 7 : Surprendre par une proposition magique, fruit du
géomarketing
Bénéfice n° 8 : La validation des pairs. Le smart shopping est un art difficile, qui met en jeu
plus que de l’argent, mais également une crédibilité de bon acheteur. La crise, l’immensité du
frenchpdf.com
choix, la sophistication grandissante du marketing, le devoir de mise en scène de soi sur les
médias sociaux sont autant de facteurs de stress inhérent au shopping Y. L’avis de l’autre plus
qu’un repère, est en passe de devenir un remède anti-stress. Le mobile fluidifie la confirmation
d’un achat, par sa communauté d’amis, c’est la validation des pairs.
Leçon de pragmatisme mobile n° 8 : Mes amis + mon mobile sont mes meilleurs
antidépresseurs shopping
Bénéfice n° 9 : Le coach. Le Petit traité du bonheur 2.0 de Christophe Deshayes et Jean-
Baptiste Stuchlik, sorti en 2013 chez Armand Colin, présente le mobile comme une
« technologie du bonheur », en jouant le rôle de coach numérique, intervenant avec une
efficacité redoutable dans toutes les sphères de notre vie privée et professionnelle. Une
application symbole de cette proximité organique entre le mobile et l’homme, Isommeil, qui par
l’enregistrement de vos ronflements, délivre une analyse sur votre qualité de sommeil, donne
des conseils pour l’améliorer et optimise par la musique et la lumière vos phases
d’endormissement et de réveil. Nous creuserons cette dimension dans la prochaine tendance
(tendance 18).
Leçon de pragmatisme mobile n° 9 : Transformer le mobile de votre client, en son meilleur
coach
frenchpdf.com
aux joueurs de foot de connaître leur vitesse de frappe, ou encore l’application pour iPad Adidas Group
Investor Relations and Media qui permet aux investisseurs de se tenir au courant des dernières
actualités du groupe.
Facteurs Y
La convergence : les jeunes de la génération Y considèrent leur smartphone comme un
prolongement intime d’eux-mêmes. Ils utilisent des applications pour communiquer sur les réseaux
sociaux et via leurs mails, pour commander des vêtements et des repas et pour se tenir informés. Si
leurs smartphones leur donnent accès à leur vie familiale et sociale, pourquoi ne pas l’utiliser pour
accwéder à leur vie professionnelle ? Quoi de plus naturel pour eux que de chercher du travail en
passant par une application qui va en plus leur donner des conseils sportifs à la manière d’un coach
ou des conseils propres aux ressources humaines, leur permettant de visionner des vidéos fun liées à
l’univers Adidas. La marque réfléchit même à intégrer un shop afin de compléter l’expérience par du
m-commerce pour une convergence totale.
L’optimisation des temps creux : les représentants de la génération Y veulent tout avoir tout de
suite. Il en va de même avec la recherche d’emploi : ils veulent pouvoir chercher un emploi dès
qu’ils en ont envie et être prévenus des nouvelles offres partout où ils sont. Et qu’ont-ils toujours sur
eux ? Leur smartphone. Créer une application dédiée au recrutement enrichie de contenus comme
des vidéos ou des données sur la marque permet d’être accessible et de capter l’attention des jeunes
dès qu’ils ont un moment libre : dans une file d’attente, entre deux rendez-vous ou encore dans les
transports.
Enseignements pour les marques
À chaque génération ses usages : la force d’Adidas est d’avoir construit une marque employeur
forte et en phase avec son époque : les membres de la génération Y ne se contentent plus de postuler
en fonction d’une fiche de poste, ils veulent également savoir si l’esprit de l’entreprise leur
correspond et correspond à leurs valeurs.
Des suites d’actions courtes ou une mémoire de recherche permettent de faire découvrir à la
génération Y l’univers de l’entreprise à travers une application dédiée pendant tous les temps creux
qui semblent habituellement perdus. L’application a ainsi le double avantage d’être utile et
informative et de permettre l’optimisation des temps creux.
Vers une hybridation des usages : le smartphone n’est plus seulement pour la génération Y un outil
de distraction ou de communication, il est devenu une véritable extension de chacun, un
prolongement d’intimité. Il est donc essentiel de pouvoir tout y faire facilement, même les choses les
plus sérieuses. À l’image du cas Adidas, l’avenir est aux applications qui sont à la fois un coach
sportif, un coach pour leur carrière, un ami qui leur délivre des conseils au quotidien, un ami un peu
“déjanté” qui partage ses vidéos les plus folles, un ami qui débat sur ses choix vestimentaires et bien
d’autres encore. Nous sommes dans une hybridation et une complétude totale des usages
professionnels et personnels. »
Jean-Noël CHAINTREUIL
frenchpdf.com
les services indispensables à la vie contemporaine (information, communication,
loisir, création personnelle…), dans un minimum d’espace et toujours à notre
portée. Au-delà, grâce à son amélioration technologique permanente, il est
l’écran des écrans, à tel point que les systèmes d’exploitation actuels sont pensés
en priorité pour lui plus que pour l’ordinateur.
L’élément le plus fascinant est ailleurs. Il réside dans sa capacité à devenir le
coach de notre vie quotidienne. Un coach personnel (hier reservé aux plus
fortunés), qu’on porte toute la journée dans notre poche, donc qui sait nous
écouter à hauteur de peau, avec des réponses toujours plus pertinentes, car
guidées par les algorithmes qu’ils renferment. Un coach qui a terrassé
l’ordinateur car ses injonctions à changer sont bien plus écoutées au travers
d’une notification push (encore un message intimiste) arrivant au moment le plus
important.
Le mobile, cet écran des écrans, ce coach personnel pour tous est au centre de
gravité de toutes les vies de la génération Y, tant personnelle, sociale, loisir que
shopping ; c’est pourquoi nous voyons apparaître l’idée de convergence mobile.
frenchpdf.com
shopping (de plus en plus long, conséquence directe du smart shopping), jusque
dans l’après-vente, sans oublier dans le magasin. La catégorie de « smartphone
shopper » définie par le Google Marketing Adgency Shopper est révélatrice de
cette vérité. Le smartphone shopper est un utilisateur de smartphone, qui utilise
au moins une fois par semaine cet outil, pour l’aider dans son shopping. Il
représente 79 % des possesseurs de smartphone aux États-Unis. 90 % s’en
servent pendant la période de pre-shopping et 84 % l’utilisent quand ils sont
dans le magasin physique ! Quand on creuse plus loin, un tiers utilise leur
mobile pour éviter de poser des questions au vendeur, c’est le phénomène bien
connu du « self help ». Le smartphone devient un allier précieux de l’adepte du
smart shopping car il lui fait gagner du temps à 51 %, lui fait faire des
économies à 44 %, bref, lui facilite la vie[6].
Il y a deux manières de penser le mobile :
Comme la force fluide du commerce cross-canal, créatrice d’un monde de
convergence, bienveillant pour le consommateur car perçue par lui comme
un gain de pouvoir (empowerment) comme le soulignait le salon e-
commerce 2013 à Paris.
Comme une force nuisible, incarnation de la tendance du showrooming, ou
le fait de détourner le point de vente physique de sa fonction naturelle
(vendre), pour en faire un simple lieu d’exposition, de test, avant un achat
uniquement online.
Le monde du luxe par son modèle de distribution relativement contrôlé, est
encore relativement épargné par la tendance showrooming, ce qui ne l’empêche
pas d’être à la pointe de la réflexion mobile. Le grand département mobile, créé
en 2013 par Burberry, en est la parfaite illustration. Affronter le mobile est une
bataille perdue d’avance, le consommateur ne peut plus s’en séparer. Au
contraire, certaines marques pensent cette convergence mobile, en adoptant une
approche appelée « mobile first », ou la réflexion retail part d’abord de
l’application ou du site mobile.
frenchpdf.com
de départ de toute action marketing digne de ce nom.
« Personalization is message » : en 2002, dans Buzz Marketing[7], Éric
Briones imposait un mantra fondateur, « People is message », le principe
d’une communication organique, humaine était posé. Le mobile accélère ce
mouvement car le rapport que nous entretenons avec lui, dicte ce devoir de
personnalisation du message publicitaire.
« Faciliter le mobile search en magasin et partout… » : la validation des
pairs et au-delà le « price checking » deviennent des réflexes pavloviens du
smart shopper. Au lieu de les combattre, facilitez-les ! À l’image de
Sephora US, facilitez le Wifi en magasin et construisez des sites mobile où
l’avis du consommateur est d’accès fluide, enrichi par un contenu à valeur
ajoutée provenant de la marque.
« Reconstruire la préférence boutique » : que le lieu de vente redevienne
le lieu roi du smart shopping, grâce à une synergie mobile et au-delà une
vraie approche « web to store ».
Par une politique de sélections de produits distribués exclusivement pour chaque boutique,
mais mise en avant sur les sites mobiles, dans une approche « go to store ».
Par la fin des magasins « sourd et muet ». Le magasin reconnaît le client et lui donne la parole,
dans des espaces consacrés, où mobiles et vitrines doivent échanger. De même le magasin
devient transparent pour le mobinaute, en lui donnant accès en temps réel à son inventaire. Les
magasins GAP sont rentrés dans une telle démarche, avec le service « reserve in store », où le
mobinaute peut faire mettre de côté pendant 24 heures jusqu’à 5 vêtements qu’il a repéré sur
internet.
Par une redéfinition du rôle de la force de vente au nom de la personnalisation et de la
curation. La personnalisation n’est possible qu’avec un vendeur connecté par tablette et
smartphone enrichis d’outils de connaissance client. Quant à la curation, elle a pour mission
d’offrir une sélection plus efficace, afin d’éliminer le stress du surchoix, par un conseil digne
d’un personal shopper. Cependant, ne rêvons pas, le chemin est encore long. D’après l’étude
Forrester Reasearch « A new Generation of Clienteling », seulement 19 % des consommateurs
de luxe américains pensent que les vendeurs détiennent des informations pertinentes à leur
offrir, alors que signe de cette crise de confiance, 34 % d’entre eux ont vérifié en boutique,
avec leur mobile directement, si les prix présentés par les vendeurs n’étaient pas gonflés.
Le vendeur est-il condamné ? Nullement, à condition de retrouver sa crédibilité. 66 % des
consommateurs de luxe américains préfèrent avoir à faire à un vendeur équipé d’une tablette
ou d’un smartphone. Nous pensons que la vision de l’efficacité du vendeur peut changer :
Par un prolongement expérientiel en magasin des contenus entertaining (ou divertissants)
virtuels. Un contenu liquide, qui joue finalement du multi-écrans et gagne en puissance
immersive. Le magasin est consacré lieu d’expérimentation, il est un « living website ».
Par enfin une politique de pricing flottant qui sait créer l’évènement, par les mécaniques
éphémères d’happy hours et de ventes privées à consommer en boutique, mais informée par le
mobile.
Avis d’expert
Catherine Barba, fondatrice du Lab e-commerce, figure du web commercial français
frenchpdf.com
Bien sûr. La génération Y, comme nous tous, est aujourd’hui connectée, toujours et partout ; c’est une
réalité pour une grande majorité de Français et cette tendance va continuer à s’installer dans les années
à venir. Du matin au soir, le mobile permet de faire bien autre chose que téléphoner ou envoyer des
SMS : écouter de la musique, consulter son agenda, jouer, suivre ses amis sur les réseaux sociaux,
vérifier une info, trouver un magasin, réserver un produit, l’acheter, poster un commentaire… Avec le
mobile, tout est vraiment à portée de clic ou plutôt de doigt : il suffit de regarder avec quelle agilité un
enfant navigue sur un écran tactile, une tablette ou un smartphone pour admettre que notre culture est
devenue celle de l’écran, de l’image. Michel Serres parle de « Petits Poucets » pour qualifier cette
génération qui a pris le réflexe d’utiliser ses doigts pour communiquer et apprendre.
Quel est le rôle du vendeur face à la génération Y ?
Ma conviction, c’est que la pièce maîtresse d’un commerce, d’une enseigne, c’est le vendeur, qui est
aujourd’hui appelé à jouer un nouveau rôle de toute première importance.
Avec les ingénieurs développeurs, je crois que ce sont eux les métiers stars de demain, parce que
réussir sa transition numérique, c’est d’abord repenser en profondeur le rôle et la compétence des
vendeurs, pour faire de son magasin un lieu de relation et de service à forte présence humaine où les
clients se sentiront toujours plus aimés et reconnus qu’ailleurs. Les clients attendent beaucoup des
vendeurs : de l’expertise, un vendeur qui connaît et qui aime ses produits, du conseil personnalisé, la
recommandation sur-mesure, le « vous avez aimé, vous aimerez » d’Amazon est devenu un standard
comme dit précédemment. Mais aussi du plaisir dans l’échange, de l’émotion : ce qu’Amazon ne lui
donnera jamais aussi bien qu’un bon vendeur. Le « vendeur-bonheur », « vendeur-passion », c’est lui
que recherche le client hyper connecté.
frenchpdf.com
Bien au-delà d’une cible stratégique à conquérir, la génération Y est avant tout
une force vive à manager au cœur des entreprises de luxe, mode et beauté. Vaste
sujet de librairie, il engendre les caricatures les plus extrêmes, qui présentent le
Y comme le pire cauchemar des employeurs ; notre point de vue est à l’opposé.
Le Y est le meilleur atout de l’entreprise qui a intégré les mutations initiées par
le numérique, à condition de lui donner le rôle actif auquel il aspire, et ce sous
l’œil expert et bienveillant d’un management expérimenté. C’est toute la
philosophie des cercles du reboot, que nous allons vous présenter.
frenchpdf.com
qu’une solution réellement nouvelle et pas une simple optimisation, avait le
pouvoir de perturber un marché, à condition de réellement faciliter la vie du
consommateur roi, de s’appuyer sur une plateforme de diffusion gratuite et
d’adopter un rythme de conception et de production à grande vitesse.
Prophétique, l’auteur annonce que la digitale disruption multiplie par cent le
pouvoir de l’innovation, par rapport à l’ancienne décennie car internet va
multiplier le nombre de nouveaux entrants par dix en divisant les coûts par dix.
frenchpdf.com
Le reboot ADN
Face à un consommateur en soif perpétuelle de renouveau, le reboot de marque
devient impérieux, à condition de ne pas tomber dans le piège de la nouveauté
pour la nouveauté, sans une relecture intelligente de ses valeurs.
Les exemples de reboot d’ADN de marques sont légions. Nous aurions pu
nous concentrer sur l’exceptionnel reboot Saint Laurent entrepris par Hedi
Slimane qui a su en quelques mois réinventer les fondamentaux de la maison,
tout en créant un vestiaire qui capture le pouvoir créatif et sensuel de la jeunesse,
ce qui le rend d’autant plus désirable pour une cible de plus de 40 ans, un
véritable botox Y en quelque sorte, oserons nous dire.
Nous avons préféré décrypter avec vous le reboot Lacoste à travers sa marque
fille Lacoste Live. Lacoste Live a réinventé la marque, en lui insufflant l’énergie
cool de la génération Y, si loin de son image confuse des années 1990, avec sa
gestion de l’appropriation du crocodile par la banlieue. Lacoste Live a redonné
un vent de fraîcheur et de créativité à toute la marque, en se fondant sur un
manifeste infusé par la philosophie de René Lacoste, véritable profession de foi
avec pour promesse finale, d’adopter toujours un ton irrévérencieux, qui aurait
fait la « fierté de René » ! Une fois le manifeste posé, le mix marketing peut se
rebooter. Le programme Lacoste Live Reboot intègre une approche collective de
la création dans un mode de fonctionnement en factory garant d’un produit stylé,
la mise en place d’un lab enrichissant la gamme Lacoste de produits lifestyle
augmentés de collaboration avec des artistes confirmés et jeunes, et une mise en
jeu des codes de la maison, avec en premier lieu le crocodile, qui prend vie à
travers des vidéos sur internet, en devenant le totem des fêtes Lacoste.
Le reboot marché
Le reboot marché réussi débouche sur deux possibilités : la création d’un
nouveau marché ou la reconfiguration d’un marché classique. Le cas que nous
vous présentons de création d’un nouveau marché, ne vient pas d’une start-up,
mais, bien au contraire, d’une enseigne endormie de la mode : Carven. Née en
frenchpdf.com
1945, pratiquement morte en 2009, mais ressuscitée par le talent du jeune
créateur Guillaume Henry, portée à la fois par une grammaire stylistique
immédiatement reconnaissable pour les Yers et tellement recherchée par les
marques. C’est le fameux effet Tumblr, qu’a détecté la journaliste Melinda
Triana entre autre pour l’émission TV « La mode, la mode, la mode » :
« L’exemple de Carven est très intéressant. Ils ne connaissent pas, mais adhèrent
complètement aux codes et ils relaient les images sur leurs Tumblr, leurs
Facebook, sur leurs sites internet ou sur leurs blogs. Ils reprennent les images
des défilés instantanément ». Carven, c’est une proposition unique sur le marché,
qui reboote la notion de prêt-à-porter en lui injectant une qualité couture, avec un
prix médian pour une robe de 350 euros, au nom d’un positionnement
contemporain parfaitement taillé pour les marchés américains et asiatiques.
Carven est l’exemple type d’un reboot marché, qui a placé la « value for
money » au cœur de sa proposition, une démonstration par la preuve du
« consumer centric » en action.
La deuxième nature de reboot marché est celui de la reconfiguration d’un
marché classique, par des forces vives entrepreneuriales, majoritairement Y,
nous pensons à trois marchés : le marché des tailleurs pour homme, avec des
jeunes entreprises comme Tailor Corner, le marché des lunetiers avec Warby
Parker et celui du rasage masculin avec la société Harry’s créée par les
fondateurs de Warby Parker.
Trois secteurs, trois entreprises, mais une même vision d’un reboot marché, au
nom de la libération du consommateur, par la prise en main direct sur l’outil de
production, afin de ne plus passer par des intermédiaires autrefois
incontournables. Une vraie révolution permettant au consommateur Y et, au-
delà, d’avoir la « value for money » qu’il mérite.
frenchpdf.com
chaque jour avec certains de nos clients. Ce n’est pas une méthode court-
termiste, elle entraîne un mécanisme de changement étalé sur un temps long,
jusqu’à s’étaler sur deux générations de collaborateurs, en premier lieu ceux de
la génération Y, puis leurs petits frères et sœurs de la génération Z. Au-delà, elle
exige le retour de la passion dans le marketing.
Outil 19 – Les cycles du reboot
Étape n° 1 : l’éveil
L’étape n° 1 est celle de l’éveil, c’est une période clé où l’entreprise va se
poser 3 questions fondamentales, qui demande lucidité et courage. Lucidité par
rapport à l’état de l’entreprise, sa position sur le marché, les transformations du
consommateur, et courage, en faisant fi des sensibilités internes. Il doit apporter
un diagnostic d’essence médicale dans son honnêteté et aussi sa radicalité.
Pour cela, l’entreprise doit se poser trois questions : quel est le combat à
mener, quelle libération consumériste doit apporter mon combat, quel armement
utiliser pour vaincre ?
Quel est le combat à mener ?
frenchpdf.com
Les combats que nous avons référencés sont de trois natures :
Un combat contre un monopole qui sclérose le marché.
Un combat contre une pensée unique dans l’esprit du consommateur.
Un combat contre un embourgeoisement dont est victime l’entreprise.
La définition d’un combat adapté à la réalité du marché, est l’acte fondateur du
reboot. La pertinence de son message est la condition du succès de la démarche.
La formulation du combat sera la pierre angulaire du manifeste, qui est le
premier armement à se doter, quel que soit le reboot choisi.
Quelle libération consumériste doit apporter mon combat ?
La définition d’une libération consumériste ne peut se construire sans adopter
un point de vue « consumer centric », totalement généreux, en oubliant pendant
un moment les intérêts premiers de l’entreprise. Le combat doit servir le bonheur
du client, répondre à ses frustrations, augmenter ses plaisirs. La formulation de
la libération doit porter en lui la promesse d’un « empowerment » du
consommateur, condition à son épanouissement.
Quel armement dois-je utiliser pour vaincre ?
Nous avons référencés trois types d’armement au service du reboot, il y en a
certainement d’autres :
Armement nº 1 : tracer un nouveau chemin, prendre le parti du pionnier,
aller là où personne n’a jamais osé, conquérir la zone vierge d’un mapping.
Armement n° 2 : servir sa cible, adopter une demande radicalement
consumer centric, jusqu’à s’inventer de nouveaux métiers, loin de sa
mission originelle.
Armement n° 3 : investir dans une innovation disruptive, oser une
authentique démarche de pionnier.
3 types d’armement pour 3 types de disruption : marché, métier, technologie.
D’expérience, les vrais décideurs des entreprises ne peuvent seuls répondre à
cet étape n° 1 du reboot, appelez l’éveil. Pour s’éveiller à ces réalités nouvelles
et difficiles, et définir ce cap dérangeant néanmoins prospectif, notre credo est
simple, faites-vous accompagner dans chacune des étapes du cycle du reboot par
les membres les plus brillants de la génération Y de votre entreprise. Ils
partagent la même culture que les « digital disruptors ». On ne les appelle pas la
frenchpdf.com
génération « why » pour de mauvaises raisons, ils ont la capacité de poser les
bonnes questions (celles qui fâchent), et surtout d’apporter des réponses
détonantes (celles qui font changer un marché). Les Y sont naturellement
radicaux et inspirés par l’action sans compromis.
L’étape de l’éveil a permis à l’entreprise de se poser les questions
fondamentales à son reboot et de vouloir se connecter aux forces vives Y en son
sein.
Étape n° 2 : la transformation
frenchpdf.com
Il existe deux types d’énergie Y, une énergie interne, celle qu’il faut
privilégier, et une autre, externe.
Commençons par l’interne, il s’agit de l’énergie intrapreneur. À l’image du
management développé par Burberry, avec son Strategic Innovation Council qui
regroupe les meilleurs espoirs de la société, il est vital de constituer un groupe de
travail 100 % Y consacré au reboot, comprenant des éléments à la fois
empathiques par rapports aux désirs des consommateurs et possédés par le désir
d’entreprendre.
Les missions du groupe s’étendent aux trois champs du reboot, soit la
définition du combat, la formulation de la libération, puis la définition et la mise
en pratique de l’armement.
L’énergie Y ne peut se limiter à la réflexion, sous peine de désengagement à
court terme, c’est pourquoi il faut lui donner la mission de réaliser le reboot sur
le terrain, avec une dose réelle d’autonomie, donc de responsabilité, sous le
regard d’un groupe de mentors constitué d’hommes et de femmes d’expérience,
là encore mis en application par Burberry, dans son « Senior Executive
Council ».
Responsabilisé et doté d’une mission ambitieuse à long terme, le Y peut enfin
s’investir dans une société et lui rester fidèle.
Parfois, l’armement du reboot exige des compétences qui ne se trouvent pas
dans l’entreprise, il faut alors se doter d’énergies Y extérieures à la société et
jouer le rôle d’incubateur Y. Cela a été le cas de Nike, au moment de
l’enrichissement de ses solutions mobiles Nike Fuel en particulier. Nike a fait
son reboot, en devenant aussi une entreprise de services numériques, véritable
coach sportif virtuel de la planète. Pour cela, la marque devait se doter
d’applications mobiles pouvant faciliter la vie de ses clients. Ses profils
d’employés étant éloignés des « digital disruptors », elle décida de se doter de
ces compétences, en jouant le rôle d’incubateur de dix start-ups, autour du label
Nike+ Accelerator, en partenariat avec la société IT Techstars (dans un rôle de
frenchpdf.com
mentor), pendant une période de 3 mois. Et leur mission était de développer les
applications les plus efficaces pour faciliter la vie des gens. Le résultat dépassa
les objectifs de Nike. Tout d’abord ce fut un véritable coup médiatique en
l’honneur de l’innovation de la marque, le fruit de l’incubation produit,
aujourd’hui la meilleure des applications Nike.
La démarche de transmission est une démarche longue, qui mobilise la
meilleure des énergies Y en mode intrapreneur, ou incubateur en fonction du
périmètre d’armement défini en étape d’éveil. Le cercle de reboot n’a pas de
limite dans le temps, une fois qu’il est défini, il ne doit cesser de tourner car le
marché n’attend pas une réinvention éphémère, mais une exigence permanente.
Étape n° 3 : la transmission
frenchpdf.com
reboot doit être chargé d’une énergie permanente. Cette étape n° 3, nous propose
de réfléchir à l’après génération Y, leurs petits frères, la génération Z, elle
débutera dans une dizaine d’années.
Quand on interroge les Y, une idée revient régulièrement, celle d’être une
« génération de transition », qui prépare le terrain pour une authentique
révolution, qui sera vécue et portée par la génération Z.
Dans l’étape n° 3, de transmission, l’énergie Y est remplacée par l’énergie Z.
Les trois points clés du reboot se sont également transformés, témoignage d’une
évolution dans la manière de mener des affaires, mutation dictée par un
consommateur roi exigeant une démarche éthique sans la moindre équivoque.
Ainsi le combat deviendrait conviction, la libération serait bien sûr conservée
intacte du fait de ses valeurs de bonheur inhérent à sa définition. Quant à
l’armement, il bénéficierait de marchés plus pacifiés et deviendrait soft power.
Nous avons eu le privilège de sophistiquer notre outil, des cercles du reboot
avec les conseils de Vincent Montet.
Avis d’expert
Vincent Montet, directeur et fondateur du MBA spécialisé MCI de l’ILV et directeur associé de
l’agence Grenade & Sparks
Les différentes étapes du cycle de « reboot » illustrent une nécessité absolue des trente prochaines
années : comment accueillir la génération Z et réussir l’adaptation de nos vieilles structures aux vagues
successives de révolutions technologiques du XXIe siècle ?
C’est inévitablement en passant par la génération intermédiaire, celle des « grands frères », trait
d’union entre le modèle industriel et celui des « petites poucettes » si justement décrit dans l’ouvrage
éponyme et incontournable de Michel Serres.
Oui, il faut s’éveiller à ce triptyque de valeurs et de motivations des Y.
La première vague d’e-transformation du monde des vingt dernières années qui a vu les start-up
désintermédier des « acteurs-empereurs » de l’économie traditionnelle a en effet libéré chez la
génération Y trois étincelles « intérieures ».
En premier lieu, celle du combat « contre » non plus un état, un système ou des idées, mais contre des
positions dominantes. Cette posture de combat entrepreneurial s’enrichit d’une motivation nouvelle,
celle de la libération du consommateur.
Les Y sont issus de la transformation des médias et des modèles de communication imposés par le 2.0.
La puissance conversationnelle a rejoint celle du 20 heures de TF1. En étant les acteurs de l’ère du
face-à-face où consommateurs et annonceurs, consommateurs et médias sont à égalité, les
entrepreneurs Y ne cherchent plus à cibler le consommateur, mais à lui proposer des modèles et des
frenchpdf.com
outils de libération, de diffusion et de collaboration.
Enfin, leur arsenal se concrétise soit par l’élaboration d’un nouveau modèle de distribution, soit par la
création de multiples fonctionnalités servicielles ou bien encore, et ce cas sera le plus fréquent, par une
innovation technologique en totale rupture avec l’ancien monde.
Comment intégrer cette énergie dans les entreprises actuelles, encore structurant et dominant de
nombreux marchés ? Le modèle proposé ici va enfin plus loin que les discours habituels et bien
pauvres du management de la génération Y. Cette génération voudra se connecter à Facebook pendant
les heures de travail (oh quelle révolution !). L’éveil est bien de comprendre que le défi n’est pas de les
« manager », mais de leur proposer véritablement des nouveaux modèles d’entreprises. Il faut pouvoir
intégrer, recevoir cette nouvelle énergie. Les deux « structures » proposées, l’intraprenariat ou
l’incubation nourrie par « l’œil » bienveillant, par le partenariat avec les boomers, sont les seules
possibilités de garder à l’intérieur un flux transformateur. S’il n’est pas lancé, il se fera à l’extérieur et
le « avec ou sans vous » n’est pas une simple menace verbale.
L’océan bleu des Z : enfin le XXIe siècle commence…
Le reboot proposé par les auteurs est pourtant bien plus ambitieux. Il envisage certes d’intégrer les Y
mais pour mieux anticiper l’arrivée de la génération Z qui, elle, ira bien plus loin dans la
transformation. Les Y sont en fait qu’une petite étape, ils sont l’énergie permettant de transmettre aux
Z, ils sont le réceptacle de la génération bouleversante, celle du « cognitif exaflopique et
algorithmique »[11].
Qui n’a pas appris à lire, à jouer, à apprendre, à penser avec Google ne peut pas réellement saisir ce
qui va arriver. Sans les grands frères Y, nous ne pourrons pas transformer nos organisations et
entreprises pour y accueillir les Z.
Des Z qui ne seront plus « contre » quelque chose, leur motivation de combat sera toute intérieure, ils
auront désormais des convictions, reposant même parfois sur une « nouvelle intelligence intuitive »
nous dit Michel Serres. Plus besoin de motivations extérieures pour partir au combat. Plus difficiles
donc à déchiffrer, à comprendre pour nous, mais leur force et puissance seront phénoménales.
D’autant que l’objectif de libération des Z ne sera plus le consommateur. Quand dès l’âge de 10 ans, le
développement durable est quasiment une discipline scolaire, quand l’économie circulaire et
collaborative vous a émerveillé, quand les enjeux de l’interdépendance mondiale vous sont donnés dès
l’adolescence, c’est le citoyen éco-solidaire que vous voulez libérer. La consommation capitalistique
des deux derniers siècles pourra même devenir obsolète, caduque, symbole d’un modèle d’évolution
dangereux et destructeur. Les Z pourront choisir ce chemin du business responsable. Nous ne voulons
pas ici, tomber dans un angélisme utopique et éco-naïf. Il s’agit simplement d’anticiper la fusion de la
révolution technologique avec l’impératif de développement responsable nécessaire à la survie de la
planète dans les cinquante prochaines années.
Leur armement lui aussi sera transformé, le hard power managérial des boomers et ses palimpsestiques
résurgences chez les Y ne seront plus de mises. Initié dans les années 1990, le soft power modèle de
management humaniste, et reposant sur l’exemplarité et non pas l’autorité, sera leur arme. La
hiérarchie devient matricielle et éphémère, elle est liée à des projets et n’est plus statutaire. La
reconnaissance de l’importance de la plus petite partie d’un collectif dans la réussite générale permet
des motivations et des comportements managériaux bien différents passant de la compétition à la « co-
pétition ».
frenchpdf.com
Le reboot deviendra alors un nouveau départ. L’entreprise traditionnelle transformée avec l’énergie
des Y sera dirigée par la lumière de la génération Z. Cette lumière à la fois onde et matière construira
l’histoire de notre siècle.
[1]
Directeur artistique de la marque Diesel
[2]
Director of interaction and experience research chez l’Intel Labs.
[3] Group Vice President, Digital/New Media and Multicultural Marketing Macy’s.
[4]
Source : webpronews.
[5] « Buzz Media Mobile Millennials », 2012.
[6] Source : “Mobile In-Store Research How in-store shoppers are using mobile devices”, avril 2013.
[7]
Karim Stambouli et Éric Briones, Eyrolles, 2002.
[8] John Wiley & Sons, 2011.
[10] Amazon Publishing, 2013, James McQuivey est directeur du département « art de vivre » du bureau
de style Nelly Rodi.
[11] Exaflop étape du milliard de milliard d’opération qu’un microprocesseur peut réaliser en une seconde
et très bientôt atteinte (2020). Elle symbolise les possibilités de « tris » de milliard de données des
« traces » numériques et la création technologique à des échelles macro et nano (10_9) qui vont
permettre l’émergence de la fusion entre le vivant et la technologie. Vivant « physique » et biologique
certes mais aussi psychologique et cognitif avec les progressions des sciences et applications
algorithmiques. Les capacités « à penser » et « à décider » de la machine sont aujourd’hui déjà
étonnantes.
frenchpdf.com
CONCLUSION
frenchpdf.com
performance qu’au Premium.
Nous croyons que la Génération Y exige des marques de luxe un univers
100 % premium, à un prix low-cost.
Nous croyons que la Génération Y demande de la transparence aux
marques et qu’il est normal pour elle que le luxe puisse à tout moment
justifier son statut privilégié.
Nous croyons que la Génération Y développe une totale intolérance au délit
d’authenticité.
Nous croyons que la Génération Y intègre la dimension durable
(responsabilité sociale, économique et environnementale) dans la valeur
d’un produit de luxe.
Nous croyons que la Génération Y est complètement luxophage et
sincèrement addict aux codes de marque. Elle développe d’ailleurs une
érudition unique (dépassant de loin toutes les précédentes générations) en la
matière.
Nous croyons que la Génération Y idéalise le luxe et en fait bien souvent sa
madeleine de Proust préférée.
Nous croyons que la Génération Y aimerait que le luxe joue plus avec elle
et « gamifie » davantage leurs échanges.
Nous croyons que la Génération Y plébiscite le luxe qui sait développer un
discours LOL augmenté de poésie et de lyrisme.
Nous croyons que la Génération Y aime les communications luxe qui
sortent du cadre et qui s’assument en tant qu’authentiques Ovnis créatifs.
Nous croyons que la Génération Y choisit les marques misant sur
l’innovation permanente.
Nous croyons que la Génération Y se projette dans le lifestyle des
blogueuses de mode à condition qu’elles ne se la racontent pas.
Nous croyons que la Génération Y chinoise rejette les megabrands, au
profit des marques de niche qui servent sa singularité.
Nous croyons que le meilleur ami de la Génération Y est son smartphone,
ne pas le prendre en compte c’est l’oublier elle.
Nous croyons que la Génération Y est l’énergie fondamentale pour le
reboot des entreprises, à condition de bien l’organiser.
Nous croyons que la Génération Y peut être le néo-libérateur d’un luxe
sclérosé par ses préjugés et se transformer en véritable Jack Torrance[1] de
l’hôtel Overlook…
Nous croyons que la Génération Y ne s’interdit rien, pas même de créer de
nouvelles maisons de luxe en totale cohérence avec ses valeurs et son
monde.
frenchpdf.com
Nous croyons que la Génération Y peut s’engager avec une marque de luxe
à condition qu’elle lui démontre son attachement authentique.
Nous croyons enfin que la Génération Y ouvre la voie à la Génération Z :
celle qui, quand nous nous soucierons encore de la protection privée, ne verra aucun mal à
vendre ses données.
celle qui, quand nous ne comprendrons pas encore le partage incessant de tous tout le temps,
créera des filtres exceptionnels pour faire le tri.
celle qui, quand nous utiliserons encore Google pour trouver et s’informer, foncera sur des
réseaux de confiance et comptera sur les vidéos de YouTube pour prendre des décisions.
celle qui, quand nous regarderons encore la télévision sur des écrans de télévision, décidera
des programmes sur leurs tablettes et leurs smartphones.
celle qui, quand nous écouterons encore la radio sur des postes de radio, n’imaginera pas la
musique sans Pandora, Spotify ou Deezer.
celle qui, quand nous continuerons à faire confiance à nos amis et à notre famille, partagera
tout ou presque avec des inconnus à travers le monde.
[1] Jack Torrance est le personnage joué par Jack Nicholson dans le film Shining de Stanley Kubrick, tiré
du bestseller de Stephen King.
frenchpdf.com
POSTFACE
frenchpdf.com
CQFD, seules les Marques smarts, révolutionnaires et géniales survivront. C’est sûr.
Hugh WILSON
Diplômé de l’Institut d’Études Politiques de Paris, professeur
de marketing à l’École Supérieure d’Arts Graphiques
dite Penninghen, directeur de la marque Clarins.
frenchpdf.com
PRÉSENTATION DES AUTEURS
Grégory Casper
9 ans d’expériences dans le métier de Concepteur Rédacteur dans des agences traditionnelles et des
agences digitales ont permis à Grégory Casper de s’exprimer pleinement et créativement au sein d’agences
de publicités parisiennes comme BETC, Lowe Stratéus, Six & Co (Groupe Fullsix), ou encore Digitas
(Groupe Publicis).
Chroniqueur sur Darkplanneur et Influencia, il est également professeur à l’ISCOM où il enseigne la
Conception Rédaction et le Jugement Créatif en 3e année ainsi que le Storytelling en 5e année. En 2013,
#SupDeWeb le contacte pour assurer des cours de Création Digitale.
Lorsqu’Éric Briones lui propose de co-écrire ce livre, il accepte avec enthousiasme et y voit la possibilité
d’éclairer sous un jour nouveau une génération mal considérée dont il fait partie. Grégory Casper travaille
aujourd’hui comme planneur-créatif freelance pour les marques et les agences.
frenchpdf.com
REMERCIEMENTS
Nos remerciements sont nombreux car ils incarnent la nature profondément participative de notre
création.
Les remerciements d’Eric Darkplanneur Briones
Tout d’abord merci à Jean Christophe Herail, président de Publicis EtNous, qui est mon mentor dans le
métier, depuis mes premières heures dans le groupe Publicis. À toute l’agence, en particulier Isabelle
Giafferi, qui m’a infusé sa science du schéma, Fabien Mouillard et Marine Corson pour leurs précieux
conseils artistiques.
Merci :
À Alexandre Malsch, Alexandre Assous et Rodolphe Pelosse (Meltygroup) qui m’ont soutenu dès le
premier jour dans cette aventure.
À mon complice photographe James Bort et ma muse Y, Anaïs Duquesne depuis le premier jour.
À Corinne Mrejen et Elisabeth Ciadella (M Publicité), qui m’ont permis de creuser le premier chemin
vers la Génération Y, pendant nos inspirantes Rencontres du Luxe.
Au monde des marques, qui nous ont offert le meilleur de leur réflexion, en la personne de : Hugh Wilson
(Clarins), Guillaume Cappon et Margot Canfeure (Shiseido), Julie Ceccaldi (Biotherm), Marie-Laure
Dubuisson (MAKE UP FOREVER), Katia Hersard (Fnac), Odile Roujol (Orange France), Charlotte
Bouvier (Mama Shelter)…
À Yvonne Herbin et Gwenaëlle Thebault (Stylist), qui m’ont permis d’ouvrir la porte du bureau d’Aude
Walker, notre grande « préfaceuse ».
Aux précieux Sylvine Nuret et Vincent Grégoire (Nelly Rodi).
À Wanessa Dali, pour sa science des insights chez Zenith Optimedia.
À la créativité stratégique illimitée de Stéphane Galienni (Agence Balistikart)
Au monde de l’éducation, Marc Drillech (Ionis Group), Philippe Bastien (ISTEC), Elodie de Boissieu
(EIML), Marie Hélène Madilian (ECS).
Aux amis chers, qui m’ont permis de tenir le cap, quand l’adversité a parfois frappé à la porte, mon « frère
spirituel » Thomas Mondo, ma chère équipière Céline Cathary, mes chères relectrices Carole Rodesch et
Karima Riahi, les lumières poétiques de Charlotte Tisserant, le cogito Z de Vincent Montet et la pensée
frenchpdf.com
rock de Thomas Jamet.
À nos cent interviewés (Isabelle Musnik, Jacques Séguéla, Jean-Jacques Picart, Michel Maffesoli, Olivier
Altmann, Fred & Farid, Nicolas Bordas, Natacha Dzikowski, Georges Mohammed Chérif…) et en
particulier à Stephen du Tag Parfait, qui m’a donné involontairement, l’idée d’écrire notre livre.
À mes « sœurs blogueuses » : Deedee, Geraldine Dormoy, Kenza Sadoun, Lily Ponthieux, Manon
Anchor, Babillages, Judith Amsallem… et mes frères blogueurs Emery Doligé, PPC, Henri Kaufman et
Matthieu Lebreton.
À Merav Griguer pour ses précieux conseils juridiques.
Et puis merci à notre Task Force Y toute entière.
À notre maison d’édition Dunod, en particulier à l’équipe éditoriale et François-Xavier Robert.
Et enfin, à mes chers parents, bien sûr.
Les remerciements de Grégory Casper
Tout d’abord merci à mon épouse qui a dû me partager avec ce livre pendant presque un an. Merci ma
chérie pour ta patience.
Merci aussi à tous mes clients qui m’ont permis de prendre le temps d’écrire ce livre sans avoir peur du
lendemain.
Merci ensuite à nos nombreux interviewés (Jean-Jacques Picart, Georges Mohammed Chérif et Cyril
Paglino, Fred & Farid, Nicolas Bordas, Joseph Ghosn, Marc Drillech, Emmanuel Vivier…) et en particulier
Michel Maffessoli et Georges Lewi auprès desquels je me suis senti redevenir étudiant, passionné par leurs
pensées et leurs réflexions.
Et puis parce qu’en tant que concepteur rédacteur j’aime les marques, je remercie le Wifi du Starbucks
Opéra, le thé Twinings Earl Grey pour sa théine bien utile, Orange pour son forfait 4G qui m’a permis de
communiquer avec Éric même lorsque celui-ci était perdu en montagne, à Apple pour avoir imaginé le Mac
Book Air sur lequel ce livre a été quasiment intégralement écrit et si je précise quasiment c’est aussi pour
avoir le plaisir de remercier Moleskine, le cahier souple sur lequel j’ai griffonné, écrit, schématisé et dessiné
des trucs plus ou moins utiles pour ce livre, enfin je remercie aussi la RATP qui m’a permis d’être à l’heure
à tous les rendez-vous organisés pour donner vie à ce livre.
Un grand merci également à notre Task Force Y toute entière sans laquelle ce livre ne serait pas le même :
Allan Joseph pour son professionnalisme et sa réactivité (promis je te réveillerai plus à 7h), merci à
Stéphane Bal pour son talent (alors tu préfères Photophop ou After ?), merci à Manon Quantin et à sa
créativité débordante (tu vas pas t’ennuyer le week-end maintenant ?), merci à Estelle Giraudeau pour son
énergie (tu marches à quoi ?), merci aussi à Christel Van Isacker pour son dynamisme (et que je ne
confondrai plus avec Estelle maintenant), merci enfin à Aristide, à toute l’équipe de Bonne Gueule pour
leur science de la mode et du goût (on reparlera blouson les gars promis). Merci aussi à Charlotte Tisserant,
Pierre de la Saussay, Laurent Julien Montfils, Camille Broussin, Yoan, N. Dorny, Peter Dona et Jean-Noël
Chaintreuil.
Je rappelle ici que bon nombre de ces jeunes sont actuellement à la recherche d’un emploi alors n’hésitez
pas, ce sont des bons !
Un merci amical et personnel à Mathieu Devillers et Marc Fouchard pour leurs précieux conseils
frenchpdf.com
graphiques. Merci aussi aux lumières artistiques de Vincent Gaillot.
Merci également à l’Hôpital Cochin et au service pneumologique qui m’a permis de continuer ma mission
après seulement 4 jours d’hospitalisation.
J’ajouterai pour finir un merci tout particulier à un homme dont sincèrement j’ai oublié le nom et à qui je
dois d’avoir voulu approfondir la question du luxe et des Y. Cet homme, un jour a heurté mon pied lors
d’une réunion et alors que je n’étais que stagiaire m’a dit en regardant mes chaussures « Ben dis donc t’as
les moyens de te payer ça toi ? » avec un air à la fois plein de dédain et d’envie. À l’époque je n’ai rien
répondu. Aujourd’hui ce livre est ma réponse.
frenchpdf.com
frenchpdf.com
frenchpdf.com
frenchpdf.com
frenchpdf.com
frenchpdf.com
frenchpdf.com
frenchpdf.com
frenchpdf.com
frenchpdf.com
frenchpdf.com
frenchpdf.com
frenchpdf.com
frenchpdf.com
frenchpdf.com
frenchpdf.com
Souhaitez-vous avoir un
accès illimité aux livres
gratuits en ligne ?
Désirez- vous les télécharger
et les ajouter à votre
bibliothèque ?
French .com
À votre service!