Immunoglobulines Cours

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UNIVERSITE DE SOUSSE

Faculté de Médecine
« Ibn El Jazzar » Sousse

Cours d’Immunologie
1ère année Médecine

Dr Samar Samoud

2021
LES IMMUNOGLOBULINES
I. DEFINITION

Les immunoglobulines (Ig) sont des glycoprotéines douées d'activité anticorps, c'est-à-dire
capables de se lier spécifiquement à un déterminant antigénique unique, ou épitope. Elles sont
présentes dans le plasma, les liquides extravasculaires et les sécrétions. Elles sont produites par
les lymphocytes B, mais seulement excrétées par leur descendance plasmocytaire. Un
lymphocyte B donné produit des Ig qui ne portent qu'une seule spécificité anticorps. Il est donc
capable de ne reconnaître qu'un seul épitope, et ce pour toutes les étapes cellulaires de sa
différenciation, jusqu'au stade ultime du plasmocyte sécréteur d'anticorps. Les anticorps sont les
médiateurs de l'immunité humorale. On retrouve les Ig principalement dans la fraction des
gammaglobulines à l'électrophorèse des protéines. Outre leur fonction anticorps spécifique, les Ig
sont caractérisées par leur très grande hétérogénéité. L'Ig présente une dualité structurale qui
explique sa dualité fonctionnelle : elle possède deux extrémités variables identiques et propres à
chaque Ig, et une portion constante définissant cinq classes principales : IgG, IgA, IgM, IgD et
IgE, par ordre de concentration sérique décroissant. Les parties variables sont le support de
l'activité anticorps, et une Ig monomère peut ainsi lier deux épitopes, alors que la partie constante
est le support des propriétés biologiques des Ig.
De plus, la reconnaissance de l'antigène par les lymphocytes B se fait selon deux modalités. Sous
forme libre en solution, dans le sang et les liquides extravasculaires, elle est connue depuis
longtemps sous le vocable d'anticorps. Ancrée à la membrane du lymphocyte B elle y est connue
sous le nom d'Ig membranaire, et y participe à la formation du récepteur du lymphocyte B pour
l'antigène (ou BCR). Les deux types de molécules ne diffèrent que par un court segment
peptidique, qui sert précisément d'ancrage dans la membrane du lymphocyte B.

II. STRUCTURE GENERALE DES IMMUNOGLOBULINES. NOMENCLATURE.

Toutes les Ig, en dépit de leur très grande hétérogénéité, sont bâties sur un modèle de base
commun, symétrique, celui de l'IgG monomère qui fut la première décrite. Elles comportent
toutes 4 chaînes polypeptidiques groupées en deux paires identiques de taille inégale :

- D'une part 2 chaînes lourdes dites H, pour "heavy", d'environ 50 kD, d'environ 450 à 600
acides aminés.

- D'autre part 2 chaînes légères dites L, pour "light", d'environ 25 kD, d'environ 210 à 220
acides aminés.

Les chaînes lourdes sont unies entre elles par un ou plusieurs ponts disulfures.
Les chaînes légères sont unies aux chaînes lourdes par un pont disulfure très proche de leur
extrémité carboxyterminale. Les chaînes légères sont communes à l'ensemble des classes d'Ig,
mais on en distingue 2 types antigéniquement différents : le type kappa (κ) et le type lambda (λ).
Il n'existe pas de différence fonctionnelle entre les deux types, mais la répartition au sein des
espèces est variable : le rapport est de 65% / 35% dans l'espèce humaine. Dans une molécule
donnée d'Ig les deux chaînes légères sont toujours du même type : il n'y a jamais de molécules
hybrides, même dans les Ig monoclonales produites par des plasmocytes malins.
Les chaînes lourdes sont au contraire spécifiques pour chaque classe d’Ig : cinq isotypes (gamma
(γ), alpha (α), mu (μ), delta (δ)] et epsilon (ε)) définissent respectivement les 5 classes d’Ig : IgG,
IgA, IgM, IgD et IgE.

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III. STRUCTURE FINE DES CHAINES LEGERES ET LOURDES DES
IMMUNOGLOBULINES.

III.1. CHAÎNES LÉGÈRES.

- Les chaînes légères comportent généralement 214 acides aminés, numérotés à partir de
l'extrémité N-terminale,

- La moitié carboxyterminale de la chaîne est dite partie constante (CL). Elle renferme les
acides aminés 108 à 214.

- En revanche les 107 premiers acides aminés diffèrent beaucoup d'une chaîne légère à
l’autre ; c'est la partie variable (VL).

Au sein de cette région variable il existait trois séquences de cinq à dix résidus où la variabilité
était maximum. Ces trois zones sont désignées comme les zones hypervariables ou HVR ou CDR
pour "complementary determining region". Ces trois CDR, appelés respectivement CDR1, CDR2
et CDR3 sont séparés par des régions plus longues, nettement moins variables, plus conservées
qui constituent la charpente ou "framework". Cette charpente représente 80 % de la région VL.

III.2. CHAÎNES LOURDES.

Elle est constituée de deux parties franchement inégales :

- Les 3/4 du côté C-terminale ont une composition relativement invariante : c'est la région
constante (C). Elle est constituée de trois segments successifs, comprenant chacun
environ 110 acides aminés. Entre le premier et le second segment de la région constante
se trouve un court segment d'une vingtaine d'acides aminés qui contient les ponts
disulfures entre les chaînes lourdes et qui est appelé région charnière.

- En revanche le 1/4 du côté N-terminal est très variable d'une séquence à l'autre.

C'est la région variable ou VH, qui tout comme son homologue VL possède trois régions
hypervariables ou CDR situées sensiblement aux mêmes endroits que ceux de VL et séparées
également par des régions charpentes plus conservées.
Le site anticorps, ou paratope, d'une Ig est constitué de l'association des régions
VH et VL, et plus particulièrement des différents CDR.

III.3. NOTION DE DOMAINE ET DE SUPERFAMILLE DES IMMUNOGLOBULINES.

Chaque région d'homologie (un segment de 110 acides aminés), VL, CL, VH,
CH1, CH2 et CH3 forme un domaine compact stabilisé par un pont disulfure et possédant une
certaine autonomie thermodynamique. On regroupe toutes ces molécules au sein de la
superfamille des immunoglobulines, car descendant probablement toutes d'un gène ancêtre
commun codant pour un domaine primitif "Ig-like".

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IV. CARACTERISTIQUES DES DIFFERENTES CLASSES D'IMMUNOGLOBULINES.

IV.1. IgG.

Sa concentration physiologique moyenne est d'environ 12 g/L, son poids moléculaire est de
l'ordre de 160 kD correspondant à un coefficient de sédimentation de 7 S en ultracentrifugation.
Elle se présente sous forme de monomère et sa chaîne lourde γ possède trois domaines constants
et une région charnière individualisée.
L'IgG ne possède qu'une seule chaîne polysaccharidique, ne représentant que 2 à 3 % du poids de
la molécule. La plupart des anticorps circulants appartiennent à cette classe. Les anticorps de
classe IgG sont des anticorps opsonisants, fixant le complément et neutralisant les toxines
bactériennes et les virus.

IV.1.1. Fragments obtenus par dégradation enzymatique.

IV.1.1.1. La papaïne
La papaïne activée scinde l'IgG en trois fragments de taille voisine, en clivant la molécule au
niveau de la région charnière, avant les ponts disulfures unissant les deux chaînes lourdes :

- Deux fragments identiques dits Fab pour "Fragment antigen binding"

- Un fragment dit Fc (fragment cristallisable)

IV.1.1.2. La pepsine

La pepsine, scinde, à pH 5, la molécule d'IgG aussi dans la région charnière, mais après les ponts
disulfures unissant les chaînes lourdes. Il en résulte un seul gros fragment, appelé F(ab')2, tandis
que la moitié carboxyterminale restante est clivée en plusieurs peptides dont le plus volumineux
est appelé pFc.

IV.1.2. Ponts disulfures.

Il existe donc, comme nous l'avons vu, des ponts disulfures intercaténaires (inter-chaînes), entre
les chaînes lourdes, et entre celles-ci et les chaînes légères, qui sont les cibles des agents
réducteurs. De plus existent des ponts disulfures intracaténaires (intra-chaînes) qui stabilisent les
domaines de 110 acides aminés et qui sont eux résistants aux agents réducteurs.

IV.1.3. Les sous-classes d'IgG.

Il existe en fait quatre sous-classes dont la structure et les propriétés diffèrent légèrement. Ces 4
sous-classes sont appelées IgG1, IgG2, IgG3 et IgG4 et sont définies par leurs chaînes lourdes :
respectivement γ1, γ 2, γ 3 et γ 4. Tous les individus de l'espèce humaine possèdent ces 4 sous-
classes d'IgG au même titre qu'ils possèdent toutes les classes d'Ig.
Chaque sous-classe présente des propriétés biologiques spécifiques : les IgG4 n'activent pas le
complément à la différence des trois autres.
La fixation aux différents Fc γ récepteurs est variable selon les sous-classes.

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IV.2. Les IgM.

Les IgM existent sous deux formes moléculaires :

- Pentamère sérique
- Monomère à la surface du lymphocyte B

IV.2.1. La structure

C'est la plus volumineuse des Ig sériques : son poids moléculaire est de 970 kD avec un
coefficient de sédimentation de 19 S. Son taux sérique moyen est d'environ 1,6 g/L. Chaque
molécule d'IgM est formée de 5 sous-unités (ou monomères), reliés entre elles par des ponts
disulfures au niveau du CH3 : chaque sous-unité isolée conserve le pouvoir de se lier à l'antigène
mais pas le pouvoir d'agglutiner. La chaîne lourde μ possède un domaine constant
supplémentaire : elle a donc un domaine variable et 4 domaines constants. Ceci, ajouté au fait
qu'elle possède aussi plus de résidus polysaccharidiques (5 soit 12 % du poids final de la
molécule).

A l'extrémité carboxyterminale se lie à une petite glycoprotéine, appelée chaîne J (pour


"joining"), dont l'unique fonction est d'assurer la polymérisation des Ig. Le gène de la chaîne J est
porté par un chromosome différent (chromosome 4) de ceux des gènes des Ig et ne subit aucun
réarrangement au cours de la différenciation du lymphocyte B.
La forme particulière de cette molécule d’IgM lui confère un remarquable pouvoir agglutinant,
de loin supérieur à celui des IgG. De même, son pouvoir lytique, lié à l'activation du
complément, est très puissant : ceci s'explique par les contraintes spatiales pour l'activation du
premier composant (C1q) du complément.
Ces deux propriétés, fort pouvoir agglutinant et forte activation du complément, expliquent que
les anticorps de cette classe soient particulièrement adaptés pour lutter contre la dissémination
par voie sanguine des micro-organismes.
Les premiers anticorps qui apparaissent après une primo-immunisation sont de classe IgM. Ils
cèdent généralement la place aux anticorps de classe IgG, plus abondants et plus durables.

Les IgM n'ont pas de sous-classes et sont également la première classe d'immunoglobulines à
apparaître chez le nouveau-né.

IV.2.2. Les IgM membranaires

A la surface du lymphocyte B, l'IgM est la principale Ig membranaire où sa fonction est celle de


récepteur de l'antigène. Celle-ci est sous forme de monomère avec une structure légèrement
différente dans son extrémité carboxyterminale, comparativement à la forme sécrétée : il existe
en effet une séquence supplémentaire d’acides aminés composant un segment hydrophobe
d'ancrage dans la membrane plasmique.

IV.3. Les IgA.

L'IgA est caractérisée par deux formes moléculaires de présentation. Dans l'espèce humaine on
distingue deux compartiments, dans lesquels la répartition et la fonction des IgA sont différentes
: le compartiment sérique et le compartiment muqueux.

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IV.3.1. L'IgA sérique.

Elle constitue la deuxième classe d'Ig sérique après les IgG, puisqu'elle représente environ 10 %
du total des Ig avec un taux moyen de 2 à 3 g/L. Elle se présente principalement sous forme de
monomères, avec un coefficient de sédimentation de 7S, un poids moléculaire de 160 kD. Elle
est bâtie sur le modèle général avec deux chaînes lourdes H, qui ont trois domaines constants, et
deux chaînes légères L. On connaît deux sous-classes d'IgA: l'IgA1 et l'IgA2. Dans le sérum
l'IgA1 est l'isotype de loin majoritaire (90 %).

V.3.2. L'IgA sécrétoire ou exocrine.

C'est l'Ig principale des sécrétions salivaires, lacrymales, nasales, bronchiques, gastro-intestinales
et mammaires. Elle est synthétisée par les plasmocytes des chorions et des muqueuses. Les
muqueuses représentent 400 m2 de contact avec l'extérieur et sont la principale porte d'entrée des
microbes. C'est dire le rôle fondamental de l'IgA exocrine fonctionnant comme une première
barrière de défense vis-à-vis des substances étrangères. Les principales sécrétions contenant de
l'IgA sécrétoire sont les larmes, la salive, le liquide nasal, le liquide bronchique, la bile, le
colostrum, le lait, les sécrétions intestinales et génitales.
La structure de l'IgA sécrétoire diffère de celle de l'IgA sérique : son coefficient de sédimentation
est de 11 S et son poids moléculaire de 400 kD. Elle est en effet constituée de deux monomères
d'IgA 7 S reliés par une chaîne J et comporte une chaîne glycoprotéique supplémentaire : le
composant sécrétoire ou pièce sécrétoire. Cette dernière n'est pas synthétisée par les plasmocytes,
contrairement aux monomères d'IgA et à la chaîne J, mais par les cellules épithéliales. De même,
quelles que soient l'origine et la sous-classe, l'IgA est incapable d'activer le complément par la
voie d'activation classique.

V.4. L'IgD.

Son taux physiologique sérique est très faible de l’ordre de 0,03 g/L, soit 300 fois moins que
l'IgG. L'IgD a un poids moléculaire de 184 kD avec une constante de sédimentation de 7 S. Elle
confère au modèle des Ig monomères : 2 chaînes lourdes H unies à deux chaînes légères L. La
chaîne lourde a trois domaines constants. L'IgD est riche en oligosaccharides (6 à 7 résidus
polysaccharidiques représentant 9 à 14 % du poids moléculaire) et caractérisée par une région
charnière particulièrement longue. C'est au niveau cellulaire que cette classe d'Ig paraît jouer un
rôle fondamental. On la retrouve fréquemment à la surface des lymphocytes B en association
avec des IgM monomères. Elles ont la même région variable VH et la même chaîne légère.

IV.5. L'IgE.

L'IgE est la moins abondante des Ig : chez l'adulte normal, son taux physiologique moyen est très
faible (soit 100 à 200 unités internationales). Ceci représente un taux 100 000 fois moindre que la
concentration physiologique des IgG, et pourtant c'est sans doute la classe d'Ig qui intéresse le
plus les Allergologues.
Malgré leur très faible concentration sérique, les IgE jouent un rôle considérable dans les
manifestations d'hypersensibilité immédiate, telles que le choc anaphylactique, le rhume des
foins, l'asthme.

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IV.5.1. Structure et Propriétés.
Sa structure est celle d'un monomère avec 2 chaînes lourdes H et deux chaînes
Légères L. Tout comme la chaîne μ la chaîne lourde ε possède 4 domaines constants. L'IgE fait
188 kD. De même elle ne possède pas de région charnière. Elle contient 13 % de sucres (6
résidus polysaccharidiques).
Sa demi-vie est très brève : 2,5 jours dans le sérum, donc la plus brève de toutes les Ig. Mais on
sait que l'IgE fixée aux mastocytes et aux polynucléaires basophiles est beaucoup plus protégée
de la destruction catabolique et a une demi-vie de plusieurs semaines, voire de plusieurs mois.
L'IgE ne fixe pas le complément par la voie classique. L'IgE ne traverse pas le placenta. V.5.2.
Récepteurs pour le Fc des IgE (FcεR)
On en connaît deux types principaux ;
FcεRI : C'est un récepteur de forte affinité présent sur les polynucléaires basophiles,
éosinophiles, les mastocytes et les cellules de Langerhans.
FcεRII : Le récepteur de type II est dit de faible affinité. Il est également désigné sous le nom de
CD23, il est présent sur divers types cellulaires en particulier les monocytes/macrophages, les
éosinophiles hypodenses, les plaquettes mais aussi les mastocytes, les basophiles, les
lymphocytes T et B, les cellules de Langerhans.

V. ONTOGENIE DES IMMUNOGLOBULINES.


Le foetus est capable de synthétiser assez tôt certaines classes d’anticorps : on décèle des
anticorps de classe IgM dès la 10ème semaine de la vie foetale et de très faible quantité d'IgG dès
la 12ème. Par contre on ne retrouve pas d'anticorps de classe IgA, IgD ou IgE. Il est bien connu
que seules les IgG maternelles franchissent le placenta par un phénomène de transport actif.
Cependant ce passage reste modeste pendant les deux premiers trimestres de la grossesse : ce
n'est que vers la 20ème semaine que la perméabilité placentaire pour cette Ig augmente
brusquement. Les enfants nés avant terme sont donc d’autant moins protégés que leur
prématurité est grande.

VI. LES DIFFERENTS NIVEAUX D'HETEROGENEITE DES IMMUNOGLOBULINES


Nous avons vu que les Ig étaient une famille très hétérogène. L'Ig est, comme toute protéine,
antigénique et constituée de différents épitopes. Selon la nature et l'expression de ces motifs
antigéniques on peut classer les différents niveaux hétérogénéité en trois types :
VI.1. L'ISOTYPIE.
Les isotypes sont constitués de motifs antigéniques que l'on rencontre chez tous les individus
d'une même espèce. Les déterminants isotypiques sont localisés sur les domaines constants des
chaînes lourdes et légères.
VI.2. L'ALLOTYPIE.
L'allotype est un motif antigénique qui ne s'observe, au sein d'une espèce, que chez un certain
nombre d'individus donnés, et non chez tous, définissant des sous-groupes de population. Les
allotypes sont les produits alternatifs (mutuellement exclusifs) de certains gènes polymorphes.

L'exclusion allélique ou haploïdie fonctionnelle :


Pour un allotype donné, l'individu hétérozygote hérite de chacun de ses deux parents d'un allèle.
Bien que le lymphocyte B, comme toute cellule, soit diploïde, et possède 2n chromosomes, et
donc deux allèles pour chaque locus polymorphique, les molécules d'Ig produites par un

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lymphocyte donné ne seront porteuses que d'un seul des allotypes, et jamais des deux à la fois.
Ce phénomène d'haploïdie fonctionnelle, est appelé exclusion allélique.
VI.3. L'IDIOTYPIE.

Les idiotopes sont des épitopes portés par le fragment Fv (VH-VL) des Ig. L'ensemble des
idiotopes d'une molécule d'Ig forme son idiotype.

VII. RELATIONS ENTRE STRUCTURE ET ACTIVITE BIOLOGIQUE.

VII.1. PROPRIÉTÉS PORTÉES PAR LE FRAGMENT FAB DES IG: LE SITE ANTICORPS.

Le site anticorps est localisé du côté amino-terminal des deux chaînes. On a déjà insisté sur le
caractère symétrique de la molécule : les deux sites anticorps (paratopes) sont identiques. Il est
clairement établi que les deux chaînes légères et lourdes participent activement à la constitution
du site anticorps. L'ensemble des sites anticorps dont peut disposer un individu, constitue ce qui
l'est convenu d'appeler son répertoire B, lui permettant de reconnaître les déterminants
antigéniques correspondants.

VII.2. PROPRIÉTÉS PORTÉES PAR LE FRAGMENT FC.

Le fragment Fc est dénué de toute activité anticorps mais est le support de plusieurs activités
biologiques très importantes qui confèrent à l'Ig son caractère bifonctionnelle : liaison de
l'antigène puis propriétés effectrices. A la différence des chaînes lourdes, on ne connaît pas de
fonctions biologiques associées au fragment CL. Ces propriétés résultent de l'existence de sites de
liaison spécifiques sur les domaines constants pour différents types de molécules, solubles
(complément) ou membranaires (RFc).

VII.2.1. Catabolisme.

La vitesse de catabolisme, ou la durée de vie des diverses classes d'Ig dans l'organisme est une
fonction réglée par le fragment Fc. En effet cette durée de vie est approximativement la même
pour le fragment Fc que pour l'Ig native, alors que le fragment Fab isolé est au contraire très
rapidement catabolisé. Les IgG ont une demi-vie d'environ trois semaines.

VII.2.2. Traversée du placenta


.
Seules les IgG traversent le placenta dans l'espèce humaine, assurant le transfert de l'immunité
humorale de la mère à l'enfant (immunité passive) : le sérum du nouveau-né renferme un taux
d'IgG au moins égal à celui de sa mère.

VII.2.3. Traversée des muqueuses.

Cette propriété concerne principalement les IgA dans leur forme sécrétoire selon un mécanisme
actif qui transfère le dimère d'IgA du chorion muqueux sous-jacent vers la lumière intestinale,
pulmonaire, etc... Ce transport repose sur l'existence d'un récepteur spécifique qui reconnaît
l'extrémité Fc des Ig polymères, qui est la pièce sécrétoire.

VII.2.4. Fixation du complément.

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Seules les IgM et les IgG (sauf les IgG4) sont capables de fixer le premier composant C1q de la
voie classique du complément. Encore faut-il pour déclencher l'activation que au moins deux
domaines CH2 d'IgG soient proches l'un de l'autre à une distance correspondant aux dimensions
de la molécule C1q. Par contre, l'IgM, de par sa structure pentamérique, est dans la bonne
configuration.

VII.2.5. Fixation aux récepteurs des fragments Fc (FcR).

Ces récepteurs, exprimés variablement à la surface de différents types cellulaires, appartiennent


tous, à l'exception du récepteur de faible affinité des IgE (CD23), à la superfamille des
immunoglobulines. Selon le type de RFc, et en fonction de la cellule qui l’exprime, la liaison des
Ig aux RFc peut entraîner :
- la phagocytose après opsonisation
- la cytotoxicité cellulaire anticorps dépendante (ADCC)
- l’anaphylaxie
- la régulation de la production d’anticorps

VIII. GENES DES IMMUNOGLOBULINES.

Le nombre de structures différentes que le système immunitaire est appelé à reconnaître est
extrêmement élevé. Le problème qui se pose est de savoir comment le système immunitaire peut
générer une telle diversité, puisque le nombre total de gènes chez l'homme se situe aux alentours
de 5x104 pour l'ensemble du génome.
L'étude des séquences des chaînes polypeptidiques lourdes et légères d'Ig a conduit, comme on
l'a vu, à la reconnaissance de leur division en parties variables et constantes ; il est donc
rapidement devenu évident que de telles chaînes ne pouvaient être commandées par un seul gène
comme le voudrait la biologie moléculaire classique. On a pu montrer qu'il n'y avait bien qu'un
seul ARN messager par chaîne polypeptidique, bien suffisamment long pour traduire la totalité
de la chaîne. On a donc été conduit à postuler que la jonction V-C se produisait au niveau de
l'ADN.
Les gènes des différentes chaînes ont été localisés : sur le chromosome 14 pour les chaînes
lourdes, sur le chromosome 2 pour les chaînes κ et sur le chromosome 2 pour les chaînes λ.
On est ainsi arrivé à la conclusion que la diversité des anticorps reposait sur des mécanismes de
recombinaisons génétiques entre fragments géniques. Ces fragments sont éloignés et non
transcrits dans l'ADN génomique. Uniquement dans le lymphocyte B qui se différencie ces gènes
vont être rapprochés (réarrangés) pour être transcrits et formés un ARN messager primaire.
Il a été montré que l'obtention d'une région variable complète nécessitait le rapprochement de
deux fragments géniques pour les chaînes légères et de trois pour les chaînes lourdes. En effet,
pour les deux types de chaînes, on décrit des gènes V codant pour la région V et des gènes J
(pour jonction) pour la dizaine d'acides aminés C-terminaux de liaison avec le premier domaine
constant. Uniquement pour les chaînes lourdes existe un troisième type de fragment génique, des
gènes D (pour diversité) codant pour quelques acides aminés, localisés dans le CDR3, entre les
produits des gènes V et des gènes J.

Gènes des chaînes légères :


Le locus IgK s'étend sur 1820 kb et comprend un seul gène C et 300 gènes V dont 34
fonctionnels. Il existe 5 variants J différents sur l'ADN génomique.

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Pour les gènes des chaînes légères λ étendus sur 1000 kb, l'organisation est tout à fait comparable
à la seule différence près qu'il existe 30 gènes V dont 26 sont fonctionnels, 4 gènes C et 4 gènes
J.
On distingue donc quatre étapes conduisant à la production de chaînes légères pour le
lymphocyte B. Dans l'ADN en configuration germinale (ou embryonnaire) une recombinaison
somatique rapproche un gène V d'un gène J avec excision de l'ADN intercalaire. La deuxième
étape de transcription conduit à un ARNm primaire de l'ensemble V-J-intron-C. La troisième
étape d'épissage élimine l'intron et aboutit à un ARNm mature qui est finalement traduit en
chaîne polypeptidique par la quatrième étape.

Gènes des chaînes lourdes :

L'organisation des gènes des chaînes lourdes est un peu plus complexe. Le locus
IgH s'étend sur 1350 kb. Il n’existe 1000 gènes VH dont 46 à 50 de fonctionnels, tous situés sur le
chromosome 14 chez l'homme de même que les gènes commandant aux diverses parties
constantes. Mais la variabilité est ici accrue, apportée non seulement par l'existence de gènes J
différents des précédents au nombre de 5 gènes fonctionnels, mais encore par des petits segments
génétiques supplémentaires appelés D pour diversité ; il existe environ 15 gènes D chez l'homme.
Il y a d'abord rapprochement, au hasard, d'un gène D et d'un gène J, puis l'un des gènes VH se
rapproche de D formant ainsi un complexe VDJ qui reste au début éloigné des gènes des parties
constantes C. Le rapprochement se fera au niveau de l'ARN messager primordial par un
phénomène d'épissage comparable à celui décrit pour les chaînes légères et au niveau de l'ARN
messager final opérationnel cytoplasmique on aura bien la séquence VDJC traduite en la chaîne
lourde correspondante. Il existe donc une étape supplémentaire pour les chaînes lourdes puisqu'il
existe deux réarrangements : d'abord D-J, puis V-DJ.

Mécanismes des réarrangements :

Ces mécanismes sont relativement complexes, originaux bien qu'on les retrouve de façon tout à
fait comparable au niveau des chaînes constitutives du récepteur d'antigène des lymphocytes T
(TCR). Ils sont le fait de deux recombinases (RAG-1 et RAG-2 qui sont à la fois endonucléase et
ligase) qui reconnaissent des signaux spécifiques en 5' et en 3' des gènes D, en 3' des gènes V et
en 5' des gènes J. L'ADN intermédiaire est éliminé par délétion sous forme de boucle d'excision.
Ces recombinaisons comportent une certaine imprécision dans les nucléotides participant aux
jonctions V-J, responsable d'une diversité jonctionnelle : la coupure n'a pas forcément lieu à la
limite du codon terminal de l'exon V, mais peut être décalée de 1 à 2 nucléotides.

Diversité jonctionnelle :

Le phénomène de recombinaison fait vraisemblablement intervenir d'autres enzymes que les


seules RAG-1 et RAG-2 pour apparier, couper, lier l'ADN de manière transcriptible. A ce stade
apparaît la possibilité d'ajouter par complémentarité des nucléotides supplémentaires lors de la
jonction V-J ou V-DJ pour augmenter la diversité en ajoutant un ou deux acides aminés dans le
CDR3 générant ainsi une diversité.
Pour les chaînes lourdes ce mécanisme est supporté par une enzyme, la terminale
deoxynucléotidyl transférase (TdT), indépendante de toute matrice d'ADN et active qu'au stade
précoce de la différenciation des lymphocytes B. On parle de diversité N (pour nucléotide). Dans
les deux cas, une exonucléase enlève les nucléotides non appariés, avant réparation et ligation de
l'ADN. La diversité jonctionnelle aboutit soit à un ajout, soit à une soustraction de nucléotides.

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La mutation somatique :
Ce dernier mécanisme, intervenant lui au stade de lymphocyte B mature stimulé par son antigène
spécifique est représenté par les mutations somatiques qui, paradoxalement, semblent se focaliser
sur les régions V des Ig au cours des mitoses consécutives à l'expansion clonale. Ces mutations
entraînent surtout une maturation d'affinité des anticorps.
Explication de l'exclusion allélique (ou haploïdie fonctionnelle) :
Un lymphocyte B différencié n'exprime donc qu'un seul gène recombiné VHDJH et une seule
chaîne légère, κ ou λ, ce qui explique l'exclusion allèlique. Que ce soit pour la chaîne lourde ou
légère, un seul des deux chromosomes est porteur d'un réarrangement productif. L'autre est soit
en configuration germinale, soit porteur d'un réarrangement abortif.
Mécanisme du "Switch" :
Une fois obtenus, les réarrangements fonctionnels d'une chaîne lourde (VDJ) et d'une chaîne
légère (VJ), dont l'association définit une spécificité anticorps, sont définitifs et caractérisent un
clone lymphocytaire. Cependant au niveau du locus Ig CH, sur le chromosome, le gène réarrangé
VDJ a la possibilité de s'apparier avec différents gènes codant pour les parties constantes.
Sur le chromosome 14, chez l'homme, à la suite des gènes codant pour les parties variables on
trouve une série de 11 gènes pour les parties constantes à savoir dans l'ordre de 5' vers 3' : μ, δ, γ
3, γ 1, γ 2, γ 4, ε, α1 et α 2 Chaque gène est précédé d'une séquence dite "Switch" ou de
commutation qui permet à l'ensemble VDJ de "s'accrocher" à un gène C différent sauf le gène δ.
Après stimulation par l'antigène, le lymphocyte B qui exprime une IgM de membrane peut se
différencier en plasmocyte sécréteur d'IgG, d'IgA ou d'IgE. Cette commutation, ou "switch", est
rendue possible par l'existence des régions "switch" situées en 5' de caque région constante. Elle
aboutit à la production d'anticorps qui conserve leur spécificité anticorps (même VDJ) associée à
des propriétés effectrices variables avec les différents isotypes. Une seule partie de la région Sμ
est délétée lors de la première commutation, expliquant que des commutations ultérieures soient
possibles à partir de la portion restante. Les lymphocytes T jouent un rôle important dans la
commutation, grâce aux cytokines qu'ils sécrètent et aux contacts qu'ils établissent avec les
lymphocytes B. Les cytokines agissent en stimulant ou en réprimant les régions S. Ainsi l'IL-4
favorise la synthèse de l'IgE et de l'IgG4, alors que le TGFβ ("transforming growth factor β)
stimule la synthèse d'IgA. Les contacts cellulaires entre le lymphocyte B et le lymphocyte T pour
permettre cette commutation sont assurés par un couple de molécules spécifiques
(respectivement CD40 et son ligand, CD40L ou CD154).
Formes membranaire et sécrétée des immunoglobulines :
Toutes les molécules d'immunoglobulines existent sous deux formes, l'une intégrée à la
membrane plasmique et exprimée à la surface de la cellule B en tant que récepteur, l'autre
sécrétée dans les fluides tissulaires en tant qu'anticorps soluble. Tout lymphocyte B a la
possibilité de produire les deux formes. Comme il a déjà été indiqué ces deux espèces
moléculaires partagent exactement les mêmes chaînes légères et ont des chaînes lourdes
identiques sauf un court segment à l'extrémité C terminale qui représente la région
transmembranaire suivie par une courte région cytoplasmique. Ces deux formes
d'immunoglobulines sont produites à partir du même ARN primaire et c'est seulement pendant
l'épissage de ce transcrit que la décision sera faite de la forme définitive devant être produite. Ce
mécanisme d'épissage dit alternatif se produit de façon analogue pour toutes les autres chaînes
lourdes d'immunoglobulines. L'IgM membranaire a une portion intracytoplasmique très courte
formée de quelques acides aminés seulement, insuffisantes pour transmettre à elle seule le signal
d'activation c'est-à-dire de reconnaissance de l'épitope par l'extrémité Fab de la molécule.

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