Culture de La Communication Année 1 Chapitre 2

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Séquence 2

Les moyens de la communication


OBJECTIFS

– Interpréter l’utilisation du langage à travers différentes théories.


– Caractériser les composantes du langage.
– Utiliser les fonctions du langage pour un usage professionnel.
– Caractériser différents signes, les interpréter.
– Utiliser les signes dans des situations de communication.
– Différencier les niveaux de communication.
– Analyser ou construire des situations de communication.

EN PRÉAMBULE

Prérequis : Séquence 1 de la matière Cultures de la communication


Durée indicative de la séquence : 6 heures
Auteure : Michèle Amelineau

Pour réussir une analyse mais également une production et répondre aux demandes du client, il est
nécessaire de comprendre et de maîtriser les moyens de la communication.
Comprendre les fonctions du langage et les signes qui le composent permettra de travailler sur la
création d’un message en organisant les composantes pour en augmenter l’efficacité.
Comprendre l’importance du contexte et les différents niveaux de communication du message
permettra de le rendre plus audible à la cible.

1. La fonction du langage
1.1 Qu’est-ce que le langage ?
La linguistique est l’étude scientifique du langage humain.
La langue française dispose de deux mots distincts : langue et langage, ce qui n’est pas le cas de l’anglais par
exemple.
• La langue est un instrument de communication constitué d’un code composé d’un système de règles
communes à un même groupe.
• Le langage est l’aptitude innée à communiquer. Le bébé possède le langage, un système symbolique
qui lui permet d’interagir avec le monde, avec son entourage (cris, pleurs, gazouillis…). Il peut
potentiellement apprendre toutes les langues. Petit à petit, ce système symbolique va se manifester
dans une langue particulière. Le langage renvoie à la manière dont nous utilisons la langue pour
communiquer, nous exprimer (exprimer des affects, de l’identité…), pour raconter, décrire,
expliquer, argumenter, élaborer de la pensée, dire ses conceptions du monde… Le langage est lié
au vouloir dire de chacun. Vouloir dire qui va se clarifier et prendre forme à travers la langue dans le
choix des mots, des phrases, l’ordre des informations, les objectifs…

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Exemple :
• « Maman, le chat a cassé le vase de Tata ! »
• Le chat : le déterminant « le » désigne un chat particulier, celui de la famille. Il en est de même pour
le vase.
• En cours de sciences, le chat renvoie au chat en général, il s’agit du générique.
• En cours de sciences et vie de la terre, pour désigner le chat, on trouvera : félin, mammifère, animal,
ce qui renvoie à la manière dont la discipline organise et hiérarchise le monde des vivants.
Précision : l’acquisition de la langue est postérieure au langage.

1.2 Nombre et répartition des langues


• Les langues naturelles sont appelées ainsi car elles n’ont pas été inventées par les humains anglais,
espagnols, allemands, etc. Elles sont le résultat du vivre ensemble et n’ont pas été mises en forme
avant d’être utilisées.
• Les langues artificielles sont les langues fabriquées par les humains. On peut citer comme exemples
l’espéranto, mise au point par le docteur Zamenhof, ou les langages Java, C, C++, utilisés pour la
programmation informatique.
On peut également citer le sindarin, langue construite inventée par J.R.R. Tolkien pour sa trilogie Le Seigneur
des anneaux (le sindarin a été rebaptisé elfique pour l’utilisation au cinéma).
• L’espèce humaine a développé une grande variété de langues, aussi différentes que le grec et le
sumérien, le japonais et l’inuktitut (l’une des langues parlées par les populations Inuits), le bambara
(langue nationale du Mali) et le finnois (ou finlandais).
• Ce sont ces langues parlées par les êtres humains que l’on peut apprendre, observer, transcrire,
enregistrer, décrire.
Les langues du monde sont initialement et majoritairement orales. On compte aujourd’hui environ
6 000 langues dans le monde, parmi lesquelles seulement une toute petite minorité, environ 200, dispose de
systèmes d’écriture.
Grâce à son histoire coloniale et à la francophonie, le français est quant à lui parlé par environ 100 millions
de locuteurs. Au contraire, certaines langues sont parlées par un beaucoup plus petit nombre de personnes,
comme l’inuktitut qui compte environ 90 000 locuteurs. Certaines langues en danger comptent seulement
quelques centaines de locuteurs : c’est le cas du múra-pirahã, parlé uniquement par les 250 membres d’une
peuplade amazonienne.

1.3 La créativité du langage


• Parmi les propriétés du langage humain qui ont le plus intrigué les philosophes, les grammairiens
et les linguistes, figure l’étonnante capacité qu’ont les êtres humains en tant qu’êtres parlants de
produire une infinité de phrases inédites à partir d’un nombre fini de mots et de sons.
• On désigne cette propriété sous le nom de créativité du langage.
• La linguistique du XXe siècle a développé pour tenter de l’expliquer trois concepts fondamentaux :
l’arbitraire du signe, la double articulation et la récursivité.

1.3.1 Arbitraire du signe


• Le linguiste genevois Ferdinand de Saussure est considéré comme le père de la linguistique moderne.
Lorsqu’il développe le concept de signe linguistique dans son Cours de linguistique générale (1916), il
met l’accent sur la propriété qu’ont les mots, les unités signifiantes, d’être arbitraires.
• Cela signifie que la forme sonore, pour désigner un objet est la même pour toutes les personnes
parlant la même langue. En d’autres termes, je ne peux pas choisir d’utiliser le mot « table » pour
désigner une chaise, ni le mot « lampe » pour désigner le fait de chanter.

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• Selon Saussure, les unités signifiantes (les signes linguistiques) résultent de l’association d’une
forme sonore, le signifiant, et d’un concept, le signifié.
• Par exemple, le mot « table » résulte de l’association entre la suite de sons/tabl/et le concept
d’un objet manufacturé comportant un plateau supporté par plusieurs pieds. Cette association est
arbitraire : l’association d’une forme sonore n’a pas de relation avec le concept. Le mot « table » ne
ressemble en rien à l’objet table.
• D’une langue à l’autre, le même concept peut être associé à des formes sonores très différentes.
Par exemple, le concept de « table » sera associé à la forme sonore/masa/en turc ou encore/ti∫/
en allemand, deux signifiants très différents entre eux et très différents du signifiant de « table » en
français.

Association signifiant/signifié
© DR

Exemples :

Exemple [O]
© DR

Objection que l’on peut opposer à la notion d’arbitraire du signe : l’existence dans les langues
d’onomatopées.
En français, le cri du coq est représenté par l’onomatopée « cocorico » alors que c’est « cock-a-doodle-doo »
que l’on utilise en anglais. Le son des onomatopées ressemble à ce qu’il veut décrire, contrairement au
signifiant qui ne ressemble pas à ce qu’il décrit. Lorsqu’on dit « coq » une personne parlant français saura
qu’il s’agit de l’animal, mais le son « coq » ne ressemble pas à l’animal.

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1.3.2 La double articulation
Première articulation : les morphèmes (unités minimales de signification)
Les morphèmes sont :
• Des noms (arbre, crayon, maison, etc.).
• Des verbes (manger, écrire, rêver, etc.).
• Des adjectifs (bleu, grand, rapide, etc.).
• Des « parties de mots » (comme le [-ons] dans le verbe « mangeront », ou le [eur] dans
« réparateur » ou « chanteur ») qui apportent un sens. Chaque fois qu’un verbe se termine par
un [-ons] on reconnaît en français que le sujet est la première personne du pluriel (« nous »), peu
importe le verbe ; [eur] à la fin d’un mot indique « celui qui fait l’action de ».
Exemples :
Je viendrai : 3 morphèmes.
|Je| | vien |  |drai |
|Je | : pronom personnel.
|vien| : verbe venir.
|drai |: futur, 1re personne du singulier.

Sénateur : 2 morphèmes
|sénat| « assemblée législative ».
|eur| sert à former des noms masculins indiquant une fonction, (celui qui fait). « Voleur », « Docteur »,
« Précurseur »…

Le : 2 morphèmes
|l | article + défini.
|e | masculin.
Ces morphèmes sont constitués d’un signifiant (un son) ET d’un signifié (un concept, un sens).
Un morphème est un son qui contient un sens.

Seconde articulation : les phonèmes (unités minimales distinctives)


• Ce sont des sons distinctifs, ils changent le sens d’un mot (pont-bon, quand-banc, mâle-pâle) sans
qu’ils ne soient porteurs de sens.
• Les Raisins de la colère (roman de John Steinbeck)/Les raisons de la colère (titre de IAM).
« Un homme Azerty en vaut deux » (Accroche de l’application Transilien de la SNCF) / « un homme averti en
vaut deux ».
Ces phonèmes ne sont constitués que d’un signifiant (son), SANS signifié (un concept, un sens).
Un phonème est un son qui n’a pas de sens particulier mais qui va changer la signification du mot.

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Extrait de l’Alphabet phonétique international (API)
© DR

Les phonèmes ne doivent pas être confondus avec les lettres de l’alphabet : le français compte 6 voyelles
écrites mais 16 sons différents pour ces voyelles.
Combien de mots français d’une seule syllabe se terminant par le son « on » pouvez-vous former ?
• Bon, don, éon, ion, long, mon, non, son, thon, ton, won… Et d’autres encore.
• En formant un grand nombre de mots différents avec une seule modification (remplacer un seul
son) plutôt que de créer un nouveau mot complètement différent à chaque fois. La langue peut donc
« optimiser » son système c’est-à-dire qu’avec un nombre limité de signes, il est possible de créer un
nombre illimité de messages.
• Cette particularité de créer un système contenant deux niveaux d’organisation pour communiquer
constitue :
• Une différence majeure entre les systèmes de communication utilisés entre animaux et ceux
utilisés par les humains.
• Une des principales conditions de la créativité linguistique.

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À noter : dans les langues tonales se superpose le ton qui peut également faire varier la signification.
Ainsi, en chinois, le sens du mot « ma » est différent selon le ton utilisé :

ma signification
1er ton maman
2e ton chambre
3e ton cheval
4e ton injurier

On peut également citer l’exemple de l’igbo, une langue tonale parlée par quelque 30 millions de personnes
dans le sud du Nigéria.
https://www.youtube.com/watch?v=6cwaeNl-d9E

1.3.3 La récursivité
• La récursivité est la troisième propriété qui explique la créativité des langues naturelles. Ce
mécanisme concerne l’organisation des mots dans la phrase, que les linguistes nomment la syntaxe.
C’est le linguiste américain Noam Chomsky qui a mis en évidence l’importance de ce mécanisme dans
le fonctionnement des langues humaines.
La récursivité est la possibilité de produire des énoncés comportant des enchâssements ou des
enchaînements en nombre infini.
Exemple :
« Maudit
soit le père de l’épouse du forgeron
qui forgea le fer de la cognée
avec laquelle le bûcheron abattit le chêne
dans lequel on sculpta le lit
où fut engendré l’arrière-grand-père
de l’homme qui conduisit la voiture
dans laquelle ta mère
rencontra ton père. »
(Robert Desnos)
La phrase aurait pu être infiniment rallongée…
• La subordination représente un exemple de ce mécanisme : la phrase subordonnée est incluse dans
la phrase principale
• Par exemple, la phrase « l’école était facultative » est un constituant de la phrase « Mon fils pensait
que l’école était facultative ».
• Un autre exemple est celui de l’enchâssement des groupes nominaux en français. Ainsi, le groupe
nominal « la voisine » est enchâssé dans le groupe nominal « Le chat de la voisine » dont il est un des
constituants.
• Cette propriété récursive des langues humaines permet d’expliquer pourquoi, à partir d’un nombre
limité formes (la phrase, le groupe nominal, l’adjectif et quelques autres), on peut produire des types
de structure de phrase d’une impressionnante variété.
• Pour exemple, la ressource complémentaires : Marcel Proust, le champion de la récursivité.
(Téléchargez le document 209K11TKPC0216doc1).

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1.3.4 Saussure et le structuralisme
Cherchant à définir l’essence de ce qu’est une langue, Ferdinand de Saussure la représente comme
l’émanation d’une communauté linguistique. Au début du XXe siècle, il révolutionne la linguistique en
considérant que la langue n’est pas seulement le fruit des accidents de l’histoire, mais qu’elle est un
véritable système, un ensemble cohérent et autonome de dépendances internes. Selon Saussure, la langue
doit être étudiée en synchronie (sans se préoccuper de son histoire), et de façon immanente (à l’exclusion de
tout facteur externe).
(Source : Sciences humaines, décembre 2004)

Les composantes de la créativité du langage


© DR

1.4 Fonctions et utilisation du langage


Les fonctions du langage semblent avant tout être : communiquer et penser. Quelques questions permettent
d’aller plus loin dans la réflexion.

1.4.1 Le langage sert-il avant tout à communiquer ?


Le langage sert en tout premier lieu à transmettre nos intentions à autrui et pour interagir avec lui :
• Une question appelle une réponse.
• Une demande réclame une action.
• Une information nouvelle attend un acquiescement.
L’analyse des conversations a mis en évidence l’importance des régulateurs d’écoute (Hum, Ah ! bon…) lors
des échanges linguistiques. (cf. séquence 1). Les régulateurs d’écoute sont tous les énoncés (voilà, ben, hum,
alors, ah, bon, tu sais) qui facilitent l’échange, le maintien de l’attention ou l’alternance des tours de parole.

1.4.2 Communiquer, est-ce une fonction propre au langage ?


• Le langage est un moyen de communication particulièrement performant. Toutefois, nous
communiquons par bien d’autres moyens. Nous interprétons toutes sortes de signes qui ne sont pas
linguistiques : les pleurs, les rougeurs du visage, la position du corps, le regard…

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1.4.3 E
 n quoi les systèmes de communication des animaux illustrent-
ils cette généralité de la fonction communicative ?
Puisque les animaux ne sont pas doués de parole, l’existence même de leurs modes de communication
riches et variés illustre de manière éclatante que la fonction communicative n’est pas l’apanage du langage.
Charles Hockett a mis en évidence 13 caractéristiques que seul le langage humain possède (Téléchargez le
document 209K11TKPC0216doc2 en ressources complémentaires : les critères de Hockett).
La question des relations entre le langage et la pensée est une question centrale de la philosophie depuis la
plus haute antiquité et se trouve aujourd’hui au centre des préoccupations aussi bien des linguistes que des
chercheurs en sciences cognitives.
Découverte par Karl Von Frisch, la danse des abeilles se compose de deux éléments : la partie médiane
de leur danse en huit sur les rayons de la ruche forme le même angle avec la verticale que la direction
des fleurs à butiner avec le soleil, l’angle constituant une unité, la distance étant indiquée par le rythme
de frétillement de l’abdomen, constituant une seconde unité ; la combinaison des deux indiquant vers quel
endroit doivent se diriger les insectes pour butiner. Un changement d’angle ou de rythme indiquera un
endroit différent.

1.4.4 Comment le langage influence-t-il la pensée ?


• Une première approche des relations entre langage et pensée interroge essentiellement la relation
entre les mots et le monde : la façon dont les mots d’une langue représentent les choses du monde.
Une langue constitue une manière de penser, une façon de voir le monde, une culture.
• https://fr.babbel.com/fr/magazine/intraduisible-1
« Avant l’acquisition d’une langue particulière, la pensée n’est qu’une “masse amorphe et indistincte”. »
(Saussure, Cours de linguistique générale)
L’hindi (la langue la plus parlée en Inde) utilise le même mot pour « hier » et « demain ». La représentation
du temps étant différente, l’hindi distingue entre ce qui est – aujourd’hui – et ce qui n’est pas : hier et
demain.
Nous élevons et mangeons des « moutons », les Anglais élèvent des « sheep » et mangent du « mutton ».
Le 14 octobre 1066, Guillaume le Conquérant, duc de Normandie bat les troupes du roi en titre à Hastings et
prend le pouvoir en Angleterre. Les Normands y introduisent leur langue d’adoption, le français.
Les Normands sont les vainqueurs, outre les terres, ils prennent possession des meilleures nourritures, dont
la viande, qui leur est réservée. Les Saxons vaincus ont gardé leur langue, ils élèvent les « sheep », qu’ils ne
mangeront pas, pour les vainqueurs qui mangeront les muttons !
L’anglais a gardé ces deux mots un mot pour la viande sur pied et un mot pour la viande à consommer : nous
élevons et mangeons des « moutons », les Anglais élèvent des « sheep » et mangent du « mutton ».

1.4.5 Y a-t-il une pensée sans langage ?


• Nous utilisons volontiers des expressions comme « le langage des couleurs », « le langage des
corps », etc. L’existence de modes de communication non linguistiques comme ceux des animaux,
ou encore le fait que nous soyons capables de donner une signification à ce qui n’est pas du langage,
suggère que l’on peut concevoir qu’il y ait de la pensée sans qu’il y ait du langage.

Bien que ce soit sous une forme très différente, la psychanalyse défend elle aussi cette idée que le
langage structure en profondeur la pensée, comme en témoigne la célèbre phrase de Jacques Lacan :
« L’inconscient est structuré comme un langage ». Pour Lacan l’inconscient est composé comme le
langage de signifiants et de signifiés : Le signifiant psychanalytique est une trace dans l’inconscient.
Cela peut être une odeur (l’odeur de la madeleine pour Proust), une image (avoir été témoin d’un acte
violent), une cicatrice (la trace d’une brûlure) qui va renvoyer à un signifié. Ce signifié est le fait décrit
dans le souvenir.

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1.5 Le langage selon Roman Jakobson
• En 1926, Jakobson participe à la création du Cercle linguistique de Prague, aux côtés de son
compatriote russe Nicolaï Troubetzkoï. Ils vont alors donner naissance à la phonologie, étude de la
fonction des sons dans une langue, en s’inspirant de l’idée de système défendue par Saussure.
• En 1963, paraît en français le premier tome des Essais de linguistique générale, recueil d’articles de
Roman Jakobson.
• Roman Jakobson attribue 6 fonctions au langage :

Schéma de la communication verbale d’après Jakobson


Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=181433

1.5.1 Fonction référentielle (ou dénotative)


Chaque mot est porteur d’information.
Dans la publicité, c’est une fonction appréciée car elle permet de donner une information (plus ou moins
objective) sur le produit. Exemple : « Seb, c’est bien ».

1.5.2 Fonction conative (ou impressive ou incitative)


Elle se concentre sur le destinataire. Il s’agit souvent d’un impératif, elle est orientée vers le destinataire
pour inciter ou convaincre. Exemple : « Manger, bouger ».

1.5.3 Fonction expressive (ou émotive)


Axée sur celui qui parle et qui exprime d’abord soi. La fonction émotive relève souvent de mots expressifs,
des interjections, des exclamations ou des intonations. Ce sont les traces de l’émetteur dans le message (voix
qui tremble, je, zut…).
Certains slogans de publicité utilisent cette fonction en faisant du récepteur l’acteur même du message.
Exemple : « L’Oréal, parce que je le vaux bien ».

1.5.4 Fonction phatique


C’est le reflet des conditions de communication. Elle permet de s’assurer que l’autre a bien saisi le message,
que le canal de communication entre les interlocuteurs n’est pas rompu. Exemple : « Allô ? ».
Il s’agit aussi avant tout de prolonger le discours, d’éviter les silences. Des phrases comme « Il fait beau
aujourd’hui » n’ont pas d’intérêt informationnel, mais elles permettent de prolonger, ou d’initier une
conversation.

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Exemple : dans Alice au pays des merveilles (Lewis Carroll, 1955, p. 119), lors de la partie de croquet de la
Reine :
« — Venez. Alors ! dit la Reine, et Alice, curieuse de ce qui allait se passer se joignit à la procession.
— Il fait très beau, n’est-ce pas, fit une voix craintive à son côté. Elle marchait à côté du lapin Blanc qui la
dévisageait d’un air inquiet. »
C’est le cas également des histoires drôles, ou des onomatopées (« Hum, hum », « Oui… »). C’est aussi la
première fonction verbale à être acquise par les enfants ; chez ceux-ci, la tendance à communiquer précède
la capacité d’émettre ou de recevoir des messages porteurs d’information.
L’anthropologue Robin Dunbar établit une analogie entre l’activité d’épouillage à laquelle se livrent les singes
pour maintenir un contact et entretenir des relations sociales de proximité avec leurs congénères et l’activité
de ragotage des êtres humains. (Source : Robin Dunbar, Grooming, Gossip and the Evolution of Language, 1996)

1.5.5 Fonction esthétique (ou poétique)


Le terme poétique ne renvoie pas à la poésie. Il s’agit du message lui-même. Chaque mot est choisi, mesuré
parmi les milliers de mots de la langue française. La combinaison des mots entre eux est également un
choix. La fonction est dite poétique car le message a une construction autonome, donnant un son, une phrase
« qui sonne bien ». Il s’agit du langage comme utilisation des figures de styles. C’est l’esthétique du message
qui est mise en jeu (les jeux de mots, les redondances, les répétitions, les effets de styles).
Évidemment, en publicité, la fonction poétique est quasi omniprésente. Elle permet une mémorisation, par
l’originalité du message, mais aussi par sa simplicité.
Exemples : « Il est fou, Afflelou », « Plus t’en mets, plus t’en as ! », « Il faut faire vite, il faut Fervex ! »

1.5.6 Fonction métalinguistique


Cette fonction est un commentaire sur ce que l’on vient de dire : une autoréférence à son message, reflet de
la conscience que le locuteur a de son code. Ainsi, l’expression « Il fait beau » signifie que le ciel est bleu et
que le soleil brille.
Cette fonction est sans doute la plus complexe à comprendre. Elle est utilisée quand il faut donner des
informations sur le code, son fonctionnement…
Exemple :
• Un livre qui décrit des règles de grammaire, un langage informatique…
• Les poèmes : ils utilisent les figures de style. Les figures de style font partie de la fonction
métalinguistique puisqu’elles expriment une idée à travers un ensemble de mots.
• La mort : Cette petite grande âme venait de s’envoler : Victor Hugo, Les Misérables.
Il y a une communication « au-dessus » de la communication initiale. Les êtres humains ont un code commun
du langage qui leur permet de comprendre les connotations qui s’en dégagent.
Vous pouvez consulter en ligne un dictionnaire des métaphores sur Gallica http://gallica.bnf.fr

2. Signes, symboles, icônes

2.1 La sémiologie : les signes, le signifiant, le signifié


• La sémiologie est la science des signes.
• Le terme sémiologie a été créé par Émile Littré et pour lui, il se rapportait à la médecine. Lors d’un
examen clinique le médecin va repérer les signes qui peuvent indiquer une pathologie (la fièvre,
la sécheresse de la peau, la tension artérielle…). Il a ensuite été repris et élargi par Ferdinand de
Saussure, pour qui la sémiologie est « la science qui étudie la vie des signes au sein de la vie sociale ».

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• Selon Peirce, les signes linguistiques appartiennent à la catégorie des symboles qui associent
arbitrairement une forme et une signification. Mais certains symboles ne sont pas des signes
linguistiques : par exemple, la fleur de lys qui symbolise la royauté. Peirce répertorie deux autres
catégories de signes : les indices et les icônes.

2.1.1 Les indices


• Les indices associent une manifestation sensible (que l’on peut voir, toucher, sentir…) avec ce dont
elle est la manifestation : une trace de pas avec l’animal qui l’a laissée, de la fumée avec le feu dont
elle provient, la pâleur avec la maladie, etc.

2.1.2 Les icônes


• Les icônes ressemblent à ce qu’elles désignent par certaines de leurs propriétés : un plan ressemble
au territoire qu’il représente, les émoticônes miment les traits du visage caractéristiques des
émotions qu’elles figurent.
• Exemple : une sculpture reproduit fidèlement les lignes du modèle dans la pierre.

Les sous-catégories de l’icône


• L’image ressemble à l’objet qu’elle représente

Image d’un téléphone

• Le diagramme reproduit les relations qui existent dans l’objet représenté (plans, cartes, circuits,
organigrammes…). Ainsi, l’organigramme met en évidence les relations hiérarchiques à l’intérieur de
l’organisation.

directeur

assistant

salarié 1 salarié 2 salarié 3

Organigramme

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• La carte met en évidence les liaisons routières, ferroviaires, fluviales, les pays, provinces, villes…

Carte de la Belgique
By Alexandre Vuillemin (reproduit par histoirepostale.net) – old maps from histoirepostale.net website,
Public Domain, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=3112945

• La métaphore est un procédé de substitution.


La métaphore peut utiliser des mots. Lorsqu’on utilise une métaphore, on désigne un objet ou une idée par
un mot faisant référence à un autre mot ou à une autre idée.
• Exemples :
• Le gel des salaires : Le gel renvoie à une situation figée, qui n’évolue pas.
• L’avenir se noircit. : La couleur noire évoque la tristesse.
• Une marée humaine : la marée évoque l’océan qui avance de façon inexorable et qui va tout recouvrir.
La métaphore est une figure de style très utilisée en poésie, elle était l’une des figures préférées de Victor
Hugo.
La métaphore peut également utiliser des images
Comme dans l’exemple ci-dessous de vanité, style très en vogue au XVIIe siècle, qui évoque le caractère
provisoire de l’existence.

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Vanité de Pieter Steenwijck (fl. circa 1633–1656) – Aron and Titus of Jan Vos,
Public Domain, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=404388

2.1.3 Les signaux et les symboles


Le signal
• Le signal vise à déclencher une réaction. Il peut combiner différents signes de façon simultanée.
On parlera de combinatoire simultanée. Si on utilise une phrase pour déclencher la même réaction
l’interprétation SERA MOINS RAPIDE
Exemple : le panneau routier interdiction de doubler pour les poids lourds est composé du
Signe interdiction : rond rouge, centre blanc
Signe poids lourd : ici en rouge marquant l’interdiction
Signe voiture : ici en noir pas d’interdiction
Ces trois signes se combinent sur un seul panneau que les conducteurs interpréteront rapidement même
s’ils ne connaissent pas la langue.

Panneau d’interdiction de doubler


© DR

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Sur le tableau ci-dessous, le signal serait beaucoup plus long à interpréter, et le conducteur réagirait moins
rapidement (à condition que ce conducteur connaisse la langue).

© DR

Le symbole
Le symbole est utilisé volontairement par convention.
Dans la Grèce antique, le symbolon était un tesson de poterie brisé en deux morceaux ; chaque morceau
ensuite était donné aux ambassadeurs de deux pays ou ville alliés comme une preuve de cette alliance
Le symbole est un signal qui, par sa forme ou sa nature, évoque spontanément dans une culture donnée
quelque chose d’abstrait ou d’absent. C’est une représentation fondée sur une convention qu’il faut
connaître pour la comprendre.
Exemple : « Le myrte, symbole de l’amour, le laurier, symbole de la guerre, l’olivier, ce bêta, symbole de la paix. »
(Victor Hugo, Les Misérables, tome 2, 1862, p. 319).
« Il se disait qu’un fleuve était le plus exact symbole de la vie active ; on le suivait dès sa naissance, sur tout son
parcours, au travers des territoires qu’il fécondait : il remplissait une tâche assignée, avant que d’aller mourir, en
s’immergeant, dans le sépulcre béant des mers. » (Joris-Karl Huysmans, En route, Collection Folio classique
(n° 2873), Gallimard, 1996, p. 222).
Exemples :
• Le drapeau français symbolise la République française.
• Le dessin d’une balance peut être une simple représentation de l’objet. Placé sur un pare-brise, il
devient un signe, symbolise l’Ordre des avocats, mais pas pour tout le monde : il faut être au courant
de cette convention.
Cette convention peut varier, elle peut être différente :
• Selon l’époque
La main de Justice fut jusqu’en 1792 l’emblème du pouvoir judiciaire des rois de France conféré par Dieu.
Le roi est représenté par le pouce, la raison par l’index, la charité par le majeur et la foi catholique est
symbolisée par l’annulaire et l’auriculaire.

Main de justice
Par Martin-Guillaume Biennais (1764–1843) — From File:Main Justice Louvre.jpg by User:Urban (décembre 2005),
Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=474423

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• Selon la zone géographique

Le symbole infirmier en Grande Bretagne


Par I, Silje, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=2325233

Le caducée en France
Par Rama and Eliot Lash — Drawing by Rama. Vectorized with Inkscape by Eliot Lash.,
Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=662346

Le bâton d’Esculape aux États-Unis


Par derivative work: Luigi Chiesa (talk) — Esclapius_stick.svg,
Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=9547824

Un symbole est souvent collectif mais peut être valable pour une seule personne. Ainsi, les tatouages
peuvent faire référence à l’appartenance à une communauté, ou bien à un souvenir personnel.
Les Vory v Zakone (вор в законе)
Installée au sommet de la hiérarchie carcérale, cette mafia russe née dans les années 1920 dicte sa loi parmi
les détenus. L’organisation se veut une caste d’élite au sein du monde criminel, dont les membres obéissent
à un code très strict, la Ponyatiya (вор в законе, littéralement les notions). Un détenu sans tatouage n’avait
pas de statut social au sein de la prison. Plus qu’un rite de passage, les tatouages agissent comme une carte
de visite. Ils révèlent le parcours d’un détenu sans qu’il soit nécessaire de lui poser la moindre question.
Emprunts de symbolisme, les tatouages affichent le passif de celui qui les porte : nature du crime, durée
de l’incarcération, rang prisonnier, tout ce qui détermine son degré de « prestige » par rapport aux autres
détenus. Plus un criminel est tatoué, plus son vécu est important, plus il est respecté en prison. Les motifs
choisis par les prisonniers empruntent à la fois à l’art populaire et à la tradition russe : église, chats, images
saintes, la Madone, le Christ, architecture soviétique… Ces icônes détournées forment un langage social et
politique, un code clandestin complexe à destination du milieu.

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Le nombre d’étoiles présentes sur le corps symbolise le nombre d’années passées
en prison : une étoile = une année passée en détention.

© DR

Le nombre de coupoles – souvent, une église orthodoxe est tatouée sur le torse
ou le ventre – indique le nombre de séjours ; ici, 6 coupoles représentent 6 incarcérations.

© DR

Pour récapituler

© DR

• Les travaux de la sémiotique (ou sémiologie), cette science des signes dont la linguistique est l’une
des branches selon Ferdinand de Saussure, ont montré comment nos postures, nos vêtements,
jusqu’à nos objets les plus quotidiens (comme la voiture) communiquent notre état d’esprit au sein
d’une situation, notre volonté de paraître, notre statut social, notre désir ou non désir, et bien d’autres
aspects, conscients ou non.

La fonction communicative n’est pas propre au langage : elle est beaucoup plus générale.
• Les théories du signe triadique sont nombreuses. La notion de signe recouvre trois éléments :
signifiant, signifié et référent. On utilise souvent un triangle pour représenter visuellement ce type de
signe. On parle alors de « triangle sémiotique ».

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Triangle sémiotique
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2.2 Relations entre les signes


Les relations entre les signes permettent, lorsqu’elles peuvent être changées, d’explorer d’autres facettes du
message. Il existe deux types de relations :
• Les relations syntagmatiques.
• Les relations paradigmatiques.

2.2.1 Relations syntagmatiques


• Cette phrase est composée d’une séquence de mots qui se succèdent de gauche à droite :
• La--> vieille--> voiture --> fait--> du --> bruit.
• Si on modifie cet ordre de lecture, on change ou on perd le sens de cette phrase. La séquence suivante
n’est pas possible en français :
• *Vieille -->1 La --> voiture-->fait --> du--> bruit On dit que cette forme est agrammaticale (notée par
un*) car elle enfreint les lois de la syntaxe.
L’ensemble des règles qui déterminent l’ordre selon lequel certains éléments peuvent être mis en séquence
se nomme syntaxe.
Attention : il ne faut pas confondre forme agrammaticale (qu’aucun locuteur natif de la langue ne produirait)
et forme incorrecte (contraire à une norme, mais parfois produite par certains locuteurs). Ainsi la formule
« Si j’avais su, je n’aurais pas venu ! » (Immortalisée dans le roman de Louis Pergaud, La Guerre des boutons)
est incorrecte, mais grammaticale.
L’importance de la position des mots peut modifier :
• Le sens
• « Ancien » placé avant signifie « n’ayant plus une certaine qualité » (l’ancien ministre), mais placé
après, il indique un âge avancé (une voiture ancienne).

1  --> symbolise un type de relation qu’on nomme syntagmatique.

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• La forme
• Certains adjectifs de description, courts et fréquents, se placent normalement avant le nom (jeune,
petit, beau, grand…) un petit bateau, un grand peintre…
• Certains adjectifs, placés avant le nom, produisent un effet stylistique : « une verte prairie » n’est pas
impossible, mais appartient au registre poétique.

Dans la phrase « Petrus verbet Paulum », la terminaison nous indique quel est le sujet du verbe (-us,
nominatif) et quel est l’objet (-um, accusatif), si bien que la phrase pourrait s’écrire aussi bien « Paulum
verbet Petrus » ou « verbet Paulum Petrus », « Petrus Paulum verbet », etc., ce qui permet de mettre
l’accent sur l’un ou l’autre des éléments sans changer le sens. Pour faire cela en français, il faudrait
recourir à une circonlocution2 : « C’est Paul que Pierre frappe ».

Le français est une langue où l’ordre des mots joue un rôle très important, alors que les langues
comme le latin, véhiculent le sens par la forme des mots.
• Ces relations entre les mots permettent de créer une figure de style : l’inversion. Cela permet à
partir d’une phrase banale d’obtenir une phrase plus poétique.
• L’inversion est un procédé qui consiste à renverser l’ordre habituel des éléments d’une phrase sans
que leur fonction grammaticale soit changée.
• Le sujet reste le sujet, même si son ordre est changé dans la phrase.
• L’inversion est employée en poésie, on peut inverser différentes composantes de la phrase, par
exemple :
• Le sujet après le verbe
• Vienne la nuit, sonne l’heure (Guillaume Apollinaire, Le pont Mirabeau.)
• Le complément avant le verbe ou le nom
• En vain des mers, il a fouillé la profondeur (Alfred de Musset, La Muse.)
• L’attribut avant le verbe
• Merveilleuse était alors la forêt dans son étincellement d’argent. (Julien Gracq, Au château d’Argol.)
• L’adjectif avant le nom
• Les cormorans qui vont comme de noirs crieurs. (Victor Hugo, Les pauvres gens)

2.2.2 Relations paradigmatiques


Il s’agit de la possibilité des remplacements d’un mot par un autre, à condition :
• Qu’il appartienne à une même catégorie. On ne peut pas remplacer un mot par un verbe. Ou un verbe
par un adjectif.
• On ne pourrait pas remplacer « aimer » par « vert »
• Qu’il puisse être permuté sans altérer la validité de la phrase, ni même son sens.
• Par contre, le mot « lumière » pourrait être remplacé par un autre mot du même sens : « clarté », »
lueur »…

J’aime de vos longs yeux la lumière verdâtre. (Charles Baudelaire, chants d’automne)
Je kiffe de vos longs yeux la lumière verdâtre.
J’apprécie de vos longs yeux la lumière verdâtre.
Eh bien ! dansez maintenant ! (Jean de La Fontaine, La cigale et la fourmi).
Eh bien ! guinchez maintenant ! (Pierre Perret, La cigale et la fourmi).

2  Détours de langage.

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2.3 L’importation du contexte : dénotation et connotation
2.3.1 Dénotation
• La dénotation est le sens donné par le dictionnaire : il s’agit d’une information neutre et objective,
ayant la même signification pour tous.
Exemple :
« Arbre : végétal vivace, ligneux, rameux, atteignant au moins 7 m de hauteur et ne portant de branches durables
qu’à une certaine distance du sol. Figure arborescente servant à représenter schématiquement les filiations entre
les éléments d’un ensemble : Arbre généalogique. »
(Source : dictionnaire Larousse).

2.3.2 Connotation
• La connotation est la signification affective personnelle ou culturelle que l’on ajoute au sens
premier. Il s’agit de ce que le mot suggère ou évoque chez une personne. C’est un sens implicite qui
dépend du contexte, de la culture, etc.
• Le sens connoté d’un mot est variable car il est subjectif. Les connotations d’un mot peuvent varier
selon la situation d’énonciation, le niveau de langue, le contexte géographique ou culturel. Un mot
peut se charger d’une connotation péjorative ou méliorative : le mot évoque une chose ou un être sous
un aspect favorable ou défavorable.
Exemple d’une connotation liée au contexte géographique : en Occident, le noir est associé au deuil, à la
tristesse ; en Asie et en Afrique c’est le blanc qui est associé au deuil.
Exemple de connotations liées au contexte historique : durant la Seconde Guerre mondiale, un collaborateur
était une personne qui trahissait son pays en travaillant avec les Allemands, Aujourd’hui, dans le vocabulaire
de management, c’est un salarié de l’entreprise.
• La valeur de connotation pèse si fort sur certains mots qu’ils deviennent tabous, par souci de
bienséance ou de politiquement correct. Ils sont alors remplacés par des tournures qui en atténuent
le pouvoir d’évocation.
• Victimes civiles/dommages collatéraux
• Chômeur/demandeur d’emploi
• À une époque où soufflait un vent de puritanisme, le mot « sein » devint tabou en raison de sa
connotation sexuelle. « Cachez ce sein que je ne saurais voir », dit le Tartuffe de Molière ; on le
remplaça alors par gorge ou poitrine (cette figure de style s’appelle une métonymie).

2.4 Les limites du traitement de l’information


• En permanence le cerveau humain va traiter un ensemble considérable d’informations pour n’en
retenir qu’une infime portion. La communication publicitaire va tenir compte de cette contrainte pour
que le message diffusé fasse partie de cette infime portion.
• La perception est l’un des grands domaines d’étude de la psychologie cognitive3 : les études sur la
perception permettent de répondre à des questions variées telles que « Comment repère-t-on un
avion sur un radar », « Quelles sont les illusions courantes qui nous affectent ? » « Quel parfum
préfèrent les femmes de 40 ans ? », « Pourquoi voit-on moins bien en voiture au crépuscule ? »
• La perception se définit comme l’ensemble des mécanismes par lesquels l’organisme prend
connaissance du monde extérieur sous l’effet de stimulations, le système perceptif transforme ces
stimulations en informations : c’est le traitement de l’information.

3  La psychologie cognitive étudie : le langage, la mémoire, la perception, la résolution des problèmes, l’apprentissage.

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En 1956, George Miller montre dans un article célèbre, « Le chiffre magique 7 », que la mémoire
immédiate est limitée : elle ne parvient qu’avec peine à retenir une liste de plus de sept éléments. Pour
surmonter cette faiblesse, l’esprit humain emploie une méthode qui consiste à grouper les éléments
(comme on le fait pour un numéro de téléphone où l’on regroupe les 10 chiffres en 5 nombres de
2 chiffres).

Le traitement de l’information
© DR

• L’efficacité des fonctions cognitives peut être entravée par l’émotion, la santé, l’étayage
environnemental4, la motivation, la compréhension de la consigne, les stéréotypes…

3. Communication digitale et analogique


« Pour modifier sa vision du monde, il est plus efficace de commencer par modifier sa façon d’agir. »
Paul Watzlawick
• Une logique de la communication est un texte célèbre des recherches du Mental Research Institute
à Palo Alto, en Californie. Paul Watzlawick y développe « Les axiomes de la communication » qui
mettent en évidence la dimension relationnelle de la communication :
• La communication comprend des informations, mais elle est fonction aussi de la relation avec
l’autre.

4  C’est-à-dire l’existence ou la non-existence de l’aide que l’on peut apporter à un sujet dans la résolution d’un problème qu’il
ne pourrait résoudre tout seul.

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Les axiomes de la communication
© DR

Pour communiquer, nous utilisons des signaux (mots, gestes, postures, etc.). Ils doivent répondre à un
« code » commun.
• L’école de Palo Alto a classé ces signaux en deux types de codes et s’est référée aux termes de
l’électronique.
• Le code « digital » est cérébral, logique, analytique. Précis, il explique et interprète. La
communication digitale ne peut passer qu’entre les personnes qui connaissent les codes.
• Le code « analogique » Le code analogique, est affectif, imagé. Il utilise les symboles, les
métaphores.
La communication analogique est comprise de tous car elle dépasse les barrières de la langue, mais elle
peut être contrainte par des barrières culturelles.
Nous utilisons tous séparément, ou en même temps les 2 procédés de communication : la communication
digitale et analogique.
Exemple de communication digitale :
Les plongeurs connaissent les signaux et peuvent agir rapidement en fonction du signal émis.

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« OK » en immersion

Exemple de communication analogique :


Les expressions universelles : elles dépassent les barrières de la langue, elles sont reconnues par tous, il
n’y a pas de barrières culturelles. Les chercheurs ont identifié 21 expressions universelles : une étude menée
à l’Ohio State Université a donné un nouvel aperçu de la façon dont les humains reconnaissent les visages et
les expressions faciales.
On a demandé aux participants de l’étude d’identifier les expressions des visages dans une base de données
de photos, qui comportait les expressions présentées ici (dans le sens horaire à partir de la photo en haut à
gauche, neutre, heureux, en colère et crier).
Tous les participants, quelle que soit leur origine ou leur culture ont pu identifier ces expressions.

Photos courtoisie de l’Ohio State University

Les conditions de l’amour passionnel


Cet état survient dans les cultures qui lui offrent un statut, et où les jeunes gens ont donc appris que cette
forme de relation pouvait exister. Cela paraît banal dans la culture occidentale où les thèmes des contes,
des romans et des films sont très souvent liés à des « histoires d’amour ». La société des adultes et des
adolescents en donne aussi des exemples quotidiens aux enfants. Mais en fait, il semblerait que l’invention
de l’amour soit récente, remontant en Europe au Moyen Âge. Jusqu’à la fin du XVIIe siècle, il n’était pas
considéré comme un élément essentiel du mariage.

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Dans les cultures orientales, on trouve d’ailleurs encore fréquemment une prédominance des arrangements
socio-familiaux des unions maritales qui sont indépendants du souci de savoir si les futurs conjoints s’aiment
ou non. Les unions sont d’ailleurs parfois prévues quand les sujets sont encore enfants, voire à naître. Le
mariage (ou simplement l’union) d’amour n’est pas un fait universel.
(Source : Jacques Cosnier, Psychologie des émotions et des sentiments, Retz, 1991)

Les manifestations de l’amour passionnel sont reconnues par la culture occidentale, mais ne seront pas ou
moins reconnues par les cultures orientales.

Conclusion
• Communiquer n’est pas seulement envoyer une information d’un émetteur isolé dans l’absolu à un
destinataire, comme le suggère la théorie mathématique de Shannon.
• Communiquer, c’est composer avec les autres ; on ne communique pas qu’avec des mots, mais avec
tout son corps, son histoire personnelle, ou par des outils de communication dans un environnement
défini qui va impacter le sens du message.
• De nouveaux usages des signes ont vu le jour. Les transactions sociales s’accomplissant par la voie
des réseaux génèrent des assemblages d’images (fixes ou animées), de textes mixés parfois aux
mots-images que représentent les emojis et viennent créoliser5 les langages iconiques et scripturaux.

Snap personnel
© DR

5  La créolisation est la mise en contact de plusieurs cultures ou au moins de plusieurs éléments de cultures distinctes, dans
un endroit du monde, avec pour résultante une donnée nouvelle, totalement imprévisible par rapport à la somme ou à la simple
synthèse de ces éléments.

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Bibliographie
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Eco Umberto, La structure absente : introduction à la recherche sémiotique, Paris, Mercure de France, 1972.
Eco Umberto, « Pour une reformulation du concept de signe iconique : les modes de production sémiotique »,
dans Communications, n° 29, 1978, p. 141-191.
Forestier G., « Conventions théâtrales », dans Dictionnaire encyclopédique du théâtre, Éditions Michel Corvin,
Paris, Bordas, 1991, p. 203-204.
O’Reagan James, « Making Image Theatre », dans Canadian Theatre Review, n°50, printemps 1987, p. 10-13.
Pavis Patrice, « Convention », dans Dictionnaire du théâtre, Paris, Messidor/Éditions sociales, 1987, p. 97-98.
Peirce Charles Sanders, Logic as Semiotic, The Theory of Signs, The Philosophy of Peirce : Selected Writings, Éd.
Justus Buchler, London, Routledge, 1950, p. 98-119.
Ruesch Jurgen et Weldon Kees, Nonverbal Communication : Notes on the Visual Perception of Human Relations,
Berkeley, University of California Press, 1970.
Veron Eliseo, « L’analogue et le continu (note sur les codes non digitaux) », dans Communications, n°15, 1970,
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Watzlawickv Paul, Helmick Beavin J. et Jackson Don D., Une logique de la communication, Paris, Seuil, 1972.
Watzlawickv Paul, L’Invention de la réalité, Le Seuil Poche, 1996.
Nardone Giorgio, Watzlawick Paul, L’Art du changement, L’Esprit du temps, 1993.
Watzlawick Paul, Faites vous-même votre malheur. Décodons avec humour nos stratégies personnelles qui nous
poussent à vivre en conflit, Le Seuil, 1990.

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