S1 Bourouba Pharmaco M1 Physio Chapitre 2 Partie 2

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Chapitre 2 : Pharmacocinétique (Suite)

2. Distribution
1. Définition

C’est une étape correspondant à la distribution du principe actif depuis la circulation


générale vers les différents organes et tissus de l’organisme. Elle est fonction de la capacité du
médicament à franchir les barrières qui séparent les différents compartiments de l'organisme et
à s'y accumuler ou à en être exclu.

Fig 1 : Distribution

2. Phases de la distribution

Le médicament est brassé dans la voie circulatoire ; sa concentration y devient rapidement


homogène. Les vaisseaux le distribuent aux différents tissus. La distribution comprend donc
2 phases :
- Une phase plasmatique (transport sanguin)
- Une phase tissulaire (diffusion tissulaire depuis le compartiment sanguin).

A* Phase Plasmatique

Dans le sang un PA se réparti en :


 Fraction libre : Active, diffusible, métabolisable et éliminable,
 Fraction liée aux protéines plasmatiques,
 Fraction liée aux éléments figurés du sang.
Les médicaments ont la capacité à se lier aux protéines plasmatiques (principalement
l'albumine, mais des liaisons à des protéines spécifiques sont décrites). Cette liaison va

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diminuer leur capacité à se distribuer dans d'autres compartiments que le plasma et ralentir leur
élimination. Il existe un équilibre entre la forme libre active et la forme liée inactive.

Seule la forme libre est active de telle sorte qu'on recherchera parfois à mesurer cette
forme plutôt que la concentration totale. Ceci est particulièrement important (1) si le
pourcentage de liaison n'est pas constant dans la zone de concentrations normales du
médicament (augmentations disproportionnées de la concentration de la forme libre par rapport
à celle de la forme totale); (2) chez des patients dont le taux de protéines plasmatiques est
abaissé, augmentant d'autant la concentration de la forme libre sans changement apparent de la
concentration totale.

Remarque : Il faut noter que les échanges entre forme libre et liée sont rapides. En
outre, certaines situations existent où la liaison du médicament à la cible est tellement plus
élevée que celle vis-à-vis des protéines, qu'un déplacement instantané est obtenu.

Fig 2 : Notion de fraction libre.

Plusieurs protéines sont impliquées dans le transport des médicaments :

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On peut avoir compétition entre deux principes actifs (PA) vis-à-vis de leur liaison aux
protéines plasmatiques, l’un déplaçant l’autre, d’où augmentation de la ou des formes libres
actives d’un ou des PA → interactions médicamenteuses.

La liaison aux protéines plasmatiques est caractérisée par :

- l’affinité du PA pour les protéines plasmatiques (importance et solidité de la liaison


PA-Protéine) ;- la quantité de protéines plasmatiques disponibles (exp en cas d’hypo-
albuminémie, la fraction libre d’un PA fortement lié aux protéines plasmatiques va augmenter
entrainant une augmentation de l’effet pharmacologique), - le pourcentage de PA lié (d’un %
proche de 0 pour le paracétamol à 97% pour le Préviscan).

Fig 3 : Compétition entre médicaments.


Fu : fraction libre (unbound)

Pour quitter le sang, le médicament doit traverser la paroi capillaire. Certains organes
se comportent d'une manière particulière :

*** Barrière capillaire : Le passage du médicament se fait à travers les pores entre les cellules
de l'endothélium par diffusion passive. Ces pores ne permettant la filtration que de molécules
d'un poids moléculaire inférieur à 64 000, le médicament fixé sur les protéines reste dans le
plasma, seule la fraction libre peut traverser. L'équilibre s'établit à travers la paroi capillaire

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entre les concentrations des espaces interstitiels et du plasma en fraction libre. Cet équilibre est
réversible et le passage peut se faire dans les deux sens.

Remarque : c'est la concentration en médicament libre dans le compartiment central, c'est-à


dire dans le plasma, qui fixe le sens du passage et la quantité contenue dans les tissus.

*** Barrière hémato-méningée : Elle se situe entre le plasma d'une part, le système nerveux
central et les méninges d'autre part. Elle joue un rôle sélectif et empêche le passage de
nombreuses substances physiologiques ou médicamenteuses. Le médicament quitte le sang
pour gagner soit le liquide céphalo-rachidien, soit le tissu nerveux (neurones, névroglie, liquides
intercellulaires). D'une manière générale, les conditions du passage sont identiques du plasma
vers le LCR ou le système nerveux, et une substance qui peut pénétrer dans l'un peut ensuite
gagner l'autre.

Remarque : Seules les substances capables de franchir la barrière hémato-méningée sont


susceptibles d'avoir des effets thérapeutiques (ou nocifs) sur le système nerveux central.

Fig 4 : Différents types d’échanges intervenant à travers les cellules endothéliales du


système nerveux central (SNC).
A : Perméabilité de petites molécules lipophiles
B : Arrêt des molécules hydrophiles ou de grande taille
C : Captage par transport facilité
D : Expulsion par transport actif
E : Endocytose médiée par des récepteurs.

*** Barrière placentaire : Interposé entre l'organisme maternel et le fœtus, le placenta joue le
rôle d'un (mauvais) filtre à médicament. Passent en règle tous les produits d'un poids

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moléculaire compris entre 500 et 1000, à quelques exceptions près. A l'inverse, les grosses
molécules (héparine, insuline, curares) ne passent pas.

Des mécanismes divers ont été décrits, dont le principal est la diffusion non ionique à
travers la membrane du trophoblaste et l'endothélium capillaire, mais même les médicaments
fortement ionisés et hydrosolubles finissent par passer si des concentrations élevées persistent
suffisamment longtemps du côté maternel. De plus, il existe d'autres processus (affinités pour
certaines protéines, gradient électrochimique ; à l'inverse, les enzymes trophoblastiques
détruisent certaines molécules).

Remarque : En pratique, il faut considérer que, sauf exceptions démontrées, tous les
médicaments traversent le placenta. Il faut s'interroger systématiquement sur leurs effets
possibles sur l'enfant in utero.

B* Phase Tissulaire

Les mécanismes du passage transmembranaire du médicament sont identiques à ceux


exposés pour l’absorption digestive.

La diffusion tissulaire est donc dépendante de :


 Caractéristiques physico-chimiques du médicament (taille, lipophilie, ionisation,)
 Capacité du médicament à franchir les parois vasculaires et cellulaires
 La fixation protéique (sanguine et tissulaire)
 Le débit sanguin tissulaire (très élevé pour le foie et le rein, faible pour l’os et la
peau…)

Il existe des transporteurs membranaires dont le rôle est d’expulser les xénobiotiques
de la cellule (protection cellulaire). La diffusion des PA, substrat de ces transporteurs, est
réduite. Le premier transporteur d’efflux identifié est la glycoprotéine P (P-gp), produit
d’expression du gène MDR1 (Multi-Drug Resistance Protein). La P-gp est particulièrement
abondante au niveau :

o Des cellules de l’intestin,


o Du foie (excrétion biliaire),
o Du tubule contourné proximal du rein (élimination urinaire),
o De la barrière hémato encéphalique,
o De la barrière testiculaire et au niveau du placenta.

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La glycoprotéine-P limite l’absorption, facilite l’élimination par la bile ou l’urine,
réduit la pénétration de nombreux médicaments au niveau du SNC, des testicules et du placenta
(effet barrière).

Fig 5 : Aspect moléculaire de la P-gp.

3. Paramètres de la distribution

3.1. Le volume de distribution


C’est le volume apparent dans lequel semble se repartir la totalité de la dose du
médicament pour que sa concentration plasmatique soit égale à celle des tissus. On voit donc
que le volume de distribution doit être compris comme un volume virtuel. Il peut s'exprimer en
pourcentage ou en L/kg, soit encore en L par individu (en supposant un adulte moyen de 70
kg). Donc, un PA qui a une forte affinité pour les tissus aura un volume de distribution
important ; et à l’inverse un PA qui reste dans le compartiment sanguin aura un volume de
distribution faible et proche du volume sanguin (exp : 5L pour le Lovenox, 0,08 pour
le clofibrate : diffusion tissulaire faible, 25L pour le halopéridol : diffusion tissulaire élevée).

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Trois situations peuvent schématiquement se présenter :
a) Si le principe actif demeure dans un compartiment de faible volume (par ex., le plasma
et/ou les fluides interstitiels, cas fréquent pour les médicaments hydrophiles), le volume
de distribution sera faible par rapport au volume total du corps (< 20 - 30 % ou 0.2 – 0.3
L/kg).

b) Si le médicament se distribue de façon uniforme (situation rare), son volume de


distribution sera égal au volume du corps (100 % ou 1 L/kg).

c) Si le médicament se lie fortement à un constituant du corps ou s'accumule dans un


compartiment de volume limité (cas fréquent de médicaments lipophiles qui s'accumulent
dans le tissu graisseux), sa concentration rapportée au volume total du corps apparaîtra
comme > 100 % (> 1 L/ kg). Dans ce cas, le volume de distribution calculé excède le
volume réel de l’organisme ou, si exprimé par kg de poids corporel, une valeur
apparemment erronée car correspondant à un volume supérieur au volume physique.

Fig 6 : Exemples de volumes de distribution.

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La concentration plasmatique d'un médicament doit toujours être interprétée en fonction
de son volume de distribution. Il est important de noter que les médicaments à volume de
distribution faible ont, pour une même dose, des concentrations plasmatiques maximales
beaucoup plus élevées que des médicaments à volume de distribution élevé. Inversement, un
médicament à volume de distribution élevé aura toujours, pour une même dose, une
concentration plasmatique très basse.

3.2. La demi-vie plasmatique (T½)


C’est le temps nécessaire pour que la concentration plasmatique diminue de moitié. Elle
n’est pas le reflet unique de l’élimination du médicament mais un critère composite lié à la
distribution et à l’élimination de celui-ci.
Dans l'immense majorité des cas, la demi-vie est indépendante de la dose du médicament
administré. La connaissance de la demi-vie permet de prévoir la fréquence d'administration du
médicament (nombre de prises journalières) pour obtenir la concentration plasmatique
souhaitée.
Une fois le compartiment plasmatique atteint, le médicament se distribue dans différents
compartiments soit pour accéder à son récepteur et entraîner une réponse tissulaire, soit pour
être métabolisé et ensuite éliminé, soit pour se fixer de manière non spécifique ou être stocké
de manière prolongée dans des secteurs constituant un compartiment profond tel que la masse
adipeuse.

3.3. Notion de pharmacocinétique


A/ Modèle mono-compartimental : La décroissance des concentrations du
médicament peut suivre une décroissance mono-exponentielle : La totalité de la quantité
injectée se dilue instantanément dans un espace homogène et le seul processus apparent
correspond à la phase d’élimination.

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Liaison aux protéines plasmatiques

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Volume de distribution

B/ Modèle bi-compartimental : Une décroissance pluri-exponentielle (modèle bi ou


tri-compartimental) : La quantité injectée subit simultanément une diffusion vers le(s)
compartiment(s) périphérique(s) et une élimination. Lorsque les échanges entre compartiment
central et périphérique(s) sont terminés (phase alpha), apparaît la phase d’élimination pure
(phase bêta ou gamma selon le nombre de phases).

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Fig 7 : Modèle de distribution à 2 compartiments.

M : médicament, per os: voie orale .

4. Facteurs de la distribution

Plusieurs facteurs peuvent modifier la distribution :


 Volume liquidiens de l’organisme : • Age (nourrisson…) ; • Déshydratation
 Rapport masse maigre/tissu adipeux : • Obésité ; • Age
 Hémodynamique : • Etat de choc ; • Insuffisance cardiaque chronique
 Modifications des protéines plasmatiques
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 Diminution de la concentration d’albumine : • Grossesse ; • Syndrome
néphrotique ; • Dénutrition ; • Grands brûlés ; • Cirrhose.

Le facteur principal qui gouverne la diffusion passive est, par ordre d'importance, la
solubilité dans les lipides et la taille moléculaire.

Etant donné que de nombreux médicaments sont des acides ou des bases faibles, leur
ionisation et donc le pH environnant, jouera un rôle essentiel car la forme non-ionisée diffusera
nettement plus vite que la forme ionisée. Il s'ensuit que les bases faibles auront tendance à
s'accumuler dans les compartiments acides tandis que les acides faibles le seront dans les
compartiments basiques.

Mais, par ailleurs, les médicaments lipophiles auront tendance à s'accumuler dans les
tissus riches en lipides, tandis que les médicaments hydrophiles resteront principalement dans
les compartiments aqueux. Les médicaments amphiphiles pourront aussi avoir tendance à
s'accumuler dans les membranes cellulaires.

La taille moléculaire peut s'opposer au mouvement des médicaments au travers des


membranes et, par-là, restreindre leur possibilité d'accumulation dans certains compartiments.
La limite de taille est souvent celle correspondant à un poids moléculaire de 300 à 500.

Enfin, l'action des transporteurs peut fortement modifier la distribution spontanée d'un
médicament et ceci tant dans le sens d'une accumulation que d'une exclusion suivant
l'orientation du transporteur.

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