A Propos Du Théier

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 8

Revue de botanique appliquée et

d'agriculture coloniale

A propos du Théier.
É. de Wildeman

Citer ce document / Cite this document :

de Wildeman É. A propos du Théier. . In: Revue de botanique appliquée et d'agriculture coloniale, 4ᵉ année, bulletin n°29, 31
janvier 1924. pp. 34-40;

doi : https://doi.org/10.3406/jatba.1924.4137

https://www.persee.fr/doc/jatba_0370-3681_1924_num_4_29_4137

Fichier pdf généré le 02/05/2018


— 34 —

A propos du Théier.

ParÉ. DE WILDEMÀN.

M. le prof. Perrop, Directeur de l'Office National des Matières


premières a, dans la série des travaux de cet Office, fait paraître une
intéressante étude sur le Thé dans laquelle il a passé en revue
l'origine, la culture, la préparation et le commerce de ce produit connu
depuis la plus haute antiquité, mais qui a acquis une notable
importance surtout durant ces dernières années (1).
M. Perrot insiste dans ce travail sur les conditions de la culture,
et en particulier sur le fait que la culture de Théier transportée dans
les régions tropicales n'a pu s'y développer que grâce à l'humidité ; il
ne peut être question de réussir cette culture dans les régions où la
période humide n'est pas également répartie et surtout dans celles où
la saison sèche dure environ deux mois.
Un autre facteur qui a été parfois cause des insuccès dans cette
culture et que M. Perrot met en relief, c'est la profondeur du sol. Il faut
que les racines puissent s'enfoncer jusqu'à un mètre de profondeur
dans un sol qui ne peut être marécageux.
Il est un autre point sur lequel il faut insister, à propos de culture,
c'est la sélection des semences qui, d'après les recherches du Dr
Bernard, qui a travaillé le Théier à la Station expérimentale de Java qu'il
dirige, doit être basée sur le poids des graines.
Mais à côté du choix des graines pour l'obtention d'une plantation
sélectionnée, il faut aussi placer la multiplication par la voie asexuée,
qui donnera des plantations très uniformes.
Nous citerons à ce propos, plus loin, les dernières recherches de la
Proefstation voor thee de Java.
Nous ne pouvons nous étendre sur la récolte et la préparation assez
largement envisagées par M. Perrot, mais il faut rappeler que toutes
deux doivent, si l'on veut obtenir des résultais, être faites avec le
plus grand soin, et suivant des méthodes rigoureuses sur lesquelles
M. Perrot attire d'ailleurs l'attention.
Depuis quelques années la préparation, qui se faisait dans le temps
presque exclusivement à la main, se fait de plus en plus à l'aide de

(1) É. Perrot. — Le thé. Origine, culture, préparation, commerce. Travaux


de l'Office national des matières végétales, n" 14, mai 1923. Paris.
— 35 —

machines, ce qui a eu pour résultat de fournir des qualités de plus


en plus régulières, et souvent meilleures.
Parmi les pays producteurs de thé qui, dans ces dernières années
ont vu leur exportation augmenter, il faut citer Ceylan, qui après
avoir vu ses plantations de Caféiers détruites par YHemileia vasta-
trix, les cultures de Quinquina produire de faibles résultats, s'est mis
à la culture du Théier. C'est comme le dit M. Perrot « grâce à leur
esprit de décision et d'organisation, grâce aussi à l'Exposition de Paris
de 1889, qui leur permit par un admirable effort coopératif, la
vulgarisation de leur produit », que les planteurs de Ceylan réussirent à
imposer un thé qui, moins bien préparé que le thé de Chine, moins
parfumé, et plus riche en tanin, surtout au début, n'aurait pu, dans
d'autres circonstances, concurrencer le produit ordinaire'ment mis sur
le marché. ■
II y a naturellement entre les qualités du début et celles fournies
actuellement des différences notables, car les Anglais ont cherché, par
leurs recherches scientifiques soutenues, à améliorer la qualité du
thé de Ceylan.
Si d'ailleurs ce thé a conservé sa vogue, il faut considérer, comme
nous le répète M. le prof. Perrot, «que la propagande est restée bien
organisée ».
Le Tea and Coffee Trade Journal dans ses numéros de mars et
.

avril 1923, a fait ressortir les efforts faits parle Tea Cess Committee
of India.
Il est probable qu'une somme de 250.000 dollars pourra être consacrée
annuellement pour augmenter la consommation du thé en Amérique.
C'est M. Newsby qui est chargé d'organiser la réclame, il est
d'ailleurs passé par Paris. En Amérique il va chercher à faire déguster
gratuitement du thé bien préparé. La campagne pour le thé menée parmi
les indigènes des Indes paraît avoir donné d'excellents résultats. On
faisait ressortir aux indigènes la valeur du thé, riche en vitamines,
principe dont le Riz ne renferme que de faibles quantités; on leur
offrait la boisson à des prix dérisoires dans presque toutes les stations
du réseau ferroviaire des Indes et en annexe, à un très grand nombre
d'usines, ont été construits des « tearooms » où l'on débite des tasses
de thé bien préparé à un demi-cent.
L'argent du comité provient d'une taxe mise sur l'exportation, taxe
qui, vu les résultats obtenus, a été portée à 1/6 de cent (États-Unis)
par livre. C'est grâce à une augmentation de ce capital qu'une campagne
intensive a pu être entreprise en France.
— 36 —

Le comité du Tea Cess est constitué par une quarantaine de


personnes intéressées plus ou moins directement dans l'Industrie du thé
aux Indes; dans ce comité s'est formé un Comité exécutif de
sept membres, six appartenant au groupe des personnes intéressées
directement dans l'industrie du thé, le septième étant un
banquier.
L'histoire du thé de Ceylan est certainement un des beaux exemples
de ce que peut faire une collectivité de producteurs, qui travaillent sur
desbases économiques et scientifiques, en complet accord, aidés par les
Gouvernants qui ont saisi l'origine de l'extension rationnelle de la
culture de cette essence.
Si le Théier a peut-être moins à craindre des maladies que
beaucoup d'autres- plantes de grande culture, il est cependant sujet aux
attaques de certains insectes et d'assez nombreux champignons.
M. Perrot n'en a pas parlé, mais tous les planteurs connaissent les
difficultés que l'on a, dans certains districts producteurs, à se
débarrasser par exemple de YHelopeltis, cet insecte qui endommage les
feuilles et qui force les planteurs à abandonner parfois toute une
récolte pour briser le cycle de développement du parasite. De nombreux
travaux ont été publiés sur ce parasite, dans les Indes néerlandaises
et dans les Indes anglaises, en parliculier par MM. Bernard et Gar-
retsen.
Quant aux cryptogames du groupe des champignons, si en 1903
Watt et Mann, dans leur relevé des maladies du Théier n'avaient eu
à signaler qu'environ douze champignons, ceux-ci se sont multipliés
et le dernier ouvrage consacré à la phytopathologie du Théier, dû au
Mycologiste du Gouvernement de Geylan, M. Petch, a été amené à en
relever environ soixante, qui heureusement ne doivent pas être
considérés tous comme parasites très graves.
Cependant comme l'expose M. Petch (1), qui nous fournit une ample
bibliographie sur le sujet, et les moyens de lutter contre
l'envahissement des parasites, des champignons peuvent se développer sur les
feuilles, sur les tiges, sur les racines. Plusieurs de ces parasites, sont
naturellement communs à plusieurs plantes de grande culture ; il
faudra lutter surtout contre ceux qui attaquent les racines, et contre
ceux qui détruisent les feuilles.
Nous tenons à attirer l'attention sur ce travail de M. Petch, car il
est destiné, en particulier, à permettre aux planteurs de reconnaître les
(1) Petch. — The diseases of the Tea plant. 1 vol. in 8°, 220 p. 3 pi. en
couleurs, 69 fig.
— 37 —

maladies du Théier dès le moment de leur apparition, afin d'éviter un


développement intensif dangereux pour l'avenir de la culture.
On ne peut en culture tropicale assez insister sur la pathologie.
Si Ceylan est, comme l'a décrit M. Perrot, un bel exemple à citer à
propos de la culture du Théier et du commerce du thé, les Indes
Néerlandaises, ne peuvent être passées sous silence.
Là aussi, au point de vue scientifique, comme au point de vue
économique et commercial, des progrès immenses ont été accomplis.
Depuis des années la Proefstation voor thee, qui se trouve placée
sous la direclion du Dr Gh. Bernard, a fait des travaux remarquables
qui ont largement contribué à l'essor de la culture du Théier dans les
îles des Indes néerlandaises. Plus de quatre-vingt mémoires ont paru
dans les publications de cette Station expérimentale, envisageant les
principaux problèmes soulevés par l'exploitation de cette plante
utile ; malheureusement, cette publication n'est pas dans le commerce
et la direction de cette institution paraît très stricte pour accorder la
permission de la reproduction de ses études.
Une d'entre elles cependant, celle de M. Keuchenius, résumant les
procédés de multiplication du Thé par voie végétative peut être achetée
et mérite d'ailleurs de fixer largement l'attention de tous les planteurs
de Théiers.
Nous ne pouvons insister sur les données de ce travail (1) qui semble
permettre la conclusion que parmi les meilleures méthodes de
propagation de Théiers il faut compter sur le greffage, en particulier le
greffage en couronne, et le marcottage, soit le marcottage aérien en
tubes de bambous, soit le marcottage par enracinement dans la terre,
qui donne déjà 9 mois après le couchage des systèmes radiculaires
étendus.
M. Perrot examinant le commerce mondial du -thé en 1919 cite
parmi les producteurs :
Indes anglaises. .. 168. 500 tonnes, ou 43,2 °/0 du commerce total.
Geylan 94.300 tonnes, soit 24 % —
Java et Sumatra. . 54.000 tonnes, soit 14 °/0 —
Puis vient la Chine avec environ. ... 10 % —
Ces chiffres ne concordent pas totalement avec ceux pris à d'autres
sources que nous reproduisons ci-après. Ils donnent suivant le Tea
and Coffee Trade Journal et une circulaire de la Thee-Cultunr in
Nederlandsche Indie les chiffres d'exportation pour 1922.

(1) Keuchenius. — Vegetative propagation of tea. Mededeel. Proefstation voor


thee. N°85, Batavia. Ruygrok, 1923, 1 fasc. 16 p. 26 fig. hors texte.
— 38 —

Indes anglaises 140.307.204 kilos.


Ceylan 77.126.512 —
Java et Sumatra .*.". 43. 2ol. 000 —
Japon 13.500.000 -
Formose 9.000.000 —
Et pour Java et Sumatra de 1917 à 1922 (tonnes de 1.000 kgs.) :
1922 1921 1920 1919 1917
Java 37.000 28.000 47.000 42.500. 43.500
Sumatra.... 6.500 4.000 5.000 4 000 2.000
43.500 32.000 52 000 46.500 45.500
D'après le tableau ci-dessus on peut voir que la production de Java
est plutôt en régression, mais que celle de Sumatra a régulièrement
augmenté ; cela est dû d'un côté à une récolte plus intensive, mais
aussi à l'ouverture, durant ces dernières années, d'un assez grand
nombre de plantations, atteignant .actuellement l'époque de
production.
Si l'on cherche à se rendre compte de la direction que prennent ces
matières premières, on verra par les statistiques que la direction de
l'exportation de Java et de Sumatra se fait dans l'ordre d'importance
décroissant suivant :
Hollande, Angleterre, Australie, États-Unis, Canada, Europe
(continent), Singapore, Chine, Divers.
Il existe aussi, pour Sumatra une exportation importante sur
Singapore et Java.
On peut juger aussi que, malgré la forte production de ses colonies,
l'Angleterre est encore pour les Indes Néerlandaises un bon client,
bien que les chiffres en croissance ne soient pas revenus tout à fait à
ceux d'avant guerre.
Les États-Unis de l'Amérique du Nord sont aussi pour Java et
Sumatra un bon centre d'exportation, car leur consommation totale
en thé a notablement augmenté, bien que si l'on établit la
consommation par tête d'habitant, elle semble plutôt avoir baissé, étant passée de
1,34 livre par tête en moyenne de 1880 à 1885, à 1,03 livre de 1915
à 1920.
Un autre débouché intéressant pour les Indes Néerlandaises est, on
peut en juger par les chiffres rappelés ci-dessus, l'Australie.
Les Indes Néerlandaises essaient" d'ailleurs, par une propagande
appropriée, de faire, comme les Anglais, mieux connaître leurs produits
à l'étranger.
— 39 —

La Handels verèeniging de Batavia a édicté un règlement sur la


vente du thé, dans lequel il est nettement exposé à quelles conditions
doivent satisfaire les thés faisant l'objet d'un contrat de livraison.
La Verèeniging voor de thee cultuur in Nederlandsche-Indie
d'accord avec le Thee Export Bureau de Batavia, de la Chambre de
Commerce pour les Indes Néerlandaises à Londres, s'occupent de la
mise en vigueur de ces réglementations, et grâce à l'appui financier
de la Verèeniging van Thee-lmporteurs elle a pu continuer une
active propagande, tant dans le pays qu'à l'étranger.
A une foire commerciale d'Utrecht une dégustation de thé a pu être
entreprise, des milliers de brochures furent distribuées. A Bâle, à
Copenhague les mêmes essais de vulgarisation ont été répétés et cela
avec un succès marqué.
Des essais d'introduction, en plus grande quantité, de thé des Indes
Néerlandaises vont être également tentés au Canada, où les produits
de cette production sont déjà consommés en certaine proportion, mais
par l'intermédiaire de firmes anglaises qui ont des filiales aux Indes
Néerlandaises.
La réapparition de la Russie sur le marché du thé fait espérer que la
vente de ce produit y reprendra les allures d'avant-guerre. C'était
naturellement la Chine qui devait souffrir le plus de la disparition de
la Russie du marché du thé.
Actuellement les Indes Anglaises sont, comme nous l'avons vu, les
plus grands pourvoyeurs de thé du monde. Ceylan et les Indes
néerlandaises viennent en seconde ligne, puis se rangent par ordre
d'importance : Chine, Japon, Formose.
En 1819, les Indes anglaises et Ceylan avaient dépassé la production
d'avant-guerre de 150.000.000 de livres. La Chine par contre avait
diminué ses exportations en thé de 10.000.000 de livres, de sorte que
grâce à la faible consommation russe la matière disponible en 1919
aurait dépassé celle de 1913 d'envion 300.000.000 de livres.
En Amérique la consommation a augmenté comme nous l'avons dit
mais pas suffisamment semble-t-il, pour diminuer le stock.
La rentrée de la Russie a fait même espérer à beaucoup une
pénurie de produit, mais il semble cependant peu probable que
l'importation en Russie atteindra dans les premières années son niveau
antérieur. La situation économique de la Russie ne lui permettra sans
doute pas non plus de reprendre son ancienne capacité d'achat.
Rappelons que dans l'emballage du thé des modifications sont
également survenues. On cherche à remplacer la feuille de plomb par la
— 40 —

feuille d'aluminium, qui paraît avoir des avantages sur lesquels


certains producteurs insistent. L'on sera sans doute d'ici peu, fixé d'une
façon définitive sur les bénéfices que peut donner ce nouveau mode
d'emballage, qui éviterait des accidents lors du transport.
De cet aperçu sommaire de la « question du thé», on peut déduire,
pensons-nous, que le commerce du thé verra sous peu son importance
augmenter et que peut-être des Colonies, comme l'Indo-Chine qui
jusqu'à ce jour sont -encore peu intervenues dans l'ensemble du
commerce, pourraient s'y créer une place.
Mais elles ne pourront le faire que si elles font des sacrifices pour
placer la culture et l'industrie, d'emblée, au point atteint par celles
du même produit dans les pays à la tète du mouvement.

NOTES & ACTUALITÉS

L'Enseignement Agronomique supérieur de demain.

Em. MARCHAI,,
Membre de l'Académie des sciences royales de Belgique, Professeur à l'Institut
agronomique de l'État, à Gembloux (i).

Dans presque tous les pays du monde existe, à l'heure actuelle, un


enseignement agronomique que l'on qualifie de supérieur et qui
représente, en tout cas pour chacun d'eux, dans le domaine des études
techniques, le degré le plus élevé de la hiérarchie didactique.
Toutefois, la question du rôle précis dévolu à cet enseignement,
comme celle de son organisation, font l'objet de vives controverses. Il
en résulte que, tiraillé entre des tendances inconciliables,
l'enseignement agronomique apparaît, dans certains pays, comme désemparé et
menacé d'une véritable crise si l'on n'y porte bientôt remède. Aussi
semble-t-il opportun de cherchera déterminer quelle est l'orientation
de ces hautes études la plus conforme aux besoins actuels et généraux
de l'Agronomie.
A en juger d'après l'état d'esprit qui se manifeste notamment en

(1) Institut International d'Agriculture de Rome. Bulletin des Renseignements


agricoles et des maladies des plantes. Nouv. Sér., v. I. n° 00, pp. 283-284.

Vous aimerez peut-être aussi