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UNIVERSITAIRES :
DES CONDITIONS À RÉUNIR
ISBN : 2-550-35602-0
Dépôt légal : Bibliothèque nationale du Québec, 2000
CHAPITRE 4
OBSERVER LES CONDITIONS DE
RÉUSSITE MISES EN ŒUVRE DANS
LES UNIVERSITÉS À DIVERSES
ÉTAPES DE LA TRAJECTOIRE.................. 71
4.1 L’accès .........................................................71
4.2 Le cheminement ...........................................74
4.3 La délivrance des diplômes ..........................77
4.4 L’insertion socioprofessionnelle ..................78
4.5 L’ensemble de la trajectoire .........................79
Résumé
Avec cet avis sur l’ordre universitaire, le Conseil L’analyse de ces sous-thèmes est précédée par le
complète sa réflexion sur le thème de la réussite repérage des nouveaux éléments contextuels qui
éducative, qu’il a traité spécifiquement à chacun ont une influence sur la réussite et par une lecture
des autres ordres d’enseignement au cours de la attentive des enjeux soulevés en mettant au jour
dernière décennie. Ce thème demeure au cœur des les positions diverses qui s’affrontent et en propo-
préoccupations du milieu de l’éducation et de l’État. sant des avenues pour les résoudre.
Pour l’enseignement universitaire, la Politique
québécoise à l’égard des universités – Pour mieux Contexte
assurer notre avenir collectif réaffirme l’importance
de poursuivre les efforts en ce sens. Dans chacune Les éléments contextuels suivants appellent un
des universités, les moyens mis en œuvre pour renouvellement de l’idée même de la réussite à
améliorer la réussite témoignent du fait qu’il s’agit l’université :
bel et bien d’une question prioritaire.
Ø le développement du savoir, accéléré par les
Cet avis propose un cadre conceptuel original nouvelles technologies de l’information et des
pour comprendre les facteurs en jeu dans la communications et la mondialisation de l’éco-
réussite, pour orienter les interventions et pour nomie, interpelle plus que jamais la mission
guider le développement de la réflexion sur ce universitaire et, dans ce contexte, la formation
thème. Son apport réside dans l’idée même de la devient un atout pour l’étudiante ou l’étudiant
réussite, analysée précisément dans une perspective et pour toute la société;
multidimensionnelle, qui montre que les étudiantes
et les étudiants réussissent chaque fois qu’ils Ø la multiplication des relations de partenariat
franchissent avec succès un obstacle ou un seuil que vivent les universités conduit à reconnaître
critique, qui jalonnent inéluctablement leur projet que ces dernières ne sont pas les seules à tirer
d’études, de l’étape de l’accès à l’université les ficelles de la réussite;
jusqu’à l’insertion socioprofessionnelle au terme
des études. Ø les fluctuations du marché de travail dessinent
des perspectives inégales d’insertion socio-
Aboutissant à un ensemble de recommandations professionnelle pour les diplômées et diplômés;
adressées principalement au ministre de l’Éducation
et au milieu universitaire, l'avis : Ø les transformations sociales de la jeunesse
rompent avec la linéarité du cheminement
Ø cerne les conditions associées à la réussite traditionnel de l’entrée dans la vie adulte et
d’études universitaires sur divers plans à font pression notamment dans le sens d’un
travers les travaux de recherche; engagement moins exclusif envers les études
et, conséquemment, de la réduction du rythme
Ø explore le sens que revêt la réussite parmi la des études;
population étudiante, en en comparant son
évolution sur quelques générations d’étudiantes Ø l’apport attendu de l’université à la résolution
et d’étudiants; des problèmes humains et sociaux introduit de
nouveaux critères de réussite où le développement
Ø et, finalement, brosse le portrait des conditions de compétences de haut niveau doit collaborer
qui prévalent dans les universités, en identifiant au mieux-être de l’humanité;
les obstacles et les seuils critiques à la réussite
ainsi qu’en présentant divers exemples de Ø la perspective d’éducation tout au long de la
mesures de soutien qui y sont implantées. vie oblige à élargir cette idée d’une réussite
trop exclusivement centrée sur l’obtention
6 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
niveau universitaire ou aux échelons précédents • leur motivation permet de mobiliser les efforts
du cursus; requis aux apprentissages et de soutenir la
persévérance aux études.
• la situation financière des étudiantes et étudiants
pourrait être reliée à la persévérance aux études; Un nouveau rapport envers les études
• l’accès aux nouvelles technologies de l’infor- L’exploration du nouveau rapport qu’entretiennent
mation et des communications comme nouveau les étudiantes et les étudiants envers les études,
facteur d’accès au savoir constitue potentielle- révélée dans les études et la consultation du
ment une nouvelle barrière financière à l’accès Conseil, souligne quelques particularités :
aux études universitaires.
Ø l’intérêt à l’égard de la discipline et du travail
Sur le plan des conditions psychopédagogiques, intellectuel, les motifs d’ordre socioprofessionnel
notons que : et l’influence d’une personne significative, dont
un parent, seraient des facteurs importants de
• les ressources universitaires délimitent les motivation à entreprendre des études universi-
conditions de réussite par leur effet direct sur taires;
le rapport professeur-étudiants, sur les infra-
structures dédiées à la formation et sur l’enca- Ø leur représentation de la réussite serait généra-
drement; lement polarisée entre des critères personnels
de réussite et des critères institutionnels qu’ils
• la qualité de l’intégration à l’université fait la déduisent des exigences universitaires – plus
différence entre la persévérance et l’abandon ils avancent dans le parcours universitaire et
des études; plus cette représentation s’intériorise, référant
alors davantage à leurs critères personnels;
• le programme d’études, incluant le contenu de
la formation, les méthodes d’enseignement, la Ø leur degré de satisfaction à l’endroit des études
charge de travail, l’évaluation et l’encadrement, serait généralement élevé et il tendrait à
serait un facteur de réussite; s’accroître au fil des cycles d’études – néanmoins,
la satisfaction varie grandement selon le
programme, le niveau de connaissance du
• la relation professeur-étudiant ressort comme
programme et les attentes initiales à cet égard;
un facteur d’influence sur la réussite;
Ø divers facteurs favoriseraient leur engagement
• la formation préalable, le degré de précision
envers les études, dont le temps consacré aux
du choix scolaire et professionnel et l’engage- études, le fait d’occuper un emploi lié au
ment dans un régime d’études – temps partiel domaine d’études, le financement adéquat des
ou temps plein – constituent des caractéristi- études, les perspectives avantageuses sur le
ques propres aux étudiantes et aux étudiants plan de la carrière, le degré d’appartenance à
qui influent sur la réussite. un groupe social et, pour les adultes d’âge
mûr, un partage équitable des tâches au sein
Finalement des conditions psychologiques de la famille ainsi que le soutien de l’employeur
présentes chez les étudiantes et les étudiants quant au projet de formation;
marquent la réussite :
Ø la relation avec le professeur, en ce qui touche
• leur engagement envers les études, se concré- sa disponibilité, la qualité de l’encadrement,
tisant par des actions précises de leur part, le contact personnalisé et soucieux du déve-
influence grandement la réussite; loppement global, la rétroaction explicite sur
8 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
pas nécessairement par des emplois avantageux, de diagnostic - intervention - évaluation des
que l’attrait exercé par le marché du travail mesures d’aide à la réussite afin d’adapter le
dans certaines disciplines peut inciter à une soutien offert aux besoins des étudiantes et
trop forte accélération de la formation ou bien étudiants;
à l’abandon du programme avant l’obtention
du diplôme et que l’examen d’un ordre pro- Ø et affiner la composante pédagogique dont la
fessionnel peut constituer un seuil critique pédagogie au premier chef, l’élaboration de
important. Pour pallier ces situations, diverses programmes et les modes d’évaluation des
mesures favorisent le rapprochement de la apprentissages.
formation et du marché du travail, la diffusion
d’informations sur l’évolution des professions Tout en soulignant l’apport de cet avis à la
et sur le marché du travail ainsi que la réussite compréhension du phénomène de la réussite à
des examens d’un ordre professionnel. l’université, le Conseil conclut à la nécessité
d’élucider dans les plus brefs délais plusieurs
Recommandations questions laissées en suspens. En outre, il invite le
ministre de l’Éducation et le milieu universitaire à
S’appuyant sur ces analyses, le Conseil propose s’y appuyer pour réaliser cet engagement collectif
un ensemble de recommandations visant essentiel- pris lors du Sommet du Québec et de la jeunesse
lement à : envers la réussite et la qualification des jeunes.
En 1948, l’Organisation des Nations Unies proclamait Les variables lourdes affectant la réussite sont
la Déclaration universelle des droits de l’homme reconnues comme étant en premier lieu l’origine
stipulant le droit de toute personne à l’éducation et sociale, et en deuxième, le sexe. Ces dernières
« l’accès aux études supérieures en pleine égalité années, peu d’études ont contribué à éclairer
à tous en fonction du mérite1 ». Un demi-siècle l’influence de l’origine sociale sur la réussite.
plus tard, la première Conférence mondiale sur Tout se passe comme s’il était devenu difficile de
l’enseignement supérieur de l’UNESCO rassemblant développer une analyse contemporaine de ce
182 États aboutit à une déclaration dont le premier phénomène apportant les nuances requises. Nous
article réaffirme ce droit fondamental : croyons que cette lacune peut conduire à gommer
cette réalité au sein du milieu universitaire, de
L’enseignement supérieur doit être ouvert en sorte que peu de mesures de soutien y soient
pleine égalité à tous en fonction de leur consacrées. Comment réactualiser une réflexion
mérite, conformément aux dispositions de
l’article 26.1 de la Déclaration universelle féconde autour de l’influence de l’origine sociale
des droits de l’homme. En conséquence, sur la réussite ?
aucune discrimination ne saurait être admise
pour ce qui est de l’accès à l’enseignement L’université ne tire pas seule les ficelles de la
supérieur en raison de la race, du sexe, de la
langue, de la religion ou de toute distinction réussite; de nombreux partenaires contribuent à
économique, culturelle ou sociale ou encore définir les conditions de réussite. Les gouvernements
de handicaps physiques2. fédéral et provincial déterminent largement le
financement de la formation, de la recherche et
Cet objectif social réitéré au fil de l’histoire se fait
des études. Les entreprises participent à définir les
l’écho des constats réalisés par plusieurs États quant
conditions des études, notamment dans le contexte
à l’accès inégal des diverses couches de la popula-
tion à l’université3. La thématique n’est donc pas de la réalisation de stages ou de travaux de recherche.
Si de telles collaborations constituent des apports
nouvelle mais demeure néanmoins d’actualité.
généralement souhaités, le trop fort attrait qu’exerce
Dans le présent avis, le Conseil a choisi de traiter le marché du travail sur certains étudiants et
cette question en l’abordant sous l’angle des étudiantes les conduit parfois à la négligence de
conditions de réussite des étudiantes et des étudiants leurs études ou à leur abandon. Comment établir
à l’université. Certains écarts persistent entre, d’une un pacte social autour du soutien de la réussite des
part, la connaissance des conditions favorables à la étudiantes et étudiants ?
réussite et, d’autre part, leur mise en application. Ils
Du côté institutionnel, la démocratisation de la
reflètent des dilemmes à résoudre, des ambiguïtés à
formation universitaire et la massification de
éclairer, voire, dans certains cas, des paradoxes à
dénouer. Les pages suivantes en donnent un bref l’enseignement supérieur ont eu pour effet de
rendre la population étudiante plus hétérogène que
aperçu.
par le passé. Dans ce contexte, une difficulté
importante consiste à maintenir un accès équitable
à l’université aux divers sous-groupes de la
1. Organisation des Nations Unies, La Déclaration population et à soutenir la persévérance jusqu’au
universelle des droits de l’homme de 1948, article 26. diplôme tout en maintenant des exigences élevées,
2. UNESCO, L’Enseignement supérieur au XXIe siècle. à la hauteur d’études universitaires, et en assurant
Vision et actions, Paris, UNESCO, 1998, p. i. la qualité de la formation. Comment les universités
3. U.S. Department of Education, Reconceptualizing parviennent-elles à relever ce défi ?
Access in Postsecondary Education. Report on the
Policy Panel on Access; Maggie Woodrow, Projet
sur l’accès à l’enseignement supérieur en Europe : En outre, parmi les mesures mises en œuvre dans
Rapport de travail. Partie I - Synthèse et recom- les universités pour améliorer la réussite des
mandations; Jean-Louis Moortgat, A Study of étudiantes et des étudiants, toutes n’atteignent pas
Dropout in European Higher Education.
12 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
leur cible. Par exemple, certaines politiques insti- l’étudiant, le projet de formation peut s’inscrire
tutionnelles en matière de réussite peuvent être totalement ou partiellement dans son projet personnel;
reçues avec tiédeur par ceux et celles qui ont la dans le dernier cas, il peut comporter diverses options
responsabilité de les appliquer; certaines mesures allant de la persévérance dans le programme initial
d’aide à la réussite sont méconnues des professeurs; jusqu’au diplôme, au changement de programme,
les étudiantes et les étudiants qui ont le plus besoin au retour vers le collégial, à l’interruption des
d’aide ne fréquentent pas pour autant les services études ou à l’abandon, etc. Pour l’établissement,
correspondants ou n’y ont pas nécessairement le projet de formation est porté par le programme
accès. Comment établir une véritable synergie d’études. Pour les employeurs, la formation devrait
institutionnelle autour de l’amélioration de leur permettre d’acquérir des savoirs et des compétences
réussite ? de haut niveau, le plus près possible des conditions
d’exercice de l’emploi. Comment définir la réussite
En matière de condition étudiante, un courant dans un tel contexte ?
de la sociologie de la jeunesse observe des trans-
formations importantes des comportements des Les recommandations contenues dans cet avis
jeunes adultes. Ceux-ci empruntent des trajectoires prennent position sur les questions soulevées
scolaires diversifiées et établissent un rapport aux précédemment. Elles sont présentées au chapitre
études moins exclusif que par le passé. Si l’on 5. Les chapitres 2, 3 et 4, s’appuyant sur le corpus
connaît les conditions garantes de réussite à travers des travaux ainsi que sur les consultations réalisées
les diverses étapes de la trajectoire universitaire, par le Conseil au sein du milieu universitaire
on observe pourtant que cette trajectoire n’est québécois, développent chacune de ces questions
empruntée que par une minorité d’étudiantes et en donnant un aperçu de l’état de la connaissance
d’étudiants. Quelles incidences les choix de vie sur les conditions de réussite (chapitre 2), en
des étudiantes et des étudiants ont-ils sur leur esquissant le portrait du nouveau rapport aux
réussite à l’université ? études qu’entretiennent les étudiantes et les
étudiants (chapitre 3) et en résumant les principaux
L’insertion socioprofessionnelle au terme des obstacles et les seuils critiques en matière de
études est devenue une préoccupation grandissante, réussite rencontrés dans le milieu universitaire
voire une nette inquiétude dans certains cas, parmi québécois ainsi qu’en présentant plusieurs
la population étudiante. Globalement, malgré une exemples de mesures d’aide à la réussite qui y
détérioration des conditions d’insertion des diplômées sont implantées (chapitre 4). Mais d’abord, le
et diplômés à un emploi lié au domaine d’études premier chapitre établit le sens accordé à la
au cours des années 90, faisant davantage place à réussite ainsi que l’angle particulier à partir
la précarité des emplois et au travail à temps partiel duquel le Conseil en traite. Il le fait en clarifiant
– jusqu’en 1997, année de la dernière enquête les éléments contextuels, en soulevant les principaux
Relance – , leurs perspectives d’emplois demeurent enjeux et en rappelant la pensée du Conseil sur ce
généralement plus favorables que celles de leurs thème pour tous les ordres d’enseignement.
homologues des autres ordres d’enseignement. Finalement, ce chapitre présente la grille d’analyse
L’image du chômeur instruit et le climat de morosité utilisée dans l’étude du phénomène de la réussite.
sociale quant à la formation universitaire peuvent
alimenter une ambiguïté dans l’esprit des étudiantes La réalisation du présent avis est le fruit des travaux
et étudiants. La réussite des étudiantes et des de la Commission de l’enseignement et de la
étudiants en est-elle affectée ? recherche universitaires mandatée à cette fin par
le Conseil.
Le projet de formation n’a pas une définition
univoque. Les différents acteurs nourrissent des La démarche de la Commission prend appui sur
attentes diverses sur ce plan. Pour l’étudiante ou l’analyse du corpus des travaux, recensant à la
Introduction 13
fois les recherches institutionnelles réalisées dans Une seconde consultation a été réalisée auprès des
les universités québécoises, les enquêtes portant étudiantes et étudiants afin de mieux cerner leur
sur tout le réseau universitaire québécois et les réalité. Au total, 87 étudiantes et étudiants provenant
études produites à l’étranger. En outre, le fait de de tous les cycles d’études et de tous les grands
rassembler les données quantitatives disponibles domaines d’études ont participé à des entrevues
en ce qui touche la scolarisation de la population, de groupe. Le premier volet de cette consultation
l’évolution des effectifs étudiants, la diplomation explore le rapport aux études, la représentation de
et l’insertion socioprofessionnelle analysées selon la réussite ainsi que la perception de l’efficacité
le cycle, le régime d’études, le domaine d’études des mesures d’aide à la réussite. Le second volet
éclaire la situation des étudiantes et étudiants de
et le sexe a permis de cerner les acquis ainsi que
premier cycle dans les domaines des sciences de la
certains éléments de la problématique. santé, des sciences pures et des sciences appliquées;
le rapport aux études y est analysé dans ses dimensions
Afin d’approfondir et de nuancer les diagnostics touchant les perspectives d’avenir, les perspectives
établis à l’aide des sources précédentes, des d’emploi établies par les enquêtes Relance et la
consultations ont été réalisées par le Conseil au persévérance aux études.
sein du milieu universitaire au cours de l’année
1998-1999. En outre, la Commission de l’enseignement et de
la recherche universitaires a organisé deux tables
Une première consultation auprès des membres du rondes, réunissant 13 personnes1. Les aspects
personnel des universités québécoises a permis de pédagogiques ainsi que l’engagement des étudiantes
recueillir des informations sur les obstacles et les et des étudiants ont été abordés au cours de la
seuils critiques que vivent les étudiantes et étudiants première table ronde. La seconde a rassemblé des
ainsi que sur les mesures d’aide à la réussite visant à chercheures et chercheurs du milieu universitaire
les combattre. Au total, 52 personnes ont été ayant étudié la condition étudiante en lien avec la
rencontrées dans la presque totalité des universités. réussite des études.
Des entrevues individuelles et de groupe ont été
réalisées auprès de vice-recteurs à l’enseignement, Le Conseil tient à remercier chaleureusement toutes
de directeurs de programmes ou de départements, ces personnes qui ont participé aux consultations
de professeurs, de conseillers pédagogiques ou et aux tables rondes ainsi que celles qui ont contribué
à organiser les entrevues dans leur milieu. L’ensemble
d’agents de recherche. Parmi les entrevues de
des données recueillies a largement enrichi notre
groupe, deux rencontres ont eu lieu avec les vice-
analyse et inspiré les recommandations. Nous
recteurs à l’enseignement du Comité des affaires désirons exprimer notre reconnaissance et notre
académiques de la CREPUQ, pour traiter succes- appréciation aux membres de la Commission de
sivement de la situation de la réussite au premier l’enseignement et de la recherche universitaires
cycle et aux cycles supérieurs. Lors de la deuxième (CERU) dont la diversité et la richesse des expé-
rencontre, quelques doyens des études supérieures riences et des analyses ont permis d’éclairer avec
ont participé aux échanges. Finalement, l’informa- justesse et sensibilité la production de cet avis et
tion recueillie a été complétée par le repérage des les recommandations qu’il contient. Toutes ces
mesures d’aide à la réussite à partir des rapports collaborations ont permis au présent avis de
déposés par les universités à la Commission de prendre forme.
l’éducation en septembre 1998 en vertu de la Loi
modifiant la Loi sur les établissements d’ensei-
gnement de niveau universitaire. Ces diverses
opérations ont mis au jour une grande variété de
mesures d’aide à la réussite mises en œuvre dans
les universités québécoises.
1. La liste des personnes consultées par la Commission
est reproduite à l'annexe 6.
CHAPITRE 1
Préciser le sens de la réussite : quelques
considérations préliminaires
De manière générale, si on s’appuie sur les plus aux cycles supérieurs, on observe des modifications
récentes enquêtes de relance des diplômés et des importantes de l’engagement des étudiantes et des
diplômées universitaires1, leurs perspectives étudiants envers les études qui vont dans le sens
d’emploi se détériorent jusqu’en 1997. Des de l’alternance travail-études, de l’interruption
disparités importantes sont observées selon les momentanée des études lors de grossesse, etc.5
disciplines, allant d’une très faible à une très forte
intégration à un emploi lié au domaine d’études. Au moment même où la demande sociale de formation
Néanmoins, les perspectives d’emploi demeurent de la part des étudiantes et des étudiants est plus
plus favorables pour les diplômées et diplômés importante et plus longue que par le passé et où la
universitaires que pour leurs homologues des formation universitaire devient centrale pour le
autres ordres d’enseignement, et cela particulière- développement de l’économie, les transformations
ment pour les titulaires de maîtrise2. sociales relatives à la jeunesse font pression dans
le sens d’un engagement moins exclusif envers les
L’allongement de la jeunesse études, d’une trajectoire universitaire ponctuée par
les changements de programme, l’abandon suivi
Se faisant l’écho des transformations du marché parfois d’un retour aux études, un attrait grandissant
du travail ainsi que de l’évolution de la forme et pour la réduction du rythme des études, etc. Comme
du sens que prend le travail dans les sociétés nous le verrons en traitant des conditions objectives
occidentales, les sociologues notent le phénomène de réussite, tous les parcours qu’empruntent les
de l’allongement de la jeunesse3 caractérisé par la étudiantes et les étudiants ne mènent pas avec les
prolongation de la période de la scolarité retardant mêmes probabilités à la réussite et à l’obtention
ainsi l’entrée sur le marché du travail, par une d’un diplôme. De ce fait, on peut affirmer que les
insertion socioprofessionnelle plus longue et plus transformations sociales relatives à la jeunesse
difficile ainsi que par le report de l’âge de départ constituent un obstacle supplémentaire à la réussite.
du domicile parental. De plus, on observe un
brouillage des étapes de la vie des jeunes qui L’apport de l’université au développement de
rompt la linéarité du cheminement traditionnel où l’humanité
se succèdent, dans l’ordre, les études, l’accès à un
emploi et la fondation d’une famille. Les grands problèmes humains et sociaux – les
problèmes environnementaux, la pauvreté,
Au Québec, on observe une participation grandissante
l’exclusion sociale, les conflits nationaux et
des étudiants et étudiantes au travail rémunéré
durant les études. À la différence de l’ensemble internationaux, le racisme et la xénophobie –
des jeunes, les étudiantes et étudiants auraient interpellent la communauté scientifique univer-
tendance à quitter le domicile parental plus tôt et à sitaire. Celle-ci est appelée à jouer un rôle sur le
retarder l’âge de fondation d’une famille4. Néanmoins, plan de l’amélioration du bien-être de toute la
société. En outre, tant par le respect de valeurs
éthiques sur les plans professionnel et scientifi-
que, que par l’accueil des étudiantes et étudiants
1. Marc Audet, Qu’advient-il des diplômés et diplômées
des universités ? respectant les exigences universitaires, sans consi-
2. Voir le tableau 1 de l’annexe 1, L’évolution du taux
dérer leurs caractéristiques financières, sociales,
de placement [...]; Conseil supérieur de l’éducation, raciales, linguistiques, sexuelles, religieuses, etc.,
L’Insertion sociale et professionnelle, une l’université participe aux projets de renforcement
responsabilité à partager.
3. Allessandro Cavalli et Olivier Galland, L’Allongement
de la jeunesse.
4. Arnaud
e
Sales et al., Le Monde étudiant à la fin du 5. Réflexion de Jacques Crochetière, Fonds FCAR,e lors
XX siècle. Rapport final sur les conditions de vie de la table ronde réalisée dans le cadre de la 30
des étudiants universitaires dans les années quatre- réunion de la CERU.
vingt-dix.
18 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
Le contexte québécois du financement des univer- nombre de professeurs3, encouragée par les
sités comporte diverses particularités, comparati- programmes de départ anticipé à la retraite, par
vement à celui des autres provinces canadiennes des diminutions du personnel de soutien et des
ou, plus largement, à la situation nord-américaine. auxiliaires d’enseignement, par des rationalisations
Au Québec, le financement des universités se importantes du côté des dépenses matérielles pour
fonde encore majoritairement, et dans une propor- les équipements, l’immobilisation et le renouvel-
tion supérieure à ce qui est observé dans les autres lement des collections de livres et des revues
provinces canadiennes, sur les crédits de source scientifiques dans les bibliothèques, etc. Le
publique, et cela malgré les compressions récentes1. ralentissement des dépenses de recherche dû à la
Depuis 1994-1995, les crédits de source privée baisse du financement gouvernemental, provincial
sont limités par la politique gouvernementale de et fédéral, au cours des années 904 a une influence
gel des droits de scolarité. Pour tenter d’équilibrer sur les possibilités réelles de financer les travaux
cette situation, la subvention publique de fonction- auxquels participent les étudiantes et les étudiants
nement versée aux universités a été, dans la et qui contribuent à l’avancement et au financement
première moitié des années 90, plus généreuse que de leurs études. Cependant, la fin des années 90
celle des autres provinces2. Cette avance s’estompe annonce une reprise des investissements gouver-
en 1996-1997 et un recul est observé en 1997-1998. nementaux en recherche. Bien qu’il ne soit pas
En outre, la politique d’aide financière aux études facile de cerner avec précision l’impact des
s’appuie sur le principe d’accès aux études univer- compressions budgétaires sur la réussite des
sitaires selon le mérite et, de ce fait, une aide est étudiantes et des étudiants, il est clair que cette
consentie aux étudiantes et étudiants dont les nouvelle situation influe sur les conditions
ressources personnelles ou familiales ne permet- d’organisation des études ainsi que sur l’offre de
tent pas de rencontrer les obligations financières formation.
liées aux études universitaires. Le régime québécois
de prêts et bourses est jugé comme l’un des plus En bref…
avantageux au Canada. Cependant, dans le contexte
des récentes compressions budgétaires, les universités Le Conseil prend acte des effets structurants de
québécoises disposent d’un fonds de fonctionnement certains éléments contextuels sur la réussite des
général par étudiant (cumul de la subvention de étudiantes et des étudiants à l’université, soit :
fonctionnement et des droits de scolarité) qui Ÿ les changements dans la production et la diffusion
décroît depuis 1995-1996, passant de 11 563$ en des savoirs qu’annonce le développement des
1994-1995 à 10 780$ par étudiant en dollars nouvelles technologies de l’information et des
courants en 1997-1998. Cette année-là, tant en communications par leurs effets sur la redéfinition
Ontario que dans l’ensemble des provinces des conditions d’accès à l’université et de réussite
canadiennes, on observe pourtant une hausse du ainsi que sur le devenir des universités;
fonds de fonctionnement général par étudiant.
Ÿ le ralentissement économique opéré jusque vers la la situation, dénonçant l'abandon et la faible diplo-
fin des années 90, qui s’est accompagné d’une mation. Au sein des universités, on tente de mettre
insertion plus lente des nouveaux titulaires de en place diverses politiques et mesures visant à
diplômes universitaires sur le marché du travail; conduire les étudiantes et étudiants vers la réussite;
Ÿ l’allongement de la jeunesse et le bris de la linéarité l’encadrement est au centre des orientations et des
des étapes franchies au début de la vie adulte actions entreprises en ce sens. Les étudiantes et les
(les études, l’accès à un emploi et la fondation d’une étudiants nourrissent des attentes en ce qui touche
famille) desquels résulte la diversification de par- leurs études et se définissent des objectifs de
cours qui ne conduisent pas avec les mêmes proba- réussite qui tantôt s’approchent des standards
bilités à un diplôme universitaire; institutionnels et tantôt s’en éloignent. Les asso-
Ÿ le caractère central de la formation universitaire pour ciations et les corporations professionnelles tentent
le bien-être collectif; également de faire valoir leurs exigences propres
auprès des universités en spécifiant les compétences
Ÿ l’idée de formation tout au long de la vie qui oblige à
attendues des nouveaux diplômés et diplômées au
redéfinir la réussite au-delà de la formation initiale;
seuil d’entrée dans la profession.
Ÿ l’émergence de nouveaux partenariats qui influen-
cent les conditions de réalisation des études; Ainsi, l’ensemble des perceptions, des attentes,
Ÿ le contexte d’organisation et de réalisation de la for- des exigences et des engagements des divers
mation universitaire sous l’effet de la diminution du acteurs sociaux envers la formation universitaire
financement des universités, depuis la deuxième fait pression sur les résultats escomptés de l’activité
moitié des années 90. universitaire où la réussite des étudiantes et des
étudiants à l’université constitue l’enjeu principal.
Dans les pages qui suivent, le concept d’enjeu
renvoie à un élément à propos duquel deux ou
1.2 Les enjeux plusieurs acteurs ou groupes d’acteurs luttent pour
en prendre le contrôle. Ce contrôle ou cette
La réussite des étudiantes et des étudiants dans tentative de contrôle peut s’exercer sous un mode
l’ensemble du système d’éducation ne laisse personne incitatif ou coercitif. Cette tentative de contrôle
indifférent. Il en va de même à l’université. Dans peut s’exercer également par la persuasion, soit
le cadre de la Politique québécoise à l’égard des en défendant une idée, ou par la mobilisation.
universités – Pour mieux assurer notre avenir
collectif, une amélioration du taux de scolarisation L’énoncé des enjeux met en relief les éléments de
est souhaité dans divers segments de la formation débat. En outre, le fait de dévoiler au fur et à
universitaire. Ainsi, de manière générale, on vise à mesure la manière dont nous résolvons chacun de
favoriser l’obtention d’un premier grade universitaire ces enjeux, annonce déjà les positions qui sont
et, de manière spécifique, des priorités sont accordées développées au dernier chapitre. Finalement, il est
aux domaines de formation qui font l’objet d’une fréquent que les enjeux renvoient à certaines données
forte demande, c’est-à-dire les domaines scientifi- qui sont développées aux chapitres 3 et 4. Les
ques et technologiques, ainsi qu’aux cycles supérieurs, enjeux permettent donc d’introduire la problématique
principalement au doctorat1. La réussite à l’uni- et d’engager la réflexion qui s’approfondit au fil
versité retient également l’attention des médias et des chapitres.
ceux-ci portent généralement un regard sévère sur
l’atteinte d’objectifs personnels dans une des savoir, l’abandon des études universitaires est
dimensions du projet de vie qui inclut des projets susceptible de freiner ce développement économique.
de toute nature liés, par exemple, au travail, à la Pour le milieu artistique ou littéraire, la participation
vie amoureuse, aux loisirs, à l’engagement social à des études universitaires peut se traduire par
ou politique, etc. Pour les adultes d’âge mûr étudiant l’augmentation du niveau de culture de la société
à l’université, la réussite peut être subordonnée au et aussi par le développement de la sensibilité
développement de compétences professionnelles, esthétique et artistique des étudiants et étudiantes
à l’amélioration des conditions de travail ou à une inscrits dans des domaines artistiques ou littéraires
promotion, au dépassement de soi, etc. variés. L’abandon des études dans ces domaines
n’est pas toujours perçu comme une perte mais
C’est donc dire que le résultat escompté de l’activité bien souvent comme un signe de maturité artistique
universitaire dépend largement des positions des et créatrice chez l’étudiante et l’étudiant devenus
acteurs. La définition de la réussite n’est pas neutre. aptes à s’insérer dans la communauté artistique.
Elle constitue un enjeu qui met en présence une Pour les tenants de la démocratisation de l’ensei-
diversité de définitions possibles du résultat attendu. gnement supérieur, la persévérance devient le
levier d’un changement en permettant la mobilité
sociale. Selon ce point de vue, l’abandon des
Pour sa part, le Conseil retient de ce débat l’impor- études universitaires, et particulièrement par les
tance de centrer la réussite sur le projet de forma- étudiantes et étudiants issus de milieux socio-
tion de l’étudiant ou de l’étudiante – et comme on économiques défavorisés, menace les valeurs de
le verra, ce projet de formation peut être multi- développement social, de démocratie et d’égalité
forme, de sorte que la cohérence n’apparaît pas entre les citoyens et les citoyennes. Finalement,
d’emblée – tout en considérant son développe- du point de vue des étudiantes et des étudiants, la
ment à la fois sur les plans professionnel ou artis- persévérance aux études peut être associée à
tique, scientifique, culturel, civique et personnel. l’épanouissement et à l’actualisation de soi en lien
Il apparaît nécessaire de donner plus d’extension au avec les aspirations personnelles, professionnelles
concept de réussite. Ainsi, alors qu’il importe que ou artistiques. L’abandon peut devenir synonyme
la formation initiale revête les qualités d’une for- d’échec dans la réalisation de son projet personnel
mation qualifiante, spécialisée et de haut niveau ou peut signifier une importance différente accordée
comme en témoigne généralement la délivrance aux études en lien avec la réalisation des autres
d’un diplôme universitaire, la réussite doit égale- dimensions du projet de vie.
ment s’élargir à la formation tout au long de la vie
permettant un renouvellement continu des
connaissances et l’affinement des compétences. Sur cet enjeu, dans ses avis antérieurs, le Conseil
a soutenu fermement que la persévérance aux
études permet l’accès à une formation initiale
supérieure, au développement des compétences
Évaluer les conséquences de l’abandon à scientifiques ou artistiques, au développement
l’université d’un sens critique et de comportements éthiques, à
la culture au sens large, etc. En outre, il considère
L’abandon des études universitaires constitue un important de bien situer les conséquences de
enjeu dont les groupes d’acteurs font ressortir des l’abandon des études universitaires qui engendre
conséquences diverses menant à la perte ou à la des pertes qu’il ne faut pas minimiser. Au secon-
dégradation d’une valeur estimée essentielle. Dans daire, l’abandon est associé à la pauvreté, à la
le milieu industriel, où la formation universitaire détérioration de la santé, à la diminution de l’espé-
se présente comme le moteur du développement
d’une économie mondiale et régionale axée sur le
Préciser le sens de la réussite : quelques considérations préliminaires 23
rance de vie, à une qualité de vie moindre et aussi démocratisation de l’université qui s’est imposé
à une insertion professionnelle fragilisée1. Au au cours des années 60 n’a pas donné tous les
collégial, l’abandon des études peut interdire bénéfices escomptés, et cela tant au Québec qu’ailleurs
l’accès à une formation initiale qui constitue une dans le monde. La composition sociale de l’effectif
exigence minimale d’entrée sur le marché du étudiant à l’université met en évidence les inégalités
travail et d’adaptation professionnelle au cours de persistantes qui s’accentuent au cours des études3.
la vie adulte2. La politique de la « porte ouverte » dans l’ensemble
des pays d’Europe, aux États-Unis et aussi au
À l’université, l’abandon met en péril les valeurs Québec semble s’être soldée par une politique de
liées au développement personnel, professionnel la « porte à tambour » puisque les étudiants pour
ou artistique des individus, au développement qui la formation universitaire constitue un tremplin
social ainsi qu’au développement économique. à la mobilité sociale sont les plus touchés par
Ainsi, il est le plus souvent source de déception l’abandon4.
sur le plan des aspirations personnelles des
étudiantes et étudiants. Il peut contribuer au L’analyse du discours contenu dans les rapports
maintien de la fracture sociale entre les groupes des universités déposés à la Commission permanente
qui composent la société. Notons que les conséquences de l’éducation en vertu de la Loi modifiant la Loi
diffèrent selon le cycle d’études, mais, dans tous sur les établissements d’enseignement de niveau
les cas, une valeur est menacée. Au premier cycle, universitaire révèle des positions différentes
se dessine le spectre d’une formation initiale manifestées par les universités en ce qui concerne
inachevée. Aux deuxième et troisième cycles, c’est l’objectif de démocratisation. Quatre positions
la formation scientifique des chercheurs de pointe distinctes ont été décelées à partir d’une définition
ainsi que la formation des professionnels haute- du concept de démocratisation déjà proposée par
ment qualifiés qui sont menacées. Sur le plan le Conseil, soit la poursuite d’un triple objectif lié
économique, l’enjeu touche la participation du à l’accès à l’université, à la qualité de la formation
Québec au développement du savoir, les entre- et à l’accès au diplôme. Pour les uns, l’objectif de
prises innovantes pour qui le savoir et la technolo- démocratisation se traduit par un net accent sur
gie constituent les bases de leur existence et de l’élargissement de l’accès à quiconque en manifeste
leur développement, etc. Bref, les conséquences de l’intérêt, en lien avec les exigences minimales
l’abandon d’études universitaires menacent le d’entrée à l’université. Pour les autres, la formation
bien-être des individus ainsi que celui de toute la de qualité et l’accès au diplôme apparaissent
société. comme étant des valeurs qui justifient la forte
sélectivité à l’entrée. D’autres positions observées
sont dites hybrides ou mitoyennes par rapport aux
deux précédentes. Ainsi, dans certains établissements
Renouveler les engagements en regard de la coexistent au sein d’une même université des
démocratisation de l’université politiques de large accessibilité dans certains
Ce courant propose une manière non linéaire de automne-hiver, le cumul des certificats aux fins de
concevoir l’insertion professionnelle. Progressive- l’obtention d’un baccalauréat, les programmes
ment, au cours de sa formation, l’étudiante et courts, etc.). En effet, à titre d’exemple, le régime
l’étudiant sont appelés à se situer par rapport aux d’études à temps partiel constitue une voie d’accès à
valeurs de leur profession, à se définir personnelle- l’université qui, pour bon nombre d’étudiantes et
ment quant à leur profession, à apprendre à répon- d’étudiants, s’avère la première étape d’un enga-
dre aux exigences requises tant à l’université que gement à temps plein envers les études universi-
dans le cadre de la pratique professionnelle ou taires. Les certificats jouent un rôle similaire par
artistique ainsi qu’à y exercer leur sens critique rapport au baccalauréat. Ces deux voies offrent
afin de participer à l’évolution de la profession. sans contredit l’accès à l’université aux adultes
d’âge mûr désirant parfaire leur formation.
Comme nous le verrons ultérieurement, malgré les
disparités observées sur le plan de la diplomation
Adapter la formation aux nouvelles réalités entre les régimes d’études à temps plein et à
étudiantes temps partiel, cette possibilité de se prévaloir de
l’un ou l’autre régime peut contribuer à améliorer
Dans le contexte des transformations sociales rela- la diplomation. Néanmoins, nous verrons qu’il
tives à la jeunesse, les nouvelles réalités rencontrées existe des voies de formation qui conduisent plus
parmi la population étudiante constituent un enjeu directement et plus sûrement vers l’obtention du
interpellant l’adaptation de la formation universitaire. diplôme.
Pour les uns, l’allongement de la durée des études
occasionné par l’exercice de la conciliation étude-
travail-famille peut constituer un problème à Le Conseil considère qu’il est important de sensibili-
résoudre dont la solution va dans le sens d’un
ser les étudiantes et les étudiants à l’existence de
engagement accru envers les études, du report du
moment de la fondation d’une famille, du resser- ces conditions objectives de réussite. De plus, elles
rement de la fréquentation universitaire vers rappellent le rôle central de l’engagement des
l’obligation d’un engagement à temps plein, etc. étudiantes et des étudiants envers leurs études en
Pour les autres, il importe de prendre acte des matière de réussite, un engagement auquel ne peut
mutations sociales importantes qui se répercutent pallier la souplesse de l’offre de formation.
sur les trajectoires scolaires des étudiants; il y
aurait tentative d’adaptation de la part des étudiantes
et étudiants aux nouvelles réalités sociales et
économiques auxquelles ils sont confrontés. Résoudre les tensions inhérentes à la formation
Jusqu’où l’université peut-elle prendre en compte La formation universitaire devient la scène de tensions
les projets de vie des étudiantes et étudiants sans quotidiennes. Celles-ci naissent des demandes
trahir les exigences propres à une formation diversifiées provenant d’une population étudiante
universitaire à chacun des cycles ? La question est hétérogène, des attentes personnelles que les
complexe. Pour le Conseil, il ne convient nullement étudiantes et étudiants nourrissent envers la
de remettre en cause l’existence des voies diversi- formation à partir de leur perception initiale de
fiées de formation (les régimes d’études à temps leur choix scolaire, de l’intervention multiple de
plein et à temps partiel, les cours offerts le jour ou professeurs et chargés de cours véhiculant des
le soir, le trimestre d’été complétant la programmation points de vue qui tantôt convergent et tantôt
révèlent le caractère équivoque d’une discipline
ou d’un domaine d’études, des ressources maté-
rielles qui s’avèrent parfois suffisantes pour
sionnelle des étudiants à l'université. Perspectives
théoriques et méthodologiques, p. 36-38. soutenir l’enseignement et parfois insuffisantes,
Préciser le sens de la réussite : quelques considérations préliminaires 27
des engagements divers des étudiantes et des l’encadrement au sein du programme pour faire le
étudiants à l’égard de leurs études et, finalement, lien entre l’ensemble des cours, à l’encadrement
d’une adaptation plus ou moins réussie aux dans sa dimension institutionnelle, c’est-à-dire
exigences universitaires selon l’héritage social et d’établissement « encadrant » par l’ensemble des
culturel des étudiants et étudiantes. ressources mises à la disposition des étudiants et
des étudiantes.
En ce qui concerne le financement des universités, appel aux dimensions affectives et sociales, en
la mission sociale confiée aux universités engage plus de créer un sentiment d’appartenance à la
réciproquement la responsabilité de l’État à fournir communauté;
aux universités les moyens inhérents à sa réalisation.
- la poursuite du processus de maturation du
Le Conseil s’est résolument prononcé en faveur
choix vocationnel4.
du maintien du caractère public de l’enseignement
universitaire, recommandant d’assurer la prépon- Sur la scolarisation de la population québécoise,
dérance du financement public des universités1. comme il était évoqué antérieurement, le Conseil
Cette position sur le financement des universités s’est beaucoup préoccupé de démocratisation de
repose sur la conviction profonde que les coûts l’enseignement supérieur dans un contexte où les
dans le domaine de l’éducation constituent un demandes sociales – ex. : l’internationalisation
investissement productif à plus ou moins brève des rapports sociaux, l’explosion des nouvelles
échéance, cela justifiant de maintenir l’éducation technologies, le vieillissement de la population, la
comme secteur prioritaire des dépenses publiques, restructuration économique et les déséquilibres
tous ordres d’enseignement confondus2. qu'elle engendre au niveau de l’emploi, etc. – font
pression de manière irréversible et urgente sur
Le soutien de l’État à l’égard des universités doit
le système d’enseignement supérieur, créant
néanmoins s’exercer dans le respect de l’autonomie
une demande à la hausse des niveaux de scola-
universitaire qui se justifie en lien avec un volet
risation et de qualification qui vont dans le sens
de sa mission : l’analyse critique, la diffusion de
d’un enseignement supérieur de masse ouvert à
la connaissance, la contribution de l’université à la
tous ceux et celles qui respectent les exigences
vie démocratique de notre société, etc. Récipro-
d’admission5. Ces constats ont ainsi amené le
quement, l’autonomie universitaire engage la
Conseil à formuler des objectifs quantitatifs d’accès
responsabilité de l’université sur le plan de la
à l’université et aux diplômes universitaires aux
gestion ainsi que son imputabilité3. En outre, ce
trois cycles et à en évaluer l’atteinte au fil des avis
soutien doit contribuer à maintenir le Québec dans
traitant de cet ordre d’enseignement6. La proposi-
une situation avantageuse sur le plan international.
tion de hausser le niveau de scolarité de la popula-
tion québécoise par l’accès à l’université et
Dans cet avis, le Conseil abordait nommément la
l’obtention du diplôme de formation universitaire
réussite des étudiants en prenant position sur :
repose sur les trois principes généraux suivants :
- la nécessité de bien connaître les populations
- la nécessité pour l’enseignement supérieur, et
étudiantes qui fréquentent l’université;
notamment pour l’université, d’être réceptif
- le développement d’interventions visant à aux demandes sociales et d’ajuster conséquem-
favoriser la réussite à divers moments straté- ment l’offre de formation, en lien avec la
giques de leurs trajectoires; mission;
- le développement d’interventions qui mobili-
sent tous les aspects de la personne, c’est-à-
dire des interventions qui, en plus de poursuivre
des objectifs d’apprentissage, font également 4. Ibid., p. 178.
5. L’Enseignement supérieur : pour une entrée réussie
[…], chap. 1 et 3; Du collège à l’université : l’arti-
culation des deux ordres d’enseignement supérieur,
1. Le Financement des universités, p. 88. p. 28.
2. L’Enseignement supérieur : pour une entrée réussie 6. Réactualiser la mission universitaire, p. 19-29;
[…], p. 179. Recherche, création et formation à l’université :
une articulation à promouvoir à tous les cycles,
3. Ibid., p. 180; Le Financement […], p. 86. p. 32-33.
30 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
tion de l’approche programme, pour chercher des tout en se préoccupant de mieux soutenir les hommes
aménagements facilitant la conciliation études- afin de favoriser leur persévérance aux études3.
travail, pour revaloriser les activités extrascolaires
en lien avec les savoirs scolaires, etc1.
En bref…
Au secondaire, il conçoit que la réussite éducative
passe par : des interventions réalisées en synergie Le Conseil a déjà abordé la réussite éducative sous
visant le rétablissement de l’appartenance scolaire divers aspects et en lien avec diverses thématiques
chez l’élève, la diversification des méthodes péda- pour tous les ordres d'enseignement. Il s’appuie sur
gogiques, le maintien d’exigences élevées afin cette réflexion pour entreprendre ses analyses et
formuler ses recommandations sur les conditions de
d’offrir de réels défis éducatifs aux élèves, la réussite des étudiantes et des étudiants à l’université.
création d’une communauté d’appartenance pour
l’élève, la diversification des cheminements
scolaires, l’utilisation maximale des nouvelles
technologies de l’information et des communi- 1.4 Une grille d’analyse permettant de
cations (NTIC), la revalorisation de la formation
repérer les conditions de réussite
professionnelle, l’identification de conditions
d’apprentissage favorables pour les garçons, le
Dès la recension des travaux sur la réussite, il s’est
développement pédagogique des enseignants, le
avéré nécessaire d’utiliser une grille d’analyse
partenariat école-milieu communautaire et la
permettant de situer l’ensemble des données
culture de l’imputabilité chez tous les acteurs2.
recueillies afin d’apprécier l’état de la connaissance
sur le phénomène des conditions de réussite. Cette
Au primaire, le Conseil a analysé la problématique
grille d’analyse a permis de structurer les consul-
de l’écart de réussite entre les garçons et les filles.
tations et de traiter les données recueillies. En
Il propose un ensemble de recommandations pour
outre, elle a servi de guide pour recenser le corpus
tenter de soutenir les garçons et les filles, notamment
des travaux (chapitre 2) et repérer les obstacles,
dans leur apprentissage de la lecture et de l’écriture.
les seuils critiques ainsi que les mesures d’aide à
Ces recommandations se rapportent à la nécessaire
la réussite (chapitre 4). À l’usage, il est apparu
collaboration à établir entre les parents, les
qu’elle pouvait se complexifier davantage ou
enseignants et le ministre de l’Éducation pour
même que ses catégories pouvaient se définir
améliorer la réussite, à la diversification des
différemment. C’est une version enrichie qui est
méthodes d’enseignement adaptées au rythme et
présentée ci-après. Elle fournit des points de
au style cognitif des élèves, à un emploi judicieux
repère significatifs pour engager la réflexion et
du redoublement ainsi qu’au diagnostic de diffi-
mener un débat productif; en cela réside sa
cultés d’apprentissage, etc.
pertinence. Certes, le présent avis ne rend pas
Pour l’enseignement supérieur, le Conseil a déjà compte de chacune des dimensions qui y sont
manifesté son inquiétude quant aux écarts enregistrés présentes; des choix ont dû être faits afin de bien
entre les hommes et les femmes. Il recommandait circonscrire la thématique. La grille d’analyse se
alors de continuer à encourager l’accès des femmes veut avant tout un guide. Avant de la présenter,
définissons certains concepts clés sur lesquels
repose la réflexion du Conseil.
1. Ibid., p. 95-100.
3. Les Nouvelles Populations étudiantes des collèges
2. Contre l’abandon au secondaire[…], p. 70-71. et des universités : des enseignements à tirer, p. 81.
32 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
La réussite se définit en ces termes : l’acquisi- Les principaux axes à considérer dans l’analyse
tion et l’intégration par l’étudiant ou l’étu- des conditions de réussite des étudiantes et des
diante de connaissances et de compétences en étudiants à l’université sont résumés à la figure 1.
lien avec une formation de haut niveau s’inscri- Le premier axe se rapporte aux étapes de la
vant dans son projet personnel et contribuant réussite, s’échelonnant de l’accès à l’université
tout à la fois à son développement sur les plans jusqu’à l’insertion socioprofessionnelle au terme
professionnel, artistique, scientifique, culturel, des études. En outre, au cours de ces étapes, les
civique et personnel. étudiantes et les étudiants réalisent des tâches
particulières. On trouve ensuite, les facteurs de
Les conditions de réussite des étudiants et étu- réussite, qui renvoient aux facteurs environne-
diantes universitaires renvoient à un ensemble mentaux externes à l’établissement ou internes,
de facteurs qui, conjugués les uns aux autres et ces derniers se rapportant à l'organisation des
intervenant à chacune des étapes de la trajec- études ainsi qu’aux caractéristiques des étudiantes
toire universitaire, façonnent des probabilités et étudiants. Finalement, le troisième axe rend
données pour l’étudiant ou l’étudiante d’accé- explicite les divers niveaux d’analyse à partir
der à l’université, d’y réaliser une formation et desquels il est possible d’étudier les conditions de
d’obtenir un diplôme en vue d’une insertion réussite sur les plans macrosocial, microsocial,
socioprofessionnelle imminente et générale- psychopédagogique ou psychologique. L’inter-
ment souhaitée. section des catégories propres à ces trois axes
témoigne de la diversité des courants actuels de
Ces facteurs doivent être considérés dans une recherche ou de réflexion. Décrivons brièvement
perspective historique. En effet, l’état actuel du les catégories propres à ces trois axes.
développement des universités au Québec se situe
dans le prolongement de leur évolution1 et, plus Les étapes de la réussite
largement encore, du développement de la connais-
sance. L’état du développement des universités Les travaux réalisés au Conseil de l’Europe ainsi
s’inscrit ainsi sur une trame historique ponctuée qu’aux États-Unis suggèrent fortement d’étudier
de prises de positions politiques adoptées au fil la réussite à divers moments de la trajectoire univer-
des ans relativement à l’enseignement supérieur sitaire afin de bien cerner les obstacles et les seuils
dans la société québécoise, en lien avec le déve- critiques qui se posent. Ce qui constitue un atout
loppement des systèmes universitaires dans les pour les uns au cours d’une étape donnée peut fort
pays développés. Aujourd’hui, ces décisions bien s’avérer un obstacle ou, à tout le moins, un
façonnent des probabilités données pour les seuil critique pour les autres. Ces travaux, cités
Québécois et les Québécoises d’accéder à l’uni- précédemment, soulignent la pertinence de décrire
versité et d’y acquérir une formation de haut ce que vivent les étudiantes et les étudiants au
niveau. Elles déterminent la capacité d’accueillir moment de l’accès à l’université (qui sont les
les étudiants, le choix des domaines d’études étudiants que l’université accueille ?), pendant
offerts dans l’ensemble des universités québécoi- leur cheminement (quelles trajectoires empruntent-
ses, l’étendue de la production scientifique ou ils ? qu’est-ce qui caractérise leur rapport aux
artistique, l’accès à une formation universitaire en études ?) et au moment de la délivrance des
région, etc. En outre, la dimension historique de la diplômes (quelles sont les caractéristiques de ceux
réussite renvoie à l’histoire personnelle de qui réussissent ou qui abandonnent ?). En outre,
l’étudiante ou de l’étudiant. les travaux sur l’insertion socioprofessionnelle ont
mis en lumière le fait qu’elle débute bien avant
l’obtention du premier emploi lié au domaine
principal d’études et qu’elle se développe tout au
1. Voir l’annexe 2, Chronologie d’événements ayant
marqué le développement des universités québécoises. long de la formation universitaire.
Préciser le sens de la réussite : quelques considérations préliminaires 33
Figure 1
Grille d’analyse des conditions de réussite
34 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
Le Conseil retient ces quatre étapes, qu’il se propose études abordent cette étape sous les angles de la
d’éclairer dans le cadre de cet avis. Ainsi, c’est composition sociale des effectifs étudiants, de
dans l’univers balisé par les conditions d’accès l’espérance d’accès à l’université selon le sexe, de
à l’université, par les cheminements de forma- l’orientation scolaire des étudiantes et étudiants à
tion, par l’obtention d’un diplôme universitaire l’université en fonction de leurs caractéristiques
ainsi que par l’insertion socioprofessionnelle que sociales, de la formation préalable des étudiantes
nous chercherons à déceler les conditions pro- et étudiants admis à l’université, etc.
pices à la réussite ainsi que les obstacles qui se
posent et les seuils critiques qui sont rencontrés. La deuxième étape se rapporte au cheminement
des étudiantes et étudiants à l’université. Cette
Il est clair que la représentation linéaire de la étape concerne les voies empruntées par les étudiantes
trajectoire étudiante en quatre étapes ne traduit et étudiants entre le moment de l’admission à
pas nécessairement ce qui est observé dans la l’université et la sortie, que ce soit au terme du
réalité. Les trajectoires étudiantes sont plutôt programme de formation ou au moment de l’aban-
tissées d’interruptions, de changements de pro- don des études. Elle renvoie également à la persé-
gramme, de retour vers l’ordre d’enseignement vérance aux études. Celle-ci est au cœur des
qui précède, de ralentissement du rythme des préoccupations du personnel enseignant et des
études, etc. L’énumération de ces étapes marque administrations universitaires, comme en témoignent
simplement des moments distincts de la trajec- les nombreux travaux réalisés par les universités
toire étudiante qu’il importe de reconnaître. sur cette question. Prioritairement, le projet
Décrivons maintenant chacune de ces étapes. d’avis se concentre sur ce qui se rapporte au
cheminement de l’étudiante ou l’étudiant à
L’accès à l’université est la première étape conduisant l’université, une étape cruciale dans la réussite.
à la réussite. L’accès des étudiantes et des étudiants
à l’université se définit dans son sens strict, à La troisième étape est celle de la délivrance du
savoir : l’entrée des étudiantes et des étudiants à diplôme. Il s’agit d’une étape très courte, voire
l’université1. Il va sans dire que les aspirations d’un événement, mais qui sert généralement de
scolaires et professionnelles des étudiantes et des point de repère pour témoigner de la réussite.
étudiants sont en cause dans cette décision d’entre- Cette étape consiste en la remise du diplôme par
prendre des études universitaires. Mais en dehors l’établissement et son corollaire, l’obtention du
de ces aspirations personnelles, divers facteurs diplôme par l’étudiante ou l’étudiant. Il s’agit
influencent directement ou indirectement les d’une finalité explicite des programmes d’études
possibilités de l’individu d’accéder à la formation et des interventions de formation. Au fil du temps,
universitaire. Dans le corpus des travaux, les comme nous l’évoquions précédemment, une
attention renouvelée a été portée au diplôme. En
outre, la diplomation est devenue un indicateur
incontournable pour mesurer l’évolution de la
1. Par opposition au sens strict que nous attribuons ici réussite d’un programme, d’un établissement ou
au concept d’accès, le Conseil de l’Europe y voit d’un cycle d’études dans ce processus de reddition
davantage un concept intégrateur qui recouvre des de comptes par les universités.
dimensions que le Conseil supérieur de l’éducation
a plutôt attribuées au concept de démocratisation de
l’éducation, soit : un enseignement de qualité, un La quatrième étape touche à l’insertion socio-
élargissement de la fréquentation universitaire aux professionnelle. Le concept d’insertion socio-
groupes de la population qui y sont sous-représentés professionnelle évoque l’interpénétration de
ainsi que la réelle possibilité de mener les études à l’insertion sociale et de l’insertion professionnelle
terme. Maggie Woodrow, Projet sur l’accès […],
p. 9; Conseil supérieur de l’éducation, Le Défi d’une dans la vie des citoyennes et des citoyens. Dans
réussite de qualité, p. 12-16. un récent rapport annuel traitant de ce thème, le
Préciser le sens de la réussite : quelques considérations préliminaires 35
Conseil a défini ces deux concepts. L’insertion travail, au quotidien, chacune de ces étapes
professionnelle se rapporte au processus d’accès à importe dans la conquête de la réussite.
un emploi, c’est-à-dire à la capacité d’effectuer
avec succès la transition entre l’école et le marché Les facteurs de la réussite
du travail. L’insertion sociale, pour sa part, renvoie
au processus incessant de construction de l’appar- Cet axe de la grille d’analyse propose de prendre
tenance sociale et de l’affirmation de l’identité en compte les facteurs environnementaux qui
sociale1. Cette décision d’inclure l’étape de définissent les contours du système universitaire
l’insertion socioprofessionnelle dans l’analyse des et les facteurs internes se rapportant à l’organisa-
conditions de réussite des étudiantes et des étudiants tion des études et aux caractéristiques des étudian-
à l’université s’appuie d’abord sur l’importance tes et des étudiants qui fréquentent l’université.
qu’elle revêt dans la représentation des étudiantes Décrivons sommairement chacune des catégories
et des étudiants à l’endroit de la réussite2 mais de cet axe.
aussi sur le rôle exercé par la formation univer-
sitaire dans le processus d’insertion socioprofes- Les facteurs environnementaux ou facteurs
sionnelle. Rappelons qu’il s’agit bel et bien d’une externes au système universitaire regroupent les
étape et non du point culminant de la réussite. éléments contextuels les plus immédiats dans
lesquels l’université s’inscrit. Les décisions gouver-
Chacune des étapes précitées, de l’accès à l’univer- nementales sur le financement des universités, les
sité à l’insertion socioprofessionnelle, constitue fluctuations du marché du travail, le niveau d’acti-
des moments clés de la réussite au cours desquels vité scientifique ou artistique du Québec par rapport
les étudiantes et les étudiants relèvent des défis, à celui du Canada ou d’ailleurs dans le monde et
puisent des renforcements et obtiennent des grati- les partenariats de l’université avec le milieu sont
fications les incitant à évoluer vers l’étape suivante. autant d’exemples de facteurs externes qui balisent
Ainsi, rappelons-le, la réussite des étudiantes et l’activité universitaire et qui influent sur les condi-
des étudiants ne saurait aucunement se limiter tions de réussite des étudiantes et des étudiants.
à l’obtention du diplôme ni au fait de
décrocher le premier emploi lié au domaine Les facteurs internes concernent tout à la fois
d’études, même s’il s’agit là de réussites haute- l’organisation des études et les caractéristiques
ment souhaitables sur les plans personnel, des étudiantes et des étudiants que l’université
social ou économique. La réussite se construit accueille. Les premiers renvoient à la mise en
au quotidien, par l’engagement envers la for- œuvre des dispositifs de formation que constituent
mation, la présence aux cours, le temps accordé les programmes et les cours offerts; ils englobent
aux études, une conciliation efficace entre les notamment les lieux d’enseignement (en classe, à
études et les autres activités de la vie adulte, distance, en entreprise), les stratégies pédagogiques,
etc. Aussi, sans nier l’importance que repré- les horaires des cours, le matériel pédagogique,
sente le diplôme comme couronnement des les mesures d’aide à la réussite, etc. Les seconds
efforts et comme voie d’accès au marché du concernent le fait que les étudiantes et étudiants
sont déjà, à l’entrée à l’université, des citoyennes
et citoyens situés à des positions distinctes sur
l’échelle sociale, une position héritée de la famille,
1. L’Insertion sociale et professionnelle […],
par les niveaux de scolarité et de revenus des
p. 11 et 13. parents. Comme nous le verrons au chapitre
2. Dans cet esprit, Christian Baudelot et Roger Establet suivant, ces positions confèrent aux étudiantes et
affirment : « La réussite scolaire n’est pour personne étudiants des ressources financières et culturelles
une fin en soi. Le capital scolaire n’a de valeur que distinctes qui facilitent ou contraignent leur accès
s’il se transforme en capital social. », dans Allez les
filles !, p. 17. et leur cheminement à l’université. En outre, les
36 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
caractéristiques des étudiantes et des étudiants des étudiants et étudiantes définissant leur niveau
renvoient à des facteurs individuels, tels les talents, d’engagement envers les études, leur motivation,
les acquis scolaires, la motivation, l’engagement leur perception de la réussite, leurs attitudes par
envers les études, le travail consacré aux études, rapport à l’apprentissage, la maturation de leur
les habitudes studieuses, etc. choix scolaire, leurs attentes personnelles en lien
avec la réalisation d’études universitaires, leur
Les niveaux d’analyse plan de carrière, etc. Dans la mesure du possible,
il s’agit de mettre en relief les variables indivi-
Diverses considérations sur les conditions de duelles qui influencent directement la réussite. Ce
réussite peuvent être mises au premier plan selon sont certes des aspects fluctuants mais qui sont
la perspective d’analyse adoptée, à savoir une centraux dans le processus d’apprentissage et de
perspective macrosociologique, microsociologique, progression vers la réussite.
psychopédagogique ou psychologique. Ces niveaux
d’analyse peuvent être définis plus finement en En conclusion
mettant au jour les considérations politique,
économique, épistémologique, culturelle, etc. Le Conseil souhaite mettre en évidence la nécessité
Nous avons choisi de regrouper ces perspectives d’ouvrir l’analyse des conditions de réussite à
sous l’angle macrosocial. d’autres perspectives que celles qui ont pu être
privilégiées dans le passé. L’idée même d’une
Ainsi, la perspective d’analyse macrosociale réussite se construisant par la somme des efforts
considère les grands paramètres économiques, engagés à chacune des étapes clés de la trajectoire
politiques, sociaux et culturels qui ont une universitaire, voire à chacun des seuils critiques
influence sur le développement de l’université ou des obstacles rencontrés, mérite qu’on s’y
dans lesquels ont évolué les conditions de réussite attarde. En outre, la complexité de ce phénomène
des étudiantes et des étudiants. Dans le cadre du qui se révèle dans la multitude des facteurs en
présent avis, elle est évoquée pour brosser le cause interdit des raccourcis dans l’analyse de la
contexte et pour comprendre le fil des événements, problématique et dans la recherche de solutions
situant ces éléments dans une profondeur historique. pour y remédier. Finalement, les changements
contextuels nécessitent de reconsidérer ce thème
L’analyse microsociale met en lumière les variables sous un angle nouveau.
lourdes liées aux caractéristiques personnelles et
sociales des étudiantes et étudiants à l’université. La
population étudiante ne constitue d’aucune manière
un groupe homogène. Au contraire, elle reflète les
caractéristiques sociales qui composent la population
en général. En outre, des caractéristiques person-
nelles tel le sexe distinguent le cheminement de la
population étudiante.
Quels facteurs sont associés à la réussite ? L’état pent à modeler le développement des universités
de la connaissance sur le sujet permet-il de propo- ainsi que les choix des étudiantes et étudiants.
ser un modèle explicatif de la réussite ? Dans ce
chapitre, les éléments clés permettant de compren- La démocratisation – Au cours des années 60, la
dre le phénomène de la réussite sont dégagés du scolarisation de la population québécoise accusait
corpus des travaux. C’est principalement à partir un retard important par rapport au reste du Canada
de recherches sur la condition étudiante, sur l’accès ou aux autres sociétés comparables. La Commission
à l’université, sur la persévérance et sur l’abandon royale d’enquête sur l’enseignement dans la pro-
que la réussite des étudiantes et des étudiants à vince de Québec proposait alors un redressement
l’université a été étudiée. Les travaux recensés important en la matière, en lien avec le projet social
regroupent à la fois les études réalisées dans le de renforcement de la démocratie. Elle précise :
milieu universitaire québécois de même que celles
provenant d’autres pays. Ces dernières offrent des Pour se réaliser aussi pleinement et porter
tous ses fruits, la démocratie suppose des
points de comparaison par rapport à la situation citoyens éclairés sur les exigences du bien
québécoise qui, parfois, marquent l’importance commun, aptes à comprendre et à juger des
structurante d’un facteur de réussite à travers les situations pour participer ensuite au proces-
systèmes universitaires ou qui en proposent de sus de décision, capables d’agir librement,
nouveaux, alimentant ainsi la réflexion. doués du sens des responsabilités. La société
démocratique requiert donc une éducation du
caractère mais cette éducation, pour prendre
Les travaux sont présentés à partir de leur perspec- tout son sens, nécessite en même temps une
tive analytique telle que définie dans la grille préparation de chacun à la vie en société, par
d’analyse1. Notre présentation ne prétend aucune- le développement le plus complet possible de
ses qualités et de ses aptitudes propres, dont
ment exposer de manière exhaustive l’ensemble l’enseignement, bien compris et généralisé,
des travaux réalisés sur le sujet. Nous avons retenu est seul à fournir la clé. L’éducation est donc
ceux dont la pertinence s’impose en regard des essentielle dans une société démocratique et
préoccupations qui sont les nôtres sur la réussite. elle doit y être accessible à tous : c’est à cette
double condition qu’on peut espérer
Le portrait général qui s’en dégage dépeint une atteindre à l’égalité dans la participation
image de la pluralité des facteurs qui interviennent sociale, égalité fondée non sur l’uniformité
dynamiquement pour soutenir la persévérance ou mais la diversité2.
conduire vers l’abandon.
La démocratisation de l’enseignement universitaire,
au milieu des années 60, devenait urgente en lien
avec divers besoins sociaux tels que l’augmentation
2.1 Les conditions macrosociales
des demandes d’admission à l’université au tour-
nant des années 50, la progression des connaissan-
Dans le cadre de ses travaux sur la réussite, le
Conseil a eu l’occasion de constater la lourde ces, la volonté naissante des femmes d’accéder à
divers champs d’études et d’intégrer le marché du
influence de l’origine sociale et du sexe sur la
réussite. Les conditions macrosociales présentées travail, la pression exercée par les entreprises et
dans cette section mettent en relief les effets du l’État sur les universités afin que celles-ci s’enga-
projet social d’instauration d’une société démo- gent résolument dans le développement économique,
cratique, de la conjoncture économique et de social et culturel, etc.3 Au cours des années 60,
l’accès à l’université demeure limité. La Commission
l’évolution en matière de condition féminine sur
la réussite, dans la mesure où ces éléments partici-
royale d’enquête sur l’enseignement propose alors gnement supérieur, toute proportion gardée.
que le développement du système d’éducation Cependant, les gains relatifs à l’insertion socio-
s’oriente selon une triple finalité : professionnelle sont tout autre. Le système de
sécurité – la sécurité d’emploi, la protection
- mettre à la portée de tous, sans distinc- syndicale et le régime de retraite – mis en place
tion de croyance, d’origine raciale, de par la génération précédente profite peu aux
culture , de milieu social, d’âge, de sexe,
de santé physique ou d’aptitudes nouveaux diplômés et diplômées; l’insertion
mentales, un enseignement de bonne socioprofessionnelle se fonde pour bon nombre
qualité et répondant à la diversité des d’entre eux sur des emplois précaires. Ces diffé-
besoins; rences marquées entre les deux générations pren-
- permettre à chacun de poursuivre ses draient racine dans le fait que l’actuelle génération
études dans le domaine qui répond le de la population étudiante intériorise la précarité
mieux à ses aptitudes, à ses goûts et à
ses intérêts, jusqu’au niveau le plus d’emploi en la recadrant comme un défi personnel
avancé qu’il lui est possible d’atteindre à relever et, conséquemment, en rejetant le système
et de bénéficier ainsi de tout ce qui peut de sécurité auquel elle ne peut accéder. C’est
contribuer à son plein épanouissement; l’hypothèse développée dans les travaux réalisés
- préparer toute la jeunesse à la vie en par Jacques Hamel3.
société, c’est-à-dire à gagner sa vie par
un travail utile, à assumer intelligem- Poursuivant sur cette lancée, les études mettent en
ment toutes ses responsabilités sociales
dans l’égalité et la liberté, et offrir aux relief que la situation de l’emploi et de l’insertion
adultes les plus grandes possibilités de socioprofessionnelle a des répercussions sur le
perfectionnement1. cheminement des étudiantes et étudiants à l’univer-
sité. Les étudiantes et étudiants développeraient
À l’université, les commissaires souhaitent que le
des stratégies en cours d’études selon leur perception
développement s’opère dans le sens d’un accès
des perspectives d’emploi. Ces stratégies iraient
accru au premier cycle, de l’ouverture de la for-
dans le sens d’un éloignement du modèle traditionnel
mation universitaire aux adultes dans une perspec-
de fréquentation universitaire et d’une diversifica-
tive de formation continue et du développement
tion des cheminements de formation4. Le fort
de la formation aux cycles supérieurs, incluant
attrait du marché du travail ou, dans certains cas,
notamment la recherche2. Cette volonté s’est
les inquiétudes concernant les perspectives d’emploi
concrétisée par un développement important du
modèlent des comportements d’adaptation diffé-
système universitaire québécois.
rents chez les étudiantes et les étudiants, comme
l’illustrent les deux études suivantes.
La conjoncture économique – Les perspectives
d’emploi influencent les choix, les stratégies, les
L’enquête CODEVIE révèle que chez les étudiantes
comportements et les attitudes des étudiantes et
et étudiants des sciences pures, des sciences
étudiants universitaires à l’égard de leurs études et
du marché du travail. Les recherches présentées
ci-après font état de ces relations.
appliquées et des sciences de la santé, la motivation l’emploi; les conclusions des enquêtes ne sont pas
aux études apparaît soutenue par « la confiance en unanimes sur la question.
la valeur d’échange du diplôme universitaire, en
sa capacité à faciliter l’obtention d’un bon posi- Dans une étude des facteurs d’abandon, Chenard
tionnement professionnel et social futur mais qui, note que le cumul des études et du travail rémunéré
par contre, exigent de s’astreindre à un régime de constitue une des raisons majeures les plus fréquem-
vie très contraignant, très centré sur les études1 ». ment citées pour interrompre les études4. Selon
En outre, les résultats partiels d’une enquête réalisée l’enquête CODEVIE, même en réduisant la partici-
à l’Université Laval auprès de différents groupes pation au marché du travail à moins de 10 heures
d’étudiants et d’étudiantes au baccalauréat mettent par semaine, 51,6 % des étudiantes et étudiants
en lumière les stratégies qu’ils adoptent à l’égard qui vivent cette situation estiment qu’il est assez
de leurs études dans des contextes fortement ou même très difficile de concilier le travail rému-
contrastés d’insertion socioprofessionnelle au néré et les études. Cette difficulté croît à mesure
terme des études2. qu’augmente le nombre d’heures consacrées
hebdomadairement au travail durant les études.
Une autre facette du lien entre la réussite et le Conséquemment, le nombre d’heures d’étude
marché du travail analysée est le fait d’occuper un diminue au fur et à mesure qu’augmente le temps
emploi durant les études. Cela semble avoir un dédié à un emploi rémunéré5. L’enquête ICOPE6
effet différent sur la réussite selon l’ordre d’ensei- révèle que l’obtention du diplôme est en lien avec
gnement; cet effet serait important au secondaire la participation au marché du travail; le pourcentage
mais plus ténu au collégial3. À l’université, ce lien de diplômés et de diplômées est meilleur chez les
varie selon les cycles d’études et la nature de étudiantes et étudiants qui, au moment de l’entrée
à l’université, n’ont pas occupé d’emploi au cours
des cinq dernières années précédentes, qui n’occupent
toujours pas d’emploi et qui n’ont pas l’intention
1. Arnaud Sales et al., La Différenciation de la popu-
lation étudiante universitaire du Québec, p. 142-143.
L’enquête sur les conditions de vie des étudiants
(CODEVIE) réalisée à la session d’automne 1994 4. Pierre Chenard, L’Interruption des études à l’Uni-
repose sur un échantillon de 2398 entrevues télé- versité du Québec, Volet II : Les motifs de départ,
phoniques réalisées auprès d’étudiantes et étudiants p. 46. Cette enquête sur les abandons et les inter-
des trois cycles inscrits à 9 crédits et plus dans ruptions au premier cycle s’est déroulée à l’automne
l’ensemble des universités québécoises, à l’excep- 1986 et concerne les étudiantes et étudiants inscrits à
tion de l’Université Bishop's. un programme conduisant à un certificat ou à un
2. Chantal Leclerc et Marie-France Maranda, op. cit.; baccalauréat ayant interrompu leurs études et qui
Chantal Leclerc et Lucille Bédard, La Formation en provenaient de quatre établissements du réseau de
physiothérapie : un dosage subtil d’endurance et l’Université du Québec : l’UQAM, l’UQTR, l’UQAR et
d’habileté à décrocher; Chantal Leclerc et al., La l’UQAC.
Formation en éducation physique : les plaisirs des 5. Arnaud Sales et al., Le Monde étudiant […], p. 179-180.
uns et les souffrances des autres. Cette recherche 6. L’enquête sur les conditions de poursuite des études
qualitative vise à mettre au jour et à analyser les universitaires (ICOPE) a été réalisée à l’automne 1993
stratégies des étudiantes et étudiants pour composer à l’Université du Québec à Trois-Rivières, à l’Uni-
avec les contraintes inhérentes à la vie universitaire versité du Québec à Rimouski et à la Télé-Université;
dans un contexte d’insertion socioprofessionnelle en 1994, l’enquête s’est poursuivie à l’Université
plus difficile. Elle est actuellement en voie de réali- du Québec à Chicoutimi et à l’Université du Québec
sation. À terme, 18 groupes d’une quinzaine de en Abitibi-Témiscamingue. Tous les étudiantes et
personnes devraient constituer l’échantillon total de étudiants nouvellement inscrits à un certificat, un
270 personnes. Chaque groupe est formé d’étudiantes baccalauréat ou une maîtrise aux établissements
et d’étudiants fréquentant le même programme. La précités ont rempli un questionnaire écrit. Au total,
recherche se déroule à l’Université Laval. 4764 questionnaires ont été analysés en 1993 et
3. Anne Filion, La Réussite et la diplomation au collé- 1649 questionnaires en 1994. Les réponses ont été
gial. Des chiffres et des engagements, p. 66; Conseil jumelées aux résultats du cheminement scolaire de
supérieur de l’éducation, Des conditions de réussite ces étudiants et étudiantes observés 13 trimestres
au collégial […], p. 66-70. après l’arrivée à l’université.
40 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
de travailler durant les études; à l’inverse, les plus Les travaux du Conseil de l’Europe3 mettent en
faibles pourcentages de diplômés et de diplômées lumière l’attrait qu’exerce le marché du travail sur
s’observent chez le sous-groupe d’étudiantes et certains étudiants et étudiantes universitaires et, à
d’étudiants dont la participation au marché du l’opposé, les inquiétudes manifestées par d’autres
travail s’élève à plus de 20 heures par semaine. quant à l’insertion socioprofessionnelle. Ces situa-
À partir des données de l’enquête ICOPE, Privé et tions peuvent toutes deux conduire à l’abandon
Thériault ont réalisé une enquête à l’UQAC qui des études. Ainsi, Moortgat note que l’un des
révèle que les étudiantes et étudiants ayant facteurs prédominants de l’abandon des études
abandonné les études occupent très majoritaire- universitaires en 1993-1994, en République fédé-
ment un emploi à temps plein ou à temps partiel rale d’Allemagne, se rapporte à la participation au
au cours du dernier trimestre d’études à l’université1. marché du travail; celle-ci se conjugue au surcroît
de travail et aux difficultés financières4. En Italie,
L’enquête sur la persévérance réalisée par Crespo les hommes interrompent leurs études proportion-
et Houle auprès des étudiantes et étudiants de nellement plus que les femmes pour des raisons
baccalauréat inscrits à des programmes à fort taux liées à l’emploi5. Les inquiétudes manifestées par
d’abandon à l’Université de Montréal n’enregistre les étudiantes et les étudiants par rapport à l’inser-
pas de différences significatives entre les persévé- tion socioprofessionnelle au terme des études
rants et les décrocheurs liées au fait d’occuper un semblent également influencer la réussite. Si on se
travail rémunéré durant les études ou au nombre reporte à la situation citée précédemment en
d’heures hebdomadaires consacrées à un tel République fédérale d’Allemagne, la trop longue
travail; néanmoins les persévérants occupent durée des études évaluée à la lumière des faibles
proportionnellement plus souvent un emploi lié à perspectives d’emploi pour les diplômés et les
leurs études qu’ils considèrent comme une expérience diplômées constitue un motif d’abandon cité par
professionnelle pertinente et qui se déroule sur le près d’un décrocheur sur deux6.
campus universitaire2.
La condition féminine – La situation des étudiantes
à l’université ainsi que des diplômées au moment
de l’insertion socioprofessionnelle s’inscrit sur un
continuum historique décrivant l’évolution des
rapports sociaux de sexe et de la reconnaissance
1. Marc Privé et Renaud Thériault, Enquête sur l’inter- des droits des femmes. Pour traiter avec brièveté
ruption des études à l’UQAC, p. 28-29. Cette enquête a
été réalisée à l’UQAC auprès d’étudiantes et d’étudiants ces considérations, rappelons que, jusqu’en 1964,
au baccalauréat et au certificat ayant interrompu les les femmes n’avaient pas un statut juridique équi-
études en 1994. Un questionnaire écrit a été administré
à 150 personnes. En outre, comme l’UQAC a participé valent à celui de leur époux dans la famille –
à l’enquête ICOPE décrite précédemment, des données l’ « incapacité juridique des femmes mariées »
issues de cette dernière enquête ont permis de
connaître les intentions des étudiants à l’entrée à
l’université.
2. Manuel Crespo et Rachel Houle, La Persévérance 3. Le Conseil de l’Europe, s’appuyant sur sa Commis-
aux études dans les programmes de premier cycle à sion de la recherche et de l’enseignement supérieur,
l’Université de Montréal, p. 37. L’enquête explore les regroupe 44 États européens. Cet organisme centre
motifs liés à l’abandon et à la persévérance aux ses activités dans trois domaines principaux, dont
études à l’Université de Montréal. L’échantillon se l’un touche à l’accès à l’enseignement supérieur.
compose de 935 étudiantes et étudiants persévérants Plusieurs chercheurs des universités européennes
et de 279 étudiantes et étudiants ayant interrompu collaborent à ces travaux.
les études. Tous sont issus des cohortes de l’automne
1989 et 1990 des programmes de baccalauréat où le 4. Jean-Louis Moortgat, A Study of Dropout […],
pourcentage d’abandon s’avère élevé. Les données p. 28.
recueillies proviennent à la fois des fichiers institu- 5. Ibid., p. 23.
tionnels sur le suivi des cohortes et d’un question-
naire écrit. 6. Ibid., p. 28.
Cerner les conditions de réussite à partir de recherches 41
s’est appliquée du XVIe au XXe siècle; elles n’avaient du fait qu’elle pourrait au besoin aider finan-
pas le droit de vote jusqu’en 1940 au Québec; une cièrement son mari ou assurer la subsistance
de la famille si ce dernier venait à faire défaut.
faible proportion d’entre elles détenaient les Le nombre de femmes dans la trentaine ou la
préalables permettant d’accéder à l’université quarantaine qui retournent aux études et au
jusque vers la fin des années 60, etc. Pendant plus travail augmente sans cesse; il y a là, pour un
de trois cents ans, soutenues et orientées par les certain nombre, un besoin profond de faire
contrepoids à l’ennui, de se sentir vivre dans
institutions juridiques, scolaires, politiques et un univers moins restreint, après quelques
religieuses, les femmes ont été généralement années consacrées aux occupations de la
confinées à des rôles d’épouse et de mère jusqu’au maternité et à l’éducation des enfants.
moment de la Révolution tranquille. Au cours de Article 1020 - L’éducation familiale doit faire
cette période, leur contact avec les institutions partie de la formation des jeunes filles et les
économiques et politiques, conclut Descarries- habituer à trouver un certain agrément esthé-
Bélanger, a été à peu près inexistant1. tique et humain aux travaux de la maison2.
L’accès des femmes à l’enseignement supérieur et
La réforme scolaire des années 60 n’a pas été le au marché du travail est étroitement lié aux retom-
moteur de la progression remarquable des femmes bées du mouvement social féministe, à une plus
au niveau universitaire; ce sont d’autres facteurs large intégration des femmes au marché du travail
qui en sont responsables. En effet, la Commission et aux transformations de la famille3. Il illustre à
royale d’enquête présentait une vision mitigée de la fois la possibilité de faire reculer les inégalités
la scolarisation des femmes et de leur participation sociales mais aussi la difficulté répétée de trans-
au marché du travail : former les rapports sociaux de sexe, notamment
au sein même du système scolaire. Aujourd’hui
Article 1019 - La préparation de la jeune fille
à la vie ne doit pas se limiter à la formation encore, la socialisation des femmes demeure
ménagère, qu’on entende celle-ci dans un marquée par des archétypes qui continuent
sens étroit : cuisine, entretien ménager, etc., d’influencer leur trajectoire scolaire et profession-
ou dans un sens large : équilibre du budget, nelle. Claire Bonenfant écrit :
formation de la consommatrice-acheteuse,
etc. D’une part, on doit intéresser toutes les L’égalité formelle dans l’enseignement n’a
jeunes filles à ces occupations et au rôle de pas suffi à faire passer dans les faits l’égalité
maîtresse de maison, aussi bien celles qui des chances des filles et des femmes, que ce
seront médecins, professeurs et soit en éducation ou dans la vie tout court.
techniciennes que celles qui se marieront au Les actions, dans tous les ordres d’enseigne-
sortir de l’école; d’autre part, on doit les ment, doivent d’ailleurs s’inscrire en com-
préparer toutes, dans une certaine mesure, à plément d’autres mesures adoptées dans
être des femmes conscientes des grands d’autres domaines comme les politiques
problèmes de la vie conjugale, et des mères sociales, les politiques d’emploi, les condi-
capables de prendre soin de leurs enfants et tions de vie des hommes et des femmes dans
de les élever convenablement. Enfin, on doit la société. L’école ne fonctionne pas d’une
fournir à toute jeune fille une certaine pré-
paration à une occupation qui lui permettra
de gagner sa vie avant ou durant sa vie en
ménage ou quand ses enfants seront élevés.
Cette formation et cette activité de la femme 2. Commission royale d’enquête sur l’enseignement
qui a un emploi ou est capable d’en remplir dans la province de Québec, op. cit., Deuxième
un, peut faire d’elle un être plus éveillé et partie, p. 239.
plus intéressant, souvent plus satisfait et plus
équilibré, et possédant une certaine sécurité 3. Renée Cloutier, « Les femmes à l’université : leurs
acquis sont fragiles », dans L’Évolution de la popu-
lation étudiante à l’université, sous la direction de
Pierre Chenard, p. 99; Pierre Dandurand, « Mouve-
ments de scolarisation, conditions de vie des étu-
1. Francine Descarries-Bélanger, L’École rose… et les diants et politiques d’accessibilité à l’université »,
cols roses, p. 30. Revue des Sciences de l’éducation, p. 441.
42 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
façon isolée. Elle est en interaction avec la cation ont permis de mieux cerner ce phénomène.
famille et le milieu de travail. Les grands En bref, l’origine sociale définirait un ensemble
mouvements sociaux ne sont pas sans
l’influencer1. de positions qui, selon la culture véhiculée à
l’école, apparaîtraient tantôt favorables et tantôt
défavorables. Tout un courant de la sociologie
En bref… française – Baudelot, Establet, Bourdieu, Passeron
et Boudon en tête – a étudié les mécanismes de la
L’université s’inscrit dans la société. La réussite des stratification sociale et leurs effets sur la trajectoire
étudiantes et des étudiants universitaires, qu’il des individus au sein du système scolaire et du
s’agisse des générations actuelles ou futures, est
influencée par les changements sociaux ou culturels
marché du travail. Quant au poids du sexe sur la
ainsi que par la configuration économique. Les réussite, la socialisation différenciée selon le sexe
conditions de réussite évoquées dans cette section – une socialisation qui se transforme d’ailleurs
en montrent l’influence structurante. dans l’histoire pour s’adapter aux nouvelles
réalités sociales – influencerait grandement la
division sociale des hommes et des femmes au
sein du système scolaire et, ultérieurement, sur le
2.2 Les conditions microsociales marché du travail2. Nous présenterons quelques
résultats de ces travaux tout en indiquant les
Les travaux réalisés en Amérique ou en Europe questions qui demeurent. En outre, cette section
mettent clairement en évidence l’inégalité persistante présente de nombreux autres facteurs influents se
de la représentation à l’université des divers sous- rapportant à l’âge, à la situation financière ainsi
groupes de la population caractérisés par leur qu’à l’accès aux nouvelles technologies.
origine sociale, leur sexe, leur origine ethnique et
linguistique et, le cas échéant, leur handicap. Au L’origine sociale – D’une période à l’autre de
Québec, si on se reporte à l’histoire récente du l’histoire récente du développement de l’univer-
développement des universités, même si la massi- sité québécoise, les enquêtes révèlent la surrepré-
fication de l’enseignement universitaire en consti- sentation à l’université des étudiantes et étudiants
tue le trait marquant, les inégalités liées à l’origine universitaires issus de familles dont le père occupe
sociale et à la division sociale selon le sexe persis-
des fonctions de cadres, de professionnels ou de
tent à l’université. Jusqu’où l’influence des varia-
bles précitées s’exerce-t-elle après l’admission à semi-professionnels. L’enquête CODEVIE montre
l’université ? Sur cette question, diverses thèses que
s’affrontent.
l’ensemble des fils et des filles des dirigeants et
cadres (21 %) et des professionnels (26,4 %)
Cette section présente un bref tour d’horizon des représente près de la moitié des étudiants. En
études ayant traité de l’influence de l’origine sociale contrepartie, les enfants d’ouvriers comptent pour
et du sexe sur la réussite. D’entrée de jeu, il importe 28,4 % de l’échantillon. Pierre Dandurand
mentionne à ce propos que « la représentation
de clarifier que ces variables ne marquent pas la des jeunes de classe ouvrière au niveau de
réussite de manière déterministe; leur importance l’enseignement universitaire n’a pratiquement
repose sur la présence des variables médiatrices.
Plusieurs études réalisées en sociologie de l’édu-
formation de soi dans le sens de ce qui est attendu l’origine sociale prendrait fin lors de l’accès à
à l’école, l’élève issu d’un milieu socioéconomique l’université (l’entrée à l’université et le choix d’un
défavorisé peut craindre cette transformation qui régime d’études), l’origine sociale n’expliquant
l’engage dans une voie qui l’amène vers l’inconnu. pas le choix scolaire ni la réussite à ce niveau3.
L’attitude de la famille peut contribuer à résoudre Pour les autres, l’origine sociale continuerait de se
ce fossé culturel : « Tu peux devenir autre chose faire sentir sur le choix disciplinaire et sur la
que ce que tu es et ce que nous sommes, mais tu persévérance4. L’hypothèse de l’effet prolongé de
demeureras quand même notre enfant1 ». Quelles l’origine sociale sur le cheminement et l’obtention
traces ces expériences laissent-elles chez les du diplôme des étudiants et étudiantes ou l’abandon
étudiantes et les étudiants issus de familles à apparaît plausible, comme en témoignent les études
faibles revenus et scolarité ? suivantes.
L’origine sociale aurait une influence sur le façon- Selon notre analyse, les données de l’enquête
nement des aspirations et le développement d’un CODEVIE tendent plutôt à démontrer une relation
projet professionnel. La représentation inégale des positive entre l’origine sociale et le choix discipli-
classes sociales à l’université s’appuierait ainsi sur naire; les étudiantes et étudiants québécois dont le
ces variables médiatrices. père occupe des fonctions de dirigeants, de cadres,
de professionnels ou de semi-professionnels se
Les jeunes de milieux populaires, écrit retrouvent majoritairement en sciences appliquées
Kuzminski, ont proportionnellement moins (62,7 %), en arts et lettres (54,9 %), en sciences de
développé les aspirations professionnelles
justifiant le prolongement de leurs études la santé (54,1 %) et en sciences pures (53,6 %).
jusqu’à l’université, alors que ceux des On observerait néanmoins une certaine parité au
milieux plus aisés ont proportionnellement niveau de la représentation des étudiants selon
plus développé de telles aspirations2. l’occupation du père dans les domaines suivants :
Néanmoins, comme l’illustrait Dandurand dans les sciences de l’éducation et les sciences de
une citation précédente, le renversement des effets l’administration5.
de l’origine sociale demeure possible en s’appuyant
sur l’intentionnalité des individus. Leur motivation à L’origine sociale serait aussi associée au phéno-
entreprendre un processus de transformation de mène d’abandon des études universitaires. Une
leur identité personnelle et sociale pour s’adapter étude réalisée en 1991 en Belgique auprès des
à la culture universitaire et y intégrer de nouvelles étudiants de première année de l’Université catho-
manières de penser, de sentir et d’agir constitue lique de Louvain souligne le fait que l’abandon
les fondements mêmes du pouvoir individuel
faisant contrepoids à l’origine sociale.
Auparavant, nous nous sommes demandé jusqu’où 3. Raymond Boudon, L’Inégalité des chances : la
intervient l’influence de l’origine sociale sur les mobilité sociale dans les sociétés industrielles;
Alain Massot et Louise Laforce, « Les inégalités
études universitaires. Pour les uns, l’effet de sociales dans l’école québécoise des années soixante-
dix », dans Analyse sociale de l’éducation, sous la
direction de Renée Cloutier et al., p. 180; Arnaud
Sales et al., op. cit., p. 58.
4. Danielle Pageau et Johanne Bujold, Données préli-
1. Conférence de Michel Develay, professeur à minaires extraites de l’enquête ICOPE présentées
l’Université Lumière-Lyon 2, à la permanence du lors de la 35e réunion de la CERU, le 7 octobre 1999;
Conseil, le 6 décembre 1999. Danielle Pageau, L’Accessibilité aux études : bilan
et réflexion, p. 34; Jean-Louis Moortgat, A Study of
2. Frédéric Kuzminski, Choix disciplinaire et persé- Dropout […], p. 10.
vérance dans les études, une question d’attitudes ?
p. 18. Les données de cette recherche sont extraites 5. Calcul effectué par le Conseil à partir des données de
de l’enquête CODEVIE. l’enquête CODEVIE, Arnaud Sales et al., op. cit., p. 60.
Cerner les conditions de réussite à partir de recherches 45
touche davantage les étudiantes et étudiants universitaire, il devient aujourd’hui plus difficile
d’origine sociale modeste (44,6 %), comparative- d’analyser la problématique spécifique qu’elles
ment à leurs homologues d’origine sociale élevée vivent au cours de leur trajectoire à l’université.
(26,9 %)1. Au Québec, Privé et Thériault obser- Les femmes rencontrent-elles des difficultés parti-
vent que les étudiantes et étudiants de l’UQAC qui culières encore aujourd’hui ?
abandonnent leurs études universitaires sont issus
majoritairement de familles dont le père détient Les écarts de réussite entre les hommes et les femmes
une scolarité de niveau primaire (28,9 %) ou à l’université n’apparaissent vraiment que lorsqu’on
secondaire (32,2 %) plutôt que collégial (14,8 %) analyse l’ensemble de la trajectoire, de l’accès à
ou universitaire (17,4 %)2. En corollaire, Crespo l’université jusqu’au seuil de l’insertion socio-
et Houle, se fondant sur une analyse trivariée, professionnelle. À l’université, les hommes et les
découvrent que les étudiantes et étudiants persévé- femmes optent pour des choix scolaires typiquement
rants ont le plus souvent un père dont la scolarité et traditionnellement distincts4. Du côté des
hommes, la problématique se rapporte à l’accès à
est de niveau universitaire3.
l’université, étant donné les difficultés que vivent
les garçons au primaire et au secondaire, de même
Au Québec, l’enquête ICOPE révèle des pourcentages
qu’à leur faible taux d’accès et d’obtention du
relativement égaux quant à l’origine sociale des
diplôme au collégial5. Néanmoins, lorsque l’étape
étudiantes et étudiants au moment de l’accès à
de l’accès à l’université est franchie, à caractéristi-
l’université dans les universités en région.
ques favorables équivalentes, les hommes se
Néanmoins, ces étudiants ne se répartissent pas
retrouvent généralement en aussi bonne position
également dans les programmes d’études conduisant
que les femmes pour l’atteinte du diplôme6. Du
à un grade universitaire. Cette enquête montre que
côté des femmes, l’augmentation remarquable de
62,2 % des étudiantes et étudiants d’origine socio-
leur présence à l’université camoufle certaines
économique élevée étudient dans un programme
disparités persistantes. En effet, l’avantage que les
de baccalauréat contre 44,1 % de ceux dont l’origine
femmes retirent d’un accès accru à l’université,
socioéconomique est faible. Ces derniers se retrouvent
compte tenu de leur réussite scolaire à tous les
davantage au niveau du certificat (45,1 %) et leurs
échelons du système, s’estompe par leur choix
homologues de statut socioéconomique élevé s’y
scolaire. Malgré une progression importante des
retrouvent en plus faible proportion (28,9 %).
L’origine sociale aurait peu d’effet sur le nombre
de diplômés et de diplômées au baccalauréat mais,
étant donné les trajectoires typiques quant au
4. Voir le tableau 3 de l’annexe 1, Distribution selon le
choix de programme à l’entrée, les étudiantes et sexe dans les différents domaines d’études [...].
étudiants d’origine socioéconomique élevée se
5. Voir le tableau 4 de l’annexe 1, Nombre de DEC
retrouveraient ainsi proportionnellement plus décernés […].
nombreux à obtenir un baccalauréat, 13 trimestres
6. Comme le souligne l’enquête ICOPE, au baccalauréat,
après leur première admission aux universités du à conditions avantageuses égales sur le plan de
réseau de l’Université du Québec, dont il est l’engagement envers les études, les hommes rejoi-
question dans l’enquête. gnent les femmes quant à l’accès au diplôme, ces
pourcentages s’élevant respectivement à 91,2 % et
92,4 %. Les conditions avantageuses ont trait au
Le sexe – Compte tenu des gains importants que fait de cumuler l’ensemble des conditions suivantes :
les femmes ont réalisés en matière de scolarisation étudier à temps plein, vouloir le diplôme du pro-
gramme, considérer son choix d’établissement
comme définitif, prévoir un cheminement continu
de formation, vouloir suivre ses cours le jour, ne
pas manifester d’intérêt face à un autre programme
1. Jean-Louis Moortgat, op. cit., p. 10. d’études, avoir une bonne connaissance du pro-
2. Marc Privé et Renaud Thériault, Enquête […], p. 16. gramme d’études et, finalement, occuper un travail
rémunéré moins de 15 heures par semaine. (Résultats
3. Manuel Crespo et Rachel Houle, La Persévérance préliminaires de l’enquête ICOPE présentés à la
[…], p. 49. CERU par Danielle Pageau et Johanne Bujold.)
46 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
femmes dans la plupart des domaines d’études, - la socialisation des femmes, etc.3
elles demeurent minoritaires en sciences appliquées
à tous les cycles et en sciences pures au troisième Ensuite, analysant les conditions de vie des étudiantes
cycle. Les choix scolaires des femmes ne sont pas et des étudiants, l’enquête CODEVIE met au jour le
à la hauteur de leur réussite sur le plan scolaire1 : fait que les femmes cumulent plus souvent que les
les femmes s’orientent vers des champs d’études hommes le travail et les études universitaires.
conduisant à des emplois moins prestigieux et qui Sales et al. affirment que :
ne les préparent pas à occuper des postes de
direction2; à la suite de l’obtention d’un diplôme […] tout indique que la situation se présente
universitaire, elles parviennent dans une proportion peut-être comme une forme de désavantage
moindre que les hommes à obtenir un emploi lié à structurel pour les femmes vis-à-vis les hommes,
leur domaine d’études, permanent et à temps plein; puisqu’elle suppose des contraintes qui limitent
malgré leur progression remarquable sur le plan la disponibilité de temps à investir dans les
études, des obligations – financières et tem-
de l’accès et de l’obtention du diplôme au doctorat, porelles – auxquelles les hommes sont moins
à ce niveau, leur persévérance stagne. Analysons confrontés4.
plus particulièrement la situation rencontrée par
les femmes sur les plans de l’orientation, du Aux États-Unis, on observe que les femmes
cheminement et de l’insertion socioprofessionnelle. fréquentent les établissements universitaires les
moins prestigieux5. En République fédérale
Les éléments soulevés pour expliquer la faible d’Allemagne, une des causes d’abandon chez les
représentation des femmes dans des domaines femmes a trait aux responsabilités familiales à
d’études conduisant à des emplois clés sur le plan l’égard de l’éducation des enfants6.
économique renvoient à :
Finalement, les femmes tirent des avantages
- des choix scolaires qui demeurent stéréotypés moindres que les hommes de leur réussite scolaire.
tant chez les hommes que chez les femmes; En outre, elles nourrissent une représentation
souvent négative de leurs compétences malgré
- des préjugés qu’entretiennent les employeurs leurs résultats scolaires remarquables; cette
sur l’embauche des femmes dans des emplois représentation prend racine dans divers lieux de
traditionnellement masculins; socialisation, dont l’école. Alors que les filles et
- des facteurs d’ordre culturel qui tiennent à les femmes prennent un net avantage sur les
l’absence de modèle féminin dans les secteurs
non traditionnels;
- des inquiétudes manifestées par les femmes 3. Marie-Josée Larocque, « Les projets scolaires des
de se retrouver dans un univers masculin tant femmes à l’éducation des adultes », dans Femmes,
éducation et transformations sociales, sous la
à l’université que sur le marché du travail; direction du Collectif Laure-Gaudreault, p. 213. Il
est à noter que l’auteure traite de la situation des
- le manque d’incitatifs; femmes adultes sans référence précise à un ordre
d’enseignement.
- l’influence du milieu;
4. Arnaud Sales et al., La Différenciation[…], p. 95.
5. Sandra S. Ruppert, « Reconceptualizing Access in
Postsecondary Education. Report on the Policy
Panel on Access », dans U.S. Department of Educa-
tion, Reconceptualizing Access[…], p. 6. Ces obser-
1. Christian Baudelot et Roger Establet, Allez les vations sont tirées d’un colloque sur l’accès à
filles!, p. 43. l’enseignement supérieur aux États-Unis rassemblant
des chercheurs universitaires de même que divers
2. Danielle Pageau, op. cit., p. 24-25; Renée Cloutier, organismes gouvernementaux dont l’American
« Les femmes à l’université : leurs acquis sont Council on Education.
fragiles », dans L’Évolution de la population […],
Pierre Chenard (sous la direction de), p. 91. 6. Jean-Louis Moortgat, op. cit., p. 27.
Cerner les conditions de réussite à partir de recherches 47
raisons administratives (6,2 %) et les raisons plus fréquemment observée dans l’ensemble des
personnelles (4,7 %)1. motifs évoqués6.
Dans un autre ordre d’idées, il est difficile d’évaluer Finalement, le développement des nouvelles
l’effet de la situation financière des étudiantes technologies de l’information et des communi-
et des étudiants sur la persévérance à l’université. cations (NTIC) serait de nature à transformer
Sur cette question également, les résultats sont l’accès au savoir. Aux États-Unis, on s’inquiète
divergents. Trois études réalisées dans la commu- du fait que l’inégalité d’accès aux nouvelles
nauté européenne tendent à confirmer qu’une technologies de l’information et des communica-
situation financière précaire constitue un facteur tions puissent accentuer les inégalités sociales,
d’abandon des études universitaires2. Aux États- malgré le fait que les télécommunications permet-
Unis, on observe que les problèmes financiers des tent de réduire la distance et d’accroître la diffusion
étudiantes et des étudiants, découlant du déclin de de l’enseignement supérieur. Cette inquiétude tient
la valeur de l’aide financière accordée en dollars au fait qu’un clivage peut s’opérer entre ceux qui
courants, des défauts de paiement quant au rembour- possèdent les outils technologiques et ceux qui
sement des prêts, diminuant ainsi l’aide disponible, n’en possèdent pas, créant ainsi une nouvelle
et de l’endettement étudiant, constituent une barrière à l’accès aux études universitaires7. Le
barrière à l’accès à l’enseignement universitaire3. Conseil entend approfondir cette question importante
Cette étude indique néanmoins que l’aide financière dans son prochain rapport annuel.
n’est pas une garantie à la persévérance aux études;
un nombre important de boursiers ne terminent
pas leurs études4. Crespo et Houle estiment pour En bref…
leur part que les problèmes financiers sont jugés
« peu ou pas du tout importants » par les étudiantes Les conditions microsociales influencent lourdement
et étudiants de l’Université de Montréal dans la la réussite. Dans l’ordre, l’origine sociale et le sexe
décision d’abandonner un premier programme sont des variables d’importance reconnues unanime-
(75,2 %) ou un deuxième (84,1 %)5. Les travaux ment, dans les travaux portant sur la sociologie de
de Privé et Thériault réalisés sur la population l’éducation, quant à leur effet sur l’accès à l’univer-
étudiante de l’UQAC indiquent plutôt une relation sité et le choix d’un régime d’études. En outre,
étroite entre l’interruption des études et les motifs d’autres travaux montrent que cet effet (l’origine
économiques; les problèmes financiers expliquent sociale) pourrait tout autant s’étendre au choix d’un
programme d’études et à la décision de persévérer
24,3 % des abandons, ce qui en fait la raison la ou d’abandonner.
Ces faits ne sont pas nouveaux. À l’opposé, des
transformations récentes dessinent de nouvelles
conditions microsociales de réussite. Ainsi, l’augmen-
tation de l’âge de fréquentation universitaire, les
difficultés financières des étudiantes et étudiants
ainsi qu’un accès inégal aux nouvelles technologies
1. Arnaud Sales et al., op. cit., p. 79. de l’information et des communications pourraient
influer sur la réussite. Cette nouvelle conjoncture
2. Ces études ont été réalisées en France, en Républi- mérite une attention particulière.
que fédérale d’Allemagne et au Royaume-Uni.
Jean-Louis Moortgat, op. cit.
3. Michael T. Nettles et al., « Research Question and
Data Resource Needs for Examining Student Access
to Higher Education », dans Reconceptualizing
Access[…], sous la direction du U.S. Department of
Education, p. 52 à 55.
4. Ibid., p. 53.
6. Marc Privé et Renaud Thériault, op. cit., p. 33.
5. Manuel Crespo et Rachel Houle, op. cit., p. B47 et
B49. Calcul réalisé par le Conseil. 7. Sandra S. Rupert, op. cit., p. 7.
Cerner les conditions de réussite à partir de recherches 49
2.3 Les conditions psychopédagogiques tations que doivent réaliser les étudiantes et les
étudiants pour persévérer à l’université, explique-
Les conditions psychopédagogiques de réussite t-il, seraient à l’origine de l’abandon. Au moment
mettent principalement en lumière les facteurs de l’entrée à l’université, l’étudiante et l’étudiant
propres à l’université ainsi que ceux qui concernent se sentent étrangers tant aux règles informelles qui
l’historique scolaire de l’étudiante ou l’étudiant. régissent la vie universitaire qu’aux exigences
Les études qui sont citées traitent de la persévé- universitaires elles-mêmes. À cette étape d’étrangeté,
rance ou de l’abandon sous l’angle des ressources où l’étudiant cherche des points de repère, succède
universitaires, de l’intégration à l’université, du l’apprentissage des nouveaux codes et des règles,
programme d’études, de la relation pédagogique tant sur les plans institutionnel (la vie à l’université)
professeur-étudiant ainsi que des éléments propres qu’intellectuel (les exigences universitaires), qui
à l’étudiant ou l’étudiante. devrait conduire à l’affiliation où il passe d’un
statut d’étudiant novice à celui de membre de la
Les ressources universitaires – Une recension communauté universitaire. Sur un plan théorique,
des travaux réalisée par le Conseil de l’Europe sur explique Chenard (1988), les étudiants et étudiantes
les facteurs d’abandon au niveau supérieur1 met consentent à des compromis afin de réduire l’écart
au jour l’insuffisance des ressources universitaires. entre leurs intentions initiales à leur arrivée à
Ainsi, un rapport d’encadrement étudiants- l’université et la formation qu’ils y reçoivent.
professeur désavantageux (Italie et Royaume-Uni), Pour Spady, l’intégration à l’université est présentée
des infrastructures inadéquates quant aux salles de comme nécessairement problématique. Pascarella
travail, à la bibliothèque, etc. (Italie), un niveau (1983) et Bean (1982) soulignent l’importance de
élevé d’accessibilité aux études universitaires l’acculturation à l’université et à la discipline, une
mettant en péril la qualité de la formation (France) acculturation qui reposerait autant, sinon plus, sur
ou, de manière générale, les compressions budgé- la qualité de l’environnement universitaire que sur
taires affectant l’encadrement des étudiants et la formation offerte3. En contexte québécois,
étudiantes (Royaume-Uni) sont cités comme l’enquête de Crespo et Houle révèle que les étu-
facteurs potentiels d’abandon des études. diantes et étudiants qui abandonnent leurs études
estiment qu’il leur a été « assez » ou « très » difficile
L’intégration à l’université – L’intégration à de s’adapter sur le plan de leurs études (48,2 %)
l’université est considérée dans l’ensemble des ainsi que sur le plan social (37,9 %). Leurs
travaux – tant ceux réalisés au Québec qu’à homologues persévérants sont moins enclins à
l’étranger – comme un facteur prépondérant de la avoir une telle perception4. Néanmoins, deux
réussite. Elle peut faire la différence entre la études sur l’abandon réalisées en République
persévérance et l’abandon. C’est l’hypothèse fédérale d’Allemagne et au Royaume-Uni notent
soutenue par Coulon2. Les ruptures et les adap- que ce n’est pas toujours le processus d’intégration
qui est en cause mais plutôt l’incompatibilité entre
la formation offerte et les besoins de la clientèle
1. Des études réalisées en Belgique, en France, en Italie, étudiante5.
en République fédérale d’Allemagne et au Royaume-
Uni y sont résumées. Jean-Louis Moortgat, op. cit.
2. Alain Coulon, Le Métier d’étudiant, p. 2. Les travaux
de recherche se fondent sur l’approche ethnométho-
dologique. Les observations ont été réalisées auprès
des étudiants de premier cycle de l’Université Paris
VIII au cours des années 1984 à 1996. Les données
3. Pierre Chenard, L’Interruption des études[…],
recueillies sont issues de quatre sources : des entre- Volet I […], p. 6-20.
vues individuelles et de groupe réalisées à la fin du
semestre d’orientation, des journaux rédigés par les 4. Manuel Crespo et Rachel Houle, op. cit., p. 23, B8
étudiants de première année dans le cadre d’un cours et B35. Calcul effectué par le Conseil.
ainsi que des observations directes et des entretiens
qui ont eu lieu au moment de l’entrée à l’université. 5. Jean-Louis Moortgat, op. cit., p. 28 et 33.
50 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
plein au moment de leur première inscription à diants « engagés » envers leurs études ne compo-
l’université1. Pour les cas des certificats, le régime sent que 16 % de la population étudiante à temps
d’études à temps partiel demeure prédominant2. plein au baccalauréat et seulement 2 % de celle à
temps partiel. Il y a là un hiatus important entre,
d’une part, les intentions, les choix et les compor-
En bref… tements des étudiantes et étudiants et, d’autre part,
l’importance stratégique de l’engagement envers
S’il est difficile de pondérer l’effet de chacune des les études comme condition de réussite.
conditions psychopédagogiques sur la réussite et
d’en évaluer l’importance relative, on doit néanmoins La notion d’engagement envers les études est
retenir que les étudiantes et les étudiants y sont également présente dans les travaux de Tinto sur
sensibles, comme le révèlent les études sur la la persévérance et l’abandon. Cet engagement se
persévérance et l’abandon.
concrétise dans un projet d’études pour lequel
l’étudiante et l’étudiant est disposé à investir les
efforts nécessaires à sa réalisation. La persévérance
s’appuierait sur des intentions clairement affirmées
2.4 Les conditions psychologiques par rapport au programme suivi; à l’inverse, l’incer-
titude mènerait plus fréquemment à l’abandon.
Analysée sous l’angle psychologique, la réussite L’engagement conduirait à fournir les efforts requis
se rapporte principalement à l’engagement et à la en lien avec les intentions initiales4. Dans ses plus
motivation envers les études. Ce sont les principales récentes réflexions, Tinto tente de distinguer les
dimensions mises en lumière dans les études facteurs institutionnels et personnels de l’enga-
recensées. Elles renvoient directement aux carac- gement envers les études5.
téristiques des étudiantes et étudiants ainsi qu’à
celles de l’organisation universitaire et peuvent La motivation – Elle se définit comme un ensemble
concerner chacune des étapes de la trajectoire de forces, de désirs ou de volonté qui pousse une
universitaire. personne à accomplir une tâche ou à viser un
objectif correspondant à un besoin6. Elle permet
L’engagement – Dans le milieu universitaire, ainsi aux étudiants et étudiantes de mobiliser les
l’engagement envers les études est considéré efforts vers l’atteinte d’un objectif lié à la formation
comme une variable prépondérante en matière de universitaire. Il pourrait donc s’agir d’une variable
persévérance et de réussite à l’université. Les importante dans la persévérance ou l’abandon.
recherches appuient-elles cette conviction ? Les données appuient-elles cette affirmation ? Il
L’enquête ICOPE, adoptant une définition opéra- se dégage des études analysées que, si l’abandon
tionnelle de l’engagement qui s’approche du s’accompagne d’une plus faible motivation à
modèle de l’étudiant traditionnel3 montre que l’égard des études, les étudiantes et les étudiants
cette variable conduit au diplôme dans au-delà de manifestent très majoritairement une intention
90 % des cas. Cependant, les étudiantes et étu- ferme de persévérer jusqu’au diplôme lors de leur
arrivée à l’université.
3
Affirmer que les étudiantes et les étudiants entre- FEUQ éclaire la situation rencontrée aux cycles
tiennent un rapport moins exclusif aux études que supérieurs. Les faits rapportés dans cette dernière
les générations étudiantes qui les ont précédés est enquête sont ici traités comme un échantillon du
devenu un lieu commun. Comme en témoigne leur discours porté par les étudiantes et les étudiants
trajectoire, les étudiants et étudiantes d’aujourd’hui permettant de cerner leurs besoins, leurs difficultés,
sont plus nombreux que par le passé à concilier leurs perceptions de la relation professeur-
les études et le travail rémunéré tout au long de la étudiant, leurs attentes, etc. En outre, pour appro-
formation, à adapter le rythme des études selon fondir la présente thématique, le Conseil a réalisé
leurs besoins propres, à interrompre les études une enquête qualitative en deux volets qui repose
avant l’arrivée à l’université et en cours de forma- sur des entrevues en profondeur réalisées auprès
tion universitaire, etc. Au-delà de ces différences d’un échantillon restreint mais diversifié dans sa
révélées par les statistiques, qu’est-ce qui pousse composition de 87 étudiantes et étudiants provenant
les étudiantes et les étudiants à s’engager dans des de divers domaines d’études, de divers établisse-
études universitaires ? Comment perçoivent-ils la ments et régions, à chacun des cycles d’études4.
réussite de leurs études ? Sont-ils satisfaits de la
formation qu’ils reçoivent ? Comment définissent- Les données extraites de ces enquêtes sont mises
ils leur engagement par rapport aux études ? Quelle en parallèle avec la situation prévalant il y a 20
importance la relation avec le professeur revêt-elle ans et qui est révélée dans l’enquête réalisée par
à leurs yeux au fil de la progression à travers les Dandurand et Fournier (1978)5. Cette mise en
cycles d’études ? Connaissant les attitudes et les perspective de la situation actuelle par rapport à
comportements différenciés des garçons et des celle d’il y a 20 ans vise à vérifier s’il y a continuité
filles à l’égard des études aux autres paliers du ou rupture dans le rapport aux études au cours des
système scolaire, comment se distinguent les dernières décennies.
aspirations des hommes et des femmes qui étu-
dient à l’université ? Quelles stratégies élaborent- S’appuyant sur ces sources complémentaires de
ils en lien avec leur vision de l’avenir tant sur le données, le présent chapitre offre ainsi une esquisse
plan professionnel que sur le plan de leur projet de du rapport aux études qu’entretiennent les étudiantes
vie adulte ? Voilà les diverses facettes de la réalité et étudiants qui fréquentent actuellement l’université.
étudiante qui seront explorées dans ce chapitre. Pourquoi se limiter à esquisser la réalité étudiante ?
Le Conseil a constaté qu’il ne pouvait accéder qu’à
L’analyse du rapport aux études s’appuie sur les une connaissance partielle de la réalité sur ce sujet.
Dans l’état du développement des connaissances sur la
plus récentes enquêtes statistiques réalisées dans
population étudiante, ni les chercheurs ni le per-
les universités québécoises. Les enquêtes CODEVIE1 et
2 sonnel enseignant, ni les associations étudiantes, ni
ICOPE présentent des données pertinentes sur
les administrateurs ne peuvent fournir une image
cette question. En outre, l’enquête réalisée par la
complète et nuancée sur cette question bien que des études universitaires ? Sont-elles différentes
tout un chacun y apporte une contribution signifi- de celles évoquées par leurs prédécesseurs ? Sur
cative et éclairante. La présente synthèse est cette question, des données recueillies de diverses
empreinte de ces limites, mais elle tente également sources mettent en lumière à la fois une continuité
de s’en affranchir par la réflexion que suscite la dans les motivations à entreprendre des études
mise en commun des données récentes sur la universitaires mais aussi des différences notables.
population étudiante. En outre, nous tenterons de Ces données soulignent l’importance du travail
cerner les interrogations qui demeurent. intellectuel et l’intérêt pour la discipline ou le
domaine d’études choisi, une importance crois-
sante au fur et à mesure de la progression vers les
3.1 Les motifs liés à la décision cycles supérieurs. Elles mettent en relief les motifs
d’entreprendre ou de poursuivre d’ordre socioprofessionnel qui semblent particu-
des études universitaires lièrement plus présents chez les adultes d’âge mûr
étudiant à temps partiel ainsi que chez les étudiants
Il y a plus de 20 ans, une enquête sur la population et étudiantes à la maîtrise que chez leurs homologues
étudiante décrit en ces termes les motivations des inscrits au baccalauréat à temps plein, soit les
étudiants et étudiantes qui désirent entreprendre jeunes adultes. Il y a tout lieu de croire que la
ou poursuivre des études : dégradation, au cours des années 90, des conditions
En premier lieu, les étudiants manifestent un d’insertion socioprofessionnelle des nouveaux
grand intérêt pour les matières enseignées : diplômés et diplômées universitaires dans des
près de 85 % des étudiants avouent, en effet, emplois liés à leur domaine d’études alimente
qu’ils « aiment la plupart des matières qu’ils
ont à étudier ». Mais, paradoxalement, ces encore aujourd’hui des inquiétudes grandissantes
mêmes étudiants ne semblent pas s’intéresser parmi la population étudiante. Les motifs d’ordre
particulièrement à la vie étudiante que permet socioprofessionnel occupent ainsi aujourd’hui une
la poursuite d’études à l’université : moins place plus grande dans ce qui incite les étudiantes
de 40 % des étudiants reconnaissent que « ce
qui les intéresse à l’université, c’est de vivre et étudiants à entreprendre des études universitaires
une vie d’étudiant ». que par le passé. Finalement, dans notre enquête
En second lieu, au faible intérêt qu’inspire la
qualitative, les motifs exprimés par les étudiantes
vie étudiante universitaire, correspond une et étudiants mettent davantage en évidence l’influence
conception largement utilitariste des études du milieu familial comme facteur déclencheur de
universitaires : pour plus de la moitié des la décision d’entreprendre des études universitaires.
étudiants, ce qui importe « c’est d’obtenir un Approfondissons ces observations issues de trois
diplôme ». Toutefois, ceux-ci sont un peu
moins nombreux (48,3 %) à dire que « ce enquêtes.
n’est pas tant leurs études qui les intéressent
que la profession qu’elles leur permettront Dans l’enquête CODEVIE réalisée à l’automne 1994
d’exercer ». auprès des étudiantes et étudiants des trois cycles
Enfin, l’inquiétude à l’égard de l’avenir universitaires, ceux-ci se sont prononcés sur six
professionnel n’est pas partagée par l’ensemble énoncés visant à décrire leur décision d’entreprendre
des étudiants : il n’y a qu’un peu plus du ou de poursuivre des études universitaires. Cette
quart des étudiants (25,9 %) qui « ne savent
pas trop où cela va les mener »1. décision se rapporte principalement à un motif
d’ordre intellectuel (le plaisir et la satisfaction
Aujourd’hui quelles raisons motivent les étudian- d’apprendre de nouvelles choses : 94,6 % des
tes et les étudiants à entreprendre ou à poursuivre étudiants interrogés affirment que ce motif est
« très » ou « assez » important); celui-ci gagne en
importance selon les cycles d’études. En outre, les
1. Pierre Dandurand et Marcel Fournier, op. cit., étudiantes et étudiants évoquent des raisons
p. 104-105. d’ordres personnel (le défi à relever : 92,1 %) et
Explorer le nouveau rapport aux études : une esquisse de la réalité étudiante actuelle 57
professionnel (la possibilité d’avoir un meilleur des études universitaires. Finalement, chez les
emploi : 88,6 %) ainsi que l’intérêt pour le domaine étudiantes et les étudiants du certificat – peu
d’études (85,4 %). L’influence du milieu familial importe le régime d’études – ainsi que chez leurs
rejoint 47 % des étudiantes et des étudiants. Il y a, homologues au baccalauréat à temps partiel,
somme toute, peu de variation des motifs évoqués l’amélioration des conditions de travail influence
selon le sexe des répondants, mais des distinctions leur décision d’entreprendre des études universitaires.
se dessinent selon le cycle d’études, le domaine
d’études et l’appartenance linguistique1. Dans l’enquête ICOPE, à l’instar de l’enquête
CODEVIE, on voit ainsi que les motifs d’ordre
L’enquête ICOPE propose 18 énoncés pour qualifier intellectuel croissent en importance avec la fréquen-
la décision d’entreprendre des études universitaires. tation universitaire. Ce qui était qualifié il y a 20
Que ce soit chez les étudiantes et étudiants au ans de motifs utilitaristes dans le fait d’entreprendre
baccalauréat, au certificat ou à la maîtrise, peu des études universitaires – l’obtention d’un diplôme
importe le régime d’études, à l’instar de ce que ou l’obtention d’un emploi – semble manifestement
révèle l’enquête CODEVIE, les intérêts pour le présent chez certains sous-groupes de la population
domaine d’études ressortent clairement dans la étudiante actuelle. Devons-nous aujourd’hui parler
décision d’entreprendre ou de poursuivre des de motifs utilitaristes ou d’attitudes visant une
études universitaires. En effet, dans les trois meilleure adaptation au contexte actuel ? Nous
catégories de programmes précités, les répondants aborderons cette question à la section 3.6.
accordent beaucoup d’importance – c’est l’un des
cinq énoncés les plus fréquemment cités – au fait Sur ce point, les données qualitatives présentent
d’acquérir des connaissances dans une discipline des tendances généralement similaires tout en
particulière ou d’acquérir de nouvelles connais- apportant certaines nuances. Dans les deux volets
sances et habiletés. De plus, chez les étudiants et de l’enquête réalisée par le Conseil, les motifs de
étudiantes à la maîtrise fréquentant l’université à l’intérêt pour l’activité intellectuelle et pour le
temps partiel, le fait d’aimer l’activité intellectuelle domaine d’études influencent la décision d’entre-
fait partie des cinq principales raisons évoquées. prendre des études universitaires, et cela davantage
Finalement, l’enrichissement de la culture person- dans les programmes de baccalauréat et de doctorat.
nelle ressort comme l’un des motifs les plus Que ce soit en médecine, en danse, en génie ou en
importants chez les étudiantes et étudiants à temps informatique, par exemple, les témoignages des
partiel, et cela dans les trois types de programmes. étudiantes et étudiants que nous avons recueillis
confirment leur intérêt pour la discipline étudiée.
Outre les motifs de l’intérêt pour un domaine et Au doctorat, l’attrait pour la recherche est rapporté
pour l’activité intellectuelle, les étudiants et par des étudiantes et étudiants en physique et en
étudiantes se préoccupent de leur insertion socio- sciences neurologiques. En outre, en filigrane, on
professionnelle. Le motif « accéder à une profes- perçoit que l’intérêt pour le domaine d’études ou
sion » revêt une importance particulière chez les tout simplement pour les études universitaires
étudiants et étudiantes à temps plein des trois s’inscrit dans une démarche de maturation qui
programmes concernés dans l’enquête. En outre, semble nécessaire à l’étudiante ou à l’étudiant
exception faite des étudiantes et étudiants à la avant de s’insérer dans le marché du travail.
maîtrise à temps partiel, le fait d’obtenir un « J’aime étudier et je n’ai jamais ressenti le besoin
diplôme dans une discipline particulière compte d’aller sur le marché du travail », affirme une
dans la décision d’entreprendre ou de poursuivre étudiante en médecine. « Quand j’ai terminé mes
études collégiales, je ne me sentais pas prêt à
intégrer le marché du travail; alors j’ai poursuivi
des études universitaires », révèle un étudiant au
1. Arnaud Sales et al., Le Monde étudiant […], p. 73-75. baccalauréat en sciences de l’orientation. « Si
58 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
j’avais terminé une formation technique, j’aurais des études universitaires. » Ces témoignages illus-
été bien trop jeune à la sortie des études et je ne trent bien le poids de l’origine sociale dans la
me serais pas sentie prête pour occuper un décision d’entreprendre des études universitaires.
emploi », ajoute une autre étudiante en médecine. À l’inverse, pour d’autres, plus rien ne va de soi
dans la décision d’entreprendre des études univer-
Également, dans le cadre de notre consultation, les sitaires. « Chaque fois que j’allais travailler, je
motifs d’ordre socioprofessionnel semblent détenir passais devant l’université et pour moi, ça me
un certain poids dans la décision d’entreprendre semblait inaccessible », avoue cette étudiante au
des études universitaires. Des perspectives d’emploi baccalauréat en linguistique.
alléchantes constituent un attrait à cet égard, comme
l’ont manifesté des étudiants au baccalauréat en
informatique et en biochimie ainsi qu’à la maîtrise En bref…
en génie métallurgique. Cette préoccupation pour
l’insertion socioprofessionnelle constitue également Les raisons évoquées par les étudiants et les étu-
un motif pour entreprendre des études aux cycles diantes pour entreprendre des études universitaires
supérieurs. « Pour travailler comme économiste, il ou les poursuivre aux cycles supérieurs mettent en
est clair qu’il faut terminer la maîtrise », affirme lumière que les motifs de l’intérêt pour l’activité intel-
lectuelle et pour le domaine d’études continuent
un étudiant à la maîtrise. Finalement, dans le d’occuper une place prépondérante dans la décision,
même esprit que les enquêtes précédentes, on note et ce particulièrement au premier et au troisième
que les étudiantes au baccalauréat que nous avons cycles. L’influence de l’origine sociale a également
interrogées, conciliant travail-études, études- été observée, notamment en lien avec la scolarité des
famille ou travail-études-famille, accordent plus parents. À la faveur de l’évolution du contexte écono-
d’importance aux motifs d’ordre socioprofessionnel. mique marqué par un ralentissement au cours des
années 90, les motifs d’ordre socioprofessionnel y
Pour elles, l’amélioration des conditions de travail occupent aussi une place importante, particulièrement
sur le plan salarial, la réorientation professionnelle, aux yeux des étudiants et étudiantes de deuxième
l’élargissement des compétences professionnelles, cycle, y compris chez ceux inscrits à une formation
l’accès à une carrière, les possibilités d’avancement, en recherche, ainsi que chez les étudiants à temps
le développement personnel et l’actualisation de partiel au premier cycle, notamment chez les femmes
soi sont autant de raisons de s’engager dans des d’âge mûr. Au troisième cycle, les motifs d’ordre
intellectuel prédominent mais, comme nous le verrons,
études universitaires.
l’inquiétude par rapport à l’insertion socioprofession-
nelle au terme des études est grande. Ces données
Dans notre enquête, l’influence d’une personne appuient les conclusions d’études canadiennes
significative ressort davantage comme motif pour mettant en relief la diversité des raisons de fréquen-
1
expliquer le fait d’entreprendre ou de poursuivre ter l’université .
des études universitaires que ce que l’on observe
dans les enquêtes CODEVIE et ICOPE. Au premier
cycle, l’effet du milieu familial est souvent cité. 3.2 La représentation de la réussite
« Cela allait de soi que j’aille à l’université, car
c’est le milieu dans lequel j’ai grandi », affirme C’est à travers la consultation réalisée par le
une étudiante au baccalauréat en sciences de Conseil que la représentation de la réussite que
l’orientation, tout comme cet étudiant au bacca- nourrissent les étudiantes et les étudiants en
lauréat en droit qui déclare ne s’être jamais posé rapport avec leurs études universitaires est
la question tant il était évident qu’il irait à l’uni- abordée. Deux principaux constats en ressortent :
versité. Et cet étudiant en médecine dont les
parents sont tous les deux médecins aborde cette
question dans la même perspective : « Je n’avais
1. Herb O'Heron, « Autres étudiants, autres besoins »,
pas le choix. C’était clair que j’allais poursuivre Dossier de recherche, p. 2.
Explorer le nouveau rapport aux études : une esquisse de la réalité étudiante actuelle 59
- les étudiants et étudiantes adoptent un double comme en témoigne cette étudiante en danse :
standard pour se représenter la réussite à « Réussir des cours, c’est facile. Il s’agit de bien
l’université : l’un est conforme à leur vision répondre au problème. Mais en danse, il y a plus
personnelle de la réussite et l’autre renvoie que ça. Il faut apprendre à développer notre sensi-
aux exigences universitaires qu’ils perçoivent; bilité et notre précision. La réussite des cours
n’est pas l’enjeu principal.»
- plus l’étudiante ou l’étudiant progresse à tra-
vers les cycles d’études et dans la vie adulte, Parfois, le double standard de la réussite passe par
plus sa vision de la réussite dépasse cette une conciliation des exigences universitaires et de
dichotomie du double standard, devenant la vie amoureuse; cet élément de représentation de
résolument intériorisée. la réussite ressortait également de la consultation
des étudiantes et étudiants au collégial1. Cette
Repérons, à travers les témoignages recueillis, observation souligne l’importance de la consolida-
quelques fragments de leur représentation de la tion de la vie amoureuse chez les jeunes adultes
réussite. comme contexte de vie entourant les études
universitaires.
Le double standard
La représentation de la réussite de l’étudiante et
La représentation de la réussite fondée sur un double l’étudiant universitaire constitue un élément moteur
guidant l’engagement envers les études. À ce titre,
standard à respecter prend diverses formes selon
il importe de mieux connaître les standards de
les étudiants ou les étudiantes. Globalement, ce réussite que les étudiantes et étudiants se fixent
double standard se présente de manière dichoto- personnellement. En outre, cela pose le défi de
mique, opposant la vision personnelle de la réussite l’amélioration de la réussite en prenant en compte
aux exigences institutionnelles où l’évaluation des les objectifs personnels variés des étudiantes et
apprentissages semble peser lourdement. des étudiants.
Le double standard de réussite peut ainsi s’exprimer Une vision intériorisée de la réussite
entre cette satisfaction personnelle qui ne corres-
pond pas nécessairement aux exigences universi- Au fur et à mesure que les étudiants et étudiantes
taires, comme l’illustre cette étudiante au bacca- progressent à travers les cycles d’études universitaires
lauréat en sciences de l’orientation : « Je pensais et avancent en âge, leur représentation de la réussite
que je n’étais pas capable de faire des études semble davantage intériorisée; elle est subordonnée
conduisant à un baccalauréat alors que j’y étudie. aux aspirations personnelles. C’est ce que révèlent
C’est déjà une réussite pour moi. Mais je m’aper- les témoignages que nous avons recueillis.
çois bien que la réussite définie par l’université
passe par les notes et le fait de se conformer aux En réaction à une conception de la réussite axée
exigences des cours. » sur le diplôme, les adultes d’âge mûr semblent
avoir développé une représentation de la réussite
En outre, il peut se polariser autour du développe- largement intériorisée où prime le fait de s’investir
ment des compétences professionnelles et de la dans leurs études, d’en tirer une satisfaction per-
réussite des cours. « Est-ce que je me sens prêt à sonnelle, de travailler à leur croissance personnelle
travailler comme professionnel en sciences de
et de développer leur ouverture d’esprit. C’est une
l’orientation même si je n’ai pas toujours obtenu
de très bonnes notes dans mes cours ? » s’interroge
cet étudiant au baccalauréat. Les exigences per-
sonnelles que se fixent l’étudiante et l’étudiant
peuvent dépasser les exigences de l’institution, 1. Conseil supérieur de l’éducation, Des Conditions de
réussite au collégial […].
60 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
véritable transformation de la vision de soi et du soi sans penser aux lendemains. Si nos produits ne
monde qu’ils cultivent. Cette représentation de la sont pas utiles maintenant, ils auront peut-être de
réussite est présente chez les étudiantes au bacca- la valeur un jour. Ce n’est certainement pas le
lauréat en administration (femmes adultes à temps salaire qui me motive. Maintenant que je me vois
partiel), en lettres (adultes de retour aux études) et comme un artiste, je me sens mieux. »
aussi en droit (jeunes adultes). Chez les femmes
adultes d’âge mûr, la représentation de la réussite Tout se passe comme si cet étudiant tentait de
à l’université renvoie généralement à la progres- résoudre la dissonance cognitive afin de redonner
sion de soi et au dépassement personnel. Plusieurs un sens à la formation suivie. La théorie de la
d’entre elles ne se croyaient pas capables de réussir dissonance cognitive met au jour le processus de
des études universitaires. Leur représentation de la recadrage qu’opèrent les individus afin de redon-
réussite se fonde sur un jugement particulièrement ner une cohérence à des informations ou à des
sévère quant à leur propre capacité de réussir des intérêts contradictoires dans le but d’éliminer la
études universitaires, un archétype que portent tension créée par la dissonance1. Ainsi, reprenant
socialement les femmes. Dans ce contexte, la le témoignage ci-haut, on note que l’étudiant est
vision de la réussite comme dépassement de soi confronté au fait que son choix et son intérêt pour
doit plutôt être entendue comme le renversement la physique sont en contradiction avec les faibles
d’une vision erronée quant à leurs possibilités de possibilités d’emploi de même qu'avec l’inutilité
réussir des études universitaires. Au-delà des cas qu’il perçoit face à ses propres travaux, du moins
observés, cette vision intériorisée de la réussite à court terme. Pour résoudre cette tension, il fait
camoufle-t-elle le faible niveau de confiance que une analogie entre le travail du physicien et celui
les femmes ont envers elles-mêmes lorsqu’il s’agit de l’artiste, ce qui procure l’élimination de la
d’entreprendre et de réussir des études universitaires ? tension. On peut déceler, de ce cas particulier, une
Dans quelle mesure cette attitude intervient-elle représentation de la réussite des études universitaires
dans le faible nombre de diplômées observé en ce fondée sur la contradiction, la tension et l’inconfort
qui concerne les études à temps partiel, où les que les étudiants et étudiantes tentent de résoudre
femmes sont représentées très majoritairement ? afin de maintenir leur motivation aux études.
Ce sont là des questions que le Conseil désire Combien d’autres étudiants et étudiantes inquiets
soumettre à la réflexion. à propos de leur insertion socioprofessionnelle au
terme des études empruntent-ils ce processus dans
Au doctorat, la représentation de la réussite repose leur représentation de la réussite ?
sur des considérations personnelles et également
largement intériorisées. Les étudiantes et étudiants
des programmes de physique et de sciences neuro-
logiques se considèrent fondamentalement capables
de juger par eux-mêmes de leurs accomplissements
plutôt que de s’en remettre à l’évaluation externe.
Pour eux, réussir à l’université, c’est donc éprouver
la satisfaction d’avoir fait du bon travail, avec
rigueur et éthique. Cette intériorisation de la réus-
site semble reposer sur une évaluation subjective
des perspectives d’emploi jugées trop faibles. Cet
étudiant au doctorat en physique affirme : « Per-
1. Luc Lamarche, « Les attitudes et le changement des
sonnellement, je crois que pour réussir en physique, attitudes », dans Psychologie sociale, sous la direction
il faut se voir comme un artiste et travailler pour de Guy Bégin et Puroshottan Joshi, p. 128.
Explorer le nouveau rapport aux études : une esquisse de la réalité étudiante actuelle 61
Dans le cadre de l’enquête réalisée par le Conseil, tion par des apprentissages autodidactes et par la
nous cherchions à mesurer l’écart entre les débrouillardise (étudiants au baccalauréat en
attentes initiales au moment de s’inscrire au anglais, langue seconde, en sciences de l’orienta-
programme et la réalité rencontrée en cours de tion et en danse) ou en revendiquant des correctifs
formation, une autre façon d’évaluer la satisfac- au programme.
tion en ce qui touche les études universitaires. Les
propos recueillis amènent certaines nuances au
constat général de satisfaction qu’établit l’enquête En bref…
CODEVIE. La satisfaction dépend largement du
programme d’études et elle est plutôt variable Ces observations soulignent d’abord l’importance de
d’un programme à l’autre. On y note que la satis- l’information sur le programme d’études au moment
faction de l’étudiant ou de l’étudiante est relative de s’y inscrire pour assurer la satisfaction
personnelle des étudiantes et étudiants. Ensuite, la
au niveau de connaissance du programme au
pertinence du programme de formation par rapport
moment de s’y inscrire, à l’intérêt pour le choix aux exigences du marché du travail apparaît comme
scolaire initial qui se concrétise ou non, ainsi un point sensible. Finalement, un programme souple
qu’au degré de correspondance entre la formation et polyvalent, permettant aux étudiants d’évoluer
offerte et les compétences recherchées sur le dans divers domaines d’emploi associés à un même
marché du travail. domaine d’études, constitue une caractéristique
appréciée.
Diverses insatisfactions s’expriment. Les activités
de préaccueil, visant tout autant l’information
scolaire que le recrutement, semblent recueillir
chez les étudiantes et étudiants en médecine un 3.4 L’engagement envers les études
intérêt plutôt mitigé. En outre, dans certains cas,
la méconnaissance du programme induit un mau- Sur le plan de la répartition du temps productif
vais choix d’orientation que l’étudiant ou l’étu- entre les études et le travail rémunéré, l’enquête
diante doit corriger en effectuant un deuxième réalisée par Dandurand et Fournier en 1978 révèle
que, en moyenne, les étudiants et étudiantes
baccalauréat ou en poursuivant ses études à la
consacrent 41,9 heures par semaine aux études,
maîtrise (étudiante au baccalauréat en adminis- incluant les heures de cours, les travaux person-
tration et étudiant au baccalauréat en enseigne- nels et l’étude1. En 1994, l’enquête CODEVIE
ment de l’anglais, langue seconde). enregistre à cet égard un nombre moyen de 38,3
heures par semaine, soit une diminution de 3,6
Aux cycles supérieurs, la satisfaction naît d’une heures d’étude par semaine2. Il est clair que ce
bonne connaissance du programme dès l’admission. temps moyen correspond à des engagements très
À titre d’exemple, une étudiante au doctorat en diversifiés envers les études selon le cycle et le
sciences neurologiques affirme avoir fait son domaine d’études. L’enquête CODEVIE évalue que
choix de programme après avoir visité les labora- les heures hebdomadaires totales consacrées à
toires de recherche et avoir discuté avec les l’étude sont plus importantes du côté des sciences
professeurs-chercheurs. « C’est important, dit- de la santé, des sciences pures et des sciences
elle, d’aller voir sur place et de se faire une idée appliquées, que du côté des sciences humaines,
de l’atmosphère et du fonctionnement d’une des arts et des lettres ainsi que des sciences de
équipe de recherche. » l’éducation, par exemple. En outre, le temps
consacré aux études s’allonge au fil de la sciences de la santé, des sciences pures et des
progression dans les cycles d’études, passant de sciences appliquées, de même que chez ceux des 2e
37,9 à 45,2 heures par semaine, du premier au et 3e cycles4. Dans ce contexte marqué par une
troisième cycle1. forte propension à concilier les études à temps
plein et le travail rémunéré, quel effet cette
Comparativement aux années 60 ou 70, les
situation engendre-t-elle sur l’engagement envers
étudiantes et étudiants d’aujourd’hui occupent
les études ?
davantage un travail rémunéré durant les études.
C’était le cas du tiers de la population étudiante à
La signification profonde de l’engagement envers
temps plein en 19782 et de plus de quatre étudiantes
les études renvoie à cette attitude qui marque
ou étudiants à temps plein sur dix, tous cycles
l’appartenance à une institution, en l’occurrence
d’études confondus, en 19943. Notons que, si l’on
l’appartenance au programme d’études et à l’éta-
considère les universités en région de l’enquête
blissement fréquenté, et qui se traduit par la réali-
ICOPE, le pourcentage des étudiantes et étudiants
sation des devoirs attendus d’un étudiant ou d’une
nouvellement inscrits au baccalauréat et au certificat
étudiante. Cet aspect est exploré dans notre enquête.
à temps plein qui travaillent est demeuré au tiers
Divers facteurs favorisent cet engagement :
en 1993 et 1994 et est à un peu moins de trois sur
dix à la maîtrise à temps plein. Il est clair que la
Ø l’importance du temps consacré aux études
participation au marché du travail croît de manière
(ex. : la médecine, le génie métallurgique, la
substantielle chez les étudiantes et étudiants à
physiologie, les sciences économiques)
temps partiel chez qui, pour bon nombre d’entre
canaliserait l’engagement envers les études;
eux, le travail rémunéré s’exerce à temps plein.
Finalement, la situation d’avoir un emploi à temps
Ø le fait d’occuper un emploi lié à son domaine
plein tout en étudiant également à temps plein
d’études, comme cela se produit le plus souvent
serait le fait d’une minorité d’étudiantes et d’étu-
chez les étudiants des cycles supérieurs, per-
diants, soit 6 % en 1978 d’après l’enquête de
mettrait de se centrer sur les études;
Dandurand et Fournier, tous cycles confondus, et
de 2 % selon l’enquête ICOPE. Ø le financement adéquat des études favoriserait
un engagement quasi exclusif envers les études;
Alors que l’on observe un effritement de quelque
trois heures d’étude au fil des ans et un engagement Ø les perspectives favorables d’emploi au terme
moins exclusif envers les études, est-ce à dire que des études amèneraient les étudiants et étu-
les étudiants et étudiantes travaillent moins ? Selon diantes à se consacrer pleinement à leurs études;
l’enquête CODEVIE, lorsque s’additionnent le temps
d’étude et le temps consacré au travail salarié pour Ø l’appartenance à un groupe social, entendu ici
près de quatre étudiantes et étudiants à temps plein au sens du regroupement des étudiantes et
sur dix des trois cycles d’études, on voit que leur étudiants d’un même programme dans le
charge de travail est en moyenne de 49,7 heures cadre de séances de travail ou d’activités de
par semaine. Cette charge de travail est plus loisir, favoriserait un sentiment de solidarité à
lourde chez les étudiants et étudiantes des l’égard du programme d’études;
néré. Certains facteurs objectifs soutiennent l'enga- sur le plan intellectuel en développant leurs intérêts
gement envers les études, dont le temps consacré à à l’égard d’une discipline ou d’un champ d’études,
l'étude, un emploi lié au domaine d'études, un finan- qu’ils favorisent les échanges avec le milieu
cement adéquat des études, etc. D'autres facteurs
minent cet engagement. Ils se rapportent notamment professionnel, qu’ils contribuent à développer leur
à une conciliation parfois trop lourde des études et identité professionnelle et qu’ils manifestent un
des responsabilités de la vie adulte. intérêt réel pour leur développement global. Bref,
du point de vue étudiant, le professeur remplit à la
fois une fonction d’expert, de modèle et de mentor
qui permet à l’étudiante ou l’étudiant de développer
3.5 La relation professeur-étudiant avec lui une relation privilégiée dans une perspective
de développement global.
Dans un avis portant sur les conditions de réussite
au collégial définies à partir du point de vue des Sur la disponibilité des professeurs, les étudiantes
cégépiens et cégépiennes, la relation maître-élève et étudiants de premier cycle recherchent un contact
est apparue comme un élément central. Ils attendent personnalisé avec les professeurs sur le plan des
des professeurs qu’ils soient disponibles, qu’ils apprentissages en dehors des heures de cours. Aux
développent des rapports interpersonnels fondés cycles supérieurs, affirment-ils, « un professeur
sur le respect et la compréhension de la réalité disponible est le minimum qu’un étudiant est en
étudiante, qu’ils adoptent une approche rigoureuse droit de recevoir2 ». Un directeur de recherche
et exigeante en matière de formation et, finalement, disponible, aux yeux des étudiants, signifie :
qu’ils témoignent d’un réel intérêt pour l’ensei-
gnement1. À l’université, qu’attendent les être capable de planifier rapidement une
rencontre pour un étudiant qui en ressent le
étudiants et étudiantes des professeurs ? Compte besoin. C’est aussi être en mesure de recevoir
tenu de leur maturation psychologique, vocation- un étudiant à tout moment et de lui accorder
nelle et intellectuelle, l’importance de la relation le temps nécessaire pour l’écouter et faciliter sa
professeur-étudiant s’estompe-elle à l’université compréhension, de même que disposer d’un
temps suffisant pour lire ses textes3.
de même qu’au fil des cycles d’études ?
En ce qui touche à l’encadrement, sous l’angle
Comme il en est fait mention dans l’analyse de la de la relation professeur-étudiant, les étudiantes et
satisfaction des étudiantes et des étudiants à l’égard étudiants au premier cycle apprécient que les
de la formation, la relation professeur-étudiant est professeurs les soutiennent dans les moments
un élément clé de la satisfaction qui semble gagner critiques de leur trajectoire, qu’ils interviennent
en importance auprès de la population étudiante auprès d’eux comme expert, qu’ils les aident à
au fil des générations. De manière générale, les clarifier les notions mal intégrées en se souciant
enquêtes soulignent le fait que les étudiantes et de répondre à leurs questions, qu’ils les traitent
étudiants, à tous les cycles, attendent des profes- avec courtoisie et respect, etc. Il est à noter que
seurs qu’ils soient disponibles, qu’ils offrent un l’encadrement individualisé constitue une situation
encadrement de qualité et qui soit personnalisé,
qu’ils se soucient de donner une rétroaction
explicite sur les travaux de recherche ou sur les
examens, qu’ils soutiennent leur motivation,
qu’ils les orientent vers de nouvelles perspectives
colloques, conférences, etc. Mais hélas, l’inquiétude s’est installée parmi la population
41,9 % des étudiants interrogés pensent qu’ils étudiante, comme le souligne l’enquête CODEVIE.
ont été mal informés par leur directeur des
activités associées au champ de recherche1. Avec la progression du chômage au cours des
années 90, l’inquiétude des jeunes à l’égard de
l’emploi n’a cessé de croître. En 1994, 63 % des
En bref… étudiantes et étudiants fréquentant l’université à
temps plein estiment qu’il leur sera difficile de
Du point de vue des étudiantes et étudiants, à tous trouver un emploi dans leur domaine d’études3.
les cycles, la qualité de la relation pédagogique Notons que ce sentiment d’inquiétude par rapport
importe et se reflète dans des aspects tels la dispo-
nibilité des professeurs à leur égard, l'encadrement
à l’insertion au marché du travail relève d’une
ainsi que la rétroaction donnée par les professeurs attitude irrationnelle pour l’essentiel puisque,
sur les travaux. malgré les ralentissements en matière d’emploi
qui affectent aussi l’insertion des diplômées et
diplômés universitaires, ceux-ci demeurent le
groupe de la population le moins touché par le
3.6 Les stratégies déployées au chômage. Cependant, ce constat général recouvre
présent pour préparer l’avenir des disparités importantes selon les domaines
d’études, allant de perspectives d’emploi très
Les plus récentes recherches sur la condition étu- favorables à d’autres nettement plus restreintes.
diante prennent en compte l’influence de l’antici-
pation de l’avenir, telle que perçue par l’étudiante Les deux volets de l’enquête qualitative réalisée
ou l’étudiant, sur l’engagement présent envers les au Conseil ont exploré l’influence des projets
études et la trajectoire empruntée. C’est dans cet d’avenir sur l’organisation des études et l’engage-
esprit que les deux volets de l’enquête réalisée au ment des étudiantes et étudiants dans leur démarche
Conseil ont été définis. Un premier élément de formation. L’analyse des témoignages recueillis
d’anticipation de l’avenir qui a un effet sur les auprès d'étudiantes et étudiants de premier cycle
études est sans contredit les perspectives d’emploi inscrits dans des domaines scientifiques et techno-
associées à chaque domaine d’études. Des com- logiques – les sciences de la santé, les sciences
portements distincts ont été observés selon les pures et les sciences appliquées – révèle que, compte
groupes d’étudiants et d’étudiantes en fonction tenu des perspectives d’emploi associées au domaine
des perspectives d’emploi. Un deuxième élément d’études, les étudiantes et les étudiants adoptent
concerne les aspirations des hommes et des des stratégies distinctes sur les plans social, édu-
femmes en lien avec le projet futur de conciliation cationnel et professionnel. De manière générale,
travail-famille. celles-ci concernent l’engagement envers les
études, la décision de poursuivre les études et les
Le comportement à l’égard des études en perspectives de carrière.
rapport avec les perspectives d’emploi
Résumons d’abord les stratégies adoptées par les
Comme il a été décrit antérieurement, alors qu’il y étudiantes et étudiants qui sont inscrits à un
a 20 ans les étudiantes et les étudiants semblaient programme dont les perspectives d’emploi liées
relativement sereins à l’égard de l’avenir2, au domaine d’études sont faibles4. Ils planifient
davantage la poursuite d’études aux cycles supé-
1. Laurence Viry, op. cit., p. 51. 3. Arnaud Sales et al., Le Monde étudiant[…], p. 121.
2. Pierre Dandurand et Marcel Fournier, Conditions 4. Fait à noter, ceux-ci semblent pleinement conscients
de vie[…], p. 105. de la situation de l’emploi dans leur domaine d’études.
68 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
rieurs dans le but d’améliorer leurs probabilités concrètement les apprentissages en situation de
d’accéder à un emploi. Ils considèrent parfois le travail. Ce premier défi est relevé dans le cadre
programme dans lequel ils sont inscrits comme un des stages. Le plaisir d’apprendre semble ainsi
programme de transition conduisant vers un autre subordonné à l’attrait du marché du travail et aux
programme où les perspectives d’emploi semblent dividendes qu’ils espèrent en retirer. En effet, ces
plus favorables1. Ils adoptent une attitude réso- étudiantes et étudiants ont déjà développé un plan
lument confiante envers l’avenir, une attitude qui de carrière.
a été qualifiée précédemment de moyen de résoudre
la dissonance cognitive afin de soulager le malaise Ces attitudes distinctes à l’égard des études en
occasionné par cette situation et de maintenir la fonction des perspectives d’emploi illustrent bien
motivation pour les études. Ils semblent intérioriser que la perception de l’avenir professionnel importe
la précarité d’emploi par leur insistance à miser dans l’engagement présent envers les études, dans
sur leurs connaissances et leurs habiletés intellec- l’attitude à l’égard de l’apprentissage et dans les
tuelles dans la résolution de problèmes complexes. acquis que les étudiantes et étudiants considèrent
Ils entrevoient l’avenir professionnel de manière importants de développer au cours de la formation.
plus floue et leurs projets de carrière sont traversés Contre toute attente, l’inquiétude à l’égard de
par l’incertitude. Des observations tirées des deux l’avenir semble favoriser chez eux un intérêt plus
volets de l’enquête, on note ainsi cette tendance à grand envers les études et, en particulier, envers le
se centrer résolument sur les études afin d’en domaine d’études. Le développement des habiletés
retirer toute la satisfaction intellectuelle possible intellectuelles et l’actualisation de l’intérêt pour le
et de promouvoir pleinement l’intérêt qu’ils domaine d’études y sont nettement valorisés. À
portent au domaine d’études. l’inverse, de fortes perspectives d’emploi semblent
agir comme une force d’attraction vers l’extérieur.
Pour leur part, les étudiantes et étudiants dont les Dans ce cas, les étudiants et étudiantes semblent
perspectives d’emploi au terme des études sont davantage intéressés par une expérience concrète
favorables adoptent des stratégies différentes à du marché du travail qu’investis dans leurs études
l’égard de la connaissance, des études et de la vie et centrés sur les apprentissages qu’ils y font.
professionnelle. Il semble ainsi que les fortes
perspectives d’emploi au terme des études favori- Les aspirations des hommes et des femmes
sent l’engagement envers les études. Mais,
contrairement à leurs homologues dont les En ce qui touche les aspirations scolaires et pro-
perspectives d’emploi sont plus faibles, la forma- fessionnelles des hommes et des femmes, nous
tion universitaire semble moins importante en avons relevé certains témoignages où les femmes
termes d’acquisition de connaissances, de déve- tendent à réduire leurs aspirations scolaires et
loppement d’habiletés intellectuelles ou de professionnelles à la lumière de la conciliation
compétences professionnelles. Pour eux, ce qui travail-famille qu’elles anticipent. Dans une
compte réellement, c’est la possibilité d’appliquer situation similaire, les hommes tendent plutôt à
prioriser le projet professionnel et n’abordent pas
la perspective de la conciliation de la même manière.
1. Il existe, dans les trajectoires étudiantes, un sous- Les témoignages d’étudiantes à la maîtrise en
ensemble de programmes transitoires permettant
d’accéder, dans un deuxième temps, au programme sciences économiques et en médecine montrent
correspondant au choix initial de l’étudiant ou de les choix déchirants qu’elles font afin de concilier
l’étudiante. À titre d’exemple, mentionnons les les études, la vie professionnelle et le désir de
intentions des étudiantes et étudiants de biochimie
de s’orienter vers la médecine, ceux de mathémati- fonder une famille. Ils illustrent la tension entre
ques d’opter pour les statistiques, l’informatique ou les aspirations scolaires et les exigences profes-
les sciences de l’ingénieur, de même que ceux de sionnelles associées aux études doctorales ou à
physique de bifurquer également vers l’informatique. certains domaines spécialisés d’études. La façon
Explorer le nouveau rapport aux études : une esquisse de la réalité étudiante actuelle 69
dont elles abordent leurs choix scolaire et profes- gnement, le contexte culturel, etc. Les perspectives
sionnel est troublante lorsqu’on met en rapport d’avenir ont un effet sur le comportement en cours
leur désir légitime de concilier travail et famille en de formation, mais les expériences significatives
écartant les études doctorales ou des choix de vécues à l’université façonnent aussi le projet d’ave-
nir. Il serait donc plus juste de parler d’interinfluence
carrière jugés trop exigeants (certaines spécialités
de la formation et des projets d’avenir.
médicales, par exemple), alors qu’elles admettent
volontiers que leur conjoint s’engage dans ces
voies qu’elles ont délaissées pour elles-mêmes.
C’est dire qu’au plus haut niveau du cursus, les
stéréotypes liés aux rapports sociaux de sexe sont En conclusion
encore très présents et influencent les aspirations
des femmes – et des hommes aussi – dans leur L’esquisse du rapport aux études qu’entretiennent
représentation personnelle comme individu, comme les étudiantes et étudiants d’aujourd’hui donne un
professionnelle, comme artiste ou comme cher- aperçu de la complexité du phénomène. Dans les
cheure. Les étudiants et les étudiantes qui aspirent limites des connaissances actuelles, on peut néan-
à avoir des enfants ont donc déjà intériorisé cette moins affirmer que le rapport aux études se fonde
division sociale des tâches et des responsabilités. sur les caractéristiques personnelles des étudiantes
Du côté des étudiants, la conciliation travail- et étudiants, sur l’organisation des études en lien
famille est une réalité qu’ils envisagent ou qui avec les objectifs et les exigences des programmes,
s’est déjà concrétisée, mais il apparaît que les sur le financement des études, sur les perspectives
considérations de nature professionnelle semblent d’emploi ainsi que sur des éléments culturels issus
influencer davantage le déroulement de leurs de la socialisation qui s’opère tout au long de la
études que la réalité familiale elle-même. vie. On peut également en conclure qu’il s’inscrit
dans la lignée historique du rapport aux études
Cette différence entre la représentation des hommes
qu’entretenaient les générations précédentes qui
et des femmes a déjà été mise en lumière dans la
ont fréquenté l’université tout en s’en distinguant
recherche en soulignant que la conciliation travail-
résolument sur certains aspects, dont l’importance
famille constitue un enjeu majeur dans le projet
de la relation professeur-étudiant et l’inquiétude
des jeunes femmes qui n’est pas partagé avec la
croissante par rapport aux perspectives d’emploi.
même intensité par les jeunes hommes1. Tout se
On a pu observer que ce rapport aux études diffère
passe comme si, pour les hommes, l’enjeu semble
substantiellement chez les étudiantes et étudiants
être de concilier la vie de famille avec les études
selon leur domaine d’études, leur cycle d’études et
alors que pour les femmes, il importe de concilier
leur âge. Sur ce dernier point, les adultes d’âge mûr
les études avec les responsabilités parentales.
témoignent d’un rapport particulier aux études
universitaires, tant par les motifs singuliers qui les
incitent à entreprendre des études universitaires,
En bref… par leur régime d’études devant s’adapter aux
responsabilités de la vie adulte que par leur per-
Les étudiantes et étudiants s’inscrivent dans un
environnement marqué par la socialisation dès la
ception de leurs compétences comme étudiant et
plus tendre enfance, la conjoncture économique, les étudiante en regard des exigences universitaires.
perspectives d’emploi, les rapports sociaux de sexe, Finalement, l’engagement moins exclusif envers
leur expérience scolaire à tous les ordres d’ensei- les études se confirme; le temps productif se
partage entre des activités tels que le travail, les
loisirs, la famille et la vie de couple. Sur ce plan,
les données qualitatives ont permis de cerner les
1. Renée Cloutier, « Les femmes à l’université : leurs éléments qui soutiennent l’engagement envers les
acquis sont fragiles », dans L’Évolution de la popu-
lation étudiante […], sous la direction de Pierre études et ceux qui tendent à l’affaiblir. En outre,
Chenard, p. 97. l’anticipation de l’avenir relativement à l’emploi
70 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
La démocratisation de l’enseignement universitaire Les mesures d’aide à la réussite présentées dans les
constitue une préoccupation récente qui a amené à pages qui suivent proviennent de trois principales
s’interroger sur la réussite. En outre, les restrictions sources : les rapports déposés par les universités à
budgétaires des États à l’égard des services publics la Commission de l’éducation, en septembre 1998,
ont accentué la réflexion sur l’efficacité et l’effi- en vertu de la Loi modifiant la Loi sur les établis-
cience ainsi que sur les résultats. Somme toute, la sements d’enseignement de niveau universitaire;
réussite est une question abordée depuis peu. une consultation réalisée par la permanence du
Malgré cela, les universités ont développé une Conseil auprès des membres du personnel des
grande variété de mesures d’aide à la réussite afin
universités2; et deux entretiens avec le Comité des
de pallier certains obstacles ou seuils critiques que
affaires académiques de la CREPUQ. Elles sont
rencontrent généralement les étudiantes et étudiants.
À la lecture de ce chapitre, on perçoit nettement mises en parallèle avec les obstacles et les seuils
que certains de ces obstacles ou seuils critiques critiques présentés jusqu’à maintenant.
sont négligés par les mesures d’aide à la réussite.
Pour l’heure, des interrogations demeurent quant à Il est à noter que les obstacles, les seuils critiques et
l’accessibilité de ces mesures ainsi qu’à leur les mesures d’aide à la réussite repérés ultérieure-
efficacité. ment ont un caractère général ou plus particulier.
Le portrait qui se dégage de la présente synthèse
Dans ce chapitre, les obstacles à la réussite ren- ne prétend aucunement dresser de manière exhaus-
voient à ce qui s’oppose à l’action, à l’obtention tive un état de situation du système universitaire
d’un résultat1. Ils se rapportent aux conditions québécois. Néanmoins, il constitue une amorce
objectives qui menacent la réussite des études éclairante en la matière qui pourrait être complétée
universitaires. Par exemple, un engagement trop par des analyses plus détaillées de la situation au
grand dans un travail rémunéré durant les études sein du réseau universitaire. L’ensemble des données
peut s’avérer un obstacle à la réussite. Il importe recueillies est présenté sous forme d’énumération
de préciser que cette définition ne revêt aucune- ordonnée selon les quatre étapes préidentifiées de
ment une connotation déterministe mais plutôt la trajectoire universitaire. Le Conseil a ainsi jugé
probabiliste. En effet, dans le contexte d’un utile de dresser la liste des obstacles, des seuils
soutien attentif, les obstacles n’engendrent pas critiques et des mesures d’aide à la réussite qui
irrémédiablement l’échec ou l’abandon. Les seuils
constituent autant de points de repère pour des
critiques désignent les exigences de la formation
travaux à poursuivre ou des chantiers ultérieurs à
universitaire envers lesquelles bon nombre d’étu-
diantes ou d’étudiants éprouvent des difficultés. entreprendre dans les universités.
L’adaptation lors de la première année universi-
taire au premier cycle ou la réalisation du mémoire
ou de la thèse aux cycles supérieurs en sont des 4.1 L’accès
exemples. On ne devrait donc pas parler de ces
exigences comme d’obstacles mais plutôt comme En dépit de la progression remarquable du nombre
des seuils critiques à franchir. Les mesures d’aide d’étudiants et d’étudiantes fréquentant l’université
à la réussite se rapportent aux interventions mises depuis les trente dernières années, subsiste-t-il
en œuvre au sein des universités, que ce soit à encore aujourd’hui certaines barrières au moment
l’échelle de l’établissement, d’une unité d’ensei- de l’accès à l’université qui auraient pour effet de
gnement ou de recherche ou dans le cadre d’un dissuader ceux qui auraient la capacité et l’intérêt
cours, dans le but de soutenir les étudiantes et de poursuivre des études universitaires ?
étudiants vers la réussite à chacune des étapes de
la trajectoire.
Les obstacles et les seuils critiques mis au jour à Ÿ Le choix d’une carrière scientifique
l’étape de l’accès à l’université interpellent à plusieurs Afin de sensibiliser les jeunes aux perspectives de
égards la responsabilité de l’État, que ce soit en carrière en sciences et en technologie, des camps
lien avec le développement de l’enseignement scientifiques sont offerts aux enfants.
supérieur en région, le financement de la recherche Ÿ Les programmes d’accès à l’égalité
par l’entremise des organismes subventionnaires
Des programmes d’accès à l’égalité pour les femmes et
provinciaux et fédéraux, le financement des les minorités culturelles sont implantés dans certains
études et le développement de politiques sociales établissements.
qui touchent les étudiantes et étudiants comme Ÿ Les adultes à l’université
citoyennes et citoyens (ex. : la politique familiale,
la politique fiscale, etc.). En outre, le milieu Les établissements développent divers moyens pour
soutenir l’accès des adultes à l’université. En région,
industriel est nommément concerné par le l’offre de formation par vidéoconférence permet d’élar-
financement de la recherche universitaire. Dans gir l’accès sur le territoire. En outre, les programmes
les universités, c’est principalement par des courts offerts aux adultes constituent une réponse
adaptée à certains besoins de perfectionnement. Fina-
interventions sur l’information et l’orientation lement, une politique de reconnaissance des acquis
scolaires ainsi que sur le financement des études facilite le retour aux études. L’implantation d’une garde-
que l’accès à l’université est soutenu. rie sur le campus universitaire est également de nature
à soutenir la conciliation études-famille auprès des étu-
diantes et des étudiants qui assument des responsabili-
Les mesures d'aide à la réussite tés parentales.
Ÿ L’accès aux outils technologiques
Ÿ L’information et l’orientation des
étudiantes et étudiants La mise à la disponibilité des étudiantes et des étudiants
d’ordinateurs constitue une mesure qui vise à résoudre
L’université offre des services de consultation en orienta- les inégalités sociales pour ceux dont les ressources
tion à la population. Ces services permettent de dépister personnelles ne permettent pas de posséder un ordina-
les personnes aptes à entreprendre des études univer- teur personnel.
sitaires et désireuses de le faire. En outre, dans certaines
universités, on insiste sur l’importance de l’information Ÿ Les personnes handicapées
scolaire permettant de mieux concilier les attentes des
étudiants et étudiantes, notamment de ceux provenant Certains établissements ont adopté un ensemble de
de l’extérieur du pays, et les objectifs des programmes. mesures à l’égard des personnes handicapées qui sont
L’intervention peut parfois se faire auprès des étudiantes prévues dans les politiques et les règlements de l’établis-
et des étudiants des cégeps (ex. : journée Carrière). sement.
Ÿ Le financement des études
Les étudiantes et les étudiants bénéficient des pro-
grammes gouvernementaux de prêts ou de bourses Il demeure des obstacles et des seuils critiques à
d’études distribués selon le revenu familial. Les disponi- propos desquels des mesures pourraient être
bilités financières des établissements ou des unités développées ou accentuées au sein des universités.
d’enseignement et de recherche, permettent également
aux étudiantes et étudiants d’avoir accès à un finance- Citons, par exemple, des politiques et des mesures
ment, et cela particulièrement aux cycles supérieurs. Les d’accessibilité des clientèles cibles (les hommes et
mesures de financement des études sont diverses (ex. :
bourses institutionnelles d’études, travail de recherche
les femmes, l’accueil des étudiantes et des étudiants
ou d’enseignement, etc.) mais inégalement accessibles à temps partiel, le soutien des étudiantes et étudiants
selon les cycles d’études, les établissements et les provenant de milieu familial défavorisé sur le plan
domaines d’études. Certaines unités d’enseignement et
de recherche assurent un financement des études alors socioéconomique, l’accès en sciences, etc.), un
que, dans d’autres unités, ce sont les étudiantes et les financement des études visant l’équité selon les
étudiants qui doivent trouver le financement de leurs domaines d’études, un accès élargi aux nouvelles
études ainsi que de leurs travaux de création ou de
recherche. technologies de l’information et des communica-
tions à l’université, etc.
74 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
raison notamment des horaires d’ouverture des Comme on pouvait s’y attendre, les établissements
services universitaires qui ne correspondent pas à
leur disponibilité. développent et mettent en œuvre de multiples
interventions pour soutenir la réussite tout au long
- Les étudiantes et étudiants ainsi que le corps
professoral connaissent peu l’existence des du cheminement à l’université, qui se répercutent
mesures d’aide à la réussite au sein de leur également sur l’accès au diplôme. Sur ce plan,
programme ou de leur établissement. l’intégration à l’université, l’encadrement et le
Ÿ Une conception élitiste de l’évaluation soutien à la persévérance apparaissent comme
étant des orientations privilégiées, voire générali-
Certaines pratiques d’évaluation des apprentissages se
veulent éliminatoires. Dans cette optique, une utilisation sées, dans les universités québécoises.
inappropriée de la courbe de Gauss, communément
désignée courbe normale, amène à comparer les
apprentissages des étudiantes et étudiants les uns par
rapport aux autres plutôt qu’aux objectifs du cours et
d’en mesurer l’atteinte, comme le propose la méthode Les mesures d'aide à la réussite
d’interprétation critérielle.
Ÿ La qualité de la formation en cause Ÿ L’intégration à l’université
Les études montrent que l’abandon peut, dans certains Les mesures d’accueil des étudiantes et étudiants à la
cas, être associé à une pédagogie inadéquate, aux première année du baccalauréat, et exceptionnellement
insatisfactions quant au soutien reçu par les profes- à la première année de la maîtrise, ainsi que les
seurs, au fait que le programme soit inintéressant, etc. mesures liées au soutien lors de la première année ont
un caractère quasi généralisé dans le réseau universi-
Ÿ Les signes précurseurs à l’abandon des taire. Il s’agit là d’une orientation importante des
études mesures d’aide à la réussite. Ces mesures prennent
d’ailleurs différentes formes : préaccueil et accueil visant
Il existe des signes précurseurs à la décision d’aban- notamment à diffuser de l’information sur le programme
donner, soit : l’abandon de cours, la demande d’infor- d’études, sur les activités, sur les services offerts à
mation scolaire sur d’autres programmes ou sur les l’université ainsi que sur les perspectives d’emploi; service
emplois disponibles, etc. d’un conseiller pédagogique; séminaire d’intégration;
tutorat pédagogique offert par les professeurs ou les
Ÿ Des segments de la population étudiante chargés de cours; tutorat ou monitorat par les pairs (un
plus touchés par l’abandon des études étudiant plus avancé est jumelé à un étudiant
nouvellement inscrit ); groupe d’entraide, etc. Toutes
L’abandon serait associé à une plus faible scolarité des les universités sont engagées dans l’une ou l’autre de
parents, à la fréquentation d’un régime d’études à ces mesures de soutien. En outre, diverses interven-
temps partiel, à la discontinuité de l’itinéraire scolaire, à tions sont réalisées dans les universités pour développer
l’interruption d’études universitaires, aux problèmes le sentiment d’appartenance des étudiantes et des
financiers, etc. étudiants à l’université et briser l’isolement.
Ÿ La réalisation du mémoire ou de la thèse Ÿ L’encadrement
comme un seuil critique aux cycles
supérieurs Les universités sont clairement engagées dans la
mise en œuvre de mesures d’encadrement et elles
Les difficultés rencontrées se rapportent au choix du ont adopté des politiques institutionnelles en ce
directeur de recherche, à la définition du projet de sens, à tous les cycles.
recherche, au fait pour l’étudiante ou l’étudiant d’effec-
tuer ses travaux de recherche sans être intégré à une Au premier cycle, l’encadrement peut se concevoir
équipe de recherche et à la rédaction du mémoire ou de diverses manières, que ce soit en lien à un cours
de la thèse. La soutenance de thèse est perçue comme ou à un programme d’études.
une étape difficile requérant un soutien particulier de la L’encadrement lié à un cours peut prendre diverses
part du directeur de recherche, bien que cette étape formes : l’obligation pour un professeur de mentionner
compromette rarement la réussite.
dans son plan de cours ses disponibilités en dehors
Ÿ Les facteurs inhérents à l’étudiante ou de l’horaire du cours, l’apport de l’auxiliaire d’ensei-
l’étudiant gnement affecté au soutien d’un groupe-cours, une
politique de réduction de la taille des groupes-cours,
Les étudiantes et étudiants se perçoivent généralement le développement de mesures spécifiques d’enca-
comme le principal obstacle à la réussite de leurs études. drement adaptées aux grands groupes, le soutien
Quel est le sens de cette affirmation ? des chargés d’enseignement en dehors des heures
76 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
de cours dans les matières où les étudiantes et des étudiantes et des étudiants (ex. : le personnel
étudiants éprouvent le plus de difficulté, etc. enseignant, les employés de soutien qui accueillent
et informent les étudiantes et étudiants, le personnel
L’encadrement lié à un programme semble l’orienta- de la bibliothèque, des services informatiques ou
tion dans laquelle les universités s’engagent peu à des laboratoires, le personnel professionnel œuvrant
peu. Le programme d’études étant le lieu premier dans les divers services aux étudiants, etc.). Les
d’appartenance de l’étudiante et de l’étudiant à services aux étudiants collaborent étroitement à
l’université, c’est donc autour de ce programme que l’encadrement par les interventions qu’ils réalisent
doivent se structurer les activités d’encadrement; en partenariat avec les unités d’enseignement et de
celles-ci, appliquées à l’intérieur de chacun des recherche. Les services d’orientation assument le
cours, n’offriraient pas tout le potentiel que pour- plus souvent le volet qui touche le métier d’étudiant.
raient avoir des interventions concertées sur ce plan. D’autres services aux étudiants, animés par des
À titre d’exemple, citons : les ateliers d’information étudiantes et étudiants plus avancés dans leur
sur les politiques, règlements et mesures à caractère cheminement, sont offerts pour pallier certaines
pédagogique offerts annuellement aux directeurs de carences sur le plan des habiletés langagières ou
département afin de susciter une réflexion sur leur pour favoriser l’intégration à l’université. Les bureaux
rôle en matière d’encadrement tout en respectant de recherche institutionnelle assurent un suivi statis-
l’autonomie des unités d’enseignement, le suivi tique des cohortes d’étudiantes et d’étudiants auquel
accordé aux étudiantes et étudiants tout au long du peuvent s’ajouter des enquêtes sur les nouveaux
programme de formation, la formation de cohortes inscrits. En outre, les unités d’enseignement déposent
d’étudiantes et d’étudiants qui auront sensiblement des bilans annuels des activités d’encadrement.
le même horaire, le suivi des résultats scolaires, le
dépistage des difficultés d’apprentissage, l’encadre- Ÿ Le soutien à la persévérance
ment des étudiantes et étudiants en tutelle, les
rencontres préparatoires à la réalisation de stages, le Parmi les mesures inventoriées, plusieurs visent à
suivi des étudiantes et étudiants qui abandonnent, soutenir la persévérance aux études. Divers comités
l’aménagement de périodes d’encadrement en dehors et groupes de travail sont mis sur pied et des études
des cours, l’aide à la préparation des stages, le sont réalisées dans le but de favoriser la
soutien au métier d’étudiant (la prise de notes, la persévérance et de contrer l’abandon. Parfois, ces
lecture, la mémorisation, la gestion du temps, la travaux donnent lieu à l’adoption d’une politique sur
préparation aux examens, la gestion du stress, les la persévérance. Sur cette base, de multiples
stratégies d’étude), etc. interventions se mettent en œuvre : des interven-
tions conjointes réalisées par l’unité d’enseignement
Aux cycles supérieurs, l’encadrement comporte des et le service de psychologie et d’orientation, la concer-
particularités qui se traduisent dans le choix des tation de l’unité d’enseignement et des associations
mesures de soutien à la réussite. En voici quelques étudiantes afin de dépister les étudiantes et les
exemples : l’insertion de l’étudiante ou de l’étudiant étudiants en difficulté sur le plan scolaire, le
dans une équipe de recherche ou dans des activités diagnostic hâtif de la difficulté rencontrée, l’offre de
de recherche réalisées en partenariat avec le milieu cours de mise à niveau, la présence d’un centre de
industriel, le suivi des résultats scolaires et de la dépannage et d’aide dans des matières données, la
durée des études, la rédaction de rapports d’étape consolidation de la moyenne cumulative en limitant
faisant état de l’avancement des travaux de recher- le nombre de cours par trimestre, l’obligation de la
che, l’évaluation écrite de l’avancement des travaux reprise d’un cours raté au trimestre suivant, la
de recherche à chaque trimestre, la mise sur pied relance des étudiantes et étudiants qui abandon-
d’un comité d’encadrement, la précision des rôles et nent, la présence de conseillers pédagogiques
responsabilités du directeur de recherche et de voués aux étudiantes et étudiants éprouvant des
l’étudiant dans la relation de supervision (une difficultés, etc.
entente d’encadrement), l’encadrement pédagogique
intégrant des rencontres régulières de l’étudiante ou Ÿ La pédagogie
l’étudiant avec son directeur de recherche, la partici-
pation à des activités de séminaire au cours des Certaines interventions pourraient être qualifiées de
dernières années du doctorat, le service d’aide à la préventives en ce qu’elles tentent d’adapter la péda-
rédaction des mémoires et des thèses, la prépara- gogie aux besoins et aux difficultés que vivent les
tion à la soutenance de thèse, les activités de étudiantes et les étudiants. Il s’agit ici d’approches
diffusion scientifique, la participation à un comité pédagogiques utilisées lors de l’enseignement. Certai-
d’encadrement ou à un séminaire de tutorat animé nes sont citées en exemple dans le milieu universi-
par les étudiantes et étudiants, etc. taire pour leur efficacité. Mentionnons l’approche par
problèmes, l’enseignement coopératif, l’environne-
Finalement, l’encadrement est vu comme moyen ment pédagogique intégré s’appuyant sur les outils
structurant de l’activité universitaire. Il peut parfois informatiques, les modèles opérationnels de télé-
être décrit comme une activité informelle à laquelle assistance dans un contexte de formation à distance,
participe l’ensemble des personnels intervenant auprès le Profil Synergie en sciences de l’administration, etc.
Observer les conditions de réussite mises en œuvre dans les universités… 77
titulaires d’un diplôme universitaire, quel qu’il soit, Les mesures mises en œuvre pour favoriser l’insertion
obtiennent dans une proportion moindre que les
hommes un travail à temps plein, un emploi
socioprofessionnelle des diplômées et des diplômés
permanent, un emploi à temps plein lié au domaine s’orientent principalement vers un rapprochement
d’études et, la situation idéale, un emploi à temps de la formation des réalités du marché du travail.
plein, permanent et lié au domaine d’études. Un aspect peu couvert dans les mesures inventoriées
Ÿ Des formations écourtées par les autour duquel des interventions pourraient s’organiser
perspectives d’emploi concerne le développement de l’identité profes-
L’attrait du marché du travail, dans les secteurs où sionnelle tout au long de la formation. On peut
l’offre d’emploi est intéressante, peut inciter les croire qu’une telle catégorie de mesures, en plus
étudiantes et les étudiants, mais aussi les unités de profiter à l’ensemble de la population étudiante,
d’enseignement, à aménager un parcours accéléré serait susceptible de soutenir davantage les femmes
de formation. D’autre part, la rareté des emplois peut
conduire à quitter le programme d’études dès que se diplômées à l’étape de l’intégration à un emploi.
présente un emploi dans son domaine, pour ainsi
saisir la chance au passage de crainte qu’une telle 4.5 L’ensemble de la trajectoire
occasion ne se reproduise pas.
La réussite incertaine aux examens d’un ordre pro- Il existe des mesures dont la portée se répercute
fessionnel ou aux stages professionnels au terme sur l’ensemble de l’itinéraire universitaire, de
des études peut constituer un seuil critique de l’accès jusqu’à l’insertion socioprofessionnelle.
première importance pour l’insertion socioprofes-
sionnelle. Ces mesures abordent la réussite de manière trans-
versale. Ainsi en est-il de l’analyse des besoins
des étudiantes et étudiants, de l’évaluation et de la
révision des programmes et de l’affinement des
Les mesures d'aide à la réussite compétences pédagogiques.
Ÿ Le rapprochement entre la formation et les
réalités du marché du travail
Un ensemble de mesures a pour cible l’insertion Les mesures d'aide à la réussite
socioprofessionnelle. Ces mesures visent à répon-
dre à l’intérêt des étudiantes et étudiants pour une Ÿ L’analyse des besoins des étudiantes et
formation pratique et adaptée aux réalités du marché étudiants
du travail. Plusieurs exemples ont été observés :
l’offre d’un cours d’introduction à la profession, Les universités réalisent des études et des recherches
l’insertion de stages au programme d’études, les et mettent sur pied des groupes de réflexion et d’action
activités de transfert des connaissances dans le afin de mieux connaître les besoins de la population
milieu industriel, les contacts avec le milieu profes- étudiante qui fréquente leur établissement, par exemple :
sionnel et scientifique, les mesures « d’employabi-
lité » durant l’été, les journées Carrière, des mesures - en dégageant les seuils critiques en matière de
d’adaptation des programmes à l’internationalisation réussite qui jalonnent le cheminement à tous les
des savoirs et à la mobilité, l’implantation de réseaux cycles;
socioprofessionnels, la mise sur pied de centres de - en cernant les facteurs favorables à la persévérance;
démarrage et d’incubation d’entreprises, etc.
- en améliorant la compréhension des besoins
Ÿ L’information professionnelle des étudiantes et étudiants en matière d’enca-
drement ou de formation à distance;
Les services d’orientation diffusent de l’information
sur l’évolution des professions et du marché du - en identifiant les besoins particuliers des étu-
travail. diantes et étudiants en difficulté;
Ÿ Le « bachotage » - en utilisant les résultats de la Relance des
diplômés comme rétroinformation sur la perti-
Le « bachotage » vise à aider les étudiantes et étudiants nence des programmes en regard de l’insertion
diplômés à réussir l’examen de l’ordre professionnel. socioprofessionnelle.
80 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
Ces interventions d’analyse des besoins de la popu- des enseignements dans une perspective d’amélio-
lation étudiante constituent le fondement du dévelop- ration continue des compétences professorales; et
pement de mesures favorisant la réussite. par le perfectionnement des professeurs ou des
chargés de cours, notamment ceux qui éprouvent
Ÿ Les programmes d’études des difficultés. En outre, les services aux étudiants2
participent également au développement des com-
La vigie qu’exercent les universités sur les dispositifs pétences pédagogiques du personnel enseignant en
de formation constitue une catégorie de mesures d’aide aidant les professeurs à approfondir leur connais-
à la réussite en amont de l’accueil des étudiantes et sance des besoins des étudiantes et des étudiants.
étudiants dans un programme de formation universi- Finalement, aux cycles supérieurs, tous les établis-
taire. De telles mesures ont pour but de garantir la sements du réseau de l’Université du Québec ont mis
qualité de la formation (cibler les bons objectifs, en place un processus d’accréditation du corps pro-
développer les habiletés pertinentes, transmettre des fessoral à la supervision des mémoires et des
connaissances à jour, etc.). Pour ce faire, on observe thèses.
que les établissements se sont dotés d’outils et de
politiques d’évaluation des cours, des programmes
ou de la qualité de l’enseignement dans lesquels les
étudiants peuvent avoir un rôle à jouer. En outre, les
politiques d’évaluation des programmes sont com- En conclusion
plétées, le cas échéant, par la révision des program-
mes. Certains établissements s’affairent au dévelop- Le portrait d’ensemble des mesures répertoriées,
pement de programmes offerts au premier cycle.
D’autres procèdent à l’enrichissement des banques tout approximatif qu’il soit, témoigne manifestement
de cours au doctorat. En outre, la révision des des préoccupations des universités envers la réussite
objectifs généraux des cycles supérieurs permet de et de leur engagement à mettre en œuvre des condi-
préciser les frontières entre les cycles d’études. tions favorables sur ce plan. On ne saurait toutefois
Finalement, l’arrimage des programmes entre le
cégep et l’université permet de favoriser le passage conclure que les étudiantes et étudiants de tous les
de l’enseignement collégial vers le baccalauréat et établissements et de tous les programmes en béné-
d’offrir un cheminement intégré de formation ficient également pas plus que nous ne pouvons en
supérieure.
évaluer l’efficacité. La présentation de ces mesures
Ÿ Les compétences pédagogiques permet néanmoins de dresser l’éventail des inter-
C’est à divers moments de la carrière professorale ventions susceptibles d’améliorer le taux de réus-
que les universités élaborent et mettent en œuvre site et d’indiquer les voies d’actions possibles afin
des mesures visant à développer les compétences d’aider encore davantage les étudiantes et les étu-
pédagogiques. Lors du recrutement des professeurs, diants à surmonter les obstacles et à franchir les
les compétences pédagogiques sont évaluées. En
outre, une politique sur le recrutement des nouveaux seuils critiques qui jalonnent inévitablement leur
professeurs vise à inciter les unités d’enseignement trajectoire à l’université, à chacune des étapes.
à accorder plus de poids aux compétences en ensei-
gnement et à concevoir de nouveaux moyens de les
évaluer (ex. : par une mise en situation d’enseigne-
ment). Des procédures d’allégement de tâches
peuvent permettre aux nouveaux professeurs
d’acquérir une formation en pédagogie. En cours de
carrière, diverses mesures visent à développer les
compétences pédagogiques par la valorisation de la
tâche d’enseignement (ex. : un prix d’enseigne-
ment); par le soutien aux innovations pédagogiques;
par l’intégration progressive et appropriée des
nouvelles technologies de l’information et des d’offrir un soutien individualisé aux étudiantes et
communications à l’enseignement (dans presque étudiants, en obligeant une certaine réflexion sur la
toutes les universités)1; par le suivi des évaluations démarche pédagogique à suivre et en proposant une
méthode de travail, etc.
2. L’expression « services aux étudiants » doit être
entendue ici dans son sens large, incluant les services
de prêts et bourses, les services d’orientation, les
1. L’intégration de ces technologies à l’enseignement services de santé, les centres d’aide liés à une disci-
contribue à améliorer la pédagogie en favorisant un pline donnée, etc.
recentrage sur les apprentissages, en permettant
CHAPITRE 5
Améliorer les conditions de réussite des étudiantes et
des étudiants
Dans cet avis qui complète la pensée du Conseil sur Première orientation : S’approprier un
le thème de la réussite, on souligne l’importance de nouveau paradigme de la réussite
se centrer sur la réalité de l’étudiante et de l’étudiant
dans le contexte de la mission de formation des La définition de la réussite citée au chapitre premier
universités. Même si les analyses présentées met en relief le projet de formation de l’étudiante
jusqu’à maintenant ont été effectuées spécifique- et de l’étudiant, c’est-à-dire l’acquisition et l’inté-
ment à l’enseignement universitaire, le paradigme gration par l’étudiant ou l’étudiante de connaissances
de la réussite qui y est développé peut également et de compétences en lien avec une formation de
s’appliquer à l’enseignement collégial et inspirer haut niveau s’inscrivant dans son projet personnel
la réflexion aux niveaux primaire et secondaire. et contribuant tout à la fois à son développement
Le Conseil invite donc le ministre de l’Éducation sur les plans professionnel, artistique, scientifique,
ainsi que tout le milieu de l’éducation à en culturel, civique et personnel. En outre, l’analyse
prendre acte. des conditions de réussite a bien montré leur
aspect multidimensionnel1.
Ce chapitre présente sept orientations indiquant
autant de chantiers à mettre en œuvre pour amé- 1) Le Conseil recommande:
liorer les conditions de réussite des étudiantes et
des étudiants à l’université. Les orientations font de considérer la réussite à partir du projet
ressortir la nécessité de : de formation de l’étudiante ou de l’étudiant,
d’en reconnaître le caractère multidimen-
- s’approprier un nouveau paradigme de la sionnel et complexe et de prendre en compte
réussite; les diverses conditions de réussite mises en
- poursuivre l’amélioration du niveau de lumière dans le présent avis lors du déve-
scolarisation de la population québécoise; loppement de mesures visant à soutenir ou
à améliorer la réussite ainsi que lors de
- favoriser l’engagement des étudiantes et des l’évaluation de l’atteinte des objectifs en la
étudiants envers leurs études; matière.
- repérer les disparités en matière de réussite et
y remédier; La synergie des orientations, des actions et des
moyens est nécessaire à l’amélioration de la réussite.
- mieux cerner la réalité étudiante actuelle; Elle fait appel à l’engagement des étudiantes et
- implanter un processus de diagnostic- étudiants envers leur projet de formation. Elle
intervention-évaluation; nécessite la mise en œuvre par l’établissement et
le personnel enseignant de pratiques pédagogiques
- soutenir les étudiantes et les étudiants de favorables aux apprentissages. Elle repose sur une
façon à maintenir les exigences universitaires. formation de qualité offerte aux autres paliers du
système d’éducation. Elle prend appui sur un projet
Les orientations et les chantiers qui s’en dégagent démocratique inspirant le développement social.
sont balisés par un ensemble de recommandations En ce sens, la réussite à l’université engage la
issues des éléments de problématique déjà exposés. responsabilité d’un ensemble d’acteurs, que ce soit
Pour en faciliter l’appropriation, chaque recom- au sein même du réseau universitaire, dans tout le
mandation est précédée d’un énoncé de la problé- système d’éducation ou dans la société civile.
matique accompagné d’une référence à l’exposé
de la problématique et suivie de précisions quant à
sa nature et à sa portée.
carrière intéressantes aux diplômées et diplômés quelques exemples. Dans les secteurs de pointe, il
universitaires. Il doit pouvoir mettre en valeur les peut arriver que les employeurs embauchent un
compétences acquises par les diplômées et diplômés étudiant ou une étudiante en fin de parcours, avant
universitaires et permettre à ceux d’entre eux qui même que son programme d’études soit achevé.
le souhaitent de s’épanouir en région. En retour, le Dans d’autres secteurs, une entreprise peut
rehaussement de la scolarisation des régions peut conclure une entente de stage rémunéré dès la
contribuer au développement de créneaux tout à première année universitaire et pour toute la durée
fait originaux, notamment du côté des nouvelles des études, ce qui fait que les étudiantes et
technologies de l’information et des communica- étudiants ont peu d’opportunité d’explorer leur
tions, en plus de consolider les secteurs tradition- domaine professionnel. Finalement, le travail à
nels d’activité économique. temps partiel pendant de longues heures peut
détourner des études universitaires.
Pour revenir à l’importance du régime d’études à diants à temps partiel. Les besoins sont multiples
temps plein, disons que des raisons pédagogiques et l’offre de formation doit pouvoir s’y adapter.
fort nombreuses appuient cette position1. Ces Dans la section suivante, le Conseil formule une
raisons ont trait à la continuité de la formation recommandation à l’intention de la population
plutôt qu’au morcellement des apprentissages, à étudiante à temps partiel dans le contexte du
l’intégration des savoirs, à l’acculturation à un soutien à la persévérance jusqu’au diplôme3.
domaine d’études par une exposition prolongée et
soutenue plutôt que par des contacts fragmentés
ou à l’entraide accrue par les pairs dans un rythme Quatrième orientation : Repérer les
de cheminement analogue pour tous. Cependant, il disparités en matière de réussite et y
faut bien reconnaître que, d’emblée, l’incitation remédier
des étudiantes et étudiants à s’engager dans un
régime d’études à temps plein ne rencontre pas L’examen du pourcentage de diplômés et de
nécessairement les visées de tous, des tensions diplômées en fonction de l’origine sociale, du
opérant dans des directions opposées. sexe, du domaine d’études et du régime d’études
révèle des disparités persistantes au fil des ans et
5) Le Conseil recommande au ministre de appelle un ensemble d’interventions qui feront
l’Éducation : l’objet des six prochaines recommandations.
de mettre en œuvre les conditions favora- La première disparité se rapporte aux écarts
bles permettant aux jeunes adultes de observés entre les domaines d’études au chapi-
privilégier le choix d’un régime d’études à tre du pourcentage de diplômés et de diplômées
temps plein, notamment en améliorant le et, à plus forte raison, entre les programmes, à
soutien financier aux études. chacun des cycles4. Dans certains cas, le faible
pourcentage peut s’expliquer, à l’instar de certaines
Les moyens visant à favoriser la participation à disciplines artistiques, par le fait que l’étudiante et
temps plein aux études universitaires sont multiples. l’étudiant ont développé des compétences qui les
Le Conseil appuie la Politique québécoise à l’égard rendent aptes à s’insérer au monde du travail avant
des universités dans son intention de réduire les même l’obtention du diplôme; celui-ci ajouterait,
obstacles d’ordre économique aux études2. Outre dans certaines disciplines artistiques, peu de poids
le financement des études, ces moyens passent par à l’intégration au milieu artistique. Il y a aussi
l’adoption d’une définition univoque de ce qu’est certains programmes de transition où les étudiantes
étudier à temps plein et le respect de cette définition et étudiants s’inscrivent dans l’espoir d’être admis
par les organismes gouvernementaux (l’aide finan- au programme qui constitue leur choix scolaire
cière aux études ainsi que les organismes subven- premier. En outre, il arrive que les étudiantes et
tionnaires de recherche et de création, etc.) et les étudiants s’inscrivent aux cycles supérieurs afin
établissements universitaires eux-mêmes. d’améliorer leurs perspectives d’emploi et, lorsque
l’emploi se présente, le choix d’abandonner les
Même s’il privilégie le régime d’études à temps études se pose.
plein chez les jeunes adultes, le Conseil considère
important que les universités demeurent ouvertes
à accueillir et à soutenir des étudiantes et des étu-
1. Voir le chapitre 2, section 2.2, p. 47 et section 2.4, 3. Voir la recommandation n° 10, p. 90.
p. 52.
4. Voir le chapitre 4, section 4.3 ainsi que les tableaux
2. Ministère de l’Éducation, op. cit., p. 22. 7 et 8 de l’annexe 1.
86 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
Sur la question du pourcentage de diplômés et de mesures peuvent être variées, comme en témoigne
diplômées, le Conseil désire soulever trois consi- le chapitre précédent.
dérations. D’abord, le diplôme universitaire est
garant d’une véritable formation qualifiante dont La seconde disparité touche, de manière géné-
la portée va bien au-delà de l’insertion professionnelle rale, aux situations de discrimination systémi-
en favorisant l’insertion sociale, par l’exercice que. Le Conseil s’est questionné à savoir si les
éclairé du rôle de citoyenne ou citoyen dans la difficultés rencontrées par les étudiantes et les
société civile, et en stimulant le développement étudiants en fonction de leur origine sociale, de
personnel. Pour cette raison, le Conseil est d’avis leur sexe, de leur régime d’études ou de leur
que les universités doivent continuer à inciter les domaine d’études à l’une ou l’autre des étapes de
la trajectoire universitaire se rapportent à des
étudiantes et les étudiants à persévérer jusqu’à
situations de discrimination systémique largement
l’obtention du diplôme dans le cas où le programme
présentes dans la société et qui pénètrent insidieu-
suivi s’inscrit vraiment dans leur choix de carrière sement la vie universitaire. La discrimination systé-
et à les recentrer sur les gains à moyen et à long mique renvoie ici aux situations d’inégalité vécues
termes plutôt qu’à court terme. Ensuite, ce n’est par un segment de la population étudiante, des
pas dans l’ensemble des programmes qu’il faut situations qui ne sont ni souhaitées ni planifiées ni
chercher à améliorer le taux d’obtention du intentionnelles de la part de l’établissement univer-
diplôme mais bien dans ceux où des faiblesses sitaire ou, plus largement, du système universitaire,
sont enregistrées. Les gains à réaliser sont à ce résultant de pratiques établies de bonne foi et
niveau principalement. Finalement, l’enseignement apparemment neutres, mais qui engendrent ou
universitaire au premier cycle joue un rôle d’orien- renforcent les inégalités déjà présentes dans la
tation; le processus de maturation du choix scolaire société. Les écarts observés à l’université en
comporte invariablement des indécisions et des matière de réussite sont considérés comme une
changements de programme. situation de discrimination systémique : 1) s’ils
affectent un sous-groupe donné de la population
6) Afin d’améliorer le pourcentage de diplômés étudiante et 2) s’ils reflètent les inégalités préexis-
et de diplômées, le Conseil recommande tantes dans la société; ces deux indicateurs doivent
aux unités d’enseignement et de recherche : être présents.
- de cerner les éléments de problématique Que les disparités découlent ou non de discrimination
qui se posent dans les programmes à systémique, elles demeurent tout aussi préoccupantes
faible pourcentage de diplômés et de pour le Conseil. Néanmoins, il est utile de bien
diplômées afin d’élaborer et de mettre situer la nature de la problématique puisque, dans
en œuvre les moyens appropriés d’y l’un et l’autre cas, les correctifs envisagés tendent
remédier; à être ou bien plus directs (quand il ne s’agit pas
- de poursuivre les efforts déjà engagés de discrimination systémique) ou bien plus diffus
pour soutenir des étudiants et étudiantes (quand il s’agit de situation de discrimination
dans les programmes où le pourcentage systémique), nécessitant des interventions à divers
de diplômés et de diplômées est élevé. paliers pour opérer le changement social. Si
l’université a moins d’emprise sur les situations
C’est localement, au sein des unités d’enseignement de discrimination systémique, y compris celles qui
et de recherche, qu’il est opportun de poser les touchent la réussite des hommes et des femmes,
diagnostics et d’apporter les correctifs requis. Pour elle n’en joue pas moins un rôle moteur important
ce faire, les ressources doivent être décentralisées sur le plan social; c’est à ce titre qu’elle est appelée
afin que l’unité puisse jouir d’une pleine autonomie à apporter sa contribution.
pour appliquer les mesures qui s’imposent; les
Améliorer les conditions de réussite des étudiantes et des étudiants 87
Les pages suivantes précisent en quel sens il est de leurs études universitaires et de leur vie
possible d’intervenir sur les discriminations fondées professionnelle2.
sur l’origine sociale et sur le sexe dans le but
d’améliorer la réussite à l’université. Chez les hommes, la difficulté d’accéder à des
études universitaires de premier cycle semble
croissante au fur et à mesure que diminue le
Les discriminations fondées sur l’origine
sociale nombre de diplômés aux niveaux secondaire et
collégial. Comme le Conseil l’a mis en évidence
Les étudiantes et étudiants provenant d’un dans un avis sur la réussite des garçons et des
milieu socioéconomique défavorisé se retrou- filles au primaire et au secondaire, ces écarts
vent généralement dans une position plus s’expliquent en partie par une socialisation à des
fragile quant à l’accès et à la persévérance aux rôles sociaux de sexe, où les garçons tendent à
études1. Le corpus des travaux ne parvient pas à dévaloriser certains apprentissages scolaires,
cerner unanimement les effets de l’origine sociale notamment ceux liés à la lecture et à l’écriture, à
sur la réussite à l’université. Néanmoins, certains valoriser certains apprentissages autonomes non
indices fiables laissent croire que chez les étudiantes scolaires, à adopter un rythme d’apprentissage
et étudiants qui forment la première génération de autre que le rythme scolaire, etc. Au collégial,
leur famille à accéder à l’université, la réussite des comme le souligne la Fédération des cégeps, cette
études peut se complexifier par le choix d’un socialisation intervient dans le sens d’un engagement
régime d’études à temps partiel où les probabilités plus grand des filles envers les études, qui se
de persévérer jusqu’au diplôme sont moindres, par manifeste par un temps consacré à l'étude nette-
des aspirations professionnelles plus diffuses, par ment supérieur à celui des garçons au secondaire
une intégration à l’université plus difficile due à et au collégial. Les garçons s’intégreraient à des
une acculturation nécessaire et par une probabilité réseaux sociaux de plus grande taille où prime le
plus importante d’abandonner les études, etc. caractère ludique des relations interpersonnelles.
En comparaison, les filles s’inscriraient dans des
7) En ce qui touche les étudiantes et les réseaux sociaux de plus petite taille caractérisés
étudiants issus de milieu socioéconomique par l’entraide et la disponibilité de ses membres
défavorisé, le Conseil recommande aux sur le plan de l’aide scolaire, de l’aide à l’orienta-
administrateurs universitaires ainsi qu’aux tion et du soutien émotif 3.
unités d’enseignement et de recherche :
De prime abord, les hommes à l’université ne
de développer et d’appliquer des mesures semblent pas faire l’objet d’une discrimination
d’aide à la réussite permettant de mieux les systémique. Leurs difficultés scolaires sont mani-
soutenir, notamment lors de l’intégration à festes dans certaines matières à tous les échelons
l’université dans les programmes de du système scolaire; elles tendent à exclure une
premier cycle. bonne proportion d’entre eux des études universi-
taires. Mais cette situation ne peut être associée à
Les discriminations fondées sur le sexe des inégalités sociales préexistantes. Bien au
contraire, à scolarité équivalente, les hommes
Les hommes et les femmes rencontrent des tirent avantageusement partie de leur formation
difficultés singulières à des moments distincts universitaire sur le marché du travail. Le Conseil a
déjà témoigné de son inquiétude en ce qui a trait à important corpus de travaux où une diversité de
la situation des garçons dans tout le système scolaire. pistes explicatives permettent de mieux cerner ces
Bien que certaines hypothèses explicatives nous questions du côté des femmes. En outre, beaucoup
orientent vers des pistes plausibles pour aider à d’universités québécoises ont développé des groupes
comprendre leur situation dans le contexte de de recherche ou des chaires d’étude sur la
l’enseignement obligatoire, force est d’admettre la condition féminine.
compréhension somme toute limitée de la situation
vécue par les jeunes hommes aux niveaux collégial 8) Considérant la nature distincte de la
et universitaire. Outre le constat que leur rendement problématique vécue par les hommes et par
scolaire les confine à l’exclusion des études univer- les femmes à des moments précis de leur
sitaires dans bien des cas, comment expliquer de trajectoire à l’université, le Conseil recom-
manière pertinente et sensible la situation qu ils mande aux administrateurs universitaires
vivent au cégep et à l’université ? et aux unités d’enseignement et de recher-
che :
Chez les femmes, les luttes menées pour faire
- de reconnaître que les hommes et les
reconnaître leurs droits sur les plans juridique,
femmes étudiant à l’université doivent
politique, social et économique ont sans contredit
surmonter des obstacles et des seuils
contribué à transformer profondément leurs condi-
critiques distincts selon leur sexe;
tions de vie et leur devenir social1. Mais la situation
n’est cependant pas toute rose et le destin social - de développer et d’appliquer les
des femmes n’est pas une question réglée. Les mesures correctives adéquates afin de
femmes font l’objet de discrimination systémique lever les obstacles rencontrés par les
à bien des égards. D’ailleurs, la Politique en hommes et par les femmes qui étudient
matière de condition féminine cerne les éléments à l’université, à chacun des cycles.
de discrimination à l’égard des femmes. En éduca-
tion, la politique vise trois axes : améliorer la Pour améliorer la réussite des étudiants à l’univer-
réussite des études, favoriser la diversification des sité, les mesures tendront vers :
choix professionnels et soutenir la formation des - une collaboration plus étroite avec les services
femmes adultes2. Des mesures correctives pour de la vie étudiante du milieu collégial – ex. : les
pallier les discriminations sont inscrites dans les services d’orientation – afin de sensibiliser les
plans triennaux d’actions gouvernementales. À étudiants inscrits à la formation préuniversitaire
l’université, les progrès remarquables accomplis à l’importance de la formation universitaire;
par les femmes tendent à gommer les éléments de
discrimination restants. S’il y a lieu d’accueillir - des incitations plus directes à l’endroit des
avec optimisme ce bilan positif qui témoigne étudiants du secteur préuniversitaire (ex. : des
d’une nette amélioration de la situation, des messages adressés spécifiquement à leur
actions demeurent nécessaires pour éliminer les intention lors des journées portes ouvertes à
obstacles persistants. Dans un autre ordre d’idées, l’université, des journées Carrière au sein du
notons que, contrairement à l’état limité des milieu collégial, une campagne d’information
connaissances des difficultés rencontrées par les scolaire, etc.);
hommes à l’enseignement supérieur, il existe un - un encadrement particulier auprès des hommes
inscrits au baccalauréat afin d’améliorer la
persévérance aux études.
1. Voir le chapitre 2, section 2.1, p. 40.
2. Secrétariat à la condition féminine, Un avenir à Pour améliorer la réussite des étudiantes à l’univer-
partager : la politique en matière de condition sité, les mesures développées peuvent consister à :
féminine, p. 29.
Améliorer les conditions de réussite des étudiantes et des étudiants 89
- offrir aux étudiantes des modèles féminins dans universités ont déjà mis en place un programme
les domaines des sciences pures et du génie d’accès à l’égalité tant en matière d’emploi, à
(ex. : la présence de professeures, le contact l’égard de leur personnel, qu’en ce qui concerne
avec des chercheures et des ingénieures); les étudiantes et les étudiants. Selon ces programmes,
des mesures de redressement temporaires et perma-
- soutenir les étudiantes de second et de troisième
nentes s’adressent aux sous-groupes visés3.
cycles dans ce processus de cristallisation de
l’identité de chercheure en tant que productrice
9) Tant en ce qui concerne les situations
de savoir;
potentielles de discrimination fondée sur
- favoriser la construction de l’identité profes- l’origine sociale, le sexe, l’ethnie, la langue,
sionnelle chez les étudiantes et renforcer leur le handicap, etc., conformément aux dispo-
prise de conscience des compétences qu’elles sitifs prévus dans la loi, le Conseil recom-
ont développées en cours d’études, en vue de mande aux administrateurs universitaires :
bien préparer l’insertion socioprofessionnelle
- de poursuivre les efforts entrepris dans
à la fin des études, et cela à chacun des cycles.
les programmes d’accès à l’égalité en
emploi pour le personnel universitaire
Une approche systémique de la réduction afin de pallier l’absence de modèle pour
de la discrimination les étudiantes et étudiants;
Pour compléter cette réflexion sur les situations de - de développer des programmes d’accès
discrimination systémique, notons qu’il existe un à l’égalité à l’intention de la population
ensemble d’outils prévus dans la loi favorisant étudiante afin de soutenir et d’améliorer
l’équité entre les groupes sociaux. Au Québec, la la réussite.
Charte des droits et libertés de la personne prévoit
que des programmes d’accès à l’égalité, tant en La troisième disparité se rapporte au faible
emploi que dans le domaine de l’éducation, puissent pourcentage de diplômés et de diplômées
s’instaurer pour corriger une situation vécue par observé dans le cadre des études à temps
des personnes victimes de discrimination1. La partiel4. Ce sous-groupe se compose majoritaire-
Commission des droits de la personne du Québec ment de femmes, pour qui cette situation constitue
administre le Règlement sur les programmes d’accès une seconde chance d’accéder à des études
à l’égalité permettant notamment à un établissement universitaires. En outre, ce sont davantage les
de formation de mettre en œuvre un programme étudiantes et les étudiants dont le statut socio-
d’accès à l’égalité après en avoir démontré la perti- économique est faible qui composent ce sous-
nence, en s’appuyant sur une démarche d’analyse groupe. Notons que le Québec accueille la plus
prédéterminée2. Dans ce contexte légal, quelques forte proportion d’étudiantes et d’étudiants à
temps partiel de toutes les provinces canadiennes nous avons observé des façons efficaces d’organiser
et cela, en dépit de la chute marquée des effectifs l’offre de formation à ce sous-groupe de la popu-
à temps partiel qui a été observée (plus du quart au lation étudiante; un réel dialogue s’instaure quant
baccalauréat au cours de la décennie 1988-1998). à la planification des cours offerts, à l’utilisation
de la formation à distance, etc. De telles initiatives
Peut-on qualifier les écarts observés à l’endroit indiquent la voie à suivre.
des étudiantes et des étudiants à temps partiel de
situation de discrimination systémique ? On ne Le quatrième et dernier élément de disparité
peut répondre avec certitude à cette question mais touche le financement des études2. Le Conseil
de fortes présomptions laissent croire que tel est le désire sensibiliser le ministre de l’Éducation ainsi
cas. D’abord, sachant que ce sont les femmes qui que l’ensemble du réseau universitaire aux effets
fréquentent très majoritairement l’université à temps redistributifs que peuvent avoir des modifications
partiel, en lien avec la discrimination systémique aux programmes de financement des études (bourses
socialement reconnue à l’égard des femmes, il d’études aux cycles supérieurs, programme québécois
faudrait pouvoir vérifier si elles sont davantage de prêts et bourses, financement des études par la
touchées par l’abandon. Néanmoins, il faut préciser participation aux équipes de recherche universitaire,
que la diminution importante des effectifs à temps etc.). Plus largement, les politiques sociales et
partiel a conservé intacte la proportion hommes- fiscales peuvent avoir également un effet direct
femmes à temps partiel. Finalement, on note que sur la population étudiante, modifiant à la hausse
les étudiantes et étudiants à temps partiel présentent ou à la baisse les ressources financières disponibles
une plus forte probabilité de provenir d’une famille pour les études. En outre, des modifications aux
dont le niveau socioéconomique est faible. droits de scolarité ou aux frais afférents peuvent
avoir des répercussions sur les étudiantes et
Même si on ne peut définir avec précision les étudiants les plus démunis sur le plan financier.
contours du problème, il est clair que ce sous- Dans un précédent avis3, le Conseil a examiné
groupe de la population étudiante rencontre des cette question. Il n’est cependant pas clair dans
difficultés majeures à l’université. Il importe de quelle mesure ces changements affectent la réussite
demeurer attentif à leur situation et de répondre à et la persévérance aux études.
leurs besoins en toute équité, comme le souligne
pertinemment la Politique québécoise à l’égard 11) Le Conseil recommande au ministre de
des universités1. l’Éducation :
de confier au Comité consultatif sur l’acces-
10) Le Conseil recommande aux établissements
sibilité financière aux études le mandat
universitaires :
d’établir l’incidence sur la persévérance et
de faire en sorte que les services et les la réussite à l’enseignement supérieur des
mesures d’aide à la réussite soient égale- récentes modifications aux contributions
ment offerts aux étudiantes et aux financières des étudiantes et étudiants de
étudiants à temps partiel. même que les modifications aux politiques
sociales et fiscales qui concernent les
L’université doit assumer pleinement la responsabilité étudiantes et les étudiants.
inhérente à l’admission d’étudiantes et d’étudiants
à temps partiel. Au cours de nos consultations,
- l’effet de l’opinion publique à propos de l’inser- 13) Afin de permettre un meilleur suivi de
tion socioprofessionnelle des diplômées et l’évolution de la réussite ainsi que
diplômés universitaires sur l’accès et la d’approfondir la connaissance des facteurs
persévérance aux études universitaires. qui la favorisent, le Conseil recommande
au ministre de l’Éducation ainsi qu’aux
Ces pistes de recherche témoignent de l’état somme administrateurs réunis au sein de la
toute limité de l’avancement des connaissances CREPUQ d’en arriver à :
sur cette question. Le Conseil désire souligner ici
- améliorer les méthodes de cueillette et
que les rapides mutations vécues par les générations
de traitement de l’information sur la
d’étudiantes et d’étudiants qui se succèdent néces-
population étudiante, de leur entrée à
sitent d’alimenter de manière continue les connais-
l’université jusqu’à leur sortie du
sances sur la population étudiante. C’est là le fon-
système universitaire;
dement même d’une offre de formation adaptée,
de mesures bien ciblées d’aide à la réussite et du - utiliser le code permanent pour identi-
soutien de l’engagement des étudiantes et des fier les étudiantes et étudiants afin de
étudiants à l’égard de leur formation universitaire. permettre un suivi longitudinal et
interordres en matière de réussite;
Dans le même ordre d’idées, à l’échelle nationale
- et à rendre ces bases de données acces-
ou internationale, les organismes notent que, en
sibles et exploitables par les chercheurs.
dépit des données quantitatives disponibles sur les
phénomènes de l’accès et de l’obtention du diplôme
Ces précisions méthodologiques sont de nature à
au niveau universitaire, il est difficile d’en tirer
renforcer la validité des données sur lesquelles se
une information valide et comparable, que ce soit
fonde le développement d’indicateurs d’intrants et
au sein d’un même système universitaire ou par
de résultats de même que l’analyse des conditions
rapport à la situation rencontrée dans les autres
de réussite.
pays. Le Québec n’y échappe pas. L’exemple de
l’imprécision des données sur les cheminements
des étudiantes et étudiants1 à l’université, la
Sixième orientation : Implanter un
difficulté de comparer les données entre les
établissements et, à plus forte raison, de dégager
processus continu et intégré de
le portrait d’ensemble – une donnée pourtant diagnostic-intervention-évaluation
essentielle à la compréhension du phénomène de
la réussite – illustrent bien ce type de difficulté. Le Conseil a observé que les universités mettent
En outre, il importe de mieux connaître la réalité en œuvre des moyens variés pour favoriser la
étudiante selon le sexe, le domaine d’études et le réussite des étudiantes et des étudiants, mais ces
régime d’études. moyens ne reposent pas toujours sur des diagnostics
clairement établis des besoins des étudiantes et
étudiants. Il a aussi constaté que les étudiantes et
étudiants ne sont pas toujours bien informés des
services existants ou encore que certains de leurs
besoins ne trouvent pas nécessairement réponse
dans les mesures appliquées d’aide à la réussite2.
1. Les données sur les cheminements renvoient à une
observation de type longitudinal permettant de
suivre la trajectoire de cohortes étudiantes à
l’université sur une certaine période, intégrant des
informations sur les changements de programme, le
régime d’études et la durée des études jusqu’à
l’obtention du diplôme ou l’interruption des études. 2. Voir le chapitre 4.
Améliorer les conditions de réussite des étudiantes et des étudiants 93
14) Le Conseil recommande aux comités de gner des efforts réalisés par les universités pour
programmes, en collaboration avec les ser- favoriser la réussite des étudiantes et étudiants.
vices aux étudiants et les unités d’enseigne- Ces indicateurs ne révèlent ni les aspirations ni les
ment et de recherche: stratégies empruntées par les étudiantes et étudiants
au cours de leur formation universitaire. Les
- de déterminer de manière précise les
consultations réalisées par le Conseil auprès des
besoins rencontrés par les étudiantes et
étudiantes et étudiants dépeignent avec justesse
étudiants en matière de persévérance
l’hétérogénéité des stratégies et des trajectoires
aux études dans le cadre de la gestion
qu’ils empruntent. D’ailleurs, l’exploration des
régulière des programmes d’études;
mesures réalisées dans les établissements pour
- d’intégrer l’évaluation des retombées soutenir la réussite3 en a bien montré l’étendue et
des mesures d’aide à la réussite au la variété. Les indicateurs disponibles actuelle-
processus d’évaluation périodique des ment traduisent mal ces réalités.
programmes.
Dans le cadre de la Loi modifiant la Loi sur les
Cette évaluation pourrait s’appuyer à la fois sur établissements d’enseignement de niveau
des indicateurs quantitatifs (ex. : la persévérance, universitaire les universités transmettent au
la réussite des cours, le rythme des études et le ministre de l’Éducation un ensemble de données
pourcentage de diplômés et de diplômées, etc.) et quantitatives et qualitatives sur la réussite. Parmi
sur des données qualitatives (ex. : la satisfaction les données qualitatives, règle générale, on retrouve
en ce qui touche les études, le développement principalement des informations sur l’encadrement
d’attitudes et de comportements en lien avec le – c’est là une exigence de la loi – mais aussi de
métier d’étudiant, l’intégration à l’université, manière plus générale sur les mesures d’aide à la
etc.). En outre, elle s’inscrit dans l’esprit de la réussite. Ces riches informations témoignent perti-
priorité retenue dans le cadre de la Politique nemment des efforts engagés par les universités
québécoise à l’égard des universités quant à pour soutenir et améliorer la réussite. Cependant,
l’atteinte de l’efficience des universités ainsi que la diversité des formats de ces rapports ainsi que
dans la pensée du Conseil développée dans son leur degré variable de précision permet difficilement
dernier rapport annuel sur l’évaluation institution- d’en dégager une vision d’ensemble.
nelle1.
15) Le Conseil recommande :
Dans le même ordre d’idées, le Conseil appuie les
- aux établissements universitaires :
intentions gouvernementales affirmées dans la
Politique québécoise à l’égard des universités de d’utiliser un format univoque4 pour
développer divers indicateurs d’intrants et de rendre compte des mesures d’aide à la
résultats et souligne la pertinence d’utiliser cette réussite dans le cadre du rapport déposé
information afin d’améliorer la connaissance des annuellement à la Commission de
facteurs qui influent sur la réussite2. Néanmoins, l’éducation;
si tous conviennent de l’importance d’indicateurs
- et au ministre de l’Éducation :
valides et fiables pour rendre compte de l’évolution
de la réussite, les limites de ces indicateurs font de publier annuellement une synthèse
rapidement surface quand vient le temps de témoi- des réalisations des universités quant
aux mesures mises en œuvre pour refléter dans des critères d’admission qui soient
améliorer la réussite, du moment de pertinents et équitables. Le Conseil avait pris
l’accès jusqu’à l’insertion socioprofes- position sur le fait que le diplôme d’études collégiales
sionnelle des diplômées et diplômés, en constitue une base d’information suffisante pour
faisant ressortir les différences selon le témoigner du degré de préparation aux études
cycle d’études, le sexe, le champ d’études universitaires. Le Conseil a observé dans le discours
et le régime d’études. des universités des points de vue polarisés sur cette
question se résumant à certains excès – plus
Ces données qualitatives, en plus d’offrir un portrait
d’exigences – ou à certaines lacunes – moins
d’ensemble des mesures d’aide à la réussite mises
d’exigences. Les premiers ont trait à la détermina-
en œuvre à l’échelle du réseau universitaire, peuvent
tion de conditions sans lien avec les exigences du
également devenir une source d’inspiration et de
programme (ex. : certaines pratiques de sélection
collaboration entre les établissements en matière
aux cycles supérieurs, certaines pratiques institu-
de soutien à la réussite. En outre, une telle synthèse
tionnelles fondées sur la sélection des meilleures
permettrait de boucler la boucle du processus de
candidatures). Les seconds renvoient à l’admission
reddition de comptes mis en place par la Loi
de candidatures qui, en cours de formation univer-
modifiant la Loi sur les établissements d’ensei-
sitaire, s’avèrent présenter de graves lacunes, par
gnement de niveau universitaire et de donner un
exemple sur le plan des habiletés langagières, qui
véritable sens à cette exigence légale.
compromettent sérieusement leur capacité à réussir.
La propédeutique
Septième orientation : Maintenir des
exigences élevées mais soutenir La qualité de la préparation des étudiantes et des
davantage les étudiantes et les étudiants est une question qui ne manque pas de
étudiants refaire surface dans le quotidien de la vie universitaire.
Malgré le fait que les étudiantes et étudiants détien-
La réaffirmation de la position du Conseil sur la nent les préalables nécessaires pour être admis à
démocratisation de l’enseignement universitaire et un programme, ils peuvent présenter des lacunes
la réussite du plus grand nombre doit être clairement sur divers plans1. Le Conseil est conscient de
entendue dans cette visée du maintien des exigences l’inégalité de l’état de la préparation des étudiantes et
des programmes de formation selon les buts fixés étudiants à leur arrivée au premier cycle univer-
à chacun des cycles. L’engagement et la motivation sitaire. Ces lacunes ont le plus souvent trait, au
de l’étudiante ou de l’étudiant envers sa formation premier cycle, à la méthode de travail, aux habile-
universitaire, à chacun des cycles, demeurent des tés langagières en français ou en anglais ainsi
conditions importantes de la réussite sur lesquelles qu’aux habiletés en mathématiques et en physique.
se fondent les mesures d’aide. L’absence de ces Aux cycles supérieurs, des lacunes s’observent sur
attributs constitue un obstacle sérieux à l’efficacité le plan de la préparation à entreprendre une
de toute mesure de soutien en cours de formation. formation à la recherche. L’université doit-elle
C’est à ces conditions seulement que le soutien pallier l’ensemble des lacunes diagnostiquées ?
offert tout au long du programme peut apporter Quelles sont la portée et les limites de sa respon-
l’effet souhaité. sabilité ? De quels moyens dispose-t-elle pour
Les exigences d’admission
Les exigences universitaires découlant des objectifs 1. Voir le chapitre 2, section 2.3, p. 51 et le chapitre 4,
des programmes à chacun des cycles doivent se section 4.2, p. 74.
Améliorer les conditions de réussite des étudiantes et des étudiants 95
Des pratiques équitables d’évaluation qui constitueront pour ces derniers des défis à
leur véritable mesure, offrant un milieu intel-
Le Conseil insiste sur l’utilisation de pratiques lectuel riche et stimulant;
d’évaluation des apprentissages qui soient cohé-
- au soutien des étudiantes et étudiants dans
rentes avec les visées de la formation et qui reflètent
leur démarche d’apprentissage en tentant de
de manière équitable le niveau d’apprentissage
pallier certaines lacunes pour amener le plus
réalisé par les étudiantes et étudiants en fonction
grand nombre d’entre eux vers des apprentis-
des objectifs fixés dans les cours1.
sages qui répondent aux standards de réussite;
18) Le Conseil recommande au personnel - à la participation aux innovations pédagogi-
enseignant : ques dans leur champ de recherche, d’études
ou de pratique professionnelle;
- d’adopter des pratiques d’évaluation
qui reflètent le degré d’atteinte des - à la prise de conscience du rôle de modèle que
objectifs visés – l’interprétation crité- chacun d’entre eux représente pour les étudiantes
rielle en est un exemple; et étudiants en quête d’une identité profes-
sionnelle;
- quel que soit le mode d’évaluation
utilisé, d’éviter des pratiques de norma- - au soin porté à la qualité de la relation professeur-
lisation des résultats conduisant à des étudiant;
échecs même en présence d’une atteinte
- à la diffusion des informations sur les mesures
suffisante des objectifs d’apprentissage.
d’aide à la réussite qui existent au sein de
l’établissement en fonction des besoins mani-
La vie pédagogique
festés par les étudiantes et étudiants.
L’amélioration de la réussite se fonde inéluctablement
sur la pédagogie. Le Conseil note les efforts déployés 19) Considérant l’importance fondamentale de
par les universités pour rehausser les compétences la dimension pédagogique dans l’améliora-
pédagogiques du personnel enseignant. Les admi- tion de la réussite, engageant au premier
nistrateurs universitaires y contribuent notamment chef la responsabilité du corps professoral,
par la vigie exercée quant à la qualité des programmes le Conseil recommande au personnel ensei-
de formation, à la qualité pédagogique des ensei- gnant, professeurs et chargés de cours :
gnements offerts et à la qualité de l’encadrement - de soigner la dimension pédagogique de
des étudiantes et des étudiants. En outre, les profes- leurs interventions.
sionnels et le personnel de soutien apportent une
contribution précieuse sur ce plan. Le soin porté à la dimension pédagogique repose
sur un souci de formation et de perfectionnement
Tout le personnel enseignant – professeurs et pédagogiques de l’ensemble du personnel enseignant
chargés de cours – contribue à définir la qualité de des universités. La relation professeur-étudiant
l’environnement pédagogique. Il assume diverses demeure au cœur de la dimension pédagogique,
responsabilités à cet égard quant : revêtant une grande importance à la fois pour les
- au maintien d’attentes élevées relativement étudiantes et étudiants et pour le personnel ensei-
aux apprentissages des étudiantes et étudiants gnant soucieux de favoriser l’apprentissage. En
outre, le personnel de soutien, le personnel profes-
sionnel et les administrateurs contribuent à la
définition de l’environnement pédagogique selon
leurs responsabilités respectives.
1. Voir le chapitre 3, section 3.5, p. 66 et chapitre 4,
section 4.2, p. 75.
Améliorer les conditions de réussite des étudiantes et des étudiants 97
Le Conseil tient à réaffirmer la responsabilité tout ceux et celles qui abandonnent. La motivation et
aussi importante qu’assument l’étudiante et l’étu- l’engagement envers les études sont des condi-
diant à cet égard et qui tient à leur engagement et tions de réussite importantes qui relèvent initiale-
à leur motivation vis-à-vis de leur projet de forma- ment de l’étudiante et de l’étudiant et qui doivent
tion. Le corpus des travaux a bien montré que, de être cultivées et soutenues dans un environnement
manière générale, cette motivation est grande chez pédagogique stimulant.
eux au début des études et qu’elle fait défaut à
Conclusion
L’amélioration des conditions de réussite des bilan des mesures d’aide à la réussite mises en
étudiantes et des étudiants repose inéluctablement œuvre dans les établissements pour soutenir la
sur une compréhension profonde des facteurs en réussite. Bien que parcellaire, le portrait qui en est
jeu. Des interventions parcellaires ou des mesures présenté au chapitre 4 offre une vision d’ensemble
uniques appliquées même de manière rigoureuse des efforts importants des universités pour amélio-
ne peuvent suffire à lever les obstacles et les seuils rer la réussite. La complexité du phénomène de la
critiques que rencontrent inévitablement les réussite n’a d’égal que la créativité des efforts
étudiantes et les étudiants à un moment ou l’autre déployés dans le réseau universitaire québécois
de leurs études universitaires. Les mesures d’aide pour soutenir quotidiennement les étudiantes et les
à la réussite appliquées à l’échelle des unités étudiants à chacun des moments clés de leur
d’enseignement ou de recherche, de l’établisse- trajectoire.
ment, du réseau universitaire ou de l’État doivent
témoigner de cette compréhension des facteurs En matière d’amélioration des conditions de réussite
multiples qui influencent la réussite. des étudiantes et étudiants à l’université, « pédagogie »
et « engagement » des étudiantes et des étudiants
Dans le cadre du présent avis, le Conseil a choisi envers leur projet d’études sont les maîtres mots.
de traiter la réussite sous l’angle du projet de Le Conseil n’insistera jamais assez sur l’importance
formation de l’étudiante ou de l’étudiant. Ce choix de la dimension pédagogique pour soutenir la
l’a conduit à explorer les nouvelles réalités de la motivation et l’intérêt des étudiantes et étudiants,
population étudiante actuelle, en comparaison leur permettre de progresser dans leur projet d’études
avec celle des générations précédentes. Néanmoins, en franchissant avec succès les obstacles et les
reconnaître le nouveau rapport aux études qu’éta- seuils critiques qu’ils y rencontrent. Il reconnaît
blissent les jeunes adultes ou être sensible aux comme étant tout aussi important l’engagement
éléments contextuels qui les affectent (ex. : les des étudiantes et étudiants envers leurs études,
changements sociaux qui touchent la jeunesse, les sachant pertinemment que les changements que
fluctuations du marché du travail, etc.) ne doit pas vivent les jeunes adultes redéfinissent un nouveau
être confondu avec une abdication par rapport aux contexte dont il faut tenir compte tout en demeurant
exigences propres à une formation de niveau ferme sur le plan des exigences universitaires.
supérieur. Le Conseil propose plutôt de considérer
la période de la jeunesse comme un moment privi- Les travaux qui ont conduit à l’élaboration de cet
légié d’engagement personnel dans les études. avis ont permis d’identifier plusieurs facteurs en
Pour ce faire, l’État et les universités doivent cause dans la réussite des étudiantes et étudiants à
établir de manière explicite leurs attentes envers l’université. Ils ont aussi contribué à approfondir
les jeunes adultes et leur offrir le soutien requis la compréhension de la réalité des étudiantes et
pour qu'ils puissent y répondre. étudiants en cernant davantage le sens qu’ils
accordent à la réussite, les stratégies qu’ils élabo-
Par ailleurs, le choix d’orientations à privilégier rent et qu’ils réalisent à cette fin, les compromis
pour améliorer la réussite, que ce soit à l’échelle auxquels ils consentent en cours d’études, les
des unités d’enseignement ou de recherche, de soutiens auxquels ils ont recours et ceux dont ils
l’établissement ou de tout le réseau universitaire ignorent l’existence ainsi que les aspirations qui
québécois, doit s’appuyer sur une identification les animent. Cet apport important a néanmoins
juste des besoins des étudiantes et des étudiants pour limite, dans l’état actuel des connaissances,
ainsi que sur l’évaluation de l’efficacité des l’impossibilité d’évaluer l’importance relative de
mesures utilisées par le passé. Là-dessus, le chacun des facteurs repérés sur la réussite. En
Conseil demande au milieu universitaire d’accen- effet, s’il apparaît clairement que l’origine sociale
tuer les efforts réalisés en ce sens. En outre, il constitue un facteur prépondérant de réussite par
convient également de dresser régulièrement le rapport au sexe, qu’en est-il du poids respectif des
100 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
facteurs tels que la motivation et l’engagement l’Éducation et le milieu universitaire quant aux
des étudiantes et étudiants, la qualité de l’environ- conditions à réunir pour donner suite à l’engage-
nement pédagogique, la diminution des ressources ment pris lors du Sommet du Québec et de la
financières ou la perte de l’expertise professorale jeunesse en février dernier sur la réussite scolaire
en raison des départs anticipés à la retraite ? Cette et la qualification des jeunes. L’analyse et la
analyse doit être approfondie afin d’éclairer le synthèse des données qui sont présentées dans cet
choix d’interventions efficaces susceptibles avis ainsi que les recommandations arrivent à
d’améliorer la réussite par un soutien adéquat des point nommé pour inspirer l’élaboration d’un plan
étudiantes et étudiants dans leur projet d’études. de réussite précisant les obstacles à lever, les
objectifs à établir et les mesures à mettre en œuvre.
Finalement, par cet avis, le Conseil souhaite
contribuer à éclairer à la fois le ministre de
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TABLEAU 1
Évolution du taux de placement des diplômées et diplômés
disponibles pour l'emploi, 1987-1997 (en %)
Variation
1987 1989 1992 1994 1997
1997/1987*
Tous types d'emplois
Baccalauréat F 89,8 90,8 92,0 90,0 91,2 1,4
H 93,4 93,2 89,9 86,6 90,5 -2,9
T 91,7 91,9 91,1 88,6 90,9 -0,8
Maîtrise F 93,7 94,0 93,7 94,1 93,3 -0,4
H 95,9 96,1 93,9 92,4 90,4 -5,5
T 94,9 95,1 93,8 93,2 91,9 -3,0
Doctorat F 97,8 97,3 98,5 0,7
H 98,2 97,2 95,0 -3,2
T 98,1 97,2 96,0 -2,1
Emploi lié au domaine d'études principal
Baccalauréat F 70,7 71,6 74,1 69,4 67,6 -3,1
H 74,3 74,7 73,4 65,5 70,1 -4,2
T 72,5 73,1 73,8 67,8 68,6 -3,9
Maîtrise F 81,4 81,1 83,5 82,0 78,2 -3,2
H 79,8 82,5 79,9 80,4 75,1 -4,7
T 80,5 81,8 81,7 81,2 76,7 -3,8
Doctorat F 94,2 89,7 90,4 -3,8
H 92,0 92,5 85,4 -6,6
T 92,7 91,6 86,8 -5,9
Emploi à temps plein et lié au domaine d'études principal
Baccalauréat F 60,9 62,5 62,9 55,4 51,4 -9,5
H 71,9 71,6 68,8 58,9 62,5 -9,4
T 66,4 66,8 65,5 56,8 55,9 -10,5
Maîtrise F 67,8 67,7 70,6 66,8 64,5 -3,3
H 75,5 80,1 76,2 75,9 69,1 -6,4
T 72,1 74,4 73,4 71,3 66,7 -5,4
Doctorat F 81,3 76,5 74,4 -6,9
H 89,1 88,0 77,8 -11,3
T 86,6 84,3 76,8 -9,8
Emploi lié au domaine d'études principal et permanent
Baccalauréat F 48,5 51,0 46,9 40,3 34,8 -13,7
H 60,2 60,5 54,4 45,8 48,5 -11,7
T 54,4 55,5 50,2 42,6 40,4 -14,0
Maîtrise F 55,1 54,1 54,3 51,1 46,8 -8,3
H 64,8 67,0 63,3 59,0 53,9 -10,9
T 60,5 61,1 58,8 55,0 50,2 -10,3
Doctorat F 55,4 55,9 43,6 -11,8
H 58,7 51,0 45,4 -13,3
T 57,6 52,6 44,9 -12,7
Emploi lié au domaine d'études principal, permanent et à temps plein
Baccalauréat F 45,7 47,9 43,2 35,4 31,0 -14,7
H 59,2 59,9 53,3 43,9 46,9 -12,3
T 52,5 53,6 47,7 38,9 37,5 -15,0
Maîtrise F 50,4 49,7 49,8 44,7 43,4 -7,0
H 63,7 66,6 61,7 57,9 52,9 -10,8
T 57,8 58,9 55,8 51,3 48,0 -9,8
Doctorat F 53,2 51,6 39,3 -13,9
H 58,7 50,7 44,5 -14,2
T 56,9 51,0 43,0 -13,9
* Pour le doctorat, l’évolution du taux de placement concerne l’année 1994 en regard de 1989.
Sources : Marc Audet, Qu'advient-il des diplômés des universités ? ; La promotion de 1995, p. 9 à 12;
Les Titulaires d'un doctorat : le portrait des études et de l'insertion professionnelle de trois promotions de diplômées et de diplômés, p. 27.
GRAPHIQUE 1
Évolution de la part des revenus de sources publiques provinciales
sur le revenu total des universités, 1987-1988 à 1997-1998
75
70
65
60
Pourcentage
55
50
45
40
35
1987-1988 1988-1989 1989-1990 1990-1991 1991-1992 1992-1993 1993-1994 1994-1995 1995-1996 1996-1997 1997-1998
1987- 1988- 1989- 1990- 1991- 1992- 1993- 1994- 1995- 1996- 1997-
1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998
Fonds de fonctionnement gén. par étudiant ($) 8 805 9 118 9 624 10 155 10 496 10 827 10 626 10 862 11 266 10 978 11 434
Fonds de fonctionnement gén. par étudiant ($) 8 787 9 177 9 771 10 325 10 736 11 004 11 017 11 181 11 363 11 187 11 700
Sources : Statistique Canada, Statistiques financières des universités et des collèges, les éditions de 1989 à 1999; L'Éducation au Canada, revue statistique pour 1990-91, p.72 et 74;
L'Éducation au Canada, revue statistique pour 1992-93, p. 54 et 56; Revue trimestrielle de l'éducation, 1995, p.66; Revue trimestrielle de l'éducation, automne 1995, p.90; Site
Internet: statcan.ca/francais/Pgdb/People/educat_f.htm, CANSIM, tableaux de recoupement 00580701,00580702; Jacques La Haye, Effectif étudiant des universités
québécoises en équivalence temps plein (EETP) de 1996-1997 à 1997-1998, p. 136. Calculs du Conseil.
TABLEAU 3
Distribution des étudiantes et étudiants selon le domaine et le cycle d’études,
automnes 1988 et 1998, en %
1er cycle 2e cycle 3e cycle
DOMAINE D'ÉTUDES
1988 1998* 1988 1998* 1988 1998*
Femmes Hommes Femmes Hommes Femmes Hommes Femmes Hommes Femmes Hommes Femmes Hommes
Sciences de la santé 8,3 4,0 9,0 3,7 7,6 4,0 8,4 4,7 10,8 6,9 12,4 10,6
Sciences pures 3,5 5,9 4,3 5,6 4,4 7,7 4,4 6,1 10,8 19,8 10,7 19,1
Sciences appliquées 4,3 19,5 6,5 25,9 5,2 17,4 6,4 19,3 6,0 23,6 8,1 22,6
Sciences humaines 17,9 14,8 18,7 14,6 23,8 17,9 22,0 14,8 38,7 28,8 38,3 27,1
Lettres 5,3 2,7 7,0 4,0 7,5 3,7 6,2 3,1 14,4 6,9 10,9 5,2
Droit 2,2 2,2 2,2 2,2 2,5 2,4 2,9 2,7 0,8 0,8 1,3 1,1
Sciences de
13,0 7,1 14,6 6,7 14,5 5,2 11,6 3,8 11,0 6,2 9,5 4,4
l'éducation
Sciences de
23,5 26,1 21,2 21,4 22,8 32,5 23,2 31,8 3,7 3,6 4,3 6,3
l'administration
Arts 3,8 2,9 4,1 3,6 4,1 2,5 2,8 1,9 1,3 1,1 2,5 1,5
Plurisectoriel 2,6 2,2 2,2 1,7 1,2 1,0 2,1 1,9 0,9 0,7 0,9 1,4
Non applicable 15,6 12,8 10,4 10,6 6,6 5,7 9,9 9,9 1,7 1,6 1,1 0,8
Total % 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100
Total N 118 539 86 519 108 808 74 356 12 874 13 875 16 971 15 192 2 202 4 084 4 011 4 914
* Données provisoires
Source : Ministère de l'Éducation, Enseignement supérieur, DERU, SA, Jacques Lavigne, liste 206H. Calculs du Conseil.
Notes méthodologiques :
A) Le premier cycle comprend les effectifs inscrits à des programmes conduisant à un baccalauréat ou au certificat. Le deuxième cycle regroupe les effectifs inscrits à un programme de maîtrise, certificat ou
diplôme. Le troisième cycle englobe les effectifs inscrits à un programme conduisant à un doctorat ou un diplôme.
B) La catégorie « plurisectoriel » dénombre les effectifs inscrits à des programmes multidisciplinaires (ex. : baccalauréat en science, technologie et société, baccalauréat bidisciplinaire en mathématique et
économique, etc.). La catégorie « non applicable » regroupe les effectifs qui sont étudiants libres, qui sont dans une situation de propédeutique ou qui sont inscrits à des microprogrammes tels qu'une mineure
personnalisée, qu’on ne peut classer sans équivoque dans un domaine d’études.
C) Ces données ne tiennent pas compte des dernières révisions effectuées en janvier 2000 concernant le classement des programmes dans les domaines d'études.
TABLEAU 4
Nombre de DEC décernés en formation préuniversitaire dans les établissements d'enseignement collégial publics et privés,
selon le domaine d'études et le sexe, de 1988 à 1997
Variation
DOMAINE D'ÉTUDES 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997
1997/1988 (%)
Sciences H 4 625 4 387 4 098 4 153 3 947 4 168 4 344 4 071 3 864 4 124 -10,8
F 3 826 3 627 3 551 3 478 3 581 3 770 4 039 3 809 3 772 3 874 1,3
T 8 451 8 014 7 649 7 631 7 528 7 938 8 383 7 880 7 636 7 998 -5,4
Sciences
H 5 899 5 923 6 122 6 090 5 911 5 351 4 987 5 202 4 629 4 739 -19,7
humaines
F 8 426 8 885 9 143 9 292 9 489 8 769 9 243 8 880 8 190 8 358 -0,8
T 14 325 14 808 15 265 15 382 15 400 14 120 14 230 14 082 12 819 13 097 -8,6
Arts H 347 370 404 428 480 563 686 724 659 726 109,2
F 656 722 774 782 892 1 014 1 104 1 267 1 204 1 336 103,7
T 1 003 1 092 1 178 1 210 1 372 1 577 1 790 1 991 1 863 2 062 105,6
Lettres H 195 166 183 191 217 272 307 327 355 361 85,1
F 815 751 689 830 897 1 064 1 122 1 239 1 195 1 482 81,8
T 1 010 917 872 1 021 1 114 1 336 1 429 1 566 1 550 1 843 82,5
Total H 11 066 10 846 10 807 10 862 10 555 10 354 10 324 10 324 9 639 10 109 -8,6
F 13 723 13 985 14 157 14 382 14 859 14 617 15 509 15 196 14 656 15 521 13,1
T 24 789 24 831 24 964 25 244 25 414 24 971 25 833 25 520 24 295 25 630 3,4
Sources : Système de la sanction des études au collégial (SSEC); Ministère de l'Éducation, Statistiques de l'éducation. Enseignement primaire, secondaire, collégial et universitaire, éditions 1994 à 1999.
DEC : Diplôme d'études collégiales.
Dans les éditions antérieures à celle de 1998, le domaine des « sciences » est identifié comme celui des « sciences de la nature » alors que les domaines « multiples » et « arts et lettres » sont absents.
TABLEAU 5
Population de 15 ans et plus selon le plus haut niveau de scolarité atteint, 1996
Bas-Saint-Laurent (01) 163 510 2,9% 8 790 5,4% 12 355 7,6% 21 145 12,9%
Saguenay - Lac-Saint-Jean (02) 224 875 4,0% 13 565 6,0% 18 340 8,2% 31 905 14,2%
Québec (03) 517 925 9,1% 41 235 8,0% 78 085 15,1% 119 320 23,0%
Mauricie (04) 210 450 3,7% 13 440 6,4% 17 875 8,5% 31 315 14,9%
Estrie (05) 218 960 3,9% 14 100 6,4% 23 605 10,8% 37 705 17,2%
Communauté-Urbaine-de-Montréal (06) 1 458 305 25,7% 163 335 11,2% 269 950 18,5% 433 285 29,7%
Outaouais (07) 239 630 4,2% 19 970 8,3% 31 840 13,3% 51 810 21,6%
Abitibi-Témiscamingue (08) 118 360 2,1% 6 705 5,7% 8 570 7,2% 15 275 12,9%
Côte-Nord (09) 80 830 1,4% 3 625 4,5% 5 155 6,4% 8 780 10,9%
Nord-du-Québec (10) 26 555 0,5% 1 065 4,0% 1 785 6,7% 2 850 10,7%
Gaspésie - Îles-de-la-Madeleine (11) 84 470 1,5% 3 820 4,5% 4 860 5,8% 8 680 10,3%
Chaudière-Appalaches (12) 297 265 5,2% 15 105 5,1% 24 070 8,1% 39 175 13,2%
Laval (13) 262 150 4,6% 24 405 9,3% 31 005 11,8% 55 410 21,1%
Lanaudière (14) 286 880 5,1% 16 735 5,8% 19 330 6,7% 36 065 12,6%
Laurentides (15) 333 045 5,9% 23 320 7,0% 28 130 8,4% 51 450 15,4%
Montérégie (16) 983 540 17,3% 75 865 7,7% 106 280 10,8% 182 145 18,5%
Centre-du-Québec (17) 166 690 2,9% 8 020 4,8% 11 100 6,7% 19 120 11,5%
Ensemble du Québec 5 673 440 100,0% 453 100 8,0% 692 335 12,2% 1 145 435 20,2%
Source : Les données présentées dans ce tableau ont été fournies par l'Institut de la statistique du Québec à la demande du Conseil.
La population par région et les proportions ont été calculées par le Conseil.
TABLEAU 6
Évolution des effectifs étudiants selon le cycle, le régime d'études et le sexe, aux trimestres d'automne 1988 à 1998,
dans les universités québécoises
Variation
PREMIER CYCLE 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998*
1998/1988 (%)
Temps plein F N 52 111 53 949 55 972 58 860 61 233 62 683 62 518 61 879 61 209 60 949 62 126 19,2
% 52 53 53 54 54 55 56 56 56 56 57
H N 48 143 48 544 48 981 50 229 51 595 51 700 49 976 48 538 47 982 47 065 46 398 -3,6
% 48 47 47 46 46 45 44 44 44 44 43
T N 100 254 102 493 104 953 109 089 112 828 114 383 112 494 110 417 109 191 108 014 108 524 8,2
Temps partiel F N 66 428 67 318 66 103 64 209 64 693 60 673 55 720 52 586 49 168 47 257 46 682 -29,7
% 63 64 64 64 63 63 63 63 63 63 63
H N 38 376 38 034 36 876 36 531 37 339 35 706 33 213 31 197 29 212 28 107 27 958 -27,2
% 37 36 36 36 37 37 37 37 37 37 37
T N 104 804 105 352 102 979 100 740 102 032 96 379 88 933 83 783 78 380 75 364 74 640 -28,8
Variation
DEUXIÈME CYCLE 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998*
1998/1988 (%)
Temps plein F N 5 473 5 659 5 588 5 985 6 314 6 580 6 796 6 640 6 843 6 915 7 832 43,1
% 46 46 46 47 47 47 49 50 50 51 52
H N 6 360 6 525 6 433 6 634 7 072 7 277 7 021 6 667 6 736 6 662 7 285 14,5
% 54 54 54 53 53 53 51 50 50 49 48
T N 11 833 12 184 12 021 12 619 13 386 13 857 13 817 13 307 13 579 13 577 15 117 27,8
Temps partiel F N 7 401 7 740 8 132 8 431 9 113 9 205 9 424 9 852 9 520 9 851 9 139 23,5
% 50 50 51 51 51 52 53 53 53 54 54
H N 7 515 7 638 7 823 8 178 8 625 8 449 8 474 8 715 8 569 8 454 7 907 5,2
% 50 50 49 49 49 48 47 47 47 46 46
T N 14 916 15 378 15 955 16 609 17 738 17 654 17 898 18 567 18 089 18 305 17 046 14,3
Variation
TROISIÈME CYCLE 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998*
1998/1988 (%)
Temps plein F N 1 563 1 729 1 713 1 852 1 983 2 222 2 349 2 465 2 528 2 840 3 419 118,8
% 34 35 34 34 34 36 37 38 39 42 44
H N 3 068 3 245 3 378 3 551 3 774 3 949 4 029 4 047 3 938 3 935 4 322 40,9
% 66 65 66 66 66 64 63 62 61 58 56
T N 4 631 4 974 5 091 5 403 5 757 6 171 6 378 6 512 6 466 6 775 7 741 67,1
Temps partiel F N 639 743 889 978 1 097 1 176 1 234 1 331 1 369 1 225 592 -7,4
% 39 40 41 42 44 45 45 47 48 48 50
H N 1 016 1 129 1 254 1 376 1 388 1 463 1 485 1 503 1 460 1 332 592 -41,7
% 61 60 59 58 56 55 55 53 52 52 50
T N 1 655 1 872 2 143 2 354 2 485 2 639 2 719 2 834 2 829 2 557 1 184 -28,5
* Données provisoires
Source : Ministère de l'Éducation, Enseignement supérieur, DERU, SA, Jacques Lavigne, Système RECU, liste 2591.
TABLEAU 7
Pourcentage des diplômées et diplômés chez les sortants des programmes conduisant à un grade
selon le sexe et l'année de la dernière inscription, 1987-1988 à 1996-1997
Baccalauréat
Sexe masculin 55,5 59,7 57,7 59,5 61,7 61,1
Sexe féminin 56,2 63,1 63,9 66,5 69,0 69,1
Ensemble 55,9 61,5 61,1 63,4 65,9 65,7
Maîtrise
Sexe masculin 57,0 64,4 64,4 63,0 63,7 64,6
Sexe féminin 55,0 64,5 67,0 66,2 67,5 66,2
Ensemble 56,1 64,5 65,7 64,6 65,6 65,4
Doctorat
Sexe masculin 53,1 55,5 57,3 57,8 60,9 60,2
Sexe féminin 40,3 46,9 50,1 49,1 48,9 54,8
Ensemble 48,7 52,4 54,9 54,5 56,5 58,3
e : Estimations
Sciences pures 57,6 64,2 6,6 Sciences pures 75,4 80,1 4,7 Sciences pures 73,0 72,9 (0,1)
Sciences
63,0 65,7 2,7 Sciences appliquées 63,5 62,2 (1,3) Sciences appliquées 57,9 61,8 3,9
appliquées
Sciences humaines 52,6 63,4 10,8 Sciences humaines 57,4 63,6 6,2 Sciences humaines 36,5 43,7 7,2
Lettres 46,7 56,7 10,0 Lettres 46,8 56,4 9,6 Lettres 38,7 39,7 1,0
Total 55,9 65,3 9,4 Total 56,1 66,0 9,9 Total 48,7 53,4 4,7
Source : Ministère de l'Éducation, Direction des statistiques et des études quantitatives, Liste UH9J423G, 1999-10-26.
L'abréviation « ns » indique que le nombre de sortants est non significatif, c’est-à-dire inférieur à 25.
TABLEAU 9
TABLEAU 10
Taux d'obtention du doctorat chez la population
Évaluation de l'atteinte des objectifs de scolarisation proposés par le Conseil
québécoise, selon le sexe (en %)
Objectif CSE
1986 1991 1995 1996 1997 1989 1992 1995 1997 1998
2000
Le diplôme
Baccalauréat 17,2% 21,3% 23,9% 24,0% 22,9% 25%
(moins de 30 ans)
Sources : Les données sur l'accès proviennent de: Ministère de l'Éducation, op. cit., p. 63;
Les calculs sur le taux de délivrance des diplômes sont réalisés par André Lespérance, MEQ, DSEQ, à
partir des données suivantes :
Estimations de la population selon le sexe et l'âge, 1er juillet -Statistique Canada Jui_2000.wb3
29-10-99;
Premiers baccalauréats - Listes UH7J15A, 4 octobre 1997, UH9J515A du 16-10-99 pour les années
1996 à 1998;
Premières maîtrises - Listes UH7J515A, 4 octobre 1997, UH9J515A du 16-10-99 pour les années
1996 à1998;
Premiers doctorats - Listes UH7J515A, 4 octobre 1997, UH9J515A du 16-10-99 pour les années
1996 à1998.
Les objectifs de scolarisation du Conseil sont extraits de : L'Enseignement supérieur : pour une entrée
réussie dans le XXIe siècle, p. 90.
Annexe 2
1. Les événements cités sont extraits d’une recherche (1920-1965); Bernard Schiele et al., Quand la science
de Jean Lamarre, Conseil supérieur de l’éducation, se fait culture : la culture scientifique dans le monde :
à partir des sources suivantes : Luc Chartrand et actes I; Colloque du Mont Gabriel et Georges-Henri
al., Histoire des sciences au Québec; Raymond Lévesque, Continuité et rupture : les sciences sociales
Duchesne, La Science et le pouvoir au Québec au Québec.
120 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
1963- Création de la Conférence des recteurs et 1974- Fusion du collège Loyola et de l’Univer-
des principaux des universités du Québec sité Sir George Williams pour former
(CREPUQ) l’Université Concordia
1964- Création du ministère de l’Éducation et du 1977- Loi sur le financement des programmes
Conseil supérieur de l’éducation établis (FPE) – Transferts fiscaux aux
provinces pour l’enseignement post-
Création du Conseil de recherche médicale secondaire et la santé
du Québec qui deviendra, en 1975, le
Conseil de recherche en santé du Québec 1978- Création du Conseil de recherches en
(CRSQ) puis, en 1981-1982, le Fonds de sciences humaines du Canada (CRSH)
recherche en santé du Québec (FRSQ)
Création du Conseil de recherches en
1966- Loi des cégeps et Loi des prêts et bourses sciences naturelles et en génie (CRSNG)
1968- Loi créant l’Université du Québec et 1990- Création du programme fédéral Réseaux
implantation progressive de ses diverses de centres d’excellence administré par le
constituantes CRSNG
Ouverture des premières polyvalentes et 1993- Abolition du Conseil des universités et
des premiers cégeps création de la Commission de l’enseigne-
ment et de la recherche universitaires au
Inauguration des subventions de rattrapage Conseil supérieur de l’éducation
qui deviendront, en 1970, le Programme de
formation des chercheurs et action concer- 1996- Loi sur les transferts canadiens en matière
tée (FCAC), ensuite le Fonds FCAC en 1981 de santé et de programmes sociaux
et le Fonds pour la formation de chercheurs
et l’aide à la recherche (FCAR), en 1983 1998- Mise sur pied de la Fondation canadienne
pour l’innovation
Création du Conseil des universités
2000- Programme fédéral des Bourses du
1969- Création du Conseil de recherches médi- millénaire
cales du Canada
Adoption de la première politique
Création de l’Institut national de la québécoise à l’égard des universités
recherche scientifique (INRS)
Annexe 3
La consultation réalisée auprès des étudiantes et par Brigitte Gemme, Josianne Lalonde et François
étudiants des universités québécoises vise à explorer Taillefer, étudiants stagiaires, dans le cadre du
la condition étudiante sous l’angle particulier de la programme Science, technologie et société à
réussite des études. Deux équipes de recherche ont l’UQAM, sous la supervision de Pierre Doray,
réalisé des entrevues auprès de groupes homogènes professeur à l’UQAM, et de France Picard de la
d’étudiantes et étudiants inscrits à un même pro- permanence du Conseil.
gramme d’études au cours du trimestre d’hiver
1999. Tout en respectant leur spécificité propre, Ainsi, 15 groupes totalisant 87 étudiantes et
qui est décrite ultérieurement, ces deux équipes de étudiants issus de programmes différents apparte-
recherche abordent certains points communs, dont nant à divers domaines d’études et provenant de 7
les motifs pour entreprendre des études universi- universités en milieu urbain et en région ont
taires et les stratégies développées par les étudiantes participé aux deux volets de cette consultation.
et étudiants en cours d’études en lien avec leurs Les pages suivantes apportent des précisions sur
projets d’avenir. les éléments méthodologiques propres à chacun
des deux volets.
La technique de cueillette de données qui a été
retenue – l’entrevue de groupe – est une méthode Volet 1
de recherche qualitative d’inspiration ethnologique
qui se prête bien à une enquête de type exploratoire
Objectif spécifique
visant à obtenir des données en profondeur sur les
thèmes retenus. Elle consiste à rencontrer un nombre
Recueillir des données sur le rapport aux études,
qualitativement représentatif de groupes, dont la
la vision de la réussite et la perception de l’effica-
composition varie généralement entre 6 et 12
cité des mesures d’aide à la réussite mises en œuvre
participants, pour y tenir une discussion ouverte
dans les universités auprès des étudiantes et étu-
mais semi-dirigée sur la base d’un schéma
diants des trois cycles universitaires et provenant
d’entrevue préétabli.
de divers domaines d’études.
Dans ce cadre général, chacune des équipes de
Thèmes explorés par la consultation
recherche poursuit des buts spécifiques. Ainsi, le
premier volet de la consultation vise à obtenir - le rapport aux études;
des informations sur le rapport aux études, la - la vision de la réussite à l’université;
vision de la réussite et la perception de l’efficacité - la perception de l’efficacité des mesures ou
des mesures d’aide à la réussite auprès d’étudiantes des ressources déployées dans les universités
et étudiants des trois cycles. Ce premier volet a tout au long du programme.
été réalisé à la permanence du Conseil par Francine
D’Ortun et Caroline Hamel. Le deuxième volet Critères ayant présidé à l’élaboration de
traite de la situation des étudiantes et étudiants des l’échantillon
domaines scientifiques et technologiques (les
sciences pures, les sciences appliquées et les - le domaine d’études;
sciences de la santé) au premier cycle. Les données - le cycle d’études;
recueillies visent à vérifier l’existence d’une relation - le sexe;
entre les perspectives d’avenir, telles que perçues - le régime d’études;
par les étudiantes et étudiants, les réelles perspec- - le type d’établissement (taille, situation
tives d’emploi pour les diplômées et diplômés et géographique, langue d’enseignement).
la persévérance aux études. Ce volet a été réalisé
122 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
Premier cycle
Sciences de l’administration Baccalauréat en administration à temps partiel 4 4
Baccalauréat en linguistique 1 3
et 8
Lettres
Baccalauréat en enseignement de l’anglais, 2 2
langue seconde
Sciences de la santé Doctorat en médecine 3 5 8
Sciences de l’éducation Baccalauréat en sciences de l’orientation 2 2 4
Arts Baccalauréat en danse 2 2
Droit Baccalauréat en droit 1 4 5
Total 9 22 31
Cycles supérieurs
Maîtrise avec mémoire en économique 4 1
et 7
Sciences humaines et sociales
Doctorat en économique 2
Total 18 10 28
Total 7 21 28
* Ce programme, généralement classé dans les sciences pures, a été considéré comme appartenant au domaine des
sciences de la santé compte tenu de ses relations étroites avec le programme de médecine.
124 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
Au total, 52 personnes occupant des postes diver- Le schéma d’entrevue utilisé pour les rencontres,
sifiés au sein de 14 établissements universitaires d’une durée approximative de 90 minutes, a été
francophones et anglophones ont participé aux élaboré à partir des éléments suivants :
entretiens individuels ou de groupe.
Ÿ Le contexte dans lequel se sont développées
Thèmes explorés lors de l’entretien les interventions
- les interventions mises en œuvre (le type - le profil des étudiantes et étudiants visés;
d’intervention, l’étape de la réussite concer- - les caractéristiques du domaine d’études
née et l’étendue de la population étudiante ou du programme (les critères d’admission,
visée par l’intervention); l’existence d’un ordre professionnel et les
perspectives d’emploi);
- la réflexion sur les interventions (la probléma- - les difficultés rencontrées en matière de
tique et le contexte dans lequel l’intervention réussite (le recrutement, la persévérance,
a été développée); les échecs, la durée des études, les chan-
- les retombées (l’évaluation de l’intervention, gements de programme, etc.);
son rayonnement et les perspectives nouvelles
qu’elle engendre);
1. Voir l’annexe 5 présentant la typologie des mesures.
126 Réussir un projet d'études universitaires : des conditions à réunir
Ÿ La représentation de la réussite et de la
responsabilité à cet égard
- la définition de la réussite;
- la façon dont l’interlocuteur y situe son
rôle;
- la façon dont l’interlocuteur présente le
rôle de l’étudiante ou l’étudiant;
- la façon dont l’interlocuteur définit le rôle
de l’établissement.
Annexe 5
Janet G. Donald
Professeure Johanne Bujold
Département des sciences de l'éducation Agente de recherche
Centre for University Teaching and Learning Direction du recensement étudiant et
Université McGill de la recherche institutionnelle
Université du Québec
Michel Guay
Professeur Luc Dupuy
Département d'Histoire Agent de recherche et de planification
Université du Québec à Montréal Services à la vie étudiante
Université du Québec à Montréal
Louise Langevin
Professeure Danielle Pageau
Département des sciences de l'éducation Agente de recherche
Université du Québec à Montréal Direction du recensement étudiant et
de la recherche institutionnelle
Johanne Lavoie Université du Québec
Responsable des stages
Décanat des études de premier cycle Gille Simard
Université du Québec à Chicoutimi Professeur en gestion des ressources humaines
Département de l'organisation
Joseph Morose et ressources humaines
Professeur Université du Québec à Montréal
Département des sciences de l'éducation
Université du Québec à Chicoutimi
Commission de l'enseignement et de la recherche
universitaires*
MEMBRES
Guy CÔTÉ
Président du Comité catholique
Graham JACKSON
Président du Comité protestant
Pauline CHAMPOUX-LESAGE
Sous-ministre de l’Éducation
Christine CADRIN-PELLETIER
Sous-ministre associée de foi catholique
Ministère de l’Éducation
Vacant
Sous-ministre associé de foi protestante
Ministère de l’Éducation
SECRÉTAIRES CONJOINTS
Claire PRÉVOST-FOURNIER
Alain DURAND
Publications récentes du
Conseil supérieur de l'éducation
Diriger une école secondaire : un nouveau Pour un accès réel des adultes à la forma-
contexte, de nouveaux défis (1999) ........ 50-0425 tion continue (1996)................................. 50-0410