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Contribution de la gravimétrie à l'étude de la structure des Hauts Plateaux

(Maroc oriental)

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Jamila Abderbi Driss Khattach

Centre Régional des Métiers de l'Education et de la Formation(CRMEF), Oujda Université Mohammed Premier
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Bulletin de l’Institut Scientifique, Rabat, section Sciences de la Terre, 2010, n°32, p. 19-30.

Contribution de la gravimétrie à l’étude de la structure

des Hauts Plateaux (Maroc oriental)
Jamila ABDERBI & Driss KHATTACH

Université Mohamed Premier, Faculté des Sciences, Laboratoire des Géosciences Appliquées (LGA),
et Centre de l’Oriental des Sciences et Technologies de l’Eau (COSTE), Oujda, Maroc
[email protected], [email protected]

Résumé. La carte gravimétrique des Hauts Plateaux met en évidence des anomalies négatives et des anomalies positives séparées ainsi que
des zones à fort gradient. Les hauts gravimétriques sont associés au socle et à ses hétérogénéités, alors que les bas gravimétriques sont la
signature de bassins sédimentaires, de granites dans le socle et de dômes de sel. Pour cartographier les contacts géologiques, les failles et
leurs caractéristiques spatiales, trois méthodes d’interprétation ont été utilisées : gradient vertical, gradient horizontal couplé au
prolongement vers le haut et déconvolution d’Euler. L’application de ces traitements a permis de cartographier un grand nombre de
linéaments gravimétriques matérialisant les discontinuités de densité. Les directions obtenues sont NE-SW, E-W et NW-SE, avec une
dominance des directions NE-SW. Les solutions d’Euler indiquent des profondeurs pouvant atteindre 2400 m. La carte des linéaments
établie permet d’améliorer la connaissance de la structure profonde des Hauts Plateaux et constitue un guide pour la prospection des
ressources du sous-sol (eau et hydrocarbures).
Mots clés : Hauts Plateaux, structure, gravimétrie, filtrages, failles.
Structural setting of the High Plateaus; insights from gravity data analysis (Eastern Morocco).
Extended English abstract. The purpose of the present work is to use gravity data to improve the knowledge on the structure of the High
Plateaus, located between the Jerada mountains to the north, the eastern High Atlas to the south, the Rekkam to the west, and the Algerian
border to the east (Fig. 1). Most part of the High Plateaus is covered by thick Quaternary deposits, outcrops of older rocks are exposed.
From the structural point of view, according to the first draft of the northern High Plateaus, the area is affected by faults which led to the
development of grabens and horsts (Fig. 2). In order to improve the knowledge on the deep structure of the study area, the gravimetric map
was reinterpreted. The isogal curves of the Bouguer anomaly map of the High Plateaus (scale 1/200,000; d=2.5 g/cm3) were digitized and a
regular grid was calculated with a mesh of 250 m (Fig. 3). We used various filtering techniques to delineate the major geological structures
such as faults and basins: vertical and horizontal derivatives, upward continuation, and Euler deconvolution (Fig. 4). The residual-gravity
anomaly field (Figs. 5-6) map presents (positive/negative) anomalies separated by strong gradient zones. Interpretation makes it possible to
associate the negative anomalies with deep basins, domes or granites (Tab. I). The positive anomalies are associated to basement uplift or
outcrop. The statistical analysis of the anomalies allows identifying the major structural trends of the region (Fig. 5b). The vertical gradient
allowed us to amplify short waves and to reduce interferences between anomalies (Fig. 7). The superimposition of horizontal derivative
maxima from the Bouguer anomaly and from its upward continuation at several heights up to 4,000 m by steps of 250 m (Fig. 8) shows
alignments outlining the contacts and gives information on their dip (Fig. 9a). The statistical analysis of contacts interpreted as faults
shows five main trends: N00; N120; N70; N90 and N45, with a clear predominance of the last trend (Figs. 9b-c). Euler deconvolution was
used to determine source depths and their location. Solutions are well grouped and correlate with various contacts previously inferred from
horizontal derivative maxima. The values of sources depth can reach 2,338 m (Fig. 10). Superimposition of the interpreted major faults to
the geological map, shown in figure 9, indicate that NE-SW and E-W system is well developed and represented by several faults with
regional importance; the other fault systems are mainly N-S, NW-SE (Fig. 11).
Key words: Moroccan High Plateaus, structural geology, gravimetry, filtering, faults.

INTRODUCTION de discontinuités ou interfaces telles que les failles et les

flexures. Pour l’étude de ces discontinuités, nous avons
Situés entre le Pays des Horsts au nord et le Haut Atlas
appliqué la méthode de l’analyse multi-échelle basée sur le
oriental au sud, les Hauts Plateaux forment une unité
gradient horizontal couplé au prolongement vers le haut, et
géographique et géologique bien distincte, avec plusieurs
la déconvolution d’Euler. Ces méthodes se sont avérées
bassins fermés ou semi-fermés et des chotts (dépressions).
efficaces dans des études similaires (Khattach et al. 2004,
Le chaînon de Trarit divise cette région en deux secteurs :
2006, Vanié et al. 2005, 2006, Chennouf et al. 2007, El
les Hauts Plateaux septentrionaux et les Hauts Plateaux
Gout et al. 2010).
méridionaux (Fig. 1).
En raison de ses richesses hydrogéologiques et minières,
CONTEXTE GEOLOGIQUE
cette région a suscité depuis les années 1950 et 1960
l’intérêt de nombreux géologues (Stretta 1952, Médioni La majeure partie des Hauts Plateaux est recouverte par
1969) ; cependant, le tracé et l’extension des accidents qui des terrains du Quaternaire, et peu de roches plus anciennes
affectent la région, ainsi que la géométrie des bassins qu’ils sont exposées en surface (Fig. 1), ce qui rend difficile toute
délimitent ne peuvent être approchés uniquement par les étude géologique et structurale. Une synthèse géologique a
données de surface. C’est pourquoi, dans le présent travail, été établie d’après les travaux de Stretta (1952), Médioni
nous avons eu recours à la gravimétrie comme outil (1969) et Carlier (1971).
d’investigation. La carte de l'anomalie de Bouguer au Sur les Hauts Plateaux septentrionaux affleurent des
1/200.000 des Hauts Plateaux (Van den Bosch 1971, 1981) schistes carbonifères, en particulier dans la boutonnière du
présente de forts contrastes (gradients) qui seraient le reflet Mekam au NW (Stretta 1952). Le Permo-Trias comprend
 J. Abderbi & D. Khattach – Gravimétrie des Hauts Plateaux

Figure 1. Carte géologique des Haut Plateaux, d’après la carte géologique du Maroc au 1/1.000.000.
Figure 1. Geological map of High Plateaus, after the geological map of Morocco at 1/1,000,000.

des formations argileuses et des basaltes ; il affleure sur les dolomitiques bleuâtres, des dolomies grossières, des
bordures ouest et nord des Hauts Plateaux septentrionaux. dolomies et calcaires à joints marneux, et enfin des marnes
Sur les Hauts Plateaux méridionaux, la série sédimentaire rouges à intercalations de calcaires grumeleux du Toarcien
visible débute seulement au Bajocien. Les faciès sont (Stretta 1952). Sa puissance est comprise entre 60 et 134 m.
néritiques, lagunaires et continentaux. Les faciès à L'Aaléno-Bajocien des Hauts Plateaux possède un faciès
ammonites font complètement défaut (Stretta 1952). Le très caractéristique formé d'une alternance de couches
Lias se présente sous le faciès classique des dolomies et calcaires et dolomitiques litées. Les calcaires sont à grain
calcaires dolomitiques ; il affleure au nord de Guefaït, sur la très fin, de couleur grise ou blanche. Les dolomies ont un
terminaison ouest du Jbel Sidi El Abed, dans le chaînon de aspect variable allant de la dolomie massive à une roche
Trarit, au Rekkam, dans les régions de Tandrara, Bouarfa et finement cristalline. La série débute en général par un
Anoual. Il est constitué essentiellement par des calcaires conglomérat marquant une transgression (Stretta 1952).

20
 J. Abderbi & D. Khattach – Gravimétrie des Hauts Plateaux

L'épaisseur maximum visible de cette série est d'environ Le Mio-Pliocène est représenté par des formations
500 m, la puissance totale pouvant atteindre 400 à 500 m. continentales : alternance d'argiles plus ou moins sableuses,
Le Bajocien supérieur–Bathonien est restreint au de sables, de grès et de calcaires lacustres à silex à grain
synclinal de Krakir-Tendrara, au nord du massif de très fin. De quelques dizaines de mètres au sud de la plate-
Tendrara (d=2,3 g/cm3), à Foum-Aggaï et sur les Hauts forme d’Aïn Beni Mathar, elle augmente au fur et à mesure
Plateaux septentrionaux dans le synclinal El-Rhoress- vers le nord. Dans l'effondrement de l'oued El-Haï, elle peut
Guefaït. Cet intervalle se présente sous forme de bancs durs dépasser 800 m.
et épais alternant avec des niveaux marneux. Les marnes Les formations du Quaternaire occupent sur les Hauts
toujours plus ou moins sableuses, sont blanches, grises ou Plateaux d'immenses étendues sous forme de dépôts et
jaunes. Sa puissance peut atteindre 150 m dans le grand croûtes superficielles. Les dépôts fluviatiles comprennent
synclinal de Tendrara, mais elle reste comprise ailleurs une haute surface villafranchienne formée d'une croûte
entre 10 et 60 m. calcaire épaisse de 1 à 2 m, puis une moyenne terrasse
L’ "Infracénomanien" représente la partie supérieure de conglomératique encroûtée et enfin une basse terrasse
la série détritique jurassico-crétacée. Sur les Hauts caillouteuse encroûtée bien développée le long des cours
Plateaux, cette série débute partout par un conglomérat dont d'eau au nord de Tendrara.
l'épaisseur est de 20 à 150 m (Stretta 1952), formé de bancs La densité moyenne des terrains tertiaires et
lités d'épaisseur variable avec des éléments de petite taille, quaternaires est de l’ordre de 2,2 g/cm3.
allant du gravier au galet. Elle se poursuit par des grès de Dans les Hauts Plateaux, la structure tabulaire
couleur rouge ou violette. Des calcaires, des silex et du d’ensemble est accidentée par des failles qui ont une
gypse se rencontrent au sommet de la série. direction E-W, parallèlement au Haut Atlas (monts de
Le Cénomanien est représenté au sud par des marnes Trarit) ou plus généralement NE-SW. Il s’agit d’axes de
vertes et rouges à gypse, avec des intercalations de bancs plis qui divergent du Haut Atlas (dôme de Tendrara, plis de
gréseux ou calcaires. Le sommet de l'étage correspond aux Sidi El Abed). Deux directions principales sont observées
calcaires blancs lités à fossiles silicifiés. dans la région : une direction principale NE-SW, observée
Les calcaires blancs cénomano-turoniens, surmontent dans les massifs locaux, comme en profondeur sous les
les marnes cénomaniennes. Le Turonien est formé de formations tertiaires (l’accident qui sépare le Mekkam du
calcaires blancs massifs, à lits de silex. plateau de Aïn Beni Mathar), et une direction E-W dans la
chaine des Horsts (Stretta 1952, Médioni 1972).
Le Sénonien dans le synclinal de Matarka-Foum-Aggaï
(d=2,4 g/cm3) est formé de marnes rouges continentales La structuration principale des Hauts Plateaux est liée à
avec passées sableuses, puis de calcaires jaunes et enfin de des failles reconnues à travers les sondages et les travaux
marno-calcaires marines se terminant par une dalle gréseuse géophysiques antérieurs. En dessous des accumulations
surmontée d'un calcaire crayeux avec des débris de pinces néogènes, il semble que le socle atlasique ait été dissocié en
de crustacés. Au Jbel Tendrara, la série a une puissance de horsts et grabens, sous la forme de larges panneaux sub-
100 m et on distingue, de bas en haut, des marnes rouges à tabulaires ou légèrement ondulés (Médioni 1972). Ainsi, du
gypse, des calcaires jaunes, des marnes rouges, des nord vers le sud se succèdent l’effondrement de l’Oued El
calcaires oolithiques roses, des marnes et grès rouges, et Haï à la limite méridionale des Monts de Jerada, la
enfin au sommet des calcaires lacustres à silex. La série de plateforme élevée de Aïn Beni Mathar–Tabouda, la zone
grès rouges du Chott Tigri (d=1,85 g/cm3) est sénonienne ; synclinale de Mechettet qui se continue en Algérie au sud
l'épaisseur visible de ces assises est évaluée à 500 m des Monts de Sidi El Abed et enfin la zone surélevée de
(Stretta 1952). l’Oued Charef qui constitue un pli anticlinal sans doute
érodé avant l’accumulation néogène (Fig. 2).

Figure 2. Coupes à travers les Hauts Plateaux (d’après Médioni 1970). A : Bni Yala – Oglet Mengoub. B : Guern Sba – Jnane Krater.
Figure 2. Sections across the High plateaus (after Médioni 1970). A : Bni Yala – Oglet Mengoub. B : Guern Sba – Jnane Krater.

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 J. Abderbi & D. Khattach – Gravimétrie des Hauts Plateaux

Figure 3. Carte gravimétrique des Hauts Plateaux (Anomalie de Bouguer, d=2,5 g/cm3, Interval=1 mGal).
Figure 3. Gravimetric map of the High Plateaus (Bouguer anomaly, d=2.5 g/cm3 Interval= 1 mGal).

ETUDE GRAVIMÉTRIQUE & Mansy 2001, Khattach et al. 2004 et 2006) : gradient
vertical, gradient horizontal couplé au prolongement vers le
Les données gravimétriques
haut, et déconvolution d’Euler.
La carte gravimétrique utilisée dans le cadre de cette 1) Le gradient vertical permet, en l’absence
étude a été obtenue à travers la numérisation de la feuille d’hétérogénéités intra-sédimentaires, de reconnaître les
gravimétrique au 1/200.000 des Hauts Plateaux (densité de parties supérieure et inférieure du socle. L’intérêt des
correction 2,5 g/cm3). Les données gravimétriques conversions des cartes du champ gravimétrique en gradient
proviennent de la Compagnie Africaine de Géophysique vertical (ou première dérivée verticale) a été reconnu depuis
(C.A.G) réalisées entre 1962 et 1963 par un procédé longtemps (Evjen 1936) ; des méthodes de calcul ont été
graphique pour le compte de la Direction des Mines et de la proposées et illustrées par Aynard (1953), Baranov (1957),
Géologie. Le Mouël (1970), Gérard & Griveau (1972) et Galdeano
La carte restituée montre des anomalies positives et des (1980). Afin de mettre en évidence les lithologies peu
anomalies négatives de dimension et amplitude variables, profondes, il est nécessaire de calculer une nouvelle
avec des valeurs allant de –120 mGal dans la partie sud et – transformation de la carte d’anomalie. Cette transformation
40 mGal dans la partie nord (Fig. 3). doit atténuer, voire supprimer, la composante régionale qui
déforme et parfois masque les relations entre la géologie
Traitement des données d’un socle peu profond et la forme des anomalies. Elle est
obtenue grâce au calcul du gradient vertical (∂g/∂z). Cette
Dans cette étude, nous avons utilisé trois méthodes de transformation joue un rôle d’amplificateur pour les hautes
traitement dans le but de déterminer de failles, leur fréquences, c'est-à-dire pour les anomalies de petite
pendage, leur longueur et leur profondeur (Cordel et al. extension, au moins dans une des directions. Elle est donc
1985, Blakely et al. 1986, Archibald et al. 1999, Everaerts indiquée pour mettre en évidence les zones où le

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 J. Abderbi & D. Khattach – Gravimétrie des Hauts Plateaux

Figure 4. a, Localisation des discontinuités de densité à

partir du gradient gravimétrique horizontal ; b, et
détermination de leur pendage.

Figure 4. a, Location of discontinuites of density from the

magnitude of the horizontal gradient. b, determination of
their dip.

socle se trouve plus près de la surface ou plus en déplacement des maxima avec le prolongement vers le haut
profondeur et les accidents ténus du socle, de petite indique le sens du pendage (Fig. 4b).
dimension latérale, qui se poursuivent éventuellement sur
3) La déconvolution d’Euler permet en plus de la
de grandes distances.
localisation dans le plan horizontal des contacts,
2) Le gradient horizontal couplé au prolongement vers le l’estimation de leur profondeur (Keating 1998, Asfirane-
haut permet la localisation des failles et la détermination de Haddadji & Galdeano 2000). Thompson (1982) puis Reid
leur pendage (Archibald & Bochetti 1999, Khattach et al. (1990) signalent que le choix de l’indice structural semble
2004 et 2006, Vanié et al. 2005 et 2006). Les contacts très important ; pour un certain nombre de structures ils ont
linéaires correspondent à des failles alors que les contacts établi un indice structural (N) qui peut prendre des valeurs
de forme circulaire sont les limites de diapirs ou de corps allant de 0 à 3 et correspondant à des nombres entiers pour
intrusifs. certaines structures simples. Ainsi, ils estiment qu’un indice
Blakely & Simpson (1986) ont proposé une méthode N=1 est le mieux adapté pour les filons minces, les dykes et
pour déterminer de manière automatique les maxima du les failles à faible rejet vertical, et un indice N=0 pour les
gradient horizontal, déterminés à partir d'une grille de failles à grand rejet, et un indice de N=0,5 pour les cas
valeurs présentées dans une fenêtre 3 x 3. L’application de intermédiaires.
cette méthode à une carte gravimétrique montre que les Le succès de l’application de ces traitements a été
maxima locaux des gradients horizontaux forment des rides démontré par de nombreuses études (Archibald & Bochetti.
étroites au-dessus des changements abrupts de densité. Les 1999, Everaerts & Mansy 2001, Khattach et al. 2004, Vanié
positions des points d'inflexion sont aussi facilement et al. 2005, Chennouf et al. 2007, El Gout et al. 2010).
déterminées par la localisation du point culminant dans
l'amplitude du module du gradient horizontal (Fig. 4a).
Gh= [(δg/δx)2 + (δg/δy)2)]1/2 RESULTATS ET INTERPRETATION

Pour déterminer le sens du pendage des différents

Interprétation qualitative des anomalies
contacts, la carte de Bouguer est prolongée vers le haut à
différentes altitudes. A chaque niveau, les maxima du La carte des anomalies résiduelles (Fig. 5a), obtenue par
gradient horizontal sont localisés. En principe, les niveaux la soustraction d’une régionale (Fig. 6) assimilée à un plan,
de prolongement les plus élevés correspondent aux contacts montre des valeurs comprises entre –18 et –24 mGal. En
les plus profonds et vice-versa. Si les structures sont s'appuyant sur les connaissances géologiques de la région, il
verticales, tous les maxima se superposent. En revanche, le est possible de faire une interprétation qualitative des

23
Figure 5. a, Carte des anomalies résiduelles (intervalle=1 mGal) ; b, rosace des fréquences des
directions des anomalies gravimétriques. Figure 6. Carte d’anomalie régionale (intervalle= 2 mGal).
Figure 5. a, Map of residual anomaly (interval=1 mGal); b, rose diagram frequencies of the Figure 6. Regional gravity anomaly map (interval= 2 mGal).
gravimetric anomalies’ directions.
 J. Abderbi & D. Khattach – Gravimétrie des Hauts Plateaux

Tableau I. Les principales anomalies gravimétriques des Hauts Plateaux.

Table I. Principal gravimetric anomalies of the High Plateaus.

Anomalies Direction Localisation Source

N1 NE-SW à ENE-WSW Sud de Tendrara Granite
N2 NNE-SSW Nord d’Anoual Plis marginaux ou un petit bassin
N3 NE-SW Entre Matarka et Bel Frissa Cuvette constituant un bassin triasique salifère
Granite dans le socle ou d’un diapir de sel dans
N4 NE-SW Sud de Jnane Krater
le sédimentaire
N5 NE-SW Passe par Aïn Bni Mathar
Graben jurassique caractérisé par une épaisse
N6 NNE-SSW
Zone de Mekkam série de calcaires et dolomies
N7 NW-SE
N8 NE-SW Sidi El Abed Bassin
N9 NE-SW Mekkam Granite
N10 NE-SW Nord de Sidi El Abed
Bassin néogène
N11 NNE-SSW Sud de Jerada
P1 ENE-WSW Est d’Anoual Partie du massif de Tamlelt
Socle paléozoïque en affleurement ou à faible
P2 NE-SW Tandrara
profondeur
P3 NE-SW Nord de Matarka Horst
P4 NW-SE Sud de Debdou
Soulèvement du socle paléozoïque qui affleure
P5 NNW-SSE
par endroits
P6 NW-SE Près de Guefaït

anomalies. Une vue d'ensemble de cette carte fait ressortir confirment et précisent le tracé de structures cassantes
les principaux secteurs gravimétriques qui reflètent la reconnues par les études géologiques, et mettent en
structure en profondeur de la zone d'étude. On distingue évidence de nouveaux accidents. La figure 8 illustre les
ainsi des zones à anomalies positives et des zones à principales limites entre des zones présentant un contraste
anomalies négatives (Tab. I) ; leur orientation permet important de densité, dont plusieurs correspondent à des
d’identifier les directions structurales majeures de la région accidents non cartographiés. Les linéaments qui subsistent
(Fig. 5b) : la direction NE-SW, qui est prédominante, et les sur la carte du gradient horizontal prolongé à 4.000 m
directions NNE-SSW, ENE-WSW et NW-SE. Les d’altitude correspondent aux accidents majeurs affectant la
différentes anomalies gravimétriques mises en évidence zone d’étude. Il ressort de cette étude que la plupart de ces
sont séparées par des zones à forts gradients, ce qui indique failles ont un pendage sub-vertical (Fig. 9a). Parmi ces
la présence de discontinuités de densité matérialisant failles identifiées on peut citer :
généralement des accidents tectoniques. – l’accident de Guefaït (G1) qui et semble se prolonger
D’après cette analyse, il apparaît que l’origine des beaucoup plus vers l’ouest (Stretta 1952) ;
différentes anomalies positives et négatives n’est pas – les failles majeures d’Aïn Beni Mathar (G2 et G3), qui
toujours évidente, et les différentes interprétations devraient ont provoqué l’effondrement de l’oued El Haï et de l’oued
être appuyées par les résultats d’autres méthodes Charef et le soulèvement de la plate-forme de Berguent-
géophysiques. Néanmoins, il faut noter que les hauts Tabouda (Médioni 1969) ;
gravimétriques sont associés aux soulèvements du socle ou
– les failles G4 et G5, constituant la limite qui sépare le
à ses hétérogénéités, alors que les bas gravimétriques sont
dôme de Mekam de la plate forme de Berguent-Tabouda
la signature des bassins sédimentaires, des granites dans le
(Médioni 1969) ;
socle et des dômes de sel dans les formations sédimentaires.
La carte du gradient vertical (Fig. 7) montre des anomalies – les failles G16, G17, G22 et G23, qui passent par Anoual
étroites et allongées, notamment au niveau des rides pour se poursuivre au nord de Bouarfa ; elles affectent la
anticlinales de Mechkakour et de Trarit. zone sud des Hauts Plateaux et le Haut Atlas oriental ;
– les failles G16 et G21, d’une part, et les failles G15 et G8
Les linéaments gravimétriques d’autre part, délimitent le bassin triasique salifère (Van Den
Bosch 1981), qui est à l’origine de l’anomalie indiquée sur
Les résultats obtenus à l’aide des traitements des
la carte des anomalies résiduelles ;
anomalies gravimétriques du domaine des Hauts Plateaux

25
 Figure 8. Superposition des maxima du gradient horizontal gravimétrique déterminés sur la
Figure 7. Carte du gradient vertical. Bouguer et ses prolongées vers le haut à différentes altitudes sur la carte du gradient
horizontal.
Figure 7. Vertical gradient map. Figure 8. Horizontal gradient maxima of the Bouguer anomaly and its upward continuations
to different heights superimposed on the horizontal gradient map.
 J. Abderbi & D. Khattach – Gravimétrie des Hauts Plateaux

Figure 9. a, Superposition des maxima du gradient horizontal gravimétrique déterminés sur la Bouguer et ses prolongées vers le haut à
différentes altitudes sur la carte du gradient horizontal ; b, rosace des fréquences des alignements interprétés comme étant des failles ; c,
histogramme des fréquences.
Figure 9. a, horizontal gradient maxima of the Bouguer anomaly and its upward continuations to different heights superimposed on the
horizontal gradient map; b, rose diagram of the alignments interpreted as faults; c, histogram of frequencies.

– les failles G14 et G15 qui encadrent les plis marginaux ; N140 sont aussi présentes mais avec une fréquence et une
longueur nettement plus faible que la première famille.
– les failles G20 et G21, d’une part, et les failles G22 et
– la direction N40 à N65, plus étendue et la plus fréquente,
G23 d’autre part, qui délimitent le dôme de Tendrara ;
a joué un rôle primordial dans le contrôle de l’évolution
– un réseau de failles (G27, G29, G30 et G28) selon les géodynamique des Hauts Plateaux ; elle atteint des
directions NE-SW et NW-SE, confère une configuration profondeurs importants ; nous pouvons alors avancer
losangique au SE de Debdou ; qu’elle affecterait le socle et qu’elle est héritée au moins de
l’orogenèse hercynienne ;
– les failles G31 et G32 qui limitent le bassin de Tiouli-Sidi
El Abed. – la direction N90 est présente à l’extrême nord des Hauts-
Plateaux (accident de Guefaït), au niveau du chaînon de
La numérisation et le traitement statistique (fréquences Trarirt et au sud de la zone d’étude entre les Hauts Plateaux
et longueurs cumulées) des linéaments interprétés comme
et le Haut Atlas oriental ;
étant des failles (Figs 9b-c), montre une nette dominance de
la famille N40 à N65. Les familles N80 à N90 et N120 à – les directions N120 à N140 se retrouvent dans les Hauts
Plateaux septentrionaux dans la partie occidentale ;

27
 J. Abderbi & D. Khattach – Gravimétrie des Hauts Plateaux

– la direction N-S se trouve dispersée sur toute la zone, distinguer deux réseaux de fractures dominants, de direction
mais elle est faiblement représentée. N35-45 et N70-90 (Fig. 11). Ce réseau composé par les
deux directions prédominantes confère à la Meseta orientale
Les solutions d'Euler pour l'indice structural IS=0 sont
une configuration losangique fort probablement empruntée
représentées dans la figure 10. Elles indiquent des
au canevas structural hercynien et qui correspondrait à des
profondeurs pouvant atteindre 2.338 m. Les accidents les
accidents profonds.
plus profonds sont de direction principalement NE-SW, E-
W et NW-SE. Le réseau de failles N-S est présent ; il s’agit
de failles intermédiaires dont la profondeur ne dépasse CONCLUSION
guère 1500 m, sauf la faille G24 où les solutions d’Euler
Les principaux résultats obtenus dans le cadre de cette
estimées peuvent atteindre 2000 m.
étude apportent des éléments nouveaux permettant ainsi
Ces résultats sont compatibles avec ceux des études d’améliorer les connaissances sur la structure des Hauts
structurales réalisées dans la région par Dubourdieu (1962), Plateaux. Ces résultats peuvent être résumés dans les points
Michard (1976) et Elmi (1984), qui ont permis de suivants :

Figure 10. Carte de solutions d’Euler (IS = 0 ; fenêtre de 10×10 et une erreur relative maximale de 15%).
Figure 10. Euler solutions (IS=0; a 10×10 window and a maximum relative error of 15%).

28
 J. Abderbi & D. Khattach – Gravimétrie des Hauts Plateaux

Figure 11. La configuration du réseau de faille d’après Dubourdieu (1962), Michard (1976) et Elmi (1984).
Figure 11. Configuration of the network of fault according to Dubourdieu (1962), Michard (1976) and Elmi (1984).

1) L’obtention d’une carte des anomalies résiduelles dont avec les résultats des études structurales classiques. Ces
l’interprétation qualitative a permis de montrer la relation directions sont globalement bien corrélables avec les
étroite d’une part, entre les anomalies positives et les structures géologiques du domaine meseto-atlasique (NE-
remontées du socle et les édifices magmatiques, et d’autre SW, ENE-WSW et E-W), et voire même avec la
part entre les anomalies négatives et les bassins, les diapirs structuration panafricaine pour la direction NW-SE dans le
et les granites. domaine anti-atlasique. La direction N-S atteint de faibles
profondeurs et reste superficielle, elle serait d’âge récent.
2) L’établissement d’une carte structurale montre les
principaux accidents tectoniques qui sont responsables de la Remerciements
structuration de la zone étudiée. En plus de la cartographie
de leur tracé, des indications ont été obtenues sur leur Les auteurs remercient les évaluateurs pour leurs
pendage ainsi que sur leur profondeur. commentaires et suggestions qui ont permis d’améliorer la version
initiale du manuscrit.
3) Les deux familles d'accidents de direction NE-SW et E-
W, déterminées dans la zone d'étude sont en bon accord

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