These - PLACZEK - Proper Orthogonal Decomposition (POD)

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Construction de modèles d’ordre réduit non-linéaires

basés sur la décomposition orthogonale propre pour


l’aéroélasticité
Antoine Placzek

To cite this version:


Antoine Placzek. Construction de modèles d’ordre réduit non-linéaires basés sur la
décomposition orthogonale propre pour l’aéroélasticité. Mécanique [physics.med-ph]. Con-
servatoire national des arts et metiers - CNAM, 2009. Français. <tel-00461691>

HAL Id: tel-00461691


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Submitted on 5 Mar 2010

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C ONSERVATOIRE N ATIONAL DES A RTS ET M ÉTIERS

T HÈSE
présentée par

Antoine PLACZEK

en vue de l’obtention du grade de


Docteur du Conservatoire National des Arts et Métiers

Discipline : Mécanique
École Doctorale ED415

C ONSTRUCTION DE MODÈLES D ’ ORDRE RÉDUIT


NON - LINÉAIRES BASÉS SUR LA D ÉCOMPOSITION
O RTHOGONALE P ROPRE POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ .

Directeur de Thèse : Roger OHAYON


Encadrement : Duc-Minh TRAN

Thèse soutenue le 16 décembre 2009 devant le jury composé de :


Charbel FARHAT Université de Stanford Président du jury
Aziz H AMDOUNI Université de La Rochelle Rapporteur
Angello I OLLO Université de Bordeaux Rapporteur
Jean-Pierre G RISVAL ONERA Châtillon Examinateur
Roger O HAYON CNAM Paris Examinateur
Duc-Minh T RAN ONERA Châtillon Examinateur
Christophe L E G ARREC Airbus Toulouse Invité

Version finale du 19 février 2010


Remerciements

Le présent mémoire de thèse résume trois années de recherches qui n’auraient sans doute jamais vu le
jour sans la contribution ni le soutien d’un certain nombre de personnes que je tiens à remercier ici.
Je souhaite tout d’abord remercier M. le Professeur Roger O HAYON pour la confiance qu’il m’a accordée
en me proposant ce sujet de recherche, et la liberté dont j’ai joui pour le mener à bien. Je remercie les rappor-
teurs, MM. les Professeurs Aziz H AMDOUNI et Angello I OLLO, pour avoir accepté de relire ce (long) docu-
ment. Leurs remarques avisées m’auront permis d’aborder certaines problématiques avec un œil nouveau.
Je remercie aussi M. le Professeur Charbel FARHAT de s’être déplacé depuis Stanford et d’avoir accepté de
présider le jury au cours de la soutenance. Enfin, je tenais à remercier M. Jean-Pierre G RISVAL pour m’avoir
accueilli au cours de ces trois années au sein du département DADS de l’Onera, et pour avoir renouvelé sa
confiance pour les prochaines années.
Je tenais aussi à remercier Minh qui m’a encadré au cours de cette thèse et plus généralement l’ensemble
des collègues du département DADS pour l’ambiance qui y règne. Merci aussi à Alain pour son aide et ses
conseils à propos de l’utilisation du code elsA et plus généralement des aspects concernant la simulation
numérique en aéroélasticité pour les turbomachines.
Merci également à la Team TDM (Fabrice, Jean-Sébastien, Mahdi, Minh, Naka, Sylvie, ainsi que ceux qui
s’y sont greffés plus ou moins régulièrement) avec qui la pause café a toujours été l’occasion de passer des
bons moments à discuter de tout et n’importe quoi, à essayer de suivre d’une oreille plus ou moins attentive
les cours de (manga) japonais, ou les poèmes chinois. Merci aussi aux volleyeurs de l’ASCO avec qui les
matchs ont toujours été l’occasion de se changer les idées, de se défouler un peu, et même de gagner par
deux fois le ZIPEC !
Je tiens aussi à remercier ceux qui sont à l’origine de ma motivation pour le travail de recherche et que
j’ai rencontré à La Rochelle (Dondon, Erwan, Sylvain, Aziz,...) ainsi qu’à Nantes (Jean-François, Cédric).
Enfin un grand merci à ceux qui ne sont certainement pas les derniers à devoir être remerciés, à savoir
la bande des compiègnois qui est toujours là depuis toutes ces années, à ma famille qui m’a toujours sup-
porté et qui m’a permis d’arriver jusqu’ici, et ce, en ayant toujours le choix, et enfin tout particulièrement à
Stéphanie, grâce à qui les moments difficiles de fin de thèse sont restés malgré tout fort agréables.

i
Résumé

La prédiction numérique de la réponse de systèmes aéroélastiques requiert la résolution d’un nombre


important d’équations lorsque les techniques classiques de discrétisation éléments finis ou volumes finis
sont employées. Le coût de calcul associé devient rapidement rédhibitoire dès lors qu’il s’agit d’effectuer
une analyse paramétrique du système afin de déterminer ses limites de stabilité, d’appliquer un contrôle
actif ou encore d’optimiser certains paramètres.
Le recours à un modèle d’ordre réduit le plus représentatif qui soit du système dynamique initial devient
alors indispensable pour réduire les coûts de calcul et rendre ainsi possible les études paramétriques. Parmi
les multiples méthodes de réduction développées par le passé, la projection de Galerkin sur une base de
vecteurs issus de la décomposition orthogonale propre (POD) d’un ensemble de réponses du système s’est
imposée en mécanique des fluides.
La difficulté de la construction d’un tel modèle d’ordre réduit pour les systèmes aéroélastiques est triple :
tout d’abord les équations de Navier-Stokes d’un fluide compressible s’accordent difficilement avec la pro-
jection de Galerkin lorsqu’il s’agit de traiter les non-linéarités, ensuite le mouvement ou la déformation du
domaine de calcul pour les applications en aéroélasticité entraîne une incohérence dans la définition des
modes POD, et enfin le système réduit demande à être stabilisé pour pallier les diverses sources d’erreur
introduites au cours de la construction du modèle d’ordre réduit.
Dans ce mémoire, le principe de construction d’un modèle d’ordre réduit reposant sur l’utilisation des
modes POD est d’abord rappelé dans une première partie puis appliqué à un système dynamique linéaire
pour lequel plusieurs formulations sont développées puis comparées pour tenir compte de conditions aux
limites spécifiques. La seconde partie concerne le développement d’un modèle d’ordre réduit des équations
de Navier-Stokes pour un fluide compressible visqueux. Un premier modèle d’ordre réduit développé pour
un domaine de frontières fixes est corrigé au moyen de diverses techniques puis validé sur l’exemple d’un
profil NACA0012 positionné de manière à provoquer le développement d’une allée instationnaire de Von
Kármán dans le sillage. Dans un second temps, le modèle d’ordre réduit est étendu au cas d’un domaine
mobile en faisant l’hypothèse d’un mouvement de corps rigide. Ainsi, la formulation adoptée permet de
se ramener à un domaine fixe afin d’éluder le problème de définition des modes POD. Ce second mo-
dèle d’ordre réduit est alors appliqué à la reproduction de l’écoulement transsonique autour d’un profil
NACA0064 animé d’un mouvement d’oscillation harmonique autour d’une position d’équilibre. Plutôt que
de calculer explicitement les coefficients du modèle d’ordre réduit à partir des expressions analytiques, une
identification des termes est pratiquée afin d’une part d’améliorer la précision des résultats et de diminuer
considérablement le temps de calcul pour la construction du modèle réduit.

iii
Table des matières

Introduction 1

I Choix du modèle d’ordre réduit et application à un système dynamique linéaire 5


1 État de l’art des méthodes de réduction de modèle pour l’aérodynamique 7
1.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
1.2 Principe de la réduction de modèles et classification . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
1.3 Description des principaux modèles d’ordre réduit physiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
1.3.1 Projection sur la base des modes propres et sous-structuration dynamique . . . . . . . 13
1.3.2 Approximation de la fonction de transfert . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
1.3.3 Identification du système réduit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.3.4 Décomposition Orthogonale Propre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
1.3.5 Modes d’oscillation et d’interaction principaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
1.3.6 Équilibrage harmonique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
1.3.7 Réduction sur une base construite a priori . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
1.3.8 Méthodes de réduction alternatives et dépendance avec un paramètre . . . . . . . . . 29
1.4 Synthèse et justification du choix de la méthode POD . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32

2 Principe de construction d’un modèle d’ordre réduit POD-Galerkin 35


2.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
2.2 Description de la décomposition orthogonale propre pour un système déterministe . . . . . . 37
2.2.1 Décomposition orthogonale propre d’un ensemble de données . . . . . . . . . . . . . 37
2.2.2 Détermination des modes POD par la méthode des clichés . . . . . . . . . . . . . . . . 41
2.2.3 Propriétés de la décomposition orthogonale propre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
2.3 Un exemple d’application de la POD en analyse de données . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
2.4 Principe de construction du modèle d’ordre réduit à partir de la base POD . . . . . . . . . . . 50
2.4.1 Construction d’un modèle d’ordre réduit linéaire par projection discrète . . . . . . . . 50
2.4.2 Construction d’un modèle d’ordre réduit implicite par projection sur le sous-espace . 51
2.4.3 Construction d’un modèle d’ordre réduit polynomial par projection de Galerkin . . . 52
2.4.4 Construction d’un modèle d’ordre réduit par identification des coefficients . . . . . . 53
2.5 Décomposition orthogonale propre des systèmes multivariables . . . . . . . . . . . . . . . . . 56
2.5.1 Description de l’approche POD scalaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56
2.5.2 Description de l’approche POD vectorielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
2.6 Synthèse du chapitre 2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61

3 Approche POD-Galerkin pour les systèmes dynamiques linéaires non-autonomes 63


3.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
3.2 Modèles d’ordre réduit pour les systèmes dynamiques linéaires autonomes . . . . . . . . . . 65
3.2.1 Formulation analytique du modèle d’ordre réduit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65
3.2.2 Formulation discrète du modèle d’ordre réduit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68
3.2.3 Formulation POD-Galerkin du modèle d’ordre réduit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
3.3 Évaluation du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin du système linéaire autonome . . . . . . 74

v
TABLE DES MATIÈRES

3.3.1 Évaluation du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74


3.3.2 Choix de la base des clichés et du nombre de modes POD . . . . . . . . . . . . . . . . 77
3.4 Modèles d’ordre réduit pour les systèmes dynamiques linéaires non-autonomes . . . . . . . 82
3.4.1 Adaptation de la méthode des pénalités au modèle d’ordre réduit . . . . . . . . . . . . 83
3.4.2 Adaptation de la méthode des multiplicateurs de Lagrange au modèle d’ordre réduit 84
3.4.3 Méthode de la fonction de contrôle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85
3.5 Évaluation du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin du système linéaire non-autonome . . . 87
3.5.1 Aspect des modes POD non-homogènes et homogénéisés . . . . . . . . . . . . . . . . 87
3.5.2 Réponse du modèle d’ordre réduit non-autonome . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87
3.6 Synthèse du chapitre 3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93

II Développement de modèles d’ordre réduit non-linéaires pour l’aéroélasticité 95

4 Modélisation du fluide en vue de la construction d’un modèle d’ordre réduit 97


4.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98
4.2 Modélisation d’un fluide compressible visqueux avec les variables conservatives . . . . . . . 99
4.2.1 Détermination des hypothèses relatives au modèle fluide . . . . . . . . . . . . . . . . . 99
4.2.2 Caractérisation d’un fluide newtonien homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100
4.2.3 Équations de Navier-Stokes en formulation ALE avec les variables conservatives . . . 105
4.3 Problématique de l’aéroélasticité et méthodologie de résolution . . . . . . . . . . . . . . . . . 108
4.3.1 Principe de l’aéroélasticité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108
4.3.2 Formulations du problème de couplage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109
4.3.3 Définition du problème aéroélastique général . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110
4.4 Modélisation du fluide avec les variables primitives modifiées . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114
4.4.1 Variables aérodynamiques pour l’obtention d’un système quadratique . . . . . . . . . 114
4.4.2 Définition du produit scalaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115
4.4.3 Équations de Navier-Stokes en formulation ALE avec les variables primitives modifiées117
4.5 Synthèse du chapitre 4 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120

5 Construction d’un modèle d’ordre réduit POD-Galerkin pour l’aérodynamique 121


5.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122
5.2 Construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123
5.2.1 Projection de Galerkin des équations de Navier-Stokes d’un fluide compressible . . . 123
5.2.2 Calcul des coefficients du modèle d’ordre réduit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125
5.2.3 Intégration du modèle d’ordre réduit en temps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129
5.3 Correction des instabilités des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin . . . . . . . . . . . . . . 130
5.3.1 Origine des instabilités et principe de la correction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130
5.3.2 Techniques de correction a priori des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin . . . . . . 131
5.3.3 Techniques de correction a posteriori des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin . . . 134
5.3.4 Autres techniques de correction des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin . . . . . . 138
5.4 Calcul des modes POD de l’écoulement autour d’un profil NACA0012 fixe en forte incidence 139
5.4.1 Simulation numérique de l’écoulement autour du profil NACA0012 . . . . . . . . . . 139
5.4.2 Calcul des modes POD de l’écoulement autour du profil NACA0012 . . . . . . . . . . 142
5.5 Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0012 . . . . . . . 147
5.5.1 Réponse du modèle d’ordre réduit non corrigé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147
5.5.2 Introduction de termes correctifs dans le modèle d’ordre réduit . . . . . . . . . . . . . 149
5.5.3 Calibrage des paramètres du modèle d’ordre réduit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 154
5.5.4 Comparaison des réponses corrigées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158
5.6 Synthèse du chapitre 5 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160

vi
TABLE DES MATIÈRES

6 Construction d’un modèle d’ordre réduit POD-Galerkin pour l’aéroélasticité 161


6.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162
6.2 Simplification des équations de Navier-Stokes pour un mouvement de corps rigide . . . . . . 163
6.2.1 Applicabilité de la POD en aéroélasticité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163
6.2.2 Simplification des équations de Navier-Stokes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 167
6.3 Construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin pour un mouvement de corps rigide . 169
6.3.1 Développement d’un modèle d’ordre réduit basé sur la formulation en vitesse absolue 169
6.3.2 Développement d’un modèle d’ordre réduit basé sur la formulation en vitesse relative 175
6.3.3 Construction de modèles d’ordre réduit par identification des coefficients . . . . . . . 178
6.3.4 Résumé et comparaison qualitative des différents modèles d’ordre réduit . . . . . . . 180
6.4 Calcul des modes POD de l’écoulement autour d’un profil NACA0064 oscillant . . . . . . . . 182
6.4.1 Simulation numérique de l’écoulement transsonique autour du profil NACA0064 . . 182
6.4.2 Simplification des coefficients du modèle d’ordre réduit pour les équations d’Euler . 186
6.4.3 Calcul de la base des modes POD de l’écoulement autour du profil NACA0064 . . . . 187
6.5 Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0064 . . . . . . . 191
6.5.1 Réponse du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin corrigé . . . . . . . . . . . . . . . . . 191
6.5.2 Réponse du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin identifié . . . . . . . . . . . . . . . . 198
6.6 Synthèse du chapitre 6 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 204

Conclusion 207

III Annexes 209


A Éléments d’algèbre linéaire et matriciel 211
A.1 Matrice d’applications linéaires et changement de base . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211
A.2 Décomposition en valeurs singulières . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 213
A.3 Résolution approchée de problèmes linéaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 214

B Compléments théoriques sur la décomposition orthogonale propre 217


B.1 Expression de l’opérateur R dans une base canonique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 217
B.2 Décomposition spectrale de l’opérateur R . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 218
B.2.1 Détermination du rang de l’opérateur R . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 218
B.2.2 Décomposition spectrale des opérateurs de Hilbert-Schmidt . . . . . . . . . . . . . . . 220
B.3 Équivalence entre la méthode directe et la méthode des clichés en dimension finie . . . . . . 222

C Compléments d’analyse du modèle d’ordre réduit du système linéaire autonome 227


C.1 Influence de l’échantillonnage des clichés d’un système périodique . . . . . . . . . . . . . . . 227
C.2 Convergence des modes POD vers les modes propres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 232
C.2.1 Un résultat préliminaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 232
C.2.2 Convergence des vecteurs propres pour la méthode directe . . . . . . . . . . . . . . . 233
C.2.3 Convergence des vecteurs propres pour la méthode des clichés . . . . . . . . . . . . . 235

D Formulaire de calcul tensoriel 237


D.1 Tenseurs et produits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 237
D.1.1 Notations tensorielle et indicielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 237
D.1.2 Tenseurs particuliers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 237
D.1.3 Produits de tenseurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 238
D.2 Opérateurs différentiels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 239
D.3 Relations usuelles entre les opérateurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 241
D.4 Théorèmes de Green-Ostrogradski et d’intégration par parties . . . . . . . . . . . . . . . . . . 242

vii
TABLE DES MATIÈRES

E Changements de repères et de variables pour les équations de Navier-Stokes 243


E.1 Écriture des équations de Navier-Stokes dans un repère non galiléen . . . . . . . . . . . . . . 244
E.1.1 Changement de base et repérage d’un point dans un repère entraîné . . . . . . . . . . 244
E.1.2 Équations de Navier-Stokes en repère entraîné avec les composantes de la vitesse ab-
solue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 249
E.1.3 Équations de Navier-Stokes en repère entraîné avec les composantes de la vitesse re-
lative . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251
E.2 Impact du jeu de variables sur la forme des équations de Navier-Stokes . . . . . . . . . . . . 258
E.2.1 Écriture générique des équations du fluide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 258
E.2.2 Variables quasi-conservatives q = [ρ, u, eI ] et q = [ρ, u, eT ] . . . . . . . . . . . . . . . . 259
E.2.3 Variables thermiques q = [ρ, u, θ] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 260
E.2.4 Variables primitives q = [ρ, u, p] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 261
E.2.5 Variables primitives modifiées q = [ϑ, u, p] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 261
E.3 Discrétisation par la méthode des Volumes Finis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262
E.3.1 Discrétisation des équations de Navier-Stokes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262
E.3.2 Approximation du gradient en Volumes Finis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265

F Analyse des contributions des coefficients des modèles d’ordre réduit 267
F.1 Analyse des coefficients du modèle d’ordre réduit autonome . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 267
F.1.1 Comparaison des contributions convectives et diffusives . . . . . . . . . . . . . . . . . 267
F.1.2 Comparaison des contributions surfaciques et volumiques . . . . . . . . . . . . . . . . 268
F.2 Analyse des coefficients du modèle d’ordre réduit non-autonome . . . . . . . . . . . . . . . . 271
F.2.1 Comparaison des coefficients analytiques et identifiés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 271
F.2.2 Comparaison des contributions autonomes et non-autonomes . . . . . . . . . . . . . . 274

Bibliographie 277

viii
Nomenclature

1. Système dynamique
Σ : ensemble d’équations gouvernant le système dynamique
x, x : vecteur d’état (dans un espace vectoriel quelconque et discret)
y : vecteur de sortie du système dynamique
µ : vecteur de paramètres du système dynamique
p : dimension du vecteur de paramètres
t 0 , tf : instant initial et instant final pour l’étude du système dynamique
nv : nombre de variables indépendantes décrivant le système dynamique
N : nombre d’éléments pour la discrétisation du système dynamique
Nv : nombre de degrés de liberté du système dynamique discrétisé
q : vecteur des nv variables décrivant le système dynamique

2. Ensembles mathématiques et domaines


V : espace sur lequel est défini le vecteur d’état du système dynamique
M (n, m) : ensemble des matrices réelles à n lignes et m colonnes
Kn (M, d) : espace de Krylov de dimension n engendré par la matrice M et le vecteur d
Rn : espace vectoriel euclidien de dimension n
R+ : droite des réels positifs
I : intervalle de temps considéré pour l’étude du système dynamique
Ie : intervalle de temps pour l’échantillonnage des clichés
Ω : domaine spatial de calcul pour la description du système dynamique
∂Ω : frontière du domaine Ω
Γ : interface fluide-structure
L2 (Ω) : espace de Lebesgue des fonctions de carré intégrable sur un domaine Ω
d : dimension du domaine spatial Ω ⊂ Rd
n : normale extérieure au domaine Ω définie sur ∂Ω

3. Décomposition Orthogonale Propre


S : sous-espace de dimension réduite engendré par les modes POD
q : dimension du sous-espace de projection
X : ensemble des clichés
M : nombre de clichés contenus dans X
x(m) : cliché solution du système dynamique à l’instant tm
s(m) : cliché centré (de moyenne nulle)
ϕ(j) , Φ : mode POD d’indice j et matrice des modes POD
a(m) j : amplitude issue de la projection du cliché à l’instant tm sur le mode POD ϕ(j)
aj (t), a : amplitude associée au mode POD ϕ(j) et vecteur des amplitudes à l’instant t
PS : projecteur orthogonal sur le sous-espace S
E [·] , · : opérateur de moyenne temporelle
αm : poids de pondération associés à l’opérateur de moyenne pour chaque instant tm
λj : valeur propre associée au mode POD ϕ(j)
R, R : opérateur aux valeurs propres de la méthode directe
R ⋆ , R⋆ : opérateur aux valeurs propres de la méthode des clichés
ix
N OMENCLATURE

J : fonctionnelle du problème d’optimisation définissant les modes POD


r : rang de l’opérateur aux valeurs propres
c(m) j : coefficient de la décomposition du mode POD ϕ(j) sur les clichés x(m)
d(j) : vecteur propre associé à l’opérateur aux valeurs propres de la méthode des clichés
ǫq : erreur de troncature de la décomposition orthogonale propre
ηq : pourcentage d’énergie captée par les q premières valeurs propres
ηei : pourcentage d’énergie captée par la valeur propre λi associée au mode POD ϕ(i)

4. Modèle d’ordre réduit


np : nombre de périodes d’oscillation correspondant à la durée d’échantillonnage
A : matrice des corrélations temporelles intervenant dans le problème d’identification
Xi : vecteur des coefficients à identifier pour l’équation relative à l’amplitude modale ai (t)
p : nombre de valeurs singulières conservées dans l’approximation du pseudo-inverse
Nc , Nc,i : nombre de coefficients pour toutes les (une seule) équations(s) du modèle d’ordre réduit
Nca , Ncna : nombre de coefficients autonomes et non-autonomes du modèle d’ordre réduit
K, L, Q : opérateurs autonomes constant, linéaire et quadratique du modèle d’ordre réduit
S(t) : terme source non-autonome du modèle d’ordre réduit
D : opérateur d’amortissement pour la correction du modèle d’ordre réduit
ε∞ : erreur relative de reconstruction en norme infinie
εL2 ,x : erreur spatiale relative en norme L2 pour la quantité x
εaj : erreur moyenne en temps pour l’amplitude modale aj
δlog : décrément logarithmique
b
f (a) : second membre polynomial du modèle d’ordre réduit
pc : nombre de paramètres calibrés pour la correction du modèle d’ordre réduit
w : vecteur des paramètres calibrés de dimension pc

5. Matrices et opérateurs
In , In,1 : matrice identité de dimension n et vecteur de la diagonale de la matrice identité
0n , 0n,m : matrice nulle de dimension n × n et n × m
δij : symbole de Kronecker
h·, ·iH : produit scalaire entre deux vecteurs de l’espace de Hilbert H
k·kH : norme induite par le produit scalaire sur l’espace de Hilbert H

6. Indices et exposants
·h : indice relatif à la discrétisation
b· : grandeurs relatives au système dynamique réduit
·T : opérateur de transposition d’une matrice
·+ : pseudo-inverse d’une matrice
·A , ·E : grandeur vectorielle exprimée dans la base du repère absolu ou du repère entraîné

7. Repères et descriptions cinématiques


ΩM , ΩC , ΩA : domaine matériel, de contrôle et arbitraire pour les descriptions cinématiques
X, x, χ : coordonnées matérielles, spatiales et arbitraires
RA , RE : repère absolu et entraîné (relatif)
s : vitesse de déplacement des points du domaine arbitraire
se , sd : vitesse d’entraînement et vitesse de déformation
ω : vecteur vitesse angulaire de rotation du repère entraîné
e
x : position relative d’un point dans le repère entraîné
x, y, z, xi : directions associées aux vecteurs de la base spatiale

8. Variables aérodynamiques
ρ : masse volumique du fluide
ϑ : covolume (volume spécifique)
u : vecteur vitesse absolue du fluide
v : vecteur vitesse relative du fluide
σ : tenseur des contraintes de Cauchy
x
N OMENCLATURE

EI , eI : énergie interne et énergie interne volumique


EC , eC : énergie cinétique et énergie cinétique volumique
ET , eT : énergie totale et énergie totale volumique
qθ : vecteur flux de chaleur
kθ : constante de conductivité thermique
θ : température
p : pression
τ : tenseur déviatorique (tenseur des contraintes visqueuses)
λ, µ : coefficients de viscosité du fluide
D : tenseur des taux de déformation
Rs : constante spécifique des gaz parfaits
c p , cv : coefficients de chaleur spécifique à pression et volume constant
γ : rapport des coefficients de chaleur spécifique
Re, Pr, Ma : nombres adimensionnels de Reynolds, de Prandtl et de Mach
CL , CD : coefficients de portance et de traîné
fCor , fcen : forces volumiques de Coriolis et centrifuge

9. Abréviations
POD : « Proper Orthogonal Decomposition »
SVD : « Singular Value Decomposition »
MP : Méthode des Pénalités
MML : Méthode des Multiplicateurs de Lagrange
MFC : Méthode des Fonctions de Contrôle
ALE : « Arbitrary Lagrangian-Eulerian »
FALE-RAUA : Formulation ALE des équations de Navier-Stokes dans le repère absolu avec les compo-
santes de la vitesse absolue (exprimée dans le repère absolu)
FALE-REUE : Formulation ALE des équations de Navier-Stokes dans le repère entraîné avec les com-
posantes de la vitesse absolue (exprimée dans le repère entraîné)
FALE-REVE : Formulation ALE des équations de Navier-Stokes dans le repère entraîné avec les com-
posantes de la vitesse relative (exprimée dans le repère entraîné)

Note : Les vecteurs et les matrices seront représentés par des lettres grasses, avec des lettres minuscules
pour les premiers et majuscules pour les seconds dans la mesure du possible. Par ailleurs, les quantités
vectorielles seront notées en italique lorsque aucune référence à une base particulière n’est faite. Dans le cas
contraire, la notation droite est employée avec éventuellement un indice précisant la base dans laquelle la
quantité est exprimée.

xi
Introduction

Dans les moteurs d’avions ou plus généralement dans les turbomachines, certains éléments du com-
presseur et de la turbine sont confrontés à des problèmes de stabilité vibratoire importants qui limitent leur
domaine de fonctionnement. Il est donc indispensable de prédire d’une manière ou d’une autre les fron-
tières du domaine de stabilité de ces pièces mécaniques regroupées sous l’appellation générique de roues
aubagées. La prédiction des caractéristiques vibratoires se fait généralement soit au moyen d’essais expéri-
mentaux onéreux, soit par ordinateur à l’aide de codes de calcul numériques.
La réalisation d’essais expérimentaux n’est toutefois pas envisageable au cours de la phase de concep-
tion et le recours aux méthodes numériques s’impose donc comme une méthode alternative inévitable.
L’objectif principal est d’évaluer le plus précisément possible les fréquences de vibration et surtout l’amor-
tissement qui caractérisent la stabilité du système mécanique, afin de réduire les marges de sécurité intro-
duites pour assurer le fonctionnement du système dans un domaine stable.
La principale difficulté pour l’estimation précise des caractéristiques vibratoires est la nécessité de tra-
vailler avec des modèles physiques très élaborés puisque l’interaction entre l’écoulement aérodynamique
à travers les étages de la turbomachine et la structure déformable des aubes donne naissance à des phé-
nomènes complexes qualifiés d’aéroélastiques puisqu’ils résultent du couplage entre les deux milieux. Les
simulations numériques doivent alors être capables de reproduire le couplage entre le mouvement de la
structure élastique et l’écoulement exerçant les charges aérodynamiques sur la paroi des aubes.
La tâche n’est cependant pas aisée car — même en considérant une structure rigide — l’écoulement est
le siège de phénomènes aérodynamiques particulièrement difficiles à modéliser en raison des vitesses et
des pressions extrêmes qui règnent, ainsi que du mouvement relatif des différents étages de la turboma-
chine. Le développement de modèles extrêmement élaborés du fluide a néanmoins permis de reproduire
des phénomènes impliquant le caractère compressible, visqueux et turbulent des écoulements dans les tur-
bomachines où les aspects non-linéaires jouent un rôle important [40, 133]. Simultanément, l’augmentation
progressive de la puissance des processeurs et leur parallélisation dans les supercalculateurs a rendu pos-
sible l’obtention de solutions numériques, bien que les coûts de calcul pour y parvenir restent encore la
plupart du temps considérables.
Quoique réalisables, les simulations aéroélastiques dans un système aussi compliqué qu’un (voire plu-
sieurs) étage(s) de turbomachine deviennent très coûteuses en temps de calcul. Le coût de calcul est surtout
tributaire de la modélisation du fluide puisque la structure peut être — en première approche — raisonna-
blement modélisée par un matériau élastique linéaire. En revanche, le modèle du fluide doit tenir compte
du caractère non-linéaire, compressible, visqueux et turbulent de l’écoulement pour espérer obtenir une es-
timation précise des caractéristiques vibratoires du système aéroélastique. Bien que les simulations soient
une solution attractive, les coûts de calcul rédhibitoires doivent être réduits afin que l’outil de prédiction
devienne utilisable en pratique dans une phase de conception. La réduction du coût de calcul est d’autant
plus indispensable qu’un nombre important de simulations doit être réalisé afin d’obtenir une cartographie
du domaine de stabilité des turbomachines sur une certaine gamme de paramètres. En effet, le domaine de
fonctionnement dépend en particulier du nombre de Mach, de la vitesse de rotation des roues aubagées,
des déphasages inter-aubes,... Toutes ces combinaisons de paramètres entraînent par conséquent un nombre
considérable de simulations numériques qu’il n’est pas possible de réaliser en pratique avec précision.
Un moyen simple de réduire le temps de calcul consiste à employer pour le fluide des modèles plus
simples, pour lesquels certaines hypothèses restrictives sont émises. Ainsi, la turbulence, voire même le
caractère visqueux du fluide peut être négligé. En aéroélasticité, il est même encore courant de recourir aux
modèles théoriques de surfaces portantes établis pour un fluide parfait, irrotationnel supportant des petites
perturbations isentropiques. L’emploi de ces modèles dits simplifiés est néanmoins risqué et conduit parfois

1
I NTRODUCTION

à des réponses de mauvaise qualité puisque la prédiction de l’amortissement du système aéroélastique re-
quiert la modélisation précise de la dissipation dans le fluide. Une seconde classe de méthodes portant le
nom de modèles d’ordre réduit, parfois abrégés en ROM pour l’acronyme anglais « Reduced Order Model »,
a donc vu le jour. Le principe consiste à construire un nouveau modèle des équations du fluide comportant
un très petit nombre de degrés de liberté. Ce modèle est en général élaboré au moyen d’une projection des
équations du modèle complexe sur une base réduite, ou encore par l’identification des coefficients d’un sys-
tème dynamique réduit à partir des réponses du modèle non réduit. L’objectif est de préserver la physique
des phénomènes complexes dans le système dynamique réduit afin que les réponses produites restent de
bonne qualité malgré le très faible nombre de degrés de liberté.
Par le passé, un certain nombre de travaux ont été menés pour tenter de construire des modèles d’ordre
réduit des équations du fluide. Karpel [127, 128] a ainsi développé une méthode de lissage des forces aé-
rodynamiques généralisées basée sur l’interpolation de la réponse évaluée en quelques points de fonction-
nement. Cette méthode a l’avantage de pouvoir être adaptée aux différents modèles de fluides gouvernés
par des équations plus ou moins complexes. Toutefois, cette méthode ne s’applique que dans le cadre d’un
couplage aéroélastique faible, i. e. pour un couplage dans lequel un mouvement harmonique de la structure
est imposé. Par ailleurs, la méthode requiert le réglage assez empirique d’un certain nombre de paramètres
spécifiques au type d’écoulement modélisé et à la configuration étudiée. Plutôt que de chercher à interpo-
ler la réponse à partir d’un certain nombre de points dans le domaine de fonctionnement, certains auteurs
ont réellement cherché à construire un modèle d’ordre réduit du fluide en projetant les équations sur une
base réduite comportant un faible nombre de vecteurs. Lumley [156] avait ainsi obtenu un modèle d’ordre
réduit capable de reproduire les structures turbulentes et de capter ainsi la transition vers la turbulence.
La base de projection employée était construite à l’aide de la décomposition orthogonale propre d’un ensemble
de solutions calculées au préalable avec le modèle non réduit. Ce type de modèle d’ordre réduit est rapi-
dement devenu populaire puisque des phénomènes particulièrement complexes peuvent être reproduits à
très faible coût. Un des avantages primordial de la méthode est le fait que les non-linéarités peuvent être
préservées.
Concernant les écoulements dans les turbomachines, les modèles d’ordre réduit construits au moyen
de la décomposition orthogonale propre ont principalement été formulés pour les équations linéarisées du
fluide ce qui facilite la mise en œuvre et permet d’étudier le système dans le domaine fréquentiel. C’est ainsi
qu’ont procédé Hall et al. [104] et Epureanu et al. [68] par exemple. Plus récemment, Amsallem et al. [10] ont
repris le même type de modèles et ont introduit la notion d’interpolation entre les bases de projection pour
obtenir la réponse du système sur une certaine gamme de paramètres dont le nombre de Mach notamment.
Dans un registre assez proche, Florea et Hall [78] ont tenté de construire de manière similaire un modèle
d’ordre réduit par projection des équations du modèle non-réduit, mais en utilisant cette fois une base de
modes propres calculés pour les équations linéarisées du fluide. La méthode, largement employée en mé-
canique des structures, a ici été étendue au cas des fluides, mais l’extraction des modes propres devient
rapidement impossible lorsque le nombre de degrés de liberté du modèle initial devient important. Enfin,
la méthode de la balance harmonique employée notamment par Hall et al. [103] et Thomas et al. [227] consiste
à supposer la solution périodique et à formuler le système d’équations pour les premiers coefficients de la
décomposition de Fourier. L’inconvénient majeur est la nécessité de faire l’hypothèse d’une réponse har-
monique. Une bonne revue et une comparaison de différentes méthodes de réduction pour les écoulements
dans les turbomachines ont été réalisées par Dowell et al. [60].
Les différents travaux menés dans le cadre de la réduction de modèle pour l’écoulement dans les tur-
bomachines ont permis de décrire des phénomènes aérodynamiques de plus en plus complexes, tout en
conservant un coût de calcul très faible. Néanmoins, les phénomènes qualifiés de « dynamiquement non-
linéaires » par Dowell et al. [60] restent à l’heure actuelle impossibles à reproduire puisque la quasi-totalité
des modèles d’ordre réduit pour les écoulements dans les turbomachines est formulée pour les équations
linéarisées. La décomposition orthogonale propre possède toutefois le potentiel nécessaire pour la construc-
tion d’un modèle d’ordre réduit non-linéaire, d’autant plus qu’elle ne repose pas sur l’hypothèse d’un écou-
lement harmonique comme la méthode de balance harmonique. En dehors du cadre de l’aéroélasticité des
turbomachines quelques rares travaux ont été réalisés à l’aide de la décomposition orthogonale propre dans
le but de construire un modèle d’ordre réduit valable pour les fluides compressibles d’une part, ou capable
de reproduire des phénomènes issus du couplage fluide-structure d’autre part. Citons ainsi la formulation
non-linéaire du modèle d’ordre réduit développé par Vigo [240] à l’aide des variables primitives modifiées

2
I NTRODUCTION

(covolume, composantes de la vitesse et pression) pour les écoulements compressibles, ou encore le modèle
de Liberge [145] construit sur un domaine fictif comprenant à la fois le fluide et la structure afin de pouvoir
traiter correctement le problème du couplage fluide-structure.
Ces deux derniers modèles présentent chacun un intérêt substantiel pour la tâche qui nous incombe,
bien qu’aucune des formulations ne réponde totalement à notre problématique. Il s’agit en effet dans le
cadre de cette thèse de parvenir à construire un modèle d’ordre réduit non-linéaire valable pour un écoule-
ment compressible, visqueux et instationnaire et capable de tenir compte du mouvement d’une structure à
l’origine de phénomènes aéroélastiques. Pour cela, on se propose de s’inspirer de la formulation développée
par Vigo [240]. L’originalité du travail réalisé ici réside dans les méthodes de correction et d’identification
employées pour stabiliser le modèle d’ordre réduit, et surtout dans l’extension des équations pour la prise
en compte du mouvement d’une structure. Les développements présentés dans ce mémoire concernent un
profil isolé mais la méthodologie reste valable pour traiter les cascades de profils caractéristiques des roues
aubagées présentes dans les turbomachines.
La démarche suivie ici se divise en deux grandes parties : la première concerne le choix de la méthode de
réduction et son application à un système dynamique linéaire, tandis que la seconde concerne l’extension
à un système non-linéaire représentatif de l’écoulement d’un fluide compressible visqueux autour d’une
structure animée d’un mouvement de corps rigide. Le premier chapitre constitue un état de l’art des dif-
férentes méthodes de réduction envisageables pour construire le modèle de substitution. À l’issue de ce
chapitre, la décomposition orthogonale propre est choisie de manière objective selon des critères relatifs
aux phénomènes devant pouvoir être reproduits et les principales propriétés de la méthode sont rappelées
dans le chapitre 2. La première partie s’achève dans le chapitre 3 par l’évaluation de la formulation POD-
Galerkin qui est d’abord comparée à une formulation analytique puis discrète du modèle d’ordre réduit
dans le cas d’un système linéaire autonome. Trois techniques sont alors développées pour tenir compte
avec l’approche POD-Galerkin d’une condition limite non-homogène de type Dirichlet. Le modèle d’ordre
réduit non-autonome obtenu dans ce cas représente alors l’archétype du problème d’aéroélasticité dans
lequel l’instationnarité est provoquée par une condition limite de ce type. Les travaux du chapitre 3 sont ré-
sumés dans les actes du congrès ISMA 08 [180] ainsi que dans l’article [181] publié dans le Journal of Sound
and Vibration. Dans le chapitre 4 de la seconde partie, un rappel des équations de Navier-Stokes écrites
dans un repère absolu puis entraîné avec les variables conservatives pour un fluide supposé compressible
et visqueux sera effectué. La formulation de Vigo [240] écrite à l’aide des variables primitives modifiées
sera alors étendue afin de tenir compte du mouvement d’une structure dans un repère entraîné. Les équa-
tions ainsi obtenues serviront par la suite pour la projection de Galerkin intervenant dans la construction
du modèle d’ordre réduit. Un premier modèle d’ordre réduit non-linéaire qualifié d’aérodynamique valable
dans un domaine de frontières fixes est alors développé au chapitre 5 pour reproduire le phénomène de
détachement de vortex dans le sillage d’un profil NACA0012 fixe fortement incliné. Un certain nombre
de méthodes de correction seront alors mises en œuvre pour tenter de reproduire au mieux la réponse du
système non-réduit. Enfin, un dernier modèle d’ordre réduit qualifié d’aéroélastique par abus de langage est
construit au chapitre 6 pour tenir compte du mouvement d’une structure supposée rigide. Celui-ci est mis
en œuvre pour reproduire l’écoulement autour d’un profil NACA0064 auquel un mouvement d’oscillation
harmonique est imposé, ce qui provoque l’oscillation du choc sur les parois. Une méthode d’identification
des coefficients du modèle d’ordre réduit est alors employée pour reproduire correctement la réponse et
réduire le coût de construction du modèle d’ordre réduit. La formulation ainsi que quelques résultats rela-
tifs aux chapitres 5 et 6 sont résumés dans les actes du congrès IFASD 09 [182]. Cette dernière étape ouvre
donc la voie à l’utilisation du modèle d’ordre réduit aéroélastique pour reproduire la réponse du système
sur une certaine gamme de fréquence ou d’amplitude de mouvement de la structure.

3
Première partie

Choix du modèle d’ordre réduit et


application à un système dynamique
linéaire

5
Chapitre 1
État de l’art des méthodes de réduction de modèle
pour l’aérodynamique

Sommaire
1.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
1.2 Principe de la réduction de modèles et classification . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
1.3 Description des principaux modèles d’ordre réduit physiques . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
1.3.1 Projection sur la base des modes propres et sous-structuration dynamique . . . . . . . 13
1.3.2 Approximation de la fonction de transfert . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
1.3.2.1 Balanced Truncation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
1.3.2.2 Méthodes d’approximation de Krylov . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
1.3.3 Identification du système réduit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.3.4 Décomposition Orthogonale Propre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
1.3.5 Modes d’oscillation et d’interaction principaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
1.3.6 Équilibrage harmonique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
1.3.7 Réduction sur une base construite a priori . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
1.3.8 Méthodes de réduction alternatives et dépendance avec un paramètre . . . . . . . . . 29
1.4 Synthèse et justification du choix de la méthode POD . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32

7
1. É TAT DE L’ ART DES MÉTHODES DE RÉDUCTION DE MODÈLE POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

1.1 Introduction
Dans ce chapitre, on considère un système dynamique représenté par un ensemble d’équations dont la
solution, caractérisée par un certain nombre de variables indépendantes, fournit une description du phé-
nomène étudié. Le système dynamique correspond aux équations du fluide dans le cadre de cette thèse,
mais peut, d’une manière plus générale, traduire le comportement d’un système mécanique ou physique
quelconque. Pour commencer, le principe de la réduction de modèle et les différentes approches envisa-
geables sont rappelées d’un point de vue formel afin d’introduire la classification employée par la suite
pour présenter les différentes catégories. On choisit ici de distinguer les modèles d’ordre réduit de type
surface de réponse, dont la construction est indépendante des équations gouvernant le système dynamique,
et les modèles d’ordre réduit physiques, qui, comme leur nom l’indique, tentent de conserver les propriétés
physiques en utilisant les équations du système dynamique. À l’intérieur de ces deux catégories, plusieurs
classes de modèles d’ordre réduit peuvent encore être isolées. Dans tous les cas, le principe de la méthode
de réduction est brièvement décrit et les principaux avantages et inconvénients sont signalés. À l’issue de
cet état de l’art des méthodes de réduction de modèles, un choix objectif de la méthode employée sera
effectué dans l’optique de la construction d’un modèle d’ordre réduit non-linéaire capable de reproduire
l’écoulement d’un fluide compressible.

8
1.2. Principe de la réduction de modèles et classification

1.2 Principe de la réduction de modèles et classification


La modélisation de phénomènes physiques au moyen de simulations numériques requiert la plupart
du temps la résolution d’un système dynamique, pour peu que le phénomène étudié soit instationnaire. On
supposera ici que ce système est composé d’un ensemble d’équations aux dérivées partielles ou ordinaires
explicites, dont la résolution fournit l’état x du système en réponse à une entrée µ supposée paramétrée par
p variables réelles. Le système dynamique peut alors s’écrire sous la forme 1

(Σ) : ẋ = f (x, µ). (1.1)

L’état x du système est supposé évoluer dans un espace de dimension infinie V et sur un intervalle de
temps fini I = [t0 ; t0 + tf ] ⊂ R+ où t0 est l’instant initial et tf l’instant final de la simulation. L’opérateur
f est une application de V × Rp dans W, et décrit la réponse du système au moyen d’opérateurs spatiaux
éventuellement différentiels. Pour un grand nombre d’applications en mécanique, l’espace des fonctions de
carré intégrable V = L2 (Ω) ou encore l’espace de Sobolev H 1 (Ω) d’ordre 1 fournissent un cadre idéal pour
la description des milieux continus dans un domaine spatial Ω ⊂ Rd , d = 1, 2 ou 3. Bien souvent, l’état x du
système est décrit par nv variables indépendantes pouvant appartenir chacune à des espaces V différents.
La connaissance de l’ensemble des solutions de l’équation (1.1) définit le flot associé au système dy-
namique. En pratique on cherche plutôt une solution particulière associée à une condition initiale x0 =
x(t = t0 ) pour laquelle le problème de Cauchy possède une solution unique. La détermination de l’état x
du système n’est généralement pas une fin en soi et sert seulement d’intermédiaire pour en déduire une
sortie y ∈ Vy qui correspond à une grandeur d’intérêt souvent macroscopique, telle que y = g(x, µ). Dans
le cadre de cette thèse, le système dynamique (1.1) représente les équations du fluide et l’état x correspond,
par exemple, aux nv variables conservatives tandis que la sortie y représente les forces aérodynamiques
s’exerçant sur la paroi d’un profil, ou encore la fréquence ou l’amortissement de ces forces. Le paramètre
µ peut correspondre à certaines propriétés physiques du fluide, à certaines conditions limites, à un terme
source ou encore aux paramètres géométriques du domaine spatial sur lequel les équations sont résolues.
En dehors des cas académiques, la résolution analytique du système (Σ) est impossible et c’est la raison
pour laquelle les simulations numériques reposent sur une approximation du système d’équations basée
sur la discrétisation du domaine de calcul Ω. Le principe consiste alors à rechercher une solution approchée
xh dans un nouvel espace V h ⊂ V de dimension finie Nv = O(nv /h) où h est le paramètre de discréti-
sation spatiale. L’application discrète fh est alors définie de V h × Rp dans W h . La sortie y du système est
éventuellement discrétisée afin d’être exprimée à partir de l’état discret xh : dans ce cas, la sortie appro-
chée yh ∈ Vyh ⊂ Vy découle de la relation approchée yh = gh (xh , µ). La solution approchée xh du système
dynamique discrétisé correspond alors à la solution du problème approché

(Σh ) : ẋh = fh (xh , µ). (1.2)

Les systèmes dynamiques rencontrés en mécanique sont couramment discrétisés par des méthodes Élé-
ments Finis, Volumes Finis, ou encore des méthodes spectrales et sont capables de fournir une description
d’autant plus précise et fine que le pas de discrétisation h est petit. Le nombre Nv des degrés de liberté, i. e. les
composantes du vecteur xh dans l’espace discret Vh , augmente par conséquent lorsque le pas de discrétisa-
tion diminue. Lorsque le domaine spatial Ω est discrétisé en N éléments et que l’état du système est décrit
par nv variables évaluées en un unique point par élément de discrétisation, le nombre de degrés de liberté
est Nv = N × nv .
Ainsi, lorsque les phénomènes sont régis par un système dynamique complexe ou sont caractérisés
par des échelles de temps (ou d’espace) très différentes, la simulation numérique devient très coûteuse en
temps de calcul et seul un nombre très limité de calculs peut être mené. On parlera alors de modèles d’ordre
élevé pour désigner les modèles caractérisés par un nombre important de degrés de liberté nécessaires pour
accéder aux détails de la réponse du système. Les équations de Navier-Stokes peuvent ainsi être considé-
rées comme un modèle d’ordre élevé, notamment lorsque l’écoulement d’un fluide turbulent en régime
transsonique est étudié. De ce fait, bien que des modèles numériques précis existent et soient en mesure de
1 Les systèmes d’ordre deux ou plus, i. e. impliquant des dérivées d’ordre supérieur à un en temps, peuvent se ramener à un système

d’ordre un en temps en introduisant simplement une variable supplémentaire telle que si le système est ẍ = f (x, ẋ, µ) par exemple,
alors le changement de variable z = ẋ permet de transformer le système en ż = fz (x, z, µ) et le système dynamique initial d’ordre
deux en temps est équivalent à un système de deux équations d’ordre un en temps.

9
1. É TAT DE L’ ART DES MÉTHODES DE RÉDUCTION DE MODÈLE POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

fournir la solution détaillée du système dynamique, leur emploi reste généralement confiné à la validation
du comportement du système dynamique sur un nombre très restreint de cas d’étude.
Par conséquent, il est nécessaire de travailler avec des modèles numériques plus légers comportant un
nombre de degrés de liberté moins important. L’idée n’est pas récente et un exemple célèbre est le système
dynamique de Lorenz [151] qui tente de décrire le couplage entre l’atmosphère et l’océan par un système
à trois degrés de liberté. Dans ce cas, le développement d’un tel modèle se justifiait par l’impossibilité de
résoudre numériquement des systèmes d’équations de taille importante. Le recours à ce type de réduc-
tion reste néanmoins d’actualité lorsque l’objectif est de disposer de la réponse du système pour un grand
nombre de paramètres comme c’est le cas au cours des procédures d’optimisation ou encore lorsqu’il est
nécessaire d’accéder à la réponse en temps réel pour alimenter les boucles de contrôle actif introduites dans
les systèmes asservis. Un autre intérêt de la réduction de modèle concerne l’analyse des systèmes com-
plexes. En effet, les modèles d’ordre élevé produisent des solutions extrêmement détaillées contenant une
masse d’information considérable dont il est parfois difficile d’extraire les informations pertinentes. Des
méthodes issues par exemple du domaine de la statistique permettent alors de mettre en évidence les struc-
tures intéressantes et d’analyser ainsi plus facilement le système. Ce type d’approche s’inscrit cependant
plutôt dans le registre de la compression de données car aucun système dynamique réduit n’est réellement
formé. Toutefois les structures identifiées peuvent ensuite servir dans certains cas à la construction d’un
modèle d’ordre réduit et c’est la raison pour laquelle on mentionne ici ce type d’approche.
À ce stade, il faut éclaircir la notion de réduction de modèle puisqu’il existe une grande diversité dans
la manière de procéder. La première distinction opère au niveau du choix des hypothèses émises pour la
construction du modèle d’ordre réduit :
• soit le modèle d’ordre élevé est abandonné au profit d’un modèle mathématique simplifié par des
hypothèses plus restrictives ;
• soit le modèle d’ordre élevé sert de base à la construction d’un modèle d’ordre réduit capable de
retranscrire avec un niveau de détail pratiquement équivalent la réponse du système.
Dans le premier cas, la réduction du nombre de degrés de liberté provient par exemple d’hypothèses
simplificatrices : ainsi, si le problème est de simuler l’écoulement au travers d’une roue aubagée, l’hypo-
thèse d’un fluide parfait au lieu d’un fluide visqueux permet de réduire le nombre de degrés de liberté dans
la couche limite, de même que l’hypothèse de symétrie cyclique permet de réduire le domaine spatial à un
seul secteur compris entre deux aubes successives. La réduction du nombre de degrés de liberté s’obtient
néanmoins au prix d’hypothèses de base qui deviennent parfois trop restrictives pour que la réponse ob-
tenue soit satisfaisante. Dans ce cas il ne s’agit pas à proprement parler d’une réduction de modèle mais
plutôt d’un changement de modèle qui s’accompagne d’une perte au niveau des phénomènes modélisés. Les
deux hypothèses proposées par exemple dans le cas du fluide conduisent dans le premier cas à négliger les
effets visqueux, et dans le second cas à supposer que les aubes sont accordées.
Dans le second cas, l’idée consiste à élaborer un nouveau modèle reposant sur les mêmes hypothèses de
sorte que les mêmes phénomènes puissent a priori être reproduits. La plupart de ces modèles tirent parti
d’un certain nombre de réponses calculées avec le modèle d’ordre élevé ou obtenues expérimentalement
et qui constituent en quelque sorte une base de données représentative du système. Puisque le modèle
d’ordre élevé a été employé pour obtenir les réponses, les informations contenues dans la base de données
présentent un niveau de finesse élevé. Par conséquent, l’utilisation intelligente de ces données devrait pou-
voir donner naissance à un modèle d’ordre réduit ne contenant qu’un faible nombre de degrés de liberté
mais capable de reproduire la réponse du système avec un niveau de détails pratiquement équivalent. Ce
procédé de construction présente néanmoins deux inconvénients majeurs : tout d’abord il est nécessaire de
générer une base de données représentative, et ensuite le modèle d’ordre réduit obtenu est dépendant des
données de par sa construction.
Le contexte de cette thèse conduit naturellement vers le développement d’un modèle d’ordre réduit
puisque notre objectif est ici d’obtenir un modèle représentatif d’un écoulement complexe dans lequel les
phénomènes de couplage aéroélastique ne peuvent pas être correctement captés par un modèle simplifié.
Le terme de modèle d’ordre réduit regroupe encore un grand nombre de méthodes qui peuvent être clas-
sées en deux grandes catégories.
La première d’entre elles consiste à reconstruire la sortie du modèle d’ordre élevé sans information phy-
sique particulière en dehors d’un ensemble d’échantillons censé être représentatif du comportement du

10
1.2. Principe de la réduction de modèles et classification

système dynamique. Le modèle d’ordre élevé est donc supposé pouvoir être décrit par une fonction cible
telle que la sortie y s’exprime directement en fonction du paramètre µ sans qu’aucun système dynamique
réduit ne soit construit. C’est pourquoi ces modèles sont qualifiés de boîtes noires ou de modèles de type surface
de réponse puisque la fonction présupposée n’est pas directement fonction de l’état x. La plupart du temps, la
détermination de la fonction cible s’effectue au moyen de processus régressifs. Parmi les méthodes couram-
ment employées, on peut citer les méthodes d’estimation linéaire stochastique [1], les réseaux de neurones
[61], les fonctions à base radiale, la régression par vecteurs supports [235] ou encore le Kriging [134, 163].
Une revue assez intéressante des méthodes les plus répandues pour les applications en optimisation est
fournie par Forrester et Keane [79]. On ne développera pas plus en détails ces méthodes pour les raisons
suivantes : tout d’abord, il paraît difficile de pouvoir reproduire avec de tels modèles le comportement ins-
tationnaire d’un système dynamique non-linéaire étant donné qu’aucune information sur la physique du
problème n’est prise en compte dans la construction du modèle d’ordre réduit ; par ailleurs, l’objectif final
est de parvenir à un système dynamique réduit qui puisse être couplé aux équations de la structure afin de
former un modèle d’ordre réduit aéroélastique, et le couplage risque d’être difficile à mettre en œuvre si le
modèle d’ordre réduit ne fournit que la sortie y du système dynamique sans information sur l’état x.
La seconde catégorie de méthodes repose, pour la grande majorité, sur des techniques de projection des
équations du modèle d’ordre élevé sur une base de dimension réduite convenablement choisie. Par opposi-
tion aux méthodes précédentes, on parle de modèles d’ordre réduit physiques puisque les équations du système
réduit sont souvent obtenues par des processus projectifs. Le système réduit conserve alors la même forme
que celle des équations du modèle d’ordre élevé si bien qu’une partie des propriétés du système initial est
conservée. Les méthodes les plus répandues sont les méthodes de sous-structuration dynamique, les mé-
thodes d’identification de la fonction de transfert, les méthodes de projection sur la base fournie par une
décomposition orthogonale propre, ou encore les méthodes de réduction sur une base construite a priori.
Quelques unes de ces méthodes seront brièvement présentées dans le paragraphe suivant.

+ Hypothèses simplificatrices −

Modèle
d’ordre
Degrés de liberté

io n élevé
cis
Pré

Modèle Modèle d’ordre réduit


simplifié Boîte Physique
noire

Figure 1.1 : Schématisation des différentes familles de modèles d’ordre réduit en fonction des hypothèses émises sur le système
dynamique et du nombre de degrés de liberté impliqués.

Le classement des différentes méthodes de réduction est schématisé sur la figure 1.1 en fonction des
hypothèses émises sur les modèles employés et du nombre de degrés de liberté impliqués. Les modèles
d’ordre réduit ont été placés dans une zone correspondant à des hypothèses légèrement plus fortes que
celles du modèle d’ordre élevé car, même si il ne s’agit pas d’une règle générale, il est courant d’émettre
quelques simplifications pour faciliter la construction du modèle d’ordre réduit.
La construction d’un modèle d’ordre réduit physique s’effectue généralement en deux temps : la pre-
mière étape consiste à générer la base de données représentative du système dynamique2 puis à construire
la base de projection, et la seconde étape est dédiée à la projection des équations du modèle d’ordre élevé
sur cette base de dimension réduite.
2 La production d’une base de données n’est pas toujours indispensable en fonction de la méthode de réduction adoptée.

11
1. É TAT DE L’ ART DES MÉTHODES DE RÉDUCTION DE MODÈLE POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

Une fois la base de projection déterminée, le modèle d’ordre réduit est construit à partir du système
dynamique continu (Σ) ou discrétisé (Σh ) de telle manière qu’il soit gouverné par un très petit nombre
de degrés de liberté. Il s’agit alors de reformuler le système afin de déterminer l’état approché x
b dans un
espace V q de dimension finie q telle que q ≪ Nv . L’application f est alors une nouvelle fois redéfinie sur
V q × Rp à valeurs dans W q et le système dynamique réduit est

(Σ) ḃ = fb(b
b : x x, µ). (1.3)

La relation qui définit la sortie y en fonction de l’état x et de l’entrée µ peut aussi être redéfinie sur des
espaces de dimension réduite mais cela ne présente qu’un intérêt relatif puisque dans la majorité des cas
c’est la résolution du système dynamique qui est coûteuse, et non la détermination de la grandeur d’intérêt
y. Toutefois si cela est nécessaire il est toujours possible de définir une nouvelle relation yb = b
g(b
x, µ).

V Vh
Discrétisation
(Σ) : (Σh ) :
ẋ = f (x, µ) ẋh = fh (xh , µ)

Vq

Réduction Réduction
continue b : discrète
(Σ)
ḃ = fb(b
x x, µ)

Figure 1.2 : Schéma de principe de la réduction de modèle : le système réduit (Σ) b défini dans l’espace V q se déduit soit de la
formulation continue du système (Σ) défini dans V, soit de la formulation discrète du système (Σh ) défini dans V h .

Le principe de la réduction du système (Σ) est schématisé sur la figure 1.2 où le système discrétisé
b apparaissent. Ce dernier peut s’obtenir soit à partir de la formulation
(Σh ) ainsi que le système réduit (Σ)
continue des équations du système, soit directement à partir de la formulation discrétisée.
Dans les paragraphes suivants, les méthodes de réduction physiques les plus courantes sont présentées
brièvement en commençant par décrire celles dévolues aux systèmes linéaires puis celles applicables à
n’importe quel type de système dynamique. L’accent est mis sur les applications en aérodynamique puisque
notre objectif est de réaliser un modèle d’ordre réduit pour les systèmes aéroélastiques dans lesquels la
simulation de la partie structure est peu pénalisante en terme de coût de calcul.

12
1.3. Description des principaux modèles d’ordre réduit physiques

1.3 Description des principaux modèles d’ordre réduit physiques


L’état de l’art des méthodes de réduction de modèle est ici restreint à la description des principaux mo-
dèles dits physiques qui ont déjà été employés par le passé en mécanique des fluides ou qui présentent un
certain potentiel pour ce type d’applications. Il existe une grande diversité de modèles d’ordre réduit phy-
siques dont la plupart a à l’origine été développée pour des applications ou dans des domaines spécifiques,
ou qui utilisent des propriétés intrinsèques au système dynamique — telles que la linéarité, l’existence
d’une base modale associée,... La classification des modèles d’ordre réduit physiques est donc une tâche
délicate puisque chacune possède ses propres caractéristiques. Dowell et al. [60] ont ainsi choisi de dis-
tinguer les méthodes basées sur les caractéristiques modales du système, de celles utilisant la notion de
fonction de transfert aérodynamique. Antoulas [11] s’est intéressé quant à lui aux systèmes linéaires et a
préféré opposer les méthodes basées sur la décomposition en valeurs singulières aux méthodes utilisant les
sous-espaces de Krylov pour des questions de conservation de la stabilité des systèmes. Les méthodes sont
ici présentées dans un ordre progressif, permettant de réduire des systèmes de plus en plus complexes en
partant de systèmes linéaires pour aboutir à des systèmes non-linéaires.

1.3.1 Projection sur la base des modes propres et sous-structuration dynamique


En mécanique des structures, les modes propres d’un système élastique linéaire fournissent une base
idéale pour la projection. Le principe consiste à chercher une solution particulière du système discret pour
de petites oscillations libres autour d’une position d’équilibre. Pour cela, on suppose que tous les degrés de
liberté suivent à un facteur près la même loi temporelle. En notant x ∈ RNv le vecteur des degrés de liberté
du système dynamique, la solution particulière s’écrit

e a(t),
x=ψ (1.4)
e est indépendant du temps et a(t) correspond à la loi temporelle. Les équations de Lagrange
où le vecteur ψ
pour le mouvement libre autour d’une position d’équilibre stable s’écrivent sous la forme d’un système
d’équations différentielles ordinaires linéaires qui portent sur les degrés de liberté x. Ces équations sont
regroupées sous la forme matricielle
M ẍ + K x = 0 (1.5)
dans laquelle les matrices M et K de M (Nv , Nv ) correspondent respectivement à la matrice de masse et
de raideur de la structure. Le remplacement de la relation (1.4) dans le système d’équations (1.5) donne :
Mψ e ä(t) + K ψ
e a(t) = 0. Lorsque le système a une position d’équilibre stable, les matrices M et K sont
non singulières. Le système d’équations précédent s’écrit aussi K ψ e = λM ψ e en posant λ = −ä(t)/a(t).
On peut démontrer assez simplement [83, chap. 2] que le facteur λ est réel et strictement  positif, de sorte
qu’il est transformé en λ = ω 2 . Le système prend finalement la forme K − ω 2 M ψ e = 0 qui comprend
Nv équations linéaires et homogènes. Les modes propres du système sont alors définis comme les solutions
non triviales du problème aux valeurs propres

K − ωj2 M ψ (j) = 0, (1.6)

tel que ωj2 soit racine de l’équation algébrique det K − ωj2 M = 0. Puisque les valeurs propres ωj2 sont
réelles et positives, les vecteurs propres associés qui portent le nom de modes propres sont aussi réels.
D’après la définition de λ, la loi d’évolution temporelle pour chaque mode propre s’écrit äj (t)+ωj2 aj (t) =
0 et la solution est harmonique de pulsation ωj . La détermination des modes propres de la structure est
d’abord intéressante puisqu’elle permet de décrire le comportement fréquentiel de la structure et d’identi-
fier les fréquences susceptibles de faire entrer le système en résonance en fonction des sollicitations impo-
sées. Cependant, le calcul des modes propres est aussi à la base de la construction de méthodes de réduction
de modèles. En effet, les vecteurs propres associés au problème (1.6) peuvent être regroupés pour former la
base tronquée des modes propres Ψ = [ψ (1) , . . . , ψ (q) ] dans laquelle les q premiers modes propres associés
aux fréquences propres ωj les plus basses ont été conservés. Par analogie avec l’équation (1.4), le vecteur x
des degrés de liberté du système se décompose sur la base des modes propres avec la relation

x = Ψ a(t). (1.7)

13
1. É TAT DE L’ ART DES MÉTHODES DE RÉDUCTION DE MODÈLE POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

La solution particulière est donc approchée par un ensemble de modes propres associés aux premières
fréquences de vibration de la structure. Le modèle d’ordre réduit correspondant au modèle d’ordre élevé
décrit par les équations discrètes (1.5) est alors obtenu en introduisant la décomposition précédente (1.7)
dans les équations du système puis en projetant le tout sur la base des modes propres. L’opération de
projection est une simple multiplication matricielle par la transposée de la matrice Ψ. À l’issue de ces
manipulations, le modèle d’ordre réduit se présente donc sous la forme
   
ΨT M Ψ ä(t) + ΨT K Ψ a(t) = 0. (1.8)

Or les modes propres sont orthonormaux par rapport à la matrice de masse et orthogonaux par rapport à
la matrice de rigidité [83]. Les coefficients d’orthogonalité correspondent dans ce dernier cas aux valeurs
propres ωj , si bien qu’avec ces propriétés le système d’équation (1.8) se réduit à

äj (t) + ωj2 aj (t) = 0, pour tout j = 1, . . . , q. (1.9)

Il s’agit bien d’un modèle d’ordre réduit puisque la résolution du système précédent n’implique qu’un sys-
tème de q équations au lieu des Nv équations du système discret initial. La base de projection servant à
former le modèle d’ordre réduit est ici calculée directement à partir des opérateurs du système mécanique,
sans qu’il n’y ait besoin de recourir à des simulations préalables pour générer une base de données repré-
sentative du système.
Le modèle d’ordre réduit construit de cette façon permet alors de calculer à moindre coût la réponse
de la structure qui est donc supposée pouvoir être correctement représentée par ses premiers modes de
vibration. Il s’avère que dans de nombreux cas la réponse de la structure est principalement gouvernée par
les modes de basse fréquence et par conséquent cette technique de réduction s’avère efficace. Elle peut en
particulier être employée dans la résolution de problèmes couplés afin de réduire au maximum les coûts
de calcul, comme l’ont suggéré Dowell et al. [60] et Kamakoti et Shyy [125]. Carstens et al. [38] ont ainsi
projeté les équations discrétisées d’un étage complet de turbomachine sur la base des modes propres. Pour
ce type de configuration dans laquelle une symétrie cyclique de la géométrie est présente, le nombre de
degrés de liberté peut être encore nettement réduit au moyen de techniques de sous-structuration. C’est
ainsi qu’ont procédé Tran et al. [231] pour prédire l’écoulement dans un étage de turbomachine en ne si-
mulant le système que sur un seul secteur compris entre deux aubes. L’hypothèse de symétrie cyclique est
alors combinée aux méthodes de synthèse modale inspirées de celles proposées par Hurty [114] et Craig et
Bampton [53] et à partir desquelles de nombreux développements ont depuis été réalisés [230, 232].
Tous ces travaux ne concernent néanmoins que la réduction de la partie structure. L’application de la
méthode à un système aérodynamique s’avère particulièrement intéressante puisque dans ce cas les milieux
fluide et structure pourraient être représentés par des modèles d’ordre réduit reposant sur un formalisme
identique, idéal pour traiter un problème couplé aéroélastique. Lorsque le fluide est supposé incompres-
sible, parfait et homogène, les équations d’un fluide potentiel, linéarisées pour de petites perturbations
suffisent à le modéliser correctement. Dans ce cas, il est possible de définir des caractéristiques « vibra-
toires » du fluide décrivant les fluctuations autour d’un état d’équilibre. Il devient alors possible de définir
des modes de ballottement en basse fréquence, ou encore des modes acoustiques en haute fréquence. Ainsi,
le système fluide peut être réduit au moyen de la base modale au même titre que la structure. Le lecteur
pourra consulter en particulier les travaux de Morand et Ohayon [168] ainsi que les références [204, 211]
pour plus de détails sur le calcul des modes propres dans ce contexte.
La difficulté apparaît lorsque le fluide évolue dans un domaine infini sur lequel il est modélisé par les
équations d’Euler ou de Navier-Stokes, puisque dans ce cas, le système dynamique est non-linéaire. Do-
well et al. [60] sont néanmoins parvenus à définir des modes propres sous l’hypothèse que l’écoulement est
dynamiquement linéaire : la partie stationnaire de l’écoulement est supposée non-linéaire si nécessaire mais
le caractère instationnaire du fluide est uniquement dû à des petites perturbations linéaires autour de l’état
d’équilibre. De cette manière, le système dynamique du fluide est linéarisé et en l’absence d’excitation ex-
terne, les équations se ramènent à un problème aux valeurs propres. À la différence des matrices de masse
et de raideur de la structure, l’opérateur aérodynamique linéarisé n’est pas symétrique. Les valeurs propres
obtenues sont donc complexes et se voient associées des vecteurs propres à droite et à gauche. Le principe
est expliqué en détail dans [59] et est résumé de façon générique pour l’ensemble des modèles fluide dans
[60]. La méthode est toutefois confrontée à deux inconvénients majeurs. Le premier, purement numérique,

14
1.3. Description des principaux modèles d’ordre réduit physiques

vient du fait que l’extraction des valeurs et vecteurs propres devient rapidement fastidieuse lorsque le
nombre de degrés de liberté du modèle augmente. Des techniques particulières ont par conséquent dû être
spécifiquement développées pour contourner ce problème [190]. La seconde limitation provient de l’hypo-
thèse d’un écoulement linéarisé qui devient nécessaire pour construire le modèle d’ordre réduit.
La méthode est néanmoins efficace pour les écoulements dynamiquement linéaires, et Dowell et al. [60]
l’ont donc employé pour reproduire l’écoulement potentiel autour d’un profil portant isolé et ont étudié
l’influence de la discrétisation du domaine et de son étendue sur les valeurs propres qui décrivent la stabi-
lité du système. Florea et Hall [78] ont appliqué la même technique sur un exemple similaire et ont indiqué
que l’introduction d’une correction statique s’avère nécessaire pour tenir compte des modes propres de
haute fréquence omis lors de la troncature. La solution instationnaire est alors décomposée en deux parties
qui correspondent respectivement à la réponse du système à une perturbation quasi-statique et à la partie
dynamique. Le calcul de la correction à chaque pas de temps alourdit toutefois le calcul. En employant
une formulation basée sur la méthode des Éléments de Frontière, Shahverdi et al. [207] sont parvenus à
construire un problème aux valeurs propres dans lequel les modes quasi-statiques sont éliminés, de sorte
que la correction devient superflue. Enfin, Willcox [247] a comparé la réduction sur la base des modes
propres à d’autres techniques dans le cas de la réponse aéroélastique d’un étage de turbomachine où le
fluide est modélisé par les équations d’Euler linéarisées. Les résultats ont montré que la méthode devient
rapidement fastidieuse à mettre en œuvre lorsque le modèle initial non réduit comporte un nombre impor-
tant de degrés de liberté.
Les méthodes de condensation développées en mécanique des structures constituent aussi une alterna-
tive pour la construction des modèles d’ordre réduit en aérodynamique. C’est ainsi que Sarkar et Venkatra-
man [201] ont appliqué la méthode SEREP3 pour construire un modèle d’ordre réduit capable de reproduire
l’écoulement potentiel dans une cascade de profils.
La projection des équations sur la base des modes propres est donc une première possibilité, limitée
néanmoins par deux restrictions majeures : d’une part la détermination des modes propres devient rapi-
dement impossible à mettre en œuvre lorsque le modèle d’ordre élevé comporte un nombre important de
degrés de liberté, et d’autre part les modes ne sont définis que pour des systèmes dynamiques linéaires.
Une perspective d’amélioration a cependant été proposée par Shaw et Pierre [209] qui ont tenté d’étendre
la notion de modes propres pour construire des modes non-linéaires, définis comme des variétés invariantes
tangentes aux modes propres linéaires à proximité d’un certain point. La méthode de construction propo-
sée dans [209] ne s’applique toutefois qu’à des systèmes dynamiques impliquant des dérivées secondes en
temps et un certain nombre de développements doivent encore être effectués pour espérer appliquer ce
type d’approche aux équations non-linéaires de la mécanique des fluides.

1.3.2 Approximation de la fonction de transfert


En théorie du contrôle linéaire, les systèmes dynamiques sont considérés comme des systèmes en-
trée/sortie et se mettent donc sous la forme

ẋ(t) = A x(t) + B u(t)
(Σlin ) : . (1.10)
y(t) = C x(t) + D u(t)
La première équation correspond à l’écriture discrète d’un système dynamique linéaire (Σ) tel qu’il a été
défini à l’équation (1.2). Le vecteur x ∈ RNv contient l’ensemble des degrés de liberté discrets du système
dynamique et le vecteur y ∈ RNy correspond à la sortie discrète qui décrit la grandeur d’intérêt du système.
Enfin le vecteur u ∈ Rp est le vecteur d’entrée qui reflète l’action du paramètre µ agissant sur le système
dynamique. La version discrétisée de l’équation (1.2) prend alors la forme (1.10) dans laquelle les opérateurs
du système dynamique se réduisent aux matrices A, B, C et D. Le système est donc entièrement décrit par
la matrice Σlin ∈ M (Nv + Ny , Nv + p) définie par
 
A B
Σlin = . (1.11)
C D
3 Abréviation de « System Equivalent Reduction and Expansion Process » en anglais. Une comparaison de la méthode SEREP avec
d’autres méthodes de condensation telles que celle de Guyan-Irons est effectuée par Sastry et al. [203]. À l’origine, le principe de la
méthode consiste à conserver un certain nombre de modes propres et de de degrés de liberté dans un système linéaire comportant des
non-linéarités locales. Le choix des modes conservés dépend du spectre de fréquence dans lequel le système fonctionne, et les degrés
de liberté choisis dépendent de leur degré de participation aux modes retenus.

15
1. É TAT DE L’ ART DES MÉTHODES DE RÉDUCTION DE MODÈLE POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

L’approche consiste à se concentrer sur la relation entrée/sortie qui suffit la plupart du temps à décrire
le système puisque la connaissance du vecteur d’état n’est pas une finalité en soi. Ainsi, dans le cadre d’un
système aéroélastique par exemple, le calcul du vecteur d’état x décrivant les variables en chaque point
du domaine spatial n’est qu’un intermédiaire pour évaluer une quantité intéressante telle que les efforts
aérodynamiques par exemple. Lorsque c’est possible, il est donc plus intéressant de disposer directement
de la relation entrée/sortie qui correspond à la fonction de transfert H du système. En général la fonction de
transfert s’écrit dans le domaine fréquentiel après avoir effectué une transformation de Laplace notée L du
système dynamique discret (1.10). On définit alors U(s) = L (u(t)) et de la même façon Y(s) = L (y(t)) où
s est la variable complexe de Laplace. En exprimant alors l’entrée en fonction du vecteur d’état à l’aide de
la première équation et en remplaçant dans la seconde, la fonction de transfert dans le domaine de Laplace
s’écrit formellement

H(s) = C (s I − A)−1 B + D, tel que Y(s) = H(s) U(s). (1.12)

Le calcul de la fonction de transfert définie par l’expression précédente est toutefois difficile voire impos-
sible en pratique lorsque la discrétisation des systèmes dynamiques conduit à un nombre important Nv de
degrés de liberté. En effet, cela nécessite d’inverser la matrice A ∈ M (Nv , Nv ).
Ici encore, une projection du système dynamique sur une base adéquate permet de réduire considéra-
blement la taille de la matrice à inverser et, partant, d’évaluer la fonction de transfert. Supposons en effet
qu’on dispose de deux matrices V et W définies dans M (Nv , q) telles que WT V = Iq . Alors la solution du
système dynamique est approchée par x = V x b et les équations du système dynamique sont projetées sur
WT . La matrice Σlin décrivant le système dynamique se réduit alors à
 T T
  
b lin = W A V W B = Ar Br .
Σ (1.13)
CV D Cr D
La base de projection est alors choisie de façon à pouvoir correctement représenter le système dynamique
avec un faible nombre q de vecteurs, de sorte que la matrice réduite Σ b lin appartienne à M (q + Ny , q + p). La
fonction de transfert est alors aisément calculée puisqu’elle ne fait plus intervenir que des matrices de taille
réduite dont l’inversion est rendue possible. Elle est donc définie par
b
H(s) = C V (s WT V − WT A V)−1 WT B + D. (1.14)

Le point crucial de la méthode réside évidemment dans la détermination de la base de projection. Un cer-
tain nombre de méthodes ont été développées par le passé en particulier dans le domaine de l’automatique
et de l’électronique. Antoulas [11] a ainsi distingué celles dites de troncature équilibrée et celles s’appuyant
sur la construction de sous-espaces de Krylov.

1.3.2.1 Balanced Truncation


Une première manière de déterminer la base de projection a été introduite par Moore [167]. Le principe
repose sur la définition d’un sous-espace dit contrôlable et d’un sous-espace dit observable auxquels on associe
les matrices grammiennes de contrôlabilité et d’observabilité
Z ∞ Z ∞
 
WC = exp (At) B BT exp AT t dt et WO = exp (At) C CT exp AT t dt. (1.15)
0 0

Ces matrices sont définies de telle manière que leurs vecteurs propres engendrent les sous-espaces contrô-
lable et observable respectivement. Elles sont solutions des équations de Lyapunov

A WC + WC AT = −B BT et AT WO + WO A = −CT C. (1.16)

Le système est dit contrôlable (resp. observable) lorsque la matrice grammienne de contrôlabilité (resp.
d’observabilité) est définie positive. Quand ces deux conditions sont vérifiées, le système dynamique est
dit équilibré et il existe une transformation d’équilibre caractérisée par la matrice T telle que les matrices
grammiennes soient diagonalisées en
T
T−1 WC T−1 = TT WO T = Σ avec Σ = diag(σ1 , . . . , σNv ). (1.17)

16
1.3. Description des principaux modèles d’ordre réduit physiques

La matrice T de la transformation d’équilibre découle du problème aux valeurs propres WC WO t(j) =


λj t(j) où le vecteur t(j) correspond
p à la j-ième colonne de la matrice T. Les termes de la matrice diagonale
Σ sont donnés par σj = λj et les valeurs propres sont organisées par ordre décroissant. Les valeurs
propres de la diagonale sont les valeurs singulières de l’opérateur de Hankel qui est lié à l’opérateur de
convolution. Le lien entre l’opérateur de Hankel et les matrices grammiennes est expliqué dans [11].
Finalement, la base de projection V est constituée des q premières colonnes de la matrice T qui sont
associeés aux valeurs singulières de Hankel les plus grandes, et la matrice WT contient les q premières
lignes de T−1 . Le principal avantage de la méthode est sa capacité à préserver la stabilité du modèle d’ordre
élevé malgré la troncature effectuée pour réduire la dimension du système dans le modèle d’ordre réduit.
Par ailleurs l’erreur globale commise reste bornée par la relation σq+1 ≤ ||Σlin − Σ b lin ||∞ ≤ 2 PNv
i=q+1 σi .
Toutefois, l’application de cette méthode pour les systèmes de très grande taille reste aussi problématique,
notamment pour la résolution des équations de Lyapunov (1.16). Des méthodes approchées [99, 119] sont
néanmoins disponibles pour parvenir à identifier les solutions. Enfin, une extension de la méthode aux
systèmes non-linéaires a été proposée par Lall et al. [139].

1.3.2.2 Méthodes d’approximation de Krylov


Puisque le calcul de la base de projection devient rapidement difficile pour les systèmes de grande taille,
une seconde famille de méthodes basées sur la correspondance des moments de la fonction de transfert s’est
développée. Pour simplifier ici, on considère la fonction de transfert scalaire H(s) dont le développement
de Taylor autour d’un point s0 s’écrit

H(s) = m0 + m1 (s − s0 ) + m2 (s − s0 )2 + . . . (1.18)

Lorsque le développement est pratiqué autour de s0 = ∞, le problème est généralement qualifié de


réalisation partielle — ou de « Partial Realization » en anglais — et les coefficients mj sont les paramètres de
Markov. En revanche, si le développement est effectué autour s0 = 0, on parle plutôt d’approximation de Padé
et les coefficients mj sont les moments de la fonction de transfert autour du point s0 .
Le but est alors d’approcher la fonction de transfert du système complet H(s) par une fonction de trans-
fert réduite Hb q (s) = m
b 0 +m b 2 (s − s0 )2 + . . . telle que m
b 1 (s − s0 ) + m b j = mj pour 0 ≤ j ≤ q. Un choix naturel
pour approcher la fonction de transfert consiste à supposer qu’il s’agit d’une fraction rationnelle définie par

b q (s) = Pq−1 (s) = aq−1 sq−1 + · · · + a1 s + a0


H . (1.19)
Qq (s) bq sq + bq−1 sq−1 + · · · + b1 s + 1

La détermination des coefficients de la fraction rationnelle s’effectue au moyen de la résolution du sys-


tème linéaire H(s) Qq (s) = Pq−1 (s) dans lequel le second membre est identifié à celui de l’équation (1.18).
Le problème matriciel résultant implique une matrice de Hankel qui est en général très mal conditionnée
[20]. L’évaluation de l’approximation de Padé au moyen du calcul explicite des moments est donc numé-
riquement instable. Toutefois, des méthodes ont été développées pour remédier à ce problème en utilisant
les connections entre les approximants de Padé et les procédures de Lanczos ou d’Arnoldi. Freund [80] a
fourni sur ce point une description détaillée des différents algorithmes employés pour parvenir à identifier
la fonction de transfert réduite.
Pour faire le lien avec le titre de ce paragraphe, il faut signaler qu’il existe une relation étroite entre les
moments mj définissant la matrice de Hankel et les sous-espaces de Krylov associés au problème. Étant
donné une matrice M et un vecteur de départ d (resp. g), le sous-espace de Krylov de dimension q à droite
(resp. à gauche) est défini par l’espace engendré par la séquence des q vecteurs
   n q−1 o
Kq (M, d) = vect d, M d, . . . , Mq−1 d resp. Kq MT , g = vect g, MT g, . . . , M.T g . (1.20)

Bai [20] et Freund [80] expliquent alors que les 2q premiers moments mj de la fonction de transfert (1.18)
qui définissent la matrice de Hankel s’obtiennent simplement en calculant les produits entre les espaces de
−1
Krylov à droite et à gauche avec M = (A − sI) , ce qui conduit aux expressions
 j T   j T 
m2j = MT g · Mj d et m2j+1 = MT g · Mj+1 d . (1.21)

17
1. É TAT DE L’ ART DES MÉTHODES DE RÉDUCTION DE MODÈLE POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

Les matrices de projection V et W intervenant dans la construction du modèle d’ordre réduit défini à
l’équation (1.13) sont alors construites de manière à ce qu’elles engendrent les mêmes sous-espaces de Kry-
lov que ceux définis par les relations (1.20). Le point crucial de la méthode consiste à choisir correctement
les points d’interpolation s0 .
Cependant, bien que les sous-espaces droit et gauche de Krylov contiennent les informations souhaitées
sur les moments, les vecteurs de base engendrant les sous-espaces ne sont pas adaptés. L’astuce consiste
donc à employer d’autres vecteurs de base qui engendrent les mêmes sous-espaces de Krylov. Les procédés
de Lanczos [140] et d’Arnoldi [15] sont alors des moyens idéaux d’obtenir les vecteurs recherchés et de re-
construire finalement la fonction de transfert du système réduit, d’autant plus que les vecteurs obtenus sont
(bi-)orthogonaux. Lorsque l’algorithme de Lanczos est employé, cette approche est connue sous le nom de
méthode Padé Via Lanczos (PVL). Deux exemples d’application sont fournis dans [20], l’un concernant un
circuit électrique pour lequel les équations de Maxwell ont été discrétisées et l’autre portant sur un système
de frein automobile où la dynamique est calculée par une méthode Éléments Finis.
L’inconvénient principal de la méthode de Padé est qu’elle ne conserve plus les propriétés de stabilité
et de passivité du système original [20, 214]. Un moyen de contrer ces deux inconvénients a été proposé
par Bai et Freund [21]. Il s’agit d’une variante des méthodes PVL appelée PVLπ qui agit postérieurement à
l’obtention de la fonction de transfert réduite. La méthode est une procédure trial-and-error qui corrige les
pôles et zéros instables de la fonction de transfert réduite. Silveira et al. [214] ont proposé quant à eux une
technique analogue reposant cette fois sur l’utilisation de l’algorithme d’Arnoldi. La conservation des pro-
priétés de stabilité du système s’obtient simplement au prix d’un changement de coordonnées dans l’espace
d’état. Le modèle d’ordre réduit ainsi construit est directement stable, sans qu’il soit nécessaire de le mo-
difier a posteriori comme cela est le cas dans les méthodes de type PVLπ. Enfin, Antoulas [11] et Gugercin
[100] ont préféré combiner les méthodes de Krylov à la méthode de troncature équilibrée afin de préserver
les avantages de chacune des deux approches. L’idée repose sur le calcul itératif approché des équations de
Lyapunov (1.16).
Le champ d’application des méthodes d’approximation de la fonction de transfert est à l’origine ce-
lui de l’automatique et du contrôle de systèmes linéaires. La méthode est devenue très populaire pour
la réduction de systèmes en simulation de circuits électroniques notamment. Quelques travaux ont néan-
moins été effectués dans le domaine de l’aérodynamique. Karpel [127] a ainsi cherché à modéliser les forces
aérodynamique en réponse à une sollicitation harmonique au moyen d’une fonction de transfert d’ordre
minimal étant donné un certain degré de précision. Ueda et Dowell [233] ont quant à eux tenté d’étendre
ce type d’approximation à des systèmes non-linéaires pour lesquels l’analogue de la fonction de transfert
porte le nom de fonction descriptive. Plus récemment, Willcox [247, 248] a utilisé le procédé d’Arnoldi pour
construire le modèle d’ordre réduit et simuler le comportement aéroélastique d’un étage de turbomachine
dans lequel l’écoulement est modélisé par les équations d’Euler linéarisées. Par rapport à la méthode de
projection sur la base des modes propres qui est aussi mise en œuvre dans [247], les vecteurs d’Arnoldi
sont peu coûteux à calculer et le procédé d’Arnoldi a l’avantage de générer une transformation congruente
qui conserve la stabilité du système initial. Rule et al. [197] ont employé la méthode de troncature équilibrée
pour traiter le problème du flottement d’un profil dans un écoulement 2D incompressible. En comparaison
avec une réduction sur la base des modes propres, la réduction obtenue est satisfaisante mais le coût de
calcul de la transformation reste élevé et devient donc prohibitif pour de grands systèmes.
Bien que les méthodes décrites dans ce paragraphe possèdent des propriétés extrêmement intéressantes
en terme de conservation de la stabilité et de la passivité du système initial non réduit, leur domaine d’ap-
plication est exclusivement réservé aux systèmes dynamiques linéaires.

1.3.3 Identification du système réduit


Plutôt que de chercher à définir les matrices de projection permettant de construire le modèle d’ordre
réduit, il est possible de se servir d’un ensemble de réponses du système à différentes sollicitations afin
d’identifier directement les matrices réduites. Le principe consiste donc en quelque sorte à résoudre un pro-
blème inverse à partir d’une base de données caractéristique de la réponse du système. Une première ma-
nière de procéder pour les systèmes linéaires s’appuie sur la construction de la matrice de Hankel associée
au système dynamique. Ce dernier est caractérisé par les équations (1.10) avec pour simplifier D = 0Ny ,p .
Le modèle d’ordre réduit de dimension q gouvernant l’évolution du vecteur d’état x b ∈ Rq est recherché

18
1.3. Description des principaux modèles d’ordre réduit physiques

sous la forme du système dynamique linéaire discret en temps suivant, avec u ∈ Rp :



b b (k + 1) = Ar x
x b (k) + Br u(k)
(Σlin ) : . (1.22)
y(k) = Cr xb(k)

Lorsque le système dynamique est excité par une réponse impulsionnelle telle que u(0) = 1 et u(k) = 0
pour tout k > 0, la réponse est caractérisée par l’ensemble de matrices

Y[1] = Cr Br , Y[2] = Cr Ar Br , ... Y[k] = Cr Ark−1 Br (1.23)

qui découle de la substitution de l’impulsion dans le système dynamique précédent. Les matrices précé-
dentes Y[k] = Cr Ark−1 Br sont les paramètres de Markov du système dynamique. Le principe de superpo-
sition est valable puisque le système dynamique est supposé linéaire. Par conséquent la réponse à n’importe
quelle sollicitation s’exprime comme une combinaison linéaire des réponses impulsionnelles du système et
les paramètres de Markov sont donc reliés à la matrice généralisée de Hankel
 
Y[k] ··· Y[k + tM−1 ]

HRM [k − 1] =  .. .. 
(1.24)
. . 
Y[k + jR−1 ] · · · Y[k + jR−1 + tM−1 ]

qui utilise R fenêtrages de taille jr de la réponse impulsionnelle pour M instants discrets tm . Le choix de
R et M est arbitraire tant que le rang de la matrice est plus grand que la dimension q du système réduit
à identifier. Par exemple la réponse impulsionnelle y(k) calculée avec le modèle d’ordre élevé pour M
instants discrets est employée pour former la matrice de Hankel de taille p × M

H (0) = [y(1) y(2) ... y(M − 1)] . (1.25)

Si les équations (1.22) du modèle d’ordre réduit sont en mesure de caractériser correctement la réponse
du système dynamique, la matrice de Hankel calculée avec le modèle d’ordre élevé est en théorie reliée aux
matrices du système dynamique réduit par la relation
 
H(0) = Cr Br Ar Br . . . AM−2 r Br . (1.26)

La technique consiste alors à identifier les matrices du système réduit à partir de la matrice de Hankel
construite au moyen des réponses impulsionnelles du modèle d’ordre élevé. Pour cela, une décomposition
en valeurs singulières tronquée de la matrice de Hankel (1.25) est pratiquée afin d’éliminer les informa-
tions redondantes et de réduire la taille des matrices. Seules les q premières valeurs singulières les plus
importantes sont conservées dans l’approximation de la matrice de Hankel qui se décompose donc en4
H(0) ≈ Uq Σq VqT . Les matrices Br et Cr du système réduit sont alors définies par

Br = Σ1/2
q VqT EM et Cr = ET 1/2
p Uq Σq , (1.27)

avec ETM = [IM , 0, . . . , 0] et Ep = [Ip , 0, . . . , 0]. L’identification de la matrice Ar nécessite par ailleurs la
T

construction de la matrice de Hankel H(1) = [y(2) y(3) . . . y(M )]. De cette manière, la relation (1.26)
devient H(1) = Cr Ar Br Ar Br . . . AM−2 r Br ce qui permet d’identifier la matrice Ar avec la relation

Ar = Σq−1/2 UT −1/2
q H(1) Vq Σq . (1.28)

Tang et al. [225] ont ainsi employé cette méthode pour identifier les coefficients du modèle d’ordre réduit
développé pour une configuration d’aile delta 3D oscillante. Silva et Bartels [213] ont quant à eux étudié la
réponse aéroélastique en flottement de l’aile AGARD 445.6. Pour cela, la structure est représentée par ses
quatre premiers modes propres qui sont ensuite excités séparément par une impulsion dans le code fluide.
Les réponses impulsionnelles sont alors utilisées pour identifier les coefficients du modèle d’état à l’aide
de l’algorithme ERA (Eigensystem Realization Algorithm) développé par Juang et Pappa [123]. Bien que le
modèle d’ordre réduit obtenu soit performant, Silva et Bartels [213] ont indiqué que certaines précautions
4 Voir l’annexe A.2 pour les détails relatifs à la décomposition en valeurs singulières.

19
1. É TAT DE L’ ART DES MÉTHODES DE RÉDUCTION DE MODÈLE POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

doivent être prises pour imposer les réponses impulsionnelles, notamment en ce qui concerne la résolution
temps/fréquence et la dépendance de la solution avec l’amplitude des impulsions. Enfin, Allen et al. [4]
ont identifié un modèle d’ordre réduit suivant le même procédé et ont construit des lois de contrôle afin de
repousser la limite de flottement d’un profil portant bidimensionel.
La théorie de Volterra fournit une extension possible de la méthode d’identification précédente pour
les systèmes dynamiques non-linéaires. L’expression de la réponse du système dynamique en fonction des
noyaux de Volterra et d’un ensemble d’excitations impulsionnelles supposées ici scalaires est donc

Z t0 +t Z t0 +t Z t0 +t
x(t) = h0 + h1 (t − τ ) u(τ ) dτ + h2 (t − τ1 , t − τ2 ) u(τ1 ) u(τ2 ) dτ1 dτ2
Zt0t0 +t Z t0 +t t0 t0 (1.29)
+···+ ··· hN (t − τ1 , · · · , t − τN ) u(τ1 ) · · · u(τN ) dτ1 · · · dτN .
t0 t0

Le premier terme de la réponse correspond à la partie stationnaire xs de la réponse du système dyna-


mique. Le second terme représente la convolution entre le premier noyau de Volterra h1 (τ ) et l’excitation
impulsionnelle u(τ ) et caractérise la réponse linéaire du système. Le premier noyau de Volterra est identifié
en mesurant la réponse du système dynamique à un Dirac et revient de ce fait à la technique d’identifi-
cation précédente. Cependant, la théorie de Volterra permet de tenir compte des effets non-linéaires par
le biais des noyaux d’ordres supérieurs. Lorsque le système dynamique est seulement quadratique, Silva
[212] est parvenu à identifier les trois premiers noyaux de Volterra h0 = xs , h1 (τ1 ) = 2 x0 (τ1 ) − 1/2x2 (τ1 )
et h2 (τ1 , τ2 ) = 1/2 [x1 (τ1 , τ2 ) − x0 (τ1 ) − x0 (τ2 )] au moyen de réponses impulsionnelles adéquates. Dans les
expressions précédentes, xs est la réponse stationnaire du système dynamique, x0 (τ1 ) est celle due à un Di-
rac appliqué à l’instant initial et x2 (τ1 ) est celle due à un Dirac d’amplitude deux fois plus grande que celle
de x0 (τ1 ) imposé aussi à l’instant initial, et enfin x1 (τ1 , τ2 ) est la réponse provoquée par deux impulsions à
des instants différents.
Comme l’ont fait remarquer Lucia et al. [153], le calcul des noyaux de Volterra n’est pas une fin en soi,
même si il est essentiel pour la construction d’un modèle d’ordre réduit qui reste encore à déterminer dans
le cas d’un système non-linéaire. Lucia et al. [153] ont ainsi calculé les deux premiers noyaux de Volterra
de l’écoulement transsonique autour d’un profil RAE en mouvement de plongé. La réponse a été comparée
pour trois amplitudes croissantes d’oscillation du profil. Dans ce cas assez simple, un seul noyau suffit à
bien capter la réponse du système, mais la différence se creuse lorsque l’amplitude des oscillations, et donc
le caractère non-linéaire du système, augmente. Sibetheros et Niedzwecki [210] ont pour leur part analysé
le comportement non-linéaire de cylindres placés dans un écoulement au moyen d’un développement en
série de Volterra tronqué à l’ordre trois. L’objectif était d’étudier la dépendance linéaire, quadratique ou
cubique des fréquences présentes dans les données mais aucun modèle d’ordre réduit n’a été construit.
Enfin des applications intéressantes sont en cours de développement pour combiner ensemble la dé-
composition orthogonale propre qui sera introduite dans le paragraphe suivant et la théorie de Volterra.
Ainsi, Lucia et al. [153, 154] ont développé un modèle d’ordre réduit hybride POD/Volterra dans lequel
les modes propres de la structure étaient impulsés et la réponse du fluide était projetée sur la base POD
pour obtenir l’historique temporel des amplitudes modales. Seul le premier noyau de Volterra a été calculé
afin de construire le modèle d’état linéaire à l’aide de l’algorithme ERA. Le modèle d’ordre réduit obtenu
a été appliqué à la prédiction des cycles limites d’oscillation d’un panneau élastique dans un écoulement
supersonique parfait 2D [154]. La structure du panneau est non-linéaire mais le fluide est traité de façon
linéaire, afin de pouvoir identifier le modèle d’ordre réduit. Enfin, pour éviter d’avoir à calculer les modes
POD à partir d’une simulation supplémentaire du système complet, une tentative a été menée pour obtenir
ces modes à l’aide des réponses impulsionnelles utilisées pour former la matrice de Hankel. Toutefois, les
modes POD obtenus ne semblent pas adaptés.
Pour terminer ce paragraphe, il est important de mentionner l’apparition récente de méthodes d’iden-
tification adaptées aux systèmes non-linéaires. Sans entrer dans les détails, le principe consiste à résoudre
un problème inverse afin d’identifier les opérateurs du modèle d’ordre réduit à partir d’une structure géné-
rique des équations [22, 191, 236]. Une approche d’identification modale est alors nécessaire pour diminuer
la taille du problème inverse. On reviendra plus tard sur ce type d’approche employé notamment par Perret
et al. [177] dans le cadre de la POD.

20
1.3. Description des principaux modèles d’ordre réduit physiques

1.3.4 Décomposition Orthogonale Propre


À l’instar des méthodes d’identification précédentes, la procédure de décomposition orthogonale propre
repose sur un ensemble de réponses du système dynamique à partir duquel une base de faible dimension
est extraite. La méthode est connue sous des appellations différentes dans des domaines d’application aussi
variés que l’océanographie, la météorologie, la turbulence, l’identification d’image, la compression de don-
nées, l’économie, la psychologie, la biologie,... Son champ d’application est vaste puisque la méthode est
intimement liée à la décomposition de Karhunen-Loève introduite dans le domaine des probabilités [126, 150],
ou encore à l’analyse en composantes principales issue des statistiques [113]. Des liens étroits entre ces deux
méthodes et la décomposition en valeurs singulières ont récemment été mis en évidence et formalisés par
Volkwein [241]. Liang et al. [144] ont par ailleurs démontré l’équivalence des trois méthodes lorsque celles-ci
sont employées pour des vecteurs discrets aléatoires de dimension finie. Selon les auteurs, la décomposi-
tion orthogonale propre peut être considérée soit comme étant la décomposition de Karhunen-Loève, soit
comme un terme générique regroupant à la fois la décomposition de Karhunen-Loève, l’analyse en com-
posante principale ou encore la décomposition en valeurs singulières suivant les données auxquelles la
procédure est appliquée.
Le principe consiste à rechercher les fonctions de base qui représentent de façon optimale l’ensemble des
données auxquelles on attribue généralement le nom de clichés. Les clichés sont par exemple les solutions
(m)
x(m) ou xh des systèmes dynamiques (1.1) et (1.2) respectivement, obtenues à différents instants tm ou
pour différentes valeurs µm du paramètre µ. En fonction du domaine d’application, les vecteurs de la base
portent le nom de fonctions empiriques, de modes principaux, de modes propres orthogonaux, ou encore
de modes POD par abus de langage. La procédure de construction d’un modèle d’ordre réduit, détaillée
par Holmes et al. [112] dans le cadre des systèmes dynamiques, est brièvement reprise ici pour décrire le
principe. L’objectif est de déterminer une base Φ orthonormale de dimension q dont les vecteurs ϕ(j) conte-
nus dans un espace de Hilbert H muni du produit scalaire h·, ·i approchent le mieux possible en moyenne
les clichés x(m) de l’ensemble de données. Il s’agit donc de minimiser en moyenne la différence entre les
clichés et leur projection orthogonale sur le sous-espace engendré par les modes POD ϕ(j) . La base POD est
donc solution du problème d’optimisation
 2 
n o Xq D E

 x(m) − (i) 
Φ = ϕ(1) , . . . , ϕ(q) = arg min E x(m)
, ϕ(i)
ϕ , (1.30)
q
{ϕ(j) }j=1 ∈H
i=1

avec la contrainte supplémentaire hϕ(i) , ϕ(j) i = δij qui traduit l’orthonormalité des modes POD entre eux
[135]. L’opérateur de moyenne E [·] est souvent défini comme une moyenne en temps lorsque les clichés
sont des solutions du système dynamique à différents instants. On peut donc interpréter les modes POD
ϕ(j) comme les vecteurs qui correspondent aux minima de la fonctionnelle, ou encore comme les vecteurs
qui sont en moyenne le plus parallèles possibles à l’ensemble des données.
D’un point de vue pratique, le problème (1.30) se ramène à la résolution du problème aux valeurs
propres
R ϕ(j) = λj ϕ(j) , (1.31)
où l’opérateur R est une matrice de corrélation temporelle entre les différents clichés, pour laquelle il a
été démontré qu’il existe un nombre fini de valeurs propres [112]. Le spectre des valeurs propres décroît
en général rapidement, ce qui signifie que les premiers vecteurs propres sont en mesure de capturer les
principales structures communes aux différents clichés. Cette propriété d’optimalité explique pourquoi la
méthode est particulièrement populaire lorsqu’il s’agit d’analyser un grand ensemble de données afin d’y
repérer des structures particulières. À l’origine employée pour détecter objectivement les structures cohé-
rentes d’un écoulement turbulent, la décomposition orthogonale propre a été depuis employée à de mul-
tiples reprises en mécanique pour analyser le comportement des systèmes. Kerschen et al. [130] ont ainsi
suggéré d’employer la méthode pour caractériser la dynamique du système et détecter en particulier cer-
taines non-linéarités. Tamura et al. [224] l’ont quant à eux employé pour extraire les structures principales
dans le champ de pression fluctuant exercé sur la paroi d’un bâtiment. Enfin, Cizmas et Palacios [47] se
sont intéressés aux structures des modes POD de l’écoulement dans un étage de turbomachine. Quelques
applications pour l’analyse de problèmes couplés avec des applications en aéroélasticité ont aussi vu le jour
[234, 252].

21
1. É TAT DE L’ ART DES MÉTHODES DE RÉDUCTION DE MODÈLE POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

En plus de ses qualités pour l’analyse de données, la méthode possède encore bien d’autres atouts en ce
qui concerne la construction d’un modèle d’ordre réduit. En effet, les q premiers vecteurs propres associés
aux plus grandes valeurs propres forment une base de projection Φ idéale. Puisque la base des modes POD
constitue la meilleure approximation5 qui soit des clichés x(m) , on peut faire l’hypothèse que la variable
d’état x du système dynamique se décompose à tout instant sur la base Φ selon la relation
q
X
x(t) = aj (t) ϕ(j) . (1.32)
j=1

Cette décomposition est alors introduite dans l’équation (1.1) du système dynamique. La projection de
Galerkin sur la base des modes POD conduit alors au système d’équations
*  q  +
X
ȧi = f  (j) 
aj (t) ϕ , µ , ϕ(i)
, (1.33)
j=1

pour tout i = 1, . . . , q. L’expression précédente conduit à un modèle d’ordre réduit exploitable de façon
efficace lorsque le second membre f du système dynamique est linéaire ou multilinéaire. En particulier
lorsque les non-linéarités sont de type polynomial, l’opérateur de sommation peut être extrait et le modèle
d’ordre réduit prend la forme6
q
X q
X
ȧi = Ki + Lij aj (t) + Qijk aj (t) ak (t) + · · · (1.34)
j=1 j,k=1

Le système d’équations (1.34) comprend q équations différentielles ordinaires non-linéaires qui consti-
tuent un modèle d’ordre réduit non-linéaire. La projection de Galerkin du système dynamique sur la base
des modes POD fournit donc une procédure efficace pour construire le modèle d’ordre réduit, au moins
lorsque les non-linéarités du système dynamique sont polynomiales. Si l’expression du second membre f
fait apparaître des fractions rationnelles ou des non-linéarités plus complexes, l’extraction des amplitudes
modales telle qu’elle a été pratiquée entre les équations (1.33) et (1.34) n’est en général pas possible sans
avoir recours à certaines approximations.
La décomposition orthogonale propre est apparue en mécanique des fluides dans un premier temps
pour analyser les structures turbulentes dont le contenu stochastique peut être examiné par des outils statis-
tiques. Lumley [156] a ainsi introduit la décomposition orthogonale propre pour identifier les structures co-
hérentes d’un écoulement turbulent incompressible et s’en est ensuite servi pour former un modèle d’ordre
réduit capable de reproduire approximativement la dynamique de l’écoulement. Dans ce cas, les modes
POD correspondent aux structures spatiales contenant le maximum d’énergie cinétique. La décomposition
orthogonale propre s’est alors imposée comme une généralisation de la décomposition de Fourier dans les
directions inhomogènes ou non périodiques de l’écoulement [112]. L’utilisation de la méthode a été par la
suite révolutionnée par la découverte de formulations équivalentes au problème aux valeurs propres (1.31).
Ainsi, dans la méthode des clichés de Sirovich [218], l’opérateur de corrélation temporelle est remplacé par un
opérateur de corrélation spatiale de dimension nettement plus faible pour lequel l’extraction des vecteurs
propres est aisée. Par ailleurs, la décomposition en valeurs singulières de l’ensemble des clichés produit les
modes POD au moyen d’algorithmes peu coûteux.
L’objectif des modèles d’ordre réduit était à l’origine de pouvoir décrire simplement l’écoulement au
moyen des structures cohérentes dont l’importance est capitale pour la compréhension et la modélisation
des écoulements turbulents. Elles jouent en effet un rôle capital dans les processus de mélange, la génération
de bruit ou la création de traîné. Par conséquent, le but ultime est de pouvoir contrôler les structures turbu-
lentes d’un écoulement et la construction d’un modèle d’ordre réduit est un moyen efficace d’y parvenir si
celui-ci est capable de reproduire fidèlement l’écoulement. Pour une description détaillée des applications
en turbulence, le lecteur pourra consulter en particulier la revue effectuée par Berkooz et al. [32]. Parmi les
5 Dans le sens où l’erreur de projection orthogonale est minimisée.
6 Lesdétails de la projection de Galerkin menant à l’expression (1.34) seront explicités dans le paragraphe 2.4.3 p.52 dans le cas
général d’opérateurs multilinéaires.

22
1.3. Description des principaux modèles d’ordre réduit physiques

travaux menés, Aubry et al. [18] ont développé un modèle d’ordre réduit des équations de Navier-Stokes
pour la zone proche de la paroi d’une couche limite turbulente. Les effets des modes négligés sont pris
en compte par un modèle de fermeture de type Heisenberg censé préserver la stabilité du système réduit.
Dès les premiers travaux, la nécessité de stabiliser le modèle d’ordre réduit est donc apparue. Rempfer
[186, 187] s’est aussi intéressé à la construction et à l’analyse des structures turbulentes dans une couche li-
mite de transition. Quelques temps plus tard, il démontrait sur un exemple dans lequel la solution pouvait
être exactement représentée par un petit nombre de modes POD, que la réponse du modèle d’ordre ré-
duit construit par une projection de Galerkin pouvait exhiber un comportement physiquement instable et
que les structures dans l’espace d’état pouvaient être différentes de celles de l’écoulement réel alors même
qu’aucune erreur ne pouvait être attribuée à la troncature de la base POD [188].
Depuis lors, de nombreux travaux pour les écoulements d’un fluide incompressible turbulent se sont
orientés vers le développement de modèles d’ordre réduit pour lesquels la stabilité est une priorité. Parmi
la littérature abondante sur le sujet, on peut mentionner les travaux de Cazemier et al. [41, 42] qui ont tenté
de reproduire la circulation d’un fluide dans une cavité entraînée. Cet exemple classique a par la suite
été ré-employé pour valider une méthode de calcul des modes POD au moyen de l’algorithme de Lanc-
zos [70] et une méthode de stabilisation [124]. Un grand nombre d’études a par ailleurs été mené pour
l’étude de l’écoulement dans le sillage de divers types d’obstacles, tels qu’un cylindre de section cylin-
drique [171, 215, 216] ou carrée [35, 48, 50, 81, 82, 124], une marche descendante [50, 51] ou encore un profil
portant fortement incliné [73]. L’ensemble de ces développements a permis progressivement d’envisager
l’utilisation des modèles d’ordre réduit afin de contrôler les écoulements [31, 49, 175, 185, 226, 244, 245].
Des applications plus originales de la méthode POD aux écoulements incompressibles ont aussi vu le
jour : Allery et al. l’ont ainsi employé pour l’étude de l’effet Coanda [7] et l’étude de la dispersion de parti-
cules transportées par le fluide [6] ; Liberge [145, 146] a construit un modèle d’ordre réduit pour reproduire
certains phénomènes résultant de l’interaction fluide-structure entre un cylindre en mouvement et l’écoule-
ment. Par ailleurs des travaux théoriques portant sur la définition d’estimateurs d’erreur pour les équations
de Navier-Stokes d’un fluide incompressible ont été récemment menés afin de parvenir à contrôler la qua-
lité des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin [56, 110, 136].
La majorité des modèles d’ordre réduit construits au moyen de la décomposition orthogonale propre
concerne les fluides incompressibles puisque dans ce cas les équations de Navier-Stokes peuvent être assi-
milées à un système d’équations différentielles ordinaires dont le second membre est polynomial et quadra-
tique. Les modes POD calculés fournissent alors les structures d’énergie cinétique maximale et se prêtent
bien à la projection de Galerkin. Il en est tout autrement pour les fluides compressibles puisque dans ce cas
la définition du produit scalaire ne conduit plus nécessairement à une interprétation des modes en terme
d’énergie physique. Rowley et al. [192, 194] ont été parmi les premiers à se pencher sur la définition correcte
d’un produit scalaire pour les écoulements compressibles. Aucune définition adéquate n’a été obtenue sauf
lorsque les équations de Navier-Stokes isentropiques sont considérées. Ce même modèle a par la suite été
réutilisé par Gloerfelt [87] pour l’analyse des radiations sonores auto-entretenues produites par une cavité,
ainsi que par Moreno et al. [169] qui ont comparé la réponse du modèle d’ordre réduit d’un jet rectangulaire
supersonique à des résultats expérimentaux. Vigo [239, 240] a pour sa part choisi d’employer les équations
de Navier-Stokes formulées non pas avec le jeu de variables conservatives usuel, mais avec des variables
primitives modifiées de façon à rendre les équations quadratiques. Toutefois, le produit scalaire employé
conduit à des modes POD qui maximisent une énergie purement mathématique. Le même problème de sta-
bilité que pour les modèles d’ordre réduit des écoulements incompressibles apparaît et Iollo et al. [116, 117]
ont proposé pour remédier à ce problème de changer la définition du produit scalaire afin de tenir compte
des dérivées premières en espace du champ aérodynamique. La généralisation au cas des espaces de So-
bolev avec la prise en compte de dérivées d’ordre supérieur avait déjà été appliquée par Kirby [132] pour
développer un modèle d’ordre réduit des équations de Kuramoto-Sivashinsky. Dans le même esprit, Barone
et al. [23] ont modifié le produit scalaire pour symétriser le problème et ont cherché à tenir compte explicite-
ment des conditions aux limites dans le modèle d’ordre réduit. Enfin, Bourguet et al. [34] ont construit puis
corrigé un modèle d’ordre réduit au moyen de méthodes similaires à celles développées par Couplet et al.
[51]. Finalement, Gloerfelt [87] a effectué une comparaison exhaustive des méthodes de correction pour les
modèles d’ordre réduit POD-Galerkin développés pour les écoulements compressibles.
Dans les références citées jusqu’ici, les modèles d’ordre réduit ont pu être développés suivant le prin-
cipe exposé au début de ce paragraphe puisque les équations non-linéaires du fluide ont été écrites sous

23
1. É TAT DE L’ ART DES MÉTHODES DE RÉDUCTION DE MODÈLE POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

la forme d’un système d’équations polynomiales quadratiques. Ces modèles d’ordre réduit sont donc sou-
vent qualifiés de modèles d’ordre réduit POD-Galerkin. D’autres alternatives sont envisageables lorsque les
équations du fluide sont linéaires ou ont été linéarisées, ou encore lorsque les équations non-linéaires ne
peuvent se ramener à un système polynomial. Lucia et al. [153] ont ainsi distingué en dehors des modèles
d’ordre réduit POD-Galerkin les modèles d’ordre réduit obtenus par projection directe pour les systèmes li-
néaires7 , et enfin la projection sur le sous-espace qui consiste à projeter le second membre f de l’équation (1.1)
sur le sous-espace engendré par les modes POD8 . L’inconvénient principal de cette dernière méthode pro-
vient du fait que l’évaluation du second membre requiert la reconstruction du champ non-réduit avant de
pouvoir pratiquer la projection à chaque instant. Cette technique a néanmoins permis de reproduire des
écoulements modélisés par les équations d’Euler non-linéaires [30, 75, 155, 178], mais le bénéfice en terme
de coût de calcul est relativement faible en comparaison avec celui atteint avec l’approche POD-Galerkin.
Lucia et al. [155] ont toutefois signalé que le pas de temps peut être considérablement augmenté pour l’inté-
gration en temps du modèle d’ordre réduit puisque les hautes fréquences sont filtrées par la base tronquée
des modes POD. Une comparaison des différentes approches a été proposée par Lucia et Beran [152] et une
tentative d’extension au cas d’un système aéroélastique a été effectuée par Anttonen et al. [12, 13].
Le gain en temps de calcul est aussi substantiel pour les modèles d’ordre réduit construits à partir des
systèmes dynamiques linéaires au moyen de la projection directe. Romanowski [189] a été le premier à
développer un modèle d’ordre réduit des équations d’Euler linéarisées pour reproduire le comportement
aéroélastique d’un profil portant dans un écoulement compressible. La méthode a ensuite été transposée
par Kim [131] dans le domaine fréquentiel afin de pouvoir déterminer rapidement les limites de stabilité du
système dynamique. Les progrès réalisés ont conduit à des applications pour des profils portants isolés, des
voilures, puis des cascades de profils représentatives d’un étage de turbomachine [60, 104, 170]. Récemment,
Lieu et al. [148] sont parvenus à réaliser le modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour d’un avion complet
pour tenir compte des effets aéroélastiques et la réponse sur une certaine gamme de fréquences d’excitation
et de nombres de Mach a été obtenue au moyen de techniques d’interpolation [10, 147]. Concernant les
systèmes aubagés, Epureanu et al. [68] ont développé un modèle d’ordre réduit à partir des équations po-
tentielles complétées par une équation intégrale de couche limite au voisinage des parois pour tenir compte
des effets visqueux. Enfin, Willcox [247] a comparé la projection sur la base des modes POD aux techniques
d’identification basées sur l’équilibrage des moments de la fonction de transfert.
Avant conclure cet état de l’art des modèles d’ordre réduit construits à partir des modes POD, il faut si-
gnaler qu’un certain nombre d’applications ont aussi vu le jour en mécanique des structures. Kerschen et al.
[130] ont ainsi livré une revue historique des applications en mécanique des structures en ce qui concerne le
contrôle actif, la détection de dommages, la réduction de modèle, la validation de capteurs,... La projection
sur la base des modes POD s’affiche ainsi comme une extension de la projection sur la base des modes
propres pour les systèmes non-linéaires. Feeny et Kappagantu [74] et Kerschen et Golinval [129] ont fourni
une interprétation physique des modes POD dans le cadre de problèmes de vibrations en les reliant notam-
ment aux modes propres du système dynamique. Une conclusion importante de Feeny et Kappagantu [74]
est que pour les vibrations libres non amorties d’un système linéaire symétrique avec une matrice de masse
unitaire, les modes POD convergent vers les modes propres lorsque le nombre de clichés employé pour
calculer les modes POD augmente. Des connexions existent aussi dans le cas de vibrations forcées. Toute-
fois, pour les systèmes linéaires la projection sur la base des modes POD ne présente pas d’intérêt puisque
les modes propres constituent déjà une méthode d’approximation très efficace. En revanche, la méthode
s’avère intéressante lorsque des non-linéarités sont présentes [8, 28] ou que le système est soumis à des
vibro-impacts [19], même si Sampaio et Soize [200] ont souligné que la projection sur la base des modes
propres est tout aussi performante dans le cadre de l’élastodynamique non-linéaire.
Pour être complet, il faut signaler pour terminer qu’il existe des variantes de la décomposition ortho-
gonale propre et que celle-ci est parfois combinée avec d’autres méthodes de réduction. Une variante in-
troduite par Aubry [16] sous le nom de décomposition bi-orthogonale permet de déterminer deux familles de
fonctions propres qui portent respectivement le nom de topos pour les fonctions spatiales et de chronos
pour les fonctions temporelles. La méthode est toutefois restreinte à l’analyse des écoulements puisque
dans ce cas les fonctions temporelles aj (t) sont obtenues au même titre que les fonctions spatiales et ne

7 Dans ce cas la projection de Galerkin correspond à une simple projection matricielle analogue à celle effectuée avec la base des

modes propres à l’équation (1.8).


8 Voir les paragraphes 2.4.1 et 2.4.2 pour les détails relatifs à ces deux approches.

24
1.3. Description des principaux modèles d’ordre réduit physiques

peuvent par conséquent pas être utilisées comme inconnues pour formuler un modèle d’ordre réduit. Hé-
mon et Santi [109] ont ainsi appliqué la décomposition bi-orthogonale à l’étude d’un problème d’interaction
fluide-structure pour analyser le champ de pression sur la paroi de corps non profilés puis pour réduire la
taille des données permettant de représenter un champ de vitesse de vent qui est utilisé ensuite pour des
simulations du comportement aéroélastique de tabliers de ponts. La méthode a aussi été employée par Ste-
phen et al. [221] qui l’ont comparée une autre méthode d’analyse de signaux multivariables pour étudier
un fluide baroclinique. Les modes POD ont parfois été calculés pour un ensemble de clichés composé de la
réponse du système dynamique ainsi que sa dérivée en temps [110] et une variante de la POD connue sous
le nom de « Smooth Orthogonal Decomposition » a par ailleurs vu le jour. La technique revient simplement
à résoudre un problème aux valeurs propres généralisé dans lequel interviennent deux matrices de corré-
lations, l’une construite pour la réponse du système et l’autre pour sa dérivée en temps [29, 44]. Enfin, la
projection sur la base des modes POD a parfois été combinée à des hypothèses de symétrie [195], au déve-
loppement en séries de Volterra [154], ou encore à la méthode de troncature équilibrée [115, 193, 246].
La projection sur la base des modes POD présente l’avantage de pouvoir être appliquée à des systèmes
dynamiques non-linéaires. L’expression du modèle d’ordre réduit résultant de la projection est particulière-
ment intéressante lorsque le second membre du système dynamique est polynomial. Dans le cas contraire
il est difficile de formuler un modèle d’ordre réduit exploitable, à moins de recourir à la technique de pro-
jection sur le sous-espace dans laquelle le second membre doit être calculé au moyen du modèle d’ordre
élevé ce qui limite fortement le gain en terme de réduction. Par ailleurs, il faut préciser que le modèle
d’ordre réduit est susceptible d’être instable et doit donc être corrigé la plupart du temps. Enfin il s’agit à
l’origine d’une méthode d’analyse de données si bien que les modes POD dépendent des clichés qui ont
servi à construire la base de projection. Cette dépendance peut remettre en cause la capacité du modèle
d’ordre réduit à reproduire des réponses correctes sur une certaine gamme de paramètres et la méthode
demande donc à être éventuellement adaptée au moyen de techniques inspirées de [10, 147] par exemple.

1.3.5 Modes d’oscillation et d’interaction principaux


La principale limitation de la décomposition orthogonale propre est que les modes POD sont construits
pour extraire des clichés les structures cohérentes spatiales, sans tenir compte à aucun moment de l’évolution
temporelle du système dynamique dans le processus de calcul. Les modes POD sont donc certes optimaux
au sens d’une approximation moindres carrés pour représenter « statiquement » les clichés à chaque instant,
mais ils ne le sont pas pour reproduire le comportement dynamique du modèle d’ordre élevé. Hasselmann
[107] a alors proposé de construire un modèle d’ordre réduit optimal à partir d’une forme générique, de
telle manière que les modes ainsi que les coefficients du modèle d’ordre réduit fournissent la meilleure
approximation de la solution de référence. À la différence de la projection sur la base des modes POD
où seuls les modes étaient optimaux pour approcher les clichés, la méthode fournit ici simultanément les
modes et les coefficients du système dynamique réduit. En procédant ainsi, le modèle d’ordre réduit est
optimal au sens spatio-temporel et non plus seulement spatial. Les modes obtenus portent le nom de modes
d’interaction principaux dans le cas général, et de modes d’oscillation principaux pour les systèmes linéaires9 .
Une revue des applications dans le cas linéaire a été réalisée par Von Storch et al. [242]. La méthode a été
développée à l’origine pour l’étude de phénomènes climatiques tels que El Niño pour n’en citer qu’un.
La nécessité de compléter l’analyse à partir des modes POD s’est imposée dans ce domaine puisque les
systèmes dynamiques mis en jeu présentent des échelles de temps et d’espace très diverses dans lesquelles
les caractéristiques spatio-temporelles sont fondamentales.
Les variables dynamiques du système (1.2) sont alors supposées s’écrire sous la forme
q
X
x(t) = aj (t)e e a(t) + ρ,
ϕ(j) + ρ = Φ (1.35)
j=1

e (j) désigne un mode d’interaction principal, aj est l’amplitude modale pour laquelle le modèle d’ordre
où ϕ
e de taille
réduit est formulé dans ce qui suit, et ρ est le résidu de l’erreur d’approximation. La matrice Φ
Nv × q regroupe les q modes d’interaction principaux qui décrivent le modèle d’ordre réduit.
9 Les acronymes PIPs et POPs sont généralement employés pour abréger les expressions anglaises « Principal Interaction Patterns »

et « Principal Oscillation Patterns ».

25
1. É TAT DE L’ ART DES MÉTHODES DE RÉDUCTION DE MODÈLE POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

Les coefficients d’expansion a(m) qui minimisent le résidu ρ par rapport à une certain métrique M dans
la décomposition (1.35) sont solutions du système linéaire approché x(m) ≈ Φ e a(m) , où x(m) est un cliché à
l’instant tm . Dans le cas général, le problème n’a pas de solution exacte et il faut recourir à des méthodes de
résolution approchées, telles que celles proposées dans l’annexe A.3. La solution des équations normales de
la méthode des moindres carrés avec la métrique M conduit à l’expression
 T −1 T
a(m) ≈ Φ e + x(m) = Φe MΦ e Φe M x(m) . (1.36)

Dans un second temps, il est nécessaire de choisir la forme générique du modèle d’ordre réduit censée
pouvoir décrire le comportement du système non réduit. Ce choix résulte d’une certaine connaissance de
la physique du problème modélisé ou d’une suite de raisonnements logiques concernant les propriétés que
le modèle d’ordre réduit doit pouvoir reproduire. Un choix particulièrement judicieux consiste à utiliser
l’expression formelle de la projection de Galerkin des équations du modèle d’ordre élevé pour des modes
e (j) qui seront déterminés comme les modes d’interaction principaux. D’une manière générale, on note
ϕ
ȧ = f (a, X ) le système d’équations gouvernant les amplitudes modales a en fonction d’un certain nombre
de paramètres X qui correspondent aux coefficients des équations différentielles ordinaires du modèle
d’ordre réduit. À la différence des amplitudes a(m) , les amplitudes a sont celles calculées à l’aide du système
dynamique réduit. Les modes optimaux regroupés dans la matrice Φ e et les coefficients optimaux X du
modèle d’ordre réduit sont alors déterminés simultanément de façon à minimiser la fonctionnelle
   T  
Q Φ,e X = E ȧ(tm ) − ȧ(m) M f ȧ(tm ) − ȧ(m)
    (1.37)
+ (m) T + (m)
e
= E f (a(tm ), X ) − Φ ẋ f e
M f (a(tm ), X ) − Φ ẋ ,

définie comme l’erreur moyenne entre les dérivées des amplitudes modales ȧ produites par le modèle
d’ordre réduit et celles de référence ȧ(m) associées aux modes d’interaction principaux par la relation (1.36).
L’opérateur E [·] est un opérateur de moyenne en temps identique à celui employé dans la formulation POD
et dont l’objectif est de transcrire l’effet de moyenne d’ensemble statistique sous l’hypothèse d’ergodicité du
système. Hasselmann [107] conseillait de choisir pour la métrique M l’inverse de la matrice de covariance
d’un ensemble de clichés x(m) et pour M f l’inverse de la matrice de covariance de la dérivée temporelle des
clichés ẋ(m) .
La méthode fournit alors les modes ϕ e (j) optimaux et les coefficients X optimaux du modèle d’ordre ré-
duit pour représenter à la fois les données de départ issues du modèle non réduit et la réponse fournie par
le modèle d’ordre réduit. Toutefois, le problème d’optimisation à résoudre est extrêmement lourd puisqu’il
faut déterminer, en plus de tous les coefficients du modèle d’ordre réduit, l’ensemble des degrés de liberté
pour les modes d’interaction principaux. Or si le modèle d’ordre réduit est construit pour un domaine
fluide comportant un nombre important de cellules de contrôle, la résolution n’est pas possible en pratique.
C’est la raison pour laquelle Kwasniok [137] a proposé de chercher des modes d’interaction principaux qui
soient des combinaisons linéaires des modes POD. Le principe consiste à calculer dans un premier temps les
qϕ premiers modes POD ϕ(j) associés à la réponse du système. Ensuite, le problème d’optimisation (1.37)
est formulé pour une fonctionnelle Q ′ (λ, X ), où les coefficients λ sont ceux Pqϕde la décomposition linéaire
des modes d’interaction principaux sur les modes POD tels que : ϕ e (j) = n=1 λnj ϕ(n) . En procédant de
la sorte, le nombre de paramètres à optimiser pour minimiser la fonctionnelle Q ′ est nettement réduit et la
résolution devient possible même pour des systèmes comportant un nombre très important de degrés de
liberté.
Deux remarques importantes distinguent les modèles d’ordre réduit basés sur les modes d’interaction
principaux de ceux utilisant les modes POD. Les modes d’interaction principaux obtenus ne sont pas néces-
sairement orthogonaux à moins d’imposer une condition supplémentaire par le biais d’une contrainte dans
le problème d’optimisation à résoudre par exemple, alors que par construction, les modes POD sont définis
comme des vecteurs propres orthogonaux entre eux. Ensuite, la seconde remarque est que les modes d’in-
teraction principaux peuvent convenir à un système d’équations différent — éventuellement simplifié — de
celui du modèle d’ordre élevé puisque les coefficients et les modes s’adaptent à la réponse de référence alors
que la projection sur la base des modes POD doit nécessairement être pratiquée pour les mêmes équations.
Cette dernière remarque signifie par ailleurs que les modes d’interaction principaux peuvent conduire à
des modèles d’ordre réduit non physiques lorsque la forme générique des équations est choisie a priori.

26
1.3. Description des principaux modèles d’ordre réduit physiques

1.3.6 Équilibrage harmonique


Dans le cas d’écoulements dominés par un comportement périodique, l’utilisation d’une décomposi-
tion en série de Fourier de la solution du système dynamique s’avère très intéressante. Le principe consiste
à remplacer la décomposition de Fourier dans les équations du système dynamique puis à équilibrer les
termes de fréquences identiques. Le système dynamique est alors remplacé par un ensemble d’équations
algébriques non-linéaires stationnaires portant sur les coefficients de Fourier. La résolution de ces équations
peut être menée à l’aide des techniques d’accélération de la convergence développées pour les simulations
stationnaires. La méthode, connue sous le nom d’équilibrage harmonique a d’abord été développée pour
analyser le comportement harmonique des équations différentielles ordinaires, puis a plus récemment été
appliquée à la résolution de problèmes d’aérodynamique par Hall et al. [103].
Le principe consiste donc à décomposer le vecteur d’état du système dynamique (1.1) sur les nHB pre-
mières harmoniques de la manière suivante :
nHB
X
x(t) = bn ejωnt .
x (1.38)
n=−nHB

Le terme pour l’harmonique n = 0 correspond au champ moyen. L’introduction de la décomposition pré-


cédente dans l’équation (1.1) du système dynamique conduit alors à la relation
nHB nHB
!
X X
jωnt jωnt
bn e
jωn x =f bn e
x ,µ , (1.39)
n=−nHB n=−nHB

et en développant le second membre on parvient à l’expression


nHB
X nHB
X
bn ejωnt =
jωn x fbn (b
xn , µ) ejωnt . (1.40)
n=−nHB n=−nHB

dans laquelle les termes de même fréquence ont été regroupés. Dans ce cas les termes de fréquence iden-
tique sont identifiés entre eux, ce qui conduit à 2nHB + 1 relations algébriques portant sur les coefficients de
Fourier x
bn qui s’écrivent
jωn xbn = fbn (b
xn , µ), ∀n ∈ J−nHB ; nHB K. (1.41)
Enfin, en notant N = diag(−nHB , . . . , 0, . . . , nHB ) la matrice des indices des harmoniques, x b =[x b−nHB , . . . ,
bnHB ] le vecteur des coefficients de Fourier et b
b0 , . . . , x
x f = [fb−nHB (b
x, µ), . . . , fb0 (b
x, µ), . . . , fbnHB (b
x, µ)] le vecteur
des seconds membres, l’expression (1.41) se récrit sous la forme matricielle

b=b
jωN x f. (1.42)

Bien que le principe soit simple, la mise en œuvre est difficile lorsqu’il s’agit de traiter les équations
d’Euler ou de Navier-Stokes puisque la détermination des termes fbn est fastidieuse et coûteuse en terme
de temps de calcul. En outre, l’extension de la méthode telle qu’elle a été introduite ici est difficilement
envisageable pour les écoulements turbulents. Hall et al. [103] ont donc proposé une technique alternative
pour évaluer le second membre. Celle-ci consiste à évaluer le vecteur d’état x du système dynamique à
2nHB + 1 instants différents régulièrement répartis sur une période d’oscillation du système. Les solutions
sont alors regroupées dans un vecteur x∗ = [x(t1 ), . . . , x(t2nHB +1 )] auquel on applique une transformation
de Fourier discrète. Le vecteur des coefficients de Fourier x b est alors relié au vecteur x∗ par l’opérateur de
la transformée de Fourier discrète noté E tel que xb = E x . Le système (1.42) devient alors jωN E x∗ = b

f et
finalement, puisque la matrice de la transformée de Fourier discrète est inversible, l’équation est transposée
dans le temps pour obtenir l’expression

jω E−1 N E x∗ = f ∗ . (1.43)

L’opérateur E−1 N E correspond en fait à l’approximation spectrale de la dérivée temporelle et le vecteur


f est défini par f ∗ = E−1 b

f . L’avantage de cette dernière expression est que le second membre se calcule

27
1. É TAT DE L’ ART DES MÉTHODES DE RÉDUCTION DE MODÈLE POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

facilement avec le code de calcul habituellement employé pour le modèle d’ordre élevé. Hall et al. [103] ont
finalement introduit dans l’équation (1.43) un terme pseudo-temporel afin de pouvoir résoudre le système
au moyen des algorithmes de résolution déjà disponibles. Le système s’écrit alors
∂x∗ 
+ jω E−1 N E x∗ = f ∗ . (1.44)
∂τ
De cette manière, le système est intégré vers un pseudo-état stationnaire périodique qui correspond aux
coefficients de Fourier de la décomposition (1.38).
La méthode permet de conserver les non-linéarités et a été employée en particulier pour modéliser les
écoulements dans les turbomachines. Ainsi, Hall et al. [103] ont appliqué avec succès cette technique pour
effectuer des calculs instationnaires avec les équations de Navier-Stokes moyennées pour des cascades de
profils en flottement harmonique. Thomas et al. [227] ont employé l’équilibrage harmonique pour éva-
luer le cycle limite d’oscillation d’un profil portant en écoulement visqueux transsonique. McMullen et al.
[164, 165] ont quant à eux cherché à résoudre directement les équations (1.42) à l’aide d’un code fréquen-
tiel. Liu et al. [149] se sont quant à eux intéressés à la réponse aéroélastique d’un profil portant dont le
déplacement est gouverné par un ressort de rigidité cubique. La réponse du système est alors comparée
lorsque celle-ci est calculée par la méthode dite « classique » dans laquelle le système porte directement sur
les coefficients de Fourier gouvernés par l’équation (1.41) et avec la méthode dite de « grande dimension »
dans laquelle l’équation (1.44) est résolue avec un terme pseudo-temporel. L’utilisation de la transformée de
Fourier discrète pour résoudre le problème en temps allège considérablement la résolution, d’autant plus
lorsque le nombre d’harmoniques retenues est grand. Cependant, la seconde version de l’équilibrage har-
monique est moins performante que la version classique puisque pour une précision équivalente, le double
d’harmoniques doit être retenu. Les auteurs attribuent cet accroissement du nombre d’harmoniques au de-
gré de non-linéarité introduit et précisent que le nombre d’harmoniques supplémentaires est inférieur si
la non-linéarité est seulement quadratique. Enfin, la méthode a aussi été employée par Gopinath et al. [95]
pour modéliser l’écoulement instationnaire (i) dans un compresseur à un seul étage en 3D et (ii) dans un
compresseur multi-étage en 2D. Dans ce cas, la difficulté consiste à combiner des fréquences associées aux
différents étages qui ne sont pas nécessairement multiples entre elles.
Des gains en temps de calcul significatifs sont obtenus avec cette méthode puisque seuls 2nHB + 1 coeffi-
cients de Fourier sont calculés. La principale limitation de la méthode est toutefois le fait que l’écoulement
doit nécessairement être harmonique et que les fréquences des oscillations doivent être connues a priori.
Toutefois certains développements sont en cours pour éviter cette dernière contrainte [94].
La méthode d’équilibrage harmonique peut aussi servir à construire un modèle d’ordre réduit non-
linéaire à partir d’un solveur fluide linéarisé, en pratiquant un développement de Taylor du résidu [228].
Le développement obtenu est alors projeté sur les modes POD pour aboutir à un modèle d’ordre réduit
non-linéaire, tronqué ici à l’ordre deux. Le principal avantage est que non seulement le modèle d’ordre ré-
duit est capable de reproduire des phénomènes non-linéaires, mais il permet en outre d’obtenir une réponse
paramétrique si les modes POD ont été calculés à partir de clichés obtenus pour différents paramètres.

1.3.7 Réduction sur une base construite a priori


Enfin des travaux récents ont conduit à la construction de modèles d’ordre réduit pour lesquels la base
de projection est fabriquée a priori de manière itérative. Le terme a priori sous-entend qu’il n’est pas néces-
saire de générer au préalable un ensemble de clichés, d’où un gain en temps de calcul pour la construc-
tion du modèle d’ordre réduit. La méthode de construction de la base a priori introduite par Ryckelynck
[198, 199] consiste, comme la plupart des autres méthodes rencontrées jusqu’à présent, à effectuer une
décomposition linéaire analogue à celle donnée à l’équation (1.32) pour le vecteur d’état du système dyna-
mique. Une projection formelle du système dynamique sur la base à déterminer est pratiquée et le modèle
d’ordre réduit résultant a ainsi une forme identique à celle donnée à l’équation (1.34) pour la décomposition
sur la base des modes POD lorsque le second membre du système dynamique est polynomial.
La base de projection recherchée est dans un premier temps initialisée avec un vecteur arbitraire, comme
par exemple la condition initiale imposée au système dynamique ou la solution stationnaire. La base a priori
est donc formée initialement d’un seul vecteur : Φ(k=1) = { ϕ(1) }. Le système dynamique réduit est alors in-
tégré en temps sur une durée Tc au cours de laquelle le résidu R du système dynamique est évalué. Celui-ci
est défini à partir de l’équation (1.1) du système dynamique par

28
1.3. Description des principaux modèles d’ordre réduit physiques
 
nq nq
X X
R(t) = ȧj (t)ϕ(j) − f  aj (t)ϕ(j) , µ. (1.45)
j=1 j=1

Le nombre nq de vecteurs ϕ(j) contenus dans la base de projection est au départ égal à un et le résidu du
système dynamique est évidemment élevé lorsque la base a été initialisée avec un vecteur arbitraire. Si la
norme du résidu dépasse un certain seuil εR pour au moins un instant au cours de l’intervalle de temps
[t0 ; t0 +Tc ], cela signifie que les vecteurs ϕ(j) de la base a priori ne sont pas appropriés et la base de projection
doit donc être améliorée et/ou complétée.
La base est dans un premier temps améliorée en procédant à une décomposition orthogonale propre des
amplitudes modales aj intégrées sur l’intervalle de temps [t0 ; t0 + Tc ]. Seuls les p premiers modes POD
associés aux plus grandes valeurs propres du problème (1.31) sont conservés. En notant alors V(j) les p
modes POD de dimension nq , les vecteurs de la base a priori sont corrigés pour tout j = 1, . . . , p en

nq
X (j)
e(j) =
ϕ ϕ(i) Vi . (1.46)
i=1

La base a priori améliorée est donc constituée de p ≤ nq vecteurs tels que Φ e (k) = {ϕ e(p) }. Finale-
e(1) , . . . , ϕ
ment la base doit être enrichie par des vecteurs supplémentaires pour améliorer le contenu de la projection.
On choisit pour cela d’alimenter la base avec le résidu R(t+ ) où t+ est le premier instant au cours de l’in-
tégration en temps du modèle d’ordre réduit où le résidu dépasse le seuil de tolérance εR imposé. Plus
généralement, la base est enrichie avec le sous-espace de Krylov à droite de dimension m défini à l’équa-
tion (1.20). Le vecteur d correspond alors à la discrétisation R+ du résidu R(t+ ) et la matrice M est la
matrice jacobienne J du système dynamique. La nouvelle base enrichie et améliorée
n o
Φ(k+1) = Φe (k) , Km J, R+ (1.47)

comprend au final les p vecteurs améliorés auxquels viennent s’ajouter les m vecteurs supplémentaires ap-
portés par l’enrichissement avec le sous-espace de Krylov. En pratique on choisit m = 1 afin de ne pas avoir
à évaluer la matrice jacobienne du système dynamique. Les vecteurs de la base Φ(k+1) doivent être normés
et éventuellement orthogonalisés. Le processus est poursuivi de façon itérative jusqu’à ce que la base enri-
chie soit en mesure de reproduire correctement la réponse du modèle d’ordre élevé.
La méthode a été mise en œuvre par Ryckelynck [198, 199] pour des problèmes de thermomécanique.
Verdon [238] a quant à lui appliqué la méthode aux équations de Navier-Stokes d’un écoulement incom-
pressible couplées au transport de particules. Les gains en terme de réduction du nombre de degrés de
liberté et de temps de calcul sont considérables. Le seul reproche qui peut être formulé à propos de cette
méthode est que la construction du modèle d’ordre réduit est intrinsèquement liée au code de calcul em-
ployé pour résoudre le modèle d’ordre élevé afin de pouvoir évaluer le résidu R(t).
Dans le même esprit, Sirisup et al. [217] ont proposé une méthode dite d’intégration projective pour accé-
lérer la résolution du système dynamique. L’idée est de calculer sur un petit intervalle de temps la solution
du modèle d’ordre élevé afin de pouvoir extraire les modes POD ainsi que les amplitudes modales asso-
ciées aux clichés prélevés sur la durée simulée. Une intégration projective est alors réalisée : elle consiste
simplement à évaluer les amplitudes modales pour un instant ultérieur par des techniques classiques d’in-
tégration en temps des équations différentielles ordinaires. La méthode alterne donc entre la résolution du
modèle d’ordre élevé et du modèle d’ordre réduit et permet donc d’aboutir à des simulations stables sur de
très longues durées, ce qui n’était pas possible avec des modèles POD-Galerkin classiques [215, 216].

1.3.8 Méthodes de réduction alternatives et dépendance avec un paramètre


L’état de l’art effectué dans ce paragraphe n’est pas totalement exhaustif et il existe encore bien d’autres
techniques de réduction — peu ou pas encore employées en mécanique des fluides — qui se doivent d’être
mentionnées ici puisqu’elles présentent un certain potentiel.

29
1. É TAT DE L’ ART DES MÉTHODES DE RÉDUCTION DE MODÈLE POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

Méthodes de Galerkin non-linéaires et variétés inertielles L’obtention de modèles d’ordre réduit non-
linéaires s’effectue très souvent au moyen d’une projection « classique » ou « linéaire » de Galerkin, mais
récemment des méthodes de Galerkin non-linéaires issues de la théorie des variétés inertielles pour les sys-
tèmes dynamiques sont apparues. Le principe consiste simplement à construire le modèle d’ordre réduit en
tenant compte de la dynamique rapide de certains modes [158]. Comme le notent Steindl et Troger [220],
cette approche peut permettre l’élaboration de modèles d’ordre réduit plus performants puisque l’intégra-
tion en temps reste stable à long terme et ce, même avec très peu de modes. L’efficacité de la méthode a en
particulier été étudiée pour les équations de Kuramoto-Sivashinsky et de Burgers par Jones et al. [121].

Décompositions alternatives D’autres types de décompositions plus marginales ont aussi été étudiés.
Ainsi, l’analyse archétypale développée par Cutler et Breiman [54] apparaît comme une extension intéressante
de la décomposition orthogonale propre puisqu’elle fournit des modes optimaux pour des ensembles de
données non nécessairement elliptiques alors que les modes POD peuvent justement s’interpréter comme
les axes principaux d’une ellipsoïde. Une variante de la méthode décrite par Stone et Cutler [222] pour
suivre les structures mobiles telles que les ondes progressives demande à être étudiée plus en détail puis-
qu’elle est prédisposée aux systèmes où les conditions limites sont cycliques comme pour les turboma-
chines. La méthode semble robuste puisque Adrover et Giona [2] sont parvenus à reproduire les réponses
de systèmes dynamiques dans lesquelles des bifurcations importantes interviennent.
La base de projection peut être construite à l’aide des tessellations de Voronoï. Les diagrammes de Voro-
noï ont été à l’origine développés pour produire une décomposition de l’espace en polygones à partir d’un
ensemble de points. De nombreuses applications de la méthode sont fournies dans [62] et la méthode a
naturellement été employée pour discrétiser le domaine spatial sur lequel un système dynamique est défini
[63]. Plus récemment, un modèle d’ordre réduit pour les équations de Navier-Stokes a été construit par
Burkardt et al. [37]. Dans cet article, les performances du modèle d’ordre réduit sont comparées à celles
obtenues avec un modèle d’ordre réduit dont la base de projection est constituée des modes POD. Les ré-
sultats ne permettent cependant pas de favoriser une méthode plus qu’une autre.
Enfin, citons aussi les travaux de Ammar et al. [9] qui ont introduit une décomposition des variables
d’état afin de réduire le système dynamique non-linéaire à un ensemble d’équations linéaires dans chaque
direction de l’espace, ou encore la décomposition spectrale généralisée de Nouy [173] pour les problèmes gou-
vernés par un ensemble d’équations aux dérivées partielles stochastiques.
Pour conclure, Chinesta et al. [45] ont fait le point sur différentes méthodes de réduction a priori et a
posteriori et ont fait le lien, toujours dans l’optique de réduire les coûts de calcul, avec d’autres techniques
envisageables comme l’homogénéisation ou la parallélisation de codes de calcul.

Réponse paramétrique Les méthodes décrites dans cette partie visent à déterminer une base de projection
optimale pour décrire le système dynamique. La construction de la base s’effectue souvent à partir d’un
ensemble fini de M échantillons formant une base de données parfois appelée base d’apprentissage et notée
n o
X = x(1) , . . . , x(M) . (1.48)

Le choix des échantillons dans la base de données est crucial pour la construction de la base de pro-
jection puisque ce sont les seuls éléments qui apportent des informations caractéristiques du système. Plu-
sieurs manières de choisir les échantillons peuvent être envisagées. Si le processus est stationnaire, l’état
du système ne dépend que du paramètre µ et par conséquent l’ensemble X est constitué des réponses du
modèle d’ordre élevé x(µi ) pour M valeurs différentes du paramètre. Pour l’application qui nous intéresse
ici, le système est instationnaire et par conséquent les échantillons peuvent être prélevés à des instants
ti différents et pour des valeurs différentes µj du paramètre µ. Les M échantillons correspondent donc à
l’état x(ti , µj ). Enfin, il est possible de considérer le temps comme un paramètre et de ne considérer pour
les échantillons que les états x(ti ). Le choix de la base d’apprentissage peut faire l’objet d’un plan d’expé-
rience qui vise à déterminer un ensemble d’échantillons qui soit le plus représentatif possible du modèle
d’ordre élevé sur un intervalle de temps ou une gamme de paramètres donnés. Mentionnons juste que
l’ensemble X peut être obtenu par un tirage aléatoire par une méthode de type Monte-Carlo, ou par des
techniques d’échantillonnage stratifié tels que les hypercubes latins. L’échantillonnage peut aussi être pra-
tiqué au moyen d’une décomposition en tessellations de Voronoï de l’espace paramétrique, ou à l’aide d’un

30
1.3. Description des principaux modèles d’ordre réduit physiques

algorithme glouton [36]. Weller et al. [244] ont quant à eux proposé de combiner les deux approches.
Dans ce document on se concentre sur la construction d’un modèle d’ordre réduit capable de repro-
duire la réponse temporelle du modèle d’ordre élevé. Par conséquent, le paramètre µ ne représente pour
l’instant que le temps, mais il pourrait correspondre dans le futur à un paramètre de l’écoulement comme le
nombre de Mach par exemple. La base de projection devra donc être construite de manière à tenir compte de
ces nouvelles variations paramétriques. De nombreux travaux ont contribué à la construction de modèles
d’ordre réduit paramétriques. Citons en particulier la construction de bases paramétriques à partir des
sous-espaces de Lagrange, de Taylor ou de Hermite [118], les extensions proposées par Christensen et al.
[46] et Jørgensen et al. [122] pour compléter les éléments de la base de projection, ou encore les méthodes
d’interpolations récemment développées par l’équipe de Farhat pour les écoulements compressibles linéa-
risés [10, 147, 148]. Le problème de la construction d’une base de projection adéquate pour reproduire la
réponse du système sur une gamme de paramètres est clairement expliqué par Rozza et al. [196] dans le cas
de problèmes linéaires, mais la méthode s’applique de manière plus générale aux systèmes non-linéaires.
Les auteurs décrivent en détail le principe de construction d’une base paramétrique et définissent la ma-
nière de choisir les clichés à partir d’algorithmes gloutons et d’estimateurs d’erreurs a posteriori. L’objectif
est à terme d’aboutir à un modèle d’ordre réduit paramétrique dans lequel les paramètres sont différents
du temps. De Vuyst et Audouze [55] ont quant à eux suggéré de combiner des modèles réduits construits
par projection sur la base des modes POD avec des méthodes d’interpolation des amplitudes modales pour
obtenir la réponse sur une gamme de paramètres. Les méthodes d’interpolation en question sont celles
présentées dans le paragraphe 1.2 sous le nom de méthodes de réduction de type surface de réponse.

31
1. É TAT DE L’ ART DES MÉTHODES DE RÉDUCTION DE MODÈLE POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

1.4 Synthèse et justification du choix de la méthode POD


Dans le paragraphe précédent, un certain nombre de méthodes physiques de réduction de modèle ont
été présentées, mais seules quelques unes d’entre elles sont de bons candidats pour construire un modèle
d’ordre réduit non-linéaire de l’écoulement aérodynamique compressible dans les étages d’un compresseur
ou d’une turbine de turbomachine. Pour nous aider dans le choix de la méthode de projection adoptée, on
résume dans le tableau 1.1 plusieurs caractéristiques des principales méthodes décrites dans ce qui précède.

Syst. dyn. Type de réduction BdD Intr. Spécificité


Décomposition en Calcul des vecteurs propres de l’opérateur élastique
modes propres ou aérodynamique.
Calcul des vecteurs propres diagonalisant les matrices
Balanced Truncation
grammiennes de contrôlabilité et d’observabilité.
Linéaire
Calcul d’une base engendrant les mêmes espaces de
Approximation de
Krylov que ceux associés aux moments de la fonction
Krylov
de transfert.
Identification de la Identification des matrices du système réduit à partir
matrice de Hankel de réponses impulsionnelles.
Développement en série Calcul des noyaux de Volterra à partir de réponses im-
de Volterra pulsionnelles.
Décomposition Calcul des vecteurs propres minimisant l’erreur de
orthogonale propre projection orthogonale.
Décomposition en
Calcul des vecteurs et des coefficients optimaux pour
Non-linéaire modes d’interaction
le système dynamique.
principaux
Calcul de la réponse pour les coefficients de la décom-
Équilibrage harmonique
position en série de Fourier.
Calcul itératif de la base par amélioration et enrichis-
Réduction a priori
sement avec le résidu.

Tableau 1.1 : Comparaison des principales méthodes de réduction de modèle physiques. La première colonne indique à quel type
de système dynamique (linéaire ou non-linéaire) s’applique la méthode de réduction proposée dans la deuxième colonne. Les cases
colorées dans la troisième et la quatrième colonne signifient respectivement que la construction du modèle d’ordre réduit nécessite
une base de données (BdD) ou est intrusive (Intr.). Enfin la dernière colonne décrit très brièvement le principe de la méthode.

Les méthodes de réduction valables pour les systèmes non-linéaires le sont bien évidemment pour les
systèmes linéaires qui en constituent une simplification. La première partie des méthodes dédiées aux sys-
tèmes linéaires est écartée d’emblée puisque l’application qui nous intéresse ici met en œuvre des sys-
tèmes dynamiques non-linéaires. Parmi les méthodes disponibles pour les systèmes non-linéaires, un cer-
tain nombre présente des atouts. Un critère supplémentaire pour orienter notre choix concerne la manière
dont le modèle d’ordre réduit est construit. La détermination de la base de projection nécessite en général
soit de s’introduire dans le code de calcul avec lequel le modèle d’ordre élevé est résolu, soit d’utiliser les
résultats produits par ce code. Dans le premier cas on parle de méthodes intrusives puisqu’il est nécessaire
au cours de la construction du modèle d’ordre réduit d’effectuer un certain nombre d’opérations avec les
routines du code de calcul pour récupérer par exemple les matrices de masse et de rigidité d’un système
mécanique, ou l’opérateur aérodynamique discret par exemple, ou encore pour calculer le résidu. La se-
conde classe de méthode n’est pas intrusive mais nécessite de générer une base de données caractérisant le
système dynamique au moyen d’un certain nombre de réponses. Dans le cadre de cette thèse, on se fixe
l’objectif de construire un modèle d’ordre réduit du système dynamique qui soit indépendant du code de
calcul et par conséquent les méthodes intrusives sont éliminées.
Le choix de la base de projection est encore large puisque en plus des modes POD et des modes d’inter-
action principaux recensés dans le tableau 1.1, les modes produits par l’analyse archétypale, ou encore les
générateurs associés aux tessellations de Voronoï conviennent. Le développement en série de Volterra est
un cas à part puisque même si il permet théoriquement de représenter des systèmes non-linéaires au moyen
d’un faible nombre de noyaux, son emploi en tant que modèle d’ordre réduit n’est pas encore formalisé.
Notre choix s’oriente vers la construction d’un modèle d’ordre réduit au moyen de la décomposition ortho-

32
1.4. Synthèse et justification du choix de la méthode POD

gonale propre afin de bénéficier des nombreux résultats déjà obtenus pour les écoulements incompressibles
et des rares travaux effectués pour les écoulements compressibles.

Écoulement Étude L NL Ael Projection


Anttonen et al. [12, 13] Sous-espace
Potentiel
Epureanu et al. [68] Discrète
Barone et al. [23] Discrète
Beran et al. [30] Sous-espace
Feng et Soulaimani [75] Sous-espace
Hall et al. [104] Discrète
Euler
Lieu et Farhat [147] Discrète
Lucia et al. [155] Sous-espace
Lucia et Beran [152] POD-Galerkin
Mortchéléwicz [170] Discrète
Pettit et Beran [178] Sous-espace
Romanowski [189] Discrète
Willcox [247] Discrète
Gloerfelt [87] POD-Galerkin
Navier-Stokes
Moreno et al. [169] POD-Galerkin
isentropique
Rowley et al. [192, 194] POD-Galerkin
Bourguet et al. [34] POD-Galerkin
Gloerfelt [87] POD-Galerkin
Iollo et al. [117] POD-Galerkin
Navier-Stokes
Mortchéléwicz [170] Discrète
Vigo [239, 240] POD-Galerkin
Étude actuelle POD-Galerkin

Tableau 1.2 : Résumé de l’utilisation de modèles d’ordre réduit basés sur la décomposition orthogonale propre pour les écoulements
d’un fluide compressible. Les deux premières colonnes indiquent le type d’écoulement pour lequel le modèle d’ordre réduit est
construit et la référence de l’étude. Dans les colonnes suivantes, on précise si le modèle d’ordre réduit est linéaire (L) ou non-
linéaire (NL) et si il existe une application pour l’aéroélasticité (Ael). Enfin dans la dernière colonne le type de projection employé
pour obtenir le modèle d’ordre réduit est fourni.

Le tableau 1.2 résume les principaux travaux effectués pour la réduction de systèmes dynamiques au
moyen de la décomposition orthogonale propre pour les écoulements d’un fluide compressible. Pour les
applications en aéroélasticité, la grande majorité des travaux est effectuée avec les équations linéarisées
d’Euler qui permettent d’employer la projection discrète. Quelques applications avec la projection sur le
sous-espace ont été réalisées par Beran et al. [30] et Feng et Soulaimani [75] mais comme cela a été dit plus
tôt au paragraphe 1.3.4, la projection sur le sous-espace ne permet pas des gains en temps de calcul aussi
intéressant que la projection discrète ou celle de Galerkin. À notre connaissance, aucun modèle d’ordre
réduit non-linéaire des équations d’Euler ou de Navier-Stokes d’un fluide compressible n’a été développé
pour des applications en aéroélasticité. Dans cette thèse, on se propose donc d’étendre la formulation du
modèle d’ordre réduit POD-Galerkin non-linéaire développée par Vigo [239] afin de tenir compte d’effets
aéroélastiques dus au déplacement d’une structure dans le fluide. La principale difficulté sera d’écrire for-
mellement les équations du modèle d’ordre réduit obtenues par projection de Galerkin.
L’écriture formelle de cette projection sera ici combinée avec les modes POD de l’écoulement afin de
construire le modèle d’ordre réduit, mais le choix d’autres vecteurs de base éventuellement plus appro-
priés est évidemment envisageable. En particulier, il paraît intéressant d’étudier par la suite la construction
d’un modèle d’ordre réduit avec une base constituée des modes d’interaction principaux ou issus de l’ana-
lyse archétypale puisque ces méthodes permettent de déterminer des modes optimaux en adéquation avec
les coefficients du modèle d’ordre réduit.

33
Chapitre 2
Principe de construction d’un modèle d’ordre
réduit POD-Galerkin

Sommaire
2.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
2.2 Description de la décomposition orthogonale propre pour un système déterministe . . . . 37
2.2.1 Décomposition orthogonale propre d’un ensemble de données . . . . . . . . . . . . . 37
2.2.2 Détermination des modes POD par la méthode des clichés . . . . . . . . . . . . . . . . 41
2.2.3 Propriétés de la décomposition orthogonale propre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
2.2.3.1 Orthogonalité des amplitudes modales en moyenne . . . . . . . . . . . . . . 43
2.2.3.2 Énergie associée aux modes POD . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
2.2.3.3 Troncature de la base POD et estimateur d’erreur . . . . . . . . . . . . . . . . 45
2.2.3.4 Héritage de propriétés par les modes POD . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
2.3 Un exemple d’application de la POD en analyse de données . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
2.4 Principe de construction du modèle d’ordre réduit à partir de la base POD . . . . . . . . . 50
2.4.1 Construction d’un modèle d’ordre réduit linéaire par projection discrète . . . . . . . . 50
2.4.2 Construction d’un modèle d’ordre réduit implicite par projection sur le sous-espace . 51
2.4.3 Construction d’un modèle d’ordre réduit polynomial par projection de Galerkin . . . 52
2.4.4 Construction d’un modèle d’ordre réduit par identification des coefficients . . . . . . 53
2.5 Décomposition orthogonale propre des systèmes multivariables . . . . . . . . . . . . . . . 56
2.5.1 Description de l’approche POD scalaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56
2.5.2 Description de l’approche POD vectorielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
2.6 Synthèse du chapitre 2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61

35
2. P RINCIPE DE CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN

2.1 Introduction
Après avoir décrit dans le paragraphe précédent un certain nombre de méthodes de réduction, notre
choix s’est porté sur la décomposition orthogonale propre qui fournit une base adéquate pour construire
un modèle d’ordre réduit selon les critères que nous nous sommes fixés dans le cadre de cette thèse. Avant
d’entrer directement dans le vif du sujet, le principe de la décomposition orthogonale propre est d’abord dé-
taillé afin de présenter le cadre théorique ainsi que les principales propriétés des modes POD qui constitue-
ront la base de projection. Un exemple d’application simple sera fourni en conclusion de cette description
afin de faire clairement ressortir le caractère optimal de la méthode ainsi que les liens étroits qui existent
avec une approximation de type moindres carrés. Pour terminer, les différents types de projection sur la
base des modes POD seront décrits et comparés à l’approche POD-Galerkin qui sera employée par la suite
pour aboutir à un modèle d’ordre réduit non-linéaire. Enfin, la distinction entre les approches POD scalaire
et vectorielle pour les systèmes multivariables sera rappelée et l’importance de la définition du produit
scalaire sera évoquée.

36
2.2. Description de la décomposition orthogonale propre pour un système déterministe

2.2 Description de la décomposition orthogonale propre pour un


système déterministe
Dans le paragraphe 1.3.4 du chapitre précédent, une brève discussion sur les liens existant entre plu-
sieurs méthodes d’analyse de données étroitement liées à la décomposition orthogonale propre a été amor-
cée. Les travaux de Liang et al. [144] ont notamment permis d’établir des équivalences entre la décomposi-
tion de Karhunen-Loève, l’analyse en composantes principales et la décomposition en valeurs singulières
sous l’hypothèse que les données auxquelles la décomposition est appliquée sont composées de vecteurs
discrets aléatoires en nombre fini. Dans ce cas, les trois méthodes peuvent être regroupées sous l’appella-
tion générique de décomposition orthogonale propre. L’utilisation de ces méthodes est alors justifiée dans
le cadre du traitement de données statistiques, ou encore pour l’analyse d’un écoulement turbulent. Dans
ce contexte, l’aspect stochastique des données est en effet avéré, si bien que les notions probabilistes invo-
quées dans le théorème de Karhunen-Loève ont un sens.
Cependant, l’objectif est ici d’employer ces méthodes pour des systèmes mécaniques déterministes. La
méthode est donc formulée dans un tel contexte comme un problème d’optimisation dont la solution est la
base optimale pour approcher en moyenne l’ensemble de données. De cette manière, la formulation s’af-
franchit de tout argument probabiliste.

2.2.1 Décomposition orthogonale propre d’un ensemble de données


On considère un système dynamique dont la solution sur l’intervalle de temps fini Ie = [t0 ; t0 + Te ] ⊂
R+ est connue à M instants tm pour m = 1, . . . , M tels que pour tout m, tm ∈ Ie . Ces solutions constituent
les clichés auxquels la décomposition orthogonale propre va être appliquée pour en extraire les modes POD.
Dans la présentation qui suit, chaque cliché est considéré comme un élément de l’espace de Hilbert H défini
sur un corps K = R et muni de la norme k·kH induite par le produit scalaire h·, ·iH tel que pour tout élément
x ∈ H on ait kxk2H = hx, xiH . En général l’espace de Hilbert est soit l’espace de Lebesgue H = L2 (Ω)
des fonctions de carré intégrable définies sur un domaine spatial Ω ⊂ Rd avec d = 1, 2 ou 3, soit l’espace
euclidien H = RNv des vecteurs discrets de dimension finie Nv . Dans le premier cas, cela conduit à formuler
la décomposition orthogonale propre dans un espace de dimension infinie lorsque les solutions continues
du système dynamique (1.1) sont considérées, alors que dans le second cas la méthode est plutôt formulée
pour les solutions du système discrétisé (1.2) impliquant un nombre fini Nv de degrés de liberté. Dans les
deux cas on supposera ici que les solutions du système dynamique ne sont connues qu’aux instants tm ce
qui conduit à adopter une formulation discrète en temps. On notera ensuite N = dim (H) en prenant garde
au fait que N est infini lorsque H = L2 (Ω). Enfin, l’ensemble des clichés introduit à l’équation (1.48) est
désigné ici par l’ensemble X qui regroupe M solutions du système dynamique aux instants tm ∈ Ie tel que
n oM
X = {x(t1 ), . . . , x(tM )} = x(m) ∈ H . (2.1)
m=1

Le principe de la décomposition orthogonale propre consiste à trouver un sous-espace S ⊂ H de dimen-


sion finie q ≪ N qui fournit la description « optimale » de l’ensemble X. Le sous-espace est alors caractérisé
par une base de fonctions Φ = {ϕ(j) ∈ H, j = 1, .., q} qui l’engendre : S = vect{ϕ(1) , ..., ϕ(q) }. La détermi-
nation des vecteurs de base ϕ(j) définit complètement le sous-espace S et par conséquent la décomposition
orthogonale propre fournit une approximation x b(m) des clichés sur cette base telle que
q
X (m)
x(m) ≈ x
b(m) = aj ϕ(j) ∀m ∈ J1; M K. (2.2)
j=1

(m)
Dans la décomposition précédente, les vecteurs ϕ(j) correspondent aux modes POD et les coefficients aj
sont des scalaires caractérisant l’amplitude modale associée au mode ϕ(j) pour le cliché x(m) . La décompo-
sition recherchée est « optimale » au sens où la base Φ doit être meilleure que n’importe quelle autre base de
dimension égale utilisée pour reconstruire les données de l’ensemble X. Pour assurer le caractère optimal
de la base recherchée, on impose que la moyenne E [·] du carré de l’erreur de projection des éléments de X
sur le sous-espace S soit minimale, ce qui se traduit par la définition suivante [135].

37
2. P RINCIPE DE CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN

Définition 2.1 : Étant donné un ensemble de clichés X = {x(m) ∈ H}M


m=1 et un opérateur de moyenne E [·], la
base des modes POD Φ = {ϕ(j) ∈ H}qj=1 de dimension q est définie comme la solution du problème de minimisation
 2 
q D E D E
 X
(m) (m) (j) (j) 
Φ = arg minq
E  x − x ,ϕ ϕ  tel que ϕ(i) , ϕ(j) = δij . (2.3)
{ϕ(j) }j=1 ⊂H j=1

L’opérateur de moyenne E [·] agit sur (une fonction) des éléments de l’ensemble de données X. Il est
défini dans le cas présent1 par une moyenne arithmétique pondérée puisque les clichés sont supposés n’être
connus qu’aux instants tm . On a alors pour toute fonction f dépendant des clichés

h  i X
M   M
X
E f x(m) = αm f x(m) avec αm = 1. (2.4)
m=1 m=1

Dans l’expression précédente, les coefficients αm sont des poids de pondération éventuellement introduits
pour accentuer l’effet de certains clichés par rapport à d’autres. Le choix le plus simple consiste à prendre
αm = 1/M pour tout m ∈ J1; M K si aucun argument ne permet d’attribuer plus d’importance à certains
clichés. L’opérateur de moyenne défini ci-dessus est linéaire par rapport aux f (x(m) ) puisqu’il s’agit d’une
simple moyenne arithmétique. En particulier si la fonction f désigne le produit scalaire, la bilinéarité de
f entraîne la commutation entre l’opérateur de moyenne et le produit scalaire. On a donc trivialement les
deux propriétés suivantes :
h    i h  i h  i
E f x(m) + µg x(m) = E f x(m) + µE g x(m) ∀µ ∈ R, (2.5a)
hD Ei D h i E
E x(m) , y = E x(m) , y ∀y ∈ H. (2.5b)

On introduit par ailleurs l’opérateur PS de projection orthogonale des éléments de H sur le sous-espace
S. Celui-ci est défini comme une application de H à valeurs dans S telle que la distance entre l’argument
du projecteur et son image soit minimale, d’où
q D
X E
PS y = y, ϕ(j) ϕ(j) ∀y ∈ H. (2.6)
j=1

La condition (2.3) revient de manière équivalente à trouver les vecteurs ϕ(j) ∈ H qui maximisent la moyenne
du carré de la norme de la projection sur le sous-espace. En effet, il suffit de remarquer que pour toute pro-
jection orthogonale P agissant sur un élément x ∈ H, on a la relation kxk2 = kx − P xk2 + kP xk2 puisque
kxk2 = k(x − P x) + P xk2 = kx − P xk2 + kP xk2 + 2hx − P x, P xi. Or hx − P x, P xi = 0 puisque
les vecteurs (x − P x) et (P x) sont orthogonaux par définition du projecteur orthogonal. En appliquant
l’opération de moyenne E [·] à la relation précédente pour x = x(m) et en utilisant la propriété de linéarité
donnée par la relation (2.5a), on obtient
   2   2 
(m) 2 (m) (m) (m)
E x = E x − PS x + E PS x . (2.7)

La relation précédente résume tout l’enjeu de la décomposition orthogonale propre dont l’objectif est de
trouver une base qui approche au mieux la moyenne de la norme des clichés E[||x(m) ||2 ]. Celle-ci s’ob-
tient donc soit en minimisant l’erreur de projection E[||x(m) − PS x(m) ||2 ] ce qui conduit à la définition du
problème donnée à l’équation (2.3), soit en maximisant la projection E[||PS x(m) ||2 ] ce qui donne lieu à la
définition équivalente ci-dessous.
1 L’application de la décomposition orthogonale propre à un système déterministe repose sur une hypothèse d’ergodicité, qui sti-

pule que la moyenne statistique d’un ensemble de réalisations d’un système aléatoire peut être remplacée de manière équivalente par
une moyenne temporelle sur une réalisation. L’opérateur de moyenne est noté E [·] puisque dans le cas d’un système stochastique il
représente l’espérance. La pondération introduite dans la moyenne correspond alors à la probabilité.

38
2.2. Description de la décomposition orthogonale propre pour un système déterministe

Définition 2.2 : Étant donné un ensemble de clichés X = {x(m) ∈ H}M


m=1 et un opérateur de moyenne E [·], la
base des modes POD Φ = {ϕ(j) ∈ H}qj=1 de dimension q est définie comme la solution du problème de maximisation
 2 
Xq D E D E

(j) 
Φ = arg max E  x(m)
, ϕ(j)
ϕ  tel que ϕ(i) , ϕ(j) = δij . (2.8)
{ϕ(j) }qj=1 ⊂H j=1

Le carré de la norme de la projection orthogonale se développe au moyen du théorème de Pythagore


généralisé puisque les modes POD recherchés sont soumis à la contrainte d’être orthonormés. Ainsi,
 2   
q D E q D E2
 X  X
E  x(m) , ϕ(j) ϕ(j)
=E
 x(m) , ϕ(j)  (2.9)
j=1 j=1

et puisque l’opérateur de moyenne est linéaire, les propriétés (2.5) permettent de transformer la relation
précédente en
 
Xq D E2 q
X hDD E Ei X q D hD E i E
E x(m) , ϕ(j)  = E x(m) , ϕ(j) x(m) , ϕ(j) = E x(m) , ϕ(j) x(m) , ϕ(j) . (2.10)
j=1 j=1 j=1

Le premier terme du produit scalaire s’interprète finalement comme l’action d’un opérateur linéaire R sur
la variable ϕ(j) , défini par
R : H −→ H 
 (2.11)
y 7−→ R y = E x(m) , y x(m) .
La linéarité de l’opérateur R est triviale puisqu’il est défini à partir (i) de l’opérateur de moyenne E [·] pour
lequel le caractère linéaire a été signalé plus tôt et (ii) du produit scalaire qui est une application bilinéaire.
Par conséquent on a bien R(ϕ + µψ) = Rϕ + µRψ pour tout ϕ, ψ dans H et tout µ ∈ R. Par ailleurs, il est
aussi important de remarquer que l’opérateur est auto-adjoint, i. e. hR ϕ, ψi = hϕ, R ψi pour tout ϕ, ψ dans
H (voir l’annexe B.2 pour la démonstration). Pq
Le problème d’optimisation (2.8) revient donc à maximiser la somme j=1 hRϕ(j) , ϕ(j) i, ou encore à
maximiser séparément chacun des termes de la somme avec toujours la contrainte de chercher des modes
orthonormaux. On formule donc un problème variationnel pour chaque mode POD ϕ(j) au moyen de la
fonctionnelle J (ϕ(j) ) définie par la relation
  D E  2 

J ϕ(j) = R ϕ(j) , ϕ(j) − λj ϕ(j) − 1 , (2.12)

où λj est un multiplicateur de Lagrange introduit pour tenir compte de la contrainte d’orthonormalité


imposée2 . Une condition nécessaire pour évaluer les maxima porte sur l’annulation de la dérivée de la
fonctionnelle J pour toute variation ϕ(j) + δψ avec δ ∈ R et ψ ∈ H : dJ (ϕ(j) + δψ)/dδ|δ=0 = 0. Pour
satisfaire la condition précédente, il suffit d’abord de détailler J (ϕ(j) + δψ) avec l’expression (2.12) en
 
  2 
J ϕ(j) + δψ = R ϕ(j) + δψ , ϕ(j) + δψ − λj ϕ(j) + δψ − 1




= R ϕ(j) (j) (j) (j) 2 (2.13)
, ϕ

(j) (j) + δ R ϕ ,

(j) ψ + δ R
ψ, ϕ
(j)
+ δ2 hR ψ, ψi 
−λj ϕ , ϕ + δ ϕ , ψ + δ ψ, ϕ + δ hψ, ψi − 1 .

La dérivée de la fonctionnelle par rapport à la variation δ conduit alors à


 
dJ ϕ(j) + δψ D E D E D E D E 
= R ϕ(j) , ψ + R ψ, ϕ(j) + 2δ hR ψ, ψi − λj ϕ(j) , ψ + ψ, ϕ(j) + 2δ hψ, ψi . (2.14)

2 Voir l’ouvrage de Holmes et al. [112] pour la formulation du problème d’optimisation dans le contexte de la POD et l’ouvrage de

Fletcher [77] par exemple pour les détails généraux relatifs à l’optimisation.

39
2. P RINCIPE DE CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN

Finalement la dérivée de la fonctionnelle évaluée en δ = 0 se réduit à


h i
dJ ϕ(j) + δψ




= R ϕ(j) , ψ + R ψ, ϕ(j) − λj ϕ(j) , ψ + ψ, ϕ(j)
dδ (2.15)

δ=0



= 2 R ϕ(j) , ψ − λj ϕ(j) , ψ = 2 R ϕ(j) − λj ϕ(j) , ψ .

en utilisant le caractère auto-adjoint de l’opérateur R et le fait que le produit scalaire est une application
symétrique. Si l’on en revient à présent au problème d’origine, les extrema de la fonctionnelle s’obtiennent
lorsque l’expression précédente s’annule pour tout ψ ∈ H, ce qui finalement est équivalent à résoudre le
problème aux valeurs propres
R ϕ(j) = λj ϕ(j) . (2.16)

pour tout j ∈ J1; qK. En conclusion, maximiser (resp. minimiser) la projection (resp. l’erreur de projection)
de l’ensemble X des clichés sur le sous-espace S = vect{ϕ(1) , . . . , ϕ(q) } revient à résoudre un problème aux
valeurs propres pour l’opérateur linéaire R défini à l’équation (2.11).
Pour terminer, il reste à établir que les solutions du problème (2.16) existent. Pour cela, il suffit de dé-
montrer que l’opérateur R est compact. En effet, cette dernière propriété, associée au caractère auto-adjoint
de R, permet d’invoquer la théorie spectrale pour les opérateurs de Hilbert-Schmidt, qui assure qu’il existe
au plus une infinité dénombrable de valeurs propres positives ou nulles [205]. Les vecteurs propres cor-
respondant à ces valeurs propres sont en outre orthogonaux entre eux. Quelques détails concernant les
propriétés de ce type d’opérateurs sont donnés dans l’annexe B.2. Enfin, le rang r de l’opérateur R est fini
si bien que le problème aux valeurs propres (2.16) produit un nombre fini r de valeurs propres λj et de
vecteurs propres ϕ(j) . Lorsque tous les modes sont retenus, les clichés x(m) se décomposent exactement sur
la base des modes POD en
Xr
(m)
x(m) = aj ϕ(j) ∀m ∈ J1; M K. (2.17)
j=1

La décomposition tronquée (2.2) s’obtient donc en ne conservant que les q premiers modes POD associés
aux valeurs propres les plus élevées, ce choix étant justifié ultérieurement au paragraphe 2.2.3. En pratique
q sera choisi le plus petit possible et nécessairement inférieur au rang r de l’opérateur R. Pour éviter que
le nombre de valeurs propres non nulles soit identiquement nul, il suffit que le rang de l’opérateur R soit
strictement positif ; cette condition est vérifiée dès qu’un des clichés est non nul, ou lorsque les clichés sont
linéairement indépendants, auquel cas on a r = M valeurs propres non nulles.
Les résultats établis dans ce paragraphe peuvent être résumés sous forme du théorème suivant :

Théorème 2.1 : Décomposition Orthogonale Propre


Étant donné un ensemble de données X = {x(m) ∈ H}M m=1 et un opérateur de moyenne E [·], le sous-espace S ⊂
H de dimension finie q < r qui minimise l’erreur de projection E ||x(m) − PS x(m) ||2 est engendré par la base
orthonormale Φ = {ϕ(j) }qj=1 , où les ϕ(j) sont les modes POD solutions du problème aux valeurs propres :

R ϕ(j) = λj ϕ(j) .

L’opérateur R ϕ(j) = E [hx(m) , ϕ(j) i x(m) ] est compact, auto-adjoint et de rang fini r. Il possède donc un nombre fini
de valeurs propres non nulles λ1 ≥ λ2 ≥ · · · ≥ λr > 0.

La description de la décomposition orthogonale propre effectuée ici fait clairement ressortir le fait qu’il
s’agit d’une méthode basée sur l’analyse de données a posteriori. En effet, la recherche des modes POD
est entièrement fondée sur un problème d’optimisation du sous-espace approchant l’ensemble des clichés
X fourni au départ. Il est par ailleurs important de noter que la décomposition orthogonale propre est
essentiellement une méthode linéaire, dans le sens où la représentation des données obtenue s’écrit sous
forme d’une série de fonctions modales multipliées par les coefficients adéquats, et ceci, malgré le fait que
dans la pluplart des cas les données traitées proviennent d’un système dynamique non-linéaire.

40
2.2. Description de la décomposition orthogonale propre pour un système déterministe

Remarque 2.1 : Expressions de l’opérateur R pour des espaces de Hilbert spécifiques


Avant de poursuivre, on précise ici l’expression de l’opérateur R lorsque l’espace de Hilbert considéré est l’espace
H = RNv des vecteurs réels de dimension finie Nv , ou l’espace H = L2 (Ω) des fonctions de carré intégrable.
Dans le premier cas, la définition
P vde l’opérateur donnée à l’équation (2.11) se développe avec le produit scalaire
(m) (j) (m)
canonique de RNv en Rϕ(j) = E[ N i=1 xi ϕ i x ], si bien que le problème aux valeurs propres (2.16) se réduit à
un simple problème matriciel puisque l’opérateur R est une matrice de M (Nv , Nv ) notée R et telle que
h i
R ϕ(j) = λj ϕ(j) où R = E x(m) ⊗ x(m) . (2.18)

Dans l’expression précédente, le symbole ⊗ désigne le produit tensoriel et les notations en gras correspondent à
(m) (m)
la représentation des quantités vectorielles dans la base canonique de RNv de sorte que x(m) = [x1 , . . . , xNv ] et
(j) (j)
ϕ(j) = [ϕ1 , . . . , ϕNv ]. Le problème se ramène donc simplement à la résolution d’un problème d’algèbre linéaire dans
lequel il s’agit d’identifier les vecteurs propres ϕ(j) .
Lorsque l’espace H = L2 (Ω) est considéré, le produit scalaire associé conduit à la définition suivante du problème
aux valeurs propres en regroupant les termes sur lesquels l’opérateur de moyenne E [·] opère :
Z h i
e ξ ′ ) ϕ(j) (ξ) dξ = λj ϕ(j)
R(ξ, e ξ ′ ) = E x(m) (ξ) x(m) (ξ ′ ) .
où R(ξ, (2.19)

Dans ce cas, l’opérateur Re correspond au tenseur de corrélation entre deux points ξ et ξ ′ du domaine spatial Ω. Le
problème à résoudre fait alors intervenir une équation intégrale dite de Fredholm.

2.2.2 Détermination des modes POD par la méthode des clichés


Le processus décrit dans ce qui précède porte en général le nom de méthode directe puisque les modes
POD sont obtenus directement par la résolution du problème aux valeurs propres (2.16). Toutefois, la re-
cherche des valeurs et vecteurs propres par la méthode directe devient rapidement très coûteuse lorsque
la dimension N de l’espace dans lequel les clichés sont contenus devient importante. Le problème se pose
par exemple
 pour des clichés issus de simulations numériques où il n’est pas rare que N soit de l’ordre
de O 105 et bien souvent plus pour les applications en mécanique des fluides. L’opérateur R a une taille
similaire (voir l’équation (2.18) dans le cas discret par exemple) et par conséquent l’extraction des valeurs
et vecteurs propres devient fastidieuse, voire impossible en pratique.
Une variante de la méthode directe proposée par Sirovich [218] sous le nom de méthode des clichés per-
met de réduire considérablement le coût de calcul en se basant sur la résolution d’un problème aux valeurs
propres annexe dont la taille est nettement inférieure. La nouvelle formulation du problème découle du fait
que les modes POD ϕ(j) s’expriment en fonction des clichés x(m) selon la combinaison linéaire

M
X
ϕ(j) = c(j)
m x
(m)
(2.20)
m=1

qui est justifiée puisque l’image de l’opérateur R est incluse dans l’espace engendré par les clichés. La dé-
monstration est donnée dans l’annexe B.2 lorsqu’on établit le rang de R, et la décomposition des modes
POD sur les clichés est détaillée dans la remarque B.1 page 220.
(j)
Les cm sont des coefficients réels décrivant la décomposition du mode ϕ(j) sur les clichés x(m) qui
correspondent dans la méthode telle qu’elle a été présentée par Sirovich [218] à des solutions du système
évaluées à des instants tm régulièrement espacés sur l’intervalle de temps Ie . On généralise dans ce para-
graphe le principe d’obtention des modes POD par la méthode des clichés à partir du problème aux valeurs
propres de la méthode directe dans le cas de clichés pondérés par l’opérateur de moyenne E [·].
Le problème aux valeurs propres de la méthode directe (2.16) écrit pour un mode ϕ(j) donné est trans-
formé en introduisant la décomposition des modes POD (2.20) dans la définition (2.11) de l’opérateur R :

41
2. P RINCIPE DE CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN

M
* M
+ M
X X (j)
X (j)
(m) (l)
αm x , cl x x(m) = λj ck x(k)
M
m=1
M D
l=1
E
! k=1
M (2.21)
X X (j)
X (j)
αm x(m) , x(l) cl x(m) = λj ck x(k) .
m=1 l=1 k=1

Dans la somme du second membre, l’indice k est muet et on peut donc à ce titre choisir d’indexer plutôt
la somme avec l’indice m. En regroupant lesP membres de droite et de gauchePMd’un même côté et dans une
M (j) (j)
somme commune, on parvient à l’écriture : m=1 θm x(m) = 0 avec θm = l=1 αm hx(m) , x(l) icl − λj cm .
Sous l’hypothèse que l’ensemble des clichés X = {x }m=1 forme une famille libre, la somme des θm est
(m) M

nulle si et seulement si tous les θm sont nuls pour m ∈ J1; M K. En reprenant l’expression des θm , le problème
se résume à résoudre le système linéaire
M
X D E
(j)
αm x(m) , x(l) cl = λj c(j)
m ∀m ∈ J1; M K. (2.22)
l=1

L’expression du nouveau problème aux valeurs propres est alors

e ⋆ c(j) = λj c(j) .
R (2.23)

Le terme général du nouvel opérateur est R e⋆ = αi hx(i) , x(j) i et c(j) = [c(j) , · · · , c(j) ]T est le vecteur
ij 1 M
propre associé à la valeur propre λj . Sous cette forme, la matrice R e ⋆ n’est pas symétrique, à moins que les
poids αi associés à l’opérateur de moyenne E [·] ne soient tous égaux. Le caractère symétrique est pourtant
crucial puisqu’il assure l’existence des valeurs propres et, par voie de conséquence, celle de la décompo-
sition orthogonale propre. L’opérateur aux valeurs propres R e ⋆ est donc redéfini en écrivant R e ⋆ = α P où
α = diag(α1 , . . . , αM ) est la matrice diagonale des poids de pondération de l’opérateur de moyenne et
P est la matrice des produits scalaires telle que Pij = hx(i) , x(j) i. En supposant que les poids de l’opéra-
teur de moyenne soient tous strictement positifs, la matrice α est définie positive, ce qui permet de définir
√ √
e = diag( α1 , . . . , αM ) telle que α = α
α eαe T . Le changement de variable c(j) = α e d(j) transforme alors le
problème aux valeurs propres en  
e α
α e T Pα e (j) .
e d(j) = λj αd (2.24)
| {z }
R⋆

Finalement, puisque la matrice α


e est définie positive, son inverse existe et la pré-multiplication de la relation
précédente par cet inverse donne
R⋆ d(j) = λj d(j) . (2.25)

L’opérateur R⋆ est bien symétrique puisque son terme général est défini par Rij ⋆
= αi αj hx(i) , x(j) i.
La taille du problème aux valeurs propres (2.25) est nettement réduite puisque R ∈ M (M, M ) alors que

l’opérateur impliqué dans le problème (2.16) est une matrice de M (N, N ). La méthode des clichés devient
donc beaucoup plus avantageuse en terme de temps de calcul dès lors que le nombre de clichés M est
très inférieur à la dimension N du système. Le choix entre la méthode directe ou la méthode des clichés
s’effectue en fonction des valeurs respectives de M et N . Lorsque les clichés proviennent d’un disposi-
tif expérimental, la résolution spatiale des données est généralement faible puisqu’elle est limitée par le
nombre de capteurs mais la résolution temporelle est souvent fine ; dans ce cas, la méthode directe paraît
plus adaptée puisque la dimension du système représenté par les données des capteurs est très inférieure
au nombre de clichés (N ≪ M ). Au contraire, les simulations numériques produisent une résolution spa-
tiale importante en raison de la discrétisation fine du maillage alors que la résolution temporelle est plutôt
limitée (N ≫ M ) ; dans ce cas, il est préférable d’opter pour la méthode des clichés afin de réduire la taille
du problème aux valeurs propre à résoudre.
Il faut par ailleurs mentionner que la méthode des clichés ne fournit pas directement les modes POD.
En effet, la résolution du problème (2.25) produit l’ensemble des vecteurs propres d(j) pour j = 1, . . . , M .
(j)
Dans un premier temps, les coefficients cm de la décomposition (2.17) sont calculés à l’aide des vecteurs
propres d et du changement de variable c(j) = α
(j) e d(j) effectué pour symétriser le problème. Ensuite, les
modes POD ϕ de la décomposition (2.17) sont reconstruits par combinaision linéaire avec les clichés au
(j)

42
2.2. Description de la décomposition orthogonale propre pour un système déterministe

moyen de la relation (2.20). En procédant de cette manière, la condition d’orthonormalité des modes POD
hϕ(i) , ϕ(j) i = δij imposée avec la méthode directe n’est plus respectée. En effet, la condition d’orthonorma-
lité porte à présent sur les vecteurs propres d(j) puisqu’ils sont solutions du problème aux valeurs propres
(2.25) et de ce fait le produit scalaire de deux modes POD donne
* M M
+

(i) (j) X (i)
X (j)
ϕ ,ϕ = ck x(k) , cl x(l)
k=1 l=1
M
X D E
=
(i)
ck
(j)
x(k) , x(l) cl (2.26)
k,l=1
 T  T  
= c(i) Pc(j) = d(i) αe T Pα
e d(j) .

Dans la dernière égalité, le terme α e T Pαe correspond à l’opérateur R⋆ . Le produit (α e T Pα)d


e (j) est donc
remplacé par R d = λj d puisque d est un vecteur propre de l’opérateur R . Ainsi le produit scalaire
⋆ (j) (j) (j) ⋆

de deux modes POD se réduit à la relation hϕ(i) , ϕ(j) i = λj (d(i) )T d(j) . Cette dernière se simplifie au moyen
de la condition d’orthonormalité des vecteurs d(i) qui sont solutions du problème aux valeurs propres
(2.25). Le produit scalaire entre deux modes POD devient alors
D E
ϕ(i) , ϕ(j) = λj δij . (2.27)

Les modes POD obtenus par la méthode des clichés après reconstruction pdoivent donc subir une étape sup-
plémentaire de normalisation par la racine carrée des valeurs propres λj pour disposer d’une condition
d’orthonormalité hϕ(i) , ϕ(j) i = δij analogue à celle obtenue par la méthode directe.
Pour terminer, il est intéressant de comparer la signification des opérateurs pour les méthodes directe
et des clichés. Dans la méthode des clichés, le terme général de l’opérateur est proportionnel à hx(i) , x(j) i. Il
correspond donc à la somme du produit des contributions spatiales de deux clichés pris à deux instants dif-
férents. Autrement dit, le terme général correspond à la corrélation temporelle des clichés x(i) et x(j) . Dans le
cas de la méthode directe, l’expression de l’opérateur R a été détaillée à la remarque 2.1 dans le cas de deux
espaces de Hilbert spécifiques. Le terme général de l’opérateur correspond dans ce cas à des corrélations
spatiales puisque chaque terme de l’opérateur est la moyenne du produit des contributions temporelles de
deux points de l’espace différents. Il existe donc en quelque sorte une dualité espace/temps entre les deux
méthodes de calcul des modes POD. Dans les deux cas cependant, les modes POD représentent les distri-
butions spatiales qui maximisent la projection des clichés sur la base des modes POD. On a montré dans ce
paragraphe que les deux méthodes produisent des résultats équivalents, sous l’hypothèse que l’ensemble
de clichés X est linéairement indépendant. Cette équivalence est généralisée dans l’annexe B.3 pour des
clichés contenus dans un espace de dimension finie sans avoir recours à cette hypothèse, et le lien avec la
décomposition en valeurs singulières y est en outre explicité.

2.2.3 Propriétés de la décomposition orthogonale propre


2.2.3.1 Orthogonalité des amplitudes modales en moyenne
(m)
Les amplitudes modales aj de la décomposition (2.17) sont telles que la moyenne temporelle du pro-
duit de deux amplitudes est liée aux valeurs propres λj de l’opérateur de corrélation par la relation
h i
(m) (m)
E aj ai = λj δij . (2.28)

Le résultat précédent s’obtient facilement en écrivant que les amplitudes modales se déduisent du produit
scalaire entre les clichés et les modes POD. On a en effet le résultat suivant en prenant le produit scalaire
entre la décomposition (2.17) et un mode POD ϕ(i) puisque les modes POD sont orthogonaux :
D E
(m)
aj = x(m) , ϕ(j) . (2.29)

43
2. P RINCIPE DE CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN

La définition est triviale si on se réfère à la définition (2.6) de la projection orthogonale sur le sous-espace S.
Par conséquent, la moyenne du produit de deux amplitudes modales donnée à l’équation (2.28) se récrit
h i 

 

(m) (i) (m) (j) 


(m) (m)
E aj ai = E x(m) , ϕ(j) x(m) , ϕ(i) = E x ,ϕ x ,ϕ


(m) (m) (i)  (j)
(2.30)
= E x x ,ϕ ,ϕ = R ϕ(i) , ϕ(j) .
La dernière égalité provient de la définition (2.11) de l’opérateur de corrélation R. Finalement, le problème
aux valeurs propres (2.16) permet de conclure puisque hR ϕ(i) , ϕ(j) i = hλi ϕ(i) , ϕ(j) i = λi hϕ(i) , ϕ(j) i = λi δij ,
ce qui démontre la relation (2.28).

2.2.3.2 Énergie associée aux modes POD


Les valeurs propres λj extraites du problème (2.16) sont souvent interprétées en terme d’« énergie ». La
projection de l’équation (2.16) sur un mode ϕ(j) donne d’après ce qui précède :
D E D E
R ϕ(j) , ϕ(j) = λj ϕ(j) , ϕ(j) = λj . (2.31)

Or l’opérateur R a été défini à l’équation (2.11) de sorte que hR ϕ(j) , ϕ(j) i = E[hx(m) , ϕ(j) i2 ]. Par conséquent
la valeur propre λj est un indicateur du degré de parallélisme entre l’ensemble des clichés et les modes
POD puisque la relation
D E2   2 
(m) (j) (m)
λj = E x , ϕ = E aj . (2.32)

indique que les valeurs propres λj les plus grandes sont celles qui maximisent en moyenne la projection
des clichés x(m) sur les modes ϕ(j) , ou de manière équivalente, qui minimisent en moyenne l’erreur de
projection. Une seconde interprétation proposée par Sirovich [218] consiste à considérer que les valeurs
propres sont une expression du temps moyen relatif passé par le système le long de l’axe ϕ(j) dans l’espace
fonctionnel.
Par ailleurs, la somme des valeurs propres représente l’énergie moyenne totale contenue dans le sys-
tème, cette énergie étant définie mathématiquement par E[||x(m) ||2 ]. On montre ainsi que
 2  X
r

E x(m) = λj . (2.33)
j

En effet, en détaillant l’écriture du premier membre avec la décomposition (2.17) on a


M
* r r
+

(m) (m)  X X (m) X (m) (j)
(i)
E x ,x = αm ai ϕ , aj ϕ
m=1 i=1 j=1
M r D E (2.34)
X X (m) (m) (i) (j)
= αm ai aj ϕ ,ϕ .
m=1 i,j=1

Par orthonormalité des modes POD, le produit scalaire subsistant se réduit à δij si bien que le terme d’éner-
gie moyenne devient
 2  X
r X
M r
X h i
(m) (m) (m) (m)
E x(m) = αm ai ai = E ai ai . (2.35)
i=1 m=1 i=1

La deuxième égalité de la relation (2.28) permet alors de conclure la démonstration de la propriété (2.33).
On dira donc par abus de langage que la valeur propre λj correspond à l’« énergie », au sens de la
norme induite par l’espace H, captée par le mode POD ϕ(j) puisque d’après la relation (2.32), elle donne
une mesure de la projection moyenne des clichés sur les modes POD. Les modes POD associés aux valeurs
propres les plus grandes sont donc ceux qui contiennent le plus d’énergie et par conséquent ceux qui seront
le plus à même de reproduire la réponse du système. Ces observations restent valables pour la méthode des
clichés puisque les valeurs et vecteurs propres calculés par la méthode directe ou des clichés sont identiques.

44
2.2. Description de la décomposition orthogonale propre pour un système déterministe

2.2.3.3 Troncature de la base POD et estimateur d’erreur

L’objectif étant à terme de construire un modèle d’ordre réduit avec un faible nombre de degrés de
liberté, la base des modes POD est en pratique tronquée pour ne conserver que les q premiers modes POD
associés aux valeurs propres les plus grandes. La décomposition n’est plus exacte et il donc souhaitable
de disposer d’un indicateur d’erreur afin de pouvoir estimer l’erreur de troncature. Un moyen simple de
caractériser cette quantité est de calculer l’erreur pour les clichés qui ont servi à la construction des modes
POD. La décomposition orthogonale propre exacte de l’ensemble de clichés X est donnée par la relation
(2.17) dans laquelle l’ensemble des modes POD est conservé. En revanche, la décomposition orthogonale
propre tronquée donnée à l’équation (2.2) fournit une approximation des clichés notée x b(m) . L’erreur de
troncature notée ǫq est alors définie par la relation
 2   2 
 2  r q r
 X X
(m) (j) 
 X (m) (j)
b(m) = E 
ǫq = E x(m) − x a
(m) (j)
ϕ − a ϕ = E a ϕ  (2.36)
j j   j .
j=1 j=1 j=q+1

L’expression de l’erreur se simplifie en raison de l’orthonormalité des modes POD ϕ(j) en


 
r
X  2 r
X h i
(m) (m) (m)
ǫq = E  aj = E aj aj . (2.37)
j=q+1 j=q+1

Finalement, l’interprétation énergétique des valeurs propres (2.32) établie dans le paragraphe précédent
fournit l’expression suivante de l’erreur commise en fonction des valeurs propres négligées :

r
X
ǫq = λj −→ 0 . (2.38)
j→r
j=q+1

L’indicateur traduit donc le fait que l’erreur commise correspond aux valeurs propres négligées, i. e.
à l’énergie associée aux modes POD omis dans la base POD tronquée. Ces modes correspondant aux plus
basses valeurs propres contiennent peu d’énergie et peuvent donc dans la majorité des cas être négligés sans
altérer notablement la reconstruction des clichés par la relation (2.2). En pratique, une fois que les valeurs
et vecteurs propres du système sont calculés, l’indice de troncature de la base POD est déterminé comme
le nombre de modes POD q pour lequel l’énergie captée Λq représente presque la totalité de l’énergie Λr
(plus de 99% par exemple). Le ratio ηq caractérisant le pourcentage d’énergie captée par la décomposition
tronquée est alors donné par
Xq X r
Λq
ηq = = λj λj , (2.39)
Λr j=1 j=1

et le pourcentage d’erreur commis correspondant à l’erreur de troncature ǫq est donc 1 − ηq .


L’utilisation de l’erreur de troncature ǫq comme seul critère pour déterminer la dimension de la base de
(m)
projection n’est suffisant que dans le cadre de la compression de données où les coefficients aj sont ceux
issus de la projection des clichés. Lorsque la base POD est employée pour construire un modèle d’ordre
réduit, il devient alors nécessaire de déterminer des estimateurs d’erreur basés sur les amplitudes modales
aj (tm ) issues de l’intégration en temps, ce qui est autrement plus difficile. Le développement d’estimateurs
d’erreur pour les systèmes dynamiques réduits a fait l’objet de plusieurs études. Le lecteur intéressé pourra
consulter en particulier les références suivantes [56, 110, 135, 136].
Le choix d’une base composée des q premiers modes POD associés aux valeurs propres les plus grandes
telle que 1 − ηq soit inférieur à un très faible pourcentage n’est donc pas toujours adéquat. En effet, Henri et
Yvon [110] ont signalé que l’ordre des modes POD n’est pas toujours pertinent et l’erreur de reconstruction
du modèle réduit peut être diminuée en choisissant des modes POD associés à des valeurs propres plus
petites. Ils ont alors proposé de modifier le critère pour la troncature de la base POD en introduisant des
conditions supplémentaires portant sur les bornes des estimateurs d’erreur associés au système dynamique.

45
2. P RINCIPE DE CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN

2.2.3.4 Héritage de propriétés par les modes POD


Enfin un aspect fondamental de la décomposition orthogonale propre concerne la conservation de cer-
taines propriétés vérifiées par les clichés. L’expression des modes POD en fonction des clichés établie à
l’équation (2.20) indique que si les clichés satisfont une contrainte linéaire homogène notée symbolique-
ment L(x(m) ) = 0 où L : H → H est un endomorphisme de H, alors les modes POD vérifient aussi cette
contrainte d’après la relation
!
  M
X M
X  
(j)
L ϕ =L c(j)
m x
(m)
= c(j)
m L x
(m)
= 0. (2.40)
m=1 m=1

Le caractère solénoïdal du champ de vitesse d’un fluide incompressible est donc par exemple préservé
par les modes POD : ∀m = 1, . . . , M, div x(m) = 0 =⇒ ∀j = 1, . . . , q, div ϕ(j) = 0.
Le même raisonnement est employé pour déterminer quels types de conditions aux limites sont vérifiées
par les modes POD. Soit ∂ΩD et ∂ΩN deux portions du bord du domaine Ω de normale extérieure n sur
lesquelles sont respectivement appliquées des conditions aux limites de type Dirichlet et Neumann, alors
les variables du système dynamique vérifient à tout instant t ∈ R+

∂x
x(∂ΩD , t) = γD (t) et (∂ΩN , t) = γN (t). (2.41)
∂n

À chaque instant tm , les clichés sont contraints par les conditions limites précédentes. Les modes POD
décrits par la décomposition (2.20) vérifient quant à eux les relations
M
X XM
∂ϕ(j)
ϕ(j) (∂ΩD ) = c(j)
m γD (tm ) et (∂ΩN ) = (j)
cm γN (tm ) (2.42)
m=1
∂n m=1

qui correspondent en quelque sorte à une combinaison linéaire des conditions aux limites vérifiées par les
clichés aux instants tm . Les conditions aux limites sont cependant exactement vérifiées lorsqu’elles sont ho-
mogènes — i. e. γD (t) = 0 et γN (t) = 0 à tout instant. Ainsi, les conditions de non-glissement sur l’interface
Γ entre la paroi et un fluide visqueux (x(Γ, t) = 0) sont aussi vérifiées par les modes POD.

46
2.3. Un exemple d’application de la POD en analyse de données

2.3 Un exemple d’application de la POD en analyse de données


Le principe de la décomposition orthogonale propre est illustré pour commencer avec un problème
d’approximation d’un ensemble de données formé de vecteurs du plan. Le lien étroit entre cette méthode
et une approximation du type moindres carrés sera ainsi clairement révélé.
Soit X = {Pm }M m=1 un ensemble de points repérés par leurs coordonnées (xm , ym ) dans le plan de
l’espace H = R2 . L’ensemble des points {Pm }M m=1 constitue alors l’ensemble X des clichés pour lequel il
s’agit de déterminer l’approximation fournie par la décomposition orthogonale propre. Le sous-espace de
projection S de dimension q = 1 < N = 2 recherché est engendré par un unique vecteur − →
ϕ ∈ R2 tel que


S = Vect { ϕ }.
Le sous-espace S est donc une droite vectorielle sur laquelle les points Pm sont projetés. Pour mener à
bien l’opération de projection, il est nécessaire de définir des vecteurs associés aux points Pm puisque le
projecteur PS relatif au sous-espace S intervenant dans la formulation de la décomposition orthogonale
−−−→
propre agit sur les vecteurs de H = R2 et non pas sur des points. On construit donc les vecteurs OPm et la
−−−→
projection des points Pm sur la droite vectorielle S est alors définie par PS OPm .

(a) Projection sur l’axe des abscisses S = Vect(e1 ). (b) Projection sur la droite vectorielle S = Vect(ϕ)

Figure 2.1 : Exemples de projection de l’ensemble de points {Pm }M


m=1 sur deux droites vectorielles.

La figure 2.1 donne deux exemples de sous-espaces de projection. On constate immédiatement par
exemple qu’en choisissant − →ϕ =− →e 1 l’axe des abscisses n’est pas adapté pour caractériser les données dans
le sens où la distance entre les points {Pm }M m=1 et la droite vectorielle formée par l’axe des abscisses n’est
pas en moyenne minimale. Intuitivement, on observe que la « meilleure » approximation est obtenue en
trouvant la droite qui minimise en moyenne l’écart entre les points initiaux et leurs projections sur un sous-
espace à identifier. Cet écart, ou plutôt cette distance correspond à l’erreur de projection ǫq qu’on cherche
à minimiser dans la POD. Le vecteur optimal − →ϕ est solution du problème de minimisation (2.3). Celui-ci
se ramène au problème de maximisation (2.8) dont l’adaptation à l’exemple traité dans cette section donne
lieu au problème ci-dessous.
 D E 2 
−−−→ −

→ −

Trouver le vecteur ϕ tel que : ϕ = arg max E OPm , ϕ − → →ϕ . (2.43)


ϕ ∈R2 ,k→

ϕ k=1

L’opérateur de moyenne E [·] correspond ici à la moyenne arithmétique


h −−−→ i M
1 X −−−→
E f (OPm ) = f (OPm ). (2.44)
M m=1

Le produit scalaire employé est le produit euclidien canonique. En utilisant les mêmes arguments va-
riationnels que dans la méthode générale, le problème revient à résoudre l’équation aux valeurs propres
R−→ϕ = λ− →
ϕ . Pour cela, il faut tout d’abord détailler l’expression (2.11) de l’opérateur R, qui dans le cas
présent se résume à une matrice de M (2, 2), notée R et définie par

47
2. P RINCIPE DE CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN

hD−−−→ E −−−→i M   M   
1 X xm xm ϕ1 + xm ym ϕ2 1 X xm xm xm ym ϕ1
R−

ϕ =E −

OPm , ϕ OPm = = , (2.45)
M m=1 xm ym ϕ1 + ym ym ϕ2 M m=1 ym xm ym ym ϕ2
−−−→
en notant OPm = [xm ym ]T et − →
ϕ = [ϕ1 ϕ2 ]T la décomposition des vecteurs sur la base canonique de R2 . La
dernière égalité est particulièrement intéressante puisqu’elle permet d’identifier l’opérateur R à partir de
−−→ −−−→
la matrice des clichés X = [OP1 · · · OPM ] au moyen de l’expression
M  
1 X xm xm xm ym 1
R= = X XT . (2.46)
M m=1 ym xm ym ym M

Au passage, on peut noter que la forme de l’opérateur (2.46) correspond bien à l’expression du terme
général3 lorsque tous les poids de pondération αm sont constants et égaux à 1/M . Connaissant à présent
l’expression de R, il ne reste plus qu’à en extraire les valeurs et vecteurs propres pour déterminer le vec-
teur −

ϕ optimal pour la projection des données. La résolution du problème fournit autant de valeurs et
de vecteurs propres orthogonaux que le rang de l’opérateur R, soit deux en l’occurence. Le sous-espace S
recherché est alors caractérisé par le mode POD associé à la valeur propre la plus grande, i. e. celle pour
laquelle le maximum d’« énergie » est captée.
5

4.5

3.5

2.5
y

1.5

0.5

0
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
x

(a) Comparaison des sous-espaces de projection (b) Schématisation de l’effet du centrage

Figure 2.2 : Effet du centrage des clichés sur l’approximation POD d’un ensemble de points de R2 .

La méthode décrite ci-dessus est mise en application pour un ensemble de M = 11 points du plan. Le ré-
sultat est tracé sur le graphique 2.2(a) où figurent plusieurs courbes. Les cercles correspondent à l’ensemble
−−−→
X des clichés OPm qui peuvent être interprétés comme un échantillonnage du signal continu tracé avec la
ligne noire. La décomposition orthogonale propre est appliquée à la matrice X qui représente l’ensemble
X des clichés, ce qui revient à calculer les vecteurs propres de l’opérateur (2.46). Le premier vecteur propre
correspond au vecteur directeur de la droite vectorielle approchant au mieux l’ensemble des données. Cette
droite est représentée en rouge sur le graphique et correspond au sous-espace S = Vect{− →ϕ } recherché.
L’approximation des données est relativement mauvaise, puisque la droite obtenue passe nécessaire-
ment par l’origine du repère. En procédant de la sorte, le mode POD prépondérant correspond grossière-
ment au vecteur
h−−−→i M  
−−→′ 1 X xm
OO = E OPm = , (2.47)
M ym
m=1

où le point
−−→O représente la position moyenne du nuage de points. La droite vectorielle engendrée par le

vecteur OO′ est tracée


−−→ en pointillés noirs sur la figure 2.2(a). L’accord entre les droites vectorielles S =
Vect{−
→ϕ } et Vect{OO′ } n’est pas parfait mais la tendance montre que le premier mode POD est proche du
vecteur moyen.
3 Voir dans l’annexe B l’expression (B.3) du terme général de l’opérateur et sa forme matricielle donnée à l’équation (B.21) en

dimension finie.

48
2.3. Un exemple d’application de la POD en analyse de données

Ce phénomène est généralement observé lorsque la décomposition orthogonale propre est appliquée à
des données de moyenne non nulle. À l’origine cependant, le théorème de Karhunen-Loève est formulé
pour un ensemble de variables aléatoires « centrées », i. e. à moyenne nulle. Le choix de retrancher ou
non la moyenne aux clichés avant de procéder à leur décomposition orthogonale propre influe alors sur
les modes POD obtenus. Tamura et al. [224] et Gloerfelt [87] se sont ainsi intéressés au calcul des modes
POD lorsque des données « brutes » ou des données « centrées » sont employées. Les résultats de Tamura
et al. [224] révèlent que le spectre des valeurs propres est fortement affecté lorsque les données ne sont pas
centrées : en effet, lorsque la moyenne est incluse dans les clichés, le premier mode POD correspond environ
à la moyenne et capte près de 98% de l’énergie dans leur exemple, alors que lorsque la décomposition
orthogonale propre est effectuée sur les données centrées, le premier mode ne représente plus que 40%.
Lorsque la moyenne est soustraite, les modes POD sont plus régulièrement espacés et captent mieux les
diverses structures du système en dehors de celle représentée par la moyenne. Gloerfelt [87] a observé le
même type de comportement mais a signalé que l’inclusion de la moyenne dans les clichés peut se révéler
parfois utile pour améliorer le comportement dynamique du modèle d’ordre réduit — lorsque celui-ci est
construit — puisque la première équation du modèle d’ordre réduit gouverne l’évolution du champ moyen. −−→
D’après les remarques −−précédentes,
→ le nuage de points est projeté sur l’espace affine S ′ = Vect {OO′ +

→ −−−→
ϕ }. La partie moyenne OO′ définie à l’équation (2.47) est donc retranchée à l’ensemble des clichés OPm
avant d’en effectuer leur décomposition orthogonale propre. Le calcul du vecteur optimal −
−−′−→

ϕ est alors mené
pour les fluctuations O Pm autour de cette−nouvelle
−→ → origine comme le montre le schéma de la figure 2.2(b).
La nouvelle droite vectorielle S ′ = Vect {OO′ + − ϕ } est tracée en bleu sur la figure 2.2(a). Dans ce cas, la
droite de projection est très proche d’une régression linéaire classique tracée en traits discontinus noirs
sur la figure 2.2(a). Strang [223], Chap. 3.2 propose par exemple de calculer le coefficient directeur a et
l’ordonnée à l’origine b de la droite de régression y = ax + b en résolvant le système linéaire
 M
  M

X X
 M xm     ym 
  a  m=1 
 m=1  =  . (2.48)
XM XM  b XM 
 2   
xm xm xm ym
m=1 m=1 m=1

Le système précédent découle de la relation axm +b = ym écrite pour m = 1, ..., M . La détermination des
coefficients a et b se fait alors en cherchant à minimiser l’erreur dm = ym − axm − b pour chaque point Pm ,
cette erreur correspondant alors à la distance verticale. La méthode de régression linéaire diffère légèrement
de la décomposition orthogonale propre en ce sens que la direction de projection correspond dans le premier
cas à l’axe des ordonnées tandis que dans le second cas la projection s’effectue selon la direction orthogonale
à la droite vectorielle S. Les droites obtenues par la décomposition orthogonale propre des données centrées
et la méthode de régression linéaire sont néanmoins très proches, ce qui confirme bien l’idée que la POD
peut être vue comme une méthode de minimisation de type moindres carrés.
Ceci conclut cet exemple élémentaire d’application de la décomposition orthogonale propre, au moyen
duquel l’importance de l’utilisation de clichés centrés a pu être mise en évidence. La structure de l’opérateur
R a par ailleurs été exhibée pour un espace de Hilbert de type RN et a permis de retrouver l’expression
générale établie à l’équation (B.21).

49
2. P RINCIPE DE CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN

2.4 Principe de construction du modèle d’ordre réduit à partir de la


base POD
Le principe de construction du modèle d’ordre réduit repose sur l’hypothèse que la solution — continue
ou discrète — du système dynamique peut être approchée à chaque instant par une combinaison linéaire
analogue à la décomposition (2.2). Ainsi, les premiers modes POD fournissent une approximation relati-
vement précise de l’ensemble des clichés X et par extension on suppose qu’ils sont aussi valables pour re-
présenter le comportement dynamique du système à tout instant t différent des instants tm correspondants
aux clichés. On attire ici l’attention sur le fait que les coefficients de la décomposition (2.2) correspondent
(m)
aux amplitudes modales aj définies par la relation (2.29), tandis que le modèle d’ordre réduit fournit un
ensemble d’équations gouvernant les amplitudes modales inconnues aj (t) à tout instant afin de pouvoir
reconstruire la solution x(t) du système dynamique. La première étape de construction du modèle d’ordre
réduit consiste donc à introduire la décomposition des variables dans les équations du système dynamique.
Vient ensuite dans un second temps la phase de projection pour réduire le nombre d’équations.
Comme on l’a évoqué dans le paragraphe 1.3.4, plusieurs types de projection sont envisageables pour
parvenir au modèle d’ordre réduit en fonction du degré de non-linéarité des équations du système dyna-
mique initial. On distingue ainsi la projection discrète, la projection sur le sous-espace et la projection de Galerkin
pour reprendre la terminologie de Lucia et al. [153]. Enfin une dernière technique consiste à identifier les
coefficients du modèle d’ordre réduit à partir d’une forme pré-supposée.

2.4.1 Construction d’un modèle d’ordre réduit linéaire par projection discrète
La projection discrète est l’approche la plus simple pour obtenir le modèle d’ordre réduit d’un système
dynamique linéaire pour lequel les équations discrétisées de la forme (1.2) sont disponibles. La discrétisation
en espace des opérateurs du système dynamique s’écrit sous la forme générique

A1 ẋh (t) + A0 xh (t) = b. (2.49)

Le vecteur xh contient l’ensemble des degrés de liberté xi pour i = 1, . . . , Nv qui sont associés aux ap-
proximations de la variable continue x dans le domaine de calcul Ω. Les matrices A1 et A0 contiennent les
coefficients algébriques résultant de la discrétisation des opérateurs impliqués dans le système d’équations
aux dérivées partielles associé à (1.1), et enfin b est composé de coefficients algébriques provenant de la
discrétisation des valeurs connues de xh , en particulier celles sur les conditions limites.
(m)
Si les clichés notés xh proviennent de la résolution numérique des équations précédentes, alors la ré-
solution du problème aux valeurs propres de la méthode directe ou des clichés construit à partir des clichés
discrets (voir le tableau B.1 p.224) fournit les modes POD ϕ(j) sous forme discrète. La matrice tronquée des
modes POD Φ = [ϕ(1) , . . . , ϕ(q) ] est alors employée pour décomposer directement le vecteur des degrés de
liberté xh sur la base POD tronquée selon la relation

xh (t) ≈ Φ a(t). (2.50)

Le modèle d’ordre réduit gouvernant les amplitudes modales a = [a1 , . . . , aq ]T s’obtient alors en rem-
plaçant la décomposition (2.50) dans les équations semi-discrètes (2.49) du modèle d’ordre élevé puis en
projetant au moyen d’une simple multiplication matricielle : (ΦT A1 Φ) ȧ(t) + (ΦT A0 Φ) a(t) = ΦT b. Le
système réduit est alors explicitement déterminé par un système matriciel qui n’implique que des matrices
de M (q, q) et des vecteurs de Rq , où q ≪ Nv . Celui-ci s’écrit
 T
 M = Φ A1 Φ
M ȧ(t) = L a(t) + K avec L = −ΦT A0 Φ (2.51)

K = ΦT b

et découle de la projection discrète qui s’appuie sur l’approximation discrète (2.50) des degrés de liberté du
système. La réduction opère donc dans l’espace euclidien réel H = RNv .
Lorsque le système est non-linéaire, une pratique courante consiste à linéariser les équations du sys-
tème afin de se ramener à une équation de la forme (2.49). C’est une technique souvent employée pour

50
2.4. Principe de construction du modèle d’ordre réduit à partir de la base POD

traiter les problèmes d’aéroélasticité pour lesquels on cherche à déterminer les limites de stabilité en flot-
tement par exemple. Le principe consiste à supposer que les quantités physiques sont caractérisées par
de petites perturbations x′ autour d’un état stationnaire xs éventuellement non-linéaire, de sorte que le
vecteur des degrés de liberté est décomposé en xh (t) = xs + x′ (t). La partie stationnaire xs peut être calcu-
lée soit au moyen des équations linéarisées, soit à partir des équations non-linéaires. Ces deux approches
correspondent respectivement aux modèles entièrement linéaire et dynamiquement linéaire décrits par Dowell
et al. [60]. L’utilisation de l’écoulement stationnaire non-linéaire est particulièrement utile lorsqu’il s’agit de
calculer un écoulement transsonique dans lequel les non-linéarités restent confinées à l’écoulement station-
naire tandis que les perturbations peuvent être considérées comme linéaires. Connaissant la partie station-
naire xs , la décomposition xh (t) = xs +x′ (t) est introduite dans les équations (2.52), puis le terme A0 (xh (t))
est linéarisé. Le système d’équations résultant a une forme similaire à celle donnée à l’équation (2.49) à la
différence près que les inconnues sont à présent les fluctuations x′ . Le principal inconvénient de ce type
de modèle d’ordre réduit pour les systèmes linéaires est la nécessité de recalculer la partie stationnaire à
chaque fois qu’un paramètre est modifié.

2.4.2 Construction d’un modèle d’ordre réduit implicite par projection sur le sous-
espace
Dans le cas d’un système non-linéaire, la semi-discrétisation conduit à l’écriture
A1 ẋh (t) + A0 (xh (t)) xh (t) = b. (2.52)
L’introduction de la décomposition (2.50) dans les équations semi-discrètes (2.52) et la projection sur la base
tronquée des modes POD conduit à (ΦT A1 Φ) ȧ(t) + [ΦT A0 (Φ a(t)) Φ] a(t) = ΦT b. Le modèle d’ordre ré-
duit ainsi obtenu est défini implicitement en raison du caractère non-linéaire de l’opérateur A0 dont la
e (a(t)) qui nécessite d’être évalué à chaque instant t puisqu’il dépend en-
projection produit un opérateur L
core des amplitudes modales instationnaires a(t). Le modèle d’ordre réduit du système non-linéaire prend
donc la forme implicite
 T
 M = Φ A1 Φ
e
M ȧ(t) = L(a(t)) a(t) + K avec Le = −ΦT A0 (Φ a(t)) Φ . (2.53)
 T
K=Φ b
Deux alternatives peuvent être envisagées pour traiter le problème d’un système non-linéaire avec une
e
approche discrète. La première consiste à évaluer effectivement l’opérateur L(a(t)), ce qui nécessite de re-
courir aux routines du modèle d’ordre élevé. La seconde alternative consiste à pratiquer une linéarisation
du système (2.52) autour de l’état stationnaire xs comme on l’a expliqué dans le paragraphe précédent.
Lucia et al. [153] qualifient de projection sur le sous-espace ou de projection sur le résidu la première tech-
nique qui consiste à évaluer à chaque instant le terme non-linéaire. En effet, le résidu Rh de l’équation
semi-discrète (2.52) est défini à chaque instant par
Rh (t) = A1 ẋh (t) + A0 (xh (t)) xh (t) − b (2.54)
et les équations (2.52) sont vérifiées lorsque le résidu est nul. Par analogie, la solution du modèle d’ordre
réduit satisfait les équations (2.53) lorsque le résidu projeté ΦT Rh (t) est nul.
Le principe de la projection sur le sous-espace repose alors sur l’intégration en temps du système (2.53)
mais puisque le terme non-linéaire n’est pas explicitement connu pour les amplitudes modales, le champ
non réduit xh est reconstruit à chaque instant avec la décomposition (2.50) pour évaluer l’opérateur non-
linéaire au moyen des routines du système non réduit. La solution est alors calculée itérativement jusqu’à
l’annulation du résidu projeté.
e
Les non-linéarités du système dynamique initial donc sont préservées puisque l’opérateur L(a(t)) cor-
respondant à la projection de A0 (xh ) est calculé tel quel. Le modèle d’ordre réduit est donc capable de
reproduire n’importe quel type de non-linéarité. Toutefois, cette approche est intrusive puisque l’évalua-
tion des termes non-linéaires est effectuée au moyen des routines du code de calcul du modèle d’ordre
élevé. Par ailleurs, la réduction du temps de calcul n’est pas optimale puisqu’il est nécessaire à chaque pas
de temps de reconstruire le vecteur xh à partir de la décomposition (2.50) afin de pouvoir évaluer le terme
non-linéaire.

51
2. P RINCIPE DE CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN

2.4.3 Construction d’un modèle d’ordre réduit polynomial par projection de Galerkin
Lorsque les non-linéarités du système dynamique sont « polynomiales », la projection de Galerkin des
équations continues permet d’aboutir à une forme explicite des opérateurs non-linéaires de sorte que le
modèle d’ordre réduit résultant soit optimal en terme de réduction du nombre de degrés de liberté et du
temps de calcul.
À la différence de l’approche discrète, on considère la forme continue (1.1) du système dynamique. La
variable continue x est alors décomposée sur la base tronquée des modes POD selon la relation
q
X
x(t) ≈ aj (t) ϕ(j) . (2.55)
j=1

La méthode de Galerkin est un cas particulier de la méthode des résidus pondérés dont Bathe [26]
donne un bref aperçu. Le principe consiste à approcher la solution continue de l’espace vectoriel V de
dimension infinie par une solution approchée définie dans l’espace Vh ou dans l’espace Vq (voir la figure
1.2). La méthode des Éléments Finis correspond par exemple à une approximation dans Vh , alors que la
projection sur la base des modes POD au moyen de la décomposition (2.55) représente une approximation
dans Vq . Bien que le principe de la projection soit identique dans les deux cas, la dimension des espaces de
projection diffère de façon significative. La particularité de la projection de Galerkin provient de l’utilisation
des mêmes fonctions ϕ(j) pour l’approximation des variables continues et comme fonctions de pondération
dans la projection. Cette dernière est réalisée au moyen du produit scalaire h·, ·i associé à l’espace de Hilbert
H adopté pour décrire les solutions du système dynamique. Ainsi, la projection de Galerkin des équations
(1.1) du système dynamique donne la relation
hẋ(t), ψi = hf (x(t)), ψi (2.56)
qui revient à minimiser l’erreur de projection du résidu R(t) = ẋ(t) − f (x, µ), d’où le nom de la méthode
des résidus pondérés. Avec la projection de Galerkin, les fonctions de pondération ψ sont naturellement
les modes POD de la base tronquée Φ = { ϕ(i) }qi=1 qui sont orthonormaux entre eux par construction.
L’introduction de la décomposition (2.55) dans la projection (2.56) simplifie alors légèrement l’expression
en *  q  +
X
ȧi (t) = f  aj (t) ϕ(j) , ϕ(i) = fbi (a(t)). (2.57)
j=1

Le second membre fbi (a(t)) de l’expression précédente est encore exprimé implicitement en fonction des
amplitudes modales. Toutefois, lorsque le second membre f du système dynamique est linéaire ou mul-
tilinéaire, la bilinéarité du produit scalaire peut être mise à profit pour dériver une expression du modèle
d’ordre réduit dans laquelle apparaissent explicitement les composantes du vecteur des amplitudes mo-
dales a(t). On considère dans le cadre de cette thèse que le second membre f du système dynamique s’écrit
sous la forme d’une somme d’opérateurs multilinéaires, ce qui conduit donc à reformuler le second membre
avec l’expression X
f (x) = fe0 + fen (x, . . . , x), (2.58)
n≥1

où la fonction fe0 représente un terme constant et les fonctions multilinéaires fen sont définies de H n dans
H pour un n-uplet (x, . . . , x). Cette transformation permet alors d’introduire la décomposition (2.50) pour
chaque terme du n-uplet. La transformation (2.58) est toujours possible lorsque les termes de f s’écrivent
sous forme « polynomiale », dans le sens où f est seulement défini à partir de produits des variables x sur
lesquels agissent éventuellement les opérateurs aux dérivées partielles spatiales. Ainsi, la divergence div x
sera considérée comme une fonction linéaire fe1 (x), tandis que l’opérateur d’advection x · ∇x correspond à
un terme quadratique fe2 (x, x).
Sous l’hypothèse que le second membre du système dynamique s’écrive sous la forme (2.58), l’introduc-
tion de la décomposition (2.55) dans le produit scalaire hf (x), ϕ(i) i donne
*  q  +
D E D E X X q
X
f (x), ϕ(i) = fe0 , ϕ(i) + fen  aj (t) ϕ(j1 ) , . . . ,
1 aj (t) ϕ(jn ) , ϕ(i) .
n (2.59)
n≥1 j1 =1 jn =1

52
2.4. Principe de construction du modèle d’ordre réduit à partir de la base POD

Finalement, puisque les fonctions fen sont multilinéaires et que le produit scalaire est une application bi-
linéaire, les sommes dans les arguments du n-uplet des fonctions fen peuvent être extraites et le modèle
d’ordre réduit prend la forme explicite

D E X q
X D   E
ai (t) = fe0 , ϕ(i) + fen ϕ(j1 ) , . . . , ϕ(jn ) , ϕ(i) aj1 (t) . . . ajn (t) . (2.60)
n≥1 j1 ,...,jn =1

Le modèle d’ordre réduit est complètement défini par les coefficients hfen (ϕ(j1 ) , . . . , ϕ(jn ) ), ϕ(i) i qui sont
à présent indépendants des amplitudes modales a(t). Il est donc possible de calculer les coefficients dans
un premier temps avant l’intégration en temps du modèle d’ordre réduit contrairement à l’approche de
e
projection sur le sous-espace où le calcul des termes L(a(t)) doit être effectué à chaque pas de temps. Le
système d’équations (2.60) offre donc un gain substantiel en terme de réduction du nombre de degrés de
liberté et du temps de calcul.
L’obtention de la forme (2.60) requiert toutefois que le second membre du système dynamique s’écrive
comme une somme d’opérateurs multilinéaires. Dans le cas contraire, il n’est pas possible d’extraire les
opérateurs de sommation et les non-linéarités ne peuvent être explicitées. Le recours à la projection sur le
sous-espace est donc indispensable des ces situations, à moins d’effectuer un développement de Taylor des
termes non-linéaires, auquel cas la forme du second membre f peut être interprétée comme ici en tant que
somme d’opérateurs multilinéaires.
Avant de poursuivre, la forme du modèle d’ordre réduit est fournie lorsque le second membre présente
des non-linéarités au plus quadratiques puisque les systèmes dynamiques rencontrés dans le cadre de cette
thèse seront ramenés à cette forme dans la mesure du possible. Dans ce cas n ∈ J1; 2K et la relation (2.60) se
simplifie en
D E Xq D   E q D 
X  E
ai (t) = fe0 , ϕ(i) + fe1 ϕ(j) , ϕ(i) aj (t) + fe2 ϕ(j) , ϕ(k) , ϕ(i) aj (t) ak (t). (2.61)
j=1 j,k=1

L’expression linéaire (2.51) est donc généralisée par la relation quadratique


q
X q
X
ai (t) = Ki + Lij aj (t) + Qijk aj (t) ak (t) . (2.62)
j=1 j,k=1

2.4.4 Construction d’un modèle d’ordre réduit par identification des coefficients
Une dernière manière de construire le modèle d’ordre réduit consiste à identifier les coefficients plutôt
que de les calculer analytiquement à partir des expressions issues de la projection des opérateurs du sys-
tème dynamique sur les modes POD. La principale difficulté consiste à déterminer dans un premier temps
la structure des équations du modèle d’ordre réduit dont on cherche les coefficients. Le choix de la projec-
tion de Galerkin des équations du modèle d’ordre élevé est particulièrement judicieux puisqu’il découle
d’un processus physique. Une fois la forme du modèle d’ordre réduit connue, les coefficients sont détermi-
nés comme les solutions d’un problème inverse.
En pratique, le recours à la décomposition orthogonale propre est capital pour réduire le nombre de
paramètres à déterminer. Par ailleurs, l’hypothèse d’un modèle d’ordre réduit polynomial est encore une
fois fondamentale puisque les coefficients sont alors facilement calculés comme les solutions d’un problème
moindres carrés linéaire. La méthode a déjà été employée par exemple par Perret et al. [177] pour obtenir un
modèle d’ordre réduit à partir de données expérimentales. Puisque les clichés dont ils disposaient prove-
naient de résultats expérimentaux pour lesquels aucun système d’équations n’était associé en particulier,
les auteurs avaient donc supposé que le modèle d’ordre réduit s’écrivait de la manière la plus générale qui
soit comme un système d’équations différentielles ordinaires polynomial au maximum cubique. Lorsque
cela est possible, les coefficients identifiés seront de préférence ceux correspondant à la projection de Galer-
kin afin de préserver le lien physique avec le modèle d’ordre élevé.
Cette approche sera qualifiée de méthode d’identification des coefficients du modèle réduit, pour re-
prendre la terminologie employée par Perret et al. [177]. Elle a très récemment été reprise et améliorée

53
2. P RINCIPE DE CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN

[48, 244], notamment pour régulariser le problème inverse à résoudre. La méthode est robuste puisque les
erreurs liées à la troncature de la base POD, ainsi que les erreurs numériques ou de modélisation qui dé-
gradent la réponse des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin n’interviennent plus ici. Les coefficients sont
directement évalués de manière à s’adapter à la forme pré-supposée des équations et par conséquent au-
cune phase de correction a posteriori n’est nécessaire. Un autre avantage de la méthode est que le temps
de calcul alloué à la construction du modèle d’ordre réduit et notamment à l’évaluation des coefficients du
modèle d’ordre réduit est considérablement diminué.
La construction d’un modèle d’ordre réduit par identification des coefficients repose toujours sur la dé-
composition orthogonale propre d’un ensemble X de clichés x(m) , à partir duquel les modes POD ϕ(i) et
(m)
les amplitudes modales ai sont déterminés. Si l’on suppose que la forme du modèle d’ordre réduit est
donnée par le système d’équations quadratiques (2.62) par exemple4 , l’objectif est alors de déterminer les
(m)
coefficients Ki , Lij et Qijk de manière à ce que la dérivée des amplitudes ȧi issues de la décomposition
(2.2) des clichés coïncide avec le second membre fbi (a(m) ) évalué pour les amplitudes correspondant aux
clichés aux mêmes instants tm . L’idée sous-jacente est que si les dérivées des amplitudes coïncident, alors
l’intégration en temps du modèle d’ordre réduit devrait pouvoir fournir les bonnes amplitudes modales
(m)
ai (tm ). En supposant que les amplitudes modales ai correspondant aux clichés satisfont les équations du
modèle d’ordre réduit, la relation suivante peut être écrite à chaque instant tm pour m = 1, . . . , M :
q
X q
X
(m) (m) (m) (m) (m)
ȧi = fbi (aj ) = Ki + Lij aj + Qijk aj ak . (2.63)
j=1 j,k=1

(m)
Les amplitudes modales de référence ai sont connues à chaque instant tm puisqu’elles ont été dé-
terminées en même temps que les modes POD lors de la décomposition orthogonale propre des clichés.
(m)
Les dérivées en temps des amplitudes modales peuvent ensuite être évaluées de sorte que les termes ȧi
soient aussi connus. Si l’échantillonnage des clichés est assez faible, ou si le schéma de dérivation en temps
est d’ordre assez bas, la dérivée des amplitudes modales peut être évaluée en deux étapes : les amplitudes
modales connues aux instants tm sont d’abord interpolées au moyen de splines par exemple, puis ces fonc-
tions sont dérivées en temps au moyen d’un schéma aux différences finies centrées.
Dans le problème (2.63), les inconnues sont donc les coefficients du modèle d’ordre réduit Ki , Lij et
Qijk . L’équation gouvernant chaque amplitude modale est gouvernée par 1 coefficient constant Ki , q co-
efficients linéaires Lij et q 2 coefficients quadratiques Qijk . En fait, la moitié des termes quadratiques est
(m) (m) (m) (m)
redondante puisque les contributions aj ak sont identiques à celles produites par ak aj . Par consé-
quent, on considère seulement les q (q + 1)/2 premiers coefficients quadratiques et le vecteur des inconnues
de dimension Nc,i = 1 + q + q(q + 1)/2 est donc
 T
Xi = Ki Li1 · · · Lij · · · Liq Qi11 · · · Qijk,k≥j · · · Qiqq . (2.64)

La relation (2.63) fournissant la dérivée des amplitudes modales à chaque instant d’échantillon-
(m)
nage
PNc,is’écrit(m)alors sous la forme d’une équation linéaire en fonction du vecteur des inconnues : ȧi =
l=1 A l (a ) Xil où Xil est la l-ième composante du vecteur X i . Le regroupement des M relations précé-
dentes écrites aux instants tm conduit alors à la forme matricielle

A X i = Bi . (2.65)

La matrice A ∈ M (M, Nc,i ) contient les corrélations temporelles entre les différentes amplitudes éva-
luées aux instants tm et le vecteur Bi ∈ RM contient les dérivées des amplitudes modales, tels que
   
(1) (1) (1) (1) (1) (1) (1)
1 a1 · · · aq a1 a1 · · · aq aq ȧi
 . .. .. .. ..   
A=  et Bi =  ..  .
 .. . . . .   .  (2.66)
(M) (M) (M) (M) (M) (M) (M)
1 a1 · · · aq a1 a1 · · · aq aq ȧi
4 Tant que le second membre est composé d’opérateurs multilinéaires, la méthode décrite dans ce qui suit reste valable et conduit

toujours à la résolution d’un problème linéaire, même lorsque le modèle d’ordre réduit est décrit par un système polynomial d’ordre
supérieur tel que celui donné à l’équation (2.60).

54
2.4. Principe de construction du modèle d’ordre réduit à partir de la base POD

Les coefficients inconnus sont donc solutions d’un problème linéaire du type (A.20) qui est résolu au
moyen des méthodes décrites dans le paragraphe A.3 p.214. Lorsque le système est mal posé et que la
matrice A est mal conditionnée, le problème est résolu de façon approchée au moyen du pseudo-inverse
A+ défini par la relation (A.24) et la solution est approchée par

e i = A+ B i .
X (2.67)
p

Il est important de rappeler que si la forme générique choisie pour le modèle d’ordre réduit n’est pas
polynomiale, alors il n’est pas possible de formuler le problème sous la forme (2.65), et la détermination
des coefficients optimaux pour reproduire les amplitudes modales doit se faire par le biais d’algorithmes
d’optimisation plus complexes [33, 143, 159]. Toutefois, le problème devient rapidement très lourd à traiter
lorsque le nombre de coefficients augmente et la méthode n’est plus viable.
Une seconde remarque concerne l’échantillonnage des clichés : si l’intervalle δtc = tm+1 − tm entre deux
(m)
clichés est trop important, alors les dérivées temporelles des amplitudes modales ȧj risquent d’être mal
évaluées. Par conséquent le second membre Bi du problème (2.65) est peu précis et ceci est d’autant plus
grave que la matrice A est en général mal conditionnée, ce qui rend la résolution du problème extrêmement
sensible aux perturbations du second membre. Pour plus de précautions, on a donc choisi ici d’interpoler
d’abord les amplitudes modales avec des splines avant de procéder à la dérivation en temps, de manière à
ce que les schémas différences finies employés puissent être appliqués pour des pas de temps plus petits
que celui associé à l’échantillonnage.
Pour terminer, on précise la terminologie employée dans la suite de ce document. L’approche POD-
Galerkin consiste à calculer les coefficients du modèle d’ordre réduit à partir des expressions analytiques
établies comme la projection des opérateurs du système non réduit sur les modes POD, alors que la méthode
d’identification consiste à optimiser les coefficients pour reproduire la réponse du système non réduit. Il est
important de mentionner toutefois que la projection formelle de Galerkin sur les modes POD est une étape
indispensable puisque dans le premier cas elle fournit les expressions analytiques tandis que dans le second
elle donne la forme générique des équations qui serviront à identifier les coefficients.
Les deux approches sont en quelque sorte complémentaires et ne diffèrent en réalité que dans l’utilisa-
tion qui est faite des modes POD et des amplitudes modales issus de la décomposition orthogonale propre
pour construire le modèle d’ordre réduit. Ainsi, l’approche POD-Galerkin repose sur l’emploi des modes
POD pour calculer les coefficients du modèle d’ordre réduit, alors que les coefficients sont identifiés à par-
tir des (dérivées des) amplitudes modales dans la seconde méthode. Les deux méthodes sont donc d’une
certaine manière « duales » puisque la construction du modèle d’ordre réduit avec chacune d’entre elles
repose soit sur les modes POD, soit sur les amplitudes modales. Or ces deux quantités contiennent chacune
des informations quant au comportement du système : les modes POD représentent les structures spatiales
d’énergie maximale dans la réponse du système, alors que les amplitudes modales décrivent plutôt le com-
portement dynamique de la réponse. L’idéal serait donc de disposer d’une méthode de construction du
modèle d’ordre réduit qui tire parti à la fois des informations spatiales et temporelles. Sur ce sujet, il serait
intéressant d’approfondir les méthodes de construction de modèles d’ordre réduit basées sur les modes
d’interaction principaux qui ont été brièvement décrites au paragraphe 1.3.5.

55
2. P RINCIPE DE CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN

2.5 Décomposition orthogonale propre des systèmes multivariables


Dans la section 2.2, la décomposition orthogonale propre a été décrite dans le contexte d’un système
caractérisé par une unique variable x contenue dans un espace de Hilbert H. Cependant, les systèmes
dynamiques complexes tels que ceux rencontrés en mécanique des fluides sont décrits par un ensemble
de nv variables indépendantes gouvernées chacune par une équation du type (1.1). On note alors q =
[x1 , . . . , xnv ]T le vecteur des inconnues du système dynamique qui appartient à l’espace H nv . Le système
dynamique (1.1) est donc remplacé par le système multivariable

 ẋ1
 = f1 (x1 , . . . , xnv )
q̇(t) = f (q) ⇐⇒ .. .. . (2.68)
 . .

ẋnv = fnv (x1 , . . . , xnv )

De même que lorsque le système est monovariable, un ensemble Q de clichés q (m) est généré soit par
simulation numérique, soit par des dispositifs expérimentaux. La question du traitement des différentes
variables du vecteur q se pose alors lorsqu’il s’agit d’en effectuer une décomposition orthogonale propre :
faut-il, puisqu’il y a à présent plusieurs variables, calculer un jeu de modes POD pour chaque variable, ou,
au contraire, extraire des modes « globaux » calculés à partir de l’ensemble des variables ? Rowley [192]
compare les deux méthodes et qualifie la décomposition orthogonale propre de scalaire dans le premier
cas puisque chaque variable xk pour k = 1, . . . , nv est traitée séparément comme un scalaire possédant sa
propre décomposition, et de vectorielle dans le second cas en raison de la décomposition qui porte directe-
ment sur le vecteur q des variables considéré dans son ensemble.
D’après les remarques formulées dans l’exemple de la section 2.3, la décomposition orthogonale propre
sera de préférence pratiquée pour les clichés centrés dans le reste de ce document. On définit par conséquent
la partie moyenne des clichés notée
h i X M
q = E q (m) = αm q (m) (2.69)
m=1

et obtenue par application de l’opérateur de moyenne E [·] aux clichés de l’ensemble Q. La décomposition
orthogonale propre n’est donc plus appliquée à l’ensemble des clichés Q = {q (m) }Mm=1 mais à l’ensemble
Qc des clichés centrés s(m) définis par soustraction de la partie moyenne par

s(m) = q (m) − q, ∀m ∈ J1; M K. (2.70)

2.5.1 Description de l’approche POD scalaire


L’ensemble Qc des clichés centrés est décomposé en nv ensembles Qc,k relatifs au champ de la variable
(m) (m) (m)
xk prélevé aux instants tm et centré pour donner les sk = xk − xk qui constituent les nv composantes
du vecteur s (m)
défini ci-dessus. La partie moyenne pour chaque variable xk est obtenue par application de
(m)
l’opérateur de moyenne E [·] aux clichés xk des ensembles Qc,k . La partie moyenne est alors donnée par

h i XM
(m) (m)
xk = E xk = αm xk . (2.71)
m=1

Avec l’approche POD scalaire, chaque variable possède son propre jeu de modes POD qui proviennent
de la recherche des valeurs et vecteurs propres des nv opérateurs de corrélation R⋆sk définis pour les va-
riables sk à partir de la relation (2.25) si la méthode des clichés est adoptée par

R⋆sk d(j) (j)


sk = λj,sk dsk avec (j, k) ∈ J1; rK × J1; nv K. (2.72)

Les opérateurs aux valeurs propres sont construits pour les clichés centrés et le terme général s’écrit alors
√ (i) (j) (j)

Rij,s = αi αj hxk − xk , xk − xk iH . Les vecteurs propres dsk permettentPalors de revenir aux coefficients
(j) k (j) (j) (j) (m)
csk = αde sk utilisés dans la décomposition (2.20) adaptée ici en ϕxk = M m=1 cm,sk sk pour les clichés

56
2.5. Décomposition orthogonale propre des systèmes multivariables

centrés. Les modes POD définis pour chaque variable s’écrivent alors comme la combinaison linéaire des
(m) (j)
clichés centrés sk pondérés par les composantes du vecteur csk , de sorte que
M
X  
(m)
ϕ(j)
xk ≈ c(j)
m,xk xk − xk . (2.73)
m=1

La décomposition orthogonale propre tronquée utilisant seulement les q premiers modes est adaptée à
partir de l’équation (2.55) pour chaque variable centrée sk , ce qui conduit à la relation
q
X
xk (t) = xk + axj k (t) ϕ(j)
xk . (2.74)
j=1

La décomposition pour le vecteur q des variables du système dynamique s’écrit de manière synthétique

q(t) ≈ q + Φ a(t). (2.75)

Le vecteur q = [x1 , . . . , xnv ]T regroupe les parties moyennes des différentes variables et correspond à la
définition (2.69). La matrice Φ et le vecteur a sont définis respectivement par
   (1) (q)
  x1 
Φx 1 0 ϕx1 . . . ϕx1 0 a
 .   .   . 
..  .. 
Φ= =  et a =  ..  . (2.76)
0 Φx n v 0
(1)
ϕxnv . . . ϕxnv
(q) axnv

Il est important de noter que la matrice Φ ∈ M (nv , qnv ) n’est pas à proprement parler la matrice de la
base POD, mais seulement une matrice diagonale par blocs qui regroupe les matrices des modes POD
(1) (q)
Φxk = [ϕxk . . . ϕxk ] relatives à chaque variable. Ainsi, les colonnes des matrices Φxk correspondent bien à
la base des modes POD ce qui n’est pas le cas de celles de Φ.
Le modèle d’ordre réduit est construit en remplaçant la décomposition (2.74) de chaque variable dans
l’équation continue du système dynamique relative à cette variable. Le système (1.1) prend la forme (2.68)
dans le cas d’un système multivariables. On suppose alors que les seconds membres fk (q) s’écrivent comme
la somme d’opérateurs multilinéaires, à la manière de la décomposition (2.58). En particulier, on suppose ici
pour simplifier que le système est au plus quadratique et chacun des opérateurs fen est encore décomposé en
une somme d’opérateurs portant exclusivement sur chaque xk . L’équation aux dérivées partielles régissant
la variable xi s’écrit alors
nv
X Xnv
ẋi = Ki + Lin (xn ) + Qinp (xn , xp ). (2.77)
n=1 n,p=1

À présent il est possible de remplacer la décomposition scalaire (2.74) de chaque variable dans l’équation
précédente. Les propriétés de multilinéarité des opérateurs permettent de développer l’expression obtenue
(j)
et enfin la projection sur chaque mode POD ϕxi conduit à l’égalité
* nv nv
+
X X
xi
ȧj = Ki + Lin (xn ) + Qinp (xn , xp ), ϕ(j)
xi
* q "nn=1 n,p=1 # +
X X v   Xnv      
(k) xn (k) xp (k) xn (j)
+ Lin ϕxn ak + Qinp xn , ϕxp ak + Qinp ϕxn , xp ak , ϕxi (2.78)
* q
k=1 n=1 n,p=1 +
X X nv  
xn xp
+ Qinp ϕ(l) (k)
xn , ϕxp al ak , ϕxi
(j)
.
k,l=1 n,p=1

Finalement, un changement d’indice dans la deuxième contribution du terme linéaire permet de modifier
x
les amplitudes ak p en axk n , de sorte que le modèle d’ordre réduit s’écrit
q X
X nv q
X nv
X x x x
ȧxj i = Kj + Lxjkn axk n + n p xn
Qjkl al ak p . (2.79)
k=1 n=1 k,l=1 n,p=1

57
2. P RINCIPE DE CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN

Les coefficients du modèle d’ordre réduit sont donnés par les relations suivantes :
* nv nv
+
X X
Kj = Ki + Lin (xn ) + Qinp (xn , xp ), ϕ(j)
, xi
* n=1 n,p=1 +
  X nv     
(2.80)
Lxjkn = Lin ϕx(k)
n
+ Qipn xp , ϕ(k) (k)
xn + Qinp ϕxn , xp , ϕ(j)
xi ,
D  p=1  E
xn xp
Qjkl = Qinp ϕ(l) (k) (j)
xn , ϕxp , ϕxi .

En effectuant la décomposition orthogonale propre de chaque variable, le modèle d’ordre réduit se com-
pose d’un système d’équations différentielles ordinaires couplées. En effet, les q équations sur les ampli-
tudes axj i relatives à la variable xi ne peuvent être résolues indépendamment des autres modèles d’ordre
réduit puisque les équations font intervenir toutes les amplitudes modales, y compris celles correspondant
à d’autres variables xn 6= xi . Par conséquent, il faut résoudre simultanément un ensemble de q nv équations,
où q est le nombre de modes POD retenus dans la base de projection et nv est le nombre de variables indé-
pendantes du système dynamique. Il serait toutefois possible d’optimiser la taille du modèle d’ordre réduit
en ne choisissant pas forcément le même nombre q de modes POD pour chaque variable xi . Ceci pourrait
éventuellement être efficace si certaines grandeurs physiques peuvent être représentées par un nombre très
restreint de modes alors que d’autres en demandent davantage.
L’approche POD scalaire a été employée principalement par Lucia et Beran [152] et Moreno et al. [169].
L’avantage de la méthode est de fournir une décomposition pour chaque variable, pour laquelle les modes
POD représentent les structures d’énergie maximale. Cependant, le système d’équations différentielles or-
dinaires obtenu est relativement compliqué et la formulation du modèle d’ordre réduit devient lourde. Un
second reproche peut être formulé vis-à-vis de cette approche : en procédant de la sorte, une partie de la
physique du problème est négligée puisque les opérateurs de corrélation sont formés à partir de clichés
contenant exclusivement une quantité physique donnée, alors que les différentes variables sont corrélées
entre elles. Ainsi, dans le cas d’un fluide incompressible les modes POD ne correspondent plus aux struc-
tures d’énergie cinétique maximale, mais aux « énergies cinétiques » dans chaque direction. Il est donc
préférable de former un opérateur aux valeurs propres à partir des clichés contenant l’ensemble des gran-
deurs physiques du problème, même si cela induit d’autres difficultés comme on va le voir.

2.5.2 Description de l’approche POD vectorielle


À l’opposé de la méthode précédente, on considère l’ensemble Qc des clichés centrés sans aucune dis-
tinction entre les différentes variables. L’unique problème aux valeurs propres construit pour des clichés
centrés s(m) contenant l’ensemble des variables du système à différents instants tm est donc défini par

R⋆ d(j) = λj d(j) avec j ∈ J1; rK. (2.81)

L’opérateur aux valeurs propres est formulé pour les clichés centrés et le terme général s’écrit donc Rij ⋆
=
√ (j)
αi αj hq − q, q − qiH nv . À la différence de l’approche POD scalaire, le produit scalaire est cette fois
(i)

celui associé à H nv et non plus à H. Les vecteurs propres d(j) solutions du problème (2.81) fournissent alors
les coefficients c(j) = αd
e (j) utilisés dans la décomposition

M
X  
ϕ(j) = c(j)
m q (m)
− q . (2.82)
m=1

Il est toujours possible de décomposer le vecteur des modes POD en différentes contributions relatives
(j) (j)
à chaque variable, en posant : ϕ(j) = [ϕx1 . . . ϕxnv ]T . Bien qu’on retrouve le même type de fonctions que
(j)
pour la POD scalaire, il est primordial de signaler que les ϕxi ne sont plus des modes POD puisqu’ils
ne découlent pas directement de la résolution du problème aux valeurs propres (2.81). En particulier, la
propriété d’orthonormalité des modes POD est vérifiée par le vecteur des modes POD ϕ(j) mais pas par les
(j)
composantes ϕxi relatives à chaque variable.

58
2.5. Décomposition orthogonale propre des systèmes multivariables

La décomposition POD est donc appliquée cette fois directement au vecteur des inconnues q plutôt qu’à
chaque composante xi , ce qui conduit à l’approximation
q
X
q(t) ≈ q + aj (t) ϕ(j) . (2.83)
j=1

À la différence de l’approche scalaire, il n’existe qu’un seul jeu d’amplitudes modales aj (t) pour l’en-
semble des variables du système au lieu d’en avoir un par variable. La décomposition orthogonale
Pq propre
(j)
d’une variable xi donnée correspond alors à la i-ième ligne de (2.83) et s’écrit xi (t) = xi + j=1 aj (t) ϕxi .
(j)
Cependant, à la différence de (2.74), les amplitudes ne dépendent plus de xi et les ϕxi ne correspondent
plus aux modes POD mais seulement à la partie du vecteur ϕ(j) relative à la variable xi . Ici, l’écriture
matricielle synthétique de la décomposition orthogonale propre des variables du système devient

q(t) ≈ q + Φ a(t). (2.84)

L’expression est similaire à (2.75) mais la structure de la matrice Φ et du vecteur a est plus simple. En
effet, Φ ∈ M (nv , q) est une matrice pleine et le vecteur des amplitudes modales ne possède plus que q
composantes identiques quelle que soit la variable xi , d’où les définitions
   
(1) (q)
ϕx1 . . . ϕx1 a1
 . .   .. 
(1) (q)  . . 
Φ = [ϕ . . . ϕ ] =  . .  et a =  .  . (2.85)
(1) (q) aq
ϕxnv . . . ϕxnv

La construction du modèle d’ordre réduit à partir des équations (2.68) est grandement facilitée puisque
la décomposition orthogonale propre est écrite directement pour le vecteur des inconnues q. En supposant
que le second membre f (q) s’écrit à la manière de la décomposition (2.58) comme la somme d’opérateurs
multilinéaires au plus quadratiques, le système dynamique prend la forme vectorielle

q̇ = K + L(q) + Q(q, q). (2.86)

Il suffit alors de remplacer la décomposition (2.84) dans l’équation (2.86) et d’utiliser la multilinéarité des
opérateurs L et Q directement par rapport au vecteur q. On aboutit alors à l’égalité
q
X
ȧk ϕ(k) = K + L(q) + Q(q, q)
k=1 Xq   Xq   q
X  
+ L ϕ(k) ak + Q q, ϕ(k) ak + Q ϕ(l) , q al (2.87)
k=1 k=1 l=1
Xq  
+ Q ϕ(k) , ϕ(l) ak al .
k,l=1

Enfin la projection de l’équation précédente sur les q modes POD ϕ(j) conduit aux équations suivantes du
modèle d’ordre réduit :
q
X Xq
ȧj = Kj + Ljk ak + Qjkl ak al . (2.88)
k=1 k,l=1

Les coefficients du modèle d’ordre réduit sont alors donnés par les relations
D E
Kj = K + L(q) + Q(q, q), ϕ(j) ,
D       E
Ljk = L ϕ(k) + Q q, ϕ(k) + Q ϕ(k) , q , ϕ(j) , (2.89)
D   E
Qjkl = Q ϕ(l) , ϕ(k) , ϕ(j) .

La forme des équations est proche de celle obtenue par l’approche scalaire donnée à l’équation (2.79),
mais est largement simplifiée par l’indépendance des amplitudes et des coefficients vis-à-vis de chaque

59
2. P RINCIPE DE CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN

variable xi . Un des avantages de l’approche vectorielle est qu’il est inutile de décomposer les opérateurs
K, L et Q en différentes contributions exclusivement relatives à un xi donné puisque la décomposition
orthogonale propre porte directement sur le vecteur q dont dépendent les opérateurs.
Rowley [192] a comparé au chapitre 5 de sa thèse les approches POD scalaire et vectorielle. Outre le fait
que l’approche vectorielle ne nécessite que de résoudre q équations au lieu de q nv dans l’approche scalaire,
il a remarqué que le modèle d’ordre réduit obtenu avec l’approche scalaire a plus facilement tendance à
diverger et le comportement ne s’améliore pas lorsque le nombre q de modes POD contenus dans la base
de projection est augmenté. La difficulté principale de l’approche vectorielle est de déterminer le produit
scalaire h·, ·i associé à l’espace H nv . Mathématiquement, les définitions basiques du produit scalaire pour
l’espace euclidien de dimension finie (RN )nv = RNv avec Nv = N nv et l’espace de Lebesgue des fonctions
vectorielles de carré intégrable (L2 (Ω))nv ne posent pas de problème. Ainsi, le produit scalaire euclidien
entre deux clichés discrets tels que q = [x1,1 · · · xN,1 · · · x1,nv · · · xN,nv ]T s’écrit
Nv
X nv
N X
X
∀(q, r) ∈ RNv × RNv , hq, r i = qi ri = qj,k rj,k . (2.90)
i=1 j=1 k=1

De la même manière, le produit scalaire de deux vecteurs de fonctions continues q = [x1 · · · xnv ]T s’écrit
Z X
nv
2 nv 2 nv
∀(q, r) ∈ (L (Ω)) × (L (Ω)) , hq, r i = qk (ξ) rk (ξ) dξ. (2.91)
Ω k=1

Les définitions précédentes correspondent certes à un produit scalaire, mais la somme des quantités
qj,k rj,k et qk (ξ) rk (ξ) pour différentes valeurs de k n’est pas consistante du point de vue des unités phy-
siques si les variables xi du vecteur q ont des unités différentes. Ce problème n’est pas anodin et la déter-
mination d’un produit scalaire correct est primordial puisque la définition même des modes POD, et par
voie de conséquence la qualité de la base de projection, dépend de ce choix. Des détails supplémentaires à
propos de ce choix seront donnés plus tard lorsque les équations du fluide seront présentées.

60
2.6. Synthèse du chapitre 2

2.6 Synthèse du chapitre 2


Dans ce chapitre, la décomposition orthogonale propre a été décrite dans le contexte d’un système dé-
terministe en s’appuyant sur le principe d’optimalité que doit vérifier la base des modes POD afin de mi-
nimiser l’erreur moyenne de projection. Après avoir rappelé l’écriture des problèmes aux valeurs propres
correspondant à la méthode directe et des clichés, les principales propriétés des modes POD et des am-
plitudes modales ont été rappelées. Un exemple très simple dans lequel un nuage de point de l’espace R2
est approché a permis de mettre en œuvre la décomposition orthogonale propre et d’attirer l’attention sur
l’importance de travailler avec des clichés centrés, i. e. à moyenne nulle. Le lien étroit avec une méthode
classique de régression linéaire a par ailleurs été mis en évidence.
Le principe de construction d’un modèle d’ordre réduit au moyen de la base POD a ensuite été pré-
senté. Quatre techniques ont été décrites pour traiter des systèmes linéaires ou non-linéaires. Le cas parti-
culier des systèmes dynamiques non-linéaires pour lesquels les opérateurs peuvent être considérés comme
multilinéaires a ouvert la voie à la construction explicite de modèles d’ordre réduit non-linéaires via une
projection de Galerkin. En procédant de la sorte, une réduction optimale en terme de nombre de degrés de
liberté et de coût de calcul est réalisée. La technique de projection sur le sous-espace permet certes de traiter
n’importe quel type de non-linéarité, mais il s’agit d’une méthode intrusive qui ne permet pas réellement
de réduction en terme de nombre de degrés de liberté. Finalement, une dernière technique de construction
du modèle d’ordre réduit par identification des coefficients du modèle d’ordre réduit a été décrite. Celle-ci
utilise encore l’hypothèse que le système dynamique peut s’écrire en fonction d’opérateurs multilinéaires
afin de formuler un problème d’approximation moindres carrés linéaires. Les coefficients calculés de cette
manière évitent un certain nombre d’erreurs de calcul qui conduisent parfois à la déstabilisation des mo-
dèles d’ordre réduit POD-Galerkin et par conséquent elle apparaît comme une méthode robuste. Enfin,
l’application de la décomposition orthogonale propre à un système multivariables a été détaillée avec les
approches POD scalaires et vectorielles. Les avantages et les inconvénients des deux méthodes ont été rap-
pelés et l’importance de la définition du produit scalaire a été évoquée.
Ces premières remarques concernant les aspects théoriques de la construction d’un modèle d’ordre ré-
duit au moyen de la base des modes POD permettent de mieux appréhender la méthode qui sera à l’avenir
mise en œuvre dans le cas de systèmes mécaniques plus complexes. On s’intéressera en particulier dans
le chapitre suivant au cas d’un système dynamique linéaire pour lequel différentes formulations de la dé-
composition orthogonale propre sont comparées pour commencer, avant de chercher à prendre en compte
l’action d’une condition limite de Dirichlet non-homogène.

61
Chapitre 3
Évaluation de l’approche POD-Galerkin pour les
systèmes dynamiques linéaires non-autonomes

Sommaire
3.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
3.2 Modèles d’ordre réduit pour les systèmes dynamiques linéaires autonomes . . . . . . . . . 65
3.2.1 Formulation analytique du modèle d’ordre réduit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65
3.2.1.1 Génération de clichés à partir de la solution analytique du problème . . . . . 66
3.2.1.2 Calcul des modes POD . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66
3.2.1.3 Construction du modèle d’ordre réduit analytique . . . . . . . . . . . . . . . 67
3.2.2 Formulation discrète du modèle d’ordre réduit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68
3.2.2.1 Génération de clichés à partir de la solution Éléments Finis du problème . . 68
3.2.2.2 Calcul des modes POD . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
3.2.2.3 Construction du modèle d’ordre réduit par une approche discrète . . . . . . 70
3.2.3 Formulation POD-Galerkin du modèle d’ordre réduit . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
3.2.3.1 Approximation numérique du produit scalaire . . . . . . . . . . . . . . . . . 71
3.2.3.2 Calcul des modes POD . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71
3.2.3.3 Construction du modèle d’ordre réduit par une approche POD-Galerkin . . 72
3.3 Évaluation du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin du système linéaire autonome . . . . 74
3.3.1 Évaluation du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74
3.3.2 Choix de la base des clichés et du nombre de modes POD . . . . . . . . . . . . . . . . 77
3.4 Modèles d’ordre réduit pour les systèmes dynamiques linéaires non-autonomes . . . . . . 82
3.4.1 Adaptation de la méthode des pénalités au modèle d’ordre réduit . . . . . . . . . . . 83
3.4.2 Adaptation de la méthode des multiplicateurs de Lagrange au modèle d’ordre réduit 84
3.4.3 Méthode de la fonction de contrôle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85
3.5 Évaluation du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin du système linéaire non-autonome . . 87
3.5.1 Aspect des modes POD non-homogènes et homogénéisés . . . . . . . . . . . . . . . . 87
3.5.2 Réponse du modèle d’ordre réduit non-autonome . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87
3.6 Synthèse du chapitre 3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93

63
3. A PPROCHE POD-G ALERKIN POUR LES SYSTÈMES DYNAMIQUES LINÉAIRES NON - AUTONOMES

3.1 Introduction
On se propose dans ce chapitre d’évaluer l’approche POD-Galerkin présentée dans la section 2.4 lors-
qu’elle est employée pour la construction du modèle d’ordre réduit d’un système dynamique linéaire. L’ob-
jectif est dans un premier temps de comparer la qualité de la réponse reproduite à celle fournie par une
formulation analytique, ainsi qu’à la réponse du modèle d’ordre réduit construit par la projection discrète
qui devrait être particulièrement adaptée puisqu’il s’agit d’un système linéaire. L’exemple d’application
choisi ici est volontairement extrêmement simple afin de pouvoir comparer les résultats à la formulation
analytique qui constituera notre référence.
Dans un second temps, la formulation POD-Galerkin sera mise à l’épreuve pour reproduire la réponse
du système rendu non-autonome par l’introduction d’une condition limite de Dirichlet non-homogène. Ce
type de condition limite est choisi intentionnellement puisqu’il correspond à celui rencontré dans les pro-
blèmes d’interaction fluide-structure et notamment d’aéroélasticité pour traiter la condition de couplage
cinématique à l’interface entre le milieu fluide et solide. Plusieurs techniques sont alors développées et
comparées pour tenir compte de cette condition limite non-homogène. Enfin, la capacité du modèle d’ordre
réduit à reconstruire des réponses de divers types ou pour différentes valeurs d’un paramètre à partir d’une
unique base de modes POD sera brièvement étudiée.

64
3.2. Modèles d’ordre réduit pour les systèmes dynamiques linéaires autonomes

3.2 Développement de modèles d’ordre réduit basés sur la POD pour


les systèmes dynamiques linéaires autonomes
Plusieurs formulations d’un modèle d’ordre réduit basé sur la décomposition orthogonale propre sont
développées dans cette section pour un système linéaire autonome au moyen de la projection discrète et de
la projection de Galerkin. Ces deux formulations supposent respectivement de considérer que les clichés
dont on dispose sont discrets ou continus. Les performances des modèles d’ordre réduit sont alors com-
parées à celles d’une formulation analytique de référence qui peut être développée pour l’exemple simple
traité ici. Ce dernier consiste en l’étude des déplacements d’une barre encastrée-libre unidimensionnelle,
dont la géométrie est décrite sur la figure 3.1 : la barre est de longueur L et le matériau
p supposé linéaire
élastique est modélisé par sa masse volumique ρ et son module de Young E tels que c = E/ρ corresponde
à la célérité du son dans le milieu. Sous l’hypothèse de petits mouvements, l’équation gouvernant les dépla-
cements de la barre se résume à l’équation des ondes unidirectionnelle lorsque les paramètres structuraux
et géométriques sont supposés constants [83]. Celle-ci s’écrit
∂2u ∂2u
2
− c2 2 = 0. (3.1)
∂t ∂x
Il s’agit donc d’un système dynamique linéaire monovariable (nv = 1) dans lequel l’inconnue u désigne
le déplacement longitudinal. L’état du système noté auparavant x correspond à présent au déplacement u
et la notation x sera réservée à la direction spatiale associée à une base du domaine de calcul Ω = [0; L] ⊂ R.

U0

Figure 3.1 : Schématisation du problème de la barre en petits mouvements de traction-compression.

Pour spécifier une solution unique, l’équation (3.1) est complétée par les conditions aux limites

 u(x = 0, t) = 0
∂u ∀t > 0, (3.2)
 =0
∂x x=L
ainsi que les conditions initiales1

 u(x, t = 0) = (U0 /L) x
∂u ∀x ∈ [0; L]. (3.3)
 =0
∂t t=0
Dans les paragraphes qui suivent, trois formulations du modèle d’ordre réduit sont détaillées : tout
d’abord une formulation analytique dans laquelle les clichés et l’équation de base employée pour projeter le
modèle d’ordre réduit sont continus, ensuite une formulation discrète reposant sur un formalisme Éléments
Finis où les clichés et l’équation de base du modèle d’ordre réduit sont liés à la discrétisation du système et
enfin une formulation POD-Galerkin utilisant des clichés discrets et l’équation continue de base.

3.2.1 Formulation analytique du modèle d’ordre réduit


Cette première formulation est développée uniquement dans le but de servir de référence ensuite pour
évaluer la qualité des réponses produites avec les autres formulations. La construction des modèles d’ordre
réduit pour le système dynamique autonome étudié ici n’a en soi qu’un intérêt très limité en dehors de
l’évaluation des performances, puisque la solution exacte est connue.
1 La condition initiale portant sur les déplacements correspond à la solution statique du problème pour une déformée U appliquée
0
à l’extrémité libre : en effet, il faut satisfaire ∂ 2 u/∂x2 = 0 avec les conditions aux limites u(x = 0) = 0 et u(x = L) = U0 , ce qui,
après deux intégrations, donne bien U0 x/L.

65
3. A PPROCHE POD-G ALERKIN POUR LES SYSTÈMES DYNAMIQUES LINÉAIRES NON - AUTONOMES

3.2.1.1 Génération de clichés à partir de la solution analytique du problème


En l’absence d’efforts extérieurs, il est possible de montrer que la solution analytique du problème (3.1)
avec les conditions limites (3.2) et les conditions initiales (3.3) s’écrit sous la forme d’une série infinie de
fonctions trigonométriques donnant lieu à la décomposition
∞ ∞
" √ # r  
X X n−1 4 2L U0 2 kn x
u(x, t) = ζn Θn (t) ψn (x) = (−1) 2 cos (kn t) sin . (3.4)
n=1 n=1 (2n − 1) π 2 L c

L’expression précédente s’obtient à partir de la méthode de séparation des variables rappelée par La-
lanne et al. [138] par exemple. Les nombres d’ondes kn = πc (2n − 1)/(2L) donnent la pulsation des mo-
dulations temporelles Θn (t) et des variations spatiales de chaque mode ψn (x). Enfin, les constantes ζn sont
déterminées de manière à satisfaire les conditions initiales (3.3).
Il est intéressant de remarquer que le principe d’obtention de la décomposition (3.4) découle d’une sépa-
ration des variables analogue à celle qui a été pratiquée pour rechercher les modes propres au paragraphe
1.4. Les modes ψn seront donc appelés les modes propres du système dynamique, à ne pas confondre avec les
modes POD qui seront construits dans la suite. Les fonctions ψn sont par ailleurs orthonormales entre elles
pour le produit scalaire associé à l’espace de Hilbert H = L2 ([0; L]), d’où la propriété
Z L    
2 kn x km x
hψn , ψm iL2 = sin sin dx = δnm . (3.5)
L 0 c c
La fréquence fondamentale du système, notée T0 , est donnée par la relation
π 4L
T0 = 2 = . (3.6)
k1 c
En pratique seul un nombre limité p de fonctions de base est utilisé pour caractériser la réponse. La série
tronquée représente alors une approximation de la solution analytique.

3.2.1.2 Calcul des modes POD


Le problème aux valeurs propres induit par la décomposition orthogonale propre est formulé au moyen
des solutions analytiques (3.4) de sorte que les clichés {u(m) = u(x, tm ), m = 1, . . . , M } soient des éléments
de l’espace L2 ([0; L]). L’expression analytique (3.4) des clichés s’écrit alors

X
u(m) = ζn(m) ψn (x), (3.7)
n=1
(m)
où ζn = ζn cos(kn tm ) est la modulation temporelle à l’instant tm du mode propre ψn .
La première étape de la construction du modèle d’ordre réduit consiste à rechercher les modes POD
du système au moyen de la méthode directe ou de la méthode des clichés (voir §2.2). Les deux méthodes
étant équivalentes, on décrit simplement le calcul des modes POD au moyen de la méthode des clichés. On
procède de préférence à la décomposition orthogonale propre des clichés centrés s(m) = u(m) − u. Puisque
le système est monovariable, la partie moyenne u est donnée par l’équation (2.71) et le problème aux va-
leurs propres est celui donné à l’équation (2.72). Comme pour les clichés, la partie moyenne u est aussi dé-
composée sur la base des modes propres afin d’introduire les modulations moyennes ζ n qui apparaissent
naturellement dans l’expression
M ∞
! ∞ M
! ∞
X X X X X
(m) (m)
u= αm ζn ψn = αm ζn ψn = ζ n ψn . (3.8)
m=1 n=1 n=1 m=1 n=1

Le terme général ⋆
Rij de l’opérateur de corrélation se simplifie ici au moyen de l’expression analytique
(3.7) des clichés et de la propriété d’orthonormalité (3.5) des modes propres ψn . On obtient alors

√ D E √ X ∞  

Rij = αi αj s(i) , s(j) = αi αj ζn(i) − ζ n ζn(j) − ζ n . (3.9)
n=1

66
3.2. Modèles d’ordre réduit pour les systèmes dynamiques linéaires autonomes

La somme dans l’expression analytique (3.4) est généralement tronquée pour ne conserver que p < ∞
(m) (m)
fonctions de base, ce qui permet d’introduire les vecteurs des clichés ζ (m) = [ζ1 , . . . , ζp ]T et de la partie
moyenne ζ = [ζ 1 , . . . , ζ p ] puis la matrice des clichés centrés S ∈ M (p, M ) dont le terme général est
T
(j)
Sij = ζi − ζ i . L’opérateur de corrélation de la méthode des clichés s’exprime donc au moyen du produit
matriciel
R⋆ = αe T ST S α
e (3.10)
√ √
dans lequel la matrice α e = diag( α1 , . . . , αM ) contient les poids de pondération de l’opérateur de
moyenne. La résolution du problème aux valeurs propres (2.72) fournit les vecteurs propres d(j) à partir
desquels les coefficients c(j) sont déterminés. Les modes POD sont alors obtenus au moyen de la combinai-
son linéaire (2.73). Par ailleurs, la décomposition (3.7) des clichés sur les modes propres fournit l’expression
suivante des modes POD en fonction des modes propres ψn :
!
XM   X M ∞ 
X  X∞ XM  
(j) (j) (m) (j) (m) (j) (m)
ϕ = cm u −u = cm ζn − ζ n ψn = cm ζn − ζ n ψn . (3.11)
m=1 m=1 n=1 n=1 m=1

Par conséquent les modes POD se décomposent analytiquement sur la base des modes propres comme
en témoigne la relation

X M
X  
ϕ(j) = µ(j)
n ψn avec µ(j)
n = c(j)
m ζn
(m)
− ζ n . (3.12)
n=1 m=1
(j)
En définissant µ ∈ M (p, q) la matrice des coefficients µn et C ∈ M (M, q) la matrice des coefficients
(j)
cm , on obtient µ = S C. Une interprétation des liens entre les modes propres et les modes POD a été
proposée par Feeny et Kappagantu [74] et Kerschen et Golinval [129] dans le cas de systèmes linéaires
similaires à celui étudié ici.

3.2.1.3 Construction du modèle d’ordre réduit analytique


La solution du système dynamique est alors approchée par la décomposition
q
X
u(x, t) ≈ u(x) + aj (t)ϕ(j) (x) (3.13)
j=1

qui correspond à l’équation (2.74). L’introduction de cette décomposition dans l’équation (3.1) et la projec-
tion de Galerkin sur le mode POD ϕ(i) avec le produit scalaire associé à l’espace H = L2 ([0; L]) conduit à
l’égalité
*   + *   +
2 Xq 2 Xq
∂  ∂
u(x) + aj (t)ϕ (x), ϕ (x) − c
(j) (i) 2 u(x) + aj (t)ϕ (x), ϕ (x) = 0.
(j) (i)
(3.14)
∂t2 j=1
∂x2 j=1

La partie moyenne u étant indépendante du temps, le terme ∂u/∂t disparaît. Par ailleurs, puisque les
modes POD sont orthonormaux entre eux, le premier produit scalaire se réduit à äi . Le second produit
scalaire devient quant à lui
*   +
2 Xq  2  Xq  2 (j) 
2 ∂  (j)  (i) 2 d u (i) 2 d ϕ (i)
c u(x) + aj (t)ϕ (x) , ϕ (x) = c ,ϕ +c ,ϕ aj (t). (3.15)
∂x2 j=1
dx2 j=1
dx2

Pour terminer, une expression analytique des dérivées secondes est établie pour simplifier les produits
scalaires précédents. En remplaçant la partie moyenne u et le mode POD ϕ(j) par leurs décompositions
respectives (3.8) et (3.12) sur la base des modes propres, on aboutit aux expressions
X∞  2 X∞  2
d2 u kn d2 ϕ(j) kn
= − ζ n ψn et = − µ(j)
n ψn . (3.16)
dx2 n=1
c dx2 n=1
c

67
3. A PPROCHE POD-G ALERKIN POUR LES SYSTÈMES DYNAMIQUES LINÉAIRES NON - AUTONOMES

Ainsi, les produits scalaires entre les dérivées précédentes et le mode POD ϕ(i) se simplifient en intro-
duisant la décomposition (3.12). L’orthonormalité des modes propres est alors mise à profit pour simplifier
(i)
le produit scalaire subsistant : hψn , ϕ(i) i = µn . Finalement, la projection (3.14) devient
∞  2 q ∞  2 !
X kn X X kn
2 (i) 2 (j) (i)
äi = −c ζ n µn − c µn µn aj , (3.17)
n=1
c j=1 n=1
c

et lorsque la série trigonométrique est tronquée, le modèle d’ordre réduit linéaire s’écrit sous la forme
matricielle
ä = La + K (3.18)
en regroupant les amplitudes modales dans le vecteur a. Les opérateurs K ∈ Rq et L ∈ M (q, q) sont alors
définis par    
2 2
K = −c2 µT diag (kn /c) ζ et L = −c2 µT diag (kn /c) µ. (3.19)
Finalement, pour intégrer en temps le modèle d’ordre réduit il faut préciser la condition initiale a0 =
a(t = 0). Celle-ci peut être calculée comme la projection de la condition initiale (3.3), ce qui conduit à
a0 = µT (ζ (0) − ζ) et ȧ0 = ȧ(t = 0) = 0. L’équation matricielle (3.18) complétée par les conditions initiales
a0 et ȧ0 forme donc un problème de Cauchy pour lequel il existe une solution unique.
Cette première formulation du modèle d’ordre réduit repose sur la solution analytique des clichés qui
est exprimée comme une série de modes propres. La décomposition orthogonale propre n’est toutefois pas
complètement équivalente à une décomposition sur la base des modes propres puisque la décomposition
des variables (3.13) est affine. En ce sens, elle ne coïncide pas avec la décomposition (3.4) mais les deux
méthodes ne diffèrent en réalité que par les coefficients qui pondèrent les modes. En effet, la relation (3.12)
indique bien que les modes POD sont une combinaison linéaire des modes propres dans ce cas particulier.
Le lien entre les deux types de décompositions est explicité un peu plus en détail dans l’annexe C.2.

3.2.2 Formulation discrète du modèle d’ordre réduit


Cette seconde formulation repose directement sur les solutions discrètes du système dynamique carac-
térisé par un système d’équations différentielles ordinaires issu de la discrétisation des équations continues
(3.1). Le principe de la méthode est celui exposé au paragraphe 2.4.1 : la décomposition orthogonale propre
est formulée pour les degrés de liberté discrets du système dynamique, de sorte que les modes POD sont
obtenus sous une forme discrète qui peut servir directement pour la projection des équations discrètes du
système.

3.2.2.1 Génération de clichés à partir de la solution Éléments Finis du problème


Dans un premier temps, on donne les équations du système dynamique discrétisé qui forment le mo-
dèle d’ordre élevé à l’aide duquel une base de clichés discrets est générée. Le système continu (3.1) est ici
discrétisé au moyen de la méthode des Éléments Finis afin d’obtenir un système matriciel. Les détails des
étapes menant à la forme du système discrétisé pourront être trouvés dans [83] entre autres.
D’une manière générale, la discrétisation des équations du système dynamique est associée à une par-
tition du domaine de calcul en un nombre fini N d’éléments telle que Ω = ∪N e=1 Ωe . Dans l’exemple traité
ici, on considère que le domaine de calcul Ω = [0; L] est partitionné en N éléments qui correspondent ici à
des segments identiques de longueur constante h = L/N . Le principe de la discrétisation consiste alors à
décomposer la solution continue u sur les N segments au moyen d’une base de fonctions de forme χj (x)
et à rechercher les valeurs des Nv = N + 1 coordonnées généralisées uj = u(xj ) aux extrémités xj de ces
segments. La solution analytique est alors approchée par
Nv
X
u(x, t) ≈ uj (t)χj (x). (3.20)
j=1

À la différence de la décomposition sur la base des modes POD, le nombre Nv de fonctions de base est
en général grand puisque les fonctions choisies pour l’approximation sont universelles : contrairement aux

68
3.2. Modèles d’ordre réduit pour les systèmes dynamiques linéaires autonomes

modes POD, les fonctions considérées ici sont linéaires par morceaux et s’adaptent à n’importe quel type
de réponse du système dynamique, alors que les modes POD sont construits pour une réponse particulière.
Les équations discrètes associées à l’équation continue (3.1) sont obtenues en écrivant une formulation
faible dans laquelle les déplacements virtuels correspondent aux fonctions de forme χj . En ramenant en-
suite les fonctions de forme à un domaine de référence, on obtient le système d’équations discrètes

M ü + K u = 0 (3.21)

qui porte sur les coordonnées généralisées uj regroupées dans le vecteur u = [u1 · · · uNv ]T . Les matrices M
et K sont respectivement les matrices de masse et de rigidité qui appartiennent à M (Nv , Nv ). Elles sont
respectivement définies par
   
1 ··· ··· 0
0 1 −1 0 ··· 0
 ..   .. .. 
0 2 . −1 2 . . 
h  c 2  
M =  ... ..
 ..   .. .. .. 
. . et K =  . . . 0 . (3.22)
2  h 0 
.   . .. 
 .. 2 0  .. . 2 −1
0 ··· ··· 0 1 0 ··· 0 −1 1

Bien que ce ne soit pas l’objet ici, le système (3.21) peut être réduit au moyen d’une décomposition sur
la base des modes propres suivant le principe exposé dans le paragraphe 1.3.1 puisque le problème est
linéaire. La comparaison entre la projection sur la base des modes propres et des modes POD a déjà fait
l’objet de diverses publications et ne sera donc pas effectuée ici. Le lecteur intéressé pourra consulter entre
autres les références suivantes [200, 247].

3.2.2.2 Calcul des modes POD


Le système (3.21) est résolu sur l’intervalle de temps Ie = [t0 ; t0 + Te ] afin de générer un ensemble de
clichés discrets u(m) représentatifs du système. Les clichés correspondent cette fois à des vecteurs de RNv
de sorte que l’ensemble des M clichés est décrit par la matrice des clichés
 
(1) (M)
h i  u 1 · · · u 1
U = u(1) · · · u(M) =  . .. 

 .. .  ∈ M (Nv , M ) . (3.23)
(1) (M)
uNv · · · uNv
(j)
Chaque composante ui de la matrice représente la i-ème coordonnée généralisée du j-ième cliché,
i. e. celle associée à u(xi , tj ). La partie
PM moyenne des clichés u = E[u(m) ] est un vecteur dans lequel chaque
(m)
composante est donnée par ui = m=1 ui . La matrice des clichés centrés S est alors définie en retranchant
la matrice de la partie stationnaire U = u I1,M à la matrice des clichés U :

S = U − U. (3.24)
(j) (j)
Le terme général de la matrice des clichés centrés est donc donné par sij = si = ui − ui . Les modes
POD sont alors calculés comme les solutions du problème aux valeurs propres (2.72) si l’on adopte la mé-
thode des clichés. Le produit scalaire considéré ici est celui de l’espace euclidien RNv à la différence de la
formulation analytique où le produit scalaire était celui associé à l’espace des fonctions de carré intégrable
L2 ([0; L]). Le terme général est donc donné par l’expression

√ D E √
N
X
⋆ (i) (j)
Rij = αi αj s(i) , s(j) = αi αj sl sl . (3.25)
RN v
l=1

Le produit scalaire de RNv s’interprète immédiatement en terme de produit matriciel entre la matrice

des clichés centrés et sa transposée. Les coefficients αi sont introduits en pré- et post-multipliant par la
matrice αe pour rendre l’opérateur symétrique. L’opérateur aux valeurs propres de la formulation discrète

69
3. A PPROCHE POD-G ALERKIN POUR LES SYSTÈMES DYNAMIQUES LINÉAIRES NON - AUTONOMES

est finalement défini par le même produit matriciel que celui donné à l’équation (3.10) pour la formulation
analytique. La seule différence réside dans la définition de la matrice des clichés qui contient ici les coor-
(i)
données généralisées sj résultant de l’approximation Éléments Finis de la solution du système discret.
Les modes POD se décomposent toujours sur l’ensemble des clichés au moyen P de la relation (2.73), mais
(j) (m)
il s’agit cette fois de clichés discrets. Ainsi, la décomposition s’écrit ϕ(j) = Mj=1 c m s et par conséquent
(j) (j)
les modes POD sont décrits au moyen de leurs coordonnées généralisées telles que ϕ(j) = [ϕ1 , . . . , ϕNv ]T .
La décomposition sur les clichés est alors équivalente au produit matriciel
Φ = SC. (3.26)
La base de projection est donc représentée par la matrice Φ = [ϕ(1) , . . . , ϕ(q) ] ∈ M (Nv , q) qui contient
les coordonnées généralisées des modes POD correspondant au formalisme Éléments Finis employé pour
discrétiser l’équation continue du système dynamique.

3.2.2.3 Construction du modèle d’ordre réduit par une approche discrète


La décomposition orthogonale propre fournit une approximation des coordonnées généralisées u. Par
conséquent, la décomposition discrète (2.50) adaptée ici pour des clichés centrés devient
u(t) ≈ u + Φ a(t). (3.27)
La construction du modèle d’ordre réduit détaillée au paragraphe 2.4.1 résulte du remplacement de la
décomposition (3.27) dans l’équation discrétisée (3.21) puis de la pré-multiplication par ΦT qui correspond
à l’étape de projection. Le modèle d’ordre réduit s’écrit donc
Mq ä + Kq a + Fq = 0, (3.28)
T T
où Mq = Φ M Φ est la matrice de masse réduite, Kq = Φ K Φ est la matrice de raideur réduite et Fq =
ΦT K u est le vecteur correspondant à la projection d’un effort statique induit par la partie moyenne u. La
matrice Mq est symétrique, définie positive et par conséquent inversible. De ce fait, le modèle d’ordre réduit
s’écrit exactement sous la même forme (3.18) que celle obtenue avec la solution analytique. Les opérateurs
linéaires et constants sont cependant donnés respectivement par
K = −M−1
q Fq et L = −M−1
q Kq . (3.29)
Enfin les conditions initiales traduites en terme d’amplitudes modales se calculent aussi par projection
de la relation u(t = 0) = u+Φ a(t = 0) sur la base des modes POD, ce qui conduit à : a0 = ΦT (u(t = 0) − u).
Les conditions initiales sur la dérivée des amplitudes restent ici encore nulles, en accord avec (3.3) : ȧ0 = 0.

3.2.3 Formulation POD-Galerkin du modèle d’ordre réduit


La dernière technique employée pour construire le modèle d’ordre réduit découle de la projection de
Galerkin décrite au paragraphe 2.4.3. La projection des équations continues s’effectue au moyen du pro-
duit scalaire associé à l’espace H = L2 ([0; L]) puisqu’on cherche une décomposition des variables conti-
nues similaire à (2.74) lorsque les clichés centrés sont considérés. Toutefois, lorsque les clichés sont calculés
comme les solutions numériques d’un système discrétisé tel que (3.21), seuls les vecteurs des coordonnées
généralisées des clichés u(m) sont connus. Par conséquent les produits scalaires qui apparaissent dans les
expressions (2.57) ou (2.60) du modèle d’ordre réduit doivent être explicités au moyen des quantités dis-
crètes dont on dispose2 .
La manière la plus cohérente d’évaluer les produits scalaires consiste à interpréter les composantes dis-
crètes des clichés comme les coordonnées généralisées intervenant dans l’approximation (3.20) dans le cas
où les clichés ont été générés par un calcul Éléments Finis. Cependant, on emploie ici une technique d’ap-
proximation plus générale qui ne fait pas directement appel au formalisme de discrétisation employé pour
générer les clichés3 .
2 D’après le principe de construction, l’approche a été qualifiée de méthode « hybride » ou « mixte » dans [180, 181] puisque la

projection des équations s’effectue dans un cadre continu mais les quantités discrètes sont ensuite nécessairement manipulées pour
construire le modèle d’ordre réduit.
3 En particulier la méthode peut être employée si les données proviennent d’un dispositif expérimental. Dans ce cas, les compo-

santes des vecteurs des clichés doivent être associées à un maillage de l’espace à définir.

70
3.2. Modèles d’ordre réduit pour les systèmes dynamiques linéaires autonomes

3.2.3.1 Approximation numérique du produit scalaire

Le produit scalaire associé à l’espace H = L2 ([0; L]) défini à l’équation (2.91) implique une intégrale sur
le domaine Ω qu’il est nécessaire d’approcher au moyen des coordonnées généralisées. L’intégrale sur tout
le domaine est donc scindée en une somme d’intégrales portant sur chaque élément de la discrétisation si
bien que le produit scalaire de deux fonctions intégrables f et g définies sur le domaine spatial Ω s’écrit :
Z N Z
X N
X
hf, giL2 (Ω) = f (x) g(x) dx = f (x) g(x) dx ≈ fbe gbe δΩe . (3.30)
Ω e=1 Ωe e=1

Chaque intégrale de la somme est alors approchée par le produit des valeurs moyennes fbe et b ge des fonctions
f et g sur le sous-domaine Ωe , le tout étant multiplié par la mesure de Lebesgue4 δΩe = mes(Ωe ) du sous-
domaine Ωe . Lorsque la valeur moyenne sur l’élément est calculée comme la moyenne arithmétique des
valeurs aux extrémités des éléments, la méthode porte le nom de méthode des trapèzes puisque sur chaque
intervalle, l’intégrale est approchée par l’aire du trapèze délimitant le secteur sous la courbe. L’expression
(3.30) se ramène alors au produit matriciel

hf, giL2 (Ω) ≈ b


fT ∆ g
b (3.31)

en introduisant le vecteur des valeurs moyennes b f = [fb1 , . . . , fbN ]T (resp. g


b) de la fonction f (resp. g) sur
chaque élément et la matrice diagonale ∆ = diag(δΩ1 , . . . , δΩN ) contenant les mesures de Lebesgue de
tous les éléments Ωe .
Le calcul des valeurs moyennes dépend de la discrétisation employée pour générer les clichés, et en
particulier de la localisation des coordonnées généralisées qui peuvent être calculées sur les nœuds des
éléments du maillage ou au contraire au centre des éléments. Si les valeurs des fonctions f et g sont connues
au centre des éléments Ωe , alors on peut considérer qu’il s’agit des valeurs moyennes. Dans le cas contraire,
les valeurs moyennes sont calculées à partir des valeurs connues sur les extrémités des éléments Ωe . Puisque
l’exemple traité est ici unidimensionnel, les valeurs moyennes sont simplement calculées comme la demi-
somme fbi = (fi + fi+1 /2) des valeurs aux nœuds correspondant aux extrémités de chaque élément.
L’approche POD-Galerkin, lorsqu’elle est combinée avec l’utilisation de clichés discrets, nécessite donc
de définir la façon dont le produit scalaire est approché ainsi que la manière dont les valeurs moyennes sont
obtenues.

3.2.3.2 Calcul des modes POD

Les clichés u(m) disponibles proviennent de l’intégration en temps du système (3.21) et sont donc dis-
crets. Toutefois, puisque la décomposition orthogonale propre est formulée dans l’espace H = L2 ([0; L]), le
terme général de l’opérateur de corrélation (2.72) formulé pour les clichés centrés s(m) = u(m) − u doit être
discrétisé au moyen de l’approximation (3.31). Ceci conduit à la relation

√ D E √  T

Rij = αi αj s(i) , s(j) ≈ s(i) ∆ b
αi αj b s(j) , (3.32)
L2

qui est généralisée de sorte que l’opérateur de corrélation s’écrive sous le forme matricielle

R⋆ = α bT ∆ S
eT S bαe. (3.33)

La forme de l’opérateur est légèrement différente de celle obtenue avec les formulations analytique et
discrète. En effet, la matrice des clichés contient cette fois les valeurs moyennes des clichés au centre des
éléments de discrétisation du domaine spatial, et la matrice des mesures de Lebesgue vient pondérer l’opé-
rateur de corrélation. Il est important de mentionner que la symétrie de l’opérateur est préservée puisque
la matrice ∆ est diagonale.
4 La mesure de Lebesgue dépend de la dimension d du domaine spatial Ω ⊂ Rd dans lequel évolue le système. Cette mesure

correspond à une longueur lorsque d = 1, à une surface lorsque d = 2 et enfin à un volume lorsque d = 3.

71
3. A PPROCHE POD-G ALERKIN POUR LES SYSTÈMES DYNAMIQUES LINÉAIRES NON - AUTONOMES

3.2.3.3 Construction du modèle d’ordre réduit par une approche POD-Galerkin


Le modèle d’ordre réduit est construit de la même manière que pour la formulation analytique puisque
dans les deux cas la projection est effectuée à l’aide du produit scalaire associé à H = L2 ([0; L]). L’intro-
duction de la décomposition (3.13) dans l’équation (3.1) et la projection de Galerkin sur le mode POD ϕ(i)
avec le produit scalaire associé à l’espace H = L2 ([0; L]) conduit à l’équation (3.14). Le développement des
produits scalaires donne alors
 2  X q  2 (j) 
2 d u (i) 2 d ϕ (i)
äi = c ,ϕ +c ,ϕ aj . (3.34)
dx2 j=1
dx2

Les produits scalaires sont ensuite approchés au moyen de la relation (3.31) fournie au début de ce
paragraphe. Il suffit pour cela de calculer les dérivées secondes5 des modes POD et de la partie station-
naire puis d’évaluer les valeurs moyennes sur les éléments de discrétisation pour former les vecteurs
dd
2 Φ = [d2 ϕ\
(1) /dx2 , . . . , d2 ϕ\ (q) /dx2 ] et d d 2 u = d2\u/dx2 respectivement. La matrice des valeurs moyennes
des modes POD Φ b = [ϕ d d
(1) , . . . , ϕ(q) ] est aussi formée afin de pouvoir évaluer les opérateurs du modèle

d’ordre réduit. Celui-ci s’écrit donc finalement sous la forme matricielle ä = K e +L


e a, où les opérateurs sont
définis par
 T
Ke = −c2 Φ b ∆ dd 2 u et Le = −c2 Φb ∆ dd2Φ . (3.35)
L’inconvénient de cette formulation est de devoir évaluer les dérivées secondes de la partie stationnaire
et des modes POD, ce qui nécessite d’employer des schémas de dérivation d’ordre élevé. Le problème peut
être aisément contourné en tirant profit de la définition du produit scalaire sur l’espace L2 ([0; L]). En effet,
les produits scalaires de l’expression (3.34) se transforment par le biais d’une intégration par partie en
 2  Z L 2  L Z L
d u (j) d u (j) du (j) du dϕ(j)
2
,ϕ = 2
ϕ dx = ϕ − dx
dx L2 0 dx dx 0 dx dx
| {z 0}
=0
 2 (j)  Z L 2 (j)  (j) L Z L (3.36)
d ϕ (i) d ϕ (i) dϕ (i) dϕ(j) dϕ(i)
,ϕ = ϕ dx = ϕ − dx.
dx2 L2 0 dx2 dx 0 0 dx dx
| {z }
=0

Les termes entre crochets s’annulent puisque les modes POD héritent des conditions aux limites homo-
gènes (3.2) vérifiées par les clichés (voir §2.2.3.4) et par conséquent ϕ(j) (x = 0) = 0 et dϕ(i) (x)/dx|x=L = 0.
De même la partie moyenne se simplifie puisque u est par définition une combinaison linéaire des clichés
si bien que les conditions aux limites homogènes sont aussi satisfaites par u.
Les intégrales subsistant dans les expressions (3.36) correspondent encore à des produits scalaires de
l’espace L2 ([0; L]). Après intégrations par parties, le modèle d’ordre réduit s’écrit donc
  Xq  
du dϕ(i) dϕ(j) dϕ(i)
äi = −c2 , − c2 , aj . (3.37)
dx dx j=1
dx dx

Les produits scalaires sont approchés par la relation (3.31) et on introduit à cet effet la matrice des valeurs
moyennes des dérivées premières des modes POD dΦ c = [dϕ\ \
(1) /dx, . . . , dϕ(q) /dx] et le vecteur des valeurs

moyennes de la dérivée première de la partie moyenne du \ Le système d’équations (3.37) s’écrit


c = du/dx.
donc sous la même forme matricielle (3.18) que celle des formulations précédentes, mais les opérateurs sont
maintenant définis par
 T  T  
K = −c2 dΦ c c et L = −c2 dΦ
∆ du c ∆ dΦc . (3.38)

Enfin la condition initiale pour les amplitudes modales s’obtient par projection de la condition initiale
b T ∆ (b
(3.3) : a0 = Φ b La condition initiale cinématique ȧ0 reste quant à elle toujours nulle.
u(t = 0) − u).
5 Les dérivées sont calculées ici au moyen d’un schéma aux différences centrées.

72
3.2. Modèles d’ordre réduit pour les systèmes dynamiques linéaires autonomes

Remarque 3.1 : Intégration en temps du modèle d’ordre réduit


D’après la remarque effectuée dans la note 1 p.9, les systèmes dynamiques réduits d’ordre deux en temps développés
dans ce paragraphe peuvent être ramenés à des systèmes équivalents dans lesquels seules des dérivées premières en
temps interviennent. Ainsi, le modèle d’ordre réduit (3.18) est transformé en posant y = [a ȧ]T . Le système se
réorganise alors en        
0q,q Iq ȧ L 0q,q a K
= + . (3.39)
Iq 0q,q ä 0q,q Iq ȧ 0q,1
| {z } | {z } | {z }
V W g

La matrice V étant inversible, le système différentiel d’ordre 2 en temps portant initialement sur le vecteur d’in-
connue a ∈ Rq se ramène à un système différentiel d’ordre 1 en temps portant sur le vecteur y ∈ R2q :

ẏ = V−1 W y + V−1 g. (3.40)

Le système (3.40) complété par les conditions initiales y0 = [a0 ȧ0 ]T définit un problème de Cauchy bien posé
puisque le modèle d’ordre réduit nécessite seulement la donnée de conditions initiales. En effet, les conditions aux
limites vérifiées par le modèle d’ordre élevé sont implicitement prises en compte dans la manière de calculer les modes
POD et interviennent par conséquent au travers des valeurs des coefficients du modèle d’ordre réduit6 . L’intégration
en temps du modèle d’ordre réduit peut alors être menée au moyen des méthodes classiques de résolution proposées
dans diverses libraires informatiques. L’intégration en temps est ici réalisée au moyen de la fonction ode de Scilab
qui n’est en réalité qu’une interface vers les librairies ODEPACK [111]. Le solveur lsoda du package ODEPACK est
utilisé par défaut. Il choisit automatiquement entre un schéma d’Adams de type prédicteur-correcteur et un schéma de
type « Backward Differentiation Formula » (méthode de Gear) adapté aux systèmes raides. La résolution débute avec
le schéma d’Adams puis, en fonction de la raideur du problème, le schéma est ensuite choisi dynamiquement au cours
de la résolution .

6 En dehors des conditions aux limites homogènes, les modes POD ne satisfont pas en général les conditions aux limites mais une

combinaison linéaire des conditions aux limites aux instants correspondant aux clichés (voir §2.2.3.4).

73
3. A PPROCHE POD-G ALERKIN POUR LES SYSTÈMES DYNAMIQUES LINÉAIRES NON - AUTONOMES

3.3 Évaluation du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin du système


linéaire autonome
Dans cette section, la formulation POD-Galerkin est comparée aux formulations analytique et discrète
développées dans le paragraphe précédent dans le cas d’une réponse autonome du système à une condition
initiale. Dans un premier temps, les erreurs de reconstruction produites par les différentes formulations sont
comparées, puis on s’intéresse dans un second temps au choix de l’ensemble des clichés servant ensuite au
calcul des modes POD : l’influence de la distribution des clichés, leur quantité ainsi que le nombre de modes
POD retenus dans la base de projection seront en particulier étudiés.

3.3.1 Évaluation du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin


La qualité des réponses produites par les différentes formulations du modèle d’ordre réduit est évaluée
au moyen de plusieurs types d’erreurs. La première d’entre elles est l’erreur relative spatiale de reconstruc-
tion, définie au sens de la norme L2 (Ω) pour des fonctions de carré intégrable par
s
Z L
ku(x, t) − ur (x, t)kL2
εL2 ,u = 100 avec ∀f ∈ L2 ([0; L]) kf (x)kL2 = f (x)2 dx. (3.41)
kur (x, t)kL2 0

L’erreur précédente mesure à tout instant t l’écart relatif entre la solution u(x, t) reconstruite par le modèle
d’ordre réduit et la solution de référence ur (x, t) qui correspond aux clichés aux instants t = tm . En pratique,
les solutions ne sont connues que sous leur forme discrète et par conséquent l’erreur εL2 ,u est évaluée en
approchant les intégrales par la règle du trapèze donnée à l’équation (3.30). La solution analytique (3.4) sera
en général employée comme solution de référence afin de disposer d’une solution à tout instant et en tout
point du domaine.
En complément de cette erreur spatiale, on introduit l’erreur moyenne en temps qui est uniquement
évaluée à l’extrémité x = L de la barre puisque le déplacement y est maximal. Elle est donnée par
v
u T
uX |u(x = L, tj ) − ur (x = L, tj )|2
εrms (x = L) = t . (3.42)
j=1
T

Enfin, la différence entre la matrice de la solution de référence Ur ∈ M (Nv , T ) et la matrice de même


dimension U des solutions produites par le modèle d’ordre réduit en T instants définit l’erreur spatio-
temporelle globale
kU − Ur k∞
ε∞ = . (3.43)
kUr k∞
L’utilisation de la norme infinie permet d’évaluer l’erreur maximale commise parmi les Nv coordonnées
généralisées et les T instants d’intégration en temps.
Les différentes formulations du modèle d’ordre réduit décrites aux paragraphes §3.2.1, §3.2.2 et §3.2.3
sont désignées respectivement par la suite au moyen des abréviations suivantes : POD-A pour la formula-
tion analytique, POD-D pour la formulation discrète et POD-G pour la formulation POD-Galerkin.
Les valeurs propres associées aux modes POD de chaque formulation sont comparées sur le graphique
3.2 au moyen du pourcentage d’énergie ηei capté par chaque valeur propre. Par analogie avec le pourcentage
ηq d’énergie captée par les q premières valeurs propres dont la définition a été donnée à l’équation (2.39), le
pourcentage ηei est
.Xr
ηei = λi λj . (3.44)
j=1

L’allure de la distribution des valeurs propres obtenues avec la formulation analytique reste beaucoup
plus régulière qu’avec les deux autres formulations lorsque l’indice i augmente. Ceci est dû au fait que
l’ensemble des clichés utilisé avec les formulations discrète et de Galerkin provient de la résolution des
équations discrètes (3.21) alors que la formulation analytique repose sur l’expression exacte des clichés (3.4)

74
3.3. Évaluation du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin du système linéaire autonome

qui n’est pas entachée d’erreurs d’approximation. Les spectres obtenus avec les différentes formulations
sont pratiquement confondus jusqu’à la douzième valeur propre au-delà de laquelle une discontinuité dans
le spectre est observée lorsque les clichés proviennent de la simulation numérique.

2
10
POD−A
POD−D
1
10 POD−G

0
10

−1
10

−2
10
ηi

−3
10

−4
10

−5
10

−6
10
2 4 6 8 10 12 14 16 18 20
i

Figure 3.2 : Spectre du pourcentage d’énergie capté par les premières valeurs propres associées aux modes POD calculés au moyen
des formulations POD analytique, discrète et Galerkin.

Les valeurs propres évoluent de manière très similaire avec les formulations discrète et de Galerkin.
La distinction se traduit uniquement par une translation verticale du spectre qui s’explique par le fait que
les opérateurs de corrélation ne différent en réalité que par la métrique qui est employée pour calculer les
produits scalaires (voir les expressions (3.25) et (3.32) du terme général des opérateurs de corrélation des
deux formulations).
Le spectre des valeurs propres décroît rapidement : la première valeur propre capte ηe1 = 98, 6% de
l’énergie du système et le pourcentage d’énergie capté par les cinq premières valeurs propres est ηq =
99, 98%, ce qui signifie que le modèle d’ordre réduit doit pouvoir être construit avec un nombre très restreint
de valeurs propres.
La figure 3.3 donne l’allure des quatre premiers modes POD de la barre calculés au moyen des diffé-
rentes formulations. Quelle que soit la méthode, la ressemblance entre les modes POD et les modes propres
ψn de la barre est flagrante. L’écart entre les modes POD issus de la formulation analytique et ceux produits
par les autres formulations se creuse au fur et à mesure pour les modes d’ordre élevé.
Les réponses produites par les modèles d’ordre réduit construits avec les différentes formulations sont
tracées sur le graphique de la figure 3.4(a). Globalement la réponse est excellente lorsque le modèle d’ordre
réduit est intégré en temps sur une durée d’environ cinq périodes d’oscillation. Toutefois l’étude des er-
reurs spatiales εL2 ,u tracées sur la figure 3.4(b) révèle des comportements sensiblement différents. Ainsi,
les réponses reconstruites avec les formulations analytique et de Galerkin suivent une évolution assez si-
milaire produisant une erreur εL2 ,u caractérisée par une croissance globalement monotone dans le temps.
Au contraire, la formulation discrète produit une erreur qui oscille globalement sur la période de temps
considérée. En simulant sur des durées plus longues, on pourrait vérifier que les formulations analytique
et de Galerkin produisent invariablement une erreur instantanée globalement croissante, alors que l’erreur
associée à la formulation discrète augmente par cycles, la forme étant grossièrement sinusoïdale et crois-
sante.
Enfin le tableau 3.1 fournit les valeurs des erreurs εrms et ε∞ pour chaque formulation lorsque la réponse
est simulée sur cinq ou dix périodes. La formulation analytique se révèle bien être la plus performante pour
reconstituer la réponse du système puisque sur les deux durées simulées, les erreurs rms et infinies sont
minimales. La formulation de Galerkin produit des erreurs légèrement plus importantes que la formula-
tion analytique comme le laissait entrevoir le graphique de l’erreur instantanée 3.4(b). Enfin, la fomulation
discrète apparaît comme la plus « mauvaise » puisque non seulement l’erreur instantanée mais aussi les
erreurs rms et infinies montrent qu’en moyenne la réponse reconstruite est de moins bonne qualité.

75
3. A PPROCHE POD-G ALERKIN POUR LES SYSTÈMES DYNAMIQUES LINÉAIRES NON - AUTONOMES

1
1

0.9
0.8

0.8 0.6

0.7 0.4

0.6 0.2
Φ1 / ||Φ1||∞

Φ2 / ||Φ2||∞
0.5 0

0.4 −0.2

0.3 −0.4

0.2 −0.6

0.1 −0.8

0 −1
0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1 0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1
x/L x/L

(a) Mode 1 (b) Mode 2

1 1

0.8 0.8

0.6 0.6

0.4 0.4

0.2 0.2
Φ3 / ||Φ3||∞

Φ4 / ||Φ4||∞

0 0

−0.2 −0.2

−0.4 −0.4

−0.6 −0.6

−0.8 −0.8

−1 −1
0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1 0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1
x/L x/L

(c) Mode 3 (d) Mode 4

Figure 3.3 : Comparaison des quatre premiers modes POD de la barre calculés avec la formulation analytique (—), la formulation
discrète (—) et la formulation de Galerkin (—). L’allure des modes propres {ψn }4n=1 définis à l’équation (3.4) est donnée à titre de
comparaison (◦).

3
1

0.8
2.5
0.6

0.4
2
εL2 / ||U0|| (%)

0.2
u(x=L)/U0

0 1.5

−0.2
1
−0.4

−0.6
0.5

−0.8

−1 0
0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5 5 0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5 5
t/T0 t/T0

(a) Solution reconstruite (b) Erreur au sens de la norme L2

Figure 3.4 : Comparaison des solutions produites par le modèle d’ordre réduit construit avec q = 5 modes POD avec la formulation
analytique (—), la formulation discrète (—) et la formulation de Galerkin (—). La courbe (—) sur la figure (a) correspond à la
solution de référence calculée avec p = 50 modes propres. Le graphique de droite représente l’erreur au sens de la norme L2 entre
la solution reconstruite avec chaque formulation et la solution de référence.

76
3.3. Évaluation du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin du système linéaire autonome

5 périodes 10 périodes
POD-A POD-D POD-G POD-A POD-D POD-G
εrms 1, 59 2, 74 1, 71 2, 38 3, 22 2, 55
ε∞ 1, 89 3, 74 2, 39 2, 76 4, 44 3, 58

Tableau 3.1 : Comparaison des erreurs produites par les réponses calculées avec les formulations analytique, discrète et de Galerkin
du modèle d’ordre réduit. La réponse est évaluée sur cinq et dix périodes d’oscillation du système.

La comparaison des trois formulations du modèle d’ordre réduit présentées au paragraphe 3.2 a permis
d’évaluer la qualité de la réponse produite par chacune des formulations. La formulation analytique est
sans surprise la plus performante puisque les modes POD sont construits à partir de clichés définis exacte-
ment comme les solutions du système, ce qui assure une bonne régularité du spectre. La réponse produite
par le modèle d’ordre réduit construit avec cette formulation n’engendre que de très faibles erreurs. Toute-
fois, cette formulation n’a que peu d’intérêt en dehors de celui de servir de point de comparaison puisqu’en
pratique les solutions analytiques ne seront jamais disponibles.
Ainsi, il est intéressant de comparer les perfomances des formulations discrète et de Galerkin par rap-
port à l’approche analytique qui constitue le modèle d’ordre réduit de référence. Les modes POD calculés
avec ces deux formulations sont pratiquement confondus puisque les clichés ayant servis à les générer sont
identiques. La seule différence entre les deux méthodes de calcul provient de la métrique employée pour
calculer l’opérateur de corrélation, dont l’influence semble ici peu prononcée. Cependant, la réponse du
modèle d’ordre réduit basé sur la formulation discrète produit des erreurs généralement plus importantes
que celles correspondant à la formulation de Galerkin. Cette dernière apparaît donc comme un bon com-
promis entre les approches analytique et discrète pour l’exemple traité ici. En effet, elle offre la possibilité
d’employer les clichés discrets issus des simulations numériques tout en étant basée sur une formulation
continue du problème qui semble diminuer au final l’erreur de reconstruction.

3.3.2 Choix de la base des clichés et du nombre de modes POD


Dans ce paragraphe, l’influence de quelques paramètres entrant dans la construction du modèle d’ordre
réduit à partir de la base des modes POD est étudiée. On s’intéresse en particulier au nombre M de clichés
employé pour construire l’opérateur de corrélation, ainsi qu’au nombre q de modes POD conservés dans la
base de projection. Un troisième paramètre important noté np correspond au nombre de périodes d’oscilla-
tion du système sur lequel les clichés sont prélevés. L’influence de ce paramètre est analysée dans l’annexe
C.1 pour ne pas surcharger la présentation. Les résultats obtenus indiquent, entre autres, que l’échantillon-
nage doit être pratiqué de préférence avec une valeur np telle que la durée d’échantillonnage ne soit pas un
multiple de période fondamentale du système lorsque l’échantillonnage est uniforme.
Les résultats présentés ont pour la plupart été obtenus avec le modèle d’ordre réduit construit au moyen
de la formulation POD-Galerkin puisqu’il s’agit de la méthode qui sera conservée pour la suite. Néanmoins,
une comparaison des différentes formulations est fournie en conclusion de ce paragraphe.
Dans un premier temps, on étudie la convergence de l’erreur de reconstruction lorsque le nombre M de
clichés employés pour former l’opérateur de corrélation augmente. Le nombre de modes POD conservés
dans la base de projection est constant et égal à q = 5 puisque d’après les résultats du paragraphe précédent
le pourcentage d’énergie captée est déjà ηq = 99, 98%. Les modes POD sont alors calculés pour différentes
valeurs de M variant dans l’intervalle J6; 50K. La borne inférieure est choisie de sorte que la taille du pro-
blème aux valeurs propres à résoudre soit supérieure au nombre q de modes POD choisi pour le modèle
d’ordre réduit7 . La borne supérieure est quant à elle déterminée par le nombre Nv de degrés de liberté du
modèle Éléments Finis correspondant au modèle d’ordre élevé.
La convergence est aussi analysée en fonction du nombre np de périodes sur lequel les clichés sont pré-
levés. Le résultat tracé sur le graphique de la figure 3.5 laisse apparaître une certaine convergence lorsque
le nombre M de clichés augmente pour np fixé. Toutefois des pics d’erreurs localisés pour certaines combi-
naisons critiques de M et np sont observés. Des détails quant à l’origine des pics d’erreurs sont fournis dans
7 Si les clichés ne sont pas linéairement indépendants, le rang de l’opérateur de corrélation chute et le nombre de modes POD dans

la base de projection correspond alors au minimum entre le nombre q de mode POD souhaité et le rang r de la matrice de corrélation.

77
3. A PPROCHE POD-G ALERKIN POUR LES SYSTÈMES DYNAMIQUES LINÉAIRES NON - AUTONOMES

l’annexe C.1. On retrouve en particulier le fait que les principaux pics d’erreur se concentrent le long des
lignes où le rapport M/np est entier. Les erreurs les plus faibles se rencontrent dans la zone correspondant
aux valeurs élevées de M et aux valeurs de np comprises approximativement dans l’intervalle [0, 5; 1, 5].
D’une manière générale, la réponse est de bonne qualité dès qu’une vingtaine de clichés est utilisée, sauf
dans le cas où la valeur de M choisie conduit à une redondance des clichés. Ainsi, lorsque le nombre de
clichés augmente pour np ≈ 1, 0, l’erreur de reconstruction converge assez rapidement vers une valeur
asymptotique qui atteint ε∞ = 2, 39%.

Figure 3.5 : Convergence de l’erreur infinie de reconstruction ε∞ du modèle d’ordre réduit en fonction du nombre M de clichés et
du nombre np de périodes d’échantillonnage. Les tons bleus correspondent à une erreur faible tandis que les tons roses indiquent
les erreurs maximales.

La convergence s’observe aussi au niveau de l’allure des modes POD qui est représentée sur les gra-
phiques de la figure 3.6 pour différentes valeurs de M : plus le nombre de clichés utilisés pour former
l’opérateur de corrélation est grand (de M = 6 en bleu clair à M = 50 en rose), plus la forme des modes
POD se rapproche de celle des modes propres ψn . Le premier mode POD coïncide parfaitement avec le pre-
mier mode propre du système, et ce, même pour de très faibles valeurs du nombre de clichés. Cependant, le
nombre de clichés nécessaire pour capter correctement les modes d’ordre plus élevé augmente rapidement.
Ainsi avec M < 20 clichés, le troisième et le quatrième mode sont fortement écrêtés.
Ce phénomène de convergence des modes POD vers les modes propres correspond bien à la situation
décrite dans [74, 129] à condition que le système étudié soit linéaire, autonome et que la matrice de masse
du système soit proportionnelle à l’identité. Ces conditions sont bien réunies ici8 et la convergence vers les
modes propres est effectivement constatée. Quelques éléments d’explication de la convergence des modes
POD vers les modes propres pour le système considéré ici sont fournis dans l’annexe C.2.
Le dernier paramètre fondamental dans la construction du modèle d’ordre réduit est le nombre q modes
POD conservés dans la base de projection. La réponse du modèle d’ordre réduit est alors évaluée lorsque
le nombre q de modes est compris dans l’intervalle J2; 15K. Il est inutile de considérer plus de modes POD
puisque le temps de calcul augmente rapidement sans que la réponse ne soit améliorée de manière signi-
ficative. La valeur de np est choisie en accord avec les résultats précédents où il a été mis en évidence que
pour np ≈ 1, la convergence était optimale. L’allure de la distribution de l’erreur infinie ε∞ obtenue avec
les paramètres précédents est alors représentée sur le graphique de la figure 3.7 en fonction du nombre de
modes POD ainsi que du nombre de clichés.
Le nombre de modes POD a été volontairement tronqué au-dessus d’une certaine limite matérialisée
par la ligne noire puisque celui-ci est limité par le rang de la matrice de corrélation qui est lui-même assu-
jetti au nombre de clichés ayant servi pour construire l’opérateur de corrélation par la méthode des clichés :
q ≤ r ≤ M . Le nombre maximal de modes POD disponible9 est alors q = M − 1 et lorsque le modèle d’ordre
8 En éliminant dans la matrice de masse (3.22) les termes correspondants aux conditions aux limites.
9 Le rang chute d’une unité si l’opérateur de corrélation est formulé pour les clichés centrés où la partie moyenne a été soustraite.

78
3.3. Évaluation du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin du système linéaire autonome

1 1

0.9 0.8

0.8 0.6

0.7 0.4

Φ2 / ||Φ2||∞
0.6 0.2
Φ1 / ||Φ1||∞

0.5 0

0.4 −0.2

0.3 −0.4

0.2 −0.6

0.1 −0.8

0 −1
0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1 0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1
x/L x/L

(a) Mode POD 1 (b) Mode POD 2

1 1

0.8 0.8

0.6 0.6

0.4 0.4
Φ3 / ||Φ3||∞

Φ4 / ||Φ4||∞
0.2 0.2

0 0

−0.2 −0.2

−0.4 −0.4

−0.6 −0.6

−0.8 −0.8

−1 −1
0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1 0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1
x/L x/L

(c) Mode POD 3 (d) Mode POD 4

Figure 3.6 : Convergence des quatre premiers modes POD de la barre calculés pour np ≈ 1 lorsque le nombre de clichés augmente.
: M = 6, : M = 10, : M = 20, : M = 30, : M = 50. L’allure des modes propres de la
barre est donnée à titre de comparaison par les cercles (◦).

20

15

10
ε∞

5
5
0
0 10
15

5 20
25

q 10 30 M
35

15 40

Figure 3.7 : Convergence de l’erreur infinie de reconstruction ε∞ du modèle d’ordre réduit en fonction du nombre M de clichés et
du nombre q de modes POD conservés dans la base de projection POD.

79
3. A PPROCHE POD-G ALERKIN POUR LES SYSTÈMES DYNAMIQUES LINÉAIRES NON - AUTONOMES

réduit doit être construit pour M < q, le nombre de modes dans la base de projection n’est en réalité que de
M − 1.
Le graphique de la figure 3.7 met en évidence la convergence de l’erreur vers une valeur asymptotique
lorsque M et q augmentent. En considérant un nombre q de modes POD fixé, la courbe de l’erreur présente
un léger minimum local qui se situe vers M = 13. De la même façon, pour un nombre M de clichés donné,
l’erreur décroît fortement, passe par un minimum local situé vers q = 4 — pour M ≥ 15, sinon la position
du minimum est plus variable — puis se stabilise vers une valeur asymptotique. Le minimum global atteint
pour (q, M ) ∈ J1; 15K × J2; 50 K est situé pour M = 13 et q = 9, l’erreur atteignant alors ε∞ = 1, 23%.
Le tracé de l’erreur en fonction du nombre de modes POD a permis de vérifier que le modèle d’ordre
réduit converge globalement vers une erreur asymptotique résiduelle qui ne décroît plus au delà d’un cer-
tain d’un nombre de modes POD conservés dans la base de projection. Cependant, la convergence n’est pas
strictement monotone et l’existence de minima locaux a pu être mise en évidence. Par ailleurs, l’exemple
traité ici montre que pour un M donné le minimum de l’erreur est atteint rapidement pour de petites va-
leurs de q — typiquement q = 4 pour M ≥ 15 — et qu’il n’est donc pas nécessaire de conserver beaucoup
de modes dans la base de projection. Ces résultats corroborent les remarques de Rowley [192] qui affirmait
qu’augmenter le nombre de modes POD au-delà d’une certaine limite n’améliore pas nécessairement le
résultat. Park et Kim [175] ont par ailleurs expliqué ce phénomène par les erreurs d’arrondis commises sur
les modes POD associés à des valeurs propres de plus en plus faibles.

5
POD−A
4.5 POD−D
POD−G
4

3.5
ε∞

2.5

1.5
2 4 6 8 10 12 14
q

Figure 3.8 : Comparaison de la convergence de l’erreur infinie de reconstruction ε∞ des différentes formulations du modèle d’ordre
réduit en fonction du nombre q de modes POD conservés dans la base de projection.

Pour terminer, on compare sur la figure 3.8 la convergence de l’erreur infinie de reconstruction pro-
duite avec les différentes formulations du modèle d’ordre réduit. Seul le nombre de modes POD q retenus
dans le modèle d’ordre réduit est modifié ; le nombre de clichés utilisés pour former les modes POD est
constant et égal à M = 25. On vérifie alors que la formulation analytique présente bien le meilleur com-
portement en terme de convergence puisque l’erreur de reconstruction affiche une décroissance quasiment
monotone et converge rapidement vers une valeur symptotique proche de ε∞ = 1, 7%. Les autres for-
mulations convergent de façon plus irrégulière. Ainsi, l’erreur de la formulation discrète se stabilise sur
l’intervalle q = J4; 10K à une valeur assez élevée ε∞ ≈ 3, 7% sans diminuer significativement lorsque q
augmente. Enfin, l’erreur produite par la formulation POD-Galerkin évolue aussi de manière irrégulière
puisque quelques pics localisés apparaissent — notamment pour q = 8. Dans l’ensemble, l’erreur de re-
construction varie autour de ε∞ = 2, 5% ce qui en fait un bon compromis entre les formulations analytique
et discrète malgré les irrégularités observées.

80
3.3. Évaluation du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin du système linéaire autonome

Dans ce paragraphe, les formulations analytiques, discrète et de Galerkin ont été dans un premier temps
comparées entre elles. L’objectif était de vérifier que les erreurs produites par les formulations discrète et de
Galerkin présentaient des niveaux équivalents à celui de la formulation analytique. Les résultats obtenus
ont par ailleurs montré que la formulation de Galerkin était plus performante que la formulation discrète,
ce qui peut s’expliquer par le fait que la formulation est basée sur les équations continues du système. Dans
un second temps, l’influence de trois paramètres de construction du modèle d’ordre réduit a été étudiée. Le
nombre np de période semble devoir être choisi de façon à éviter les redondances dans les clichés qui appa-
raissent lorsque la réponse du système est périodique. Par ailleurs, le nombre de modes POD et de clichés
ne doit pas nécessairement être élevé. Le choix du nombre de cliché est dicté en partie par le pourcentage
d’énergie capté ηq mais une analyse de la convergence de l’erreur de reconstruction s’avère plus efficace
pour déterminer les valeurs adéquates. Les résultats obtenus avec la formulation POD-Galerkin sont en-
courageants et valident son utilisation pour les développements ultérieurs.

81
3. A PPROCHE POD-G ALERKIN POUR LES SYSTÈMES DYNAMIQUES LINÉAIRES NON - AUTONOMES

3.4 Développement de modèles d’ordre réduit basés sur la POD pour


les systèmes dynamiques linéaires non-autonomes
Dans le paragraphe 3.2, plusieurs formulations du modèle d’ordre réduit ont été développées pour un
système autonome dans lequel la sollicitation provenait simplement de la condition initiale appliquée sur
l’extrémité libre de la barre. La comparaison des différentes formulations a permis de contrôler que la pro-
jection de Galerkin était adaptée et on se concentre donc à présent sur l’étude avec cette formulation de la
réponse du même système rendu non-autonome par l’introduction d’une sollicitation instationnaire. L’ob-
jectif est de parvenir à construire un modèle d’ordre réduit dans lequel les effets de la condition limite
imposée interviennent explicitement afin de pouvoir à l’avenir modifier les paramètres de la condition li-
mite directement dans le modèle d’ordre réduit.
La sollicitation imposée sur l’extrémité libre de la barre porte soit sur les déplacements, soit sur la dé-
rivée des déplacements par rapport à la normale externe au domaine. On parlera alors respectivement de
condition limite de Dirichlet et de Neumann non-homogènes. La condition limite en x = L donnée à l’équa-
tion (3.2) est donc modifiée par des conditions aux limites du type (2.41).
Les conditions aux limites de type Neumann sont facilement prises en compte dans le modèle d’ordre
réduit avec la formulation POD-Galerkin. En effet, le produit scalaire de H = L2 ([0; L]) fait intervenir une
intégrale à l’aide de laquelle une intégration par parties peut être pratiquée pour introduire explicitement
la condition limite dans les équations du modèle d’ordre réduit. La projection des équations (3.1) sur les
modes POD conduit à l’expression (3.34) du modèle d’ordre réduit avec la formulation POD-Galerkin. Ce-
pendant, seuls les termes correspondant à l’encastrement en x = 0 s’annulent dans les produits scalaires
(3.36) tandis que les termes du bord libre en x = L subsistent. Après simplification, les équations du modèle
d’ordre réduit satisfont alors l’égalité
Xq    
dϕ(j) dϕ(i) du dϕ(i)
äi = −c2 , a j − c2 ,
j=1
dx dx dx dx
  (3.45)
Xq
(j)

dϕ du
+c 2 aj +  (i)
ϕ (x = L).
j=1
dx x=L dx x=L

Or la condition limite de Neumann donnée sous forme générale à l’équation (2.41) s’écrit
q
∂u du X dϕ(j)
= γN (t) ⇐⇒ + aj (t) = γN (t) (3.46)
∂x x=L dx x=L j=1 dx x=L

pour le déplacement u sur le bord ∂ΩN qui correspond ici au point x = L. Ainsi, le terme supplémentaire
qui subsiste dans l’équation (3.45) s’interprète directement comme la condition de Neumann (3.46) décom-
posée sur la base des modes POD. La projection des équations donne alors
Xq    
2 dϕ(j) dϕ(j) 2 du dϕ(i)
äi = −c , aj − c , + c2 γN (t) ϕ(i) (x = L). (3.47)
j=1
dx dx dx dx

Le modèle d’ordre réduit s’écrit donc comme un système d’équations différentielles ordinaires linéaires
non-autonomes dans lequel apparaît un terme source instationnaire supplémentaire qui décrit l’action de
la condition limite imposée sur l’extrémité libre. Le système matriciel s’écrit sous la forme synthétique

ä = La + K + S(t), (3.48)

dans laquelle les coefficients des opérateurs sont définis par les relations suivantes :
Xq    
2 dϕ(j) dϕ(i) 2 du dϕ(i)
Lij = −c , , Ki = −c , et Si (t) = −c2 γN (t) ϕ(i) (x = L). (3.49)
j=1
dx dx dx dx

Les produits scalaires sont alors évalués selon le principe exposé au paragraphe 3.2.3.1 et les opérateurs
constant et linéaire sont donc définis par les relations (3.38) lorsque les produits scalaires sont approchés.

82
3.4. Modèles d’ordre réduit pour les systèmes dynamiques linéaires non-autonomes

La prise en compte de conditions aux limites de type Dirichlet est plus délicate à mettre en œuvre
puisque les déplacements ne peuvent être directement introduits dans les équations du modèle d’ordre
réduit au moyen d’intégrations par parties10 . On peut alors s’inspirer de méthodes issues des techniques
Éléments Finis pour tenir compte d’une telle condition limite et recourir ainsi à la méthode des pénalités ou
à la méthode des multiplicateurs de Lagrange qui sont par exemple décrites dans [26, 253]. Une troisième
solution, inspirée des méthodes de relèvement statique, présente quelques similarités avec les méthodes de
synthèse modale [53, 230]. On décrit dans les paragraphes suivants ces trois techniques.
La condition limite de Dirichlet écrite de manière très générale à l’équation (2.41) prend ici la forme
suivante : u(x = L, t) = γD (t). Il est important de mentionner que les modes POD ne satisfont pas exacte-
ment les conditions aux limites puisque celles-ci ne sont pas homogènes. La relation vérifiée dans ce cas est
donnée au paragraphe 2.2.3.4.

3.4.1 Adaptation de la méthode des pénalités au modèle d’ordre réduit


Dans le cadre d’une discrétisation Éléments Finis, les facteurs de pénalités peuvent être introduits di-
rectement dans le système matriciel sur les lignes correspondant aux degrés de liberté contraints par la
condition limite. Toutefois, le modèle d’ordre réduit est formulé pour les amplitudes modales où la notion
de déplacement est absente. Une première manière de procéder est d’introduire dans l’équation continue
un opérateur de pondération local défini à partir d’une distribution de Dirac qui permet de tenir compte
de la condition limite de Dirichlet. Cependant la construction du modèle d’ordre réduit devient difficile à
justifier rigoureusement puisqu’il est nécessaire de recourir aux notions de la théorie des distributions. Par
conséquent, on préfère ici une seconde approche décrite par Zienkiewicz et Morgan [253], qui consiste à
remplacer artificiellement la condition limite de Dirichlet u(x = L, t) = γD (t) par une condition limite de
Neumann γN (t) approchée. La condition est alors relaxée au moyen de la relation

∂u uL(t) − γD (t)
= γN (t) = − . (3.50)
∂x x=L ǫp

Dans l’expression précédente, uL représente l’inconnue en déplacement sur l’extrémité libre en x =


L qui doit coïncider avec le déplacement imposé γD (t) à tout instant. Lorsque le facteur ǫp > 0 est très
faible, la condition de Neumann précédente se réduit à la limite à la condition de Dirichlet souhaitée. On
définit alors un facteur de pénalité fp = c2 /ǫp dont la valeur doit être élevée pour que la condition limite
soit approximativement vérifiée. Puisque la condition limite de Dirichlet a été ramenée à une condition
limite de Neumann, il est possible de l’introduire dans les équations du modèle d’ordre réduit au moyen
d’une intégration par parties comme on l’a décrit au début de cette section. L’équation (3.47) s’écrit alors en
fonction de la condition limite de Dirichlet relaxée au moyen de l’expression (3.50) :

Xq    
2 dϕ(j) dϕ(j) 2 du dϕ(i)
äi = −c , aj − c , + fp (uL (t) − γD (t)) ϕ(i) (x = L). (3.51)
j=1
dx dx dx dx

Finalement, le déplacement uL est décomposé


Pq sur la base des modes POD puisqu’il s’agit d’un élément
(j) (j)
de l’ensemble des clichés : uL (t) = uL + j=1 aj (t) ϕL avec ϕL = ϕ(j) (x = L). L’introduction de cette
décomposition dans l’équation (3.51), conduit à l’expression

Xq     Xq
2 dϕ(j) dϕ(j) 2 du dϕ(i) (i) (i) (j) (i)
äi = −c , aj − c , + fp uL ϕL + fp ϕL ϕL aj − fp γD (t) ϕL . (3.52)
j=1
dx dx dx dx j=1

Le modèle d’ordre réduit s’écrit donc sous la même forme matricielle (3.48) que celle obtenue pour la
prise en compte de la condition limite de Neumann, mais on précise ici par l’indice MP que les opérateurs
découlent de la méthode des pénalités pour une condition limite de Dirichlet. En introduisant le vecteur
(1) (q)
ϕL = [ϕL , . . . , ϕL ]T ∈ Rq , les opérateurs sont alors définis par les relations
10 Il est possible d’introduire les conditions aux limites de Dirichlet dans le modèle d’ordre réduit en pratiquant deux intégrations

par parties successives, mais dans ce cas il devient nécessaire d’évaluer des dérivées secondes. Les essais menés avec cette technique
ont toutefois conduit à un modèle d’ordre réduit dont la réponse diverge à chaque fois.

83
3. A PPROCHE POD-G ALERKIN POUR LES SYSTÈMES DYNAMIQUES LINÉAIRES NON - AUTONOMES

LMP = L + Lp avec Lp = fp ϕL ⊗ ϕL ,
KMP = K + Kp avec Kp = fp uL ϕL , (3.53)
S MP (t) = −fp γD (t) ϕL .

Les opérateurs L et K sont ceux définis à l’équation (3.49) et sont cette fois complétés par les opérateurs
Lp et Kp qui représentent l’action du terme de pénalité. Enfin le terme source S MP est directement lié à la
condition limite de Dirichlet qui peut donc être modifiée dans le modèle d’ordre réduit.
La méthode a été employée par Tang et al. [226] qui l’ont comparée à la méthode des fonctions de
contrôle présentée dans le paragraphe 3.4.3. Sirisup et Karniadakis [215] ont aussi employé un facteur de
pénalité pour imposer une condition limite non-homogène et ont remarqué que la détermination du facteur
de pénalité adéquat n’est pas évidente. La meilleure valeur à prendre pour le modèle d’ordre réduit était
dans leur cas relativement faible, ce qui laisse penser que la condition limite n’est qu’approximativement
vérifiée.

3.4.2 Adaptation de la méthode des multiplicateurs de Lagrange au modèle d’ordre


réduit
Le principe de la méthode consiste cette fois à adjoindre à l’équation continue du système (3.1) une
inconnue supplémentaire notée Rγ (t) qui représente la force de réaction produite sur l’extrémité libre par
le déplacement imposé u(x = L, t) = γD (t). Le problème à résoudre est donc transformé en
 2 2
 ∂ u − c2 ∂ u = Rγ (x, t)

2 ∂x2
∂t . (3.54)


u(x = L, t) = γD (t)

La première équation est projetée sur chacun des modes POD suivantPq la méthode de Galerkin après
avoir utilisé la décomposition maintenant habituelle u(x, t) = u(x) + j=1 aj (t)ϕ(j) (x). De manière ana-
logue, la seconde équation est aussi décomposée sur la base des modes POD afin d’obtenir le système
 q  2 (j)   2  D E
 X d ϕ d u (i)

 äi = c 2
, ϕ(i)
a + c 2
, ϕ + R (x, t), ϕ(i)

 dx2
j
dx2
γ
j=1
q . (3.55)

 X
 aj (t)ϕ(j) (x = L) = γD (t)
 u(x = L) +

j=1

La première ligne du système correspond encore à la forme (3.48) du modèle d’ordre réduit dans laquelle
les opérateurs constant et linéaire — notés ici respectivement KMML et LMML pour indiquer qu’il s’agit de la
méthode des multiplicateurs de Lagrange — correspondent aux opérateur K e et L
e définis à l’équation (3.35).
Le terme source S MML est quant à lui défini par la projection de la réaction sur les modes POD.
La réaction Rγ est produite par le déplacement imposé en x = L, et de ce fait, il est possible de considérer
qu’il s’agit d’une force localisée en ce point. Ceci se traduit formellement à l’aide d’une distribution de Dirac
par Rγ (x, t) = rL (t) δ(x − L). Par conséquent les composantes du terme source sont transformées en
D E Z L
(i)
SMML,i (t) = Rγ (x, t), ϕ(i) = rL (t) δ(x − L) ϕ(i) (x) dx = rL (t) ϕL . (3.56)
0

En utilisant le vecteur ϕL introduit avec la méthode des pénalités dans le paragraphe précédent, le terme
source s’écrit alors
S MML (t) = rL (t) ϕL . (3.57)
Enfin la seconde ligne du système (3.55) se récrit uL + ϕTL a = γD (t), de sorte que le système (3.55) se met
sous la forme matricielle
       
Iq 0q,1 ä LMML ϕL a KMML
= + . (3.58)
01,q 0 r̈L ϕT 0 rL uL − γD (t)
84
3.4. Modèles d’ordre réduit pour les systèmes dynamiques linéaires non-autonomes

Le problème est donc ramené à un système matriciel de la forme I ea


ë = LeMML e
a+K e MML qui porte sur le
vecteur d’inconnues e a = [a rL ] . Contrairement aux modèles d’ordre réduit construits jusqu’ici, l’intégra-
T

tion en temps doit être menée avec un schéma de Newmark [26] par exemple puisque la matrice I e n’est pas
inversible. Par conséquent il n’est pas possible de mettre le système (3.58) sous la forme générique (3.40)
résolue habituellement avec les routines du code ODEPACK.

3.4.3 Méthode de la fonction de contrôle


Au lieu de considérer le déplacement imposé comme une contrainte supplémentaire que doit vérifier
le modèle d’ordre réduit, l’expression (3.13) de la décomposition orthogonale propre de la variable est
modifiée par l’ajout d’un terme supplémentaire correspondant à la sollicitation γD (t) imposée au sysème.
Le principe consiste alors à décomposer la solution du système dynamique en deux parties telles que la
première contribution uh corresponde à la solution satisfaisant des conditions aux limites homogènes tandis
que la seconde contribution uγ représente l’effet de la sollicitation qui vérifie les conditions aux limites non-
homogènes. La solution du système dynamique est donc recherchée sous la forme u = uh + uγ avec en
particulier uh (x = L) = 0 et uγ (x = L) = γD (t).
La décomposition orthogonale propre est alors appliquée à la partie homogène uh . Les modes POD
sont calculés à partir de l’opérateur de corrélation construit pour des clichés centrés rendus artificiellement
(m) (m) (j)
homogènes, notés ici sh = uh − uh . Les modes POD ϕh ainsi obtenus sont homogènes puisqu’ils
(m)
héritent des conditions aux limites homogènes satisfaites par lesP clichés centrés sh selon la relation (2.40).
q (j)
La partie homogène uh se décompose alors en uh (x, t) = uh (x)+ j=1 aj (t) ϕh (x) qui est l’homologue de la
décomposition (3.13). Pour faciliter le développement du modèle d’ordre réduit, il est judicieux d’effectuer
une décomposition espace-temps de la contribution non-homogène telle que uγ (x, t) = γD (t) uc (x) où uc
est la fonction éponyme de la méthode. La nouvelle décomposition de la variable u prend donc la forme
 q
 X
 u (x, t) = u (x) + (j)
aj (t) ϕh (x)
h h
u(x, t) = uh (x, t) + uγ (x, t) avec . (3.59)

 j=1
uγ (x, t) = γD (t) uc (x)

La décomposition (3.59) nécessite de définir l’expression de la fonction de contrôle uc . Le choix est


relativement vaste puisque la seule contrainte est que le déplacement à l’extrémité libre coïncide avec la
condition limite imposée : uγ (x = L, t) = γD (t). Combinée avec la décomposition uγ (x, t) = γD (t) uc (x), la
contrainte se résume à uc (x = L) = 1 et la forme de uc est a priori quelconque sur l’intervalle ]0; L[. Le choix
le plus simple consiste à prendre une distribution de Dirac, nulle partout sauf à l’extrémité libre. Toutefois
ce choix n’est certainement pas optimal puisqu’il n’y a aucun lien avec l’équation résolue et, qui plus est,
il s’agit d’une distribution qu’il n’est pas toujours simple de manipuler rigoureusement. Un autre choix
plus élégant pour la fonction de contrôle consiste à prendre la solution du problème statique en réponse à
un déplacement unitaire imposé. Les expressions des fonctions de contrôle données ci-dessous lorsqu’on
considère une distribution de Dirac et la solution statique établie dans la note 1 p.65 sont respectivement
x
uc (x) = δ(x − L) et uc (x) = . (3.60)
L

La nouvelle décomposition (3.59) de la variable u est alors remplacée dans l’équation continue (3.1). La
projection sur la base des modes POD conduit alors à

q
* (j)
+  2 
X d2 ϕh (i) d uh (i)
2 2
äi = c , ϕ h a j + c , ϕ h
dx2 dx2
j=1
 2  (3.61)
d uc (i) d2 γD (t) D (i)
E
+c2 γD (t) , ϕ h − u c , ϕ h
dx2 dt2

et le modèle d’ordre réduit conserve donc la même forme générique (3.48), mais les coefficients sont cette
fois définis par les expressions

85
3. A PPROCHE POD-G ALERKIN POUR LES SYSTÈMES DYNAMIQUES LINÉAIRES NON - AUTONOMES

q
* +
X 2 (j)
d ϕ h (i)
LMFC,ij = c2 2
, ϕh ,
dx
j=12 
d uh (i) (3.62)
KMFC,i = c2 ,ϕ ,
dx2 h 
2
2
d uc (i) d2 γD (t) D (i)
E
SMFC,i = c γD (t) , ϕ − u c , ϕ .
dx2 h dt2 h

Les opérateurs linéaire et constant sont les mêmes que ceux donnés à l’équation (3.35), à la différence
près qu’ils sont cette fois définis pour les modes POD et la partie moyenne homogènes. Le terme source
nécessite quant à lui d’évaluer la dérivée seconde de la fonction de contrôle, ce qui est délicat lorsqu’une
distribution de Dirac est choisie.
La méthode des fonctions de contrôle tire son nom de son application dans le domaine du contrôle actif
pour tenir compte des conditions d’injection ou d’aspiration d’air sur un profil par exemple. La méthode
a en particulier été adoptée par Park et Kim [175], Ravindran [185], Tang et al. [226], Vigo [240] ou encore
Cordier et Bergmann [49]. Gunzburger et al. [101] ont par ailleurs développé et comparé plusieurs mé-
thodes pour tenir compte de conditions aux limites non-homogènes dans le modèle d’ordre réduit lorsque
le nombre de paramètres devient important. En effet, la méthode des fonctions de contrôle n’a été présentée
ici que pour un seul degré de liberté dans la condition limite et son extension à un nombre important de
degrés de liberté n’est pas immédiate.

86
3.5. Évaluation du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin du système linéaire non-autonome

3.5 Évaluation du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin du système


linéaire non-autonome
La formulation POD-Galerkin qui avait été évaluée dans le cas du système autonome au paragraphe
3.3 est à présent mise en œuvre dans le cas d’un système rendu non-autonome en imposant une condition
limite de Dirichlet non-homogène. Les différentes techniques développées dans la section 3.4 pour tenir
compte de ce type de condition limite dans le modèle d’ordre réduit basé sur la formulation POD-Galerkin
sont alors confrontées et comparées notamment en terme d’erreur de reconstruction. On insiste dans un
premier temps sur la forme des modes POD et sur les conditions aux limites qu’ils vérifient.

3.5.1 Aspect des modes POD non-homogènes et homogénéisés


Les clichés u(m) calculés comme les solutions du système dynamique non réduit vérifient la condition
limite de Dirichlet non-homogène au niveau du déplacement imposé. Parmi les techniques présentées dans
la section précédente, la méthode des pénalités et la méthode des multiplicateurs de Lagrange reposent sur
des modes POD non-homogènes qui ont été calculés à partir des clichés centrés non-homogènes s(m) =
u(m) − u. La méthode des fonctions de contrôle se distingue quant à elle par le fait que les modes POD sont
(m) (m)
calculés pour les clichés centrés sh = uh − uh rendus homogènes en soustrayant à chaque instant tm la
(m)
partie non-homogène de sorte que uh = u(m) − uγ (x, tm ).
L’allure des différents modes POD — non-homogènes et rendus homogènes au moyen des fonctions
de contrôle (3.60) — est représentée sur les graphiques de la figure 3.9. Dans un premier temps les modes
POD ϕ(j) calculés à partir des clichés non-homogènes peuvent être comparés à ceux calculés à partir de
la réponse du système autonome où les clichés vérifiaient des conditions aux limites homogènes. On avait
observé sur la figure 3.3 que les modes POD convergeaient dans ce cas vers les modes propres de la barre
encastrée-libre. Des différences assez légères sont constatées ici, en particulier au niveau de l’extrémité libre
puisque les modes POD ne satisfont plus la condition homogène dϕ(i) /dx|x=L = 0 mais une condition
(j)
du type (2.42). Les modes POD ϕh rendus homogènes avec la distribution de Dirac uc (x) = δ(x − L) sont
identiques aux modes POD non-homogènes, sauf pour le point x = L où ils s’annulent. Les modes arborent
donc clairement une allure discontinue.
(j)
Au contraire, lorsque les modes POD ϕh sont rendus homogènes à l’aide de la solution statique du
problème uc (x) = x/L, ils deviennent continus sur l’intervalle [0; L]. Par ailleurs, on peut remarquer que
ces modes correspondent aux modes propres de la barre encastrée aux deux extrémités comme le confirment
les graphiques de la figure 3.9. La méthode des fonctions de contrôle présente alors certaines similarités avec
la méthode de synthèse modale décrite par Craig et Bampton [53] puisque les modes POD homogénéisés
sont le pendant des modes propres encastrés.
La figure 3.10 représente les valeurs propres associées aux modes POD homogénéisés avec différentes
fonctions de contrôle. Le spectre conserve une allure proche de celui obtenu lorsque les modes POD sont
calculés à partir des clichés homogènes analytiques de la réponse du système autonome. Cependant on
remarque que lorsque les clichés sont rendus homogènes avec la solution statique, le spectre décroît de
façon moins prononcée, ce qui signifie que la réponse du système est plus complexe.

3.5.2 Réponse du modèle d’ordre réduit non-autonome


Les modèles d’ordre réduit basés sur les différentes techniques développées au paragraphe 3.4 pour
tenir compte de la condition limite sont à présent mis à l’épreuve afin d’évaluer la qualité de la réponse
reconstruite pour différents paramètres de l’excitation. Celle-ci est supposée être gouvernée par la loi sinu-
soïdale
γD (t) = Ue sin (2 πfe t), (3.63)
où Ue représente l’amplitude maximale des oscillations et fe est la fréquence d’excitation.
La figure 3.11 présente les réponses reconstruites avec q = 5 modes POD à l’aide du modèle d’ordre
réduit basé sur la méthode des fonctions de contrôle dans laquelle la solution du problème statique est
employée pour homogénéiser les clichés. Les réponses tracées sur la figure 3.11 correspondent au déplace-
ment du point central de la barre en x = L/2 puisque la réponse du point à l’extrémité est imposée et son

87
3. A PPROCHE POD-G ALERKIN POUR LES SYSTÈMES DYNAMIQUES LINÉAIRES NON - AUTONOMES

1 1
0.9 0.8
0.8 0.6
0.7 0.4
Φ1 / ||Φ1||∞

0.6

Φ2 / ||Φ2||∞
0.2
0.5 0
0.4 −0.2
0.3 −0.4

0.2 −0.6

0.1 −0.8

0 −1
0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1 0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1
x/L x/L

(a) Mode 1 (b) Mode 2

1 1

0.8 0.8

0.6 0.6

0.4 0.4
Φ3 / ||Φ3||∞

Φ4 / ||Φ4||∞
0.2 0.2

0 0

−0.2 −0.2

−0.4 −0.4

−0.6 −0.6

−0.8 −0.8

−1 −1
0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1 0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1
x/L x/L

(c) Mode 3 (d) Mode 4

Figure 3.9 : Comparaison des quatre premiers modes POD de la barre avec un déplacement imposée à l’extrémité libre. Les courbes
(—) correspondent aux modes POD calculés à partir des clichés rendus homogènes à l’aide d’un Dirac uc (x) = δ(x − L),
tandis que les courbes (—) représentent les modes obtenus avec des clichés homogénéisés avec la solution statique du problème
uc (x) = x/L. Les premiers sont quasiment identiques aux modes POD non-homogènes (•) calculés avec un déplacement imposé
à l’extrémité libre, alors que les seconds coïncident avec les modes propres ψnEE = sin (nπ/L x) de la barre encastrée aux deux
extrémités (◦).

2
10

1
10

0
10

−1
10

−2
10
ηi

−3
10

−4
10

−5
10

−6
10
0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20
i

Figure 3.10 : Comparaison du spectre des valeurs propres pour différentes fonctions de contrôle : les carrés () correspondent aux
valeurs propres associées aux modes POD rendus homogènes avec un Dirac et les triangles (△) à celles associées aux modes POD
rendus homogènes avec la solution statique du problème. Les cercles (◦) correspondent quant à eux aux valeurs propres associées
aux modes POD calculés à partir des clichés homogènes analytiques de la réponse du système autonome.

88
3.5. Évaluation du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin du système linéaire non-autonome

évolution ne présente donc aucun intérêt. Pour les trois réponses, les modes POD utilisés ont été calculés
à partir de clichés issus de la résolution du problème pour une sollicitation γD caractérisée par fe = 150
et Ue = 0, 01. Les modes obtenus permettent alors de reconstruire presque parfaitement les réponses pour
d’autres jeux de paramètres, tels que (fe ; Ue ) = (200; 0, 05) ou (fe ; Ue ) = (325; 0, 2).
−3
x 10
8
0.04 0.2

6
0.03 0.15

4
0.02 0.1

2
0.01 0.05
u(x=L/2)/L

u(x=L/2)/L

u(x=L/2)/L
0
0 0

−2
−0.01 −0.05

−4 −0.02 −0.1

−6 −0.03 −0.15

−8 −0.04 −0.2
0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5 5 0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5 5 0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5 5
t fe t fe t fe

(a) (fe ; Ue ) = (150; 0, 01) (b) (fe ; Ue ) = (200; 0, 05) (c) (fe ; Ue ) = (325; 0, 2)

Figure 3.11 : Comparaison de la réponse reconstruite par le modèle d’ordre réduit avec différents déplacements imposés à l’extrémité
de la barre. Les courbes (—) correspondent à la réponse reconstruite alors que les cercles (◦) indiquent les valeurs de la solution de
référence.

L’allure de la réponse obtenue avec les autres techniques n’est pas tracée puisque qu’elle est sensible-
ment identique. Pour comparer la qualité de la réponse obtenue avec les différentes techniques, il est plus
judicieux de tracer en fonction du temps l’erreur de reconstruction εL2 ,u évaluée au sens de la norme L2
par rapport à la solution de référence. Celle-ci est donc évaluée pour le modèle d’ordre réduit utilisant la
méthode de la fonction de contrôle (MFC) avec un Dirac ou la solution du problème statique, ainsi que pour
la méthode des pénalités (MP) et la méthode des multiplicateurs de Lagrange (MML). Le résultat est tracé
sur la figure 3.12 pour les trois jeux de paramètres considérés précédemment. À première vue, il ressort
que l’erreur augmente en fonction du temps, quelle que soit la formulation employée. Cet accroissement
de l’erreur varie néanmoins selon la technique adoptée pour tenir compte de la condition limite dans le
modèle d’ordre réduit. L’erreur la plus faible est toujours commise lorsque la solution est reconstruite pour
le même jeu de paramètres que celui employé pour générer la base de projection et l’écart avec la solution
de référence augmente d’autant plus que les paramètres utilisés pour la reconstruction s’écartent de ceux
employés pour calculer les clichés.

2 2.5 3.5
MP MP MP
1.8 MML MML MML
MFC avec uc(x)=δ(x−L) MFC avec uc(x)=δ(x−L) 3 MFC avec uc(x)=δ(x−L)
1.6 MFC avec uc(x)=x/L 2 MFC avec uc(x)=x/L MFC avec uc(x)=x/L

1.4 2.5

1.2 1.5
2
εL2,u (%)

εL2,u (%)

εL2,u (%)

1.5
0.8 1

0.6 1

0.4 0.5
0.5
0.2

0 0 0
0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5 5 0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5 5 0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5 5
t fe t fe t fe

(a) (fe ; Ue ) = (150; 0, 01) (b) (fe ; Ue ) = (200; 0, 05) (c) (fe ; Ue ) = (325; 0, 2)

Figure 3.12 : Comparaison de l’erreur εL2 ,u de reconstruction engendrée par les réponses reconstruites par le modèle d’ordre réduit
dans lequel la condition limite est prise en compte par différentes techniques.

Dans l’exemple traité ici, il apparaît que la méthode des fonctions de contrôle utilisant la solution du
problème statique fournit les meilleurs résultats : l’erreur de reconstruction est globalement plus faible
et augmente moins rapidement qu’avec les autres formulations. Au contraire, lorsque cette formulation

89
3. A PPROCHE POD-G ALERKIN POUR LES SYSTÈMES DYNAMIQUES LINÉAIRES NON - AUTONOMES

est employée avec un Dirac pour assurer le rôle de la fonction de contrôle, l’erreur augmente considéra-
blement. Ceci peut s’expliquer simplement par le fait que les modes POD homogénéisés avec la solution
statique possèdent une forme continue régulière qui se prête bien aux opérations de dérivation et d’intégra-
tion numériques nécessaires pour construire le modèle d’ordre réduit. Entre ces deux extrêmes se situent la
méthode des pénalités et la méthode des multiplicateurs de Lagrange dont les performances sont à peu près
équivalentes. Le dernier jeu de paramètres laisse apparaître une légère différence entre ces deux méthodes
en faveur de la méthode des pénalités.
La figure 3.13(a) résume l’évolution de l’erreur infinie de reconstruction ε∞ calculée pour les différents
jeux de paramètres avec les trois techniques de prise en compte de la condition limite de Dirichlet. L’er-
reur est calculée sur cinq périodes d’oscillations forcées avec des modèles d’ordre réduit utilisant q = 5
modes POD dans la base de projection. L’évolution observée confirme celle des graphiques de la figure 3.12
puisque la méthode des fonctions de contrôle reste la plus efficace lorsque la solution statique est employée
pour homogénéiser les clichés, tandis que l’emploi du Dirac fournit les résultats les moins bons.

4 4
CFM with uc(x) = δ(x−L)
CFM with uc(x) = x/L
MP
3.5 MML
PM
3.5 MFC avec uc(x)=δ(x−L)
LMM MFC avec uc(x)=x/L
3
3
2.5
2.5
ε∞ (%)

2
ε∞

2
1.5

1 1.5

0.5 1

0
(150,0.01) (200,0.05) (325,0.20) 0.5
2 4 6 8 10 12 14 16 18 20
(fe,Ue) q

(a) (b)

Figure 3.13 : Le graphique de la figure (a) représente l’évolution de l’erreur infinie ε∞ calculée avec les différentes techniques
de prise en compte des conditions aux limites pour chaque jeu de paramètres (fe ; Ue ). Le graphique (b) donne pour (fe ; Ue ) =
(150; 0, 01) la convergence de l’erreur infinie de reconstruction ε∞ en fonction du nombre de modes POD pour les différents
modèles d’ordre réduit avec déplacement imposé.

Pour terminer, il est important de contrôler que chaque technique respecte bien la propriété de conver-
gence de l’erreur de reconstruction lorsque le nombre q de modes POD retenus dans la base modale aug-
mente. Le graphique 3.13(b) présente pour chaque formulation les courbes de convergence pour q = J3; 20K.
En dehors de la méthode des pénalités qui présente un comportement irrégulier, l’erreur de reconstruction
converge de manière monotone vers une valeur asymptotique lorsque le nombre de modes POD devient
grand. Ces résultats peuvent s’expliquer par le fait qu’avec la méthode des pénalités, la condition limite
n’est pas exactement vérifiée mais est d’autant mieux approchée que le facteur de pénalité est grand11 . Le
graphique permet de confirmer le fait que la méthode des fonctions de contrôle dans laquelle la solution du
problème statique est employée est la plus performante, tant au niveau de la valeur de l’erreur asympto-
tique que de la rapidité avec laquelle elle est atteinte. Lorsqu’un Dirac est employé à la place de la solution
statique, la technique devient satisfaisante seulement lorsque le nombre de modes POD est élevé. Les er-
reurs relevées sur le graphique de la figure 3.13(a) pour q = 5 modes POD avaient conduit à la conclusion
que cette formulation était la moins performante, mais en réalité elle peut atteindre le même degré de pré-
cision qu’avec la solution statique. Enfin, la méthode des multiplicateurs de Lagrange produit une erreur
intermédiaire.
Un dernier point important concerne le type de réponse pouvant être reconstruit en fonction de la nature
des modes POD employés. La question se pose en effet de savoir si il est possible — dans le cas d’un dé-
placement imposé sur l’extrémité de la barre — d’employer une base de projection dans laquelle les modes
11 En pratique cela n’est pas toujours vrai et la détermination du facteur de pénalité adéquat est un problème difficile sur lequel se

sont penchés Sirisup et Karniadakis [215].

90
3.5. Évaluation du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin du système linéaire non-autonome

POD ont été calculés avec des clichés solutions du problème autonome par exemple, ou encore des clichés
solutions d’un problème avec une condition limite non-homogène de type Neumann au lieu de Dirichlet.
Ceci devient problématique lorsqu’il s’agit de travailler avec la méthode des fonctions de contrôle
puisque les modes POD doivent être homogénéisés afin d’être compatibles avec le modèle d’ordre réduit.
Supposons par exemple que les modes POD soient calculés avec les clichés provenant du système non-
autonome avec une condition limite non-homogène de Neumann imposée à l’extrémité. Il s’agit alors de
déterminer l’expression du terme de forçage uγ (x, t) = γD (t) uc (x) qui convient pour homogénéiser les
modes, sachant que la modulation temporelle γD (t) est inconnue puisque le déplacement de l’extrémité est
gouverné par une condition limite de Neumann. Par ailleurs, si les modes POD sont calculés à partir des
clichés du système autonome, ils sont déjà homogènes et dans ce cas la décomposition (3.59) ne peut être
employée puisque le terme de forçage est absent.
−3
x 10
2.5
0.8

0.6
2

0.4

0.2 1.5

EL2
u/Ue

1
−0.2

−0.4
0.5

−0.6

−0.8 0
0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5 5 0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5 5
t/te t/te

(a) Utilisation des modes POD du système autonome


−4
x 10
3
0.8

0.6 2.5

0.4
2
0.2
EL2
u/Ue

0 1.5

−0.2
1

−0.4

0.5
−0.6

−0.8 0
0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5 5 0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5 5
t/te t/te

(b) Utilisation des modes POD du système non-autonome vérifiant une condition limite de Neumann

Figure 3.14 : Reconstruction de la solution pour (fe ; Ue ) = (150; 0, 01) à l’aide des modes POD de diverse nature : les graphiques
de la figure (a) donnent la réponse et l’erreur commise lorsque les modes POD sont calculés à partir des clichés du système
autonome ; sur la figure (b) les modes POD sont calculés avec les clichés du système non-autonome satisfaisant une condition
limite non-homogène de Neumann. Dans les deux cas, la réponse de référence (◦) est comparée à celle obtenue avec la méthode des
multiplicateurs de Lagrange (—). Sur les graphiques d’erreur à droite, la courbe (—) correspond à la méthode des multiplicateurs
de Lagrange tandis que la méthode des pénalités est représentée par (—).

En revanche, ces difficultés disparaissent avec la méthode des pénalités et la méthode des multiplica-
teurs de Lagrange puisqu’il n’existe pas d’étape d’homogénéisation des modes. Les graphiques de la figure
3.14 présentent la réponse obtenue avec ces techniques ainsi que l’évolution de l’erreur de reconstruction
εL2 ,u lorsque le modèle d’ordre réduit est construit avec les modes POD du système autonome ou du sys-
tème non-autonome avec une condition limite non-homogène de Neumann imposée sur l’extrémité libre.
On peut vérifier que l’utilisation des modes POD du système autonome permet certes de retrouver l’allure
globale de la réponse, mais l’erreur devient visible. L’erreur infinie ε∞ stagne autour de 20%, et ceci quel que
soit le nombre de modes POD q employé. Au contraire, lorsque les modes POD du système non-autonome

91
3. A PPROCHE POD-G ALERKIN POUR LES SYSTÈMES DYNAMIQUES LINÉAIRES NON - AUTONOMES

avec une force imposée sont utilisés, la réponse est en bon accord avec celle attendue et l’erreur de recons-
truction reste satisfaisante : ainsi, la méthode des pénalités (respectivement la méthode des multiplicateurs
de Lagrange) produit une erreur infinie ε∞ = 1, 46% (resp. ε∞ = 1, 62%) avec ce type de modes POD alors
qu’elle s’élevait à 1, 69% (resp. 1, 57%) avec les modes POD calculés à partir de clichés issus de la réponse
du système non-autonome avec la condition limite de Dirichlet. Ces résultats s’expliquent simplement par
le fait que les modes POD calculés avec les clichés satisfaisant la condition limite de Neumann vérifient
aussi une condition limite non-homogène à l’extrémité libre, ce qui n’est pas le cas lorsque les modes sont
ceux du système autonome.
En conclusion de cette section, il s’avère que la méthode de la fonction de contrôle est la plus perfor-
mante en terme d’erreur de reconstruction lorsque la fonction de contrôle uc est correctement choisie. La
solution statique du problème avec une condition limite de Dirichlet unitaire paraît être un bon candidat
pour homogénéiser les clichés à partir desquels les modes POD sont calculés. De leur côté, la méthode
des pénalités et la méthode des multiplicateurs de Lagrange produisent une erreur de reconstruction lé-
gèrement plus importante, mais sont plus flexibles lorsqu’ils s’agit de construire un modèle d’ordre réduit
avec des modes POD calculés à partir de clichés issus de réponses de nature diverse — telle que celle du
système autonome ou du système non-autonome avec une condition limite non-homogène de Neumann
par exemple. La méthode des multiplicateurs de Lagrange semble toutefois plus robuste puisque la conver-
gence de l’erreur de reconstruction lorsque le nombre de modes POD augmente a pu être vérifiée. Une des
limitations majeures de la méthode des pénalités provient du fait que la condition limite n’est pas exac-
tement vérifiée, ce qui explique certainement pourquoi l’erreur asymptotique est plus élevée qu’avec les
autres méthodes.

92
3.6. Synthèse du chapitre 3

3.6 Synthèse du chapitre 3


Dans ce chapitre, nous nous sommes intéressés dans un premier temps au développement d’un modèle
d’ordre réduit pour un système linéaire autonome. Le choix volontaire d’un système extrêmement simple a
permis de développer puis de comparer trois formulations du modèle d’ordre réduit qui s’appuient respec-
tivement sur l’existence d’une solution analytique pour la première d’entre elles, sur les équations discré-
tisées du système pour la formulation dite discrète et enfin sur les équations continues pour la formulation
dite POD-Galerkin. Ces deux dernières formulations qui avaient été présentées au paragraphe 2.4 ont donc
pu être comparées au modèle d’ordre réduit de référence construit à partir de la solution analytique et les
résultats ont conduit à la conclusion que la formulation POD-Galerkin était particulièrement bien adaptée
pour reproduire la réponse d’un tel système dynamique. La supériorité de la méthode par rapport à l’ap-
proche discrète peut être attribuée au fait que la formulation repose sur les équations continues du système
dynamique.
Des résultats intéressants sur l’influence des paramètres de construction du modèle d’ordre réduit
ont par ailleurs pu être établis et la convergence de l’erreur de reconstruction a été étudiée en fonction
du nombre de modes POD conservés dans la base de projection. Par ailleurs, des résultats complémen-
taires concernant l’échantillonnage des clichés pour une réponse périodique et des remarques relatives à la
convergence des modes POD vers les modes propres pour ce type particulier de système dynamique ont
été ajoutés dans l’annexe C.
Dans un second temps, la formulation POD-Galerkin a été étendue pour reproduire la réponse du
même système dynamique rendu non-autonome par l’introduction d’une condition limite de Dirichlet non-
homogène. Trois techniques ont donc été développées pour prendre en compte explicitement ce type de
condition limite dans le modèle d’ordre réduit. La méthode des pénalités et celle des multiplicateurs de
Lagrange qui dérivent directement de techniques employées pour traiter ce type de condition limite dans
les problèmes discrétisés par Éléments Finis ont été adaptées au modèle d’ordre réduit avec la formulation
POD-Galerkin. Une troisième méthode qui présente certaines similarités avec les méthodes de relèvement
statique et appelée ici méthode des fonctions de contrôle consiste à effectuer une décomposition orthogo-
nale propre de clichés qui ont été au préalable homogénéisés par ladite fonction de contrôle.
Les comparaisons de ces trois techniques ont permis de conclure que la méthode des fonctions de
contrôle était la plus efficace en terme d’erreur de reconstruction et de convergence lorsque le nombre
de modes POD conservés dans la base de projection augmente. Ceci nécessite toutefois d’employer une
fonction de contrôle adéquate, telle que la solution du problème statique par exemple. La méthode des
multiplicateurs de Lagrange fournit des résultats intermédiaires alors que la méthode des pénalités semble
souffrir du fait que la condition limite est seulement approchée et que le choix du facteur de pénalité peut
être délicat. Ces deux formulations sont néanmoins plus souples lorsqu’il s’agit de construire un modèle
d’ordre réduit avec des modes POD construits à partir de clichés issus d’un autre type de réponse.
Au vu des résultats obtenus dans ce chapitre, la formulation POD-Galerkin semble être un bon candidat
pour le développement futur de modèles d’ordre réduit non-linéaires. La formulation, qui n’a été employée
ici que dans le cas d’un système monovariable, est donc étendue dans la deuxième partie de ce manuscrit
au cas d’un système dynamique non-linéaire multivariables qui gouverne le comportement aérodynamique
d’un fluide compressible.

93
Deuxième partie

Développement de modèles d’ordre


réduit non-linéaires pour l’aéroélasticité

95
Chapitre 4
Détermination des équations du fluide en vue de
la construction d’un modèle d’ordre réduit
POD-Galerkin

Sommaire
4.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98
4.2 Modélisation d’un fluide compressible visqueux avec les variables conservatives . . . . . 99
4.2.1 Détermination des hypothèses relatives au modèle fluide . . . . . . . . . . . . . . . . 99
4.2.2 Caractérisation d’un fluide newtonien homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100
4.2.2.1 Descriptions cinématiques du fluide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100
4.2.2.2 Bilans de conservation des grandeurs physiques . . . . . . . . . . . . . . . . 102
4.2.2.3 Loi de comportement du fluide et équation d’état . . . . . . . . . . . . . . . 104
4.2.3 Équations de Navier-Stokes en formulation ALE avec les variables conservatives . . . 105
4.2.3.1 Expression des équations dans le repère absolu . . . . . . . . . . . . . . . . . 105
4.2.3.2 Expression des équations dans le repère entraîné . . . . . . . . . . . . . . . . 106
4.3 Problématique de l’aéroélasticité et méthodologie de résolution . . . . . . . . . . . . . . . . 108
4.3.1 Principe de l’aéroélasticité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108
4.3.2 Formulations du problème de couplage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109
4.3.2.1 Approche monolithique vs approche couplée . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109
4.3.2.2 Couplage fort vs couplage faible . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110
4.3.3 Définition du problème aéroélastique général . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110
4.4 Modélisation du fluide avec les variables primitives modifiées . . . . . . . . . . . . . . . . 114
4.4.1 Variables aérodynamiques pour l’obtention d’un système quadratique . . . . . . . . . 114
4.4.2 Définition du produit scalaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115
4.4.3 Équations de Navier-Stokes en formulation ALE avec les variables primitives modifiées117
4.4.3.1 Formulation dans le repère absolu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 117
4.4.3.2 Formulation dans le repère entraîné . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 117
4.5 Synthèse du chapitre 4 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120

97
4. M ODÉLISATION DU FLUIDE EN VUE DE LA CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT

4.1 Introduction
Dans la partie précédente, le modèle d’ordre réduit d’un système dynamique linéaire a été développé
au moyen de diverses formulations afin de révéler le potentiel de la formulation POD-Galerkin. D’après
les remarques effectuées au paragraphe 2.4.3, cette formulation s’impose comme le meilleur choix lorsqu’il
s’agit de construire un modèle d’ordre réduit dans lequel les non-linéarités sont préservées. L’objectif, dans
cette seconde partie, est donc de parvenir à construire le modèle d’ordre réduit d’un système aérodyna-
mique non-linéaire pour les écoulements instationnaires d’un fluide compressible visqueux.
Ce premier chapitre constitue une étape préliminaire pour la construction d’un tel modèle d’ordre
réduit. Le but est d’établir les équations continues qui serviront à modéliser le comportement non-
linéaire d’un fluide compressible visqueux impliqué dans un problème de couplage fluide-structure. Pour
cela, les équations du fluide sont présentées dans un premier temps sous la forme d’équations conservatives
habituellement employées dans les codes de calcul pour la résolution numérique. Plusieurs formulations
des équations sont données afin de tenir compte du mouvement d’une structure immergée dans le fluide,
en se plaçant dans un repère absolu ou entraîné. La formulation des équations dans ce dernier cas se justifie
en particulier lorsque le système est animé d’un mouvement de corps rigide, tel que la rotation des sys-
tèmes aubagés dans les turbomachines. Le problème aéroélastique est ensuite défini de manière générale et
le principe du couplage est explicité.
Les équations du fluide écrites à l’aide des variables conservatives sont cependant inadaptées pour la
construction d’un modèle d’ordre réduit avec l’approche POD-Galerkin puisque le système dynamique
présente des non-linéarités qui ne sont pas polynomiales. La reformulation des équations locales du fluide
avec les variables primitives modifiées est un moyen judicieux de ramener le système dynamique sous la forme
souhaitée qui se prête bien à la construction du modèle d’ordre réduit. Les équations du fluide écrites avec
les variables primitives modifiées dans un repère absolu et entraîné sont alors établies et constitueront dans
les chapitres suivants les équations continues de base pour la projection de Galerkin.

98
4.2. Modélisation d’un fluide compressible visqueux avec les variables conservatives

4.2 Modélisation d’un fluide compressible visqueux avec les variables


conservatives
4.2.1 Détermination des hypothèses relatives au modèle fluide
L’objectif de cette thèse est de parvenir à construire un modèle d’ordre réduit capable de reproduire les
écoulements aérodynamiques au sein des turbomachines. Les équations continues du système dynamique
qui serviront pour la projection de Galerkin doivent donc nécessairement avoir été développées pour être en
mesure de reproduire le maximum de phénomènes impliqués dans la réponse du fluide1 . On rappelle dans
ce premier paragraphe les principaux types de phénomènes qui caractérisent la réponse de l’écoulement. À
partir de là, les hypothèses relatives aux principaux phénomènes sont conservées pour établir les équations
continues. Même si ces hypothèses proviennent de l’analyse des phénomènes relatifs aux turbomachines,
les équations employées restent très générales comme on le verra par la suite et les modèles d’ordre réduit
pourront donc être employés pour reproduire des réponses de nature assez diverse.

Figure 4.1 : Schématisation des principaux phénomènes aérodynamiques au sein des turbomachines (d’après W.D. Mc Nally,
Review of experimental work on transonic flow in turbomachinery, 1977).

L’écoulement au sein d’une turbomachine est particulièrement complexe en raison de la géométrie des
pièces mécaniques composant le système, du mouvement relatif des différents éléments les uns par rapport
aux autres et des conditions de fonctionnement extrêmes. La lecture du AGARD Manual vol.1 [3], du
rapport de la NASA de Verdon et al. [237], des chapitres 8 et 9 de l’ouvrage de Dowell et al. [58] ou encore
de l’article de Marshall et Imregun [161] fournira un aperçu assez exhaustif des principales caractéristiques
de l’écoulement qui sont résumées sur le schéma de la figure 4.1. Ici, on retiendra en particulier les aspects
suivants de l’écoulement :

• Présence de chocs : sur l’ensemble de la plage de fonctionnement d’une turbomachine, l’écoulement


évolue du régime subsonique vers le supersonique, en passant par un régime transsonique. Le
fluide est par conséquent compressible et des zones de discontinuité correspondant à des chocs dont
la position peut osciller apparaissent.
• Écoulement séparé : dans certaines plages de fonctionnement, les couches de fluide se séparent
et donnent éventuellement naissance à des détachements de vortex dans le sillage des profils. Le
caractère visqueux du fluide à l’origine de la séparation a une influence significative sur l’amortisse-
ment aérodynamique du système — et donc sur la limite de stabilité — ou encore sur la fréquence
d’oscillation des ondes de choc en régime transsonique [97].

1 Dans l’idéal, le modèle d’ordre élevé employé pour générer les clichés doit vérifier (au moins) les mêmes hypothèses.

99
4. M ODÉLISATION DU FLUIDE EN VUE DE LA CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT

• Écoulement turbulent : au vu des conditions opérationnelles, le nombre de Reynolds qui traduit le


caractère turbulent de l’écoulement est en général très élevé. La modélisation de la turbulence est
un enjeu fondamental puisqu’elle conditionne la précision de la reproduction des effets visqueux.
• Interactions stator/rotor : l’écoulement arrivant sur les aubes d’un stator dans une turbomachine à
plusieurs étages est fortement influencé par la proximité de l’étage amont. Trois types d’interactions
peuvent être mis en évidence : une interaction sillage-rotor provoquée par le sillage des aubes de
l’étage amont [84], une interaction potentielle-rotor due au champ potentiel de l’écoulement des
étages amont et aval, et enfin une interaction provoquée par les retours de pression fluctuante.
• Décrochage en rotation : un dernier phénomène mentionné ici est le décrochage en rotation — ou en
propagation — qui correspond à un écoulement circonférentiel asymétrique dans les compresseurs
axiaux. Il se manifeste par une ou plusieurs régions tournant autour de l’axe du compresseur avec
une vitesse d’écoulement faible voire inversée. La formation des structures caractéristiques de ce
type de décrochage a été étudiée notamment dans [96, 174].

Outre les phénomènes mentionnés ci-dessus, il faut signaler l’influence des effets tridimensionnels tels
que les effets de bords étudiés par exemple par Bell et He [27] et analysés expérimentalement par Yu et
Liu [250]. Enfin, les non-linéarités de l’écoulement sont à l’origine de phénomènes tels que l’apparition de
cycles limites d’oscillation qui sont particulièrement importants dans le régime transsonique [40, 58, 133].
Les modèles physiques du fluide les plus élaborés sont capables de reproduire la plupart des phéno-
mènes décrits ci-dessus, même si la modélisation des effets turbulents, entres autres, reste difficile. L’objectif
étant ici de construire un modèle d’ordre réduit, il ne s’agit pas de reproduire l’ensemble des phénomènes,
mais seulement les principaux à partir desquels une estimation correcte de la fréquence et de l’amortis-
sement des efforts aérodynamiques peut être obtenue. On se restreint donc à l’étude d’un seul étage et
même d’un seul secteur d’une roue aubagée de turbomachine, de sorte que les phénomènes d’interaction
stator/rotor ou le décrochage en rotation ne sont pas considérés. Par ailleurs, puisque la modélisation de
la turbulence reste un enjeu d’actualité, on négligera en première approximation ces effets. En conclusion,
le modèle fluide devra être construit de façon à ce que le caractère non-linéaire, visqueux, compressible et
éventuellement tridimensionnel de l’écoulement puisse être reproduit.

4.2.2 Caractérisation d’un fluide newtonien homogène


4.2.2.1 Descriptions cinématiques du fluide

On considère un domaine spatial Ω ⊂ Rd de frontière ∂Ω et de normale n dirigée vers l’extérieur, dans


lequel le fluide est décrit sur l’intervalle de temps de simulation I = [t0 ; t0 + tf ]. L’approche lagrangienne
fournit la description cinématique d’une quantité physique associée à une certaine quantité de matière
contenue un domaine ΩM tel que ΩM (t0 ) = Ω. Si les particules parcourent de longues distances sur l’in-
tervalle de temps considéré, la description lagrangienne n’est pas adaptée puisque le domaine ΩM (t) se
déplace et se déforme considérablement pour continuer à suivre la quantité de matière considérée à l’ins-
tant initial. Un autre point de vue consiste à considérer un domaine de contrôle ΩC invariable au cours
du temps et sur lequel on suit l’évolution d’une quantité physique qui est cette fois associée à un certain
domaine spatial. Cette description dite eulérienne est en particulier adaptée lorsqu’il s’agit d’étudier le com-
portement du fluide dans une certaine région confinée de l’espace.
Cependant, lorsqu’une structure mobile et/ou déformable est placée dans l’écoulement, une partie de la
frontière ∂Ω n’est plus invariante au cours du temps si bien qu’il n’est plus possible de définir un domaine
spatial ΩC indépendant du temps qui couvre l’ensemble du domaine d’intérêt. La solution consiste alors à
introduire un domaine arbitraire noté ΩA tel que la portion de frontière fixe coïncide avec une description
eulérienne, tandis que la portion de l’interface mobile entre le fluide et la structure suit le mouvement la-
grangien de la structure. Les points à l’intérieur du domaine sont alors disposés de manière arbitraire, d’où
le nom de description Arbitrairement Lagrangienne-Eulérienne, communément abrégée en ALE. Une brève
présentation des différentes descriptions est fournie ci-dessous. Pour plus de détails, le lecteur pourra se
reporter à [57] par exemple.

100
4.2. Modélisation d’un fluide compressible visqueux avec les variables conservatives

ΩM (X, t) ΩC (x)

ψ Φ
ΩA (χ, t)

Figure 4.2 : Représentation du domaine matériel ΩM (X , t) de la description lagrangienne, du domaine de contrôle ΩC (x) de la
description eulérienne et du domaine arbitraire ΩA (χ, t) de la description ALE. Les trois domaines sont reliés entre eux par les
applications φ, ψ et Φ.

On introduit pour commencer les coordonnées matérielles X associées au domaine matériel ΩM (X, t)
de la description lagrangienne, ainsi que les coordonnées spatiales x correspondant quant à elles au do-
maine de contrôle ΩC (x) de la description eulérienne. Par analogie, on introduit finalement les coordonnées
arbitraires χ associées au domaine arbitraire ΩA (χ, t) de la description ALE. Les trois domaines sont reliés
entre eux au moyen des applications φ, ψ et Φ. La figure 4.2 représente schématiquement les trois domaines
et indique les relations définies par les applications précédentes.
Le lien entre les coordonnées matérielles X et les coordonnées spatiales x est décrit par l’application

φ : ΩM × I −→ ΩC × I
(4.1)
(X, t) 7−→ φ(X, t) = (x, t),

qui définit la loi de mouvement x = x(X, t) à partir de laquelle on introduit la vitesse matérielle — ou
vitesse lagrangienne — notée

∂x
u(X, t) = . (4.2)
∂t X
La vitesse précédente est donc celle de la particule X qu’on suit dans son mouvement. La vitesse eulérienne
est quant à elle notée simplement
u = u (x, t) (4.3)
et correspond à la vitesse en un point x de l’espace. Les équations décrivant le comportement du fluide
découlent de lois de bilans formulées sur le domaine Ω et détaillent l’évolution au cours du temps de
différentes quantités physiques. Il est donc nécessaire d’établir une relation entre la dérivée temporelle dans
le domaine ΩM d’une quantité physique notée f (X, t) et la dérivée dans le domaine spatial ΩC de la même
quantité physique notée f (x, t). Les règles de composition des fonctions permettent d’écrire f (X, t) =
f (x, t) ◦ φ(X, t) et la dérivation par rapport au temps de la relation précédente donne

∂f (X, t) ∂f (x, t)
= + u(x, t) · ∇x f (x, t). (4.4)
∂t X ∂t x

L’expression ci-dessus fait apparaître l’opérateur ∇ introduit à l’équation (D.13) et qui permet ici de
définir le gradient ∇x f (x, t) de la fonction par rapport au système de coordonnées x. La dérivée temporelle

101
4. M ODÉLISATION DU FLUIDE EN VUE DE LA CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT

∂ · /∂t|X , parfois notée simplement d · /dt ou encore D · /Dt, correspond à la dérivée matérielle. Pour des
quantités intégrales, la relation (4.4) est transformée pour aboutir à l’expression
Z Z I
∂ ∂f (x, t)
f (x, t) dΩ = dΩ + f (x, t) u(x, t) · n d∂Ω (4.5)
∂t X ΩM (t) ΩC (t) ∂t x ∂ΩC (t)

qui correspond au théorème de Reynolds. Le même type de relation peut être établi entre le domaine arbitraire
ΩA et le domaine spatial ΩC à partir de l’application

Φ : ΩA × I −→ ΩC × I
(4.6)
(χ, t) 7−→ Φ(χ, t) = (x, t).

Par analogie, la vitesse de déplacement des points du domaine arbitraire par rapport aux coordonnées
du domaine spatial est définie par
∂x
s(χ, t) = . (4.7)
∂t χ

Lorsque le domaine arbitraire est discrétisé, cette vitesse représente la vitesse des nœuds du maillage. La
relation entre les dérivées temporelles dans le domaine arbitraire et spatial s’obtient en dérivant la relation
φ = Φ ◦ ψ −1 par rapport à (X, t), ce qui entraîne l’égalité

∂χ
c = u − s = ∇X x · w avec w(X, t) = . (4.8)
∂t X
La vitesse de convection c représente dans ce cas la vitesse relative entre la vitesse des points matériels
et celle des points du domaine arbitraire qui correspond à la vitesse de déplacement du maillage. Si le
domaine est fixe, la vitesse du maillage est nulle (s = 0) et par conséquent la vitesse de convection est égale
à celle des points matériels (c = u) : on retrouve alors la formulation eulérienne classique. Au contraire, si
le domaine arbitraire bouge en suivant les particules, alors la vitesse de maillage est égale à celle des points
matériels (s = u) si bien que la vitesse de convection est nulle (c = 0) : on retrouve alors la formulation
lagrangienne. La formulation ALE permet donc de passer d’une formulation à l’autre en fonction de la
vitesse attribuée aux nœuds du maillage.
Finalement, des relations analogues à (4.4) et (4.5) sont établies pour relier la dérivée temporelle d’une
quantité exprimée dans le domaine arbitraire ΩA à celle exprimée dans le domaine spatial ΩC . Lorsqu’il
s’agit d’une grandeur f locale la relation (4.4) devient

∂f (χ, t) ∂f (x, t)
= + s · ∇x f (x, t), (4.9)
∂t χ ∂t x

alors que dans le cas d’une grandeur intégrale, le théorème de Reynolds (4.5) se transforme en
Z Z I
∂ ∂f (x, t)
f (x, t) dΩ = dΩ + f (x, t) s · n d∂Ω. (4.10)
∂t χ ΩM (t) ΩA (t) ∂t x ∂ΩA (t)

4.2.2.2 Bilans de conservation des grandeurs physiques


Le système dynamique qui caractérise le comportement d’un fluide provient de l’écriture d’un cer-
tain nombre de bilans de conservation qui décrivent l’évolution de différentes grandeurs physiques et qui
peuvent être résumés sous la forme générique dF (X, t)/dt = QF (X, t), où la dérivée temporelle est la
dérivée matérielle puisque le bilan est écrit pour une certaine quantité de matière.
R La grandeur physique
F (X, t) est en général associée à une grandeur f (x, t) telle que F (X, t) = Ω ρ f (x, t) dΩ où ρ désigne la
masse volumique du fluide. Ainsi, le bilan générique s’exprime sous la forme intégrale
Z I
∂ρf
dΩ + ρf u · n d∂Ω = QF (4.11)
Ω ∂t ∂Ω

écrite sur le domaine spatial avec la description eulérienne en utilisant le théorème de Reynolds (4.5)
et en omettant les notations relatives au domaine pour plus de clarté. On considère alors d’une ma-

102
4.2. Modélisation d’un fluide compressible visqueux avec les variables conservatives

nière générale
R queH le terme source QF provient de contributions volumiques et surfaciques telles que
QF = Ω qF,v dΩ + ∂Ω qF,s · n d∂Ω. Le théorème de Green-Ostrogradski (D.28) permet alors de transformer
les intégrales surfaciques en intégrales volumiques de sorte que le bilan soit formulé comme l’intégrale
d’une somme de termes qui doit être nulle. On déduit alors le bilan local eulérien
∂ρf
+ div (ρf u) = qF,v + div (qF,s ) (4.12)
∂t
puisque la relation reste valable pour un domaine Ω infiniment petit. Pour décrire complètement le compor-
tement du fluide, on écrit en général un bilan pour la conservation de la masse, un autre pour la conserva-
tion de la quantité de mouvement et enfin un dernier pour la conservation de l’énergie. Les détails relatifs à
l’obtention de ces bilans peuvent être consultés dans les ouvrages de Batchelor [25] et Ferziger et Perić [76]
par exemple. En l’absence de terme source (QF = 0), le bilan de conservation de la masse s’écrit pour f = 1
sous la forme intégrale Z I
∂ρ
dΩ + ρu · n d∂Ω = 0, (4.13)
Ω ∂t ∂Ω
et de manière équivalente sous la forme locale
∂ρ
+ div (ρu) = 0. (4.14)
∂t
La conservation de la quantité de mouvement s’écrit pour le vecteur des composantes de la vitesse
eulérienne f = u. Dans ce cas, les écritures (4.11) et (4.12) doivent être adaptées puisqu’il s’agit d’une
quantité vectorielle : le terme ρf u·n se transforme alors en ρ u⊗u n. Par ailleurs, le terme source volumique
est un vecteur qui représente une force volumique qF,v = ρfvol , comme la gravité par exemple (fvol = g),
tandis que le terme surfacique provient du tenseur des contraintes de Cauchy σ ∈ M (d, d) en lieu et place
de qF,s . Le bilan intégral de conservation de la quantité de mouvement prend donc la forme
Z I Z I
∂ρu
dΩ + ρu ⊗ un d∂Ω = ρ fvol dΩ + σ n d∂Ω, (4.15)
Ω ∂t ∂Ω Ω ∂Ω

qui devient localement


∂ρu
+ div (ρ u ⊗ u) = ρ fvol + div σ. (4.16)
∂t
Enfin, le bilan de conservation de l’énergie peut être établi à partir du premier principe de la thermo-
dynamique. Dans ce cas le bilan porte sur l’énergie interne volumique f = eI . Le terme source volumique
correspond au travail des forces volumiques et surfaciques ρu · fvol et div (σu) respectivement, mais une
partie de ce travail doit être soustrait puisqu’il participe à l’énergie cinétique et non à l’énergie interne. Le
terme subsistant est alors σ : ∇u [25]. Par ailleurs le terme surfacique dans le bilan provient du flux de
chaleur sur la frontière qui découle de la loi empirique de Fourier
qθ = −kθ ∇θ, (4.17)
où kθ est la constante de conductivité thermique et θ désigne la température. Le terme source surfacique est
alors qF,s = −qθ pour être cohérent avec l’orientation de la normale vers l’extérieur du domaine. Finalement
le bilan de conservation de l’énergie interne s’écrit sous forme intégrale et locale :
Z I Z I
∂ρeI
dΩ + ρeI u · n d∂Ω = σ : ∇u dΩ − qθ · n d∂Ω, (4.18)
Ω ∂t ∂Ω Ω ∂Ω

∂ρeI
+ div (ρeI u) = σ : ∇u − div qθ . (4.19)
∂t
Le bilan précédent est souvent reformulé avec une grandeur physique différente de l’énergie interne.
Ainsi, l’énergie totale eT = eI + eC définie comme la somme de l’énergie interne et de l’énergie cinétique
est souvent employée. Le bilan tient alors compte de toutes les contributions liées au travail des forces et
s’écrit sous forme intégrale et locale :
Z I Z I
∂ρeT
dΩ + ρeT u · n d∂Ω = ρu · fvol dΩ + (σ u − qθ ) · n d∂Ω, (4.20)
Ω ∂t ∂Ω Ω ∂Ω

103
4. M ODÉLISATION DU FLUIDE EN VUE DE LA CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT

∂ρeT
+ div (ρeT u) = ρu · fvol + div (σ u − qθ ). (4.21)
∂t
D’autres variables comme par exemple l’enthalpie, l’entropie, la pression ou encore la température sont
parfois employées pour exprimer un bilan équivalent à celui de l’énergie [25, 76]. Les équations locales2
de bilan (4.14), (4.16) et (4.19) ou (4.21) doivent encore être complétées et détaillées pour que le système
soit fermé, i. e. que toutes les variables soient explicitement liées entre elles. Les variables q = [ρ, ρu, ρeT ]T
portent habituellement le nom de variables conservatives puisqu’elles satisfont les équations des bilans de
conservation.

4.2.2.3 Loi de comportement du fluide et équation d’état


Les équations de bilan précédentes font intervenir en plus des variables conservatives le tenseur des
contraintes de Cauchy σ et la température θ qui sont des inconnues supplémentaires3 . Dans le cas général
d’un fluide newtonien homogène, le tenseur des contraintes de Cauchy qui fournit la loi de comportement
se décompose en une partie isotropique −pId et une partie déviatorique τ telles que

σ = −p Id + τ . (4.22)

La partie isotropique fait intervenir la pression définie par p = −1/3Tr(σ) qui peut être différente de la
pression à l’équilibre thermodynamique notée pe . La relation entre les deux pressions est donnée par p−pe =
−κ divu, où κ est la viscosité de dilatation. L’hypothèse de Stokes couramment effectuée consiste à supposer
que les deux pressions sont égales (κ = 0). Batchelor [25] explique alors que le tenseur déviatorique se
simplifie en
2
τ = 2µ D + λ (div u) Id avec λ = − µ. (4.23)
3
Les coefficients µ et λ représentent respectivement le premier et le second coefficient de viscosité. En
pratique, l’hypothèse de Stokes permet de considérer seulement µ puisque dans ce cas λ = −2/3 µ. La
détermination précise de la valeur de la viscosité dépend de plusieurs paramètres, et notamment du ré-
gime — laminaire ou turbulent — de l’écoulement. Elle dépend par ailleurs de la température à laquelle
elle est reliée via la loi de Sutherland µ(θ) = βS θ3/2 /(θ + αS ), où αS et βS sont des constantes égales à
αS = 110, 4 et βS = 1, 45 × 10−6 pour représenter les variations de viscosité de l’air sur une plage de tempé-
rature s’étalant environ de 170 K à 1900 K. Lorsque l’écoulement est turbulent, la viscosité dépend alors de
manière complexe des variables conservatives et parfois de grandeurs annexes qui nécessitent d’introduire
des équations de bilan supplémentaires pour fermer le système dynamique.
Le tenseur D correspond au tenseur des taux de déformations introduit en décomposant le gradient des
vitesses en une partie symétrique et une partie anti-symétrique telles que ∇u = D + Ω avec
1  1 
D= ∇u + ∇T u et Ω= ∇u − ∇T u . (4.24)
2 2
Les équations de bilan (4.14), (4.16) et (4.21) ne sont toujours pas fermées puisque la température et la
pression qui vient d’être introduite ne sont pas encore exprimées en fonction du reste des variables conser-
vatives. Sous l’hypothèse d’un gaz parfait, l’équation d’état qui relie les grandeurs thermodynamiques p, ρ
et θ entre elles est donnée par
p = ρ Rs θ, (4.25)
où Rs = R/M est la constante spécifique des gaz parfaits définie à partir de la constante universelle des
gaz parfaits R = 8, 314 J K−1 mol−1 et de la masse molaire moléculaire M du gaz. La constante spécifique
de l’air vaut Rs,air = 287, 06 J K−1 mol−1 . Cette constante vérifie la loi de Carnot cp − cv = Rs qui porte sur
les coefficients de chaleur spécifique à volume et pression constants notés respectivement cv et cp . L’énergie
interne est donc définie par la relation eI = cv θ pour un gaz parfait et par conséquent l’équation d’état
(4.25) se récrit
p = (γ − 1)ρ eI , (4.26)
2 Ilen va de même pour les équations intégrales de bilan (4.13), (4.15) et (4.18) ou (4.20).
3 En général, la force volumique fvol est explicitement connue. Elle ne dépend pas des variables conservatives si elle représente les
effets de la gravité, mais dans les autres situations, l’expression de la force doit être explicitée pour fermer le problème.

104
4.2. Modélisation d’un fluide compressible visqueux avec les variables conservatives

en introduisant le rapport γ = cp /cv des coefficients de chaleur spécifique. Finalement, les bilans de conser-
vation donnés dans le paragraphe précédent complétés par les expressions (4.22), (4.23) et (4.24) définissant
le tenseur des contraintes de Cauchy puis l’équation d’état (4.25) ou (4.26) forment un système dynamique
fermé dont la résolution permet de prédire le comportement non-linéaire d’un écoulement compressible et
visqueux pour un fluide newtonien homogène.

4.2.3 Équations de Navier-Stokes en formulation ALE avec les variables conservatives


4.2.3.1 Expression des équations dans le repère absolu
Les équations sont la plupart du temps exprimées dans un repère absolu RA muni d’une base BA qui
est invariante au cours du temps. Les quantités vectorielles telles que la vitesse ou le tenseur des contraintes
de Cauchy sont donc exprimées dans cette base de sorte qu’on note uA = MatBA (u) le vecteur des compo-
santes de la vitesse exprimé dans la base absolue, ainsi que σ A pour le tenseur des contraintes de Cauchy.
Par ailleurs, les opérateurs différentiels opèrent suivant les directions xA,i = (xA , yA , zA ) associées à la base
BA et on notera respectivement divA et ∇A les opérateurs de divergence et de gradient par rapport aux
directions de la base absolue.
La forme intégrale des équations de Navier-Stokes écrites avec les variables conservatives s’obtient à
partir des bilans eulériens (4.13), (4.15) et (4.20). Ces bilans sont transportés dans le domaine arbitraire noté
ici simplement Ω = ΩA (t) au moyen de la relation (4.10) pour établir la formulation ALE des équations
dans le repère absolu RA qui est donnée ci-dessous :
 Z I

 ∂

 ρ dΩ + ρ(uA − sA ) · nA d∂Ω = 0


 ∂t χ Ω ∂Ω

 ∂ Z
 I Z I
ρ uA dΩ + ρ uA ⊗ (uA − sA ) nA d∂Ω = ρ fvol,A dΩ + σ A nA d∂Ω

 ∂t χ Ω ∂Ω Ω ∂Ω

 Z I Z I

 ∂

 ∂t
 ρ eT dΩ + ρ eT (uA − sA ) · nA d∂Ω = ρ fvol,A · uA dΩ + (σ A uA − div qθ,A ) · nA d∂Ω.
χ Ω ∂Ω Ω ∂Ω
(4.27)
Les équations précédentes sont écrites sous forme conservative et font apparaître des termes surfaciques
dits de flux. La forme du système dynamique précédent se prête bien à la résolution numérique, notamment
lorsqu’une discrétisation en Volumes Finis est envisagée. Toutefois, pour la construction du modèle d’ordre
réduit il est préférable de disposer d’équations continues locales. Pour cela, les bilans locaux eulériens (4.14),
(4.16) et (4.21) sont transformés avec la relation (4.9) et les termes sont remaniés au moyen des formules
données dans l’annexe D.3 pour aboutir au système suivant :


 ∂ρ
 + (uA − sA ) · ∇A ρ = −ρ divA uA


 ∂t χ


 ∂uA
ρ + ρ (uA − sA ) · ∇A uA = divA σ A + ρ fvol,A (4.28)

 ∂t χ



 ρ ∂eT + ρ (u − s ) · ∇ e = div (σ u − q ) + ρ f


 vol,A · uA .
∂t
A A A T A A A θ,A
χ

La formulation eulérienne des équations de Navier-Stokes s’obtient à partir des équations intégrales
ou locales en posant simplement sA = 0 puisque dans ce cas le domaine arbitraire est supposé invariant
et confondu avec le domaine spatial de contrôle. On désignera la formulation ALE des équations dans le
repère absolu par FALE-RAUA et la formulation eulérienne par FEUL-RAUA pour les différencier des autres
formulations développées dans le paragraphe suivant. Dans la suite, on négligera pour simplifier le terme
de force volumique fvol puisque aucun effet particulier n’a besoin d’être pris en compte par ce type de terme.
Le système dynamique obtenu est non-linéaire en raison de l’opérateur d’advection, ainsi que des dé-
pendances des variables entre elles dans l’équation d’état et la loi de Sutherland gouvernant la viscosité. La
construction du modèle d’ordre réduit nécessitera d’expliciter l’ensemble des expressions afin de détermi-
ner le type de non-linéarités rencontrées.

105
4. M ODÉLISATION DU FLUIDE EN VUE DE LA CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT

4.2.3.2 Expression des équations dans le repère entraîné


Lorsque le système considéré est entraîné dans un mouvement de corps rigide, les équations sont de
préférence formulées dans le repère entraîné RE associé au mouvement. L’écriture des équations de Navier-
Stokes dans un repère entraîné peut s’avérer judicieuse dans certains cas puisque l’écoulement peut devenir
permanent dans le repère entraîné alors qu’il est instationnaire dans le repère absolu. C’est le cas notamment
pour une roue isolée de turbomachine, pour un rotor d’hélicoptère en vol stationnaire ou pour une hélice en
mouvement de translation axiale par exemple. Les simulations numériques de tels écoulements bénéficient
alors des techniques d’accélération de la convergence développées pour les problèmes stationnaires.
Le changement de repère conduit à une nouvelle forme des équations dans laquelle des termes sources
supplémentaires apparaissent pour modéliser les effets du mouvement du domaine relatif. Les équations
peuvent alors être formulées au moyen des composantes de la vitesse absolue ou des composantes de la
vitesse relative. Ces formulations sont désignées respectivement par FALE-REUE et FALE-REVE lorsque la
description cinématique ALE est adoptée. Le principe d’obtention de ces équations est brièvement présenté
ici mais une justification plus rigoureuse est donnée dans l’annexe E.1.
L’écriture des équations dans le repère entraîné nécessite de définir un certain nombre de relations de
changement de base pour les quantités vectorielles, ainsi que pour les opérateurs de différentiation spatiale
et temporelle. La position absolue d’un point M de coordonnées x est décomposée par la relation de Chasles
en x = x0 + x e où x0 représente la position absolue de l’origine du repère entraîné et x
e est la position relative.
Si on note R = PBA →BE la matrice de passage entre les bases BE et BA associées aux repères absolu et
entraîné respectivement, la position du point M s’écrit xA = R xE , ou encore

eA = x0,A + R x
xA = x0,A + x eE , (4.29)

où x
eE est la position relative exprimée dans la base du repère entraîné. Si on considère que le changement de
base correspond seulement à un ensemble de rotations, la matrice R est orthogonale et unitaire (R−1 = RT ),
ce qui signifie au passage que la relation de changement de base de BA vers BE s’écrit xE = RT xA . On
associe à R la matrice de la vitesse angulaire ΩE = RT dR/dt qui est antisymétrique. Le vecteur vitesse
angulaire ω E est alors défini tel que pour tout vecteur rE , ΩE rE = ω E ∧ rE .
La vitesse absolue des points du domaine arbitraire est alors exprimée comme la dérivée de la position
absolue (4.29) qui correspond à sA (M ) = dxA /dt. Cependant, puisque les équations doivent être formulées
dans le repère entraîné, on écrit de préférence sE = RT sA en projetant dans la base BE . Après réorganisa-
tion des termes, on parvient à l’expression
(
eE
se,E (M ) = s0,E + ωE ∧ x
sE (M ) = se,E (M ) + sd,E (M ) avec dexE (4.30)
sd,E (M ) = .
dt
La relation précédente fait intervenir la vitesse d’entraînement se,E et la vitesse de déformation sd,E
exprimées dans la base BE . La vitesse s0,E correspond à la vitesse d’entraînement en translation qui est
définie par RT d(Rx0,E )/dt alors que le terme ωE ∧ xeE correspond à la vitesse d’entraînement en rotation.
En plus de ces relations, les opérateurs de différentiation spatiale sont modifiés par les relations de
changement de base analogues à (A.9) et (A.11) lorsque la quantité résultant de l’action de l’opérateur est
un vecteur ou une matrice.
Les équations intégrales de bilan (4.27) sont donc transformées en exprimant les quantités vectorielles
ainsi que les opérateurs de différentiation spatiale dans la base BE . Le bilan de quantité de mouvement est
en outre projeté sur la base BE puisqu’il s’agit d’une équation vectorielle. Après manipulation des termes
(voir l’annexe E.1.2), on parvient aux équations suivantes données sous forme intégrale :
 Z I

 ∂
 ρ dΩ + ρ (uE − sE ) · nE d∂Ω = 0


 ∂t χ Ω ∂Ω

 ∂ Z
 I I Z
ρ u dΩ + [ρ u ⊗ (u − s )] n d∂Ω = σ(u ) n d∂Ω − ω ∧ ρ uE dΩ (4.31)
∂t χ Ω
E E E E E E E E

 ∂Ω ∂Ω Ω

 Z I I

 ∂

 ρ eT dΩ + ρ eT (uE − sE ) · nE d∂Ω = [σ(uE ) uE − qθ,E ] · nE d∂Ω .
 ∂t
χ Ω ∂Ω ∂Ω

106
4.2. Modélisation d’un fluide compressible visqueux avec les variables conservatives

Bien qu’elles ne soient pas présentées ici, les équations locales (4.28) peuvent être transformées en sui-
vant le même processus pour obtenir une forme locale des équations de Navier-Stokes. La formulation avec
les variables conservatives dans le repère entraîné avec les composantes de la vitesse absolue sera désignée
par FALE-REUE. La formulation précédente basée sur les composantes de la vitesse absolue u est appro-
priée pour la simulation des écoulements autour de rotors d’hélicoptères ou d’hélices puisque le domaine
fluide est supposé infini et que l’écoulement n’est pas confiné.
Une autre formulation basée sur les composantes de la vitesse relative v au lieu de la vitesse absolue est
plus adaptée lorsque l’écoulement reste confiné au voisinage du corps en mouvement, comme c’est le cas
par exemple pour les turbomachines en rotation. La vitesse relative v se déduit de la vitesse d’entraînement
se des points du domaine Ω qui a été définie à l’équation (4.30) par l’égalité

v = u − se . (4.32)

Les équations de bilan (4.31) sont donc reformulées pour faire apparaître les composantes de la vitesse
relative exprimées dans le repère entraîné, i. e. vE = uE − se,E . Pour alléger la présentation4 , on donne
directement les équations dans le repère entraîné avec la vitesse relative :
 Z I
 ∂

 ρ dΩ + ρ (vE − sd,E ) · nE d∂Ω =0

 ∂t χ Ω

 Z
∂Ω(t)
I I Z



 ∂

 ∂t ρ v E dΩ + [ρ v E ⊗ (vE − s d,E )] nE d∂Ω = σ(v E ) n E d∂Ω − ρ (fCor + fcen ) dΩ
χ Ω ∂Ω ∂Ω Ω
Z I I (4.33)

 ∂

 ρ e dΩ + ρ e (v − s ) · n d∂Ω = [σ(v ) v − q ] · n d∂Ω

 ∂t χ Ω
T,r T,r E d,E E E E θ,E E

 ∂Ω ∂Ω

 Z


 + ρ vE · fcen dΩ .

Plusieurs remarques peuvent être faites sur les équations précédentes qui correspondent à la formula-
tion FALE-REVE. Tout d’abord, l’équation de conservation de la quantité de mouvement est modifiée par
l’introduction de nouveaux termes sources qui correspondent aux forces fictives de Coriolis et de la force
centrifuge. Les expressions des termes gyroscopiques sont données ci-dessous :

fCor = −2 ωE (RE /RA ) ∧ vE , 


∂se,E (4.34)
fcen = − + ω E (RE /RA ) ∧ se,E .
∂t

Par ailleurs, il faut noter que l’énergie totale eT,r du système est à présent définie pour la vitesse relative :
l’énergie interne reste intacte, mais l’énergie cinétique est celle de la vitesse relative du fluide, de sorte que
l’énergie totale « relative » soit définie par

1
eT,r = eI + eC,r = cv θ + kvk . (4.35)
2
Les équations de Navier-Stokes ont été présentées dans les paragraphes 4.2.3.1 et 4.2.3.2 au moyen d’une
description ALE introduite afin de traiter le problème d’un écoulement dans lequel une partie de la fron-
tière du domaine est mobile au cours du temps. Trois formulations ont alors été établies pour décrire l’écou-
lement à partir du repère absolu ou du repère relatif où les composantes de la vitesse absolue ou relative
peuvent être employées. Ces formulations sont disponibles dans le code de calcul de dynamique des fluides
elsA 5 [24] qui sera employé pour générer les clichés nécessaires pour la construction du modèle d’ordre ré-
duit. Il s’agit d’un code de calcul multiblocs structuré pour les écoulements compressibles visqueux ou
non, laminaires ou turbulents. La discrétisation des équations repose sur une approche Volumes Finis dont
le principe est brièvement rappelé dans l’annexe E.3.

4 Les détails des étapes pour parvenir aux équations (4.33) sont donnés dans l’annexe E.1.3.
5 Voir aussi http://elsa.onera.fr/.

107
4. M ODÉLISATION DU FLUIDE EN VUE DE LA CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT

4.3 Problématique de l’aéroélasticité et méthodologie de résolution


4.3.1 Principe de l’aéroélasticité
L’aéroélasticité statique concerne l’étude du couplage entre les forces aérodynamiques et élastiques.
Lorsque les effets dynamiques entrent en ligne de compte, les forces inertielles participent en plus au cou-
plage. Les analyses aéroélastiques s’imposent lorsque les interactions mutuelles entre les différentes forces
influent significativement sur la réponse du système. Elles se justifient par exemple lorsque les vibrations
d’une structure in vacuum sont amorties alors que la prise en compte du fluide peut conduire à des vi-
brations entretenues ou — dans le pire des cas — à des vibrations dont l’amplitude augmente jusqu’à un
seuil critique pour l’intégrité de la structure. Dans ce cas, les échanges d’énergie entre les deux milieux,
fluide et structure, doivent être modélisés afin de pouvoir analyser différents types de phénomènes aéroé-
lastiques. Dowell et al. [58] ont notamment distingué le phénomène de divergence en aéroélasticité statique,
le phénomène de flottement qui décrit la stabilité dynamique du système aéroélastique en réponse à une
petite perturbation ou encore la réponse dynamique qui correspond à la réponse temporelle du système à
une excitation externe telle qu’une rafale, un contrôle actif,... Seuls les deux derniers types d’analyses sont
instationnaires et correspondent au cadre de cette étude.

Figure 4.3 : Schéma de principe du cycle d’interaction entre le fluide et la structure.

Le principe du couplage peut être représenté par le cycle d’interaction de la figure 4.3 dont les étapes
sont les suivantes :

1. les forces aérodynamiques exercent une charge sur la structure qui se déplace et/ou se déforme ;
2. la résolution du problème structural fournit les déplacements et/ou les déformations de la structure
et en particulier ceux de la frontière entre le fluide et la structure en réponse aux efforts ;
3. la modification de la position et de la vitesse de l’interface fluide-structure redéfinit donc le domaine
fluide dans lequel évolue le champ aérodynamique ;
4. la résolution du problème fluide pour la nouvelle topologie du domaine fournit alors le nouveau
champ aérodynamique à partir duquel la force aérodynamique est calculée, et ainsi de suite.

La description précédente du cycle d’interaction indique que l’état d’équilibre du système est obtenu —
à chaque instant pour la réponse dynamique — lorsque les forces aérodynamiques sont en adéquation avec
la bonne position de l’interface entre le fluide et la structure. La résolution du cycle d’interaction en vue de
déterminer cet équilibre fait l’objet d’un certain nombre de choix concernant notamment la manière de trai-
ter les équations du système couplé (approche monolithique ou couplée) et de tenir compte du mouvement
de la structure (couplage fort ou faible).

108
4.3. Problématique de l’aéroélasticité et méthodologie de résolution

4.3.2 Formulations du problème de couplage


4.3.2.1 Approche monolithique vs approche couplée
En fonction des hypothèses émises pour chacun des deux milieux, les équations se prêtent plus ou moins
bien à la formation d’un unique système couplé fluide-structure. Lorsque cela est possible, on parle d’une
approche monolithique puisque les équations des deux milieux sont résolues simultanément. Dans le cas
contraire, on parlera d’une approche couplée puisque les équations des deux milieux sont résolues successi-
vement l’une après l’autre avec un certain décalage temporel.
L’approche monolithique est par exemple adéquate lorsqu’on s’intéresse à des problèmes de ballotte-
ment d’un liquide dans une structure déformable ou pour des études de vibroacoustique dans une cavité.
Le fluide, alors supposé incompressible, parfait et homogène, est modélisé par les équations d’un fluide
potentiel qui sont linéarisées pour de petites perturbations. Il est ainsi possible de définir des modes de
ballottement en basse fréquence, ou encore des modes acoustiques en haute fréquence. La résolution du
système fluide peut donc être conduite simultanément avec celle de la structure en utilisant par exemple
un formalisme Éléments Finis. En outre, une approche modale peut être adoptée pour réduire la taille du
système couplé. Pour plus de détails sur ces méthodes, le lecteur pourra consulter en particulier les travaux
de Morand et Ohayon [168] ainsi que [204, 211]. Une extension de ces travaux pour des applications au
ballottement dans une structure déformable en microgravité est en cours de développement [67].
Lorsque le fluide incompressible est modélisé par les équations non-linéaires de Navier-Stokes, la mé-
thode des domaines fictifs [88, 89, 176] peut être employée de manière à conserver une approche monoli-
thique. En effet, une unique formulation variationnelle du problème couplé est obtenue par extension des
équations du domaine fluide à la structure. Pour cela, la contrainte de rigidité sur le domaine fictif est im-
posée au moyen d’un coefficient de pénalisation.
L’approche monolithique réalise le couplage de façon intrinsèque, si bien que les schémas numériques
sont en général plus stables et plus précis [166]. Toutefois, cette approche n’est pas adaptée pour formuler
les équations du problème couplé aéroélastique qui motive cette étude. Kamakoti et Shyy [125] ont en effet
relevé très peu de travaux basés sur une approche monolithique pour l’aéroélasticité, et ont signalé qu’il
existait encore beaucoup de restrictions à leur emploi. Les principales raisons viennent de la différence de
modélisation des deux milieux, de l’ordre de grandeur des pas de temps caractéristiques et des descriptions
cinématiques employées. Par conséquent la résolution pour des systèmes de grande taille est pratiquement
impossible, à moins de recourir à des méthodes de décomposition de domaine [102].
Afin de pouvoir jouir de certains développements spécifiques6 à chacun des deux milieux, il est donc
préférable de traiter le problème par une approche couplée avec des codes de calcul dédiés. Intuitivement,
le principe revient à reproduire une à une les étapes du schéma de la figure 4.3. Si l’algorithme de couplage
est explicite, le cycle d’interaction est calculé une seule fois par pas de temps. Au contraire, si l’algorithme
est implicite, plusieurs itérations sur le cycle d’interaction sont effectuées pour le pas de temps en ques-
tion, jusqu’à la convergence de l’état d’équilibre du système couplé. L’approche couplée nécessite donc de
disposer d’un code de calcul pour le milieu fluide et d’un second code pour la structure, ainsi que d’un
algorithme de couplage permettant de gérer le transfert d’informations entre les deux milieux (procédure
de transfert des efforts et des déplacements, sous-itérations dans le cas d’un couplage implicite,...).
Les procédures décalées ont ainsi permis d’obtenir une description précise de phénomènes complexes
tels que l’écoulement transsonique autour d’une aile 3D [71, 72], le comportement d’absorbeurs de choc
hydrauliques [142], la réponse transitoire à des explosions [39] ou encore les phénomènes de vibrations
induites par un détachement de vortex dans un écoulement incompressible [90, 179, 202]. De telles simu-
lations sont progressivement employées dans l’industrie aérospatiale pour tenter de prédire les limites de
stabilité des systèmes mécaniques. De nombreux développements ont ainsi été menés à l’Onera afin de pré-
dire le comportement aéroélastique de voilures ou de fuselages d’avions, ou encore dans le but de détermi-
ner la réponse aéroélastique des roues aubagées rencontrées dans les turbomachines [64, 65, 85, 86, 206].
Les méthodes couplées restent donc les plus appropriées pour traiter les problèmes d’aéroélasticité. La
difficulté consiste toutefois à préserver la conservation des échanges d’énergie entre les deux milieux sans
laquelle une production artificielle d’énergie à l’interface peut conduire à la divergence. Pour limiter ce
risque, les simulations deviennent souvent très coûteuses en temps de calcul puisqu’un petit pas de temps
est requis avec les algorithmes explicites et les algorithmes implicites sont itératifs.
6 Par exemple les lois de comportement, la turbulence pour le fluide, ou encore les algorithmes de résolution.

109
4. M ODÉLISATION DU FLUIDE EN VUE DE LA CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT

4.3.2.2 Couplage fort vs couplage faible


Indépendamment de l’approche choisie pour formuler les équations, il existe deux manières de traiter le
mouvement de la structure. On parle de couplage fort lorsque le cycle d’interaction est effectivement calculé,
c’est-à-dire lorsque les vibrations de la structure sont provoquées par les charges aérodynamiques qui lui
sont appliquées. Une autre technique consiste à pratiquer un couplage faible, c’est-à-dire un couplage dans
lequel il n’y a pas de rétroaction du fluide sur la structure : le principe consiste à résoudre les équations
du fluide pour certains mouvements imposés à la structure. Les forces aérodynamiques obtenues sont alors
introduites a posteriori au second membre de l’équation gouvernant la structure, en supposant qu’elles dé-
pendent des déplacements et des vitesses. La méthode est particulièrement intéressante lorsque la structure
est linéaire puisqu’il est possible de pratiquer une décomposition sur la base des modes propres de manière
à réduire le nombre de degrés de liberté dans le modèle structural. Les mouvements imposés à la structure
lors de la résolution du problème fluide sont donc les déformées modales qui produisent les forces aérodyna-
miques généralisées — i. e. les forces associées à chaque mode excitateur de la structure. Sous l’hypothèse de
linéarité des forces aérodynamiques généralisées en fonction des degrés de liberté structuraux, la réponse
temporelle du système aéroélastique peut être déterminée à partir de l’équation structurale.
Le couplage faible est souvent employé pour les problèmes de stabilité en flottement. Dans ce cas, on
suppose une petite perturbation harmonique des degrés de liberté structuraux et l’équation gouvernant la
structure s’écrit sous la forme d’un problème aux valeurs propres non-linéaire puisque la matrice des forces
aérodynamiques généralisées dépend des valeurs propres. Plusieurs méthodes itératives peuvent être em-
ployées pour parvenir à résoudre le problème (voir par exemple [58], paragraphe 3.6). La plus populaire
d’entre elles est la méthode p − k [108] qui fournit en plus de la vitesse de flottement une estimation de
l’amortissement du système couplé. La méthode s’applique aussi aux systèmes aubagés présents dans les
turbomachines [104] et a été décrite en détail par Tran et al. [231]. La difficulté principale lors du processus
itératif de la méthode p− k est l’estimation des forces aérodynamiques généralisées pour la valeur inconnue
de la solution du problème aux valeurs propres du système aéroélastique. Pour cela, des méthodes d’inter-
polation plus ou moins élaborées [127, 183] sont employées. Le couplage faible simplifie considérablement
les calculs puisque le couplage entre les deux milieux n’est pas directement effectué. Il permet des gains
substantiels en temps de calcul mais nécessite d’interpoler les forces aérodynamiques généralisées lors de
la résolution du problème de stabilité et repose en outre sur l’hypothèse que les forces aérodynamiques
généralisées sont linéaires en fonction des degrés de liberté structuraux.
Que ce soit par le biais d’un couplage fort ou faible, la résolution du problème aéroélastique n’est pas
complètement satisfaisante lorsqu’il s’agit de calculer la réponse pour un grand nombre de paramètres tels
que le nombre de Mach, ou encore le déphasage interaube ou la vitesse de rotation pour les applications
aux turbomachines. En effet, le couplage fort conduit à des temps de calcul prohibitifs, tandis que le cou-
plage faible — lui aussi assez coûteux — nécessite de recourir à des procédés d’interpolation qui requièrent
le réglage souvent délicat d’un certain nombre de paramètres [231]. En outre, le couplage faible repose sur
l’hypothèse de linéarité des forces aérodynamiques généralisées en fonction des degrés de liberté structu-
raux qui n’est pas justifiée dans le cas général.

4.3.3 Définition du problème aéroélastique général


Soit Ω ⊂ Rd un domaine de l’espace de dimension d défini par la réunion disjointe d’un domaine fluide
Ωf et d’un domaine solide Ωs tels que
Ω = Ωf ∪ Ωs ,
(4.36)
Ωf ∩ Ωs = ∅.
On considère une structure présentant une interface commune avec le fluide au travers de laquelle
aucun échange de matière n’a lieu. Le fluide est en outre supposé monophasique. À tout instant t ∈ I, on
note Γ(t) la frontière commune entre le domaine fluide et le domaine solide, i. e. l’interface fluide-structure.
Les autres frontières des domaines fluide et structure seront notées respectivement ∂Ωf et ∂Ωs 7 . La normale
à l’interface fluide-structure Γ dirigée vers le fluide sera notée n, tandis que les normales sur ∂Ωf et ∂Ωs
seront indiquées respectivement par nf et ns . Le schéma de la figure 4.4 résume les différentes notations.
7 Si la structure est entièrement immergée dans le fluide, la frontière du domaine solide correspond uniquement à Γ.

110
4.3. Problématique de l’aéroélasticité et méthodologie de résolution

∂Ωf
Ωf (t)

nf
Γ(t + δt)
Ωs (t)
Γ(t)

Figure 4.4 : Schématisation des domaines fluide et structure pour la résolution du problème couplé aéroélastique à un instant t. La
frontière externe ∂Ωf est fixe, alors que l’interface fluide-structure Γ se déforme au cours du temps. Les traits pointillés représentent
la position de l’interface fluide-structure à un instant ultérieur t + δt.

Dans l’optique d’une résolution du système aéroélastique par une approche couplée, le problème est
décrit par un ensemble d’équations gouvernant le fluide dans le domaine Ωf (t) et le solide dans le domaine
Ωs (t), le tout étant complété par un ensemble de conditions de couplage sur l’interface fluide-structure Γ(t).

Modélisation du fluide Le fluide, supposé homogène, compressible, visqueux et newtonien, est décrit
par les équations de Navier-Stokes. Le domaine fluide Ωf (t) se déforme au cours du temps pour tenir
compte du déplacement et/ou de la déformation de la structure sur l’interface Γ et par conséquent une
formulation ALE des équations doit être adoptée. Le domaine Ωf correspond alors à un domaine arbitraire
ΩA de l’espace, tel que le bord ∂Ωf soit fixe et que le bord Γ suive le mouvement de la structure.
Les systèmes d’équations (4.27), (4.31) et (4.33) établis au paragraphe 4.2.3 sont donc employés pour
décrire le fluide dans le repère absolu ou relatif, avec les composantes de la vitesse absolue ou relative.
Les équations sont ensuite complétées par une condition initiale portant sur le champ aérodynamique qui
peut être initialisé par exemple avec le champ stationnaire. Par ailleurs, des conditions aux limites sur les
frontières du domaine sont imposées : sur ∂Ωf , des conditions de non-réflexion sont par exemple imposées
pour modéliser un domaine infini et les conditions de couplage spécifiques à l’interface fluide-structure Γ
seront détaillées dans la suite de ce paragraphe.

Modélisation de la structure Dans la formulation classique d’un problème aéroélastique, la structure est
décrite dans le cadre de l’élasticité linéaire pour un matériau isotrope8 . La structure est supposée ne subir
que de petites déformations qui sont correctement caractérisées au moyen de l’équation de bilan locale

∂ 2 xs
ρs = div σ s + ρs fvol,s (4.37)
∂t2 X

gouvernant les déplacements xs en formulation lagrangienne dans Ωs (t). Par ailleurs, le tenseur des défor-
mations εs = 1/2 (∇xs +∇T xs ) est relié au tenseur des contraintes de Cauchy σ s par la loi de comportement

1 + νs νs
εs = σs − Tr(σ) Id , (4.38)
E E
qui nécessite la donnée du module de Young E et du coefficient de Poisson νs caractéristiques du matériau
employé. La densité ρs du solide est ici considérée comme constante dans Ωs . Les forces volumiques se
réduisent en général à la pesanteur, si bien que fvol,s = g où g est l’accélération de la pesanteur.
8 Il est tout à fait possible d’employer des lois de comportement plus complexes et de dépasser ainsi le cadre de l’élasticité linéaire

pour modéliser la structure, notamment lorsqu’elle est constituée par exemple d’un matériau composite.

111
4. M ODÉLISATION DU FLUIDE EN VUE DE LA CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT

De la même manière que pour le fluide, l’équation (4.37) est complétée par une condition initiale por-
tant sur les déplacements de la structure ainsi que par des conditions limites. Si le solide est entièrement
immergé dans le fluide, seules les conditions limites de couplage entre le fluide et la structure sur Γ s’ap-
pliquent. Si une partie de la structure n’est pas directement en contact avec le fluide, il est possible d’intro-
duire d’autres conditions limites de type Dirichlet ou Neumann par exemple.

Remarque 4.1 : Mouvement de corps rigide


Pour simplifier le problème dans un premier temps, il est courant de faire l’hypothèse d’un corps rigide en mouvement
dans le fluide. Le mouvement de l’interface n’est donc plus gouverné par la déformée élastique de la structure mais par
un petit nombre de degrés de liberté n’excédant pas 6 lorsque l’espace est tridimensionel (3 rotations et 3 translations).
Dans ce cas, il ne s’agit plus au sens strict du terme d’une analyse aéroélastique puisque la structure est rigide.
Dans l’hypothèse d’un corps rigide, le domaine solide Ωs (t) se déduit du domaine à l’instant initial par un ensemble
de translations et de rotations. La distance entre deux points distincts x et y de coordonnées x et y dans Ωs (t) reste
donc constante à chaque instant, ce qui se traduit mathématiquement par

∀t ∈ R+ , ∃K ∈ R3 , ∀(x, y) ∈ Ωs (t), vs (x, t) = vs (y, t) + j(K) (x − y), (4.39)

où vs (x, t) = ẋ est le champ de vitesse dans le domaine Ωs (t). L’application j vérifie quant à elle
   
K1 0 −K3 K2
∀K = MatB (K) = K2  ∈ R3 , ∀r ∈ R3 , j(K) r = K ∧ r avec j(K) =  K3 0 −K1  . (4.40)
K3 −K2 K1 0

Par conséquent ∇vs = j(K) et ∇T vs = −j(K) donc le tenseur des taux de déformation pour un solide rigide
est nul : D(vs ) = 1/2(∇vs + ∇T vs ) = 0d,d . La réciproque est aussi vraie. Ainsi, l’équivalence suivante définit
formellement un corps rigide :

1 
Un milieu continu est indéformable si et seulement si D(vs ) = ∇vs + ∇T vs = 0d,d . (4.41)
2
Puisque le solide est rigide, la position de n’importe quel point M du domaine solide de coordonnées xs se déduit
de la position du centre de gravité G de coordonnées xG à l’aide de la loi de composition des vitesses (4.39) qui se
transforme avec la relation (4.40) en

vs (M, t) = vG + ω ∧ (xs (M ) − xG ). (4.42)

La vitesse vs (M, t) = ẋs du point M — et par conséquent la position — s’exprime donc en fonction de celle du
centre de gravité vG = ẋG au moyen du vecteur vitesse angulaire ω9 . Les vitesses de translation vG et de rotation ω
sont gouvernées par le système d’équations différentielles ordinaires

 dvG
 m = Fa (t)
dt (4.43)

 J dω + J ω ∧ ω = M (t).
a
dt
Dans les expressions précédentes, m désigne la masse du solide, et J sa matrice d’inertie. Les termes du second
membre représentent les résultantes de la force et du moment aérodynamiques dus à l’action du fluide sur la paroi du
solide. Ils sont respectivement donnés par
Z
Fa (t) = σ f n dΓ, (4.44a)
Γ(t)
Z
Ma (t) = (xs − xg ) ∧ (σ f n) dΓ. (4.44b)
Γ(t)

9 Ce vecteur vitesse correspond au vecteur K de la relation (4.39). Il est donc associé à l’application j dont la représentation matri-

cielle est un tenseur antisymétrique, d’où l’interprétation en terme de rotation.

112
4.3. Problématique de l’aéroélasticité et méthodologie de résolution

Conditions de couplage sur l’interface fluide-structure L’interface Γ(t) est le siège des transferts entre
le fluide et la structure et assure donc le couplage entre les deux milieux. Ce dernier est assuré par deux
types de conditions qui expriment (i) le fait qu’aucune particule ne peut traverser l’interface, et (ii) que les
contraintes doivent être continues au passage de l’interface. La première condition est de type cinématique
et revient à imposer la continuité des vitesses au passage de l’interface. La seconde est quant à elle dyna-
mique et assure la continuité des contraintes normales à l’interface suivant le principe d’action-réaction.
Pour un fluide visqueux, ces deux conditions s’écrivent

u = ẋs
sur Γ(t). (4.45)
σf n = σs n

Dans le cas d’un fluide parfait, seules les composantes normales de la vitesse sont couplées dans la
condition cinématique car le fluide est libre de glisser sur la paroi du solide. En outre, la condition de
couplage dynamique peut être simplifiée : la loi de comportement du fluide ne fait plus intervenir que la
pression (σ f = −p Id ) puisque les termes visqueux sont éliminés. Les conditions de couplage sur l’interface
deviennent alors 
u · n = ẋs · n
sur Γ(t). (4.46)
−p n = σ s n

Remarque 4.2 : Condition de paroi pour un solide fixe


La condition de couplage cinématique est simplement une extension de la condition de paroi habituellement employée
lorsque la frontière est fixe. Dans ce cas, la vitesse du fluide est en effet supposée nulle (u = 0) si le fluide est
visqueux ; pour un fluide parfait, on impose simplement que la vitesse normale soit nulle. Par conséquent il s’agit
d’un cas particulier où ẋs = 0 pour les conditions de couplage cinématiques dans les équations (4.45) et (4.46).

Couplage fort et couplage faible Si le problème aéroélastique à résoudre requiert un couplage fort, la
solution est recherchée au moyen d’une approche couplée dans laquelle les équations du fluide établies
au paragraphe 4.2.3 puis celles de la structure élastique (4.37) sont résolues successivement en vérifiant à
chaque pas de temps les conditions de couplage (4.45) si le fluide est supposé visqueux. Si la structure est
supposée rigide, les équations résolues sont simplement remplacées par (4.43). On obtient de cette manière
la réponse temporelle du système aéroélastique qui est ensuite analysée, pour évaluer par exemple l’amor-
tissement si l’objectif est de contrôler la stabilité du système couplé.
Dans le cas d’un couplage faible les équations du fluide sont résolues pour un mouvement de la struc-
ture imposé a priori. Par conséquent la position de l’interface Γ(t) est explicitement prescrite et ne requiert
pas l’intégration en temps de l’équation (4.37) si le corps est élastique, ou des équations (4.43) si la struc-
ture est supposée rigide. Pour un solide rigide, il suffit d’imposer un mouvement au centre de gravité ainsi
qu’une loi d’évolution pour la vitesse angulaire et la position de l’interface Γ se déduit immédiatement par
la loi de composition des vitesses (4.42). Si la structure est élastique, alors on peut calculer les déformées
associées aux premiers modes propres qui seront imposées avec une excitation harmonique à une certaine
fréquence et avec une certaine amplitude. L’objectif est alors de calculer les forces aérodynamiques géné-
ralisées en réponse à l’excitation imposée, puis d’introduire ces forces au second membre de l’équation
gouvernant la structure afin de mener par exemple une étude de stabilité.

113
4. M ODÉLISATION DU FLUIDE EN VUE DE LA CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT

4.4 Modélisation du fluide avec les variables primitives modifiées pour


la construction du modèle d’ordre réduit
4.4.1 Variables aérodynamiques pour l’obtention d’un système quadratique
Les équations du fluide ont été établies dans les paragraphes précédents pour les variables conservatives
qui sont habituellement employées lorsque la résolution est effectuée au moyen d’une discrétisation Élé-
ments Finis ou Volumes Finis par exemple. L’utilisation de ces mêmes équations pour la construction d’un
modèle d’ordre réduit non-linéaire avec l’approche POD-Galerkin décrite au paragraphe 2.4.3 pose néan-
moins problème puisque le système dynamique ne s’écrit pas sous la forme d’un polynôme dont la projec-
tion permet de conserver simplement les non-linéarités. Pour s’en convaincre, il suffit d’expliciter la forme
locale des équations (4.28) en faisant apparaître exclusivement les variables conservatives q = [ρ, ρu, ρeT ]T .
Parmi les termes qui dépendent implicitement des variables, le tenseur des contraintes de Cauchy dont
l’expression a été donnée à l’équation (4.22) fait intervenir la pression p. Celle-ci s’exprime en fonction de
l’énergie interne eI par la relation (4.26) sous l’hypothèse d’un gaz parfait et par conséquent en fonction de
l’énergie totale puisque eT = eI + eC . En développant l’énergie cinétique, la pression satisfait l’expression
  !
T
uT u (ρu) (ρu)
p = ρ(γ − 1) eT − = (γ − 1) ρeT − (4.47)
2 2ρ
qui ne dépend que des variables conservatives. Cependant, l’apparition d’une fraction rationnelle dans l’ex-
pression conduit à des termes difficiles à traiter lors de la projection de Galerkin après remplacement des
variables conservatives par leur décomposition sur la base des modes POD. La même difficulté survient
pour le terme de température dans le flux de chaleur qθ , et plus généralement dès qu’un terme isolé u ou
eT apparaît dans les équations du système (4.28). Ce problème, déjà signalé par Vigo [240] et Rowley [192],
provient principalement du terme de masse volumique ρ qui doit être introduit comme facteur multiplicatif
dans les termes isolés u et eT pour faire apparaître les variables conservatives ρu et ρeT .
La décomposition orthogonale propre des variables « quasi-conservatives » q = [ρ, u, eT ]T ne règle pas
totalement le problème puisque le système dynamique devient certes polynomial mais s’écrit sous la forme
implicite f (q̇, q, t) = 0. D’autres jeux de variables peuvent alors être envisagés pour tenter de remédier
au problème. En effet, l’équation d’état liant les variables thermodynamiques permet de transformer les
équations de bilan pour obtenir un système d’équations équivalent dont on espère que la forme deviendra
polynomiale et permettra de conserver une forme explicite q̇ = f (q, t) pour les équations aux dérivées
partielles. Un certain nombre de jeux de variables est envisagé dans l’annexe E.2 et il s’avère que le choix
des variables primitives modifiées q = [ϑ, u, p]T remplit toutes les conditions souhaitées grâce à l’introduction
du covolume ϑ = 1/ρ. Ce jeu de variables a notamment été employé par Vigo [239, 240] pour développer
ensuite un modèle d’ordre réduit selon une approche POD-Galerkin. Le même modèle a ensuite été repris
par Iollo et al. [117] et plus récemment par Gloerfelt [87] et Bourguet et al. [34]. Rowley [192] et Moreno
et al. [169] ont quant à eux préféré émettre l’hypothèse supplémentaire que le fluide était isentropique, afin
de pouvoir ramener les équations
p de Navier-Stokes à un système quadratique gouverné seulement par la
vitesse locale du son a = γp/ρ et la vitesse du fluide u.
Le jeu de variables primitives modifiées s’impose comme le plus prometteur puisqu’il permet d’obtenir
une forme polynomiale des équations de Navier-Stokes sans faire l’hypothèse d’un fluide isentropique. Il
est toutefois important de préciser que pour y parvenir, il est nécessaire de supposer que la viscosité est
constante. Dans le cas contraire, si la viscosité suit la loi de Sutherland habituellement adoptée pour les
fluides compressibles, la dépendance avec la température est telle que le système dynamique perd sa forme
polynomiale. Par ailleurs, si l’écoulement est turbulent il devient difficile de traiter les variations de visco-
sité turbulente dans le système tout en conservant une forme polynomiale. Vigo [240] a tenté de modéliser
les effets turbulents au moyen du modèle de Spalart-Allmaras [219], mais des approximations drastiques
doivent être effectuées afin de maintenir la forme polynomiale. Le champ aérodynamique doit donc être
reconstruit à chaque itération pour pouvoir calculer les termes non polynomiaux mais le gain en temps de
calcul est alors perdu. Vigo s’est donc contenté de conserver le premier mode POD de viscosité turbulente
qui correspond à la viscosité turbulente moyenne en temps.
En général, les variations de viscosité sont négligées en première instance pour la construction du mo-
dèle d’ordre réduit, mais il s’agit d’une hypothèse relativement forte dont les conséquences peuvent être

114
4.4. Modélisation du fluide avec les variables primitives modifiées

désastreuses pour la stabilité du modèle d’ordre réduit. Ainsi, les modèles d’ordre réduit sont la plupart
du temps corrigés afin de pallier les erreurs liées aux simplifications effectuées pour la modélisation. On
reviendra sur ce problème par la suite lors des applications numériques.

Remarque 4.3 : Construction du modèle d’ordre réduit d’un écoulement incompressible


Lorsque le fluide est supposé incompressible, le bilan de quantité de mouvement suffit seul à décrire la dynamique de
l’écoulement dans le cas laminaire. La masse volumique et la viscosité sont alors traitées comme des termes constants
si bien que la réponse du système se déduit d’un ensemble d’équations polynomiales quadratiques portant sur les
composantes de la vitesse q = [u, v, w]T . L’approche POD vectorielle (2.83) employée pour décomposer les variables
se combine donc bien avec la projection de Galerkin des équations du fluide et produit un modèle d’ordre réduit
polynomial quadratique. Dans ce cas, le jeu de variables employé pour la construction du modèle d’ordre réduit est
identique à celui habituellement utilisé pour résoudre les équations de Navier-Stokes avec une approche Volumes Finis
ou Éléments Finis.

4.4.2 Définition du produit scalaire


L’approche POD-Galerkin envisagée pour construire le modèle d’ordre réduit nécessite d’effectuer la
projection selon le produit scalaire de l’espace de Hilbert considéré. L’espace H = L2 (Ω) des fonctions
de carré intégrable est un bon candidat puisqu’on peut raisonnablement considérer que le champ aérody-
namique solution des équations de Navier-Stokes vérifie à chaque instant les propriétés d’appartenance à
l’espace L2 . Le produit scalaire associé à cet espace avait été défini par la relation (2.91) pour des vecteurs
de fonctions de dimension nv . Le vecteur q = [ϑ, u, p]T composé des variables primitives modifiées sera
donc considéré comme un élément de H = (L2 (Ω))nv avec nv = 2 + d où d est la dimension du domaine
spatial tel que Ω ⊂ Rd .
L’application donnée par la relation (2.91) définit bien un produit scalaire de manière cohérente au sens
mathématique. Toutefois, la signification physique est remise en question puisque les différentes compo-
santes du vecteur q ont des unités physiques diverses dont la somme n’a aucun sens. L’idéal consisterait à
travailler avec un produit scalaire tel que la norme induite par le produit scalaire soit reliée à une certaine
énergie physique E du système par la relation
2
kqk = hq, qi = E . (4.48)
Ceci justifierait ainsi l’assertion que la décomposition orthogonale propre soit basée sur la recherche des
structures contenant le plus d’énergie du système puisque le terme général de l’opérateur de corrélation R⋆
dont on recherche les valeurs propres est proportionnel à hq (i) − q, q (j) − qi.
Pour un fluide incompressible, la définition (2.91) est cohérente puisque le vecteur des inconnues ne
contient que les composantes de la vitesse : q = [u, v, w]T . Par conséquent, la normeR induite par le produit
Rscalaire standard est liée à l’énergie cinétique volumique eC du système : kqk2 = Ω (u2 + v 2 + w2 ) dΩ =

2 eC dΩ. Le terme sous l’intégrale s’écrit donc q PE q avec PE = I3 . En choisissant plutôt PE = ρ/2 I3 , la
T

norme induite par le produit scalaire correspond exactement à l’énergie cinétique puisque
Z Z Z
ρ 2 
kqk2 = q T PE q dΩ = u + v 2 + w2 dΩ = ρeC dΩ = Ec . (4.49)
Ω Ω 2 Ω

Par analogie, le produit scalaire associé aux variables d’un écoulement compressible devrait pour sa
part être recherché de manière à ce que la norme induite représente l’énergie totale du système, puisque
les variables thermodynamiques associées à l’énergie interne du système participent aussi à la dynamique.
Il serait donc souhaitable de trouver une expression de PE telle que q T PE q = ρeT . Dans ce cas, la norme
induite par le produit scalaire correspondrait à l’énergie totale du système ce qui fournirait une description
cohérente de l’opérateur de corrélation, tant d’un point de vue dimensionnel qu’énergétique. L’énergie
totale volumique du système s’écrit
p 1 T
ρeT = ρeI + ρeC = + u u (4.50)
γ − 1 2ϑ
en fonction des variables primitives modifiées q = [ϑ, u, p]T . Le problème est qu’il ne s’agit pas d’une forme
quadratique puisque l’énergie interne est linéaire en fonction de p alors que l’énergie cinétique s’exprime à

115
4. M ODÉLISATION DU FLUIDE EN VUE DE LA CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT

l’aide d’une fraction rationnelle. Ce problème est commun à la plupart des jeux de variables envisagés dans
l’annexe E.2. Il est alors possible de définir la norme de manière à ce qu’elle corresponde à l’énergie totale
volumique eT , bien qu’il ne s’agisse pas exactement d’une quantité conservée. Dans ce cas, les variables
primitives modifiées q = [ϑ, u, p]T fournissent une forme quadratique définie par la matrice
 1 
0 01,d 2(γ−1)
PE =  0d,1 1/2 Id 0d,1  . (4.51)
1
2(γ−1) 01,d 0
R
Toutefois, une condition nécessaire pour que l’application qui au vecteur q associe Ω q T PE q dΩ soit un
produit scalaire est que la matrice PE soit définie positive [223]. Or cette propriété n’est pas vérifiée puisque
la matrice en question possède la valeur propre négative −1/(2(γ − 1)).
Rowley [192, 194] a attribué certaines sources d’instabilité des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin à
une mauvaise définition du produit scalaire et insistait donc sur la nécessité d’une définition cohérente qui
préserve l’énergie du système dynamique. Sous l’hypothèse d’un fluide isentropique émise dans [192, 194],
l’énergie totale volumique eT a été écrite sous la sous la forme eT = a2 /(γ − 1) + 1/2 uTu qui est bien
quadratique en fonction du vecteur de variables q = [u, a]T qui suffit à décrire un écoulement isentropique.
Dans ce cas, la matrice diagonale PE = diag(1/2, 1/(γ − 1)) associée au produit scalaire est bien définie
positive. Puisque le produit scalaire est basé sur l’énergie du système, Rowley et al. [194] ont montré que
la projection de Galerkin préserve la stabilité du système, au moins pour les points d’équilibre autour de
l’origine. Cependant, la stabilité des autres points d’équilibre et celle des cycles limites n’est pas assurée.
En dehors de l’hypothèse d’un fluide compressible isentropique, il est difficile de construire un produit
scalaire énergétique cohérent. Une solution alternative consiste donc à définir le produit scalaire de façon
à satisfaire les propriétés mathématiques, et à adimensionner les variables afin de remédier aux problèmes
d’unité. Le produit scalaire (2.91) ainsi modifié est alors défini par
Z
hq, riL2 = q T Padim
T
Padim r dΩ, (4.52)

où la matrice Padim contient des coefficients de pondération choisis de manière à rendre chaque variable qi
et ri adimensionnelle. Il suffit alors de choisir une densité de référence ρ0 et une vitesse de référence U0 et
de construire la matrice de pondération
 
ρ0 01,d 0
1
Padim = 0d,1 U0 Id,d 0d,1  (4.53)
1
0 01,d ρ0 U02

associée aux variables primitives modifiées q = [ϑ, u, p]T . Rowley [192] a cependant signalé que la procé-
dure d’adimensionnement n’est pas transparente et altère l’optimalité des modes POD obtenus puisque les
projections effectuées dépendent du choix relativement arbitraire des valeurs prises par les grandeurs d’adi-
mensionnement. Bourguet et al. [34] ont quant à eux proposé d’utiliser un adimensionnement de chaque
variable par la variance statistique temporelle. Le produit

T
Padim Padim a alors été remplacé par une matrice
2
diagonale dont les termes sont donnés par 1/ σi + ε , où ε est une petite constante positive introduite pour
éviter les indéterminations sur les bords du domaine. La variance statistique temporelle σi2 est quant à elle
définie pour chaque variable qi pour i = 1, . . . , nv par
Z t0 +Te
1 2
σi2 = (qi (t) − q i ) dt. (4.54)
Te t0

Le produit scalaire obtenu de cette manière relève néanmoins toujours d’un processus d’adimensionnement
susceptible d’affecter l’optimalité des modes POD.
Pour terminer, il est important de mentionner que pour des raisons de stabilité plutôt que par un souci
de cohérence dimensionnelle du produit des variables, Kirby [132] a proposé de définir le produit scalaire
sur l’espace de Sobolev W n,p = {u ∈ Lp (Ω); Dα u ∈ Lp (Ω)}, où Dα désigne une dérivée partielle de u telle
que 0 ≤ |α| ≤ n et Lp est l’espace de Lebesgue pour lequel les puissances d’ordre p de u sont intégrables.

116
4.4. Modélisation du fluide avec les variables primitives modifiées

De cette façon, le calcul des modes POD tient compte des corrélations du champ, du flux, de la dissipation,
et ainsi de suite. L’application de ce produit scalaire sur l’équation de Kuramoto-Sivashinsky a révélé que
la prise en compte des dérivées d’ordre deux dans le calcul des modes POD a un effet stabilisateur pour la
réponse du modèle d’ordre réduit. Iollo et al. [117] ont pour leur part redéfini le produit scalaire sur l’espace
de Sobolev H 1 = {u ∈ L2 (Ω); D1 u ∈ L2 (Ω)} de façon à tenir compte des gradients. Dans ce cas, le produit
scalaire est transformé en
Z X nv Z X nv nv Z
" d
#
X X ∂qi ∂ri
hq, riH 1 = qi ri dΩ + µH 1 ∇qi ∇ri dΩ = qi ri + µH 1 dΩ, (4.55)
Ω i=1 Ω i=1 i=1 Ω
∂xl ∂xl
l=1

où µH 1 est un paramètre de pondération qui doit être ajusté — de manière empirique — pour stabiliser
correctement le modèle d’ordre réduit. D’après les travaux existants, aucun produit scalaire véritablement
cohérent n’a pu être établi dans le cas général des équations de Navier-Stokes pour un fluide compressible.
L’adimensionnement des variables semble donc être pour l’instant la seule solution envisageable pour ef-
fectuer les produits scalaires sans violer la cohérence dimensionnelle des produits effectués. Bien que ce
choix ne constitue pas la solution idéale, il s’inscrit naturellement dans le processus de calcul du code elsA
qui fournit des clichés sous forme adimensionnelle.

4.4.3 Équations locales de Navier-Stokes en formulation ALE avec les


variables primitives modifiées
D’après les remarques effectuées dans les deux paragraphes précédents, il s’avère que l’écriture des
équations avec les variables primitives modifiées est adéquate pour la construction d’un modèle d’ordre
réduit POD-Galerkin. Toutefois, les équations ont été établies dans l’annexe E.2 dans le cadre d’une formu-
lation eulérienne pour simplifier la présentation. Dans l’optique de développer un modèle d’ordre réduit
en aéroélasticité, il est nécessaire d’étendre les équations locales (E.98) à une description ALE formulée dans
le repère absolu RA ou entraîné RE .

4.4.3.1 Formulation dans le repère absolu

La description ALE se déduit immédiatement des équations (E.98) en notant que la dérivée temporelle
qui apparaît dans le membre de gauche correspond à la dérivée ∂ · /∂t|x puisqu’il s’agit d’une description
eulérienne. Par conséquent, la relation (4.9) est mise à profit pour transformer les équations locales et obtenir
ainsi une description ALE dans laquelle intervient la vitesse de déplacement s des points du domaine
arbitraire. Lorsque les quantités vectorielles sont décrites dans le repère absolu RA , les équations de Navier-
Stokes prennent la forme


 ∂ϑ
 + (uA − sA ) · ∇A ϑ = ϑ divA uA


 ∂t χ

 ∂u

A
+ (uA − sA ) · ∇A uA = −ϑ ∇A p + ϑ divA τ (uA ) (4.56)

 ∂t


 χ  

 ∂p kθ

 ∂t + (uA − s A ) · ∇A p = −γ p div u
A A + (γ − 1)τ (uA ) : ∇ u
A A + div A ∇A (ϑ p) .
χ cv

4.4.3.2 Formulation dans le repère entraîné

Les équations écrites avec les variables primitives modifiées dans le repère entraîné s’obtiennent soit
à partir des équations intégrales de Navier-Stokes fournies aux équations (4.31) et (4.33) dans le repère
entraîné, soit à partir des équations locales (4.56) écrites en formulation ALE dans le repère absolu. La
première alternative nécessite d’effectuer le travail de changement de variables et de ramener les équations
intégrales à des équations locales alors que la seconde requiert seulement une transformation de repère. On
opte pour la seconde alternative pour bénéficier des résultats déjà établis dans l’annexe E.1.

117
4. M ODÉLISATION DU FLUIDE EN VUE DE LA CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT

Formulation en vitesse absolue Pour établir les équations locales, on a besoin de relations de passage
entre la base absolue BA et la base du repère entraîné BE pour l’opérateur u · ∇. Il suffit pour cela de
remarquer que pour un scalaire s et un vecteur c, (c · ∇)s = c·(∇s). De même, pour un vecteur r, (c · ∇)r =
(∇r) c. Ainsi, le changement de base pour l’opérateur d’advection s’écrit
cA · ∇A s = cE · ∇E s et (4.57a)
cA · ∇A rA = R cE · ∇E rE (4.57b)
à l’aide des formules (E.27) et (E.29). L’équation de conservation du covolume se déduit donc de la première
équation du système (4.56) avec les relations (4.57a) et (E.32) qui conduisent à

∂ϑ
+ (uE − sE ) · ∇E ϑ = ϑ divE uE . (4.58)
∂t χ
Pour l’équation de conservation de la quantité de mouvement, on suit le même procédé que celui em-
ployé au paragraphe E.1.2.2 : la formule de dérivation en repère mobile (E.22) est appliquée cette fois à
rA = uA puis les équations sont projetées dans le repère entraîné en multipliant par RT ce qui donne


T δuA
R + RT ω A ∧ uA + RT (uA − sA ) · ∇A uA = −RT ϑ∇A p + RT ϑdivA τ (uA ). (4.59)
δt χ
En explicitant la dérivée δ · /δt définie par l’équation (E.18), le premier terme s’écrit ∂uE /∂t. Le second
terme est modifié en introduisant le vecteur vitesse angulaire défini à l’équation (E.40) : RT ωA ∧ uA =
RT ΩA uA = RT (Ṙ RT ) R uE = ΩE uE = ω E ∧ uE . Le troisième et le quatrième terme sont simplement
modifiés à l’aide des relations (4.57b) et (E.27) respectivement. Enfin, le dernier terme se déduit de la relation
(E.34). Le bilan de quantité de mouvement a donc pour expression

∂uE
+ (uE − sE ) · ∇E uE = −ϑ∇E p + ϑdivE τ (uE ) − ω E ∧ uE . (4.60)
∂t χ
Enfin le bilan de conservation de l’énergie se déduit de la dernière équation dans le système (4.56) à
l’aide des relations (4.57a) et (E.32) pour transformer les termes (uA − sA ) · ∇A p en (uE − sE ) · ∇E p et
γ p divA uA en γ p divE uE respectivement.
Les deux derniers termes ∇A uA : τ (uA ) et divA [kθ /cv ∇A (p ϑ)] sont invariants par changement de repère.
En effet, le double produit de contraction peut s’écrire (R A RT ) : (R B RT ) en utilisant les relations (E.29) et
(E.43) et en notant A = ∇E uE et B = τ (uE ). On a alors (R A RT ) : (R B RT ) = (Rij Ajk Rlk ) (Rij Bjk Rlk ) =
T
(Rij Rji T
) Ajk Bjk (Rlk Rkl ). Or puisque la matrice R est orthogonale, le double produit de contraction se
réduit à Ajk Bjk = ∇E uE : τ (uE ).
Enfin, en supposant kθ /cv constant, le dernier terme s’écrit kθ /cv divA (∇A (pϑ)) = kθ /cv ∆A (pϑ). Or
puisque le laplacien s’applique à une quantité scalaire, on a ∆A (pϑ) = ∆E (pϑ) et le bilan pour la pression
s’écrit alors

∂p kθ
+ (uE − sE ) · ∇E p = −γ p divE uE + (γ − 1)∇E uE : τ (uE ) + ∆E (p ϑ). (4.61)
∂t χ cv
Finalement, la formulation ALE locale des équations de Navier-Stokes écrites avec les variables primi-
tives modifiées dans le repère entraîné avec les composantes de la vitesse absolue s’écrit


 ∂ϑ
 + (uE − sE ) · ∇E ϑ = ϑ divE uE


 ∂t χ

 ∂u

E
+ (uE − sE ) · ∇E uE = −ϑ∇E p + ϑdivE τ (uE ) − ω E ∧ uE (4.62)

 ∂t χ



 ∂p kθ


 ∂t + (uE − sE ) · ∇E p = −γ p divE uE + (γ − 1)∇E uE : τ (uE ) + c ∆E (p ϑ).
χ v

Les équations formulées dans le repère entraîné avec les variables primitives modifiées conservent une
forme quadratique polynomiale en fonction des variables qE = [ϑ, uE , p]T lorsque les composantes de la
vitesse absolue exprimée dans le repère RE sont employées. Ainsi, il restera possible de formuler le modèle
d’ordre réduit au moyen d’une projection de Galerkin sur la base constituée des modes POD.

118
4.4. Modélisation du fluide avec les variables primitives modifiées

Formulation en vitesse relative Enfin, il reste à établir les équations de Navier-Stokes dans le repère
entraîné avec les variables primitives modifiées utilisant les composantes de la vitesse relative. Ici encore, il
suffit de remplacer les composantes de la vitesse absolue uE par uE = vE + se,E et de scinder la vitesse du
maillage en deux contributions telles que sE = se,E + sd,E . Puisque le champ de vitesse se,E est solenoïdal,
la propriété (E.52b) permet d’obtenir facilement le bilan de conservation du covolume

∂ϑ
+ (vE − sd,E ) · ∇E ϑ = ϑ divE vE (4.63)
∂t χ

à partir de l’équation (4.58). Ensuite, le bilan de conservation de la vitesse absolue (4.60) est transformé afin
d’obtenir un bilan pour la vitesse relative en utilisant la relation (E.53), d’où l’expression

∂vE ∂se,E
+ + (vE − sd,E ) · ∇E vE + (vE − sd,E ) · ∇E se,E =
∂t χ ∂t χ (4.64)
−ϑ∇E p + ϑdivE τ (vE ) − ω E ∧ vE − ω E ∧ se,E .

Le théorème de Reynolds local (4.9) utilisé avec la vitesse de déformation de maillage sd,E permet de
transformer la seconde dérivée temporelle suivant l’égalité

∂se,E ∂se,E (( ((
+ (vE − sd,E ) · ∇E se,E = ((
+ sd,E · ∇(
E se,E + vE · ∇E se,E − ( ((
sd,E · ∇(
E se,E (4.65)
∂t χ ∂t x (

dans laquelle une partie des termes se simplifie. Enfin, on remarque que vE · ∇E se,E = (∇E se,E ) vE =
ωE ∧ vE avec la propriété (E.52c). Par conséquent, en remplaçant l’expression (4.65) dans (4.64) on parvient
au bilan
∂vE
+ (vE − sd,E ) · ∇E vE = −ϑ∇E p + ϑdivE τ (vE ) + fCor + fcen (4.66)
∂t χ
dans lequel on a fait apparaître la force de Coriolis ainsi que la force centrifuge définies à l’équation (4.34).
Le bilan de la pression s’obtient en modifiant le terme convectif comme pour le bilan du covolume, puis en
utilisant la propriété (E.52b) pour le terme γ p divE uE avec uE = vE + se,E . Enfin, le double produit de
contraction s’écrit ∇E uE : τ (uE ) = ∇E vE : τ (vE ) + ∇E se,E : τ (vE ) avec la relation (E.53). Par ailleurs,
puisque le tenseur ∇E se,E est antisymétrique et que le tenseur τ (vE ) est au contraire symétrique, le double
produit de contraction ∇E se,E : τ (vE ) s’annule10 . Au final, le bilan pour la pression s’écrit donc

∂p kθ
+ (vE − sd,E ) · ∇E p = −γ p divE vE + (γ − 1)∇E vE : τ (vE ) + ∆E (p ϑ), (4.67)
∂t χ cv

et la formulation ALE locale des équations de Navier-Stokes écrites avec les variables primitives modifiées
dans le repère entraîné avec les composantes de la vitesse relative s’écrit


 ∂ϑ
 + (vE − sd,E ) · ∇E ϑ = ϑ divE vE


 ∂t χ

 ∂v

E
+ (vE − sd,E ) · ∇E vE = −ϑ∇E p + ϑdivE τ (vE ) + fCor + fcen (4.68)
 ∂t χ




 ∂p kθ


 ∂t + (vE − sd,E ) · ∇E p = −γpdivE vE + (γ − 1)∇E vE : τ (vE ) + c ∆E (pϑ).
χ v

10 Sur ce point, voir la remarque effectuée dans l’annexe E.1.3 p. 257.

119
4. M ODÉLISATION DU FLUIDE EN VUE DE LA CONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT

4.5 Synthèse du chapitre 4


Dans ce chapitre, les formulations ALE des équations intégrales de Navier-Stokes d’un fluide compres-
sible visqueux ont tout d’abord été rappelées lorsque le système est décrit dans un repère absolu ou entraîné
avec les variables conservatives. Les différentes formulations sont résumées dans le tableau 4.1 en fonction
des composantes de la vitesse employées. Ces équations, écrites à l’aide des variables conservatives, sont
généralement celles résolues par les codes de calcul au moyen d’une discrétisation en Volumes Finis. Elles
sont en particulier adaptées pour traiter les problèmes en aéroélasticité où une structure déformable et
éventuellement animée d’un mouvement de corps rigide est considérée.

RA RE
Composantes de vitesse uA vA uE vE
Formulation FALE-RAUA FALE-RAVA FALE-REUE FALE-REVE

Tableau 4.1 : Notations employées pour les différentes formulations ALE possibles des équations du fluide.

Toutefois, dans l’optique de construire ensuite un modèle d’ordre réduit POD-Galerkin, les formulations
basées sur les variables conservatives sont inadéquates. Il s’avère alors judicieux d’employer les variables
primitives modifiées comme l’a suggéré Vigo [240] puisque les équations prennent une forme polynomiale
quadratique qui se prête bien à la projection de Galerkin intervenant au cours de la construction du mo-
dèle d’ordre réduit. Les équations locales formulées avec ce jeu de variables ont alors été étendues à une
description ALE pour tenir compte d’une structure déformable placée dans le fluide, ce qui a conduit au
développement de la formulation FALE-RAUA avec les variables primitives modifiées. Enfin, les équations
ont été formulées dans le repère entraîné RE afin de tenir compte d’un éventuel mouvement de corps rigide
imposé à la structure en plus de son caractère déformable. De cette manière, les formulations FALE-REUE
et FALE-REVE ont pu être développées avec les variables primitives modifiées. Le point crucial est que ces
formulations conservent une forme polynomiale quadratique — même dans le repère entraîné — si bien
que la projection de Galerkin reste possible.
Dans les chapitres suivants, on s’intéresse à la construction de modèles d’ordre réduit POD-Galerkin
sur la base des équations écrites avec les variables primitives modifiées. Dans un premier temps, un mo-
dèle d’ordre réduit dit aérodynamique est construit pour l’écoulement dans un domaine à parois fixes, puis
on s’intéressera finalement au développement d’un modèle d’ordre réduit aéroélastique afin de tenir compte
d’une structure mobile dans le domaine fluide.

120
Chapitre 5
Construction et mise en œuvre d’un modèle
d’ordre réduit POD-Galerkin non-linéaire et
autonome pour l’aérodynamique

Sommaire
5.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122
5.2 Construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123
5.2.1 Projection de Galerkin des équations de Navier-Stokes d’un fluide compressible . . . 123
5.2.2 Calcul des coefficients du modèle d’ordre réduit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125
5.2.2.1 Expression des coefficients quadratiques convectifs . . . . . . . . . . . . . . 126
5.2.2.2 Expression des coefficients quadratiques diffusifs . . . . . . . . . . . . . . . 126
5.2.3 Intégration du modèle d’ordre réduit en temps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129
5.3 Correction des instabilités des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin . . . . . . . . . . . . 130
5.3.1 Origine des instabilités et principe de la correction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130
5.3.2 Techniques de correction a priori des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin . . . . . . 131
5.3.2.1 Correction des vecteurs de la base POD . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131
5.3.2.2 Introduction d’amortissement dans le modèle d’ordre réduit . . . . . . . . . 132
5.3.3 Techniques de correction a posteriori des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin . . . 134
5.3.3.1 Optimisation des coefficients du modèle d’ordre réduit . . . . . . . . . . . . 134
5.3.3.2 Stabilisation intrinsèque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136
5.3.4 Autres techniques de correction des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin . . . . . . 138
5.4 Calcul des modes POD de l’écoulement autour d’un profil NACA0012 fixe en forte incidence139
5.4.1 Simulation numérique de l’écoulement autour du profil NACA0012 . . . . . . . . . . 139
5.4.2 Calcul des modes POD de l’écoulement autour du profil NACA0012 . . . . . . . . . . 142
5.5 Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0012 . . . . . . 147
5.5.1 Réponse du modèle d’ordre réduit non corrigé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147
5.5.2 Introduction de termes correctifs dans le modèle d’ordre réduit . . . . . . . . . . . . . 149
5.5.2.1 Correction du nombre de Reynolds . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 150
5.5.2.2 Correction de Cazemier et al. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151
5.5.2.3 Correction de Kalb et Deane . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152
5.5.3 Calibrage des paramètres du modèle d’ordre réduit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 154
5.5.3.1 Calibrage du nombre de Reynolds . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 154
5.5.3.2 Calibrage des coefficients du modèle d’ordre réduit . . . . . . . . . . . . . . 157
5.5.4 Comparaison des réponses corrigées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158
5.6 Synthèse du chapitre 5 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160

121
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

5.1 Introduction
Maintenant que les équations du fluide ont été présentées dans le cas général d’un fluide newtonien
homogène, il reste à décrire la forme du modèle d’ordre réduit basé sur les équations de Navier-Stokes
d’un fluide compressible. Dans ce chapitre, un premier modèle d’ordre réduit POD-Galerkin est construit
pour les équations autonomes non-linéaires de Navier-Stokes. Celles-ci sont formulées avec les variables
primitives modifiées dans le repère absolu puisque les frontières du domaine spatial sont supposées fixes.
La formulation FALE-RAUA se ramène donc dans ce cas à la formulation FEUL-RAUA basée sur une des-
cription eulérienne.
Dans un premier temps, les expressions analytiques des coefficients du modèle d’ordre réduit sont dé-
terminées à partir de la projection de Galerkin. Le problème de la stabilité des modèles d’ordre réduit POD-
Galerkin sera alors évoqué et un certain nombre de méthodes de correction seront présentées afin d’amé-
liorer la stabilité et la précision de la réponse du modèle d’ordre réduit.
Le modèle d’ordre réduit sera alors évalué sur l’exemple d’un profil NACA0012 fortement incliné de
sorte qu’un détachement périodique de vortex apparaisse dans le sillage. Les paramètres du fluide seront
choisis de manière à obtenir un écoulement laminaire et faiblement compressible afin d’analyser la qualité
du modèle d’ordre réduit en l’absence de modélisation des effets turbulents. Le modèle d’ordre réduit sera
finalement corrigé au moyen de diverses méthodes afin de déterminer quelles sont les techniques les plus
appropriées pour améliorer la précision de la réponse obtenue.

122
5.2. Construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin

5.2 Construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin


5.2.1 Projection de Galerkin des équations de Navier-Stokes d’un fluide compressible
dans un domaine fixe
Le modèle d’ordre réduit est construit par projection de Galerkin des équations continues du système
aérodynamique de manière à préserver les non-linéarités. Les équations de Navier-Stokes formulées avec
les variables primitives modifiées q = [ϑ, u, p]T dans le chapitre précédent ont permis d’aboutir à un sys-
tème explicite d’équations aux dérivées partielles dans lequel des non-linéarités polynomiales au plus qua-
dratiques ont été mises en évidence. Cette forme se prête bien à la procédure de projection de Galerkin
présentée au paragraphe 2.4.3 de manière générale.
On considère dans ce chapitre que l’écoulement est étudié dans un domaine Ω dont les frontières ∂Ω
sont fixes. Ainsi, les équations de Navier-Stokes sont décrites au moyen de la formulation FEUL-RAUA qui
se déduit de la formulation FALE-RAUA en supposant simplement que la vitesse des points du domaine
arbitraire de la description ALE est nulle : sA = 0. Dans un premier temps, les équations intégrales (4.27)
de Navier-Stokes sont résolues avec le logiciel elsA pour générer un ensemble de clichés q (m) à partir des-
quels les modes POD sont calculés. Les clichés ainsi obtenus sont adimensionnels et le vecteur vitesse u est
(m)
exprimé dans le repère absolu RA . En toute rigueur, il faudrait noter les clichés qA pour signifier que les
vecteurs sont exprimés dans la base absolue, mais pour alléger la notation on omet l’indice A dans l’écri-
ture des clichés ainsi que dans celle de la vitesse notée simplement u = uA = MatBA (u). Les modes POD
sont alors déterminés à partir du problème aux valeurs propres (2.81) avec la relation (2.82). Les modes
POD sont supposés être contenus dans l’espace de Hilbert H = (L2 (Ω))nv . Le produit scalaire associé à cet
espace est celui qui a été défini à l’équation (4.52) avec Padim = Inv puisque les variables sont adimension-
nelles. La base Φ est constituée des q modes POD ϕ(i) qui seront décomposés en nv composantes relatives
(i) (i) (i)
à chacune des variables : ϕ(i) = [ϕϑ , ϕu , ϕp ]T . Chaque contribution est une fonction de l’espace L2 (Ω)
mais ne correspond pas, lorsqu’elle est considérée seule, à un mode POD.
Avant de projeter les équations locales de Navier-Stokes données par les relations (4.56), il est préférable
de les rendre adimensionnelles afin que le modèle d’ordre réduit s’inscrive dans la continuité du calcul
aérodynamique effectué avec elsA. En outre, l’utilisation des équations adimensionnelles est rendue né-
cessaire par le choix du produit scalaire employé qui n’a de sens que si les variables ont toutes la même
unité, ou, par la force des choses, si elles sont toutes adimensionnelles. L’adimensionnement est pratiqué
à partir d’une longueur L0 , d’une vitesse U0 , d’une masse volumique ρ0 et d’une température θ0 de réfé-
rences qui servent à définir un temps t0 = L0 /U0 , une pression p0 = ρ0 U02 , et un covolume ϑ0 = 1/ρ0
pour l’adimensionnement. Finalement on introduit une viscosité de référence µr et une conductivité ther-
mique de référence kθ,r si bien que le processus d’adimensionnement fait apparaître les célèbres nombres
de Reynolds Re, de Prandtl Pr et de Mach Ma respectivement définis par

ρ0 U 0 L 0 µr cp U0
Re = , Pr = et Ma = (5.1)
µr kθ,r a

à partir des grandeurs de référence et de la célérité du son notée ici a. Les équations de Navier-Stokes d’un
fluide compressible écrites avec les variables primitives modifiées prennent alors la forme adimensionnelle

 ∂ϑ∗

 + u∗ · ∇x∗ ϑ∗ = ϑ∗ divx∗ u∗

 ∂t ∗


 ∂u∗ 1 ∗

+ u∗ · ∇x∗ u∗ = −ϑ∗ ∇x∗ p∗ + ϑ divx∗ τ ∗µr (u∗ ) (5.2)

 ∂t Re

  ∗ 

 ∂p∗ γ −1 γ kθ

 ∗ ∗ ∗
+ u · ∇x∗ p = −γ p divx∗ u +∗ ∗ ∗ ∗
∇x∗ u : τ µr (u ) + ∗ ∗
divx∗ ∗ ∇x∗ (ϑ p ) .
∂t∗ Re Re Pr cv

Les quantités étoilées dans l’expression précédente indiquent le caractère adimensionnel des différentes
variables : ϑ∗ = ϑ/ϑ0 , u∗ = u/U0 , p∗ = p/p0 . Le processus d’adimensionnement concerne aussi les opéra-
teurs de dérivation, ce qui nécessite l’emploi du temps adimensionnel t∗ = t/t0 et des longueurs x∗ = x/L0
dans les opérateurs de divergence et de gradient. Enfin, le tenseur des contraintes visqueuses τ (u) est rendu

123
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

adimensionnel en factorisant par la viscosité de référence µr , ce qui d’après la définition donnée à l’équation
(4.23) conduit à l’égalité
 
µr U0 µ ∗ ∗ λ ∗ µr U0 ∗ ∗
τ (u) = 2 D(x , u ) + (divx u ) Id =
∗ τ (u ). (5.3)
L0 µr µr L0 µr
Le système d’équations (5.2) est simplifié en émettant quelques hypothèses supplémentaires concer-
nant notamment les coefficients de viscosité. On suppose ainsi que l’hypothèse de Stokes est vérifiée, ce
qui conduit à prendre λ = −2/3 µ pour le second coefficient de viscosité. Une seconde hypothèse, beau-
coup plus forte, consiste à considérer que le premier coefficient de viscosité µ est constant et égal à µr .
Ceci conduit à négliger d’une part la loi de Sutherland qui fournit les variations de viscosité en fonction
de la température, et d’autre part les éventuelles fluctuations de viscosité turbulente. Ces simplifications
conduisent à µ/µr = 1 et λ/µr = −2/3, de sorte que l’expression du tenseur des contraintes visqueuses
adimensionnel τµ∗r devient
2
τµ∗r (u∗ ) = 2 D(x∗ , u∗ ) − (divx∗ u∗ ) Id . (5.4)
3
On supposera enfin que le coefficient de conductivité thermique kθ est constant et égal à kθ,r , de sorte
que kθ∗ = 1. Par ailleurs, sous l’hypothèse d’un gaz parfait, il est possible de supposer que les coefficients
de chaleur spécifique sont constants, si bien que c∗v = 1. Finalement, les équations du fluide s’écrivent sous
la forme du système dynamique
1 D
q̇ = QC (q, q) + Q (q, q), (5.5)
Re
où les termes quadratiques ont été scindés en deux contributions, l’une relative aux termes convectifs et
l’autre aux termes diffusifs. Les notations étoilées sont à présent abandonnées pour alléger l’écriture, de
même que l’indice µr précisant l’adimensionnement du tenseur des contraintes ; sauf mention contraire,
les variables et autres quantités manipulées seront donc supposées adimensionnelles. En particulier, le vec-
teur q fera référence au vecteur des variables adimensionnelles q∗ = [ϑ∗ , u∗ , p∗ ]. Les opérateurs associés à
l’équation (5.2) sont alors définis par
   
−u · ∇ϑ + ϑ div u 0
 ϑ div τ (u) 
QC (q, q) =  −u · ∇u − ϑ ∇p  et QD (q, q) =  γ . (5.6)
−u · ∇p − γ p div u (γ − 1)∇u : τ (u) + ∆(ϑ p)
Pr
La forme générale du modèle d’ordre réduit se déduit immédiatement de l’équation (5.5) en y intro-
duisant la décomposition POD vectorielle de l’équation (2.83). La bilinéarité des opérateurs quadratiques
convectif QC et diffusif QD mène alors à l’expression
q
X 1 D
ȧj ϕ(j) = QC (q, q) + Q (q, q)
j=1
Re
q      
X
C (j) C (j) 1 D (j)
 1 D  (j) 
+ Q q, ϕ + Q ϕ ,q + Q q, ϕ + Q ϕ , q aj (5.7)
j=1
Re Re
q    
X
C (j) (k) 1 D  (j) (k) 
+ Q ϕ ,ϕ + Q ϕ ,ϕ aj ak ,
Re
j,k=1

dans laquelle les symboles de sommation ont pu être extraits. L’égalité précédente est ensuite projetée sur
les q modes POD ϕ(i) à l’aide du produit scalaire défini à l’équation (4.52), pour lequel les modes POD sont
orthonormaux. Le modèle d’ordre réduit est alors caractérisé par l’ensemble d’équations non-linéaires
q
X q
X
ȧi = Ki + Lij aj + Qjik aj ak . (5.8)
j=1 j,k=1

Bien que les équations du fluide écrites en variables primitives modifiées soient composées uniquement
de termes quadratiques, des termes constants et linéaires apparaissent dans le modèle d’ordre réduit en

124
5.2. Construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin

raison de la partie moyenne q introduite dans la décomposition POD affine (2.83) adoptée. Les coefficients
du modèle d’ordre réduit sont donc donnés par les expressions
 D E

 K C
= Q C
(q, q), ϕ (i)
1 D i
Ki = KiC + Ki avec D E ,
Re 
 KiD = QD (q, q), ϕ(i)
 D     E
 C C (j) C (j) (i)
1 D L ij = Q q, ϕ + Q ϕ , q , ϕ
Lij = LCij + L avec D     E , (5.9)
Re ij  LD = QD q, ϕ(j) + QD ϕ(j) , q , ϕ(i)
ij
 D   E
 C C (j) (k) (i)
1 D Q ijk = Q ϕ , ϕ , ϕ
Qijk = QCijk + Q avec D   E .
Re ijk  QD = QD ϕ(j) , ϕ(k) , ϕ(i)
ijk

Le modèle d’ordre réduit est donc entièrement défini par les coefficients précédents dont le nombre
s’élève à Nc = q + q 2 + q 3 . Toutefois, seuls q 2 (q + 1)/2 coefficients quadratiques sont réellement néces-
saires puisqu’une partie des termes est redondante. Par conséquent le modèle d’ordre réduit est décrit par
Nc′ = q(q + 1)(q + 2)/2 coefficients.
Avant de poursuivre, le modèle d’ordre réduit POD-Galerkin est écrit sous forme tensorielle afin d’allé-
ger l’écriture et de simplifier la mise en œuvre de l’intégration temporelle qui est effectuée de façon vecto-
rielle. Le terme quadratique qui implique un tenseur d’ordre trois peut s’écrire comme le produit tensoriel
(Q ⊗ a) ⊗ a. En effet, d’après les relations fournies dans l’annexe D.1.3 concernant le produit tensoriel gé-
néralisé, on obtient la suite d’égalités

(Q ⊗ a) ⊗ a = [Qijk (δ i ⊗ δ j ⊗ δ k ) ⊗ al δ l ] ⊗ am δ m
= [Qijk al δkl (δ i ⊗ δ j )] ⊗ am δ m
= Qijk ak am (δ i ⊗ δ j ) ⊗δ m (5.10)
= Qijk ak am δjm δ i
= Qijk ak aj δ i .

Le produit tensoriel (Q ⊗ a) ⊗ a est donc un vecteur dont chaque composante est donnée par Qijk ak aj ,
où la convention d’Einstein sur les indices répétés est utilisée. Par conséquent les composantes de ce vecteur
correspondent bien aux contributions quadratiques établies à l’équation (5.8). En toute rigueur, le modèle
d’ordre réduit devrait s’écrire sous la forme
 
ȧ = K + L ⊗ a + Q ⊗ a ⊗ a (5.11)

en adoptant les symboles ⊗ pour le produit tensoriel et en désignant l’ordre du tenseur par autant de barres
sous l’opérateur. Cependant, on adoptera de préférence par la suite l’écriture simplifiée

ȧ = K + L a + (Q ⊗ a) a . (5.12)

Le dernier symbole du produit tensoriel contracté entre (Q ⊗ a) et a peut être omis puisqu’il s’agit simple-
ment d’un produit matrice-vecteur, au même titre que celui opérant entre L et a.

5.2.2 Calcul des coefficients du modèle d’ordre réduit


Le détail des expressions des coefficients du modèle d’ordre réduit n’est fourni que pour les termes
quadratiques Qijk , puisque les termes constants et linéaires sont aussi construits à partir de la projection de
l’opérateur Q = QC + QD /Re appliqué non plus au couple (ϕ(j) , ϕ(k) ) mais aux couples (q, q), (ϕ(j) , q) et
(q, ϕ(j) ) respectivement.
Afin de clarifier l’exposé, les opérateurs quadratiques introduits à l’équation (5.6) sont découpés en
trois parties relatives aux différentes variables en jeu, au même titre que pour les modes POD décompo-
(i) (i) (i)
sés en ϕ(i) = [ϕϑ , ϕu , ϕp ]T . On notera ainsi QC (q, q) = [QC ϑ , Qu , Qp ] pour l’opérateur convectif, et
C C T

Q (q, q) = [Qϑ , Qu , Qp ] pour l’opérateur diffusif.


D D D D T

125
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

5.2.2.1 Expression des coefficients quadratiques convectifs


Les coefficients quadratiques QC ijk ont été définis à l’équation (5.9) comme la projection de la contribu-
tion convective QC (ϕ(j) , ϕ(k) ) sur le mode POD ϕ(i) . Le développement du produit scalaire donne donc
Z   Z   Z  
C C (j) (k) (i) C (j) (k) (i)
Qijk = Qϑ ϕ , ϕ ϕϑ dΩ + Qu ϕ , ϕ · ϕu dΩ + QC (j)
p ϕ ,ϕ
(k)
ϕ(i)
p dΩ, (5.13)
Ω Ω Ω

puis en explicitant les opérateurs quadratiques, l’expression de la contribution convective devient


Z  
(j) (k) (k) (j) (i)
QCijk = − ϕu · ∇ϕϑ − ϕϑ div ϕ u ϕϑ dΩ

Z  
(j) (k) (j)
− ϕu · ∇ϕu + ϕϑ ∇ϕ(k) p · ϕ(i)
u dΩ . (5.14)

Z  
(j)
− ϕu · ∇ϕ(k) (j)
p + γ ϕp div ϕu
(k)
ϕ(i)
p dΩ

Une forme encore plus détaillée des coefficients QC


ijk s’obtient en développant les opérateurs tensoriels
dans la base cartésienne orthonormée directe BA associée aux directions x, y et z. Les coefficients sont alors
donnés par l’expression
Z " (k) (k) (k) (j) (j) (j)
!#
∂ϕϑ ∂ϕϑ ∂ϕϑ (k)∂ϕu ∂ϕv ∂ϕw (i)
QC
ijk = − ϕ(j)
u + ϕ(j)
v + ϕ(j)
w − ϕϑ + + ϕϑ dΩ
Ω ∂x ∂y ∂z ∂x ∂y ∂z
Z " (k) (k) (k) (k)
#
∂ϕu ∂ϕu ∂ϕu (j) ∂ϕp
− ϕ(j)
u + ϕ(j)
v + ϕ(j)
w + ϕϑ ϕ(i)
u dΩ
Ω ∂x ∂y ∂z ∂x
Z " (k) (k) (k) (k)
#
∂ϕv ∂ϕv ∂ϕv (j) ∂ϕp
− ϕ(j)
u + ϕ(j)
v + ϕ(j)
w + ϕϑ ϕ(i)
v dΩ . (5.15)
Ω ∂x ∂y ∂z ∂y
Z " (k) (k) (k) (k)
#
∂ϕw ∂ϕw ∂ϕw (j) ∂ϕp
− ϕ(j)
u + ϕ(j)
v + ϕ(j)
w + ϕϑ ϕ(i)
w dΩ
Ω ∂x ∂y ∂z ∂z
Z " (k) (k) (k) (k) (k) (k)
!#
∂ϕp ∂ϕp ∂ϕp ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕw
− ϕ(j)
u + ϕ(j)
v + ϕ(j)
w + γϕ(j)
p + + ϕ(i)
p dΩ
Ω ∂x ∂y ∂z ∂x ∂y ∂z

Le calcul des coefficients quadratiques convectifs nécessite donc seulement de disposer d’une méthode
de calcul des gradients des modes POD ϕ(i) et de la partie stationnaire q = [ϑ, u, p]T qui intervient dans
les coefficients constants et linéaires. Le calcul des gradients et des intégrales volumiques s’effectuera en
suivant une approche Volumes Finis cohérente avec celle employée dans elsA pour discrétiser les champs
aérodynamiques (voir l’annexe E.3.2 p.265).

5.2.2.2 Expression des coefficients quadratiques diffusifs


Comme précédemment, les coefficients quadratiques diffusifs QD ijk définis à l’équation (5.9) comme la
projection de la contribution diffusive QD (ϕ(j) , ϕ(k) ) sur le mode POD ϕ(i) sont détaillés en développant
le produit scalaire en
Z   Z   Z  
(i)
QD
ijk = Q D
ϑ ϕ (j)
, ϕ(k)
ϕϑ dΩ + Q D
u ϕ(j)
, ϕ(k)
· ϕ(i)
u dΩ + Q D
p ϕ(j)
, ϕ(k)
ϕ(i)
p dΩ, (5.16)
Ω Ω Ω

puis en explicitant les opérateurs quadratiques pour aboutir à l’expression


Z  
(j)
D
Qijk = ϕϑ div τ ϕ(k)
u · ϕ(i)
u dΩ

Z h     i . (5.17)
γ (j) (k)
+ (γ − 1) ∇ϕ(j)
u : τ ϕ(k)
u + div ∇ ϕϑ ϕp ϕ(i)
p dΩ
Ω Pr

126
5.2. Construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin

Enfin, le développement des opérateurs tensoriels dans la base BA conduit à l’expression


Z " (k) (k) (k) (k) (k)
#
(j) 4 ∂ 2 ϕu ∂ 2 ϕu ∂ 2 ϕu 1 ∂ 2 ϕv 1 ∂ 2 ϕw (i)
QD
ijk = ϕϑ + + + + ϕu dΩ
Ω 3 ∂x2 ∂y 2 ∂z 2 3 ∂x∂y 3 ∂x∂z
Z " (k) (k) (k) (k) (k)
#
(j) ∂ 2 ϕv 4 ∂ 2 ϕv ∂ 2 ϕv 1 ∂ 2 ϕu 1 ∂ 2 ϕw (i)
+ ϕϑ + + + + ϕv dΩ
Ω ∂x2 3 ∂y 2 ∂z 2 3 ∂y∂x 3 ∂y∂z
Z " (k) (k) (k) (k) (k)
#
∂ 2 ϕw
(j) ∂ 2 ϕw 4 ∂ 2 ϕw1 ∂ 2 ϕu 1 ∂ 2 ϕv (i)
+ ϕϑ 2
+ + ++ ϕw dΩ
Ω ∂x ∂y 2 3 ∂z 2 3 ∂z∂x 3 ∂z∂y
Z " (k) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j)
#
2 ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕw ∂ϕu ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕu ∂ϕu ∂ϕw ∂ϕu (i)
+(γ − 1) 2 − − + + + + ϕp dΩ
Ω 3 ∂x ∂y ∂z ∂x ∂y ∂x ∂y ∂z ∂x ∂z
Z " (k) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j)
#
2 ∂ϕv ∂ϕu ∂ϕw ∂ϕv ∂ϕv ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕv ∂ϕw ∂ϕv (i)
+(γ − 1) 2 − − + + + + ϕp dΩ
Ω 3 ∂y ∂x ∂z ∂y ∂x ∂y ∂x ∂z ∂y ∂z .
Z " (k) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j)
#
2 ∂ϕw ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕw ∂ϕw ∂ϕu ∂ϕw ∂ϕw ∂ϕv ∂ϕw (i)
+(γ − 1) 2 − − + + + + ϕp dΩ
Ω 3 ∂z ∂x ∂y ∂z ∂x ∂z ∂x ∂y ∂z ∂y
Z (k) (k) (k)
!
γ (j) ∂ 2 ϕp ∂ 2 ϕp ∂ 2 ϕp (i)
+ ϕϑ + + ϕp dΩ
Pr Ω ∂x2 ∂y 2 ∂z 2
Z (j) (j) (j)
!
γ (k) ∂ 2 ϕϑ ∂ 2 ϕϑ ∂ 2 ϕϑ (i)
+ ϕp + + ϕp dΩ
Pr Ω ∂x2 ∂y 2 ∂z 2
Z (j) (j) (j)
!
γ ∂ϕϑ ∂ϕ(k)
p ∂ϕϑ ∂ϕ(k)
p ∂ϕϑ ∂ϕ(k)
p (i)
+ 2 + + ϕp dΩ
Pr Ω ∂x ∂x ∂y ∂y ∂z ∂z

(5.18)
L’expression des termes diffusifs fait apparaître des dérivées secondes caractéristiques des processus de
diffusion, ainsi que des dérivées croisées. Il est donc judicieux de réduire l’ordre des dérivées apparaissant
dans le calcul des coefficients en procédant à des intégrations par parties. Seuls deux groupes de contribu-
tions nécessitent d’évaluer des dérivées secondes et mixtes des champs vectoriels. Ces dérivées proviennent
(i)
précisément de la projection du terme QD u Rsur la contribution du mode POD ϕu associée, et de la projec-
(i) eD (j) (k) (i)
tion de QR p sur(j)ϕp . On(k)note(i)alors Qu = Ω ϕϑ div τ (ϕu ) · ϕu dΩ la contribution du terme de vitesse,
D

QeD = ∇ϕ : τ (ϕ ) ϕ p dΩ la première contribution de la projection du terme de pression et enfin


p,1 RΩ u
(j) (k)
u
(i)
QeD
p,2 = ∆(ϕ ϕ p )ϕ p dΩ la seconde contribution. Ainsi, le coefficient diffusif défini à l’équation (5.17)
Ω ϑ
se décompose en QD = Q eD + (γ − 1) Q eD + γ/Pr Q eD .
ijk u p,1 p,2
En supposant que le domaine Ω possède une frontière ∂Ω assez régulière pour qu’en tout point de ∂Ω,
la normale extérieure n = [nx , ny , nz ]T puisse être définie, il est alors possible d’utiliser les théorèmes d’in-
tégration par parties établis dans l’annexe D.4. Il suffit en effet d’appliquer la formule d’intégration par
eD (j) (k) (i)
parties (D.32) pour le terme Q u avec p = ϕϑ , D = τ (ϕu ) et u = ϕu , ce qui conduit à
Z  
eD = ϕ(j) div τ ϕ(k) · ϕ(i) dΩ
Q u ϑ u u

I   T  
(j) (i)
= ϕϑ ϕu τ ϕ(k)
u n d∂Ω (5.19)
∂Ω
Z   Z    
(j) (j)
− ϕϑ ∇ϕ(i)
u : τ ϕ(k)
u dΩ − ϕ(i)
u ⊗ ∇ϕϑ : τ ϕ(k)
u dΩ.
Ω Ω
eD
Par analogie, la formule d’intégration par parties (D.34) s’applique au terme Q p,2 en notant que pour tout
(i) (j) (k)
scalaire s, ∆s = div (∇s). En posant p = ϕp , q = ϕϑ et r = ϕp dans (D.34) on obtient
Z h  i
eD = ϕ(i) div ∇ ϕ(j) ϕ(k) dΩ
Q p,2 p ϑ p

I   Z Z (5.20)
(j) (j) (j)
= ϕ(i)
p ∇ ϕϑ ϕ(k)
p · n d∂Ω − ϕϑ ∇ϕ(k)
p · ∇ϕ(i)
p dΩ − ϕ(k) (i)
p ∇ϕϑ · ∇ϕp dΩ.
∂Ω Ω Ω

127
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

Les relations précédentes ne font plus apparaître maintenant que des dérivées premières qui inter-
viennent dans des intégrales surfaciques et volumiques. Le terme diffusif est donc de préférence scindé
en deux parties, l’une notée QD
Vol
comprenant les termes d’intégration sur le domaine Ω, et l’autre notée QDSurf
regroupant les termes intégrés sur le bord ∂Ω du domaine, de manière à ce que QD ijk = QVol + QSurf . Après
D D

regroupement des différents termes, les contributions volumiques et surfaciques s’écrivent

Z   Z    
(j) (j)
QD
Vol
= − ϕϑ ∇ϕ(i)
u : τ ϕ(k)
u dΩ − ϕ(i)
u ⊗ ∇ϕϑ : τ ϕ(k)
u dΩ
Ω Ω
Z  
+(γ − 1) ∇ϕ(j)
u : τ ϕ(k)
u ϕ(i)
p dΩ

Z Z (5.21)
γ (j) (k) (i) γ (j)
− ϕ ∇ϕp · ∇ϕp dΩ − ϕ(k) ∇ϕϑ · ∇ϕp(i) dΩ,
Pr Ω ϑ Pr Ω p
I   T   I  
(j) (i) (k) γ (j) (k)
QD
Surf
= ϕϑ ϕu τ ϕu n d∂Ω + ϕ(i)
p ∇ ϕϑ ϕp · n d∂Ω.
∂Ω Pr ∂Ω

La contribution volumique participant aux termes diffusifs se développe donc en

Z " (k) (k) (k)


! (i) (k) (k)
! (i) (k) (k)
! (i) #
(j) 2 ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕw ∂ϕu ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕu ∂ϕu ∂ϕw ∂ϕu
QD =−
Vol ϕϑ 2 − − + + + + dΩ
Ω 3 ∂x ∂y ∂z ∂x ∂y ∂x ∂y ∂z ∂x ∂z
Z " (k) (k) (k)
! (i) (k) (k)
! (i) (k) (k)
! (i) #
(j) 2 ∂ϕv ∂ϕu ∂ϕw ∂ϕv ∂ϕv ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕv ∂ϕw ∂ϕv
− ϕϑ 2 − − + + + + dΩ
Ω 3 ∂y ∂x ∂z ∂y ∂x ∂y ∂x ∂z ∂y ∂z
Z " (k) (k) (k)
! (i) (k) (k)
! (i) (k) (k)
! (i) #
(j) 2 ∂ϕw ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕw ∂ϕw ∂ϕu ∂ϕw ∂ϕw ∂ϕv ∂ϕw
− ϕϑ 2 − − + + + + dΩ
Ω 3 ∂z ∂x ∂y ∂z ∂x ∂z ∂x ∂y ∂z ∂y
Z " (k) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j)
#
(i) 2 ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕw ∂ϕϑ ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕϑ ∂ϕu ∂ϕw ∂ϕϑ
− ϕu 2 − − + + + + dΩ
Ω 3 ∂x ∂y ∂z ∂x ∂y ∂x ∂y ∂z ∂x ∂z
Z " (k) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j)
#
(i) 2 ∂ϕv ∂ϕu ∂ϕw ∂ϕϑ ∂ϕv ∂ϕu ∂ϕϑ ∂ϕv ∂ϕw ∂ϕϑ
− ϕv 2 − − + + + + dΩ
Ω 3 ∂y ∂x ∂z ∂y ∂x ∂y ∂x ∂z ∂y ∂z
Z " (k) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j)
#
2(k)∂ϕw ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕϑ ∂ϕw ∂ϕu ∂ϕϑ ∂ϕw ∂ϕv ∂ϕϑ
− ϕw 2 − − + + + + dΩ .
Ω 3 ∂z ∂x ∂y ∂z ∂x ∂z ∂x ∂y ∂z ∂y
Z " (k) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j) #
2 ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕw ∂ϕu ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕu ∂ϕu ∂ϕw ∂ϕu (i)
+(γ − 1) 2 − − + + + + ϕp dΩ
Ω 3 ∂x ∂y ∂z ∂x ∂y ∂x ∂y ∂z ∂x ∂z
Z " (k) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j) #
2 ∂ϕv ∂ϕu ∂ϕw ∂ϕv ∂ϕv ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕv ∂ϕw ∂ϕv (i)
+(γ − 1) 2 − − + + + + ϕp dΩ
Ω 3 ∂y ∂x ∂z ∂y ∂x ∂y ∂x ∂z ∂y ∂z
Z " (k) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j) (k) (k)
! (j) #
2 ∂ϕw ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕw ∂ϕw ∂ϕu ∂ϕw ∂ϕw ∂ϕv ∂ϕw (i)
+(γ − 1) 2 − − + + + + ϕp dΩ
Ω 3 ∂z ∂x ∂y ∂z ∂x ∂z ∂x ∂y ∂z ∂y
Z (k) (i) (k) (i) (k) (i)
!
γ (j) ∂ϕp ∂ϕp ∂ϕp ∂ϕp ∂ϕp ∂ϕp
− ϕϑ + + dΩ
Pr Ω ∂x ∂x ∂y ∂y ∂z ∂z
Z (j) (j) (j)
!
γ (k) ∂ϕϑ ∂ϕ(i)
p ∂ϕϑ ∂ϕ(i)
p ∂ϕϑ ∂ϕ(i)
p
− ϕp + + dΩ
Pr Ω ∂x ∂x ∂y ∂y ∂z ∂z
(5.22)
Pour parachever la définition des coefficients du modèle d’ordre réduit, il ne reste plus qu’à expliciter
l’expression de la contribution surfacique participant aux termes diffusifs. Celle-ci se développe à l’aide du
vecteur de la normale extérieure n = [nx , ny , nz ]T en

128
5.2. Construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin

Z " (k) (k) (k)


! (k) (k)
! (k) (k)
! #
(j) 2 ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕw ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕu ∂ϕw (i)
QDSurf = ϕϑ 2 − − nx + + ny + + nz ϕu d∂Ω
∂Ω 3 ∂x ∂y ∂z ∂y ∂x ∂z ∂x
Z " (k) (k) (k)
! (k) (k)
! (k) (k)
! #
(j) 2 ∂ϕv ∂ϕu ∂ϕw ∂ϕv ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕw (i)
+ ϕϑ 2 − − ny + + nx + + nz ϕv d∂Ω
∂Ω 3 ∂y ∂x ∂z ∂x ∂y ∂z ∂y
Z " (k) (k) (k)
! (k) (k)
! (k) (k)
! #
(j) 2 ∂ϕw ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕw ∂ϕu ∂ϕw ∂ϕv (i)
+ ϕϑ 2 − − nz + + nx + + ny ϕw d∂Ω . (5.23)
∂Ω 3 ∂z ∂x ∂y ∂x ∂z ∂y ∂z
Z (k) (k) (k)
!
γ (i) (j) ∂ϕp ∂ϕp ∂ϕp
+ ϕp ϕϑ nx + ny + nz d∂Ω
Pr ∂Ω ∂x ∂y ∂z
Z (j) (j) (j)
!
γ (i) (k) ∂ϕϑ ∂ϕϑ ∂ϕϑ
+ ϕp ϕp nx + ny + nz d∂Ω
Pr ∂Ω ∂x ∂y ∂z

L’utilisation d’une intégration par parties a permis de réduire l’ordre des dérivées qu’il est nécessaire
d’évaluer pour calculer les coefficients du modèle d’ordre réduit. Cette approche introduit un plus grand
nombre de termes à calculer, mais l’avantage principal est que leurs expressions ne font appel qu’aux gra-
dients des modes POD et de la partie moyenne des clichés qui peuvent être évalués de manière satisfaisante
avec les méthodes de calcul proposées dans l’annexe E.3.2.
Le modèle d’ordre réduit de l’écoulement compressible est donc constitué de l’équation (5.8) qui repro-
duit la dynamique du système. Les opérateurs sont caractérisés par les coefficients (5.9), eux-mêmes étant
entièrement définis par les expressions des termes convectifs (5.15) et des contributions volumiques (5.22)
et surfaciques (5.23) participant aux termes diffusifs.
Signalons enfin qu’en fonction des conditions aux limites choisies dans le problème fluide, les termes
de bord s’annulent si les quantités physiques ou leur gradient projeté sur la normale sortante sont nuls sur
le bord ∂Ω puisque les modes héritent des propriétés linéaires homogènes comme on l’a vu au paragraphe
2.2.3.4. Il est donc fort probable qu’une partie des termes de bord QD Surf
s’annule et c’est la raison pour la-
quelle Iollo et al. [117] ont choisi dans leur modèle de négliger les termes surfaciques issus de l’intégration
par parties.

5.2.3 Intégration du modèle d’ordre réduit en temps


Le modèle d’ordre réduit POD-Galerkin s’écrit sous la forme d’un système d’équations différentielles or-
dinaires non-linéaires à coefficients constants d’ordre un en temps, défini par l’équation (5.12). Le système
doit ensuite être complété par un ensemble de q conditions initiales portant sur les amplitudes modales
{ai }qi=1 afin que le problème (5.12) soit bien posé. Le modèle d’ordre réduit est par exemple initialisé avec
la solution stationnaire de l’écoulement ou encore avec le premier cliché puisque celui-ci est solution du
problème instationnaire. Cette solution initiale du modèle non réduit notée q0 est alors supposée être solu-
tion du modèle d’ordre Préduit à l’instant initial t = t0 et se décompose alors sur la base des modes POD en
q
q0 = q(t = t0 ) = q + j=1 aj (t = t0 )ϕ(j) . Les amplitudes modales à l’instant initial s’obtiennent alors par
projection de la relation précédente sur les modes POD et les propriétés d’orthogonalité des modes POD
conduisent à D E
ai (t = t0 ) = q0 − q, ϕ(i) . (5.24)

Le système (5.12) complété par les conditions initiales (5.24) est à présent bien posé puisque le modèle
d’ordre réduit ne dépend que du temps. Le système dynamique réduit a donc la forme ȧ = b f (a, t) et
s’intègre au moyen du solveur lsoda de la librairie ODEPACK (voir la remarque 3.1 p.73). Il est important
de noter que le nombre CFL imposé pour résoudre en temps le modèle d’ordre réduit peut être largement
augmenté par rapport à celui du modèle original. La raison en est que la méthode POD peut être vue comme
un filtre passe-bas [117] éliminant les hautes fréquences qui habituellement nécessitent de travailler avec
un CFL petit.

129
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

5.3 Correction des instabilités des modèles d’ordre réduit POD-


Galerkin
5.3.1 Origine des instabilités et principe de la correction
Malgré les précautions prises lors de la construction du modèle d’ordre réduit, la réponse souffre sou-
vent d’un manque de stabilité qui se traduit sous diverses formes allant d’un faible excédent sur l’ampli-
tude d’oscillations entretenues à la divergence rapide de la réponse. L’existence de termes non-linéaires
dans le modèle d’ordre réduit est une des sources d’instabilité puisqu’une perturbation infinitésimale des
coefficients des opérateurs du modèle d’ordre réduit est susceptible de conduire à des comportements très
différents de la réponse. Le système dynamique de Lorenz [151] en est un bon exemple.
En ce qui concerne les modèles d’ordre réduit POD-Galerkin, le caractère instable a été observé et ana-
lysé en particulier par Rempfer [188] et Noack et al. [171]. Rempfer rappelait que pour fonctionner cor-
rectement, les fonctions de base — en l’occurrence ici les modes POD — employées dans la projection de
Galerkin doivent (i) engendrer entièrement l’espace des phases de l’équation originale, (ii) être linéairement
indépendantes pour assurer l’unicité de la solution et (iii) vérifier les conditions limites du problème. Par
ailleurs Rempfer a aussi attiré l’attention sur le fait que le champ initial doit se trouver sur la trajectoire
de l’écoulement original. Dans le contexte de la décomposition orthogonale propre, seule la condition (ii)
est en pratique vérifiée. Rempfer a alors construit un exemple dans lequel l’ensemble des conditions est
vérifié en dehors de celle portant sur les conditions aux limites et a montré que le non-respect de cette seule
condition suffit à déstabiliser la réponse. Le même type d’analyse mené par Noack et al. [171] a aussi mon-
tré que le modèle d’ordre réduit conduisait à un mauvais attracteur. Enfin Iollo [116] s’est intéressé aussi
aux problèmes de stabilité des systèmes réduits POD-Galerkin pour l’équation d’Euler et a montré que la
stabilité peut être maintenue par rapport au système original non réduit en effectuant un choix judicieux
pour les schémas de discrétisation des flux.
Pour résumer, l’instabilité régulièrement observée avec les modèles d’ordre réduit POD-Galerkin pro-
vient principalement des trois causes suivantes :
• la construction de la base des modes POD qui n’engendrent pas totalement l’espace des phases1 et
ne satisfont pas les mêmes conditions aux limites que celles du modèle initial ;
• les erreurs de modélisation qui résultent d’hypothèses simplificatrices émises pour la construction
du modèle d’ordre réduit, comme par exemple le fait de supposer la viscosité constante ;
• les erreurs d’approximation numérique à l’origine de perturbations infinitésimales dans l’évalua-
tion des coefficients et qui sont potentiellement suffisantes pour déstabiliser le système dynamique.
La question de la stabilité des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin a été soulevée dès les premiers tra-
vaux et un grand nombre de techniques a vu le jour afin de tenter de la préserver. On peut distinguer d’une
part les techniques visant à améliorer la structure et le contenu de la base tronquée des modes POD sans mo-
difier la forme du modèle d’ordre réduit obtenu par projection de Galerkin, et d’autre part les techniques
dans lesquelles le modèle d’ordre réduit est modifié soit en le complétant par l’introduction de termes
supplémentaires, soit en corrigeant les coefficients. Le schéma de la figure 5.1 résume pour plus de clarté
le principe de fonctionnement des différentes méthodes de correction. Il est aussi possible de distinguer
comme on le fera dans la suite les techniques a priori et a posteriori avec lesquelles la correction s’appuie
ou non sur la réponse produite par le modèle d’ordre réduit intégré en temps sans aucune correction.
Le système dynamique (5.12) construit à partir d’une base de modes POD Φ est récrit pour la suite sous
la forme
ȧ = b
f G (a) avec bf G (a) = K + L a + (Q ⊗ a) a (5.25)
pour reprendre la notation de l’équation (1.3). Chaque composante {fbiG }qi=1 du vecteur b f G (a)
Pest donc un
polynôme de degré deux portant sur les amplitudes modales, de sorte que b G
K
q
Pq f i (a) = i + j=1 Lij aj +
j,k=1 Q jik a j a k . Les coefficients des polynômes sont calculés à partir des expressions analytiques (5.9) qui
proviennent de la projection de Galerkin. Pourvu que les coefficients du modèle d’ordre réduit soient relati-
vement bien calculés, l’intégration en temps de ce système d’équations est possible au moins sur l’intervalle
1 La raison provient en partie de la troncature effectuée dans la base qui élimine les modes associés aux petites valeurs propres et

aux petites structures spatiales qui peuvent participer activement au transfert et à la dissipation d’énergie dans le système.

130
5.3. Correction des instabilités des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin

Figure 5.1 : Schématisation du principe de correction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin. On distingue les méthodes de
correction a priori (—) des méthodes de correction a posteriori (—) qui reposent sur la définition d’une erreur de reconstruction
obtenue à partir d’une première résolution du modèle d’ordre réduit non corrigé.

de temps Ie = [t0 ; t0 + Te ] et produit des amplitudes modales a(tm ) évaluées aux mêmes instants que les cli-
chés. Ces amplitudes sont plus ou moins proches des amplitudes exactes a(m) correspondant à la projection
des clichés sur les modes POD. Le modèle d’ordre réduit est alors validé soit (i) en comparant les ampli-
tudes a(tm ) calculées avec le modèle d’ordre réduit aux amplitudes exactes a(m) , soit (ii) en comparant une
quantité annexe χG = gb(a(tm )) (variable aérodynamique, coefficient de portance, énergie totale,...) avec
la quantité de référence issue du calcul avec le modèle non réduit notée χ(m) . Quelle que soit l’approche
envisagée, l’objectif est de modifier le modèle d’ordre réduit ȧ = b f G (a) en un nouveau modèle d’ordre
b
réduit ȧ = f (a) où les termes du polynôme sont corrigés par rapport à ceux de la projection de Galerkin
c

initialement effectuée avec les vecteurs de la base Φ.

5.3.2 Techniques de correction a priori des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin


5.3.2.1 Correction des vecteurs de la base POD
Pour pallier le problème de stabilité du modèle d’ordre réduit, certains auteurs ont évoqué la nécessité
de compléter la base des modes POD par de nouvelles fonctions préalablement orthonormalisées, ou de
modifier légèrement la façon de calculer les modes POD. Une nouvelle base POD Φ e est donc construite et
donne par conséquent naissance au polynôme corrigé b f c après projection de Galerkin.
Noack et al. [171] ont ainsi proposé de compléter la base des modes POD avec un vecteur supplémen-
taire associé à une correction liée à l’écart entre la solution stationnaire réelle qs de l’écoulement et la partie
moyenne des clichés q impliquée dans la décomposition affine des variables sur la base des modes POD.
Rempfer [188] a quant à lui suggéré de compléter la base avec des éléments appartenant au noyau de l’opé-
rateur de corrélation associé à la décomposition orthogonale propre et de procéder à une analyse de Floquet
pour déterminer les éventuels modes instables dans la base POD générée. Enfin, il est possible de chercher
à compléter la base POD en utilisant les informations contenues dans l’erreur de reconstruction produite
par le modèle d’ordre réduit non corrigé mais dans ce cas il ne s’agit plus d’une correction a priori.
Plutôt que de chercher à compléter la base des modes POD, une solution consiste à en améliorer le
contenu en construisant les modes POD au moyen d’un produit scalaire différent de celui de l’espace eu-
clidien RN ou de l’espace L2 (Ω). Iollo et al. [117] ont ainsi remarqué que l’utilisation du produit scalaire
basé sur l’espace de Sobolev H 1 permet d’améliorer nettement la stabilité du modèle d’ordre réduit obtenu.

131
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

En effet, le nouveau produit scalaire (4.55) fait intervenir le gradient des fonctions et par conséquent per-
met de tenir compte des petites structures associées aux modes négligés. L’amélioration n’a toutefois été
constatée que pour un écoulement turbulent dans lequel des structures associées aux petites échelles de
la turbulence sont susceptibles d’être présentes. Kirby [132] a lui aussi défini un produit scalaire pour un
espace de Sobolev impliquant des dérivées d’ordre supérieur et a obtenu une amélioration significative en
introduisant les dérivées secondes du champ aérodynamique pour le calcul des modes POD. Dans les deux
cas cependant, la méthode nécessite d’ajuster empiriquement des paramètres de pondération du produit
scalaire — comme le paramètre µH 1 dans l’expression (4.55).
Henri et Yvon [110] ont suggéré de construire les modes POD en utilisant comme clichés la réponse du
système non réduit ainsi que la dérivée en temps de cette réponse afin que les modes POD contiennent une
partie de la dynamique du système. Par ailleurs l’erreur de reconstruction est parfois améliorée en conser-
vant dans la base de projection des modes POD associés à de petites valeurs propres.
À la différence de ces méthodes de correction des vecteurs de la base de projection, les méthodes expo-
sées dans les paragraphes qui suivent reposent toutes sur la correction directe du polynôme b f G.

5.3.2.2 Introduction d’amortissement dans le modèle d’ordre réduit


L’une des raisons les plus souvent invoquées pour expliquer l’instabilité des systèmes POD-Galerkin est
la troncature réalisée dans la base POD pour obtenir un modèle d’ordre réduit de petite taille. Bien qu’en
général la base tronquée des modes POD contienne la quasi-totalité de l’énergie du système, les modes POD
négligés contiennent encore des contributions non négligeables, notamment en ce qui concerne le caractère
dissipatif du système. Les modes POD négligés exhibent en effet des petites structures spatiales qui jouent
un rôle important dans les transferts d’énergie.
Qualitativement, ce processus est très similaire aux transferts d’énergie qui ont lieu dans le contexte de
la turbulence entre les structures cohérentes de grandes et de petites échelles. La méthode POD-Galerkin
partage donc quelques traits communs avec les méthodes de Simulation des Grandes Échelles (Large Eddy
Simulation, ou LES en anglais) qui agissent comme un filtre sur les équations de Navier-Stokes et permettent
de ne résoudre que les grandes échelles de la turbulence en modélisant l’action des petites échelles à l’aide
d’une viscosité turbulente ou d’un modèle de similarité d’échelle par exemple. Un parallèle entre les trans-
ferts d’énergie agissant d’une part entre structures turbulentes et d’autre part entre les modes POD d’un
écoulement turbulent incompressible a été établi par Couplet et al. [52] et a permis de mettre en place une
paramétrisation visqueuse des interactions entre les modes POD résolus et non-résolus.
Dans le cas général d’un écoulement non nécessairement turbulent ni incompressible, l’introduction
d’une viscosité artificielle dans le modèle d’ordre réduit POD-Galerkin a été une des premières solutions
adoptées pour stabiliser le système. Plusieurs manières d’introduire cette viscosité additionnelle ont été
exploitées. La plus simple consiste à multiplier la viscosité physique µ par un facteur constant 1 + ηa où
ηa = µa /µ, ce qui revient finalement à introduire le nombre de Reynolds corrigé
ρ0 L 0 U 0 1 1 1
Rec = ⇐⇒ = + , (5.26)
µ(1 + ηa ) Rec Re Rea
défini à partir des grandeurs aérodynamiques d’adimensionnement ou de façon équivalente à partir du
nombre de Reynolds réel de l’écoulement Re et du nombre de Reynolds ajouté Rea associé à la viscosité
artificielle µa . Une mesure de la quantité de viscosité artificielle introduite est alors donnée par le ratio
µa Re Re
ηa = = = − 1. (5.27)
µ Rea Rec
Une variante permettant d’attribuer à chaque mode un certain niveau de dissipation a été employée
par Cazemier [41] : la viscosité additionnelle attribuée au i-ième mode POD était simplement donnée par
µa,i = i × Cst, où Cst est une constante déterminée de façon empirique après une série d’essais. Ce type de
correction conduit au polynôme corrigé
 
q
X q
X Xq q
X
1
fbic (a) = KiC + LC
ij aj + QC
jik aj ak +
KiD + LD
ij aj + QD
jik aj ak
 , (5.28)
j=1
Rec j=1
j,k=1 j,k=1

132
5.3. Correction des instabilités des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin

où les différents coefficients ont été définis à l’équation (5.9). La correction introduite agit sur l’ensemble des
termes diffusifs du modèle d’ordre réduit, et par conséquent sur les contributions constantes KiD , linéaires
c a a
LDij et quadratiques Qjik . En récrivant le facteur 1/Re = 1/Re + 1/Re où Re est le nombre de Reynolds
D

ajouté, il est possible de mettre le polynôme corrigé sous la forme fi (a) = fbiG (a) + fbiG,D (a)/Rea dans
bc

laquelle fbiG,D correspond à la partie diffusive du polynôme fbiG .


La détermination de la viscosité artificielle introduite pour stabiliser le modèle d’ordre réduit avec la
technique précédente est empirique et par conséquent, Cazemier et al. [42] ont proposé une autre méthode
pour tenir compte de l’effet des modes négligés au moyen d’un terme d’amortissement linéaire. L’idée est
de déterminer ce terme en imposant que la moyenne du taux de variation de l’énergie dans la direction
de chaque mode POD soit conservée. Par définition, le taux de variation de l’énergie dans la direction du
mode POD i est donné par
da2i dai
= 2 ai , (5.29)
dt dt
ou encore
X q q
X
dai
2 ai = 2 ai Ki + 2 Lij ai aj + 2 Qjik ai aj ak , (5.30)
dt j=1 j,k=1

en multipliant l’équation (5.8) gouvernant le modèle d’ordre réduit par le facteur 2ai . La moyenne du taux
de variation de l’énergie dans la direction de chaque mode POD est alors conservée si l’action de l’opérateur
de moyenne E [·] sur l’équation précédente donne bien un résultat identiquement nul qui correspond à
q
X
Qjik E [ai aj ak ] + λi Lii = 0, (5.31)
j,k=1

(m)
en utilisant les propriétés (2.28) et E[ai ] = 0 pour simplifier le résultat2 . Pour que cette relation soit véri-
fiée par le modèle d’ordre réduit, on introduit alors un terme linéaire supplémentaire Di dans le polynôme
corrigé qui devient
q
X q
X
fbic (a) = Ki + Lij aj + Qjik aj ak + Di ai . (5.32)
j=1 j,k=1

Le coefficient d’amortissement introduit est alors défini par


q
1 X
Di = − Qjik E [ai aj ak ] − Lii . (5.33)
λi
j,k=1

Le calcul du terme E [ai aj ak ] s’effectue à partir des amplitudes modales a(m) issues de la projection des
clichés sur les modes POD. Cazemier et al. ont aussi suggéré de ne conserver que les valeurs négatives de
Di de manière à introduire exclusivement de l’amortissement dans le modèle d’ordre réduit. À la différence
de la correction (5.28), ce modèle agit uniquement sur les coefficients linéaires et la correction utilise des
contributions provenant à la fois des termes diffusifs et convectifs.
D’autres manières d’introduire une viscosité dans le modèle d’ordre réduit ont été adoptées par le passé.
En particulier, Aubry et al. [18] ont utilisé un modèle de fermeture de Heisenberg pour tenir compte des
modes non résolus. Cette approche est très similaire à ce qui est fait dans le cadre de la LES avec un modèle
de type Smagorinsky. Sirisup et Karniadakis [216] ont quant à eux préféré introduire une viscosité spectrale
évanescente pour stabiliser le modèle d’ordre réduit à long terme.
Les méthodes de correction basées sur l’introduction d’une viscosité artificielle permettent de minimiser
l’effet des modes tronqués en rajoutant la dissipation qui aurait dû être prise en compte par les modes
négligés. Cependant, en dehors de la méthode basée sur la conservation de la moyenne du taux d’énergie
dans la direction de chaque mode développée par Cazemier et al. [42], la plupart des techniques nécessitent
de déterminer de façon empirique un ou plusieurs paramètres dépendant entre autres du nombre de modes
conservés dans la base réduite ou encore du type d’écoulement. Par conséquent il est préférable d’avoir
recours à des méthodes de stabilisation plus robustes.
2 La (m)
seconde propriété E[ai ] = 0 n’est vraie que pour une réponse périodique évaluée sur un intervalle de temps adéquat.

133
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

5.3.3 Techniques de correction a posteriori des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin


5.3.3.1 Optimisation des coefficients du modèle d’ordre réduit
Une manière moins empirique de procéder à la correction du modèle d’ordre réduit consiste à calibrer
certains coefficients des opérateurs K, L et Q en utilisant l’historique des amplitudes modales intégrées
avec le modèle d’ordre réduit. Les coefficients du modèle réduit sélectionnés deviennent alors les para-
mètres w d’un problème d’optimisation dans lequel une certaine erreur de reconstruction doit être mini-
misée. La résolution du problème d’optimisation fournit alors un ensemble de nouveaux coefficients qui
définissent le polynôme corrigé b f c de sorte que les amplitudes a(tm ) et a(m) coïncident au moins sur l’in-
tervalle de temps Ie .
La méthode a été employée à l’origine par Galletti et al. [82] qui cherchaient à optimiser un terme cor-
rectif linéaire Cij aj (t) dans le modèle d’ordre réduit afin de tenir compte du terme de pression qui est
généralement négligé pour les écoulements incompressibles. Plus récemment, Buffoni et al. [35] et Galletti
et al. [81] ont mis en œuvre une méthode de calibrage similaire permettant d’optimiser à la fois les coeffi-
cients constants et linéaires du modèle d’ordre réduit. Couplet et al. [51] ont ensuite généralisé la méthode
en proposant un calibrage de tout ou partie des coefficients du modèle d’ordre réduit. L’avantage de cette
approche est que les coefficients linéaires, mais aussi constants et quadratiques peuvent être corrigés. Bour-
guet et al. [34] ont quant à eux comparé divers types d’erreur qui définissent la fonctionnelle à minimiser.
De leur côté, Favier et al. [73] ont confronté plusieurs méthodes de calibrage à une méthode de stabilisa-
tion analogue à celle employée par Rempfer [186] et dans laquelle le nombre de Reynolds est modifié pour
chaque mode POD. Enfin, Cordier et al. [48] ont présenté les diverses formes de calibrage au moyen d’un
même formalisme et ont établi les liens existants avec la méthode d’identification des coefficients. Une com-
paraison de ces méthodes est par ailleurs effectuée.
Le problème d’optimisation est formulé de manière très générale en notant w le vecteur de dimension
pc < Nc′ = q(q + 1)(q + 2)/2 contenant les coefficients du polynôme b f G qui doivent être calibrés. La fonc-
tionnelle à minimiser porte sur une erreur ǫ qui peut être exprimée soit en fonction de la différence entre
les amplitudes modales a(tm ) et a(m) , soit en fonction de la différence entre des quantités physiques χ(tm )
et χ(m) . Dans les deux cas, la fonctionnelle dépend d’une manière plus ou moins complexe du polynôme
b
f G et par conséquent des paramètres w à optimiser. La fonctionnelle à minimiser est donc notée J (b f G (w))
et le polynôme corrigé recherché b f est défini à partir des coefficients calibrés solutions du problème d’op-
c

timisation
 
b
fc = b
f G (wopt ) avec wopt = arg min J b f G (w) . (5.34)
w∈Rpc

En pratique, la résolution du problème d’optimisation est facilitée lorsque la fonctionnelle s’écrit comme
une somme de carrés puisqu’un certain nombre de méthodes ont été spécifiquement développées pour des
fonctions quadratiques [77]. Idéalement, la fonctionnelle s’écrit donc

X  
J (r) = rl2 où r = r bf G (w) (5.35)
l=1

est simplement une application vectorielle qui associe au polynôme b f G (w) à calibrer un vecteur d’erreur
de taille nǫ . Le lien entre les paramètres à calibrer et la fonctionnelle à minimiser se résumé par le jeu de
relations
fG r J
J : Rpc −→ Rq −→ Rnǫ −→  R  (5.36)
bG b
w 7−→ f (w) 7−→ r(f (w)) 7−→ J r b
G
f G (w) .

Lors du processus d’optimisation, les pc paramètres du vecteur w définissent le polynôme b f G (w) en


cours de calibrage. Les équations du modèle d’ordre réduit définies par ce polynôme sont alors employées
pour calculer les amplitudes a(tm ) — ou une quantité χ(tm ) déduite de ces amplitudes — et établir ensuite
le vecteur d’erreur r ∈ Rnǫ dont la dimension dépend de la définition de l’erreur ǫ choisie. Si l’erreur porte
sur les amplitudes modales (ǫ = a(tm ) − a(m) par exemple), alors il est possible de l’évaluer à chaque
instant tm correspondant aux clichés et pour chaque mode i, ce qui conduit à nǫ = M q composantes pour
le vecteur d’erreur. Si au contraire la variable optimisée est une quantité scalaire évaluée à chaque instant

134
5.3. Correction des instabilités des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin

(par exemple le coefficient de portance ou l’énergie totale du système), alors on ne dispose que de nǫ = M
composantes pour l’erreur. De manière générale, on considère que l’erreur est évaluée à chaque instant tm
pour m = 1, . . . , M et que la quantité contrôlée est caractérisée par Nddls degrés de liberté. La fonctionnelle
portant sur l’erreur générique ǫ est alors définie par

  h i X
M M
X N
X ddls

J b
2 2 2
f G (w) = E kǫk2 = αm kǫ(tm )k2 = αm |ǫi (tm )| (5.37)
m=1 m=1 i=1

afin de minimiser en moyenne la norme de l’erreur. Les composantes du vecteur d’erreur r de dimension
nǫ = M Nddls introduit à l’équation (5.35) sont donc

rl = rm+(i−1)M = αm |ǫi (tm )| , ∀(m, i) ∈ J1; M K × J1; Nddls K. (5.38)

Il reste maintenant à détailler l’expression de l’erreur générique ǫ pour définir complètement le pro-
blème d’optimisation. L’approche la plus courante consiste à définir l’erreur comme l’écart entre les (dé-
rivées des) amplitudes modales a(tm ) calculées par le modèle d’ordre réduit et celles de référence a(m)
obtenues par projection des clichés. Ces choix ont notamment été effectués par Bourguet et al. [34], Couplet
[50], Favier et al. [73]. Pour reprendre la terminologie de Bourguet et al., la minimisation de l’erreur ǫ basée
sur l’écart entre les amplitudes correspond à la méthode de calibrage de Floquet, alors que l’erreur basée sur
l’écart entre les dérivées des amplitudes porte le nom de méthode de calibrage de Poincaré. Dans ce cas, le
vecteur d’erreur r est de dimension nǫ = M q puisque l’erreur ǫi (tm ) est évaluée à chaque instant et pour
chaque mode. Les fonctionnelles pour ces deux types d’erreur sont donc respectivement données par
   2 
F bG (m)
J f (w) = E a(tm ) − a avec ǫ = a(tm ) − a(m) et (5.39a)
2
   2 

JP b f G (w) = E ȧ(tm ) − ȧ(m) avec ǫ = ȧ(tm ) − ȧ(m) . (5.39b)
2

Les définitions précédentes conduisent à une formulation de la fonctionnelle fortement non-linéaire


en fonction des paramètres w à calibrer. En effet, la fonctionnelle dépend des paramètres par le biais
des amplitudes a(tm ) — ou de leurs dérivées — qui proviennent de l’intégration en temps du modèle
d’ordre réduit non-linéaire caractérisé par b f G (w). Par conséquent Couplet [50] a proposé de linéariser le
problème en remplaçant
R t +t les amplitudes a(tm ) provenant de l’intégration du modèle d’ordre réduit par
a(tm ) ≈ a(m) (0) − t00 m bf G (a(m) (τ )) dτ , ce qui revient non plus à calibrer directement les amplitudes mais
le polynôme. De la même façon, les dérivées des amplitudes intervenant dans la formulation de Poincaré
sont remplacées par ȧ(tm ) ≈ b f G (a(m) ).
Une autre classe d’erreur est définie pour calibrer une grandeur spécifique χ qui peut être aussi bien
scalaire (coefficient de portance, énergie totale,...) que vectorielle (champ aérodynamique en un certain
nombre de degrés de liberté,...). Lorsque la quantité χ est scalaire, l’erreur est évaluée à chaque instant
et la dimension du vecteur d’erreur est donc nǫ = M . La fonctionnelle à minimiser porte alors sur l’erreur
ǫ = χ(tm ) − χ(m) et s’exprime donc en fonction de χ(tm ) = b g(a(tm )) suivant la relation
   2   2 

Jχ b f G (w) = E χ(tm ) − χ(m) = E b g(a(tm )) − χ(m) . (5.40)
2 2

Le calibrage d’une grandeur dérivée du champ aérodynamique devient rapidement très coûteux en
temps de calcul, notamment lorsqu’il s’agit d’une grandeur globale. En effet, R si l’on souhaite par exemple
calibrer le modèle d’ordre réduit de manière à ce que l’énergie totale ET = Ω ρeT dΩ du système soit conser-
vée, il est nécessaire de reconstruire à chaque instant et pour chaque itération de l’algorithme d’optimisation
le champ aérodynamique sur l’ensemble du domaine de calcul. Ce problème est moins contraignant pour le
calcul du coefficient de portance puisqu’il ne fait intervenir que le champ sur le bord du profil où le nombre
de degrés de liberté reste relativement faible.
Le calibrage du modèle d’ordre réduit basé sur la conservation de l’énergie totale semble cependant
une idée intéressante puisqu’elle repose sur un principe physique plutôt que sur un simple recalage de
variables telles que les amplitudes modales. Pour remédier au problème du coût de calcul, on s’inspire

135
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

de la définition de l’énergie cinétique pour un système incompressible. Ainsi, les clichés employés pour
un écoulement
R incompressible correspondent au champ de vitesse q = [u, v, w]T et l’énergie cinétique
EC = Ω 1/2ρ0 eC dΩ se déduit donc immédiatement des clichés au moyen du produit Pscalaire défini sur
q
l’espace L2 : EC = 1/2 ρ0 hq, qiL2 . L’introduction de la décomposition POD q(t) = j=1 a j (t)ϕ(j)
dans
l’écriture précédente conduit alors à
q
1 X
E C ≈ ρ0 ai (t)ai (t) (5.41)
2 i=1

puisque les modes POD sont orthonormaux pour le produit scalaire L2 par construction. Si on considère
la moyenne de l’énergie cinétique, alors celle-ci s’exprime simplement en fonction P des valeurs propres λi
(m)
associées aux modes POD puisque la relation (2.28) conduit à E[EC ] = 1/2ρ0 qi=1 λi .
Dans le cas d’un écoulement compressible, le lien entre les valeurs propres associées aux modes POD et
l’énergie totale de l’écoulement n’est pas évident. En effet, l’énergie totale de l’écoulement ne peut s’expri-
mer comme une fonction quadratique des clichés comme on l’a vu au paragraphe 4.4.2. Bien que les valeurs
propres n’aient plus de lien direct avec l’énergie totale du système, on peut toujours envisager de calibrer le
modèle d’ordre réduit à partir de la relation (2.28) qui est vérifiée pour les amplitudes de référence a(m) mais
pas nécessairement par celles provenant de l’intégration en temps du modèle d’ordre réduit. La nouvelle
fonctionnelle !
Xq XM
ET∗
J = λi − αm ai (tm )ai (tm ) (5.42)
i=1 m=1

est donc introduite dans le but d’ajuster le contenu énergétique de chaque mode. Dans ce cas, la méthode
revient à calibrer le modèle d’ordre réduit pour la moyenne
R d’une énergie ET∗ définie comme une P
fonction
q
quadratique des clichés par la relation ET = hq, qi = Ω (ϑ + uT u + p2 ) dΩ telle que E [ET∗ ] ≈ i=1 λi .
∗ 2

Bien que l’énergie ET diffère de l’énergie totale réelle de l’écoulement, on pourra vérifier numériquement

que calibrer le modèle d’ordre réduit d’un écoulement compressible en ajustant numériquement le contenu
énergétique de chaque mode au moyen de la fonctionnelle (5.42) revient à calibrer l’énergie totale (réelle)
(m)
de l’écoulement au moyen de l’erreur ǫ = ET (tm ) − ET calculée à partir du champ aérodynamique re-
construit à chaque instant avec la relation (4.50).
Les méthodes basées sur le calibrage de certains des coefficients du modèle d’ordre réduit sont particu-
lièrement efficaces pour corriger le polynôme issu de la projection de Galerkin et conduisent à une solution
coïncidant presque exactement avec celle du modèle non réduit sur l’intervalle de temps Ie . Cependant,
le choix des coefficients qui doivent être optimisés n’est pas évident et la résolution du problème d’opti-
misation devient fastidieuse lorsque le nombre pc de coefficients à calibrer devient important. En outre, le
problème devient rapidement sur-déterminé lorsque le nombre pc de coefficients dépasse la dimension nǫ
du vecteur d’erreur sur lequel la définition de la fonctionnelle repose. Enfin, il serait souhaitable lors de la
formulation du problème d’optimisation de disposer d’un critère pour fixer des bornes aux intervalles dans
lesquels les paramètres varient.

5.3.3.2 Stabilisation intrinsèque


Une autre méthode baptisée « stabilisation intrinsèque » par Kalb et Deane [124] consiste aussi à utiliser
les informations contenues dans les amplitudes temporelles a(m) associées aux clichés pour corriger les co-
efficients du modèle d’ordre réduit. Le terme correctif est cette fois calculé explicitement à partir de l’erreur
entre les amplitudes a(m) et celles produites par le modèle d’ordre réduit non corrigé lorsqu’il est initialisé
à chaque instant correspondant aux clichés avec les amplitudes a(m) . Les amplitudes a(tm ) ainsi produites
traduisent alors les défaillances liées à l’intégration du polynôme b f G sur l’intervalle d’échantillonnage.
En effet, en supposant qu’il existe un polynôme de référence b f R fournissant les amplitudes a(m) , l’in-
tégration en temps du modèle d’ordre réduit avec un schéma d’Euler progressif fournit les amplitudes à
l’instant tm+1 : a(m+1) = a(m) + δtc b
f R (a(m) ), où δtc est le pas de temps d’échantillonnage. Si le polynôme b fG
calculé au moyen des coefficients définis au début de ce chapitre correspondait au polynôme de référence
b
f R , les amplitudes calculées devraient coïncider lorsque le modèle d’ordre réduit défini avec b f G est intégré
en temps. Puisque ce n’est pas le cas, on définit les amplitudes a(tm ) en initialisant le modèle d’ordre réduit
à chaque instant correspondant aux clichés avec les amplitudes de référence a(m) et en intégrant en temps

136
5.3. Correction des instabilités des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin

avec le schéma d’Euler progressif, ce qui conduit à : a(tm+1 ) = a(m) + δtc b


f G (a(m) ). L’erreur est donc définie
à chaque instant tm+1 comme la différence entre les amplitudes exactes et celles calculées avec le polynôme
non corrigé b
f G , ce qui s’écrit
   
f R a(m) − δtc b
ε(tm+1 ) = a(m+1) − a(tm+1 ) ≈ δtc b f G a(m) . (5.43)

Les amplitudes a(tm+1 ) sont en pratique calculées avec le même schéma d’intégration en temps que
celui adopté pour le modèle d’ordre réduit, et par conséquent le schéma d’Euler progressif est dans le
cas présent remplacé par le schéma d’Adams ou un schéma de type BDF suivant la raideur du système.
Ensuite, l’erreur est normalisée par le pas de temps d’échantillonnage δtc de sorte que l’expression (5.43)
n’en dépende plus : ε(tm+1 ) ≈ b f R (a(m) ) − b
f G (a(m) ).
L’erreur définie précédemment est alors employée pour améliorer la réponse du modèle d’ordre réduit.
En effet, si l’erreur est introduite au second membre du modèle d’ordre réduit pour corriger les défauts du
polynôme bf G , on obtient la relation suivante : a(tm+1 ) = a(m) +δtc b f G (a(m) )+ε(tm+1 ) ≈ a(m+1) . Cependant,
pour l’implémentation du terme correctif dans le modèle d’ordre réduit, il est nécessaire d’exprimer cette
erreur comme une fonction temporelle des amplitudes recherchées puisque pour l’instant la définition (5.43)
ne fournit qu’une approximation discrète aux instants tm où les clichés ont été prélevés. Pour remédier à
(1) (M)
ce problème, il suffit de se rappeler que les amplitudes modales aj = [aj , . . . , aj ]T pour j = 1, . . . , q
forment une base orthogonale. L’idée consiste alors à évaluer l’erreur (5.43) aux M instants associés aux
clichés et à projeter chaque composante εi = [εi (t1 ) . . . εi (tM )]T du terme correctif sur cette base. Si on note
PA la projection orthogonale sur l’espace engendré par la base des amplitudes modales, alors la projection
de εi est donnée par
D E
q (m)
X εi , aj
PA εi (tm ) = D E a(m)
j . (5.44)
(m) (m)
j=1 aj , aj

La projection est de préférence effectuée sur les erreurs centrées εi − εi où l’opérateur de moyenne em-
ployé est identique à celui adopté dans le processus de calcul des modes POD. Finalement, si les erreurs
produites par le polynôme b f G ne sont pas trop importantes, il est raisonnable d’assimiler la projection des
erreurs à l’erreur elle-même, de sorte que εi ≈ PA εi . En outre, la projection nécessite une certaine norma-
lisation ; Kalb et Deane [124] ont proposé d’utiliser la norme des amplitudes modales ka(m) j kRM définie au
moyen du produit scalaire euclidien, bien que cela puisse conduire à des corrections très importantes pour
les modes d’indice élevé puisque le produit scalaire est proportionnel aux valeurs propres associées aux
modes POD3 . Le terme correctif d’erreur est finalement approché par l’expression
D E
q (m) q
X εi − εi , aj X
εi (tm ) ≈ εi + D E aj(m) = Kic + (m)
Lcij aj (5.45)
(m) (m)
j=1 aj , aj j=1

qui fournit une approximation des fluctuations de l’erreur sur la base des amplitudes exactes. Par extension,
le terme correctif pourra être exprimé en fonction des amplitudes a(t) recherchées. Ainsi, le polynôme
corrigé de la méthode de stabilisation intrinsèque s’écrit

q
X q
X

fbic (a) = (Ki + Kic ) + Lij + Lcij aj + Qjik aj ak . (5.46)
j=1 j,k=1

La méthode de stabilisation intrinsèque semble intéressante puisqu’elle se base sur une correction ex-
plicitement définie à partir de l’erreur ε(tm+1 ) = a(m) − a(tm ), sans recourir à la résolution d’un problème
d’optimisation comme dans les approches précédentes.
3 En (m) (m) (m) (m)
effet, le produit scalaire haj , aj i correspond à l’expression E[aj ai ] avec des poids de pondération αm = 1 pour
(m) (m)
l’opérateur E [·]. De la relation (2.28), on en déduit que le produit scalaire vaut ici haj , aj i = M λj , où λj est la valeur propre
correspondant au mode POD ϕ(j) .

137
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

5.3.4 Autres techniques de correction des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin


D’autres méthodes de stabilisation ont vu le jour, notamment pour tenter de corriger les problèmes liés
au non-respect de certaines conditions aux limites. Noack et al. [172] ont ainsi attribué l’instabilité de leur
modèle d’ordre réduit POD-Galerkin au fait que le terme de pression généralement négligé pour les écou-
lements incompressibles entraîne un manque de dissipation. Ils ont donc proposé de corriger l’absence du
terme de pression à l’aide d’un modèle quadratique dont les coefficients sont calculés comme les solutions
d’une équation de Poisson. Galletti et al. [81, 82] et Buffoni et al. [35] ont pour leur part modélisé les effets du
terme de pression négligé dans le cas incompressible par l’ajout d’un opérateur linéaire dont les coefficients
sont calibrés. Plutôt que de corriger le terme de pression, Sirisup et Karniadakis [215] ont préféré introduire
au second membre du modèle d’ordre réduit le terme de pénalité
Z
Gi (a) = −τ ϕ(i) · (q − q∞ ) I∂Ω (x) dΩ, (5.47)

où I∂Ω est la fonction caractéristique du bord telle que I∂Ω = 1 si x ∈ ∂Ω et I∂Ω = 0 sinon. Les variables
aérodynamiques q sont donc remplacées par leurs valeurs q∞ sur le bord ∂Ω. En remplaçant q par sa
décomposition sur la base des modes POD, le terme de pénalité s’écrit
 
Xq Z Z
Gi (a) = τ  aj ϕ(i) · ϕ(j) d∂Ω − ϕ(i) · q∞ d∂Ω. (5.48)
j=1 ∂Ω ∂Ω

La méthode est bien adaptée lorsque les valeurs des variables aérodynamiques sont connues sur le bord
du domaine, ce qui est surtout le cas lorsqu’un contrôle est appliqué. Toutefois, la stabilisation du modèle
d’ordre réduit dépend fortement du paramètre τ qui doit être ajusté correctement.
Vigo [240] a pour sa part tenté d’introduire un terme de stabilisation cubique dans le modèle d’ordre
réduit en s’appuyant sur une méthode SUPG (Streamline Upwind Petrov Galerkin) déjà existante dans le
code de calcul employé pour générer les clichés. Le terme de correction nécessite toutefois de nombreuses
approximations pour utiliser les décompositions POD des variables aérodynamiques et est en outre très
coûteux à calculer. Enfin, Allery [5] a introduit une correction dans son modèle d’ordre réduit afin de tenir
compte des erreurs éventuelles des simulations LES. Pour cela, la correction apportée est déterminée de
façon à ce que le champ des vitesses corrigées satisfasse exactement les équations de Navier-Stokes.
Bien que les méthodes de correction présentées soient dans certains cas assez spécifiques, l’éventail
des techniques disponibles est assez vaste. Gloerfelt [87] a comparé un grand nombre de méthodes de
stabilisation afin de déterminer celle qui sera la plus efficace pour traiter un problème d’oscillations auto-
entretenues d’ondes sonores et est arrivé à la conclusion que les méthodes de calibrage basées sur la ré-
solution d’un problème d’optimisation sont certainement les plus robustes. En effet, la plupart des autres
méthodes dépendent d’un ou de plusieurs paramètres qui doivent être déterminés au cas par cas après une
série d’essais afin de stabiliser correctement le modèle d’ordre réduit. La détermination de ces paramètres
reste assez empirique et dépend notamment de l’écoulement modélisé, du nombre de modes tronqués dans
la base POD,... Par ailleurs le calibrage ne constitue pas non plus la solution idéale — bien qu’il soit souvent
plus performant. En effet, le problème d’optimisation doit être correctement défini et la convergence vers
l’optimum devient délicate lorsque le nombre de paramètres calibrés augmente. Lorsque ces techniques
sont insuffisantes, il est toujours possible de se diriger vers la méthode d’identification du modèle d’ordre
réduit qui a été présentée au paragraphe 2.4.4. Toutefois, il faut bien comprendre que la correction introduite
dans le modèle d’ordre réduit est la manifestation de certains défauts de modélisation qu’il est nécessaire
sinon indispensable d’identifier pour pouvoir correctement améliorer la réponse du modèle d’ordre réduit.
Dans ce qui suit, le modèle d’ordre réduit est mis à l’épreuve pour reproduire le champ aérodynamique
autour d’un profil NACA0012 en forte incidence. Plusieurs méthodes de correction du modèle d’ordre ré-
duit seront évaluées afin de déterminer celle qui se prête le mieux au problème étudié.

138
5.4. Calcul des modes POD de l’écoulement autour d’un profil NACA0012 fixe en forte incidence

5.4 Calcul des modes POD de l’écoulement autour d’un profil


NACA0012 fixe en forte incidence
5.4.1 Simulation numérique de l’écoulement autour du profil NACA0012 pour la
génération des clichés
Ce premier exemple est mis en œuvre uniquement dans le but de servir à valider la formulation du
modèle d’ordre réduit développé pour un fluide compressible — non turbulent — étudié dans un domaine
de frontières fixes. De ce fait, les paramètres de l’écoulement sont déterminés de manière à ce que les hy-
pothèses émises lors de la construction du modèle d’ordre réduit soit vérifiées, plutôt que par souci de
réalisme physique.
La première étape de la construction du modèle d’ordre réduit consiste à effectuer une simulation nu-
mérique préalable du système afin d’extraire un certain nombre de clichés pour calculer les modes POD.
L’instationnarité du système est ici d’origine purement aérodynamique puisqu’elle résulte de détachements
de vortex de type Von Kármán qui se forment dans le sillage du profil symétrique NACA0012 pour certaines
valeurs de l’angle d’incidence α, du nombre de Mach Ma et du nombre de Reynolds Re.
Pulliam [184] a en particulier étudié l’influence du nombre de Reynolds sur l’intervalle [800; 3 000] pour
α = 20˚et Ma = 0, 2, et a mis en évidence une bifurcation qui caractérise la transition entre un détache-
ment simple de vortex et un détachement chaotique. Shan et al. [208] ont pour leur part analysé au moyen
de simulations directes les détails de la séparation puis du détachement de la couche limite, de l’émission
de vortex, de la transition vers la turbulence puis du ré-attachement de la couche limite lorsque le profil
est incliné d’un angle d’incidence α = 4˚, pour un nombre de Reynolds Re = 105 et un nombre de Mach
Ma = 0, 2. D’autres travaux concernent la modélisation du bruit rayonné par l’écoulement autour du profil :
Marsden et al. [160] ont ainsi simulé le bruit rayonné autour du profil pour un angle d’incidence nul, avec
Re = 60 000 et Ma = 0, 33 ; Le Garrec et Gloerfelt [141] ont quant à eux étudié le bruit rayonné pour des
angles d’incidence compris entre 0 et 10˚, avec Re = 5 000 et Ma = 0, 2.
Par ailleurs, la simulation de l’écoulement autour d’un profil NACA0012 a servi à plusieurs reprises de
cas test pour valider des modèles d’ordre réduit. Favier et al. [73] l’ont notamment utilisé dans le cas d’un
fluide incompressible afin de valider plusieurs méthodes de calibrage de leur modèle d’ordre réduit. Bour-
guet et al. [34] ont repris le modèle d’ordre réduit développé par Iollo et al. [117] et ont validé leur modèle
d’ordre réduit en régime transonique (Ma = 0, 80 et 0, 85 pour Re = 5 000 et 10 000 en incidence nulle) alors
que Iollo et al. avaient utilisé cet exemple en régime subsonique (Ma = 0, 2 et Re = 2 100, avec α = 20˚).
Dans le cas présent, on se place dans des conditions similaires à celles de Iollo et al. [117], en inclinant
le profil d’un angle d’incidence α = 20˚et en choisissant des paramètres de l’écoulement tels que Ma = 0, 2
et Re = 2 000. De ce fait, l’écoulement peut donc être considéré comme compressible et laminaire, ce qui
rentre dans le cadre des hypothèses qui ont été émises pour élaborer le modèle d’ordre réduit.

Figure 5.2 : Maillage du domaine de calcul pour la simulation numérique de l’écoulement autour du profil NACA0012 incliné
d’un angle α = 20˚.

139
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

Le domaine de calcul représenté sur la figure 5.2 est discrétisé en N = 19 100 cellules Volumes Finis à
l’aide d’un maillage bidimensionnel en C, raffiné localement au niveau de la paroi du profil et vers les bords
d’attaque et de fuite. Le maillage a été généré au moyen d’une méthode d’interpolation transfinie [69].
L’écoulement supposé compressible, laminaire et visqueux est modélisé au moyen des équations de
Navier-Stokes. Les équations sont résolues pour les variables conservatives avec une méthode multigrille à
deux niveaux. L’intégration temporelle des équations est effectuée au moyen du schéma d’Euler rétrograde
et les flux sont discrétisés selon l’approche de Jameson [120] (voir l’annexe E.3 pour les détails relatifs à la
discrétisation). On peut distinguer deux types de frontières du domaine Ω : la première, notée Γ correspond
à l’interface fluide-structure où la condition limite (4.45) s’applique avec une vitesse de la structure nulle
puisque le profil est fixe ; la seconde frontière notée simplement ∂Ω∞ représente une limite non physique du
domaine Ω supposé infini. Sur cette portion de la frontière, des conditions aux limites dites de non-réflexion
sont imposées pour éviter la réflexion des grandeurs aérodynamiques. Les valeurs du champ sur la frontière
perméable sont soit imposées par les valeurs du champ dans Ω, soit par les valeurs pré-supposées à l’infini
en fonction des relations caractéristiques.

p
1 0.714
0.712
0.71
0.708
0.706
0.704
0.702
0.7
0.5 0.698
0.696
0.694
0.692
z

0.69
0.688
0.686
0.684
0 0.682
0.68
0.678
0.676
0.674
0.672
0.67

-0.5

0 0.5 1 1.5
x

Figure 5.3 : Champ de pression stationnaire et lignes de courant autour du profil NACA0012 en forte incidence.

Une première simulation stationnaire est effectuée afin de mettre en évidence l’existence d’une zone
de recirculation sur l’extrados vers le bord de fuite. Celle-ci est visible sur la figure 5.3 où quelques lignes
de courant de l’écoulement ont été superposées au champ de pression stationnaire. L’existence d’une telle
structure laisse supposer un possible détachement de cette zone de recirculation, conduisant ainsi à la créa-
tion d’un phénomène instationnaire caractérisé par des allées de Von Kármán.
On procède donc ensuite à des simulations instationnaires afin de vérifier l’existence du détachement
de vortex dans le sillage du profil, qui sera le facteur déclencheur de l’instationnarité de l’écoulement. La
simulation est initiée à partir de la solution stationnaire calculée précédemment. Après une période tran-
sitoire, les différentes grandeurs aérodynamiques se mettent à osciller de façon périodique. La figure 5.4
présente par exemple le champ de pression relevé à différents instants sur une période complète de dé-
tachement tourbillonnaire. Les deux vortex dans le sillage proche à t0 sont convectés progressivement en
aval, tandis que de nouveaux vortex commencent à se former sur l’extrados du profil. Ceux-ci sont expulsés
vers t0 + TS /2 puis convectés à leur tour dans le sillage jusqu’à t0 + TS où ils occupent exactement la même
place que les vortex précédemment émis.
La validation du modèle d’ordre réduit effectuée par la suite reposera sur la bonne reproduction du
phénomène instationnaire. Ce dernier peut être caractérisé notamment par les courbes d’évolution des co-
efficients aérodynamiques de portance CL et de traînée CD définis respectivement par les relations

FD FL
CD = et CL = , (5.49)
0.5 ρ0 U∞ L0 0.5 ρ0 U∞ L0
140
5.4. Calcul des modes POD de l’écoulement autour d’un profil NACA0012 fixe en forte incidence

(a) t0 (b) t0 + TS /8 (c) t0 + TS /4

(d) t0 + 3TS /8 (e) t0 + TS /2 (f) t0 + 5TS /8

(g) t0 + 3TS /4 (h) t0 + 7TS /8 (i) t0 + TS

Figure 5.4 : Clichés du champ de pression sur une période de détachement tourbillonnaire. Le détachement de vortex dans le sillage
s’effectue de façon périodique à la période de Strouhal TS et donne ainsi naissance à une allée de Von Kármán.

141
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

où FL et FD sont les efforts de portance et de traînée définis comme la projection des efforts aérodynamiques
le long d’un axe perpendiculaire à la direction de l’écoulement pour FL et d’un axe parallèle à l’écoulement
pour FD . Ces deux composantes sont extraites directement d’elsA au moyen des flux convectifs et diffusifs
dans les deux directions souhaitées4 . Les courbes d’évolution des coefficients de traînée et de portance
sont présentées sur la figure 5.5(a) en fonction du temps adimensionnel t∗ = t/t√ 0 où t désigne le temps
physique et t0 = L0 /U0 est le temps utilisé pour l’adimensionnement avec U0 = γRθ0 — γ = 1, 4 étant
le rapport des chaleurs spécifiques, R = 287, 04 J kg−1 K−1 étant la constante des gaz parfaits de l’air
et θ0 est la température de référence en Kelvin. Après une période transitoire s’étalant sur environ cinq
périodes, les variables aérodynamiques présentent une allure sinusoïdale entretenue comme en témoignent
les historiques des coefficients aérodynamiques. Les transformées de Fourier de la partie établie du signal
représentées sur la figure 5.5(b) confirment le caractère parfaitement sinusoïdal du phénomène d’émission
de vortex, et permettent de déterminer la période de Strouhal TS∗ = 9, 6 × 102 associée au détachement, ce
qui est cohérent avec la valeur trouvée par Iollo et al. [117] pour des paramètres d’écoulement proches.

0.16 1.3

1.2
0.14
1.1

0.12
1
CL (−)
CD (−)

0.1 0.9

0.8
0.08
0.7
0.06
0.6

0.04 0.5
0 50 100 150 200 250 0 50 100 150 200 250
t* t*

(a) Historique des coefficients aérodynamiques


5
4 x 10
x 10
9
4.5
8
4
7
3.5

3 6
Magnitude
Magnitude

2.5 5

2 4

1.5 3

1 2

0.5 1

0 0
0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25 0.3 0.35 0.4 0.45 0.5 0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25 0.3 0.35 0.4 0.45 0.5
f* f*

(b) Transformées de Fourier des historiques des coefficients aérodynamiques

Figure 5.5 : Historiques et transformées de Fourier des coefficients de traînée et de portance.

5.4.2 Calcul des modes POD de l’écoulement autour du profil NACA0012


Un ensemble de M clichés adimensionnels relatifs aux champs q(m) = [ϑ, u, v, p]T , pour m = 1, . . . , M
est échantillonné régulièrement sur l’intervalle de temps Ie à partir de la simulation précédente. Les cli-
chés sont sélectionnés sur une durée couvrant un peu plus d’une période puisque l’analyse d’un système
périodique dans l’annexe C.1 avait permis de mettre en évidence qu’il n’était pas nécessaire d’allonger l’in-
tervalle d’échantillonnage.
La construction du modèle d’ordre réduit est basée sur une approche POD multivariables si bien que
4 Dans le cas présent, le profil est horizontal et l’angle d’incidence est introduit au niveau de la condition limite de non-réflexion.

Par conséquent les flux issus d’elsA fournis dans le repère du profil et non de l’écoulement correspondent aux coefficients Cx et Cz .
Pour retrouver les valeurs des coefficients de traînée et de portance il sera donc nécessaire de pratiquer un changement de repère,
correspondant à une rotation de l’angle d’incidence α.

142
5.4. Calcul des modes POD de l’écoulement autour d’un profil NACA0012 fixe en forte incidence

les modes POD sont calculés à partir des vecteurs propres du problème (2.81) et de la relation (2.82). Le
produit scalaire adopté est celui défini par l’équation (4.52) avec Padim = Inv puisque les clichés extraits sont
déjà sous forme adimensionnelle. Les modes POD obtenus seront donc eux aussi adimensionnels, ce qui
est cohérent pour effectuer ensuite les produits scalaires qui interviendront au cours de la construction du
modèle d’ordre réduit.
La figure 5.6 représente le spectre des valeurs propres de l’opérateur de corrélation spatial formé pour la
méthode des clichés proposée par Sirovich [218]. Le graphique indique le pourcentage ηei d’énergie captée
par chaque valeur propre qui a été défini à l’équation (3.44). Les premières valeurs propres captent la quasi-
totalité de l’énergie contenue dans le système : ainsi pour M = 50, les q = 6 premières valeurs propres
captent déjà ηq = 99,P 99% de l’énergie totale et les q = 10 premières valeurs propres conduisent à une erreur
de troncature ǫq = ri=q+1 λi de l’ordre de 10−4 . Le nombre de clichés choisis sur une période d’oscilla-
tion du système semble avoir assez peu d’influence sur les valeurs propres, bien que quelques différences
soient visibles sur le spectre, notamment pour de faibles valeurs de M . Les valeurs propres apparaissent
par paires, au moins pour i ∈ J1; 20K et lorsque le nombre de clichés utilisé est suffisamment grand. Ce
regroupement par paires peut être attribué à la symétrie de translation des ondes progressives caractérisant
l’écoulement [17] et est habituellement observé, que ce soit dans le sillage d’un profil portant comme celui
traité ici [34, 73, 117], ou encore dans le sillage d’un cylindre de section circulaire [216] ou carrée [50].

2
10
M=12
M=25
M=50
0
10 M=75

−2
10
λi / Σi λi (%)

−4
10

−6
10

−8
10

−10
10
0 10 20 30 40 50 60 70 80
i

Figure 5.6 : Spectre des valeurs propres associées aux modes POD calculés avec la méthode des clichés pour quelques valeurs du
nombre M de clichés.

À la vue de ce spectre, on peut supposer qu’un modèle d’ordre réduit construit à l’aide d’une base POD
tronquée à six modes seulement devrait déjà permettre de reconstruire correctement la solution. Au-delà de
vingt modes POD, il semble peu utile de rajouter des modes supplémentaires dans la base puisque la pente
du spectre devient moins importante, ce qui traduit le fait que chaque nouveau mode ajouté n’apporte que
peu d’information complémentaire.
La figure 5.7 donne l’aspect des six premiers modes POD de pression calculés par la méthode des clichés.
Il s’agit en réalité d’un abus de langage puisque les « modes POD » représentés correspondent seulement
(j) (j) (j) (j)
à la partie ϕp du vecteur ϕ(j) = [ϕϑ ϕu ϕp ]T . Le regroupement par paires des valeurs propres déjà
observé auparavant se retrouve dans l’allure des modes POD : les structures spatiales des modes sont simi-
laires pour les paires (1-2), (3-4), (5-6),... et présentent uniquement un déphasage spatial. Le premier couple
de modes POD met en évidence une structure relative à l’émission simultanée de deux vortex contrarotatifs
convectés ensuite en aval sur deux axes distincts comme dans le cas des allées de Von Kármán, alors que les
couples de modes suivants font plutôt apparaître des structures de vortex émis successivement. De plus,
il apparaît que la taille des structures spatiales mises en évidence décroît lorsque l’indice des modes POD
associés à des valeurs propres de plus en plus faibles augmente. Ceci signifie que les modes POD d’ordre
élevé rendent accessibles des détails de plus en plus fins qui permettront par conséquent de reconstruire de
plus en plus précisément la solution. Ce phénomène est très similaire à ce qui se produit avec des dévelop-

143
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

pements en séries trigonométriques où les longueurs d’ondes des fonctions de la série sont de plus en plus
faibles.

POM1 POM3 POM5


0.08 0.2 0.2
0.072 0.18 0.18
0.064 0.16 0.16
0.056 0.14 0.14
0.048 0.12 0.12
0.04 0.1 0.1
0.032 0.08 0.08
0.024 0.06 0.06
0.016 0.04 0.04
0.008 0.02 0.02
0 0 0
-0.008 -0.02 -0.02
-0.016 -0.04 -0.04
-0.024 -0.06 -0.06
-0.032 -0.08 -0.08
-0.04 -0.1 -0.1
-0.048 -0.12 -0.12
-0.056 -0.14 -0.14
-0.064 -0.16 -0.16
-0.072 -0.18 -0.18
-0.08 -0.2 -0.2

POM2 POM4 POM6


0.1 0.2 0.2
0.09 0.18 0.18
0.08 0.16 0.16
0.07 0.14 0.14
0.06 0.12 0.12
0.05 0.1 0.1
0.04 0.08 0.08
0.03 0.06 0.06
0.02 0.04 0.04
0.01 0.02 0.02
0 0 0
-0.01 -0.02 -0.02
-0.02 -0.04 -0.04
-0.03 -0.06 -0.06
-0.04 -0.08 -0.08
-0.05 -0.1 -0.1
-0.06 -0.12 -0.12
-0.07 -0.14 -0.14
-0.08 -0.16 -0.16
-0.09 -0.18 -0.18
-0.1 -0.2 -0.2

(j)
Figure 5.7 : Allure des six premiers modes POD de pression ϕp calculés à partir de M = 50 clichés solutions de l’écoulement
autour du profil NACA0012 en forte incidence.

Les clichés initialement utilisés pour calculer les modes POD sont dans un premier temps reconstruits
en évaluant les amplitudes modales telles qu’elles satisfassent la décomposition (2.83). Pour cela, il suffit
d’utiliser l’orthonormalité des modes POD ϕ(j) au sens du produit scalaire de (L2 (Ω))nv de sorte que les
amplitudes modales associées aux clichés de départ q(j) soient données par
D E Z  
(m) (m) (j)
aj = q − q, ϕ = q(m) − q · ϕ(j) dΩ, ∀(m, j) ∈ J1; M K × J1; qK. (5.50)

Une fois les amplitudes modales calculées, les clichés sont reconstruits comme combinaison linéaire des
modes POD au moyen de la relation (2.83). La figure 5.8(a) représente le champ de pression p correspondant
au premier cliché q(1) de la base de clichés initiale. Le champ de pression est alors reconstruit en utilisant
une base POD dont on augmente au fur et à mesure le nombre de vecteurs q. Les figures 5.8(b) à (f) repré-
sentent l’erreur relative de reconstruction 100 |p − pr |/|pr |, où pr est le champ de pression du cliché original
et p est la pression reconstruite à l’aide des amplitudes (5.50) introduites dans la décomposition POD en
conservant de deux à dix modes. L’erreur de reconstruction reste très faible, même lorsque peu de modes
sont pris en compte : ainsi, avec seulement q = 2 modes, l’erreur relative maximale dans le domaine est
seulement de l’ordre 0, 65%. En augmentant le nombre de modes dans la base, l’erreur diminue jusqu’à
être progressivement noyée dans les erreurs numériques lorsque l’ensemble des modes POD est conservé.
La figure 5.8 fournit en outre des informations sur la répartition spatiale des erreurs de reconstruction à un
instant donné. En particulier, on observe que lorsque seuls les deux premiers modes sont conservés, l’erreur
fait apparaître des structures correspondant à celles des modes 3 et 4 (voir figure 5.7) ; de la même manière,
lorsque les quatre premiers modes sont conservés, on observe que les structures de l’erreur correspondent
aux modes 5 et 6 qui sont négligés — plus d’autres composantes relatives aux modes d’indices supérieurs
mais qui ne sont pas nettement visibles ici.
L’erreur introduite à l’équation (3.41) est redéfinie d’une manière plus générale pour tenir compte de
l’erreur commise dans tout le domaine et pour toutes les variables au moyen de l’expression

(m) (m)
q − qr
L2
εL2 ,q =
q(m) 2 . (5.51)
L

144
5.4. Calcul des modes POD de l’écoulement autour d’un profil NACA0012 fixe en forte incidence

p p p
0.71 0.65 0.22
0.707 0.62 0.21
0.704 0.59 0.2
0.701 0.56 0.19
0.698 0.53 0.18
0.695 0.5 0.17
0.692 0.47 0.16
0.689 0.44 0.15
0.686 0.41 0.14
0.683 0.38 0.13
0.68 0.35 0.12
0.677 0.32 0.11
0.674 0.29 0.1
0.671 0.26 0.09
0.668 0.23 0.08
0.665 0.2 0.07
0.662 0.17 0.06
0.659 0.14 0.05
0.656 0.11 0.04
0.653 0.08 0.03
0.65 0.05 0.02
0.01

(a) Champ de pression original (b) q = 2 (c) q = 4

p p p
0.105 0.03 0.014
0.1 0.028 0.013
0.095 0.026 0.012
0.09 0.024 0.011
0.085 0.022 0.01
0.08 0.02 0.009
0.075 0.018 0.008
0.07 0.016 0.007
0.065 0.014 0.006
0.06 0.012 0.005
0.055 0.01 0.004
0.05 0.008 0.003
0.045 0.006 0.002
0.04 0.004 0.001
0.035 0.002
0.03
0.025
0.02
0.015
0.01
0.005

(d) q = 6 (e) q = 8 (f) q = 10

Figure 5.8 : Erreur de reconstruction relative entre le champ de pression initial p représenté en (a) et le champ pr reconstruit à
l’aide de la base POD constituée de q = 2, 4, 6, 8 et 10 modes POD (figures (b) à (f)).

−4
x 10
6
0.08
q=2
0.07 q=4
5
q=6
0.06 q=8
q=10
4
0.05
2 (%)
2 (%)

0.04 3
ε(k)
ε(k)

L
L

M=12
0.03
2 M=25
0.02 M=50
1 M=75
0.01
M=150

0 0
0 5 10 15 0 5 10 15
t* t*

(a) Erreur εL2 ,q en fonction du nombre de modes POD (b) Erreur εL2 ,q en fonction du nombre de clichés

Figure 5.9 : Erreur εL2 ,q commise lors de la reconstruction des clichés de départ (a) lorsque la base des clichés est constituée de
M = 50 clichés et que le nombre de modes POD varie de q = 2 à 10, et (b) lorsque le nombre de clichés varie de M = 12 à 150 et
que la base des modes POD est constituée de q = 10 modes.

L’erreur εL2 ,q est alors estimée pour chaque cliché m = 1, . . . , M de la base initiale. Le résultat est
présenté sur la figure 5.9(a) pour une base de clichés initialement composée de M = 50 clichés et une
base POD dont on augmente le nombre de modes de q = 2 à 10. L’ordonnée donne l’erreur εL2 ,q et les
abscisses indiquent le temps adimensionnel t∗ auquel les clichés ont été pris. L’erreur εL2 ,q est déjà très
bonne lorsqu’un petit nombre de modes POD est conservé dans la base et on observe une convergence
assez rapide de l’erreur vers des valeurs très faibles lorsque la taille de la base POD augmente : l’erreur
εL2 ,q calculée comme la moyenne sur l’ensemble des clichés passe de 0, 05% à 4 × 10−4 % lorsque q varie de
2 à 10. Par ailleurs, la figure 5.9(b) représente la même erreur εL2 ,q lorsque le nombre de clichés dans la base
initiale varie de M = 12 à 150 et que la dimension de la base POD est maintenue à une valeur constante
q = 10. On observe une certaine convergence de l’erreur lorsque le nombre clichés augmente, mais le cas
M = 12 produit une erreur nettement plus faible ce qui peut sembler incohérent. En réalité, ceci s’explique
par le fait que la taille de la base POD utilisée est maintenue constante et que dans ce cas le nombre de

145
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

−1

−2

log( E(εL2) )
−3

−4

−5

−6
150

100
0
5
50 10
15
20
0 25
M q

Figure 5.10 : Convergence de l’erreur infinie de reconstruction ε∞ en fonction du nombre M de clichés contenus dans la base
POD initiale et du nombre q de modes POD retenus dans la base réduite.

modes POD utilisés correspond pratiquement à la base complète — puisque r = 11 lorsque M = 12 — et


par conséquent l’erreur de troncature
 est extrêmement faible : dans ce cas, le pourcentage d’énergie perdue
1 − ηq est de l’ordre de O 10−6 alors que pour les autres valeurs de M il est de l’ordre de O 10−4 .
Finalement, le graphique de la figure 5.10 résume la convergence de l’erreur moyenne εL2 ,q lorsque le
nombre de clichés et de modes POD contenus dans la base de projection POD augmente. Le nombre de
clichés employés a peu d’influence sur la convergence de l’erreur. On note cependant que pour de faibles
valeurs de M , l’erreur décroît plus rapidement pour la même raison que celle invoquée ci-dessus, puisque
la troncature effectuée dans la base est moins importante.

Remarque 5.1 : Calcul des modes POD pour des clichés de grande dimension
Les clichés comportent ici un nombre important Nv = N nv de degrés de liberté qui rend le calcul des modes POD
relativement coûteux, même avec la méthode des clichés. La matrice des clichés ne peut en effet pas être stockée inté-
gralement en mémoire et le calcul de l’opérateur de corrélation s’effectue donc de manière itérative. Puisque les modes
POD peuvent s’obtenir de façon équivalente comme les solutions d’une décomposition en valeurs singulières (voir
l’annexe B.3 p.222), il est possible de profiter de certaines méthodes approchées pour le calcul de la SVD. L’idée sous-
jacente est d’effectuer initialement la SVD d’une matrice des clichés tronquée qui est améliorée de manière itérative
au moyen des clichés absents de la matrice tronquée de départ. Le principe de la méthode est expliqué en détail par
Chahlaoui et al. [43] et l’algorithme implémenté ici est celui proposé par Mastronardi et al. [162]. Le coût de calcul
des modes POD est alors nettement réduit au moyen de cette technique mais les erreurs de reconstruction deviennent
d’autant plus élevées que la matrice tronquée des clichés employée pour initialiser l’algorithme est de faible dimension.
Une technique alternative qui n’a pas été évaluée ici consiste à calculer les modes POD au moyen d’une méthode de
Lanczos comme l’a proposé Fahl [70].

146
5.5. Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0012

5.5 Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil


NACA0012
Dans le paragraphe précédent, le calcul des modes POD de l’écoulement avait permis de constater que
les clichés pouvaient être reconstruits de façon très satisfaisante au moyen des amplitudes a(m) issues de la
projection des clichés sur les modes POD. En effet, les erreurs de reconstruction obtenues indiquent qu’un
petit nombre de modes suffit à reproduire le phénomène de détachement de vortex dans le sillage du profil.
L’objectif est à présent de calculer les amplitudes modales a(t) à l’aide du modèle d’ordre réduit et de
comparer les erreurs commises par rapport aux amplitudes de référence a(m) . Le modèle d’ordre réduit est
défini par le système d’équations (5.8) et les expressions des coefficients données à l’équation (5.9). Dans un
premier temps, la solution produite par le modèle d’ordre réduit non corrigé tel qu’il a été défini au para-
graphe 5.2.1 sera étudiée et comparée à la solution de référence. Les deux paragraphes suivants résumeront
un certain nombre de tentatives plus ou moins fructueuses pour améliorer la réponse.
Auparavant, signalons qu’une comparaison des contributions convectives et diffusives d’une part, et
surfaciques et volumiques d’autre part est fournie dans l’annexe F.1. Celle-ci révèle que la partie diffu-
sive joue surtout un rôle au travers de la partie moyenne q qui intervient dans la définition des coeffi-
cients constants et linéaires. Par ailleurs, les contributions surfaciques issues de l’intégration par parties
des termes diffusifs sont peu significatives et pourraient éventuellement être négligées. Cependant, l’en-
semble des contributions est pris en compte afin de minimiser les erreurs dans l’évaluation des coefficients
qui pourraient conduire à une déstabilisation de la réponse du modèle d’ordre réduit. Enfin, le nombre
de Reynolds est calculé à partir de la définition (5.1) en évaluant la viscosité avec la loi de Sutherland :
µ = µ273 (θ/θ273 )3/2 (θ273 + S)/(θ + S) où µ273 est une viscosité de référence à 273˚ Kelvin, θ273 = 273˚
Kelvin et S = 110, 4 est la constante de Sutherland. La valeur du nombre de Prandtl est quant à elle prise
constante et égale à Pr = 0, 72.

5.5.1 Réponse du modèle d’ordre réduit non corrigé


Le modèle d’ordre réduit POD-Galerkin de l’écoulement autour du profil NACA0012 est à présent mis
à l’épreuve pour reproduire le champ aérodynamique au moyen des amplitudes modales a(tm ) associées
aux modes POD. La qualité du modèle d’ordre réduit est principalement évaluée au moyen des amplitudes
qui doivent être les plus proches possible des amplitudes de référence a(m) . À partir d’elles, il devient alors
possible de comparer n’importe quelle grandeur aérodynamique telle que le coefficient de portance CL
défini à l’équation (5.49) par exemple. On définit pour commencer l’erreur générique
sZ
kχr (t) − χ(t)kL2 (I) t0 +tf
εχ = 100 avec kχ(t)kL2 (I) = χ2 (t) dt, (5.52)
kχr (t)kL2 (I) t0

qui mesure l’écart relatif moyen en temps entre la solution de référence χr (t) et celle reconstruite avec le
modèle d’ordre réduit notée simplement χ(t). L’erreur définie ci-dessus sera calculée en pratique sur l’inter-
valle de temps d’échantillonnage Ie . Elle permettra ainsi d’évaluer l’erreur moyenne commise pour chaque
amplitude modale en choisissant χ(t) = aj (t), ce qui conduira à l’erreur notée εaj , ou de la même manière
à la déviation moyenne εCL observée sur le coefficient de portance reconstruit par le modèle d’ordre réduit
(j)
en choisissant χ(t) = CL (t). En outre, on définit à partir des matrices Ar et A de termes généraux ai et
ai (tj ) respectivement l’erreur globale
kAr − Ak2
εA = 100 . (5.53)
kAr k2
Pour commencer, le modèle d’ordre réduit est construit à l’aide des q = 10 premiers modes POD puisque
d’après les résultats du paragraphe 5.4.2 la base constituée de ces modes POD capture près de 100% de
l’énergie du système. Par ailleurs, le nombre de clichés utilisés pour construire les modes POD semble avoir
peu d’influence (voir la figure 5.9(b) p.145) et on optera ici pour une base de clichés constituée de M = 50
vecteurs. Le modèle d’ordre réduit est alors intégré en temps à partir d’une solution initiale calculée à l’aide
de la relation (5.24) avec q0 = q(1) . L’intégration en temps du système réduit fournit les amplitudes modales
sur le même intervalle de temps Ie que celui utilisé pour l’échantillonnage des clichés, de façon à pouvoir
comparer la solution de référence à celle calculée au moyen du modèle d’ordre réduit.

147
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

0.15 0.04
0.015

0.03
0.1 0.01

0.02

0.05 0.005
0.01
a2

a4
0 0

a6
0

−0.01
−0.05 −0.005

−0.02

−0.1 −0.01
−0.03

−0.04 −0.015
−0.1 −0.05 0 0.05 0.1 0.15 −0.04 −0.03 −0.02 −0.01 0 0.01 0.02 0.03 0.04 −0.015 −0.01 −0.005 0 0.005 0.01 0.015
a1 a3 a5
−3 −3
x 10 x 10
4 3 500

450
3
2
400
2
350
1
1
300
a10
a8

i
0 0

εa
250

200
−1
−1
150
−2
100
−2
−3
50

−4 −3 0
−4 −3 −2 −1 0 1 2 3 4 −3 −2 −1 0 1 2 3 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
a7 −3
x 10
a9 −3
x 10 i

Figure 5.11 : Comparaison des portraits de phase des amplitudes modales {aj (t)}10 j=1 reconstruites par le modèle d’ordre réduit
non corrigé (+) avec celles issues de la projection des clichés (◦). Le dernier graphique représente de l’erreur moyenne relative εaj .

Le résultat est tracé sous forme de portraits de phase sur la figure 5.11 où les amplitudes modales {aj }10
j=1
(m)
associées aux modes POD sont comparées aux amplitudes aj de référence. Le modèle d’ordre réduit non
corrigé produit des amplitudes qui semblent diverger au fil du temps. L’amplitude des aj (t) calculées par
le modèle d’ordre réduit est en général trop élevée et les cycles limites sont mal reproduits, tant au niveau
de la forme que de l’étendue qu’ils couvrent. L’écart entre les amplitudes issues de la projection des clichés
et celles reconstruites par le modèle d’ordre réduit mesuré pour chaque mode au moyen de l’erreur εaj est
représenté sur le dernier graphique de la figure 5.11. Une forte augmentation de l’erreur relative est consta-
tée lorsque l’indice j des modes augmente : d’environ 25% pour le premier mode, l’erreur relative moyenne
sur l’amplitude associée aux derniers modes POD passe à près de 500% ! Toutefois, plus l’indice j est grand,
et plus les variations des amplitudes sont faibles : le grand axe de l’ellipse du premier portait de phase a
une amplitude de l’ordre de O(10−1 ), alors que sur le dernier portrait de phase, les variations maximales
de a10 sont de l’ordre de O(10−3 ). Par conséquent, le fait que l’écart entre les amplitudes de référence et
celles calculées par le modèle d’ordre réduit augmente avec l’indice j est en quelque sorte compensé par la
diminution des variations des amplitudes quand j augmente. Il s’ensuit que les grandeurs macroscopiques
ne sont pas si éloignées de la solution de référence.
Pour illustrer ceci, on évalue l’erreur commise sur le coefficient de portance qui correspond à une gran-
deur macroscopique χ annexe au modèle d’ordre réduit. Le coefficient R de portance se déduit indirectement
des amplitudes modales puisque les efforts de portance FL (t) ≈ Γ p(x, t) nz ds entrant dans la définition
(5.49) du coefficient de portance font intervenirPla pression p qui est reconstruite au moyen de la décom-
(j)
position orthogonale propre p(x, t) = p(x) + qj=1 aj (t) ϕp (x), de sorte qu’il existe bien une relation
CL (t) = bg(a(t)). Le modèle d’ordre réduit est intégré sur une durée plus longue que celle ayant servie pour
l’échantillonnage des clichés afin d’observer le comportement à long terme de la réponse. La figure 5.12(a)
confronte ainsi le coefficient de portance calculé au moyen du modèle d’ordre réduit à celui de référence
sur une durée correspondant à une quinzaine de détachements de vortex. Le rectangle noir correspond à
l’intervalle de temps d’échantillonnage. Au cours de cette période, la solution reconstruite avec le modèle
d’ordre réduit est en relativement bon accord avec la solution de référence puisque l’erreur calculée pour
le modèle d’ordre réduit caractérisé par q = 10 modes POD et M = 50 clichés ne s’élève qu’à εCL = 3, 8%.
Toutefois, lorsque l’intégration en temps du modèle d’ordre réduit est poursuivie en dehors de la fenêtre
d’échantillonnage, une amplification anormale de l’amplitude est observée. Bien que les oscillations ne di-

148
5.5. Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0012

vergent pas, l’amplitude crête-à-crête5 ∆cc,POD = 0, 83 est pratiquement deux fois plus importante que celle
de référence ∆cc,r = 0, 38. Malgré cette imperfection concernant les amplitudes d’oscillation, la fréquence
est correctement évaluée : les transformées de Fourier des signaux de portance données sur la figure 5.12(b)
permettent d’identifier le pic principal à fS,r

= 0, 0960 tandis que le modèle d’ordre réduit produit un pic à
fS,POD = 0, 0975, ce qui correspond à des périodes de Strouhal respectivement égales à TS,r = 2, 95 × 10−2 s

et TS,POD = 2, 91 × 10−2 s, soit une erreur ne dépassant pas 1, 5%.

5
x 10
1.5
15 elsA
elsA
1.4 POD
ROM
1.3

1.2
10

Magnitude
1.1
CL (−)

0.9

0.8 5

0.7

0.6

0.5 0
0 50 100 150 200 250 0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25 0.3 0.35 0.4 0.45 0.5
t* f*

(a) Coefficients de portance (b) Transformées de Fourier

Figure 5.12 : Comparaison des coefficients de portance calculés avec elsA et le modèle d’ordre réduit non corrigé sur une longue
durée (a) et comparaison des transformées de Fourier associées (b).

Avant de conclure sur la qualité du modèle d’ordre réduit, il est important de contrôler si l’augmenta-
tion du nombre de modes POD q contenus dans la base de projection et/ou du nombre M de clichés em-
ployés pour calculer les modes POD permet(tent) d’améliorer la réponse. Plusieurs critères de convergence
peuvent être adoptés et on retiendra ici l’erreur globale εA définie à l’équation (5.53) pour les amplitudes
modales, ainsi que l’erreur εCL définie à partir de l’équation (5.52) pour le coefficient de portance. Le même
type d’analyse de convergence de l’erreur commise sur les clichés reconstruits en fonction de M et q avait
été effectué au paragraphe 5.4.2 en utilisant les amplitudes modales issues de la projection des clichés a(m)
alors que maintenant les amplitudes a(tm ) produites par le modèle d’ordre réduit sont employées. Le résul-
tat est tracé sur les graphiques de la figure 5.13 : quel que soit le type d’erreur considéré, une décroissance
de l’erreur de reconstruction est toujours observée lorsque le nombre q de modes POD conservés dans la
base de projection augmente mais la réponse du modèle d’ordre réduit converge très rapidement vers une
valeur asymptotique de l’erreur, ce qui coïncide avec les résultats obtenus au paragraphe 3.3 pour le sys-
tème dynamique linéaire. Ce phénomène est encore plus prononcé pour l’erreur εA qui semble constante
dès que q ≥ 6. Par ailleurs, le nombre M de clichés employés au départ semble avoir très peu d’influence
sur l’erreur de reconstruction. Enfin il faut signaler que l’erreur relative moyenne commise sur le coefficient
de portance reste faible — de l’ordre de εCL = 3, 9% — malgré une erreur de reconstruction globale assez
élevée pour les amplitudes — de l’ordre de εA = 33%.

5.5.2 Introduction de termes correctifs dans le modèle d’ordre réduit

La réponse du modèle d’ordre réduit non corrigé révèle bien le manque de stabilité symptomatique de
l’approche POD-Galerkin. Par conséquent le modèle d’ordre réduit est corrigé pour commencer au moyen
des techniques proposées par Cazemier et al. [42] et Kalb et Deane [124].

5 L’amplitude crête-à-crête est calculée pour un signal périodique établi comme la différence entre la valeur maximale et la valeur

minimale sur une période d’oscillation. Ici, les trois dernières valeurs des extrema sont relevées lorsque les oscillations sont établies.
Ces valeurs permettent de calculer un maximum et un minimum moyens qui serviront à évaluer l’amplitude crête-à-crête du coeffi-
cient de portance ∆cc = CL,max − CL,min . À partir de cette quantité, on définit l’erreur relative ε∆cc = 100|∆cc,r − ∆cc,POD |/|∆cc,r |.

149
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

55 6.5

50 6

5.5

E(εCL) (%)
45
εA (%)

5
40
4.5

35
4

30 3.5
0 0
0 0
5 5
10 50 10 50
15 100 15 100
20 150 20 150
M M
q q

(a) Erreur sur les amplitudes (b) Erreur sur le CL

Figure 5.13 : Convergence en fonction du nombre M de clichés et du nombre q de modes POD de l’erreur globale de reconstruction
εA pour les amplitudes modales (a) et de l’erreur εCL pour le coefficient de portance (b).

5.5.2.1 Correction du nombre de Reynolds


La réponse du modèle d’ordre réduit peut être améliorée de manière significative en introduisant de
la viscosité artificielle dans le système réduit. Il suffit donc de multiplier, comme au paragraphe 5.3.2.2,
la viscosité réelle de l’écoulement par un facteur 1 + ηa qui donne lieu au nombre de Reynolds corrigé
Rec défini à l’équation (5.26). La valeur de ce dernier est donc diminuée progressivement par rapport au
nombre de Reynolds réel afin d’augmenter la dissipation introduite. La réponse du modèle d’ordre réduit
est alors évaluée pour différentes valeurs du nombre de Reynolds corrigé Rec et du nombre q de modes
POD retenus dans le modèle d’ordre réduit. La qualité de la réponse reproduite est évaluée d’une part au
moyen de l’erreur εCL qui décrit la précision de la réponse sur la durée d’échantillonnage, et d’autre part à
l’aide de l’erreur ε∆cc sur l’amplitude crête-à-crête qui fournit une indication sur l’erreur à long terme. Le
résultat est présenté sur la figure 5.14.

5 150

4.5

4 100
E(εCL)

ε∆,cc

3.5

3 50

2.5

2 0
2000 2000
1800 0 1800 0
1600 5 1600 5
1400 10 1400 10
1200 15 1200 15
1000 20 1000 20
q q
Rec Rec

(a) Erreur moyenne (b) Erreur sur l’amplitude

Figure 5.14 : Erreurs de reconstruction εCL et ε∆cc du modèle d’ordre réduit corrigé à l’aide d’une viscosité artificielle conduisant
au nombre de Reynolds corrigé Rec .

La valeur optimale du nombre de Reynolds corrigé pour un nombre de modes POD q donné est recher-
chée en procédant par dichotomie, bien que cette méthode requière un grand nombre d’essais. On observe
en effet qu’en dessous de Rec = 1 000, l’erreur de reconstruction du modèle d’ordre réduit a tendance à
augmenter à nouveau puisque les oscillations du système passent d’un régime périodique entretenu à un

150
5.5. Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0012

régime amorti, ce qui est le signe d’une trop forte dissipation introduite dans le modèle d’ordre réduit.
L’amélioration la plus importante est obtenue pour Rec = 1 250 en conservant q = 10 modes POD, ce qui
correspond à un taux de dissipation artificiel ηa = 60%. L’erreur sur les amplitudes d’oscillation tombe
alors à ε∆cc = 11, 1%, tandis que l’erreur moyenne εCL sur la durée d’échantillonnage n’atteint que 2%.

5.5.2.2 Correction de Cazemier et al.


Afin d’éviter la recherche du nombre de Reynolds adéquat pour corriger le système dynamique, Caze-
mier et al. [42] proposent d’introduire une correction linéaire dans le modèle d’ordre réduit. Les coefficients
de la correction sont calculés de façon à ce que l’énergie associée aux modes POD soit conservée sur une pé-
riode d’oscillation du système dynamique, selon le principe exposé au paragraphe 5.3.2.2. Les coefficients
Di de la correction peuvent être interprétés comme une contribution dissipative Pintroduite pour chaque
q
mode POD. En effet, la partie linéaire du modèle d’ordre réduit peut se ré-écrire j=1 (Lij + δij Di ) aj et la
correction peut être regroupée avec la partie diffusive des coefficients, de sorte que l’ensemble puisse être
vu comme une modification du nombre de Reynolds pour chaque mode POD. Les termes diagonaux de Lii
sont ainsi modifiés en LC ii + (1/Re Lii + Di ). L’introduction de la correction linéaire revient alors à calculer la
D

partie diffusive linéaire Lii avec un nombre de Reynolds corrigé Reci , de sorte que 1/Re LD
D c D
ii +Di = 1/Rei Lii .
a
L’effet du terme Di peut donc être exprimé en fonction d’un nombre de Reynolds ajouté Re en utilisant la
relation (5.26) qui conduit à
LD
Reai = ii . (5.54)
Di

140
q=4
q=6
120
q=8
q=10
100 q=12
q=14
q=16
ηa (i) (%)

80
q=18
q=20
60

40

20

0
0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20
i

Figure 5.15 : Pourcentage de viscosité artificielle ηa introduit pour chaque mode POD ϕ(i) avec la correction proposée par
Cazemier et al. Le résultat est tracé pour différentes dimensions q de la base de projection.

La viscosité artificielle µa introduite de cette manière est alors quantifiée au moyen du ratio ηa = µa /µ =
Re/Rea calculé pour chaque mode POD. Le résultat est tracé sur la figure 5.15 pour différentes tailles de
la base réduite. Les premiers modes POD (q ≤ 4) sont très fortement amortis puisque la viscosité ajoutée
représente à chaque fois plus de 70% de la viscosité réelle. Par ailleurs, on observe que lorsque la taille de
la base POD augmente, la dissipation totale introduite diminue : ainsi, lorsqu’on passe de q = 8 à q = 10
par exemple, la dissipation artificielle des 6 premiers modes reste identique mais elle chute fortement pour
les modes 7 et 8 qui passent d’environ 35% lorsque la base POD est de taille q = 8 à environ 7% pour
q = 10. Enfin la dissipation associée aux modes 9 et 10 est de l’ordre de 24%, c’est-à-dire supérieure à
celle des modes précédents. On peut avancer l’hypothèse que le surplus de dissipation associé aux deux
derniers modes est lié à la troncature effectuée dans la base POD puisque ce phénomène se reproduit à
chaque fois que la taille de la base POD est augmenté. On retrouve par ailleurs le fait que les modes se
comportent par paire, ce qui est lié à leur structure et au spectre des valeurs propres mis en évidence. Enfin,
lorsque la taille de la base POD devient assez grande, la viscosité artificielle associée aux modes d’indices
élevés devient négligeable : ainsi, pour q ≥ 16, les coefficients Di calculés deviennent positifs au-delà du 12e

151
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

mode et sont donc réinitialisés à zéro comme l’ont suggéré Cazemier et al. afin que la correction apportée
soit purement dissipative. La correction proposée par Cazemier et al. est donc simple à mettre en œuvre
et possède un comportement assez intuitif puisque la dissipation totale introduite dans le modèle d’ordre
réduit diminue lorsque la taille de la base de projection augmente. Ceci est en accord avec le fait que le
manque de dissipation du modèle d’ordre réduit peut être attribué en partie à la troncature effectuée dans
la base POD. En conclusion, la correction agit efficacement et les amplitudes sont correctement atténuées.
L’erreur moyenne εCL sur la durée d’échantillonnage reste globalement inférieure à 2% dès que q > 4 et
l’écart ε∆cc sur l’amplitude crête-à-crête est de l’ordre de 10%.

5.5.2.3 Correction de Kalb et Deane

Une autre technique évaluée ici pour corriger le modèle d’ordre réduit est due à Kalb et Deane [124]
qui avaient proposé de tirer parti des informations liées à l’erreur entre les amplitudes modales issues de
la projection des clichés et celles provenant d’un premier calcul avec le modèle d’ordre réduit non corrigé.
Suivant le principe exposé au paragraphe 5.3.3.2, des coefficients de correction constants Kic et linéaires Lcij
sont calculés en projetant cette erreur sur la base formée des fonctions propres temporelles. Les corrections
apportées par cette méthode sont plus complètes puisque l’ensemble des termes constants et linéaires est af-
fecté, alors que l’approche de Cazemier et al. ne modifiait que les termes linéaires diagonaux de l’opérateur
L. Les corrections introduites sont évaluées au moyen des rapports

Kc Lc
ΠK = log 100 et ΠL = log 100 (5.55)
K L

qui quantifient la correction par rapport aux coefficients du modèle d’ordre réduit non corrigé.

4.5
2
4 4
log( 100 | Lcij / Lij | ) (−)

3.5 2 1

3
log( 100 | Kci / Ki | ) (−)

0
0
2.5 −2

2 100% −1
−4
50%
1.5 25%
−6 −2
10%
1
10
9
0.5 8 −3
7
6 1
5 2
0 4 3
4
3 5 −4
2 6
7
−0.5 1 8
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 9
10
i j i

(a) Correction constante (b) Correction linéaire

Figure 5.16 : Contribution relative des termes correctifs constants et linéaires de la méthode de Kalb et Deane par rapport aux
coefficients initiaux.

Les corrections apportées sont représentées sur la figure 5.16 au moyen des rapports définis ci-dessus.
Il s’avère que pour un certain nombre de coefficients, la correction modifie de manière très importante le
coefficient initial : ainsi, le coefficient constant relatif au 3e mode est multiplié par plus de 200 et, en dehors
du 2e et du 9e mode, les corrections représentent toujours plus de 100% du coefficient constant non cor-
rigé. Par ailleurs, les corrections linéaires se sont pas uniformément réparties : elles agissent principalement
pour i = 1, 2 et sur l’ensemble des colonnes j = 1, . . . , q, alors que les corrections sur les autres coefficients
linéaires sont quasiment négligeables.
La correction proposée par Kalb et Deane permet d’obtenir une réponse corrigée satisfaisante puisque

152
5.5. Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0012

l’erreur de reconstruction εCL sur la période d’échantillonnage tombe à 2, 34% et celle sur l’amplitude crête-
à-crête est de l’ordre de ε∆cc ≈ 5%. Toutefois, cette réponse aussi précise a été obtenue à l’aide d’une nor-
malisation adéquate du terme correctif qui diffère de celle proposée par Kalb et Deane. En effet, le facteur
(m) (m)
de normalisation 1/haj , aj i intervenant dans l’expression de la correction linéaire (5.45) est inverse-
ment proportionnel aux valeurs propres λj associées aux modes POD ϕ(j) . Puisque les valeurs propres dé-
croissent très rapidement lorsque l’indice j des modes POD augmente, les corrections linéaires deviennent
très importantes et déstabilisent le modèle d’ordre réduit plus qu’elles ne le corrigent. Par conséquent, l’er-
reur a ici été normalisée par un facteur proportionnel à δtc /M . Une constante de proportionnalité égale à 10
a été introduite pour atteindre une stabilisation satisfaisante du modèle d’ordre réduit. Ainsi, la méthode
proposée par Kalb et Deane n’est pas totalement satisfaisante puisqu’elle nécessite encore la détermination
empirique d’une constante afin de corriger correctement le modèle d’ordre réduit.

1.3 300

1.2 Reynolds
250
Cazemier
1.1
Kalb
200
1
CL (−)

εa (%)
0.9 150

j
0.8
elsA 100
0.7 Reynolds
Cazemier 50
0.6 Kalb

0.5 0
0 50 100 150 200 250 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
t* j

(a) Comparaison des coefficients de portance (b) Comparaison des erreurs sur les amplitudes

Figure 5.17 : Comparaisons (a) du coefficient de portance et (b) des erreurs sur les amplitudes modales calculés tous les deux par le
modèle d’ordre réduit stabilisé par l’introduction de termes correctifs issus (i) d’un Reynolds basé sur une viscosité artificielle, (ii)
de la correction de Cazemier et al. [42], et (iii) de la correction de Kalb et Deane [124].

Les graphiques de la figure 5.17 confrontent la réponse du modèle d’ordre réduit corrigé par les trois
méthodes présentées dans ce qui précède. Dans tous les cas, la réponse a été obtenue avec une base POD
constituée de q = 10 modes POD. Sur le graphique 5.17(a), le coefficient de portance reconstruit au moyen
des réponses corrigées par les trois méthodes coïncide pratiquement avec la courbe de référence, même si
un déphasage très léger persiste. Le graphique 5.17(b) présente l’erreur de reconstruction εaj pour l’ampli-
tude associée à chaque mode POD obtenue avec les différentes corrections. Globalement, l’erreur relative
augmente avec l’indice du mode POD et atteint des valeurs toujours très importantes pour les derniers
modes ; l’erreur a néanmoins été fortement réduite puisqu’elle ne culmine « plus qu’à » 250% environ alors
qu’elle atteignait pratiquement le double sans correction (voir le dernier graphique de la figure 5.11). Les
trois corrections proposées ici conduisent toutes à une réponse pratiquement équivalente d’un point de vue
macroscopique. Toutefois, la correction proposée par Cazemier et al. semble être la plus efficace des trois
méthodes comparées ici puisqu’elle permet d’amortir correctement le système réduit, sans avoir à détermi-
ner de façon empirique une constante caractéristique de la correction. En outre, cette méthode se comporte
idéalement puisque la dissipation introduite diminue lorsque la taille du modèle d’ordre réduit augmente.
La méthode basée sur la modification du nombre de Reynolds peut certes fournir une réponse satisfaisante
comme celle obtenue ici avec Rec = 1 250, mais la détermination du nombre de Reynolds adéquat nécessite
une série (éventuellement) importante d’essais. Enfin la méthode de stabilisation de Kalb et Deane fournit
aussi une réponse très satisfaisante, mais elle nécessite de normaliser correctement l’erreur employée pour
la correction. Or aucune expression adéquate n’a été établie pour le facteur de normalisation qui est identi-
fié de manière empirique après une série d’essais.
Dans le paragraphe qui suit, des méthodes de calibrage des coefficients basées sur la résolution d’un
problème d’optimisation sont donc mises en œuvre afin de corriger le modèle d’ordre réduit de manière
plus efficace.

153
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

5.5.3 Calibrage des paramètres du modèle d’ordre réduit


Les techniques de correction précédentes requièrent pour la plupart la détermination d’un ou plusieurs
paramètres dont l’évaluation s’effectue empiriquement. Un moyen plus rigoureux de déterminer la correc-
tion à apporter consiste donc à résoudre un problème d’optimisation dans lequel une erreur de reconstruc-
tion ǫ caractéristique de la réponse du modèle d’ordre réduit est minimisée. Le problème d’optimisation
présenté au paragraphe 5.3.3.1 nécessite d’effectuer un certain nombre de choix concernant :
• l’algorithme d’optimisation mis en œuvre ;
• la formulation linéaire ou non-linéaire de l’erreur à minimiser ;
• la quantité dont on cherche à minimiser l’erreur ;
• les coefficients du modèle d’ordre réduit à calibrer ;
• l’intervalle dans lequel les coefficients à calibrer peuvent varier.
L’objectif n’étant pas ici de reprogrammer un algorithme d’optimisation, le choix est limité en fonction
de ceux proposés dans Scilab. Parmi les méthodes disponibles pour les systèmes non-linéaires, l’algorithme
de Levenberg-Marquardt [77, 143, 159] semble être un bon candidat puisqu’il permet de traiter des pro-
blèmes d’optimisation pour des fonctionnelles définies en particulier par les équations (5.35) à (5.38) pour
une erreur générique. Toutefois, la version de cet algorithme proposée dans Scilab est limitée d’une part
par l’impossibilité de tenir compte des contraintes éventuellement associées au problème d’optimisation,
et d’autre part par le fait que l’algorithme ne traite pas les problèmes sur-déterminés — dans lesquels le
nombre de paramètres pc à calibrer doit être inférieur ou égal à la dimension nǫ du vecteur d’erreur r. Lors-
qu’il est nécessaire de prendre en compte des contraintes ou de traiter un problème sur-déterminé, on aura
recours à la méthode Quasi-Newton modifiée détaillée par Bonnans [33].
En ce qui concerne le choix entre une formulation linéaire ou non-linéaire de l’erreur qui doit être mi-
nimisée, Couplet [50] proposait — pour simplifier la formulation du problème — de linéariser l’erreur afin
qu’elle ne dépende que des amplitudes modales de référence ou de leurs dérivées. La comparaison effec-
tuée par Favier et al. [73] entre ces deux types de formulations a montré que la formulation non-linéaire du
problème d’optimisation conduisait à de meilleurs résultats, ce que confirment les tentatives effectuées ici.
Par conséquent, la formulation non-linéaire sera de préférence adoptée pour l’ensemble des fonctionnelles
mises en œuvre dans ce qui suit. Les paramètres calibrés correspondent tout d’abord au nombre de Rey-
nolds qui agit sur les termes diffusifs puis d’une manière plus générale à certains coefficients du modèle
d’ordre réduit.

5.5.3.1 Calibrage du nombre de Reynolds


En ce qui concerne les trois derniers points de l’énumération précédente, des éléments de réponse sont
fournis dans la suite de ce paragraphe. Dans un premier temps, on s’interroge sur la meilleure définition
de la quantité ǫ à minimiser. Le problème d’optimisation est donc formulé pour cinq quantités différentes
en utilisant (i) la fonctionnelle (5.39a) pour calibrer les amplitudes a(tm ) (calibrage de Floquet), (ii) la fonc-
tionnelle (5.39b) pour calibrer les dérivées des amplitudes modales ȧ(tm ) (calibrage de Poincaré), (iii) la
fonctionnelle (5.40) avec χ = CL lorsqu’on optimise le coefficient de portance, ou (iv) avec χ = ET lors-
qu’on s’intéresse plutôt à l’énergie totale, et enfin (v) la fonctionnelle (5.42) pour calibrer l’énergie ET∗ captée
par chaque mode POD. Le problème d’optimisation correspondant à chacune des erreurs minimisées re-
pose sur une formulation non-linéaire de la fonctionnelle définie pour pc = 1 paramètre, celui-ci étant le
nombre de Reynolds optimal Rec commun à l’ensemble des modes POD. Afin d’introduire exclusivement
de la dissipation dans le modèle d’ordre réduit (ηa ≥ 0), il est nécessaire d’imposer que le nombre de Rey-
nolds corrigé Rec soit inférieur ou égal au nombre de Reynolds réel Re de l’écoulement. En outre, il est
indispensable que le nombre de Reynolds reste positif, de sorte que le problème d’optimisation (5.34) soit
en outre soumis à la contrainte que w = Rec ∈]0; Re]. Pour tenir compte de cette contrainte additionnelle,
il est nécessaire de travailler avec l’algorithme Quasi-Newton. Afin de juger de l’efficacité des différentes
formulations, le problème d’optimisation est résolu dans chaque cas pour différentes tailles de la base de
projection. La qualité de la reconstruction est alors évaluée au moyen des erreurs εCL et ε∆cc relatives au
coefficient de portance, ainsi que des erreurs εA et εȦ concernant les amplitudes modales et leurs dérivées.

154
5.5. Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0012

q ǫ Rec εCL ε∆cc εA εȦ


ae − ag 1 099, 16 2, 32 11, 67 20, 13 18, 83
ȧe − ȧg 1 082, 63 2, 35 12, 62 20, 17 18, 83
g e
4 CL − CL 1 191, 20 2, 25 6, 06 20, 64 19, 76
ETg − ETe 1 152, 38 2, 26 12, 33 20, 29 19, 19
ET∗,g − ET∗,e 1 157, 35 2, 26 12, 61 20, 32 19, 25
ae − ag 1 125, 01 2, 12 10, 22 18, 66 17, 20
ȧe − ȧg 1 117, 78 2, 13 9, 98 18, 68 17, 21
g e
6 CL − CL 1 219, 68 2, 03 7, 87 19, 10 17, 70
ETg − ETe 1 133, 40 2, 10 11, 05 18, 66 17, 20
ET∗,g − ET∗,e 1 134, 00 2, 10 11, 40 18, 66 17, 20
ae − ag 1 126, 26 2, 14 10, 99 18, 77 17, 36
ȧe − ȧg 1 120, 23 2, 15 10, 48 18, 78 17, 37
g e
10 CL − CL 1 224, 09 2, 05 5, 42 19, 24 17, 94
ETg − ETe 1 138, 06 2, 12 11, 03 18, 77 17, 36
ET∗,g − ET∗,e 1138, 95 2, 12 10, 90 18, 77 17, 36
ae − ag 1 127, 70 2, 13 10, 68 18, 77 17, 36
ȧe − ȧg 1 119, 31 2, 15 10, 46 18, 78 17, 37
g e
14 CL − CL 1 221, 73 2, 05 5, 49 19, 23 17, 93
ETg − ETe 1 137, 29 2, 12 10, 93 18, 76 17, 36
ET∗,g − ET∗,e 1 138, 17 2, 12 10, 81 18, 76 17, 36
ae − ag 1 125, 05 2, 14 10, 83 18, 77 17, 35
ȧe − ȧg 1 119, 23 2, 15 10, 43 18, 78 17, 36
g e
20 CL − CL 1 221, 67 2, 05 5, 48 19, 22 17, 91
ETg − ETe × × × × ×
ET∗,g − ET∗,e 1 138, 14 2, 12 10, 77 18, 76 17, 35

Tableau 5.1 : Erreurs produites par le modèle d’ordre réduit dont le nombre de Reynolds a été calibré au moyen de diverses
formulations de l’erreur ǫ et pour différentes tailles q de la base de projection.

Les erreurs regroupées dans le tableau 5.1 indiquent que le nombre de Reynolds corrigé varie légère-
ment en fonction des quantités dont on minimise l’erreur : le calibrage basé sur le coefficient de portance est
la méthode la moins dissipative, suivie des méthodes de calibrage de l’énergie totale puis de celles basées
sur les amplitudes modales et leurs dérivées. Dans la plupart des cas, la dissipation introduite a légèrement
tendance à décroître lorsque q augmente ce qui est cohérent avec l’hypothèse qu’une partie du manque de
dissipation du modèle d’ordre réduit est due à la troncature effectuée dans la base POD. En dehors de la
méthode de calibrage basée sur le coefficient de portance, les autres méthodes sont trop dissipatives sur le
long terme et la réponse du modèle d’ordre réduit a tendance à être amortie au lieu d’être entretenue. On
constate aussi sans surprise que l’erreur εCL est toujours minimale pour le calibrage du coefficient de por-
tance puisque dans ce cas le modèle d’ordre réduit est calibré pour minimiser l’erreur sur cette quantité. En
contrepartie, l’erreur εA sur les amplitudes modales est la plus importante avec cette méthode. Par consé-
quent, le calibrage devient inadapté dès lors qu’une autre quantité que le coefficient de portance devra être
reconstruite avec les amplitudes issues de l’intégration du modèle d’ordre réduit.
Pour la suite de l’étude, on retiendra seulement la formulation de Floquet basée sur la minimisation de
l’erreur sur les amplitudes, ainsi que la formulation reposant sur la minimisation du contenu énergétique
de chaque mode POD via l’énergie ET∗ . En effet, la formulation de Floquet vise à minimiser l’erreur sur les
amplitudes modales, ce qui lui procure la capacité de reproduire correctement n’importe quelle quantité
aérodynamique au moyen de la décomposition POD, dès lors que les amplitudes sont bien évaluées. Par
ailleurs, la formulation basée sur la minimisation de l’erreur sur l’énergie présente l’avantage de faire appel
à un critère physique qui permet de s’assurer de la conservation de l’énergie du système initial par le mo-
dèle d’ordre réduit. Les valeurs des erreurs fournies dans le tableau 5.1 indiquent que le calibrage portant
sur l’énergie totale (réelle) ET de l’écoulement fournit pratiquement les mêmes résultats que lorsque le cali-
brage est effectué au moyen de l’erreur ET∗ , ce qui justifie le fait que la formulation basée sur ET∗ repose bien
sur un critère énergétique. Cette dernière formulation est bien plus avantageuse que celle portant directe-
ment sur l’énergie totale réelle puisqu’elle ne nécessite pas de reconstruire à chaque fois le champ global
afin d’évaluer l’énergie dans le domaine.
Le calibrage du nombre de Reynolds seul ne semble pas suffire puisque dans la plupart des cas le taux de
dissipation artificiel déterminé par le processus d’optimisation est légèrement trop élevé. On cherche donc

155
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

à améliorer le processus de calibrage en attribuant à chaque mode POD ϕ(i) un certain taux de dissipation
ηa,i via un nombre de Reynolds Reci comme dans la méthode de Cazemier et al. [42]. On impose par ailleurs
la contrainte supplémentaire que le nombre de Reynolds associé à chaque mode ne peut varier que dans
l’intervalle ]0; Re] et on se limitera pour la suite à q = 10 modes POD au maximum puisque l’introduction
de modes supplémentaires dans le modèle d’ordre réduit n’améliore pas de manière significative l’erreur
de reconstruction.
Le problème d’optimisation résolu ici devient beaucoup plus compliqué puisque le nombre de para-
mètres à optimiser passe de 1 à q. Par conséquent, les fonctionnelles à minimiser sont susceptibles de conte-
nir des minima locaux vers lesquels l’algorithme d’optimisation risque de converger. Plusieurs résolutions
du problème d’optimisation doivent donc être menées afin de vérifier que l’optimum global est bien atteint.
À cet effet, le problème d’optimisation sera initialisé avec un jeu de paramètres w0 correspondant soit à la
borne inférieure6 winf → 0 de l’intervalle ]0; Re] considéré, soit à la borne supérieure wsup = Re, soit à la va-
leur moyenne wmid = Re/2, ou encore en utilisant une régression linéaire en fonction de l’indice i du mode
en partant de la valeur moyenne Re/2 pour le premier mode : wi,reg = Re/2 + (Re/2 − Re)/(q − 1) × (i − 1).
Dans le dernier cas, l’initialisation consiste à imposer au départ un taux de dissipation de ηa,1 = 100% pour
le premier mode et de ηa,q = 0% pour le dernier mode.
250 200 200
Floquet qRe Floquet qRe Floquet qRe
Floquet 1Re 180 Floquet 1Re 180 Floquet 1Re
E*T qRe E*T qRe E*T qRe
200 160 160
E*T 1Re E*T 1Re E*T 1Re
140 140

150 120 120


εa (%)

εa (%)

εa (%)
100 100
j

j
100 80 80

60 60

50 40 40

20 20

0 0 0
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
j j j

(a) Initialisation avec wsup (b) Initialisation avec wmid (c) Initialisation avec wreg

Figure 5.18 : Comparaison des erreurs sur les amplitudes modales commises avec la méthode de calibrage de Floquet et celle basée
sur l’énergie en optimisant le taux de dissipation pour chaque mode POD.

Les graphiques de la figure 5.18 détaillent ainsi pour q = 10 et les différents types d’initialisation du pro-
blème d’optimisation, les erreurs sur les amplitudes modales obtenues avec la formulation de Floquet et la
formulation énergétique. En outre, les erreurs obtenues dans le tableau 5.1 avec le calibrage d’un nombre
de Reynolds commun à tous les modes sont rappelées à titre de comparaison7 . L’amélioration constatée
concerne surtout les premières amplitudes modales qui contribuent majoritairement à la reconstruction
des grandeurs physiques au moyen de la décomposition orthogonale propre. L’initialisation effectuée au
moyen de wmid ou wreg conduit à des résultats pratiquement identiques. En revanche, si l’algorithme est
initialisé avec wsup , les erreurs deviennent beaucoup plus importantes et dépassent même largement celles
obtenues avec le calibrage 1Re. Enfin, l’initialisation winf avec la borne inférieure est peu adéquate car elle
revient à introduire une dissipation quasiment infinie sur chacun des modes. L’algorithme ne parvient alors
pas à converger vers un minimum autre que local et une majorité des nombres de Reynolds corrigés restent
bloqués à la borne inférieure.
Les corrections apportées au modèle d’ordre réduit par le biais des calibrages 1Re et qRe ont permis
d’améliorer encore la réponse du modèle d’ordre réduit par rapport aux corrections du paragraphe précé-
dent. En particulier l’erreur sur les amplitudes modales qui était de εA = 19, 53% en utilisant une correc-
tion « à la main » avec Rec = 1 250, puis de εA = 18, 39% avec la correction de Kalb et Deane et enfin de
εA = 14, 50% avec la correction de Cazemier et al., a ainsi pu être réduite encore de quelques pour cents
— près de 6% par rapport au premier cas, et environ 1% par rapport au dernier. Les corrections apportées
jusqu’ici n’ont toutefois porté que sur les termes dissipatifs et la réponse peut encore être améliorée en
agissant directement sur les coefficients du modèle d’ordre réduit.
6 En pratique on prendra pour la borne inférieure un nombre de Reynolds égal à 1 puisque la valeur Rec = 0 conduirait à un taux

de dissipation ajouté infini d’après la définition (5.27).


7 On note 1Re le calibrage d’un seul nombre de Reynolds Rec pour tous les modes POD par opposition au calibrage qRe dans

lequel un nombre de Reynolds Reci est déterminé pour chaque mode POD ϕ(i) .

156
5.5. Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0012

5.5.3.2 Calibrage des coefficients du modèle d’ordre réduit


Les paramètres du problème d’optimisation correspondent à présent à un certain nombre de coefficients
du modèle d’ordre réduit. Le nombre de paramètres à corriger peut ainsi être augmenté en gardant à l’esprit
que l’algorithme Quasi-Newton devra nécessairement être adopté si le problème devient sur-déterminé.
Dans le cas contraire, on lui préférera l’algorithme de Levenberg-Marquardt puisque rien ne dicte ici les
limites dans lesquelles les coefficients à calibrer doivent rester.
On envisage donc tout d’abord d’optimiser les termes constants K et ceux de la diagonale du
terme linéaire L, ce qui représente un compromis entre les méthodes de correction de Cazemier et al. et
Kalb et Deane puisque dans le premier cas seule la diagonale du terme linéaire était modifiée alors que
dans le second cas, les termes constants et l’ensemble des termes linéaires étaient corrigés. On notera KdL
ce calibrage qui fait intervenir pc = 2q paramètres. Ensuite, on cherchera à calibrer comme dans la méthode
de Kalb et Deane les q termes constants et l’ensemble des q 2 termes linéaires si bien que ce calibrage sera
désigné par KL.
La méthode de calibrage basée sur la conservation de l’énergie fournit des résultats de très mauvaise
qualité par rapport à ceux résultant de la formulation de Floquet. Une explication probable est que le pro-

blème devient sur-déterminé puisque le vecteur d’erreur r que la fonctionnelle J ET doit minimiser est
seulement de taille nǫ = q alors que le nombre de paramètres à calibrer passe à pc = 2q ou pc = q + q 2 . Par
conséquent, on se concentrera pour les exemples qui suivent sur la formulation de Floquet, dans laquelle
la dimension du vecteur d’erreur r est nǫ = q M , ce qui permet de conserver un problème sous-déterminé
tant que le nombre de clichés M reste assez grand (M ≥ 2 pour KdL et M ≥ 1 + q pour KL).
4 3 1000%

500%
3.5
2.5
250%
3 1000%
log( 100 | Lcii / Lii | ) (−)

log( 100 | Lcii / Lii | ) (−)

500% 2 100%
2.5
250%
50%
2 100% 1.5
25%
50%
1.5
25% 1 10%

1 10%

0.5
0.5

0 0
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
i i

(a) Correction constante (b) Correction linéaire

Figure 5.19 : Contribution relative des termes constants et linéaires diagonaux calibrés avec la formulation de Floquet KdL. On
représente le rapport entre les valeurs de la correction et celles des coefficients initiaux.

Le calibrage KdL conduit pour q = 10 avec la formulation de Floquet aux erreurs suivantes : εCL =
1, 67%, ε∆cc = 11, 47%, εA = 9, 86% et εȦ = 9, 63%. Cette formulation permet donc d’améliorer encore sen-
siblement l’erreur sur les amplitudes modales, certainement en raison du fait que la contribution convective
des coefficients est aussi modifiée. Cependant, aucune contrainte n’a été imposée ici sur les paramètres, si
bien que l’algorithme de Levenberg-Marquardt employé pour la résolution est libre de faire varier les pa-
ramètres dans Rpc . Les graphiques de la figure 5.19 représentent ainsi le rapport relatif entre les coefficients
du modèle d’ordre réduit corrigé et ceux du modèle d’ordre réduit non corrigé. Les graphiques mettent
alors en évidence que l’amélioration de la solution passe par une modification relativement importante des
coefficients du modèle d’ordre réduit.
On peut espérer réduire encore l’erreur avec le calibrage KL puisque le nombre de paramètres corrigés
s’élève cette fois à pc = q + q 2 . Avec q = 10 modes POD, le modèle d’ordre réduit calibré au moyen de
la formulation de Floquet conduit aux erreurs suivantes : εCL = 1, 52%, ε∆cc = 4, 80%, εA = 0, 03% et
εȦ = 0, 16%. Les amplitudes modales ainsi que leurs dérivées obtenues avec le modèle d’ordre réduit sont
donc excellentes et les grandeurs reconstruites au moyen de la décomposition POD sont très satisfaisantes.
Toutefois, la question de la validité du modèle d’ordre réduit corrigé de cette manière se pose. En effet, les

157
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

coefficients sont modifiés de manière très importante, comme l’indiquent les graphiques de la figure 5.20.
Un certain nombre de coefficients constants voient leur contribution nettement réduite et les coefficients
linéaires — en particulier hors de la diagonale — subissent de fortes variations. Par conséquent le modèle
d’ordre réduit corrigé s’éloigne de plus en plus du modèle d’ordre réduit initialement obtenu par projection
de Galerkin. À cela s’ajoute le problème que la fonctionnelle dépend à présent de q + q 2 paramètres et l’exis-
tence de minima locaux vers lesquels l’algorithme risque de se précipiter est très probable. Le problème est
en outre accentué par le fait qu’aucune contrainte n’a été imposée : si les coefficients sont par exemple
contraints à rester dans un intervalle de ±25% autour de la valeur initiale du coefficient, l’amélioration
obtenue est peu satisfaisante et la réponse du modèle d’ordre réduit n’est pas assez dissipative.

3.5
4

4 3
3.5

log( 100 | Lcij / Lij | ) (−)


3 2.5
3 1000%
log( 100 | Kci / Ki | ) (−)

500%
2.5 2
250% 2

2 100% 1
1.5
50%
1.5 0
25%
1
10
1 10% 9
8
7
6 1 0.5
0.5 5 2
4 3
4
3 5
2 6
7
0 1 8
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 9
10
i j i

(a) Correction constante (b) Correction linéaire

Figure 5.20 : Contribution relative des termes constants et linéaires calibrés avec la formulation de Floquet KL par rapport aux
coefficients initiaux.

Les méthodes de calibrage mises en œuvre par Bourguet et al. [34], Couplet [50], Favier et al. [73] doivent
donc être manipulées avec précaution puisque les modifications apportées aux coefficients deviennent très
importantes. La capacité des algorithmes d’optimisation à déterminer un optimum correct est rapidement
dépassée quand le nombre de paramètres augmente, et ce d’autant plus lorsque aucune borne n’est imposée
pour contraindre le problème.
En conclusion de ce paragraphe, il s’avère que l’utilisation de la formulation non-linéaire de Floquet ou
celle basée sur l’énergie ET∗ fournit de bons résultats pour calibrer un nombre de Reynolds associé à chaque
mode POD. Le problème d’optimisation est dans ce cas résolu avec l’algorithme Quasi-Newton avec la
contrainte supplémentaire de n’introduire que de la dissipation.

5.5.4 Comparaison des réponses corrigées


Le choix d’une méthode de correction du modèle d’ordre réduit doit se faire en gardant à l’esprit que
les équations sur lesquelles la méthode de projection est basée ne correspondent pas strictement à celles
résolues pour générer les clichés. Dans le cas présent, l’hypothèse d’une viscosité du fluide constante peut
expliquer les différences qui apparaissent dans la réponse du modèle d’ordre réduit non corrigé. Ainsi,
la correction du nombre de Reynolds est un moyen cohérent de remédier aux défauts du modèle d’ordre
réduit qui peuvent être attribués à l’hypothèse d’une viscosité constante. Par extension, l’optimisation d’un
nombre de Reynolds pour chaque mode POD puis la correction des coefficients linéaires diagonaux s’inscrit
dans la lignée d’une correction des termes dissipatifs. La méthode de Cazemier et al. [42] et celle basée
sur le calibrage des nombres de Reynolds avec une formulation de Floquet ont donc permis d’améliorer
nettement la solution tout en maîtrisant l’importance de la correction introduite. Les méthodes de calibrage
des coefficients du modèle d’ordre réduit impliquant un nombre plus important de paramètres sont par

158
5.5. Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0012

ailleurs capables de produire des réponses dont la qualité est encore meilleure, mais il est plus difficile de
maîtriser les corrections apportées, tant au niveau de leur intensité que de leur interprétation.
Pour conclure ce paragraphe, la réponse du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin corrigé au moyen de
la méthode de Cazemier et al. et de celle de Floquet pour les paramètres qRe est comparée à la réponse
du modèle d’ordre réduit non corrigé. Le graphique 5.21(a) indique que les deux méthodes produisent des
amplitudes modales assez similaires et permettent de réduire considérablement les erreurs commises. Ceci
se traduit immédiatement par une amélioration du coefficient de portance dont l’évolution à long terme
est tracée sur le graphique de la figure 5.21(b). Après correction, le système réduit est donc en mesure de
reproduire correctement l’amortissement du modèle initial.
Les corrections apportées se justifient par l’existence d’erreurs dont les origines ont été évoquées au
paragraphe 5.3.1 p.130. La principale source d’erreur est certainement liée à la modélisation de la viscosité
qui a été supposée constante alors que la réponse de référence issue du modèle non réduit tient compte de la
loi de Sutherland et introduit une dissipation artificielle pour dissiper correctement la réponse. La correction
apportée ici peut donc raisonnablement être interprétée comme un opérateur de dissipation artificielle.
500
Sans correction
1.5
Cazemier elsA
450
Floquet
1.4
Sans correction
400 1.3 Cazemier
Floquet
350 1.2

300 1.1
CL (−)
εa (%)

250 1
j

0.9
200

0.8
150
0.7
100
0.6
50
0.5
0 0 50 100 150 200 250
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
j t*

(a) Erreur sur les amplitudes (b) Coefficient de portance

Figure 5.21 : Comparaison de réponses du modèle d’ordre réduit corrigé au moyen de la méthode de Cazemier et al. et du calibrage
qRe du nombre de Reynolds pour chaque mode POD.

159
5. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉRODYNAMIQUE

5.6 Synthèse du chapitre 5


Dans ce chapitre, les différents éléments nécessaires à la construction du modèle d’ordre réduit d’un
écoulement compressible instationnaire évoluant dans un domaine de frontières fixes ont été présentés. La
formulation POD-Galerkin s’est révélée adéquate pour développer un modèle d’ordre réduit non-linéaire
basé sur les équations de Navier-Stokes formulées au moyen des variables primitives modifiées. Une dé-
composition orthogonale propre multivariables a été pratiquée afin de tenir compte des corrélations entre
les variables et a conduit à un modèle d’ordre réduit de dimension extrêmement faible. Le modèle d’ordre
réduit résultant de la projection sur la base des modes POD est simplement composé d’un ensemble de q
équations différentielles ordinaires quadratiques dont l’intégration en temps s’effectue très rapidement.
Le modèle d’ordre réduit ainsi développé a été mis à l’épreuve pour reproduire l’écoulement instation-
naire autour d’un profil NACA0012 fortement incliné. L’objectif a alors consisté à reproduire le phénomène
de détachement tourbillonnaire dans le sillage du profil qui se caractérise notamment par une oscillation
périodique du coefficient de portance. Le calcul des modes POD a permis de retrouver une organisation des
modes par paires qui est caractéristique du phénomène d’émission de vortex dans le sillage d’obstacles.
La réponse du modèle d’ordre réduit dont les coefficients ont été calculés au moyen des expressions
analytiques établies au début de ce chapitre a révélé un manque significatif de dissipation. Plusieurs mé-
thodes de correction ont alors été mises en œuvre avec plus ou moins de succès. En particulier, la méthode
de correction de Cazemier et al. dans laquelle un terme d’amortissement calculé pour conserver l’énergie
de chaque mode fournit une stabilisation efficace. Des techniques de correction a posteriori reposant sur
la résolution d’un problème d’optimisation ont par ailleurs été employées avec succès. Parmi les variantes
évaluées, la formulation de Floquet utilisant l’erreur sur les amplitudes modales ainsi que la formulation
énergétique dans laquelle l’énergie captée par chaque mode est calibrée permettent de corriger efficacement
le modèle d’ordre réduit. Afin de maîtriser la correction introduite, la méthode adoptée a consisté à optimi-
ser un nombre de Reynolds pour dissiper correctement chaque mode POD, en imposant que la correction
soit purement dissipative.
Les réponses obtenues avec le modèle d’ordre réduit corrigé sont donc satisfaisantes puisqu’elles per-
mettent de reproduire avec une bonne précision l’amplitude des forces aérodynamiques. Cette première
étape dans le développement d’un modèle d’ordre réduit aérodynamique est capitale et ouvre donc la voie
au couplage avec le mouvement d’une structure dans le cadre d’un système aéroélastique.

160
Chapitre 6
Construction et mise en œuvre d’un modèle
d’ordre réduit POD-Galerkin non-linéaire et
non-autonome pour l’aéroélasticité

Sommaire
6.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162
6.2 Simplification des équations de Navier-Stokes pour un mouvement de corps rigide . . . . 163
6.2.1 Applicabilité de la POD en aéroélasticité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163
6.2.1.1 Obstacles à la définition de la POD sur un domaine mobile . . . . . . . . . . 163
6.2.1.2 État de l’art des modèles d’ordre réduit basés sur la POD en aéroélasticité . . 164
6.2.2 Simplification des équations de Navier-Stokes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 167
6.3 Construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin pour un mouvement de corps rigide 169
6.3.1 Développement d’un modèle d’ordre réduit basé sur la formulation en vitesse absolue 169
6.3.2 Développement d’un modèle d’ordre réduit basé sur la formulation en vitesse relative 175
6.3.3 Construction de modèles d’ordre réduit par identification des coefficients . . . . . . . 178
6.3.4 Résumé et comparaison qualitative des différents modèles d’ordre réduit . . . . . . . 180
6.4 Calcul des modes POD de l’écoulement autour d’un profil NACA0064 oscillant . . . . . . . 182
6.4.1 Simulation numérique de l’écoulement transsonique autour du profil NACA0064 . . 182
6.4.2 Simplification des coefficients du modèle d’ordre réduit pour les équations d’Euler . . 186
6.4.3 Calcul de la base des modes POD de l’écoulement autour du profil NACA0064 . . . . 187
6.5 Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0064 . . . . . . 191
6.5.1 Réponse du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin corrigé . . . . . . . . . . . . . . . . 191
6.5.1.1 Correction de Cazemier et al. du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin . . . . 191
6.5.1.2 Calibrage des coefficients du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin . . . . . . 193
6.5.2 Réponse du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin identifié . . . . . . . . . . . . . . . . 198
6.6 Synthèse du chapitre 6 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 204

161
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

6.1 Introduction
Le travail effectué jusqu’à présent a permis de construire et de valider le modèle d’ordre réduit d’un
écoulement dans un domaine de frontières fixes au moyen de la formulation FEUL-RAUA basée sur une
description eulérienne des équations de Navier-Stokes dans le repère absolu. On s’intéresse à présent à la
prise en compte d’un mouvement de corps rigide de la structure afin de progresser vers la construction d’un
modèle d’ordre réduit d’aérodynamique instationnaire pour l’aéroélasticité. On justifie dans un premier
temps le choix d’un mouvement de corps rigide avant de décrire deux formulations du modèle d’ordre
réduit obtenues à partir des équations de Navier-Stokes écrites dans le repère entraîné avec les composantes
de la vitesse absolue ou relative.
La réponse du modèle d’ordre réduit sera alors évaluée sur l’exemple d’un profil NACA0064 animé
d’un mouvement d’oscillation harmonique placé dans un écoulement transsonique. Le fluide modélisé par
les équations d’Euler exhibe alors un phénomène d’oscillation des chocs qui apparaissent sur la paroi du
profil. Plusieurs techniques de construction et de correction du modèle d’ordre réduit seront alors mises en
œuvre pour parvenir à reproduire correctement le phénomène.

162
6.2. Simplification des équations de Navier-Stokes pour un mouvement de corps rigide

6.2 Simplification des équations de Navier-Stokes pour un mouvement


de corps rigide
Jusqu’à présent, les modes POD ont été calculés à partir d’un ensemble de clichés définis sur un do-
maine de l’espace Ω invariant au cours du temps. Dans le cadre d’un problème aéroélastique cependant, la
structure placée dans l’écoulement est en général supposée déformable et peut en outre être animée d’un
mouvement de corps rigide. Par conséquent le domaine se déplace et/ou se déforme au cours du temps.
Cela nécessite dans un premier temps de reformuler les équations du fluide dans le domaine arbitraire
associé à la description ALE si le domaine se déforme et éventuellement dans le repère entraîné au mouve-
ment de corps rigide si il en existe un. Ce travail a été effectué dans le chapitre 4 et fournit une description
de l’écoulement dans de telles conditions. Les équations du fluide ont en particulier été écrites avec les
variables primitives modifiées afin de conserver une forme quadratique des équations différentielles ordi-
naires qui soit propice à la projection de Galerkin.
La seconde partie du travail consiste à trouver une formulation du modèle d’ordre réduit qui s’adapte
au mouvement et si possible à la déformation de la structure. Cependant, la signification des modes POD
est remise en cause lorsque le domaine spatial est variable au cours du temps. L’objectif de cette section
est d’éclaircir dans un premier temps la problématique de l’applicabilité de la décomposition orthogonale
propre en aéroélasticité. Les différentes solutions adoptées par le passé seront alors recensées et la solution
adoptée dans le cadre de cette thèse sera exposée pour terminer.

6.2.1 Applicabilité de la POD en aéroélasticité


6.2.1.1 Obstacles à la définition de la POD sur un domaine mobile
À l’origine employée comme un outil d’analyse de données, la décomposition orthogonale propre four-
nit une base optimale pour représenter l’ensemble des clichés, indépendamment de toute notion de varia-
tion du domaine de définition des données. En mécanique, les clichés q (m) solutions pour m = 1, . . . , M du
système dynamique aux instants tm doivent donc pouvoir être décomposés en une somme finie de modes
(m)
POD spatiaux ϕ(j) (x) pondérés par des amplitudes modales aj P . Par extension on suppose que la solution
q
à tout instant t doit pouvoir se décomposer en q(x, t) = q(x) + j=1 aj (t)ϕ(j) (x) pour x ∈ Ω. Le principe
repose donc sur une séparation espace-temps des solutions du système à l’aide des modes POD qui sont
des structures spatiales indépendantes du temps capturant de façon optimale les caractéristiques du système.
Or, lorsque le domaine spatial varie au cours du temps, cette séparation des variables est remise
en cause. En effet, à chaque instant tm , les clichés sont définis sur un domaine Ω(tm ) différent pour
lequel la position des nœuds du maillage est modifiée, comme le montre le schéma de la figure 6.1.
Par conséquent il est difficile de déterminer le domaine spatial de définition des modes POD, et la dé-
composition des modes POD sur les clichés introduite à l’équation (2.82) n’a plus aucun sens. En effet,
lorsque la Pdépendance des variables en fonction du temps et de l’espace est précisée la relation s’écrit :
M (j)
ϕ(j) (x) = m=1 cm (q(x, tm ) − q(x)). Ainsi se pose la question de savoir sur quel domaine les modes POD
ϕ(j) doivent être définis puisque chaque cliché q(x, tm ) est défini sur un domaine Ω(tm ) différent. Leur
domaine de définition devrait couvrir au moins la réunion des Ω(tm ) de sorte que chaque cliché puisse être
ensuite reconstruit sur son domaine de définition par la décomposition POD. Toutefois, dans l’optique de
la construction d’un modèle d’ordre réduit, la réponse n’est pas connue a priori et par conséquent il faut
supposer que les solutions restent comprises dans un certain domaine spatial sur lequel les modes doivent
être définis.
(j)
Quand bien même cela serait possible, il reste à calculer les coefficients cm qui pondèrent les clichés dans
l’expression des modes POD (2.82). Or ces coefficients sont solutions du problème aux valeurs propres de

la méthode des clichés dont le terme général Rij ⋆
= αi αj hq (i) − q, q (j) − qiH requiert le calcul du produit
scalaire entre des clichés centrés à deux instants différents. Jusqu’à présent, les clichés étaient supposés être
contenus dans l’espace H = (L2 (Ω))nv des fonctions de carré intégrable définies sur un domaine spatial Ω
auquel on avait adjoint le produit scalaire
D E Xnv Z
q (i) , q (j) = qk (x ∈ Ω(ti ), ti ) qk (x ∈ Ω(tj ), tj ) dΩ. (6.1)
k=1 Ω

163
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

M(tj )

M(ti ) M(ti )

Ω(ti ) Ω(tj )

Figure 6.1 : Schématisation du mouvement du domaine fluide au cours du temps. Le domaine de définition Ω(t) du fluide (en bleu)
change entre les instants ti et tj et le même nœud M change de position.

Cependant, les fonctions sont cette fois définies sur des domaines Ω(ti ) et Ω(tj ) différents si bien que
le domaine d’intégration Ω n’est pas clairement défini. L’ensemble des incohérences relevées découle de la
mauvaise définition de l’espace de travail. En effet, pour formuler correctement la décomposition ortho-
gonale propre dans le cas d’un domaine variable, il serait nécessaire de travailler sur l’espace de Hilbert
H = (L2 (Ω(t)))nv et de définir le produit scalaire associé en tenant compte du fait que le domaine de dé-
finition change au cours du temps. Il s’agit donc bien d’un problème intrinsèque à la formulation POD
employée jusqu’à présent, et non pas seulement de l’utilisation de la méthode des clichés au lieu de la mé-
thode directe1 . La solution consiste donc à se ramener autant que possible à un domaine de référence fixe
sur lequel les clichés et les modes POD sont définis. De cette façon, la même formulation POD que celle
utilisée jusqu’à présent peut être conservée. Cependant, la difficulté apparaît lorsqu’il s’agit de formuler les
équations gouvernant le système dynamique sur ce domaine de référence.

6.2.1.2 État de l’art des modèles d’ordre réduit basés sur la POD en aéroélasticité
Malgré la difficulté de formuler le problème de la décomposition orthogonale propre sur un domaine
mobile, quelques travaux ont été menés pour des systèmes couplés fluide-structure. Tout d’abord, la décom-
position orthogonale propre a été employée comme outil d’analyse, sans chercher à construire de modèle
d’ordre réduit du système dynamique. Ainsi, Zhang et al. [252] ont étudié le comportement aérodynamique
d’ailes volantes grâce à l’analyse de modes POD calculés à partir de clichés prélevés sur un domaine mo-
bile. Pour cela, les clichés sont interpolés à chaque instant sur un domaine fixe Ω0 au moyen d’une méthode
d’interpolation basée sur l’inverse de la distance à un point. Un cliché q(xi , tm ) défini au centre de la cellule
de contrôle Ωi sur le maillage mobile à un instant tm est donc interpolé en un point xi,0 sur le maillage fixe
de référence au moyen de la relation

K
, K
X q(xi,k , tm ) X 1
e i,0 , tm ) =
q(x , (6.2)
rk rk
k=1 k=1

où q(xi,k , tm ) représente la valeur du champ aérodynamique à l’instant tm au k-ième coin de la cellule Ωi ,


et rk est la distance entre ce même point et le point d’interpolation xi,0 .
D’une façon plus générale, Utturkar et al. [234] se sont intéressés à l’application de la POD en mécanique
des fluides sur un domaine avec une frontière mobile au cours du temps, que ce soit pour des problèmes
d’interaction fluide-structure comme ici, ou encore pour des problèmes de cavitation ou de changement de
phase. Aucune modification à la formulation POD n’a été introduite pour l’exemple de la cavitation, ni pour
le problème de changement de phase puisque dans ce cas le fluide est modélisé au moyen d’une fraction de
phase liquide. L’exemple en interaction fluide-structure est celui traité dans [252] où les clichés sont interpo-
lés sur un maillage de référence. Dans ces deux études, aucun modèle d’ordre réduit n’a été construit et les
modes POD ont simplement été calculés en vue d’analyser les caractéristiques des systèmes dynamiques.
1 Avec la méthode directe, il faut résoudre une équation intégrale de Fredholm qui est aussi mal définie puisqu’elle fait intervenir

le tenseur de corrélation spatiale entre deux points Mi et Mj dont les positions changent au cours du temps.

164
6.2. Simplification des équations de Navier-Stokes pour un mouvement de corps rigide

Afin de reproduire les phénomèmes physiques impliqués dans les différents exemples, il semble que la base
POD doit être composée d’un nombre plus important de modes, en particulier pour les problèmes d’inter-
action fluide-structure. En outre le nombre de modes dépend de l’intervalle de temps simulé [234].
Très peu de travaux ont conduit à la construction de modèles d’ordre réduit pour l’interaction fluide-
structure en raison de la difficulté provoquée par le mouvement du domaine. Pour remédier à ce problème,
les premiers travaux étaient basés sur les équations linéarisées du fluide [189]. Dans ce cas, puisque les
équations sont formulées pour de petites perturbations autour d’un état d’équilibre, on peut admettre que
les effets du mouvement du domaine sont négligeables pour le calcul des modes POD, de sorte que la for-
mulation POD établie dans le cas d’un domaine fixe reste encore valable. Ainsi, Hall et al. [104] ont construit
un modèle d’ordre réduit POD des équations d’Euler linéarisées qui a ensuite été couplé à un modèle à deux
degrés de liberté de la structure pour détecter les limites de stabilité d’un profil isolé en écoulement trans-
sonique et d’une cascade de profils bidimensionnelle. Les équations d’Euler employées reposent sur une
formulation eulérienne gouvernant l’évolution des fluctuations du champ aérodynamique sur une grille
de calcul invariante au cours du temps. Une autre approche consiste à linéariser les équations d’Euler ou
de Navier-Stokes écrites en formulation ALE, auquel cas le terme lié au mouvement de maillage doit aussi
être linéarisé. C’est la solution adoptée notamment par Mortchéléwicz [170] et Lieu et al. [148]. Dans tous
les cas, le modèle d’ordre réduit du domaine fluide peut être aisément couplé aux équations de la structure
afin de construire un modèle d’ordre réduit du système couplé aéroélastique qui sert ensuite à obtenir la
réponse à différents paramètres tels que l’amplitude ou la fréquence d’une pertubation imposée.
Anttonen et al. [12, 13] se sont intéressés de leur côté au calcul de modes POD et à la construction d’un
modèle d’ordre réduit POD pour des mouvements de grande amplitude d’une frontière du domaine fluide.
Dans un premier temps, l’évaluation de l’erreur de reconstruction des clichés à partir d’une base POD cal-
culée avec les équations formulées sur un domaine fixe en repère entraîné et dans un domaine mobile en
repère fixe démontre qu’il est nécessaire de conserver plus de modes POD dans la base de projection avec la
formulation en repère fixe et domaine mobile. Dans les deux cas, les modes POD sont calculés avec le pro-
duit scalaire de RNv , où Nv est le nombre de degrés de liberté du système — et ceci malgré le fait que dans
le second cas les positions des nœuds changent à chaque instant. L’argument avancé est que la connectivité
des nœuds n’est jamais modifiée et par conséquent les modes POD sont calculés dans un espace indiciel. Les
structures mises en évidence par les modes POD sont alors associées à la connectivité du maillage et non
pas aux positions spatiales. Toutefois, cette base POD calculée est inappropriée lorsqu’il s’agit de construire
un modèle d’ordre réduit et de reproduire la réponse du système à différents paramètres comme l’ampli-
tude du mouvement par exemple. En effet, en procédant de la sorte les informations sur la déformation de
maillage sont totalement absentes et les modes POD ne sont pas localisés. La première solution développée
— appelée Blended POD dans [12] — qui consiste à construire une base POD à partir de clichés calculés
pour différentes fréquences et amplitudes de mouvement n’est donc pas satisfaisante puisque les informa-
tions sur la déformation du maillage sont absentes : le modèle d’ordre réduit obtenu est instable à toutes
les fréquences et amplitudes. Par conséquent une seconde méthode — appelée Multi-POD dans [12] — est
développée à partir de plusieurs modèles d’ordre réduit construits pour différentes amplitudes ; la sélection
du modèle d’ordre réduit adéquat se fait en fonction d’un critère de déformation du maillage qui permet
d’identifier le modèle d’ordre réduit qui a été construit pour l’amplitude de déformation la plus proche
de la déformation actuellement calculée par le modèle d’ordre réduit. Pour déterminer le meilleur modèle
d’ordre réduit, une base POD du mouvement de maillage est établie pour chaque modèle d’ordre réduit.
L’erreur de projection du champ de déformation actuel sur cette base est alors calculée pour les différentes
bases POD de maillage et l’erreur de projection minimale indique le modèle d’ordre réduit le plus appro-
prié. La méthode nécessite donc de construire un certain nombre de modèles d’ordre réduit puis de passer
de l’un à l’autre en fonction de la déformation de maillage calculée. Un exemple d’application à un profil
en mouvement de tangage et de plongeon est traité dans [13] mais les résultats sont peu probants.
Finalement, une formulation élégante du problème couplé fluide-structure pour un écoulement incom-
pressible a été proposée par Liberge et Hamdouni [145, 146]. Le principe consiste à poser le problème de
façon monolithique, i. e. à employer les mêmes équations pour le fluide et la structure. La formulation gé-
néralisée des équations de Navier-Stokes développée par Glowinski et al. [88] a donc été reprise par Liberge
pour formuler le problème sur le domaine Ω = Ωf ∪ Ωs , de sorte le domaine solide puisse être considéré
comme un domaine fluide « fictif ». Le problème couplé s’écrit donc au moyen d’une formulation faible
globale sur tout le domaine spatial Ω qui apparaît comme invariant au cours du temps. L’objectif est alors

165
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

de trouver le champ de vitesse u, le multiplicateur de Lagrange λ et la fonction caractéristique IΩs tels que
pour tout mode POD ϕ(j)
 Z   Z    Z
 ∂u (j) (j)

 ρ + u · ∇u · ϕ dΩ + 2µ Tr D(u) D ϕ dΩ − σ nf · ϕ(j) dΩ

 ∂t


Ω Ω Γ
Z   
(6.3)

 + IΩs Tr D(λ) D ϕ(j) dΩ = 0,

 Ω


 ∂IΩs + u · ∇I = 0.
Ωs
∂t
L’opérateur D(u) = 1/2 (∇u + ∇Tu) est le tenseur des taux de déformations, ρ et µ sont respectivement
la masse volumique et la viscosité cinématique du milieu. Ces deux quantités sont définies à partir de la
fonction caractéristique du solide IΩs par les expressions

ρ = IΩs ρs + (1 − IΩs ) ρf ,
(6.4)
µ = IΩs µs + (1 − IΩs ) µf .

Liberge a assimilé dans un premier temps la structure à un corps rigide, si bien que le terme µs re-
présente un facteur de pénalisation associé à cette contrainte qui se traduit2 par D(u) = 0 sur Ωs . Cette
condition est imposée au moyen du tenseur D(λ) faisant intervenir un R multiplicateur de Lagrange associé
à la contrainte. Le terme de contrainte sur l’interface fluide-structure Γ σ nf · ϕ(j) dΩ est quant à lui traité
par pénalisation.
Enfin, la fonction caractéristique du solide IΩs est définie en tout point de Ω et à chaque instant par

1 si x ∈ Ωs (t)
IΩs (x, t) = . (6.5)
0 si x 6∈ Ωs (t)

La définition précédente combinée avec l’équation d’évolution donnée à l’équation (6.3) permet alors de
suivre la position de l’interface fluide-structure. Toutefois, la fonction caractéristique est fortement discon-
tinue à l’interface et ne se marie pas toujours bien au formalisme de la POD lorsque les modes POD obtenus
ont un aspect continu. Par conséquent, il est préférable de définir la fonction caractéristique au moyen de
la fonction Level-Set ψ au moyen de la relation

IΩs (x, t) = H(ψ), (6.6)

où H est la fonction de Heaviside. La fonction Level-Set est quant à elle définie par

 > 0 si x ∈ Ωs (t)
ψ(x, t) = 0 si x ∈ Γ(t) . (6.7)

< 0 si x 6∈ Ωs

Plutôt que de suivre directement l’évolution de la fonction caractéristique IΩs pour connaître la position
de l’interface, on suit alors l’évolution de la fonction Level-Set qui sera définie de manière à être continue.
L’écriture des équations sur le domaine invariant Ω simplifie considérablement la construction du mo-
dèle d’ordre réduit puisque dans ce cas la formulation POD établie dans le cadre de l’espace de Hilbert
H = L(Ω) est toujours valable. Les modes POD sont ainsi calculés sur le même domaine spatial Ω que
celui sur lequel les équations du système couplé sont écrites, si bien que la projection de Galerkin peut être
effectuée de manière cohérente. L’extension de la formulation des équations de Navier-Stokes généralisées
à un solide déformable a été établie par Yu [251] et par conséquent il semblerait possible de pouvoir obtenir
un modèle d’ordre réduit aéroélastique à proprement parler.
Parmi les différentes solutions déjà envisagées par le passé, aucune ne répond correctement à notre
problématique pour les raisons suivantes :
• les méthodes linéarisées [104, 148, 170] employées offrent certes l’avantage d’être simples à mettre
en œuvre et se prêtent bien aux analyses de stabilité, mais elles font l’impasse sur les phénomènes
non-linéaires qui motivent justement la construction du modèle d’ordre réduit développé ici ;
2 Voir la remarque 4.1 p.112.

166
6.2. Simplification des équations de Navier-Stokes pour un mouvement de corps rigide

• la Multi-POD d’Anttonen et al. [12] nécessite la construction d’un ensemble de plusieurs modèles
d’ordre réduit entre lesquels on alterne en fonction de la déformation du maillage. Or il serait pré-
férable de disposer d’une formulation tenant compte intrinsèquement de la mobilité du domaine,
et de réserver les changements — ou mieux les interpolations — de modèles d’ordre réduit aux
variations de paramètres tels que le nombre de Mach ou l’angle d’incidence par exemple ;
• la formulation de Liberge [145] basée sur les équations généralisées de Navier-Stokes est attractive
puisque le cadre théorique est bien posé et permet de traiter les non-linéarités de l’écoulement. La
seule limitation est que la formulation s’applique pour l’instant à un solide rigide et à un écoule-
ment incompressible.
Au vu des descriptions des différentes approches, il semblerait que la meilleure solution soit de travailler
sur un domaine spatial fixe, à moins de trouver une définition pertinente du produit scalaire sur un domaine
mobile. Le choix d’un domaine invariant n’est simple qu’en apparence, car si il est facile d’interpoler les
clichés sur un domaine de référence sur lequel les modes POD seront calculés, la difficulté est reportée
lorsqu’il s’agit d’adapter les équations du fluide à ce domaine de référence. En effet, si les clichés peuvent
être interpolés sur un domaine de référence au moyen de la relation (6.2) par exemple, alors les modes POD
e (j) sont déterminés sur ce même domaine par l’expression (2.82). Toutefois, on obtient la décomposition
ϕ
POD des variables interpolées sur le domaine Ω0
q
X
e 0) +
e 0 , t) = q(x
q(x e (j) (x0 ),
aj (t) ϕ (6.8)
j=1

et non une décomposition des variables sur le domaine variable Ω(t). Or, les équations du fluide formu-
lées au moyen de la description ALE par exemple gouvernent les variables aérodynamiques q(x, t) et non
e 0 , t). Ainsi, la décomposition POD (6.8) n’est pas d’un grand secours pour la
les variables interpolées q(x
construction d’un modèle d’ordre réduit puisqu’elle ne peut être employée pour remplacer les variables
aérodynamiques dans les équations à projeter.
La solution adoptée dans le cadre de cette thèse va donc consister à supposer un mouvement de corps
rigide puis à formuler les équations dans le repère entraîné associé au mouvement. De cette manière, le
domaine spatial reste invariant et les équations peuvent être écrites dans le repère entraîné, au prix d’un
certain nombre de calculs détaillés dans la section suivante.

6.2.2 Simplification des équations de Navier-Stokes dans le cas d’un mouvement de


corps rigide de la structure
Les équations locales de Navier-Stokes ont été formulées au paragraphe 4.4.3 à l’aide des variables pri-
mitives modifiées pour obtenir une forme quadratique propice à la projection de Galerkin. La description
ALE adoptée a ainsi permis de tenir compte de l’effet d’une structure déformable placée dans l’écoulement
et d’un éventuel mouvement de corps rigide. Dans ce dernier cas, le choix des composantes de la vitesse
absolue ou relative a conduit aux formulations FALE-REUE et FALE-REVE fournies respectivement aux
équations (4.62) et (4.68) avec les variables primitives modifiées.
L’hypothèse d’un mouvement de corps rigide permet alors de simplifier les formulations précédentes et
de se ramener finalement à une formulation dans laquelle des termes sources supplémentaires sont intro-
duits pour tenir compte du mouvement du domaine qui est alors indissociable de celui du repère entraîné.
L’expression de la vitesse des nœuds du maillage (4.30) est alors simplifiée puisque les positions relatives
eE sont invariantes dans le repère entraîné et la vitesse de déformation des points du maillage sd,E s’an-
x
nule. En outre, la vitesse d’entraînement correspond à la vitesse du mouvement de corps rigide, i. e. au
mouvement imposé à la structure dans le cas d’un couplage faible. Sous l’hypothèse d’un mouvement de
corps rigide les vitesses d’entraînement et de déformation sont données par

sd,E = 0
. (6.9)
eE
sE = se,E = s0,E + ω E ∧ x

Les relations précédentes permettent alors de simplifier les expressions des équations de Navier-Stokes
formulées dans le repère entraîné. En particulier les termes liés à la vitesse du maillage sont explicitement

167
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

connus dès lors que la vitesse de translation s0,E et la vitesse de rotation ωE sont connus. Les équations
(4.62) formulées avec les composantes de la vitesse absolue exprimée dans le repère entraîné sont alors ren-
dues adimensionnelles selon le même procédé qu’au paragraphe 5.2.1. La vitesse sE est ensuite explicitée
avec les relations (6.9) sous l’hypothèse d’un mouvement de corps rigide, ce qui conduit à


 ∂ϑ
 + uE · ∇E ϑ = ϑ divE uE + se,E · ∇E ϑ


 ∂t χ


 ∂u

ϑ
E
+ uE · ∇E uE = −ϑ∇E p + divE τ (uE ) − ω E ∧ uE + se,E · ∇E uE . (6.10)

 ∂t χ Re





 ∂p γ−1 γ

 + uE · ∇E p = −γ p divE uE + ∇E uE : τ (uE ) + ∆E (p ϑ) + se,E · ∇E p
∂t χ Re RePr

La formulation en vitesse relative s’obtient de manière analogue à partir de l’équation (4.68) :



∂ϑ
+ vE · ∇E ϑ = ϑ divE vE
∂t χ

∂vE ϑ
+ vE · ∇E vE = −ϑ∇E p + divE τ (vE ) + fCor + fcen . (6.11)
∂t χ Re

∂p γ−1 γ
+ vE · ∇E p = −γ p divE vE + ∇E vE : τ (vE ) + ∆E (p ϑ)
∂t χ Re Re Pr

Dans ce cas, les équations sont similaires à celles d’une formulation eulérienne, à la différence près
que le bilan de quantité de mouvement fait intervenir des termes gyroscopiques. Ceci provient du fait que
le domaine reste rigide et peut être considéré comme un domaine invariant puisque les équations sont
formulées dans le repère associé au mouvement.

168
6.3. Construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin pour un mouvement de corps rigide

6.3 Construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin pour un


mouvement de corps rigide
Le problème du mouvement d’une structure mobile placée dans le fluide a été résolu en faisant l’hypo-
thèse d’un mouvement de corps rigide et en reformulant les équations dans le repère associé à ce mouve-
ment. Il en résulte une modification des équations de Navier-Stokes par l’introduction de termes sources
reflétant le mouvement du domaine. Les modes POD peuvent être calculés de façon cohérente puisque
le domaine spatial est invariant lorsqu’on se place dans le repère entraîné. Deux formulations du modèle
d’ordre réduit sont alors développées ici suivant que les composantes de la vitesse absolue ou relative sont
employées.

6.3.1 Développement d’un modèle d’ordre réduit POD-Galerkin basé sur la


formulation en vitesse absolue
Ce premier modèle d’ordre réduit est construit par projection de Galerkin des équations continues (6.10)
en suivant le même principe que dans le paragraphe 5.2.1. Cependant, le système dynamique devient non-
autonome en raison de la présence des termes sources et s’écrit donc

1 D
q̇ = QC (q, q) + Q (q, q) + T(q, s0,E , ωE ), (6.12)
Re
où les opérateurs introduits sont donnés par
   
−uE · ∇E ϑ + ϑ divE uE se,E · ∇E ϑ
QC (q, q) =  −uE · ∇E u − ϑ ∇E p  , T(q, s0,E , ω E ) = se,E · ∇E uE − ω E ∧ uE  ,
−uE · ∇E p − γ p divE uE se,E · ∇E p
  (6.13)
0
D  ϑ div E τ (uE )

Q (q, q) =  γ .
(γ − 1)∇E uE : τ (uE ) + ∆E (ϑ p)
Pr

Les opérateurs QC et QD ont exactement la même forme que ceux de l’équation (5.6) mais ils s’ap-
pliquent cette fois à la vitesse absolue uE exprimée dans le repère entraîné au lieu de la vitesse uA expri-
mée dans le repère absolu. Enfin, le terme source supplémentaire T est linéaire en fonction des variables
aérodynamiques q, mais il dépend aussi du mouvement imposé qui résulte d’une translation et d’une ro-
tation caractérisées respectivement par s0,E et ωE . Le terme source ne dépend que de ces deux degrés de
liberté de mouvement — ce qu’on note T(q, s0,E , ω E ) — puisque la vitesse du maillage se,E est donnée par
l’expression (6.9).
Le modèle d’ordre réduit est construit comme dans le paragraphe 5.2.1 : les variables aérodynamiques
q = [ϑ, uE , p]T sont remplacées par leur décomposition POD (2.83) qui est introduite dans le système
d’équations (6.12), puis le tout est projeté sur chaque mode POD. Cette opération conduit au système dy-
namique réduit
q
X q
X q
X
ȧi = Ki + Lij aj + Qjik aj ak + KiE (t) + LE
ij (t)aj , (6.14)
j=1 j,k=1 j=1

dans lequel les amplitudes modales ont été extraites des opérateurs en recourant à la propriété de multili-
néarité de QC , QD et T. La nouvelle expression du modèle d’ordre réduit introduit deux types de termes :
d’une part les coefficients autonomes Ki , Lij et Qjik , et d’autre part les coefficients non-autonomes (ou d’en-
traînement) KiE (t) et LE ij (t) qui dépendent implicitement du temps et rendent donc le système d’équa-
tions différentielles ordinaires non-autonome. Les coefficients autonomes sont identiques à ceux du modèle
d’ordre réduit construit à partir des équations en formulation eulérienne dans le repère absolu, bien que
les modes POD employés à présent aient été obtenus à partir des vitesses absolues exprimées dans le re-
père entraîné. Leurs expressions sont données par les équations (5.9). La projection du terme source linéaire

169
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

induit quant à elle un ensemble de coefficients constants et linéaires supplémentaires en raison de la dé-
composition affine des variables sur les modes POD. On obtient donc les termes
*   +
D E X q
T(q, s0,E , ω E ), ϕ(i)
= 
T q+ (j) 
aj ϕ , s0,E , ωE , ϕ (i)

j=1
(6.15)
D E Xq D   E
= T(q, s0,E , ω E ), ϕ(i) + T ϕ(j) , s0,E , ωE , ϕ(i) aj ,
j=1

à partir desquels sont introduits les coefficients non-autonomes constants KiE et linéaires LE ij issus du mou-
vement du domaine et définis par
D E D   E
KiE (t) = T(q, s0,E , ωE ), ϕ(i) et LE ij (t) = T ϕ(j)
, s 0,E , ω E , ϕ(i)
. (6.16)

En développant le produit scalaire, les coefficients linéaires s’écrivent


D   E D   E D   E
(i)
LEij (t) = Tϑ ϕ(j) , ϕϑ + TuE ϕ(j) , ϕ(i) uE + T p ϕ
(j)
, ϕ(i)
p
Z  
(j) (i)
= se,E · ∇E ϕϑ ϕϑ dΩ

Z   (6.17)
(j) (j)
+ se,E · ∇E ϕu E
− ω E ∧ ϕu E
· ϕ(i)
uE dΩ

Z  
(j)
+ se,E · ∇E ϕj ϕ(i)p dΩ,

et les coefficients constants se déduisent simplement de l’expression précédente en remplaçant le mode


POD ϕ(j) par la partie moyenne q.
La formulation précédente du modèle d’ordre réduit n’est pas adéquate puisque les coefficients non-
autonomes KiE (t) et LE ij (t) dépendent implicitement du temps comme en témoigne l’expression (6.17). Les
coefficients non-autonomes doivent être calculés à chaque pas de temps d’intégration du modèle d’ordre
réduit puisque les termes instationnaires entrent dans le calcul des intégrales. Par conséquent le calcul de
ces coefficients devient rapidement trop coûteux lorsque le nombre de cellules de contrôle dans le domaine
de calcul augmente et l’intérêt de la réduction de modèle en pâtit.
Il est donc essentiel de scinder les expressions des termes KiE (t) et LEij (t) afin d’obtenir des coefficients
scalaires indépendants du temps qui soient pondérés par les degrés de liberté instationnaires du mou-
vement s0,E et ω E . Ainsi, les coefficients peuvent être calculés une fois pour toute avant l’intégration en
temps du modèle d’ordre réduit. Le travail est effectué pour les coefficients linéaires, puisque les coeffi-
cients constants se déduisent simplement en remplaçant les modes POD ϕ(j) par la partie moyenne des
clichés q.
La modification des expressions des coefficients non-autonomes repose sur l’analyse de la vitesse de
déplacement des nœuds du maillage donnée par l’expression (6.9). En effet, cette vitesse est la somme de
la vitesse de translation s0,E de l’origine M0 du repère entraîné et de la vitesse de rotation calculée comme
le produit vectoriel de la vitesse angulaire ω E avec la position relative xeE . Parmi ces trois termes, seule la
position relative xeE dépend de la position des points du maillage et ne peut par conséquent être extraite
des intégrales impliquées dans l’expression (6.17) des coefficients. En effet, la vitesse de translation s0,E ne
dépend que de la position de l’origine M0 du repère entraîné et le vecteur vitesse angulaire ne dépend que
de la vitesse de rotation imposée au repère entraîné et qui est indépendante de la position des points du
domaine. Si on précise explicitement la dépendance des différentes quantités, la vitesse de déplacement
d’un nœud M du maillage s’écrit

eE (M ).
se,E (M, t) = s0,E (M0 , t) + ω E (t) ∧ x (6.18)

Le point capital est que la position relative x


eE ne dépend que de la position du point M et pas du temps.
Ceci est dû à l’hypothèse d’un mouvement de corps rigide sans laquelle il ne serait pas possible d’effectuer
les modifications qui suivent.

170
6.3. Construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin pour un mouvement de corps rigide

L’idée est donc d’extraire des intégrales de l’équation (6.17) les quantités s0,E et ω E qui dépendent du
temps. On considère pour cela un scalaire s(M, t) = η(t) · µ(M ) fonction de la position d’un point M et du
temps, défini comme le produit scalaire d’un vecteur η(t) de fonctions dépendant uniquement du temps et
d’un vecteur µ(M ) de fonctions dépendant uniquement de l’espace. Les termes scalaires sous les intégrales
de l’équation (6.17) sont alors interprétés comme un produit scalaire s(M, t) = η(t) · µ(t), de sorte que
l’intégrale devienne
Z Z Z
s(M, t) dΩ = η(t) · µ(M ) dΩ = η(t) · µ(M ) dΩ. (6.19)
Ω Ω Ω

L’intégrale du vecteur de fonctions µ(M ) = [µ1 (M ), µ2 (M ), µ3 (M )]T est simplement définie comme le
vecteur des intégrales de chacune des composantes sur le domaine Ω. D’un point de vue pratique, si le
domaine Ω est discrétisé en un ensemble de N cellules de contrôle dans lesquelles on connaît les valeurs
s(e), ηi (e) et µi (e) du scalaire s et des composantes de η et µ au centre des cellules, alors l’intégrale du
scalaire s est approchée de manière discrète au moyen de la règle du point milieu par

Z N
X N X
X 3
s(M, t) dΩ ≈ s(e) δΩe = ηi (e) µi (e) δΩe . (6.20)
Ω e=1 e=1 i=1

Par ailleurs, la discrétisation de la relation (6.19) conduit à


Z 3
X N
X
η(t) · µ(M ) dΩ ≈ ηi µi (e) δΩe . (6.21)
Ω i=1 e=1

Les expressions (6.21) et (6.20) sont en réalité identiques puisque le vecteur η est indépendant de la posi-
tion des points M ; par conséquent, pour tout élément du domaine discrétisé, la valeur de ηi (e) est identique
quelque soit e. Il suffit donc de modifier les expressions des termes sous les intégrales de l’équation (6.17)
afin de faire apparaître un produit scalaire de type s(M, t) = η(t) · µ(M ) à partir duquel les contributions
instationnaires puissent être isolées puis extraites de l’intégrale.
Pour y parvenir, on établit d’abord les quatre relations suivantes pour un scalaire s défini par des
produits d’opérateurs intervenant dans l’équation (6.17) et portant sur des scalaires a, b ou des vecteurs
α, β, γ, δ :

s = (α · ∇a) b = α · [(∇a) b], (6.22a)


s = [(α ∧ β) · ∇a] b = α · [β ∧ ((∇a) b)], (6.22b)
 T
s = (α · ∇β) · γ = α · γ T (∇β) , (6.22c)
  T 
T
s = [(α ∧ β) · ∇γ] · δ = α · β ∧ δ (∇γ) . (6.22d)

À chaque fois, le vecteur α représente le vecteur vitesse de translation s0,E ou de rotation ω E . Ainsi, on
parvient à une expression sous forme d’un produit scalaire de α avec un autre vecteur, ce qui permettra
d’extraire de l’intégrale α avec la relation (6.19).
Les relations (6.22) se démontrent facilement. Pour la première relation (6.22a) il suffit de remarquer que
(α · ∇)a = α · (∇a) puisque les deux relations donnent αi a,i . Pour la seconde relation, on a [(α ∧ β) · ∇a] b =
(α ∧ β) · ((∇a) b) avec le même argument que précédemment. On note alors B = (∇a) b, de sorte que la
deuxième relation s’écrive (α ∧ β) · B qui est un produit mixte. Puisque le produit mixte est invariant par
permutation circulaire, on peut écrire la deuxième relation α · (β ∧ B) ce qui donne bien l’égalité (6.22b).
La troisième relation s’écrit en notation indicielle αj βi,j γi ; en permutant αj et γi on peut donc écrire le
premier produit γ T ∇β puis il suffit de prendre la transposée de ce vecteur pour obtenir le produit scalaire
avec α, ce qui fournit bien la relation (6.22c). Enfin pour obtenir la dernière relation, on applique la relation
(6.22c) en prenant α = (α ∧ β) = A, β = γ et γ = δ ce qui donne : (A · ∇γ) · δ = A · [δ T (∇γ)T ]. On note
ensuite B = δ T (∇γ)T et on développe A ce qui donne l’expression (α ∧ β) · B qui est un produit mixte. Par
permutation circulaire, on a finalement (α ∧ β) · B = α · (β ∧ B) d’où la relation (6.22d).

171
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

Les trois contributions de l’équation (6.17) sont d’abord détaillées au moyen de la relation (6.18) pour la
vitesse du maillage. La première contribution associée au covolume s’écrit
D   E Z   Z h i
(i) (j) (i) (j) (i)
Tϑ ϕ(j) , ϕϑ = s0,E · ∇E ϕϑ ϕϑ dΩ + (ωE ∧ xeE ) · ∇E ϕϑ ϕϑ dΩ
Ω Ω
Z Z h  i (6.23)
(i) (j) (j) (i)
= s0,E · ϕϑ ∇E ϕϑ dΩ + ωE · eE ∧ ∇E ϕϑ
x ϕϑ dΩ.
Ω Ω

La dernière égalité est obtenue au moyen des relations (6.22a) et (6.22b) établies ci-dessus et de la rela-
tion (6.19) pour extraire de l’intégrale les degrés de liberté du mouvement s0,E et ω E . Ainsi, les intégrales
peuvent être évaluées une fois pour toutes avant l’intégration en temps du modèle d’ordre réduit. De la
même manière, la contribution en pression aux coefficients non-autonomes est
D   E Z   Z h i
Tp ϕ(j) , ϕ(i)
p = s 0,E · ∇ ϕ
E p
(j)
ϕ (i)
p dΩ + eE ) · ∇E ϕ(j)
(ω E ∧ x p ϕp(i) dΩ
Ω Ω
Z Z h  i (6.24)
(i) (j)
= s0,E · ϕp ∇E ϕp dΩ + ωE · eE ∧ ∇E ϕ(j)
x p ϕ (i)
p dΩ.
Ω Ω

Enfin, la contribution liée à la vitesse absolue exprimée dans le repère entraîné est d’abord transformée
au moyen des relations (6.22c), (6.22d) et (6.19). Ensuite, la permutation circulaire du produit mixte (ω E ∧
(j) (i) (j) (i)
ϕuE ) · ϕuE = ω E · (ϕuE ∧ ϕuE ) conduit à
D   E Z   Z h i
TuE ϕ(j) , ϕu(i)
E
= s 0,E · ∇E ϕ(j)
uE · ϕ (i)
uE dΩ + eE ) · ∇E ϕ(j)
(ω E ∧ x (i)
uE · ϕuE dΩ
Ω Ω
Z  
(j) (i)
− ω E ∧ ϕuE · ϕuE dΩ

Z  T T Z  T T (6.25)
= s0,E · ϕ(i)
uE ∇E ϕ(j)
uE dΩ + ω E · e
x E ∧ ϕ(i)
uE ∇E ϕ(j)
uE dΩ
Ω Ω
Z
−ωE · ϕ(j) (i)
uE ∧ ϕuE dΩ.

L’expression générale des coefficients linéaires non-autonomes s’obtient alors comme la somme des
contributions (6.23), (6.24) et (6.25). Le regroupement des termes conduit à l’expression
"Z Z  T Z #
T
(i) (j) (i) (j) (i) (j)
LE
ij (t) = s0,E (t) · ϕϑ ∇E ϕϑ dΩ + ϕuE ∇E ϕuE dΩ + ϕp ∇E ϕp dΩ
Ω Ω Ω
Z h  i Z h  i
(j) (i)
+ ω E (t) · xeE ∧ ∇E ϕϑ ϕϑ dΩ + xeE ∧ ∇E ϕ(j)
p ϕ(i)
p dΩ (6.26)
Ω Ω
Z  T Z #
T
+ eE ∧
x ϕ(i)
uE ∇E ϕ(j)
uE dΩ − (j)
ϕu E
∧ ϕ(i)
uE dΩ
Ω Ω

qui correspond à la forme recherchée puisque le coefficient linéaire non-autonome LE ij (t) est la somme de
deux produits scalaires entre d’une part des vecteurs de coefficients linéaires d’entraînement en translation
LET ER
ij et en rotation Lij et d’autre part l’excitation temporelle instationnaire caractérisée par le vecteur vi-
tesse de translation s0,E (t) et le vecteur vitesse angulaire ωE (t). On aboutit donc à l’expression synthétique

ET ER
LE
ij (t) = s0,E (t) · Lij + ω E (t) · Lij . (6.27)

Les coefficients constants d’entraînement issus du mouvement de corps rigide se déduisent simplement
en remplaçant les modes POD ϕ(j) par la partie moyenne des clichés q dans l’expression (6.17), ce qui
conduit à l’expression similaire

KiE (t) = s0,E (t) · KET


i + ω E (t) · KER
i . (6.28)

172
6.3. Construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin pour un mouvement de corps rigide

La forme détaillée du modèle d’ordre réduit des équations de Navier-Stokes écrites dans le repère en-
traîné avec les composantes de la vitesse absolue s’écrit donc

q
X q
X
ȧi (t) = Ki + Lij aj (t) + Qjik aj (t)ak (t)
j=1 j,k=1
+ s0,E (t) · KET
i + ωE (t) · KER
i (6.29)
Xq  
+ ET
s0,E (t) · Lij + ω E (t) · LER
ij aj (t)
j=1

en remplaçant les expressions (6.27) et (6.28) dans l’équation (6.14). Pour chaque coefficient constant (resp.
linéaire) d’entraînement KiE (t) (resp. LEij (t)), il faut calculer les vecteurs des coefficients constants (resp.
linéaires) d’entraînement en translation KET i et en rotation KERi (resp. LET ER
ij et Lij ). Tout comme pour
les coefficients autonomes, le calcul est effectué hors ligne avant l’intégration en temps du modèle d’ordre
réduit. L’évaluation des coefficients est assez coûteuse puisqu’un modèle d’ordre réduit construit avec une
base de projection comprenant q modes POD est défini par Nca = q+q 2 +q 3 coefficients autonomes auxquels
viennent s’ajouter Ncna = 6q + 6q 2 coefficients non-autonomes supplémentaires associés au mouvement de
corps rigide. Une fois ce travail effectué, le coût de calcul pour l’intégration en temps du modèle d’ordre
réduit est nettement réduit. En effet, il ne reste plus qu’à effectuer les produits scalaires s0,E (t) · LETij et
ωE (t) · LER
ij et leur équivalent pour les termes constants d’entraînement. Cette opération est relativement
peu coûteuse puisqu’elle n’implique que des vecteurs de R3 .
Le vecteur des coefficients linéaires d’entraînement en translation est défini par la relation

Z Z  T T Z
(i) (j)
LET
ij = ϕϑ ∇E ϕϑ dΩ + (i) (j)
ϕuE ∇E ϕuE dΩ + ϕ(i) (j)
p ∇E ϕp dΩ , (6.30)
Ω Ω Ω

détaillée ci-dessous en développant les opérateurs tensoriels dans la base BE supposée cartésienne, ortho-
normée et directe :

 Z " (j) (j) (j) (j) (j)


# 
(i) ∂ϕϑ ∂ϕp ∂ϕu ∂ϕv ∂ϕw
 ϕϑ+ + ϕ(i)
p + ϕ(i)
u + ϕ(i)
dΩv ϕ(i)
w 
 Ω ∂x ∂x ∂x ∂x ∂x 
 Z " # 
 (j) (j) (j) (j) (j) 
 (i) ∂ϕϑ (i) ∂ϕp (i) ∂ϕu (i) ∂ϕv (i) ∂ϕw 
LET
ij = ϕ + ϕp + ϕu + ϕv + ϕw dΩ  . (6.31)
 Ω ϑ ∂y ∂y ∂y ∂y ∂y 
 
 Z " (j) (j) (j) (j) (j)
# 
 (i) ∂ϕϑ (i) ∂ϕp (i) ∂ϕu (i) ∂ϕv (i) ∂ϕw 
ϕϑ + ϕp + ϕu + ϕv + ϕw dΩ
Ω ∂z ∂z ∂z ∂z ∂z

Le vecteur des coefficients linéaires d’entraînement en rotation est quant à lui défini par la relation

Z h  i Z h  i
(j) (i)
LER
ij = xeE ∧ ∇E ϕϑ ϕϑ dΩ + xeE ∧ ∇E ϕ(j)
p ϕ(i)
p dΩ
Ω Ω
Z  T T Z , (6.32)
+ eE ∧
x ϕ(i)
uE ∇E ϕ(j)
uE dΩ − ϕ(j)
uE ∧ ϕ(i)
uE dΩ
Ω Ω

dont le détail est aussi obtenu en développant les opérateurs tensoriels dans la base BE . En notant les
composantes du vecteur des positions relatives x
eE = [xE , yE , zE ]T on aboutit après calcul à l’expression

173
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

Z " ! ! 
∂ϕϑ
(j)
∂ϕϑ
(j)
∂ϕp
(j)
∂ϕp
(j)  
(i)
 yE − zE ϕϑ + yE − zE ϕ(i) (j) (i)
p − ϕv ϕw − ϕw ϕv
(j) (i)

 Ω ∂z ∂y ∂z ∂y 
 ! !# 
 (j) (j) (j) (j) (j) (j) 
 ∂ϕ u ∂ϕ v ∂ϕ w ∂ϕ u ∂ϕ v ∂ϕ w 
 +yE ϕu(i)
+ ϕv(i)
+ ϕw(i)
− zE ϕu (i)
+ ϕv(i) (i)
+ ϕw dΩ 
 ∂z ∂z ∂z ∂y ∂y ∂y 
 
Z " ! ! 
 ∂ϕϑ
(j)
∂ϕϑ
(j)
∂ϕp
(j)
∂ϕp
(j)   
 zE − xE
(i)
ϕϑ + zE − xE (i) (j) (i)
ϕp − ϕw ϕu − ϕu ϕw (j) (i) 
 
 Ω ∂x ∂z ∂x ∂z 
Lij = 
ER
 (j) (j) (j)
!
(j) (j) (j)
!#  .

 ∂ϕ u ∂ϕ v ∂ϕw ∂ϕ u ∂ϕ v ∂ϕw 
 +zE ϕ(i)
u + ϕ(i)
v + ϕ(i)
w − xE ϕ(i)u + ϕ(i)
v + ϕ(i)
w dΩ
 ∂x ∂x ∂x ∂z ∂z ∂z 
 " ! ! 
Z (j) (j) (j) (j)   
 ∂ϕϑ ∂ϕϑ ∂ϕ ∂ϕ 
 xE − yE
(i)
ϕϑ + xE
p
− yE
p (i) (j) (i)
ϕp − ϕu ϕv − ϕv ϕu (j) (i) 
 ∂y ∂x ∂y ∂x 
 Ω 
 ! !# 
 (j) (j) (j) (j) (j) (j) 
 (i) ∂ϕu (i) ∂ϕv (i) ∂ϕw (i) ∂ϕu (i) ∂ϕv (i) ∂ϕw 
+xE ϕu + ϕv + ϕw − yE ϕu + ϕv + ϕw dΩ
∂y ∂y ∂y ∂x ∂x ∂x
(6.33)
Le modèle d’ordre réduit construit par projection de Galerkin des équations de Navier-Stokes formu-
lées dans le repère entraîné avec les composantes de la vitesse absolue pour un mouvement de corps rigide
est donc défini par les équations (6.29) gouvernant les amplitudes modales. Les coefficients d’entraînement
constants et linéaires KiE (t) et LE
ij (t) ont été décomposés en différentes contributions au moyen des relations
(6.28) et (6.27) afin de faire apparaître des coefficients indépendants du temps qui peuvent être calculés une
fois pour toute avant l’intégration en temps du modèle d’ordre réduit. Pour cela, des coefficients d’entraî-
nement en translation et en rotation ont été définis aux équations (6.30) et (6.32).

Remarque 6.1 : Écriture tensorielle des termes non-autonomes.


Le modèle d’ordre réduit établi auparavant dans le cas de frontières fixes avait pu être écrit sous la forme tensorielle
suivante : ȧ = K + L⊗a + (Q⊗a)⊗a, où le nombre de barres sous les différents tenseurs indique leur ordre. Dans
cette écriture, l’opérateur ⊗ désigne le produit tensoriel contracté une fois qui correspond au produit matriciel clas-
sique lorsqu’il opère entre une matrice et un vecteur. Cette expression doit à présent être complétée par les termes
non-autonomes KiE (t) et LE ij (t) qui ont été décomposés avec les expressions (6.28) et (6.27).
Pour les coefficients constants d’entraînement, on définit les matrices des coefficients constants d’entraînement
en translation KET = [KET ET
1 , . . . , Kq ] et en rotation K
ER
= [KER ER
1 , . . . , Kq ] qui regroupent les diffé-
rents vecteurs des coefficients constants d’entraînement en translation Ki et en rotation KER
ET
i . Ces deux ma-
trices sont dans M (3, q) et le vecteur des coefficients constants non-autonomes est alors calculé par la relation
KE (t) = (sT 0,E K
ET
+ ωT EK
ER T
) qui généralise l’équation (6.28) établie pour chaque composante. Cette re-
lation peut aussi s’écrire avec un produit tensoriel contracté puisque pour tout vecteur u et toute matrice D,
u⊗D = ui δ i ⊗(Djk δ j ⊗ δ k ) = ui Djk δij δ k = uj Djk δ k = uT D. Par conséquent, le vecteur des coefficients
constants non-autonomes s’écrit

KE (t) = s0,E (t) ⊗ KET + ωE (t) ⊗ KER . (6.34)

On procède alors de façon similaire pour le vecteur des coefficients linéaires non-autonomes. Pour cela, les vecteurs
LET ER
ij et Lij sont regroupés dans des tenseurs d’ordre 3 de taille 3 × q × q notés L
ET
et LER . En effet, le produit
tensoriel contracté entre un vecteur u et un tenseur d’ordre 3 noté L donne une matrice de terme général ui Likl . Par
conséquent si l’on choisit de placer dans chaque colonne d’indices (k, l) le vecteur LET ER
kl (et de même avec Lkl ), le
terme général de la matrice Lkl (t) définie par l’équation (6.27) s’obtient bien au moyen de la relation
E

LE (t) = s0,E (t) ⊗ LET + ω E (t) ⊗ LER . (6.35)

Une fois la matrice précédente multipliée par un autre vecteur v, on retrouve bien un vecteur dont les composantes
kl (t)vl , ce qui correspond à l’expression initiale de l’équation (6.29) avec v = a. Finalement, la forme tensorielle
sont LE

174
6.3. Construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin pour un mouvement de corps rigide

du modèle d’ordre réduit avec les termes non-autonomes issus du mouvement est
 
ȧ(t) = K + L ⊗ a(t) + Q ⊗ a(t) ⊗ a(t)
  . (6.36)
+ s0,E (t) ⊗ KET + ωE (t) ⊗ KER + s0,E (t) ⊗ LET + ωE (t) ⊗ LER ⊗ a(t)

6.3.2 Développement d’un modèle d’ordre réduit POD-Galerkin basé sur la


formulation en vitesse relative
Ce second modèle d’ordre réduit est construit par projection de Galerkin des équations continues (6.11)
en suivant toujours le même principe que dans le paragraphe 5.2.1. Le système d’équations obtenu a exac-
tement la même forme que celle associée au système d’équations (6.12) relatif à la formulation en vitesse
absolue. La seule différence est que les opérateurs QC et QD s’appliquent cette fois à la vitesse relative vE
au lieu de la vitesse absolue uE , et le vecteur des variables primitives modifiées est cette fois q = [ϑ, vE , p]T .
En outre, la définition du terme source change aussi et les différents opérateurs sont donc donnés par
   
−vE · ∇E ϑ + ϑ divE vE 0
QC (q, q) =  −vE · ∇E v − ϑ ∇E p  , T(q, s0,E , ω E ) = fCor + fcen  ,
−vE · ∇E p − γ p divE vE 0
  (6.37)
0
 ϑ divE τ (vE ) 
QD (q, q) =  γ .
(γ − 1)∇E vE : τ (vE ) + ∆E (ϑ p)
Pr
Le terme source contient cette fois les accélérations de Coriolis et centrifuge définies à l’équation (4.34).
Le terme source dépend donc encore de la vitesse du maillage se,E et plus particulièrement des deux degrés
de liberté du système que sont la vitesse de translation s0,E et la vitesse angulaire ω E .
Le modèle d’ordre réduit est donc construit par projection de Galerkin des équations (6.11) sur chaque
mode POD après avoir remplacé les variables par leur décomposition sur la base des modes POD. Les
coefficients autonomes du modèle d’ordre réduit Ki , Lij et Qijk restent identiques. La projection du terme
source sur les modes POD se réduit à la projection des termes gyroscopiques sur la contribution du mode
POD en vitesse qui s’écrit D E D E
T(q, s0,E , ω E ), ϕ(i) = fCor + fcen , ϕ(i)
vE (6.38)
puisque les autres composantes du terme source sont nulles. Les accélérations de Coriolis et centrifuge
sont des termes linéaires en fonction des variables aérodynamiques et leur projection sur les modes POD
conduit donc à l’apparition de coefficients constants et linéaires dans l’expression du modèle d’ordre réduit.
Toutefois, le même problème que celui rencontré dans le paragraphe précédent ressurgit : les coefficients
issus de la projection des termes gyroscopiques dépendent du temps puisque les accélérations de Coriolis
et centrifuge sont définies à partir de la vitesse des nœuds du maillage. Par conséquent, le même travail que
dans le paragraphe précédent doit être mené pour parvenir à déterminer des coefficients d’entraînement
indépendants du temps.

Projection de l’accélération de Coriolis Le développement de la projection de l’accélération de Coriolis


au moyen de l’expression (4.34) fait apparaître un produit mixte invariant par permutation circulaire :
D E Z Z   Z
(i) (i) (i)
fCor , ϕ = −2 (ω E ∧ vE ) · ϕvE dΩ = −2 ω E · vE ∧ ϕvE dΩ = −2 ωE · vE ∧ ϕ(i)
vE dΩ. (6.39)
Ω Ω Ω

La dernière égalité est vraie puisque le vecteur vitesse angulaire est indépendant de la position des
points du domaine d’intégration, si bien que la relation (6.19) peut être employée. L’introduction de la
décomposition orthogonale propre du vecteur vitesse relative mène ensuite à
D E Z q 
X Z 
(i) (i) (j) (i)
fCor , ϕ = −2 ωE · vE ∧ ϕvE dΩ − 2 ωE · ϕvE ∧ ϕvE dΩ aj . (6.40)
Ω j=1 Ω

175
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

Par analogie avec le formalisme adopté dans ce qui précède, la projection est écrite sous la forme

D E q 
X 
fCor , ϕ(i) = −2 ωE · KCor
i − 2 ω E · LCor
ij aj , (6.41)
j=1

ce qui permet de définir les vecteurs de coefficients constants KCor


i et linéaires LCor
ij d’accélération de Co-
riolis. Ce dernier est donné par
Z
Cor
Lij = ϕ(j) (i)
vE ∧ ϕvE dΩ (6.42)

et l’expression du vecteur de coefficients constants KCor se déduit de celle de LCor


(j)
i ij en remplaçant ϕvE
par la partie moyenne des clichés de vitesse relative vE . Le détail de l’expression précédente dans la base
cartésienne et orthonormée du repère entraîné RE est donné par
 Z 
ϕ(j) (i) (j) (i)
v ϕw − ϕw ϕv dΩ
 Ω 
 Z 
 
 
LCor = ϕ(j) ϕ(i) − ϕ(j) (i)
u ϕw dΩ  . (6.43)
ij
 Ω w u 
 Z 
 
ϕ(j) (i) (j) (i)
u ϕv − ϕv ϕu dΩ

Projection de l’accélération centrifuge Le même travail est effectué pour l’accélération centrifuge dont
l’expression est donnée à l’équation (4.34). À la différence de l’accélération de Coriolis, l’accélération centri-
fuge est indépendante du champ aérodynamique et résulte seulement du mouvement du repère entraîné.
La projection sur les modes POD engendrera donc seulement des coefficients constants dans le modèle
d’ordre réduit. L’expression de la projection de l’accélération centrifuge est donc décomposée au moyen
des expressions (4.34) et (6.9) en deux parties telles que
Z Z

∂se,E (i)
fcen , ϕ(i)
= − · ϕvE dΩ − (ω E ∧ se,E ) · ϕ(i)
vE dΩ
Ω ∂t Ω
Z Z   Z  
∂s0,E (i) ∂ωE (i) ∂e
xE
= − · ϕvE dΩ − ∧xeE · ϕvE dΩ − ωE ∧ · ϕ(i)
vE dΩ
Ω ∂t Ω ∂t Ω ∂t
| {z } (6.44)
Z Z ①
− (ω E ∧ s0,E ) · ϕ(i)
vE dΩ − (ωE ∧ (ω E ∧ x eE )) · ϕ(i)
vE dΩ .
Ω Ω
| {z }

Dans le premier terme de la contribution ①, on peut extraire directement de l’intégrale la dérivée par-
tielle du vecteur vitesse de translation s0,E puisque celle-ci ne dépend que de la position de l’origine du
repère entraîné. Le second terme de ① est modifié par permutation ciruclaire du produit mixte, afin d’ob-
tenir un produit scalaire entre ∂ωE /∂t et les autres vecteurs. Ainsi le premier vecteur ∂ωE /∂t sera extrait
de la seconde intégrale. Enfin, le troisième terme de ① est nul puisque la position relative x
eE est invariante
dans le repère entraîné sous l’hypothèse d’un mouvement de corps rigide. Le terme ① se récrit donc
Z Z
∂s0,E ∂ωE
①=− · ϕ(i)
vE dΩ − · eE ∧ ϕ(i)
x vE dΩ. (6.45)
∂t Ω ∂t Ω

Dans le premier terme de ②, le produit vectoriel ωE ∧ s0,E peut être entièrement extrait de l’intégrale
puisque les deux vecteurs sont indépendants de la position. Le deuxième terme est plus délicat à traiter. On
(i)
commence par noter A = ωE ∧ x eE . Ainsi le double produit vectoriel projeté sur le mode ϕvE s’interprète
(i)
comme un produit mixte dont on effectue une permutation circulaire : (ω E ∧ (ω E ∧ x eE )) · ϕvE = (ω E ∧ A) ·

176
6.3. Construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin pour un mouvement de corps rigide

(i) (i)
ϕvE = (A ∧ ϕvE ) · ωE . Cette première opération permet ainsi d’écrire le terme sous l’intégrale du second
terme de ② sous la forme
h i
eE )) · ϕ(i)
(ω E ∧ (ω E ∧ x vE = ω E · (ω E ∧ e
x E ) ∧ ϕ(i)
vE . (6.46)

Bien que le premier vecteur ωE puisse être extrait de l’intégrale, le terme entre crochet dans l’équation
(6.46) dépend encore de la vitesse angulaire ω E qui est un terme instationnaire. L’expression précédente
n’est donc pas encore totalement satisfaisante et pour pallier ce problème il est nécessaire d’isoler les deux
vecteurs vitesse angulaire. Le double produit vectoriel est alors développé à l’aide de la formule (u ∧ v) ∧
w = (u · w) v − (v · w) u qui, appliquée à l’équation (6.46), donne
h    i
(ωE ∧ (ω E ∧ xeE )) · ϕ(i)
vE = ω E · ω E · ϕ(i)
vE e
x E − e
x E · ϕ(i)
vE ω E
    (6.47)
= (ωE · x eE ) ωE · ϕ(i) vE − x eE · ϕ(i)
vE (ω E · ω E ).

Le dernier terme dans la seconde égalité présente une forme satisfaisante puisque le vecteur vitesse
angulaire apparaît de manière isolée. En revanche le vecteur vitesse angulaire ωE dans le premier terme
est impliqué dans les deux produits scalaires impliquant chacun un vecteur dépendant de la position spa-
tiale des points du domaine. Pour remédier à cela, il suffit de remarquer qu’un scalaire issu du produit
(a · b) (c · d) résulte de (ai bi ) (cj dj ) = (ai cj ) (bi dj ). Par conséquent on obtient le même résultat avec le
double produit de contraction des tenseurs a ⊗ c et b ⊗ d. En appliquant ce résultat au premier terme de la
dernière égalité de l’équation (6.47), on peut transformer le terme ② en
Z Z Z
② = −(ω E ∧ s0,E ) · ϕ(i)
vE dΩ − (ω E ⊗ ω E ) : ϕ(i)
vE ⊗ e
x E dΩ + (ω E · ω E ) eE · ϕ(i)
x vE dΩ. (6.48)
Ω Ω Ω

La projection du terme centrifuge sur chaque mode POD, définie à l’équation (6.44), s’écrit donc
  Z Z

∂s0,E (i) ∂ωE
fcen , ϕ(i)
= − + ω E ∧ s0,E · ϕvE dΩ − · eE ∧ ϕ(i)
x vE dΩ
∂t Ω ∂t Ω
Z Z (6.49)
(i) (i)
−(ω E ⊗ ω E ) : ϕvE ⊗ x eE dΩ + (ω E · ω E ) eE · ϕvE dΩ,
x
Ω Ω

où intervient une somme de produits scalaires entre des coefficients indépendants du temps et les vec-
teurs des degrés de liberté qui décrivent l’évolution temporelle du mouvement du domaine. L’expression
obtenue est donc mise sous la forme synthétique
 

∂s0,E ∂ωE
fcen , ϕ(i) = − + ω E ∧ s0,E · KCor,1
i − · KCor,2
i
∂t ∂t , (6.50)
−(ω E ⊗ ω E ) : KCor,3
i
+ (ω E · ω E ) KiCor,4

pour faire clairement apparaître le fait que des coefficients indépendants du temps ont pu être déterminés.
La projection de l’accélération centrifuge conduit à une forme plus compliquée qui fait notamment interve-
nir pour chaque mode POD de projection un coefficient scalaire KiCor,4 , deux vecteurs de coefficients KCor,1
i
et KCor,2
i et enfin une matrice de coefficients KCor,3
i
définis par
Z Z
Kcen,1
i = ϕv(i)E dΩ Kcen,2
i = eE ∧ ϕ(i)
x vE dΩ
Ω Ω
Z Z . (6.51)
Kcen,3
i
= ϕv(i)E eE dΩ
⊗x Kicen,4 = eE · ϕ(i)
x vE dΩ
Ω Ω

Les expressions détaillées de ces différents coefficients sont données ci-dessous dans la base BE sup-
posée cartésienne et orthonormée. Les vecteurs de coefficients Kcen,1
i et Kcen,2
i s’écrivent respectivement

177
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

Z  Z 
ϕ(i)
u dΩ yE ϕ(i) (i)
w − zE ϕv dΩ
 Ω   Ω 
Z  Z 
   
   
Kcen,1 = ϕ(i)
v dΩ et Kcen,2 = zE ϕ(i) (i)
u − xE ϕw dΩ , (6.52)
i  Ω  i  Ω 
Z  Z 
   
 ϕ(i) dΩ  xE ϕ(i) − yE ϕ(i) dΩ
w v u
Ω Ω

le scalaire Kicen,4 prend la forme


Z
Kicen,4 = xE ϕ(i) (i) (i)
u + yE ϕv + zE ϕw dΩ , (6.53)

et enfin les termes de la matrice Kcen,3


i
sont donnés par

Z Z Z 
ϕ(i)
u xE dΩ ϕ(i)
u yE dΩ ϕ(i)
u zE dΩ
 Ω 
Z Z

Z
Ω 
 
 (i) (i) (i) 
Kcen,3
i

= ϕv xE dΩ ϕv y E dΩ ϕv z E dΩ  .
 (6.54)
Ω Ω Ω
Z Z Z 
 
 ϕ(i) xE dΩ (i)
ϕw yE dΩ ϕw zE dΩ
(i)
w
Ω Ω Ω

Finalement, le modèle d’ordre réduit des équations de Navier-Stokes construit à partir de la formulation
en repère entraîné avec les composantes de la vitesse relative s’écrit

q
X q
X
ȧi (t) = Ki + Lij aj (t) + Qjik aj (t)ak (t)
j=1 j,k=1
q 
X 
− 2 ωE (t) · KCor
i −2 ωE (t) · LCor
ij aj (t)
j=1
. (6.55)
 
∂s0,E (t) ∂ωE (t)
− + ω E (t) ∧ s0,E (t) · Kcen,1
i − · Kcen,2
i
∂t ∂t
− (ω E (t) ⊗ ω E (t)) : Kcen,3
i
+ (ωE (t) · ω E (t)) Kicen,4

Les accélérations de Coriolis et centrifuge induisent six termes supplémentaires pour lesquels un
nombre important de coefficients doit être déterminé. Ainsi, lorsque la base de projection comprend q
modes POD, le nombre de coefficients autonomes s’élève à Nca = q + q 2 + q 3 pour les opérateurs K, L
et Q, auxquels viennent s’ajouter 3q + 3q 2 coefficients pour les termes KCori et LCor
ij relatifs à l’accélération
cen,1
de Coriolis, et encore 3q + 3q + 9q + q coefficients pour les termes Ki , Kcen,2
i , Kcen,3
i
et Kicen,4 relatifs à
l’accélération centrifuge, soit un total de Ncna = 19q + q 2 coefficients non-autonomes. Au total, le modèle
d’ordre réduit des équations en repère entraîné avec les composantes de la vitesse relative requiert le calcul
de 20q + 4q 2 + q 3 coefficients.

6.3.3 Construction de modèles d’ordre réduit des équations de Navier-Stokes par


identification des coefficients
Au lieu de construire le modèle d’ordre réduit à l’aide des expressions analytiques développées pré-
cédemment pour les formulations en vitesse absolue et relative, il est possible d’identifier directement les
coefficients à partir des clichés selon le principe d’identification exposé au paragraphe 2.4.4. Cette technique
devient d’autant plus intéressante que le nombre de coefficients à évaluer pour ces nouvelles formulations
du modèle d’ordre réduit a été augmenté.

178
6.3. Construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin pour un mouvement de corps rigide

La méthode d’identification des coefficients du modèle d’ordre réduit a été présentée au paragraphe
2.4.4 dans le cas d’un système autonome similaire à celui obtenu par la projection de Galerkin des équations
de Navier-Stokes dans un domaine fluide de frontières fixes. Or la projection de Galerkin des équations de
Navier-Stokes formulées avec les composantes de la vitesse absolue ou relative avait conduit aux systèmes
non-autonomes (6.29) et (6.55) respectivement. Connaissant la forme des modèles d’ordre réduit, il est donc
possible d’étendre le problème d’identification (2.65) afin de déterminer les coefficients supplémentaires
provenant du mouvement du domaine.
L’extension aux modèles d’ordre réduit (6.29) et (6.55) est relativement triviale une fois que la forme du
modèle d’ordre réduit est connue. Il suffit alors de former un nouveau vecteur d’inconnues X i contenant
à la fois les coefficients du modèle d’ordre réduit autonome et les coefficients supplémentaires qui rendent
le système non-autonome. Par ailleurs, la matrice A doit aussi être adaptée pour tenir compte des corréla-
tions supplémentaires. Le problème d’identification (2.65) conserve donc la même forme et la résolution est
menée au moyen de la technique présentée au paragraphe A.3. La seule différence réside dans la définition
du vecteur X i et de la matrice A qui sont décomposés en deux contributions telles que
 T  
X i = X ai X na
i et A = Aa Ana . (6.56)

Les contributions X ai et Aa contiennent les termes liés à la partie autonome du modèle d’ordre réduit
et sont ainsi données par les relations (2.64) et (2.66) respectivement. Le terme Bi reste quant à lui inchangé.
Les termes X nai et A
na
apparaissent en raison du mouvement du domaine et leurs expressions dépendent
de la formulation choisie pour les composantes de la vitesse. Les détails sont fournis ci-dessous lorsque la
vitesse absolue ou relative est considérée.

Formulation en vitesse absolue Dans ce cas, la formulation du modèle d’ordre réduit (6.29) introduit 6 +
6q coefficients supplémentaires pour chaque équation gouvernant l’amplitude modale ai . Par conséquent,
le vecteur des coefficients non-autonomes X na na
i contient Nc,i = 6 + 6q coefficients provenant à la fois des
ET ER
contributions constantes Ki et Ki et des contributions linéaires LET ER ET
ij et Lij . En notant Lij0 le vecteur
colonne relatif à l’indice j0 on parvient à l’expression
 T  T  T  T  T   T T
X na
i = KET
i KER
i LET
i1 · · · LET
iq LER
i1 ··· LER
iq . (6.57)


La matrice Ana ∈ M q, Nc,i
na
prend une forme similaire notée ici
h    iT
Ana = AK,ET (s0,E ) AK,ER (ωE ) AL,ET s0,E , a(m) AL,ER ωE , a(m) . (6.58)

Formulation en vitesse relative Pour terminer, la formulation du modèle d’ordre réduit (6.55) avec les
na
vitesses relatives introduit Nc,i = 19 + 3q coefficients supplémentaires pour chaque équation gouvernant
l’amplitude modale ai . Le vecteur des coefficients non-autonomes X na i contient ainsi 3 + 3q coefficients
provenant des contributions constantes KCor i et linéaires L Cor
ij dues à l’accélération de Coriolis, puis encore
16 coefficients résultants de l’accélération centrifuge caractérisée par les coefficients Kcen,1
i , Kcen,2
i , Kcen,3
i et
cen,4
Ki . L’expression du vecteur X i est alors donnée par
 T  T  T  T
X na
i = KCor
i LCor
i1 ··· LCor
iq Kcen,1
i
 T  T  T  T i (6.59)
Kcen,2
i Kcen,3
i,1 Kcen,3
i,2 Kcen,3
i,3 Kicen,4 ,

et celle de la matrice Ana pour la formulation en vitesse relative s’écrit


h  
Ana = AK,Cor (ω E ) AL,Cor ωE , a(m) AK,cen,1 (s0,E , ωE )
i (6.60)
AK,cen,2 (ω E ) AK,cen,3 (ω E ) AK,cen,4 (ω E ) .

179
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

6.3.4 Résumé et comparaison qualitative des différents modèles d’ordre réduit POD-
Galerkin développés
Plusieurs modèles d’ordre réduit basés sur des formulations différentes des équations de Navier-Stokes
ont été développés dans les chapitres 5 et 6. Dans tous les cas, ces modèles d’ordre réduit sont valables
pour reproduire l’écoulement instationnaire d’un fluide compressible visqueux dans lequel des phéno-
mènes non-linéaires peuvent être rencontrés. Trois formulations ont été développées afin de pouvoir tenir
compte de l’effet d’une structure placée dans le fluide. Ces formulations se distinguent d’abord par le repère
dans lequel sont formulées les équations projetées et ensuite par les composantes de la vitesse employée.
Ainsi, lorsque la structure est fixe, la description eulérienne de l’écoulement dans le repère absolu RA
avec les composantes de la vitesse absolue exprimée dans ce repère est employée, d’où la dénomination
FEUL-RAUA pour ce modèle d’ordre réduit. Deux formulations du modèle d’ordre réduit des équations de
Navier-Stokes dans le repère entraîné RE ont ensuite été développées : la première repose sur l’emploi des
composantes de la vitesse absolue exprimée dans RE ce qui conduit au modèle d’ordre réduit FALE-REUE,
tandis que la seconde repose sur les composantes de la vitesse relative exprimée dans RE ce qui conduit
au modèle d’ordre réduit FALE-REVE. Dans les deux cas, on a supposé en outre que la structure est mobile
mais non déformable afin de s’affranchir des problèmes d’incohérence dans la formulation de la décompo-
sition orthogonale propre sur un domaine déformable. Le tableau 6.1 résume les différentes formulations
des modèles d’ordre réduit développés et indique certaines de leurs spécificités.
Le premier modèle d’ordre réduit développé conduit à un système d’équations différentielles ordinaires
quadratiques autonomes. Dans ce cas, l’instationnarité de l’écoulement doit être d’origine purement aéro-
dynamique puisque la structure est supposée fixe. Deux autres formulations du modèle d’ordre réduit, tou-
jours basées sur les équations de Navier-Stokes, reposent sur l’écriture des équations dans le repère entraîné
avec les composantes de la vitesse absolue ou relative. Dans ce cas, les modèles d’ordre réduit obtenus ne
sont plus autonomes puisque des termes sources supplémentaires liés à la prise en compte du mouvement
du domaine apparaissent. Ces termes permettent ainsi d’obtenir la réponse avec le modèle d’ordre réduit
pour un certain déplacement du domaine qui correspond au mouvement imposé à la structure puisque
les équations ont été formulées dans le repère entraîné attaché à la structure. Si le mouvement imposé à
la structure est un mouvement d’oscillation harmonique de l’angle d’incidence par exemple, il suffit de
changer la fréquence ou l’amplitude des oscillations pour obtenir la réponse sur un certain intervalle de
fréquence et/ou d’amplitude avec le modèle d’ordre réduit. Pour cela, il suffit simplement de modifier le
vecteur de la vitesse angulaire ωE au second membre du modèle d’ordre réduit.
Les formulations du modèle d’ordre réduit en repère entraîné ont été développées pour un mouve-
ment impliquant une seule rotation et une seule translation du domaine. Une généralisation au cas de
mouvement plus complexes impliquant un nombre quelconque de repère pourrait être établie mais on se
contentera dans le cadre de cette thèse d’un mouvement simple impliquant un seul repère entraîné.

180
6.3. Construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin pour un mouvement de corps rigide
Mouvement de la Nombre de
Formulation Repère Vitesse Expression du modèle d’ordre réduit
structure coefficients
q
X q
X
FEUL-RAUA RA uA Structure fixe ȧi = Ki + Lij aj + Qjik aj ak q + q2 + q3
j=1 j,k=1
Xq X q
ȧi = Ki + Lij aj + Qjik aj ak
j=1 j,k=1
Mouvement de
FALE-REUE RE uE + s0,E · KET + ω E · KER 7q + 7q 2 + q 3
corps rigide q 
i i

X
+ s0,E · LET ER
ij + ω E · Lij aj
j=1
q
X q
X
ȧi = Ki + Lij aj + Qjik aj ak
181

j=1 j,k=1
q 
X 
Mouvement de − 2 ωE · KCor − 2 ω (t) · LCor
aj
FALE-REVE RE vE i E ij 20q +4q 2 +q 3
corps rigide  j=1 
∂s0,E ∂ωE
− + ωE ∧ s0,E · Kcen,1 i − · Kcen,2
i
∂t ∂t
cen,3 cen,4
− (ω E ⊗ ω E ) : Ki + (ω E · ω E ) Ki

Tableau 6.1 : Tableau comparatif des différents modèles d’ordre réduit développés à partir des équations de Navier-Stokes. Pour chacun d’entre eux, on indique dans la première
colonne le nom de la formulation qui repose sur le repère dans lequel sont formulées les équations et sur les composantes de la vitesse utilisées. Ces deux paramètres sont précisés dans
les colonnes suivantes : RA désigne le repère absolu tandis que RE désigne le repère entraîné ; le vecteur uA représente les composantes de la vitesse absolue exprimée dans RA alors
que le vecteur uE représente les composantes de la vitesse absolue exprimée dans RE , et vE est le vecteur contenant les composantes de la vitesse relative exprimée dans RE . Le type
de mouvement pris en compte par chaque modèle d’ordre réduit est donné dans la 4e colonne. Enfin l’expression du modèle d’ordre réduit est fournie dans la 5e colonne et le nombre
de coefficients Nc à évaluer pour déterminer complètement le modèle d’ordre réduit est indiqué dans la dernière colonne.
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

6.4 Calcul des modes POD de l’écoulement transsonique autour d’un


profil NACA0064 oscillant
6.4.1 Simulation numérique de l’écoulement transsonique autour du profil
NACA0064 pour la génération des clichés
Un premier pas vers la modélisation d’un écoulement supportant des phénomènes aéroélastiques
consiste à étudier le mouvement d’une structure mobile supposée rigide placée dans le fluide. Le pro-
blème est encore simplifié en procédant à un couplage faible dans lequel le mouvement de la structure est
imposé. Dans le cas présent on considère un profil NACA0064 bidimensionnel, animé d’un mouvement
forcé de corps rigide. Ce mouvement combine à la fois une translation qui représente l’avancement du pro-
fil3 , et une oscillation autour de la position d’équilibre qui traduit la torsion d’une voilure sous l’effet des
charges aérodynamiques. Le repère  absolu RA est caractérisé par l’origine O et la base orthonormée directe
de vecteurs BA = eA A A
1 , e2 , e3 pointant dans les directions xA , yA et zA . Le repère entraîné RE d’origine
M0 est quant à lui attaché au mouvement de corps rigide du profil et le suit donc dans son mouvement de
translation et de rotation. Le schéma de la figure 6.2 représente le système modélisé.

zE

zA
eE
2

α(t)
M0
α0 eE
1
e
x
x0 M

x xE

eA V∞ d
2
α∞
xA
O eA
1

Figure 6.2 : Schéma du profil NACA64 en mouvement de translation uniforme à la vitesse V∞ et en rotation autour de l’axe
yE d’un angle α(t) par rapport à la direction horizontale xA . Le domaine d’étude est repéré dans la base BE entraînée par le
mouvement de corps rigide, de sorte que la distance relative x
e d’un point M soit constante dans cette base.

Le mouvement de translation est supposé uniforme et s’effectue dans la direction d à la vitesse constante
V∞ dont la valeur est donnée par les conditions expérimentales pour un nombre de Mach à l’infini Ma∞ et
la célérité du son à l’infini c∞ . La direction de translation est éventuellement inclinée d’un angle d’incidence
α∞ , si bien que le vecteur vitesse de translation du repère entraîné est donné par
 
cos α∞
s0,A = V∞ d = V∞  0  . (6.61)
sin α∞
La translation s’effectue donc à vitesse constante ce qui simplifiera en partie les termes induits par le
mouvement d’entraînement dans la formulation des équations du fluide en repère entraîné. En revanche,
un mouvement d’oscillation harmonique instationnaire est imposé au profil. Celui-ci est décrit par l’angle
d’incidence α(t) dont la loi d’évolution est
3 Le mouvement de translation du profil est ici associé au déplacement du repère R par rapport au repère R . Une autre manière
E A
de procéder consiste à reporter le mouvement de translation du profil dans les conditions limites de l’écoulement à l’infini. Dans ce
cas, le vecteur vitesse de translation est nul : s0 = 0.

182
6.4. Calcul des modes POD de l’écoulement autour d’un profil NACA0064 oscillant

α(t) = α0 + αm sin (ωα t). (6.62)

À l’équilibre, le profil est incliné d’un angle α0 et les oscillations d’amplitude maximale αm s’effectuent
autour de cette position d’équilibre à la fréquence fα = ωα /(2π). La période des oscillations forcées est donc
Tα = 1/fα . Bien souvent, la fréquence circulaire ωα se déduit de la pulsation réduite
ωα L0
k= (6.63)
V∞ 2
définie comme paramètre du modèle avec une longueur de référence L0 souvent prise égale à la corde du
profil. La rotation du profil autour de l’axe yE est caractérisée par l’angle α(t). Cependant, l’angle d’inci-
dence est défini pour un profil pointant « vers le haut » pour reprendre la modélisation adoptée dans elsA,
et par conséquent l’angle de rotation entre les bases BE et BA est en réalité α′ = 2π − α. La matrice de pas-
sage associée au mouvement de rotation correspond à l’expression de Ry donnée à l’équation (E.6) pour un
angle α′ . Son expression en fonction de α s’écrit alors
 
cos α(t) 0 sin α(t)
R(α) =  0 1 0 . (6.64)
− sin α(t) 0 cos α(t)

La matrice de la vitesse angulaire ΩE est définie selon l’expression (E.40) par ΩE = RT Ṙ. La dérivée
temporelle Ṙ de la matrice de rotation est
 
− sin α(t) 0 cos α(t)
dR
= α̇(t)  0 0 0 , (6.65)
dt
− cos α(t) 0 − sin α(t)

avec α̇(t) = αm ωα cos (ωα t) selon l’expression (6.62). La matrice de la vitesse angulaire ΩE et le vecteur
vitesse angulaire ω E défini à l’équation (E.40) sont donc donnés respectivement par
   
0 0 −1 0
ΩE = α̇(t)  0 0 0  et ωE = α̇(t) . (6.66)
−1 0 0 0

Pour terminer, il est nécessaire de transformer l’expression (6.61) de la vitesse de translation puisque
celle-ci est exprimée dans la base BA alors que le modèle d’ordre réduit requiert son expression dans BE .
Pour cela, il suffit de projeter l’équation (6.61) sur la matrice de passage R au moyen de la relation de
changement de base s0,E = RT s0,A , ce qui donne
 
cos α∞ cos α(t) − sin α∞ sin α(t)
s0,E = V∞  0 . (6.67)
cos α∞ sin α(t) + sin α∞ cos α(t)

Dans l’exemple traité ici, on supposera que la translation s’effectue horizontalement dans la direction
xA , si bien que α∞ = 0. En outre, l’angle d’incidence moyen α0 sera aussi supposé nul. Par conséquent, les
expressions de la vitesse de translation et de la vitesse angulaire correspondent à
   
cos α(t) 0
s0,E = V∞  0  et ω E = α̇(t) avec α(t) = αm sin (ωα t) . (6.68)
sin α(t) 0

L’amplitude maximale des oscillations est fixée à αm = −1, 01˚ et la pulsation réduite vaut k = 0, 202.
La vitesse à l’infini du fluide est calculée par la relation V∞ = Ma∞ c∞ . Le modèle étudié dépend donc
principalement de trois paramètres qui définissent complètement les degrés de liberté du mouvement du
profil : le nombre Mach de l’écoulement à l’infini Ma∞ , l’amplitude αm des oscillations du profil et leur
fréquence fα .
L’écoulement autour du profil est supposé parfait, compressible et transsonique puisque le nombre de

183
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

Figure 6.3 : Maillage du domaine fluide utilisé pour le calcul de l’écoulement autour du profil NACA0064 rigide en translation
uniforme et animé d’un mouvement d’oscillation en tangage.

Mach pour lequel l’écoulement est simulé est Ma∞ = 0, 796. Par conséquent le champ aérodynamique sup-
portera des ondes de choc dont la position oscille en suivant le mouvement imposé au profil. La résolution
numérique repose sur les équations d’Euler formulées dans le repère entraîné avec les composantes de la
vitesse absolue. Ce choix se justifie par le fait que l’écoulement est ici modélisé dans un domaine infini pour
lequel la formulation en vitesse relative est peu adaptée.
L’exemple traité dans ce chapitre est un cas test développé pour valider la formulation des équations de
Navier-Stokes en repère entraîné dans le logiciel elsA 4 et par conséquent le modèle numérique est relative-
ment léger. Le maillage 2D en C représenté sur la figure 6.3 comporte en effet seulement N = 8 192 cellules
de contrôle mais cela suffit pour capter les oscillations du choc sur la paroi du profil.

MaAbs
1.2
1.175
1.15
1.125
1.1
1.075
1.05
1.025
1
0.975
0.95
0.925
0.9
0.875
0.85
0.825
0.8

Figure 6.4 : Isolignes du nombre de Mach du champ aérodynamique stationnaire autour du profil NACA0064.

La résolution des équations effectuée par elsA fournit les champs aérodynamiques pour les variables
conservatives. La discrétisation repose sur le schéma de Jameson [120] et, lorsqu’une simulation instation-
naire est pratiquée, l’intégration en temps des équations est menée avec un schéma de Runge-Kutta d’ordre
4. Avant d’effectuer une simulation instationnaire en imposant un mouvement au profil, le champ station-
naire de l’écoulement est calculé. Les isolignes de Mach représentées sur la figure 6.4 indiquent clairement
la présence d’un choc symétrique. La vitesse de l’écoulement est légèrement subsonique en amont du profil
4 Les détails du modèle et le script de lancement de la simulation sont disponibles dans la section naca-rigid sur la page

http://elsa.onera.fr/elsA/validation/valid.html.

184
6.4. Calcul des modes POD de l’écoulement autour d’un profil NACA0064 oscillant

(Ma∞ = 0, 796 pour l’écoulement à l’infini) puis des zones de compression se forment et donnent naissance
à un choc à environ 54% de la corde du profil. Le caractère symétrique des discontinuités sur l’intrados et
l’extrados s’explique par le fait que le profil se déplace à l’horizontale (α∞ = 0) et que l’angle d’incidence
moyen est nul (α0 = 0).

(a) t0 (b) t0 + Tα /8 (c) t0 + Tα /4

(d) t0 + 3Tα /8 (e) t0 + Tα /2 (f) t0 + 5Tα /8

(g) t0 + 3Tα /4 (h) t0 + 7Tα /8 (i) t0 + Tα

Figure 6.5 : Clichés du champ de pression sur une période d’oscillation du profil NACA0064. La position des chocs sur l’intrados
et l’extrados oscille périodiquement en suivant le mouvement de rotation imposé au profil.

Une simulation instationnaire est ensuite réalisée en imposant au profil le mouvement de corps rigide
caractérisé par les vitesses données à l’équation (6.68). Le champ aérodynamique est initialisé avec la solu-
tion stationnaire. La mise en mouvement du profil provoque alors une oscillation périodique de la position
du choc sur la paroi à la fréquence fα = 1/Tα . L’évolution du champ de pression enregistré à différents
instants au cours d’une période d’oscillation est donnée sur la figure 6.5. À l’instant t0 , l’angle d’incidence
atteint la valeur maximale α(t0 ) = αm et le choc sur l’extrados est positionné vers l’arrière du profil à en-
viron 58% de la corde, tandis que le choc sur l’intrados se situe vers le bord d’attaque à environ 50% de la
corde. Lorsque l’angle d’incidence diminue le choc de l’extrados se déplace vers le bord d’attaque alors que
le choc sur l’intrados suit la tendance inverse. À t = t0 + Tα /4, l’angle d’incidence devient nul et le pro-
fil est donc orienté à l’horizontale ; le champ aérodynamique se confond alors avec le champ stationnaire
puisque la configuration géométrique est identique. Le processus se poursuit et le choc sur l’intrados atteint
sa position maximale à t = t0 + Tα /2. Le même processus se répète ensuite en sens inverse au cours de la
demi-période restante jusqu’à retrouver le même champ aérodynamique à t0 + Tα .

185
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

Enfin, les graphiques de la figure 6.6 montrent les courbes de Lissajous des coefficients aérodynamiques
Cx et Cz . Sur ces courbes, les efforts aérodynamiques dans les directions xE et zE sont représentés en fonc-
tion de l’excitation harmonique paramétrée par l’angle d’incidence α(t) défini à l’équation (6.68). On peut
noter pour commencer que les forces sont principalement orientées dans la direction verticale, ce qui s’ex-
plique d’une part puisque l’amplitude maximale de l’angle d’incidence est très faible et d’autre part parce
que le fluide est supposé parfait. Ces courbes permettent par ailleurs d’interpréter les échanges d’énergie
qui s’effectuent entre le fluide et la structure en fonction du sens dans lequel est parcouru le cycle. C’est
la raison pour laquelle le sens de rotation est indiqué à chaque fois par des flèches. Lorsque le cycle est
parcouru dans le sens trigonométrique, le système tend à être amorti si l’excitation n’est pas entretenue
puisque les efforts aérodynamiques sont en retard sur l’excitation. C’est le cas notamment pour les efforts
dans la direction zE , ce qui est logique puisque dans l’exemple traité ici le mouvement est imposé à la struc-
ture qui est donc à l’origine des efforts aérodynamiques. À l’inverse, si le cycle est parcouru dans le sens
horaire, les efforts aérodynamiques sont en avance sur l’excitation ce qui signifie que les efforts aérodyna-
miques peuvent provoquer la mise en mouvement de la structure. Par conséquent une amplification du
mouvement conduisant à la divergence est possible. La courbe de Lissajous du Cx est plus complexe : elle
laisse apparaître deux lobes qui sont parcourus chacun dans un sens différent. Lorsque l’angle d’incidence
est positif, les forces tendent à être amorties puisque le cycle est parcouru dans le sens trigonométrique,
tandis que lorsque l’angle d’incidence devient négatif, une amplification des forces est possible.

−3
x 10
3
0.15

2.8 0.1

2.6 0.05

2.4 0
Cx

Cz

2.2 −0.05

2 −0.1

1.8 −0.15

1.6 −0.2
−1.5 −1 −0.5 0 0.5 1 1.5 −1.5 −1 −0.5 0 0.5 1 1.5
α (t) α (t)

Figure 6.6 : Courbes de Lissajous des coefficients aérodynamiques Cx et Cz associés au mouvement d’oscillation harmonique
imposé au profil NACA0064 en tangage.

Les résultats de cette simulation numérique seront exploités par la suite pour former la base des modes
POD nécessaire pour la construction des modèles d’ordre réduit. Avant de présenter les résultats des dif-
férents modèles d’ordre réduit, on précise dans le paragraphe suivant les expressions des coefficients au-
tonomes pour les équations d’Euler puis des coefficients non-autonomes pour le mouvement particulier
traité ici.

6.4.2 Détail des coefficients du modèle d’ordre réduit pour les équations d’Euler dans
un domaine en translation uniforme et en rotation simple

Au paragraphe 6.3.1, un modèle d’ordre réduit POD-Galerkin des équations de Navier-Stokes formu-
lées dans le repère entraîné avec les composantes de la vitesse absolue avait été développé. Ce modèle
d’ordre réduit est légèrement simplifié dans le cas présent puisque l’écoulement étudié est modélisé par les
équations d’Euler. Celles-ci se déduisent des équations de Navier-Stokes en éliminant les termes diffusifs
associés aux processus visqueux. Les équations du fluide conservent la forme d’un système polynomial
quadratique identique à celui de l’équation (6.12), avec les termes diffusifs QD (q, q) en moins. Les coeffi-
cients convectifs QC sont encore donnés par l’équation (6.13). L’expression (6.14) du modèle d’ordre réduit
est donc toujours valable, mais les coefficients autonomes Ki , Lij et Qijk sont à présent définis par

186
6.4. Calcul des modes POD de l’écoulement autour d’un profil NACA0064 oscillant
D E
Ki = KiC = QC (q, q), ϕ(i) ,
D     E
Lij = LC
ij = Q
C
q, ϕ(j) + QC ϕ(j) , q , ϕ(i) , (6.69)
D   E
(j) (k) (i)
Qijk = QCijk = Q C
ϕ , ϕ , ϕ .

Les coefficients non-autonomes KiE (t) et LE ij (t) décomposés ensuite aux équations (6.28) et (6.27)
peuvent aussi être simplifiés puisque le mouvement consiste dans cet exemple en une translation à vi-
tesse uniforme et une rotation autour de l’axe yE . En effet, les expressions de la vitesse de translation et
de la vitesse angulaire fournies à l’équation (6.68) au début de ce paragraphe indiquent que seules trois
composantes sont non nulles sur les six permettant de décrire le mouvement des deux degrés de liberté.
Par conséquent, les produits scalaires dans les expressions (6.28) et (6.27) n’impliquent que ces trois com-
posantes et les coefficients non-autonomes s’écrivent donc
 ET   ET     
Ki,x Lij,x 0 0
KET
i =  0 , LET
ij =
 0 , KER
i = Ki,y
ER 
et LER  ER 
ij = Lij,y . (6.70)
ET ET
Ki,z Lij,z 0 0

Le nombre de coefficients non-autonomes à évaluer n’est donc plus Ncna = 6q + 6q 2 mais seulement
Ncna = 3q + 3q 2 : il y a 2q coefficients constants d’entraînement en translation à calculer et q coefficients
pour la rotation, puis 2q 2 pour les coefficients linéaires d’entraînement en translation et q 2 pour la rotation.

6.4.3 Calcul de la base des modes POD de l’écoulement autour du profil NACA0064
rigide en tangage
Dans un premier temps, un ensemble de clichés est extrait de la simulation instationnaire effectuée avec
elsA sur l’intervalle de temps Ie = [t0 ; t0 + Te ]. La base des modes POD est alors calculée avec la méthode
des clichés pour un ensemble de M = 16, 32, 64, 96 et 192 clichés uniformément répartis sur une durée
d’échantillonnage Te ≈ np Tα couvrant environ une période et demi du mouvement d’oscillation forcé
(np ≈ 1, 5). Un deuxième ensemble de M = 120 clichés est sélectionné sur np ≈ 2, 5 périodes d’oscillation
afin de vérifier si le spectre des valeurs propres reste proche lorsque la durée d’échantillonnage est allongée.
Le résultat est représenté sur la figure 6.7 où le pourcentage d’énergie captée par chaque valeur propre est
tracé pour différentes valeurs du nombre de clichés.

2
10
2
10 M=16
0
10 M=32
0
10 M=64
−2
10 M=96
λi / Σi λi (%)

−2
10 M=120
−4
10
−4
10
−6
10
−6
10
−8 0 10 20
10 i
−10
10
0 20 40 60 80 100 120
i

Figure 6.7 : Spectre des valeurs propres associées aux modes POD aérodynamiques de l’écoulement autour du profil NACA0064
animé d’un mouvement de corps rigide. Le spectre est tracé pour différentes valeurs M du nombre de clichés échantillonnés sur
np ≈ 1, 5 période, sauf pour M = 120 où les clichés sont prélevés sur np ≈ 2, 5 périodes. L’encadré correspond au zoom du spectre
sur les 20 premières valeurs propres.

La durée d’échantillonnage conduit à des spectres relativement proches lorsque np ≈ 1, 5 et 2, 5 et que


le nombre de clichés employés est du même ordre de grandeur. Ceci s’explique par le fait que l’écoulement

187
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

considéré est encore une fois périodique et que l’allongement de la durée d’échantillonnage n’apporte pas
d’information supplémentaire au delà d’une période complète d’oscillation Tα , comme on l’avait déjà ob-
servé dans l’annexe C.1. Le nombre M de clichés influe toutefois légèrement sur la forme du spectre, en
particulier sur les dernières valeurs propres. Au-delà de M = 32 clichés, les 20 premières valeurs propres
sont pratiquement confondues et par conséquent on prendra pour la suite des ensembles de clichés com-
portant au moins M = 32 éléments. Dans cet exemple, le spectre décroît de manière moins significative
que pour l’écoulement autour du profil NACA0012 en forte incidence traité au chapitre 5. En particulier,
on n’observe pas de coupure nette dans la pente du spectre, qui permettrait de décider du nombre de
modes POD minimal à conserver dans la base de projection. Toutefois, le zoom sur les 20 premières va-
leurs propres tracé sur la figure 6.7 met en évidence une légère discontinuité de la pente au niveau de la
12e valeur propre. Pour la suite, on peut considérer qu’une dizaine de modes POD devrait encore suffire
pour reproduire correctement l’écoulement puisque le pourcentage d’énergie captée par les q = 10 premiers
modes POD lorsque le nombre de clichés employés est M = 64 s’élève à ηq = 99, 99%.
(j)
La figure 6.8 donne l’allure de la contribution en pression ϕp des six premiers modes POD de l’écou-
lement autour du profil NACA0064. Comme pour les modes POD de l’écoulement autour du profil
NACA0012, les modes POD peuvent être regroupés par paires mais le classement ne s’effectue pas di-
rectement en fonction de l’indice des modes : sur les six premiers modes, on peut distinguer les paires (1-2),
(3-6) et (4-5). Les modes obtenus font clairement apparaître des discontinuités représentatives du choc gé-
néré sur l’intrados et l’extrados. Les deux premiers modes POD mettent en évidence une seule zone de
discontinuité asymétrique qui s’étend de part et d’autre du profil avec un signe opposé côté intrados et
côté extrados. Les modes POD suivant font apparaître des structures de taille inférieure présentant encore
des discontinuités. Les paires de modes (3-6) et (4-5) font apparaître respectivement deux et trois zones de
discontinuité où les signes alternent. Les modes suivants peuvent encore être regroupés mais l’association
des modes entre eux devient de plus en plus difficile puisque les structures ont des tailles de plus en plus
faibles et relativement proches les unes des autres.

POM1 POM3 POM5


1 3 3
0.9 2.75 2.7
0.8 2.5 2.4
0.7 2.25 2.1
0.6 2 1.8
0.5 1.75 1.5
0.4 1.5 1.2
0.3 1.25 0.9
0.2 1 0.6
0.1 0.75 0.3
0 0.5 0
-0.1 0.25 -0.3
-0.2 0 -0.6
-0.3 -0.25 -0.9
-0.4 -0.5 -1.2
-0.5 -0.75 -1.5
-0.6 -1 -1.8
-0.7 -1.25 -2.1
-0.8 -1.5 -2.4
-0.9 -1.75 -2.7
-1 -2 -3

POM2 POM6 POM4


0.3 2 2.5
0.27 1.8 2.35
0.24 1.6 2.2
0.21 1.4 2.05
0.18 1.2 1.9
0.15 1 1.75
0.12 0.8 1.6
0.09 0.6 1.45
0.06 0.4 1.3
0.03 0.2 1.15
0 0 1
-0.03 -0.2 0.85
-0.06 -0.4 0.7
-0.09 -0.6 0.55
-0.12 -0.8 0.4
-0.15 -1 0.25
-0.18 -1.2 0.1
-0.21 -1.4 -0.05
-0.24 -1.6 -0.2
-0.27 -1.8 -0.35
-0.3 -2 -0.5

Figure 6.8 : Allure des six premiers modes POD de pression calculés à partir de M = 64 clichés répartis uniformément sur environ
une période et demi d’oscillation du mouvement harmonique imposé au profil NACA0064 en tangage. Les modes sont regroupés
par paires dans chaque colonne en fonction des structures mises en évidence.

Le phénomène d’oscillation du choc doit pouvoir être reproduit à l’aide de la base POD en conservant
assez de modes pour que la position de l’onde de choc s’écrive correctement comme une combinaison li-
néaire des modes. Dans un premier temps, on cherche à vérifier ceci à un instant donné, choisi de manière
arbitraire comme l’instant final tM = t0 + Te de la fenêtre d’échantillonnage. Le champ de pression
Pq corres-
(M) (j)
pondant est représenté sur la figure 6.9(a) à titre indicatif. Le champ de pression pr (tM ) = j=1 aj ϕp

188
6.4. Calcul des modes POD de l’écoulement autour d’un profil NACA0064 oscillant

(M)
est ensuite reconstruit à l’aide des amplitudes modales aj obtenues par projection du champ de pression
(j)
sur une base de q modes POD ϕp de la base de projection. L’erreur relative de reconstruction commise en
conservant un nombre croissant de modes POD dans la base de projection est représentée sur les figures
6.9(b) à (f). On constate bien une diminution de l’erreur lorsque le nombre q de modes POD conservés dans
la base de projection augmente. L’erreur relative maximale qui est de l’ordre de 6, 5% lorsque seuls deux
modes POD sont conservés dans la base de projection chute à seulement 0, 46% lorsque la base POD est
constituée de 10 modes. Comme pour l’exemple du profil NACA0012 en forte incidence, les zones où l’er-
reur est importante correspondent bien aux modes qui ont été tronqués dans la base de projection et sont
par conséquent atténunées lorsque les modes POD suivants sont introduits dans la base de projection.

p p p
1.05 6.5 5.4
1 6.175 5.13
0.95 5.85 4.86
0.9 5.525 4.59
0.85 5.2 4.32
0.8 4.875 4.05
0.75 4.55 3.78
0.7 4.225 3.51
0.65 3.9 3.24
0.6 3.575 2.97
0.55 3.25 2.7
0.5 2.925 2.43
0.45 2.6 2.16
2.275 1.89
1.95 1.62
1.625 1.35
1.3 1.08
0.975 0.81
0.65 0.54
0.325 0.27
0 0

(a) Champ de pression original (b) q = 2 (c) q = 4

p p p
1.9 0.44 0.46
1.805 0.418 0.437
1.71 0.396 0.414
1.615 0.374 0.391
1.52 0.352 0.368
1.425 0.33 0.345
1.33 0.308 0.322
1.235 0.286 0.299
1.14 0.264 0.276
1.045 0.242 0.253
0.95 0.22 0.23
0.855 0.198 0.207
0.76 0.176 0.184
0.665 0.154 0.161
0.57 0.132 0.138
0.475 0.11 0.115
0.38 0.088 0.092
0.285 0.066 0.069
0.19 0.044 0.046
0.095 0.022 0.023
0 0 0

(d) q = 6 (e) q = 8 (f) q = 10

Figure 6.9 : La figure (a) représente le champ de pression à l’instant tM = t0 + Te qui est ensuite reconstruit au moyen de la
POD. L’erreur relative de reconstruction entre le champ de pression représenté en (a) et le champ de pression reconstruit avec un
nombre croissant q de modes POD dans la base de projection est représentée sur les figures (b) à (f).

Les erreurs représentées sur les figures précédentes sont établies pour un instant donné au cours de la
fenêtre d’échantillonnage et fournissent une description spatiale des zones où se concentrent les défauts
de reconstruction. D’une manière plus générale, on définit une erreur de reconstruction spatio-temporelle
globale pour chaque couple de paramètres (M, q) : l’erreur spatiale globale à chaque instant tm est définie
par la norme L2 avec la relation (5.51), puis l’erreur moyenne sur la fenêtre d’échantillonnage est obte-
nue par application de l’opérateur de moyenne temporelle E [·] à l’erreur précédente. Le graphique de la
figure 6.10 résume le comportement de l’erreur en fonction du nombre M de clichés et du nombre q de
modes POD conservés dans la base de projection. L’erreur se comporte de la même manière que pour le
profil NACA0012 : on observe une décroissance monotone de l’erreur lorsque le nombre de modes POD
augmente, mais le nombre de clichés prélevés lors de l’échantillonnage n’a pratiquement pas d’influence
sur l’erreur de reconstruction globale. Il faut cependant remarquer que l’erreur décroît cette fois de façon
moins accentuée que pour le profil NACA0012. Ceci illustre le fait que l’écoulement est plus complexe et
corrobore l’allure du spectre des valeurs propres tracé sur la figure 6.7 pour lequel on avait signalé que la
pente était moins prononcée que pour l’exemple du profil NACA0012.
Bien que l’écoulement semble cette fois plus complexe, il semble d’après les résultats précédents que la
réponse du système puisse être reproduite — au moins globalement — avec un faible nombre de modes
POD puisque les premiers modes permettent déjà de représenter le phénomène d’oscillation du choc. Si
l’objectif était de reproduire de façon très précise la position du choc, un nombre important de modes serait

189
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

−1

−1.5

−2

log(E(εL2))
−2.5

−3

−3.5

−4
200
0
150
5
100
10
50 15
0 20
q
M

ˆ ˜
Figure 6.10 : Convergence de l’erreur spatio-temporelle globale E εL2 ,q en fonction du nombre M de clichés et du nombre q
de modes POD contenus dans la base de projection pour l’écoulement autour du profil NACA0064. L’erreur est tracée en échelle
logarithmique pour mettre en évidence la décroissance.

certainement nécessaire, mais ici, c’est principalement la résultante des efforts sur la paroi du profil qui
importe puisque le solide est supposé rigide. C’est la raison pour laquelle on se contentera par la suite
d’une dizaine de modes POD dans la base de projection. Le graphique de la figure 6.11 permet de vérifier
que l’erreur relative sur le coefficient de portance est très faible sur la fenêtre d’échantillonnage, dès lors
qu’une dizaine de modes POD a été conservée dans la base de projection.

45
q=2
40 q=4
35 q=6
q=8
30 q=10
εC (%)

25
L

20

15

10

0
0 0.5 1 1.5
t*

Figure 6.11 : Erreur relative de reconstruction du coefficient de portance du profil NACA0064 oscillant en fonction du nombre q
de modes POD dans la base de projection. L’erreur relative est tracée en fonction du temps rendu adimensionnel avec la période
d’oscillation Tα pour chaque cliché de la fenêtre d’échantillonnage.

Dans ce premier paragraphe, l’allure des modes POD a été présentée et les structures spatiales mises en
évidence permettent de caractériser l’oscillation des chocs sur la paroi du profil. Les erreurs de reconstruc-
tion calculées à l’aide des amplitudes modales issues de la projection des modes POD sur les clichés ont
permis de montrer qu’un faible nombre de modes POD devrait ici encore suffire pour reproduire l’écoule-
ment, bien que la décroissance du spectre des valeurs propres indique que celui-ci semble plus riche. Avec
seulement une dizaine de modes POD, le coefficient de portance est très bien reproduit et par conséquent on
peut espérer que la réponse produite par l’intégration en temps du modèle d’ordre réduit sera acceptable.

190
6.5. Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0064

6.5 Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil


NACA0064
Le modèle d’ordre réduit POD-Galerkin est à présent employé afin de reproduire le champ aérodyna-
mique autour du profil, et en particulier le coefficient de portance généré. Les équations (6.14) sont donc in-
(m)
tégrées en temps et les amplitudes modales ai (t) obtenues sont comparées aux amplitudes de référence ai
issues de la projection sur les modes POD ϕ des clichés connus aux instants tm . Le modèle d’ordre réduit
(i)

souffre cependant d’un manque de stabilité encore plus prononcé que dans l’exemple du profil NACA0012
traité au chapitre 5. En effet, l’intégration en temps conduit à une réponse divergente bien avant d’atteindre
la fin de la fenêtre d’échantillonnage avec M = 64 clichés échantillonnés sur np ≈ 1, 5 périodes et q = 10
modes POD. L’augmentation du nombre q de modes POD compris dans l’intervalle J1; 20K n’y change rien.
Aucune amélioration significative n’est non plus obtenue avec l’augmentation du nombre de clichés em-
ployés pour calculer les modes POD et qui s’élève à M = 192 ou M = 120 avec dans ce dernier cas un
échantillonnage sur np ≈ 2, 5 périodes.
L’extrême instabilité du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin peut s’expliquer par le fait que le fluide a
été supposé parfait et qu’il n’existe donc dans les équations continues aucune source de dissipation permet-
tant de stabiliser la réponse du modèle d’ordre réduit. Dans la pratique, la résolution des équations d’Euler
ou de Navier-Stokes pour les écoulements compressibles requiert l’introduction d’une certaine quantité de
dissipation artificielle afin de stabiliser la réponse (voir l’annexe E.3.1.2 p.264). Cette viscosité supplémen-
taire associée à la discrétisation des équations est d’origine purement numérique [24, 157] mais le système
d’équations la gouvernant ne se prête pas à une projection sur une base modale puisqu’il ne s’agit pas
d’un système d’équations aux dérivées partielles polynomiales. Aucune modélisation de cette quantité (ar-
tificielle) n’a donc été introduite dans le modèle d’ordre réduit. Par ailleurs, l’hypothèse d’une dissipation
(physique) constante et égale à la viscosité du fluide au repos qui s’était révélée acceptable dans l’exemple
de l’écoulement visqueux et faiblement compressible autour du profil NACA0012 n’a plus lieu d’être ici
puisque le fluide est parfait. Par conséquent, lorsque les équations d’Euler sont employées pour un écoule-
ment transsonique tel que celui traité dans cette partie, l’absence totale de dissipation semble compromettre
la stabilité du modèle d’ordre réduit, même à très court terme. Il devient donc absolument indispensable
de corriger le modèle d’ordre réduit au moyen de techniques similaires à celles mises en œuvre dans le
chapitre 5 pour tenter d’améliorer la réponse.

6.5.1 Réponse du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin corrigé


6.5.1.1 Correction de Cazemier et al. du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin
On considère tout d’abord la méthode de correction de Cazemier et al. [42] à l’aide de laquelle un opéra-
teur d’amortissement linéaire diagonal est ajouté dans les équations du modèle d’ordre réduit. Le principe
rappelé au paragraphe 5.3.2.2 consiste à déterminer les coefficients d’amortissement de manière à ce que
la moyenne du taux de variation de l’énergie dans la direction de chaque mode POD soit conservée. Dans
le cas d’un système dynamique autonome, les coefficients d’amortissement sont donnés par la relation
(5.33) mais il convient de modifier ici l’expression pour tenir compte des termes non-autonomes associés
au mouvement du domaine. En suivant le même procédé que pour le système autonome, les coefficients
d’amortissement s’écrivent
 
q q
1 X 1   X 
Dii = − Qijk E(ai aj ak ) − Lii − E
E Ki (tm ) ai + E Lij (tm ) ai aj .
E
(6.71)
λi λi j=1
j,k=1

L’expression des termes de correction fait à présent apparaître les contributions KiE (tm ) et LE
ij (tm ) rela-
tives au mouvement imposé. Ces contributions instationnaires sont évaluées au moyen des relations (6.28)
et (6.27) à chaque instant tm où les clichés sont extraits.
Utilisée telle quelle, la correction précédente ne permet pas d’améliorer la réponse du modèle d’ordre
réduit de manière significative avec M = 64 et q = 10. Pour améliorer significativement la stabilité à
long terme, on peut forcer artificiellement l’amortissement en multipliant les coefficients de la correction
de Cazemier et al. par un facteur de pondération. Ce facteur peut être identique pour chaque coefficient de

191
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

la diagonale de l’opérateur D mais il est préférable de fournir un facteur différent pour chaque coefficient.
Dans les deux cas, la réponse peut être stabilisée, au moins sur la durée d’échantillonnage des clichés.
−3
x 10
0.08 0.01 3

2
0.06
0.005 1
0.04
0

0
0.02 −1
a2

a6
a4
0 −2
−0.005
−3
−0.02
−4
−0.01
−0.04
−5

−0.06 −0.015 −6
−0.1 −0.08 −0.06 −0.04 −0.02 0 0.02 0.04 0.06 0.08 −0.015 −0.01 −0.005 0 0.005 0.01 0.015 0.02 −8 −6 −4 −2 0 2 4 6
a1 a3 a5 −3
x 10
−3 −3
x 10 x 10
1.5 1.5 500

1 450

0.5 1 400

0 350

−0.5 0.5 300

εa (%)
a10
a8

−1 250

−1.5 0 200

−2 150

−2.5 −0.5 100

−3 50

−3.5 −1 0
−3 −2 −1 0 1 2 3 4 5 6 7 −20 −15 −10 −5 0 5 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
a7 −3
x 10
a9 −3
x 10 i

Figure 6.12 : Comparaison des portraits de phase des amplitudes modales calculées par intégration du modèle d’ordre réduit corrigé
par la méthode de Cazemier et al. sur la fenêtre d’échantillonnage des clichés (•) et des amplitudes modales de référence issues de la
projection des clichés sur les modes POD (◦). La réponse du modèle d’ordre réduit à long terme tracée en traits plein (—) montre la
convergence de la solution vers un cycle limite. Le dernier graphique représente l’erreur εaj en norme L2 sur l’intervalle de temps
Ie par rapport aux amplitudes modales de référence.

La réponse obtenue est illustrée par les portraits de phase des amplitudes modales tracés sur la fi-
gure 6.12 lorsque les termes d’amortissement introduits sont pondérés par un facteur variant linéairement
en fonction de l’indice i correspondant à l’équation gouvernant l’amplitude ai . Sur l’intervalle de temps
Ie = [t0 ; t0 + Te ], les erreurs sont relativement importantes : l’erreur globale sur les amplitudes modales
définie à l’équation (5.53) atteint εA = 45, 0%. Le détail des erreurs pour chaque amplitude modale est
donné sur le dernier graphique de la figure 6.12. On observe en particulier que la réponse de la neuvième
amplitude est complètement erronée. Les erreurs pour les premières amplitudes modales restent quant à
elles raisonnables, si bien que la réponse pour des grandeurs macroscopiques telles que le coefficient de
portance CL est passable. Ainsi, l’erreur moyenne en temps εCL au sens de la norme L2 définie par (5.52)
s’élève à εCL = 33, 7%.
Le portrait de phase du coefficient de portance CL est tracé sur la figure 6.13 en fonction de l’angle d’in-
cidence α(t) imposé au profil. Sur l’intervalle Ie , le cycle limite n’est pas exactement reproduit mais l’orien-
tation et l’amplitude du cycle sont qualitativement satisfaisants. Toutefois, lorsque l’intégration en temps
du modèle d’ordre réduit est poursuivie, les amplitudes modales sont beaucoup trop amorties et le coef-
ficient de portance converge vers un cycle limite beaucoup trop incliné et aplati. Le comportement à long
terme du modèle d’ordre réduit est évalué au moyen de diverses erreurs. La première porte sur la fréquence
d’oscillation εfα qui est relativement faible ici : εfα = 0, 40%. Ensuite, on définit des erreurs relatives pour le
maximum et le minimum atteints par le coefficient de portance (εCL ,max = 53, 7% et εCL ,min = 88, 9%) ainsi
que l’erreur sur l’amplitude crête-à-crête (ε∆cc = 69, 9%). Finalement l’évolution à long terme des oscilla-
tions est caractérisée par le décrément logarithmique moyen qui vaut ici δlog = 0, 111. Celui-ci est calculé à
partir de la moyenne des décréments calculés pour les maxima du coefficient de portance sur les dernières
oscillations par la relation
nX
max
1 CL,max (i)
δlog = δlog (i) avec δlog (i) = log10 . (6.72)
nmax i=1
CL,max (i + 1)

192
6.5. Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0064

0.15

0.1

0.05

CL (−)
0

−0.05

−0.1

−1.5 −1 −0.5 0 0.5 1 1.5


α (t)

Figure 6.13 : Comparaison sur l’intervalle de temps Ie du portait de phase du coefficient de portance (•) calculé avec le modèle
d’ordre réduit POD-Galerkin corrigé par la méthode de Cazemier et al. avec le coefficient de portance de référence (◦). La trajectoire
du coefficient de portance à long terme tracée en trait plein (—) converge vers un cycle limite erroné.

Le décrément caractérise la tendance de la réponse à la divergence ou à l’amortissement. Dans le cas pré-


sent, le décrément logarithmique doit être nul puisque le mouvement d’oscillation est imposé au profil, et
par conséquent les oscillations sont nécessairement entretenues. Au contraire, une valeur négative indique
une tendance à la divergence de la réponse, tandis qu’une valeur positive est le signe d’un amortissement
conduisant éventuellement à la disparition du mouvement.
En conclusion, la correction de Cazemier et al. permet de stabiliser le modèle d’ordre réduit en intro-
duisant un surplus d’amortissement, mais le comportement à long terme du modèle d’ordre réduit n’est
pas satisfaisant. Il semble que l’introduction d’un amortissement linéaire diagonal ne soit pas suffisante,
puisque la réponse du modèle d’ordre réduit est soit divergente, soit trop amortie en fonction de la valeur
attribuée au facteur multiplicatif introduit pour pondérer la correction.
La correction n’est pas plus efficace pour d’autres valeurs de M et q. En particulier, lorsqu’un nombre
plus important de modes POD est conservé dans la base de projection, la valeur du facteur multiplicatif
doit aussi être augmenté pour éviter la divergence. Dans ce qui suit, on a donc recours aux méthodes de
calibrage présentées au paragraphe 5.3.3.1 afin que la correction introduite puisse agir sur l’ensemble des
termes du modèle d’ordre réduit et non plus seulement sur l’amortissement linéaire diagonal.

6.5.1.2 Calibrage des coefficients du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin


Les résultats du paragraphe 5.5.3 concernant le calibrage du modèle d’ordre réduit pour l’exemple du
profil NACA0012 conduisent à retenir la formulation de Floquet pour la fonctionnelle à minimiser et à em-
ployer l’algorithme de Levenberg-Marquardt pour chercher les coefficients optimaux.
Plusieurs difficultés apparaissent avec ce nouvel exemple. La première provient du fait que le modèle
d’ordre réduit est extrêmement instable. Par conséquent, il n’est pas possible d’évaluer correctement la
fonctionnelle à minimiser puisque celle-ci requiert les amplitudes modales calculées sur la durée d’échan-
tillonnage Ie . Or au cours de l’intégration en temps du modèle d’ordre réduit non corrigé, la solution di-
verge bien avant d’atteindre l’instant final t0 + Te . La solution adoptée ici consiste donc à partir du modèle
d’ordre réduit déjà corrigé avec la méthode de Cazemier et al. [42] de façon à disposer des amplitudes
modales sur l’ensemble de l’intervalle de temps d’échantillonnage. Lorsque les coefficients à calibrer sont
corrigés progressivement au fil des itérations de l’algorithme d’optimisation, il est possible que l’intégra-
tion en temps du modèle d’ordre réduit diverge encore, empêchant ainsi d’évaluer la fonctionnelle sur
l’intervalle de temps Ie complet. L’optimisation est toutefois poursuivie en évaluant la fonctionnelle sur
l’intervalle de temps sur lequel la simulation est stable, et en introduisant un facteur de pénalité important
pour signaler la divergence avec le nouveau jeu de paramètres proposé par l’algorithme d’optimisation.
La seconde difficulté concerne le choix des paramètres à calibrer. Dans l’exemple du profil NACA0012, un

193
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

choix naturel consistait à calibrer le nombre de Reynolds en le modifiant pour chaque équation du modèle
d’ordre réduit, de manière à introduire le taux de dissipation adéquat. Dans le cas présent, puisque le fluide
est supposé parfait, cette solution est inapplicable. Il faut donc modifier directement certains coefficients du
modèle d’ordre réduit, de manière à stabiliser la réponse à long terme. Le choix des coefficients est rendu
encore plus difficile par le fait que le modèle d’ordre réduit contient cette fois Ncna = 6q + 6q 2 coefficients
supplémentaires liés au mouvement imposé au domaine.

Identifiant Coefficients pc
KdL Ki , Li,i 2q
K3dL Ki , Li,i , Li,i+1 , Li,i−1 2q + 2(q − 1)
KdL_E Ki , Li,i , s0,E,i , ω E,i 2q + 6
K3dL_E Ki , Li,i , Li,i+1 , Li,i−1 , s0,E,i , ω E,i 2q + 2(q − 1) + 6

Tableau 6.2 : Résumé des jeux de coefficients calibrés par minimisation de la fonctionnelle d’erreur de la formulation de Floquet. La
première colonne indique le nom du jeu de paramètres, la seconde les coefficients calibrés et la dernière le nombre pc de coefficients
calibrés.

Le tableau 6.2 résume les différents jeux de paramètres qui sont regroupés dans le vecteur w ∈ Rpc
intervenant dans la définition de la fonctionnelle du problème d’optimisation. Les deux premiers jeux de
paramètres KdL et K3dL permettent de calibrer une partie des coefficients autonomes du modèle d’ordre
réduit. L’ensemble des coefficients constants est corrigé pour pallier les erreurs relatives à la partie moyenne
de la réponse du système. Avec la correction KdL, seuls les coefficients linéaires de la diagonale principale
sont modifiés. Pour améliorer la reproduction de l’amortissement, la correction K3dL a été introduite pour
calibrer les termes de couplage linéaires intervenant sur les deux diagonales voisines de la diagonale prin-
cipale dans l’opérateur linéaire L. Enfin, les jeux de paramètres KdL_E et K3dL_E ont été introduits afin de
corriger les termes sources non-autonomes. Plutôt que de corriger directement chacun des Ncna coefficients
supplémentaires, on a choisi ici d’agir sur le vecteur vitesse de translation s0,E et le vecteur vitesse angu-
laire ω E , ce qui permet de réduire à 6 le nombre de paramètres. Pour le mouvement particulier imposé, ce
dernier type de calibrage n’introduit en réalité que 3 paramètres supplémentaires puisque le mouvement
s’effectue dans le plan.
Les réponses du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin dont certains coefficients ont été corrigés sont éva-
luées par rapport à la réponse de référence dans le tableau 6.3. Les différents jeux de coefficients présentés
dans le tableau 6.2 sont utilisés afin de corriger le modèle d’ordre réduit construit dans un premier temps
avec M = 64 clichés prélevés sur np ≈ 1, 5 période d’oscillation du système. La base de projection contient
à chaque fois q = 10 modes POD. La réponse est caractérisée par plusieurs types d’erreurs, relatives à la
réponse à court terme (εA , εCL ) ou à long terme (εfα , δlog ). À chaque fois, le temps de calcul nécessaire pour
l’optimisation des coefficients est indiqué dans l’avant dernière colonne en secondes. Le portrait de phase
du coefficient de portance tracé en fonction de l’angle d’incidence α(t) est donné dans la dernière colonne.
D’une manière générale, le calibrage des coefficients du modèle d’ordre réduit permet d’améliorer no-
tablement la réponse à court terme : parmi les quatre jeux de paramètres testés, l’erreur sur le coefficient de
portance varie entre 5, 56% et 19, 3%, au lieu de 33, 7% avec la correction de Cazemier et al. L’erreur sur les
amplitudes modales est quant à elle aussi raisonnable. L’augmentation du nombre de paramètres calibrés
n’est pas toujours synonyme d’une amélioration de l’erreur de reconstruction du modèle d’ordre réduit :
en effet, l’erreur augmente considérablement entre les calibrages KdL et K3dL, alors que le nombre de co-
efficients calibrés pc passe de 20 à 38. En outre, la solution devient instable très rapidement après la fenêtre
d’échantillonnage. Une explication plausible quant à cet accroissement de l’erreur est que la recherche de
l’optimum est de plus en plus difficile lorsque le nombre de paramètres augmente et il est fort probable que
l’algorithme n’ait ici convergé que vers un optimum local. Par ailleurs, la diminution de l’erreur à court
terme ne permet pas non plus d’affirmer que le comportement à long terme de la réponse sera meilleur,
même si il s’agit d’un indice en faveur d’une probable amélioration. Enfin, le calibrage des coefficients non-
autonomes est une piste pour l’amélioration de la réponse à court et/ou long terme. En effet, la correction
KdL_E produit un cycle limite plus proche de celui attendu, et ce malgré des erreurs à court terme plus
élevées que pour les cas KdL et K3dL_E.

194
6.5. Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0064

Temps
M q np Calibration Erreurs Portrait de phase
CPU
εA = 15, 7%
εCL = 5, 93%
64 10 1, 5 KdL 6 008
εfα = 0, 37%
δlog = 0, 040
εA = 23, 5%
εCL = 19, 3%
64 10 1, 5 K3dL 21 597
εfα = ND
δlog =ND
εA = 19, 2%
εCL = 7, 48%
64 10 1, 5 KdL_E 10 139
εfα = 0, 22%
δlog = 0, 045
εA = 13, 0%
εCL = 5, 56%
64 10 1, 5 K3dL_E 16 473
εfα = 0, 83%
δlog = 0, 101

Tableau 6.3 : Réponses du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin construit avec M = 64 clichés sur np ≈ 1, 5 période et calibré
avec différents jeux de paramètres. Les premières colonnes indiquent respectivement le nombre M de clichés, le nombre q de modes
POD dans la base de projection, la durée np en nombre de périodes sur laquelle les clichés sont prélevés, et le jeu de paramètres
calibrés (cf. Table 6.2). La colonne suivante donne les différentes erreurs de reconstruction à court et long terme lorsqu’elles peuvent
être calculées (ND signifie non défini). Le temps de calcul pour la résolution du problème d’optimisation est fourni dans l’avant-
dernière colonne. Enfin le portait de phase du coefficient de portance (•) calculé avec le modèle d’ordre réduit POD-Galerkin corrigé
est comparé avec le coefficient de portance de référence (◦) et la trajectoire à long terme tracée en trait plein (—).

D’autres jeux de paramètres que ceux présentés dans le tableau 6.3 ont été testés sans grand succès avec
les mêmes caractéristiques du modèle d’ordre réduit (M = 64, np ≈ 1, 5, q = 10). L’introduction d’un
nombre pc toujours plus important de paramètres n’est pas une solution souhaitable puisque l’algorithme
d’optimisation devient rapidement incapable de trouver l’optimum. Ainsi le calibrage de type KL dans le-
quel tous les coefficients linéaires sont corrigés ne produit pas l’amélioration escomptée. En outre le temps
de calcul devient rapidement rédhibitoire puisqu’il atteint déjà plusieurs heures lorsque le nombre de pa-
ramètres est de l’ordre de O(q). Le calibrage de certains coefficients quadratiques pourrait être une piste
intéressante mais les rares tentatives effectuées n’ont jamais conduit à une amélioration notable de la stabi-
lité de la réponse. Il manque en outre un critère pour permettre de décider quels coefficients quadratiques
doivent être corrigés.
Les informations contenues dans le modèle d’ordre réduit sont alors complétées soit par l’introduction
de nouveaux clichés toujours prélevés sur np ≈ 1, 5 période, soit en complétant la base de projection avec
des modes négligés précédemment. Le tableau 6.4 présente les résultats pour M = 192 et q = 10 puis
pour M = 64 et q = 15. Pour la correction K3dL, l’augmentation du nombre de clichés permet de réduire
considérablement l’erreur à court terme puisque l’erreur sur le coefficient de portance chute de εCL =
19, 3% à seulement 3, 77%. Toutefois, il ne s’agit pas d’une règle générale puisque pour la correction KdL_E,
l’augmentation du nombre de clichés produit une erreur légèrement plus importante. Lorsque le nombre
de modes POD dans la base de projection est augmenté, l’erreur à court terme est bien réduite avec la
correction KdL, mais elle augmente avec KdL_E. Dans ce dernier cas, la réponse devient même instable et
diverge rapidement. En conclusion, il n’est pas possible d’affirmer que l’augmentation du nombre de clichés
ou de modes POD permet de réduire les erreurs et de stabiliser la réponse, bien que quelques améliorations
sporadiques aient été constatées.
Enfin une dernière tentative est effectuée en prélevant M = 120 clichés sur np ≈ 2, 5 périodes d’oscilla-
tion. En effet, on peut espérer qu’en calibrant sur une durée plus longue l’amortissement du système sera
mieux reproduit. Les résultats présentés dans le tableau 6.5 ne sont toujours pas satisfaisants. À nombre de
modes POD équivalent, l’erreur est plus importante dans le cas KdL avec M = 120 clichés qu’avec M = 64,

195
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

Temps
M q np Calibration Erreurs Portrait de phase
CPU
εA = 13, 3%
εCL = 3, 77%
192 10 1, 5 K3dL 16 206
εfα = ND
δlog = ND
εA = 19, 3%
εCL = 9, 59%
192 10 1, 5 KdL_E 18 708
εfα = 1, 12%
δlog = 0, 110
εA = 28, 6%
εCL = 18, 0%
64 15 1, 5 KdL 21 113
εfα = 0, 02%
δlog = 0, 030
εA = 16, 4%
εCL = 5, 56%
64 15 1, 5 KdL_E 36 630
εfα = ND
δlog = ND

Tableau 6.4 : Réponses des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin calibrés avec différents jeux de paramètres. Les modèles d’ordre
réduit sont construits pour différentes valeurs du nombre M de clichés ou avec une base de projection contenant un nombre plus
élevé q de modes POD. Les informations sont les mêmes que celles du tableau 6.3.

Temps
M q np Calibration Erreurs Portrait de phase
CPU
εA = 26, 5%
εCL = 21, 9%
120 10 2, 5 KdL 13 763
εfα = 0, 32%
δlog = 0, 094
εA = 14, 0%
εCL = 5, 30%
120 10 2, 5 KdL_E 22 119
εfα = 0, 86%
δlog = −0, 074
εA = 38, 9%
εCL = 35, 4%
120 15 2, 5 KdL_E 41 302
εfα = 0, 27%
δlog = 0, 006

Tableau 6.5 : Réponses des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin calibrés avec différents jeux de paramètres. Les modèles d’ordre
réduit sont construits avec M = 120 clichés prélevés sur np ≈ 2, 5 périodes et q = 10 ou 15 modes POD. Les informations sont
les mêmes que celles du tableau 6.3.

196
6.5. Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0064

ce qui peut se comprendre puisque l’erreur est évaluée sur une durée plus longue au cours de laquelle la
déviation par rapport à la solution de référence a tendance à s’accroître. La correction KdL_E produit certes
des erreurs nettement inférieures à court terme avec M = 120 clichés, mais la réponse diverge rapidement
en dehors de la fenêtre d’échantillonnage. Finalement, le cas KdL_E avec q = 15 modes ne donne pas plus
satisfaction, car même si la réponse reste stable à long terme, le cycle limite est totalement erroné.
Malgré ces résultats en demi-teinte, il n’en reste pas moins que la correction apportée par l’optimisation
de certains coefficients permet d’améliorer considérablement la réponse par rapport à celle obtenue avec la
correction pondérée de Cazemier et al. Parmi les nombreux jeux de coefficients calibrés, la correction KdL_E
avec M = 64 et q = 10 fournit un compromis acceptable : l’erreur à court terme est assez faible, et la ré-
ponse à long terme converge vers un cycle limite qui se rapproche de celui de référence. Les amplitudes
modales tracées sur la figure 6.14 font clairement apparaître l’amélioration obtenue en comparaison de la
figure 6.12. En particulier l’erreur sur les premières amplitudes modales responsables de l’allure globale de
la réponse a été nettement réduite. Les cycles limites pour les autres amplitudes restent parfois éloignés de
ceux attendus mais la plupart des erreurs — à court terme — ont pu être diminuées, comme en atteste le
dernier graphique de la figure 6.14.

−3
x 10
0.08 3
0.01

0.06
2
0.005

0.04
1

0
0.02
a2

a6
0
a4

0
−0.005
−1
−0.02

−0.01
−2
−0.04

−0.06 −0.015 −3
−0.12 −0.1 −0.08 −0.06 −0.04 −0.02 0 0.02 0.04 0.06 0.08 −0.015 −0.01 −0.005 0 0.005 0.01 0.015 −6 −4 −2 0 2 4 6 8
a1 a3 a5 −3
x 10
−3 −3
x 10 x 10
1 250
1.5

0.8
1
0.6 200
0.5
0.4

0
0.2 150
εa (%)
a10

0
a8

−0.5

−0.2 100
−1

−0.4
−1.5
−0.6 50

−2
−0.8

−2.5 −1 0
−2 −1.5 −1 −0.5 0 0.5 1 1.5 2 2.5 −8 −7 −6 −5 −4 −3 −2 −1 0 1 2 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
a7 −3
x 10
a9 −3
x 10 i

Figure 6.14 : Comparaison des portraits de phase des amplitudes modales calculées par intégration du modèle d’ordre réduit calibré
pour le jeu de coefficients KdL_E. La légende est identique à celle de la figure 6.12 mais la correction (•) correspond cette fois au
calibrage KdL_E.

En conclusion, il apparaît que le modèle d’ordre réduit POD-Galerkin étendu pour tenir compte du
mouvement d’une structure est extrêmement instable. La raison la plus probable pour expliquer cela est
l’absence de modélisation de la dissipation artificielle, ce qui est en accord avec les problèmes de dissipation
observés dans la réponse du modèle d’ordre réduit. Les méthodes de correction mises en œuvre dans le
chapitre précédent ne semblent cependant plus être en mesure de pallier les erreurs commises lors de la
construction du modèle d’ordre réduit. Malgré toutes les tentatives menées, le modèle d’ordre réduit POD-
Galerkin n’a jamais pu être corrigé de manière à reproduire correctement la réponse à long terme, même
si la réponse à court terme peut être correctement calculée. Puisque le calcul des coefficients du modèle
d’ordre réduit avec les expressions analytiques ne donne pas satisfaction, on cherche dans ce qui suit à
identifier les coefficients selon le principe exposé au paragraphe 6.3.3.

197
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

6.5.2 Réponse du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin identifié


a
Le nombre de coefficients à déterminer dans le problème d’identification 2.65 s’élève à présent à Nc,i +
na
Nc,i = 4 + 4q + q(q + 1)/2 et le problème devient sur-déterminé uniquement lorsque M > Nc,i . Le problème
d’identification est alors résolu au moyen de la technique décrite au paragraphe 2.4.4 et dans l’annexe A.3.
La troncature de la décomposition en valeurs singulières effectuée pour le calcul du pseudo-inverse est
capitale car elle conditionne la stabilité de la réponse du modèle d’ordre réduit comme on le verra.

2
10

0 10
0 q=10
10
q=9
−2
10 q=8
q=7
−4 −5
10 10 q=6
σi (−)

q=5
−6
10 2 4 6 8 10 12 q=4
q=3
−8
10

−10
10

−12
10
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100
i

Figure 6.15 : Spectre des valeurs singulières de la matrice de corrélation A calculée pour différentes valeurs du nombre q de modes
POD employés dans la base de projection. Dans tous les cas, M = 120 clichés ont été prélevés sur np ≈ 2, 5 périodes d’oscillation
du système. La discontinuité observée dans le spectre se déplace vers les indices inférieurs lorsque q diminue.

Le spectre des valeurs singulières de la matrice A est tracé sur la figure 6.15 pour différentes valeurs q
du nombre de modes POD employés dans la base de projection et lorsque M = 120 clichés ont été échan-
tillonnés sur np ≈ 2, 5 périodes. Le spectre suit une tendance similaire à celle observée sur le spectre des
valeurs propres de l’opérateur de corrélation de la méthode des clichés (voir figure 6.7 p.187). En particulier
pour q = 10 le même décrochement entre la onzième et la douzième valeur singulière est observé. L’indice
de troncature est sélectionné soit a priori en s’aidant du spectre des valeurs singulières de la matrice A tracé
sur la figure 6.15, soit au moyen de la méthode de la courbe en L (voir [105, 106] et le paragraphe A.3).
Le modèle d’ordre réduit est tout d’abord construit pour q = 10 en conservant p = 9 valeurs singulières
pour approcher le pseudo-inverse. L’erreur relative commise par la troncature SVD est extrêmement faible :
εAp = 100 kAp − Ak / kAk = 0, 05%. La qualité de la matrice est par ailleurs fortement améliorée puisque
le nombre de conditionnement passe de κ(A) = 9, 37 × 1012 à seulement κ(Ap ) = 1 379.
L’intégration en temps du modèle d’ordre réduit fournit une réponse en parfait accord avec celle de
référence sur l’intervalle d’échantillonnage. L’erreur globale sur les amplitudes chute à εA = 1, 50% et les
portraits de phase des amplitudes modales tracés sur les graphiques du tableau 6.6 sont bien reproduits sur
Ie . L’histogramme de la figure 6.16(a) indique une diminution spectaculaire de l’erreur εaj : l’erreur sur les
premières amplitudes est inférieure à 0, 2% et culmine au maximum à 161% pour la neuvième. À titre de
comparaison, le modèle d’ordre réduit POD-Galerkin corrigé par la méthode de Cazemier et al. produisait
une erreur aussi importante dès la troisième amplitude et pour toutes les suivantes, avec un record à plus
de 2 100% d’erreur pour la neuvième amplitude (voir l’histogramme de la figure 6.12).
À l’exception près des dernières amplitudes modales, le comportement à long terme est globalement
bien reproduit. Ainsi, sur la période de temps considérée, le système reste stable et l’erreur sur la va-
leur maximale et minimale du coefficient de portance CL reste inférieure à 0, 5%, de même que pour l’er-
reur commise sur l’amplitude crête-à-crête. Par ailleurs le décrément logarithmique est quasiment nul :
δlog = 6, 10 × 10−4 . Pour autant, cela ne signifie pas que la réponse soit stable sur le très long terme puisque
les portraits de phase des dernières amplitudes du modèle d’ordre réduit présagent d’une éventuelle diver-
gence (voir la figure 6.6, pour les amplitudes aj,j≥7 ). Celle-ci survient effectivement lorsque l’intégration

198
6.5. Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0064

180
0.15

160

0.1
140

120
0.05

100
εa (%)

CL (−)
0
80

60 −0.05

40
−0.1
20

0
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 −1.5 −1 −0.5 0 0.5 1 1.5
i α (t)

(a) Erreur sur les amplitudes εaj (b) Coefficient de portance

Figure 6.16 : L’histogramme (a) représente les erreurs εaj sur les amplitudes modales associées à chaque mode POD sur l’intervalle
de temps Ie et la figure (b) fournit une comparaison sur le même intervalle de temps entre le portait de phase du coefficient de
portance (•) calculé avec l’identification des coefficients du modèle réduit et le coefficient de portance de référence (◦). La trajectoire
du coefficient de portance à long terme est tracée en trait plein (—) sur une vingtaine de périodes.

est poursuivie sur une durée équivalente à une centaine de périodes.


Ces premiers résultats indiquent que l’approche d’identification des coefficients permet de construire
un modèle d’ordre réduit extrêmement précis à court terme. La solution reconstruite est d’une qualité ir-
réprochable sur l’intervalle de temps d’échantillonnage, aussi bien pour les amplitudes modales que pour
les grandeurs macroscopiques mais la réponse à long terme laisse toutefois apparaître des signes d’insta-
bilité qui se manifestent parfois par une divergence. Un comportement similaire avait déjà été évoqué par
Sirisup et Karniadakis [216], mais aucune solution adéquate n’avait permis de stabiliser correctement le
modèle d’ordre réduit pour des durées extrêmement longues. Dans ce qui suit, on cherche donc à établir
un certain nombre de conditions relatives aux paramètres M, q, p et np pour lesquels la réponse reste stable
à très long terme.
Dans un premier temps on considère le modèle d’ordre réduit construit avec M = 120 clichés prélevés
sur np ≈ 2, 5 période d’oscillation avec une base de projection de dimension q = 10. Les coefficients du
modèle d’ordre réduit sont alors calculés comme les solutions approchées définies à l’équation (2.67) où
le pseudo-inverse est évalué en conservant un nombre fixe p de valeurs singulières. Les effets de la valeur
de l’indice de troncature sont alors analysés lorsque p ∈ J3; 11K. Au-delà de p = 11, les valeurs singulières
ajoutées polluent la solution et la réponse du système diverge dans tous les cas. Pour chaque valeur de p, les
coefficients du modèle d’ordre réduit sont identifiés et la réponse est intégrée en temps sur une vingtaine de
périodes. Les erreurs à court terme pour les amplitudes modales et le coefficient de portance sont précisées,
ainsi que les erreurs à long terme pour la fréquence et l’amortissement du système. Le tableau 6.6 résume
ces erreurs et recense les portraits de phase des amplitudes aj ainsi que du coefficient de portance.
Plusieurs remarques peuvent être formulées au vu des résultats. Tout d’abord, la réponse macrosco-
pique diverge de manière exponentielle à long terme lorsque le pseudo-inverse est approché avec p = 6, 8
et 10 valeurs singulières alors que les autres indices de troncature rendent le modèle d’ordre réduit stable.
Cependant, lorsque l’intégration est poursuivie à très long terme, seule la troncature avec p = 7 valeurs
singulières conduit à une réponse stable. D’après les réponses obtenues, il s’avère que la troncature de la
matrice A avec des valeurs impaires de p améliore l’évaluation des coefficients. Il est fort probable qu’il
existe un lien entre le caractère impair de l’indice de troncature et le regroupement par paire des modes
POD qui avait été mis en évidence au paragraphe 6.4.3.
La stabilité du cycle limite du coefficient de portance est toutefois assurée au prix d’une divergence pro-
gressive des amplitudes modales aj,j≥7 : les oscillations sont en fait entretenues artificiellement par suite
d’un accroissement progressif des contributions associées aux derniers modes POD de la base de projection.
On peut aussi observer que la divergence des amplitudes diffère suivant le nombre de valeurs singulières

199
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

p Erreurs Amplitudes modales CL


εA = 21, 0%
εCL = 1, 43%
3
εfα = 0, 020%
δlog = −0, 0071
εA = 96, 4%
εCL = 2, 51%
4
εfα = 0, 021%
δlog = −0, 0042
εA = 6, 72%
εCL = 1, 35%
5
εfα = 0, 005%
δlog = −0, 0085
εA = 32, 6%
εCL = 1, 56%
6
εfα = 0, 001%
δlog = ND
εA = 2, 82%
εCL = 0, 13%
7
εfα = 0, 001%
δlog = 0, 0007
εA = 25, 7%
εCL = 0, 22%
8
εfα = 0, 317%
δlog = −0, 1290
εA = 1, 50%
εCL = 0, 13%
9
εfα = 0, 001%
δlog = 0, 0006
εA = 52, 0%
εCL = 2, 64%
10
εfα = 0, 075%
δlog = ND
εA = 1, 44%
εCL = 0, 13%
11
εfα = 0, 014%
δlog = 0, 0001

Tableau 6.6 : Réponses des modèles d’ordre réduit construits par identification des coefficients avec M = 120 clichés prélevés
sur np ≈ 2, 5 périodes et q = 10 modes POD. La résolution du problème inverse est effectuée à chaque fois en fixant un nombre
constant p de valeurs singulières pour l’approximation du pseudo-inverse A+ . Dans chaque cas, on donne les erreurs à court et
long terme puis on présente les portraits de phase de toutes les amplitudes modales avant de fournir celui du coefficient de portance.

200
6.5. Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0064

conservées. Ainsi, le second portrait de phase qui représente a4 en fonction de a3 est extrêmement mal
reproduit pour p < 5 mais pour 5 ≤ p ≤ 10 la forme du cycle est globalement bien captée. Le même phé-
nomène s’observe pour le troisième portrait de phase — représentant a6 en fonction de a5 — qui est bien
reproduit pour 7 ≤ p < 11 et ainsi de suite. La généralisation de cette observation conduit à penser que
l’indice de troncature p nécessaire pour capter correctement j amplitudes modales est donné par la relation
j = 2⌊(p − 1)/2⌋ où ⌊·⌋ désigne la partie entière.
En conclusion de cette première série de résultats, il paraît judicieux de choisir une valeur impaire de
l’indice de troncature dans l’intervalle J0; 11K lorsque la base de projection est de dimension q = 10. La
borne supérieure correspond à la discontinuité observée sur le spectre des valeurs singulières tracé sur la
figure 6.15 et la borne inférieure est dictée de manière qualitative par le minimum de vecteurs singuliers à
conserver pour maintenir une approximation valable du pseudo-inverse A+ . Par ailleurs, plus le nombre
p de valeurs singulières est grand, plus le nombre j d’amplitudes modales correctement représenté est im-
portant. D’après la relation étalie précédemment, il faudrait ici conserver un minimum de p = 11 valeurs
singulières pour que l’ensemble des q = 10 amplitudes modales soit correctement reproduites. Toutefois,
cet indice de troncature correspond à la discontinuité observée dans le spectre des valeurs singulières et il
s’avère que dans ce cas la réponse est instable.
Le modèle d’ordre réduit est à présent construit avec un nombre q de modes POD inférieur à 10. Pour
pratiquement toutes les valeurs de q dans l’intervalle J3; 9K, il est possible d’identifier correctement les coef-
ficients pour obtenir une réponse stable à long terme. Mieux encore, le cas p = 7 fournit une réponse stable
à très long terme sauf pour q = 3 et 4. Le tableau 6.7 résume les résultats obtenus. Le nombre q de modes
a na
POD et le nombre de coefficients Nc,i = Nc,i + Nc,i à identifier est précisé dans chaque cas dans la première
colonne avec l’indice de troncature p. Les erreurs commises sont à chaque fois très faibles, et en particulier
le décrément logarithmique est la plupart du temps de l’ordre de 10−4 ce qui signifie que le modèle d’ordre
réduit reproduit correctement les oscillations entretenues. Les portraits de phase des amplitudes modales
sont représentés dans la colonne suivante ; lorsque le nombre q de modes POD est impair, le dernier gra-
phique représente l’évolution de l’amplitude en fonction de l’angle d’incidence α pour conserver la forme
d’un portrait de phase. Enfin, les portraits de phase du coefficient de portance sont tracés dans la dernière
colonne pour une centaine de périodes d’oscillation.
Les résultats obtenus confirment bien que la valeur impaire p = 7 est propice à l’approximation du pro-
blème inverse et dans ce cas les j = min(2⌊(p − 1)/2⌋, q) premières amplitudes modales sont correctement
reproduites, au moins lorsque le nombre q de modes POD dans la base de projection est dans un voisinage
de p : la valeur p = 7 donnne des résultats optimaux pour q ∈ J5; 10K mais pour de plus faibles valeurs de q,
l’indice de troncature p chute à 4 ou 5. Cette dernière observation indique que le choix de l’indice de tron-
cature n’est pas totalement décorrélé de la dimension q de la base de projection, bien que la relation établie
entre le nombre j d’amplitudes modales correctement reproduites et l’indice de troncature p ne dépende
pas directement du nombre q de modes POD. La seule contrainte est que l’indice de troncature doit être
inférieur à l’indice maximal p = 11 correspondant à la discontinuité sur le spectre des valeurs singulières.
Or celle-ci se déplace bien lorsque le nombre de modes POD conservés dans la base de projection change
comme l’atteste le graphique de la figure 6.15.
Pour conclure, l’influence du nombre M de clichés sur l’approximation des coefficients est analysée. Les
réponses produites pour différentes valeurs de q sont présentées dans le tableau 6.8 pour M = 64 et 192
clichés échantillonnés sur np ≈ 1, 5 période d’oscillation du système. À chaque fois le pseudo-inverse A+
est calculé avec p = 7 valeurs singulières puisque cette valeur avait conduit dans les exemples précédents à
des réponses de très bonne qualité lorsque les M = 120 clichés étaient échantillonnés sur np ≈ 2, 5 périodes
(voir les tableaux 6.6 et 6.7). Le nombre M de clichés a peu d’influence : ainsi lorsqu’on compare le cas
q = 10, p = 7 avec M = 192, 64 ou 120 clichés, on constate que les erreurs sont quasiment identiques à
court terme. L’augmentation du nombre de clichés prélevés sur la même durée np permet de réduire très
légèrement l’erreur εA à court terme, mais l’erreur sur le coefficient de portance εCL n’est pratiquement
pas affectée. En revanche, cette erreur est beaucoup plus faible lorsque les M = 120 clichés sont prélevés
sur np ≈ 2, 5 périodes. En outre, le décrément logarithmique est bien meilleur lorsque l’échantillonnage
est pratiqué sur une durée plus longue. Ces résultats s’observent aussi pour les cas q = 7 et q = 5. Il est
aussi important de signaler que les réponses sont pratiquement identiques indépendamment du fait que le
problème est sur- ou sous-déterminé. En effet, si on considère une base de projection de dimension q = 10,
le problème est sur-déterminé si l’ensemble de clichés contient M = 192 éléments, tandis que le problème

201
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

devient sous-déterminé avec M = 64. Malgré ces différences quant au rang de la matrice A, la résolution
du problème n’est pas affectée de manière significative et les réponses restent globalement identiques.

[q, p, Nc,i ] Erreurs Amplitudes modales CL


εA = 2, 81%
εCL = 0, 14%
[9, 7, 85]
εfα = 0, 001%
δlog = 0, 0004
εA = 2, 71%
εCL = 0, 13%
[8, 7, 72]
εfα = 0, 001%
δlog = 0, 0004
εA = 2, 51%
εCL = 0, 13%
[7, 7, 60]
εfα = 0, 001%
δlog = 0, 0004
εA = 1, 32%
εCL = 0, 13%
[6, 7, 49]
εfα = 0, 001%
δlog = 0, 0003
εA = 1, 29%
εCL = 0, 18%
[5, 7, 39]
εfα = 0, 008%
δlog = 0, 0003
εA = 1, 86%
εCL = 1, 01%
[4, 5, 30]
εfα = 0, 004%
δlog = 0, 0005
εA = 18, 8%
εCL = 1, 03%
[3, 4, 22]
εfα = 0, 023%
δlog = 0, 0010

Tableau 6.7 : Réponses des modèles d’ordre réduit construits par identification des coefficients avec M = 120 clichés prélevés sur
np ≈ 2, 5 périodes. La base de projection contient un nombre variable q de modes POD et la résolution du problème inverse est
effectuée à chaque fois en fixant un nombre constant p de valeurs singulières pour l’approximation du pseudo-inverse A+ . Dans
chaque cas, on donne les erreurs à court et long terme puis on présente les portraits de phase de toutes les amplitudes modales avant
de fournir celui du coefficient de portance.

De nombreuses autres configurations de paramètres ont été testées en dehors de celles présentées ici.
Celles-ci confirment que les valeurs impaires de l’indice de troncature fournissent en général des réponses
de meilleure qualité. Parmi toutes les simulations effectuées (q ∈ J3; 10K, p ∈ J3; 11K, M = {64, 192}, np ≈
1, 5) très peu de cas ont fourni une réponse stable à très long terme en dehors des jeux de paramètres q = 3,
p = 10 et M = 64 ou 192. Au contraire, lorsque les M = 120 clichés sont échantillonnés sur une durée plus
longue np ≈ 2, 5, de nombreux jeux de paramètres conduisent à une réponse stable à très long terme.
Par conséquent, avec un choix adéquat des paramètres de construction (M, q, p, np ), l’identification des
coefficients du modèle d’ordre réduit est une technique particulièrement efficace. D’après les résultats de
ce paragraphe, il s’avère qu’une durée de simulation de l’ordre de np ≈ 2, 5 périodes d’oscillation au lieu
de np ≈ 1, 5 conduise à de meilleurs résultats pour la stabilité à long terme de la réponse. Le nombre M de
clichés a peu d’influence et ceci rejoint les analyses effectuées pour les modèles d’ordre réduit POD-Galerkin
où seul le nombre de modes POD conservés dans la base de projection avait une influence significative. Le
choix de l’indice de troncature p va de pair avec celui du nombre q de modes POD et doit être sélectionné
dans un voisinage de la valeur de q en dessous de la discontinuité observée dans le spectre des valeurs
singulières. On peut alors s’attendre à ce que le nombre j d’amplitudes modales correctement prédites soit
donné par la relation j = min(2⌊(p − 1)/2⌋, q).
À la différence des modèles d’ordre réduit POD-Galerkin, certaines amplitudes modales ont tendance à

202
6.5. Réponse du modèle d’ordre réduit de l’écoulement autour du profil NACA0064

[q, p, M, Nc,i ] Erreurs Amplitudes modales CL


εA = 3, 16%
εCL = 0, 34%
[10, 7, 64, 99]
εfα = 0, 013%
δlog = 0, 0081
εA = 2, 97%
εCL = 0, 33%
[10, 7, 192, 99]
εfα = 0, 009%
δlog = 0, 0083
εA = 2, 53%
εCL = 0, 37%
[7, 7, 64, 60]
εfα = 0, 013%
δlog = 0, 0054
εA = 2, 48%
εCL = 0, 38%
[7, 7, 192, 60]
εfα = 0, 094%
δlog = 0, 0057
εA = 1, 28%
εCL = 0, 38%
[5, 7, 64, 39]
εfα = 0, 059%
δlog = 0, 0058
εA = 1, 25%
εCL = 0, 40%
[5, 7, 192, 39]
εfα = 0, 053%
δlog = 0, 0055

Tableau 6.8 : Réponses des modèles d’ordre réduit construits par identification des coefficients avec M = 64 ou 192 clichés prélevés
sur np ≈ 1, 5 période. La base de projection contient un nombre variable q de modes POD et la résolution du problème inverse est
effectuée à chaque fois en fixant un nombre constant p = 7 de valeurs singulières pour l’approximation du pseudo-inverse A+ .
Dans chaque cas, on donne les erreurs à court et long terme puis on présente les portraits de phase de toutes les amplitudes modales
avant de fournir celui du coefficient de portance.

diverger à long terme au lieu de se stabiliser sur un cycle limite. Malgré cela, la réponse macroscopique reste
dans de nombreux cas stable à très long terme, même si une divergence en un temps fini n’est pas exclue. Ce
phénomène disparaît parfois lorsqu’un très petit nombre d’équations est conservé dans le modèle d’ordre
réduit : ainsi, avec q = 3, 4 ou 5 et M = 120 clichés, l’ensemble des amplitudes modales reste stable (voir
tableau 6.7) et on peut considérer que ces modèles d’ordre réduit constituent une approximation précise
du système fluide. L’identification des coefficients du modèle réduit est donc une technique très puissante
puisque le système fluide caractérisé initialement par Nv = 32 768 degrés de liberté peut être finalement
réduit à un système de 3, 4 ou 5 degrés de liberté. En outre, le temps de calcul pour la construction du
modèle d’ordre réduit est considérablement réduit par rapport à l’approche POD-Galerkin puisque les
coefficients sont directement identifiés à partir de la résolution du problème (2.65) dont le coût CPU est
de l’ordre de la seconde alors que les étapes de calcul puis de correction des coefficients dans l’approche
POD-Galerkin prenaient plusieurs heures.

203
6. C ONSTRUCTION D ’ UN MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT POD-G ALERKIN POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

6.6 Synthèse du chapitre 6


Dans ce dernier chapitre, le problème de la prise en compte du mouvement d’une structure dans le
modèle d’ordre réduit a été traité. Les équations de Navier-Stokes qui avaient été formulées au chapitre 4
avec les variables primitives modifiées au moyen d’une description ALE ne sont pas compatibles avec la
construction d’un modèle d’ordre réduit basé sur la décomposition orthogonale propre lorsque le domaine
du fluide se déforme. Pour remédier à ce problème, les équations de Navier-Stokes ont donc été reformu-
lées dans le repère entraîné associé au mouvement de la structure mobile puisque sous l’hypothèse d’un
mouvement de corps rigide, le domaine devient invariant. Ainsi, la formulation POD développée au début
de ce mémoire reste valable et une projection de Galerkin des équations de Navier-Stokes peut être prati-
quée en conservant une cohérence mathématique. Deux modèles d’ordre réduit ont alors été construits en
écrivant la projection de Galerkin formelle des équations de Navier-Stokes dans le repère entraîné avec les
composantes de la vitesse absolue ou relative. Ces deux modèles d’ordre réduit permettent de traiter les
écoulements internes ou externes respectivement, dans lesquels une structure mobile indéformable est la
source d’une instationnarité.
Le modèle d’ordre réduit en formulation vitesse absolue a été mis en œuvre sur l’exemple d’un profil
NACA0064 oscillant autour d’une position d’équilibre dans un écoulement parfait transsonique. Les équa-
tions non-linéaires d’Euler ont alors été employées pour construire le modèle d’ordre réduit et la réponse a
été reproduite après que les coefficients aient été corrigés au moyen des méthodes développées au chapitre
5. Toutefois, la construction du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin s’avère très coûteuse, notamment à
cause du calibrage des coefficients. En outre, la correction introduite n’est pas en mesure de pallier les défi-
ciences du modèle d’ordre réduit dont la réponse est extrêmement instable. Seule la réponse à court terme
du modèle d’ordre réduit a pu être reproduite correctement. Une des causes possibles de l’instabilité du
modèle d’ordre réduit est l’absence totale de dissipation dans le modèle d’ordre réduit puisque les équa-
tions d’Euler ont été employées pour la projection.
L’approche POD-Galerkin a donc été abandonnée au profit de la méthode d’identification des coeffi-
cients du modèle réduit à l’aide de laquelle il est possible d’évaluer correctement les coefficients. Ainsi,
la réponse reste stable même à très long terme. Une comparaison des coefficients évalués à partir des ex-
pressions analytiques ou identifiés est fournie dans l’annexe F.2. Celle-ci révèle que l’identification des
coefficients permet de filtrer en quelque sorte les erreurs d’évaluation commises à partir des expressions
analytiques et accentue les contributions de certains coefficients. Par ailleurs, l’analyse des contributions
relatives a permis de mettre en évidence la prépondérance des termes liés au mouvement de translation.
Les termes autonomes et non-autonomes participent conjointement à la réponse du système lorsque les co-
efficients sont identifiés alors que leurs effets se compensent en grande partie si les coefficients sont évalués
à partir des expressions analytiques. Ceci est donc un signe supplémentaire que les expressions analytiques
des coefficients nécessitent d’être corrigées.
L’identification des coefficients du modèle d’ordre réduit a en outre l’avantage d’être une méthode par-
ticulièrement attractive en terme de coût de calcul puisque la détermination des coefficients du modèle
d’ordre réduit est pratiquement immédiate et ne nécessite aucune correction ultérieure. Le graphique de la
figure 6.17 indique ainsi le coût CPU des différentes étapes de construction5 de plusieurs modèles d’ordre
réduit POD-Galerkin dont les paramètres sont donnés dans le tableau 6.9 (Cas 1, 2 et 3). L’étape de calcul
des coefficients est pratiquement négligeable lorsqu’ils sont identifiés alors que leur évaluation à partir des
expressions analytiques établies au début de ce chapitre représente pratiquement autant de temps que celui
nécessaire au calcul des modes POD. L’inconvénient de l’évaluation des expressions analytiques des coef-
ficients provient cependant de l’étape de correction qui est de loin la plus coûteuse puisque l’algorithme
d’optimisation doit faire face à un problème fortement non-linéaire comportant plusieurs dizaines de para-
mètres.
Une fois que le modèle d’ordre réduit est construit, le temps de simulation de l’écoulement transso-
nique autour d’un profil en tangage peut être réduit d’un facteur de l’ordre de O(102 ) en terme de coût de
calcul tout en conservant une précision excellente. Le nombre de degrés de liberté a ainsi été diminué de
Nv = 32 768 à q ≤ 10 seulement, ce qui permet d’une part de réduire les coûts de calcul, mais aussi d’étudier
plus simplement le fonctionnement du système. Les gains effectués sont résumés sur la figure 6.18 : trois
5 Les temps CPU indiqués ne tiennent pas compte de la simulation préalable avec le modèle non-réduit qui fournit les clichés. En

effet, ce temps de calcul est identique pour l’ensemble des modèles d’ordre réduit construits, quelle que soit l’approche considérée.

204
6.6. Synthèse du chapitre 6

modèles d’ordre réduit construits par identification des coefficients avec q = 10, 7 et 3 modes POD sont
comparés au modèle non réduit au moyen du logarithme du nombre de degrés de liberté (nddls = Nv ou
q) et du logarithme du gain en coût CPU (ηCPU = τCPU elsA /τCPU ROM ). Les temps τCPU elsA et τCPU ROM correspondent
respectivement aux temps CPU pour l’intégration en temps du système dynamique sur une période d’os-
cillation Tα avec le modèle non-réduit (elsA ) et avec le modèle d’ordre réduit.
L’identification des coefficients du modèle d’ordre réduit semble donc être une méthode très promet-
teuse lorsque le calcul explicite des coefficients du modèle d’ordre réduit conduit à une réponse de mau-
vaise qualité ou devient trop coûteux. Elle permet en effet de reproduire très fidèlement la réponse originale
et ce, pour un coût de calcul extrêmement faible. Toutefois il ne s’agit que d’une méthode d’identifica-
tion qui repose entièrement sur l’expression formelle des équations du modèle d’ordre réduit issues de la
projection de Galerkin. Ainsi, l’identification ne permet pas de modéliser correctement les effets qui sont
justement à l’origine des défaillances du modèle d’ordre réduit POD-Galerkin, mais fournit simplement
une correction plus efficace. Il est donc primordial d’améliorer l’expression de la projection de Galerkin en
tenant compte par exemple des effets de la viscosité artificielle.

Modes POD
5
Coefficients
Correction
4 Cas No Approche M np q Correction
1 PODG 64 1, 5 10 KdL
Cas No

3 2 PODG 64 1, 5 10 KdL_E
3 PODG 120 2, 5 10 KdL
2
4 IPOD 64 1, 5 10 p=7
5 IPOD 120 1, 5 10 p=7
1

0 2000 4000 6000 8000 10000 12000 14000 16000 18000


Temps CPU (s)

Figure 6.17 : Temps CPU relatif à la construction d’un modèle Tableau 6.9 : Définition des paramètres des modèles d’ordre
d’ordre réduit avec l’approche POD-Galerkin ou par identifi- réduit construits avec l’approche POD-Galerkin (PODG) ou
cation des coefficients. Les différents cas représentés sont listés l’identification des coefficients (IPOD) pour l’évaluation des
dans le tableau 6.9. temps de calcul.

5 4 3 2 1 0 0.5 1 1.5 2 2.5 3

log(nddls) log(ηCPU)

Figure 6.18 : Gain en temps CPU et en nombre de degrés de liberté avec différents modèles d’ordre réduit. L’ordonnée correspond
au modèle non-réduit ainsi qu’à différents modèles d’ordre réduit construits par identification des coefficients avec q = 10, 7 et 3
modes POD. Les abscisses du graphique de gauche représentent le logarithme du nombre de degrés de liberté avec chaque modèle,
tandis que le graphique de droite indique le logarithme du gain en temps de calcul pour la simulation d’une période d’oscillation du
système. Pour le modèle non réduit, le gain est fixé à 1.

205
Conclusion

Le travail effectué au cours de cette thèse a contribué au développement d’une méthode de réduction
efficace dans le but de diminuer les coûts de calcul qui deviennent considérables lorsqu’il s’agit de mo-
déliser correctement l’écoulement d’un fluide dont le couplage avec le mouvement d’une structure est à
l’origine de phénomènes aéroélastiques. En effet, la résolution des équations non-linéaires d’Euler ou de
Navier-Stokes qui sont indispensables pour capter certains phénomènes implique un nombre de degrés de
liberté si important que le coût de calcul devient rapidement prohibitif lorsqu’il s’agit de mener des études
paramétriques du système.
La première partie de ce mémoire, dévolue à la présentation de la méthode de réduction et à son appli-
cation à un système dynamique linéaire, a été l’occasion d’évaluer plusieurs formulations sur un problème
relativement simple. Dans le chapitre 1, l’état de l’art des principales méthodes de réduction physiques a ré-
vélé que la décomposition orthogonale propre remplit les critères nécessaires pour le développement d’un
modèle d’ordre réduit non-linéaire représentatif d’un fluide compressible visqueux. En effet, l’approche
POD-Galerkin dans laquelle la décomposition orthogonale propre est combinée à une projection de Galer-
kin des équations de Navier-Stokes conduit à un modèle d’ordre réduit dans lequel les non-linéarités sont
préservées. Le principe de la décomposition orthogonale propre rappelé au chapitre 2 a permis d’établir
un certain nombre de propriétés employées par la suite pour la construction du modèle d’ordre réduit.
L’application de la méthode au chapitre 3 à un système dynamique linéaire a démontré que l’approche
POD-Galerkin possédait de bonnes propriétés en termes d’erreur de reconstruction et de convergence en
comparaison avec une formulation analytique ou discrète. Par la suite, trois techniques ont été développées
puis comparées pour tenir compte avec l’approche POD-Galerkin de conditions aux limites non-homogènes
de type Dirichlet et Neumann. La réponse du système pour diverses fréquences et amplitudes d’oscillation
est alors obtenue simplement en modifiant le terme source du modèle d’ordre réduit non-autonome qui
apparaît afin de reproduire l’effet de la condition limite. Ce premier modèle d’ordre réduit constitue ainsi
l’archétype du problème aéroélastique dans lequel le mouvement de la structure correspond à la condition
limite non-homogène.
Dans la seconde partie de ce mémoire le travail a consisté à développer un modèle d’ordre réduit non-
linéaire représentatif d’un fluide compressible visqueux. Dans le chapitre 4 plusieurs formulations des
équations de Navier-Stokes résolues en pratique par les méthodes de discrétisation classiques — en Vo-
lumes Finis ou Éléments Finis par exemple — ont été rappelées. La solution de ces équations a en parti-
culier servi à générer l’ensemble des clichés nécessaires au calcul des modes POD de la base de projection.
Une discussion sur le choix des équations adéquates pour la construction du modèle d’ordre réduit a alors
abouti à choisir les variables primitives modifiées au lieu des variables conservatives afin que les équations
de Navier-Stokes prennent la forme d’un système dynamique quadratique qui se prête bien à la projection
de Galerkin. La formulation de Vigo [240] établie avec une description eulérienne a alors été étendue à une
description ALE formulée dans le repère absolu ou dans le repère entraîné. Dans ce dernier cas, l’emploi
des composantes de la vitesse absolue ou relative a conduit à deux formulations différentes. L’hypothèse
d’un mouvement de corps rigide qui a finalement été émise se justifie par la nécessité de conserver un
domaine indéformable de sorte que la définition du produit scalaire intervenant dans le processus de la dé-
composition orthogonale propre reste cohérente. Au chapitre 5, le modèle d’ordre réduit POD-Galerkin des
équations des Navier-Stokes a été développé à partir de la formulation dans le repère absolu. Celui-ci a per-
mis de reproduire le phénomène de détachement de vortex dans le sillage du profil NACA0012 fortement
incliné. Le manque de dissipation important constaté dans la réponse du modèle d’ordre réduit a pu être
corrigé au moyen de diverses techniques reposant soit sur l’introduction d’amortissement dans le système,
soit sur un calibrage des coefficients du modèle d’ordre réduit. Finalement, le travail mené au chapitre 6 a

207
C ONCLUSION

consisté à développer le modèle d’ordre réduit à partir des équations de Navier-Stokes écrites dans le repère
entraîné en faisant l’hypothèse d’un mouvement de corps rigide de manière à préserver la cohérence de la
définition des modes POD. Le modèle d’ordre réduit a alors été mis en œuvre pour reproduire le phéno-
mène d’oscillation d’un choc sur la paroi d’un profil NACA0064 oscillant dans un écoulement transsonique
modélisé par les équations d’Euler. Dans ce cas, la réponse s’est avérée être très instable puisque aucune
dissipation n’est introduite dans le modèle d’ordre réduit. Les méthodes de correction employées au cha-
pitre 5 se sont alors révélées être insuffisantes pour corriger correctement la réponse à (très) long terme.
Le recours à la méthode d’identification des coefficients a néanmoins permis de remédier à ce problème de
stabilité et par ailleurs le coût de construction du modèle d’ordre réduit s’en est trouvé nettement amélioré.
Le potentiel de la méthode de réduction développée dans ce mémoire au moyen d’une approche POD-
Galerkin a été démontré sur deux exemples représentatifs d’un écoulement non-linéaire, visqueux et com-
pressible tel que celui rencontré dans les applications turbomachines. Des gains substantiels en temps de
calcul ont ainsi pu être obtenus puisque l’écoulement est reproduit de manière très précise en un temps
extrêmement court. Il faut cependant relativiser les gains présentés sur le graphique de la figure 6.17 puis-
qu’ils ne concernent que l’intégration en temps du modèle d’ordre réduit et ne tiennent pas compte de la
construction du modèle d’ordre réduit qui comprend notamment la génération des clichés avec le modèle
non-réduit. Le gain ne sera donc en réalité effectif que lorsque le même modèle d’ordre réduit sera employé
pour reproduire la réponse sur une certaine gamme de paramètres.
Le principal apport de la thèse est donc le développement de la forme générique du modèle d’ordre
réduit des équations de Navier-Stokes. En effet, la projection de Galerkin a ici été écrite en détail pour
une base de modes POD, mais d’une manière plus générale elle reste valable pour n’importe quelle base
orthonormale sur laquelle le champ aérodynamique est décomposé. Par conséquent le choix d’une autre
base spatiale est envisageable et permettrait de s’affranchir de l’hypothèse d’un mouvement de corps ri-
gide émise ici pour préserver la cohérence de la définition des modes POD.
Pour conclure, quelques pistes de développements à explorer sont proposées pour améliorer ou pour-
suivre la construction de modèles d’ordre réduit non-linéaires d’un fluide compressible visqueux :
• Étude et amélioration de la stabilité : les problèmes d’instabilité des modèles d’ordre réduit POD-
Galerkin semblent devoir être attribués principalement à la modélisation de la viscosité. En effet,
la loi de Sutherland a été négligée et l’introduction d’une viscosité artificielle analogue à celle em-
ployée en Volumes Finis [157] semble nécessaire. Il serait par ailleurs souhaitable de disposer de
critères théoriques pour évaluer la stabilité à partir des opérateurs du modèle d’ordre réduit au
lieu de la réponse intégrée sur le long terme. Un premier moyen de procéder consiste à linéariser le
système et à analyser les valeurs propres à l’instar de la procédure proposée par Dowell et al. [60].
Une analyse plus fine devrait cependant être envisagée puisqu’il s’agit d’un système dynamique
non-linéaire dont la stabilité peut être estimée d’une certaine manière au moyen des exposants de
Lyapunov et des multiplicateurs de Floquet [98].
• Prise en compte d’une structure déformable : en l’état actuel des choses, la formulation développée
n’est valable que pour une structure indéformable animée d’un mouvement de corps rigide. L’ex-
tension au cas d’une structure déformable est délicate et nécessite de reformuler la décomposition
orthogonale propre dans le cadre d’un domaine spatial variable au cours du temps. Une alternative
possible est de remplacer les modes POD par les PIPs [107, 137] qui ne correspondent pas à des
corrélations spatiales et autoriseraient le travail sur un domaine déformable.
• Réponse paramétrique : l’enjeu final reste la capacité du modèle d’ordre réduit à reproduire la ré-
ponse sur une certaine gamme de paramètres. La formulation actuelle a été développée de telle
sorte qu’il est possible de faire varier les vitesses de translation et de rotation du profil, si bien que
l’amplitude et la fréquence du mouvement imposé sont déjà deux paramètres qui peuvent poten-
tiellement être considérés pour la réponse paramétrique. En revanche, la réponse sur une certaine
gamme de nombre de Mach nécessitera certainement le développement de méthodes d’interpola-
tion entre plusieurs bases POD [10, 147].
Enfin, d’un point de vue purement informatique, il faut signaler que l’ensemble des développements a
été effectué ici avec le langage de programmation Scilab. L’emploi d’un langage plus robuste tel que le C++
permettrait de tirer parti d’un certain nombre de fonctionnalités déjà développées au sein du logiciel elsA,
et de bénéficier de l’approche orientée objet récemment développée pour la POD [14].

208
Troisième partie

Annexes

209
Annexe A
Éléments d’algèbre linéaire et matriciel

Sommaire
A.1 Matrice d’applications linéaires et changement de base . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211
A.2 Décomposition en valeurs singulières . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 213
A.3 Résolution approchée de problèmes linéaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 214

Dans cette annexe, on rappelle un certain nombre de définitions et de propriétés d’algèbre linéaire aux-
quelles il est souvent fait référence dans le manuscrit. La définition des matrices en tant que représentation
d’une application linéaire est d’abord rappelée avant de présenter la procédure de décomposition en va-
leurs singulières d’une matrice quelconque puis de donner quelques techniques de résolution approchées
d’un système linéaire. Un certain nombre de compléments pourront être trouvés dans les ouvrages de
Strang [223] et Golub et Van Loan [93] par exemple.

A.1 Matrice d’applications linéaires et changement de base


On se place dans le cadre général d’un espace vectoriel E défini sur un corps K, de dimension finie N
tel que B = (e1 , . . . , eN ) soit une base de E. On désignera par M (N, M ) l’ensemble des matrices de taille
N × M dont les composantes sont des scalaires définis sur le corps K. Tout vecteur x ∈ E se décompose sur
la base B en
XN
x= xi ei , (A.1)
i=1

où les xi ∈ K sont les coordonnées de x dans la base B. Le vecteur x est représenté dans la base B par la
matrice unicolonne  
x1
 .. 
MatB (x) =  .  (A.2)
xN

qui appartient à RN et dont les coefficients sont les coordonnées de x. On considère à présent une fa-
mille (x1 , . . . , xP ) de P vecteurs de E. Alors la matrice de cette famille dans la base B est la matrice
PN
MatB (x1 , . . . , xP ) ∈ M (N, P ) dont la j-ième colonne est MatB (xj ) puisque pour tout j, xj = i=1 xij ei
d’après la relation (A.1). La matrice de la famille (x1 , . . . , xP ) s’écrit alors
 
x11 ··· x1j ··· x1P
 .. .. ..  .
MatB (x1 , . . . , xP ) =  . . .  (A.3)
xN 1 · · · xN j · · · xN P
211
A. É LÉMENTS D ’ ALGÈBRE LINÉAIRE ET MATRICIEL

Les matrices sont en particulier employées pour représenter des applications linéaires quelconques dans
les bases de départ et d’arrivée de l’application. Soient E et F deux espaces vectoriels de dimensions finies
P et N respectivement munis des bases B = (e1 , . . . , eP ) et C = (f1 , . . . , fN ), et u : E −→ F une application
linéaire de E dans F . On appelle matrice de u relativement aux bases B et PC la matrice MatB,C (u) de la
famille (u(e1 ), . . . , u(eP )) exprimée dans la base C avec la relation u(ej ) = N i=1 aij fi , ce qui conduit à
 
a11 · · · a1j · · · a1P
 .. .. ..  .
MatB,C (u) =  . . .  (A.4)
aN 1 · · · aN j · · · aN P

Chaque colonne correspond donc à l’image par u du vecteur de base ej ∈ E exprimée dans la base C sur les
vecteurs de base fi . La notion de changement de base apparaît naturellement lorsqu’on considère seulement
l’espace vectoriel E et deux bases B = (e1 , . . . , eN ) et B ′ = (e′1 , . . . , e′N ). On appelle
PN alors matrice de passage
de B ′ à B la matrice de la famille (e′1 , . . . , e′N ) exprimée dans B telle que e′j = i=1 pij ei . Ainsi la matrice
de passage s’écrit  
p11 · · · p1j · · · p1N
PB′ →B = MatB′ ,B (IdE ) =  ... .. ..  .

. .  (A.5)
pN 1 · · · pN j · · · pN N
L’opération de changement de base peut être vue comme une application linéaire qui est simplement
l’identité de E, mais où la base B ′ est employée pour exprimer les vecteurs de l’ensemble de départ alors
que les vecteurs de l’image sont exprimés dans B. On a les propriétés suivantes :
– La matrice de passage d’une base dans elle-même est l’identité :

PB→B = IN . (A.6)

– Soient B, B ′ et B ′′ trois bases de E, alors

PB′′ →B = PB′′ →B′ PB′ →B . (A.7)

La relation précédente traduit la transitivité du changement de base, qui s’exprime simplement par un
produit matriciel entre les matrices de passage.
– La matrice de passage d’une base B à une base B ′ est inversible, et son inverse est donné par la
matrice de passage de B ′ à B ce qui s’écrit
−1
(PB′ →B ) = PB→B′ . (A.8)

On peut donc définir une formule de changement de base pour un vecteur et une matrice quelconques.
Soient B et B ′ deux bases de l’espace vectoriel E de dimension finie N , et PB′ →B la matrice de passage
entre les deux bases. Pour tout vecteur x ∈ E, on note X = MatB (x) la représentation de ce vecteur dans la
base B et X′ = MatB′ (x) sa représentation dans B ′ . Alors la formule de passage pour le vecteur x s’écrit

X = PB′ →B X′ . (A.9)
PN PN
En effet, un vecteur x ∈ E se décompose sur les bases B et B ′ en x = i=1 xi ei P selon la
= j=1 x′j e′j P
N N
relation
PN (A.1). Or la
PN PN définition (A.5) de la matrice de passage permet d’écrire x = x′ ′
e
j=1 j j = ′
j=1 xj
j=1 pij xj )ei . Ainsi, la coordonnée xi du vecteur x exprimé dans B correspond à

(P i=1 pij ei ) = i=1 (
N
j=1 p ij x′
j d’où la relation (A.9) entre les composantes des coordonnées du vecteur x exprimé dans les
deux bases. Inversement, on obtient X′ = (PB′ →B )−1 X = PB→B′ X au moyen de la relation (A.8).
De la même manière on considère une application linéaire u : E → F définie sur les espaces vectoriels
E et F de dimension P et N . Soient B et B ′ deux bases de E telle que P = PB′ →B soit la matrice passage
de l’une à l’autre, et C et C ′ deux bases de F telle que Q = QC ′ →C soit la matrice passage de l’une à l’autre.
On note M = MatB,C (u) et M′ = MatB′ ,C ′ (u) les matrices de M (N, P ) représentant l’application linéaire
u. On a alors la relation de passage
M′ = Q−1 M P . (A.10)

212
A.2. Décomposition en valeurs singulières

Si en outre u est un automorphisme de E dans E, et si on note P = PB′ →B , M = MatB,B (u) et M′ =


MatB′ ,B′ (u), alors la relation devient
M′ = P−1 M P . (A.11)
Les relations données aux équations (A.9) et (A.11) seront particulièrement utiles pour transposer les
équations de Navier-Stokes d’un repère absolu RA = (O, BA ) muni de la base BA dans le repère entraîné
RE = (M0 , BE ) muni de la base mobile BE . Le lecteur pourra se reporter par exemple à [223, Annexe A]
pour une analyse plus détaillée concernant les relations de changement de base.

A.2 Décomposition en valeurs singulières


La décomposition en valeurs singulières d’une matrice A ∈ M (N, M ) est un moyen efficace de factori-
ser et éventuellement d’approcher la matrice par une autre de rang inférieur. La décomposition est énoncée
dans le théorème suivant.

Théorème A.1 : Décomposition en Valeurs Singulières


Soit A ∈ M (N, M ) une matrice quelconque de rang 1 ≤ r ≤ min(N, M ), alors il existe deux matrices Q1 ∈
M (N, N ) et Q2 ∈ M (M, M ) et une matrice diagonale Σ ∈ M (N, M ) telles que

A = Q1 Σ QT
2. (A.12)

La décomposition précédente est la décomposition en valeurs singulières de la matrice A. Les colonnes des matrices
Q1 et Q2 sont les vecteurs singuliers à gauche et à droite respectivement et vérifient les conditions d’orthogonalité

QT
1 Q1 = IN et QT
2 Q2 = IM . (A.13)

La matrice Σ contient sur sa diagonale les r valeurs singulières σ1 ≥ σ2 ≥ · · · ≥ σr > 0 non nulles, telle que
 
σ1 0 ··· 0
 .. .. .. 
 . . .
   
 σr 0 · · · 0 Σr 0r,M−r
Σ=   (A.14)
 = 0N −r,r 0N −r,M−r .
 0 · · · 0 0 · · · 0
. .. .. .. 
 .. . . .
0 ··· 0 0 ··· 0

La première preuve de la décomposition en valeurs singulières pour les matrices rectangulaires et com-
plexes est attribuée à Eckart et Young [66] mais le calcul efficace n’a été rendu possible que récemment avec
notamment l’algorithme de Golub/Kahan [91, 92].
Dans la pratique, on a souvent recours à la décomposition en valeurs singulières tronquée pour laquelle
on ne considère que les r premiers vecteurs singuliers dans les matrices Q1 et Q2 puisque les N − r vecteurs
restant dans Q1 et les M − r vecteurs restant dans Q2 appartiennent à l’espace nul. Cela conduit à travailler
avec les matrices Q1,r ∈ M (N, r) et Q2,r ∈ M (M, r) telles que Q1 = [Q1,r Q1,N −r ] et Q2 = [Q2,r Q2,M−r ]
respectivement. Dans ce cas la décomposition en valeurs singulières de la matrice A s’écrit
  
 Σr 0r,M−r QT 2,r
A = Q1,r Q1,N −r = Q1,r Σr QT2,r . (A.15)
0N −r,r 0N −r,M−r QT 2,M−r

Les valeurs singulières associées à la décomposition décroissent en général de façon extrêmement ra-
pide, ce qui signifie que le contenu de la matrice est principalement caractérisé par les premiers vecteurs
singuliers qui sont associés aux plus grandes valeurs singulières. Il est alors courant d’approcher la matrice
A par une décomposition en valeurs singulières tronquée qui, à la différence de l’équation (A.15), est in-
exacte. Si les p < r premières valeurs singulières sont conservées, alors la matrice A s’approche au moyen
des matrices Q1,p ∈ M (N, p), Q2,p ∈ M (M, p) et Σp ∈ M (p, p) par

A ≈ Ap = Q1,p Σp QT
2,p . (A.16)

213
A. É LÉMENTS D ’ ALGÈBRE LINÉAIRE ET MATRICIEL

La décomposition en valeurs singulières est un processus largement utilisé en algèbre linéaire qui per-
met notamment de calculer le pseudo-inverse d’une matrice. Celui-ci généralise la définition de l’inverse
d’une matrice au cas d’une matrice rectangulaire quelconque. Par définition, le pseudo-inverse d’une ma-
trice A ∈ M (N, M ) est donné par l’expression

A+ = Q2 Σ+ QT
1. (A.17)

La matrice Σ+ correspond elle-même au pseudo-inverse de la matrice Σ, qui est simplement définie pour
une matrice diagonale au moyen des inverses non nuls de la diagonale principale par
 
+ Σ+ 0r,M−r 
Σ = r avec Σ+ −1 −1
r = diag σ1 , . . . , σr . (A.18)
0N −r,r 0N −r,M−r

Le pseudo-inverse ainsi défini par l’équation (A.17) est l’unique matrice de M (N, M ) qui vérifie les quatre
conditions de Moore-Penrose suivantes :

A A+ A = A, (A.19a)
A+ A A+ = A+ , (A.19b)
T
A A+ = A A+ , (A.19c)
T
A+ A = A+ A. (A.19d)

Si les colonnes de A sont linéairement indépendantes, alors r = M et AT A est inversible ; il s’ensuit que
le pseudo-inverse est explicitement défini par A+ = (AT A)−1 AT avec les propriétés (A.19a) et (A.19c) 1 .
Par conséquent on retrouve dans ce cas la définition du pseudo-inverse obtenue avec le problème moindres
carrés (A.22). De la même façon, si les lignes de A sont linéairement indépendantes, alors r = N et la
matrice A AT est inversible ; on montre alors que le pseudo-inverse est donné par A+ = AT (A AT )−1 .
Enfin, si les lignes et les colonnes de A sont linéairement indépendantes, alors la matrice A est inversible et
le pseudo-inverse coïncide avec l’inverse classique : A+ = A−1 .

A.3 Résolution approchée de problèmes linéaires


À plusieurs reprises dans ce document, il est question de résoudre un problème linéaire de la forme

A X = B, (A.20)
où X ∈ R est le vecteur des inconnues qui doivent être déterminées, A ∈ M (N, M ) est la matrice des
M

données qui est non inversible dans le cas général et B ∈ RN est le vecteur des observations.
Le problème (A.20) a soit une solution unique, soit une infinité de solutions, soit aucune solution en
fonction de la valeur du rang r < min (N, M ) de la matrice A. Pour plus de détails, le lecteur pourra
consulter [223, Chap. 2] et [93, Chap. 5]. Lorsque N < M , alors le problème est sous-déterminé puisqu’il y
a moins d’équations que d’inconnues à déterminer. Dans ce cas, r ≤ N et on peut toujours supposer que
les r premières lignes de la matrice A sont indépendantes et que les N − r dernières sont des combinai-
sons linéaires des r premières. Alors si les N − r derniers termes du second membre B vérifient les mêmes
combinaisons linéaires dites de compatibilité, les N − r dernières équations sont superflues. Dans le cas
contraire, le système n’a pas de solution puisque tout vecteur solution d’une des r premières lignes ne peut
être solution d’une des N − r dernières lignes. Lorsque r = N , il existe seulement r < M inconnues jouant
réellement un rôle dans le problème, et M − r variables dites libres. Il existe par conséquent une infinité de
solutions qui diffèrent seulement d’un vecteur du sous-espace Ker(A) = {x ∈ RM , A x = 0}. Au contraire,
lorsque N > M , le problème est sur-déterminé puisqu’il y a trop d’équations par rapport au nombre d’in-
connues et le problème ne possède en général pas de solution.
Lorsque le système n’a pas de solution exacte, il est toujours possible de chercher une solution appro-
chée, telle qu’elle satisfasse au mieux le système d’équations. La solution classique consiste à minimiser
1 En effet, en remplaçant la relation (A.19c) dans (A.19a) on a : A = (A A+ )T A = (A+ )T AT A. En prenant la transposée de la

dernière égalité, on a AT = AT A A+ , et puisque la matrice AT A est inversible lorsque r = M , on a bien A+ = (AT A)−1 AT .

214
A.3. Résolution approchée de problèmes linéaires

l’erreur de projection orthogonale par une approche moindres carrés (voir [223, Chap. 3] et [93, Chap. 5]).
La solution moindres carrés X e du système indéterminé caractérisé par l’équation (A.20) satisfait alors les
équations normales

AT A X e = AT B. (A.21)
Si les colonnes de la matrice A sont linéairement indépendantes de sorte que r = M , alors la matrice AT A
est carrée, symétrique et surtout inversible. Par conséquent l’unique solution du problème moindres carrés
donné par l’équation (A.21) est définie par la relation
 
e = AT A −1 AT B = A+ B,
X (A.22)

qui fournit la meilleure solution — dans le sens où les valeurs obtenues maximisent la projection.
Cependant, l’évaluation de la solution précédente est la plupart du temps délicate puisque la matrice A
est souvent très mal conditionnée. Ceci se caractérise par le nombre de conditionnement

κ(A) = σ1 /σr , (A.23)

qui correspond au rapport de la valeur singulière maximale sur la valeur singulière minimale introduites
toutes deux à l’équation (A.14) dans le cadre de la décomposition en valeurs singulières. Le nombre de
conditionnement donne une estimation de la sensibilité de la solution obtenue si une petite perturbation
du second membre est pratiquée. Lorsque ce dernier prend des valeurs très élevées, le pseudo-inverse cal-
culé par les relations (A.17) ou (A.22) est en général lui-même très mal conditionné puisqu’il fait intervenir
les inverses des valeurs singulières.
Pour améliorer l’approximation de la solution, il est nécessaire de réduire le nombre de conditionne-
ment. Les techniques les plus courantes consistent soit à pratiquer une régularisation de Tikhonov [229] du
problème (A.20), soit à effectuer une décomposition en valeurs singulières de la matrice A puis à éliminer
les lignes et les colonnes des matrices de la décomposition qui sont associées aux valeurs singulières les
plus petites. On se concentre ici sur la seconde solution à l’aide de laquelle la matrice A peut être approchée
par la décomposition en valeurs singulières (A.15). Il est alors possible de définir son pseudo-inverse par
la relation (A.17). En outre, si le rang de la matrice A vaut r = M alors la matrice AT A est inversible et
on a indiqué au paragraphe A.2 que le pseudo-inverse est explicitement défini par A+ = (AT A)−1 AT .
Par conséquent la définition du pseudo-inverse à partir de la décomposition en valeurs singulières coïn-
cide avec celle obtenue avec la formulation du problème moindres carrés (A.22) si bien que le problème
du mauvais conditionnement de la matrice A n’est pas résolu. Pour y remédier, on peut tenter d’effectuer
une approximation du pseudo-inverse dans laquelle n’interviennent que les p < r plus grandes valeurs
singulières associées à la décomposition en valeurs singulières, de sorte que le nombre de conditionne-
ment κ(Ap ) = σp /σ1 soit nettement plus petit. On considère donc la décomposition en valeurs singulières
tronquée de la matrice A définie à l’équation (A.16) et le pseudo-inverse associé à la matrice Ap est alors
approché par
+
A+ T
p = Q2,p Σp Q1,p . (A.24)
Le système (A.20) est finalement résolu de façon approchée et la solution est définie par
e = A+ B.
X (A.25)
p

Le choix de l’indice de troncature p est toutefois délicat et plusieurs techniques ont été développées pour
déterminer correctement le pseudo-inverse défini à l’équation (A.24). La solution la plus simple consiste à
imposer un nombre de conditionnement κ0 (Ap ) que la matrice à inverser ne doit pas dépasser. Les valeurs
singulières les plus petites sont alors éliminées successivement jusqu’à ce que le nombre de conditionne-
ment soit inférieur à κ0 (Ap ). Cependant, ce choix est arbitraire et surtout la troncature est pratiquée indé-
pendamment du second membre B. La méthode de la courbe en L proposée par Hansen [105, 106] offre un
critère souvent efficace de sélection de l’indice de troncature p en fonction du second membre. Le principe
s’appuie en partie sur une régularisation de Tikhonov du problème (A.20) pour lequel on cherche à mini-
2
miser kA X − Bk2 + γ kL Xk , où L est un opérateur choisi de manière adéquate et γ est le paramètre de
régularisation de Tikhonov. La solution du problème régularisé est alors Xγ = (AT A + γ 2 LT L)−1 (AT B).
La difficulté dans la méthode de régularisation de Tikhonov est de déterminer le facteur γ approprié. Han-
sen [105, 106] a donc suggéré de déterminer la valeur du paramètre γ comme étant celle pour laquelle la

215
A. É LÉMENTS D ’ ALGÈBRE LINÉAIRE ET MATRICIEL

courbe définie par δ = kL Xγ k en abscisse et η = kA Xγ − Bk en ordonnée a la plus grande courbure. En ef-


fet, cette courbe possède en général une partie relativement verticale et une autre relativement horizontale,
d’où le nom de courbe en L. Le point de courbure maximale correspond alors au coin du L. La courbure est
d’autant plus marquée lorsqu’on considère la courbe (log(δ), log(η)). Le principe peut être appliqué pour
déterminer efficacement l’indice de troncature de la décomposition en valeurs singulières. En effet, si on
considère que L = I et qu’on dispose déjà de la décomposition en valeurs singulières de la matrice A, alors
on peut définir une courbe discrète de coordonnées (δp , ηp ) telles que δp = kXp k et ηp = kA Xp − Bk. Le
vecteur Xp est dans ce cas construit en conservant seulement les p premiers vecteurs singuliers de la décom-
position en valeurs singulières tronquée de sorte que X e p = A+p B. L’angle maximal sur la courbe discrète
indique alors l’indice de troncature p à conserver. D’autres variantes pour la détermination de l’indice de
troncature ont été développées et comparées à la méthode de la courbe en L par Xu [249] entre autres. Par
ailleurs Cordier et al. [48] ont employé une régularisation de Tikhonov étendue à l’ordre un ou deux pour
déterminer les coefficients de leur modèle d’ordre réduit. Le principe consiste simplement à choisir la ma-
trice L de sorte qu’elle représente un opérateur de dérivation d’ordre un ou deux. Toutefois les résultats
obtenus dans [48] indiquent que la régularisation à l’ordre zéro (L = I) fournit la meilleure approximation
des coefficients du modèle d’ordre réduit.

216
Annexe B
Compléments théoriques sur la décomposition
orthogonale propre

Sommaire
B.1 Expression de l’opérateur R dans une base canonique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 217
B.2 Décomposition spectrale de l’opérateur R . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 218
B.2.1 Détermination du rang de l’opérateur R . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 218
B.2.1.1 Caractère auto-adjoint . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 218
B.2.1.2 Détermination du rang de R . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 218
B.2.2 Décomposition spectrale des opérateurs de Hilbert-Schmidt . . . . . . . . . . . . . . . 220
B.2.2.1 Compacité pour les opérateurs de Hilbert-Schmidt . . . . . . . . . . . . . . 220
B.2.2.2 Théorème de décomposition spectrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 221
B.3 Équivalence entre la méthode directe et la méthode des clichés en dimension finie . . . . . 222

Dans ce paragraphe, on établit quelques propriétés fondamentales de l’opérateur R intervenant dans le


problème aux valeurs propres (2.16), de manière à justifier l’existence de solutions et au passage celle de la
décomposition orthogonale propre. Dans un premier temps, l’expression du terme général de l’opérateur
dans une base canonique de l’espace de Hilbert est donnée, puis l’application du théorème spectral pour
les opérateurs de Hilbert-Schmidt sera justifiée dans un second paragraphe. Enfin, pour terminer, l’équiva-
lence entre la méthode directe et celle des clichés sera démontrée en dimension finie.
On considère pour la suite une base orthonormée {ei }i∈I de l’espace de Hilbert H, telle que l’ensemble
I soit éventuellement infini. On introduit par ailleurs le sous-espace SX = Vect {x(m) , m = 1, . . . , M }
correspondant à l’espace engendré par l’ensemble X des clichés. Le sous-espace SX de dimension finie
r = dim SX est alors entièrement caractérisé par une base orthonormée notée {fi }ri=1 .

B.1 Expression de l’opérateur R dans une base canonique


Les clichés x(m) — et plus généralement tout vecteur y de H — se décomposent sur la base {ei }i∈I de
l’espace H au moyen des relations
X (m)
x(m) = ηi ei ∀m ∈ J1; M K, (B.1a)
i∈IX
y= µi ei ∀y ∈ H. (B.1b)
i∈I

En utilisant les décompositions (B.1a) et (B.1b) sur


Pla base(m)
{ei }i∈I , le produit
P scalaire entre un cliché x(m) et
(m)
un vecteur quelconque y ∈ H s’écrit hx , yi = i,j∈I ηi µj hei , ej i = i∈I ηi µi puisque hei , ej i = δij .
(m)

217
B. C OMPLÉMENTS THÉORIQUES SUR LA DÉCOMPOSITION ORTHOGONALE PROPRE

L’image Ry d’un élément quelconque y ∈ H par l’opérateur R défini à l’équation (2.11) s’exprime alors sur
la base canonique avec la relation
! !
hD E i M
X X X X M
X
(m) (m) (m) (m) (m) (m)
Ry = E x ,y x = αm ηi µi ηj ej = αm ηi ηj µi ej . (B.2)
m=1 i∈I j∈I i,j∈I m=1

Pour mettre en évidence le terme général de l’opérateur R, on considère uniquement la j-ième com-
posante duP vecteur
PMRy qui(m) correspond à hRy, ej i. En réorganisant les termes on obtient l’expression
(m)
hRy, ej i = i∈I m=1 αm ηi ηj µi qui permet d’isoler le terme général de l’opérateur R de la partie
relative au vecteur y lorsque les vecteurs sont décomposés sur la base {ei }i∈I . Le terme général qui s’écrit
donc
XM h i
(m) (m) (m) (m)
Rij = αm ηi ηj = E ηi ηj (B.3)
m=1

est défini par la moyenne du produit des composantes i et j des clichés exprimés sur la base {ei }i∈I . Lors-
qu’une base spatiale est employée, Rij correspond à la fonction de corrélation spatiale entre un point i et
un point j de l’espace.

B.2 Décomposition spectrale de l’opérateur R


L’existence de la décomposition orthogonale propre d’un ensemble X de clichés repose sur l’utilisation
de la décomposition spectrale pour les opérateurs de Hilbert-Schmidt. Afin de justifier que l’opérateur de
corrélation vérifie les propriétés de ce type d’opérateurs, il est nécessaire dans un premier temps d’établir
le rang de l’opérateur de corrélation avant de pouvoir invoquer le théorème de décomposition spectrale.

B.2.1 Détermination du rang de l’opérateur R


B.2.1.1 Caractère auto-adjoint

Définition B.1 : Soit E un espace de Hilbert et T ∈ L (E) une application linéaire de E dans lui-même. On dit
que l’opérateur T est normal si il commute avec son adjoint noté T ⋆ , i. e. T T ⋆ = T ⋆ T . On dit par ailleurs que T est
hermitien (ou auto-adjoint, ou simplement symétrique si K = R) si il coïncide avec son adjoint : T = T ⋆ . Cette
propriété se traduit pour tout y, z ∈ E par
hT y, zi = hy, T zi , (B.4)
ce qui signifie par conséquent que tout opérateur hermitien est normal.

On vérifie alors que cette définition s’applique à l’opérateur R pour y, z ∈ H quelconques. En dévelop-
pant l’expression de R et en utilisant la propriété de commutation de l’opérateur de moyenne E [·] avec le
produit scalaire qui avait été donnée à l’équation (2.5b), on obtient


(m) (m)  

 


hRy, zi = E

x , y x z =
E 
x(m) , y x(m), z = E x(m) , y x(m) , z
, 
(B.5)
= E x(m) , z x(m) , y = E x(m) , z x(m) , y = hy, Rzi .

La dernière égalité provient du fait que le produit scalaire est une application symétrique et par conséquent
l’opérateur R est bien auto-adjoint.

B.2.1.2 Détermination du rang de R

Définition B.2 : Soit E, F deux espaces vectoriels sur un corps K et T ∈ L (E, F ) une application linéaire
de E dans F . Le rang de l’opérateur T est égal à la dimension de l’image T (E) de E par T , définie par Im(T ) =
{T x, x ∈ E}. On dit alors que T est de rang fini si et seulement si la dimension de l’image Im(T ) est finie.

218
B.2. Décomposition spectrale de l’opérateur R

D’après la définition précédente, le rang de l’opérateur R ∈ L (H) est la dimension de son image Im(R).
Or celle-ci est étroitement liée à la dimension de l’espace SX engendré par l’ensemble X des clichés étant
donné la définition (2.11) de R. Dans ce qui suit, on établit que le rang de R noté pour l’instant rg (R) est
égal à la dimension r de l’espace SX . À cet effet, on commence par démontrer le lemme suivant.


Lemme B.1 : Soit y ∈ SX . Si x(m) , y = 0 pour tout m = 1, . . . , M alors y = 0.

Démonstration. Puisque y ∈ SX = Vect {x(m) , m = 1, . . P


. , M }, il est possible de l’exprimer comme une com-
binaison linéaire des clichés qui engendrent SX : y = M i=1 ai x , où les ai sont des scalaires appartenant
(i)

à K. La somme pondérée par les coefficients a


PM m (m) de la relation hx(m) , yi = 0 du lemme qui est supposée
vraie pour tout m ∈ J1; M K donne alors m=1P am hx , yi = 0. Finalement en introduisant la somme dans
le premier membre du produit scalaire on a h M m=1 am x
(m)
, yi = 0. Cette dernière relation correspond en
fait au carré de la norme du vecteur y qui doit être nulle (hy, yi = kyk2 ). Ceci implique que le vecteur y est
nécessairement le vecteur nul puisque le produit scalaire est une application définie positive.

Propriété B.1 : Soit r = dim SX . Alors rg(R) = r et Im (R) = SX .

Démonstration. On peut montrer cette propriété en deux étapes au cours desquelles l’image Im(R) =
Vecti∈I {Rei } est encadrée par deux ensembles de dimension identiquement égale à r.
Im(R) ⊂ SX
En développant l’expression de l’image par R du vecteur de base ei on a Rei = E[βmi x(m) ] avec
βmi = hx(m) , ei i ∈ K. Toute image par R d’un des vecteurs de la base {ei }i∈I s’exprime alors comme une
combinaison linéaire des clichés lorsqu’on développe l’expression de l’opérateur de moyenne E [·]. Ainsi,
pour tout i ∈ I
XM M
X
R ei = αm βmi x(m) = γmi x(m) , (B.6)
m=1 m=1

et par conséquent Rei ∈ Vectm∈J1;MK {x (m)


} = SX , ce qui signifie que l’image de l’opérateur R est incluse
dans l’espace engendré par les clichés :
Im(R) ⊂ SX . (B.7)
On note alors
r = dim SX (B.8)
la dimension de l’espace engendré par l’ensemble des clichés qui est clairement finie puisque la famille des
m=1 est une collection finie. On impose alors qu’au moins un cliché soit non nul de sorte que r ≥ 1.
{x(m) }M
Par ailleurs, si la famille des clichés est libre, alors le rang atteint sa valeur maximale r = M et dans ce cas
m=1 est une base de SX .
{x(m) }M

Vectj∈J1;rK (Rfj ) ⊂ Im(R)


Soit une base orthonormée {fj }rj=1 de l’espace SX . L’inclusion est triviale puisque Im(R) = {Ry, ∀y ∈ H}
et fj est un élément de SX donc par conséquent de H. On a donc immédiatement

Vectj∈J1;rK (Rfj ) ⊂ Im(R). (B.9)

On cherche à présent à montrer que l’espace engendré par l’image de la base {fj }rj=1 par R est aussi de
dimension r. Pour cela, on montre que la famille {Rfj }rj=1 est une famille libre. Pr Les clichés se décomposent
sur la base {fj }rj=1 puisqu’ils appartiennent à SX , ce qui conduit à x(m) = i=1 PM i fi . Ainsi,
η (m)
Pr le(m) terme Rfj
(m)
se développe de la même façon que pour obtenir la relation (B.2) Pr en : Rf j = m=1 mα ( η
i=1 i ηj fi ).
On considère alors la famille de scalaires (a1 , . . . , ar ) telle que j=1 aj Rfj = 0. La famille {Rfj }j=1 est donc
r

libre à condition que tous les coefficients aj soient nuls. L’interversion des symboles de sommation conduit
alors à l’égalité
  
Xr M
X X r
 (m) (m)
αm  aj ηi ηj  fi = 0. (B.10)
i=1 m=1 j=1

219
B. C OMPLÉMENTS THÉORIQUES SUR LA DÉCOMPOSITION ORTHOGONALE PROPRE

Or
PMles {fjP }rj=1 forment une base de SX et par conséquent une famille libre, ce qui permet d’écrire
r (m) (m)
m=1 αm ( j=1 aj ηi ηj ) = 0 pour tout i = 1, . . . , r. Cette dernière relation est alors multipliée par
la somme des coefficients ai et la réorganisation des sommes donne
M r
! r 
X X (m) 
X (m)
αm ai ηi aj ηj  = 0. (B.11)
m=1 i=1 j=1
Pr
Finalement on définit le vecteur a = i=1 ai fi ∈ SX comme la combinaison linéaire des coefficients intro-
duits comme pondération de la famille Rfj dans la relation (B.10). Les deux sommes apparaissant dans la
dernière expression de l’équation (B.11) s’interprètent alors comme le produit scalaire entre le vecteur a et
un cliché x(m) puisque
* r +
D E X Xr X r Xr
(m) (m) (m) (m)
a, x = ai f i , ηj fj = ai ηj hfi , fj i = ai ηi . (B.12)
i=1 j=1 i,j=1
| {z } i=1
=δij
PM
Par conséquent en remplaçant la relation (B.12) dans (B.11) on obtient : m=1 αm ha, x(m) i2 = 0. Or la famille
des αm qui correspond aux poids de l’opérateur de moyenne E [·] ne contient que des termes strictement
positifs, si bien que la condition précédente se réduit à ha, x(m) i = 0 pour tout m = 1, . . . , M . D’après le
lemme B.1, cela signifie que a P = 0 puisque ce vecteur est contenu dans SX par définition. Pour conclure,
r
il suffit de remarquer que a = i=1 ai fi et puisque les {fj }rj=1 forment une base de SX et par conséquent
une famille libre on a bien ai = 0 pour tout i = 1, . . . , r.
La famille des Rfj est donc bien une famille libre, et puisque c’est trivialement une famille génératrice
de Vectj∈J1;rK {Rfj }, il s’agit d’une base. L’espace Vectj∈J1;rK {Rfj } est donc de dimension égale au cardinal
de la base, soit r. L’image de R est donc encadrée par les relations d’inclusion (B.7) et (B.9) telle que
Vectj∈J1;rK (Rfj ) ⊂ Im(R) ⊂ SX . (B.13)
Finalement, puisque les dimensions de Vectj∈J1;rK {Rfj } et SX sont identiquement égales à r, la dimension
de Im(R) est nécessairement égale aussi à r, ce qui signifie que rg(R) = r. Le rang de l’opérateur R est
alors compris dans l’intervalle J1; M K qui dépend du nombre M de clichés mais aussi de leur dépendance
linéaire. En outre, puisque Im(R) ⊂ SX et que les dimensions sont égales, on a
Im(R) = SX . (B.14)

Remarque B.1 : Expression des modes POD en fonction des clichés


La relation (B.6) établie pour les vecteurs de base ei ∈ I peut être généralisée à tout vecteur y ∈ H, de sorte que
l’image Ry se décompose sur la famille des clichés de l’ensemble X qui ne forme pas nécessairement une base — sauf
si les clichés sont linéairement indépendants.
PMCette(j)
décomposition s’applique en particulier aux modes POD ϕ(j) ∈
(j)
SX ⊂ H, ce qui permet d’écrire R ϕ = m=1 γm x(m) en notant γm = αm hx(m) , ϕ(j) i les coefficients de cette
(j)

décomposition. Par ailleurs, puisque les modes POD sont solutions du problème aux valeurs propres Rϕ(j) = λj ϕ(j) ,
la relation précédente conduit à
XM (j)
γm (m)
ϕ(j) = x . (B.15)
m=1
λj
(j) (j)
On retrouve ainsi la décomposition (2.20) en notant cm = γm /λj ce qui est possible pour tout j = 1, . . . , r
puisque dans ce cas les modes POD sont associés à des valeurs propres λj non nulles. La relation précédente justifie
donc la décomposition (2.20) qui a été supposée pour formuler le problème aux valeurs propres annexe de la méthode
des clichés.

B.2.2 Décomposition spectrale des opérateurs de Hilbert-Schmidt


B.2.2.1 Compacité pour les opérateurs de Hilbert-Schmidt
Puisqu’on a établi auparavant que l’opérateur R était de rang fini, les propriétés suivantes tirées de [243,
p. 437] s’appliquent à l’opérateur R.

220
B.2. Décomposition spectrale de l’opérateur R

Propriété B.2 : Tout opérateur T ∈ L (E, F ) de rang fini est de Hilbert-Schmidt.

Propriété B.3 : Les opérateurs de Hilbert-Schmidt sont compacts. En outre, le sous-espace des opérateurs de rang
fini est dense dans l’ensemble H (E, F ) des opérateurs de Hilbert-Schmidt pour la norme de Hilbert-Schmidt.

B.2.2.2 Théorème de décomposition spectrale


Le présentation qui suit reprend les définitions et démonstrations établies en particulier dans les ou-
vrages de Schwartz [205], Chap. XXIII, §7 et 8 et de Wagschal [243], Chap. 3, §G. Le lecteur est en particulier
invité à s’y reporter pour les démonstrations des propriétés et du théorème de décomposition spectral qui
suivent.
Soit E un espace de Hilbert sur un corps K et T ∈ L (E) une application linéaire de E dans lui-même.
On considère alors l’opérateur Tλ = λIdE − T , où IdE est l’identité de l’espace E et λ ∈ K est une valeur
dite régulière si Tλ est un isomorphisme de E dans E. L’ensemble ρ(T ) des valeurs régulières est appelé
l’ensemble résolvant de T et si λ est une valeur régulière, l’application (λIdE − T )−1 est la résolvante de T au
point λ.
Le complémentaire de l’ensemble résolvant noté σ(T ) porte le nom de spectre de T . Lorsque λ ∈ σ(T )
on parle de valeur spectrale de l’opérateur T . Ceci signifie que Tλ n’est pas une bijection — i. e. λIdE − T
n’est pas inversible — et en particulier si Tλ n’est pas injectif, λ est une valeur propre. On note alors Eλ 6= ∅
le sous-espace propre associé à la valeur propre λ défini par

Eλ = Ker Tλ = {x ∈ E, λx − T x = 0} . (B.16)

Les éléments de Eλ correspondent alors aux vecteurs propres associés à λ. On notera par ailleurs Pλ le
projecteur orthogonal de E sur le sous-espace propre Eλ .

Propriété B.4 : Soit T ∈ L (E) un opérateur hermitien, alors son spectre σ(T ) est réel.

La propriété précédente tirée de [243, p.426] s’applique à l’opérateur R puisqu’on a démontré au para-
graphe B.2.1 qu’il est auto-adjoint (i. e. hermitien). Ainsi, l’opérateur R possède un spectre réel. Par ailleurs,
on peut montrer que l’opérateur R est positif. Il suffit pour cela de montrer que pour tout y ∈ H, hRy, yi ≥ 0.
Le développement du produit scalaire donne


(m) (m)  


hRy, yi = E x , y x , y = E x(m) , y x(m) , y
h
2 i X M D E2
= E x(m) , y = αm x(m) , y , (B.17)
m=1 | {z }
≥0

et l’opérateur R est donc positif si et seulement si les poids αm associés à l’opérateur de moyenne sont tous
positifs, ce qui est en pratique le cas. On ne dispose pas de résultats sur le caractère défini de l’opérateur
dans le cas général. Tout au plus, on se contentera de dire que R est défini non négatif — i. e. positif mais
pas forcément défini. On a alors l’équivalence suivante [243, p.430-31] :

Propriété B.5 : Soit T ∈ L (E) un opérateur hermitien compact. Alors :

T positif ⇐⇒ σ(T ) ∈ [0; +∞[.

L’opérateur R intervenant dans le problème aux valeurs propres (2.16) est donc finalement hermitien
(ou symétrique puisque K = R), compact et positif. On en déduit donc que son spectre est contenu dans
la droite des réels positifs R+ . Finalement, le théorème de décomposition spectrale [205, p.427] fournit des
résultats importants concernant l’orthogonalité et la quantité de valeurs propres associées à l’opérateur R
impliqué dans la définition de la décomposition orthogonale propre.

Théorème B.1 : Théorème de décomposition spectrale


Soient E un espace de Hilbert et T ∈ L (E) un opérateur compact symétrique si K = R ou hermitien si K = C.
Alors :

221
B. C OMPLÉMENTS THÉORIQUES SUR LA DÉCOMPOSITION ORTHOGONALE PROPRE

(i) l’ensemble des valeurs propres σ(T ) est fini ou peut être rangé en une suite convergeant vers 0, 0 appartenant
ou non au spectre ;
(ii) pour chaque valeur propre λ ∈ σ(T ), le sous-espace propre associé Eλ est de dimension finie. De plus, les
sous-espaces propres sont orthogonaux deux à deux ;
(iii) E est la somme hilbertienne des sous-espaces propres Eλ ; la décomposition porte alors le nom de décomposition
spectrale de E relativement à T et s’écrit M
E= Eλ ; (B.18)
λ∈σ(T )

(iv) les familles (λPλ )λ∈σ(T ) et λPλ λ∈σ(T )
sont sommables dans L (E) et de somme T et T ⋆ telles que
X X
T = λPλ et T⋆ = λPλ . (B.19)
λ∈σ(T ) λ∈σ(T )

Le théorème spectral fournit un certain nombre d’informations intéressantes, à commencer par le fait
qu’il existe au plus une infinité dénombrable de valeurs propres pouvant être organisées en une série
convergeant vers 0. Toutefois, on a montré auparavant que R était un opérateur de Hilbert-Schmidt de
rang fini. Par conséquent, le nombre de valeurs propres non nulles est dans ce cas fini est égal à r, i. e.
la dimension de l’espace engendré par l’ensemble X des clichés. Ainsi, l’opérateur R est caractérisé par r
valeurs propres réelles positives.
Le second point indique que les sous-espaces propres sont orthogonaux entre eux, si bien que les vec-
teurs propres associés à deux valeurs propres distinctes sont orthogonaux entre eux. Enfin, la décompo-
sition spectrale (B.18) signifie que n’importe quel vecteur de l’espace E s’écrit de façon unique comme
combinaison linéaire des vecteurs propres du spectre σ(T ). Cependant, les vecteurs propres associés aux
valeurs propres non nulles de l’opérateur R ne permettent de représenter que l’ensemble des éléments du
sous-espace engendré par les clichés1 . En particulier les clichés se décomposent bien sur la base de ces
vecteurs propres et la décomposition (2.17) existe bien.

B.3 Équivalence entre la méthode directe et la méthode des clichés en


dimension finie
Dans ce paragraphe, on cherche à établir le lien d’équivalence entre la méthode directe et celle des clichés
sans recourir à l’hypothèse d’indépendance linéaire des clichés qui a été émise pour établir la méthode
des clichés au paragraphe 2.2.2. Pour simplifier, on se place dans un espace de Hilbert de dimension finie
N = dim(H) < ∞ de manière à pouvoir faire appel à des concepts d’algèbre linéaire matricielle. Des
résultats d’équivalence entre la décomposition orthogonale propre et décomposition en valeurs singulières
pourront aussi être trouvés dans l’article de Liang et al. [144] et le rapport de Volkwein [241].
PNSoit(m){ei }i∈J1;N K une base orthonormée de l’espace H telle que les clichés se décomposent en x(m) =
i=1 ηi ei . En suivant la définition (A.3), on définit la matrice des clichés X = Matei (X) comportant les
coordonnées des clichés de l’ensemble X exprimés dans la base {ei }i∈J1;N K . On obtient ainsi la matrice
 
(1) (M)
η1 · · · η1
 . .. 
X=  ..

. , (B.20)
(1) (M)
ηN · · · ηN

dont le rang correspond à la dimension de l’espace engendré par ses colonnes, i. e. à la dimension de SX .
D’après la notation introduite en (B.8), on a rg(X) = r avec 1 ≤P
r ≤ M.
√ N √ (m)
On introduit pour la suite les clichés xe(m) = αm x(m) = i=1 αm ηi ei . Les poids de pondération
associés à l’opérateur de moyenne sont regroupés dans la matrice diagonale α = diag(α1 , . . . , αM ) et on
1 Holmes et al.[112] montrent dans le cas de H = L2 (Ω) que la base des vecteurs propres permet de représenter toutes les fonctions
contenues dans le sous-espace engendré par les vecteurs propres, et même n’importe quelle fonction indistingable au sens de la norme
de L2 (Ω) d’un cliché x(m) .

222
B.3. Équivalence entre la méthode directe et la méthode des clichés en dimension finie

√ √
définit la matrice α
e = diag( α1 , . . . , αM ) comme au paragraphe 2.2.2. Les clichés xe(m) se déduisent donc
des x (m) e
par la relation matricielle X = X α. e
e La matrice X est de même rang que la matrice des clichés X
puisque tous les poids de pondération associés à l’opérateur de moyenne sont strictement positifs.
D’après l’expression (B.3) établie au paragraphe B.1, l’opérateur linéaire R peut s’écrire — en dimension
finie — comme une matrice de taille N × N définie par le produit matriciel

eX
R = X α XT = X e T. (B.21)

On considère par ailleurs l’opérateur

e T XT X α
R⋆ = α eT X
e=X e (B.22)

qui correspond à l’opérateur de la méthode des clichés établi au paragraphe 2.2.2 lorsque le produit scalaire
est celui de la base canonique. Dans ce qui suit, on cherche alors à montrer que les valeurs et les vecteurs
propres associés à R⋆ permettent de retrouver de manière équivalente les valeurs propres et les modes POD
correspondant à l’opérateur R de la méthode directe. L’objectif est donc de montrer le théorème suivant.

Théorème B.2 : Équivalence entre la méthode directe et la méthode des clichés


Soit X la matrice représentative des clichés dans un espace de Hilbert de dimension finie N et ϕ(j) , j = 1, . . . , r les
modes POD associés aux clichés. Alors
eX
ϕ(j) solution de R ϕ(j) = λj ϕ(j) pour tout j ∈ J1; rK avec R = X eT
m
p
ϕ(j) e d(j) avec d(j) solution de R⋆ d(j) = λj d(j) pour tout j ∈ J1; rK et R⋆ = X
= 1/ λj X e T X.
e

Pour établir l’équivalence des deux méthodes, une décomposition en valeurs singulières de la matrice
e est pratiquée. Seuls les vecteurs singuliers associés aux valeurs propres non nulles sont conservés, de
X
sorte que la décomposition s’écrit (voir l’équation (A.15) au paragraphe A.2)

e = Q1,r Σr QT .
X (B.23)
2,r

La matrice orthogonale Q1,r ∈ M (N, r) (resp. Q2,r ∈ M (M, r)) contient les vecteurs singuliers à
gauche (resp. à droite) de X e et la matrice diagonale Σr ∈ M (r, r) regroupe sur sa diagonale principale
les valeurs singulières non nulles σ1 ≥ . . . ≥ σr > 0.
L’introduction de la décomposition en valeurs singulières (B.23) de la matrice Xe dans l’expression (B.21)
2
de R conduit à R = Q1,r Σr Q2,r Q2,r Σr Q1,r = Q1,r Σr Q1,r puisque Q2,r est une matrice orthogonale. On
T T T

récrit de préférence la relation précédente sous la forme d’un problème aux valeurs propres en multipliant
à droite par Q1,r et en utilisant l’orthogonalité des vecteurs singuliers à gauche ce qui donne

R Q1,r = Q1,r Σ2r . (B.24)

Par conséquent le problème (B.24) est identique à celui de la méthode directe qui s’écrit en notation matri-
cielle R Φ = Φ Λ avec Φ = [ϕ(1) . . . ϕ(r) ] et où Λ ∈ M (r, r) est la matrice carrée diagonale contenant les r
valeurs propres associées aux modes POD. Par identification des termes, on obtient donc

Φ = Q1,r et Λ = Σ2r . (B.25)

Ainsi, les r premiers vecteurs singuliers à gauche Q1,r de la décomposition en valeurs singulières de X e
correspondent aux modes POD Φ et le carré des valeurs singulières de X e s’identifie aux valeurs propres du
problème POD formulé avec la méthode directe.
L’opérateur R⋆ se transforme de manière similaire en utilisant la décomposition en valeurs singulières
e qui, remplacée dans (B.22), donne R⋆ = X
(B.23) de X eT Xe = Q2,r Σr QT Q1,r Σr QT = Q2,r Σ2 QT . En-
1,r 2,r r 2,r
core une fois, on ramène l’expression précédente à celle d’un problème aux valeurs propres en multipliant
à droite par Q2,r , ce qui conduit à
R⋆ Q2,r = Q2,r Σ2r . (B.26)

223
B. C OMPLÉMENTS THÉORIQUES SUR LA DÉCOMPOSITION ORTHOGONALE PROPRE

Il s’ensuit que les r premiers vecteurs singuliers à droite Q2,r de la décomposition en valeurs singulières
de X e correspondent aux vecteurs propres d(j) du problème aux valeurs propres R⋆ D = D Λ, où D ∈
M (M, r) est la matrice D = [d(1) . . . d(r) ] qui regroupe dans ses colonnes les vecteurs propres. Par ailleurs,
le carré des valeurs singulières de X e s’identifie aux valeurs propres du problème POD formulé avec la
méthode des clichés et on a donc les relations
D = Q2,r et Λ = Σ2r . (B.27)
Les opérateurs R et R⋆ possèdent donc les mêmes valeurs propres σi2 = λi , ce qui démontre l’équiva-
lence des méthodes directe et des clichés. Les vecteurs propres correspondent alors aux modes POD avec la
méthode directe tandis qu’avec la méthode des clichés les vecteurs propres correspondent aux coefficients
de pondération de la décomposition des modes POD sur les clichés.
Finalement, à partir de la matrice des clichés pondérés Xe = X α,
e les modes POD et les valeurs propres
associées peuvent être obtenus de façon équivalente en résolvant soit le problème de la méthode directe,
soit celui de la méthode des clichés, soit en recourant à une décomposition en valeurs singulières. Les rela-
tions entre les modes POD Φ, les valeurs propres Λ = diag(λ1 , . . . , λr ) et les coefficients D permettant de
décomposer les modes POD sur les clichés sont résumées dans le tableau ci-dessous lorsque ces quantités
sont calculées par les trois méthodes possibles.

Méthode directe Méthode des clichés SVD


Opérateur de corrélation R=X eX eT R⋆ = XeT Xe —
Décomposition RΦ = ΦΛ R⋆ D = D Λ e = Q1,r Σr QT2,r
X
Modes POD Φ Φ=X e D Λ−1/2 Φ = Q1,r
Valeurs propres Λ Λ Λ = Σ2r
Pondération des clichés e T Φ Λ−1/2
D=X D D = Q2,r

Tableau B.1 : Relations entre les modes POD Φ, les valeurs propres Λ et les coefficients D lorsque ces quantités sont calculées
par la méthode directe, la méthode des clichés ou une décomposition en valeurs singulières. Les opérateurs de corrélation ainsi que
les problèmes aux valeurs propres sont précisés dans les deux premières lignes, de même que l’expression de la SVD.

Dans le paragraphe 2.2.2, on a introduit la décomposition (2.20) qui a conduit à formuler le problème
aux valeurs propres symétrisé (2.25). Les coefficients c(j) sont reliés aux vecteurs propres d(j) par la rela-
tion c(j) = α e d(j) et les modes POD normalisés sont donc donnés par la relation Φ = X e D Λ−1/2 fournie
dans le tableau B.1. De façon équivalente, on peut en déduire une expression des coefficients de la ma-
trice D en fonction des modes POD Φ pour compléter les quantités obtenues par la méthode directe. Pour
cela, il suffit « d’inverser » la relation en multipliant à droite par Λ1/2 et à gauche par X e T , ce qui donne :
Xe T Φ Λ1/2 = (X e T X)
e D. On reconnaît à droite l’opérateur de corrélation R⋆ si bien que le produit R⋆ D est
remplacé par D Λ. Finalement, en remplaçant dans l’expression précédente et en multipliant à droite par
Λ−1 , on parvient à la relation D = X e T Φ Λ−1/2 qui fournit les coefficients D en fonction des quantités Φ et
Λ produites par la résolution du problème aux valeurs propres de la méthode directe.
(m)
Pour terminer, il est utile de disposer d’une expression matricielle des amplitudes modales aj regrou-
pées dans la matrice A ∈ M (r, M ) de sorte que la décomposition orthogonale propre des clichés donnée à
l’équation (2.17) s’écrive en notation matricielle
X = Φ A. (B.28)
Les amplitudes modales sont alors simplement données par la relation A = ΦT X puisque les modes POD
sont orthonormés. Par ailleurs il est parfois nécessaire de disposer d’une relation directe en fonction des
coefficients D. Pour cela il suffit de remplacer l’expression de Φ par celle donnée dans le tableau en fonction
de D, ce qui conduit à A = (X e D Λ−1/2 )T X = Λ−1/2 DT (X e T X). La relation précédente est alors multipliée
à droite par α
e D, de sorte que dans le membre de droite apparaisse le terme (X e D = R⋆ D = D Λ. Par
e T X)
−1/2 1/2
conséquent, la relation se réduit à A α eD = Λ T
D DΛ = Λ puisque les vecteurs propres D sont
orthonormaux. Finalement, les amplitudes se déduisent par la relation suivante : A = Λ1/2 DT α e −1 . En
fonction du problème résolu, la matrice des amplitudes modales A s’écrit donc

A = ΦT X = Q T
1,r X ou e −1 = Σr QT
A = Λ1/2 DT α e −1 .
2,r α (B.29)

224
B.3. Équivalence entre la méthode directe et la méthode des clichés en dimension finie

En conclusion, on a montré que les opérateurs R et R⋆ permettaient tous deux de calculer les modes
POD associés aux clichés représentés par la matrice X. La formulation POD directe fournit directement les
modes POD comme solution du problème aux valeurs propres alors que la méthode des clichés nécessite
de résoudre un problème aux valeurs propres annexe de taille M × M à l’issu duquel les modes POD
doivent être reconstruits par combinaison linéaire des clichés suivant l’expression donnée dans le théorème
B.2. Il est important de noter que la condition d’indépendance linéaire des clichés n’est intervenue à aucun
moment alors qu’elle était nécessaire au paragraphe 2.2.2. Par conséquent, en dimension finie, les méthodes
directe et des clichés sont équivalentes, même si le rang r de la matrice des clichés est strictement inférieur
à M.

225
Annexe C
Compléments d’analyse du modèle d’ordre réduit
du système linéaire autonome

Sommaire
C.1 Influence de l’échantillonnage des clichés d’un système périodique . . . . . . . . . . . . . 227
C.2 Convergence des modes POD vers les modes propres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 232
C.2.1 Un résultat préliminaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 232
C.2.2 Convergence des vecteurs propres pour la méthode directe . . . . . . . . . . . . . . . 233
C.2.3 Convergence des vecteurs propres pour la méthode des clichés . . . . . . . . . . . . . 235

Le système linéaire et autonome considéré dans cette annexe correspond à l’exemple de la barre
encastrée-libre traité au paragraphe 3.2 dont on a étudié la réponse à une déformation initiale appliquée
à l’extrémité libre. La formulation analytique du modèle d’ordre réduit est tout d’abord employée pour
mettre en évidence l’importance de l’échantillonnage dans le cas d’un système périodique, puis, dans un
second temps, des éléments de démonstration de la convergence des modes POD vers les modes propres
seront fournis pour ce type particulier de système dynamique.

C.1 Influence de l’échantillonnage des clichés d’un système périodique


Parmi les paramètres importants entrant en ligne de compte dans la construction du modèle d’ordre
réduit, la durée sur laquelle les clichés sont prélevés requiert une certaine attention. Les résultats présentés
ici complètent ceux du paragraphe 3.3.2 où l’influence du nombre M de clichés et du nombre q de modes
POD conservés dans la base de projection a été étudiée.
La solution analytique (3.4) du système en réponse à une déformée initiale avait permis de mettre en
évidence l’expression (3.6) de la fréquence fondamentale T0 . Les clichés sont prélevés en M instants tm qu’il
est nécessaire de choisir judicieusement afin que l’opérateur de corrélation contienne un maximum d’infor-
mations pour calculer les modes POD. Un échantillonnage uniforme des clichés est pratiqué puisque la
réponse du système est périodique et ne présente pas de phénomène localisé dans le temps qui justifierait
l’emploi d’un échantillonnage variable. Ce processus de sélection est toutefois dangereux lorsque la réponse
du système est périodique car un certain nombre de clichés peuvent devenir redondants. L’objectif est donc
de déterminer sous quelles conditions l’échantillonnage uniforme fournit le maximum d’information.
La résolution du modèle non réduit est conduite sur un intervalle de temps Ie = [t0 ; t0 +Te ] au cours du-
quel les clichés sont prélevés. La durée Te correspond à la durée d’échantillonnage qui s’exprime en fonction
de la période fondamentale T0 par la relation

T e = np T 0 , (C.1)

227
C. C OMPLÉMENTS D ’ ANALYSE DU MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT DU SYSTÈME LINÉAIRE AUTONOME

où np ∈ R désigne le nombre de périodes sur lesquelles les clichés seront extraits — ce nombre étant en
général non entier. Au cours de l’intervalle de temps Ie , des clichés du modèle non réduit sont prélevés en
M instants pour calculer les modes POD. Lorsque l’échantillonnage est uniforme, ceci conduit à définir le
pas de temps d’échantillonnage des clichés
Te
δtc = . (C.2)
M
En remplaçant la durée Te par son expression (C.1), on obtient la relation

M T0
= (C.3)
np δtc

qui lie le rapport du nombre de clichés sur le nombre de périodes au rapport de la période fondamentale
sur le pas d’échantillonnage des clichés. Les paramètres introduits ci-dessus sont résumés pour plus de
clarté sur la figure C.1.

u(x = L, t)
Te = np T0
δtc

δt
T0

Figure C.1 : Représentation sur la réponse schématique du système des paramètres temporels employés pour l’analyse de l’influence
de l’échantillonnage des clichés. Les points • correspondent à la discrétisation temporelle du modèle non réduit avec le pas de temps
δt, alors que les cercles représentent les clichés prélevés de manière uniforme avec le pas de temps δtc .

Pour certaines combinaisons de M et np , le rapport M/np est entier de sorte que le pas d’échantillonnage
des clichés devient un sous-multiple de la fréquence fondamentale du système. Ainsi, pour tout k ∈ N∗

M
= k ⇐⇒ T0 = kδtc . (C.4)
np

Les combinaisons pour lesquelles le rapport M/np est entier sont problématiques puisque certains clichés
sélectionnés deviennent redondants, ce qui entraîne une diminution de la quantité d’information contenue
dans la base des clichés. Ce phénomène découle simplement du fait que les clichés ne sont plus linéairement
indépendants et se traduit donc par la chute du rang de la matrice des clichés et par voie de conséquence
de celui de l’opérateur de corrélation. Le nombre de valeurs propres non nulles diminue, de même que le
nombre de modes POD disponibles.
Afin de vérifier à quelles conditions le rang de l’opérateur de corrélation peut chuter, on trace sur la
figure C.2 l’évolution de l’erreur infinie ε∞ commise dans la réponse du modèle d’ordre réduit ainsi que
la valeur du rang r de l’opérateur de corrélation en fonction du nombre de périodes np ∈ [0, 25; 4, 0] sur
lesquelles les clichés sont échantillonnés. Le résultat est fourni pour deux valeurs du nombre total de clichés
M = 12 et M = 25. Plusieurs remarques intéressantes peuvent être formulées à partir de l’analyse des
graphiques :
• l’erreur de reconstruction explose lorsque np ≤ 0, 25 ;
• il existe des pics d’erreur localisés ;
• l’amplitude de ces pics augmente globalement avec np .

228
C.1. Influence de l’échantillonnage des clichés d’un système périodique

150 50

45

40

35
100
30

ε∞
ε∞

25

20
50
15

10

0 0
0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4
np np
14 30

12
25

10
20

8
rg(U)

rg(U)
15
6

10
4

2 5

0 0
0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4
np np
(a) M = 12 (b) M = 25

Figure C.2 : Évolution de l’erreur de reconstruction infinie ε∞ et du rang r de l’opérateur de corrélation en fonction du nombre de
périodes np sur lesquelles les clichés sont échantillonnés. Les résultats sont présentés pour deux valeurs du nombre M de clichés.
Sur chaque graphique, les droites verticales représentent les valeurs critiques M/np = k, pour k ∈ N∗ .

La première remarque signifie simplement que les informations contenues dans un ensemble de cli-
chés échantillonnés sur une durée inférieure à un quart de période sont insuffisantes pour caractériser le
système. En effet, seules les valeurs positives des déplacements sont rencontrées sur cet intervalle, et la so-
lution reconstruite par le modèle d’ordre réduit correspond à la valeur absolue de la solution de référence.
Les pics d’erreur localisés apparaissent pour certaines combinaisons de M et np , lorsque certains cli-
chés deviennent redondants en raison de la périodicité de la réponse. Ces valeurs critiques représentées
par les droites grisées sur les graphiques de la figure C.2 correspondent aux valeurs entières de M/np pour
lesquelles le pas de temps d’échantillonnage devient un sous-multiple de la période fondamentale. La re-
dondance des clichés est confirmée par les graphiques de la seconde ligne de la figure C.2 qui indiquent
que le rang évolue d’une façon aussi irrégulière que l’erreur infinie. La diminution du rang s’explique par
le fait que suivant les combinaisons choisies, certains clichés ne sont plus linéairement indépendants.
La courbe pour M = 25 fait en outre clairement ressortir le fait que l’amplitude de l’erreur ε∞ entre
deux pics successifs n’augmente pas de manière régulière : les pics associés à des valeurs critiques pour les-
quelles k est pair sont plus intenses que lorsque k est impair. Par exemple, pour M = 25, les pics à np = 2, 5
et np = 3, 125 correpondent à k = 10 et k = 8 ; ils encadrent le pic d’amplitude inférieure à np = 2, 78 qui
correspond à k = 9. On reviendra plus tard sur l’interprétation de cette observation.
La chute du rang de l’opérateur de corrélation est dans la plupart des cas associée au fait que M/np
prend une valeur entière k ∈ N∗ . Ainsi, prendre M clichés sur np périodes revient en réalité à en prendre
k sur une période complète (np = 1, 0). On peut donc raisonner sur une période d’oscillation du système
et observer ce qui se passe suivant les valeurs de k. Le fait que k soit entier implique que le pas de temps
d’échantillonnage des clichés est un sous-multiple de la période d’oscillation du système d’après la relation
(C.4). Or la réponse du système est loin d’être quelconque puisqu’elle possède des propriétés importantes
de périodicité et de parité. Il est clair que la réponse (3.4) est périodique de période T0 et est en outre

229
C. C OMPLÉMENTS D ’ ANALYSE DU MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT DU SYSTÈME LINÉAIRE AUTONOME

symétrique par rapport aux axes tn = nT0 /2 pour n ∈ N∗ et aux points tn = nT0 /4 avec n impair. Sur
une période d’oscillation, l’axe central t = T0 /2 constitue donc un axe de symétrie, tandis que les points
T0 /4 et 3T0 /4 sont des points de symétrie. Suivant la parité de k, le pas de temps d’échantillonage des
clichés δtc prend des valeurs telles que certains clichés se répètent. Les schémas de la figure C.3 traduisent
ce phénomène pour trois valeurs de k : une impaire, une paire et multiple de 2 et une paire multiple de 4.

(a) k = 4p + 2, p = 2 (b) k = 2p + 1, p = 5 (c) k = 4p, p = 3

Figure C.3 : Schématisation de la redondance des clichés sur une période d’oscillation du système pour trois valeurs de k telles
que M/np = k. Les droites verticales en pointillés (– –) indiquent l’axe de symétrie et le symbole ⊗ désigne le point de symétrie
centrale. Les points en rouge (•) correspondent aux clichés linéairement indépendants subsistants après élimination des redondances
par symétrie.

Lorsque k est impair, seul l’axe t = T0 /2 joue un rôle : la moitié des clichés est identique par symétrie
axiale, si bien que le rang de la matrice des clichés chute de (k + 1)/2. La situation se dégrade lorsque k
est pair et multiple de 2 seulement. Dans ce cas, en plus de la symétrie axiale qui élimine la moitié des
clichés, vient s’ajouter la symétrie centrale en t = T0 /4 qui agit sur les (k + 2)/2 clichés restant. La symétrie
centrale est liée au caractère impair de la solution et exprime la redondance de certains clichés qui sont
simplement opposés les uns des autres. Au final, en supprimant ces clichés, il ne reste plus que (k + 2)/4
clichés linéairement indépendants. Enfin le cas le plus alarmant correspond aux valeurs de k multiples de
4 : pour ces valeurs, on retrouve évidemment les symétries axiales et centrales qui éliminent une grande
partie des clichés, mais il se trouve que dans ce dernier cas, un des clichés restant est nul et doit donc être
supprimé aussi. On peut alors établir les relations suivantes exprimant le rang de la matrice des clichés U
en fonction du nombre k correspondant au rapport M/np . Pour tout p ∈ N,
k+1
si k = 2p + 1 =⇒ rg(U) = ,
2
k+2
si k = 4p + 2 =⇒ rg(U) = , (C.5)
4
k
si k = 4p =⇒ rg(U) = .
4
Les relations précédentes sont valables lorsque np ≥ 0, 5. En effet, pour 0, 25 ≤ np < 0, 5, seule la symé-
trie centrale en T0 /4 est encore susceptible d’agir et d’éliminer ainsi quelques clichés, ce qui peut encore se
produire si k est pair. Enfin, lorsque np < 0, 25, aucune symétrie ne provoque de redondance de sorte que
le rang de la matrice des clichés reste maximal et égal au nombre de clichés. Cependant, pour np < 0, 25,
les informations contenues dans les clichés ne sont pas assez représentatives de la réponse du système.
L’étude de l’évolution de l’erreur de reconstruction en combinaison avec celle du rang de la matrice des
clichés a permis de déterminer que la borne inférieure pour np se situe aux alentours de 0, 25. Dans l’inter-
valle [0, 25; 0, 5], les valeurs critiques M/np ∈ N∗ sont très proches et il devient donc délicat de trouver a
priori des valeurs de np qui conviennent. Le choix np ≈ 1 avec np 6= 1 semble donc être un bon compromis
puisque les risques de tomber sur une valeur critique dans un voisinage de 1 s’amenuisent et l’erreur de
reconstruction est encore acceptable. On prendra souvent dans les applications np ≈ 1, 3.
Pour conclure cette analyse, rappelons qu’à l’origine la décomposition orthogonale propre est une mé-
thode d’analyse de données et que les modes POD mis en évidence ne sont représentatifs de la base de

230
C.1. Influence de l’échantillonnage des clichés d’un système périodique

données que si les clichés contiennent le maximum d’informations sur la réponse. L’échantillonnage est
donc une partie cruciale du processus qui détermine en grande partie la qualité du modèle d’ordre réduit
et le choix de prélever uniformément les clichés n’est pas forcément judicieux dans le cas d’une réponse
périodique. Une extraction aléatoire des clichés sur l’intervalle Ie serait potentiellement plus adéquate, et
renouerait sur le principe avec les concepts probabilistes de la décomposition de Karhunen-Loève.

Remarque C.1 : Diminution du rang pour M/np = k, k 6∈ N


Si on observe en détail les graphiques de la figure C.2, on constate qu’il existe d’autres valeurs de np pour lesquelles le
rang de la matrice des clichés diminue, sans que cela ne se traduise nécessairement par un accroissement important de
l’erreur. En réalité, la diminution du rang à cause des symétries axiales et centrales ne nécessite pas que k soit entier.
De manière générale, si M/np ∈ Q, le rapport se réduit à M ′ /n′p avec (M ′ , n′p ) ∈ N∗ × N∗ de sorte que

M M′
= ′ .
np np

Ainsi, prendre M clichés sur np périodes revient à en prendre M ′ sur un nombre entier n′p de périodes. Les valeurs
critiques évoquées précédemment correspondent donc au cas particulier où la fraction rationnelle se réduit avec n′p = 1.
Toutefois dans le cas général n′p est différent de 1 mais reste toujours entier donc le risque de rencontrer des symétries
sur l’intervalle [0; n′p T0 ] persiste. La symétrie centrale se situe à présent en t = n′p T0 /2 et le point de symétrie centrale
se trouve quant à lui en t = n′p T0 /4. Pour être sûr que les clichés sont indépendants, il est donc nécessaire que l’axe
et le point de symétrie de l’intervalle de temps équivalent [0; n′p T0 ] soient situés en dehors de l’intervalle de temps
[0; np T0 ]. Le principe est résumé sur la figure C.4. Intuitivement, cela signifie que n′p ≫ np , ou encore que la fraction
rationnelle M/np ne peut pas être « beaucoup » réduite.
Plus précisément, cela se traduit par n′p T0 /2 > np T0 pour l’axe de symétrie et n′p T0 /4 > np T0 pour le point de
symétrie centrale. L’indépendance des clichés est alors assurée sous les deux conditions

n′p > 2 np et n′p > 4 np .

Lorsque ces conditions sont remplies, le rang de la matrice des clichés est maximal et on peut espérer que l’erreur de
reconstruction sera faible. Au contraire, le non-respect de ces conditions conduit à la répétition de quelques clichés,
dont le nombre est en général moins important que lorsque k est entier. En conclusion il semble donc que le choix idéal
consiste à prendre le nombre de période np tel que le rapport M/np soit irrationnel. En effet lorsque M/np ∈ R\Q
il n’est pas possible d’interpréter l’échantillonnage au moyen d’un nombre de période équivalent n′p entier et par
conséquent les risques de redondance des clichés par symétrie sont évités.

u(x = L, t)
n′p T0

n′p T0 /4 t

n′p T0 /2

np T0

Figure C.4 : Schématisation des symétries s’exerçant sur l’intervalle de temps équivalent. Prendre M = 20 clichés sur une durée
np = 2, 4 revient en fait à considérer M ′ = 25 clichés sur n′p = 3 périodes complètes. Il existe donc un axe de symétrie en n′p T0 /2
qui élimine dans le cas présent les 7 clichés dans l’intervalle [n′p T0 /2; np T0 ] ; le point de symétrie centrale en n′p T0 /4 ne joue ici
aucun rôle.

231
C. C OMPLÉMENTS D ’ ANALYSE DU MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT DU SYSTÈME LINÉAIRE AUTONOME

C.2 Convergence des modes POD vers les modes propres dans le cas
d’un système linéaire autonome
Feeny et Kappagantu [74] et Kerschen et Golinval [129] ont montré que sous certaines conditions, les
modes POD convergent vers les modes propres lorsque le nombre de clichés M utilisés pour construire
l’opérateur de corrélation augmente. Ce résultat a en particulier été démontré lorsque le système considéré
est (i) linéaire, (ii) non amorti, (iii) autonome et (iv) possède une matrice de masse proportionnelle à l’iden-
tité. Cette convergence se généralise par ailleurs à des systèmes pour lesquels la matrice de masse n’est pas
proportionnelle à l’identité par un simple changement de variables. En outre, la convergence persiste pour
des systèmes faiblement amortis. Dans le cas d’un système non-autonome où l’excitation est harmonique,
Kerschen et Golinval [129] ont montré que le mode POD dominant est lié à la réponse harmonique forcée
du système, et si la matrice de masse est proportionnelle à l’identité, alors les modes POD restants sont
les modes propres du système linéaire. Enfin dans le cas d’un système non-linéaire, les modes POD re-
présentent la meilleure approximation linéaire des modes propres non-linéaires. Cependant, les conditions
établies dans [74, 129] sont incomplètes puisqu’il n’y a convergence en fonction du nombre de clichés que
si ces derniers sont linéairement indépendants.
Pour établir la convergence des modes POD vers les modes propres, on considère la formulation ana-
lytique du modèle d’ordre réduit développée dans le paragraphe 3.2.1, à l’aide de laquelle les modes POD
ont été décomposés sur la base des modes propres par la relation (3.12). Il suffit alors de montrer que les
(j)
coefficients de la décomposition (3.12) s’annulent tous sauf un à la limite de la convergence : µl −→ δlj
lorsque M → ∞. Pour cela, on considère ici des clichés non centrés PM (ζ = 0) et on établit dans un premier
temps une conjecture sur la convergence des séries de la forme m=1 αm cos (κn tm ) qui dépend en parti-
culier du fait que les clichés sont indépendants ou non. À l’aide de cette relation, la forme asymptotique
de l’opérateur aux valeurs propres ainsi que celle des vecteurs propres sera déterminée aussi bien pour la
méthode directe que pour la méthode des clichés.

C.2.1 Un résultat préliminaire


Pour commencer, on cherche à caractériser la convergence des séries de la forme
M
X
Sn (M ) = αm cos (κn tm ), (C.6)
m=1

où M désigne le nombre de clichés, les αm sont les coefficients de pondération associés à l’opérateur de
moyenne E [·], les tm sont les instants où les clichés sont prélevés et la fréquence κ est un multiple de π de la
forme κn = (n + 1)πc/L avec n ∈ N∗ . On considère ici que les clichés sont prélevés sur l’intervalle de temps
Ie si bien que faire tendre M vers l’infini revient à choisir des pas de temps d’échantillonnage δtc = Te /M
de plus en plus petits. On conjecture alors que les séries de type Sn (M ) convergent vers zéro lorsque le
nombre de clichés M augmente et que le nombre de période np est correctement choisi :

Sn (M ) −→ 0. (C.7)
M→∞

Le résultat précédent est difficile à démontrer rigoureusement dans le cas général car il dépend forte-
ment de la façon dont sont répartis les clichés, et en particulier du nombre de périodes np sur lequel ils sont
prélevés. L’annulation des séries — observée en pratique pour la plupart des valeurs de np — peut être
justifiée en partie par l’existence d’axes et de points de symétrie pour la fonction cosinus qui provoquent la
répétition des valeurs cos (κn tm ) avec des signes opposés (voir à titre indicatif les schémas de la figure C.3).
Lorsque les poids de pondération αm de l’opérateur de moyenne E [·] sont tous identiques, la plupart des
valeurs des cosinus s’annulent et il subsiste quelques termes résiduels. Ces termes se compensent seulement
si le rapport M/np est bien choisi, i. e. si les termes restant sont indépendants et de signe opposé. Lorsque
M augmente, la somme des termes résiduels devient alors quasiment nulle et les séries convergent. On ne
détaille pas plus les raisons pour lesquelles les séries convergent puisque l’objectif n’est pas de montrer
rigoureusement la relation C.7 mais simplement de se servir de ce résultat observé numériquement pour
justifier pourquoi les modes POD convergent vers les modes propres du système.

232
C.2. Convergence des modes POD vers les modes propres

C.2.2 Convergence des vecteurs propres pour la méthode directe


Les clichés sont décomposés sur la base des modes propres selon la relation (3.7) et les modes POD
s’expriment de la même manière au moyen de la relation (3.12). Seuls p modes propres sont conservés pour
(m)
l’approximation de la solution analytique. L’opérateur de corrélation prend donc la forme (B.3) avec ηi =
(m)
ζi et le problème aux valeurs propres de la méthode directe s’écrit Rµ(j) = λj µ(j) avec la formulation
analytique. Pour montrer la convergence des modes POD vers les modes propres, il suffit de montrer que
(j)
µl −→ δlj quand M → ∞, ce qui signifie que les vecteurs propres µ(j) de la formulation analytique
convergent vers les vecteurs de la base canonique de Rp . Ces vecteurs notés ici ej contiennent une seule
composante non nulle sur le j-ième terme.
On détaille donc pour commencer l’expression de R ej dans le but de montrer que lorsque M tend
vers l’infini, les vecteurs de la base canonique sont des vecteurs propres de R. Le produit R ej donne
(m) (m) (m) (m)
trivialement la j-ième colonne de R qui s’écrit [E[ζ1 ζj ], . . . , E[ζp ζj ]]T d’après l’expression (B.3) de
l’opérateur aux valeurs propres de la formulation analytique. Il faut donc montrer que lorsque M tend vers
l’infini, seul le j-ième terme du vecteur R ej subsiste. Le terme général se décompose en

h i M
X
(m) (m)
E ζi ζj = αm ζi ζj cos (ki tm ) cos (kj tm )
m=1
M (C.8)
ζi ζj X
= αm [cos ((ki + kj )tm ) + cos ((ki − kj )tm )].
2 m=1

Les sommes apparaissant dans l’expression précédente sont pour la plupart du même type que les
séries Sn (M ) pour lesquelles on a expliqué qu’elles convergeaient vers 0 lorsque M était grand pour tout
n ≥ 0. En effet, lorsque ki 6= kj , la somme et la différence des nombres d’ondes s’écrivent respectivement
(i + j − 1)πc/L et (i − j − 1)πc/L et il est donc possible d’identifier l’entier n correspondant à la fréquence
κn . Ainsi les termes de la somme s’annulent tous si le nombre de clichés est assez grand et que i 6= j. Dans
le cas contraire, la somme s’écrit

h i X M
ζ2 X
M
(m) (m)
E ζi ζi = αm ζi2 cos2 (ki tm ) = i αm [1 + cos ((2ki )tm )] . (C.9)
m=1
2 m=1

La somme des cosinus s’annule ici encore puisqu’il s’agit des séries S2i−2 (M ). Par contre, le premier terme
subsiste et est égal à 1 pour tout M puisqu’il s’agit de la somme des poids de pondération associés à la
moyenne. Par conséquent, en notant λj = ζj2 /2 on peut écrire
h i
(m) (m)
lim E ζi ζj = λj δij . (C.10)
M→∞

Ainsi, lorsque M tend vers l’infini, les vecteurs propres de l’opérateur R tendent bien vers les vecteurs
ej de la base canonique de Rp et on a limM→∞ R ej = λj ej . Par ailleurs, il est encore plus intéressant
de remarquer que la relation (C.10) exprime le fait que lorsque le nombre de clichés tend vers l’infini,
l’opérateur R tend vers la matrice des valeurs propres. On obtient donc

lim R = diag(λj ) (C.11)


M→∞

(m) (m)
puisque les E[ζi ζj ] correspondent au terme général de l’opérateur R. Cela corrobore le fait que les
clichés choisis sont bien décorrélés et cela est d’autant plus prononcé que le nombre de clichés augmente.
Les graphiques de la figure C.5 illustrent bien cette convergence lorsque les clichés ont été prélevés
uniformément sur np ≈ 1 période d’oscillation. L’augmentation du nombre de clichés provoque alors un
« lissage » de l’opérateur aux valeurs propres qui converge bien vers une matrice pratiquement diagonale
dans laquelle les valeurs des pics de la diagonale principale correspondent aux valeurs propres de l’opé-
rateur. Enfin, le tableau C.1 regroupe les 10 premières valeurs propres obtenues pour plusieurs valeurs du
nombre M de clichés et met en évidence la convergence des valeurs propres λj du problème aux valeurs
propres vers les coefficients ζj2 /2 qui avaient été identifiés aux valeurs propres pour établir la relation (C.10).

233
C. C OMPLÉMENTS D ’ ANALYSE DU MODÈLE D ’ ORDRE RÉDUIT DU SYSTÈME LINÉAIRE AUTONOME

0 0

−5
−5

−10
−10
log(|R|)

log(|R|)
−15
−15
−20

−20 0 0
−25
5 5
−25 10 −30 10
0 0
15 15
5 5
10 20 10 20
15 15
20 25 20 25
25 25
30 30
30 i 30 i
j j

(a) M = 10 (b) M = 20

−5

−10
log(|R|)

−15

−20 0
5
−25 10
0
15
5
10 20
15
20 25
25
30
30 i
j

(c) M = 500

Figure C.5 : Convergence de l’opérateur aux valeurs propres de la méthode directe pour la formulation POD analytique en fonction
du nombre de clichés pour np ≈ 1, 0.

j M =5 M = 10 M = 20 M = 50 M = 100 M = 500 ζj2 /2


1 2.170e-01 2.082e-01 2.036e-01 2.007e-01 1.997e-01 1.989e-01 1.987e-01
2 2.327e-03 2.557e-03 2.509e-03 2.477e-03 2.466e-03 2.456e-03 2.454e-03
3 3.756e-04 3.104e-04 3.246e-04 3.209e-04 3.195e-04 3.183e-04 3.180e-04
4 7.573e-05 8.440e-05 8.442e-05 8.352e-05 8.317e-05 8.286e-05 8.278e-05
5 - 3.012e-05 3.097e-05 3.056e-05 3.043e-05 3.032e-05 3.029e-05
6 - 1.449e-05 1.372e-05 1.369e-05 1.364e-05 1.359e-05 1.357e-05
7 - 7.874e-06 7.040e-06 7.016e-06 6.990e-06 6.966e-06 6.959e-06
8 - 4.177e-06 3.968e-06 3.957e-06 3.943e-06 3.930e-06 3.926e-06
9 - 3.249e-06 2.400e-06 2.398e-06 2.390e-06 2.382e-06 2.380e-06
10 - - 1.534e-06 1.537e-06 1.532e-06 1.527e-06 1.525e-06

Tableau C.1 : Convergence des 10 premières valeurs propres de l’opérateur de corrélation en fonction du nombre de clichés. Les
valeurs propres λj convergent vers les coefficients ζj2 /2 de la décomposition (3.4) des modes POD sur les modes propres.

234
C.2. Convergence des modes POD vers les modes propres

C.2.3 Convergence des vecteurs propres pour la méthode des clichés


(j)
Il s’agit ici encore de démontrer que µl −→ δlj quand M → ∞ mais en utilisant cette fois le problème
aux valeurs propres de la méthode des clichés R⋆ d(j) = λj d(j) avec c(j) = α
e d(j) . En observant à la suite
de tests numériques la forme des vecteurs propres du problème non symétrique R e ⋆ c(j) = λj c(j) , on peut
conjecturer que la valeur asymptotique de leur composante est
(j) (i)
ci = αi ζj . (C.12)
(j)
En supposant l’expression précédente vraie, les composantes du vecteur d(j) sont données par di =
√ (i)
αi ζj . Par conséquent, l’expression du produit R⋆ d(j) se développe avec la relation (3.9) en
 p
! 
√ X (m)
(1) (m)
 α1 αm ζn ζn ζj 
 
M
X  n=1 
⋆ (j)
R d = .
.. 
(C.13)
 ,
 ! 
m=1  X p 
√ (m) 
αM αm ζn(M) ζn(m) ζj
n=1

et en réorganisant les termes, la i-ème composante du vecteur R⋆ d(j) s’écrit


!
h i p
√ X (i) X
M
√ X (i) h (m) (m) i
p
⋆ (j) (m)
R d = αi ζn αm ζn(m) ζj = αi ζn E ζn ζj . (C.14)
i
n=1 m=1 n=1

Or d’après la relation (C.10) on peut réduire la somme à un seul terme et justifier ainsi que l’expression
(C.12) conjecturée pour les c(j) correspond bien à des vecteurs propres pour R⋆ puisque
h i √
p
X √ (i) (j)
R⋆ d(j) −→ αi ζn(i) λj δnj = λj αi ζj = di . (C.15)
i M→∞
n=1
(j) (j)
En utilisant la relation (3.12) donnant les coefficients µi en fonction des cl et en introduisant l’expression
(j)
asymptotique (C.12) des coefficients ci on a alors
M
X M
X h i
(j) (j) (l) (l)
µi = cl ζn(l) = αl ζj ζn(l) = E ζj ζn(l) −→ λj δnj , (C.16)
M→∞
l=1 l=1

et on retrouve bien avec la méthode des clichés le fait que les modes POD convergent vers les modes propres
de la structure.
Ce paragraphe a permis de mettre en évidence le fait que les modes POD convergent bien vers les
modes propres de la barre encastrée-libre lorsque le nombre de clichés tend vers l’infini. Le résultat est
vrai lorsque l’opérateur de corrélation est construit avec des clichés non centrés par la méthode directe ou
des clichés. En réalité, la convergence n’est pas simple à démontrer rigoureusement et notre propos s’est
appuyé ici sur des résultats numériques afin de confirmer la conjecture établie dans le premier paragraphe.
En particulier, la convergence a bien lieu sous les conditions explicitées dans [74, 129] et rappelées au début
de ce paragraphe, mais l’indépendance des clichés joue un rôle crucial.

235
Annexe D
Formulaire de calcul tensoriel

Sommaire
D.1 Tenseurs et produits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 237
D.1.1 Notations tensorielle et indicielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 237
D.1.2 Tenseurs particuliers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 237
D.1.3 Produits de tenseurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 238
D.2 Opérateurs différentiels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 239
D.3 Relations usuelles entre les opérateurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 241
D.4 Théorèmes de Green-Ostrogradski et d’intégration par parties . . . . . . . . . . . . . . . . . 242

D.1 Tenseurs et produits


D.1.1 Notations tensorielle et indicielle
Dans le formulaire, on considère des opérateurs tensoriels définis dans l’espace R3 et représentés dans
une base cartésienne B = {ei }i=1,2,3 orthonormée directe. Les scalaires correspondent à des tenseurs
d’ordre 0, les vecteurs à des tenseurs d’ordre 1, et les matrices à des tenseurs d’ordre 2.
Les scalaires seront notés par des lettres minuscules. Les vecteurs et les tenseurs d’ordre supérieurs se-
ront quant à eux indiqués en lettres grasses, minuscules pour les vecteurs, et majuscules pour les tenseurs
d’ordre supérieurs. On notera u = MatB (u) la représentation dans la base B du vecteur u de sorte que
u = [u1 , u2 , u3 ]T . De la même manière, D est la représentation dans la base B de la matrice D dont le terme
général est noté dij , pour i, j = 1, . . . , 3.
On utilisera, sauf mention contraire, la convention d’Einstein sur les indices répétés : la répétition d’un
indice dans une même expression indique une sommation implicite sur cet indice.

D.1.2 Tenseurs particuliers


Symbole de Kronecker : La forme tensorielle du symbole de Kronecker δ i sert de base pour définir ensuite
des tenseurs d’ordre quelconque. Le vecteur δ i est défini comme un vecteur dont toutes les composantes
sont nulles, sauf celle située en i-ième position qui vaut 1. Le produit scalaire de deux vecteurs δ i et δ j
donne naissance au symbole de Kronecker classique δij tel que δij = 1 si i = j et δij = 0 si i 6= j. Le symbole
de Kronecker classique δij correspond alors au terme général de la matrice identité notée
 
1 0 0
I = 0 1 0 avec Iij = δij . (D.1)
0 0 1
237
D. F ORMULAIRE DE CALCUL TENSORIEL

Tenseur d’orientation : Le tenseur d’orientation ε est un tenseur d’ordre 3 défini par



 1 si (i, j, k) est une permutation circulaire de (1, 2, 3),
εijk = −1 si (i, j, k) est une permutation non circulaire de (1, 2, 3), (D.2)

0 si (i, j, k) n’est pas une permutation de (1, 2, 3).

D.1.3 Produits de tenseurs


Produit matrice - vecteur : Le produit d’une matrice de M (3, 3) par un vecteur de R3 donne un vecteur de
R3 tel que     
d11 d12 d13 u1 X3 d1k uk
v = D u = d21 d22 d23  u2  = d2k uk  avec vi = dik uk . (D.3)
d31 d32 d33 u3 k=1 d3k uk

Produit vecteur - matrice : Le produit d’un vecteur par une matrice n’est défini que lorsque la transposée
du vecteur est considérée, de sorte que les dimensions soient compatibles. Ainsi le produit de la transposée
d’un vecteur de R3 par une matrice de M (3, 3) donne le vecteur de R3
 
  d11 d12 d13 X3
 
v = uT D = u1 u2 u3 d21 d22 d23  = dk1 uk dk2 uk dk3 uk avec vi = dki uk . (D.4)
d31 d32 d33 k=1

Produit matrice - matrice : Le produit de deux matrices de M (3, 3) donne la matrice de M (3, 3)
    
d11 d12 d13 e11 e12 e13 X 3 d1k ek1 d1k ek2 d1k ek3
F = D E = d21 d22 d23  e21 e22 e23  = d2k ek1 d2k ek2 d2k ek3  avec Fij = dik ekj . (D.5)
d31 d32 d33 e31 e32 e33 k=1 d3k ek1 d3k ek2 d3k ek3

Produit scalaire : Le produit scalaire de deux vecteurs représenté par le symbole · donne un scalaire tel que
3
X
p= u·v = uk vk soit p = uk vk . (D.6)
k=1

Produit tensoriel : Le produit tensoriel de deux vecteurs représenté par le symbole ⊗ donne la matrice
 
u1 v1 u1 v2 u1 v3
D = u ⊗ v = u2 v1 u2 v2 u2 v3  avec Dij = ui vj . (D.7)
u3 v1 u3 v2 u3 v3

Le produit tensoriel de deux vecteurs correspond donc au produit matriciel de u avec vT .

Double produit de contraction : Le double produit de contraction de deux matrices représenté par le sym-
bole : donne un scalaire tel que
3 X
X 3
p=D:E= dij eij soit p = dij eij . (D.8)
i=1 j=1

Produit vectoriel : Le produit vectoriel de deux vecteurs représenté par le symbole ∧ fournit un vecteur
orthogonal aux deux autres dont les composantes s’expriment à l’aide du tenseur d’orientation ε :
 
u2 v3 − u3 v2
w = u ∧ v = u3 v1 − u1 v3  soit wi = εijk uj vk . (D.9)
u1 v2 − u2 v1

Produit tensoriel généralisé : Le produit tensoriel — éventuellement contracté — généralise la plupart des
produits précédents et s’applique à deux tenseurs d’ordre non nécessairement égaux. Ainsi le produit entre

238
D.2. Opérateurs différentiels

un tenseur T d’ordre p de terme général Ti1 ...ip et un tenseur G d’ordre q de terme général Gj1 ...jq s’écrit au
moyen des symboles de Kronecker δ i et δ j
 
A = T ⊗ G = Ti1 ...ip δ i1 ⊗ · · · ⊗ δ ip ⊗ Gj1 ...jq δ j1 ⊗ · · · ⊗ δ jq
(D.10)
= Ti1 ...ip Gj1 ...jq δ i1 ⊗ · · · ⊗ δ ip ⊗ δ j1 ⊗ · · · ⊗ δ jq .

Le résultat est un tenseur A d’ordre p + q dont le terme général est donné par Ai1 ...ip ,j1 ...jq = Ti1 ...ip Gj1 ...jq .
Par ailleurs, le symbole ⊗ désignera le produit tensoriel contracté une fois. Il suffit de le définir pour le
symbole de Kronecker par la relation
δ i ⊗δ j = δij . (D.11)
L’opération de contraction revient alors à contracter un indice puisque tous les termes d’indice j d’une
expression seront nuls si j 6= i. Elle peut être effectuée 2 fois, 3 fois,... n fois, le nombre de contractions étant
symbolisé par autant de barres au-dessus du symbole de produit tensoriel. On retrouve alors un certain
nombre de définitions données auparavant avec les notations usuelles pour des tenseurs d’ordre 1 ou 2 :

δij = δ i ⊗δ j , (D.12a)
I = δij δ i ⊗ δ j , (D.12b)
D u = D ⊗ u, (D.12c)
D E = D ⊗ E, (D.12d)
u · v = u ⊗ v, (D.12e)
D : E = D ⊗ E. (D.12f)

La généralisation du produit tensoriel sera particulièrement utile pour travailler avec des tenseurs d’ordre
supérieur à 2 où les produits ne sont pas spécifiés par des symboles particuliers.

D.2 Opérateurs différentiels


On précise ici les expressions des opérateurs de dérivées spatiales communément employés en méca-
nique des fluides pour un domaine de l’espace compris dans R3 . Seules les expressions en coordonnées
cartésiennes sont présentées. On notera les directions de l’espace (x1 , x2 , x3 ) = (x, y, z), la première forme
étant celle adoptée pour les écritures indicielles.

Opérateur nabla : Il s’agit d’un vecteur contenant les opérateurs de dérivées partielles spatiales dans les
trois directions de l’espace, tel que  
∂/∂x
∇ = ∂/∂y  . (D.13)
∂/∂z
Il n’est jamais utilisé seul mais est destiné à s’appliquer à des tenseurs d’ordre quelconque. En particulier,
il permet de définir un certain nombre d’opérateurs de dérivation couramment rencontrés en physique.

Opérateur gradient : Le gradient d’un tenseur fournit les dérivées dans les trois directions de l’espace des
différentes composantes constituant le tenseur. Il augmente donc d’un ordre le tenseur sur lequel il agit. On
le note grad ou encore à l’aide de l’opérateur nabla ∇. Le gradient d’un scalaire est le vecteur
 
∂p/∂x
∂p
grad p = ∇ p = ∂p/∂y  tel que (∇p)i = . (D.14)
∂xi
∂p/∂z

Le gradient d’un vecteur donne la matrice


 T   
∇ u1 ∂u1 /∂x ∂u1 /∂y ∂u1 /∂z
∂ui
grad u = ∇ u = ∇T u2  = ∂u2 /∂x ∂u2 /∂y ∂u2 /∂z telle que (∇u)ij = . (D.15)
∂xj
∇T u3 ∂u3 /∂x ∂u3 /∂y ∂u3 /∂z
239
D. F ORMULAIRE DE CALCUL TENSORIEL

Chaque ligne de la matrice obtenue correspond au gradient de la composante scalaire ui . On peut donc
interpréter l’action du gradient sur un vecteur comme le produit tensoriel u ⊗ ∇. On introduit par ailleurs
l’opérateur ∇T u qui correspond à la transposée (∇u)T pour alléger les écritures.

Opérateur divergence : L’opérateur de divergence réduit d’un ordre les tenseurs sur lesquels il agit. On le
note div ou encore à l’aide de l’opérateur ∇. La divergence d’un vecteur donne donc le scalaire

∂u1 ∂u2 ∂u3 ∂ui


div u = ∇ · u = + + tel que div u = . (D.16)
∂x ∂y ∂z ∂xi
La divergence d’un vecteur correspond en fait au produit scalaire de l’opérateur nabla avec le vecteur u.
Lorsque la divergence s’applique à une matrice, on obtient le vecteur
 
∂d11 /∂x + ∂d12 /∂y + ∂d13 /∂z
∂dij
div D = ∂d21 /∂x + ∂d22 /∂y + ∂d23 /∂z  tel que (div D)i = (D.17)
∂xj
∂d31 /∂x + ∂d32 /∂y + ∂d33 /∂z

dans lequel chaque composante correspond à la divergence des lignes de la matrice.

Opérateur Laplacien : L’opérateur Laplacien conserve l’ordre des tenseurs sur lesquels il agit. On le note ∆
ou encore ∇2 . Le Laplacien d’un scalaire correspond donc au scalaire

∂2p ∂2p ∂2p ∂2p


∆p = + + 2 tel que ∆p = , (D.18)
∂x2 ∂y 2 ∂z ∂xi ∂xi
qui est défini par la somme des dérivées secondes dans les trois directions. Le Laplacien d’un vecteur
correspond quant à lui au Laplacien des composantes du vecteur :
 2 
∂ u1 /∂x2 + ∂ 2 u1 /∂y 2 + ∂ 2 u1 /∂z 2
∂ 2 ui
∆ u = ∂ 2 u2 /∂x2 + ∂ 2 u2 /∂y 2 + ∂ 2 u2 /∂z 2  tel que (∆ u)i = . (D.19)
∂xj ∂xj
∂ 2 u3 /∂x2 + ∂ 2 u3 /∂y 2 + ∂ 2 u3 /∂z 2

Enfin, par analogie, le Laplacien d’une matrice D est une matrice dont le terme général ∂ 2 dij /∂xk ∂xk est le
Laplacien des composantes de la matrice sur laquelle le Laplacien agit.

Opérateur rotationnel : Le rotationnel est noté rot ou encore à l’aide de l’opérateur nabla par l’intermédiaire
du produit vectoriel tel que
     
∂/∂x u1 ∂u3 /∂y − ∂u2 /∂z
∂uk
rot u = ∇ ∧ u =  ∂/∂y  ∧ u2  = ∂u1 /∂z − ∂u3 /∂x avec (rot u)i = εijk . (D.20)
∂xj
∂/∂z u 3 ∂u /∂x − ∂u /∂y
2 1

En mécanique des fluides on définit couramment le rotationel de la vitesse ζ = rotu = ∇∧u qui représente
la vorticité.

Opérateur d’advection u · ∇ : L’opérateur u · ∇ est couramment employé pour écrire les termes de convec-
tion en mécanique des fluides. Il est défini comme le produit scalaire entre un vecteur u désignant en
pratique la vitesse de convection et l’opérateur ∇ tel que
   
ux ∂/∂x
∂ ∂ ∂
u · ∇ = uy  · ∂/∂y  = ux + uy + uz . (D.21)
∂x ∂y ∂z
u z ∂/∂z

Il agit en général sur un scalaire ou un vecteur, auquel cas il prend respectivement la forme

∂p ∂p ∂p
u · ∇p = ux + uy + uz , (D.22)
∂x ∂y ∂z
240
D.3. Relations usuelles entre les opérateurs

ou encore
   
u · ∇vx ux ∂vx /∂x + uy ∂vx /∂y + uz ∂vx /∂z
∂vi
u · ∇v = u · ∇vy  =  ux ∂vy /∂x + uy ∂vy /∂y + uz ∂vy /∂z  tel que (u · ∇v)i = uj . (D.23)
∂xj
u · ∇vz ux ∂vz /∂x + uy ∂vz /∂y + uz ∂vz /∂z

L’opérateur u · ∇ s’applique donc à chaque composante du vecteur sur lequel il s’applique. L’opérateur
intervient notamment dans la définition de la dérivée matérielle donnée à l’équation (4.4).

D.3 Relations usuelles entre les opérateurs


Gradient :

grad (∆p) = ∆ (grad p) (D.24a)


grad (p q) = p grad q + q grad p (D.24b)
grad (p u) = p grad u + u ⊗ grad p (D.24c)
 
grad (u · v) = grad T u v + grad T v u (D.24d)
u · u
(grad u) u = grad + (rot u) ∧ u (D.24e)
2

Divergence :

div u = Tr(grad u) où Tr(·) est l’opérateur de trace (D.25a)


div (∆u) = ∆ (div u) (D.25b)
div (rot u) = 0 (D.25c)
div (p u) = p div u + u · grad p (D.25d)
div (p D) = p div D + D grad p (D.25e)

div uT D = u · div D + grad u : D (D.25f)
div (p I) = grad p (D.25g)
div (u ∧ v) = v · rot u − u · rot v (D.25h)
div (u ⊗ v) = u div v + (grad u) v (D.25i)

Laplacien :

∆ p = div (grad p) (D.26a)


∆ u = div (grad u) = grad (div u) − rot (rot u) (D.26b)
∆(p q) = p ∆q + q ∆p + 2 grad p · grad q (D.26c)
∆(p u) = p ∆u + u ∆p + 2 (grad u) grad p (D.26d)

Rotationnel :

rot (grad p) = 0 (D.27a)


rot (∆u) = ∆(rot u) (D.27b)
rot (p u) = p rot u + grad p ∧ u (D.27c)
rot (u ∧ v) = u div v − v div u + (grad u) v − (grad v) u (D.27d)

241
D. F ORMULAIRE DE CALCUL TENSORIEL

D.4 Théorèmes de Green-Ostrogradski et d’intégration par parties


Théorème de Green-Ostrogradski : Le théorème de Green-Ostrogradski, aussi appelé théorème de flux-
divergence, est un théorème reliant la divergence d’un champ vectoriel au flux défini par ce champ. Il
découle du théorème de Stokes qui est un résultat central sur l’intégration de formes différentielles en
analyse vectorielle. Il s’énonce pour un domaine de l’espace Ω ⊂ R3 de frontière ∂Ω suffisamment régulière
(C 1 par morceaux), sur laquelle on peut définir en tout point une normale extérieure n. Le théorème de
Green-Ostrogradski stipule alors que le flux du champ vectoriel u à travers la surface fermée ∂Ω est égal à
la divergence de ce même champ vectoriel dans le volume Ω délimité par cette surface. Cela se traduit par
la relation Z I
div u dΩ = u · n d∂Ω. (D.28)
Ω ∂Ω

L’expression précédente s’applique aussi à un scalaire p ou une matrice D afin d’obtenir des formules
permettant de passer d’intégrales volumiques sur Ω à des intégrales sur la surface fermée ∂Ω à l’aide des
opérateurs différentiels introduits ci-dessus. On peut ainsi montrer que pour un scalaire p,
Z I
grad p dΩ = p n d∂Ω (D.29)
Ω ∂Ω

et pour une matrice D, Z I


div D dΩ = D n d∂Ω. (D.30)
Ω ∂Ω

Intégration par parties : Le théorème de Green-Ostrogradski permet de déduire une généralisation de


l’intégration par parties lorsque l’intégrale porte sur un produit de champs vectoriels faisant intervenir
une divergence. En particulier, il nous sera utile de disposer de formules d’intégrations par parties pour
transformer des intégrales portant sur des champs vectoriels définis par p div D · u ou encore p div [∇(qr)],
où p, q et r sont des scalaires, u est un vecteur et D une matrice. Pour pouvoir utiliser le théorème de
Green-Ostrogradski, il faut établir une relation entre le champ vectoriel qu’on cherche à transformer et
une divergence portant sur un champ associé. Dans le premier cas, il suffit de considérer la divergence du
vecteur v = p uT D puisque les relations usuelles (D.25f) et (D.24c), conduisent à

p div D · u = div p uT D − p ∇u : D − (u ⊗ ∇p) : D. (D.31)

Par conséquent, en intégrant sur le domaine Ω, l’expression précédente se transforme en utilisant le théo-
rème de Green-Ostrogradski pour le premier terme du membre de droite, ce qui donne
Z I Z Z

p div D · u dΩ = T
p u D n d∂Ω − p ∇u : D dΩ − (u ⊗ ∇p) : D dΩ . (D.32)
Ω ∂Ω Ω Ω

De la même manière, il suffit de considérer la divergence du vecteur v = p ∇(qr) pour le second champ
vectoriel à transformer. En effet, les relations usuelles (D.25d) et (D.24b) conduisent à

p div [∇(qr)] = div [p∇(qr)] − q ∇r · ∇p − r ∇q · ∇p. (D.33)

La formule d’intégration par parties s’obtient alors comme précédemment en intégrant sur le domaine Ω,
et en utilisant le théorème de Green-Ostrogradski pour le premier terme du membre de droite ce qui donne
Z I Z Z
p div [∇(qr)] dΩ = p∇(qr) · n d∂Ω − q ∇r · ∇p dΩ − r ∇q · ∇p dΩ . (D.34)
Ω ∂Ω Ω Ω

242
Annexe E
Changements de repères et de variables et
discrétisation des équations de Navier-Stokes

Sommaire
E.1 Écriture des équations de Navier-Stokes dans un repère non galiléen . . . . . . . . . . . . . 244
E.1.1 Changement de base et repérage d’un point dans un repère entraîné . . . . . . . . . . 244
E.1.1.1 Repérage d’un point dans un repère entraîné . . . . . . . . . . . . . . . . . . 244
E.1.1.2 Loi de composition des vitesses et dérivation temporelle dans le repère en-
traîné . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 245
E.1.1.3 Règles de changement de base pour les opérateurs différentiels . . . . . . . . 247
E.1.2 Équations de Navier-Stokes en repère entraîné avec les composantes de la vitesse
absolue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 249
E.1.2.1 Équation de conservation de la masse en repère entraîné . . . . . . . . . . . 249
E.1.2.2 Équation de conservation de la quantité de mouvement en repère entraîné . 249
E.1.2.3 Équation de conservation de l’énergie en repère entraîné . . . . . . . . . . . 250
E.1.3 Équations de Navier-Stokes en repère entraîné avec les composantes de la vitesse
relative . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251
E.1.3.1 Équation de conservation de la masse en repère entraîné . . . . . . . . . . . 251
E.1.3.2 Équation de conservation de la quantité de mouvement en repère entraîné . 251
E.1.3.3 Équation de conservation de l’énergie en repère entraîné . . . . . . . . . . . 254
E.2 Impact du jeu de variables sur la forme des équations de Navier-Stokes . . . . . . . . . . . 258
E.2.1 Écriture générique des équations du fluide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 258
E.2.2 Variables quasi-conservatives q = [ρ, u, eI ] et q = [ρ, u, eT ] . . . . . . . . . . . . . . . 259
E.2.3 Variables thermiques q = [ρ, u, θ] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 260
E.2.4 Variables primitives q = [ρ, u, p] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 261
E.2.5 Variables primitives modifiées q = [ϑ, u, p] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 261
E.3 Discrétisation par la méthode des Volumes Finis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262
E.3.1 Discrétisation des équations de Navier-Stokes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262
E.3.1.1 Discrétisation en temps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 264
E.3.1.2 Discrétisation des flux convectifs et diffusifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 264
E.3.2 Approximation du gradient en Volumes Finis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265

Dans cette annexe, on détaille dans un premier temps la manière dont les équations de Navier-Stokes
se transposent dans un domaine non galiléen pour établir les équations (4.31) et (4.33). Ensuite, on décrit
la forme des équations de Navier-Stokes écrites avec différents jeux de variables pour tenter d’établir la
meilleure forme possible pour construire ultérieurement le modèle d’ordre réduit POD-Galerkin. Enfin,
quelques détails relatifs à la discrétisation des équations de Navier-Stokes seront fournis pour terminer.

243
E. C HANGEMENTS DE REPÈRES ET DE VARIABLES POUR LES ÉQUATIONS DE N AVIER -S TOKES

E.1 Écriture des équations de Navier-Stokes dans un repère non


galiléen avec les variables conservatives
E.1.1 Changement de base et repérage d’un point dans un repère entraîné
La transposition des équations dans le repère entraîné repose tout d’abord sur les relations de change-
ment de base rappelées dans l’annexe A.1 pour un vecteur et une matrice quelconques. Celles-ci permettent
en effet d’établir la relation entre les positions puis les vitesses exprimées dans le repère absolu et entraîné.
Enfin, on termine en donnant les règles de changement de base pour les opérateurs différentiels qui inter-
viennent dans les équations de Navier-Stokes.

E.1.1.1 Repérage d’un point dans un repère entraîné


On considère un domaine de l’espace Ω(t) ⊂ R3 qui se déplace par rapport à un repère absolu RA défini
par le point d’origine O et la base BA = (eA 1 , e2 , e3 ). On associe au domaine Ω(t) un repère local RE défini
A A

par le point d’origine M0 et la base BE = (eE 1 , e2 , e3 ). On supposera pour la suite que les bases BA et
E E

BE sont orthonormées directes. On note enfin x•,i les directions spatiales relatives à la base B• , telles que
x•,1 = x• , x•,2 = y• , x•,3 = z• , où le symbole • désigne l’indice A ou E. La direction x•,i est celle du vecteur
de base e•i . Le schéma de la figure E.1 résume les notations introduites ci-dessus et dans ce qui suit.

yA yE xE
M y
eE

y
eA e
x

eE
1
α Ω(t)
x
eE
2 α
x
eE

M0

eA x0
2

xA
O eA
1
x
eA

Figure E.1 : Notations pour un domaine Ω(t) ⊂ R2 relatives au repère absolu RA = (O, BA ) muni de la base BA = (eA A
1 , e2 ) et
E E
au repère local RE = (M0 , BE ) muni de la base BE = (e1 , e2 ). Le point M est repéré par sa position absolue x ou sa position
relative x
e dans le repère local incliné d’un angle α par rapport au repère absolu.

−−→
La position absolue d’un point M du domaine Ω(t) est donnée par le vecteur distance OM par rapport
−−−→ −−→
à l’origine du repère absolu O. La position relative M0 M apparaît avec la relation de Chasles : OM =
−−−→ −−−→ −−→ −−−→
OM0 + M0 M . On notera x = OM la position absolue du point M , x0 = OM0 la position absolue de
−−−→
l’origine M0 du repère local et x e = M0 M la position relative du point M par rapport à l’origine M0 du
repère local, si bien que la relation de Chasles s’écrit dans n’importe quelle base de l’espace
e.
x = x0 + x (E.1)
Pour préciser la relation précédente dans une certaine base de l’espace, on introduit les représentations d’un
vecteur quelconque r ∈ R3 dans la base absolue BA et dans la base relative BE de sorte que
 T  T
rA = MatBA (r) = rA,1 , rA,2 , rA,3 et rE = MatBE (r) = rE,1 , rE,2 , rE,3 . (E.2)
Par conséquent, les composantes des vecteurs dans les deux bases sont liées par
rA = R rE (E.3)

244
E.1. Écriture des équations de Navier-Stokes dans un repère non galiléen

selon la relation (A.9) appliquée ici avec la matrice de changement de base R = PBE →BA .
Dans la relation (E.1), on exprime alors les vecteurs x et x0 dans le repère absolu, mais il est plus ju-
dicieux d’employer la représentation du vecteur position relative dans la base locale BE , puisque si le
domaine Ω(t) représente un corps rigide, alors la position du point M sera indépendante du temps dans ce
repère. Par conséquent la relation E.1 se récrit
eA = x0,A + R x
xA = x0,A + x eE . (E.4)
Le changement de base est ici uniquement dû à une rotation de la base BE par rapport à la base BA .
En effet une translation n’a aucune influence sur les vecteurs de base qui restent colinéaires. D’après la
définition de l’angle α(t) donnée sur la figure E.1, les vecteurs de la base BE s’expriment en fonction de ceux
de la base BA et réciproquement. Pour une rotation dans le plan, les relations s’écrivent eE A
1 = cos α(t) e1 +
sin α(t) e2 et e2 = − sin α(t) e1 + cos α(t) e2 . Ainsi, la matrice de changement de base est simplement
A E A A

donnée par l’expression  


cos α(t) − sin α(t)
R2D (α) = PBE →BA = , (E.5)
sin α(t) cos α(t)
où chaque colonne correspond au j-ième vecteur de la base BE exprimé sur les vecteurs de la base BA .
De façon plus générale, une rotation de la base BE par rapport à la base BA dans R3 s’obtient par une
combinaison d’au plus trois rotations autour des différents axes. Les matrices de rotation autour des axes
x, y et z sont données en trois dimensions pour un angle α(t) par
   
1 0 0 cos α(t) 0 − sin α(t)
Rx (α) = 0 cos α(t) sin α(t)  , Ry (α) =  0 1 0  et
0 − sin α(t) cos α(t) sin α(t) 0 cos α(t)
  (E.6)
cos α(t) sin α(t) 0
Rz (α) = − sin α(t) cos α(t) 0 .
0 0 1
La rotation générale s’obtient simplement par multiplication des différentes matrices entre elles. Ces ma-
trices de rotation appartiennent au groupe spécial orthogonal SO3 (R) dans lequel les matrices sont ortho-
gonales et possèdent un déterminant égal à 1. Ces matrices vérifient donc les propriétés
RT R = I = R RT , (E.7a)
R−1 = RT . (E.7b)
Enfin, puisque la matrice de changement de base est orthogonale, la réciproque de la relation de change-
ment de base donnée à l’équation (E.3) s’écrit
rE = R−1 rA = RT rA . (E.8)

E.1.1.2 Loi de composition des vitesses et dérivation temporelle dans le repère entraîné
Il est dans un premier temps nécessaire d’établir des relations semblables à (E.4) pour la vitesse des
nœuds du maillage qui apparaît dans les équations de Navier-Stokes écrites en formulation ALE. Le vecteur
vitesse absolue d’un point M dans le repère absolu est défini classiquement par la dérivée temporelle du
vecteur position absolue exprimé dans la base BA tel que
dxA
sa,A (M ) = = ẋA . (E.9)
dt
Connaissant les composantes du vecteur vitesse absolue sa,A (M ) dans la base BA , l’expression du vecteur
vitesse absolue sa,E (M ) exprimé dans la base BE se déduit trivialement de la relation (E.8) puisque celle-ci
est valable pour n’importe quel vecteur. On souhaite cependant obtenir la loi de composition des vitesses
reliant la vitesse absolue définie à l’équation (E.9) à une vitesse relative qui reste à définir. La dérivation en
temps de la relation (E.4) donne ainsi la relation
dxA d dx0,A dR de
xE
sa,A (M ) = = eE ) =
(x0,A + R x + eE + R
x , (E.10)
dt dt dt dt dt
245
E. C HANGEMENTS DE REPÈRES ET DE VARIABLES POUR LES ÉQUATIONS DE N AVIER -S TOKES

où le premier terme correspond à la vitesse d’entraînement en translation du repère mobile, exprimée dans le
repère absolu RA . Elle ne dépend en fait que de la position de l’origine M0 du repère local RE et sera notée
par la suite
dx0,A
s0,A (M0 ) = = ẋ0,A . (E.11)
dt
Les deux derniers termes de l’équation (E.10) font intervenir les composantes du vecteur position re-
lative x
eE exprimé dans RE . Pour conserver une expression dans laquelle seules les composantes des
vecteurs position exprimés dans RA apparaissent, il faut remplacer la position relative exprimée dans
RE par son homologue dans RA . Ainsi, dans le second terme, on remplace la position relative par
eE = RT (xA − x0,A ) = RT x
x eA en utilisant l’expression (E.4) ou simplement (E.8). On introduit ensuite
la matrice
dR T
ΩA = R , (E.12)
dt
de sorte que le second terme de (E.10) s’écrive

dR dR T
eE =
x e A = ΩA x
R x eA . (E.13)
dt dt
La matrice ΩA est appelée matrice ou tenseur de la vitesse angulaire. C’est un tenseur anti-symétrique
puisque la matrice de changement de base est orthogonale. En effet avec la propriété (E.7a) on a

dR RT dI
= = 0 ⇒ Ṙ RT + R ṘT = 0 ⇒ ΩA = −ΩT
A. (E.14)
dt dt
En outre, toute matrice anti-symétrique réelle Ω ∈ M (3, 3) comporte seulement trois composantes indé-
pendantes. On a donc coutume d’associer au tenseur Ω un pseudo-vecteur ω contenant les trois compo-
santes indépendantes de Ω tel que pour tout vecteur r ∈ R3

Ω r = ω ∧ r. (E.15)

Le vecteur ω ainsi introduit est le vecteur vitesse angulaire qui est défini à partir du tenseur de permutation ε
introduit à l’équation (D.2) par la relation

1
ωi = − εijk Ωjk . (E.16)
2
Le second terme de l’équation (E.10) transformé à l’expression (E.13) devient alors

dR
e E = ΩA x
x eA = ω A ∧ x
eA . (E.17)
dt
Il est donc lié à la vitesse angulaire du repère entraîné, par le biais de l’opérateur ΩA et constitue la vitesse
d’entraînement en rotation. Quant au dernier terme de l’équation (E.10), il est aussi modifié en remplaçant
la position relative xeE exprimée dans RE par x eA au moyen de la relation (E.8). On introduit auparavant
l’opérateur de dérivation temporelle dans le repère entraîné

δ• d 
=R RT • . (E.18)
δt dt
Ainsi, le dernier terme dans (E.10) représente la vitesse relative du point M dans le repère entraîné

de
xE d  δe
xA
R =R RT x
eA = , (E.19)
dt dt δt
et finalement, la loi de composition des vitesses s’écrit

dxA δe
xA
sa,A (M ) = eA +
= s0,A (M0 ) + ω A ∧ x (E.20)
dt δt
246
E.1. Écriture des équations de Navier-Stokes dans un repère non galiléen

en remplaçant dans l’équation (E.10) les expressions (E.11), (E.17) et (E.19) des différentes vitesses. La vi-
tesse d’un point M se décompose donc d’une part en une vitesse d’entraînement se,A associée uniquement
au mouvement de corps rigide du domaine Ω(t), et d’autre part en une vitesse relative sd,A due à la défor-
mation éventuelle du domaine. Ces deux vitesses sont données respectivement par

eA
se,A (M ) = s0,A (M0 ) + ω A ∧ x et
δe
xA (E.21)
sd,A (M ) = .
δt
Remarque E.1 : Formule générale de dérivation en repère mobile
L’équation (E.20) peut être écrite uniquement en fonction de la position relative x
eA . En effet, sa,A (M ) − s0,A (M0 ) =
d/dt(xA − x0,A ) = de xA /dt. Par conséquent on obtient en posant pour tout vecteur rA exprimé dans le repère RA
la formule générale de dérivation en repère mobile issue de l’équation (E.20) en posant rA = x eA :

drA δrA
= + ω A (RE /RA ) ∧ rA . (E.22)
dt δt
Remarque E.2 : Loi de composition des accélérations
En dérivant une seconde fois la loi de composition des vitesses, on peut établir une loi de composition des accélérations
dans laquelle l’accélération absolue aa,A (M ) est définie par la dérivée seconde de la position absolue. Après un certain
nombre de calculs, on parvient à l’expression

d2 xA d2 x0,A δω A xA δ 2 x
δe eA
aa,A (M ) = 2
= 2
+ eA + ω A ∧ (ω A ∧ x
∧x e A ) + 2 ωA + 2
, (E.23)
dt | dt δt {z } | {z δt } | δt{z }
ae,A aC,A ar,A

dans laquelle apparaissent l’accélération d’entraînement ae,A liée au mouvement de corps rigide, l’accélération de Co-
riolis aC,A et l’accélération relative ar,A . Les deux premières accélérations sont « fictives » et proviennent simplement
du fait que le système est étudié depuis un référentiel non galiléen. Pour un système de masse m, elles donnent nais-
sance à la force de Coriolis FC = −m aC,A et à la force d’inertie d’entraînement Fie = −m ae,A , le signe moins
provenant du fait que dans le principe fondamental de la dynamique m a = F, les accélérations sont dans le membre
de gauche alors que les forces apparaissent dans le membre de droite. La force centrifuge est quant à elle un cas parti-
culier de la force d’inertie d’entraînement lorsque le repère entraîné est en rotation uniforme, de sorte ae,A se réduit
à ωA ∧ (ω A ∧ x eA ) ; dans ce cas, l’accélération est dirigée perpendiculairement à l’axe de rotation, ce qui justifie le
nom donné à cette force. On parlera dans la suite d’effets gyroscopiques pour se référer aux effets induits par les
accélérations de Coriolis et d’inertie d’entraînement.

E.1.1.3 Règles de changement de base pour les opérateurs différentiels


Avant de pouvoir écrire les équations de Navier-Stokes dans le repère local, il est nécessaire d’établir des
relations entre les opérateurs aux dérivées partielles qui interviennent dans les équations de Navier-Stokes,
notamment le gradient et la divergence. On considère un vecteur quelconque r ∈ R3 pour lequel on dispose
des représentations (E.2) dans les bases BA et BE , ainsi que des relations de passage (E.3) et (E.8) entre les
deux bases.
La dérivée spatiale dans la direction x•,i du vecteur r exprimé dans la base B• s’écrit avec la convention
d’Einstein sur les indices répétés qui sera utilisée dans la suite

∂r ∂  ∂r•,j • ∂e•j
= r•,j e•j = ej + r•,j . (E.24)
∂x•,i ∂x•,i ∂x•,i ∂x•,i
| {z }
=0

Le dernier terme est nul si on suppose comme ici que les vecteurs de base e•j sont indépendants de la
position spatiale. Pour établir le lien entre les dérivées par rapport aux directions relatives aux deux bases, il
suffit de mettre en évidence la relation entre la dérivée des vecteurs de base. Pour cela, on utilise l’expression

247
E. C HANGEMENTS DE REPÈRES ET DE VARIABLES POUR LES ÉQUATIONS DE N AVIER -S TOKES

des vecteurs de la base BE dans BA telle que eE


j = Rij ei , où les Rij sont les composantes de la matrice de
A

passage (E.3). On obtient alors la relation

∂xE,j ∂eE
j ∂eA k
≡ = Rkj = Rij , (E.25)
∂xA,i ∂eA
i ∂eA i
| {z }
=δik

à partir de laquelle on déduit simplement les relations entre les opérateurs différentiels. Le gradient d’un
scalaire s nécessite ainsi d’évaluer la dérivée ∂s/∂xA,i , ce qui s’écrit
∂s ∂s ∂xE,k ∂s ∂Rmk xA,m ∂s
= = = Rik . (E.26)
∂xA,i ∂xE,k ∂xA,i ∂xE,k ∂xA,i ∂xE,k
Par conséquent, si on note ∇• s le gradient d’un scalaire s par rapport à la base B• , on obtient la relation de
changement de base
∇A s = R ∇E s, (E.27)
qui correspond à la relation classique de changement de base (A.9) en considérant le vecteur X′ = ∇E s.
La relation équivalente pour le gradient d’un vecteur s’obtient en exprimant les composantes rA,j du
vecteur r dans la base BE utilisée pour la dérivation. On a alors
∂rA,j ∂rA,j ∂xE,k ∂Rjl rE,l ∂Rmk xA,m ∂rE,l ∂rE,l
= = = Rjl Rmk δmi = Rjl Rik . (E.28)
∂xA,i ∂xE,k ∂xA,i ∂xE,k ∂xA,i ∂xE,k ∂xE,k
Ainsi, en notant ∇• r• le gradient du vecteur r exprimé dans la base B• et dérivé par rapport aux directions
de cette même base, et en remplaçant Rik par Rki T
qui est le terme général de la matrice RT , on obtient la
relation
∇A rA = R (∇E rE ) RT . (E.29)
Ici encore, on retrouve la relation de changement de base (A.11) avec la matrice M′ = ∇E rE . En effet,
puisque le changement de base considéré ici est une rotation, la relation (E.7b) donne P−1 = R−1 = RT .
La divergence d’un vecteur r est quant à elle donnée par la relation
∂rA,i ∂rA,i ∂xE,j ∂Rik rE,k ∂Rlj xA,l ∂rE,k ∂rE,k
divA rA = = = = Rik Rlj δli = Rik Rij . (E.30)
∂xA,i ∂xE,j ∂xA,i ∂xE,j ∂xA,i ∂xE,j ∂xE,j
En remplaçant Rik par Rki
T
, la relation entre la divergence calculée dans les bases BA et BE s’écrit en
notation tensorielle 
divA rA = RT R : (∇E rE ). (E.31)
Encore une fois, on peut utiliser le fait que le changement de base est une rotation. Ainsi, la matrice R est
orthogonale et la propriété (E.7a) permet de récrire la relation précédente en divA rA = I : (∇E rE ) ce qui
se simplifie en
divA rA = divE rE . (E.32)
La divergence d’un vecteur est donc préservée lorsque le changement de base est une rotation.
Enfin, la divergence d’une matrice s’écrit divA MA = divA RME RT . En notation indicielle, la compo-
sante i de divA MA s’écrit
∂ ∂ ∂xE,m ∂Mkl ∂Rnm xA,n
divA MA = (Rik Mkl Rjl ) = (Rik Mkl Rjl ) = Rik Rjl
∂xA,j ∂xE,m ∂xA,j ∂xE,m ∂xA,j
(E.33)
∂Mkl T
 ∂Mkl ∂Mkl ∂Mkm
= Rik Rjl Rnm δnj = Rik Rlj Rjm = Rik δlm = Rik .
∂xE,m ∂xE,m ∂xE,m ∂xE,m
La dernière égalité correspond au produit R divE M, d’où la relation vectorielle
divA MA = R divE ME . (E.34)
Intuitivement les relations (E.32) et (E.34) pouvaient être établies à partir du fait que la divergence d’un
vecteur est un scalaire dont la valeur n’est pas affectée lors d’un changement de base, et que la divergence
d’une matrice est un vecteur dont l’expression dans la base BE est donnée par la relation (E.3).

248
E.1. Écriture des équations de Navier-Stokes dans un repère non galiléen

E.1.2 Formulation intégrale des équations de Navier-Stokes en repère entraîné avec


les composantes de la vitesse absolue
À partir des résultats précédents, on peut établir la formulation FALE-REUE des équations (4.31) de
Navier-Stokes dans le repère entraîné RE avec les composantes de la vitesse absolue. Il suffit ainsi de rem-
placer dans les équations scalaires — de conservation de la masse et de l’énergie — les expressions dans le
repère absolu de la vitesse absolue et des vecteurs normaux par leurs expressions dans le repère local au
moyen de la relation E.3 ; l’équation vectorielle de conservation de la quantité de mouvement doit quant à
elle être projetée auparavant dans le repère local. Les détails sont développés ci-dessous.

E.1.2.1 Équation de conservation de la masse en repère entraîné


Le bilan de conservation de la masse écrit en formulation ALE avait été donné à l’équation (4.27) dans le
repère absolu avec les composantes de la vitesse absolue. Le terme sous l’intégrale surfacique est alors
simplement remplacé par les expressions de la vitesse et de la normale dans RE : ρ (uA − sA )T nA =
ρ [R (uE − sE )]T RnE = ρ (uE − sE )T (RT R) nE . Finalement, puisque la matrice de changement de base est
orthogonale, la propriété (E.7a) permet de simplifier l’équation de bilan en
Z I
∂ T
ρ dΩ + ρ (uE − sE ) nE d∂Ω = 0 . (E.35)
∂t χ Ω(t) ∂Ω(t)

E.1.2.2 Équation de conservation de la quantité de mouvement en repère entraîné


L’écriture de l’équation de conservation de la quantité de mouvement demande plus de travail puisqu’il
s’agit d’une équation vectorielle pour laquelle la dérivée temporelle doit être transformée au moyen de la
formule (E.22). L’équation doit ensuite être projetée dans le repère entraîné en multipliant par RT .R
Dans un premier temps, la formule de dérivation en repère mobile appliquée au vecteur rA = ρuA dΩ
dont les composantes sont évaluées dans la base BA donne
Z Z Z
∂ δ
ρ uA dΩ = ρ uA dΩ + ω A (RE /RA ) ∧ ρ uA dΩ. (E.36)
∂t χ Ω(t) δt χ Ω(t) Ω(t)

L’équation est ensuite projetée dans la base du repère entraîné BE en multipliant par RT , puis le bilan de
conservation de la quantité de mouvement donné à l’équation (4.27) est introduit dans la relation obtenue
pour aboutir à l’expression
Z Z
δ T
RT ρ u dΩ + R ω (R /R ) ∧ ρ uA dΩ =
δt χ Ω(t)
A A E A
Ω(t)
I I (E.37)
T T
−R [ρ uA ⊗ (uA − sA )] nA d∂Ω + R σ(uA ) nA d∂Ω,
∂Ω(t) ∂Ω(t)

dans laquelle les différents termes doivent être modifiés pour faire apparaître les vitesses absolues uE ex-
primées dans le repère entraîné. Le premier terme est récrit en explicitant la dérivée dans le repère entraîné
δ/δt définie à l’équation (E.18). Par ailleurs, l’orthogonalité de la matrice de changement de base R donne
Z " Z !# Z
T δ
∂ ∂
R ρ u dΩ = R T
R R T
ρ R u dΩ = ρ uE dΩ. (E.38)
δt χ Ω(t) ∂t χ ∂t χ Ω(t)
A E
Ω(t)

Pour le second terme de l’expression (E.37), il est nécessaire d’introduire une nouvelle matrice de vitesse
de rotation ΩE et un nouveau vecteur vitesse de rotation ω E décrivant la rotation dans la base BE . En effet,
le terme s’écrit avec la définition (E.12)
Z Z  Z
T dR T
T
R ω A (RE /RA ) ∧ T
ρ uA dΩ = R ΩA ρ uA dΩ = R R ρ R uE dΩ. (E.39)
Ω(t) Ω(t) dt Ω(t)

249
E. C HANGEMENTS DE REPÈRES ET DE VARIABLES POUR LES ÉQUATIONS DE N AVIER -S TOKES

Le produit RT R se simplifie puisque la matrice est orthogonale, et on introduit alors la matrice de vitesse
angulaire ΩE ainsi que le vecteur vitesse angulaire ω E définis pour tout rE ∈ R3 par

dR
ΩE rE = ω E ∧ rE avec ΩE = RT . (E.40)
dt
La matrice de la vitesse angulaire exprimée dans la base BE aurait par ailleurs pu être simplement déduite
de la relation de changement de base pour une matrice quelconque. En effet, la relation (A.11) donne ΩE =
RT ΩA R puisque la matrice de changement de base R est orthogonale et vérifie la propriété (E.7b). On
retrouve alors l’expression (E.40) en développant : ΩE = RT ΩA R = RT (Ṙ RT ) R = RT Ṙ. Avec ces
nouvelles quantités, le second terme de (E.37) s’écrit donc
Z Z Z
T
R ωA (RE /RA ) ∧ ρ uA dΩ = ΩE ρ uE dΩ = ωE (RE /RA ) ∧ ρ uE dΩ. (E.41)
Ω(t) Ω(t) Ω(t)

Le troisième terme de l’expression (E.37) est facilement transformé à l’aide de la relation de changement
de base (E.3) en
I I h i
RT [ρ uA ⊗ (uA − sA )] nA d∂Ω = RT ρ uA (uA − sA )T nA d∂Ω
∂Ω(t) ∂Ω(t)
I h i
= RT ρ R uE (uE − sE )T RT R nE d∂Ω (E.42)
∂Ω(t)
I
= [ρ uE ⊗ (uE − sE )] nE d∂Ω.
∂Ω(t)

Reste finalement le terme diffusif à modifier. Il faut pour cela expliciter le tenseur des contraintes
σ(uA ) = −pI + τ (uA ). Le tenseur des contraintes visqueuses τ (uA ) exprimé dans la base BE devient
 
τ (uA ) = λ (divA uA )I + µ ∇A uA + ∇AT uA = λ (divE uE )R RT + µ R ∇E uE + ∇ET uE RT (E.43)

en utilisant les relations (E.32) et (E.29) pour la transformation des opérateurs de divergence et du gradient.
Si on définit par τ (uE ) = λ (divE uE )I + µ (∇E uE + ∇ET uE ) le tenseur des contraintes visqueuses exprimé
dans la base BE , alors on peut écrire τ (uA ) = Rτ (uE )RT et le tenseur des contraintes σ(uA ) vérifie alors
la relation
σ(uA ) = R σ(uE ) RT (E.44)
qui revient simplement à effectuer un changement de base pour la matrice σ au moyen de la relation (A.11).
En notant σ(uE ) = −p I + τ (uE ), le quatrième terme de (E.37) se transforme donc en
I I I
 
RT σ(uA ) nA d∂Ω = RT R σ(uE ) RT R nE d∂Ω = σ(uE ) nE d∂Ω. (E.45)
∂Ω(t) ∂Ω(t) ∂Ω(t)

Finalement, le bilan de conservation de la quantité de mouvement exprimé dans le repère entraîné avec
les composantes de la vitesse absolue prend la forme suivante en remplaçant les termes (E.38), (E.41), (E.42)
et (E.45) dans (E.37) :
Z I

ρ uE dΩ + [ρ uE ⊗ (uE − sE )] nE d∂Ω =
∂t χ Ω(t) ∂Ω(t)
I Z . (E.46)
[−pI + τ (uE )] nE d∂Ω − ω E (RE /RA ) ∧ ρ uE dΩ
∂Ω(t) Ω(t)

E.1.2.3 Équation de conservation de l’énergie en repère entraîné


Pour terminer, il reste à établir le bilan de conservation de l’énergie totale dans le repère entraîné. Puis-
qu’il s’agit d’une équation scalaire, la dérivée temporelle dans le bilan de l’énergie (4.27) reste identique, et

250
E.1. Écriture des équations de Navier-Stokes dans un repère non galiléen

il suffit de modifier les autres termes. Comme pour le bilan de conservation de la masse, le terme convectif
sous l’intégrale surfacique s’écrit : [ρ eT (uA − sA )T ] nA = [ρ eT (uE − sE )T RT ] R nE = [ρ eT (uE − sE )T ] nE .
Ensuite, le terme diffusif est transformé au moyen de la relation (E.44) pour le tenseur des contraintes et en
notant que le flux de chaleur s’écrit qθ,A = −kθ ∇A θ on obtient
I I
T   T
[σ(uA )uA − qθ,A ] nA d∂Ω = R σ(uE ) RT R uE + kθ R ∇E θ R nE d∂Ω
∂Ω(t) ∂Ω(t)
I (E.47)
= [σ(uE ) uE + kθ ∇E θ]T nE d∂Ω :
∂Ω(t)

Au final, le bilan de conservation de l’énergie s’écrit donc


Z I h i I
∂ T
ρ e dΩ + ρ e (u − s ) n d∂Ω = [σ(uE ) uE − qθ,E ]T nE d∂Ω . (E.48)
∂t χ Ω(t)
T T E E E
∂Ω(t) ∂Ω(t)

Les expressions des bilans de conservation de la masse (E.35), de la quantité de mouvement (E.46) et de
l’énergie (E.48) établis ici justifient donc la formulation FALE-REUE des équations de Navier-Stokes don-
nées à l’équation (4.31) au moyen d’une description ALE dans le repère entraîné RE avec les composantes
de la vitesse absolue uE .

E.1.3 Formulation intégrale des équations de Navier-Stokes en repère entraîné avec


les composantes de la vitesse relative
La formulation FALE-REVE des équations (4.33) de Navier-Stokes dans le repère entraîné avec les com-
posantes de la vitesse relative se déduit en partie des résultats précédents. L’obtention des équations re-
quiert un travail fastidieux, en particulier pour l’équation de conservation de l’énergie. L’objectif est de
parvenir à exprimer les équations en fonction de la vitesse relative exprimée dans le repère entraîné par
vE = uE − se,E , où sE = se,E + sd,E est la vitesse des nœuds du maillage telle que se,E est la vitesse d’en-
traînement correspondant au mouvement de corps rigide du domaine et sd,E est la vitesse de déformation
des nœuds.

E.1.3.1 Équation de conservation de la masse en repère entraîné


Le bilan de conservation de la masse s’exprime trivialement en fonction de vE à partir de l’équation
(E.35) en décomposant la vitesse du maillage en sE = se,E + sd,E , ce qui conduit à
Z I

ρ dΩ + ρ (vE − sd,E )T nE d∂Ω = 0 . (E.49)
∂t χ Ω(t) ∂Ω(t)

Les termes convectifs apparaissant dans les équations de bilan de la quantité de mouvement et de l’énergie
seront modifiés de façon similaire.

E.1.3.2 Équation de conservation de la quantité de mouvement en repère entraîné


L’écriture de l’équation de conservation de la quantité de mouvement avec la vitesse relative nécessite
plus de travail. Tout d’abord, on exprime chacun des termes de l’équation (E.46) en fonction de la vitesse
relative. Le premier terme donne
Z Z Z
∂ ∂ ∂
ρ uE dΩ = ρ vE dΩ + ρ se,E dΩ. (E.50)
∂t χ Ω(t) ∂t χ Ω(t) ∂t χ Ω(t)

Le second terme de l’expression précédente donnera naissance à une partie de la force centrifuge définie à
l’équation (4.34) comme on le verra par la suite.
Le terme de convection sous l’intégrale dans l’équation (E.46) se transforme en : ρ uE (uE − sE )T =

251
E. C HANGEMENTS DE REPÈRES ET DE VARIABLES POUR LES ÉQUATIONS DE N AVIER -S TOKES

ρ (vE + se,E ) (vE + se,E − se,E − sd,E )T = ρ vE (vE − sd,E )T + ρ se,E (vE − sd,E )T . Par conséquent le second
terme de l’équation (E.46) devient
I h i I h i
T
ρ uE (uE − sE ) nE d∂Ω = ρ vE (vE − sd,E )T nE d∂Ω
∂Ω(t) ∂Ω(t)
I h i (E.51)
T
+ ρ se,E (vE − sd,E ) nE d∂Ω.
∂Ω(t)

Dans le terme diffusif de l’équation (E.46) les contraintes normales −pI ne sont pas modifiées. En re-
vanche, le tenseur des contraintes visqueuses τ (uE ) doit être formulé en fonction de la vitesse relative.
Pour y parvenir, les propriétés suivantes sont nécessaires

∇ET se,E = −∇E se,E , (E.52a)


divE se,E = 0, (E.52b)
3
∇E se,E = ΩE ⇔ ∀r ∈ R (∇E se,E ) r = ω E ∧ r. (E.52c)

La première propriété découle de la définition même d’un corps rigide donnée à l’équation (4.41). En effet,
si se,E est le champ de vitesse correspondant au mouvement de corps rigide, alors DE (se,E ) = 1/2(∇E se,E +
∇ET se,E ) = 0, d’où la première relation. Par ailleurs, D(se,E ) : I = divE se,E et l’hypothèse de corps rigide
impose l’annulation du tenseur des taux de déformation, d’où la seconde propriété. La dernière propriété
provient du fait que se,E = s0,E + ω E ∧ x eE et que s0,E est indépendant de la position d’un point M
quelconque. Avec les propriétés précédentes, le tenseur des contraintes visqueuses s’écrit donc

τ (uE ) = λ (divE uE ) I + µ ∇E uE + ∇ET uE
= λ (divE vE + divE se,E ) I + µ(∇E vE + ∇E se,E + ∇ET vE + ∇ET se,E )
| {z } | {z }
=0 =−∇E T s (E.53)
T
 e,E

= λ (divE vE ) I + µ ∇E vE + ∇E vE
= τ (vE ).

Le tenseur des contraintes visqueuses reste ainsi invariant à cause des propriétés (E.52a) et (E.52b). Le terme
diffusif se transforme donc en fonction de la vitesse relative vE en
I I
σ(uE ) nE d∂Ω = σ(vE ) nE d∂Ω. (E.54)
∂Ω(t) ∂Ω(t)

Enfin, en décomposant le terme source de l’équation (E.46) avec la relation uE = vE + se,E et en rem-
plaçant les termes avec les équations (E.50), (E.51) et (E.54), le bilan s’écrit en fonction de la vitesse relative
Z I h i I
∂ T
ρ v dΩ + ρ v (v − s ) n d∂Ω − σ(vE ) nE d∂Ω =
∂t χ Ω(t)
E E E d,E E
∂Ω(t) ∂Ω(t)
Z I h i
∂ T
− ρ se,E dΩ − ρ se,E (vE − sd,E ) nE d∂Ω
∂t χ Ω(t) ∂Ω(t)
| {z } | {z } (E.55)
Z ① Z ②
− ωE ∧ ρ vE dΩ − ωE ∧ ρ se,E dΩ .
Ω(t) Ω(t)
| {z } | {z }
③ ④

Les différents termes du second membre sont alors réorganisés afin de faire apparaître les forces de Coriolis
et centrifuge introduites à l’équation (4.34). Dans le terme ①, les symboles de dérivation et d’intégration
doivent être intervertis. Toutefois, puisque le domaine d’intégration est variable au cours du temps, l’opé-
ration s’effectue au moyen du théorème de Reynolds écrit pour la description ALE à l’équation (4.10). Dans
le cas présent, le changement du domaine est uniquement dû à la vitesse de déformation sd,E puisque les

252
E.1. Écriture des équations de Navier-Stokes dans un repère non galiléen

équations sont formulées dans le repère entraîné. Par conséquent, la vitesse du maillage apparaissant dans
l’équation (4.10) correspond seulement à sd,E et le terme ① s’écrit
Z Z I
∂ ∂ρ se,E
ρ s dΩ = dΩ + ρ se,E ⊗ sd,E dΩ
∂t χ Ω(t) ∂t x
e,E
Ω(t) ∂Ω(t)
Z Z Z (E.56)
∂se,E ∂ρ
= ρ dΩ + s dΩ + div (ρ s ⊗ s ) dΩ.
∂t x e,E E e,E d,E
Ω(t) Ω(t) ∂t x Ω(t)

Le premier terme dans l’équation précédente correspond à la première contribution dans l’accélération cen-
trifuge (4.34) qui est donc conservé sous cette forme. Le second terme dans l’équation (E.56) est transformé
en utilisant l’expression locale de la conservation de la masse en formulation eulérienne dans le repère
relatif, de sorte que
∂ρ
se,E = −(vE .∇E ρ + ρ divE vE ) se,E . (E.57)
∂t x
Le dernier terme dans l’équation (E.56) est développé au moyen des relations (D.25e) et (D.25i) en

divE (ρ se,E ⊗ sd,E ) = ρ divE (se,E ⊗ sd,E ) + (se,E ⊗ sd,E ) ∇E ρ


(E.58)
= ρ (∇E se,E ) sd,E + ρ se,E divE sd,E + (se,E ⊗ sd,E ) ∇E ρ.

L’intégrale surfacique du terme ② est transformée avec le théorème de Green-Ostrogradski en une inté-
grale volumique afin de pouvoir ensuite combiner les termes avec ceux provenant de ①. L’intégrale sur le
volume Ω porte alors sur le terme

divE [ρ se,E ⊗ (vE − sd,E )] = ρ se,E divE (vE − sd,E ) + [∇E (ρ se,E )] (vE − sd,E )
= ρ se,E divE vE − ρ se,E divE sd,E
(E.59)
+ ρ (∇E se,E ) vE − ρ (∇E se,E ) sd,E
+ (se,E ⊗ ∇E ρ) vE − (se,E ⊗ ∇E ρ) sd,E

qui est transformé à l’aide des relations (D.25i) et (D.24c). Finalement, il reste à regrouper les termes de
l’expression précédente avec ceux issus des équations (E.57) et (E.58). Le résultat se simplifie alors en
(ρ](s( ( (( ((
① + ② = −( [vE(·(∇E e,E − (
ρ s( (div
e,E E vE
( ( ( ( ( ( (( ((
+( (E(s(
ρ (∇ ρ s(
e,E ) sd,E + ( e,E ( E sd,E
(div +( (se,E
( (⊗(
sd,E ) ∇E ρ
(( (( (( (( (E.60)
+(ρ s( (div
e,E E vE − ( ρ s( (div
e,E E sd,E
( ( (
+ρ (∇E se,E ) vE − ( ρ (∇
( E( s(
e,E ) sd,E
⊗(∇( (( (
⊗( ∇( (((
+((se,E
(( E ρ) vE − ( (se,E
(( E ρ) sd,E

puisque la plupart des termes s’annulent en remarquant que (vE · ∇E ρ) se,E s’écrit en notation indicielle
(vE )j ρ,j (se,E )i , ce qui est équivalent à (se,E ⊗∇E ρ) vE dont le terme général est (se,E )i ρ,j (vE )j . De la même
façon, (se,E ⊗ sd,E ) ∇E ρ et (se,E ⊗ ∇E ρ) sd,E sont tous deux des vecteurs de terme général (se,E )i (sd,E )j ρ,j .
Enfin, le terme subsistant s’exprime en fonction du vecteur vitesse angulaire ω E au moyen de la relation
(E.52c) : ρ (∇E se,E ) vE = ρ ωE ∧ vE .
Ainsi la somme des termes ① à ④ devient
Z " #
∂se,E
①+②+③+④=− ρ + ρ ω E ∧ se,E + 2 ρ ωE ∧ vE dΩ (E.61)
Ω(t) ∂t x | {z }
| {z } fCor
fcen

en utilisant les relations (E.56) à (E.60), et le bilan de conservation de la quantité de mouvement écrit avec
la vitesse relative dans le repère entraîné au moyen d’une description ALE est donné par l’expression
Z I

ρ v dΩ + [ρ vE ⊗ (vE − sd,E )] nE d∂Ω =
∂t χ Ω(t)
E
∂Ω(t)
I Z . (E.62)
σ(vE ) nE d∂Ω − ρ (fCor + fcen ) dΩ
∂Ω(t) Ω(t)

253
E. C HANGEMENTS DE REPÈRES ET DE VARIABLES POUR LES ÉQUATIONS DE N AVIER -S TOKES

Les termes sources liés à l’accélération de Coriolis et à l’accélération centrifuge sont définis aux équations
(E.61) et (4.34). Le terme de force centrifuge est un abus de langage et il serait plus approprié de parler de
force d’inertie d’entraînement (voir la remarque E.2 page 247).

E.1.3.3 Équation de conservation de l’énergie en repère entraîné


L’énergie totale reste invariante lors d’un changement de repère puisque c’est une quantité scalaire. En
effet, eT = eI + eC = cv θ + 1/2kuk2 et le vecteur u a la même norme dans BA et BE puisque le changement
de base est une simple rotation1 . Il n’y a donc pas de problème de définition de l’énergie cinétique lorsque
la vitesse absolue est employée pour formuler le bilan de conservation de l’énergie comme on l’a fait pour
l’équation (E.48).
Cependant, lorsque la vitesse relative est adoptée pour formuler les bilans de conservation, il est préfé-
rable de travailler avec une énergie totale « relative », définie à partir des composantes de la vitesse relative.
Celle-ci découle naturellement de l’égalité uT u = v T v + 2 v T se + sT e se qui permet de définir l’énergie
cinétique « relative » eC,r , l’énergie cinétique d’entraînement eC,e et l’énergie cinétique fictive eC,f , toutes
trois données par
2
kvk
eC,r = , (E.63a)
2
2
kse,E k
eC,e = , (E.63b)
2
eC,f = v T se = sT e v, (E.63c)
si bien que l’énergie cinétique « absolue » est définie par
eC = eC,r + eC,f + eC,e . (E.64)
Pour obtenir une description cohérente du système dans le repère entraîné avec les composantes de la
vitesse relative, il est nécessaire de travailler avec l’énergie totale « relative » eT,r définie comme la somme
de l’énergie interne et de l’énergie cinétique relative introduite à l’équation (E.63a). Les énergies totales
« absolue » eT et « relative » eT,r sont donc reliées par les relations
eT = eI + eC = eT,r + eC,f + eC,e avec eT,r = eI + eC,r , (E.65)
et l’équation de conservation de l’énergie totale « absolue » est donc transformée afin d’obtenir un bilan
pour l’énergie totale relative. On procède terme par terme en décomposant le bilan (E.48) en
Z I h i I
∂ T T
ρ e dΩ + ρ e (u − s ) n d∂Ω = [σ(uE ) uE − qθ,E ] nE d∂Ω . (E.66)
∂t χ Ω(t)
T T E E E
∂Ω(t) ∂Ω(t)
| {z } | {z } | {z }
① ② ③

Transformation du terme ① À partir de la relation (E.65), le terme ① est scindé en trois contributions telles
que
Z Z Z Z
∂ ∂ ∂ ∂
ρ eT dΩ = ρ eT,r dΩ + ρ eC,f dΩ + ρ eC,e dΩ . (E.67)
∂t χ Ω(t) ∂t χ Ω(t) ∂t χ Ω(t) ∂t χ Ω(t)
| {z } | {z } | {z }
①.① ①.② ①.③
Le terme ①.① correspond à la variation de l’énergie totale relative qui est donc conservé sous cette forme.
Le terme ①.② est quant à lui transformé en
Z Z  
∂ ∂ρ eC,f
ρ eC,f dΩ = + divE [ρ eC,f sd,E ] dΩ (E.68)
∂t χ Ω(t) Ω(t) ∂t | {z }
| {z x} ①.②.②
①.②.①
1 En effet : kuk2 = uT
A uA = (R uE ) (R uE ) = uE uE .
T T

254
E.1. Écriture des équations de Navier-Stokes dans un repère non galiléen

au moyen du théorème de Reynolds et en suivant le même procédé que pour établir l’équation (E.56). Le
second terme ①.②.② est conservé pour l’instant sous cette forme. En revanche, le terme ①.②.① est développé
à l’aide de l’expression de l’énergie cinétique fictive donnée à l’équation (E.63c) en

∂ρ eC,f ∂vE ∂ρ T ∂sT
e,E
= ρ s T
+ s v + ρ vE . (E.69)
∂t x ∂t x ∂t x e,E
e,E E
∂t
x

Les deux premiers termes du membre de droite peuvent encore être développés à l’aide des bilans locaux
de conservation de la masse et de la quantité de mouvement. Le dernier terme est simplement modifié en
intervertissant l’opération de transposition. Après calcul, l’expression (E.69) du terme ①.②.① se récrit

∂ρ eC,f  
= sTe,E − ρ vE · ∇E vE + divE σ(vE ) + ρ (fCor + fcen )
∂t
x
(E.70)
T ∂se,E
− [vE · ∇E ρ + ρ divE vE ] sT v + ρ v .
e,E E E
∂t x
Comme pour le terme ①.②, le terme ①.③ est transformé avec le théorème de Reynolds et devient
Z Z  
∂ ∂ρ eC,e
ρ eC,e dΩ = + divE [ρ eC,e sd,E ] dΩ, (E.71)
∂t χ Ω(t) Ω(t) ∂t | {z }
| {z x} ①.③.②
①.③.①
puis la dérivée dans le terme ①.③.① est développée en plusieurs contributions à l’aide de la définition
(E.63b) de l’énergie cinétique d’entraînement pour aboutir à l’expression
 
∂ρ eC,e 1 ∂se,E ∂ρ T
= 2 ρ s T
+ s s e,E . (E.72)
∂t x 2 e,E
∂t x ∂t x e,E
Le permier terme dans l’expression précédente est conservé sous cette forme tandis que le second est mo-
difié à l’aide de l’équation de conservation de la masse. Le terme ①.③.② reste inchangé et par conséquent
après calcul le terme ①.③ s’écrit
Z Z Z
∂ T ∂se,E 1 
ρ eC,e dΩ = ρ se,E dΩ − 2 (vE · ∇E ρ + ρdivE vE ) sT
e,E se,E dΩ
∂t χ Ω(t) Ω(t) ∂t x Ω(t)
Z (E.73)
+ divE (ρ eC,e sd,E ) dΩ.
Ω(t)

En regroupant les expressions (E.68), (E.70) et (E.73) le terme ① s’écrit donc


Z Z Z
∂ ∂
ρ e dΩ = ρ e dΩ + divE (ρ eC,f sd,E ) dΩ
∂t χ Ω(t) ∂t χ Ω(t)
T T,r
Ω(t)
Z
 
+ sT
e,E − ρ vE · ∇E vE + divE σ(vE ) + ρ (fCor + fcen ) dΩ
Ω(t)
Z Z
∂se,E
− (vE · ∇E ρ + ρ divE vE ) sT vE dΩ + T
ρ vE dΩ (E.74)
Ω(t)
e,E
Ω(t) ∂t x
Z Z
∂se,E
+ ρ sT dΩ + divE (ρ eC,e sd,E ) dΩ
Ω(t)
e,E
∂t x Ω(t)
Z
1 
− (vE · ∇E ρ + ρdivE vE ) sT
e,E se,E dΩ.
Ω(t) 2

Transformation du terme ② Dans le second terme ② défini à l’équation (E.66), on modifie l’énergie to-
tale eT avec la relation (E.65) et on remplace la vitesse absolue uE par vE + se,E . Après avoir transformé
l’intégrale surfacique en une intégrale volumique avec le théorème de Green-Ostrogradski, on aboutit à

255
E. C HANGEMENTS DE REPÈRES ET DE VARIABLES POUR LES ÉQUATIONS DE N AVIER -S TOKES
Z Z
 
divE ρ eT (uE − sE ) dΩ = divE [ρ eT,r (vE − sd,E )] dΩ
Ω(t) Ω(t)
| {z }
Z ②.①
+ divE [ρ eC,f (vE − sd,E )] dΩ
Ω(t) (E.75)
| {z }
Z ②.②
+ divE [ρ eC,e (vE − sd,E )] dΩ .
Ω(t)
| {z }
②.③

Le terme ②.① reste sous la forme précédente puisqu’il ne fait intervenir que l’énergie totale relative et
la vitesse relative. Le terme ②.② est partiellement développé en remplaçant eC,f par son expression (E.63c).
Le terme sous l’intégrale se récrit alors au moyen des relations (D.25d) et (E.63c) sous la forme
 
divE ρ eC,f (vE − sd,E ) =  vE ) − divE (ρ eC,f sd,E ) T
divE (ρ eC,f 
T
= ρ vE se,E divE vE + (vE · ∇E ρ) vE se,E
T (E.76)
+ ρ sT
e,E (∇E vE ) vE + ρ vE (∇E se,E ) vE
− divE (ρ eC,f sd,E ).

De la même façon le terme sous l’intégrale de ②.③ se récrit


 
divE ρ eC,e (vE − sd,E ) = divE (ρ eC,e vE ) − divE (ρ eC,e sd,E )
1  1 
= ρ sTe,E se,E div E vE + (vE · ∇E ρ) sT
e,E se,E (E.77)
2 2
+ ρ sT
e,E (∇E se,E ) vE − divE (ρ eC,e sd,E )

en remplaçant eC,e par l’expression (E.63b) . Enfin, en rassemblant les expressions (E.75), (E.76) et (E.77), le
terme ② s’écrit
Z Z Z
   
divE ρ eT (uE − sE ) dΩ = divE ρ eT,r (vE − sd,E ) dΩ − divE (ρ eC,f sd,E ) dΩ
Ω(t) Ω(t) Ω(t)
Z
 T
 T

+ ρ vE se,E divE vE + (vE · ∇E ρ) vE se,E dΩ
Ω(t)
Z
 
+ ρ sT T
e,E (∇E vE ) vE + ρ vE (∇E se,E ) vE dΩ (E.78)
Ω(t)
Z  
1  1 
+ ρ sT s
e,E e,E div v
E E + (vE · ∇E ρ) s T
s
e,E e,E dΩ
Ω(t) 2 2
Z
 
+ ρ sT
e,E (∇E se,E ) vE − divE (ρ eC,e sd,E ) dΩ.
Ω(t)

Transformation du terme ③ Le terme ③ relatif aux contributions diffusives est très peu modifié. Le tenseur
des contraintes visqueuses n’est pas affecté par le passage de la vitesse absolue à la vitesse relative ; en
effet, on a montré à l’équation (E.53) que τ (uE ) = τ (vE ). Par ailleurs le terme de flux de chaleur est
aussi invariant puisqu’il est indépendant de la vitesse de l’écoulement. Ainsi, il suffit de remplacer uE par
vE + se,E dans le terme ③, ce qui conduit après transformation avec le théorème de Green-Ostrogradski à
Z Z Z
divE [σ(uE ) uE − qθ,E ] dΩ = divE [σ(vE ) vE − qθ,E ] dΩ + divE [σ(vE ) se,E ] dΩ. (E.79)
Ω(t) Ω(t) Ω(t)

256
E.1. Écriture des équations de Navier-Stokes dans un repère non galiléen

Simplification des termes Le remplacement des termes ①, ② et ③ par les expressions (E.74), (E.78) et
(E.79) dans l’équation (E.66) conduit à
Z I h i
∂ T
ρ e dΩ + ρ e (v − s ) nE d∂Ω =
∂t χ Ω(t)
T,r T,r E d,E
∂Ω(t)
I Z (E.80)
[σ(vE ) vE − qθ,E ]T nE d∂Ω + I dΩ,
∂Ω(t) Ω(t)

où le terme I est donné par


(( (( T T
I = −(div(E( [ρ(eC,f sd,E ] + ρ sT
e,E (vE · ∇E vE ) − se,E div E σ(vE ) − ρ se,E (fCor + fcen )

(( (( ( T ((
(
T ∂se,E ∂se,E
+ (v( · ∇ ( (
ρ) ( s T
v + ρ div (
v ( s v − ρ v − ρ s T
( E (E e,E E ((( E E e,E E E
∂t x e,E
∂t x
(( 1 ( ( (( 1 ( ( ( (

− (
div( [ρ( ((
eC,e sd,E ] + ( (vE ·( (ρ)
∇E ((sT E(vE( )(
sT
E( e,E se,E + (( (ρdiv( e,E se,E
2 (
( 2 (
( (  ( ( ( (
( 
+ (
div(
E( [ρ( ((
eC,f sd,E ] − (ρ( vET
(s( (((
e,E divE vE − ( E ·(
(v( ∇( ((
E ρ)
(
T
vE se,E (E.81)
T
− ρ sT
e,E (∇E vE ) vE − ρ vE (∇E se,E ) vE
  
1  1 (( (((( 
− ρ sT 
e,E 
se,E divE vE − ( (vE
( ·( (ρ)
∇E sT
e,E se,E
2
 (
2
(( ((
− ρ sT
e,E (∇ s
E e,E ) vE + div
(( E [ρ(
( eC,e sd,E ] + divE [σ(vE ) se,E ].

Une grande partie des termes s’éliminent immédiatement, et les termes ρ sT e,E (vE · ∇E vE ) et
ρ sT
e,E (∇ E v E ) vE se simplifient aussi puisque tous deux ont pour terme général ρ (se )i (vj vi,j ) et
ρ (se )i (vi,j ) vj respectivement. Par conséquent, le terme I s’écrit

I = −sTe,E divE σ(vE ) + divE [σ(vE ) se,E ]




T ∂se,E ∂se,E
− T
ρ se,E (fCor + fcen ) − ρ vE T
− ρ se,E (E.82)
∂t x ∂t x
T T
− ρ vE (∇E se,E ) vE − ρ se,E (∇E se,E ) vE .

Dans la première ligne de l’équation précédente, le second terme est développé au moyen de la formule
(D.25f) en utilisant le fait que le tenseur des contraintes est symétrique — donc σ(vE ) se,E = sT e,E σ(vE )).
Ainsi la première ligne devient
((( ( ((( (
− sT sT
e,E div E σ(vE ) + divE [σ(vE ) se,E ] = −( ((
e,E div( sT
E σ(vE ) + ( ((
e,E div(
E σ(vE ) + ∇E se,E : σ(vE ), (E.83)

et le terme subsistant ∇E se,E : σ(vE ) est en réalité nul. En effet, d’après la propriété (E.52a), le tenseur
∇E se,E est antisymétrique. Par ailleurs, le tenseur des contraintes visqueuses est symétrique. Or le double
produit de contraction de deux tenseurs A et B de terme général aij et bij est égal à celui des tenseurs
transposés : A : B = AT : BT , donc (A : B) + (AT : BT ) = 2 (A : B) ; les propriétés de symétrie de B et
d’antisymétrie de A conduisent à (A : B) + (AT : BT ) = aij bij + aji bji = aij bij − aij bij = 0 et puisque
(A : B) + (AT : BT ) = 2 (A : B) alors on a bien A : B = 0. Il n’y a donc pas d’énergie supplémentaire créée
lorsque les équations sont formulées avec les composantes de la vitesse relative.
Cependant, une partie des termes liés aux forces fictives subsiste. Le premier terme de la deuxième ligne
de l’équation (E.82) est développé avec les expressions (4.34) de la force de Coriolis et de la force centrifuge,
et ceux de la troisième ligne sont modifiés en utilisant la propriété (E.52c) ce qui donne
 
∂se,E
 T ∂se,E
∂s 
e,E
I = −ρ sT −2 ω ∧ v −  − ω ∧ s − ρ v − ρ s T
 
e,E E E
∂t
E e,E E
∂t x  e,E
∂t x
−ρ vE T
(ω E ∧ vE ) − ρ sTe,E (ω E ∧ vE )
T T T T ∂se,E
(E.84)
= ρ se,E (ω E ∧ vE ) − ρ vE (ωE ∧ vE ) + ρ se,E (ωE ∧ se,E ) − ρ vE
∂t x

T ∂se,E
= ρ [ω E , vE , se,E ] − ρ [ω E , vE , vE ] + ρ [ω E , se,E , se,E ] − ρ vE .
∂t
x

257
E. C HANGEMENTS DE REPÈRES ET DE VARIABLES POUR LES ÉQUATIONS DE N AVIER -S TOKES

Dans la dernière égalité, on a simplement introduit les produits mixtes tels que wT (u ∧ v) = (u ∧ v) · w =
[u, v, w]. Le produit mixte est nul si il contient au moins deux vecteurs colinéaires, donc les deux derniers
produits mixtes dans l’expression précédente s’annulent. Enfin, le produit mixte est invariant par toute
permutation circulaire des vecteurs qui le composent, et est égal mais de signe opposé si une permutation
non circulaire de ses éléments est effectuée. On a alors [ω E , vE , se,E ] = −[ωE , se,E , vE ] = −(ω E ∧ se,E ) · vE .
Par conséquent le terme I se réduit finalement à

T ∂se,E

T
I = −ρ vE (ωE ∧ se,E ) − ρ vE T
= ρ vE fcen , (E.85)
∂t x

et on retrouve bien le bilan de conservation de l’énergie donné à l’équation (4.33) en remplaçant l’expression
précédente de I dans l’équation (E.80) :
Z I I

ρ eT,r dΩ + ρ eT,r (vE − sd,E ) · nE d∂Ω = [σ(vE ) vE − qθ,E ] · nE d∂Ω
∂t χ Ω(t) ∂Ω(t) ∂Ω(t)
Z . (E.86)
+ ρ vE · fcen dΩ
Ω(t)

Les expressions des bilans de conservation de la masse (E.49), de la quantité de mouvement (E.62) et de
l’énergie (E.86) établies ici justifient donc la formulation FALE-REVE des équations de Navier-Stokes écrites
à l’équation (4.33) au moyen de la description ALE dans le repère entraîné RE avec les composantes de la
vitesse relative vE .

E.2 Impact du jeu de variables sur la forme des équations de Navier-


Stokes
E.2.1 Écriture générique des équations du fluide
Dans le cas général, le fluide est décrit par un jeu de nv = d + 2 variables indépendantes où d est
la dimension du domaine spatial Ω ⊂ Rd . On notera q = [q1 . . . qnv ]T le vecteur des inconnues qui est
supposé être un élément de l’espace H nv = (L2 (Ω))nv . Les équations du fluide forment un système de
nv équations non-linéaires formulées pour les variables qi . Les non-linéarités sont souvent polynomiales
quadratiques (termes en qi qj ), cubiques (termes en qi qj qk ), voire même tétraédriques (termes en qi qj qk ql )
suivant le jeu de variables employé. Pour simplifier l’écriture des équations, les non-linéarités polynomiales
sont interprétées comme provenant de l’action d’opérateurs multilinéaires sur le vecteur des inconnues q
en suivant le même raisonnement qu’à l’équation (2.58).
Pour clarifier les choses, on considère l’exemple simple d’une application Ξ : H nv −→ H avec nv ≥ 2
qui à un vecteur q ∈ H nv associe une fonction continue quadratique telle que Ξ(q) = q1 q2 . L’application Ξ
n’est évidemment pas linéaire par rapport au vecteur q puisque pour tout λ ∈ R et r ∈ H nv , Ξ(q + λr) =
(q1 + λr1 )(q2 + λr2 ) = q1 q2 + λ2 r1 r2 + λ(q1 r2 + q2 r1 ) 6= Ξ(q) + λΞ(r). Cependant, si on considère à présent
l’application Ξ′ : H × H −→ H comme une fonction des composantes q1 et q2 telle que Ξ′ (q1 , q2 ) = q1 q2 ,
alors on obtient une application linéaire par rapport à chaque variable, i. e. une application multilinéaire,
puisque pour tout λ ∈ R et r1 ∈ H, Ξ′ (q1 + λr1 , q2 ) = (q1 + λr1 )q2 = q1 q2 + λr1 q2 = Ξ′ (q1 , q2 ) + λΞ′ (r1 , q2 ).
Plutôt que de définir l’opérateur multilinéaire par rapport à chacune des composantes intervenant dans les
termes non-linéaires, il est possible de le définir directement par rapport au vecteur q contenant toutes les
composantes. On introduit donc finalement l’application Ξ′′ : H nv × H nv −→ H telle que Ξ′′ (q, r) = q1 r2 .
Cette dernière application est bien linéaire par rapport à chaque argument puisque pour tout λ ∈ R et
s ∈ H nv , Ξ′′ (q + λs, r) = (q1 + λs1 )r2 = q1 r2 + λs1 r2 = Ξ′′ (q, r) + λΞ′′ (s, r). Pour retrouver l’image q1 q2
de la fonction initiale Ξ au moyen de la fonction Ξ′′ , il suffit d’interpréter le terme quadratique comme
l’action de l’opérateur Ξ′′ (q, q) dont les deux arguments correspondent au même vecteur d’inconnues q.
Le principe exposé ici pour un terme quadratique se généralise bien entendu pour n’importe quel degré
de non-linéarité polynomiale : dans ce cas, le nombre d’arguments de l’opérateur multilinéaire est égal au
degré de non-linéarité du terme à interpréter.

258
E.2. Impact du jeu de variables sur la forme des équations de Navier-Stokes

En appliquant ce formalisme au système d’équations de la mécanique des fluides, on verra qu’il est
possible de parvenir à l’écriture synthétique
M(q) q̇ = K + L(q) + Q(q, q) + C(q, q, q) + · · · (E.87)
faisant intervenir une somme d’opérateurs multilinéaires dont le nombre dépend du degré de non-linéarité
des termes impliqués dans les équations. L’expression précédente suppose que les non-linéarités des équa-
tions sont au maximum cubiques, mais il n’est pas impossible que des non-linéarités d’ordre supérieur
apparaissent. Au premier membre, M est une matrice de M (nv , nv ), alors que les quantités du second
membre sont toutes des vecteurs de Rnv ; K correspond au terme constant, L contient les opérateurs li-
néaires en q, Q les opérateurs quadratiques et enfin C les opérateurs cubiques.
Toutefois, les équations (4.28) écrites au moyen des variables conservatives ne se mettent pas sous cette
forme comme on l’a fait remarquer au paragraphe 4.4.1. Dans cette annexe, plusieurs écritures équivalentes
des équations de Navier-Stokes sont donc développées en adoptant d’autres jeux de variables. L’objectif est
de parvenir au système d’équations polynomial le plus simple possible afin de pouvoir construire ensuite
un modèle d’ordre réduit POD-Galerkin au moyen d’une projection de ces équations. Pour les différents
jeux de variables envisagés, on écrit donc les équations en faisant apparaître explicitement dans leurs ex-
pressions uniquement les inconnues choisies. Cependant, pour éviter de trop surcharger les expressions,
le tenseur des contraintes visqueuses τ sera interprété comme un opérateur linéaire en q puisque celui-ci
dépend linéairement de la vitesse selon la définition τ (u) = µ(∇u + ∇T u) + λ(div u) I.

E.2.2 Variables quasi-conservatives q = [ρ, u, eI ] et q = [ρ, u, eT ]


Les variables conservatives posent problème en raison de l’apparition de termes isolés u et eT dans
les équations alors que les variables sont ρu et ρeT . Par conséquent l’utilisation de variables « quasi-
conservatives » est un moyen d’écrire les équations sous forme polynomiale. L’expression des bilans de
conservation (4.14), (4.16) et (4.19) est donc développée pour faire apparaître exclusivement les variables
q = [ρ, u, eI ]. Pour cela, le tenseur des contraintes σ est dans un premier temps décomposé en σ = −pI + τ .
La pression p participant aux contraintes normales s’exprime au moyen de l’équation d’état (4.26). Enfin,
la température apparaissant dans le bilan d’énergie se déduit de l’équation des gaz parfaits (4.25) et de
la relation précédente qui donnent θ = eI /cv . Le système d’équations utilisant le jeu de variables quasi-
conservatives s’écrit alors

 ∂ρ

 + div (ρ u) = 0
 ∂t



 ∂u
ρ + ρ u · ∇u = −∇[ρ(γ − 1)eI ] + div τ (u) + ρ fvol , (E.88)

 ∂t

  

 ∂e kθ

 ρ I + ρ u · ∇eI = −ρ(γ − 1) eI div u + τ (u) : ∇u + div ∇eI
∂t cv
et des non-linéarités cubiques font leur apparition. Le système prend donc la forme synthétique
M(q) q̇ = L(q) + Q(q, q) + C(q, q, q), (E.89)
où les opérateurs de la forme générique (E.89) associée aux variables quasi-conservatives q = [ρ, u, eI ]T
sont définis par
     
1 0 0 0 −div (ρu)
M(q) = 0 ρ 0 , L(q) = div τ (u) + ρ fvol  , Q(q, q) = −∇[ρ(γ − 1)eI ]
0 0 ρ div (kθ /cv ∇eI ) τ (u) : ∇u
  (E.90)
0
C(q, q, q) =  −ρ u · ∇u .
−ρ u · ∇eI − ρ(γ − 1)eI div u

Avec les variables quasi-conservatives q = [ρ, u, eT ]T faisant intervenir l’énergie totale eT au lieu de
l’énergie interne, le bilan de conservation de l’énergie totale (4.21) remplace alors celui portant sur l’énergie

259
E. C HANGEMENTS DE REPÈRES ET DE VARIABLES POUR LES ÉQUATIONS DE N AVIER -S TOKES

interne. Les relations donnant la pression p = ρ(γ − 1)eI et la température θ = eI /cv se transforment en
remplaçant l’énergie interne par la différence eT − eC . Or l’énergie cinétique est une forme quadratique de
la vitesse (eC = 1/2uT u), ce qui complique les équations et augmente les non-linéarités. Par conséquent, la
forme générique des équations écrites avec les variables q = [ρ, u, eT ]T présente en plus une non-linéarité
tétraédrique telle que
M(q) q̇ = L(q) + Q(q, q) + C(q, q, q) + T(q, q, q, q). (E.91)

Les opérateurs de la forme générique (E.91) associée aux variables quasi-conservatives q = [ρ, u, eT ]T
contiennent plus de termes que lorsque les variables q = [ρ, u, eI ]T sont employées, et en outre, ces termes
sont fortement non-linéaires. La matrice M(q) reste identique et les autres opérateurs sont donnés par les
expressions
   
0 −div (ρu)
L(q) = div τ (u) + ρ fvol  ,
Q(q, q) =  −∇[ρ(γ − 1)eT ]   ,

T
div (kθ /cv ∇eT ) ρu · fvol + div [τ (u) u] − div kθ /cv ∇ u u /2
    (E.92)
0  0
C(q, q, q) = −ρ u · ∇u + ∇ ρ(γ − 1) uT u /2 , T(q, q, q, q) =   0 
  .
T
−ρ u · ∇eT − div [ρu(γ − 1)eT ] div ρu(γ − 1) u u /2

L’utilisation des variables quasi-conservatives est peu appropriée — notamment lorsque l’énergie totale
est employée — si l’objectif est ensuite de construire un modèle d’ordre réduit POD-Galerkin sur la base
de ces équations puisque des non-linéarités cubiques voire tétraédriques apparaissent. En outre, le système
dynamique prend une forme implicite f (q̇, q, t) = 0.

E.2.3 Variables thermiques q = [ρ, u, θ]


L’énergie interne est remplacée par la température θ pour formuler le dernier bilan. La pression prove-
nant du tenseur des contraintes σ s’exprime simplement en fonction de la température d’après la loi des
gaz parfaits (4.25) : p = ρRs θ. Par ailleurs, l’énergie interne s’écrit simplement eI = cv θ, si bien que le
système d’équations pour les variables thermiques devient

 ∂ρ

 + div (ρu) = 0

 ∂t


 ∂u
ρ + ρ u · ∇u = −∇(ρRs θ) + div τ (u) + ρ fvol . (E.93)

 ∂t

  

 ∂θ 1 kθ

 ρ + ρ u · ∇θ = −ρ(γ − 1) θ div u + τ (u) : ∇u + div ∇θ
∂t cv cv

La structure du système reste identique à celle obtenue avec l’énergie interne (E.89). La matrice de masse
est identique et les autres opérateurs multilinéaires conservent une forme proche donnée par
   
0 −div (ρu)
L(q) = div τ (u) + ρ fvol  , Q(q, q) =  −∇(ρRs θ)  ,
div (kθ /cv ∇θ) τ (u) : ∇u/cv
  (E.94)
0
C(q, q, q) =  −ρ u · ∇u .
−ρ u · ∇θ − ρ(γ − 1) θ div u

L’utilisation des variables thermiques ne présente donc pas plus d’intérêt que le jeu de variables basé
sur l’énergie interne du système puisque les non-linéarités cubiques persistent, de même que le caractère
implicite des équations aux dérivées partielles du système dynamique.

260
E.2. Impact du jeu de variables sur la forme des équations de Navier-Stokes

E.2.4 Variables primitives q = [ρ, u, p]


Le choix de la pression comme seconde variable thermodynamique se justifie par le fait qu’elle appa-
raît naturellement dans l’expression du tenseur des contraintes normales. Les bilans de conservation de la
masse (4.14) et de la quantité de mouvement (4.16) ne nécessitent aucune modification. Le bilan de pression
peut s’obtenir en substituant ρ = p/(θRs ) dans le bilan de conservation de la masse Dρ/Dt = ρdiv u où
D · /Dt correspond à la dérivée matérielle. En explicitant la dérivée et en réorganisant les termes on obtient
une relation entre la dérivée de la température et de la pression :
   
D p p Dθ 1 Dp
+ div u = 0 ⇐⇒ = p div u + . (E.95)
Dt θRs θRs Dt ρRs Dt

Le premier membre du bilan de température peut donc être remplacé par l’expression précédente ; enfin,
les autres termes impliquant la température θ sont modifiés à l’aide de la relation θ = p/(ρRs ). Après calcul,
on parvient au système d’équations

 ∂ρ

 + div (ρu) = 0

 ∂t


 ∂u
ρ + ρ u · ∇u = −∇p + div τ (u) + ρfvol , (E.96)

 ∂t

   

 ∂p kθ p

 + u · ∇p = −γ p div u + (γ − 1)τ (u) : ∇u + div ∇
∂t cv ρ

qui est intéressant puisque la quasi-totalité des termes est quadratique. Cependant, le terme de diffusion de
la chaleur s’exprime à présent en fonction du rapport p/ρ et introduit par conséquent une fraction ration-
nelle. Il n’est donc pas possible d’écrire le bilan de pression sous une forme polynomiale simple et propice
à l’élaboration du modèle d’ordre réduit.

E.2.5 Variables primitives modifiées q = [ϑ, u, p]


Pour résumer, le principal problème de la mise en forme des équations découle de la masse volumique
qui apparaît soit dans le membre de gauche et rend ainsi le système d’équations aux dérivées partielles
implicite, soit au dénominateur de certains termes si bien que les équations ne sont pas polynomiales. Le jeu
de variables primitives modifiées employé à l’origine par Vigo [240] et Iollo et al. [117] permet de remédier
à ces deux problèmes par l’introduction du covolume — aussi appelé volume spécifique — ϑ = 1/ρ. Les bilans
de pression et de quantité de mouvement dans (E.96) s’expriment facilement en fonction du covolume. En
revanche, le changement de variable ρ = 1/ϑ dans l’équation (4.14) nécessite de transformer le bilan en
       
∂ 1 1 1 1 ∂ϑ 1 1
+ div u + u · ∇ = 0 ⇐⇒ − 2 + div u − u · ∇ϑ = 0. (E.97)
∂t ϑ ϑ ϑ ϑ ∂t ϑ ϑ2

Après simplification dans le bilan du covolume, les équations de Navier-Stokes écrites avec les variables
primitives modifiées prennent la forme

 ∂ϑ

 + u · ∇ϑ = ϑ div u

 ∂t


 ∂u
+ u · ∇u = −ϑ ∇p + ϑ div τ (u) + fvol . (E.98)

 ∂t

  

 ∂p kθ

 + u · ∇p = −γ p div u + (γ − 1)τ (u) : ∇u + div ∇(ϑ p)
∂t cv

Le système présente une forme particulièrement intéressante puisque les équations s’écrivent sous la forme
polynomiale explicite
q̇ = K + Q(q, q), (E.99)

261
E. C HANGEMENTS DE REPÈRES ET DE VARIABLES POUR LES ÉQUATIONS DE N AVIER -S TOKES

dans laquelle les non-linéarités sont au maximum quadratiques. Ce nouveau jeu de variables ne fait donc
intervenir que des termes quadratiques — mis à part le terme d’efforts volumiques externes fvol qui est la
seule contribution au terme constant K — puisque les termes linéaires et cubiques apparaissant dans les
autres formulations ont donc tous été rendus quadratiques. Les opérateurs multilinéaires associés à ce jeu
de variables sont donc définis par
   
0 −u · ∇ϑ + ϑdiv u
K = fvol  et Q(q, q) =  −u · ∇u − ϑ ∇p + ϑ div τ (u) . (E.100)
0 −u · ∇p − γ p div u + (γ − 1)τ (u) : ∇u + div [kθ /cv ∇(ϑ p)]

E.3 Discrétisation par la méthode des Volumes Finis


On décrit brièvement dans cette section les techniques employées dans le logiciel elsA pour mener à
bien la résolution des équations de Navier-Stokes. Pour simplifier, on considère ici la formulation eulérienne
FEUL-RAUA écrite avec les variables conservatives. On détaille ensuite le calcul du gradient d’une grandeur
physique quelconque par une approche Volumes Finis.

E.3.1 Discrétisation des équations de Navier-Stokes


On considère un domaine de calcul Ω ⊂ Rd de dimension d, de frontière ∂Ω et de normale extérieure n.
Les lois de bilan (4.27) s’écrivent avec sA = 0 dans le repère RA sous la forme
Z I I Z
d
q dΩ + F C (q) · n d∂Ω + F D (q, ∇q) · n d∂Ω = T(q, ∇q) dΩ (E.101)
dt Ω ∂Ω ∂Ω Ω

qui sera le point de départ de la méthode des Volumes Finis. Le terme source T est la plupart du temps
nul — en l’absence de forces volumiques — sauf par exemple lorsque les équations de Navier-Stokes sont
formulées dans un repère relatif entraîné, auquel cas le terme source contiendra des termes associés aux
forces centrifugeH et de Coriolis. La formulation (E.101)
H des équations de Navier-Stokes fait alors apparaître
le flux convectif ∂Ω F C (q) · n d∂Ω et le flux diffusif ∂Ω F D (q, ∇q) · n d∂Ω définis respectivement par
   
ρ uA 0
F C (q) =  ρ uA ⊗ uA + pI  et F D (q, ∇q) =  −τ (uA ) . (E.102)
ρ eT uA + puA −τ (uA )uA − qθ,A ∇A θ
La discrétisation des équations (E.101) s’effectue pour le domaine de calcul Ω, partitionné en un en-
semble de cellules de contrôle Ωi de centre Mi telles que Ω = ∪N
i=1 Ωi et de volume
Z
V(Ωi ) = dΩ. (E.103)
Ωi

Les cellules de contrôle Ωi du maillage structuré sont des quadrilatères lorsque d = 2 ou des hexaèdres
lorsque d = 3. Par conséquent, la surface ∂Ωi délimitant la cellule Ωi peut être définie comme la réunion
des nf faces de la cellule2 . En notant Σi,j la face commune entre la cellule Ωi et la cellule Ωj le contour ∂Ωi
de la cellule Ωi s’écrit
nf
[
∂Ωi = Σi,j , (E.104)
j=1
H
et l’intégration sur la surface fermée ∂Ωi pourra être remplacée par une somme d’intégrales sur les faces
Σi,j de la cellule au moyen de la relation
I nf Z
X
• d∂Ω = • dΣ. (E.105)
∂Ωi j=1 Σi,j

Le schéma de la figure E.2 représente les différentes quantités géométriques intervenant dans le formalisme
Volumes Finis pour la discrétisation du problème.
2 Le nombre de face n vaut 4 lorsque d = 2 puisque les cellules sont des quadrilatères, et n = 6 pour d = 3 lorsque les cellules
f f
sont des hexaèdres.

262
E.3. Discrétisation par la méthode des Volumes Finis

nΣi,j Mi,j

Mi
Ωi,j

Ωi

Σi,j

Figure E.2 : Schématisation d’une cellule de contrôle en Volumes Finis et représentation des notations associées à la discrétisation
spatiale du domaine Ω.

En négligeant le terme source T et en utilisant les relations précédentes, les lois de bilan (E.101) s’écrivent
Z nf Z
X h i
d
q dΩ = − F C (q) + F D (q, ∇q) · n dΣ (E.106)
dt Ωi j=1 Σi,j

pour chaque cellule de contrôle Ωi . On définit alors la valeur moyenne des variables conservatives q dans
la cellule Ω par Z
1
qi = q dΩ, (E.107)
V(Ωi ) Ωi
et de la même manière, on définit la valeur moyenne du flux à travers la surface Σi,j par
Z h i
F Σi,j = F C (q) + F D (q, ∇q) · n dΣ. (E.108)
Σi,j

Pour chaque cellule de contrôle Ωi , le système d’équations (E.101) prend ainsi la forme
nf
d X
(V(Ωi ) qi ) = − F Σi,j . (E.109)
dt j=1

Puisque le maillage est supposé fixe, le volume V(Ωi ) peut être extrait de l’opérateur de dérivation dans
le premier membre. La résolution numérique du système d’équations précédent consiste à chercher une
approximation numérique wi de la valeur moyenne qi des variables conservatives dans les cellules Ωi .
Pour cela, le flux exact F Σi,j à travers une des faces Σi,j de la cellule Ωi est approché par une fonction flux
numérique F(wi , wi,j ) = FC (wi , wi,j )+ FD (wi , wi,j ) qui dépend des valeurs moyennes approchées wi des
variables conservatives dans la cellule Ωi et des valeurs wi,j dans un certain nombre de cellules voisines.
En utilisant ces approximations, le système d’équations (E.109) se récrit
nf
d 1 X 1
wi = − F(wi , wi,j ) · nΣi,j = − RΩi , (E.110)
dt V(Ωi ) j=1 V(Ωi )

où nΣi,j est la normale extérieure (non unitaire) à la face Σi,j , telle que
Z
nΣi,j = n dΣ (E.111)
Σi,j
Pnf
et RΩi est le résidu numérique de la modélisation donné par RΩi = j=1 F(wi , wi,j ) · nΣi,j . Afin de ré-
soudre le système d’équations (E.110), il reste encore à préciser d’une part comment l’intégration temporelle
est effectuée, et d’autre part comment la fonction flux numérique est définie.

263
E. C HANGEMENTS DE REPÈRES ET DE VARIABLES POUR LES ÉQUATIONS DE N AVIER -S TOKES

E.3.1.1 Discrétisation en temps


Le système d’équations (E.110) peut être intégré en temps au moyen de la méthode de Runge-Kutta
à 1, 3, 4 ou 5 pas par exemple. L’intégration en temps est explicite et s’adresse plutôt à des problèmes
instationnaires rapides, faisant intervenir des phénomènes à haute fréquence ne justifiant pas l’utilisation
de grands pas de temps.
Le schéma employé pour l’intégration en temps des équations semi-discrétisées (E.110) est le schéma
d’Euler rétrograde, qui est un cas particulier de la méthode de Runge-Kutta avec un seul pas. Les variables
conservatives win+1 à l’instant tn+1 = tn + ∆t se déduisent alors des valeurs connues des variables win à
l’instant tn par la relation
∆t
win+1 − win = − Rn . (E.112)
V(Ωi ) Ωi

E.3.1.2 Discrétisation des flux convectifs et diffusifs


Dans ce paragraphe, on donne les approximations employées pour la fonction flux numérique permet-
tant de décrire les flux convectifs et diffusifs. Pour cela, on considère dans un premier temps l’approxima-
tion du flux convectif, pour lequel un schéma centré avec viscosité artificielle est adopté. La discrétisation
dite « centrée simple » sur chaque face Σi,j fait intervenir une moyenne des flux calculés aux centres des
deux cellules de contrôles adjacentes à Σi,j . Ce type de discrétisation conduit à un schéma inconditionnel-
lement instable et doit par conséquent être stabilisé par l’adjonction d’une dissipation artificielle pour le
calcul des ondes de chocs notamment. Plusieurs choix sont possibles dans elsA pour modéliser le terme de
dissipation artificielle, et on optera ici pour la formulation proposée par Jameson [120].
L’approximation « centrée simple » de la partie convective du flux numérique stabilisé par un flux de
dissipation artificielle s’écrit sur la face Σi,j de la cellule Ωi

1 C 
FC
Jameson (wi , wi,j ) · nΣi,j = F (wi ) + FC (wi,j ) · nΣi,j − DΣi,j , (E.113)
2
où wi et wi,j désignent respectivement les inconnues conservatives dans la cellule considérée Ωi et dans
la cellule voisine Ωi,j , adjacente à la face Σi,j . Le dernier terme DΣi,j correspond à la dissipation artifi-
cielle pour la face Σi,j . L’approximation du flux convectif avec le schéma de Jameson [120] requiert donc
tout d’abord l’évaluation aux centres des cellules Ωi et Ωi,j , de la densité de flux FC (wi ) définie à l’équa-
Pnf (E.102), et ensuite le calcul du terme de dissipation artificiel. Ce dernier peut se mettre sous la forme
tion
j=1 DΣi,j = Di + Dj + Dk en remplaçant (E.113) dans (E.110), ce qui permet de définir les contribu-
tions de l’opérateur de dissipation dans chacune des directions i, j et k du maillage structuré. Sans entrer
dans le détail du principe de calcul du terme de dissipation artificiel, on peut signaler tout de même que
les formulations adoptées comprennent un terme de dissipation non-linéaire du second ordre pour capter
correctement les discontinuités de l’écoulement, et un terme de dissipation linéaire du quatrième ordre car
le schéma n’est pas dissipatif au sens de Kreiss [24, 157].
Dans un second temps, les flux diffusifs doivent aussi être approchés en fonction des inconnues conser-
vatives connues aux centres des cellules de calcul. La discrétisation nécessite deux opérations successives.
La première étape consiste à évaluer les densités de flux diffusif (E.102), dont l’expression fait intervenir le
gradient des vitesses et de la température. Cette première étape exige donc l’évaluation numérique de ces
gradients à l’aide d’un schéma de discrétisation. Une fois ces densités de flux connues, la seconde opération
a pour but de discrétiser les flux de diffusion et d’en effectuer le bilan. La partie diffusive du flux numé-
rique s’obtient par un schéma similaire à celui de la formulation de Jameson, en effectuant une moyenne
arithmétique des densités de flux de diffusion dans la cellule Ωi et la cellule Ωi,j adjacente. Le flux diffusif
est alors approché par l’expression

1 D 
FD
Jameson
(wi , wi,j ) · nΣi,j = F (wi ) + FD (wi,j ) · nΣi,j (E.114)
2
qui requiert l’évaluation des densités de flux (E.102) au centre de la cellule Ωi et des cellules Ωi,j adjacentes.
Pour cela, il est nécessaire d’évaluer les gradients des grandeurs conservatives aux centres des cellules de
contrôle.

264
E.3. Discrétisation par la méthode des Volumes Finis

Finalement, les équations de Navier-Stokes (E.110) écrites avec les variables conservatives et discrétisées
en temps par un schéma d’Euler rétrograde et en espace avec le schéma de Jameson prennent la forme
nf
∆t X 1  C n 
win+1 − win = − F (wi ) + FC wi,j
n
· nΣi,j
V(Ωi ) j=1 2
n
∆t X 1  D n
f
 (E.115)
− F (wi ) + FD wi,j
n
· nΣi,j
V(Ωi ) j=1 2
∆t
− (Di + Dj + Dk)
V(Ωi )
lorsque les bilans sont écrits pour une cellule de contrôle Ωi . Le processus de discrétisation a donc permis
de passer des variables conservatives q = [ρ, ρ uA , ρ eT ] correspondant à un vecteur de nv variables appar-
tenant à l’espace (L2 (Ωi ))nv en supposant que les variables sont des fonctions de carré intégrable, à une
approximation numérique wi ∈ Rnv représentant les valeurs discrètes moyennes des variables q au centre
de la cellule Ωi . Afin d’obtenir une solution du problème sur l’ensemble du domaine Ω = ∪N i=1 Ωi , il reste
encore à assembler le système matriciel qui tiendra compte de l’ensemble des contributions wi pour chaque
cellule. Le champ aérodynamique q ∈ (L2 (Ω))nv sur l’ensemble du domaine Ω sera donc approché par le
vecteur W ∈ RNv avec Nv = N nv qui rassemble les contributions discrètes wi sur chaque cellule.

E.3.2 Approximation du gradient en Volumes Finis


Lors de la construction du modèle d’ordre réduit par une approche POD-Galerkin, il est nécessaire de
disposer des gradients des modes POD et de la partie moyenne des clichés. Puisque les clichés ont été
calculés au moyen d’un code de calcul reposant sur une discrétisation en Volumes Finis, il est conseillé de
conserver le même formalisme pour évaluer les gradients.
On considère donc le champ ψ = [ψ1 · · · ψN ] ∈ RN regroupant les approximations des valeurs de la
fonction scalaire continue ψ aux centres des cellules du maillage Volumes Finis. L’évaluation du gradient
du champ scalaire ψ s’effectue au centre Mi d’une cellule de discrétisation Ωi délimitée par les faces Σi,j .
On suppose que la valeur du gradient au centre de la cellule de discrétisation est la valeur moyenne dans
toute la cellule. Ainsi le théorème de Green-Ostrogradski (D.29) s’applique à ψ et conduit à la relation
Z nf Z
1 1 X
(∇ψ)Mi = ∇ψ dΩi = ψ n dΣi,j (E.116)
V(Ωi ) Ωi V(Ωi ) j=1 Σi,j

n
qui permet de ramener le calcul du gradient dans la cellule à un calcul sur la frontière ∂Ωi = ∪j=1
f
Σi,j . Dans
l’expression précédente, V(Ωi ) représente le volume de la cellule de calcul, et n correspond à la normale
sortante à Ωi sur la face Σi,j . Pour être en mesure d’évaluer le gradient, on suppose que le champ ψ est
uniforme sur chaque face Σi,j et la valeur représentative de ψ utilisée diffère ensuite suivant que la face
est interne au domaine ou externe — i. e. sur le bord ∂Ω du domaine. Pour une face interne au domaine, la
valeur de ψ sur la face Σi,j est simplement approchée par la demi-somme de ψ évalué au centre Mi de la
cellule Ωi et au centre Mi,j de sa voisine Ωi,j , si bien que
Z
1 
ψ n dΣi,j ≈ ψMi + ψVi,j nΣi,j . (E.117)
Σi,j 2

De la même manière que pour le champ ψ, on suppose que la normale n sur la face Σi,j est uniforme ;
on utilise alors dans l’approximation précédente la normale nΣi,j définie à l’équation (E.111) comme la
normale moyenne sur la face Σi,j . En trois dimensions, la normale moyenne à la face Σi,j délimitée par les
quatre sommets A, B, C et D est donnée par l’expression
1
nΣi,j = ǫ (OC − OA) ∧ (OD − OB), (E.118)
2
où OA, OB, OC et OD sont les vecteurs distance par rapport au point d’origine O du repère RA et ǫ = ±1
afin de toujours avoir une normale sortante.

265
E. C HANGEMENTS DE REPÈRES ET DE VARIABLES POUR LES ÉQUATIONS DE N AVIER -S TOKES

Dans le cas d’une face Σi,j externe, le champ ψ sur la face est calculé à partir d’un état satisfaisant les
conditions aux limites. C’est la méthode employée dans elsA puisque les conditions limites sont connues
et s’appliquent aux champs dont on cherche les gradients. Cependant, lorsqu’il s’agit d’évaluer le gradient
d’un champ tel que celui d’un mode POD, les conditions aux limites ne sont pas explicitement connues.
Plusieurs solutions peuvent alors être envisagées pour calculer les valeurs du gradient sur le bord du
domaine. La méthode la plus intuitive consiste à extrapoler le champ ψ à partir des valeurs connues au
centre des cellules à l’intérieur du domaine. Une variante de cette méthode repose sur un premier calcul
du gradient à l’intérieur du domaine, suivi d’une extrapolation du gradient au centre des cellules de bord.
Toutefois ces deux méthodes reposent sur une technique d’extrapolation qui n’est généralement pas recom-
mandée. La dernière méthode proposée consiste à calculer le gradient des modes POD à partir du gradient
des clichés en tirant profit de la décomposition linéaire (2.20) des modes POD sur les clichés. Les gradients
des modes POD sont alors calculés comme la combinaison linéaire des gradients des clichés

1 X (j)  (m) 
M
∇ϕ(j) = cm ∇u − ∇u . (E.119)
λj m=1

Le gradient de la partie moyenne u s’obtient lui aussi à partir du gradient des clichés puisqu’il s’agit sim-
plement de la moyenne des clichés pondérés par les coefficients αm relatifs à l’opérateur de moyenne tem-
porelle E [·]. Le gradient de la partie moyenne s’écrit alors

h i XM
∇u = E ∇u(m) = αm ∇u(m) . (E.120)
m=1

L’avantage de cette approche est qu’il est possible d’extraire d’elsA les valeurs des clichés sur le bord
du domaine si bien que les valeurs des champs sur le bord sont exactement connues et n’ont pas besoin
d’être extrapolées. La méthode peut néanmoins devenir assez coûteuse lorsque le nombre M de clichés
employés dans la base de données initiale est élevé. En effet, il est indispensable d’évaluer le gradient des
M clichés pour effectuer ensuite la combinaison linéaire, alors que les méthodes précédentes reposant sur
une extrapolation ne nécessitent que l’évaluation de q gradients, i. e. autant que le nombre de modes POD
qui est toujours inférieur au nombre M de clichés.

266
Annexe F
Analyse des contributions des coefficients
impliqués dans les modèles d’ordre réduit des
équations de Navier-Stokes

Sommaire
F.1 Analyse des coefficients du modèle d’ordre réduit autonome . . . . . . . . . . . . . . . . . . 267
F.1.1 Comparaison des contributions convectives et diffusives . . . . . . . . . . . . . . . . . 267
F.1.2 Comparaison des contributions surfaciques et volumiques . . . . . . . . . . . . . . . . 268
F.2 Analyse des coefficients du modèle d’ordre réduit non-autonome . . . . . . . . . . . . . . . 271
F.2.1 Comparaison des coefficients analytiques et identifiés . . . . . . . . . . . . . . . . . . 271
F.2.1.1 Comparaison des coefficients autonomes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 271
F.2.1.2 Comparaison des coefficients non-autonomes . . . . . . . . . . . . . . . . . . 273
F.2.2 Comparaison des contributions autonomes et non-autonomes . . . . . . . . . . . . . . 274

Dans cette annexe, les contributions relatives des différents coefficients intervenant dans les modèles
d’ordre réduit des équations du fluide développés aux chapitres 5 et 6 sont analysés afin d’évaluer leur
participation à la réponse globale.

F.1 Analyse des coefficients du modèle d’ordre réduit autonome


F.1.1 Comparaison des contributions convectives et diffusives
Les expressions des coefficients du modèle d’ordre réduit font apparaître plusieurs contributions cor-
respondant d’une part aux termes convectifs ou diffusifs (5.9), et d’autre part aux termes volumiques et
surfaciques issus des intégrations par parties pratiquées sur les termes diffusifs (5.21). On se propose donc
ici d’analyser les contributions relatives de ces deux groupes, au moyen du modèle d’ordre réduit employé
au paragraphe 5.5 avec une base de projection constituée de q = 10 modes POD.
Tout d’abord les contributions convectives (KiC , LC ij et Qijk ) et diffusives (Ki , Lij et Qijk ) contribuant
C D D D

aux coefficients du modèle d’ordre réduit sont comparées en fonction de leur participation aux coefficients
totaux (Ki , Lij et Qijk ). Pour cela, on définit les rapports

C C D
ΠC (C) = log 100 et Π D
(C) = log 100 C , (F.1)
C Re C

où le terme C représente selon le cas la contribution constante, linéaire ou quadratique. Le graphique F.1
présente ainsi les contributions relatives ΠC et ΠD des coefficients constants convectifs KiC et diffusifs KiD .

267
F. A NALYSE DES CONTRIBUTIONS DES COEFFICIENTS DES MODÈLES D ’ ORDRE RÉDUIT

3.5 3.5

3 3

2.5 2.5

2 100% 2 100%
ΠC (Ki)

ΠD (Ki)
50% 50%
1.5 1.5
25% 25%

1 10% 1 10%

0.5 0.5

0 0
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
i i

(a) Contribution convective (b) Contribution diffusive

Figure F.1 : Comparaison des contributions relatives des termes convectifs et diffusifs constants KiC et KiD .

3.5 3.5

4 3 4 3

3 3
2.5
2.5
2 2
ΠC (Lij)

ΠD (Lij)
2
1 2 1

1.5
0 0
1.5
−1 −1 1

1
10 10
9 9 0.5
8 8
7 7
6 1 0.5 6 1
5 2 5 2 0
4 3 4 3
4 4
3 5 3 5
2 6 2 6
7 0 7
1 8 1 8
9 9
10 10
j i j i

(a) Contribution convective (b) Contribution diffusive

Figure F.2 : Comparaison des contributions relatives des termes convectifs et diffusifs linéaires LC D
ij et Lij .

Parfois, la contribution dépasse largement les 100% puisque les contributions considérées séparément ont
des signes opposés et leur somme produit une contribution totale inférieure en valeur absolue.
Le graphique F.2 représente les contributions relatives des termes linéaires convectifs LC ij et diffusifs Lij .
D

Pour quelques couples d’indices (i, j), les contributions relatives des termes linéaires dépassent les 100%,
pour la même raison que celle évoquée pour les coefficients constants. Comme pour ces derniers représen-
tés sur le graphique F.1, les contributions convectives et diffusives des termes linéaires jouent chacune un
rôle significatif.
Enfin les graphiques de la figure F.3 représentent, pour trois tranches (k = 1, 5 et 10) du tenseur Q, les
contributions relatives des termes convectifs QC ijk et diffusifs Qijk . Cette fois-ci, la contribution des termes
D

convectifs est largement prépondérante par rapport à celle des termes diffusifs. Pour la majorité des coeffi-
cients, la contribution convective avoisine les 100% alors que la contribution diffusive est non négligeable
seulement pour quelques triplets (i, j, k). Ceci signifie que la contribution diffusive participe surtout à la
partie moyenne de l’écoulement, et joue un rôle moindre dans les fluctuations. En effet, les termes constants
et linéaires proviennent de la partie moyenne q de l’écoulement alors que la partie quadratique est pure-
ment liée aux fluctuations de la solution.

F.1.2 Comparaison des contributions surfaciques et volumiques


Par analogie, les contributions provenant des termes surfaciques et volumiques sont comparées en se
basant sur leur participation relative au coefficient diffusif. En effet, les contributions surfaciques et volu-
miques apparaissent comme résultat de l’intégration par parties des termes diffusifs (voir le paragraphe
D 1
5.2.2.2) de sorte que QDijk = QVol + QSurf . La comparaison s’effectue au moyen des rapports Π et Π , dé-
D S V

1 Des coefficients surfaciques et volumiques pour les termes constants (KD et KD ) et linéaires (LD et LD ) apparaissent aussi
Surf Vol Surf Vol
lorsque l’opérateur quadratique diffusif QD (q, q) de l’équation (5.5) s’applique respectivement aux couples (q, q) et (ϕ(j) , q).

268
F.1. Analyse des coefficients du modèle d’ordre réduit autonome

2.5 2.5

2
3 2.5 3

2.5 2 2.5 2
2
2 1.5 2

ΠC (Qij10)
1.5
ΠC (Qij1)

ΠC (Qij5)
1.5 1.5 1.5
1.5
1
1 1

0.5 0.5 1 0.5


1 1
0 0 0

10 10 10
9 9 0.5 9
8 0.5 8 8 0.5
7 7 7
6 1 6 1 6 1
5 2 5 2 5 2
4 3 4 3 4 3
4 4 4
3 5 3 5 3 5
2 6 2 6 2 6
7 7 7
1 8 0 1 8 0 1 8 0
9 9 9
10 10 10
j i j i j i

(a) Contribution convective QC C C


ij1 , Qij5 et Qij10

2.5
2.5
2
2
3 3 3 2
1.5
1.5
2 2 2
1.5
1
1 1 1

ΠD (Qij10)
1
ΠD (Qij1)

ΠD (Qij5)

0 0 1
0.5
0.5 0
−1 −1
0 0.5
−2 0 −2 −1

−3 −3 −0.5 −2 0
−0.5

10 10 −1 10 −0.5
9 −1 9 9
8 8 8
7 7 7
6 1 6 1 −1.5 6 1 −1
5 2 −1.5 5 2 5 2
4 3 4 3 4 3
4 4 4
3 5 3 5 3 5
2 6 2 6 −2 2 6
7 −2 7 7
1 8 1 8 1 8 −1.5
9 9 9
10 10 10
j i j i j i

(b) Contribution diffusive QD D D


ij1 , Qij5 et Qij10

Figure F.3 : Comparaison des contributions relatives des termes convectifs et diffusifs quadratiques QC D
ijk et Qijk .

finis de la même manière que le rapport ΠC donné à l’équation (F.1), en choisissant à la place de C C la
contribution surfacique ou volumique et au lieu du terme C la contribution diffusive totale.

2 100% 2.5

50%
1.5
25% 2 100%

50%
1 10%
1.5
25%
ΠV (Ki)
ΠS (Ki)

0.5

1 10%

0.5
−0.5

−1 0
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
i i

(a) Contribution surfacique (b) Contribution volumique

D D
Figure F.4 : Comparaison des contributions relatives des termes surfaciques et volumiques constants KSurf et KVol .

Le graphique F.4 présente ainsi les contributions relatives ΠS et ΠV des coefficients constants surfa-
ciques KSurf
D
et volumiques KVol
D
. On constate ici que les contributions surfaciques sont peu prononcées et ne
dépassent jamais 25% du coefficient total. Le même phénomène est observé sur les coefficients linéaires et
quadratiques représentés sur les figures F.5 et F.6. Les contributions surfaciques ne représentent à chaque
fois qu’une faible proportion des coefficients totaux et semblent même être dans la plupart des cas négli-
geables.

La comparaison effectuée ci-dessus laisse supposer que les contributions surfaciques pourraient être né-
gligées lors du calcul des coefficients du modèle d’ordre réduit, à l’instar des simplifications pratiquées par

269
F. A NALYSE DES CONTRIBUTIONS DES COEFFICIENTS DES MODÈLES D ’ ORDRE RÉDUIT

3 3

4 2.5 3.5

3 2.5
3
2 2.5
2 2

ΠV (Lij)
2
ΠS (Lij)

1.5
1 1.5
1
1 1.5
0
0.5

−1 0.5 0
1
10 10
9 0 9
8 8
7 7
6 1 6 1 0.5
5 2 −0.5 5 2
4 3 4 3
4 4
3 5 3 5
2 6 2 6
7 7
1 8 1 8 0
9 9
10 10
j i j i

(a) Contribution surfacique (b) Contribution volumique

Figure F.5 : Comparaison des contributions relatives des termes surfaciques et volumiques linéaires LD D
Surf et LVol .

Iollo et al. [117]. La faible participation des termes surfaciques provient des conditions aux limites impo-
sées sur les frontières du domaine où les quantités aérodynamiques varient peu. Par conséquent, les modes
POD calculés à partir des fluctuations des variables aérodynamiques sont quasiment nuls sur les bords du
domaine, d’où les faibles contributions des termes surfaciques dans cette zone. Cependant, on choisit ici
de ne pas négliger le calcul des termes surfaciques afin d’éviter au maximum les erreurs d’évaluation des
coefficients pouvant déstabiliser la réponse du modèle d’ordre réduit.

3
2

2.5
4 3 1.5 1.5
2

3 2 2 1.5
1
1 1
2 1
ΠS (Qij1)

ΠS (Qij5)

ΠS (Qij10)

1.5 0.5
0.5
1 0 0 0.5
1 −0.5
0 −1 0
−1
0
−1 0.5 −2 −1.5
−0.5
10 10 10
9 0 9 9 −0.5
8 8 −1 8
7 7 7
6 1 6 1 6 1
5 2 5 2 5 2
4 3 −0.5 4 3 3
4 4 4 4 −1
3 5 3 5 −1.5 3 5
2 6 2 6 6
7 7 2 7
1 8 1 8 1 8
9 9 9
10 10 10
j i j i j i

(a) Contribution surfacique QD D D


ij1,Surf , Qij5,Surf et Qij10,Surf

2 2
3.5 2.5 2.5 2.5

3
2 2
2.5
2 1.5 1.5
ΠV (Qij10)

1.5 1.5
ΠV (Qij1)

ΠV (Qij5)

1.5 1 1
1 1.5
0.5 0.5 1
0.5 1

0 0 0
1

10 10 10
9 9 0.5 9 0.5
8 8 8
7 0.5 7 7
6 1 6 1 6 1
5 2 5 2 5 2
4 3 4 3 4 3
4 4 4
3 5 3 5 3 5
2 6 2 6 2 6
7 7 7
1 8 0 1 8 0 1 8 0
9 9 9
10 10 10
j i j i j i

(b) Contribution volumique QD D D


ij1,Vol , Qij5,Vol et Qij10,Vol

Figure F.6 : Comparaison des contributions relatives des termes surfaciques et volumiques quadratiques QD D
ijk,Surf et Qijk,Vol .

270
F.2. Analyse des coefficients du modèle d’ordre réduit non-autonome

F.2 Analyse des coefficients du modèle d’ordre réduit non-autonome


Dans cette section, les coefficients du modèle d’ordre réduit développé au chapitre 6 sont dans un pre-
mier temps comparés lorsqu’ils sont évalués au moyen des expressions analytiques ou identifiés à partir
des clichés. Ensuite, les contributions des termes autonomes et non-autonomes sont analysées.

F.2.1 Comparaison des coefficients analytiques et identifiés


Le modèle d’ordre réduit considéré ici est celui du paragraphe 6.5 construit à partir de M = 120 clichés
extraits sur np ≈ 2, 5 périodes d’oscillation et une base de projection comportant q = 10 modes POD. Les
coefficients analytiques sont d’abord corrigés avec la correction de Cazemier et al. pour stabiliser le mo-
dèle d’ordre réduit sur la durée d’échantillonnage puis dans un second temps, un calibrage des coefficients
KdL_E est pratiqué puisque celui-ci avait permis d’améliorer considérablement la réponse sur une durée
légèrement plus longue (voir le tableau 6.5 p.196). En ce qui concerne l’identification des coefficients, le pro-
blème inverse est résolu en approchant le pseudo-inverse avec p = 9 valeurs singulières (voir le paragraphe
6.5.2 p.198).

F.2.1.1 Comparaison des coefficients autonomes

Les histogrammes des figures F.7, F.8 et F.9 représentent les coefficients des termes autonomes constants
Ki , linéaires Lij et quadratiques Qijk respectivement. D’une manière générale, les valeurs des coefficients
calculés par la résolution du problème d’identification sont beaucoup plus faibles que celles produites par
les expressions analytiques. Par ailleurs les coefficients prépondérants diffèrent suivant la manière dont les
coefficients sont évalués, et les signes sont souvent opposés pour les coefficients constants comme on peut
l’observer sur la figure F.7.
La comparaison des histogrammes des coefficients autonomes linéaires représentés sur la figure F.8
révèle que l’identification a tendance à aplatir l’histogramme. Les coefficients prépondérants sont moins
nombreux que lorsque les expressions analytiques sont employées pour évaluer les coefficients, ce qui laisse
penser que l’identification permet de lisser, ou de filtrer en quelque sorte l’influence de certains termes.
Ce comportement s’observe aussi pour les coefficients quadratiques représentés sur la figure F.9. Seuls
quelques termes correspondant aux premiers indices i de l’opérateur Q identifié contribuent de manière
non négligeable à la réponse quadratique. L’effet est d’autant plus flagrant sur les tranches Qij5 et Qij10 où
les contributions quadratiques sont quasiment nulles au delà de i = 3. Au contraire, les contributions des
termes quadratiques évalués avec les expressions analytiques sont beaucoup plus réparties.

−3
x 10
1.5 0.5

1
0.4
0.5

0 0.3

−0.5
0.2
Ki

−1
Ki

0.1
−1.5

−2
0

−2.5
−0.1
−3

−3.5 −0.2
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
i i

(a) Identification par la POD (b) Projection de Galerkin

Figure F.7 : Comparaison des coefficients autonomes constants Ki du modèle d’ordre réduit identifiés par la POD et calculés par
les expressions analytiques issues de la projection de Galerkin.

271
F. A NALYSE DES CONTRIBUTIONS DES COEFFICIENTS DES MODÈLES D ’ ORDRE RÉDUIT

15
1

0.8
1.5 20 10
0.6
1
10
0.4
0.5 5

0 0.2 0

Lij
Lij

−0.5 0 0
−10
−1 −0.2

−1.5 −0.4 −20 −5

10 −0.6 10
9 9
8 8 −10
7 −0.8 7
6 1 6 1
5 2 5 2
4 3 4 3
4 −1 4
3 5 3 5
6 2 6 −15
2 7 7
1 8 1 8
9 9
10 10
j i j i

(a) Identification par la POD (b) Projection de Galerkin

Figure F.8 : Comparaison des coefficients autonomes linéaires Lij du modèle d’ordre réduit identifiés par la POD et calculés par
les expressions analytiques issues de la projection de Galerkin.

−3
x 10

0.02 −3
0.12 x 10
2 0
0.15 0.04 0.01
0.1
0
0.02
0
0.1 0.08 −2 −2
0
−4
−0.01
Qij10
Qij1

Qij5

0.05 0.06 −0.02


−6
−4
−0.04 −0.02 −8
0 0.04
−0.06 −10
−0.03
−0.05 0.02 −0.08 −12 −6
−0.04
10 0 10 10
9 9 9
8 8 −0.05 8 −8
7 7 7
6 1 −0.02 6 1 6 1
5 2 5 2 5 2
3 3 4 3
4 4 4 4 −0.06 4
3 5 3 5 3 5
6 6 2 6
2 7 −0.04 2 7 7 −10
1 8 1 8 1 8
9 9 9
10 10 10
j i j i j i

(a) Identification par la POD

20
50
15 15
20 60 40 30
10
10 40 20
30
10 10
20 5
20
5 0
Qij10
Qij1

Qij5

0 0 0
10 −10
0 −20 −5
−20
−10 0
−40 −30
−10
−20 −5 −60 −10 −40
−15
10 10 −20 10
9 −10 9 9
8 8 8 −20
7 7 −30 7
6 1 6 1 6 1
5 2 −15 5 2 5 2 −25
4 3 4 3 −40 4 3
4 4 4
3 5 3 5 3 5
2 6 2 6 2 6
7 7 7 −30
1 8 1 8 1 8
9 9 9
10 10 10
j i j i j i

(b) Projection de Galerkin

Figure F.9 : Comparaison des coefficients autonomes quadratiques du modèle d’ordre réduit identifiés par la POD et calculés par
les expressions analytiques issues de la projection de Galerkin. Seules les trois tranches Qij1 , Qij5 et Qij10 de l’opérateur Q sont
représentées.

272
F.2. Analyse des coefficients du modèle d’ordre réduit non-autonome

F.2.1.2 Comparaison des coefficients non-autonomes

Il en va de même pour les coefficients non-autonomes définis à l’équation (6.70) pour lesquels seules six
composantes sont non nulles. Les trois composantes constantes Ki,x ET
, Ki,z
ET
et Ki,y
ER
sont représentées sur la
figure F.10 lorsqu’elles identifiées à partir de l’équation (2.65), ou lorsqu’elles sont calculées explicitement
à partir des expressions analytiques. L’ordre de grandeur des coefficients identifiés est toujours beaucoup
plus faible que dans le cas de coefficients calculés à partir des expressions de la projection de Galerkin et les
signes diffèrent souvent. Le même type d’observation peut être formulé pour les coefficients linéaires non-
autonomes représentés sur la figure F.11. Les coefficients prépondérants ne sont pas du tout localisés sur
les mêmes indices. En outre, l’ordre de grandeur des coefficients calculés par les expressions analytiques
prend une importance considérable par rapport à celui des coefficients identifiés, en particulier pour les
coefficients linéaires associés à la rotation.

−3
x 10
2
0.05 0.01

1
0.04 0.005

0
0
0.03

−1
−0.005
KET
i,x

KET

KER
i,z

0.02

i,y
−2
−0.01

0.01
−3 −0.015

0
−4 −0.02

−5 −0.01 −0.025
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
i i i

(a) Identification par la POD

0.4 0.6 0.25

0.3 0.5 0.2

0.15
0.2 0.4

0.1
0.1 0.3
KET

KET

KER
i,x

i,z

i,y

0.05
0 0.2
0

−0.1 0.1
−0.05

−0.2 0
−0.1

−0.3 −0.1 −0.15


1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
i i i

(b) Projection de Galerkin

Figure F.10 : Comparaison des coefficients non-autonomes constants du modèle d’ordre réduit identifiés par la POD (a) et calculés
ET ET ER
par les expressions analytiques issues de la projection de Galerkin (b). Seules les composantes non nulles Ki,x , Ki,z et Ki,y des
opérateurs constants KETi et K ER
i sont représentées.

La conclusion de cette comparaison des coefficients calculés par les deux approches est que l’identifi-
cation des coefficients permet en général de filtrer les erreurs commises dans l’évaluation des coefficients
à partir des expressions analytiques de la projection de Galerkin. Le résultat est particulièrement visible
pour les coefficients linéaires et quadratiques autonomes (voir les figures F.8 et F.9). L’identification des
coefficients quadratiques conduit aussi à des termes prépondérants pour les premières amplitudes mo-
dales, ce qui n’est pas le cas lorsque les coefficients sont calculés au moyen des expressions analytiques. Les
termes dominants dans les opérateurs du modèle d’ordre réduit diffèrent considérablement en fonction de
l’approche choisie pour calculer les coefficients. Toutefois, la réponse globale du système est relativement
proche lorsque la fenêtre d’échantillonnage Ie est considérée. Les modifications apportées par l’identifi-
cation des coefficients concernent surtout le comportement à long terme du modèle d’ordre réduit. Il est
cependant difficile de déterminer quels sont précisément les coefficients qui permettent de stabiliser la ré-
ponse à long terme.

273
F. A NALYSE DES CONTRIBUTIONS DES COEFFICIENTS DES MODÈLES D ’ ORDRE RÉDUIT

0.8
0.03 0.02
1
0.6 0.04 0.03
0.02 0.015
0.5 0.02
0.4 0.02

0.01 0.01
0
LET
ij,x

0.2 0 0.01

LET
ij,z

LER
ij,y
0
−0.5 0 0
−0.02 0.005
−0.01

−1 −0.2 −0.01
−0.04 −0.02
0
10 −0.4 10 10
9 9 −0.02 9
8 8 8
7 7 7
6 1 −0.6 6 6 −0.005
2 1 1
5 3 5 2 5 2
4 4 4 3 −0.03 4 3
5 4 4
3 6 3 5 3 5
2 7 2 6 6
8 −0.8 7 2 7
1 9 1 8 1 8 −0.01
9 9
10 10 10
j i j i j i

(a) Identification par la POD

50 500
15

20 60 40 400
600
10 40 30 300
10 400
20
20 200
5 200
0 0
LET

LET
ij,x

ij,z

10 0 100
−20
0 −200
−10 0 0
−40
−400
−5 −10 −100
−20 −60
−600
−20 −200
10 10
9 −10 9 10
8 8 9
7 7 −30 8 −300
6 6 7
1 1 6 1
5 2 5 2 5 2
4 3 −15 4 3 −40 3 −400
4 4 4 4
3 5 3 5 3 5
2 6 2 6 6
7 7 2 7
1 8 1 8 −50 1 8
9 9 9 −500
10 10 10
j i j i j i

(b) Projection de Galerkin

Figure F.11 : Comparaison des coefficients non-autonomes linéaires du modèle d’ordre réduit identifiés par la POD (a) et calculés
par les expressions analytiques issues de la projection de Galerkin (b). Seules les composantes non nulles LET ET ER
ij,x , Lij,z et Lij,y des
ET ER
opérateurs linéaires Lij et Lij sont représentées.

F.2.2 Comparaison des contributions autonomes et non-autonomes


Le modèle d’ordre réduit est ici construit à partir de M = 120 clichés avec une base de projection
contenant q = 6 modes POD. Le problème inverse pour l’identification des coefficients est approché avec
p = 7 valeurs singulières puisque dans ce cas la réponse reste stable à très long terme (voir le tableau 6.7
p. 202). Dans l’exemple du profil NACA0012, les contributions convectives et diffusives, puis surfaciques
et volumiques avaient été comparées afin d’analyser leur participation relative aux coefficients du modèle
d’ordre réduit. Dans l’exemple traité ici, cette comparaison n’a pas lieu d’être puisque l’écoulement est
supposé parfait et par conséquent les coefficients sont seulement donnés par les contributions convectives.
Il est toutefois intéressant de distinguer cette fois les contributions autonomes et non-autonomes.
Les contributions des termes autonomes Ki indépendantes du temps sont comparées à chaque instant
tm aux contributions KET i · s0,E (tm ) et KER
i · ωE (tm ) sur la figure F.12. Globalement, on constate que les
contributions liées à la rotation sont relativement faibles en comparaison avec celles du terme autonome et
de la contribution du mouvement de translation. Les contributions autonomes et non-autonomes issues de
la translation sont en revanche du même ordre de grandeur et participent activement à la réponse totale
due aux termes constants. Le comportement des différentes contributions varie en fonction des modes POD
auxquels les équations sont associées : ainsi, pour les deux premières équations, la contribution autonome
Ki s’ajoute à celle produite par la translation Ki ET · s0,E (t) puisque les deux contributions ont le même
signe. En revanche pour les équations du modèle d’ordre réduit relatives aux indices i = 4, 5 et 6, c’est
l’inverse qui se produit et les contributions autonomes atténuent les effets du mouvement d’entraînement
en translation. La transition s’effectue pour l’équation d’indice i = 3 où les contributions autonome et
d’entraînement en translation sont pratiquement égales et opposées.
De la même manière, les coefficients autonomes Lij sont comparés aux coefficients non-autonomes
LET ER
Pq(tm ) et Lij · ωE (tm ). Les graphiques de la figure F.13 représentent ainsi la contribution au-
ij · s0,E
tonome j=1 Lij aj (tm ) à chaque instant d’échantillonnage, et les contributions non-autonomes en trans-

274
F.2. Analyse des coefficients du modèle d’ordre réduit non-autonome

−3 −3
x 10 x 10
3 3

2 2
K1

K2
1 1

0 0

−1 −1
0 0.5 1 1.5 2 2.5 0 0.5 1 1.5 2 2.5
−3 −4
x 10 x 10
4 3

2 2
K3

K4
0 1

−2 0

−4 −1
0 0.5 1 1.5 2 2.5 0 0.5 1 1.5 2 2.5
−4 −4
x 10 x 10
2 4

0 2
K5

K6
−2 0

−4 −2
0 0.5 1 1.5 2 2.5 0 0.5 1 1.5 2 2.5
t* t*

Figure F.12 : Comparaison des contributions des coefficients constants du modèle d’ordre réduit calculés par identification sur
l’intervalle de temps d’échantillonnage adimensionnel t∗ ∈ [t0 ; t0 + Te ]/Tα . Les termes autonomes Ki tracés en trait plein (—)
sont constants au cours du temps. Les contributions non-autonomes issues des termes de translation KET i · s0,E (tm ) sont tracées
en traits discontinus (– –) et celles issues des termes de rotation KER
i · ω E (tm ) sont tracées en pointillés (· · · ). La résultante des
termes constants est tracée en traits rouges (—).

Pq Pq
lation j=1 (LET ij · s0,E (tm )) aj (tm ) et en rotation
ER
j=1 (Lij · ω E (tm )) aj (tm ). Les contributions dues à
la rotation sont encore une fois négligeables par rapport aux contributions autonomes et à celles dues à la
translation. Pour toutes les amplitudes modales, on peut constater que les différentes contributions linéaires
sont en phase. Par conséquent, la contribution due à la translation vient s’ajouter à celle du terme autonome
dans la réponse du système.
0.04 0.02

0.02 0.01
L1j aj

L2j aj

0 0

−0.02 −0.01

−0.04 −0.02
0 0.5 1 1.5 2 2.5 0 0.5 1 1.5 2 2.5
−3
x 10
0.01 5

0.005
L3j aj

L4j aj

0 0

−0.005

−0.01 −5
0 0.5 1 1.5 2 2.5 0 0.5 1 1.5 2 2.5
−3 −3
x 10 x 10
5 4

2
L5j aj

L6j aj

0 0

−2

−5 −4
0 0.5 1 1.5 2 2.5 0 0.5 1 1.5 2 2.5
t* t*

Figure F.13 : Comparaison des contributions des coefficients linéaires du modèle d’ordre réduit calculésP par identification sur
q
l’intervalle de temps d’échantillonnage adimensionnel t∗ ∈ [t0 ; t0 + Te ]/Tα . Les contributionPq autonomes j=1 Lij aj (tm ) sont
ET
tracés en trait plein (—). Les contributions non-autonomes issues des termes P de translation j=1 (L ij · s 0,E (tm )) aj (tm ) sont
tracées en traits discontinus (– –) et celles issues des termes de rotation qj=1 (LERij · ω E (tm )) aj (tm ) sont tracées en pointillés
(· · · ). La résultante des termes linéaires est tracée en traits rouges (—).

Finalement, la figure F.14 nous renseigne sur la façon dont les contributions des termes autonomes et
non-autonomes participent globalement à la réponse du modèle d’ordre réduit. Chaque graphique repré-
sente en trait plein rouge la dérivée ȧi des amplitudes modales qui correspond au membre de gauche
de l’équation (6.14) gouvernant le modèle d’ordre réduit. D’après P l’équation (6.14), cette quantité est la
q
somme
Pq des contributions du terme constant K, du terme linéaire j=1 Lij aj (t), du terme quadratique
Q a
j,k=1 ij j (t) a k (t), du terme constant d’entraînement K E
i (t) et enfin du terme linéaire d’entraînement

275
F. A NALYSE DES CONTRIBUTIONS DES COEFFICIENTS DES MODÈLES D ’ ORDRE RÉDUIT

Pq E
Les courbes des graphiques de la figure F.14 mettent en évidence le fait que les contribu-
j=1 Lij (t) aj (t).
tions linéaires autonomes et non-autonomes sont prépondérantes pour l’exemple traité ici, ce qui en soit
n’est pas surprenant puisque les oscillations imposées au profil sont de faible amplitude et que la réponse
aérodynamique est principalement linéaire. Toutefois, les contributions quadratiques ne sont pas négli-
geables : dès la troisième amplitude modale, les oscillations du terme quadratique sont en phase avec celles
des contributions linéaires et particpent donc à l’entretien des oscillations du système. Enfin, il s’avère que
les contributions constantes sont négligeables : les graphiques de la figure F.12 avaient permis de montrer
que l’ordre de grandeur des termes constants était très faible par rapport à ceux des termes linéaires re-
présentés sur les graphiques de la figure F.13. Lorsqu’elle n’est pas négligeable comme c’est le cas pour ȧ3 ,
la contribution constante autonome s’annule avec celle produite par le terme constant d’entraînement, si
bien que la contribution constante totale est bien négligeable. La contribution constante participe peu à la
réponse du modèle d’ordre réduit puisque la décomposition des clichés pratiquée est une décomposition
affine et que le modèle d’ordre réduit est formulé pour la partie fluctuante autour de la partie moyenne.
En conclusion, l’analyse de la contribution des différents coefficients a permis de mettre en évidence le
fait que la réponse du modèle d’ordre réduit est principalement gouvernée par les termes linéaires, bien que
les termes quadratiques ne soient pas négligeables pour les amplitudes ai,i≥3 . Par ailleurs, les termes non-
autonomes participent principalement à la réponse du modèle d’ordre réduit via les termes d’entraînement
en translation. Ceci s’explique par le fait que la vitesse de translation est beaucoup plus élevée que celle du
mouvement de rotation puisque l’écoulement est transsonique. Toutefois, il faut mentionner que l’effet de
la rotation intervient aussi dans le terme dit de « translation » puisque le vecteur vitesse s0,E est exprimé
dans le repère entraîné RE au moyen de la relation (E.8) dans laquelle apparaît la matrice de rotation R.
La même analyse aurait pu être menée avec le modèle d’ordre réduit dont les coefficients sont évalués
à partir des expressions analytiques. Les résultats, qui ne sont pas présentés ici, révèlent que la correction
introduite dans le modèle d’ordre réduit POD-Galerkin a pour but de compenser entre elles les contribu-
tions autonomes et non-autonomes afin de retrouver la réponse macroscopique correcte. Ce résultat rejoint
d’une certaine manière l’observation effectuée par Sirisup et Karniadakis [215] qui avaient dû modifier la
valeur du facteur de pénalité pour imposer une condition limite non-homogène afin que la réponse globale
du système soit correctement reproduite. Ainsi, il semble ici que la condition limite ne doit pas être imposée
directement avec les valeurs de s0,E et ωE mais avec des valeurs corrigées pour reproduire correctement la
condition limite.
0.04 0.02

0.02 0.01
d a1/dt

d a2/dt

0 0

−0.02 −0.01

−0.04 −0.02
0 0.5 1 1.5 2 2.5 0 0.5 1 1.5 2 2.5
−3
x 10
0.01 5

0.005
d a3/dt

d a4/dt

0 0

−0.005

−0.01 −5
0 0.5 1 1.5 2 2.5 0 0.5 1 1.5 2 2.5
−3 −3
x 10 x 10
5 4

2
d a5/dt

d a6/dt

0 0

−2

−5 −4
0 0.5 1 1.5 2 2.5 0 0.5 1 1.5 2 2.5
t* t*

Figure F.14 : Participation des différentes contributions du modèle d’ordre réduit à la réponse. La dérivée ȧi des amplitudes modales
est tracée pourPi = 1, . . . , q en trait plein rouge (—). On trace ensuite les contributions
P du terme constant Ki en trait plein (—), du
terme linéaire qj=1 Lij aj (tm ) en traits discontinus (– –), du terme quadratique qj,k=1 Qij aj (tm ) ak (tP m ) en pointillés (· · · ),
du terme constant d’entraînement KE (tm ) avec les carrés () et enfin du terme linéaire d’entraînement qj=1 LE ij (tm ) aj (tm )
avec les cercles (◦).

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C ONSTRUCTION DE MODÈLES D ’ ORDRE RÉDUIT NON - LINÉAIRES BASÉS SUR LA D ÉCOMPOSITION
O RTHOGONALE P ROPRE POUR L’ AÉROÉLASTICITÉ

La prédiction numérique de la réponse de systèmes aéroélastiques devient rapidement très coûteuse dès
qu’il s’agit d’effectuer une analyse paramétrique. Le recours à un modèle d’ordre réduit fidèle au système
dynamique initial est alors indispensable pour réduire les coûts de calcul. Ainsi, l’utilisation d’une base de
vecteurs issus de la décomposition orthogonale propre (POD) combinée ensuite à une projection de Galer-
kin s’est imposée en mécanique des fluides. La difficulté de la construction d’un tel modèle d’ordre réduit
pour les systèmes aéroélastiques est triple : tout d’abord en raison des non-linéarités inhérentes aux équa-
tions de Navier-Stokes, ensuite à cause de l’incohérence de la définition des modes POD pour un domaine
en mouvement et enfin de par la nécessité d’une stabilisation.
Tout d’abord, le modèle d’ordre réduit reposant sur l’utilisation des modes POD est appliqué à un sys-
tème dynamique linéaire pour lequel plusieurs formulations sont développées pour tenir compte de condi-
tions limites spécifiques. Ensuite, le modèle d’ordre réduit est développé pour les équations de Navier-
Stokes d’un fluide compressible au moyen d’un jeu de variables particulier. Ce premier modèle réduit
développé pour un domaine de frontières fixes est corrigé puis validé sur l’exemple d’un profil NACA0012
fortement incliné pour provoquer l’apparition d’une allée de vortex. Finalement, le modèle d’ordre réduit
est étendu au cas d’un domaine mobile sous l’hypothèse d’un mouvement de corps rigide afin d’éluder le
problème de définition des modes POD. Ce modèle est alors employé pour reproduire l’écoulement trans-
sonique autour d’un profil NACA0064 animé d’un mouvement d’oscillation.
Mots clés : modèle réduit, décomposition orthogonale propre, projection Galerkin, aéroélasticité, fluide
compressible, système non-autonome.

C ONSTRUCTION OF NONLINEAR P ROPER O RTHOGONAL D ECOMPOSITION BASED REDUCED - ORDER


MODELS FOR AEROELASTIC APPLICATIONS

The numerical prediction of aeroelastic systems responses becomes very costly when a parametric ana-
lysis has to be performed. The need of a reduced order model close to the initial dynamical system is the-
refore essential to reduce the computational costs. The use of a basis composed of vectors obtained by the
proper orthogonal decomposition (POD) which is then combined to a Galerkin projection has thus grown
on in fluid mechanics. However there are three main difficulties to apply this methodology to aeroelastic
systems : first because of the nonlinearities involved in the Navier-Stokes equations, then because of the
domain motion which leads to an incoherent definition of the POD modes and finally since a stabilization
is required.
Firstly the reduced order model based on the use of POD modes is applied to a linear dynamical system
for which different formulations have been developed to take into account specific boundary conditions.
Then the reduced order model is developed for the Navier-Stokes equations of a compressible fluid with a
particular set of variables. This first reduced order model developed for a spatial domain with fixed boun-
daries is corrected and validated in the case of a NACA0012 airfoil with a large angle of attack such that a
vortex street appears. Finally, the reduced order model is extended to the case of a moving domain by as-
suming a rigid body motion. In this way, the problem of definition of the POD modes is avoided. This last
model is applied to the reproduction of the transonic flow around a NACA0064 airfoil oscillating around
an equilibrium position.
Keywords : reduced-order model, proper orthogonal decomposition, Galerkin projection, aeroelasticity,
compressible fluid, non-autonomous system.

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