Provence Musulmane

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Les Sarrasins dans la

mythologie occitane
(Mise à jour du texte écrit pour Pays Cathare
magazine, n° 13, janvier-février 1999, p. 80-
81)
Le samedi 15 novembre 2003.

La domination d’une petite partie du Midi par


les sarrasins au Moyen Âge a été courte et
limitée, mais son souvenir, vivace jusqu’à nos
jours dans la mythologie occitane, est à
l’origine de légendes épiques ou fabuleuses.

En 711 des arabes et des berbères pénètrent en Espagne. Le


royaume wisigoth s’effondre. La Septimanie, partie la plus
septentrionale du royaume et correspondant actuellement aux
départements des Pyrénées-Orientales, de l’Aude, de l’Hérault et
du Gard, est conquise peu après. En 719 Narbonne devient le siège
d’une province de l’Empire Arabe, dirigée par un wali ou
gouverneur. Poursuivant leur conquête en Gaule, les Arabes se
heurtent pour la première fois à une forte résistance. La dynastie
carolingienne qui dirige depuis peu le royaume des Francs réagit.
Charles Martel arrête la progression arabe en 732, son fils Pépin
reprend Narbonne en 759, son petit-fils Charlemagne fait la
conquête de la Catalogne en 801. Cependant, cette reconquête ne
met pas un terme à la menace musulmane. Jusqu’au début du XIe
siècle le Languedoc et la Provence subissent des raids par terre et
par mer. Une tête de pont musulmane se maintient même
pendant un siècle jusqu’en 972 en Provence dans le massif des
Maures[1].

Cette courte occupation n’a laissé que peu de traces


archéologiques. Les rares découvertes, quelques monnaies et
céramiques arabes de la première moitié du VIIIe siècle, se
localisent toutes sur les villes côtières, d’Agde à Château-
Roussillon, et sur l’axe Castelnaudary-Narbonne. Ajoutons à cela
la mise à jour près de la cathédrale de Narbonne de vestiges
pouvant correspondre à une mosquée, et la découverte de
quelques épaves dans le golfe de Saint-Tropez. La toponymie n’a
rien gardé, exception faite du massif des Maures (sous le nom de
maure ou sarrasin ou désignait autrefois les arabes et les
berbères), et de la ville de Ramatuelle (de Rahmatu Allah = le
bienfait de Dieu). Les nombreux toponymes en maure, tel
Castelmaure dans les Corbières, désignent plus certainement un
lieu ou une personne de couleur brune qu’un arabe ou un berbère.
En définitive, la civilisation arabe a laissé en Occitanie des traces
beaucoup plus nombreuses au Bas Moyen Âge par le biais du
commerce et des croisades, qu’au Haut Moyen Âge.

Les traditions se rapportant à la domination arabe sont par


contre très nombreuses. Mais malgré leur ancienneté (beaucoup
sont attestées dès le XIIIe siècle)[2], ces traditions ont déformé la
réalité et appartiennent à la légende. Elles se focalisent sur la
période carolingienne, c’est à dire quand les sarrasins sont
vaincus, et plus particulièrement sur Charlemagne qui n’a
pourtant joué aucun rôle dans la reconquête du Languedoc. Dans
la plupart des récits légendaire tels ceux qui appartiennent au
cycle de Roland et de Charlemagne, le sarrasin est de plus réduit
au rôle de faire valoir des chrétiens. Seule une sarrasine, dame
Carcas, met en échec Charlemagne. Mais par sa bravoure, elle a
mérité d’être chrétienne et se fait baptiser[3]. À part cette
exception, le sarrasin est toujours présenté comme un barbare
comme dans la légende Pech Tartare[4] . Dans la haute vallée de
l’Aude on employait encore au XIXe siècle des expressions comme
brutal comme un sarrasin, sauvage comme un maure[5]. Il est
souvent assimilé à l’homme sauvage ou à l’ours dans un certain
nombre de rites liés au carnaval. À Fenestrelle[6], dans les Alpes
italiennes de langue occitane, le matin du carnaval, les habitants
sont invités à partir à la recherche d’un sarrasin caché dans les
bois. Ce sarrasin est en réalité un jeune qui s’est déguisé et noirci
la figure au charbon. Capturé par les jeunes, il est amené devant
un tribunal qui l’accuse de tous les maux de l’année. Condamné à
être pendu, on lui passe la corde au cou. Mais sa femme, tenant un
enfant dans les bras, se précipite devant les juges pour implorer
leur pardon. Émus, les juges s’en remettent à la décision de la
foule qui fait grâce au sarrasin. On l’admet avec sa famille dans la
communauté et tout se termine par des chants et des danses. Ce
rite témoigne-t-il de l’intégration dans les Alpes de sarrasins
venus du massif des Maures ?

La tradition voit aussi dans de nombreux vestiges l’œuvre des


sarrasins, quand ce n’est pas celle de leurs prédécesseurs romains
ou wisigoths. Ce sont des fortification tels les remparts romains de
Toulouse et de Carcassonne, la Tour Mauresque de Narbonne,
l’oppidum de La Lagaste ou Pech Tartare, le château Saint-Pierre
d’Alaric (Aude), le château Sarrazy de Brassac (Tarn), le château
des Cluses (Pyrénées-Orientales), le château de La Garde-Freinet
(Var). Si la tradition se trompe sur les constructeurs réels, elle
témoigne peut-être parfois des lieux qui ont été occupés par des
garnisons musulmanes. Paradoxalement, certaines tours à
signaux du haut Moyen Âge du Roussillon comme le phare de
Collioure, sont attribuées aux sarrasins alors qu’elles avaient
précisément été construite pour faire face à leur menace.

Les découvertes de champs de sépultures anciennes, ont souvent


été interprétés comme les vestiges de sanglantes batailles entre
chrétiens et musulmans. La plaine de Maraussan, près de
Narbonne garderait jusque dans son nom (jeu de mot sur mare au
sang) le souvenir d’une de ces batailles. Une étymologie fantaisiste
est aussi à l’origine de la légende de Villebersas, près de Lagrasse
(Aude). Après prise de Carcassonne Charlemagne aurait réuni sur
cette colline les prisonniers sarrasins parmi lesquels se trouvaient
des femmes portant plusieurs milliers d’enfants dans leur
berceau. Là l’archevêque Turpin aurait baptisé tout le monde et
fondé un prieuré pour rappeler l’événement. Ne voulant pas être
de reste, Charlemagne rebaptisa le lieu Villebersas (en occitan le
village des berceaux) en l’honneur des enfants nouvellement
chrétiens et offrit un festin à tout le monde[7].

Certains lieux sont aussi associés à des histoires de trésors car on


imagine les sarrasins très riches. Besse raconte qu’au XVIe siècle,
les Morisques, ces musulmans convertis de force à la religion
chrétienne puis expulsés d’Espagne et dont certains avaient
trouvé refuge en Languedoc, s’intéressaient de près à l’oppidum
de La Lagaste où ils espéraient retrouver quelque trésor fabuleux
laissé par leurs ancêtres. Le puits de la cité de Carcassonne
abriterait un autre trésor mis là à l’abri lors du siège de la ville. De
la mine d’or et d’argent de la Canal à Palairac[8] (Aude), ou de
celle de l’Alaric à Moux[9] (Aude), les sarrasins auraient tiré une
fortune dont il resterait quelques traces.

La tradition musulmane a aussi gardé quelques souvenirs de cette


période. Selon le géographe al-Zurhrî, à Narbonne les
conquérants auraient trouvé une statue avec une inscription
prophétique qui disait : « fils d’Ismaël, faîtes demi-tour. Vous ne
pouvez aller plus loin. Je vous en donnerai l’explication si vous me
le demandez, mais si vous ne rebroussez pas chemin, vous vous
entre-tuerez jusqu’à la fin des siècles ».

Pour en savoir plus :


G. Jourdanne, Folklore de l’Aude, réédité à Paris en 1973
Islam et chrétiens du Midi, Cahiers de Fanjeaux n° 18,
Privat 1983.
Gauthier LANGLOIS, 1998

La Légende de Pech Tartare


A mi chemin entre Carcassonne et Limoux s'élevait depuis la
Préhistoire un important oppidum. Occupé plus tard, selon la
tradition, par les Romains, les Wisigoths puis les Arabes, il aurait
été détruit par le duc d'Aquitaine en 719. Cette tradition a inspiré
à Joseph Maffre une curieuse légende, publiée en occitan en 1938
sous le titre Tartari, et que nous résumons ici.

Il y a bien longtemps, dans la citadelle de Pech Tartare, vivait une


belle et souriante jeune fille, nommée Alderica, qui était la fille du
roi des Wisigoths. Alderica et les habitants de cette ville vivaient
heureux, jusqu'au jour où de barbares cavaliers, les Sarrasins,
envahirent le royaume et assiégèrent la cité. Courageusement
défendue par Alderica et les siens, la cité repoussa tous les
assauts. Mais les sarrasins entassèrent du bois devant les portes
de la ville et y mirent le feu. Les portes consumées, ils se ruèrent
dans la ville. Submergés par le nombre, les défenseurs furent vite
massacrés. Alderica profita d'un court répit laissé par les Maures
occupés à piller et incendier : elle se réfugia avec les femmes et les
enfants dans la chapelle située au sommet de la ville. Quand la
porte de la chapelle céda, Alderica se trouva face au chef des
Sarrasins. Celui-ci, fasciné par sa beauté, l'entraîna dehors et
tenta de l'embrasser. Folle de honte, Alderica repoussa
violemment l'émir qui alla s'empaler sur l'épée d'un de ses gardes.
Alors, les Sarrasins, furieux, vengèrent leur chef en perçant la
jeune fille de vingt coups de lances. Le sang versé sur la terre
devait faire un miracle. Là où était tombée la jeune fille, poussa un
genévrier, toujours vivant douze siècles après et toujours vert,
même au cœur de l'été. Cet arbre est comme l'espoir du peuple
occitan, qui malgré le feu et les ruines, relève la tête. Vous qui
passez par là, admirez cet arbre et trempez-y votre âme. En
pensant au passé, construisez l'avenir. Tôt ou tard, le peuple
occitan aura la place qu'on lui a volé.

[1] « Islam et chrétiens du Midi (XIIe-XIVe siècle) », Les Cahiers de


Fanjeaux, n° 18, Toulouse : Privat, 1983, 435 p. Ph. Sénac, « Note sur le
Fraxinet des Maures », Annales du Sud-Est varois, tome XV, 1990, pp. 19-
23.

[2] Par exemple le sénéchal de Carcassonne désigne en 1240 un des murs


de la cité sous le nom de « mur sarrasin ». Archives nationales, Paris, J
1030, n° 73. Traduction dans J.-P. PANOUILLÉ, Carcassonne, le temps des
sièges, Paris : Caisse Nationale des Monuments Historiques/Presses du
C.N.R.S., 1992.

[3] G. Besse, Histoire des antiquités et comtes de Carcassonne, A Béziers,


pour A. Estradier, marchand libraire de Carcassonne, 1645,

[4] J. Maffre , Tartara, Castelnaudary : Imprimerie d’édition occitanes,


1938.

[5] G. Jourdanne (Gaston). - Contribution au folklore de l'Aude, Paris :


Maisonneuve et Larose, Carcassonne : Gabelle, 1899 et 1900.

[6] M. Mourgues, « Le sarrazin de Fenestrelle », Folklore, n° 142, tome


XXIV, 1971, pp. 18-22.

[7] É.-J. Simmonet, Édition critique du roman de Notre Dame de Lagrasse,


thèse de 3e cycle de lettres sous la direction de Madame Thiolier, Université
de Paris IV - Sorbonne, Institut de littérature et de langue d’Oc, 1988, 295
p.

[8] Archives nationales, Paris, F 14 8060, 14. Mémoire du sieur Dubosc sur
la mine de La Canal, vers 1792.

[9] Archives nationales, Paris, F 14 8060, 5. Notice sur la montagne


d'Alaric adressée par le citoyen Croizet. An IV.

Vos réactions

> Les Sarrasins dans la mythologie occitane


21 décembre 2003
En 1543, Toulon abrite une partie de la flotte impériale ottomane en
Méditerranée occidentale.
Vos réactions
> Les Sarrasins dans la mythologie occitane
29 novembre 2003, par bantu
La présence "sarrasine" en France ne se limite pas à quelques légendes
vieillottes, à une pierre et à un nom de plaine. Elle est plus complexe que ça
et beaucoup plus subtile. Il y'a eu une influence arabo-andalouse dans
l'Occitanie médiévale, mais elle a été culturelle. D'un point de vue
architectural, de nombreuses églises d'Auvergne portent des influences
mauresques, mais elles seraient le fait d'artistes mozarabes, c'est à dire de
chrétiens andalous arabisés, qui voyageaient parfois dans le sud de la
France. D'un point de vue musical, il est indéniable que les troubadours
occitans et provençaux ont emprunté à l'Espagne musulmane le mode des
"mouwacchah", elles mêmes venues d'Orient. Et d'un point de vue littéraire,
les troubadours connaissaient bien le romantisme courtois en vigueur à
Cordoue. Quant aux personnes "brunes", des Arabes et des Berbères, soldats
ou fonctionnaires de l'Empire romain, donc bien avant l'islam, se trouvaient
déjà en Gaule. Le Libyen Septime Sévère ne commandait-il pas les légions
de Lyonnaise ?
Vos réactions

voici quelques dates :

717 Al-Hur arrive a Nîmes dans le sud de la france.

719 Narbonne, Alet, Béziers, Agde, Lodève, et Maguelonne

(Montpellier) est sous le contrôle des musulmans

720 Reconstruction des murailles et du pont romain de

Cordoue(Cordoba) ,Yazid II, Califat Omeyyade contrôle Dijon et

Langres [722] en France.

724 Hicham califat Omeyyade.


725 Nîmes, Carcassonne, et Autun [725], Chalones et Beaune

[730], Bordeaux, Lyon, Besançon, et Sens [725], Burgundy [726],

St. Remi [734] sont sous le contrôle des musulmans

732 La Bataille de Poitiers, [732] et à Avignon [737].

759 Perte de Narbonne (France); puis reprise en in 792, 841 et

1019.

793 Victoires à Villedaigne, proche de Carcassonne.

813 Nice, Corse (Corsica), Civita Vecchia (prés de Rome) sont

sous le contrôle des musulmans

839 Le sud de l'Italie est occupé par les Musulmans , Bari

[847-871], Taranto [850-880], Garigliano [ 915]. Sicily :

Palerme [831], Messine [839], Castro Giovanni [853].

900 Les Musulmans contrôlent la région de Provence en France ,

puis Dauphiné, Piedmont, Montferrat, La Maurienne, St. Gall, St.

Bernard, et St. Remy.

920 Marseille sous le contrôle des Musulmans.

936 Les Musulmans gouvernent des territoires en Provence et en


Suisse: Valais, Grison, et Genève [939], Fréjus et Toulon [940],

Nice et Grenoble [942]. An-Nasir califat de Al- Andalus .

948 Hasan b. Ali b. Abul Hussein Al-Kalbi, Gouverneur de

Sicile.

952 Grenoble et Nice sous le contrôle des msulmans

1003 Antibes sous le contrôle des musulmans

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mudéjars
1275

L’effondrement D’AL-ANDALUS au XIIIe siècle


I - L'effondrement de l'Empire almohade

Après arrivée Almoravides et Almohades, beaucoup plus


l'aspect d'une guerre religieuse (au cours du XIIe s quasi
disparition des mozarabes et juifs d'Al Andalus : 90% de
musulmans en 1200 d'après Bulliet). 1148 suppression de
plusieurs évêchés par les Almohades dont Séville.

Espagnols désormais marqués par l'esprit de Croisade,


sans parler des renforts venus d'Outre-Pyrénées.

Situation évolue rapidement à partir de 1209. Rôle nouvel


archevêque de Tolède Rodrigo Jimenez de Rada.

Ferdinand héritier de Castille se croise en 1210; 1211


bulle du pape: privilège de croisade aux

français qui s'engagent en Espagne.

Depuis 1209 des combats frontaliers.

1212 La Navas de Tolosa, résultat véritable croisade.


Rencontre entre deux grandes expéditions préparées à
l'avance (exécution du cadi qui avait rendu Calatrava mal
vécue par les Andalous).

Conséquences immédiates assez faibles car résistance


des gouverneurs locaux, difficultés puis mort d'Alphonse
VIII (octobre 1214), surtout mort de Pierre II et minorité
de Jacques Ier qui n'a que 5 ans. Quand en 1218
commence son règne personnel, agitation aristocratique.
Empire almohade en sort brisé. Car Almohadisme souvent
considéré comme une véritable hérésie (reprise du titre
califal).

Le calife en-Naçir se retire, puis meurt.

Pouvoir faible de Yusuf II (10 à 15 ans) et révolte des


tribus Zénètes. Après sa mort :

Commence alors confus jeu politique avec plusieurs


califes almohades (1224-1269). Rivalités entre les cheiks
qui, au nom de la tradition (proclamation par l'élite),
veulent investir le calife, et les Mouminides. 1224, révolte
du gouverneur de Murcie Al-Adil, s'impose provisoirement
même au Maroc : contribue à déstabiliser l'empire
almohade.

Cette anarchie permet l'intervention des tribus arabes


déportées au Maroc et surtout des chrétiens. Déjà, v1220,
une milice chrétienne à Marrakech commandée par
l’infant Pierre, frère du roi du Portugal.

Baeza livrée au Castillans par un candidat, indignation de


la population de Cordoue qui tue le coupable (1226)

Al-Mamoun achète une trêve à Ferdinand III contre un


énorme tribut; puis recrute un détachement de 500
cavaliers chrétiens pour s'emparer de Marrakech (1228-
29). Revient au sunnisme et maudit la mémoire du Mahdi.
Prétexte pour soulèvement hafside en Tunisie.

Des concessions au roi de Castille qui apparaît comme


son principal appui : fondation de l'église Notre-Dame
(détruite dès 1232), accepte d'empêcher les chrétiens
d'apostasier comme d'accepter les conversions.

Le Magrheb éclate en trois grandes dominations berbères


: Mérinides au Maroc qui triomphent en 1269, Hafçides en
Ifriqiya, le Maghreb central sous les Beni abd el-Wad avec
Yaghmorasan (1235-1283).

II - La conquête chrétienne (1228-1246)

Andalousie n'est plus défendue : devant 2 razzias


chrétiennes, sorties des habitants de Séville (massacre de
Tejada 1225), puis de Murcie se terminent par des
désastres. Hors dans le deuxième combat, les troupes
chrétiennes, simples milices des villes frontières
castillanes.

Devant effondrement almohade qui renonce à la lutte


contre les chrétiens, solutions locales pour assurer la
défense : nouveau morcellement d'Al-Andalus.

Mohammed Ier (1233-1273) fonde l'Etat nasride de


Grenade.

Reconquête chrétienne dans le cadre de projets


dynastiques qui sont aussi des projets nationaux; forces
étrangères désormais plus qu'un appoint.

Malgré assimilation (parfois tardive quand expédition déjà


bien avancée) voulue par l'Eglise cf. Cortes de Barcelone
en décembre 1228 décision d'entreprendre la conquête
de Majorque, réservée aux nationaux de la couronne;
Jacques Ier en avril 1229 transforme cette expédition en
croisade pour surmonter les réticences des Aragonais;
bulle pontificale n'arrive qu'en fin d'année qu'en siège
engagé.

Pour les Chrétiens espagnols leurs luttes peut-être pas la


valeur d'une croisade cf. Jacques Ier tente par 2 fois de
réaliser une véritable Croisade vers la Terre Sainte.

Depuis traité de Tudilen 1151, conquête d'Al Andalus


constamment envisagée cf. donations anticipées de plus
en plus courantes. Traité de Cazola (1179), nouveau
partage où l'Aragon renonce à Murcie, précisé en 1244
par traité d’Almizra.

Nouvelle situation permet de réaliser cet objectif.

Ferdinand III (1217-1252), roi de Léon, en 1230 de


Castille, reprend conquête Nouvelle Castille (1236 prise
Cordoue, 1247 Séville). Prépare même un débarquement
au Maroc en 1252.

1213 Muret : fin du rêve d'un grand Etat méditerranéen.


Après minorité Jacques Ier d'Aragon (1213-1276), puis
difficultés début règne, première expédition en 1225
contre Peniscola.

Occupation Majorque et Ibiza (1228-30) voulue par les


Catalans, élimination presque totale de l'élément
musulman (Minorque vassalisée).

puis régions Valence, à partir 1231 et Murcie.

Pour Jacques Ier contrôler aussi les initiatives des grands


nobles aragonais qui risquaient, devant la désagrégation
du pouvoir musulman, de se charger de la reconquête à
leur profit cf. Blasco de Alagon qui venait d'occuper
Morella, après avoir passé plusieurs années en exil en
pays musulman. D'ailleurs toujours des réticences des
barons aragonais à ce qui paraît un renforcement de
l'autorité de la dynastie de Barcelone.

Après conquête du nord valencien et raids de pillage,


aux Cortès de Monzon en octobre 1236, Jacques Ier prend
la croix en annonçant sa volonté de conquête de tout le
royaume de Valence. Début 1237 pape ordonne
prédication croisade, y compris dans le midi français.
Mais contingents trop faibles; en janvier 1238, le roi doit
faire voeu de ne plus quitter la région jusqu'à la prise de
Valence.

Arrivée renforts dont langudociens sous l'archevêque


Amiel de Narbonne.

Capitulation de sept 1238, grande victoire royale, Jacques


Ier reste maître du repartimiento : les magnats durent
jurer de l'observer

Le sud montagneux contrôlé de 1239 à 1245.

Portugal : Algarve occupée en 1242.

Certes, après 1266, Reconquista terminée, désormais


problème purement castillan. Mais toujours menace
contre-attaque des Mérinides : 1275 reprise Algésiras par
Marocains. Affaire vraiment réglée qu'en 1340 par victoire
chrétienne du Rio Salado.

Mais conquêtes difficiles : population musulmane dense.


Ibn Hud à Murcie (1228-38) fait allégeance au calife
abbasside dont il reçoit des ambassades. Certes, légitime
son usurpation, mais cette restauration sunnite montre la
force de cette aspiration à la réunification de l'Umma
(massacres et expulsions d'Almohades). Autorité sur le
Levant, sauf Valence.

Alors que dans culture politique des Andalous, djihad


d'abord affaire de l'Etat. c'est en cette période
qu'apparaissent dans les sources, des groupes
d'irréguliers combattant aux frontières, peu encadrés
officiellement, les mugawir. Aspect populiste de ce
nouveau pouvoir avec revendication de la guerre sainte,
vite confronté à la poussée chrétienne et à la nécessité
d'acheter la paix, donc lever impôts.

Valence : le sayid almohade Abu Zayd (v1220-28) achète


la paix au roi d'Aragon 1226. Discrédité se réfugie dans
région de Segorbe où il fait alliance avec Jacques Ier. Finit
par se convertir au christianisme (devenant baron
Vincent, bien que descendant du fondateur almohadisme
et vivant toujours à l’orientale), conserve sa seigneurie
qui vers 1264-65 passe à ses descendants chrétiens au
détriment de ses fils restés musulmans.

Zayyan ben Mardanis, nouveau maître de Valence (1229)


: essaye de desserrer offensive aragonaise : razzias en
profondeur.

Reconnaissance par Zayaan ben Mardanis de la


souveraineté hafside, Andalous se tournent vers la
puissance montante de l'Occident musulman. Pour les
Andalous, Tunisie va devenir une base de repli cf. Ibn al-
Abbar, kuttab (secrétaire), historien, après la capitulation
de Valence, chef de la chancellerie hafside. Bien accueilli
par Abu Zahriya, car, outre leurs compétences, permet
d'équilibrer influence de l'aristocratie almohade (et
apport considérable à la calligraphie de l'AFN). Essaye de
rallier tout le Levant aux Hafsides : envoi de quelques
secours maritimes, totalement insuffisants, et attitude
réservée des Nasrides de Grenade.

Défaite d'Anisa (août 1237); capitulation de Valence en


septembre 1238. Cette capitulation laisse à Zayyan :
Cullera et Denia; Cullera occupée dès fin 1238.

Jacques Ier essaye de mener une expansion ordonnée et


contrôlée où les négociations jouent un grand rôle.
Beaucoup de nobles, malgré les donations faites à
Valence, ne pensent que chevauchées et butin.

Des incidents permettent le blocus puis la reddition de


Jativa et Denia (1444-45).

En fait, après 1239-41, tentatives unitaires ne laissent


qu'une juxtaposition de pouvoirs urbains.

Certains font choix du protectorat chrétien.

Le premier à Minorque, après conquête de Majorque par


Catalans en 1228-29, traité de Capdepera juin 1231 :
reconnaissance souveraineté aragonaise, tribut annuel,
relations pacifiques avec les sujets de la couronne
(course et naufrage) etc. jusqu'en 1287, un pouvoir
musulman sous l'autorité d'un fuqaha, Said ben Hakam,
jusqu'à sa mort en 1281, son mécénat fait de ce
minuscule Etat musulman un centre culturel.

1243, Murcie dans la vassalité castillane à la demande du


souverain Hudide : garnisons castillanes, le roi la moitié
des rentes publiques, mais autorités musulmanes restent
sur place (traité d'Alcaraz).

Population n'accepte pas toujours cette situation :


certaines villes prises d'assaut et population expulsée
(Alicante). Par contre à Elche, population musulmane
reste dans l'enceinte.

Conclusion :

incapacité des Andalous à trouver une réponse adéquate


à la menace chrétienne.

- Gihad avant tout affaire des gouvernants.

Pas cette fusion réalisée au Proche-Orient entre


restauration de l'orthodoxie sunnite et guerre sainte. P.
Guichard : fuqaha, la première, Berbères, la seconde.

Or faiblesse des structures étatiques (P. Guichard).


Surtout, soit émiettement en Etats urbains militairement
faibles, soit de vastes Empires aux territoires disparates
et confrontés à des mouvements centrifuges.

- Incapacité intellectuelle à sortir des schémas de la


culture musulmane classique et en particulier de penser
l'identité andaloue, surtout en terme d'Etat. Hostilité
larvée aux Almoravides, toujours considérés comme des
étrangers, réticences devant mahdisme almohade, plus
ou moins considéré comme une hérésie, n'amènent pas
la conception d'un Etat andalou fort capable de s'imposer
à ses voisins musulmans comme de résister aux
Chrétiens.

Idée d'un Etat andalou fort ne peut émerger de la culture


arabo-musulmane où seule compte la notion d'Umma.
Seul le califat omeyade avait pu surmonter cette
contradiction parce que califat, même si dans la pratique
son pouvoir ne s'étendait que sur l'Espagne musulmane.

Aussi, au moment de l'effondrement de l'Espagne


musulmane, seul espoir réintégration dans l'unité
abbasside, en particulier face aux pouvoirs maghrébins :
aucun effet sur le terrain.

- Faiblesse militaire : quand pas de renforts maghrébins,


pas de classe sociale militaire. Malgré menace
chrétienne, encadrement peu militarisé # Proche-Orient
avec Turcs. Malgré courage de certaines défenses, rôle du
soufisme qui entretient cette passivité ?

Quand pas de renforts maghrébins, faiblesse numérique


des professionnels soldés (peu de cavalerie), aussi des
amateurs sous-équipés face à des chevaliers et à leurs
piétons, bien entrainés, animés de plus en plus par
l'esprit de Croisade cf. bataille d'Anisa, dernier gros effort
des musulmans du Levant: face à une garnison
aragonaise, mobilisation générale (d'après chronique de
Jacques Ier) : 1ère ligne les frontaliers redoutés des
chrétiens (lances et arbalètes), 2e ligne les forces
régulières, 3e ligne la masse de volontaires; alors
qu'affaire très disputée panique de cette 3e ligne devant
stratagème du chef chrétien.
Armée de peu de prestige, ne bénéficie que d'une part du
prélèvement fiscal sauf sous les pouvoirs berbères. Dans
textes chrétiens, alcaids éventuellement assimilés à des
chevaliers, une approximation, sauf pour quelques cas
d'adoubement durant la phase de transition qui marque
la victoire des chrétiens (d'ailleurs à Carthagène en 1266,
les 2 négociateurs de la capitulation après la grande
révolte faits chevaliers antérieurement par le roi de
Castille); pas de classe chevaleresque musulmane # P.
Burns qui voit Espagne musulmane dominée par des
grands propriétaires absentéistes avec un style de vie
nobiliaire, mais urbanisés.

Pourtant effectifs chrétiens souvent faibles : Jacques Ier


quelques centaines de chevaliers, voire une centaine.

Musulmans quelques efforts d'imitation fin XIIe s. - début


XIIIe s. dans l'armement et les techniques de combat
avant que les Grenadins ne reviennent aux cavaliers
berbères légèrement armés.

III - Le monde ibérique des Trois religions

A - Le destin des vaincus

Prise Tolède 1085 ouvre nouvelle ère où une importante


population musulmane passe sous le contrôle chrétien
(même si départ rapide de la population musulmane,
bientôt grande mosquée rasée par archevêque Bernard
de Sédirac, un moine aquitain). Avant esclavage ou
massacre (Barbastro). Espagne chrétienne comme
Occident méditerranéen, raréfaction, puis disparition de
l’esclavage de type antique, rural : après 950 quelques
domestiques de très haut personnages en Catalogne. Par
contre, razzias commencent à approvisionner Catalogne :
un objet de luxe de la domesticité aristocratique cf.
évêque d’Urgel en possède 5 en 951.

Disparition population fragilise plutôt les conquêtes,


même si plus tard encore des expulsions (Lisbonne 1147).
Souvent aussi fuite cf. Aragon vers 1086 car peu de
traces de combats sur les sites archéologiques.

En général, volonté pour les souverains d’imposer la


domination politique chrétienne sans chasser ni détruire
les vaincus : des tributaires (idem Sicile, Syrie).

- Régime de la Capitulation (malgré pression vainqueurs


et gens d'Eglise) : liberté culte, libre disposition des biens
et autonomie juridique et administrative contre remise
citadelle, grande mosquée et payement impôt spécial.

Huesca : "de la madina = ville importante à la civitas"


(Sénac) (acte de capitulation probable car pas conservé).
Prise ville novembre 1096. 5 avril 1097, à l’évêque de
Jaca la grande mosquée où les "idoles des infâmes
démons et du détestable Mahomet avaient été adorées",
donation avec un certain nombre de villas et d'églises.

Transformation d'autres mosquées en église;

redistribution de biens (en particulier maisons) :


entourage royal et églises dès 1097 (départs notables
vers le sud).

déplacement des musulmans vers les faubourgs.


Disparition complète des institutions urbaines antérieures
(sauf un chrétien zalmedina = sahib al-madina), mais
utilisation probable de documents fiscaux musulmans
pour répartition des biens ? Un merino pour administrer
domaines royaux : à partir de 1104 des mozarabes.

Souvent négociée par les anciens des communautés


(Peniscola). Peut même exprimer une volonté de rien
changer et même d'assumer le passé islamique
cf.Raymond Berenger IV dans la charte de capitulation de
Tortosa (1148) garantit "les usages du temps des autres
rois".

En fait, toujours importants transferts fonciers (départ


des notables).

Globalement volonté de maintenir sur place population


musulmane (XIIe s., vallée de l’Ebre)

Victoires du XIIIe s. donnent toute son acuité au


problème.

Toujours des situations contrastées : Manche, steppe


vide; des villes abandonnées (Caceres 1228).

Principe exprimé dans chartes de capitulation : maintien


coutumes en vigueur, en particulier sur le plan fiscal
(Musulmans dans un premier temps pas soumis à la dîme
ecclésiastique).

Levant, communautés ont même su mettre à profit


l'effondrement des structures étatiques, en obtenant du
vainqueur le respect de la norme coranique (Eslida en
1238). Pauvreté documentaire des 2 décennies qui
suivent la conquête, mais probablement très vite
gonflement pression fiscale.

cf. charte latine de la capitulation du hisn (bourgade


fortifiée) de Chivert (zone littorale province de Castellon).
2 espaces : le village protégé par une enceinte et un
espace supérieur avec une 2e enceinte de refuge ;
probable occupation par les Templiers d'une partie de
l'espace supérieur où laissent à la disposition des
hommes, la mosquée principale et la citerne; mais
musulmans qui possèdent des maisons dans l'alcaba
doivent les évacuer et en reçoivent dans les faubourgs
(de ceux qui sont partis). Les Templiers, à leurs frais et
sans corvée, un mur entre leur castrum et faubourg
musulman : une structure seigneuriale, dualiste en
rupture avec l'époque précédente.

cf. pacte d'Alcaraz en 1243 où royaume de Murcie passe


tout entier sous protectorat castillan (absence texte du
traité): des garnisons castillanes dans forteresses et
perception d'une partie des impôts (1/2 ?) par roi de
Castille. Donc pas d'installation de colons chrétiens. Mais
résistances de plusieurs villes (dont Carthagène et
Alicante). 2 campagnes en 1244 et 1245 pour s'emparer
de ces positions dans lesquelles des colons ; en 1257, en
violation du pacte, distribution de terres dans la capitale.

S'accentue après 1266 et fin rébellion musulmane.

Maintien (provisoire) d'une aristocratie de raïs, vassale du


roi, qui exerce des droits seigneuriaux sur sa micro-
principauté.
En particulier, Jacques Ier assujettir l’aristocratie (Burns :
« militaire ») aux formes féodales. Or ressemblances :
genre de vie aristocratique cf. Abu Zayd conserve sa
clientèle après sa conversion ; mais superficielles. Jativa,
siège 1239, puis 1240 : compromis avec le roi
musulman : fait hommage avec 100 sheiks principaux de
la ville : garde château jusqu’à rupture avec ses fils en
1246 : Jativa devient aljama Couronne.

Révoltes, montre illusion de cette politique, et permettent


de supprimer ces enclaves vassales.

Maintien communautés musulmanes (aljamas) en


Andalousie et Levant (jusqu'à l'expulsion des Morisques).
Payent au roi de Castille, les impôts qui étaient destinés
au calife almohade. Par contre villes principales et leur
territoire assez vite vidées de leur population musulmane
(dont Cordoue, Séville) cf. Valence, liberté des habitants
de quitter la ville avec leurs biens lors de la capitulation,
d'après Jacques Ier 50 000 musulmans en profitent (ville
15 000 h).

Dans la décennie 1240-50, situation plus ambiguë dans


villes petites et moyennes cf. Murcie, époque musulmane
continue sous protectorat castillan.

Maintien des anciennes structures rurales. Vers 1250


Campagnes font encore partie du monde islamique, non
seulement sur le plan religieux (appel du muezzin du haut
du minaret), mais comme système socio-politique (cadi,
système scolaire). Avec conquête, un retour à la paix.
Même maintien des traditions soutenu par la couronne
car mémoire des vieux musulmans définit la coutume, en
particulier en matière d'irrigation.

Toujours la sharia; cas criminels impliquent autorités


chrétiennes, mais jugés toujours suivant loi islamique;
conquérant respecte structure politique locale : cadi et
conseil, le système de taxes.

Mais une tension, un scandale de voir croyants soumis à


des Infidèles : départ des élites et notables que ne fait
qu'accentuer les troubles anti-mudéjars après 1275. Fin
XIIIe s., les mudéjars, vus avant tout comme des
paysans.

Disparition cependant de l'appareil militaire étatique ce


qui rend vaine toute tentative de revanche sans apports
extérieurs.

Une tension entre une conquête qui promet de conserver


l'ordre ancien et les pratiques, volontaires ou non, des
vainqueurs : mise en place de processus de
dépossessions qui v1250 ne semblent toucher que
régions centrales du Levant valencien où chrétiens déjà
nombreux cf. arbitrage royal région du Jucar, pointe
extrême de la colonisation chrétienne en 1246
concernant les "héritages" donnés aux Chrétiens à Alcira.
Allusions aux empiètements de force de ces derniers,
musulmans qui cultivent doivent leur payer les impôts
qu'ils devaient au roi; une seigneurialisation déguisée,
mais le désir du roi de faire la part du feu; de même en
1241 l'évêque de Valence reproche aux Hospitaliers de
maintenir en place dans leurs seigneuries la population
musulmane; l'Ordre insiste sur son rôle dans la
Chrétienté, le rétablissement du culte chrétien, et
l'asservissement des musulmans qui peuvent être
expulsés à tout moment; et dès 1245 des chartes de
peuplement pour les chrétiens.

Imposition du régime seigneurial : château. Or totalement


inconnu auparavant : dans enceintes rurales
musulmanes, horizontalité des constructions.

L'eau devient propriété du seigneur, alors qu'auparavant


régie par les usages communautaires.

Fin 1247, Première grande révolte : al-Azraq, 3 ans après


le traité qui marque la fin de la reconquête dans le
royaume de Valence. Peut-être pour ne pas rendre les
châteaux qui étaient restés en son pouvoir (à rendre au
bout de 3 ans).

A la tête d’une douzaine de châteaux, entretient une


cavalerie, une musique, un pennon ; dans le territoire de
Pego : 8 vallées principales, 246 km², 80 centre habités ;
indépendant depuis 1223 ; avril 1244 : abandonne
quelques châteaux, subsiste comme seigneurie tributaire,
un fief avec hommage.

Soutien au moins passif de la population musulmane.


Décision d'expulsion des musulmans du royaume, après
des précautions militaires (et malgré réticences des
nobles) : début 1248, un mois pour sortir du royaume
avec biens meubles. Départs vers Castille et Grenade des
non-combattants, et soulèvement général. Résultat :
expulsion ne semble effective que dans villes importantes
et plaines côtières; ailleurs vigueur du soulèvement
oblige à composer (et appui des nobles ?) : chartes qui
reprennent conditions de la conquête.

Résultats : disparition physique des communautés


urbaines dont ne reste que des reliquats (petite moreria
de Valence, Sagonte etc.

Autres villes (Jativa, Denia etc) une ville chrétienne se


superpose à une population musulmane encore
nombreuse mais dont dépendance s'accroît.

Néanmoins, vers 1270, d'après Jacques Ier : 150 000


musulmans pour 30000 chrétiens dans royaume de
Valence.

Des donations pour combler les vides (900 bénéficiaires à


Jativa et alentours dont mosquée principale en église).
dans les sites ruraux : volonté d'établir des groupes de
quelques dizaines de colons pour une prise de possession
effective. Au milieu du siècle un saupoudrage de colons
chrétiens dans un pays musulman.

Révoltés, surtout occupation des fortifications dans


massif d'Alcoy, refus de payer l'impôt et guérilla
montagnarde. Dès milieu 1249, crise jugulée. Mais
rébellion pas réservée malgré un appel à la Croisade
d’Innocent IV. Comme bonnes relations du révolté avec le
roi de Castille (négociations contre tribut), un effort
militaire au printemps 1258, soutenu par trahison d'un
chef musulman, pour régler cette dissidence sporadique
du sud valencien; concession éphémère de quelques
seigneuries à des chefs musulmans pour mettre fin
dissidence v1260.
Nouvelle grave révolte de 1262-64 en Andalousie, puis
Murcie où véritable reconquête de l'indépendance
pendant 18 mois avec l'aide du roi de Grenade. Il faut
l'alliance de la Castille et de l'Aragon pour en venir à
bout. Finalement un choix entre la terre et les hommes :
Musulmans expulsés dans leur grande majorité
d'Andalousie. Murcie, solution plus nuancée car
conservent un quartier dans la capitale. Mais villes sont
chrétiennes (Carthagène) ou le deviennent puisque le
quartier maure de Murcie se rétrécit alors que les
campagnes restent musulmanes où seigneurs protègent
leurs vassaux. Murcie en 1300, une exception en Castille
et d'ailleurs toujours des départs pour le royaume de
Grenade.), Communautés continuent de décliner
(résiduelles au XVe s.), cependant disséminées dans
nombreuses localités; presque toujours des gens
modestes qui ne suscitent peu d’hostilité #juifs.

Royaume de Valence : Nouvelle crise 1275-79 où troupes


émir de Grenade et sultan mérinide obtiennent des
succès marqués et soutiennent révoltés. Velléités
d'expulsion, surtout, réductions en esclavage, parfois de
communautés entières, et siège Montesa en 1277
élimination du dernier pouvoir musulman avec une
certaine autonomie dans royaume de Valence (famille de
l’ancien raïs de Jativa). Seigneurie musulmane autonome
de Crevillente en Murcie aragonaise, un phénomène
résiduel jusqu’en 1318.

Au sud de Valence, le roi Jacques Ier fort de sa victoire :


contrôle direct de la plupart des châteaux où un alcaid
royal, salarié, contrôlé pour les revenus qu'il perçoit et
aucun pouvoir judiciaire; ces "châtelains" tirés de la
petite noblesse aragonaise. Après 1278, processus rapide
de seigneurialisation : disparition vestiges du cadre fiscal
étatique de tradition musulmane, conservés par traités
de capitulation; augmentation prestations de travail. XIVe
s., la dîme ecclésiastique auparavant payée que par le
seigneur chrétien.

Musulmans : une situation précaire qui n'a plus rien à


voir avec les pactes de capitulation : tournant dès 1248,
surtout 1276. système ruiné par les révoltes, leur
répression et la pression des chrétiens: colonisation et
seigneurialisation.

Musulmans : une masse de ruraux sans terre ou avec


des parcelles trop exigües : travaillent sur terres des
chrétiens (exarici, terme venu de la vallée de l’Ebre,
métayer à statut précaire) : endettés, en fuite ; aussi
aljamas survivantes dans zones montagneuses des
réserves d’hommes .

P. Guichard : une rupture. J. Torro : un système colonial.

Idem Minorque où à la fin du régime du protectorat


(1287) tous les musulmans réduits en esclavage.

Aragon : encore des musulmans dans vallée de l'Ebre, si


vite départ des villes reconquises au XIIe siècle
(Saragosse).

Reste gens modestes dans les faubourgs des villes.

Situation des paysans ? Certains exarici = métayers,


mais termes du contrat ? Donations de propriétés avec
les musulmans, mais absence des mots servi, villani.

Mise en place d'un régime seigneurial, libéral pour attirer


les colons, mais inconnu des musulmans cf. à Sesa, les
redevances à l’évêque de Huesca : prémices et 1/10 des
récoltes pour chrétiens, 1/9 pour musulmans.

Mais, vallée de l’Ebre fait figure d’exception car arrivée


de colons pas incompatible avec maintien des
autochtones (# Sicile)

Phénomènes d'acculturation ?

Conversions ?

Espérance déjà ancienne des pontifes cf. Urbain II


restaurant primauté de Tolède en 1088 : archevêque
Bernard aussi convertir les infidèles; Lucius III (1184)
approuvant règles de l'Ordre de Santiago, aussi amener à
la foi chrétienne.

Au moment de la conquête des conversions : pour


échapper à l'esclavage, éviter confiscation propriété.
Quelques convertis venant de l'aristocratie musulmane cf.
fils du dernier roi de Majorque qui épouse la fille d'un
chevalier chrétien (Miguel de Benazar), mais pas
uniquement : 1240 amende région Valence à un converti
de couleur. Mais au sein des "vieux chrétiens" méfiance :
1246, concile métropolitain de Tarragone demande qu'on
examine sincérité des Maures avant de recevoir le
baptême, en particulier les esclaves.

Le renouveau de l'esprit missionnaire depuis les années


1230 pose en effet le problème de l'esclave chrétien ou
de l'esclave qui se convertit; auparavant,
affranchissement apparemment fréquent (idem Syrie).
Retour à stricte tradition paulienne (Première aux
Corinthiens) : 1240 à Majorque, coutume d'affranchir les
esclaves convertis abolie; pape finit par accepter vente
d'esclaves chrétiens. Royaume de Valence : esprit
missionnaire incarné par Dominicains, une trentaine, dès
1250 frère Michel envoyé de Lerida enseigner à Valence.
Une foi naïve dans leur argumentation rationaliste
soutenue par leurs efforts d'apprentissage linguistique :
1254, Alphonse X : école d'arabe à Séville. Mais beaucoup
de projets, sans lendemain.

Par contre premiers évêques de Valence, tout en


encourageant les frères, surtout restaurer temporel et
organisation, pas d'effort missionnaire.

Mais toujours suspects, beaucoup de convertis sont


connus comme victimes troubles 1275-76 car vivent
dans quartier maure de Valence. Et mesures de
protection royale dont la répétition souligne leur précarité
face aux conquérants.

Des emprunts linguistiques cf. Castillan : 14 % des


arabismes avant 1050 + 15 % avant 1200. Grande
majorité durant le XIIIe s.

Valence : bilinguisme rare des 2 côtés (connaissance


roman progresse un peu par la suite).

Maladresse des traductions chez les Catalans : Ramadan


= Carême. Tendance qui deviendra forte par la suite à
plaquer des concepts occidentaux sur des réalités
musulmanes cf. aljama : un corps municipal avec un
système électoral, des conseillers et un corps de
privilèges.

III - Formation des peuples ibériques

A - L'assimilation des mozarabes

Un particularisme vivace.

Après 1085 Mozarabes majoritaires à Tolède; jusqu'au


XIIIe s., dominent la haute société urbaine. Puis perte
progressive particularité linguistique devant l'afflux des
colons venus du nord.

Fonctions qui exigent quelque familiarité avec le passé


musulman leurs sont souvent confiées cf. merinos
(Huesca).

Communauté mozarabe renforcée par départs d'Al-


Andalus cf Pedro de Almeria en Aragon pour servir le roi
Sancho Ramirez; donations de terres par Pierre I; ensuite
chanoine de la cathédrale Huesca, termine sa vie dans un
monastère (marque aussi les limites culturelles de l'élite
mozarabe : signatures et petits textes en arabe, illisibles).

Huesca : permanence d'un quartier mozarabe encore


attesté en 1178.

Certains grands d'Espagne (Guzman) issus de ce milieu


mozarabe.

Sur le plan religieux:

Nombreux particularismes de la péninsule ibérique

Aragon : longtemps fort particularisme des structures


ecclésiales locales. Faible rôle tenu par les évêques au
détriment des monastères, mieux adaptés à la dispersion
du peuplement (1er Ex paiement de la dîme en 1069).

Au XIe s., autorité épiscopale plus nette à mesure que se


renforce le royaume, le roi désignant en général les
évêques.

Peu après 1025, adoption de la règle bénédictine quasi


générale.

Participation à la réforme pontificale se marque par une


rapide occidentalisation des structures ecclésiales :

vers 1065-67, légation du cardinal Candide chargé


d'éliminer la vieille liturgie hispanique au profit de la
liturgie romaine (rite aboli en 1071).Puis légation de
Frotard, abbé de Saint-Pons de Thomières. Grand prestige
du personnage : le roi envoie comme oblat au monastère
le plus jeune de ses fils. Frotard reçoit de nombreux
biens dans région Huesca et Tudèle. 1076 réforme du
chapitre de Jaca suivant la règle augustinienne avec 2
menses séparées, ce qui est une nouveau. A la fin du XIe
s., arrivée d'évêques français avec le consentement
royal.

Action de Cluny introduit par Sanche le Grand.


Réformation des monastères et bientôt recrutement de
l'épiscopat chez les clunisiens jusqu’au XIIe s.

Dans zone de reconquête la liturgie romaine supplante la


liturgie mozarabe (théoriquement après 1080 en Castille).

Cela ne va pas sans résistances, mais dès 1100, la


Chrétienté espagnole longtemps isolée dans ses vallées
pyrénéennes (sauf le comté de Barcelone) est
réintroduite culturellement et religieusement dans le
monde occidental.

XIIe s., dans la transmission de la culture musulmane au


monde latin aucun rôle des Mozarabes : juifs ou
musulmans convertis.

B – La colonisation

1 - Le repeuplement (repoblacion)

Oeuvre de longue haleine devant l'ampleur des zones à


repeupler.

Au départ souvent spontanée, puis politique volontariste


des monarchies à partir des centres urbains.

Le mouvement s'appuie d'abord sur le dynamisme


démographique des populations du nord de la péninsule.
Des terres, mais aussi la jouissance de fueros, outre des
avantages économiques cf. 1100 Pierre Ier abolition lezda
et cens à Huesca, fin des liens de servitude.

Français :

Aide des expéditions contre les musulmans : Français une


mentalité de croisés, souvent en décalage psychologique
avec les Ibériques : ignorance du monde musulman d'al
Andalous cf. troubadour Girau de Luc reprochant à
Alphonse II d'Aragon d'avoir rendu un château aux
musulmans.

Francos : Colons venus d'Outre Pyrénées dans zones de


colonisation, mais aussi le long du chemin de Saint-
Jacques. Jusqu'au XIIIe s., quartiers, magistrats et fueros
particuliers. Puis rapide intégration, sauf Navarre où le
rattachement au royaume de France par le mariage de la
comtesse Jeanne provoque en 1276 une violente guerre
civile entre les indigènes et les Francos, en particulier à
Pampelune entre les différentes paroisses.

Mais au XIIIe s., part des Ibériques dans repeuplement de


plus en plus forte cf. repartiment de Valence : Français du
Midi (qui autour de l'archevêque de Narbonne ont aidé à
la prise ville) une minorité face à la masse des catalans et
Aragonais; seul groupe : Montpellier : 150 maisons, un
quartier, soir 4,72 % de la distribution, aussi quelques
villages (alquerias) au sud de la Huerta.

Trois grandes étapes :

- Du Douro au Tage : terres vides. Concentration des


immigrants dans des villes fortifiées pourvues de fueros :
Avila (1087), Ségovie, Salamanque (v1100) dotées d'un
évêché. La ville se charge de créer des villages.

Zone de grande liberté où colons éventuellement des


allures d’aventuriers cf. 1076 fuero de Sepulveda : serfs
en fuite, délinquants, mozarabes, juifs; puis au XIIe s., les
Francos.

Quelques grands domaines (archevêque de Tolède), mais


surtout moyens et petits propriétaires.

Aragon : au nord de l'Ebre, modification du paysage avec


développement céréaliculture et viticulture. Inutiles par
rapport à la nouvelle frontière du sud plusieurs husun
délaissés.

A la place d'un réseau de forteresses autour desquelles


gravitaient des établissements ruraux, une association
château, église, habitat.

- Au sud du Tage : souvent steppe. Rôle des ordres


militaires : peuplement autour de leurs châteaux; idem
Portugal avec renfort des cisterciens. Donc zone de
grands domaines avec peuplement qui reste clairsemé.

- XIIIe s., conquête rapide de vastes zones déjà


développées.

Système du repartimientos : répartition programmée des


terres et maisons entre conquérants suivant les règles du
partage du butin (sauf au Portugal). L'aristocratie souvent
très bien pourvue; mais création également petite
propriété.
Rôle majeur des Ibériques : Catalans dans le Levant,
Castillans.

Cette colonisation ne compense pas toujours le départ


des musulmans cf. Baléares, voire Murcie. Faible
enracinement des colons permet véritable départ des
latifundia en Murcie.

Aussi Manche et en Andalousie : orientation vers


l'élevage extensif cf. 1273 privilège de la Mesta.

Région de Valence : 1250 encore une terre musulmane,


quelques îlots de colons (d'après une évaluation de
Jacques Ier : 150 000 musulmans pour 30 000 chrétiens
vers 1270. P. Guichard moins affirmatif, mais reconnaît
retour population musulmane pour exploiter terres de
propriétaires absentéistes (plaine de Denia). Ex. Dans
massif Alcoy, échec colonisation tentée dès 1248-49,
terres rachetées par le seigneur qui rétrocède à
exploitants musulmans.

Documents XIVe s., peu probants pour saisir période


précédente car possible retour de musulmans, abandon
par des chrétiens

V.1250, impossible de saisir rapports entre 2


communautés quand vivent côte à côte.

2 - La diversité sociale
Contraste énorme entre vieilles terres chrétiennes cf.
Vieille Catalogne où asservissement de la paysannerie et
zones reconquises où creuset du peuple espagnol.

Paradoxalement victoire du féodalisme engendre souvent


une société qui ignore les types d'exploitation du monde
féodal. Reconquête moyen de résoudre certaines tensions
? (P. Bonassie).Forte tonalité militaire de la société.

Aristocratie militaire (# Pecheros) originale par rapport


aux standards européens.

- Ricos hombres : noblesse de type traditionnel, liée à la


monarchie, détentrice de droits sur d'immenses
territoires;

- Fijoralgos : catégorie très fluide, nombreuse, difficile


d'assimiler simplement à la chevalerie cf. caballeros
villanos, chevaliers ou cavaliers de village, souvent issus
de la paysannerie aisée ou caballeros des milices
urbaines réunis en fraternités.

Au XIIIe s., cette catégorie très ouverte (sauf Catalogne)


reçoit des privilèges de type nobiliaire : exemption
d'impôts, Cour de justice spéciale, transmis par hérédité.
Mais très nombreuse et fermeture jamais complète.

Par contre institutions féodales n'ont jamais la rigueur et


la force qu'elles ont dans les autres zones d'expansion
occidentale (Catalogne pays des Conventions).

Une société tournée vers la guerre qui a du mal à se


reconvertir. Car la guerre fait beaucoup pour la cohésion
de cette société cf. antagonisme, entre la nouvelle
bourgeoise de Valence, culturellement dominée par les
Catalans (langue), soutenant la création d'un royaume de
Valence, et la noblesse militaire aragonaise, éclate après
les révoltes musulmanes de 1276-78.

Avec la fin de la Reconquista, fin des conquêtes et du


butin, commencent une série de grandes révoltes
nobiliaires à partir de 1270.

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