Savants
Savants
Savants
et Jean Jacques
Savants
et Ignorants
Une histoire .
de la vulgarisation des sciences
Seuil
SAVANTSET IGNORANTS
Ouvrage de Daniel Raichvarg
Histoire de la biologie
ouvrage collectif sous la direction
d'André Giordan
Lavoisier, 1987
L'imprévu
ou la Science des objets trouvés
Odile Jacob, 1990
DANIEL RAICHVARG ET JEAN JACQUES
SAVANTS
ET IGNORANTS
UNE HISTOIRE DE LA VULGARISATION
DES SCIENCES
ÉDITIONS DU SEUIL
27, rue Jacob, Paris vr
ISBN 2-02-013409-8
La loi du li man 1957 interdit les copies ou reproductions destinks à une utilisation
collective. Toute repr6sentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque
procédé que cc soit, sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants cause, est illicite et
constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal.
Introduction
Un genre contradictoire
De même que, pendant longtemps, la science a hésité entre la
communication et le secret, la vulgarisation des sciences n'a cessé
de voir s'opposer ces attitudes extrêmes. A Ernest Renan pour qui
« la science populaire est profondément antipathique », car, « pour
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Savants et ignorants
rendre intelligibles au vulgaire les hautes théories, on est obligé de
les dépouiller de leur forme véritable », Camille Flammarion, l'un
des plus célèbres vulgarisateurs du x1xesiècle, répond que « la réno-
vation de l'astronomie servirait peu au progrès général de l'huma-
nité si ces connaissances restaient enfermées dans le cercle restreint
des astronomes de profession » et continue par un véritable mot
d'ordre de militant de la vulgarisation : « Il faut prendre le flam-
beau à la main, accroître son éclat, le porter sur les places
publiques, dans les rues populeuses, jusque dans les carrefours. »
Ce fossé entre « la science qu'élaborent certains» et « la science
que d'autres ne peuvent que recevoir» traverse toute l'histoire de la
vulgarisation des sciences. Une telle histoire est pourtant un indis-
pensable complément de l'histoire et de la philosophie des sciences,
en ce sens qu'elle prend en compte de nouvelles questions: pour-
quoi, par qui et comment une science, à un moment donné, a-t-elle
été - ou mal ou pas du tout - diffusée dans le tissu social d'une
époque ? quels citoyens se sont approprié, à un moment donné,
cette science et par quels moyens ?
Le fait que l'échange d'information entre« savants» corresponde
à une nécessité ne s'est imposé que progressivement et tardivement.
Paradoxalement; une découverte comme celle de l'anneau de
Saturne, en 1656, est encore annoncée par Huygens sous la forme
d'une anagramme indéchiffrable, alors que le premier journal scien-
tifique européen - mais qui contient aussi des rubriques littéraires
- paraît le 5 janvier 1665 sous la forme d'un mince feuillet. Le Jour-
nal des savantsdoit même interrompre un moment sa parution, car
il est, en particulier, l'objet de l'hostilité des jésuites, qui le voient
importer en France des idées hérétiques.
En mars 1665 paraissent à Londres les Phi/osophicalTransac-
tions, revue mensuelle d'un caractère plus spécifiquement scienti-
fique que son confrère parisien. Dans les années qui suivent, des
concurrents et imitateurs naissent, plus ou moins durables. Leur
contenu est souvent hétéroclite : astronomie, optique, mesure du
temps et des températures. L'amateur de physique et de philo-
sophie naturelle, les« gens d'esprit» y trouvent matière à satisfaire
leur curiosité: ils sont rédigés dans une langue qui est encore la
leur. En 1687, Nicolas Venette décide d'écrire son ouvrage sur la
génération de l'homme en français, et non en latin, afin que cet
ouvrage « ne reste pas seulement entre les mains des savants» : il
estime donc que, pour le public plus large qu'il vise, la seule diffi-
culté réside dans l'usage du latin et non dans la science qu'il veut
communiquer.
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Introduction
Vers la fin du XVIIe siècle, cependant, le nombre des publications
scientifiques croit de plus en plus rapidement. La science s'élève à
un niveau où ce nouveau public respire moins à l'aise. Les Traités
de Newton, par exemple, ne se lisent plus comme un roman. Dans
la préface des Entretienssur la pluralitédes mondes, Fontenelle fait
référence explicitement à cette recherche d'un double langage qui
satisfasse à la fois les gens du monde et les savants.
C'est donc véritablement au cours de cette période qu'on voit
apparaitre les premiers livres de vulgarisation dont l'ambition est
de traduire, pour ceux qui ne le comprennent pas immédiatement,
ce qui a été dit dans le langage de la science. Ce projet soulève une
question importante : « Qui, dans le corps social, sera à même de
tenir ce langage différent ? » ; cette question ne cessera plus de
préoccuper le vulgarisateur, et elle jouera, comme nous le verrons,
un grand rôle dans notre histoire de la vulgarisation.
La définition et l'invention du mot lui-même rappellent d'ailleurs
l'origine sociale de la vulgarisation.
D'après Littré, c'est Mme de Staël qui, au début du XIXe siècle, a
risqué le mot « vulgarité », voulant par là décrire un caractère de ce
qui est sans distinction. En fait, rapidement, on admet que, si un
vulgarisateur rend un savoir-faire ou une connaissance« vulgaire»,
c'est simplement qu'il en répand la possession et l'usage. Dans tous
les programmes annonçant les projets des revues de vulgarisation,
les rédacteurs ne cherchent que les couches de la société qu'ils vou-
draient englober dans leur « vulgaire » : aux « gens du monde »
viendront s'ajouter la classe moyenne, les ouvriers, les enfants, les
femmes ...
Toutefois, l'ambiguïté du mot subsistera : dès 1864, Camille
Flammarion désigne déjà les difficultés du métier où il allait s'illus-
trer, et qui se cachent derrière ces habitudes de vocabulaire : « Le
grand écueil du vulgarisateur est de devenir " vulgaire " sous l'in-
tention d'être " populaire ", et cet écueil, où plus d'un a perdu son
autorité, a tenu bon nombre de lecteurs en garde contre ceux qui
acceptent ce rôle. »
Quoi qu'il en soit, le mot «vulgarisation» s'est imposé et son
synonyme concurrent, « popularisation », est resté moins... popu-
laire. Plus tard, Jean Rostand mettra un point final à cette querelle
de nomenclature : « Pour ma part, je doute fort qu'on le trouve
jamais, ce synonyme plus relevé qui nous contenterait tous. Accep-
tons donc résolument, courageusement ce vieux mot, consacré par
l'usage, de vulgarisation, en nous souvenant que vu/gus veut dire
peuple et non point le vulgaire, que les langues " vulgaires " sont les
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Savants et ignorants
langues vivantes et que la Bible elle-même n'a pu se répandre dans
le monde que grâce à la traduction qu'on nomme la Vulgate.»
Quand s'arrêter?
Pourquoi vulgarise-t-on ?
1. La connaissancede la Création:
les preuvesde la bonté et du pouvoirdivin
C'est dans cette même tradition que se place, aux belles heures
du Front populaire, la fondation du palais de la Découverte, qui
donne à Jean Perrin l'occasion d'exprimer, une fois de plus, l'idéal
de ces vulgarisateurs progressistes: « Le palais de la Découverte
doit faire comprendre au public que, dans le passé, mais aussi dans
l'avenir, nous ne pouvons espérer rien de vraiment nouveau, rien
qui change la destinée qui semblait imposée aux hommes que par la
recherche scientifique et par la découverte. Ainsi, dans cette exposi-
tion [...], le grand public pourra comprendre la part déterminante
que la découverte de l'inconnu a prise dans la création. Et il
comprendra que cette découverte doit être poursuivie, sans préoc-
cupation pratique, précisément si l'on veut en tirer de grands résul-
tats.»
Cette ferveur envers la science et son catéchisme va tout naturel-
lement opposer à l'admiration soumise devant les productions du
Créateur, l'admiration orgueilleuse devant les productions de la
science et de l'esprit humain. Certains auteurs, comme Hetzel, vont
jusqu'à considérer que les contes de fées classiques, « vulgaire
tisane à destination des enfants», peuvent être aisément remplacés
par un autre type de conte, le conte scientifique. Cette référence à
un nouveau merveilleux rationnel et laïque est reprise dans le titre
d'une importante collection de livres, la Bibliothèque des mer-
veilles, ainsi que dans celui de nombreux livres de Louis Figuier,
notamment.
Mais cette mise en culture du progrès scientifique est aussi propa-
gande pour la diffusion de l'esprit scientifique. Ainsi, les éditeurs
de La Scienceillustrée(1887), s'ils se disent« toujours au premier
rang dans les luttes pour la cause du progrès et dominés par l'actua-
lité scientifique », ajoutent : « Plus encore que le détail des tech-
niques ou les ressorts complexes des découvertes, ce qu'il importe
de faire connaître en priorité, c'est la curiosité, l'effort et la rigueur
qu'exige l'acquisition de nouvelles connaissances. Il faut augmenter
autant que possible le nombre de ceux qui cultivent la science, mais
il faut viser à ce but sans la déguiser ou la frelater ... Il faut la popu-
lariser en faisant un peuple scientifique. Pour atteindre ce but, il ne
suffit pas de divulguer les connaissances scientifiques qui se
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Pourquoivu/garise-t-on?
faussent bien souvent dans des intelligences mal préparées et mal
dirigées, il faut avant tout répandre l'esprit scientifique.»
2. Les femmes,symbolesd'ignorance,
de bonnevolontéet de curiosité
4. Ce qu'onappellele « grandpublic»
Qui vulgarise?
Les auteurs et leur histoire
Quels que soient les buts et les ambitions qu'elle se fixe, quels
que soient les publics auxquels elle s'adresse, la vulgarisation a ses
exigences, ses règles, son style: qui peut alors prétendre s'en char-
ger? Qui exerce cette activité particulière, multiforme? Corres-
pond-elle nécessairement à la pratique d'un métier ? En fait, la
réponse à ces questions a beaucoup varié selon les époques et elle
n'a jamais été, loin s'en faut, univoque. L'extrême variété des
auteurs, de leurs origines, de la qualité et de l'importance de leur
contribution explique sans doute les difficultés de l'historien et
l'inévitable désordre du chapitre qui va suivre.
4. Mathématiciens,physiciens,chimistes
Les mathématiques, présentées sous forme de jeux ou d'énigmes,
ont, depuis la plus haute antiquité, donné lieu à un genre particulier
de vulgarisation qui continue d'ailleurs à prospérer de nos jours.
On a dit que c'est l'italien Nicolo Tartaglia (1505-1557), l'un des
plus célèbres mathématiciens de son siècle, qui a inauguré cette
longue série de Problèmes amusants et autres Récréations.
En France, le précurseur dans ce domaine est certainement
Claude Gaspar Bachet de Mériziac (1581-1638). Ce savant est
connu pour avoir traduit et publié !'Arithmétique de Diophante
(1621), mais, dans notre étude, il l'est également et surtout pour ses
Problèmes plaisants et délectables qui se font par les nombres ( 1612),
dont le succès justifia plusieurs éditions.
Le géomètre Claude Mydorge (1585-1647), conseiller au Châtelet
(siège du prévôt de Paris, avant 1789), puis trésorier de la généralité
d'Amiens, se ruina, paraît-il, à faire fabriquer des verres de lunettes
et des miroirs ardents. Cet ami de Descartes, passionné de mathé-
matiques et de physique, inventeur du mot « paramètre », publia,
en 1630, un Examen du livre des récréations mathématiques et de
ses problèmes en géométrie, mécanique, optique et catoptrique. Il
s'agissait de la critique d'un livre paru en 1624 sous le pseudonyme
d'un mythique Van Effen, écrit en réalité par le père jésuite Jean
Leucheron (1591-1670). Cet ecclésiastique indélicat, professeur au
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Savants et ignorants
collège de Bar-le-Duc, s'était contenté de piller les Problèmesplai-
sants de Bachet et certains brouillons inédits de Mydorge lui-même.
Le livre de Mydorge ne se limite d'ailleurs pas aux seules mathéma-
tiques ; il propose aussi quantité de problèmes de physique présen-
tés de façon à intriguer et à donner l'envie d'en savoir plus. Et il ne
cache en rien ses intentions et son procédé : « Pour donner plus de
grâce à la pratique de ces jeux, il faut couvrir et cacher le plus qu'on
peut la subtilité de l'artifice. Car ce qui ravit l'esprit des hommes,
c'est un effet admirable dont la cause est inconnue. Autrement si on
découvre la finesse, la moitié du plaisir se perd, et on l'appelle
méritoirement cousue de fil blanc. »
)I
programme, Lalande mangeant une araignée pour démontrer que
ce pauvre animal n'a rien de repoussant : ce qu'il fit réellement !
Ils ont pour nom Louis Figuier, l'abbé François Moigno, l'astro-
nome Camille Flammarion, l'entomologiste Jean-Henry Fabre et le
chimiste aéronaute Gaston Tissandier.
Louis Figuier (1819-1894) est né à Montpellier dans une famille
curieuse de sciences - son père était pharmacien, et son oncle,
Pierre Figuier, professeur à l'école de pharmacie de cette même
ville de Montpellier, avait découvert les propriétés décolorantes du
noir animal-, et c'est quasi naturellement qu'il obtient sa thèse de
pharmacie (La Chimie appliquéeà la pharmacie), qu'il est nommé,
comme son oncle, professeur agrégé de chimie à l'école de pharma-
cie de Montpellier. A partir de 1856, il s'engage dans une polé-
mique avec Claude Bernard sur la fonction glycogénique du foie.
La polémique fait grand bruit : tous les journaux de ... vulgarisation
en parlent. Le triomphe des idées de Bernard conduit un Figuier,
pour ainsi dire brûlé, à abandonner définitivement toute prétention
universitaire. C'est Arago lui-même qui lui aurait même conseillé
de s'orienter vers un métier qui devait faire sa gloire. Figuier tient,
à partir de 1855 (et jusqu'en 1878), un feuilleton scientifique dans
le journal d'Émile de Girardin, La Presse- et rédige son Exposition
et Histoire des principales découvertesscientifiques modernes (1851-
1853, 4 volumes, 6e édition en 1862). C'est le début d'une carrière
éblouissante.
Outre ses feuilletons dans différents journaux, il publie plus de
quatre-vingts volumes aux éditions toujours nombreuses et portant
sur tous les sujets (La Photographieau Salon de 1859, Les Eaux de
Paris, Le Savant du foyer, Le Tableau de la nature, en 10 volumes,
Les Merveilles de la science...); il rédige, à partir de 1856, une
Année scientifique et industrie/le,qui fait le bilan des découvertes et
des nouveautés qu'il juge importantes dans les domaines les plus
variés. Ce travail encyclopédique, le premier du genre à ainsi assu-
rer une description irremplaçable de l'état des sciences et des tech-
niques d'une époque, sera repris, à la mort de son fondateur, par un
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Savants et ignorants
ancien anarchiste de retour du bagne, Émile Gautier. Après 1870, il
se lance dans une tentative originale, dont nous reparlerons: le
théâtre scientifique. Ses pièces ont un titre très évocateur (Guten-
berg, Denis Papin, Miss Telegraph, Le Sang du Turco, sur la trans-
fusion sanguine, ou Cherchez lafraise, sur les taches de naissance)-
il faut dire, à ce propos, qu'il a épousé une actrice et auteur de
pièces de théâtre, Juliette Bouscaren. A la mort de leur fils, en 1870,
le chagrin l'oriente vers la théosophie et le conduit à écrire Le Len-
demain de la mort ou la Vie future selon la science (1872), où le
Jugement dernier est nié et qui se retrouve à l'index. Infatigable,
Louis Figuier poursuit son travail jusqu'à sa mort, en 1894.
La carrière de l'abbé François Moigno (1804-1884), autre figure
de proue de la vulgarisation du x1xesiècle, s'apparente par bien des
égards à celle de Figuier : une vie professionnelle tôt tracée, une
rupture et un nouveau métier, celui de vulgarisateur. Moigno est né
à Guéménée, dans le Morbihan. Fils d'un gentilhomme breton
devenu, après la Révolution, simple receveur de l'enregistrement, le
jeune Moigno fait des études chez les jésuites de Sainte-Anne-
d' Auray avant d'entrer au séminaire de Montrouge, d'où il sort
prêtre en 1822. Sur l'ordre de ses supérieurs qui le destinaient, vu
ses dons, à une carrière scientifique, il entre à l'École normale de la
rue de Sèvres. A la révolution de 1830, il se réfugie en Suisse avec
tout son ordre. De retour en France et après une brève expérience
d'enseignant en Auvergne, il est nommé, en 1836, professeur de
mathématiques à l'École normale ecclésiastique de la rue des
Postes. Entre-temps, il a déjà acquis une excellente réputation de
mathématicien, de prédicateur et de polémiste dans la presse catho-
lique comme L'Univers ou L'Union catholique. Pendant son exil à
Brigue, il se lie d'amitié avec le célèbre mathématicien Augustin
Cauchy (1789-1857), dont il se considérera toujours comme le dis-
ciple. Cependant, le jeune abbé déborde d'une activité mondaine
qui commence à inquiéter ses supérieurs. Il s'engage alors, avec une
certaine légèreté, dans des spéculations industrielles hasardeuses. Il
s'endette en particulier pour financer les affaires très fumeuses d'un
marquis qui avait inventé des « moteurs palmipèdes ». Pour éviter
le scandale imminent, les jésuites paient ses dettes les plus urgentes,
mais ils invitent l'imprudent professeur à aller enseigner l'histoire
et l'hébreu (qu'il avait appris en Suisse) au Collège de Laval. Cet
éloignement de ses bases parisiennes et scientifiques ne pouvait lui
faire plaisir, lui qui venait de publier ses Leçons de calcul différen-
tiel et intégral (Paris, 1840). Il refuse ce nouvel exil et se cache à
Paris. Après quatre ans de résistance à sa hiérarchie, Moigno doit
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Qui vulgarise?
quitter l'ordre des jésuites, sans pour autant abandonner une car-
rière ecclésiastique qui promettait d'être mouvementée. Son passé
journalistique lui ouvre les portes du journal L 'Époque,pour le
compte duquel il réalise un long reportage à travers l'Europe. On le
retrouve alors rédacteur scientifique à La Presse(1850; il y précède
Figuier), puis au Pays (1851). En 1852, enfin, il fonde Cosmos,
revueencyclopédiquehebdomadairedesprogrèsdes sciences,dont le
titre appartenait, au départ, à un certain M. de Montfort. Il anime
« sa» revue pendant plus de dix ans. Mais, à la suite d'un nouveau
désaccord - financier, celui-là - avec le nouveau propriétaire de
Cosmos,l'ingénieur Marc Seguin, dit « Seguin aîné » et inventeur
des ponts suspendus et de la chaudière tubulaire, il en abandonne la
_direction et fonde, en 1863, son propre périodique, Les Mondes.
Les Mondes parurent sous sa direction jusqu'en 1881, date à
laquelle ils fusionnèrent avec ... Cosmos, dont ils s'étaient séparés
vingt ans plus tôt et qui, de son côté, avait connu de nombreuses
mésaventures.
En plus de ses mémoires et de ses ouvrages de caractère purement
scientifique, Moigno a laissé une œuvre imprimée considérable:
Les Éclairagesmodernes(Paris, 1868), La Scienceanglaise(Paris,
1869-1872, 2 volumes), Enseignementpour tous (Paris, 1879-1883,
4 volumes), Les Livres saints et la Science(Paris, 1884). Il a égale-
ment traduit un très grand nombre d'ouvrages de l'italien et de l'an-
glais et dirigé la Collection des actualités scientifiques (pas moins
de cent vingt titres !). A son actif, déjà très impressionnant, on peut
encore ajouter deux chapitres que nous développerons plus loin et
qui font du savant abbé un vulgarisateur hors du commun. Le pre-
mier concerne son rôle dans l'organisation des conférences popu-
laires. Le second, sans doute encore plus original, nous révèle son
rôle de pionnier dans l'emploi des projections destinées à illustrer
ces conférences. Dès 1863, de telles soirées organisées dans une
salle du boulevard du Temple lui valurent un succès considérable.
Mais l'abbé, aumônier du lycée Louis-le-Grand de 1848 à 1851,
puis rattaché à la paroisse de Saint-Germain-des-Prés, restait cha-
noine du chapitre de Saint-Denis : c'est dire qu'il n'avait rien d'un
prêtre de fantaisie, même s'il était quelque peu marginal. Son
catholicisme militant, qu'il affirme en de multiples occasions, est
allé de pair avec son apostolat scientifique et vulgarisateur. Fran-
çois Moigno est mort à Saint-Denis en 1884.
Mme du Châtelet, première traductrice de Newton (m usée Carnava let, photo J.-L. Charme!).
Franço is Ara go , un d es in ve nt e ur s d e l' as tron o mi e po pul a ir e
(co ll. Tapabor).
tr M . - to o. Y: on u. : e rr
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JEAN MACÉ
Jean Painlevé (à gauche) avant une plongée (co ll. Kharbin e-Tapabor).
Qui vulgarise?
Il publie aussi, au cours de sa double carrière, de nombreux
livres. A côté d'œuvres consacrées, nous pouvions nous en douter, à
la navigation aérienne (En ballon! pendant le siège de Paris(1871),
Histoire de mes ascensions(1878-1890), dont l'épaisseur augmente
au fur et à mesure de ses neuf rééditions, etc.), il écrit des ouvrages
plus généraux, en particulier dans la fameuse collection la Biblio-
thèque des merveilles, lancée par Édouard Charton en 1862 : L 'Eau
(1867, 5 rééditions), La Houille (1869, 4 rééditions), Les Fossiles
(1875), La Photographie(1882), parue d'abord sous le titre ... révé-
lateur Les Merveillesde la photographie(1874). Il complète sa pro-
duction par des ouvrages sur des sujets et au style assez différents :
Les Martyrs de la science(1880) et les Récréationsscientifiquesou
l'Enseignementpar les jeux ( 1881), qui connaissent au moins sept
rééditions jusqu'en 1894 et qui se situent dans une tradition où
Tom Tit va exceller.
Arthur Good (1853-1928), plus connu sous le pseudonyme de
Tom Tit, a acquis sa célébrité par La Science amusante, dont les
trois volumes, parus entre 1889 et 1893, ont été vendus à des
dizaines de milliers d'exemplaires et distribués, comme livres de
prix, à plusieurs générations d'écoliers méritants. Arthur Good est
né à Montvilliers, près du Havre, le 26 août 1853. Sorti en 1876
ingénieur de l'École centrale des arts et manufactures, il dirige pen-
dant quelque temps deux fabriques d'amidon de maïs avant de
créer sa propre agence de brevets d'invention. Cette spécialisation
le conduit tout naturellement à fonder Le Chercheur,journal des
inventions nouvelles,qui paraît de 1885 à 1888. A partir de 1885,
La Nature accueille ses premiers articles de vulgarisation propre-
ment dite. Son créneau : les recettes pour la fabrication de jouets ou
la description d'expériences instructives, les unes et les autres réali-
sables par des enfants à partir de petits riens. Son travail de vulgari-
sateur est immédiatement apprécié. Ce qu'il signe dans Le Monde
moderne, Le Magasin pittoresqueou, plus tard, dans Le Petit Jour-
nal lui vaut une réputation durable parmi les jeunes curieux de
science et leurs parents. La première série de La Science amusante,
publiée chez Larousse et qui rassemblait ses articles, en était, en
1912, à sa quarante-sixième édition. Il est mort à Paris en 1928.
Il rêve d'une société où, dans les campagnes les plus reculées, des
laboratoires, des lunettes astronomiques seraient mis à la disposi-
tion de tous les gens. On comprend qu'avec de telles idées il ne pou-
vait que s'opposer à l'establishment, au centralisme parisien et au
conservatisme des idées et des hiérarchies représentés en particulier
par l'Académie des sciences. Les académiciens seront, pour Meu-
nier, de véritables bêtes noires.
Son talent de polémiste ne s'exerce pas toujours avec un irrépro-
chable discernement et on le voit défendre avec le même enthou-
siasme des causes de valeurs très inégales. Sans se laisser impres-
sionner par l'autorité de Pasteur, l'auteur de Jésus-Christdevantles
72
Qui vulgarise?
conseilsde guerre( 1849) est, par exemple, partisan de la génération
spontanée aux côtés de Pouchet et de Joly, car cette théorie lui
paraît plus matérialiste. En 1863, il rompt des lances avec son
confrère Hoefer à propos des habitations lacustres qu'on vient de
découvrir dans plusieurs lacs suisses. Hoefer soutient que ces
constructions sont l'œuvre des castors et non des hommes. La
réponse de Meunier, au nom d'une certaine conception de l'évolu-
tion, est cinglante et assez juste (Courrierdes scienceset de l'indus-
trie, fondé par Meunier en 1863) : « Dans Cosmos, M. le docteur
Hoefer soutient une thèse si plaisante que les journaux pour rire et
leurs facétieux rédacteurs ne pourront se pardonner de ne pas
l'avoir inventée.» Plus tard, il mène dans La Presseune vive cam-
pagne pour la pisciculture et contre son représentant officiel et
impérial, Victor Coste (1807-1873), professeur au Collège de
France, auquel il reproche de reproduire surtout... des poissons
d'avril.
S'il traverse la guerre de 1870 et la Commune sans laisser de
traces, il réapparaît en fondant le Cerclepopulaire d'instruction et
d'initiative de Choisy-le-Roy, dans la banlieue parisienne où il
devient membre du conseil municipal. Il va surtout participer, dès
lors, au mouvement de libre pensée qui marque la fin du siècle. Son
manifeste de la foi laïque résume ses préoccupations :
« Pour Bible : la nature. Pour Évangile : la conscience. Pour
Dieu: le vrai.
» Une loi: le progrès. Un but: le bonheur. Un moyen: l'action.
» Le paradis terrestre, la chute, le rachat sont des illusions
comparables à celles qui firent regarder la terre comme plate et
comme immobile au centre du monde. L'âge d'or est devant nous !
» D'où ces mots: la foi laïque... Cultivons l'arbre de la science.
Mangeons ses fruits. »
Son activité militante n'empèche pas cet infatigable vulgarisateur
d'organiser à Paris des conférences dominicales consacrées aux
actualités de la science et de l'industrie et de publier un grand
nombre d'ouvrages qui marquent sa place dans la vulgarisation
scientifique « d'humeur et de parti pris»: Science et Démocratie
(1865-1866), La Scienceet les Savants (1865-1868), Scènes et Types
du monde savant (1889) y côtoient Histoire philosophiquedes pro-
grès de la zoologie générale (1839), Les Ancêtres d'Adam (1875),
L 'Avenir des espèces (1886-1887), Sélection et Perfectionnement
animal (1895) mais aussi Les GrandesChasses(1866), Les Grandes
Pêches(1868), Scènes de la vie des animaux (1894) et ... Histoire de
perroquets,dans la Bibliothèque mignonne ( 1897).
73
Savants et ignorants
Le militantisme vulgarisateur de Victor Meunier est « hérédi-
taire ». Stanislas Meunier, à la différence de son père - mais, pro-
bablement, à sa grande satisfaction -, est un scientifique profes-
sionnel pour qui la vulgarisation, nécessaire, ne fait que prolonger
son activité d'enseignement et de recherche. Né à Paris en 1843,
préparateur de Frémy (professeur de chimie à l'École polytech-
nique, puis professeur au Muséum), il entre rapidement au labora-
toire d'Auguste Daubrée, qui occupe la chaire de géologie au
Muséum d'histoire naturelle. Aide naturaliste en 1867, soutenance
de thèse en 1869 et. .. conflit aigu avec son patron: Daubrée lui
interdit l'accès des collections de météorites et entend s'en réserver
l'étude exclusive. Les choses finissent par s'arranger, mais quel
écho dans la presse! Stanislas n'est pas pour rien le fils de son père.
1872: il assure en suppléant une grande partie du cours de géologie
et, en 1892, il succède officiellement à Daubrée.
Son œuvre scientifique est. loin d'être négligeable : il s'est inté-
ressé à l'explication rationnelle des grands phénomènes géologiques
- et, là encore, il est en parfaite harmonie avec son père-, en ayant
recours à leur simulation expérimentale (synthèse de minéraux,
reproduction artificielle de cavernes ...). En tant que vulgarisateur, il
organise des excursions publiques qui sont très suivies et il parti-
cipe très jeune à L'Ami des sci.mces:il n'a pas encore vingt ans qu'il
est déjà cité comme secrétaire de rédaction de la revue dont son
père vient d'abandonner la direction. A partir de 1867, il tient la
chronique de Cosmosoù est résumée l'activité de ... l'Académie des
sciences!
L'épouse de Stanislas, Léonie Levallois (18 52-1940) - elle signe
Mme Stanislas Meunier -, s'est d'abord penchée sur la vulgarisa-
tion des sciences. On lui doit, dans la Bibliothèque des merveilles,
une trilogie, Le Monde animal ( 1880), Le Monde végétal( 1881), Le
Monde minéral(1883), puis, dans la même collection, L'Écorceter-
restre( 1885) et Les Sources( 1886). Par la suite, elle se fait alors sur-
tout connaître comme romancière.
S. Le cas Yerne
Tous genres confondus, Jules Verne est l'un des plus célèbres
auteurs du x1xesiècle. Pourtant nous avons affaire, avec lui, à une
œuvre complexe combinant des éléments d'ordres divers - roma-
nesque, géographique, scientifique. Si notre xxe siècle le considère
surtout comme un inventeur en matière de science-fiction, comme
un anticipateur dans le domaine des sciences, si des cinéastes
contemporains ont implicitement reconnu, en utilisant le scénario
de ses livres, qu'il était un grand écrivain capable de créer de véri-
tables « types » scientifiques, il semble que ses contemporains l'ap-
préciaient essentiellement comme l'inventeur d'un genre nouveau,
outil de diffusion des connaissances scientifiques et techniques, le
roman scientifique.
Pour l'historien de la vulgarisation, son irruption sur la scène de
la vulgarisation apparaît comme surtout due... aux hasards de
l'existence. Il naît à Nantes, en 1828, dans une famille d'avoués et
d'armateurs. En 1848, son père l'envoie faire son droit à Paris. A
l'occasion de sa montée dans la capitale, il fréquente les milieux lit-
téraires, ne vit plus que pour l'écriture et, contre la volonté fami-
liale, commence, dans les années 1850, une carrière de littérateur:
des comédies en vers, des nouvelles publiées dans Le Musée des
76
Qui vulgarise?
familles (auquel il collabore régulièrement à partir de 1851), des
opéras-comiques en un acte dont les titres en disent long sur les
thèmes (Les Compagnons de la Marjolaine, Le Colin-Maillard,
L'Auberge des Ardennes). Il compose aussi des poèmes mis en
musique par son ami Aristide Hignard, un compositeur qui a
déjà acquis, au demeurant, quelque notoriété. A parcourir En
avant les zouaves,il nous faut cependant bien reconnaître que ces
productions n'auraient pu assurer le succès «éternel» de leur
auteur.
Cependant, la triple personnalité d'un Verne romancier, géo-
graphe et scientifique se dessine assez aisément. Il ne s'agit pas
d'une véritable conversion à la vulgarisation des sciences. Tous les
biographes s'accordent, en effet, à souligner la fascination précoce
exercée sur Verne par les sciences et les techniques, par le monde
des savants et des ingénieurs. A Nantes, son père n'était d'ailleurs
pas indifférent aux sciences : il avait même installé un cabinet de
physique. Comment ne pas voir une relation entre son origine nan-
taise et son attrait pour la mer et les espaces lointains, pour la géo-
graphie : les premiers voyages, en compagnie d'Hignard, l'amène-
ront,« pour le plaisir», en Écosse et en Norvège. Dès 1856, Verne
se plonge dans les lectures scientifiques. Et c'est finalement la ren-
contre avec le photographe aéronaute Nadar qui est, semble-t-il,
déterminante : en 1863, elle donne naissance au premier livre de
Verne, Cinq Semaines en ballon.Ce livre plaît à l'éditeur Jules Het-
zel et connaît un franc succès. Commence alors le cycle des Voyages
extraordinairesconviant le lecteur à un véritable tour du monde en
quatre-vingts livres.
Est-il besoin de s'attarder sur la vie - somme toute, banale - de
l'auteur à succès que Verne devient ? Les pages ne manquent pas
qui la décrivent ... Quelques difficultés privées (des conflits avec
Madame, une tentative d'attentat qui le laisse boitant bas et le
moral guère plus haut) le poussent à s'installer définitivement à
Amiens. Participation à l'action municipale (tendance modérée),
adhésion à la Ligue de la patrie française (antidreyfusarde), hon-
neurs académiques et étrangers... La trajectoire littéraire décidée
par la rencontre avec Nadar et Hetzel sera sans accidents. Jules
Verne reste très fidèle à son style et à son mode de travail. Notons
simplement qu'il prend, en 1866, la direction littéraire (et non
scientifique) du Magasin d'éducationet de récréation,journal pour
les jeunes créé par Hetzel en 1864 : il y publie pratiquement tous
ses romans en feuilleton avant de les réunir, comme si le Magasin
devait leur servir, pour ainsi dire, de banc d'essai!
77
Savants et ignorants
Mais, justement, comment définir précisément le genre auquel
appartiennent les romans de Verne? Sont-ils d'ailleurs d'un genre
unique? Que dire, par exemple, de Michel Strogoff (1816)? Si le
roman comporte des données descriptives sur la Russie, il ne se dis-
tingue en rien d'autres romans classiques dont l'action se déroule ...
dans le lointain. Mathias Sandor! (1885), quant à lui, s'apparente
plus au roman historique qu'au roman scientifique. En revanche,
dans certains cas, le roman est véritablement organisé par la
science : une théorie scientifique controversée à l'époque même de
Verne compose, par exemple, la trame du Voyage au centre de la
Terre (1864). Dans d'autres cas, des séquences proprement scienti-
fiques s'intègrent, par différentes techniques d'écriture (l'usage de
hublots, l'étonnement de passagers face au spectacle d'une nature
inconnue), dans le récit des Voyages et Aventures du capitaine Hat-
teras (1866) et de Vingt Mille Lieues sous les mers (1870). Dans Les
Aventures de trois Russes et de trois Anglais (l 872), ce sont les pro-
cédés de la cartographie qui sont longuement abordés. Ce dernier
roman est à l'opposé de Michel Strogoff dans la série vernienne : il
est, en effet, considéré comme le moins romanesque. Et c'est aussi
l'un des moins connus ! Est-ce à dire que le lecteur aime moins
Verne lorsqu'il apparaît à visage découvert comme un véritable
vulgarisateur des sciences ? Quelques critiques ont reproché, par
exemple, la minutie exagérée de certaines pages scientifiques de De
la Terre à la Lune (1865) et d'Autour de la Lune (1870), allant
même jusqu'à laisser entendre que le lecteur passe au-dessus sans
les lire.
Mais le plus important n'est peut-être pas là. Ne s'agit-il pas,
avant tout, pour Verne, d'imposer au lecteur un certain regard sur
les sciences et les techniques, regard plutôt optimiste au début, plus
inquiet mais toujours fasciné sur le tard ? Combien de générations
de jeunes nés aux alentours de 1870, et après, ont été marquées à
leur tour par les personnalités exemplaires ou démoniaques du
capitaine Nemo, du polytechnicien Liddenbrock, de l'ingénieur
maudit Marcel Camaret (L'Étonnante Aventure de la mission
Barsac, 1920) ou du Dr Ox ?
Les sources de l'inspiration de Verne et, plus encore, sa méthode
de travail définissent, en quelque sorte, son profil de vulgarisateur.
Ne se différenciant en rien d'Emile Zola, Jules Verne prépare très
sérieusement ses dossiers. Pour ce faire, il a des contacts avec des
hommes de science. Hetzel lui fait connaître Henri Saint-Claire
Deville, Joseph Bertrand (professeur à Polytechnique), Gratiolet
(professeur au Muséum d'histoire naturelle), le géographe Théo-
78
Qui vulgarise?
phile Lavallée. Son frère, ancien officier de marine, son cousin
Henry Garcet (professeur de maths qui relit aussi ses calculs), l'in-
génieur des Mines (et futur professeur à l'École polytechnique éga-
lement) Badoureau complètent, de vive voix, ses connaissances.
Verne n'est pas non plus avare de lecture: il fréquente à Amiens la
bibliothèque de la Société industrielle et divers articles du Musée
desfamilles écrits par d'autres vulgarisateurs, comme Arthur Man-
gin, sont sources de documentation, sur les orages, sur la mer, sur ...
tout. En créant un nouveau genre, il devient une sorte de « vulgari-
sateur de la vulgarisation ».
Verne a toujours été fidèle à la qualité de son information scienti-
fique et technique. Certes, le pessimisme qu'il a affiché face à la
science, à la fin de sa vie, l'a poussé à se complaire dans les por-
traits de savants fous, une création qui a laissé une nombreuse des-
cendance dans la science-fiction. Cependant, comme l'écrit Mau-
rice d'Ocagne, « il n'a jamais cessé de tenir en bride son
imagination, ne lui permettant pas d'échapper à la nécessité des lois
fondamentales de la physique ». Verne ne voulait, en aucun cas et à
l'encontre de Poe, « transgresser les lois les plus élémentaires de la
physique ou de la mécanique afin que, dès le début, ses fascinantes
imaginations apparaissent plausibles ». Ce dernier trait rend encore
plus forts, sans doute, les problèmes infiniment plus importants qui
dominent dans ses dernières productions : la place du scientifique
dans la société et l'utilisation pacifique du savoir. Et ce n'est pas le
moindre paradoxe ; ses derniers livres ont scandalisé ses contempo-
rains et restent encore aujourd'hui peu connus, comme si la trans-
formation de son image de vulgarisateur scientifique nous était,
tout d'un coup, insupportable. Malade, « demi-sourd et quart
d'aveugle», il meurt la plume à la main en 1905.
6. La contributionépisodiquedes littérateurs
Verne n'est pas le seul littérateur à avoir été tenté par l'aventure
de la vulgarisation : une démarche dont les raisons diverses défient
toute tentative de classification. Comment comparer, en effet, la
princesse républicaine italienne Belgiojoso, qui écrivit des livres
scientifiques pour les enfants, à Émile Desbeaux, dont les livres de
vulgarisation ont été, pendant de nombreuses années, des livres
d' étrennes et de prix ?
Émile Desbeaux est né à Bordeaux en 1845. Son père était un
personnage peu commun, poète, inventeur, auteur de théâtre, mili-
tant saint-simonien. Après des études classiques, le jeune Émile
79
Savants et ignorants
entre à l'École nationale d'agriculture de Grignon, et, s'il en sort
ingénieur, c'est pour devenir ... étudiant en droit et notaire. Ce qui
ne l'empêche pas, dès 1869, de débuter dans le journalisme, au Tin-
tamarre et à La Fantaisie parisienne. Pendant dix ans, sa carrière
sera celle d'un critique d'art et de théâtre (c'est lui qui a inventé le
mot « soiriste »), n'hésitant pas à écrire lui-même de nombreuses
pièces. C'est donc sans surprise qu'on le verra devenir secrétaire
général (1884), puis directeur (1892) du théâtre de l'Odéon, où il a
le mérite de faire connaître des auteurs jusque-là inconnus : Eugène
Brieux et Jules Renard.
A partir de 1879, il retrouve ses racines agronomiques et crée un
genre très particulier dont l'héroïne est une jeune et très cartésienne
ingénue dont les « pourquoi » et les « parce que » scandent les
pages scientifiques (Le Jardin de Mlle Jeanne, 1879, Les Pourquoi
de Mlle Suzanne, 1880, Les Parce que de Mlle Suzanne, 1881, Les
Idées de Mlle Marianne, 1883, La Maison de Nicole, 1885, Le
Secret de Mlle Marthe, 1886). Il publie également un Traité d'agri-
culture et d'horticulture (1881) et une Physique populaire (1891),
chez Flammarion, qui voisine avec !'Astronomie populaire, de
Flammarion, et la Zoologie populaire, de Brongniart. Tous ses
livres sont des ouvrages richement illustrés, d'assez grand format.
Ajoutez à cela la personnalité de ses héroïnes : de quoi plaire aux
parents en quête d'un petit Noël instructif et plaisant!
3. La premièremoitié du xxesiècle :
contrasteset diversité
Jean Perrin, lui, était né à Lille en 1870, fils d'un capitaine d'in-
fanterie sorti du rang. Après la mort prématurée de son père, il
achève à Paris des études commencées à Lyon : il entre à l'École
normale supérieure et y rencontre Langevin.
Les débuts de Perrin comme chercheur scientifique sont éblouis-
sants: à vingt-quatre ans, il apporte la preuve directe de l'existence
de l'électron. C'est le début d'une activité qui va le conduire à la
démonstration expérimentale de l'existence des atomes. Un livre
fameux, intitulé Les Atomes précisément, qu'il fait paraître en
1913, résume l'essentiel des travaux - dont les siens - qui appor-
taient un début de réponse aux vieux rêves des philosophes grecs.
Dès 1898, il est chargé d'un enseignement de chimie-physique à la
Sorbonne, enseignement qu'il assurera jusqu'en 1935. En 1926, il
reçoit le prix Nobel de physique pour ses travaux sur« la structure
discontinue de la matière ». Sous-secrétaire d'État à la Recherche
scientifique de septembre 1936 à juin 1937, il joue un rôle décisif
85
Savants et ignorants
dans la création du palais de la Découverte, création décidée à l'oc-
casion de !'Exposition universelle de 1937, vouée, on s'en souvient,
aux arts et aux techniques. Après la défaite et l'armistice de 1940, il
avait pu gagner les États-Unis, où il meurt en 1942. Outre son livre
classique sur Les Atomes, on lui doit, dans le domaine de la vulga-
risation, Les Éléments de la physique (1930 et 1937), Grains de
matière et de lumière(1935 et 1948), A la surfacedes choses(1940)
et, enfin, La Science et /'Espérance( 1948), recueil posthume d'ar-
ticles et de discours.
Comment vulgarise-t-on ?
1. La vulgarisationpar l'écrit
J. Les re,ues
Il n'y a rien d'étonnant à ce que toute présentation ordonnée des
multiples revues qui ont été mises à la disposition du public soit
« une entreprise difficile et comme une gageure » tant elles furent
nombreuses. Faut-il préciser leur public en retrouvant d'hypothé-
95
Savants et ignorants
tiques registres d'abonnement ? Faut-il essayer d'évaluer leur succès
en retrouvant leur tirage dans de tout aussi hypothétiques archives
ou en mesurant leur durée de vie ? Faut-il dresser des tables analy-
tiques de leurs sujets ? Faut-il dresser la liste de leurs collabora-
teurs, pratiquement aussi longue que la liste de leurs articles ? Ce
n'est pas pur hasard que rares sont les téméraires qui ont osé entre-
prendre toutes ces tâches.
Nous nous contenterons ici de quelques indications quant aux
formules choisies par ces revues, formules qui dépendent du (des)
public(s) au(x)quel(s) elles sont censées s'adresser, de leurs centres
d'intérêts scientifiques, mais aussi de l'ambiance générale des
époques où elles sont nées, ont vécu et ont parfois prématurément
disparu.
1. Le public de ces revues
Le public revendiqué par toutes ces revues est très varié. Il est le
plus souvent. .. indéterminé, sinon indéterminable. Elles s'affirment
destinées à « tous », au « grand public », à un « public populaire »,
à toutes« les personnes qui n'ont plus le temps, dans leur vie pro-
fessionnelle, de continuer à se tenir au courant des sciences ». Elles
sont écrites aussi bien dans un dessein utilitaire que plus largement
culturel (objectifs de La Nature- 1873-1939, du Vulgarisateur uni-
versel -janvier à mai 1874 -, de La Science et la Vie, entre autres).
D'autres titres, à visées plus strictement pragmatiques, traitent de
la photographie, de l'électricité, de la bicyclette, mais ont un public
d'amateurs tout aussi indéterminés. Le Vélocipède illustré s'adresse
en priorité aux fanatiques de la petite reine, mais sans exclusive.
Certains signes permettent de caractériser plus précisément peut-
être les lecteurs d'Omnia: aux annonces de demandes d'emploi, on
note qu' « un jeune homme de vingt ans demande place pour
conduire automobile toutes marques » alors qu'il est « resté déjà
trois ans dans une même maison»; aux offres d'emploi, « la Mai-
son Humber recherche un bon dessinateur connaissant [lui aussi]
très bien l'automobile ».
Les revues hygiénistes sont marquées par leur dominante pédago-
gique. Elles veulent toucher aussi bien les médecins que·les patients
éventuels: La Gazette de santé (1773-1829 puis 1833-1836 puis
1841-1843) s'adresse aux femmes du monde et aux curés, Le Petit
Moniteur de la santé, journal populaire de médecine et d'hygiène,
éphémère supplément hebdomadaire du Petit Moniteur (1885-
1887), revendique « parmi ses abonnés un nombre croissant d'insti-
tuteurs» chargés d'enseigner des rudiments d'hygiène, soit dans les
96
BIBLIOTIIEQUE DE VULGARISATION
LIVRES
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D'UNE PRitFACE
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PABl8' COLLBC'TJON HETZEL
J. HETZEL, LIBRAIRE , tDJTEUll
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D ES SI NS D E 1'0t.;RN01 S
LES
HARICOTS
DO
PETITFRANÇOIS
FAR l• LAVAYSSi ta l
l>b ,,.,..,. •
La collection de la Bibliothèque des Merveilles obtint une médaille d'or à !'Expos ition universelle
de 1878 (coll. Daniel Raichvarg).
tXCURSIONS
ou.rtTIT rouctT ·~
DANS LE CORPS HUMAIN
ET DANS LES ANIMAUX
PAR LE DOCTEUR
AUGUSTIN GA ·LOPIN
l'ROFES~EUR DE PHYS IOLOG IE GÉNÈRALE ET D'HYGI ÈNE . LA U RÉAT DES
0
HO PITA UX , DE L'È CO I.E DE MÉDE CIN!! ET DE L AC AD ÉMIF. DES SCIENCES
.1
..·.'
ALBIN MICHEL, ÉDITEUR
2 2, RUE HUYGHENS , PARIS (x1v '')
Les Excursions du Petit Poucet dans le corps humain et dans les animaux, du Dr Augustin
Galopin (18"86)furent rééditées par son fils Arnould en 1928 (Bibliothèque de l'INRP) .
Abbé TH.MOREUX
LA SCIENCE
MYSTERI EU5E
DESPHARAONS
LE ROM A N DE LA S C IENCE •
" • 1 " 1
CHARLES BRUNOLD
INSECTES LA
SARABANDI
ÉTERNELLE
DIALOGUES SUR LA MATIÈRE
Dam, cJ1aq ur: époqut, il exiBtc 1m mmlo
d'((C il~q,ii se placenu-dtssus dt tous/ra
ti11
Otlll't' $, qui lu r~ um~, let uti/Uc, les
Mhlim e ta,u. Il n'y a point dt dou.lt
91u, dt ,wtrc ù mpl , f't ,oil lt phgsicUn
qu,itit1tne le grand r61t ,
P AUi. V .\ J.tMY .
ffi
... quelques auteurs el quelques titres de l'entre-deux guerres (coll. Daniel Raichvarg, Bibliothèque
del 'INRP pour Marcel Boil) .
Comment vulgarise-t-on?
écoles, soit dans les conférences populaires. L 'Hygiènecontempo-
raine ou le Trésordes familles des villes et des campagnes(1875-
1876) du Dr Augustin Galopin traite de « l'hygiène individuelle,
scolaire, positive, sociale, agricole, industrielle, commerciale, mili-
taire, maritime, aérienne, publique, de l'enfance, de la jeune mère,
de la nourrice, de l'adolescence, de l'âge adulte et de la vieillesse ».
La plupart du temps, les revues pour les jeunes comportent, dès
leur titre, des qualificatifs qui ne laissent aucun doute quant à leur
clientèle: L'Ami des enfants (1782-1783), Le Magasin d'éducation
et de récréation(1864-1915), La Pressedes enfants(1855-1857), Le
Journalde la jeunesse (1852 puis 1873-1919, qui a repris, en 1916,
Le Magasin d'éducationet de récréation),Le Petit Françaisillustré
(1889-1905), Le Petit Inventeur(1923-1929).
On peut d'ailleurs se demander si le public qu'atteignent ces
revues est toujours bien celui que ciblent leurs propres prospectus
publicitaires ou leur éditorial de présentation. Les réclames qu'elles
contiennent, leur « courrier des lecteurs » indiquent parfois de
curieuses incertitudes : « tous » ne signifie décidément pas « tout le
monde».
Dans le cas des revues qui s'adressent aux jeunes, le lecteur
moderne peut s'interroger sur les difficultés de compréhension que
devaient y rencontrer leurs lecteurs. Ces revues étaient-elles bien
lues et si oui, à partir de quel âge ? Huit ans, dix ans, quatorze ans ?
Et pourtant, le numéro du 22 novembre 1855 de La Presse des
enfants - directeur : Victor Meunier - nous offre « la lettre d'une
petite amie qui n'a pas dix ans » :
« Je pense bien avoir trouvé le mot de l'énigme du dernier
numéro.
» Ce serviteur de l'homme le plus utile, et qui est si fort et si
lourd, doit, bien sûr, être l'ancre marine qui est attachée au navire
avec une grosse, grosse chaîne très longue, mais très longue, et dont
l'un des bouts est attaché au navire, et l'autre à l'ancre qui est tout
au fond de la mer, dans le sable.
» Je vous salue bien sincèrement,
» Ernestine Herrebrecht. »
2. Questionsde formule, de style et d'ambition
En fait, on peut, pour la commodité, distinguer trois grands types
de revues quant aux manifestations d'une volonté de faire
connaître la science.
Dans les premières, les sciences n'alimentent qu'une rubrique
parmi beaucoup d'autres, dans les deuxièmes, elles sont le centre
97
Savants et ignorants
même de la revue et sa raison d'être, enfin, dans une troisième caté-
gorie, la revue est consacrée essentiellement à une science ou à une
technique particulières, sans pour autant être une revue scientifique
à proprement parler.
Dans les revues généralistes, au milieu d'articles consacrés à la
littérature, à la politique ou aux voyages, un nombre plus ou moins
limité d'articles abordent les sciences et les techniques: Le Magasin
pittoresque(fondé par Édouard Charton en 1833 et qui disparaît en
1913), Le Musée desfamilles (fondé en 1833 également et où vont
s'illustrer de très nombreux vulgarisateurs), Je sais tout, absorbé par
Lectures pour tous en 1934, L 'Illustration ( 1843-1944), qui a ses
chroniqueurs scientifiques réguliers, spécialisés ou non - Merlieux,
Grosclaude, Baudry de Saunier - ou épisodiques - Flammarion,
Berthelot.
A cette formule nous pouvons rattacher d'innombrables alma-
nachs. Dès l'an X de la République, Les Étrennes mignonnes et Le
Petit Théâtre de l'Univers suivent l'actualité des découvertes des
savants et de la vie tumultueuse des animaux du Muséum d'histoire
naturelle. Comme le note Geneviève Bollème, « le ton et la forme
des almanachs changent au x1xesiècle: les mots d'esprit remplacent
les farces, l'observation et la réflexion succèdent aux récits prodi-
gieux. Désormais l'inouï est raisonnable et l'étrange devient scienti-
fique », on passe « des accouchements prodigieux aux longévités
extraordinaires », des « voitures circulant à Paris à la girafe
envoyée en présent à S.M. Charles X par le pacha d'Égypte». En
1884, Mme Gustave Demoulin propose une saynette intitulée La
Sciencede Matthieu Lambert. Au savoir de l'instituteur, la clientèle
paysanne préfère les connaissances météorologiques que le bon-
homme Matthieu doit à la lecture attentive de l'almanach (voir
p. 25).
Les revues pour les jeunes sont essentiellement des revues généra-
listes. La plus célèbre d'entre elles, Le Magasin d'éducation et de
récréation,lancée par Jules Hetzel en 1864 et disparue en 1915, a
deux directions. Si Verne et Hetzel s'occupent de la section litté-
raire, Jean Macé est le directeur de la section scientifique ; on y
trouve la signature du chimiste Henri Sainte-Claire Deville (le
découvreur de l'aluminium), de l'architecte Viollet-le-Duc, de l'as-
tronome Camille Flammarion, de l'entomologiste Jean-Henry
Fabre et du géographe Élisée Reclus. Même répartition des tâches
entre Charles Delon - la science et la technique - et Marie Pape-
Carpentier - la littérature - dans Mon journal (Hachette, 1881-
1925). Dans Le Rayon de soleil (1874-1905, puis 1921-1934), spon-
98
Comment vulgarise-t-on ?
sorisé par la SPA naissante, « Le triomphe [poésie]», « Tendresse
filiale » et... « Pierres lithographiques » alternent sous différents
avatars. La rubrique scientifique de Rie et Rac (1929-1940) est
d'abord l'œuvre d'Alphonse Berget, océanographe, puis, de la mort
de Berget, en 1934, jusqu'à celle de la revue elle-même, pendant la
Seconde Guerre mondiale, c'est le règne de Georges Colomb (Chris-
tophe), qui avait déjà officié de main de maître dans Le Petit Fran-
çais illustré (« Le petit jardin de Pierre »).
Les articles qui composent les diverses parties de la rubrique
« Sciences et techniques» de ces revues sont eux-mêmes d'une
grande diversité.
Les premiers sont liés à l'actualité : dans Je sais tout du 15 février
1909, à la rubrique «Nature», Camille Flammarion décrit « Les
colères de la Terre» après « l'effroyable catastrophe qui a fait, en
l'espace d'une nuit, de la Sicile et de la Calabre, ces contrées si favo-
risées, des terres de désolation » ; dans le numéro du 15 mai 1909
de la même revue, à la rubrique « Science », le Pr Élie Metchnikoff
peint le portrait de quelques « Martyrs de la science », parce que,
« dernièrement, le jeune interne Basy recevait la Légion d'honneur
pour un acte admirable de courage professionnel ».
D'autres adoptent la forme de feuilletons scientifiques qui
copient le feuilleton littéraire : Histoire d'une bouchée de pain de
Jean Macé paraît d'abord, comme nous l'avons vu auparavant,
dans La Presse des enfants, avant d'être édité en volume. Plus tard,
dans Sciences et Voyages, on peut suivre, en 1934, La Science folle,
roman scientifique et d'aventures de l'ingénieur-agronome Georges
Delhoste, ou Deux Mille Ans sous la mer de Léon Groc, auteur de
plusieurs ouvrages dans la collection Grandes Aventures et Voyages
excentriques (L 'Émetteur inconnu, La grille qui tue).
On trouve aussi des petites séquences pratiques (« petits procé-
dés » dans Le Musée des familles) ou amusantes : « amusements
physiques » dans le même Musée des familles, jeux scientifiques
(reconnaissances d'animaux ou de plantes, devinettes, petites mani-
pulations). Les premières expériences amusantes de Tom Tit, qui
paraissent dans L 'Illustration pendant cinq ans dans les années
1880, en sont probablement le meilleur exemple, compte tenu de
leur idée directrice : étant publiées dans une revue pour adultes, les
parents-lecteurs pourront les présenter à leurs enfants.
Moins fréquentes, enfin, des monographies, toujours brèves, et
dont les sujets sont laissés à la libre imagination de leurs auteurs.
Les revues très spécialisées qui avaient des thèmes très proches
du quotidien ont pu durer plusieurs décennies - certaines conti-
nuent encore. Les plus florissantes furent les revues sur la santé et
sur le jardinage - La Gazettede santé date de 1773, Le Vulgarisa-
teur et Messagerde l'hygiène (1890-1922 avant de devenir Vie et
Santé), Le Bon Jardinier,almanachhorticole(dirigé par la dynastie
Vilmorin, 1758-... au moins 1897), Le Petit Jardin illustré (1893-
1938, absorbé par L'Ami desplantes).Mais, là encore, que de tenta-
tives ont vite avorté ! Le Petit Journalde la santé ne dure que cinq
100
Comment vulgarise-t-on?
ans (1888-1893), Le Petit Moniteur de la santé, que quatre ans et La
Médecine éclairéeun an (1791-1792). Leurs articles appartiennent
aux mêmes catégories que ceux des précédentes revues, ne traitant,
bien évidemment, que du sujet vedette. Citons encore La Lumière
électrique (1879-1894), avant de devenir L'Éc/airage électrique,
puis Le Journal universelde l'électricité,Le Vulgarisateurde la pho-
tographie (1892-1910), Le Vélocipède illustré (1869-1870, puis
1874-1890), Omnia, revuepratique de locomotion(1906-1914, puis
1920-1936), La Maison illustrée(1889-1891).
Leurs sujets d'intérêt peuvent être très variables : L 'Électricité
énumère les brevets déposés entre chaque livraison et dispense les
petits conseils d,ami bien informé. Omnia inaugure une discussion
sur la consommation des voitures en 1906 (« la Berliet est un véri-
table dromadaire ») ou diffuse des connaissances scientifiques de
« dernière heure ».
La distinction entre les revues de bricolage ou de loisirs, d'un
côté, et les revues de praticiens plus ou moins au fait de la science,
de l'autre, n'est pas encore très nette. Ainsi, les éditions Bernard
Tignol (qui seront reprises par Gauthier-Villars dans les années
1910) publient plusieurs revues (et collections) qui témoignent de
- cette ambiguïté. Il en est de même pour Le Spectateur militaire
(1826-1914), dont le public est, bien sûr, très ciblé - Le Spectateur
« est ouvert à tous les officiers studieux désirant concourir par leurs
travaux aux progrès des sciences militaires». Perdu au milieu d'ar-
ticles touchant à l'histoire des armées, des grandes batailles et des
questions de stratégie, Wilfrid de Fonvielle y tient une rubrique
consacrée aux sciences et techniques intéressant au premier chef ses
lecteurs : !'aérostation, la météorologie, la photographie, la radio.
Dans les années qui précèdent la Grande Guerre, les sciences dis-
paraissent: certes, on nous explique encore « la lumière électrique
et son emploi à la guerre », mais on ne parle que de la disposition
militaire des projecteurs. 1914 marque aussi la disparition du Spec-
tateur militaire, appelé à des activités moins théoriques.
3. Questionsd'intendance: les problèmesfinanciers
Le marché des revues de vulgarisation a toujours été troublé.
Malgré les bonnes intentions - « nous ferons tous nos efforts »,
« notre but est de rendre la science accessible à tous » -, Vulgo
durera moins d'un an. La Science universelle,avec Bitard, Flamma-
rion et de Graffigny aux commandes, n'aura pas plus longue vie
malgré de présomptueuses annonces : « La Science universelle,par
son prix relativement modique, pourra être lue avec intérêt et par
101
Savants et ignorants
tous, à l'atelier et dans la famille ; sa place est dans tous les salons,
dans toutes les bibliothèques : ce sera le guide le plus sûr. » En dépit
de leurs titres ronflants, Science et Nature, revue internationale
illustréedes progrèsde la scienceet de l'industrie ou bien Science et
Nature, revuepopulaire des sciences naturelles et de leurs applica-
tions auront respectivement 50 et 15 numéros (décembre 1883-
novembre 1885 et janvier 1907-mars 1908).
D'autres revues ne durent qu'un printemps (L 'Hygiène contem-
poraine d'Augustin Galopin sort en tout et pour tout 11 numéros,
Le Vulgarisateuruniversel, 9, La Science pour rien ne trouve des
lecteurs que pour ... 4 livraisons). Les restructurations internes ou
externes sont nombreuses: La Lumière électrique (1879-1894)
devient L 'Éclairageélectriqueen 1908, puis Le Journal universelde
l'électricitéjusqu'en 1916, La Sciencepour tous devient La Science
française en 1889 (jusqu'en 1901, où elle disparaît), L 'Aventure
(1927-1929) devient Rie et Rac en 1929.
Les causes de ces difficultés et de ces échecs sont sans aucun
doute complexes. Les guerres de 1870, 1914 et 1939, les crises des
années 1930 ont, par exemple, marqué la fin de nombreuses revues.
Les formules étaient-elles trop monotones et la concurrence trop
vive dans un marché finalement vite saturé? Non seulement La
Science pittoresqueressemble comme une sœur à La Science illus-
trée, mais les équipes rédactionnelles sont interchangeables - Louis
Figuier, Arthur Mangin, Camille Flammarion, Adolphe Bitard,
Henry de Graffigny se promènent d'une revue à l'autre. Les textes à
lire étaient-ils trop denses et trop longs ? Le succès de la mise en
page « textes-photos » de La Scienceet la Vie, largement inspirée de
l'américain Popular Mechanics et sur lequel nous reviendrons,
serait là aussi pour témoigner que le difficile équilibre entre texte et
image peut être trouvé, sans assurer pour autant le succès. Avec la
même formule, Sciences et Monde, Sciences et Voyagesn'ont pas
tenu.
Le dernier numéro d'une revue garde rarement la trace de ce qui
précède le naufrage. Par pudeur ? La fin de La Sciencepopulaireest
sinistre : le numéro 232 du 24 juillet 1884 est un 16-pages encore
abondamment illustré, le numéro 243 du 10 octobre n'est plus
qu'un 4-pages sans illustrations.
Trois exemples, ceux de Cosmos, de La Sciencepittoresqueet de
La Science et la Vie sont révélateurs des mœurs, de la vie et de la
mort de ce genre de publication.
Rappelons que l'abbé Moigno a assumé la direction de Cosmos
jusqu'à ce que Seguin Ainé en devienne propriétaire, en 1863. L'in-
102
Comment vu/garise-t-on?
génieur et grand inventeur Seguin, qui ne manquait aucune occa-
sion de s,affirmer comme le neveu de Montgolfier, avait aussi beau-
coup d,autres idées, sociales, qu,il ne demandait qu,à faire partager
par une presse à sa disposition. Moigno a raconté les circonstances
de sa rupture avec son riche commanditaire. Les circonstances sont
complexes et méritent que nous nous y arrêtions quelque peu :
« M. Seguin Ainé avait voulu acquérir de M. de Montfort la pro-
priété de Cosmos,dans le double but de se procurer un concours
efficace pour le triomphe de ses théories scientifiques et de m,assu-
rer une position indépendante. Mettant immédiatement à exé-
cution ses généreuses intentions, il fit acquitter pour moi diverses
dettes montant à la somme totale de 13 500 francs. De mon côté, je
consentis à ce que mes appointements, fixés par M. de Montfort au
chiffre de 5 400 francs par mois, fussent réduits momentanément à
200 francs. Jtabandonnais pour éteindre ma dette une somme men-
suelle de 300 francs. [...]
» Après cinq ou six années, quand il fut certain pour moi que ma
dette était intégralement remboursée, je demandais qu'on la décla-
rât éteinte et que le chiffre de mes appointements fût ramené à
500 francs, car 200 francs ne suffisaient pas même à indemniser
mes collaborateurs. J,appris alors seulement que, loin de diminuer,
ma dette avait atteint le chiffre énorme de 20 944 francs parce que
l'on mettait à mon compte l'annuité d,une assurance sur ma vie de
20 000 francs, servant de garanties aux avances qui m'avaient été
faites.»
2. La scienceaux quotidiens
La présence d'une rubrique scientifique tenue régulièrement par
un publiciste avait été, on s'en souvient, l'objet d'une sérieuse que-
relle entre François Arago et Jean-Baptiste Biot en 1837. Dans la
première moitié du x1xesiècle, l'Académie des sciences, seule, avait
pour vocation de communiquer des résultats scientifiques : pré-
tendre diffuser les nouveautés des sciences supposait nécessaire-
ment s'alimenter à sa source. La présence d'étrangers assistant aux
débats de la communauté académique inquiétait plus d'un savant,
Cuvier et Biot en tête. Qu'allaient donc bien comprendre et écrire
les journalistes ?
Les débuts du feuilleton scientifique remontent à 1825. Son
inventeur fut Alexandre-François Bertrand, ancien polytechnicien
qui avait démissionné de l'École en 1815 pour des raisons poli-
tiques. Cofondateur du Globe,il y tint, jusqu'à sa mort accidentelle
en 1831, le feuilleton, grâce aux renseignements que lui fournissait
son fils, le mathématicien et académicien Joseph Bertrand. Mais
rapidement, sous l'impulsion de François Arago, et surtout après la
mort de Cuvier en 1832, le monopole académique va disparaître ;
des dispositions sont prises pour faciliter le travail des « publicistes
scientifiques » : ils assistent aux séances, une salle est mise à leur
disposition pour qu'ils puissent accéder plus aisément au contenu
des mémoires, avant que ne soient publiés, à partir de 1835, les
Comptes rendus hebdomadairesde l'Académie des sciences.Cela ne
va pas sans quelques heurts : Humboldt surnomme Alfred Donné,
chroniqueur du Journal des débats, le « laiteux Donné» (il avait
publié quelques travaux sur le lait), Saigey, feuilletoniste au Natio-
nal, se voit interdire l'entrée de l'Académie par Arago lui-même!
Si le « feuilleton scientifique » prit ainsi naissance grâce aux posi-
tions libérales de certains savants, il bénéficia lui aussi du déve-
loppement de la presse quotidienne, sous l'impulsion d'Émile de
Girardin.
Comme tous les autres feuilletons - artistique, littéraire, judi-
ciaire, théâtral -, le feuilleton scientifique a, presque toutes les
semaines, l'honneur du bas de la première et de la deuxième page.
Aux résumés des « lundis » de l'Académie des sciences, les publi-
cistes ajoutent des renseignements provenant des séances d'autres
106
Comment vulgarise-t-on?
sociétés : le feuilleton du vendredi 8 juillet 1836 de La Presse est
composé du résumé des travaux de la séance du 4 juillet de l'Acadé-
mie des sciences, de la séance générale du 6 juillet de la Société
d'encouragement pour l'industrie nationale et de la séance du 29
juin de la Société royale et centrale d'agriculture. Bientôt, quelques
brèves informations ouvrent au lecteur la porte d'autres sociétés
scientifiques plus ou moins huppées. Le 21 septembre 1836, tou-
jours dans La Presse,A. Lembert signale que le ministre de l'ins-
truction publique vient d'accorder une somme de trois mille francs
au Pr Coste (du Muséum d'histoire naturelle) pour une série de pré-
parations et de dessins destinés à présenter les connaissances de
l'embryologie comparée. Le journaliste commente, dans le même
article, l'exposition des fleurs, des fruits et des légumes que la
Société d'horticulture de Paris vient d'ouvrir dans !'Orangerie du
Louvre.
Un nouvel élan est donné après 1850. Selon le rédacteur en chef
du Cerclede la presse scientifique- créé en 1857 par Louis Figuier
(de La Presse),Lecouturier (du Pays) et Félix Roubaud (de L'illus-
tration)-,« le public témoignait quelque fatigue des abstractions et
des promesses de la théorie [...]. L'Exposition de 1851 vint rappeler
l'attention générale avec force sur les choses de la science; car cette
fois, il s'agissait de bien-être individuel et de richesse collective, et
chacun s'y intéressa, voulut toucher et voir, de près ou de loin, la
puissance nouvelle, l'industrie, issue des applications de la
science». On comprend, dès lors, la diversification et le succès du
feuilleton : il répond à une réelle curiosité. Ainsi se structure un
modèle qui dure jusque dans les années 1890, qu'il soit appelé
« Revue des sciences » (Le Correspondant),« Bulletin du monde
scientifique » (La Presse)ou, tout simplement « Sciences » (L 'Opi-
nion nationale): aux nouvelles des académies, témoignant des
avancées officielles de la science, s'ajoutent, selon la personnalité
du publiciste, des informations sur l'industrie, des visites à dif-
férents laboratoires, des comptes rendus de lecture de livres ou de
revues... Exemple parmi d'autres, dans L'Univers illustré du
24 août 1878, la « Revue scientifique» du Dr E. Decaisne nous
parle d'une note « fort intéressante » de Boussingault sur « la
composition du lait de l'arbre à vache que lui a proposé à l'analyse
Alexandre de Humboldt », de la fièvre jaune au Sénégal, d'une
exposition des abeilles qui s'est tenue à Bruxelles et enfin de la
chasse au point de vue hygiénique.
Dans les années 1890, le modèle change. Pour Le Petit Journal,
Le Temps ou Ouest-Éclair,ce ne sont plus les académies qui ont le
107
Savants et ignorants
monopole de la science qui passionne le lecteur : à partir de 1892,
dans Le Petit Journal, il ne reste, pour témoigner de la vie de l'Aca-
démie des sciences, que quelques lignes en quatrième ou cinquième
page - et encore sa parution est-elle très irrégulière. Dès cette
époque, les journalistes recherchent le « scoop » scientifique « à la
une» et ce scoop n'est, par définition, ni prévisible ni fréquent. On
retrouve ainsi en première page sur trois colonnes, le 9 juillet 1892,
un article de Thomas Grimm sur la méthode de rajeunissement du
Pr Brown-Séquard et de ses injections d'extraits testiculaires. Le
28 juillet 1892, deux colonnes du même Thomas Grimm, quelques
jours après l'éruption de l'Etna, font le point, dans un entretien
avec le Pr Daubrée, sur les connaissances en matière de volcanolo-
gie. Le 1erjanvier 1895, la venue du Dr Behring, inventeur du vac-
cin contre le croup, est, pour Jean sans Terre (pseudonyme de
Pierre Giffard, plus tard fondateur de journaux sur le vélo), l'occa-
sion d'expliquer que « Paris vient de posséder pendant quelques
jours une des plus jeunes gloires de la science médicale » ; le journa-
liste suit Behring dans ses déplacements à l'Institut Pasteur (visite
sous la direction d'Émile Roux) ou à l'École vétérinaire (visite sous
la direction de Nocard), avant son départ pour Cannes et l'Algérie,
« où l'attendent de nouvelles et incessantes recherches sur le cho-
léra ». De même, en janvier 1910, après les inondations catastro-
phiques qui succèdent au tremblement de terre de Messine, la
rédaction du Petit Journal demande à Camille Flammarion de don-
ner son point de vue sur les comètes que le populaire désigne
comme responsables de « cette succcession de phénomènes naturels
si inquiétants». Le 12 mars 1910, c'est l'abbé Moreux qui com-
mente, en première page, le prochain passage de la comète de Hal-
ley et « la terreur ridicule de la fin du monde ». On retrouve l'abbé,
le 2 février 1930, dans Ouest-Éclair.A la suite des « secousses sis-
miques ressenties à l'ouest de la France ces temps derniers»,
Moreux se demande si l'on peut « prévoir les tremblements de
terre? Oui, mais ... ». La visite d'Einstein à Paris au printemps de
1922 donne lieu à des débats sur la théorie de la relativité et, du
même coup, sur les difficultés de sa vulgarisation dans Le Figaro,
Le Temps, La Victoire... Le commentaire scientifique à chaud - ou
presque - de l'actualité ne date pas d'hier !
Enfin, coexistant avec ce scoop de première page, une petite
chronique scientifique, pouvant aller jusqu'à deux demi-colonnes
en troisième ou quatrième page, traite de tout un peu : le pouls de la
souris, l'interprétation des étincelles, la marche des ions, les écrous
indesserrables, les conséquences du chauffage des chaudières à
108
Comment vulgarise-t-on ?
mazout, la pesanteur transformée en électricité, le danger des pis-
cines publiques, le problème du pétrole (qui n'est pas encore un
gros titre !).
Entre les deux guerres, pourtant, la science tend à disparaître des
journaux, et !'Exposition universelle de 1937 - la plus scientifique
de toutes les Expositions universelles - ne fait, finalement, pas
recette. Les soucis de la société sont ailleurs. Seul le journal Le
Temps entretient la tradition du feuilleton scientifique. En 1937,
tous les quinze jours, le physicien Louis Houllevigue tient une
« causerie scientifique»: l'actualité (« Univers 1937 », « Le gluci-
nium», « La radiesthésie») y est, de nouveau, commentée avec
quelque distance, dans un style souvent plus didactique, voire théo-
rique ... Précédant d'une semaine la causerie de Houllevigue et avec
la même régularité, le Dr Henry Bouquet rédige « Les actualités
médicales » (« Les petits périls du printemps », « Un parasite »,
« La séance de la Société des hôpitaux de Paris » ). Par leurs titres,
par leurs contenus et leur style, par leur situation dans le journal (au
bas de la troisième page), ces feuilletons sont comme une résurrec-
tion, en plein xxe siècle, de la seconde moitié du x1xe.
Les signataires de cette littérature plus ou moins de circonstance
pensaient-ils que leur production méritait mieux qu'une parution
fugitive dans un numéro de revues ou de journaux voués à l'oubli?
Un certain nombre de vulgarisateurs du siècle dernier ont réuni en
volumes leurs chroniques parues au fil des jours et des années. Tels
Babinet, avec ses articles de La Revue des Deux Mondes, Jean Ram-
bosson, qui regroupe dans La Science populaire ses articles parus
dans Le Constitutionnel et Le Pays de 1862 à 1870, ou Samuel-
Henry Berthoud, qui publie, de la même manière, Les Fantaisies du
Dr Sam, en quatre volumes. D'autres, comme Louis Figuier et son
successeur, l'ancien communard amnistié Émile Gautier, ou bien
encore Henry de Parville, recomposent leurs rubriques régulières
sous forme d'annuaires des sciences : et c'est L 'Année scientifique
(1857-1913) et les Causeries scientifiques (1861-1895).
Ces recueils répondent évidemment à des ambitions plus pares-
seuses que celles qui animent les auteurs des «vrais» livres que
nous allons rencontrer maintenant.
1. La sciencepar la littérature
De nombreux livres de science vulgarisée utilisent des formes lit-
téraires pour diffuser les connaissances scientifiques, exactement à
l'inverse de ce que Zola voulait établir entre la littérature et la
science. Comme l'écrit le vulgarisateur Arthur Mangin lui-même,
en préface de son Voyagescientifiqueautour de ma chambre(1861),
le principe de composition d'un livre de science vulgarisée est le
suivant: « Le fond de l'ouvrage comprend deux éléments, l'un
accessoire, c'est la fiction, le petit roman qui amène le dialogue,
l'autre essentiel, c'est la série de leçons scientifiques qui sont l'objet
de ce dialogue. »
De fait, le « petit roman » peut prendre deux formes différentes.
Les auteurs exploitent tout d'abord le roman d'exploration, le
voyage ou son« modèle réduit», la promenade. Ils se livrent alors à
un jeu qui tente la difficile synthèse de la description et de l'explica-
tion scientifiques sur un fond lui-même narratif. Les auteurs
mettent aussi en place des situations très diverses permettant la
conversation entre différents partenaires, conversations souvent
proches de la causerie ou des histoires à la veillée.
Le support fictionnel est donc d'abord très souvent le voyage -
dont Paul et Virginiesemble marquer le point de départ et dont les
romans de Jules Verne représentent l'aboutisssement le plus remar-
quable. Le titre de l'ouvrage fait explicitement référence à ce
voyage ou à cette promenade, supports métaphoriques du chemin,
nécessairement parsemé d'embûches, qui mène de la simple curio-
sité au savoir. Paul Gouzy nous propose un Voyage au pays des
étoiles,puis une plus modeste Promenaded'une fillette autour d'un
laboratoire (1887); si Arthur Mangin nous emmène dans un
Voyagescientifiqueautour de ma [sa}chambre, Charles Beaugrand
nous demande de suivre Les Promenadesdu Dr Bob (ouvrage cou-
ronné par la Société pour l'instruction élémentaire en 1885); Marie
Maugeret nous entraîne dans La Science à traverschamps (1875).
La mise en scène est parfois exotique : Henry Coupin exploite la
mode dans sa Promenadescientifiqueau pays desfrivolités ( 1906) ;
de La Blanchère décrit, en 1884, Les Aventures d'une fourmi rouge
autour du globe, Ernest Schnaiter imagine un remake des Lettres
persanes dans son Expédition scientifique d'un sauvage en France
( 1869) : le roi cannibale Eïtouna, de l'île de Chattam, a participé au
massacre de l'équipage du Jean-Bart. Arrêté et ramené en France
par la corvette L'Héroïne, il découvre la civilisation scientifique et
111
Savants et ignorants
technique. Henry de Graffigny reprendra le mythe du bon Nègre
dans son plus tardif Un sauvage à Paris ( 1912).
Ce voyage se transforme souvent en robinsonade : si la fourmi
rouge de De La Blanchère subit de véritables épreuves de survie
dans la solitude et le froid, le neveu du Dr Bob de Charles Beau-
grand passe par une initiation douloureuse: la piqûre d'une vive,
poisson qu'il ne connaissait pas et qu'il a pris dans la main avant
que son cousin, le fils du Dr Bob, ne puisse l'en empêcher. Mais,
heureusement, Bob explique minutieusement le principe de la
piqûre et son neveu oublie sa blessure et se convertit à la science !
C'est encore, en 1886, les difficiles Excursions du Petit Poucet dans
le corps des animaux et des humains du Dr Augustin Galopin (père
d' Arnould Galopin, auteur de nombreux romans pour la jeunesse
dans l'entre-deux guerres)...
Quant aux Histoires, tous les objets et les animaux sont invento-
riés: après Histoire d'une assiette, en 1885, Eugène Lefebvre nous
raconte une Histoire d'une bouteille, un an plus tard ; Samuel-
Henry Berthoud trace« l'histoire familière du globe terrestre avant
les hommes» grâce, précisément, aux Aventures des os d'un géant;
dans ses Contes utiles (1861), Louis Fortoul associe l'histoire d'un
enfant et d'un livre; Jean-Henry Fabre s'occupe de !'Histoire d'une
bûche cependant que Victor Meunier croque celle des perroquets.
Jean Macé conte !'Histoire d'une bouchée de pain et Marie-Pape
Carpentier, celle du blé, et d'autres, celle d'une feuille de papier,
d'une goutte d'eau, d'un brin d'herbe, d'un rayon de soleil, d'un
morceau de verre, sans oublier L 'Histoire d'une chandelle du célèbre
Faraday, souvent citée en modèle et dont la traduction de l'anglais
fut un best-seller durant toute la fin du siècle.
Si ce n'est pas l'objet ou l'animal, plus rarement le végétal, qui a
la vedette du titre, c'est le maître causeur: de La Blanchère fait cau-
ser son Oncle Tobie le pêcheur ( 1866), Fabre, son oncle Paul,
Edmond Labesse présente La Science de [sa} tante Babet (1885),
Samuel-Henry Berthoud, le docteur Sam. Comme le disent Vincent
et Eckert (introduction des Causeries de l'oncle Jean, 1913): « Les
enfants adorent leur oncle et leur tante ! » Mais il y a aussi La Bota-
nique du grand'père (Leboeuf, 1886). Dans la Bibliothèque d'ins-
truction populaire, à partir de 1830 et 1850, et à l'initiative de
Cyprien-Prosper Brard (professeur de géologie au Muséum, puis
directeur de différentes mines et houillères), plusieurs auteurs
écrivent des Entretiens. Brard débute la série par Entretiens sur la
physique, puis propose des Entretiens sur l'industrie française, des
Entretiens sur l'art de bâtir à la campagne, le professeur de pharma-
112
Comment vu/garise-t-on?
cie Apollinaire Fée, ami de Bory de Saint-Vincent, propose trois
ouvrages : Entretienssur la botanique,Entretienssur la zoologieet
Entretienssur les oiseaux, (1835-1838); il y a aussi des Entretiens
sur le système métrique: tous ces Entretienssont, en fait et en sous-
titre, les aventures de « maître Pierre ou le savant du village ».
Parfois, retournement de situation, c'est l'animal (Les Mémoires
d'un hanneton, de Jeanbernat, 1892), ou bien le végétal (Les
Mémoires d'un chêne, de Mangin, 1886) ou, mieux encore, l'objet
lui-même qui se raconte : Mémoires d'un estomac écrits par lui-
même pour le bénéficede tous ceux qui mangent et qui lisent (1874)
édités par un ministre de l'Intérieur.
Ce qui domine dans ce genre, c'est une recherche de la relation de
tendresse, pourrait-on dire, entre le thème et le lecteur. Certains
titres revendiquent l'adjectif de «familier». Pierre Blanchard pré-
sente, en 1818, Les Accidentsde l'enfance« dans des petites histo-
riettes propres à détourner les enfants des actions qui leur seraient
nuisibles» (c'est le sous-titre); Arnaud Berquin donne, en 1802,
Une introductionfamilière à la connaissancede la nature et Mlle
Ulliac-Tremadeure écrit, dans les années 1830: Les JeunesNatura-
listes ou Entretiens familiers sur l'histoire naturelle, Les Jeunes
Savants ou Entretiensfamiliers sur la physiquepuis des Contesaux
jeunes naturalisteset des Contesaux jeunes agronomes.Les Récréa-
tions sont physiques (A. Castillon, 1861) et chimiques (même
auteur, 1882). Il y a des « veillées scientifiques» (Les Veilléesde
Jean Rustique, de Jean Pizzetta, 1863). La promenade est moins
rupture que le voyage : Par-ci,par-là(Desplantes, 1886).
Dès les premiers essais (et les premiers grands succès) du livre de
science vulgarisée, la conversation est, en fait, très employée.
C'était déjà le genre choisi par Galilée dans son Dialoguesur les
grands systèmes ou dans celui sur les sciencesnouvelles- sous le
nom de Salviati, Galilée s'exerçait à convaincre de ses idées les
signori Sagredo ou Simplicio. Fontenelle causait avec une marquise
aussi charmante que vierge de connaissances en astronomie. Noël-
Antoine Pluche présentait Le Spectaclede la nature à un comte, à
une comtesse et à un chevalier. Même si ces « conversations » ne
constituent pas une véritable invention parmi les méthodes utili-
sées pour partager un savoir - le procédé a donné des preuves de
son efficacité pédagogique depuis Platon -, cette atmosphère parti-
culière mérite qu'on s'y arrête un peu. Sans doute faut-il voir dans
ces causeries, ces entretiens, ces veillées le désir de rendre
attrayants des sujets réputés sérieux, sinon difficiles. Mais à ce
simple désir « négatif» s'ajoute probablement une réelle volonté de
113
Savants et ignorants
communication et de confiance réciproque : on ne parle pas à quel-
qu'un avec qui on est fâché ou qu'on méprise. La conversation, au-
delà des nécessités sociales quotidiennes qu'elle satisfait, constitue
la matière même de la culture. Choisir ce genre, c'est avant tout le
signe de vouloir intégrer la science dans la culture de tout un cha-
cun. Et quand la conversation « en direct» n'est pas possible, elle
est remplacée par la correspondance, souvent adressée à une
«Madame» (inconnue), comme la destinataire des dix-neuf Lettres
sur les révolutions du globe d'Alexandre Bertrand (première édition
en 1828), qui font suite à une longue tradition que nous avons déjà
mentionnée plus haut (Lettres à une princesse d'Allemagne, d'Euler,
entre 1768 et 1772, Lettres à Sophie sur la physique, de L.-A. Mar-
tin, ou encore Lettres à Julie sur l'entomologie, de M. E. Mulsant,
en 1830).
L'absence d'un enseignement des sciences à l'école - au moins
jusqu'en 1880 - se fait sentir dans la plupart des mises en scène.
Ces dialogues« pédagogiques» emmènent les héros (et les lecteurs)
hors de l'espace-temps scolaire: c'est évident dans le cas du voyage,
mais c'est clair aussi dans celui de la causerie - c'est rarement l'ins-
tituteur en exercice qui parle. On envoie très souvent les enfants
chez l'oncle ou la tante qui habitent loin du lieu habituel de rési-
dence de l'enfant où la causerie est associée à la promenade, donc
au temps des « récréations » ou des vacances. Le premier chapitre
des Récréations physiques de Castillon a pour titre « La distribution
des prix » pour Eugène, Ernest et Pierrot. Les Récréations chi-
miques démarrent dans « un train express lancé à toute vapeur ...
au premier jour des vacances». Alfred et Charles, les jeunes héros
de Jules Clère, reviennent chez leurs parents pour Les Vacances
d'automne ou les Jeunes Oiseleurs (1835), pour Les Vacances de
Noël ou les Jeunes Chasseurs (1837) et pour Les Vacances de Pâques
ou les Jeunes Pêcheurs (1837). Les Promenades du Dr Bob com-
mencent à la gare d'arrivée pour les vacances. Bien évidemment,
la chute du livre est le retour au domicile ou, plus exactement,
la scène du « au revoir et merci pour tout ce que j'ai appris » qui
se tient sur le quai du retour. Le titre des Jeudis de M. Dulaurier
(Victor Borie, 1865) exprime bien le fait que la leçon de botanique,
donnée par l'instituteur M. Dulaurier, se déroule le jour de relâche,
comme dans Les Promenades du jeudi ou les Visites à la ferme,
« ouvrage composé pour les jeunes filles par Mme la comtesse Dro-
hojowska et Mme A. J. T. Pinet» (1866), ou dans M. Lesage ou
Entretiens d'un instituteur avec ses élèves sur les animaux utiles, de
M. Bourguin (1865), pour les garçons.
114
Comment vulgarise-t-on?
Dans ses Entretiens sur la chimie et ses applicationsles plus
curieuses,en 1841, Ducoin-Girardin exprime un sentiment général,
que Noël-Antoine Pluche et d'autres pédagogues manifestaient,
plus prudemment, au siècle des Lumières, celui du caractère
incomplet de l'enseignement scolaire seul. Le héros du livre, Paul
de Baudemont, « après une année d'études couronnée de brillants
succès, venait jouir au sein de sa famille d'un repos bien mérité
pendant les deux mois que l'université consacre aux vacances».
Hélas ! dès les premiers jours, « sa science du collège est en
défaut»:
« Se présentait-il dans un salon? on n'y parlait que d'un procès
célèbre où le poison jouait un grand rôle et chacun discutait le
mérite des procédés employés pour en découvrir les traces ...
Allait-il en promenade? C'est du daguerréotype et de ses merveil-
leux effets qu'on aimait à s'entretenir. Visitait-il une usine? Il n'en-
tendait parler que des procédés qui se fondent sur des principes
qu'il ignorait complètement. Il commençait à penser qu'Homère et
Virgile, si bons pour former le goût, comptent pour peu de chose
dans notre vie positive.
» Un jour qu'il s'entretenait avec M. Desfoumeaux, un vieil ami
de son père, du dépit qu'il éprouvait de se trouver aussi peu ins-
truit:
» - Ne calomniez pas l'éducation que vous recevez au collège.
Ces travaux forment le goût et développent votre jugement. S'il est
vrai de dire que l'on ne vous apprend pas tout au collège, il est vrai
aussi que l'on vous y dispose à tout apprendre. Et c'est beaucoup.»
A partir de 1895, lorsque l'enseignement des sciences sera bien
développé à l'école, les livres qui usent et abusent de ce modèle dis-
paraîtront progressivement au profit d'autres genres. Mais quelques
livres à trame narrative resteront en vogue.
Un voyage bien mené reste une raison de succès pour Les Tribu-
lationsde JacquesCravan,inventeur(Guy Péron) et Deux MilleAns
sous la mer (Uon Groc), dans la collection Grandes Aventures et
Voyages excentriques. Henry de Graffigny, dans La Caverneau
radium (roman à cinquante centimes, publié dans la collection
Romans d'aventures en 1927), imagine une course au trésor d'un
homme et de son fils, course qui aurait pu finir mal si le fils, élève
de l'École de physique et chimie de Paris, n'avait su détecter du
radium et l'exploiter pour défendre la petite communauté attaquée
par des bandits: cette fois-ci, c'est l'enseignement scolaire qui rend
possible le happy end ! Le même auteur, dans Tu es un assassin
(collection Police et Mystère, 1930), met en scène un policier à
l'histoire bien particulière :
115
Savants et ignorants
« Georges Laubergé était entré à l'École de physique et chimie
industrielle de Paris car il pensait faire carrière comme ingénieur
dans une usine moderne outillée d'après les données les plus perfec-
tionnées de la science moderne, quand il se trouva subitement
arrêté au seuil de sa quatrième année d'études par un malheur
imprévu. Son père, qui exploitait un important garage d'autos, fut
victime d'un désastre qui le ruina entièrement ... Contraint de cher-
cher un gagne-pain immédiat pour essayer de venir en aide à ses
infortunés parents, il se résigna à accepter un poste dans la police
municipale.» On imagine la suite: grâce à la science de l'école,
Georges Laubergé fait carrière.
Pour les plus jeunes, Gigi parmi les insectes,de Vamba, connaît
un beau succès en 1922 : le thème - classique dans les contes et déjà
exploité dans Excursionsdu Petit Poucetdans le corpsdes animaux
- en est la miniaturisation des jeunes héros, éternels râleurs contre
l'école, et qui rêvent tout haut: « Les animaux sont mille fois plus
heureux _quenous : ils n'ont rien à faire du matin au soir. » « Plutôt
que d'apprendre la grammaire latine, je préférerais être changé en
fourmi...» A cet instant, un inconnu arrive. De nouveau, on ima-
gine aisément la suite.
L'un des derniers ouvrages « à dialogues » - et sans nul doute
l'un des plus étonnants par la personnalité de son auteur - est La
Sarabandeéternelle,dialoguessur la matière( 1929), de l'inspecteur
général Charles Brunold, théoricien de la pédagogie de la redé-
couverte. Sept dialogues« à l'état pur» mettent aux prises un pro-
fesseur (« cher Probus ») et un élève (« mon cher Lucile »), dont
nous ne savons absolument rien : ni leur âge, ni leur position sociale
exacte, ni les conditions dans lesquelles ils se rencontrent !
Les auteurs rivalisent d'imagination pour substituer à la relation
maître-élève de l'école un cadre pédagogique plus souple où inter-
viennent différents personnages. Deux exemples arbitrairement
choisis parmi des centaines d'autres montrent quelques-unes des
solutions qui ont été proposées.
Dans Les Aventuresdes os d'un géant, histoirefamilière du globe
terrestreavant les hommes ( 1863), Berthoud propose l'histoire d'un
paysan, Pierre Maréchal, qui convoite un lopin de terre apparte-
nant à la mère Javotte. Celle-ci n'accepte de le vendre qu'après en
avoir fait monter le prix. Pour aider à défricher, maître Maréchal
embauche un garçon de ferme, la Belette. Mais le champ apparaît
comme une bien mauvaise affaire: Maréchal s'est fait gruger! La
Belette avance une explication à l'absence de fertilité: ce champ fut
la possession du géant Bras-de-Fer, qui rançonna jadis la contrée.
116
Comment vulgarise-t-on?
« Tout ce qui a été le bien de Bras-de-Fer est maudit à tout
jamais. » Or voici qu'après avoir longuement creusé la Belette
découvre des os... « Ce sont les os de Bras-de-Fer ! » Et il advient
que deux messieurs, un colonel et le Dr de Frémicourt, passent par
là, « tenant à la main un grand marteau de géologue ». Ces mes-
sieurs achètent par avance tout ce que les entrailles de la Terre
pourraient livrer ! Ils font venir des soldats qui mettent au jour
d'autres os : « Le chien de Bras-de-Fer! » On l'aura compris, ce
sont des os de mammouth, puis des os de ptérodactyle. Le temps
des explications scientifiques commence ; nous en sommes au cha-
pitre 9 : la leçon va jusqu'au chapitre 36 - vingt-sept chapitres qui
révéleront aux soldats mobilisés pour les fouilles de sauvegarde
« l'apparition de la vie sur terre, le terrain primitif, les terrains ter-
tiaires» ... jusqu'aux alluvions modernes. Au chapitre 37, minuit
sonne. « Éteignons nos lumières, et prenons le repos nécessaire
pour continuer demain notre travail», non pour trouver d'autres
os, mais pour rendre à Maréchal « un champ avec un puits et prêt à
être labouré».
Les Mémoiresd'un chêne(Mangin, 1886) sont le récit d'une pro-
menade de cinq personnes dans la forêt de L'Isle-Adam : M. et
Mme R., leur fille, l'auteur du livre lui-même et son ami, spécialiste
de botanique. Pendant la promenade, on rencontre un obstacle ,
« un chêne énorme qui était là couché de tout son long». On dis-
serte sur les hommes qui ont abattu cet arbre pour servir (peut-
être ?) à la construction de quelque navire. La jeune fille demande
son âge : « Trois cent vingt ans. » D'autres questions fusent. « Soit,
mais ce n'est pas moi qui vais parler, continue le botaniste, c'est lui-
même, le chêne ; si vous aimez mieux, je parlerai en son nom,
comme s'il avait eu une âme et que cette âme eût passé en moi. » A
la fin, il est temps de manger, et les R. demandent à l'auteur de cou-
cher sur le papier ces mémorables explications du récit afin que
tout le monde puisse profiter de la leçon ...
Dans les intrigues variées de cette littérature scientifique roman-
cée, trois types de personnages se partagent la vedette :
- celui-qui-sait ou ceux-qui-savent : médecin ou naturaliste, ins-
tituteur, professeur (souvent à la retraite : « le bon M. de Saint-
Martin » pour Les Récréationsphysiques et Les Récréationschi-
miques);
- celui-qui-ne-sait-pas ou ceux-qui-ne-savent pas qui peuvent
être aussi bien des enfants que des adultes. Dans Les Aventuresdes
os d'un géant, ceux-qui-ne-savent-pas sont des paysans, puis des
soldats. Dans certaines éditions du Spectaclede la nature,le comte,
117
Savants et ignorants
la comtesse et le chevalier sont remplacés par un enfant, Amédée
(édition de 1803). Berquin s'adresse à Charlotte dans Le Jeune
Naturaliste (1860), mais à Mme de Croissy et à sa fille Émilie dans
Les Merveilles du firmament (édition de 1873). L'enfant à qui
Camille Schnaiter distribue Les Miettes de la science est un petit
Noir, Baby ; ainsi, même les plus rustres, les paysans, les soldats et
les «Nègres» peuvent absorber la science. Pourquoi pas le lecteur
lui-même?
- le troisième personnage, tout aussi capital que les deux autres,
est le narrateur. C'est celui qui est chargé d'organiser et de raconter
la rencontre entre celui-qui-sait et celui-qui-ne-sait-pas. Cette pré-
sence souvent implicite, prête à s'effacer, de l'auteur narrateur («je
suis là, mais je me retire pour laisser la place le plus vite possible à
celui-qui-sait») ne peut s'expliquer que si l'on se souvient que ces
romanciers vulgarisateurs ne sont pas, le plus souvent, de « vrais »
scientifiques. « En aucun cas, semblent-ils nous dire, nous ne nous
prenons pour les détenteurs du savoir. » Jean-Henry Fabre, malgré
sa qualité d'entomologiste, dans Le Livre d'histoires de l'oncle Paul
à ses neveux, garde ce statut de récitant, surtout quand il aban-
donne le champ habituel de ses observations. Au début d'Histoire
d'une bouchée de pain, Jean Macé se présente lui-même comme ce
troisième homme :
« J'entreprends, ma chère petite, de vous expliquer bien des
choses qu'on regarde en général comme très difficiles à
comprendre, et que l'on n'apprend pas toujours aux grandes demoi-
selles. Si nous parvenons, en nous y mettant à nous deux, à les faire
entrer dans votre tête, j'en serai très fier pour mon compte, et vous
verrez combien la science de messieurs les savants est amusante
pour les petites filles, bien que ces messieurs prétendent quel-
quefois le contraire. »
4. Encyclopidieset dictionnaires
L' Encyclopédieou Dictionnaireraisonnédes sciences,des arts et
des métiers,par une sociétéde gens de lettres,publiée, à partir de
1751, sous la direction de Diderot et d'Alembert, puis, à partir de
1765, sans d'Alembert et enfin sans Diderot pour le supplément du
libraire Panckoucke de 1776 à 1780, est devenue, pour tous, le sym-
bole de la volonté de toute une époque, celle ·des Lumières, de
«vulgariser» - c'est-à-dire « rendre accessible à tous» - les
connaissances scientifiques et techniques de ce temps-là. Son
132
Comment vulgarise-t-on?
importance (trente-cinq volumes au total), ses dates de parution (à
l'aube de la Révolution), la qualité de ses auteurs (La Condamine,
Daubenton, Montesquieu, Turgot. ..) ne doivent cependant pas
nous cacher ce qui témoigne de son rayonnement, mais aussi de ses
limites.
Avant cette réussite mémorable, il nous faut, en effet, mention-
ner, entre autres tentatives, celle de Thomas Corneille, dont le Dic-
tionnaire des arts et des sciences(2 volumes, 1694) connut de très
nombreuses rééditions jusqu'en 1731. Avant 1750 encore fleu-
rissent les dictionnaires en relation avec le jardinage ou avec la
matière médicale - c'est, de nouveau, le versant utilitaire de la vul-
garisation : l'introduction du très important Dictionnaire encyclo-
pédique des sciences médicales, plus connu sous le nom de
Dechambre(100 volumes, 1864-1889), signale même plusieurs Dic-
tionnairesportatifs dès avant le xvme siècle. Et comment oublier la
monumentale Histoire naturellegénérale et particulièrede Buffon
(36 volumes, 1749-1788), strictement contemporaine de !'Encyclo-
pédie et qui allait servir de base à d'innombrables abrégés au cours
du XIXe siècle ? Cette volonté de compiler une somme impression-
nante de connaissances était donc dans l'air: elle n'a pas débuté
avec !'Encyclopédie,et cette dernière n'y a pas mis fin, contraire-
ment à ce qu'espéraient d'Alembert et Diderot.
Énumérer tout ou partie des Dictionnaireset des Nouveaux Dic-
tionnaires, des Dictionnairesencyclopédiqueset des Dictionnaires
portatifs, des Encyclopédieset des Dictionnairespopulairesou pit-
toresquescontenant des sciences et des techniques deviendrait vite
lassant, d'autant que les titres en sont souvent très longs, au moins
jusqu'au milieu du XIXe siècle, comme si les auteurs éprouvaient
ainsi le besoin de définir au plus près, et au plus vite, leur projet.
L'inventaire et l'analyse de ces dictionnaires ou encyclopédies
nous confrontent cependant à plusieurs problèmes généraux de
nature différente que nous aborderons brièvement : celui du
domaine et du public qu'ils visent, celui des méthodes d'exposition
retenues, celui, enfin, que posent leur vieillissement et leur mise à
jour.
1. Problèmesde domaine et de public
Contours du sujet, publics ciblés, choix et nombre des auteurs
sont les trois élements qui apparaissent le plus souvent dans les
titres, comme en témoignent les quatre exemples suivants :
- Dictionnaire de médecine usuelle, hygiène des enfants, des
femmes et des vieillards,à l'usage des gens du monde, des habitants
133
Savants et ignorants
des villes et des campagnes,des chefs de famille et de grands éta-
blissements,des administrations,des magistratset des officiersde
policejudiciairechargésde se prononcersur des questionsde méde-
cine légale; enfinpouvantservirde guide à tous ceux qui se dévouent
au soulagement des malades, par une société de professeurs, de
membres de l'Académie royale de médecine, de médecins et de
chirurgiens des hôpitaux, sous la direction de Jean-Pierre Beaude
(lui-même médecin, un temps chroniqueur à La Presse),2 volumes,
1836-1849;
- Dictionnairedes sciencesnaturellesdans lequelon traite métho-
diquement des différentsêtres de la nature, considérés,soit en eux-
mêmes, d'aprèsl'état actuelde nos connaissances,soit relativement
à l'utilité qu'en peuvent retirer la médecine, /'agriculture, le
commerceet les arts,·suivi d'une biographiedes plus célèbresnatu-
ralistes,ouvragedestinéaux médecins,aux agriculteurs,aux manu-
facturiers,aux artistes,aux commerçantset à tous ceux qui ont inté-
rêt à connaître les productions de la nature, leurs caractères
génériqueset spécifiques,leur lieu natal, leurs propriétéset leurs
usages, par plusieurs professeurs du Muséum national d'histoire
naturelle et des autres principales écoles de Paris, an XII (1804),
chez Levrault (73 volumes en 1831);
- Dictionnaireclassiqued'histoire naturelle,par MM. A. Bron-
gniart, de Candolle, Drapiez, Flourens, Geoffroy Saint-Hilaire, A.
de Jussieu, Edwards, Latreille, Prévost et Bory de Saint-Vincent,
ouvrage dirigé par ce dernier collaborateur et dans lequel on a
ajouté, pour le porter au niveau de la science, un grand nombre de
mots qui n'avaient pu faire partie de la plupart des dictionnaires
antérieurs (1822-1831, 17 volumes);
- Dictionnaireportatif d'histoirenaturellecontenantl'histoire,la
descriptionet lesprincipalespropriétésdes animaux, des végétauxet
des minéraux avec un discoursphilosophiquesur la méthode de
conduireson espritdans l'étude de l'histoirenaturelle,ouvrageutile
aux naturalistes,aux physiciens,aux pharmacienset à toute per-
sonne qui passe sa vie à la campagne,par l'abbé Leclerc de Mont-
linot (1763, 2 volumes).
Le projet est généralement précisé dans des préfaces, « prospec-
tus » ou « discours préliminaires ». La mode de ces longues explica-
tions, lancée par le Discourspréliminaire(rédigé par d'Alembert) et
le Prospectus(rédigé par Didehlt) de l' Encyclopédie,a duré une
bonne partie du x1xc siècle, période pendant laquelle ce genre se
met véritablement en place. Ces textes contiennent, pour l'histo-
rien, les renseignements qui permettent de comprendre les volontés
134
Comment vulgarise-t-on?
- multiples - et les difficultés - nombreuses - rencontrées par leurs
auteurs.
La première idée qui en ressort est que ces dictionnaires ou ency-
clopédies ont très souvent mobilisé, pour leur rédaction, des
membres importants de la communauté scientifique. Outre les
exemples cités plus haut, comme le Dictionnaire de médecine
usuelle, de Beaude, œuvre « d'une société de professeurs, de
membres de l'Académie royale de médecine, de médecins et de
chirurgiens des hôpitaux », ou le Dictionnairedes sciences natu-
relles,dont le prospectus est rédigé par Georges Cuvier lui-même,
La GrandeEncyclopédie,inventaireraisonnédes sciences,des lettres
et des arts, sous la direction de Marcelin Berthelot (31 volumes),
grande œuvre de la deuxième moitié du x1xesiècle, est conçue par
« une société de savants et de gens de lettres » ; les deux volumes de
La Science,sesprogrès,ses applications,publiés sous la direction de
Georges Urbain et de Marcel Boll en 1933, ont rassemblé quarante
collaborateurs. Le Nouveau Dictionnaire des sciences et de leurs
applications,sous la direction d'Edmond Perrier et de Paul Poiré
(2 volumes, 1900-1903, réédité plusieurs fois), est fait avec« la col-
laboration d'une réunion de savants, de professeurs et d'ingé-
nieurs ». Edmond Perrier explique la nécessité de ce recours : « Ce
grand Dictionnairene devait avoir, au début, que deux auteurs,
mon savant collègue Poiré et moi. Nous reconnûmes bientôt que
notre œuvre gagnerait à ce que sa rédaction fût, en quelque sorte,
élargie. Il fallait, pour un tel travail, des compétences spéciales;
dire clairement et brièvement tout ce qu'il y a à dire sur une ques-
tion donnée de manière à apprendre au lecteur, sans grand effort
pour lui, tout ce qu'il doit en savoir suppose une connaissance du
sujet qu'une simple compilation ne peut donner. C'est pourquoi
chaque grande division de la science a été traitée par ce qu'on peut
appeler un " homme de la partie ". »
3. Problèmesd'actualisation
Un autre problème que doivent résoudre les auteurs des ouvrages
du genre encyclopédique est de rester en phase avec l'actualité
scientifique et technique. Bory de Saint-Vincent dénonce la lenteur
de parution du Dictionnaire de sciences naturelles dirigé par
Cuvier : « Il fut annoncé vers le commencement de 1816. Le vingt-
deuxième volume qui vient de paraître avec la fin de 1821 n'atteint
que la lettre M exclusivement, c'est-à-dire près du tiers présumable
de la totalité de l'ouvrage.» Les sciences et les techniques avancent
si vite que les délais de composition périment les connaissances.
Bory de Saint-Vincent porte ainsi un jugement sévère sur le Dic-
tionnaire raisonné universel d'histoire naturelle de Valmont de
Bomare (dont certains considèrent pourtant qu'il a fait beaucoup
pour l'attrait et la diffusion des sciences naturelles au xvme siècle):
« Compilation surannée, faite sans choix et sans discernement, il ne
peut être aujourd'hui d'une grande utilité en histoire naturelle ...
Quand Valmont de Bomare [le] composa, la nomenclature n'était
pas fixée, on ne sentait même point l'importance de sa précision et
nulle règle n'y était introduite; l'auteur ne pouvait asservir la
marche de son essai qu'au langage le plus impropre, formé de dési-
gnations vulgaires, arbitraires et barbares.»
1. Court ou confirences?
Rien n'tst moins évident, avant la seconde moitié du x1xesiècle,
que la distinction entre le cours magistral destiné à des étudiants
pour qui un diplôme attestera de l'acquisition de connaissances
programmées et la conférence à laquelle un public curieux peut
avoir librement accès. Les cours de chimie de Rouelle au Jardin du
Roi, vers 1740, étaient suivis par des amateurs qui s'appelaient
Jean-Jacques Rousseau ou Diderot, aussi assidus et attentifs que
Lavoisier lui-même. Un siècle plus tard, les leçons de Jean-Baptiste
Dumas à la Sorbonne étaient appréciées autant pour l'éloquence du
professeur que pour la matière qu'il exposait. Et, à la même
époque, mais à Bordeaux, un autre chimiste, Auguste Laurent, se
plaignait Que son enseignement fût surtout suivi par des dames du
monde à la recherche de distractions. Essayons de cerner quelques
caractéristiques de cette vulgarisation orale qui, plus que toute
autre forme de vulgarisation, hésite entre la distraction et l'in-
téressement, le sérieux et le pratique.
Le véritable instigateur du genre est, sans aucun doute, Bernard
Palissy, plus connu pour ses talents de céramiste (voir p. 44). Vers
1670, le chimiste Nicolas Umery a été l'un des premiers à relancer
la voie d'une véritable mise en scène de sa science. Installé rue
Galande, sur la montagne Sainte-Geneviève, « son laboratoire, écrit
Fontenelle, était moins une chambre qu'une cave, et presque un
antre maaique éclairé de la seule lueur des fourneaux ». Fontenelle
précise aussi que « l'affluence du monde était si grande qu'à peine
avait-il dt la place pour ses opérations ». Dans le public, on note la
présence de quelques sommités scientifiques ainsi que des « dames
149
Savants et ignorants
qui, entraînées par la mode, avaient l'audace de venir se montrer à
des assemblées si savantes [...] et des pensionnaires [... qui étaient
là] pour étudier la chimie». L'attraction majeure des cours de
Umery était une nouveauté chimique à base de phosphore, une
sorte de volcan artificiel qui stupéfiait l'auditoire. Et Umery en
profitait pour vendre quelques-unes de « ses préparations à base de
blanc d'Espagne [car] il était seul alors dans Paris qui possédât ce
trésor».
2. Organisationet organisateurs
Une cc~nférence,quelle qu'elle soit, suppose une initiative, une
organisation : « quelqu'un » doit se charger de trouver le conféren-
cier, une salle, choisit (avec plus ou moins d'arrière-pensées) les
151
Savants et ignorants
thèmes qui pourront intéresser un public, lequel devra être averti
par voie d'annonce.
Nous l'avons vu avec Palissy, Umery ou Nollet, ces conférences
sont d'abord liées à un lieu, le cabinet de physique et d'histoire
naturelle, dont nous parlerons plus loin. C'est dire si elles sont bien
autre chose que de simples discussions ! Elles témoignent, d'une
certaine manière, de l'abandon d'une science scolastique - qui ne
serait que parole - au profit d'une science des objets, une science
expérimentale. Les premiers « organisateurs » sont donc indirecte-
ment les possesseurs de cabinet, les nobles et les bourgeois. A la dis-
parition des cabinets, avec la Révolution, ce travail d'intendance
est assuré par des personnes ou surtout des « sociétés » les plus
diverses dont il ne peut être question de faire un inventaire exhaus-
tif. Nous nous contenterons de passer en revue quelques « cas de
figure » qui nous paraissent typiques.
Rares sont, au x1xesiècle, les institutions officielles spécialisées,
pour ainsi dire, dans la vulgarisation des sciences et des tech-
niques ; celle-ci relève, la plupart du temps, d'associations héritières
de la Société philomatique fondée en 1788 par Alexandre Bron-
gniart, et qui avait réuni de nombreux savants rendus célèbres par
leurs activités sous la Révolution. Cette société fut relayée par de
nombreuses autres. La plus importante est sans conteste la très
dynamique Association polytechnique, fondée en 1830, dans
laquelle on retrouve des scientifiques issus de l'École polytechnique
que nous avons déjà rencontrés, unis par leur volonté de « faire une
guerre acharnée à l'ignorance » : Arago, Bertrand, ~ynaud ... Son
succès est tel qu'elle doit faire appel, pour ses cours, à des profes-
seurs extérieurs à l'École polytechnique, ce qui a pour conséquence
de provoquer une scission quand ces « étrangers » sont plus nom-
breux que les professeurs issus de la maison mère. Ces professeurs
« étrangers » estimant ne pas avoir assez de pouvoir fondent à leur
tour l'Association philotechnique. Ces deux sociétés essaiment dans
toute la France et ont de nombreuses imitatrices : la Société philo-
technique, l'Association polytechnique de Marseille, la Société
d'émulation de Cambrai, la Revue Ampère, les conférences de la
rue d'Arras, organisées par les groupes plutôt anarchisants et sui-
vies de près par des inspecteurs de police (on y donne, dans les
années 1875, des conférences sur le darwinisme) ... Des conférences
sont inaugurées à Toulouse en mars 1865: la conférence inaugurale
est de M. Charles Musset qui a commenté en naturaliste La Cigale
et la Fourmi, de La Fontaine.
A sa mort, le 2 janvier 1879, le négociant Aimé-Samuel Fomey
152
Comment vu/garise-t-on?
avait léguê à la ville de Paris l'importante somme de deux cents
mille fran1~s.Ce legs était destiné, selon le testateur, à« une œuvre
d'éducaticjn populaire gratuite et laïque». Le conseil municipal
s'arrêta sur« le projet de créer, sur un type absolument nouveau,
une biblibthèque professionnelle d'art et d'industrie que les
ouvriers plarisiens pourraient venir consulter pour se perfectionner
dans leur profession ». Ainsi, le 1ermars 1886, fut inaugurée la
bibliothèque Fomey dans un local dépendant d'une école commu-
nale, en plein faubourg Saint-Antoine, l'un des principaux centres
de l'activité industrielle de Paris. Mais très rapidement, il apparaît
que, selo111 les décideurs eux-mêmes, « il ne suffit pas d'avoir une
bibliothèque, il faut savoir s'en servir, il faut que le travailleur,
parmi les matériaux qui sont placés sous sa main, sache reconnaître
et choisir parmi ceux qui lui conviennent, apprécier le parti qu'il
pourra tiirer de chacun d'eux et juger de l'application qu'il en
pourra faire». Or, pour atteindre cet objectif,« les indications et les
conseils du bibliothécaire, quels que soient son zèle et l'étendue de
ses connaissances, ne sauraient être que sommaires et ne peuvent
répondre à cette nécessité que dans une mesure insuffisante ». Dès
lors, les 01rganisateursde la bibliothèque Fomey « ont été amenés à
instituer, avec le concours dévoué d'ingénieurs, d'artistes et d'in-
dustriels, des conférences publiques, accompagnées de productions
de tablea1lxou de spécimens, de projections, d'expériences, et desti-
nées à d•&velopperen même temps qu'à éclairer l'enseignement
donné pair le livre». Le programme de chaque série des conférences
sur la scic:mceet l'art industriel est souple, mais parfaitement ciblé :
il doit êtire toujours « assez varié pour comprendre une étude des
différentelSindustries parisiennes en insistant plus particulièrement
sur celles qui ont leur centre au faubourg Saint-Antoine ou dans son
voisinage ». Le contenu de chaque étude est lui-même très précis :
en les traitant tour à tour, soit dans leur ensemble, soit dans l'une
de leurs parties, trois points de vue seront pris en compte, un point
de vue hilstorique (inventions, origines, usages dans les différents
pays et a111x différentes époques), un point de vue technologique
(procédés1anciens, procédés actuels, applications des découvertes
modeme11,transformations et perfectionnements) et un point de
vue écon10mique (statistique, salaires, exportations, moyens pra-
tiques de lutter contre les concurrences étrangères). Comme dans le
cas des cc~nférences de l'Association polytechnique, ces conférences
ont donc bien pour but l'ouverture culturelle tout autant que l'ins-
truction •~es « oubliés » de la scolarisation.
La société Franklin, qui développe ses actions autour du livre
153
Savants et ignorants
dans le cadre des bibliothèques populaires, propose aux biblio-
thèques des « animations » intitulées « lectures populaires », dont
on conseille de les faire porter sur des livres scientifiques. Dans ce
projet, on ne peut guère savoir si l'objectif prioritaire est de déve-
lopper les capacités de lecture en utilisant la motivation pour les
sciences ou de populariser ces mêmes sciences. Dans de nombreux
numéros du Bulletin de la société Franklin, cependant, on insiste
sur le fait que l'activité des bibliothèques populaires doit être
complétée par de véritables conférences faites par des professeurs,
mais aussi des médecins, des savants, sur des sujets variés et,
notamment, sur les sciences et sur « les procédés ingénieux que
l'homme a su trouver pour tirer parti de ce qui l'entoure».
Dans le même ordre d'idées, Camille Flammarion estime que les
conférences populaires sont seules capables de faire franchir l'obs-
tacle de la lecture, mais aussi, par le contact direct avec le profes-
seur, de mieux répondre aux questions. Il est, personnellement, très
satisfait d'ajouter cette corde à son arc de vulgarisateur, si l'on en
juge par le commentaire qu'il fait de son engagement, en 1865, à
l'école Turgot : « Il me sembla que je pouvais faire un peu plus
encore et ajouter la parole aux écrits. »
Les Conférences sur la science et l'art industriel de la biblio-
thèque Fomey ont existé pendant une dizaine d'années; les Confé-
rences de l'Association polytechnique ont lieu l'été pour préparer
les cours d'hiver pendant plusieurs dizaines d'années, les Confé-
rences hebdomadaires à la gare Saint-Jean de Bordeaux, quant à
elles, n'ont été organisées par la Compagnie des chemins de fer du
Midi que pendant les hivers 1867 et 1868 et n'étaient destinées,
semble-t-il, qu'au personnel de la compagnie. Malgré leur faible
durée de vie et leur public restreint, elles n'en sont pas moins fort
intéressantes par les ambitions de la société dont témoigne leur
organisation. G. Simon, sous-directeur de l'exploitation de la
compagnie, les explicite dans son discours d'ouverture:« Un mou-
vement heureux s'opère en ce moment dans toute la France en
faveur de l'instruction générale : cours publics de toutes natures,
pour tous les âges, ouverture de bibliothèques, de collections scien-
tifiques sont à l'ordre du jour[ ...]; la compagnie tient à honneur de
seconder ce mouvement, [car] elle établira alors entre elle et son
personnel une communion que de nombreuses institutions ont
assurément déjà créée, mais qu'elle désire plus intime encore. [...]
C'est ce désir manifesté depuis lontemps par notre aimé directeur
que nous réaliserons un jour. » Pour ce faire, quelques conférences
sont organisées avec, pour objectif majeur, de préfigurer un cours
154
Comment vulgarise-t-on ?
d'adultes. Après la fin de l'hiver 1867, son discours de clôture se
termine pJlr les propos suivants:« Vous avez compris que l'homme
qui travaiUe de ses mains gagne au développement de son intel-
ligence, qt~e l'ouvrier habitué à réfléchir, à observer est bientôt plus
utile à lui-niême et à la société que l'ouvrier illettré. Au revoir, puis-
sions-nou$, aux premières longues soirées du prochain hiver, nous
trouver d~ nouveau tous réunis et donner une fois de plus le salu-
taire exemple de savants, de patrons et d'employés cherchant en
commun ]lebien et glorifiant l'amour de l'étude, de la morale et du
travail.»
Nous retrouvons cette volonté, intermédiaire entre la philanthro-
pie et l'inltérêt économique de certains patrons, dans le cas de la
Société d'létudes d'histoire naturelle de Montceau-les-Mines, alias
La Physi~phile, néologisme audacieux signifiant à peu près l' « amie
de la nat\llre ». Créée en 1888 avec le soutien de la Compagnie des
mines de Blanzy, rien, dans ses titre ou sous-titre, ne semble a priori
la distingµer de l'une des nombreuses sociétés savantes locales.
Pourtant !'article premier de ses statuts est clair: cette « société
s'efforcera de développer le goût des sciences en procurant à ses
membres des distractions à la fois utiles et agréables, telles que :
excursion:&,cours, conférences, expériences, etc. » ; elle n'a donc pas
pour but de faire avancer la science par ses travaux d'amateurs
éclairés. IUie est tournée vers le grand public, vers son éducation :
elle fait bien œuvre de vulgarisation des sciences. Il existe peu de
traces de$ activités de la société: le premier bulletin, datant de
1893, sipale que, « dans le courant de 1892, des conférences sui-
vies ont ~lté organisées et se font régulièrement chaque semaine ...
des pupilles y assistent et reçoivent de leurs aînés les premières
notions qui leur permettent d'acquérir, sans trop de difficultés, les
connaissainces nécessaires pour devenir plus tard des membres
utiles à lai société à laquelle, par une légitime reconnaissance, ils se
dévouero1nt à leur tour tout entiers ». L'une des conférences est faite
par M. Dupont de Dinechin, ingénieur aux mines de Blanzy et pré-
sident de La Physiophile, sur« l'oxygène, son rôle dans les trans-
formatiOilS des matières organiques ». La Physiophi/e a, enfin, les
honneurs de ... !'Exposition universelle de Chicago en 1893. En
effet, elhl fait partie des « associations dues à l'intitiative des
ouvriers, administrées par eux ou subventionnées par la compa-
gnie », à ,côté des « institutions patronales fondées et gérées par la
Compagnie des mines de Blanzy, comme la caisse de secours, le ser-
vice médical ou les caisses de retraite, ou les ouvroirs des jeunes
filles», eltc. On apprend que La Physiophi/e est entrée dans sa
155
Savants et ignorants
période d'activité en 1888 « grâce à l'inépuisable générosité du pro-
priétaire de la compagnie ». Sans surprise, à son comité d'honneur,
on retrouve le conseiller général, maire de Saint-Vallier, le gérant,
l'ingénieur en chef, le chef du service médical, sans oublier frère
Aquilin, directeur des écoles de la compagnie, et l'abbé Brintet,
curé-archiprêtre de Montceau-les Mines. Très marquée par sa fon-
dation dans le contexte social de la fin du x1xesiècle, La Physiophi/e
est emportée par les luttes sociales : au début du xxe siècle, le pater-
nalisme patronal est devenu moins supportable. Elle renaîtra, pour-
tant, en 1924, sous une forme plus classique de société locale desti-
née à mettre en évidence le patrimoine local (flore et archéologie
essentiellement). Sous la forme de « patronage ordinaire » ou de
« patronage combiné avec des associations ouvrières», d'autres
compagnies dans d'autres régions, comme la Société industrielle de
Mulhouse (bâtie sur le même modèle social que La Physiophile),
ont ainsi joué un rôle non négligeable dans la vulgarisation des
sciences et des techniques. Et, de ce point de vue, il y a peu de dif-
férences entre ces actions menées par les patrons et les tournées de
conférences hygiéniques organisées par de nombreux médecins
hygiénistes. Le Dr Billaudeau, par exemple, membre de la Société
d'hygiène de Soissons qui donne, entre 1870 et 1880, des Confé-
rences à la Société d'horticulture de Soissons à l'usage des ouvriers
agricoles ou des conférences sur « l'hygiène populaire à l'usage des
instituteurs, des ouvriers et des gens du monde», écrit: « Nous
vivons dans un siècle où le besoin de la diffusion des sciences se fait
généralement sentir et où chacun aspire à élargir le champ de ses
connaissances. [...] Ce besoin s'accentue surtout chez celui qui n'a
pu prendre qu'une faible part au banquet des sciences, chez l'ou-
vrier. Ce désir de l'ouvrier est digne de respect, et il l'honore. Une
tâche incombe à ceux qui, plus heureux, ont pu amasser quelques
trésors dans ce riche domaine des connaissances humaines, cette
tâche, c'est de donner satisfaction à ce désir si légitime de
l'ouvrier.» Paternalisme, ouvriérisme, utilitarisme, culture géné-
rale, toutes ces catégories se dissolvent devant l'ampleur de la tâche
accomplie par tous les conférenciers populaires. Revenons à Paris.
Dès la première livraison de sa revue Cosmos,en avril 1851, l'abbé
Moigno nous fait part de son vœu « de faire marcher de front avec
l'enseignement écrit un enseignement plus efficace encore, celui qui
vient par les sens de l'ouïe et de la vue». Et ce vœu, continue-t-il,
«vase réaliser à son tour, [car] M. de Monfort met dès aujourd~hui
à notre disposition une des salles les plus vastes et les mieux situées
de la capitale, boulevard des Italiens, n° 8, la salle du Cosmos,avec
156
Comment vulgarise-t-on?
tout ce qll(iest nécessaire pour ouvrir immédiatement un cours qui
embrasseira l'ensemble complet des phénomènes de la nature repro-
duits ou :montrés aux yeux, expliqués ou dévoilés à l'intelligence
dans leur nature intime et dans leurs causes, autant du moins que
les conquietes de la science actuelle le permettront ». Et, tout natu-
rellement! « les programmes de cet enseignement seront publiés
dans notrie prochain numéro». C'est en vain que nous chercherons
ce programme. Le savant abbé devra attendre encore avant de pou-
voir réali$er ses projets : nous le retrouverons plus tard, quand ses
conférencies seront accompagnées de projections.
D'autres réalisations ont laissé des traces plus précises, avant
même la •chute de l'Empire. Le 7 mars 1864, on inaugurait à la Sor-
bonne le!I Soirées littéraires et scientifiques. Les Conférences de
l' Associatlion scientifique de France, créées par l'astronome Le Ver-
rier, répo1ndaient ainsi à une circulaire du ministère de l'instruction
publique en date du 5 octobre 1863, dans laquelle Victor Duruy
invitait les professeurs des facultés à faire des cours publics dans les
villes de leur ressort. La foule, évidemment différente quant à sa
composidon de celle des auditeurs de conférences populaires à
visée plus strictement pédagogique, était si compacte que le repor-
ter de la 1revueCosmosne put pénétrer dans le grand amphithéâtre,
bondé, mialgré son invitation spéciale et sa place réservée! Le suc-
cès de ceUe première conférence du physicien Jamin (1818-1886)
fut d'ailleurs tel qu'il dut la répéter trois jours plus tard. Et ce suc-
cès des Soirées fut durable... Les séances commençaient à huit
heures dtl soir; on n'y était admis qu'avec une carte d'entrée qu'il
fallait demander par écrit au sécrétaire du comité des Soirées. Une
lettre de .Louis Pasteur à la princesse Mathilde, le 14 décembre
1867, té1noigne du caractère officiel de certaines de ces confé-
rences:
« Votrc1Altesse m'a paru si désireuse de se donner le spectacle de
quelques••unes des merveilles du monde des infiniment petits [Pas-
teur, on le sait, fréquentait le salon de la princesse] que j'ose
prendre lia liberté de l'informer que je dois faire jeudi prochain la
première des conférences scientifiques des soirées de la Sorbonne
sur un s~jet où j'essaierai précisément de mettre en lumière une de
ces merv1eilles-là.Ma leçon aura pour objet le vinaigre et la conser-
vation des vins. J'ai pensée que Votre Altesse, instruite de cette cir-
constancè, voudrait peut-être faire aux soirées de la Sorbonne
l'honneut que fit l'impératrice, il y a dix-huit mois, aux conférences
scientifiques qui eurent lieu dans la salle du Conservatoire de
musique.
157
Savants et ignorants
» Le public de la Sorbonne est un public choisi. On n'est admis
que sur présentation de cartes personnelles. Il y a de mille à mille
deux cents auditeurs. Toutefois je n'aurais pas osé faire à Votre
Altesse une pareille invitation sans aller prendre l'avis du ministre.
M. Duruy m'a dit qu'il serait ravi de l'acceptation de Votre Altesse
et qu'il se ferait un honneur et un devoir d'aller vous recevoir et de
vous introduire. Ma démarche, Princesse, est bien hardie. Mais le
sentiment qui me l'a suggérée l'excusera à vos yeux. Je n'ai pris
conseil que de la curiosité que Votre Altesse a manifestée mercredi
soir et du plaisir que j'aurais d'y répondre en quelque chose.»
3. Conférenciers,programmes,questionsde style
Il suffit d'un choix très arbitraire des titres de quelques-unes de
ces conférences et les noms de quelques-uns des conférenciers pour
donner une image de cette activité innombrable.
L'intérêt des conférences faites à la gare de Bordeaux, sur le lieu
de travail des auditeurs, tient à l'ensemble des sujets qui y sont trai-
tés. Une harmonie s'en dégage: des sujets de culture scientifique
générale, dirions-nous (« De la fécondation des végétaux supé-
rieurs», « Le règne minéral», « Le système solaire»), alternent
avec des sujets proprement techniques, liés, par la lettre ou par l'es-
prit, à l'activité de la compagnie(« De la navigation à vapeur» ou
« Le câble transatlantique»), et avec des sujets traitant du corps
humain à la fois du point de vue hygiéniste (« Le gaz pernicieux du
foyer») et du point de vue théorique (conférence tenue par Paul
Bert, qui, déjà, s'intéressait aux problèmes pédagogiques). Notons
aussi la personnalité des conférenciers et les thèmes qu'ils
abordent:
« De quelques propriétés générales des corps», J.-J. B. Abria,
doyen de la faculté des sciences de Bordeaux ;
« De la navigation à vapeur», F. Rancès, ingénieur civil attaché à
la Compagnie des chemins de fer du Midi ;
« De l'air, propriétés physiques», Dr J. Jeannel, professeur à la
faculté de médecine de Bordeaux ;
« Le câble transatlantique », E. Cézanne, ingénieur des Ponts et
Chaussées attaché à la Compagnie des chemins de fer du Midi ;
« De l'air, propriétés chimiques», Dr J. Jeannel, professeur à la
faculté de médecine de Bordeaux ;
« Le règne minéral », V. Raulin, professeur à la faculté des
sciences de Bordeaux ;
« De l'eau au point de vue physique, chimique, mécanique et ali-
158
Comment vulgarise-t-on?
mentaire I»,L. O. de Lacollonge, ancien élève de l'École polytech-
nique;
« Le sy:$tèmesolaire», G. Lespiault, professeur d'astronomie à la
faculté dc~ssciences de Bordeaux ;
« Le garzpernicieux du foyer», E. Royer, membre de l'Académie
des sciençes, des belles-lettres et des arts de Bordeaux ;
« La cllaleur et l'humidité à la surface de la terre», J.-B. Dujar-
din, prot~sseur de géographie commerciale à la Société philo-
matique üe Bordeaux ;
« De la fécondation des végétaux supérieurs », A. Clavard,
membre de la Société linnéenne de Bordeaux ;
« La mlachine humaine - Équilibre de la matière», P. Bert, pro-
fesseur à fa facuité des sciences de Bordeaux ;
« Voyage de la lumière à travers les cristaux», J.-J. B. Abria,
doyen dei la faculté des sciences de Bordeaux ;
« La miachine humaine - Équilibre de la force», P. Bert, profes-
seur à la faculté des sciences de Bordeaux ;
La de1lxième année se termine par deux sujets plus écono-
miques : « Le libre-échange en Angleterre et en France » et « La
prévoyanice et la charité».
DICTIONNAIRE
POPULAIRE
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PAHIS
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GASTON TISSANDIER
VINGT-DE Xlf.ME H €E
t8•4 .
•rc ,utJU l tU O ' TIU !
PAR.18
G. MA , ' 0 1 , ÉDITEUR
l 18 RAIRE DE l ' AC AD t Il I E DE Il t O E CI N 1:
Le Monde et ù 1Science, une encyclopédie par fascicule dans les années 1920 (Médiathèque de la
Cité des sciences et de l'industrie) .
Page ci-contre : couleurs et photo en première page (coll. Jean Jacques et Daniel Raichvarg).
N' 755
l 5 FÉVRIER l9l4
1 fr. 25
Est-ce
le visage
des
trains de • 1
demain?
(Voit ~ae I)
4. Conférencesà la TSF
Dès 1923, dans un article écrit pour L'Iilustration (3 mars), puis,
trois ans plus tard, dans son Initiation à la TSF, le bon vulgarisa-
teur Baudry de Saunier estime que « les mœurs subiront des modifi-
cations considérables » grâce à la « sans-fil », cette « informatrice
insaisissable qui pénètre aussi vite dans les taudis que dans les
palais ». De la même manière que « les meilleurs artistes de l'Opéra
ou de !'Opéra-Comique seront aux ordres » de tout le monde, « le
rôle que peut jouer la TSF dans l'instruction populaire est véritable-
ment énorme ... on conçoit fort bien des cours généraux sur la phy-
sique, la chimie, l'électricité ou toute autre matière».
Si« les modalités de cet enseignement par correspondance n'im-
166
Comment vu/garise-t-on ?
portent pas1ici » pour Baudry de Saunier - car il ticmt « seulement à
indiquer le grand bienfait social que représente la TSF » -, il ne fau-
dra effectivement guère attendre pour retrouver la vulgarisation des
sciences à travers les ondes. « Vulgarisation » plus que véritable
«cours» r1ldiodiffusé: le premier à se lancer dan:s l'expérience est
Georges Cc)lomb, comme il avait été l'un des premiers à vulgariser
la découve1rtedes frères Lumière dans Le Petit Français illustré, en
1896. Malgré son passé - il avait d'abord enseigné les sciences natu-
relles au lyc:éeCondorcet, à Paris, puis à la Sorbom:1e-, c'est plus en
vulgarisateur scientifique qu'en professeur que Colomb aborde la
radio, à l'âge de soixante-huit ans: il sera le principal conférencier
scientifique de Radio-Paris de 1924 à 1939. Col,omb alias Chris-
tophe fut 1nême proclamé, en 1933, « prince du micro», tant ses
causeries bebdomadaires sur l'actualité scientifique emportaient
l'enthousiasme des auditeurs. Ses premières émissions radio-
diffusées oint été réunies en volume en 1930: En flânant à travers la
science. EUes portent la marque de leur auteur : des plaisanteries,
des petites histoires à fond scientifique, des anec:dotes, des méta-
phores, deia détours, au service de la « science au quotidien », un
style et des moyens qui avaient fait leurs preuves dans Le Petit
Français iNustré, dans Le Soleil du dimanche, dans Rie et Rac ou
dans ses biandes dessinées, encore plus célèbres qu'il signa sous le
pseudonynle de Christophe : Le Savant Cosinus ou Le Sapeur
Camembet. A ses qualités, déjà grandes, de « metteur en scène » de
la science, il faut sans aucun doute ajouter la quallité de « metteur
en onde » et celle, non moins importante, d' « acteur radio-
phonique >1• : Colomb-Christophe avait certainement, sans qu'il
nous soit facile aujourd'hui d'en juger, une voix radiophonique en
diable.
Choisir c:lesexemples qui témoignent de son talcmt est, là comme
ailleurs, difficile. Prenons deux de ses premières causeries : « Les
bêtes calomniées» et « Une association végétale de secours
mutuel ». l,e thème de la première est évident à la lecture du titre :
il s'agit de montrer que des bêtes qui semblent nuisibles peuvent
jouer un r1Meimportant dans la nature. Au nombre de celles-ci, le
crapaud. •KLe crapaud est laid et il est obèse »... Après avoir
démontré 1que,« en somme, malgré sa laideur, c'e:st une bien sym-
pathique !bête que le crapaud», Christophe eatime que « l'on
comprend qu'elle ait inspiré les poètes et les chansonniers». Puis il
continue ainsi:
« Vous connaissez tous la chanson que chantent avec entrain tous
les boy-scc)uts de France.
167
Savants et ignorants
Je vous la chanterais bien, au moins en partie, si vous vouliez me
promettre de ne pas croire que j'aie la moindre prétention de l'art
du chant ... Après tout, la campagne a besoin d'eau. Allons-y donc!
La nuit est limpide, Pour nous point de fêtes
L'étang est sans ride, Dieu seul, sur nos têtes,
Dans le ciel splendide, Sait qu'il nous fit bêtes
Luit le croissant d'or. Et non point méchants.
...
( )
Alors, dans la vase, Notre peau terreuse
Ouvrant en extase Se gonfle et se creuse,
Leurs yeux de topaze, D'une bave affreuse
Chantent les crapauds ! Nos flancs sont lavés
Ils disent : « Nous sommes Et l'enfant qui passe
Haïs par les hommes, Devant nous s'efface
Nous troublons leurs sommes Et, de loin, nous chasse
De nos tristes chants. A coup de pavés. »
3. La vulgarisationpar l'image
1. L 'im41ge
dans la livres et les revuesde vulgariisation
2. Les v11es
sur verre
L'histoire des « projections » et des « vues !;ur verre » - qui
appartiennent à l'archéologie de la vulgarisation audiovisuelle - a
été longuement racontée par Jacques Perriault : le lecteur curieux
pourra y trouver tout ce qu'il nous est impossible de détailler ici.
Nous laisserons donc de côté les premières tentatives d'utilisation
des lanternes magiques à des fins éducatives, alors qu'elles ont fait
leur début vers 1640 (le premier texte traitant des projections lumi-
neuses est dû au jésuite allemand Athanase K.irc:her).Nous laisse-
rons aussi de côté les premières utilisations de c:eslanternes à des
fins de spectacle (les fantasmagories de Robertson à l'époque de la
Terreur) et nous commencerons ce chapitre vers les années 1860,
au moment où, en la personne de l'abbé Moigno, ce nouveau
moyen de propagation du savoir scientifique a trouvé son apôtre.
Dans sa revue Les Mondes,Moigno nous décrit les soirées organi-
sées en 1863 par un certain Robin, dans une salliedu boulevard du
Temple, à Paris. Ces spectacles, qui comportent la projection lumi-
neuse de tableaux peints, ne sont encore que très partiellement
scientifiques. Mais, dès 1864, on peut suivre à Pa.ris plusieurs cours
ou conférences illustrés par cette nouvelle technique: ces cours et
ces conférences ont lieu au Conservatoire des arts et métiers, dans
des salles de la rue Cadet, de la rue de la Paix, <>ude la rue Bona-
parte. C'est dans cette Salle d'encouragement de l'industrie (qui
existe encore en 1990) que l'abbé Moigno exerce son apostolat vul-
garisateur.
Plus tard, en 1873, alors qu'il a émigré vers la Salle du progrès,
rue du Faubourg-Saint-Honoré, un prospectus nious renseigne très
complètement sur les buts et les réalisations du savant vulgarisa-
teur.
« Ce que M. le Ministre de l'instruction publique n'aurait pu
177
Savants et ignorants
créer qu'après un vote régulier de l'Assemblée législative et une
lourde surcharge imposée au budget de l'État ; ce que M. le Préfet
de la Seine aurait à peine osé proposer au conseil municipal de
Paris, dans les circonstances actuelles, un pauvre prêtre, apôtre
ardent du progrès, n'a pas hésité à le tenter.
» M. l'abbé Moigno, au sein d'un grand amphithéâtre, dans des
leçons ou des excursions de tous les soirs, fait passer sous les yeux
de ses auditeurs, d'une manière à la fois sérieuse et intéressante,
tout ce qui dans le vaste domaine de la science, de l'industrie, des
beaux-arts, des arts, doit être connu, apprécié, appris de la masse
intelligente des populations ... Tous les faits ou phénomènes de la
nature, tous les instruments ou appareils de la science, de l'indus-
trie et des arts, tous les chefs-d'œuvre du dessin, de la peinture, de
la sculpture, de l'architecture, projetés très agrandis à la lumière
électrique ou oxhydrique [viennent] tour à tour s'épanouir sous le
regard charmé des spectateurs. M. l'abbé Moigno aspire à former
une armée de dix mille tableaux reproduits sur verre transparent
par la photographie.
» Les prix d'entrée sont peu élevés: cinquante centimes, un
franc, deux francs; et le fondateur s'est engagé à mettre un certain
nombre d'entrées gratuites à la disposition des œuvres communales
ou paroissiales, les sociétés de secours mutuel, les cercles de soldats
ou d'ouvriers, les confréries, etc. Chaque soir, avant et après le sujet
principal : énumération, par l'abbé Moigno, des nouvelles du jour ;
exposé des théories et des découvertes, avec expériences, appareils
ou tableaux à l'appui ; série de vues ou de tableaux projetés à la
lumière électrique ou oxhydrique. »
3. Le cinémascientifiqueet le documentaire
Savants et ignorants
glie, Frédéric Joliot, etc: - ce qui était aussi une innovation allant
dans le sens des présentatiohs du palais de la Découverte, grand
laboratoire lui-même où, par des reconstitutions historiques et
contemporaines, les concepteurs essayaient de redonner autant que
possible l'atmosphère des laboratoires.
Painlevé ne se contenta pas de réaliser des films. En 1938, huit
ans après l'Institut de cinématographie scientifique, il fonda Les
Amis du cinéma documentaire en janvier 1938, en compagnie de
plusieurs réalisateurs, dont l'alpiniste Marcel Ichac et Paul Coze,
responsable de la formation des scouts, co-auteur de livres sur les
Peaux-Rouges avec René Thévenin.
Ainsi, il aura fallu une vingtaine d'années pour que les extra-
ordinaires potentialités que l'audiovisuel naissant offrait à la diffu-
sion de la science - et à l'enseignement - soient explorées. Ces vingt
ans s'expliquent, selon Painlevé, par le fait que le cinéma apparais-
sait trop comme un nouveau spectacle. L'aspect distrayant, pour-
tant très souvent invoqué par les vulgarisateurs, a paradoxalement
joué, cette fois-ci, le rôle de frein. Pourtant, dès 1910, à Bruxelles, le
1erCongrès de cinématographie émettait des vœux qui ne datent
guère:
« 1. Il est désirable que les éditeurs dirigent leurs investigations et
orientent une partie de leur production vers les sciences et leurs
applications directes au commerce et à l'industrie.
» 2. Il est désirable que soient entreprises des études sur la psy-
chologie du cinématographe, en vue de donner une base et une
direction aux études pédagogiques sur l'enseignement par le ciné-
matographe. »
Et ce n'est que dans les années trente que le premier de ces vœux
est suivi d'effets, lorsque le documentaire de première partie
acquiert toute son importance, avant de disparaître dans la tour-
mente de la Seconde Guerre mondiale.
Toutes ces réalisations cinématographiques remarquables ou
oubliées n'ont été rendues possibles que par la constitution de véri-
tables équipes. Si le réalisateur Étienne Lallier débute par le « vrai »
cinéma, si Marc Cantagrel maîtrise la science et les idées pédago-
giques, ils s'adjoignent toujours un technicien. Les films de l'UF A
et ceux de la Pathé sont signés à la fois par un scientifique et un
technicien. Mais ce n'est pas toujours le cas, et certains scienti-
fiques qui se sentent exclus de ce nouveau moyen de communica-
tion se plaignent que « les metteurs en scène sont encore trop
souvent des littéraires qui n'aspirent qu'à la production roman-
cée» ...
192
Comment vulgarise-t-on?
Enfin, sans qu'il soit bien sûr possible d'en faire l'inventaire, Les
Actualitéscinématographiquesde Paramount-Actualités,Pathé-Jour-
nal ou Éclair-Journalsont déjà à la recherche du spectaculaire et du
sensationnel. Témoin ces sujets parmi d'autres : •t<L'interview d'un
savant, M. Révélis, qui affirme, avec une assurance qui surprend
chez un savant, avoir découvert le microbe du ca:ncer et les moyens
de le vaincre», « L'état des travaux du barrag,e du Chambon»,
« Les préparatifs de l'ascension stratosphérique effectuée aux États-
Unis par le Pr Jean Picard», ou encore« Des acrobaties accomplies
à bord d'une automobile pour démontrer les qualités de résistance
de cette dernière», « Un reportage exclusif à bo:rd du Normandie,
effectué quelques heures avant que celui-ci n'appareille pour Le
Havre », « Les essais du pilote Delmotte à bord du monoplan Cau-
dron-Renault 12 cylindres, 500 cv, train d'atterrissage escamotable,
qu'il conduira pour la coupe Deutsch de la Meurthe» ou enfin« Un
immense incendie à Brooklin et les techniques de lutte mises en
œuvre ». On comprendra que certains journalistes de la presse écrite
craignent, dès cette époque, de voir la radio et, surtout, le cinéma les
condamner au chômage ...
Si, par définition, ces films d'actualités n'avaient pas pour ambi-
tion de durer, il convient évidemment de s'interroger sur la raison
de la disparition de l'essentiel des films de vulgarisation scienti-
fique. Rappelons, par exemple, que, dès 1924, la firme Pathé met-
tait au point un nouveau produit : Pathé-Baby - « Le Cinéma chez
vous », disait la publicité. Plus de mille films courts au catalogue,
films « en vente pour six francs chez tous les marchands d'appareils
photographiques, dans les grands magasins». Les titres de vulgari-
sation scientifique n'y sont pas absents. Quelques 1exemplesdonnent
une idée de leurs sujets : deux documentaires sur les Ruminants
(Ruminants - généralitéset Ruminants - familles), un sur Le Gaz
carbonique,un sur La Fabricationdes rubans de machines à écrire,
un sur Uneferme modèle de pondeuses, un sur La Récolte du goé-
mon).
Ces films qu'on ne revoit jamais ont disparu dans la tourmente
des progrès techniques. La Lutte pour la vie (1934), par exemple,
« film de courte durée composé d'images sous-marines qui révèlent
quelques aspects mal connus de la vie des mollusques, des poissons
et des crustacés», aussi bien tourné soit-il, ne p~mt guère rivaliser
avec un film du commandant Cousteau. L'arrivée de la couleur les a
définitivement condamnés. On aurait tort de les oublier et d'oublier
le rôle qu'ils ont joué dans la vulgarisation des sciences.
193
Savants et ignorants
2. La.scienceà l'Exposition
2. La scienceenfëte
Chaque époque, à chaque occasion, a su exploiter la science qui
lui était contemporaine pour rehausser le piquant de certaines célé-
brations: la science n'est alors qu'un objet parmi d'autres qui assure
le succès des réjouissances collectives. Ce qui n'empêchait pas, par
ailleurs, que la science devienne aussi le sujet de tètes explicitement
données en son honneur.
En 1662, par exemple, Louis XIV commença l'installation de la
plus fastueuse des ménageries de son temps : la ménagerie de Ver-
sailles. C'était, avant tout, un établissement d'apparat qui servait à
amuser la Cour et les grands personnages de passage. On rejoignait
la ménagerie par le Grand Canal à bord d'une flottille de gondoles et
de frégates, des musiciens suivaient dans des chaloupes. Quand
Louis XIV n'était pas là, et après s'être munis de billets,« les bour-
geois et le simple peuple avaient aussi la liberté de venir admirer les
animaux». Ainsi, parmi les visiteurs, La Fontaine, Boileau, Molière
et Racine, comme l'explique La Fontaine lui-même dans la préface
de Psyché, déambulèrent ensemble dans la ménagerie et y trou-
vèrent l'occasion de« faire un peu de philosophie».
220
Comment vulgarise-t-on?
A y regarder de près, pourtant, la science ne s'avance pas aussi
cachée par le faste qu'on pourrait le croire. Les méinageries - et celle
de Versailles, en particulier - ont joué un rôle non négligeable dans
les recherches sur l'acclimatation. La mort des anilmaux permettait
aussi différents travaux d'anatomie ... Mais, sur ce plan également, le
spectacle reprenait bien vite ses droits, comme en témoigne cette
description de la dissection de l'éléphant du roi dlu Portugal, mort
en 1681 :
« Jamais peut-être la dissection anatomique ne::fut si éclatante,
soit par la grandeur de l'animal, soit par l'exactitude que l'on
apporta à l'examen de ses parties différentes, soit ei11finpar la qualité
et le nombre de ses assistants. [...] On avait couché le sujet sur une
espèce de théâtre assez élevé ; le roi ne dédaigna pas d'être présent à
l'examen de quelques-unes des parties.»
RADIO-PARIS
...
G.COLOMB
. lhd tn ck C-Un- t.o.DC'Ur9
_, .. Sot-bon.. -
Dessin de Mrs. Félix-Archimède Pouchet destiné à l'illustration d'une des conférences de son mari
(Muséum d'histoire naturelle de Rouen, document Maryline Cantor) .
ADJUDANT REAU
longue poutre :
"'"- ... 100 .......
Exposiliion SCb,rAWl'lCLI
deJOUET Q
SNOÜVI-OAUX
pourÉTRmNNES
{Envol Pr11.n
co, aur demande, d'un ch!fma.p.l Album lliu1U'6)
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5. Poésie et théâtrescientifiques
1. La poésie scientiflque
2. Le thédtrescientifique
241
Savants et ignorants
Où t'arrêteras-tu, libre pensée humaine ?
Le mal fuit à l'aspect du droit resplendissant ;
Le bien renaît ; la paix sur la terre descend ;
L'homme règne aux pavois qu'éleva l'industrie !
Il n'a pas oublié sa première patrie,
Et, retrouvant son vol, l'archange audacieux,
Maître de la nature, a reconquis les cieux.
Salomon de Caus peut mourir tranquille, la tête soutenue par
Marion Delorme. C'est à elle qu'il appartient de conclure:
Honneur, honneur à vous, dans ce pauvre fou mort,
Amour de la science, amour de la patrie !
Ces pièces étaient aussi faites pour chanter les victoires de
l'homme sur la nature (la maîtrise de l'énergie et de la matière, la
maîtrise de la communication, de l'univers, du vivant).
La science est célébrée parce que ses applications vont boulever-
ser la vie des hommes. Salomon de Caus, par exemple, vient de
découvrir la vapeur:
Salut à toi, dans ton divin éclat,
Vénus de l'industrie, aux hommes inconnue !
La vapeur, de ses flots épais,
Fait un trône à tes pieds de reine ;
Tu tiens le sceptre de la paix ;
Ton sein est comme une urne pleine.
Ton corps, superbe et gracieux,
Semble un palmier voisin des cieux.
Jamais tu n'auras de rivale.
0 rêve heureux ! déjà je vois
S'élancer, soumise à ta voix,
L'eau, notre fougueuse cavale.
Avec la nature, je veux,
Sur ton cœur, signer de saints pactes.
Trombes, à moi vos bras nerveux !
A moi l'esprit des cataractes!
Pareil à Jupiter, demain,
J'apparaîtrai, tenant en main
Les foudres qui bouillent dans l'onde ;
Et mes fils, issus de mon front,
Sans relâche les forgeront
Pour bouleverser l'ancien monde.
Dans Gutenberg,Louis Figuier fait jouer un rôle important à
l'imagier hollandais Laurent Coster. Établi à Haarlem, où il
accueille Gutenberg, Coster a inventé les caractères mobiles pour
l'imprimerie: il ne veut pas que sa découverte tombe dans n'im-
porte quelles mains. Il choisit celles de Gutenberg, dont sa fille est,
par ailleurs, amoureuse.
« Que je sois privé du salut éternel, si je ne regarde pas mon
242
Comment vulgarise-t-on?
invention comme un second enfant, qui, autant que ma fille, a droit
à ma tendresse ... (il ouvre un tiroir du bahut et .Y prend une casse
d'imprimerie).Mon invention, la voilà ! (Il pose la cassesur le guéri-
don.) Jusqu'ici l'existence d'un pauvre copiste était à peine suffi-
sante pour transcrire une bible ou un livre d'heures ; mais désor-
mais, grâce à mes caractères mobiles, on pourra reproduire
mécaniquement les manuscrits. (Il prend quelquescaractèresdans la
cassed'imprimerie,les regardeet s'assiedprès du guéridon.)Chers
caractères, enfants de mon esprit, fruits de mes veilles et de mes
labeurs, idée qui a germé dans ma tête, pendant quarante années,
quel bonheur j'éprouve à vous contempler !... A vous appartiendra
le pouvoir d'exprimer les sentiments les plus divers et les plus oppo-
sés de l'âme humaine! ... La science, l'histoire, la poésie naîtront
tour à tour de votre arrangement multiple ... En vous, l'écolier épel-
lera son rudiment, le savant consignera ses doctrines, le vieillard
relira ses prières... Aux financiers, vous parlerez de chiffres ; aux
femmes, de parures; à la jeunesse, de plaisirs .. Vous chanterez
l'amour, après avoir célébré la gloire, et vous raco11terezl'avenir, les
événements du passé ... A vous reviendra l'honneur de régénérer le
monde; car vous vous nommerez l'imprimerie, c'est-à-dire la voix
universelle de l'humanité ! »
Introduction
253
Savants et ignorants
1. Pourquoivulgarise-t-on?
255
Savants et ignorants
3. Qui vulgarise?
x1~ siècle
rr siècle
264
Bibliographie
4. Commentvulgarise-t-on?
266
Bibliographie
p. 107 Cerclede la presse scientifique, 1858-18<>0.
Félix Foucou, « Histoire de la création, du développement
et des travaux du Cercle de la presse::scientifique», in
Revue scientifiquedes Deux Mondes, ll860.
p. 109 Jean Rambosson, La Sciencepopulaire, 1863-1869.
Samuel-Henry Berthoud, Les Fantaisies du Dr Sam, 1861,
4 vol.
Samuel-Henry Berthoud, Petites Chroniiquesde la science,
1867-1871.
Louis Figuier et Émile Gautier, L 'Annéescientifique,1857-
1913.
Henry de Parville, Causeriesscientifiques, 1861-1895
Bibliographiecomplémentaire
La Science et la Presse, organe officiel de l'Association profes-
sionnelle des Journalistes et des écrivains scientifiquesfrançais,
1913-1914.
La vulgarisationpar la parole
La vulgarisationpar l'image
281
Savants et ignorants
Conclusion
Abria, J.-J. B., 158, 159. Bellin, A. G., 213, 236, 278, 280.
Adeline, J., 176. Bensaude-Vincent, B., 263, 279.
Agricola, 54. Berget, A., 88, 99, 128-130, 175, 272,
Alcan, F., 30. 276.
Alembert J., Le Rond d', 14, 30, 38, Berland, L., 131, 272.
50, 132-134, 136, 141, 142, 145, Bernard, C. 43, 59, 110.
173, 255, 273. Bernardin de Saint-Pierre, J.-H., 48,
Algarotti, F., 32, 57, 255, 258. 110, 257, 267.
Amson, G., 229, 280. Berquin, A., 113, 118, 268, 270.
Andraud, A., 237, 240, 250, 281. Bert, P., 158-16!0.
Arago,F., 58, 59, 66,68,69,90, 106, Berthelot, M., 66, 98, 135, 141, 145,
152. 148, 203, 224, 225, 259, 273.
Arsonval, A. d', 225. Berthoud, S. H., 18, 70, 71, 109, 112,
116,254,260,267,268,270.
Babinet, J., 67, 109, 165, 259. Bertin, 160.
Bachelard,G., 195, 277. Bertrand, A., 106, 114, 269.
Bachet de Mériziac, C. G., 51, 257. Bertrand, G., 202.
Badoureau, 79. Bertrand, J., 58, 69, 78, 106, 152.
Baillière, J. B., 250. Bertrand, R., 93.
Balland, E., 121,271. Best, J., 122.
Balzac, H. de, 70. Beuchot, H., 217.
Barthélémy, G., 279. Beuchot, J., 40, 217, 252.
Baudoz, A., 27. Biart, L., 80.
Baudry de Saunier, C. L., 92, 98, 167, Billaudeau, Dr, 68, 156, 275.
264, 265, 276. Biot, J. B., 68, 69, 106.
Baumé, 54. Bitard, A., 101, 102.
Bayard, E., 122, 174, 276. Blanchard, Mme:, 223.
Bayet, 22. Blanchard, P., 113, 119, 268, 269.
Bayle, P., 238, 281. Blanqui, A.-J., 126.
Bazin, G. A., 37, 255. Blondel, C., 263, 279.
Beaude, J.-P., 134, 135, 273. Bochart de Saron, 198.
Beaugrand, C., 83, 111, 112, 262, Bocquillon, H., 123, 271.
268,269. Bodard de Tezay, 281.
Bedel, C., 277. Bohn G., 183.
Béguet, B., 271, 282. Boileau, N., 2201.
Behring, E. von, 108. Boillot, A., 147, 274.
Belgiojoso, princesse de, 33, 79. Bollème, G., 98,, 266.
Belgrand, C., 209. Boll, M., 89, 13S, 137,263,264, 273.
Bellet, D., 228, 280. Bonnier de la Mosson, J., 197,278.
283
Index des noms de personnescitées
Borel, E., 202. Charcot, J.M., 217.
Borie, V., 35, 75, 114, 121, 147, 255, Charles, J. A., 163, 198, 215.
261,269,271,274. Charles X, 98, 223.
Bory de Saint-Vincent, 70, 113, 134, Charton, E., 64, 65, 76, 91, 98, 122-
137, 139, 144,223,273, 274. 124, 127, 271.
Bougeant, G. H., 53, 54,257, 258. Châtelet, Mme du (Breteuil, G.-E. de,
Bouquet, H., 109. dite) 32-34, 56, 57, 196, 215, 255,
Bourbouze, J.-C., 67, 227. 258.
Bourgeois de Chateaublanc, D. F., Chaulnes, duc de, 198.
216. Chenu, P., 137, 274.
Bourget, 161. Chesneaux, J., 270.
Bourguin, M., 114,269. Chevreul, E., 43, 100.
Bouscaren, J., 60. Christophe (voir Colomb, G.).
Boussingault, J. B., 107. Cinq-Mars, 241.
Brard, C.-P., 112, 268. Clairaut, 56.
Breton, J. L., 206. Clairville, L.-F., 239, 281.
Brewer, E. C., 122, 254, 255, 271. Clarétie, J ., 230, 280.
Brieux, E., 80. Clarétie, L., 151, 195,230,231,233,
Brillouin, L., 171. 277,280.
Broglie, L. de, 172, 191. Claude, G., 24, 87-89, 195, 218, 263.
Brongniart, Ad., 134, 273. Clavard, A., 159.
Brongniart, Al., 152. Clemenceau, G., 225.
Brongniart, C., 67, 80, 166, 260. Clère, J., 74, 114, 261, 269.
Cohl, E., 188.
Brown-Sequard, Ch., 108.
Coignet-Gauthier, C., 33.
Brunel, G., 26.
Colin, A., 128.
Brunetière, F., 224.
Colin, F., 266.
Brunold, C., 116, 270. Colomb, G., dit Christophe, 85, 99,
Bruzon, P., 131, 272. 130, 167-172, 213, 252, 276, 278.
Buffon, G. L., Leclerc comte de, 33, Comandon, J., 185.
38, 46, 50, 51, 126, 133, 139, 198, Condorcet, marquis de, 50, 58, 162.
250, 257, 273. Constantin-Weyer, M., 131, 272.
Corneille, T., 133, 273.
Cagliostro, G. B., comte de, 220. Costantin, J., 130, 272.
Cabours, A., 32, 255. Coster, L., 242, 243.
Campardon, E., 279. Coste, V., 73, 107.
Candolle, A. de, 134, 273. Couderc, P., 171.
Cantagrel, M., 189, 192. Coudray, Mme du, 150.
Cap, P.-A., 256,275,277. Coupin, H., 27, 111, 121, 130, 254,
Caradec, F., 276, 280. 267, 271, 272.
Carnot, H., 123, 207. Courtagnon, Mme de, 33.
Carraud, Z., 80, 262. Cousin-Despréaux, L., 18, 47, 173,
Castillon, A., 113, 114, 269, 270. 254, 256, 276.
Cauchy, A., 60. Cousteau, J.-Y., 193.
Caufeynon, 23. Coyer, abbé, 35.
Caullery, M., 171, 172. Coze, P., 192.
Caus, S. de, 240-242. Cunha, A. da, 147,274.
Cazin, 160. Curel, F. de, 237, 245, 282.
Cézanne, E., 158. Curie, M., 24.
Chaptal, J. A., 136, 273. Cuvier, G., 106, 126, 135, 136, 140,
Chapuis, A., 279. 141, 144, 236, 273.
284
Index des noms de personnescitées
D'Adaoust, 235. Doré, G., 174.
D'Argent, Y .• 122. Doyen, E., 184.
Darcet, J., 236. Doyon, A., 279.
Dardaud, G., 279. Drapiez, A., 134, 138, 273, 274.
Darmon, P., 223, 279. Drohojowska, comtesse, 114, 269.
Daru, P., 237. Dronné, F., 121, 271.
Darwin, Ch., 119, 126,244. Duclaux, E., 11,, 88, 166.
Dary, G., 130, 272. Duclaux, J., 88.
Daubenton, L. B. M., 38, 50, 133. Ducoin-Girardi111, 81, 115, 262, 269.
Daubrée, A., 74, 108. Dujardin, J.-B., 159.
Daudet, A., 13, 237, 244, 281. Dumas, J.-B., 149, 162, 196, 275,
Daumas, M., 194, 198,260,277. 277.
Decaisne, E., 107. Duncan, F.M., 185.
Dechambre, A., 133,273. Duplessis, Mme:,33.
Deharme, L.-E., 123, 271. Dupont de Dinc,chin, 155.
Dehérain, P.-P., 64, 147, 148, 274. Dupuis-Delcourt, 200, 223, 236, 278,
Delagrave, C., 63. 280.
Delamain, J., 131, 272. Dupuis, E., 213, 278.
Delavigne, C., 235, 280. Dupuy, P., 30, 100, 105,176,251.
Delbrück, J., 28, 81, 82, 243, 262, Durand-Claye, A., 159.
281. Duruy, V., 157, 158, 161, 163.
Delhoste, G., 99. Ourville, M., 265.
Delille, J., 233, 235, 236, 280.
Eckert, A., 112, 268.
Delisle, 56.
Edison, T., 100,, 207, 213.
Della Bella, S., 197. Eidelman, J., 202, 263, 278.
Deloche, B., 278.
Einstein, A., 90,. 108, 188, 189, 264.
Delon, C., 81, 82, 98, 262.
Épinay, Mme d", 34.
De Lanessan, J.-L., 247, 249, 282.
Escaich, R., 262.
Delange, Y., 259. Esclangon, E., 170, 171.
Delorme, M., 241, 242. Esmes, J. d', 190.
Dembour, A., 122. Euler, L., 32, 53, 114, 255, 257, 269.
Demontzey, P., 127.
Demoulin, Mme G., 25, 82, 98, 254, Fabre, J.-H., 591,62-64, 86, 98, 112,
266. 118, 131,252,259,268,270.
Denieuil, P.-N., 251, 266, 282. Faideau, F., 82, 121, 130, 271, 272.
Derham, W., 47, 257. Faraday, M., 21, 36, 42, 66, 112, 169,
Desains, 160. 203, 255, 268:.
Desbeaux, E., 34, 79, 255, 262. Fargeaud-Ambrière, M., 260.
Descartes, R., 51, 129. Favart d'HerbiE:nY, 140.
Desplantes, 113, 269. Fée, A., 113, 268.
Déterville, 136. Fénelon, F., 17, 34, 48.
Déthan, G., 278. Férat, J., 122, 174.
Deyrolle, 21 O. Férenczy, C., 2'.79.
Obombres, J., 235, 280. Femet, 160.
Diderot, D., 14, 30, 132-134, 145, Figuier, L., 11, :20,22, 27, 28, 30, 36,
149, 162, 273. 37, 42, 59-61,, 63, 69, 72, 102, 107,
Diesbach, G. de, 262. 109, 119-122, 124, 127, 147, 148,
Disney, W., 131. 174, 177, 240, 242, 243, 249-252,
Doin, O., 130. 254, 256, 258, 267, 270, 271, 274,
Donné, A., 106. 276, 281, 282.
285
Index des noms de personnescitées
Flaherty, R., 186. Giacomelli, H., 174.
Flammarion, C., 8-10, 12, 22, 23, 28, Giffard, P., dit Jean sans Terre, 108.
30, 34, 37, 38, 55, 59, 61-64, 66, Gille, B., 145.
67, 70, 80, 89-92, 98, 99, 101, 102, Girardin, E. de, 59, 69, 71, 76, 106.
106,108,123,154,166,179,225, Girardin, J., 25.
237,250,253,255,259,276,281. Goedaert, J., 49, 257.
Flaubert, G., 110, 206, 267, 278. Goldschmidt, Pr., 226.
Flourens, P., 134, 273. Goncourt, Ed. et J. de, 33, 198, 278,
Fontenelle, B. B. de, 9, 11, 13, 29-32, 279.
34, 55, 56, 109, 113, 120,149,238, Good, A., dit Tom Tit, 11, 65, 99,
253-255, 258, 267, 275. 228, 252, 259, 280.
Fonvielle, W. de, 68, 70, 71, 101, Goupil, M., 279.
123, 125, 129,260,261,271,272. Gourmont, R. de, 57,258.
Fomey, A.-S., 152, 153, 159. Gouzy, P., 82, 111, 267.
Fortin, J., 105. Gradewitz, 188.
Fortoul, L., 82, 112, 268. Graffigny, H. de (Marquis, Raoul,
Foucou, F., 267. dit), 90-92, 101, 102, 112, 115,
Fouray, M., 278. 127, 250, 264, 268, 271.
Fourment, A., 266. Grandsire, P.-E., 122.
Fox, R., 275. Gratiolet, L. P., 78, 160.
Franklin, B., 150, 163. Grégoire, H., 198.
Froelich, 173. Gréhant, N., 67,227.
Fusil, C. A., 280. Grimaux de Caux, G., 139, 274.
Grimm, J., 50.
Gadeau de Kerville, H., 210, 276. Grimm, T., 108.
Galilée, 44-46, 113, 241, 256, 269, Grivel, 35.
282. Groc, L., 99, 115, 266, 269.
Galopin, Ar., 91, 112. Grosclaude, 98.
Galopin, Aug., 68, 97, 102, 112, 260, Groselier, N., 54.
268,270. Gruber, A.-C., 279.
Gamain, C., 213. Gudin de la Brunellerie, 236, 280.
Gandhi, 206. Guérin, F. E., 140.
Garban, E., 82. Guillemin, A., 74, 123, 125, 261,
Garcet, H., 79. 271.
Garin, 211. Guitry, S., 245, 281.
Garnerin, J., 221, 222. Gutenberg, J., 242, 243.
Garnier, J., 218, 279.
Gaudin, M.-A., 66. Hachette, L., 122-124, 127.
Gauthier-Villars, 101. Hahn, R., 277.
Gautier, E., 60, 109, 147, 267, 282. Hauser, 130, 272.
Gélis, E., 279. Hément, E., 121, 271.
Gélis, J., 275. Hément, F., 27, 82, 121, 254, 271.
Genlis, comtesse de, 33, 194, 198, Hervieu, P., 214, 279.
277. Hetzel, J., 20, 28, 75, 77, 78, 98, 119,
Geoffroy Saint-Hilaire, 1., 72, 134, 173.
273. Heulhard, A., 279.
Gérard, R., 189. Hignard, A., 77.
Gerhardt, C., 66. Hoche, J., 216, 220.
Gersaint, 197, 278. Hoefer, 73.
Gervais, P., 126. Homby, F., 232.
286
Index des noms de personnescitées
Houllevigue, L., 88, 106, 109, 128, Langevin, P. 84, 85, 87-89, 106, 132,
129, 263, 271, 272. 168, 171, 188, 191, 206, 218, 263,
Hugo, L., 201, 278. 279.
Hugo, V., 201, 237. Laplace, P.S., 129, 236, 237.
Humboldt, A. de, 106, 107. Latour, B., 165, 275.
Huygens, C., 8. Latreille, P. A., 134, 136, 273.
Laugier, H., 202.
lchac, M., 192. Laurent, A., 149.
Ivens, J., 185, 186. Lavallée, T., 79.
Lavoisier, A. L. de, 55, 100, 145,
Jacobi, D., 267. 14~ 197,20~221,235.
Jacques, J., 275, 279. Leboeuf, L.G., 112, 268.
Jahandier, A., 122. Le Boeuf, P., 280.
Jamin, J., 157, 160, 164. Le Bon G., 23.
Jansen, J., 184. Le Chatelier, H., 207.
Jeanbemat, E., 113, 268. Leclerc de Montlinot, 134, 273.
Jeannet, J., 158. Lecouturier, H.,. 107.
Jenner, E., 100, 235. Ledermuller, M., 196, 277.
Joliot-Curie, F., 192, 206. Lefebvre, E., 82:, 112, 268.
Joliot-Curie, 1., 206. Lefèvre, F., 172:.
Joly, 73. Lefèvre, J., 239, 281.
Joubin, L., 128, 130, 272. Léger, F., 188.
Jouvet, 127. Legouvé, E., 233, 241, 281.
Jussieu, A. de, 134, 273. Legros, D., 260,. 270.
Jussieu, B. de, 128. Leibniz, G. W., 52.
Lemaître, J., 215.
Karr,A., 70. Lembert, A., 1Ql7.
Kepler, J., 129. Lémery, N., 55, 150, 152, 195, 196,
Kircher, A., 177. 258,277.
Koch,R., 217. Leniaud, J.-M., 278.
Krupp, 206. Leroux, 143.
Lespiault, G., 159.
La Blanchère, H. de, 82, 111, 112, Lesueur, 214.
268. Leucheron, J., 51.
Labesse, E., 112, 268. Lévi-Alvarès, D., 121, 271.
Laboulaye, Ch., 143, 274. Lezay de Mamc,zia, 34.
Lacépède, comte de, 50. Le Monnier, 56.
Lachènes-Desbois, 140. Le Play, F., 206.
Lacollonge, L.-O. de, 159. Lenoble, R., 17, 254.
Lacroix, E., 103. Le Verrier, U., 62, 157, 160, 161.
Lagrelay, B., 219. Léveillé, A., 20:3, 205, 278.
Lalande J. J., Lefrançois de, 32, 55, Liaigre, L., 279 ..
56, 255, 258. Liard, L., 88.
Lamartine, A. de, 70, 123, 271. Liebig, J., 66, 259.
Landrin, A., 127, 271. Lippman, G., 67,227.
La Condamine, C. M. de, 133. Lissajous, J. A., 161.
La Fontaine, J., 153, 220. Littré, E., 9.
Laissus, Y., 194, 277. Loisel, G., 279.
Lalanne, 143. Loppé, E., 36.
Lallier, E., 188, 189, 192. Louis XIII, 197.
287
Index des noms de personnescitées
Louis XIV, 220, 238. Michelet, J., 175, 185, 276.
Louis XV, 150, 196. Milhaud, D., 94, 189.
Louis XVI, 198, 216, 221, 233. Milne-Edwards, H., 126, 134, 273.
Lucrèce, 234. Moigno, F., 18, 19, 36, 59-61, 63, 69,
Luc, J. A. de, 32, 255. 70, 72, 89, 100, 102, 103, 122,
Lumière, L., 167, 191,218. 156, 177-180, 249, 250, 252, 254,
Lutaud, A., 23. 259.
Luynes de, 160. Mointrel d'Elément, 32, 255.
Lyell, C., 126. Molière, 220, 237, 281.
Molteni, A., 180, 181.
Macé, J., 62, 69, 98, 99, 112, 118, Montaigne, M., 27, 54.
119,124,260,268,270,276. Monteil, C., 171.
Macquer, P., 140, 274. Montesquieu, baron de, 11, 133.
Maeterlinck, M., 80, 110, 185, 267. Montfort de, 61, 156.
Maillard, P., 265. Moret, E., 75, 80, 270.
Malaguti, F., 63. Moreux, T., 89-91, 108, 130, 264,
Mame, A., 127. 272.
Mangin, A., 70, 79, 102, 111, 113, Momet, D., 37, 46, 50, 255, 256,
117, 118, 128,129,260,267,268, 257,282.
270,272. Mouranche, M., 282.
Marcet, J., 33, 255. Muller, E., 82.
Marey, E. J., 184. Mulsant, E., 32, 114, 120, 255, 269,
Margollé, E., 123. 271.
Marinescu, Dr, 184. Musset, Ch., 153.
Marion, F., 220, 279. Muybridge, E., 184.
Marpaux, A., 21, 254. Mydorge, C., 51, 52, 257.
Martin, L.-A., 32, 114, 255, 269.
Mascart, E., 160. Nadar (F. Toumachon, dit), 77.
Mascart, J., 207, 210, 278. Napoléon I"', 221, 222.
Massain, G., 275, 277. Napoléon III, 72, 206.
Masson, G., 30, 64. Neufchâteau, F. de, 205, 206.
Mathilde, princesse, 157. Neuville, A. de, 122.
Maugeret, M., 111,267. Neuwentijdt, B., 47, 257.
Maupertuis, P. L., Moreau de, 57, Newton, 1., 9, 30, 129, 236.
221, 258, 279. Nicolle, J., 256, 275.
Mayeure, F., 11, 253. Niderst, A., 281.
Méhémet-Ali, 223. Nocard, E., 108.
Meister, J., 217. Nodier, C., 33, 80, 110, 120, 255,
Mélies, G., 218. 262,270.
Menault, E., 147, 274. Noël, 215, 216.
Merlieux, 98. Nollet, J.-A., 32, 48, 52, 53, 150, 152,
Mesmer, F.A, 221. 195, 196,215,257.
Mesnel, A., 122.
Metchnikoff, E., 99. Ocagne, M. d', 79,262.
Meunier, S., 74. Ogouz, P., 188.
Meunier, S., Mme, 74, 123, 261. Omegna, R., 185.
Meunier, V., 19, 21, 43, 70-74, 97, Orbigny, A. d', 126.
112, 123, 148, 163-165, 173, 191, Orléans, G., duc d', 197, 201.
250, 253, 254, 256, 261, 268, 276. Ory, P., 206, 251, 254, 278, 282.
Meurdrac, M., 31, 55, 255, 258. Ozanam, J., 52, 121, 257, 271.
288
Index des noms de personnescitées
Pagniez, Y., 131, 272. Poiré, P., 135, 273.
Painlevé, J ., 93, 94, 172, 183, 189- Poitevin, 176.
191, 252, 276. Poitvin, C., 240, 241, 244, 281.
Painlevé, P., 88, 93. Pomiane (voir lf>ozerskiE. A.).
Palissy, B., 44-46, 54, 126, 149, 152, Poniatowski, M., 279.
196, 249, 256, 277. Ponsard, F., 240, 244, 251, 281, 282.
Panckoucke, C., 132, 142. Pouchet, F.A., 67, 73, 148, 165, 200,
Pape-Carpentier, M., 33, 81, 82, 98, 250,275.
112, 268. Pozerski, E. A. (dit Pomiane), 169,
Papin, D., 201. 170, 276.
Paré, A., 217. Prévost, J. L., 134, 273.
Pariset, E., 142. Proudhon, P.-J., 240, 281.
Parmentier, A. A., 136, 273. Py, c., 279.
Parville, H. de, 109, 148, 267.
Pasteur, L., 24, 39, 67, 72, 88, 100, Racine, J., 220.
148, 157, 160, 165,209, 217, 225, Radau, R., 24, 25, 120, 129, 254,
244,250,275,282. 270,272.
Pasteur Vallery-Radot, 202. Raicbvarg, D., 260, 270, 281.
Pathé, C., 192, 218. Rambosson, J., 24, 38, 109, 147, 213,
Patin, G., 238. 254, 267, 274.
Payen, A.,161. Rancès, F., 158.
Pellisson, M., 10, 159, 162, 253, 215. Rancière, J., 22,. 254.
Pelletier du Mans, J., 234, 280. Raspail, F.-V., 23, 254.
Pelouze, Pr., 70. Raulin, V., 159.
Perdonnet, A., 151. Réaumur, R.-A, F. de, 37, 49, 52,
Péron, G., 115, 269. 257.
Perriault, J., 151, 177, 179, 275, 276. Rebérioux, M., 206, 278.
Perrier, E., 85, 88, 106, 135, 136, Reclus, E., 98.
225, 262, 273. Regnault, N., 53',,257.
Perrier, R., 146, 274. Renan, E., 7, 253.
Perrin, F., 172. Renard, J., 80, 92.
Perrin, J., 20, 21, 84, 85, 87-89, 131, Reynaud, J., 62, 123, 137, 143, 152,
132, 172,191,202,206,249,254, 273.
263. Richelieu, 241.
Pestre, D., 266. Riche, A., 32, 160, 255.
Petit, E., 11, 253. Riou, E., 122.
Picardet, chanoine, 35, 81, 262. Rivière, P.-L., 121, 271.
Picard, J., 188, 193. Robert-Houdin, J. E., 219.
Pierron, H., 171. Robertson, E. G., 162, 177,219, 220,
Pie VII, 222. 222, 275, 279.
Pilastre de Rosier, 236. Robert, N., 197.
Pinet, A. J. T., 114, 269. Robespierre, M., 198, 220, 224.
Pizzetta, J., 113, 136, 269, 274. Roger, abbé, 14$.
Plantefol, L., 202. Roger, H., 172.
Platon, 113. Rolland, R., 206.
Platt, L., 233, 280. Rollin, 47.
Pluche, N.-A., 35, 37, 46, 47, 53, 113, Romains, J., 2451,281.
115, 120, 250, 255, 256, 269. Ronsard, P. de, 234, 280.
Poe, E. A., 72, 79. Roqueplo, P., 26,254.
Poincaré, H., 85, 262. Roret, N. E., 229, 280.
289
Index des noms de personnescitées
Rostand, J., 9, 64, 86, 87, 89, 131, Tartaglia, N., 51.
132, 172, 253, 263, 272. Tassel, O., 277.
Roubaud, F., 107. Tétry, A., 263.
Rouelle, F., 145, 149, 162, 196, 275. Theuriet, A., 110, 267.
Roule, L., 88, 131, 170, 194, 195, Thévenard, P., 276.
199-203, 255, 272, 277, 278. Thévenin, Ev., 150, 165.
Rousseau, J.-J., 46, 80, 110, 149, Thévenin, R., 192.
162, 237, 267. Thiery, L.-V., 198, 278.
Roussy, H., 203. Thompson, A., 189.
Roux, E., 108. Thouin, A., 136, 273.
Royer, E., 159. Tignol, B., 101.
Rudaux, L., 130, 188, 202. Tissandier, O.; 27, 42, 59, 64, 100,
Ruggieri, frères, 221. 121, 123, 126, 128, 176,195,229,
Ruhmkorff, 229, 231. 254, 256, 259, 271, 276, 277, 280.
Toché, C., 265.
Sachot, O., 121, 271. Tom Tit (voir Good A.).
Sadoul, G., 277. Torlais, J., 257, 275, 277.
Saigey, J.F., 106. Tosi, V., 277.
Saint-Laguë, 202, 204. Toulouse, Ed, 106.
Sainte-Beuve, C.A., 31, 121, 236. Tronchin, Th., 224.
Sainte-Claire Deville, H., 66, 78, 98. Turgan, J., 279.
Salten, F., 131, 272. Turgot, baron de, 133, 154.
Sand, O., 75, 83.
Sand, M., 83, 119, 120,262,270. Ulliac-Tremadeure, S., 113, 173,
Santoni, L., 265. 268,276.
Saveney, Ed., 148, 275. Urbain, G., 135, 137, 171,183,202,
Savond, 214. 273.
Scève, M., 234, 280. Urban, C., 185.
Schmidt, A.-M., 234, 280.
Schnaiter, C., 75, 83, 118, 148, 161, Vaillant, 160.
261, 270, 275. Valmont de Bomare, 135, 140, 144,
Schnaiter, E., 82, 111. 198, 2ï4.
Schneider, 182, 206, 216. Vamba, 116, 2,0.
Schultz, U., 187. Van Bruyssel, E., 82.
Schweitzer, O., 130, 272. Variot, G., 68.
Seguin, M., 61, 102, 103. Vaucanson, J. de, 198,216,217.
Ségur, comtesse de, 250. Venette, N., 8, 253.
Sigaud de La Fond, J.-A., 48, 215, Veme,J., 71, 76-79, 87, 98,111,119,
257. 122, 125, 174, 229, 261, 262, 270,
Simonin, 160. 271.
Simon, O., 154, 164. Verne, J.-J., 262.
Simon, J., 123. Viau, C., 253.
Sonrel, L., 67, 125, 126, 128, 260, Vicq d'Azyr, F., 198.
271,272. Vigarello, O., 22, 254.
Spitzner, Dr, 195,217,279. Villeroy, 126.
Staël, Mme de, 9. Vilmorin, 100.
Stephenson, O., 182. Vincent, Ad., 112, 268.
Sturm, C.C., 47, 53, 256. Viollet-le-Duc, E. E., 98.
Sue, E., 122. Virey, J.-J., 136,273.
Surell, A., 126. Voisin, F., 82.
290
Index des noms de personnescitées
Voltaire, F. M. (Arouet, dit) 12, 32, Woodbury, 176,.
46, 47, 56, 196, 258. Wurtz, A., 160.
Vuibert, H., 130, 250.
Zeiss, K., 204.
Wacquez-Lalo,A., 121, 271. Zola, E., 78, 110, 111, 225.
Watteau, A., 197. Zurcher, F., 12:3.
Table
Introduction . . . . . . . . . . . . 7
Un genre contradictoire . . . . . . . 7
Enseignement «formel» et « non formel» 10
Choix du public et choix de l'histoire . . 11
Quand s'a"iter? . . . . . . . . . 14
PREMIW PARTIE
Pourquoivulprise-t-on ?
DEUXltME PARTIE
QUATRIÈME PARTIE
Commentvulgarise-t-on?
• L'astérisque indique les ouvrages disponibles dans la série de poche « Points Sciences ».
Patrick Lagadec, La Civilisationdu risque, 1981
États d'urgence,1988
AndréLanganey,Le Sexe et /'Innovation*, 1979
Tony Uvy, Figuresde l'infini, 1987
J.-M. Uvy-Leblond et A. Jaubert, (Auto)critiquede la science*, 1973
EugeneLinden, Ces singes qui parlent, 1979
GeorgesMénahem,La Scienceet le Militaire, 1976
Agata Mendel, Les Manipulationsgénétiques,1980
P.-A. Mercier, F. Plassard, V. Scardigli, La Société digitale, 1984
Abraham A. Moles, Les Sciencesde l'imprécis, 1990
Catherine Mondiet-Colle, Michel Colle, Le Mythe de Procuste,1989
Jacques Ninio, La Biologiebuissonnière,1991
Hubert Reeves, Patiencedans l'azur *, 1981
Poussièresd'étoiles, 1984
L'Heure de s'enivrer,1986
Malicorne,1990
Jacques-Michel Robert, Comprendrenotre cerveau*,1982
Colin Ronan, Histoire mondialedes sciences,1988
Philippe Roqueplo, Le Partagedu savoir, 1974
Penserla technique,1983
Steven Rose, Le Cerveauconscient,l 91S
H. Rose, S. Rose et al., L 'Idéologiede/dans la science, 1977
Joël de Rosnay, L 'Aventuredu vivant, 1988
Rudy Rucker, La QuatrièmeDimension, 198S
Carl Sagan, Les Dragonsde /'Eden, 1980
Carl Sagan, Richard Turco, L 'Hivernucléaire,1991
Henri de Saint-Blanquat, Mémoiresde l'humanité, 1991
A. Salam, W. Heisenberg, P.A.M. Dirac, La Grande Unification,1991
Jean-Claude Salomon, Le Tissu déchiré, 1991
Evry Schatzman, Les Enfants d'Uranie, 1986
Michel Schiff, L 'Intelligencegaspillée,1982
Dominique Simonnet, Viventles bébés!, 1986
William Slcyvington, Machina Sapiens, 1976
Solomon H. S,;iyder,La Marijuana, 1973
Isabelle Stengers et al., D'une scienceà l'autre, 1987
Peter S. Stevens, Les Formesdans la nature, 1978
Pierre Tbuillier, Le Petit Savant illustré, 1978
Les Savoirsventriloques,1983
Francisco J. Varela, Connaitre,1989
Renaud Vié le Sage, La Terreen otage, 1989
Steven Weinberg, Les TroisPremièresMinutes de l'univers*, 1978
Collection « Points »
SÉRIE SCIENCES
dirigéepar Jean-MarcLévy-Leblond
SI. La Recherche en biologie moléculaire, ouvragecollectif
S2. Des astres, de la vie et des hommes, par Robert Jastrow(épuisé)
SJ. Autocritique de la science
par Alain Jaubert et Jean-MarcLévy-Leb/ond(épuisé)
S4. Le Dossier électronucléaire
par le syndicat CFDT de /'Énergieatomique
SS. Une révolution dans les sciences de la Terre,
par Anthony Hal/am
S6. Jeux avec l'infini, par Rozsa Péter
S7. La Recherche en astrophysique, ouvragecollectif(nouvelle édition)
SS. La Recherche en neurobiologie,
(épuisé, voir nouvelle édition S57)
S9. La Science chinoise et l'Occident, par JosephNeedham
SI0. Les Origines de la vie, par Joël de Rosnay
SI 1. Échec et Maths, par Stella Baruk
S12. L'Oreille et le Langage, par Alexandre Tomatis
SIJ. Les Énergies du Soleil, par Pie"e Audibert
en collaborationavecDanielleRouard
S 14. Cosmic Connection ou l' Appel des étoiles, par CarlSagan
SIS. Les Ingénieurs de la Renaissance, par BertrandGille
S16. La Vie de la cellule à l'homme, par Max de Ceccatty
SI 7. La Recherche en éthologie, ouvragecollectif
SIS. Le Darwinisme aujourd'hui, ouvragecollectif
SI 9. Einstein, créateur et rebelle, par BaneshHoffmann
S20. Les Trois Premières Minutes de l'univers, par Steven Weinberg
S21. Les Nombres et leurs mystères, par André Warusfel
S22. La Recherche sur les énergies nouvelles, ouvragecollectif
S23. La Nature de la physique, par RichardFeynman
S24. La Matièreaujourd'hui, ouvragecollectif
S25. La Recherche sur les grandes maladies, ouvragecollectif
S26. L'Étrange Histoire des Quanta, par Banesh Hoffman111
S27. Éloge de la différence, par Albert Jacquard
S28. La Lumière, par BernardMaitte
S29. Penser les mathématiques, ouvragecollectif
SJ0. La Recherche sur le cancer, ouvragecollectif
SJ 1. L'Énergie verte, par Laurent Piermont
S32. Naissance de l'Homme, par Robert Clarke
S33. Recherche et Technologie, Actes du Colloquenational'
S34. La Recherche en physique nucléaire, ouvragecollectif'
S35. Marie Curie, par Robert Reid
S36. L'Espace et le Temps aujourd'hui, ouvragecollectif
S37. La Recherche en histoire des sciences, ouvragecollectif
S38. Petite Logique des forces, par Paul Sandori
S39. L'Esprit de sel, par Jean-MarcLévy-Leblond
S40. Le Dossier de l'énergie
par le Groupecorifédéralénergiede la CFDT
S41. Comprendre notre cerveau, par Jacques-Miche/Robert
S42. La Radioactivité artificielle
par MoniqueBordry et Pie"e Radvanyi
S43. Darwin et les grandes énigmes de la vie
par StephenJay Gould
S44. Au péril de la science?, par Albert Jacquard
S45. La Recherche sur la génétique et l'hérédité
ouvragecollectif
S46. Le Monde quantique, ouvragecollectif
S47. Une histoire de la physique et de la chimie,
par Jean Rosmorduc
S48. Le Fil du temps, par André Leroi-Gourhan
S49. Une Histoire des mathématiques
par Amy Dahan-Da/medicoet Jeanne Peiffer
SSO. Les Structures du hasard, par Jean-LouisBoursin
SSl. Entre le cristal et la fumée, par Henri Atlan
SS2. La Recherche en intelligence artificielle
ouvragecollectif
S53. Le Calcul, l'imprévu, par Ivar Eke/and
SS4. Le Sexe et l'innovation, par André Langaney
SSS. Patience dans l'azur, par Hubert Reeves
SS6. Contre la méthode, par Paul Feyerabend
SS7. La Recherche en neurobiologie, ouvragecollectif
SS8. La Recherche en paléontologie, ouvragecollectif
SS9. La Symétrie aujourd'hui, ouvragecollectif
S60. Le Paranormal, par Henri Broch
S6 l. Petit Guide du ciel, par BernardPellequer
S62. Une histoire de l'astronomie, par Jean-Pie"e Verdet
S63. L'Homme re-naturé, par Jean-MariePelt
S64. Science avec conscience, par EdgarMorin
S6S. Une histoire de l'informatique, par PhilippeBreton
S66. Une histoire de la géologie, par GabrielGohau
S67. Une histoire des techniques, par Bruno Jacomy
S68. L'Héritage de la liberté, par Albert Jacquard
S69. Le Hasard aujourd'hui, ouvragecollectif
S70. L'Évolution humaine, par Roger Lewin
S71. Quand les poules auront des dents, par StephenJay Gould
S72. La Recherche sur les origines de l'Univers, ouvragecollectif
S73. L'Aventure du vivant, par Joël de Rosnay
Daniel Raichvarg
et Jean Jacques
Savants et Ignorants
Une histoire de la vulgarisation
des sciences