Choc Cardiogénique

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11-038-B-10

ENCYCLOPÉDIE MÉDICO-CHIRURGICALE 11-038-B-10

Choc cardiogénique
MD Schaller R é s u m é. – Un état de choc peut se développer lors d’un infarctus myocardique étendu
P Eckert du ventricule gauche ou du ventricule droit, d’une rupture d’un cordage ou d’un pilier de la
D Tagan valve mitrale, d’une perforation du septum ou de la paroi ventriculaire suite à une nécrose,
dans l’évolution d’une myocardite ou des cardiomyopathies, des valvulopathies, lors d’une
tamponnade, d’embolie pulmonaire ou encore après chirurgie cardiaque. Le traitement
consiste à suppléer à la fonction cardiaque essentiellement par des vasopresseurs, des
inotropes, éventuellement des vasodilatateurs, une oxygénation suffisante en recourant au
besoin à la ventilation mécanique, une assistance circulatoire éventuellement ventriculaire.
La cause de l’état de choc doit être corrigée dans la mesure du possible. Ainsi, lors d’un
infarctus aigu, tout doit être mis en œuvre pour reperfuser au plus vite le myocarde :
thrombolyse associée à une pompe à contre-pulsion intra-aortique, angioplastie ou pontages
chirurgicaux. Les complications mécaniques liées à l’infarctus ainsi que les valvulopathies
relèvent de la chirurgie. Lorsque l’état de choc persiste, en dépit de toutes les mesures, une
transplantation peut être envisagée, une assistance mécanique circulatoire permettant
d’attendre la disponibilité d’un greffon.
© 1999, Elsevier, Paris.

Définition
L’état de choc cardiogénique est l’expression d’une défaillance aiguë et – une oligurie (inférieure à 20 mL/h) ;
sévère de la pompe cardiaque entraînant une altération profonde de la – une altération de l’état de conscience (agitation, confusion, coma).
perfusion périphérique et une anoxie tissulaire progressive. Il est défini
cliniquement par la présence des signes suivants [95] : Le profil hémodynamique est caractérisé par un débit cardiaque effondré
(index cardiaque inférieur à 2 L/min/m2) associé le plus souvent à des
– une hypotension artérielle systolique (inférieure à 90 mmHg) ou une chute pressions de remplissage ventriculaire élevées (pression artérielle pulmonaire
de pression artérielle systolique de 30 mmHg par rapport à la valeur de base, bloquée, ou PAPO, supérieure à 18 mmHg) et des résistances systémiques très
pendant une durée minimale de 30 minutes ; fortement augmentées [18, 79]. Plus rarement, l’état de choc est lié à une
– des troubles de la perfusion périphérique (extrémités froides, cyanosées et défaillance élective ou prédominante du ventricule droit ; la pression
marbrées) ; auriculaire droite devient égale ou supérieure à celle de l’oreillette gauche
– une sudation profuse ; [20, 63].

Classification physiopathologique
Les facteurs qui déterminent la performance ventriculaire sont au nombre de – la contraction ;
cinq :
– la fréquence cardiaque.
– la précharge, égale au volume télédiastolique ventriculaire, qui dépend de
la pression transmurale et de la distensibilité ventriculaire (relation pression- Les différents types de chocs cardiogéniques peuvent être logiquement
volume diastolique ventriculaire) ; classés en fonction de l’altération primaire de l’un ou l’autre des déterminants
– la contractilité myocardique ; du débit cardiaque. Cette classification est nécessairement schématique, vu la
complexité des mécanismes en cause qui ne permet pas toujours de rapporter
– la postcharge, qui désigne la tension pariétale instantanée durant l’éjection à un facteur unique la responsabilité des désordres fonctionnels observés. Elle
ventriculaire, et qui dépend du rayon de la cavité et de la pression a le mérite d’identifier le mécanisme initial et d’en déduire les principes
intraventriculaire au cours de la systole ; thérapeutiques [42, 46].

Anomalies de la précharge
Marie-Denise Schaller : Privat-docent et agrégée, médecin-chef.
Philippe Eckert : Médecin associé. Diminution
Damien Tagan : Médecin associé.
Service B du département de médecine interne, division des soins intensifs de médecine, – Par diminution de la durée de la diastole (tachycardie, tachyarythmie).
centre hospitalier universitaire Vaudois, CH-1011 Lausanne, Suisse.
© Elsevier, Paris

– Par diminution de la distensibilité ventriculaire (ischémie aiguë,


cardiomyopathie hypertrophique, cardiomyopathie restrictive).
Toute référence à cet article doit porter la mention : Schaller MD, Eckert P et Tagan D.
Choc cardiogénique. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Cardiologie-Angéiologie, 11-038-
B-10, Anesthésie-Réanimation, 36-840-C-10, 1999, 12 p.
– Par augmentation de la pression extrapariétale (tamponnade, pression
positive de fin d’expiration [PEP]).
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Augmentation Augmentation de la postcharge


– Par incompétence valvulaire (insuffisance aortique ou mitrale aiguë). Par obstacle à l’éjection ventriculaire (embolie pulmonaire massive, sténose
– Par shunt gauche-droit (perforation septale). aortique).
Asynergie de la contraction
Diminution de la contractilité
Par retard ou défaut de réponse à l’impulsion électrique (ischémie aiguë,
– Par perte d’un territoire contractile (infarctus myocardique, contusion infarctus myocardique aigu, anévrisme ventriculaire).
myocardique).
– Par atteinte diffuse du myocarde (myocardite aiguë ; cardiomyopathie Diminution extrême de la fréquence cardiaque
dilatée au stade terminal ; atteinte toxique ou médicamenteuse ; troubles Par trouble de l’activité sinusale ou de la conduction auriculo-
métaboliques, après circulation extracorporelle [CEC]). ventriculaire (bloc atrioventriculaire complet).

Aspects cliniques et thérapeutiques


Pour une meilleure approche clinique, les différents types de chocs
cardiogéniques sont abordés ici en fonction de leur étiologie et non selon la
classification physiopathologique décrite (cf supra) [4, 7, 16, 77].

Infarctus myocardique aigu


Malgré les progrès thérapeutiques de ces dernières années, un état de choc se
développe chez 5 à 10 % des patients ayant un infarctus myocardique aigu
[4, 33, 51, 77]. Il peut être dû à une amputation étendue de la masse contractile du

ventricule gauche, à des lésions circonférentielles du ventricule droit ou à une


complication mécanique [3]. Selon certains auteurs, la grande majorité des
états de choc survient dans les premières 24 heures [51]. D’autres rapportent
une survenue plus tardive [33, 47]. Ces différences pourraient être le reflet des
petits collectifs de patients inclus dans ces études [51]. Quoi qu’il en soit, la
mortalité reste très élevée, entre 50 et 90 % [16, 33], et voisine de 100 % s’il
s’agit d’une perte progressive et massive de la fonction myocardique non due
à une complication mécanique. Des facteurs de risque de développer un choc
cardiogénique ont été identifiés, parmi lesquels il faut citer un âge supérieur à
65 ans, un pic de l’activité de la fraction MB (muscle-brain) de la créatine
phosphokinase (CK-MB) supérieur à 160 UI/L, un diabète, un infarctus
myocardique préalable, une fraction d’éjection ventriculaire gauche 1 L’augmentation de la pression télédiastolique ventriculaire gauche (PTVG) couplée
inférieure à 35 % [47] , le sexe féminin, des antécédents d’artériopathie à la diminution de la pression de perfusion aortique compromet le flux coronarien, alors que
les besoins myocardiques en O2 sont accrus par la stimulation adrénergique. Il s’ensuit une
cérébrale ou périphérique [62]. aggravation de l’ischémie qui aboutit à une extension de la zone infarcie. P aortique :
pression aortique ; VG : ventricule gauche.

Infarctus massif du ventricule gauche La tachycardie et la diminution de la pression différentielle systémique sont
Les études anatomopathologiques ont démontré que, chez la plupart des généralement les premiers signes de la chute du débit cardiaque. À un stade
malades décédés d’un état de choc, la nécrose est très étendue, intéressant plus plus avancé l’hypotension s’installe, le pouls devient filant, les extrémités
de 40 % de la masse ventriculaire gauche [3]. Toutefois, la quantité maximale pâles, froides et moites. À l’auscultation cardiaque, les bruits sont lointains
de nécrose myocardique incompatible avec la survie n’a pas été établie, des (baisse de contractilité) avec présence d’un galop protodiastolique (B3)
patients ayant survécu à une destruction de près de 70 % de la masse souvent associé à un galop présystolique (B4), ou d’un galop de sommation.
ventriculaire gauche [67]. La lésion peut être unique ou se constituer à la faveur La dyspnée et la tachypnée peuvent évoluer vers une respiration périodique
de plusieurs dommages de moindre étendue et d’âges différents. Elle de type Cheyne-Stokes. La stase ou l’œdème pulmonaire, les troubles de l’état
correspond le plus souvent à des obstructions multiples réparties sur les trois de conscience et l’oligurie sont habituels à ce stade.
troncs coronariens ; elle est plus rarement liée à une occlusion unique La libération de la CK et de son isoenzyme CK-MB (plus spécifique d’une
intéressant le tronc commun ou la portion proximale de l’interventriculaire lésion du muscle myocardique) peut être soit précoce et massive, reflétant une
antérieure. lésion d’emblée étendue (si elle ne survient pas dans le cadre d’une
Une fois installé, l’état de choc contribue à aggraver l’ischémie myocardique : thrombolyse ou reperfusion par dilatation coronarienne), soit plus modérée
l’élévation de la pression diastolique ventriculaire compromet la perfusion mais prolongée dans le temps, suggérant une extension progressive de la
des territoires sous-endocardiques, alors que simultanément l’hypotension nécrose [45]. Au cours du choc cardiogénique, il est habituel d’observer une
systémique diminue la pression de perfusion des vaisseaux collatéraux. Ce élévation disproportionnée de l’activité des CK totales par rapport à celle de
cercle vicieux conduit à l’extension de la nécrose comme en témoignent les l’isoenzyme CK-MB. Ce phénomène traduit l’existence d’une
lésions d’âges différents retrouvées à l’autopsie et à une dégradation rhabdomyolyse associée d’origine anoxique. La troponine I, normalement
fonctionnelle progressive (fig 1) [7, 45]. indétectable dans le sérum, est un marqueur très précoce et hautement
Par ailleurs, l’état de choc déclenche généralement une stimulation spécifique d’une lésion myocardique. Elle pourrait à l’avenir remplacer le
vasoconstrictrice intense, comme en attestent les concentrations plasmatiques dosage de la CK-MB.
extrêmes de catécholamines, d’angiotensine II, d’aldostérone et de L’examen des gaz du sang montre habituellement une acidose métabolique,
vasopressine [89]. Par leurs effets sur le tonus artériolaire et veinulaire, ces compensée ou non, plus rarement une acidose mixte (œdème pulmonaire
agents augmentent la postcharge et la précharge et contribuent à accroître les asphyxiant) ; le gradient alvéoloartériel d’oxygène est franchement augmenté
besoins en oxygène du myocarde ischémique. Ce déséquilibre s’accentue et l’hypoxémie est marquée ; l’élévation du taux artériel de lactate est
avec le développement de lésions pulmonaires anoxiques (poumon de choc). constante ; elle reflète l’anoxie tissulaire et constitue de ce fait un bon indice
La conjonction d’une augmentation de la perméabilité capillaire et d’une de la durée et de la gravité du choc.
élévation de la pression intraluminale conduit à une extravasation massive de À la radiographie thoracique, les signes d’œdème pulmonaire se manifestent
liquide dans les espaces interstitiels et alvéolaires. Il en résulte une admission par un infiltrat interstitiel (lignes B de Kerley), voire alvéolo-interstitiel, et
veineuse accrue avec aggravation de l’hypoxémie et réduction une turgescence hilaire. La silhouette cardiaque n’est pas toujours agrandie
supplémentaire du transport d’oxygène au myocarde et à la périphérie. (diminution de la compliance ventriculaire).
Un examen échocardiographique doit être réalisé sans délai, au lit du malade.
Clinique et diagnostic Il montre habituellement une akinésie étendue avec hyperkinésie des
Le diagnostic d’infarctus myocardique aigu est établi dès que deux des trois territoires sains, plus rarement une hypokinésie globale. Il permet d’exclure
éléments suivants sont présents, à savoir symptômes évocateurs, une cause mécanique à la décompensation cardiaque (communication
modifications électrocardiographiques typiques et ascension de l’activité des interventriculaire, dysfonction mitrale, rupture de cordage) ou une
enzymes spécifiques. tamponnade.

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l’effet hémodynamique optimal [65]. En cas de persistance de l’état de choc,


un stimulateur séquentiel auriculoventriculaire permet de rétablir le bénéfice
de la contraction auriculaire sur le remplissage ventriculaire.
• Troubles électrolytiques, métaboliques et acidobasiques
(L/min/m2)

On connaît les effets délétères de certains désordres électrolytiques et


métaboliques (hypokaliémie, hypomagnésémie, hypocalcémie,
2 Relation entre index hypophosphatémie et hyperglycémie) sur la contractilité et le seuil
cardiaque (IC) et pression d’arythmies. Leur correction ne doit pas être négligée.
artérielle pulmonaire blo-
quée (PAPO) permettant L’acidose métabolique, reflet de la gravité de l’état de choc, exerce une action
de définir quatre sous- inotrope négative et diminue l’effet des catécholamines. Toutefois,
groupes (I-IV) en choisis- l’administration de bicarbonates, même en présence d’un pH très bas, reste
sant comme valeurs criti- controversée, et nous ne recommandons pas cette pratique.
ques 2,2 L/min/m_ pour IC
PAPO (mmHg) et 18 mmHg pour PAPO.
• Médicaments antérieurs
Un traitement chronique antérieur par des diurétiques, digitaliques,
La coronarographie réalisée en urgence, davantage à but thérapeutique que β-bloquants ou anticalciques est à interrompre.
diagnostique, met en évidence soit une occlusion unique et proximale d’une
artère principale, soit une atteinte diffuse pluritronculaire. La • Surveillance hémodynamique et investigations
ventriculographie, rarement effectuée lors d’un état de choc, confirme
La mise en place d’une sonde de Swan-Ganz est indispensable : elle permet
l’effondrement de la contractilité.
non seulement d’apprécier les caractéristiques hémodynamiques initiales,
Le tableau hémodynamique typique (sous-groupe IV de Forrester) [28] inclut d’identifier une cause mécanique du choc, mais aussi de faire un choix
une pression artérielle systémique abaissée, une PAPO élevée (supérieure à thérapeutique et d’en mesurer les effets [ 9 3 , 9 5 ] . Lorsque le choc est
18 mmHg), un index cardiaque franchement abaissé (inférieur à 2 L/min/m2), vraisemblablement secondaire à une complication mécanique de l’infarctus,
et des résistances artérielles systémiques augmentées (supérieures à 2 000 il est recommandé de pratiquer d’emblée un échocardiogramme par voie
dyn/s/cm5). La tachycardie sinusale est habituelle et d’autant plus marquée transthoracique (ETT). Cet examen, associé au doppler, permet de poser un
que le choc est plus sévère. En présence d’hypovolémie associée, la PAPO diagnostic de certitude. Sauf exception, une coronarographie sera indiquée
peut être paradoxalement normale ; elle s’élève rapidement avec l’expansion avant la réparation chirurgicale. L’ETT est également utile pour déterminer
volémique, sans amélioration concomitante du débit cardiaque (passage du la fraction d’éjection ventriculaire gauche, l’étendue de l’infarctus et l’atteinte
sous-groupe III au sous-groupe IV) (fig 2). ou non des cavités droites. En cas de difficultés techniques,
l’échocardiographie transœsophagienne (ETO) peut être envisagée chez les
Traitement patients en ventilation mécanique, notamment en situation postopératoire.
Le traitement vise d’une part à limiter le déséquilibre entre les besoins et les
apports en oxygène et, d’autre part, à corriger la dysfonction ventriculaire en Mesures spécifiques
améliorant la contractilité et les conditions de charge[16, 42]. En d’autres termes, • Expansion volémique
il s’agit d’interrompre le cercle vicieux qui conduit à une extension
progressive de la nécrose myocardique. Il faut rapidement rétablir des Le choc cardiogénique est défini par une diminution du débit cardiaque
conditions hémodynamiques assurant la perfusion et l’oxygénation des tissus associée à une augmentation des pressions de remplissage (PAPO supérieure
tout en envisageant la procédure la plus adaptée pour obtenir une reperfusion à 18 mmHg). Néanmoins, au stade aigu de l’infarctus, il peut arriver qu’une
coronarienne [77]. hypovolémie relative ou absolue (diurétiques, vomissements, sudations
profuses) s’ajoute à la défaillance myocardique et normalise faussement les
Mesures générales pressions de remplissage (sous-groupe III de Forrester) [28]. Aussi, lorsque la
baisse du débit s’accompagne d’une PAPO inférieure à 18 mmHg, il convient
• Douleur d’effectuer une expansion volémique sous contrôle hémodynamique. On peut
Elle entraîne une stimulation adrénergique et par-là même accroît la utiliser un substitut du plasma ou un cristalloïde, administré à raison de 100-
consommation d’oxygène, ce qui justifie l’administration précoce d’opiacés 200 mL en 10 minutes. Si un effet salutaire s’ensuit (augmentation du débit
à doses suffisantes (sulfate de morphine 5 mg en intraveineux, à répéter en cardiaque, de la pression artérielle ou de la diurèse), sans augmentation
fonction de la réponse). La morphine diminue à la fois la pré- et la postcharge excessive des pressions de remplissage (passage du sous-groupe III au sous-
et exerce un effet bénéfique sur les besoins myocardiques en oxygène. groupe I), il est indiqué de poursuivre l’expansion volémique jusqu’à
obtention d’une PAPO maximale de 20 mmHg [42]. L’apparition d’une stase
• Fièvre pulmonaire ou l’élévation excessive de la PAPO implique l’association
d’inotropes perfusés à doses progressives jusqu’à obtention d’un débit
Fréquente à la phase aiguë de l’infarctus, elle augmente le niveau métabolique
adéquat.
et doit être corrigée par des antipyrétiques.
• Agents inotropes et vasopresseurs
• Oxygénation
L’oxygène est administré par sonde nasale (3-4 L/min) ou par masque Les agents inotropes positifs [11], quel que soit leur mode d’action, ont pour
(concentration de l’oxygène dans l’air inspiré [FiO2] : 0,3-0,5). Lorsque effet de redresser la pente de la relation pression/volume. Ils entraînent une
l’hypoxémie est majeure et n’est pas corrigée par l’inhalation d’un mélange réduction du volume télésystolique avec augmentation du volume d’éjection
hyperoxique, lorsqu’il existe une hypercapnie associée, ou lorsque la dyspnée lorsque le volume télédiastolique est maintenu. Les inotropes les plus
s’accompagne de signes d’épuisement, une ventilation mécanique en pression couramment utilisés dans le choc cardiogénique sont les agonistes des
positive doit être envisagée. On a le choix entre l’application d’une pression récepteurs β-adrénergiques qui, en activant l’adénylcyclase, augmentent la
positive continue (+ 5 cmH2O par exemple), par masque facial (CPAP : production intracellulaire d’adénosine monophosphate cyclique (AMPc) et,
continuous positive airway pressure), ou une ventilation mécanique non par-là, le flux de calcium à travers les canaux lents. Les dérivés de la
invasive (patient conscient et suffisamment collaborant) ou invasive, après bipyridine et de l’imidazole augmentent aussi le taux intracellulaire d’AMPc
intubation orotrachéale. Plusieurs bénéfices sont attendus : en inhibant la phosphodiestérase responsable de sa dégradation [8]. Les agents
vasopresseurs augmentent la pression artérielle systémique moyenne et par-là
– une facilitation de la vidange ventriculaire gauche sous l’effet de la même la perfusion coronarienne. Par stimulation des récepteurs
PEP [15] ; α-périphériques, ils induisent une vasoconstriction marquée.
– une diminution des besoins en oxygène par réduction du travail respiratoire
favorisant la redistribution du débit cardiaque vers d’autres territoires ; • Dopamine
– une amélioration des échanges gazeux. Elle possède à la fois une action directe par stimulation des récepteurs
cardiaques adrénergiques et une action indirecte par libération de
• Troubles du rythme et de conduction
noradrénaline, dont elle est le précurseur naturel [32]. Ses effets multiples sont
La tachycardie (fibrillation ou flutter auriculaire, tachycardie ventriculaire) attribués à une flexibilité particulière de sa molécule, qui lui confère la
compromet le remplissage ventriculaire et aggrave l’ischémie myocardique propriété de se fixer sur des récepteurs différents β, α et dopaminergiques
en réduisant le temps diastolique, tout en augmentant les besoins spécifiques (tableau I).
métaboliques. La correction peut être pharmacologique et/ou électrique. Administrée par voie intraveineuse à faible dose (0,5-2 µg/kg/min), la
La bradycardie sur bloc auriculoventriculaire constitue une indication dopamine induit une vasodilatation essentiellement rénale et mésentérique
formelle à l’entraînement systolique. Sa fréquence est réglée en fonction de par stimulation élective des récepteurs dopaminergiques postsynaptiques

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Tableau I. – Effets adrénergiques et dopaminergiques des catécholamines. Tableau II. – Choc cardiogénique : médicaments et posologie en fonction de la
réponse hémodynamique.
β1 β2 α DA1 DA2
Médicaments Doses (µg/kg/min)
Noradrénaline +++ 0 +++ 0 0
Inotropes positifs et vasopresseurs
Adrénaline +++ ++ +++ 0 0
Hypotension modérée
Dopamine ++ + +/++ +++ +++
Dobutamine 5-20
Dobutamine +++ ++ + 0 0 + dopamine 2-5
DA1, DA2 récepteurs dopaminergiques. Hypotension marquée
Dopamine 10-20
+ dobutamine 5-30
(DA1). Il s’y ajoute une inhibition de la libération de noradrénaline par
Hypotension réfractaire, choc grave
stimulation des récepteurs DA2 présynaptiques. L’augmentation des doses, Noradrénaline 0,02-3
au-delà de 5 µg/kg/min, provoque le recrutement cumulatif des récepteurs α + dopamine 10-20
qui conduit à une vasoconstriction systémique progressive. À dose + dobutamine 5-30
intermédiaire (2-5 µg/kg/min), la dopamine exerce un effet β1, ce qui a pour
conséquence d’augmenter le débit cardiaque, le volume d’éjection systolique
et la pression artérielle. Toutefois, en dépit de son inotropisme, la dopamine • Inhibiteurs de la phosphodiestérase (PDE),
tend à élever les pressions de remplissage ventriculaire. L’origine de ce tels que amrinone, milrinone, énoximone et piroximone [8]
phénomène n’est pas claire : on invoque l’effet de la veinoconstriction sur la Ils combinent un effet inotrope positif et vasodilatateur par action directe sur
précharge ou l’augmentation de la postcharge secondaire à la vasoconstriction le tonus de la musculature lisse. La réponse à l’administration intraveineuse
artériolaire. est caractérisée par une amélioration de la performance cardiaque, assez
L’intérêt de la dopamine est d’améliorer la performance ventriculaire sans comparable à celle obtenue par l’association dobutamine-nitroprussiate de
abaisser la pression artérielle et de stimuler la diurèse hydrosodée par son sodium : augmentation du débit cardiaque, réduction des pressions de
action sur le flux plasmatique rénal et la cellule tubulaire proximale. Ses remplissage, augmentation du dP/dt ventriculaire gauche et abaissement des
propriétés en feraient l’agent de choix du traitement de l’insuffisance résistances périphériques et coronariennes. À doses élevées, les effets
cardiaque aiguë avec tension basse et oligurie, mais son emploi est limité dans vasodilatateurs prédominent sur l’action inotrope et le danger existe
les cardiopathies ischémiques, du fait de sa moins bonne tolérance d’aggraver l’hypotension chez des malades dont la perfusion myocardique est
(arythmies) et de ses effets systémiques. À doses élevées (supérieures à largement dépendante de la pression artérielle diastolique. Leur emploi dans
10 µg/kg/min), la dopamine entraîne une vasoconstriction périphérique le traitement du choc cardiogénique est donc limité. Des études préliminaires
réalisant une augmentation néfaste de la postcharge et une réduction du flux ont démontré l’intérêt potentiel d’une association des inhibiteurs de la PDE
plasmatique rénal. C’est la raison pour laquelle on a intérêt à l’associer à la aux β-adrénergiques. Cependant, leur principale indication reste
dobutamine en choisissant une dose initiale voisine de 5 µg/kg/min qui est l’insuffisance cardiaque grave, non ischémique, réfractaire aux
augmentée en fonction de la réponse obtenue. Cette technique de titration vise β-adrénergiques par désensibilisation des récepteurs, et le syndrome de bas
à rétablir des conditions cardiocirculatoires adéquates en utilisant des doses débit après chirurgie cardiaque en CEC [31] ; leur relative longue durée
minimales d’inotropes, afin d’éviter les effets secondaires tout en prévenant d’action rend toutefois leur maniement difficile en situations aiguës.
les phénomènes de tolérance. Toutefois, lorsque l’effet presseur est
essentiellement souhaité, les doses peuvent être augmentées en fonction de la • Glycosides digitaliques
réponse clinique à 20 µg/kg/min, voire davantage. Ils ont un effet inotrope largement inférieur à celui des agents
• Noradrénaline β-adrénergiques [37], tout en ayant une marge thérapeutique beaucoup plus
étroite et une durée d’action prolongée. Ils n’ont pas d’indication dans cette
Elle possède une action α- et β1-adrénergique et vasoconstrictrice artériolaire situation.
puissante (tableau I). Son emploi dans le choc cardiogénique est restreint aux
cas où l’hypotension artérielle reste réfractaire aux doses élevées de • Ventilation en pression positive
dopamine. La dose initiale de 0,02 µg/kg/min en perfusion intraveineuse peut
L’œdème bronchique et alvéolaire augmente les résistances à l’écoulement
être augmentée progressivement jusqu’à restauration d’une pression artérielle
moyenne voisine de 65-70 mmHg [7, 16]. Dans les états de choc majeur, il est gazeux et diminue la compliance pulmonaire. Il en résulte, chez le patient en
parfois nécessaire de recourir à des doses d’emblée élevées, par exemple de respiration spontanée, la génération de pressions inspiratoires
l’ordre de 0,5 à 3 µg/kg/min. Le gain escompté est d’améliorer la perfusion intrathoraciques fortement négatives qui sont susceptibles de modifier les
coronarienne en élevant la pression diastolique aortique. Il ne faut toutefois conditions de charge ventriculaire :
pas oublier que la noradrénaline augmente les besoins métaboliques du – le retour veineux accru sous l’effet du gradient favorable entre les veines
myocarde, atténuant ainsi le bénéfice escompté. systémiques et l’oreillette droite, conduit à l’augmentation du volume
télédiastolique ventriculaire droit et, par interférence ventriculaire, à la
• Dobutamine compression diastolique ventriculaire gauche ;
Elle est essentiellement un agoniste des récepteurs β1-adrénergiques, mais – l’élévation du gradient de pression systolique transpariétal compromet la
elle possède en plus, par son isomère lévogyre, une action sur les récepteurs vidange du ventricule gauche et entraîne de ce fait l’augmentation du volume
α1-myocardiques qui lui confère un effet inotrope complémentaire sans télésystolique et la réduction du volume d’éjection systolique.
accélération de la fréquence cardiaque. À cela s’ajoute une stimulation des Il a été montré que, dans ces conditions, l’élévation de la pression
récepteurs α1-périphériques qui compense partiellement les effets relaxants intrathoracique qui résulte d’une ventilation assistée (CPAP ou PEP) améliore
de la stimulation β 2 -adrénergique sur le tonus artériolaire et veineux la performance ventriculaire gauche et augmente le débit cardiaque [85, 86] alors
(tableau II). La réponse hémodynamique à cette double action se manifeste qu’elle produit l’inverse chez le sujet sain [15]. Cette différence de réponse
par une augmentation du volume d’éjection systolique et du débit cardiaque s’explique par le fait que le ventricule gauche défaillant est extrêmement
sans accélération notable de la fréquence, un abaissement des pressions de sensible aux variations de la postcharge, alors qu’il tolère relativement bien
remplissage et une diminution modérée des résistances périphériques. Cette une diminution de la précharge (fig 3). En d’autres termes, lorsque la pression
dernière est due en partie à l’abaissement réflexe du tonus vasomoteur sous de remplissage gauche est suffisamment élevée (PAPO supérieure à
l’effet de l’augmentation du débit cardiaque et en partie à l’action directe de 18 mmHg), le bénéfice de l’élévation de la pression intrathoracique sur
la dobutamine sur les récepteurs β2-adrénergiques. L’effet sur la pression l’éjection ventriculaire gauche se traduit par une augmentation du débit
artérielle est variable et dépend de l’importance relative de l’augmentation cardiaque en dépit de la diminution de la précharge ; lorsque les pressions de
du débit cardiaque et de la vasodilatation périphérique. Ces propriétés remplissage sont plus basses (inférieures à 12 mmHg), les effets sur le retour
particulières font de la dobutamine l’agent inotrope de choix dans le choc veineux prédominent et le débit cardiaque s’abaisse [39]. En pratique, compte
cardiogénique [32]. C’est une substance sûre, d’action rapide, efficace et peu tenu de ces effets opposés, il est prudent d’utiliser une faible pression positive
arythmogène. De plus, comme l’ont démontré plusieurs études initiale (+ 5 cmH2O) en associant au besoin une expansion volémique sous
expérimentales et cliniques, la dobutamine ne compromet pas les conditions contrôle hémodynamique par Swan-Ganz pour prévenir une réduction de la
d’oxygénation myocardique et ne provoque pas d’extension de la nécrose au précharge et une baisse du débit cardiaque. Il est important de ne pas
stade aigu de l’infarctus du myocarde. En bref, la dobutamine améliore la provoquer d’hyperinflation pulmonaire et de surveiller de près la réponse
fonction ventriculaire systolique sans beaucoup modifier les conditions de hémodynamique, pour choisir la pression intrathoracique optimale qui permet
charge. Elle s’administre sous contrôle hémodynamique à doses progressives d’assurer le meilleur débit d’oxygène à la périphérie (DO2). Il faut savoir que
(5-30 µg/kg/min). Elle peut être utilement associée à la dopamine le sevrage ventilatoire s’accompagne d’un risque accru de dysfonction
(5-20 µg/kg/min) [87], voire à la noradrénaline, lorsque l’hypotension artérielle ventriculaire et d’ischémie myocardique, pouvant exiger l’administration de
demeure préoccupante. β-adrénergiques et de vasodilatateurs.

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Cardiologie-Angéiologie CHOC CARDIOGÉNIQUE 11-038-B-10

ventriculaires implantées à pompe électromagnétique type Novacor, qui


requièrent une infrastructure lourde et des compétences particulières [64, 76].
Toutes ces techniques permettent d’assurer la perfusion coronarienne, de
diminuer le travail cardiaque en réduisant les pressions et volumes
intraventriculaires tout en garantissant un débit et une perfusion périphérique
suffisante, y compris lors d’arythmies malignes (tachycardie ou fibrillation
ventriculaire). De préférence, un système simple (par exemple Hemopumpt)
sera inséré initialement, afin de stabiliser le patient avant de procéder à une
angioplastie ou à une revascularisation chirurgicale en urgence. Le temps de
l’assistance circulatoire devrait permettre au muscle cardiaque de récupérer
et de sortir de la sidération que l’on peut observer lorsqu’ une zone ischémique
est reperfusée. En cas de persistance du choc et d’incapacité de sevrage, une
transplantation peut être envisagée [17].
A
• Thrombolyse
3 Lors de dysfonction ventri-
culaire gauche (IC), une diminu-
Il est actuellement bien établi que le traitement thrombolytique administré au
tion même importante de la pré- stade aigu d’un infarctus myocardique limite l’étendue de la nécrose et
charge n’entraîne qu’une faible diminue la mortalité [40, 44, 53, 54]. Toutefois, lorsqu’un infarctus se complique
diminution du volume d’éjection d’un état de choc, l’efficacité de la thrombolyse est moins évidente [9]. Il faut
systolique (VES), contrairement
à ce qui est observé chez le sujet
rappeler que la majorité des études cliniques sur la thrombolyse dans
sain (N) (A). Lors de dysfonction l’infarctus myocardique avaient exclu les états de choc [21]. Dans les trois
ventriculaire gauche (IC), une di- grandes études qui ont inclu et analysé spécifiquement le devenir des patients
minution de la postcharge en- en état de choc, la thrombolyse ne paraît pas d’un grand apport. Ainsi, dans
traîne une augmentation impor-
tante du VES. Le VES du sujet
GISSI-1, incluant près de 12 000 patients, pour les 2,4 % d’entre eux qui se
sain (N) n’est pas dépendant des sont présentés en état de choc, la mortalité s’est élevée à 70 %, qu’ils aient été
variations de la postcharge, sauf traités par streptokinase ou placebo [40] . Dans les deux autres études,
lorsqu’elle atteint des valeurs l’activateur tissulaire du plasminogène (rt-PA) ne s’est pas avéré supérieur à
B extrêmement élevées (B). la streptokinase, la mortalité demeurant entre 60 et 80 %. Il faut par ailleurs
relever une incidence d’état de choc relativement basse : 1,6 % pour
En dehors de ses effets sur la performance ventriculaire, la CPAP diminue le plus de 20 000 patients de l’International Study Group [53] et 0,8 % des 41 000
travail respiratoire et améliore les échanges gazeux, en réduisant les inégalités patients de GUSTO 1 [44], suggérant des biais de sélection et la non-inclusion
de distribution et le shunt intrapulmonaire ; simultanément, l’amélioration des chocs développés après l’hospitalisation.
des conditions hémodynamiques permet une élévation du contenu en oxygène L’inefficacité de la thrombolyse a été attribuée à des causes hémodynamiques,
du sang veineux mêlé. Enfin, en réduisant la demande en oxygène de la mécaniques et métaboliques. Il est probable qu’un gradient de pression
musculature respiratoire, la CPAP favorise une meilleure répartition du débit suffisant soit nécessaire pour permettre à l’agent thérapeutique de pénétrer
d’oxygène à la périphérie. dans le caillot et de le lyser [83]. Le concept thérapeutique doit donc viser à
• Assistance circulatoire par contrepulsion intra-aortique
restaurer une pression de perfusion coronarienne suffisante pour que l’agent
thrombolytique puisse agir. Chez les patients dont la pression artérielle a pu
La contre-pulsion intra-aortique (CPIA) vise à diminuer les résistances à être restaurée par noradrénaline ou dopamine, l’altéplase s’est révélée
l’éjection ventriculaire, tout en augmentant la pression diastolique aortique et efficace, avec une survie de 100 %. Ceci contraste avec le décès de ceux pour
par là même le débit coronarien [23, 34]. Le principe en est simple : il consiste à lesquels le thrombolytique et les vasopresseurs sont restés sans effet [30]. Il
introduire dans l’artère fémorale par voie percutanée un cathéter dont paraît donc légitime d’essayer par tous les moyens de rétablir et de maintenir
l’extrémité, munie d’un ballon, est avancée dans l’aorte thoracique à l’origine un flux coronarien.
de l’artère sous-clavière gauche. Un système asservi à • Thrombolyse et pompe à CPIA
l’électrocardiogramme, ou à un capteur de pression intra-artériel, détermine
les phases d’inflation et de déflation du ballon. Lors de son inflation, La pompe à CPIA, en augmentant la pression diastolique et par-là même la
immédiatement après la fermeture des valves aortiques, le ballon déplace un perfusion coronarienne, accroît l’efficacité de la thrombolyse et ce, tant avec
volume de sang égal à son propre volume. Il augmente ainsi la pression des pressions artérielles normales [43] que lors d’état de choc
[84, 94]. Dans un choc expérimental, la taille de l’infarctus a été diminuée et la
diastolique aortique et, par là, la perfusion des vaisseaux coronariens et
cérébraux. Sa brusque déflation, immédiatement avant l’ouverture des valves survie augmentée lorsque la CPIA fut associée à la thrombolyse [80]. En
aortiques, provoque une diminution importante de l’impédance aortique. Le clinique, cette approche a permis une survie intrahospitalière de 70 à 90 % [58].
bénéfice de la CPIA se manifeste habituellement par une amélioration Les meilleurs résultats ont été obtenus lorsqu’une revascularisation
immédiate de la performance ventriculaire gauche : augmentation du volume chirurgicale ou par angioplastie a pu être réalisée ultérieurement, après
d’éjection, diminution des pressions de remplissage associée à une élévation stabilisation hémodynamique [58, 82] , avec un effet bénéfique toujours
notable de la pression diastolique aortique, reprise de la diurèse et observable à une année d’évolution. Les complications de la mise en place
amélioration souvent évidente de l’état clinique [68]. Toutefois, dans ces d’une CPIA après thrombolyse ne sont pas nécessairement accrues [38, 58].
formes où la lésion est très étendue, le sevrage est généralement • Angioplastie coronarienne par voie percutanée (PTCA)
problématique et le malade devient dépendant de l’assistance circulatoire.
L’angioplastie effectuée en urgence comme traitement du choc cardiogénique
Théoriquement, le recours précoce à la CPIA devrait permettre de récupérer
a été rapportée il y a plus de 10 ans : le taux de succès avoisinait 90 %,
les territoires en voie de nécrose. Pratiquement, l’expérience montre que le
permettant des réductions substantielles de mortalité. Au cours des années
bénéfice obtenu par la CPIA seule, sans reperfusion ni revascularisation
suivantes, une vingtaine d’études, recrutant environ 600 patients, vont dans
coronarienne, ne dure le plus souvent que le temps de l’assistance. La
le même sens : l’échec de la dilatation est associé à une mortalité de 80 % (70
mortalité reste élevée, de l’ordre de 80 à 90 % dans la plupart des séries [78, 90].
à 100 %) alors que ce taux avoisine 30 % (15 à 45 %) lorsque le flux
C’est la raison qui incite souvent à y renoncer, mais probablement à tort [5],
coronarien est rétabli [10, 29, 48, 60, 74, 92]. Le bénéfice acquis est encore observable
comme suggéré par une étude comparative [99].
à une année. Toutefois, les séries rapportées sont petites et des biais de
Les complications de cette technique sont rares dans des mains sélection ont été évoqués, puisqu’il s’agit de séries non randomisées, parfois
expérimentées [26] . Il faut citer l’ischémie des membres inférieurs, les rétrospectives [50]. Dans un registre international sur le choc cardiogénique [52],
embolies artérielles, les hémorragies au point de ponction, l’infection et la 58 % des 253 patients recrutés ont eu un cathétérisme cardiaque, suivi d’une
thrombopénie [ 2 3 ] . La CPIA est contre-indiquée en présence d’une angioplastie chez 27 d’entre eux. Les patients cathétérisés sont plus jeunes et,
insuffisance valvulaire aortique, et inefficace lors de tachycardies ou de même en l’absence d’angioplastie, leur mortalité est inférieure (53 %) à celle
tachyarythmies qui réduisent par trop la durée d’inflation du ballon. observée sans cathétérisme ni dilatation (84 %).
• Assistance circulatoire ventriculaire Les bénéfices de l’angioplastie ne sont peut-être pas aussi importants et/ou
applicables à tous les patients [50]. Toutefois, dans l’attente de résultats
C’est une option dans le traitement des chocs cardiogéniques, dans l’attente définitifs fournis par des études randomisées prospectives, le recours à cette
d’une revascularisation et de la récupération de la contractilité myocardique thérapie le plus rapidement possible semble justifié, en tout cas pour les
ou d’une transplantation. Initialement et en urgence, on peut recourir à patients jeunes [57].
certains systèmes simples, telle la CEC [49], les pompes centrifuges ou
l’Hemopumpt (Johnson & Johnson International Systems, Rancho Cordova, • Revascularisation chirurgicale
CA). Une fois la situation stabilisée, on peut envisager des techniques plus De nombreuses études, non randomisées, comprenant de petits collectifs,
complexes, telles les prothèses ventriculaires orthotopiques type Jarvik, les rapportent une mortalité périopératoire moyenne de 44 %, allant de 0 à 80 %
assistances avec pompe pneumatique extracorporelle ou les dérivations [2, 10, 59, 77] . Les biais de sélection paraissent encore plus grands que lors

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perfusion coronarienne non seulement diastolique, mais aussi systolique, et


Choc cardiogénique enfin possibilité de suppléance à partir d’anastomoses provenant de l’artère
coronarienne gauche. Ces particularités expliquent la relative rareté de la
(< 24 heures) dysfonction primaire du ventricule droit au cours de l’infarctus aigu.
Bradycardie Toutefois, lorsqu’une nécrose circonférentielle du ventricule droit se
développe à la faveur d’une obstruction complète de la portion proximale de
la coronaire droite et de lésions de l’interventriculaire antérieure, qui limite
Oui Non les processus de suppléance, on voit s’installer un état de choc d’un type
particulier, où les signes d’insuffisance cardiaque droite aiguë prédominent
[20, 56, 63, 91] . Cette forme relativement rare (environ 2 % des nécroses
Atropine Tachycardie (FA, TV)
Pacemaker transmurales) se rencontre parmi les infarctus inféropostérieurs. Elle est
importante à identifier car l’approche thérapeutique est différente et le
Non Oui pronostic plus favorable.
Succès Clinique et diagnostic
Choc +
Cardioversion
électrique Le tableau clinique [20] se manifeste essentiellement par un syndrome de bas
Thrombolyse débit avec hypotension artérielle et hypertension veineuse (distension
jugulaire et stase hépatique) en l’absence de dyspnée ou de congestion
Succès
pulmonaire. À cela s’ajoutent fréquemment les signes d’une dilatation du
Choc + ventricule droit (B3, souffle de régurgitation tricuspidienne et pouls jugulaire)
dans un sac péricardique peu distensible (signe de Kussmaul et pouls
Thrombolyse paradoxal). Les troubles de la conduction sino-auriculaire et
- (Expansion volémique) auriculoventriculaire ne sont pas rares et sont mal tolérés, en raison de la
- Vasopresseurs/inotropes bradycardie et du défaut de remplissage ventriculaire secondaire à la perte
- Oxygène (masque, VMNI-CPAP, VMI) fonctionnelle des oreillettes.
Au plan électrocardiographique, l’élévation du segment ST supérieure à 0,1
mV dans les précordiales droites est un signe précoce, sensible, spécifique
Assistance CPIA mais fugace. Il peut s’y ajouter une perte des ondes R dans les mêmes
ventriculaire + thrombolyse dérivations. Le profil hémodynamique est caractéristique, comprenant une
augmentation disproportionnée de la pression auriculaire droite par rapport à
la gauche, un gradient de pression diastolique pulmonaire normal, une
Coronarographie diminution de l’index cardiaque et systolique et un effondrement du travail
du ventricule droit [20, 93]. Le tracé de pression montre souvent les signes d’une
Lésion dilatable Lésion(s) non dilatable(s) adiastolie (onde y auriculaire profonde et configuration de la courbe
ventriculaire de type early diastolic dip and plateau) témoignant de la
limitation brutale du remplissage du ventricule droit dilaté dans un sac
PTCA Thrombolyse Chirurgie péricardique peu distensible. Il s’y ajoute souvent une réduction
+ caractéristique de l’amplitude de l’ondée systolique sur le tracé de pression
– endroprothèse locale (revascularisation,
= CPIA + artérielle pulmonaire et une augmentation paradoxale de la pression
– CPIA transplantation)
auriculaire droite au cours de l’inspiration (signe de Kussmaul). La
4 Choc cardiogénique. Attitude à suivre lors d’un infarctus compliqué d’état de choc dans diminution du volume d’éjection systolique gauche procède de deux
les premières 24 heures. mécanismes : réduction du remplissage, secondaire à la dysfonction droite, et
FA : fibrillation auriculaire ; TV : tachycardie ventriculaire ; VMNI : ventilation mécanique altération de la géométrie ventriculaire gauche sous l’effet de la dilatation du
non invasive ; VMI : ventilation mécanique invasive ; CPIA : pompe à contrepulsion intra-
aortique ; PTCA : angioplastie coronarienne par voie percutanée ; + : présent. ventricule droit (interférence ventriculaire diastolique). Le phénomène se
traduit par un aplatissement, voire un bombement du septum, maximal en fin
d’angioplastie, les patients âgés ou présentant des comorbidités étant de diastole, qui limite d’autant l’expansion du ventricule gauche.
probablement exclus d’une approche aussi agressive. Cette solution ne doit Dans ces conditions, le remplissage ventriculaire dépend essentiellement de
toutefois pas être écartée, notamment lors d’atteinte pluritronculaire. l’efficacité de la contraction auriculaire, ce qui explique les répercussions
hémodynamiques catastrophiques d’une fibrillation auriculaire, d’un bloc
• Transplantation
auriculoventriculaire complet ou d’une paralysie auriculaire avec rythme
Pour les états de choc se développant tardivement après un infarctus jonctionnel [65]. La chute du débit est encore aggravée lorsqu’il s’ajoute une
myocardique, conséquence d’une nécrose étendue et prolongée, les chances insuffisance tricuspidienne (30 % des cas) ou une augmentation de la
d’obtenir un effet bénéfique par revascularisation sont minimes. Dans cette postcharge du ventricule droit (hypertension pulmonaire, embolie
situation, l’assistance circulatoire ventriculaire permet une stabilisation pulmonaire). Aussi bien à l’échocardiogramme qu’à la scintigraphie, le
jusqu’à l’obtention d’un greffon. Dans une petite série de 15 patients, la survie ventricule droit apparaît dilaté et akinétique en regard d’un ventricule gauche
a été de 70 % après transplantation en urgence [17]. Cette option est toutefois normal ou hypokinétique dans sa portion inféroseptale. L’échocardiogramme
limitée par la pénurie d’organes à disposition. La présence de comorbidités bidimensionnel confirme le mouvement paradoxal du septum et la
ou un âge supérieur à 50 ans diminue fortement les chances de succès. compression ventriculaire gauche.
La figure 4 propose une attitude à suivre lors d’un infarctus compliqué d’état
de choc dans les premières 24 heures. Si, malgré la correction d’une Traitement de l’état de choc
bradycardie ou d’une tachycardie, l’état de choc persiste, il faut exclure une
hypovolémie, introduire rapidement les agents vasopresseurs associés Lorsque l’état de choc est la conséquence d’une atteinte élective du ventricule
éventuellement à des inotropes pour restaurer une pression artérielle, assurer droit, le traitement vise à augmenter le débit cardiaque en améliorant la
l’oxygénation par masque, ou ventilation mécanique non invasive ou précharge du ventricule gauche. Là encore, les mesures répétées de la PAPO
invasive. Si l’état clinique est suffisamment stabilisé, une coronarographie et du débit cardiaque sont indispensables pour diriger le remplissage
peut être effectuée d’emblée permettant de procéder à une angioplastie vasculaire et juger de ses effets.
(PTCA) de la lésion responsable de l’infarctus. Si la lésion n’est pas dilatable, Il n’est pas inhabituel de devoir administrer 200 mL/h de soluté et d’atteindre
une thrombolyse locale suivie de la mise en place d’une pompe à contre- des pressions supérieures à 20 mmHg dans l’oreillette droite pour rétablir des
pulsion ou une chirurgie de revascularisation intra-aortique peuvent être conditions hémodynamiques satisfaisantes [41]. Le risque existe de provoquer
effectuées. Une alternative serait la mise en place d’une pompe à CPIA après par une expansion excessive un tableau hémodynamique de tamponnade, en
l’introduction d’un traitement thrombolytique, voire d’une assistance accentuant la dilatation ventriculaire droite dans un sac péricardique peu
ventriculaire, par Hemopumpt par exemple. Dans ces deux situations, une distensible. L’égalisation des pressions de remplissage permet d’en poser le
coronarographie est réalisée dans un deuxième temps afin de procéder, dans diagnostic.
la mesure du possible, à une revascularisation. Dans ces conditions, ou lorsque l’expansion volémique ne suffit pas à corriger
le choc, il convient d’associer un support pharmacologique. La dobutamine à
faible dose (2-5 µg/kg/min) peut être essayée. Il faut cependant s’assurer de
Infarctus du ventricule droit l’absence de chute de la pression artérielle systémique qui aggraverait
Le ventricule droit est moins exposé à l’ischémie que le ventricule gauche et l’hypoperfusion du ventricule droit. En cas d’échec, la dopamine, voire la
cela pour différentes raisons : besoins en oxygène restreints par le fait d’une noradrénaline, doivent être administrées. L’amélioration hémodynamique se
masse musculaire plus faible et de pressions intracavitaires plus basses, manifeste essentiellement par une augmentation du volume d’éjection

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Cardiologie-Angéiologie CHOC CARDIOGÉNIQUE 11-038-B-10

emploie à cet effet des vasodilatateurs, le nitroprussiate de sodium ou la


phentolamine, administrés à des doses croissantes sous contrôle
hémodynamique continu.
En cas d’échec, il faut recourir à l’assistance circulatoire par CPIA
[23, 34]. Dans la majorité des cas, elle s’avère remarquablement efficace, en

réalisant une réduction marquée de l’impédance aortique tout en corrigeant


l’ischémie. Lorsqu’elle ne suffit pas, on peut utilement lui associer un support
inotrope positif, tout en sachant que le gain sur la contractilité peut être annulé
par une aggravation de l’ischémie et de la régurgitation.
Dans la règle, ces mesures entraînent une amélioration remarquable de
l’hémodynamique et permettent d’entreprendre les investigations
angiographiques nécessaires en vue d’une PTCA ou d’une correction
chirurgicale éventuelle. L’intervention doit se faire précocement, afin d’éviter
l’évolution vers une dégradation fonctionnelle progressive [97].

Vasodilatateurs
• Nitroprussiate de sodium
Par une action directe sur la musculature lisse, il entraîne une vasodilatation
artérielle et veineuse [19]. En présence d’une augmentation importante des
5 Infarctus du ventricule droit. pressions de remplissage, l’association de nitroprussiate aux β-adrénergiques
Schéma résumant l’attitude théra-
peutique lors de choc cardiogéni-
peut entraîner une diminution notable de la stase pulmonaire tout en
que survenant dans le cadre de l’in- améliorant l’éjection ventriculaire. Le nitroprussiate s’administre en
farctus ventriculaire droit : si la perfusion intraveineuse à une dose de 0,2-0,5 µg/kg/min, à augmenter
restauration d’une fréquence suffi- progressivement en fonction de la réponse hémodynamique [19]. La durée de
sante, par atropine ou pacemaker
auriculoventriculaire, ne permet pas
vie très courte de la substance la rend très maniable et permet d’ajuster la dose
de corriger l’état de choc, une ex- de façon très précise. Les effets toxiques ne s’observent qu’après
pansion volémique associée éven- administration prolongée de doses élevées.
tuellement à de la dobutamine est
entreprise. Si l’état de choc persiste,
le traitement est poursuivi comme
Phentolamine
lors de choc cardiogénique en gé-
néral. IV : intraveineux. Inhibiteur des récepteurs α 1 - et α 2 -adrénergiques, c’est aussi un
vasodilatateur mixte avec une action préférentielle sur le compartiment
artériel. Elle entraîne les mêmes effets hémodynamiques que le nitroprussiate
systolique, avec une baisse parallèle du volume télésystolique, sans de sodium mais, à dose élevée (supérieure à 5 µg/kg/min), elle a un effet
modification notable de la fréquence cardiaque. Lorsque, sous traitement chronotrope positif plus marqué. Elle possède, par ailleurs, une action
inotrope, la pression télédiastolique ventriculaire droite s’abaisse, il est inotrope positive indirecte par la levée du mécanisme physiologique de
recommandé de reprendre l’expansion volémique sous contrôle rétroaction exercée par les récepteurs α2-présynaptiques, aboutissant à une
hémodynamique pour obtenir le débit optimal. libération accrue passive de noradrénaline dans la fente synaptique. La dose
Dans la règle, les vasodilatateurs sont à éviter. S’ils doivent être utilisés en initiale est de 2 à 3 µg/kg/min puis adaptée en fonction de la réponse. Dans
raison d’une atteinte ventriculaire gauche associée, ils seront administrés ces circonstances, l’amélioration des conditions hémodynamiques est
prudemment sous contrôle hémodynamique constant. Le danger de précipiter obtenue sans augmentation notable de la fréquence cardiaque, ni extension
la dysfonction cardiaque en réduisant le retour veineux existe. La CPIA a été de l’ischémie myocardique.
proposée, notamment lors d’atteinte biventriculaire.
Rupture d’un pilier
Traitement des troubles de la conduction et du rythme C’est un phénomène rare, rencontré dans moins de 0,1 % des infarctus
Diverses statistiques montrent que plus de la moitié des malades ayant un myocardiques aigus. Le pilier postérieur est le plus souvent atteint, car il est
infarctus du ventricule droit ont besoin d’un entraînement systolique dépourvu de circulation de suppléance. La rupture entraîne une régurgitation
transitoire à la phase aiguë. Malheureusement, l’accélération de la fréquence mitrale suraiguë et massive, un œdème pulmonaire asphyxiant et un état de
ventriculaire, par entraînement systolique conventionnel, se révèle choc irréversible. Le traitement associant vasodilatateurs, CPIA et inotropes
fréquemment insuffisante, vu l’inefficacité de la contraction ventriculaire positifs ne constitue qu’un support temporaire permettant d’attendre une
droite ou la non-réponse à la stimulation électrique. Dans ces conditions, intervention d’urgence [7, 97]. La mortalité est considérable, voisine de 70 %.
l’entraînement systolique auriculaire, ou mieux, la restauration d’un
synchronisme auriculoventriculaire par entraînement séquentiel permet Perforation septale
d’obtenir, par un meilleur remplissage ventriculaire, une élévation
Trouvée chez 1-2 % des patients décédés d’infarctus, elle survient
significative de la pression artérielle, du débit cardiaque et du volume
généralement entre le deuxième et le cinquième jour, plus rarement entre le
d’éjection systolique, parfois suffisante pour corriger l’état de choc [65].
sixième et le quinzième, après un infarctus transmural [7]. Elle complique
Pour les mêmes raisons, il est urgent de réduire une fibrillation auriculaire aussi bien les infarctus inférieurs qu’antérieurs, même si la perfusion septale
(choc électrique) ou de corriger une bradycardie sinusale (atropine, voire dépend essentiellement de l’interventriculaire antérieure. Elle se manifeste
entraînement auriculaire) (fig 5). souvent par une récidive de douleurs et l’apparition d’un souffle
holosystolique dans la région parasternale gauche inférieure ou apicale,
Complications mécaniques irradiant classiquement en « rayons de roue », s’accompagnant parfois d’un
frémissement palpable, qui ne se distingue pas toujours de celui de
Dysfonction de pilier l’insuffisance mitrale aiguë. Le diagnostic est posé par la mise en évidence
d’une élévation significative de la saturation en oxygène (environ 10 %) entre
L’ischémie aiguë, voire la nécrose d’un muscle papillaire, entraîne la l’oreillette droite et l’artère pulmonaire. Si la brèche est large, le shunt gauche-
dysfonction d’un pilier (antérieur ou postérieur, selon le siège de la lésion droit entraîne une importante surcharge de pression pour le ventricule droit et
coronarienne) et l’installation d’une insuffisance mitrale aiguë de volume pour le ventricule gauche, aboutissant à une insuffisance
[18, 88]. Le retentissement fonctionnel varie en fonction de l’importance de la biventriculaire, voire un état de choc. L’investigation hémodynamique à but
régurgitation systolique. Dans les formes graves, il n’est pas rare de mesurer diagnostique est superflue lorsque l’échocardiogramme bidimensionnel avec
une onde v géante (supérieure à 50 mmHg) sur le tracé de la PAPO, qui rend doppler démontre à l’évidence la perforation (fig 6). Dès que les conditions
compte de la brutalité d’apparition des manifestations cliniques : la dyspnée, hémodynamiques le permettent, une angiographie est pratiquée pour
l’œdème pulmonaire et l’état de choc peuvent s’installer en quelques minutes. confirmer le diagnostic, évaluer l’importance du shunt, ses répercussions
Le souffle holosystolique apexien et parasternal peut passer inaperçu dans le fonctionnelles et l’état des vaisseaux coronariens.
concert des râles pulmonaires ou manquer lorsque la régurgitation est L’approche thérapeutique est identique à celle de l’insuffisance mitrale aiguë
massive. Le diagnostic est rapidement posé par échocardiographie (ETT avec sévère. Là encore, l’institution précoce de l’assistance circulatoire [23, 34] est
doppler ou ETO). recommandée en cas d’échec du traitement vasodilatateur [96]. Dans la règle,
Le traitement d’urgence vise à réduire la postcharge pour limiter la la correction chirurgicale est indispensable [24, 25] car le choc traduit
régurgitation, tout en améliorant l’éjection ventriculaire dans l’aorte. On habituellement un shunt gauche-droit important (Q pulmonaire/Q systémique

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6 Échocardiogramme bidimensionnel, appro-


che parasternale gauche, incidence des quatre ca-
vités, un peu oblique.
A. Incidence apicale des quatre cavités.
B. Une large communication interventricu-
laire est visible, dans la partie supérieure du
septum, après un infarctus antéroseptal.
OG : oreillette gauche ; OD : oreillette droite ;
VG : ventricule gauche ; VD : ventricule droit ;
civ : communication interventriculaire ;
S : septum ; MEMB : membrane ; M : valve
A B mitrale ; d : droite ; a : antérieure.

supérieur à 2,5). Les techniques opératoires permettent actuellement L’échocardiographie révèle habituellement une hypokinésie globale,
d’entreprendre cette chirurgie de réparation dans les 24 à 48 heures qui touchant les deux ventricules. À l’occasion, on constate des zones
suivent l’accident, avant le développement d’une insuffisance cardiaque d’hypokinésie localisées correspondant à des troubles électro-
irréversible [61, 81]. La coexistence d’un infarctus du ventricule droit assombrit cardiographiques en imposant pour un infarctus. En cas de doute, une
le pronostic. coronarographie est indiquée. L’utilité de la biopsie myocardique reste
controversée puisque d’une part, le diagnostic histopathologique peut poser
Rupture de la paroi libre problème en cas de prélèvement en zone saine en raison de l’inhomogénéité
de l’atteinte inflammatoire et que d’autre part, la démonstration de l’efficacité
C’est un événement catastrophique, habituellement mortel, survenant plus des immunosuppresseurs n’a pas encore été établie de manière irréfutable. La
fréquemment que la perforation septale entre le troisième et le cinquième jour biopsie devrait apporter la preuve d’une nécrose cellulaire, avec infiltration
après les premiers symptômes (extrêmes : 1 jour-3 semaines) [7]. Cette
lymphocytaire, éventuellement permettre la détection des virus par
complication se développe plus souvent lors d’infarctus ventriculaire gauche,
visualisation directe ou culture.
chez la femme, chez le sujet âgé ou hypertendu. Le diagnostic est présumé
sur l’association d’une bradycardie, sinusale ou non, avec stase jugulaire Le traitement est symptomatique : support inotrope par des amines,
aiguë, perte de connaissance et dissociation électromécanique. Le massage entraînement électrosystolique temporaire, traitement des arythmies et
cardiaque externe est inefficace et la mort survient habituellement avant que ventilation mécanique, voire assistance circulatoire ou ventriculaire.
toute manœuvre thérapeutique puisse être entreprise. Quelques cas L’évolution est parfois surprenante avec une récupération fonctionnelle quasi
exceptionnels ont survécu grâce à une intervention immédiate. Dans ces complète. Ceci explique la difficulté de poser l’indication à la mise sur liste
situations pouvant se dégrader extrêmement rapidement, on se contente de urgente de transplantation cardiaque, qui parfois représente le traitement de
l’image échocardiographique avant la chirurgie. En présence d’un faux dernier recours [100].
anévrisme ventriculaire, la chirurgie préventive est préconisée en raison d’un
risque élevé de rupture à court ou à long terme.
Valvulopathies aiguës
Stade terminal des cardiomyopathies dilatées
Insuffisance aortique aiguë
Le terme de cardiomyopathie dilatée désigne une maladie du muscle
cardiaque d’étiologie inconnue, qui se manifeste par une dysfonction Une insuffisance aortique aiguë massive peut compliquer une endocardite
systolique progressive et une dilatation touchant le plus souvent les deux aiguë, une dissection de l’aorte ascendante ou un traumatisme (rupture d’une
ventricules. Le cours de la maladie n’est pas prévisible, mais son pronostic valve par décélération ou par lacération de l’aorte).
est grave avec une mortalité voisine de 30 à 50 % dans les
2 ans qui suivent le diagnostic. L’évolution est émaillée d’épisodes de Le volume régurgité dépend à la fois de la dimension de l’orifice aortique, du
décompensation aiguë. À un stade avancé, les valeurs hémodynamiques gradient de pression diastolique à travers la valve et de la durée de la diastole.
enregistrées révèlent une détérioration fonctionnelle que ne laisse pas Lors de régurgitation aiguë, le ventricule gauche, peu distensible, est
supposer l’examen clinique avec, typiquement, un abaissement majeur de incapable de s’adapter à la surcharge de volume. Il en résulte une ascension
l’index cardiaque (1-1,5 L/min/m_), une PAPO très élevée (supérieure à très marquée de la pression télédiastolique, qui peut excéder la pression
30 mmHg) et des résistances artérielles systémiques fortement accrues auriculaire gauche et entraîner alors une fermeture précoce de la valve
(supérieures à 2 000 dyn/s/cm5). mitrale [13]. Ces conditions réalisent un tableau d’œdème pulmonaire aigu,
L’examen clinique frappe davantage par les signes de bas débit que par la parfois associé à un état de choc. Les signes périphériques classiques de
congestion pulmonaire. La cardiomégalie est évidente à la radiographie l’insuffisance aortique chronique manquent par le fait que le volume
thoracique comme à l’échocardiogramme. L’hypokinésie et la dilatation d’éjection systolique n’est pas augmenté. Une pression artérielle différentielle
ventriculaire sont extrêmes et la fraction d’éjection effondrée (fréquemment peu modifiée, l’absence d’un souffle de Durosiez et du pouls capillaire
inférieure ou égale à 20 %) (fig 7). peuvent égarer [ 1 3 ] . À l’auscultation, le souffle diastolique est
remarquablement court en raison de l’augmentation rapide de la pression
Le traitement de la décompensation associe les agents inotropes positifs
diastolique ventriculaire gauche, qui annule le gradient de régurgitation. À la
(essentiellement la dobutamine) aux vasodilatateurs. L’assistance circulatoire
radiographie, le cœur est habituellement de dimension normale avec des
(CPIA) ou ventriculaire n’a de sens ici que dans l’attente d’une
transplantation cardiaque imminente. signes de congestion pulmonaire. L’échocardiogramme avec doppler permet
de confirmer la régurgitation, d’en estimer les répercussions fonctionnelles et
parfois d’en reconnaître la cause (végétation, dissection, lacération). La
Myocardite aiguë détérioration peut être si rapide qu’elle constitue une indication à une
intervention réparatrice d’urgence [55]. Tout délai ne peut qu’aggraver le
pronostic.
La myocardite est une cause rare de choc cardiogénique. Le plus souvent, elle
se manifeste par une insuffisance cardiaque gauche aiguë avec troubles du Le traitement médical se résume aux vasodilatateurs associés le cas échéant
rythme et de conduction. Sur le plan fonctionnel, l’atteinte diffuse du muscle aux β-adrénergiques. La CPIA est formellement contre-indiquée, car elle
entraîne une perte de contractilité et un défaut de compliance. accroît encore la régurgitation en augmentant la pression diastolique aortique.

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Cardiologie-Angéiologie CHOC CARDIOGÉNIQUE 11-038-B-10

A B
7 A. Échocardiogramme bidimensionnel en incidence parasternale long axe d’une cardio- Le diamètre diastolique de cette cavité est fortement augmenté à 89 mm. Noter l’akinésie
myopathie congestive terminale chez un jeune homme de 27 ans. VG : ventricule totale du septum interventriculaire (S) et le faible mouvement de la paroi postérieure du
gauche ; VD : ventricule droit ; S : septum ; Ao : aorte. ventricule gauche. Par planimétrie, la fraction d’éjection chez ce malade est estimée à 17 %.
B. Examen en mode TM du même malade, au niveau du ventricule gauche.

Sténose aortique Autres valvulopathies


La sténose aortique peut être soit congénitale (unicuspidie, bicuspidie entre Toute valvulopathie sévère, qu’elle soit mitrale, aortique ou tricuspidienne,
autres) ou acquise (rhumatisme articulaire aigu, athérosclérose très marquée peut conduire à une insuffisance cardiaque réfractaire évoluant vers le choc
de l’aorte et de la valve, dégénérescence et calcification, rarement polyarthrite cardiogénique. Dans ces conditions, la seule chance réside dans la correction
rhumatoïde). chirurgicale lorsqu’elle est encore possible [13].
En regard d’une sténose aortique qui s’aggrave, le ventricule gauche
développe une hypertrophie concentrique progressive. À un stade avancé, le
ventricule gauche se dilate. Il s’ensuit une dilatation de l’oreillette gauche puis Choc cardiogénique après circulation
une hypertension pulmonaire avec insuffisance ventriculaire droite. extracorporelle
Classiquement, la sténose aortique demeure muette sur le plan clinique
pendant de nombreuses années. Peuvent apparaître alors des crises d’angor à
l’effort, éventuellement des syncopes et des hypotensions orthostatiques [13]. Étiologie
La dyspnée d’effort, l’orthopnée, les épisodes de dyspnée nocturne Après une opération cardiovasculaire réalisée sous CEC, le développement
paroxystique et d’œdème pulmonaire aigu surviennent au stade plus avancé d’un état de choc doit faire rechercher plusieurs causes possibles (tableau III).
qui précède l’insuffisance cardiaque globale avec état de choc. S’il n’est pas lié à une hypovolémie, des troubles du rythme ou de conduction
Il faut se rappeler qu’à ce stade, l’examen clinique peut ne révéler que les toujours fréquents en période postopératoire, une dysfonction d’une valve
signes de bas débit cardiaque avec œdème pulmonaire : le souffle systolique prothétique qui vient d’être implantée, un épanchement péricardique avec
peut disparaître tout comme les caractéristiques du pouls. Cela revient à dire tamponnade, l’état de choc peut relever d’une ischémie, voire d’une nécrose
que devant toute insuffisance cardiaque réfractaire, il faut rechercher une myocardique apparue lors de la CEC. L’arrêt circulatoire dans les artères
sténose aortique méconnue. coronariennes, lors du clampage aortique, provoque une ischémie globale du
À cet égard, l’électrocardiogramme montre des signes d’hypertrophie myocarde responsable d’un œdème et de nécroses entraînant une altération
ventriculaire gauche (85 % des cas). La radiographie thoracique peut révéler, de la fonction diastolique (diminution de la compliance ventriculaire) et
en plus de l’œdème pulmonaire, une calcification en regard de la valve systolique (perte de la contractilité d’origine ischémique) [6]. L’ETO est
aortique et, éventuellement une dilatation aortique poststénotique. l’examen de choix en cas de tamponnade, d’ischémie ou de dysfonction
L’échocardiogramme avec doppler est l’examen clé qui permet de confirmer valvulaire.
le diagnostic et d’estimer le degré de sténose.
Le traitement de choix est le remplacement valvulaire. Le risque opératoire Traitement
est nettement plus élevé en présence d’une diminution de la fraction Il n’a rien de spécifique par rapport à celui du choc cardiogénique lors d’un
d’éjection. Lorsque l’opération n’est pas réalisable (grand âge, contre- infarctus. Il s’agit de restaurer le débit cardiaque et la pression artérielle par
indications à la chirurgie en raison de pathologies graves associées), une des inotropes (dobutamine, inhibiteurs des PDE) et vasopresseurs (dopamine,
valvuloplastie par dilatation endoluminale peut être tentée [22, 75]. La technique noradrénaline) et au besoin d’y associer des vasodilatateurs (nitroprussiate de
consiste à insuffler à plusieurs reprises un ballon monté sur un guide et placé sodium, dérivés nitrés). En général, la pompe à CPIA est en principe déjà
au travers de la valve aortique sténosée par voie percutanée. Après cette installée en salle d’opération et à défaut devrait être mise en place sans délai.
procédure, le gradient transvalvulaire diminue souvent de moitié, permettant Si l’état de choc persiste en dépit d’une CPIA associée à la pharmacothérapie,
une amélioration clinique. De nombreuses complications ont été rapportées une assistance ventriculaire peut être instaurée, dans l’attente d’une
telles insuffisance aortique sur avulsion de cuspide, rupture aortique, embolie récupération fonctionnelle ou d’une transplantation [6]. Lorsque le choc est dû
cérébrale ou systémique, lésion vasculaire périphérique. Par ailleurs, ce à une complication mécanique ou à une tamponnade, la cause spécifique doit
traitement n’est pas définitif, la sténose récidivant chez plus de 50 % des être traitée.
patients à 6 mois et chez la grande majorité à 1 an.
Tableau III. – Étiologie du choc cardiogénique après chirurgie cardiaque.
Dans l’attente de l’intervention, le traitement médicamenteux est à la fois
limité et difficile à conduire. Une diminution de la précharge (dérivés nitrés Ischémie en cours de circulation extracorporelle
ou diurétiques) peut conduire à une baisse supplémentaire du volume Prothèse inadaptée (taille, forme, axe, fonctionnement)
d’éjection systolique ; une réduction de la postcharge (vasodilatateurs Thrombose de la valve prothétique
Résection trop large d’un anévrisme ventriculaire
artériels ou mixtes) entraîne une chute de la pression artérielle aggravant Infarctus périopératoire lors de pontage aortocoronarien
l’ischémie myocardique ; enfin les agents β-adrénergiques sont mal tolérés Hypovolémie
(arythmies). La CPIA a été proposée pour tenter d’améliorer la performance Tamponnade
Trouble du rythme ou de conduction
ventriculaire par le biais d’une augmentation de la perfusion coronarienne.

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Tamponnade
L’accumulation rapide de moins de 200 mL de liquide dans un péricarde non
distensible peut déjà entraîner une tamponnade. En revanche, si
l’épanchement s’installe progressivement, le sac s’adapte pour contenir des
volumes considérables sans gêne mécanique apparente ; c’est donc davantage
la vitesse d’installation que le volume de l’épanchement qui est le facteur
déterminant.
La pression intrapéricardique, normalement proche de la pression
intrapleurale, est nettement inférieure à la pression diastolique des ventricules
droit et gauche. L’accumulation de liquide élève la pression intrapéricardique
et diminue la pression transpariétale. Lorsque la pression péricardique
dépasse les pressions diastoliques ventriculaires, on observe une égalisation
caractéristique des pressions auriculaires (gauche et droite) et artérielle
pulmonaire diastolique [93]. Le défaut de remplissage des ventricules est à
l’origine de la diminution du volume d’éjection systolique et finalement du
débit cardiaque. 8 Enregistrement des courbes de pression chez un patient en état de choc dû à une
tamponnade : la pression artérielle pulmonaire (PAP) diastolique est très voisine de la
Il est à relever qu’en présence d’une dysfonction ventriculaire gauche grave pression mesurée dans l’oreillette droite (POD) et de la pression artérielle pulmonaire
associée, l’élévation de la PAPO persiste en cas de tamponnade et bloquée (PAPO). Le tracé de pression auriculaire droite ne comporte pas de creux Y mais le
l’égalisation des pressions fait défaut. Un hématome intrapéricardique creux X est bien visible. Après ponction péricardique, on voit réapparaître le creux Y. Par
ailleurs, il n’y a plus d’égalisation des pressions des cavités gauche et droite. Les barres
localisé (synéchies par exemple) peut comprimer les cavités cardiaques de verticales correspondent aux complexes QRS à l’électrocardiogramme (ECG).
manière asymétrique et réaliser un tableau hémodynamique d’insuffisance
ventriculaire gauche ou droite, sans égalisation des pressions. Par ailleurs,
lorsque la tamponnade s’associe à une hypovolémie, les pressions de
remplissage n’augmentent que modérément.

Clinique et diagnostic
Le diagnostic de tamponnade doit être suspecté chaque fois qu’un état de choc
s’accompagne d’une stase veineuse marquée (turgescence jugulaire), d’un
pouls paradoxal et d’une tachycardie. Dans sa forme suraiguë, la tamponnade
se manifeste par une syncope avec bradycardie, turgescence jugulaire et
dissociation électromécanique rapidement fatale. Ce tableau dramatique est
la conséquence habituelle d’une perforation pariétale ou d’une dissection de
l’aorte ascendante.
À la radiographie thoracique, le cœur peut rester de dimension normale ou
prendre un aspect globuleux, si l’épanchement s’est constitué
progressivement. Un microvoltage des complexes QRS et une alternance
électrique sur l’électrocardiogramme sont suggestifs mais non
pathognomoniques. Le cathétérisme cardiaque droit montre, outre les
modifications déjà mentionnées, une morphologie caractéristique du tracé de
pression auriculaire droite avec un creux x prédominant (relaxation
auriculaire) contrastant avec la diminution, voire la disparition du creux y (qui
correspond à la chute de pression due à la vidange auriculaire, immédiatement 9 Échocardiogramme bidimensionnel en incidence parasternale gauche long axe
(diastole-systole), montrant un large épanchement péricardique. La paroi de l’oreillette
après l’ouverture de la tricuspide) (fig 8). Ce dernier élément permet de la gauche (la) est modérément soulevée par l’épanchement, tamponnant au moment de
distinguer d’autres conditions pathologiques limitant l’expansion l’examen.
ventriculaire, comme l’infarctus étendu du ventricule droit et la péricardite Iv : ventricule gauche ; pe : épanchement péricardique ; S : septum ; Ao : aorte ; dia :
constrictive [93]. Toutefois, l’examen de choix est l’échocardiographie qui diastole ; sys : systole.
permet de mettre en évidence le décollement péricardique, la quantité et
l’aspect (homogène ou non du liquide intrapéricardique) et la déformation des
cavités cardiaques : écrasement des cavités droites durant l’inspiration et ou l’application d’une PEP. Si l’état du malade est très préoccupant, il est
relative expansion des ventricules durant l’expiration (fig 9). recommandé d’effectuer, sous anesthésie locale, une ponction péricardique
de décharge avant d’entreprendre le drainage chirurgical.
Traitement
Le traitement approprié est de lever l’obstacle par ponction péricardique sous Embolie pulmonaire massive
contrôle échocardiographique ou par drainage chirurgical. La
péricardiocentèse sous-xiphoïdienne a l’avantage de pouvoir être effectuée au
lit du malade, d’éviter l’anesthésie générale et d’entraîner une amélioration Le développement brutal d’une hypertension artérielle pulmonaire lors
hémodynamique immédiate après la soustraction d’un volume restreint de d’embolie massive peut entraîner un état de choc par défaillance ventriculaire
liquide (20 à 50 mL). Lorsque la situation est moins urgente, le drainage droite aiguë [ 6 9 ] . Cette situation s’observe en général chez le sujet
chirurgical est préféré car il est plus efficace ; il met à l’abri des récidives et il préalablement sain, lorsque l’obstruction dépasse 60 % du lit artériel
fournit l’occasion d’une biopsie péricardique à but diagnostique. pulmonaire, mais des embolies moins étendues ont les mêmes conséquences
chez les malades ayant des antécédents pulmonaires ou cardiaques. L’état de
Certaines précautions sont nécessaires. En effet, l’anesthésie générale chez choc exprime la dépression aiguë de la fonction ventriculaire droite en
ces malades peut entraîner, par réduction brutale de la précharge, une réponse à la surcharge de pression et se manifeste par une diminution du
hypotension artérielle avec tachycardie et diminution supplémentaire du débit
volume d’éjection systolique et du débit cardiaque, en dépit de l’élévation de
cardiaque. Il convient donc de ne pas intervenir sans une surveillance
la pression télédiastolique ventriculaire droite et de l’accélération de la
hémodynamique minimale (pression veineuse centrale). Dans le délai qui
précède l’intervention, il est important d’éviter toute manipulation qui fréquence. Plusieurs études ont démontré le rôle clé de l’ischémie du
pourrait entraîner une diminution du retour veineux, de la fréquence ventricule droit dans ces conditions.
cardiaque ou de la contractilité ventriculaire. Il est même souvent utile de Le phénomène apparaît lié, en premier lieu, à la diminution du gradient de
procéder à une expansion volémique préventive afin d’obtenir des pressions perfusion coronarienne secondaire à l’élévation de la pression
de remplissage suffisantes (pression auriculaire droite entre 20 et 25 mmHg), intraventriculaire droite et à la chute de la pression aortique [14]. La diminution
en y associant, au besoin, des agents inotropes (dopamine ou dobutamine) ou des apports qui en résulte est d’autant moins bien tolérée que la dilatation
vasopresseurs (noradrénaline) sous contrôle hémodynamique. Une attention ventriculaire augmente les besoins myocardiques en oxygène.
particulière doit être apportée à la ventilation artificielle. L’élévation de la Expérimentalement, on peut démontrer que l’administration d’un
pression intrathoracique qu’entraîne la ventilation intermittente en pression vasoconstricteur artériel (phényléphrine) ou la compression de l’aorte
positive (IPPV) suffit parfois à rompre l’équilibre circulatoire en diminuant améliore la performance cardiaque, ce qui tend à confirmer le rôle
la précharge ventriculaire [70]. Ce phénomène est exacerbé par l’hypovolémie déterminant de la perfusion du ventricule droit [73].

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Cardiologie-Angéiologie CHOC CARDIOGÉNIQUE 11-038-B-10

Clinique et diagnostic la ventilation mécanique. Il est essentiel d’éviter les pressions


intrathoraciques élevées qui, en entravant le retour veineux, compromettent
L’embolie pulmonaire massive se manifeste par l’installation soudaine d’un davantage la fonction ventriculaire droite. Il est proposé dans ces cas de
état de choc avec tachycardie, dyspnée, tachypnée. Parfois, une syncope en réaliser une expansion volémique préalable prudente sous contrôle
est la manifestation inaugurale. Les signes d’insuffisance ventriculaire droite hémodynamique ou échocardiographique. En effet, une perfusion trop
sont au premier plan : turgescence et pouls jugulaire, choc ventriculaire droit importante de liquide risque de provoquer une détérioration des conditions
palpable, galop protodiastolique droit (B3), accentuation du deuxième bruit hémodynamiques, en aggravant l’interférence ventriculaire, conduisant ainsi
pulmonaire et, parfois, souffle systolique d’éjection pulmonaire [27]. Une à une chute du débit ventriculaire gauche [66]. Le support inotrope est réalisé
radiographie du thorax de bonne qualité peut évoquer le diagnostic par la mise de préférence par la dobutamine (5-15 µg/kg/min) qui n’induit pas
en évidence de zones hyperclaires (oligémie), de l’élévation d’un d’augmentation supplémentaire des résistances artérielles pulmonaires.
hémidiaphragme, d’une dilatation des artères pulmonaires avec Cependant, par effet vasodilatateur systémique, la dobutamine peut entraîner
cardiomégalie. Toutefois, un cliché normal n’exclut pas le diagnostic [27]. une chute de la pression de perfusion coronarienne. Lors de choc profond, la
L’échocardiogramme est un test sensible et non spécifique, qui reflète les noradrénaline est l’agent de choix (0,02 à 3 µg/kg/min) : à ses effets
effets de l’hypertension pulmonaire aiguë sur le cœur droit : dilatation β-adrénergiques sur la contractilité, elle associe une stimulation
ventriculaire avec augmentation du rapport VD/VG (mode M), distension de α-agoniste qui, en élevant la pression diastolique, augmente le gradient de
l’artère pulmonaire, aplatissement diastolique du septum interventriculaire ; perfusion coronarienne. Enfin, lors de choc réfractaire, l’adrénaline a prouvé
à l’occasion, l’échocardiogramme montre la présence de caillot dans les son efficacité [12].
cavités cardiaques droites dilatées ou dans les premières branches des artères
pulmonaires. La présence quasi constante d’une insuffisance tricuspidienne La présence d’un état de choc sur embolie pulmonaire massive pose
permet de mesurer, par sonde doppler, la pression systolique ventriculaire l’indication à une désobstruction vasculaire pharmacologique ou
droite, dont l’élévation témoigne de l’importance de l’hypertension mécanique [1].
pulmonaire. Le cathétérisme cardiaque droit est évocateur lorsqu’il montre
une hypertension artérielle pulmonaire (PAPm supérieure ou égale à Thrombolyse
40 mmHg) [69], un gradient de pression diastolique pulmonaire élevé (pression Il a été démontré que la thrombolyse entraîne une dissolution rapide du caillot
artérielle pulmonaire diastolique-PAPO supérieure ou égale à 10 mmHg), un et permet ainsi de rétablir un état circulatoire satisfaisant, en levant l’obstacle
débit cardiaque et surtout un volume d’éjection systolique effondré. Il faut à l’éjection ventriculaire [72] . Le bénéfice hémodynamique s’observe
relever ici la difficulté de l’insertion d’une sonde de Swan-Ganz en présence habituellement dès les premières heures [36]. Plusieurs agents fibrinolytiques
d’une hypertension pulmonaire marquée d’une part et les dangers de sont actuellement disponibles : streptokinase, urokinase, rt-PA [36, 98]. Des
mobiliser ou d’emboliser un caillot placé dans les cavités cardiaques droites études récentes portant sur l’administration en 2 heures de rt-PA (100 mg) ou
d’autre part. Le diagnostic de certitude se fait par angiographie qui révèle les d’urokinase (3 000 000 UI dont 1 000 000 UI en bolus de 10 minutes),
obstructions proximales habituellement multiples des vaisseaux pulmonaires. montrent une tendance à la diminution des complications hémorragiques, par
En extrême urgence, et si le tableau clinique est fortement suggestif, une rapport à une perfusion du thrombolytique pendant 12 à 24 heures.
échocardiographie démontrant une dysfonction ventriculaire droite ou des L’administration de rt-PA en bolus à dose adaptée ne s’est pas révélée plus
caillots dans les cavités droites ou le tronc de l’artère pulmonaire, autorise efficace qu’une perfusion de 2 heures [35]. L’efficacité de la thrombolyse sera
l’instauration d’un traitement thrombolytique [1]. Il en est de même pour la d’autant plus grande que la pression systémique est rétablie, renforçant encore
scintigraphie pulmonaire ventilée-perfusée. La place de l’imagerie par l’indication aux vasopresseurs.
scanner pulmonaire spiralé, qui permet de mettre en évidence les obstructions
des branches proximales des artères pulmonaires, fait actuellement l’objet Embolectomie
d’investigations.
Elle est actuellement réservée aux malades en état de choc qui ne répondent
pas au traitement médical maximal ou qui présentent une contre-indication
Traitement absolue à la thrombolyse et aux anticoagulants [72]. L’intervention effectuée
La majorité (deux tiers) des décès due à l’embolie pulmonaire survient dans sous CEC permet une désobstruction efficace et entraîne dans l’immédiat une
les 2 premières heures après l’installation des symptômes. Cela signifie que amélioration spectaculaire de l’état hémodynamique [71]. Les résultats sont
le traitement est le plus souvent entrepris avant même d’avoir obtenu une d’autant meilleurs que le délai opératoire est plus court.
confirmation diagnostique. Le but est d’améliorer les échanges gazeux, de L’opération de Trendelenburg est aujourd’hui une intervention d’exception
restaurer des conditions circulatoires adéquates et de prévenir les récidives. destinée aux malades en arrêt cardiorespiratoire, chez lesquels le massage
L’administration d’héparine (10 000 UI en bolus intraveineux), suivie d’une cardiaque externe ne rétablit pas des conditions hémodynamiques
perfusion continue, est justifiée chaque fois qu’est suspectée une embolie acceptables.
pulmonaire à l’origine du choc. Les héparines de bas poids moléculaire ne
sont pas encore acceptées dans cette indication.
Nous tenons à remercier le Docteur M Payot, privat-docent et agrégé à la faculté de médecine de l’université de
L’administration d’oxygène par masque est habituellement suffisante mais, Lausanne, pour les images échocardiographiques illustrant ce texte et les légendes s’y rapportant. Nous
lorsqu’une hypoxémie profonde persiste, il peut être nécessaire de recourir à remercions également Madame S Carlino pour la dactylographie du texte.

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