Prise Charge Sepsis Sur PTG
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Par L. Labattut, A. Maczynski, P. Martz, B. Viard, E. Baulot dans la catégorie MISE AU POINT
Service du Pr. Trouilloud - CHU de Dijon
La fréquence des infections sur prothèses totales de genou (PTG) dans la littérature varie
autour de 1 à 2 % [1, 2, 3, 4, 5] soit un peu plus que pour les infections de prothèses totales de
hanche.
Tout chirurgien orthopédiste a eu ou aura des complications infectieuses sur les arthroplasties.
Contrairement à l’idée que s’en font les patients, ces complications surviennent le plus
souvent sans erreur manifeste de la part du personnel soignant et, dans la genèse d’une
infection sur prothèse, le terrain du patient est aussi important que les conditions dans
lesquelles il est pris en charge.
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I. Introduction
La fréquence des infections sur prothèses totales de genou (PTG) dans la littérature varie
autour de 1 à 2 % [1, 2, 3, 4, 5] soit un peu plus que pour les infections de prothèses totales de
hanche.
Tout chirurgien orthopédiste a eu ou aura des complications infectieuses sur les arthroplasties.
Contrairement à l’idée que s’en font les patients, ces complications surviennent le plus
souvent sans erreur manifeste de la part du personnel soignant et, dans la genèse d’une
infection sur prothèse, le terrain du patient est aussi important que les conditions dans
lesquelles il est pris en charge.
La notion d’infection nosocomiale dans le cadre des sepsis sur prothèse, concerne toute
infection sur le site opératoire qui survient dans l’année qui suit la pose de la prothèse. Cette
notion est purement théorique et juridique et ne présume en rien de l’étiologie de l’infection.
Ce terme a malheureusement pour effet d’éveiller la suspicion et de générer le conflit dans la
relation patient/chirurgien. Il est par conséquent très difficile pour le chirurgien dans ce
contexte, d’aborder la prise en charge de cette complication sereinement.
La prise en charge adéquate de cette complication sera complexe, pénible et coûteuse mais
elle est indispensable et ne devra souffrir aucune négligence ni aucun retard.
Tous les chirurgiens orthopédistes n’ont pas eu la même formation en matière de prise en
charge des infections ostéo-articulaires car il n’existe que depuis quelques années des
principes techniques et stratégiques à peu près établis dans ce domaine. La prise en charge
correcte des infections ostéo-articulaires complexes est devenue depuis moins d’une dizaine
d’année une priorité ministérielle. Ceci a abouti à la mise en place plus ou moins aisée de
centres de référence interrégionaux. Leur rôle est d’uniformiser, contrôler et améliorer les
traitements proposés aux patients infectés qui, parfois, après un certain « nomadisme médical
», se sont retrouvés dans une impasse thérapeutique qui aurait sans doute pu être évitée.
Si la prise en charge des complications septiques les plus banales est l’affaire de tous les
orthopédistes, le traitement des infections ostéo-articulaires les plus complexes relève de
centres spécialisés et aguerris, en raison du coût, du temps, de l’expérience chirurgicale et du
plateau technique complet que ces prises en charge exigent.
1. En per-opératoire
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La chirurgie sans contamination est un mythe et malgré toutes les mesures d’asepsie stricte
déployées, le site opératoire sera toujours contaminé. Mais contamination ne veut pas
forcément dire infection. La survenue de l’infection dépendra du rapport inoculum bactérien /
résistance de l’hôte, le terrain du patient est par conséquent un élément majeur à prendre en
considération dans la genèse de l’infection sur prothèse [1, 4, 5].
La contamination per opératoire ne semble pas être la cause la plus fréquente de survenue
d’une infection sur prothèse.
Si la qualité de l’air en salle d’opération, le respect des techniques de lavage des mains et
d’asepsie cutanée doivent être optimaux grâce à des protocoles standardisés [7, 8], deux
facteurs sont primordiaux dans la prévention des infections sur prothèse : il s’agit de
l’antibioprophylaxie systématique qui, depuis qu’elle a été mise en place, a contribué à faire
chuter de manière très importante le taux de sepsis post-opératoires [9, 10, 11, 12] et de la
durée opératoire, facteur qui a été formellement corrélé à la survenue d’infections
périprothétiques post-opératoires précoces [13, 14, 15].
2. En post-opératoire immédiat
Il faut être particulièrement attentif à la qualité de la réfection des pansements, ceux-ci doivent
être suffisamment robustes pour résister aux mouvements et attitudes inadaptées de patients
potentiellement confus en post opératoire. Il faut proscrire absolument tout méchage de
cicatrice (Fig. 1). Un écoulement post-opératoire propre devra être respecté dans des délais
raisonnables en l’absence d’inflammation locale associée. D’une manière générale, si une
cicatrice opératoire d’arthroplastie de genou reste inflammatoire, n’est pas cicatrisée ou
présente un écoulement, même citrin, dans un contexte de syndrome inflammatoire biologique
à 2 ou 3 semaines post-opératoires, elle doit être reprise chirurgicalement et donner lieu à un
lavage articulaire comme dans le cadre d’un sepsis aigü [16].
Fig. 1 : Aspect fistuleux après méchage intempestif d’un écoulement post opératoire propre.
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Le diagnostic d’un sepsis sur prothèse repose sur la convergence d’un faisceau d’arguments
qu’il faut savoir rechercher [6, 16, 17, 18].
1. Clinique
Le diagnostic est assez souvent évident grâce aux éléments cliniques locaux classiques :
épanchement articulaire, érythème local, chaleur locale, parfois fistule (Fig. 2, 3, 4). Les signes
septiques généraux, fièvre, asthénie, altération de l’état général ne sont pas constants mais
fortement évocateurs du diagnostic.
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Fig. 2, 3 et 4 : Aspects cliniques évocateurs de sepsis sur PTG.
2. Paraclinique
Pour ce qui est du bilan paraclinique, il devra rester raisonnable, dans un premier temps,
radiographies standards et bilan biologique avec numération globulaire, vitesse de
sédimentation et protéine C réactive seront suffisants.
La procalcitonine reste un examen coûteux qui n’apporte rien de plus dans le bilan de
débrouillage d’une infection sur matériel. De même, scintigraphie osseuse, scintigraphie aux
leucocytes marqués, scanner ou IRM n’ont pas leur place dans le cas d’un sepsis sur prothèse
de genou dont le bilan clinique, radiographique et biologique initial est positif.
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Le diagnostic n’est pas toujours aussi évident et le faisceau d’argument est parfois assez
mince avec un tableau clinique évocateur mais une biologie normale ou au contraire, une
clinique modérée mais une paraclinique évidente. Il faut, dans ces cas, être particulièrement
attentif à l’histoire clinique de cette prothèse et rechercher des antécédents évocateurs comme
des difficultés de cicatrisation initiale, une notion de reprise chirurgicale pour lavage dans le
passé, une notion de chirurgie multiple sur ce genou et bien sûr les prescriptions antérieures
éventuelles d’antibiotiques. L’interrogatoire doit être précis et pointilleux car l’histoire clinique
peut parfois être le seul élément évocateur. Les examens plus complexes et coûteux évoqués
précédemment pourront alors être demandés pour tenter de confirmer une impression initiale.
Bien entendu, tout écouvillonnage de cicatrice même s’il paraît profond ou tout prélèvement
superficiel cutané ou de fistule est formellement proscrit. La fiabilité de ce genre de
prélèvement bactériologique est nulle. Ils mettent en général en évidence des germes cutanés
de surface qui ne sont pas forcément en cause dans la genèse du sepsis profond et amènent
à l’instauration d’antibiothérapies inefficaces et inadaptées source de résistances bactériennes
ultérieures.
Les indications sont régies par les propriétés d’adhésion bactérienne et la capacité des
bactéries à synthétiser le biofilm. Ce dernier rend la plupart des antibiotiques inefficaces sur
les bactéries qui en sont à l’origine. Le délai classiquement reconnu de formation du biofilm est
de 15 à 21 jours. C’est ce délai qui va déterminer le choix de prise en charge et permettre de
distinguer deux tableaux cliniques distincts : le sepsis aigu et le sepsis chronique.
1. Le sepsis aigu :
Il est donc caractérisé par un délai de prise en charge par rapport à l’apparition des premiers
signes cliniques d’infection (signes infectieux généraux, inflammation locale, douleur, etc…)
inférieur à 21 jours. Dans ce cadre, considérant que le biofilm n’est pas encore formé, les
implants scellés ou ostéo-intégrés peuvent théoriquement être conservés, les éléments
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prothétiques amovibles doivent être remplacés [19].
Une autre notion temporelle a été introduite dans le domaine des sepsis aigus, c’est le délai
de survenue de l’infection par rapport à la date de pose de la prothèse. On distingue alors des
sepsis aigus précoces survenant moins de trois mois après la pose de la prothèse et des
sepsis aigus tardifs survenant au-delà de ce délais. Cette notion n’intervient pas dans le choix
de l’indication mais revêt, pour certains [20], un caractère pronostique avec une évolution plus
péjorative des sepsis tardifs.
2. Le sepsis chronique :
Il est caractérisé par un délai de prise en charge supérieur à 21 jours. A ce délai, le biofilm
étant considéré comme formé, l’ensemble des implants doit être déposé. Ce changement de
prothèse peut être réalisé en 1 ou 2 temps. Classiquement il est considéré qu’un changement
en 1 temps peut être réalisé dans le cadre d’un sepsis chronique, lorsque le germe est connu
de manière fiable avant la prise en charge chirurgicale et lorsqu’il ne s’agit pas de germe
multi-résistant. L’état général du patient doit être relativement conservé et ses défenses
immunitaires considérées comme compétentes, le revêtement cutané doit être encore correct
[21,22]. Dans les autres cas, il semble plus prudent d’opter pour un changement de prothèse
en 2 temps. Cela dit, actuellement, le débat reste ouvert, certaines équipes pratiquent la
plupart du temps des changements en 1 temps, d’autres, dont nous faisons partie, préfèrent
encore privilégier les procédures en deux temps. Actuellement, la revue de la littérature ne
permet pas de trancher, aucune différence significative n’ayant pu être dégagée formellement
entre ces deux techniques, ni en terme de guérison de sepsis [22, 23, 24, 25, 26], ni en terme
de résultat fonctionnel à distance [23, 25].
V. Technique Chirurgicale
1. La voie d’abord :
La baguette d’ostéotomie doit être longue, au moins 8 cm, nous la relevons à la scie oscillante
et prudemment au ciseau à os en essayant de ne pas la fragmenter. Ceci peut être rendu
difficile par une qualité osseuse souvent très dégradée par l’infection. Plus l’os est fin, fragile
et friable, plus la baguette doit être longue et atteindre une zone d’os sain.
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Fig. 5 à 13 : Les étapes de la réalisation d’une ostéotomie de la TTA : Ostéotomie à la scie
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oscillante puis au ciseau à frapper fin, Décollement du bord antéro-supérieur de la TTA du
plateau prothétique, Relèvement prudent de la TTA à l’aide de deux ciseaux plats,
Exposition de la cavité articulaire dans son ensemble.
Ces précautions permettent d’obtenir des résultats significatifs pour une identification
bactérienne fiable.
Toute antibiothérapie doit être stoppée au préalable, au moins 8 jours et idéalement 15 jours
avant le geste chirurgical [6].
La voie d’abord élargie permet l’accès à l’ensemble de la cavité articulaire et ainsi une
synovectomie satisfaisante.
Dans le cas d’une prothèse de reprise en place, avec des éléments amovibles, ceux-ci doivent
être idéalement changés, ou au moins démontés, afin de nettoyer tous les interstices. La
technique de lavage de la cavité articulaire sera décrite plus bas (chapitre V4b).
a) Dépose du Matériel :
L’ablation de l’insert ne pose en général que peu de problème, même dans le cas de
prothèses contraintes si le matériel spécifique est disponible.
La dépose du carter fémoral (Fig. 15 et 16) est facilitée par l’utilisation d’une scie de Gigli qui,
si elle est glissée entre l’implant et l’os, permet de les décoller en garantissant la meilleure
épargne du capital osseux. Il est en général possible de glisser la scie de Gigli uniquement
jusqu’au niveau de la coupe distale. A ce niveau, sa progression est en général bloquée par
des plots ou divers systèmes d’ancrage fémoraux. Dans ce cas, on peut passer un ciseau à
frapper fin au niveau de chanfrein postérieur et de la coupe postérieur des deux côtés du
carter fémoral. Une fois l’implant fémoral décollé de l’os, celui-ci peut être déposé au chasse-
greffon et au marteau sans difficulté.
Concernant l’implant tibial (Fig. 17 et 18), il convient de passer également un ciseau fin et
large sous la platine afin de la décoller de l’os, chasse-greffon et marteau permettent ensuite
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l’extraction de l’implant.
En cas de présence d’un implant patellaire, celui-ci doit bien entendu être retiré (Fig. 19 et 20).
Simplement à l’aide d’un ciseau à frapper fin en cas d’implant en polyéthylène. Dans les rares
cas d’implants à embase métallique, l’extraction est aisée en cas de descellement, sinon, afin
d’éviter une extraction délabrante pour la rotule on peut utiliser une scie oscillante à lame
diamantée puis extraire séparément et prudemment les plots métalliques.
Concernant le ciment, dans un cadre septique, il faut s’attacher à le retirer dans son ensemble,
si nécessaire au prix d’un volet osseux fémoral et/ou tibial si la tubérosité n’a pas été
préalablement relevée.
Dans les cas les plus difficiles : charnières non démontable, quilles vissées, quilles cimentées
sur toute la longueur, quilles inamovibles, la solution est la réalisation d’un volet osseux qui
permettra l’extraction de l’ensemble du matériel sans risque de fracture non contrôlée et dont
la réduction et l’ostéosynthèse seront aisées (Fig. 22).
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Fig. 15 et 16 : Dépose de l’implant fémoral : passage de la scie de Gigli puis extraction au
chasse-greffon.
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Fig. 17 et 18 : Dépose de l’implant tibial : Passage d’un ciseau fin sous la platine puis
extraction au chasse-greffon.
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Fig. 19 et 20 : Aspect per-opératoire de la patella avant et après dépose d’un pion rotulien en
polyéthylène.
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Fig. 21 : Aspect de la cavité articulaire après dépose des implants.
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Fig. 22 : Volets tibial et fémoral lors d’une dépose de PTG à quilles cimentées avant
arthrodèse dans le même temps opératoire par clou fémoro-tibial.
b) Curetage et débridement de la cavité articulaire
Le maître mot lors de cette étape est agressivité. Le curetage de l’ensemble des fausses
membranes et de l’ensemble de l’os dégradé, nécrosé ou dévascularisé doit être le plus
complet possible (Fig. 23). La synovectomie doit être la plus complète possible, au bistouri
électrique, la cavité articulaire doit être totalement débridée et il faut ne laisser en place que
des tissus visuellement sains et vascularisés (Fig. 21). Des fragments de tissus infectés sont
envoyés au laboratoire de bactériologie pour identification micro-biologique (Fig. 14).
Les instruments efficaces sont nombreux : curettes de toutes tailles, bistouris froids et
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électriques, rugines, alésoirs souples ou rigides etc…
Les fûts tibial et fémoral doivent être reperméabilisés à l’aide d’une fraise à os ou d’un alésoir
puis généreusement curetés et irrigués.
Pour ce qui est du lavage, peu importe le produit. Sérum physiologique, Dakin®, Po(ly)vidone
iodée, eau oxygénée, aucun de ces produits n’a montré sa supériorité en matière de pouvoir
bactéricide au contact des tissus et liquides biologiques. L’important est d’effectuer un lavage
sous pression afin d’avoir un effet mécanique optimal et d’éliminer au mieux l’inoculum
bactérien. Nous utilisons un système de lavage-aspiration sous pression type Pulsavac®
(ZIMMER®) très bien adapté à cette utilisation (Fig. 24), mais il existe sur le marché de
nombreux systèmes équivalents.
Toute la cavité articulaire, ainsi que le panicule adipeux et le tissus sous cutané sont avivés à
la curette et lavés sous pression.
Une fois cette étape réalisée, on applique largement de la po(ly)vidone iodée sur la peau,
voire dans le site opératoire et on change le champage stérile avant l’étape de réimplantation,
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Fig. 23 : Curetage de la cavité articulaire et des surfaces osseuses.
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Fig. 24 : Système de lavage pulsé – aspiration Pulsavac® (Zimmer®).
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Fig. 25 : Irrigation pulsée et aspiration du fût fémoral.
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Fig. 26 : Spacer industriel articulé de genou.
c) Le spacer
Inconvénients théoriques :
La principale critique formulée à l’encontre de ce système est le fait de réimplanter dans le site
jusqu’alors infecté un nouveau corps étranger potentiellement contaminable, et dans ce cas,
pourquoi ne pas réimplanter tout de suite une nouvelle prothèse ? Le débat n’est pas tranché
et la remarque pertinente, mais le spacer à l’avantage d’être moins volumineux qu’un nouvel
implant et d’être confectionné avec du ciment qui va relarguer au moins pendant quelques
jours un antibiotique, censé diminuer le risque de recontamination immédiate le temps que les
antibiotiques systémiques arrivent sur site. Tout ceci est encore très théorique et sur un plan
purement microbiologique, le spacer n’a fait la preuve formelle ni de sa supériorité, ni de son
infériorité en matière de prévention de la récidive septique après dépose de prothèse infectée.
Avantages pratiques :
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Le spacer présente en revanche des avantages indéniables principalement sur un plan
mécanique [25, 31, 32, 33]. Le rôle principal du spacer est de conserver l’espace nécessaire à
la réimplantation d’une prothèse. Dans le cadre d’un genou, il évitera une éventuelle fusion
entre condyles fémoraux restants et plateaux tibiaux avivés. Il diminuera les rétractions de
tissus mous péri-articulaires et permettra de conserver au mieux la longueur du membre et de
régler plus aisément le niveau de l’interligne à respecter.
Il existe des spacers industriels pré moulés qui ont l’avantage de permettre une certaine
amplitude de mouvement en flexion et extension [31, 32, 33]. Leur inconvénient est le risque
de casse et surtout de luxation qui en diminuerait l’intérêt.
Notre choix :
Nous avons opté pour des spacers armés que nous façonnons nous même en per opératoire,
qui ne sont pas articulés et qui emplissent au mieux la cavité articulaire laissée libre. Ce
spacer est armé par deux clous de Métaizeau ou deux clous de Ender (Fig. 27 et 28) qui
donnent une solidité très correcte au montage et évitent toute mobilisation secondaire ou
luxation du spacer. Deux ou trois doses de ciment à la Gentamycine sont en général
nécessaires (Fig. 29). Le patient, en fonction de son stock osseux restant, pourra
éventuellement reprendre un appui protégé voire complet sur son membre inférieur en post
opératoire. L’arthrodèse temporaire de cette articulation n’a pas montré, dans notre
expérience, de moins bonne récupération des amplitudes articulaires à distance de la repose
de la prothèse par rapport au spacer dit articulé. Le coût de ce spacer « artisanal » est bien
entendu bien inférieur à celui d’un spacer industriel pré moulé ou de moules stériles à usage
unique et sa taille est toujours adaptée à l’articulation.
Deux astuces semblent très importantes lors de la confection du spacer : la première est de
laisser le membre en légère traction jusqu’à la fin de la polymérisation du ciment afin de
conserver la longueur du membre. La seconde est de faire déborder largement le ciment en
avant de la corticale antérieure du fémur (Fig. 30 et 31). Ceci permet de conserver l’espace
entre trochlée et patella afin d’éviter la rétraction de l’appareil extenseur et du revêtement
cutané antérieur source de raideur articulaire et de difficulté de fermeture lors de la repose.
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Fig. 27 et 28 : Clous de Ender utilisés pour armer le spacer.
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Fig. 29 : Mise en place du ciment qui remplit l’espace libre et déborde largement en avant de
la corticale fémorale antérieure.
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Fig. 30 et 31 : Aspect radiographique post-opératoire de profil. On remarque la forme convexe
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en avant du spacer qui permet de conserver l’espace fémoro-patellaire.
d) La Fermeture
L’ostéosynthèse de la tubérosité tibiale antérieure TTA.
plaquer la TTA avant la polymérisation totale du ciment afin d’éviter que celui-ci ne gêne
la bonne réduction de la baguette.
passage du passe-fil du bord latéral de la métaphyse tibiale vers le bord médial pour
éviter de léser les structures vasculaires et nerveuses de la loge latérale de la jambe.
cheminer au strict contact osseux en arrière de la métaphyse tibiale.
enfouir autant que possible le nœud de serrage dans le revêtement musculaire latéral.
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Fig. 32 : Réduction de la TTA à la pointe carrée avant polymérisation du ciment.
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Fig. 33 : Passage des fils métalliques.
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Fig. 34 : Aspect final de l’ostéosynthèse.
Les noeuds ont été enfouis pour éviter tout conflit sous cutané.
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Fig. 35 et 36 : Autre exemple d’ostéosynthèse de TTA sur spacer de genou.
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Fig. 37 et 38 : Aspect radiographique post-opératoire de profil.
La fermeture cutanée
Elle doit idéalement être réalisée sans tension, être solide et parfaitement étanche. Le fil de
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suture doit être de calibre suffisant pour éviter l’effet de fil à couper le beurre sur la peau. Des
agrafes peuvent être ajoutées pour améliorer encore l’affrontement des berges (Fig. 39 et 40).
Cela dit, dans ces contextes de chirurgie de reprise multiple, il existe assez souvent une
souffrance cutanée antérieure. La tubérosité tibiale antérieure n’est que peu matelassée et
c’est à son niveau que se retrouvent en général les problèmes de cicatrisation et de
couverture.
En cas de défaut de couverture antérieure, il ne faut pas hésiter à avoir recours à un geste
complémentaire, qui, dans ce secteur sera le plus souvent un lambeau de jumeau interne.
D’autres artifices de couverture peuvent être utilisés, nous en laissons le soin aux chirurgiens
plasticiens, mais nombres d’orthopédistes sont capables d’assurer eux même les couvertures
difficiles antérieures de genou.
Dans le cas de fermeture possible mais avec tension ou sur une peau à la vitalité ultérieure
douteuse, nous avons essayé, avec succès, les pansements aspiratifs préventifs. Les études
sérieuses concernant cette pratique restent encore peu nombreuses [34] mais notre courte
expérience est plutôt favorable. Ces pansements diminuent la macération locale et semblent
favoriser la cicatrisation, prévenir les désunions précoces et les nécroses de cicatrices.
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Fig. 39 et 40 : Aspect final après fermeture cutanée.
.VI. L’Antibiothérapie
En l’absence de preuve bactériologique pré opératoire fiable, ce qui est souvent le cas, il faut
opter pour une antibiothérapie probabiliste. Elle doit être débutée juste après la réalisation des
prélèvements bactériologiques per opératoires, dans le souci, théorique, de ne pas négativer
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les résultats bactériologiques. Aucun protocole d’antibiothérapie probabiliste n’est
unanimement recommandé et nous avons opté en accord avec nos médecins infectiologues
et nos microbiologistes pour le protocole suivant :
Vancomycine : dose de charge per opératoire de 15mg/kg à passer sur 2 heures puis 30
mg/kg au pousse-seringue sur 24 heures. Dose à adapter au dosage de vancocinémie.
Céfotaxime : 100 mg/kg/jour en 3 injections.
De nombreuses équipes préconisent de rajouter un aminoside.
En cas de preuve microbiologique pré opératoire fiable, une antibiothérapie ciblée peut être
instaurée en per opératoire.
Dans tous les cas, la prise en charge des infections sur prothèse articulaire doit faire l’objet
d’une prise en charge pluri-disciplinaire [34] et l’avis des médecins infectiologues doit être
demandé systématiquement afin d’éviter la prescription inutile, insuffisante ou mal adaptée
d’antibiothérapies. Le suivi et la surveillance des effets indésirables de l’antibiothérapie doivent
aussi faire l’objet d’une attention particulière.
La fréquence des consultations post opératoires est variable, elle dépend des équipes et des
habitudes de chacun.
En ce qui nous concerne, nous revoyons le patient vers 3 semaines post opératoires pour
surveiller la cicatrisation et vérifier les résultats des enrichissements des cultures
bactériologiques. Puis nous le convoquons à 6 semaines, 3 mois, 6 mois et 1 an pour
contrôles radio-cliniques. Le bilan biologique est contrôlé régulièrement, une fois par semaine
pendant le premier mois puis une fois toutes les deux semaines voire une fois par mois en cas
d’évolution favorable jusqu’à normalisation du bilan.
L’évolution défavorable doit être dépistée le plus précocement possible et donner lieu à une
reprise chirurgicale rapide.
Ces modalités ne sont qu’un exemple pratique, de nombreux autres modèles de suivi sont tout
à fait acceptables.
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VIII. La Réimplantation
Après dépose d’une prothèse infectée, la reconstruction articulaire peut passer par la
réimplantation d’une prothèse, qui, en raison des défects osseux et ligamentaires fréquents
faisant suite à l’excision des tissus infectés, sera effectuée avec des implants de reprise.
Les critères nécessaires à la réimplantation sont les suivants :
Cicatrisation obtenue.
Absence d’inflammation locale.
Absence de signes généraux de sepsis.
Normalisation du bilan biologique inflammatoire.
soit dans le même temps opératoire dans le cadre d’un changement en un temps.
L’ensemble de l’instrumentation opératoire et le champage chirurgical seront alors
complètement changés, le patient, pour certains, changera de salle opératoire.
soit pour certains, systématiquement 6 semaines après la dépose si l’évolution clinique
et biologique le permet [36].
soit pour d’autres, dont nous faisons partie, 3 mois minimum après l’explantation, avec
un arrêt de l’antibiothérapie 1 mois avant la réimplantation.
Nous avons opté pour une antibioprophylaxie per opératoire classique suivie de la dernière
antibiothérapie efficace contre le germe incriminé.
Les modalités techniques de réimplantation, les types et modèles de prothèses ne seront pas
abordés ici. Il s’agit d’une question vaste qui dépend des habitudes et des opinions de chacun.
Le caractère septique ou non de la révision de prothèse de genou n’influence que peu les
choix techniques de la réimplantation.
Etat général très dégradé chez un patient âgé à l’espérance de vie limitée et ne pouvant
supporter des gestes chirurgicaux itératifs.
Situation mécanique non rattrapable notamment avec rupture irréparable de l’appareil
extenseur.
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Situation microbiologique particulièrement inquiétante avec possibilités de traitements
antibiotiques limitées.
Nous optons, dans ces situations, le plus souvent pour un geste en 1 temps avec dépose de
la prothèse et arthrodèse par clou fémoro-tibial (Fig. 41, 42 et 43) mais certaines situations
inextricables nous contraignent encore parfois à l’amputation en cuisse.
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Fig. 41, 42 et 43 : Arthrodèse de genou par clou fémorotibial après dépose de PTG infectée.
Clichés à 3 ans post-opératoires
X. Conclusion
Les équipes compétentes en chirurgie des infections ostéo-articulaires sont nombreuses et
leurs pratiques peuvent parfois être sensiblement différentes. Cependant elles partagent une
philosophie globale de la prise en charge des infections sur prothèse que l’on peut résumer de
cette façon :
L’homogénéisation des pratiques, évitant les antibiothérapies non adaptées et les gestes
chirurgicaux insuffisants ou inutiles, ainsi que l’amélioration du parcours de soins des patients
restent néanmoins les clefs de l’amélioration de la prise en charge des infections ostéo-
articulaires.
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