Expérience Du Domaine Agricole

Télécharger au format docx, pdf ou txt
Télécharger au format docx, pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 6

Exprience du Domaine Agricole de Sidi

Kacem

Introduction
Le Maroc est aujourdhui de plus en plus confront aux problmes de scheresse (93% du territoire
national est aride semi-aride). Pour attnuer les effets de ces changements climatiques sur la
production agricole, nous sommes dans lobligation de combiner toutes les techniques et pratiques
culturales permettant de mieux valoriser le mtre cube deau.
Le semis direct est lune de ces pratiques; cest un systme dexploitation qui a montr ses preuves
dans plusieurs pays alors que son adoption par les agriculteurs marocains demeure limite.
Le semis direct est un mode dinstallation des cultures sans faire appel aux travaux du sol
(retournement et prparation superficielle) qui jusqu prsent paraissent indispensables pour une
mise en place de la culture, du moins pour les agriculteurs marocains.
Le semis direct est aussi un ensemble de pratiques, combines au mode dinstallation des
semences qui permet de valoriser au maximum cette technique.
Aujourdhui, aprs trois annes dessais et de travail grande chelle avec la technique de semis
direct des crales aux domaines agricoles de Sidi Kacem, nous mettons la disposition des
agriculteurs marocains les rsultats obtenus grce cette technique en comparaison avec les
autres techniques standards.

Le semis direct aux Domaines Sidi Kacem


Le semis direct des crales a t introduit au niveau des Domaines Sidi Kacem durant la
campagne agricole 2005-2006.
Pour la premire et la deuxime anne, le semis direct tait conduit sur dix hectares. Pour la
campagne 2007/2008, cette technique a t reconduite sur pas moins de 500 ha.
Le travail a t men conjointement entre les Domaines Sidi Kacem et la socit Khun. Le semis
direct a t ralis laide dune machine spciale de semis direct importe du Brsil.
Travaux de prparation du sol et priode dinstallation de la culture
Pour le systme classique, la prparation du sol constitue un enjeu majeur. Une bonne prparation
du sol, juste aprs les rcoltes, simpose. A cette poque, le minimum deau dans le sol facilite
lintervention des outils mcaniques et permet une installation prcoce de la culture suivante.
Cependant, lorsquon prpare prcocement nos parcelles, on leurs fait perdre le peu deau stocke
dans le sol.
Si le travail du sol nest pas ralis juste aprs le semis, nous nous trouvons en automne devant un
sol sec et difficile travailler. Dans ce cas, on est oblig duser des grands moyens ce qui hausse la
facture nergtique ainsi que les dpenses lies lusure et la casse des outils de travail du sol
avec le risque de chauffage des tracteurs ainsi que la difficult que rencontrent les oprateurs des
engins cause de la chaleur ce qui fait diminuer leur rendement (dcalage horaire simpose).
Lautre alternative est dattendre larrive des premires pluies pour faciliter le travail du sol, avec
le risque de perdre une bonne dose dirrigation (surtout si la fin du cycle est sche ou domine par
du Chergui) ou encore dtre dcale de la priode optimale dinstallation de la culture si les
premires pluies sont importantes.

Avec le semis direct, nous avons la possibilit actuellement de pturer nos parcelles, condition de
ne pas consommer tous les rsidus, et de semer dans les meilleurs dlais.
Temps dinstallation
Le systme classique dinstallation des crales ncessite un travail du sol profond, deux trois
prparations superficielles, un pandage dengrais, un semis et parfois un roulage (Tableau 1, voir
fichier PDF).
Il faut noter que ces normes dpendent de la puissance utilise, la nature, la topographie et la
forme du terrain.
Le nombre de jours ncessaires pour installer 100 ha de crales peut tre compressible un
certain degr mais cela ncessite lintervention de plusieurs engins en un seul moment.
Il ressort de ce tableau comparatif (Tableau 1, voir fichier PDF) que le nombre de jours ncessaires
linstallation dune crale en semis conventionnel est 9,5 fois plus important par rapport au
semis direct.
Ce rapport peut tre beaucoup plus important si laccessibilit du terrain est rendue difficile par les
pluies. Le semis direct ncessite un temps de ressuyage du sol moins important et permet de
mieux conserver lhumidit du sol alors que les autres outils conventionnels ncessitent un
desschement plus important et mme parfois on adopte des techniques facilitant cela (un cover
croppage fait perdre 10 mm de rserve deau du sol).
Une mesure du profil hydrique derrire une pluie de 20 mm nous montre que la profondeur humide
sur semis direct est 35% suprieure par rapport au semis conventionnel.
Charges lie linstallation
Le semis direct ncessite une puissance suprieure (115 cv pour un semoir de 2,8 m de largeur)
par rapport aux autres outils de prparation du sol et de semis. Cela ne veut aucunement dire que
la charge lhectare est suprieure.
Ainsi, la comparaison des charges relatives la consommation du gasoil et la main duvre
montre une diffrence de 430 Dh/ha en faveur du semis direct. Cette diffrence augmente avec
lintgration de lamortissement et lentretien du matriel. Si on fait appel la location, cette
diffrence atteint 1200 Dh/ha.
Avec les 500 ha de crales installes en semis direct au niveau des Domaines Sidi Kacem, nous
avons pu amortir la machine ds la premire anne.
Conservation des ressources
Le semis direct permet non seulement lconomie des charges mais essentiellement la gestion
durable des diffrentes ressources: hydriques, sol
Au niveau des parcelles en pente conduites avec cette technique, nous avons remarqu quaprs
des pluies importantes, le ruissellement est plus prononc sur le semis conventionnel surtout si les
parcelles sont travailles dans le sens de la pente.
Le sol derrire le semis direct reste stable alors que sur le conventionnel la fissuration se met en
place ds quil y a desschement, soit en cours de vgtation ou aprs les rcoltes.
Avec le semis direct, la semelle du labour disparat et une vie biologique sinstalle.
Contrainte dutilisation

Les contraintes dutilisation de la technique du semis direct ne doivent pas tre perues comme
limite dadoption de la technique mais il faut les connatre et les contrler pour mieux les valoriser.
Le semis direct ne permet pas de retourner le sol. De ce fait, il limite lenfouissement des graines
qui chutent durant la moisson. Ailleurs, gnralement la pluie tombe entre la rcolte et le semis, ce
qui fait lever ces graines. Au Maroc, il nous est difficile de contrler ces graines surtout quelles
appartiennent la mme espce.
Pour pallier cette contrainte, nous avons adopt au niveau de nos domaines un assolement
biennal se basant sur une lgumineuse et une crale. De cette manire, il est facile de contrler
les leves des crales sur lgumineuses et vice versa. Si la production cralire est destine pour
le commun, limpact est ngligeable.
Dans le systme de semis direct, on assiste un dmarrage prcoce des mauvaises herbes si les
pluies surviennent avant les semis. Dans ce cas, un traitement herbicide prcoce simpose.
Sur les passages de la moissonneuse batteuse, on note la prsence dimportants dbris de culture.
Lors du semis, il peut y avoir introduction de ses dbris dans le nid de semis ce qui agit
ngativement sur la germination des graines. Dans ce cas, il faut sassurer que la forme des
coutres soit adapte aux conditions du milieu ou penser introduire un parpilleur de paille
indpendant ou fix sur la moissonneuse batteuse.
Par contre, nous avons remarqu quaprs dsherbage chimique, il ny a pas de leve tardive
dautres mauvaises herbes ce qui confirme le fait que sur semis direct le stock semencier des
adventives diminue car il n y a pas retournement de sol permettant une leve chelonne des
mauvaises herbes dont les graines sont places diffrents niveaux du sol superficiel.

Itinraires techniques et rendements


Pour les deux premires annes, les essais de semis direct ont t conduits sur deux parcelles cte
cte avec 10 ha pour le semis direct et 10 ha pour le conventionnel.
La troisime anne, nous avons achet notre propre semoir ce qui nous a permis dtendre le
semis direct sur pas moins de 500 ha.
Il ressort du tableau 3 (voir fichier PDF) que la premire anne les rendements sur semis direct et
semis conventionnel taient identiques. La campagne 2005/2006 tait caractrise par une
pluviomtrie importante et relativement bien rpartie dans le temps. Ceci explique aussi les
rendements identiques entre les diffrentes doses de semis (130 180 kg/ha) en semis direct mais
avec un coefficient de tallage inversement proportionnel la dose de semis. Cependant, nous
prfrons rester sur des doses de lordre de 180 200 kg/ha qui nous permettent dviter les
surprises de la leve, davoir un bon couvert vgtal au dpart pouvant concurrencer les mauvaises
herbes et dobtenir un maximum de rcolte issue de la tige mre (qualit et poids spcifique
meilleurs).
La campagne 2006/2007 a t caractrise par un chergui fort au mois de fvrier. Nous avons
constat que les bls du semis direct se sont allongs de manire brusque et ont sorti les pis de
manire prcoce. Au niveau du sol, la diffrence de teneur en eau tait remarquable.
Pour la campagne 2007/2008, la diffrence est de lordre de 20% en faveur du semis direct par
rapport la parcelle tmoin. Sur les autres parcelles, nous avons ralis avec le semis direct des
rendements de 32 qx/ha.

Essai de semis direct chez un agriculteur Mekns


Lessai ralis chez Monsieur A. Zine El Abidine, agriculteur de la rgion de Mekns, nous montre
encore une fois le manque gagner du semis conventionnel. Nous avons constat que les
rendements, les premires annes, sont comparables entre le semis direct et celui conventionnel si

la pluviomtrie ne fait pas dfaut (Tableau 4, voir fichier PDF). Dans le cas o lanne est sche le
semis direct lemporte largement.
Les fruits de cette technique deviennent de plus en plus intressants aprs les premires annes.
Avec des pluviomtries moyennes, cette technique permettra une stabilit des rendements un
niveau suprieur par rapport ceux raliss par la mthode conventionnelle.

Conclusion
A travers cette petite exprience nous pouvons assurer que la technique du semis direct est trs
valable et adapte notre contexte marocain. Il faut considrer le semis direct comme non
seulement une technique de semis mais plutt comme un systme de production pour lequel il faut
raisonner lensemble des actions et techniques en tenant compte du contexte (milieu) pour aboutir
un rsultat meilleur et durable n.
Mohamed RAZINE
Ingnieur Agronome, Domaines Sidi Kacem
[email protected]

Semis Direct : Produire autrement, dfi ou ncessit ?


Le Semis Direct (SD) consiste semer directement dans un sol qui nest pas travaill. Seul un petit
sillon est ouvert avec des outils spcialement conus.
Le travail mcanique du sol est remplac par lactivit biologique des plantes. La couverture du sol
par les rsidus de la culture prcdente sert de protection et maintient lhumidit ncessaire aux
semis. Les racines des plantes empchent le sol de se compacter permettant ainsi leau et lair
de circuler plus facilement.
La technologie repose galement sur une rotation plus longue des cultures en introduisant par
exemple des olagineux tel que le colza et en laissant une place aux lgumineuses productrices de
quantits dazote non ngligeables.
Le Semis Direct dans le monde
Le Semis Direct connat un formidable succs au niveau mondial avec plus de 100 millions
dhectares rpartis sur lensemble de la plante: tats-Unis, Brsil, Canada, Argentine, Australie,
Europe, Pakistan, Chine et sans oublier les pays du Bassin Mditerranen et parmi eux le Maroc.
Face aux scheresses successives, lenvole des cours du ptrole et la demande croissante de
denres alimentaires, il convient de trouver des solutions: le Semis Direct peut probablement en
tre une.
La mcanisation de lagriculture a donn naissance au labour afin denfouir les rsidus qui
rendaient les semis difficiles. La conception de semoirs spcifiques et la disponibilit de nouveaux
herbicides, qui permettent aujourdhui de grer au mieux les rsidus, contriburent au
dveloppement du Semis Direct et ce, en plusieurs tapes.
En 1940, larrive de la molcule 2-4-D a permis les premires tentatives aux tats-Unis de semis
sans prparation de sol.
En 1960, la diffusion du Paraquat a donn un essor remarquable au Semis Direct dans le continent
Nord Amricain.

Puis, la mise sur le march du Glyphosate dans les annes 1970, renforce par les expriences
menes aux tats-Unis principalement, ont permis au Semis Direct de se dvelopper dabord en
Amrique du Sud puis dans le reste du monde.
Dans le mme temps, les constructeurs de machines agricoles fabriquent et mettent au point des
semoirs spcifiques Semis Direct capables de raliser un semis sur un sol non travaill avec des
vgtaux en surface.
De nombreux instituts de recherche agronomique affinent leurs travaux sur le Semis Direct en
allant progressivement vers les SCV (Semis sous Couvert Vgtal).
Ladoption du systme Semis Direct se fait pour des raisons conomiques, agronomiques mais
aussi par des contraintes climatiques.
Dans les zones tropicales avec des pluviomtries importantes (2000 mm voire plus), le climat ne
permet pas de travailler le sol temps et en conditions optimales, le Semis Direct donne alors la
possibilit de semer aussitt aprs la rcolte de la culture prcdente (par exemple du bl aprs du
mas grain).
En zones semi-arides, tel que le Maroc, avec des pluviomtries trs faibles et souvent mal
rparties, la technique SD permet deffectuer des semis sec et de profiter ainsi des premires
pluies.
En Europe de lOuest, lagriculture de conservation occupe une place diffrente selon la situation
gographique des pays qui ont des pluviomtries trs htrognes. Actuellement, les pays de
lEurope de lEst et les tats de lancienne Union Sovitique sapproprient progressivement la
technique du Semis Direct pour faire face une trs courte priode vgtative due aux hivers longs
et rigoureux.
Le Semis Direct au Maroc
Cest dans le cadre dun accord de coopration entre lUSAID (Agence Amricaine de
Dveloppement) et lINRA (Institut National de Recherche Agronomique) que le Centre
dAridoculture de Settat a pris naissance du SD. Grce cette collaboration, les recherches sur le
Semis Direct dbutent en 1982 sous la conduite du Dr. Abderrahmane Bouzza et son quipe qui
ont fait un travail de recherche remarquable sur le Semis Direct.
Les essais en station ont donn des rsultats significatifs la faveur du Semis Direct qui ont servi
de base la diffusion de la technique au sein de la cooprative de Khmisset Chaoua dans le cadre
dun accord de coopration entre lINRA de Settat et lassociation FERT (Association Franaise de
Dveloppement International).
En 2005, le Domaine Agricole de Sidi-kacem accepte de faire un essai avec un semoir disques
Kuhn sur une parcelle de 10 hectares en bl tendre ayant un prcdent pois chiche.
En 2006, sur la mme parcelle, lessai a t reconduit en bl tendre avec un rsultat significatif
puisque le semis conventionnel na rien donn alors que le Semis Direct a produit 10 quintaux par
hectare.
En 2006 et 2007, plusieurs autres essais ont t mis en place, toujours avec un semoir Semis
Direct Kuhn, chez la famille Zine El Abidine de Mekns, dans trois grandes exploitations des
Domaines Agricoles, une grande exploitation du sud du Maroc ainsi que chez des agriculteurs de
Had Bouhassoussem avec lappui de la Cooprative Agricole de Mekns et FERT (France).
Suite aux rsultats significatifs obtenus en 2007, le Domaine Agricole de Sidi-kacem et Aziz Zine El
Abidine ont fait le choix dacqurir chacun un semoir Semis Direct Kuhn combin (semences et
engrais) avec lesquels ils ont fait plus de 1000 hectares pour la saison 2007-2008.
Le systme Semis Direct se conoit dans une globalit agronomique de lexploitation et autour

dune synergie de comptences et dexpriences entre chercheurs, oprateurs conomiques,


institutions et surtout des agriculteurs.
Le Semis Direct reprsente une alternative doublement gagnante permettant la fois daugmenter
le revenu agricole tout en amliorant la conservation des eaux et des sols, et en attnuant les
variations de production.
Michel Raguin, Consultant en agronomie

Vous aimerez peut-être aussi