Malek Bennabi - Les Conditions de La Renaissance
Malek Bennabi - Les Conditions de La Renaissance
Malek Bennabi - Les Conditions de La Renaissance
Editions ANEP
COLLECTION PATRIMOINE
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Editions ANEP
ISBN: 9961-768-09-4
Dpt lgal: 1627-2005
AVERTISSEMENT
Ce livre, comme tout livre, a son histoire. Elle pC.)USe la vie
pathtique de Malek Bennabi. Au dbut de 1956, ft1yant u11e
France o la rpression anti-algrienne s'intensifiait, Ben11abi
emporte dans ses bagages la traduction, ralise par ses soins, de
son ouvrage paru en 1949 Alger aux ditions En-Nahdha sous
le titre Discours sur le;; conditions de la renai,\".'iance algrie1ine
dont les grandes lignes t'urent bauches la veille de son
arrestation en avril 1947, quelques semaines aprs la pa1ution de
son livre le Phnomne corar1ique. Bennabi devait crire plus
tard: <<j'avais eu peur, en effet, de niourir dan;; le,'i gele,<;
colonialistes sans laisser l'Algrie, 1nes frres 1nusulman;;,
une technique de renaissance tant je les 11oyais sacrifier le111
1neille1irs moyen;; et le meilleur de leur temps des futilit,'>>>.
Arriv au Caire, un article de !'crivain et journaliste gyptien
Ihsan Abdelqoudous, dans la revue Rose el Yo11cef, le fit
dc.ouvrir des tudiants algriens et arabes qui allaient se
mettre admirablement son service et au service de ses ides.
La traduction que Bennabi avait ralise de son livre fut
remanie, sous son contrle, par Abdessabour Chahine et Omar
Kamel Meskaoui. Co1rune nous l'explique Bennabi da11s son
introduction, cette premire dition arabe suscita un dbat qui fut
propice des dveloppements de certains chapitres de l'ouvrage
enrichissant ainsi la deuxime dition arabe parue en 1960 au
Caire et que nous livrons pour la premire fois at1 pt1blic
'
f1ancophone grce la traduction de notre ami Noureddine
Khendoudi qui a aussi traduit de l'arabe la postface de Rahma, la
fille de Malek Bennabi.
Abderrahman Benamara
Alger, le 5 juin 2005
'
Du mme auteur
1 - Le phnomne coranique, (arabe-franais), Alger, 1947
2 - Lebbeik, (franais), Alger, 1948
3 - Le.-.; conditions de la renaissance, (arabe-franais), Alger, 1949
4 - Vocation de l'Islam, (arabe-franais), Paris, 1954
5 - L'Afro-Asiatisme, (arabe-franais), Le Caire, 1956
6 - S.O.S Algrie, (arabe-franais), Le Caire, 1957
7 - Le problme de la culture, (arabe), Le Caire, 1959
8 - Ide d'un Commonwealth islamique, (arabe-franais), Le
Caire, 1960
9 - La lutte idologique, (arabe-franais), Le Caire, 1960
10 - La nouvelle dification sociale, (arabe), Beyrouth, 1960
11 - Rflexions, (arabe), Le Caire, 1961
12 - Dans le soujjle de la bataille, (arabe-franais), Le Caire, 1961
13 - Naissance d'une socit, (arabe), Le Caire, 1962
14 - Perspectives algriennes, (arabe-franais), Alger, 1964
15 - Mmoires d'un tmoin du sicle - L'enfant, (arabefranais), Alger, 1965
16 - L'uvre des orientalistes, (arabe-franais), Alger, 1Q67
17 - Islam et Dmocratie, (arabe-franais), Alger, 1968
18 - Mmoires d'un tmoin du sicle- L'tudiant, (arabe),
Beyrouth, 1970
19 - Le sens de l'tape, (franais), Alger, 1970
20 - Le problme des ides, (arabe-franais), Le Caire, 1971
21 - Le musulman dans le monde de l'conomie, (arabefranais ), Beyrouth, 1974
22 - Le rle du musulman et son message, (arabe) Beyrouth, 1974
23 - Entre la rectitude et l'garement, (arabe-franais),
Beyrouth, 1978
24 - Pour changer l'Algrie, (arabe-franais), Alger, 1989
25 - Colonisabilit, (franais), Alger, 2003
26 - Mondialisme, (franais), Alger, 2004
27 - La ralit et le devenir (dernier entretien avec Malek
Bennabi) (arabe-franais), Alger, 2004
Prface
La rdition du troisime ouvrage de Malek Bennab.i, Les
conditions de la renaissance, publi pour la premire fois par les
ditions algriennes En-Nahda en 1949, rpond une triple
,
.
preoccupat1on.
Bien sr, la rdition de cet ouvrage s'inscrit dans une
conjoncture particulire, celle de la commmoration du
centenaire de la naissance de l'un des penseurs algriens
contemporains les plus fconds, les plus exigeants, les plus
critiques au sens noble du terme critique, qui signifie indiquer ce
qui fait sens pour les personnes et les socits, sparer le bon
grain de l'ivraie, dmler l'accessoire de l'essentiel pour renouer
avec le primordial actionne!, ! 'Islam social, l'Islam
civilisationnel, celui des hommes et des femmes en mouvement
unissant dans une mme tension, faite de foi dans le Crateur et
de confiance dans la cration, de recherche de la vrit dans le
sens de connaissances scientifiques prcises et exactes et
d'efficience technicienne, des curs battants au rythme de la
parole divine, des neurones veills et des mains habiles.
Bien sr, il est important, voire urgent de rditer toute
l' uvre de Malek Bennabi, tout simplement parce qu'elle
reprsente une partie de notre patrimoine intellectuel, mais aussi
et surtout parce que rarement une uvre et son auteur n'auront
t si copieusement trahis, dnaturs aussi bien par ceux qui ont
cru bon de s'en dmarquer avec une virulence agressive que par
ceux qui ont eu l'outrecuidance de tenter de se l'approprier des
fins que Malek Bennabi dnonce de manire drastique. Ainsi en
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Or, je ne crois pas que la prface ait dit quelque chose de ces
problmes cruciaux, ni de la phnomnologie applique l'tude
du Coran.
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S'il est sensible cet aspect, ce n'est pourtant pas qu'il soit un
intellectuel pris d'abstraction ni un esthte gris par les belles
formes.
Ce qui l'attire, ce qui le fascine c'est le frisson humain, la
douleur, la faim, les haillons, l'ignorance. Est-il davantage le
doctrinaire qui raisonne a priori en face de ce problme?
Il l'a d'abord vcu totalement. D'autres en ont fait leur
tremplin lectoral, exaltant la misre jusqu' l'hbtement
propice toutes les mystifications, toutes les exploitations.
Nous savons, aujourd'hui, ce qu'un pareil tat peut engendrer
de dsorientation, de strilit, de dsarroi.
Mais pour Bennabi, l'exprience personnelle signifie autre
chose: une raison de mditer sur les remdes. C'est partir de
cette mditation que le drame devient pour lui un problme
technique. Il nous conduit par une analyse serre et subtile dans
les arcanes de l'histoire pour nous rvler cet ''ternel retour'' qui
lui inspire le beau chant mis en prologue cette tude.
Mais avant de suggrer la solution, un travail de dblaiement
est absolument ncessaire dans un terrain encombr par les
ruines de notre dcadence et la fange de plusieurs annes de
dmagogie lectorale.
Cette uvre est faite magistralement dans les premiers
chapitres qui mettent en lumire cette priode d'apathie peine
anime de nos ''traditions et guerriers'' laquelle succde la
priode de ''l'ide''.
Mais au fond de la conscience populaire faonne par des
sicles de maraboutisme demeure un atavisme idoltrique.
Si ''l'hydre maraboutique est terrasse par l'islahisme'' un
no-maraboutisme est encore possible, non plus avec des saints
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Introduction
La parution de la premire dition du livre en langue arabe a
rvl l'intrt croissant que suscitent, dans le monde arabe et le
monde musulman en gnral, les problmes relevant de la sociologie.
De plus en plus, la gnration actuelle fait preuve de son dsir
de mieux comprendre les faits sociaux et leurs mcanismes.
Il est normal, ainsi, qu'ayant lu la premire dition de cet
ouvrage, certains lecteurs livrent leur opinion sur la manire dont
certains faits ont t traits.
J'ai senti lors des dbats engags avec ces lecteurs que
certaines explications que j'ai exposes ne leur avaient pas offert
l'claircissement souhait. Parmi les points obscurs figure le rle
de l'ide en tant que facteur social qui influe sur l'orientation de
l'histoire, malgr ma volont de le prciser.
Il se pourrait que lorsque j'ai abord ce point dans la
prcdente dition, je ne l'aie pas explicit dans le dtail. J'tais,
en fait, convaincu par la brve explication du rle qu'accomplit
l'ide religieuse dans l'histoire ainsi que par les opinions de H.
Keyserling sur le sujet et sur lesquelles je me suis fond. Je veux
parler de ses conclusions sur le rle de l'ide chrtienne dans la
synthse de la civilisation occidentale.
J'ai abord ces points de vue dans le chapitre ''L'ternel
retour''. Les points de vue des lecteurs se sont accords sur le
caractre vague et imprcis de ce point particulier et ils ont, en
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30 octobre 1960
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PROLOGUE
L'astre idal
Compagnon: voici l'heure o le ple reflet de l'aurore glisse
entre les toiles de l'Orient.
Tout ce qui va se rveiller s'agite dj et frissonne dans
l'engourdissement et les oripeaux du sommeil.
Tout l'heure, l'astre idal se lvera sur ton labeur, dj
commenc, dans la plaine o repose encore la cit endor1nie la
veille.
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Que ton chant retentisse comme celui des prophtes jadis aux
heures propices qui enfantent des civilisations!
Que ton chant retentisse plus fort que le chur vocifrant qui
s'est lev l--bas ...
Car voil: on installe, maintenant la porte de la cit qui se
rveille, la foire et ses amusements pour distraire et retenir ceux
qui viennent sur tes pas.
On a dress trteaux et tribunes pour bouffons et
saltimbanques afin que le vacarme couvre les accents de ta voix.
On a allum des lampes mensongres pour masquer le jour
qui vient et pour obscurcir ta silhouette dans la plaine o tu vas.
On a par l'idole pour humilier l'ide.
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PREMIERE PARTIE
Le prsent et l 'Histoire
STADE EPIQUE GUERRIER ET TRADITIONS
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stade, pique
mtss1on ou soum1ss1on.
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renaissance.
Il faut reprcher l'Islam aux musulmans: il faut abandonner
les innovations pernicieuses, les idoles, il faut s'instruire, il faut
agir, il faut reprendre la communaut musulmane.
Raisonnement juste, qui implique l'art d'enfanter une
civilisation comme un phnomne social partir de conditions
toujours identiques.
Tout cela tait dit avec conviction, dans une langue lyrique,
avec force citations coraniques et d'mouvantes vocations de la
civilisation musulmane
Le peuple religieux est mlomane.
Mais l'avenir est un but lointain, il faut des voies nettes et des
vocations puissantes pour y parvenir.
Les mots devaient jalonner ces voies et contenir le ferrnent
bni de ces vocations
Mais les mots, quoique sublimes, de l'islahisme algrien ont,
parfois, malheureusement, dvi de leur objectif pour des raisons
antidoctrinales. On tait encore engourdi de sornmeil pour tendre
l'attention et l'effort invariablement. Il y eut des carts, des
inconsquences. La sagesse cda le pas l'opportunisme politique.
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* Dans cet expos doctrinal, nous n'avons pas jug ncessaire de parler du
noble Emir Khaled, ce chevalier de la lgende algrienne qui, par mgarde,
s'tait trouv dans une <<histoire des grands hommes de l'Algrie>>. Ici, nous
ne faisons que l'histoire des ides.
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STADE DE L'IDOLE
Le Coran a nomm Djahilya, c'est--dire ''ignorance'', le
paganisme qui a rgn en Arabie, avant l'Islam.
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DEUXIEME PARTIE
L'aveair
APOLOGUE
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DE L'ENTASSEMENT A LA CONSTRUCTION
Le monde musulman est demeur longtemps en marge de
)'histoire, voluant sans but ou, l'image du malade impuissant,
rsign face la maladie, perdit le sentiment de la douleur,
devenue une partie de lui-mme.
Juste avant l'avnement du XXe sicle, il entendit quelqu'un
lui rappeler sa maladie et un autre lui voquer la sollicitude
divine parvenue jusqu' son oreiller. Il n'a pas tard se rveiller
de son profond sommeil et sentir l'effet de la douleur. Avec ce
rveil apathique, une nouvelle re commena pour le monde
musulman, une re appele Renaissance. Mais que signifie ce
rvei 1? Il est ncessaire de garder l'esprit la ''maladie'' dans son
acception mdicale pour qu'on ait une ide juste sur le cas.
Evoquer une maladie ou l'prouver ne veut pas dire, en toute
vidence, ''remde''.
Le point de dpart, ce sont les cinquante dernires annes*.
Elles nous expliquent la situation prsente dans laquelle volue
le Monde musulman, une situation qui peut tre interprte de
deux faons antinomiques.
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Il est vident, aussi, que nous n'avons aucune ide sur la dure
, que va prendre ce remde. Mais un cas qui dure, ainsi, devant nos
. \ yeux, depuis un demi-sicle, revt une porte sociale qui doit
.. susciter rflexion et analyse. Au moment o nous procdons
cette analyse, nous pouvons comprendre la signification relle de
' cette poque historique dans laquelle nous vivons et nous pouvons
. . concevoir l'adaptation qu'il lui faut .
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Nous pouvons dsigner cette tape comme une tape de ''prcivilisation'' ou, en ter1nes scolastiques, une tape de prodromes
. dans laquelle le monde musulman a orient ses efforts sociaux
pour acqurir une civilisation.
Il a implicitement dcid, ainsi, que cette direction prsente
exactement le remde pour sa maladie. Nous adhrons cette
dmarche.
Nanmoins, en procdant ainsi, nous voulons dtermine1
implicitement la maladie. Et comment laisser ensuite le soin au
hasard de dcider de la thrapie suivre?
Le Monde musulman prend un comprim contre
l'analphabtisme par-ci, un cachet contre le colonialisme pa1-l,
un mdicament pour le soulager de la pauvret, l-bas. Il const1uit
une cole ici, revendique son indpendance, l-bas, construit une
usine dans un autre endroit.
A l'examen attentif de son tat cependant, nous ne relevons
pas le moindre indice de la gurison. En d'autres termes, nous ne
trouvons pas de civilisation. Il n'empche, toutefois, que de
louables efforts sont entrepris dans le monde musulman travers
lesquels, nous en remarquons la modestie, compars ceux du
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En recourant la ter1ninologie biologique, nous aboutissons
au fait que la civilisation est un ensemble de relations entre le
f domaine biologique, relatif la naissance de son ossature et son
l affermissement, d'un ct, et le domaine intellectuel relatif la
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naissance de son me et son dveloppement, de l'autre.
{ Lorsque nous achetons ses produits, la civilisation nous offre sa
configuration et son corps, mais jamais son me.
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Le Coran a fo1mul un principe biohistorique qu'il faudrait
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la raison: ''Dieu ne change rien l'tat d'un peuple que celui-ci
; n'ait, auparavant transform son me.''
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que j'ai entendu de mon pre: ''Mon fils, lis le Coran comme s'il
avait t rvl pour toi.''
Iqbal
Ainsi donc pour raliser la synthse ncessaire comme
solution du problme algrien, synthse de l'Homme, du Sol, et
du Temps, il faut le catalyseur d'une religion qui transforme
l'me musulmane, c'est--dire, selon le mot de Keyserling, lui
donne le ''principe du sens''
Cette condition est-elle ralisable dans la situation actuelle
des peuples musulmans?
Il faudrait ignorer l'Islam et, d'une manire gnrale, le sens
cosmique de la religion pour hsiter rpondre par l'affirmative.
L'efficacit biohistorique d'une religion est permanente et ne
constitue pas une proprit exceptionnelle particulire son
avnement chronologique.
Son avnement psychologique - le seul qui marque l'histoire
comme on l'a vu dans le cas de l'Europe, o la ''civilisation
chrtienne'' est ne plus de 1000 ans aprs l'avnement de l'ide
chrtienne - peut se renouveler et mme se perptuer, si l'on ne
s'cartait pas des conditions compatibles avec sa loi.
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Que chacun, dans son domaine, soit capable de cet accouchement qui doit se faire, comme tous les autres, dans la douleur.
Il faut su11r1onter cette douleur, et seule une religion le permet
en insufflant chacun ''la volont'' d'une civilisation, comme
jadis au bdouin, qui suivait les premiers pas de Mohamed dans
le dnuement d'un dsert.
C'est avec cette volont que le musulman sentira, malgr son
dnuement actuel, sa richesse pe11nanente qu'il ne sait pas encore
utiliser.
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faire face aux ''difficults''* que lui impose l'histoire, en tant que
socit si elle ne connat pas lucidement l'objectif de ses efforts.
Nanmoins, l'activit sociale ne peut tre productive, efficace
et apte son maintien et sa continuit qu'avec l'existence d'un
''mobile'' quelconque qui peut conditionner les nergies et les
,
pousser grce une finalit donne.
Au sein de cette relation, les ides de Toynbee paraissent plus
proches de la ralit que celles de Marx. En fait, la thorie du
''dfi'' explique le ''mobile'' qui conditionne l'histoire grce une
certaine finalit, en ce sens que ce dfi est suscit par le simple
instinct de conservation prsent dans tout groupe humain.
Inversement, la thorie du ''besoin'' est incapable d'expliquer le
mme fait afin de recourir un certain quilibre politique en se
fondant ainsi sur une ''conscience de classe'' donne, c'est--dire
en adjoignant un cachet politique au problme. Le ''dfi'' exige,
en pratique, une certaine ''entraide'' ou un ''rapport de
coopration'' entre les individus d'un groupe humain dfini dont
la situation lui impose d'laborer une ''rponse'' ce ''dfi'' d'une
faon collective et solidaire.
A l'oppos, les besoins lmentaires appellent l'instinct
individuel et imposent une certaine ''comptition'' ou une
''concurrence'' dans laquelle chaque individu agit pour son
propre compte, motiv par les lois basses hrites de
l'organisation animale.
En outre, l'ide religieuse qui conditionne le comportement
de l'individu - comme nous l'avons expliqu - moralise les
curs dans la socit grce une certaine finalit**, en lui
donnant une prise de conscience d'un objectif qui donne la vie,
une porte significative et une raison. Lorsque cette ide
*Cf. la confrence de l'auteur sur <<Les difficults comn1e sigr1e di1 dveloppe1nent
de la socit>>.
**Cette <<finalit>> se manifeste dans la notion du <<jour dernier>> et se ralise
historiquement sous la for111e d'une civilisation.
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Nous avons dit que la solution du problme de l'homme
s'accomplit travers trois lments essentiels qui sont:
l'orientation de la culture, l'orientation du travail et l'orientation
du capital.
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*Cette vision monolithique sert tayer un faux jugement sur l'efficacit sociale
de l'Islam d'aprs la situation actuelle du monde musulman compare celle de la
socit dveloppe.
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L'ALPHABETISME
Faute de cette mise au point fondamentale, l'instruction ne
pouvait donner naissance qu' des monstres alphabtes
clairsems dans la masse analphabte du peuple.
Nous devons cette lacune ce minus-habens qui a tronqu
l'ide de renaissance et n'a vu dans le problme algrien que la
question de ses besoins ou de ses ambitions sans y voir la donne
capitale des habitudes. Partant, il n'a vu dans la ''culture'' que
l'aspect le plus futile: une manire pour devenir ''quelqu'un'', et
au plus une science gagne-pain.
Le rsultat de cette falsification est en chair et en os, sous nos
yeux: c'est l'intellectomane.
Il y a trente ans, nous connaissions un seul mal bien curable:
l'ignorance, l'analphabtisme.
Aujourd'hui, nous connaissons un nouveau mal plus difficile
gurir: l'intellectomanie, l'alpha-btisme.
Depuis un sicle, deux tres nouveaux ont surgi dans la
socit algrienne: le porteur de haillons et le porteur de
lambeaux scientifiques.
Nous connaissons le problme du premier, mais nous
ignorons le problme du second.
Il se posait cependant depuis la zerda o tous les
intellectomanes de la ''Fdration des lus'' ont tenu l'encensoir
dans lequel l'Algrie a brl ses restes de benjoin.
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a) Dfinition historique
Il n'y a pas d'histoire sans culture, car un peuple qui n'a plus
sa culture n'a plus son histoire.
La culture, y compris l'ide religieuse, qui est la base de toute
l'pope humaine, n'est pas une science, mais une ambiance dans
laquelle se meut l'ho1nme qui porte une civilisation dans ses entrailles.
C'est un milieu o chaque dtail est un indice d'une socit qui
marche vers le mme destin: son berger, son forgeron, son
artiste, son savant et son prtre mlant leurs efforts. C'est cela la
synthse de l'histoire.
La culture, c'est cette synthse d'habitudes, de talents, de
traditions, de gots, d'usages, de comportement, d'motions, qui
donnent un visage une civilisation, et lui donnent ses deux
ples comme le gnie d'un Descartes et l'me d'une Jeanne d'Arc.
C'est l le sens historique d'une culture.
b) Dfinition pdagogique
Dfinir pdagogiquement une culture, c'est dsigner son objet
et indiquer ses moyens.
Or, son objet dcoule de sa dfinition prcdente, elle n'est
pas une science particulire, rserve une classe ou une
catgorie de gens, mais une doctrine du comportement gnral
d'un peuple, dans toute sa diversit et toute sa gamme sociale.
En particulier, si, pour les uns, elle doit tre un pont indfini
vers le progrs, elle doit tre pour certains le garde-fou qui les
empche de tomber dans l'abme.
Elle doit donc tre gnrale pour inspirer la fois le berger et
le savant et les maintenir dans le mme cadre de vie.
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/'alphabtisme
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ORIENTATION ETHIQUE
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ESTHETIQUE
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esthtique
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La grce d'un peuple est dans son esthtique, plus que dans ses traits
la
Grce
antique
tait
dans
son
sens
du
beau
plus
que
physiques. Le charme de
dans la beaut.
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TECHNIQUE
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LOGIQUE PRAGMATIQUE
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Alors que la culture, dans sa forme vivante, est une unit aux
parties sondes et lies par des liens endognes, dte1mins par
le gnie du peuple qui les a labors en accord avec sa morale,
ses gots et son histoire.
Ce sont ces liens qui impriment la culture de leur propre sceau.
Ils donnent ainsi, au style de vie de la socit et au comportement
des individus qui en font partie, un cachet particulier. Ils
dterminent en d'autres termes, toutes les caractristiques
humaines et historiques particulires cette culture.
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* Lorsqu'une femme
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ORIENTATION DU TRAVAIL
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orientation du travail
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ORIENTATION DU CAPITAL
On est peu habitu la notion de ''capital'' dans un pays sousdvelopp.
Cela est d la confusion courante des deux termes: ''avoir''
et ''capital''.
La fortune existait en Algrie bien qu'elle tende, de plus en
plus, disparatre avec la proprit agricole du paysan algrien
et le troupeau du pasteur nomade.
Mais prcisment, la dfinition de l'avoir peut tre faite de
deux manires, soit qu'on le rattache la condition sociale de son
tenant paysan, pasteur ou artisan - soit son utilisation par lui,
dans le cadre forcment restreint de son activit.
La fortune, c'est l'avoir de quelqu'un. Il lui manque les
qualits dynamiques du capital. En quelque sorte, la fortune est
un avoir qui ne bouge pas, qui ne s'exprime pas, qui ne circule
pas. Elle est localise autour de la tente ou de la maison de son
possesseur. Il faut ajouter que la fortune est mononyme; elle est
possessivement attache un nom. Elle est ainsi
cono111iquement et moralement rudimentaire; investie dans le
champ personnel d'un homme, dans son lopin de terre, dans son
troupeau ou dans son atelier. Elle est destine ordinairement, non
pas se dvelopper pour elle-mme, mais satisfaire les besoins
de son tenant.
En partant de cette dfinition de la fortune, on peut caractriser,
par opposition, le capital comme un avoir essentiellement mobile,
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orientation du capital
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LE PROBLEME DE LA FEMME
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le problme de la femme
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propre ignorance.
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le problme de la femme
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* L-dessus, je suis d'un avis diamtralement oppos et j'en indique les raisons
dans cette tude mme. Au surplus, je prtends que le problme de la femme se pose
aussi gravement en Algrie qu'en Angleterre ou en France quoi qu'en termes
diffrents. En outre, je n'ai pas dit que le problme n'tait pas social. J'ai voulu
seulement prciser les donnes fondamentales par lesquelles il acquiert le caractre
social, c'est--dire, ses donnes philosophiques, juridiques, thiques et esthtiques.
128
LE SCOUTISME
Il est un autre aspect spcifique du problme de l'homme:
c'est celui de l'enfant scout.
Le problme du scoutisme s'est dj pos, en Algrie, la
manire des autres problmes qu'on a essay galement de
rsoudre par des solutions toutes empruntes, sans le souci de
leur comptabilit avec le cadre algrien.
c'est--dire: on a vu des scouts, on a entendu parler du
scoutisme et on a ralis d'aprs le modle qui s'offrait sans se
soucier qu'il s'adapte au gabarit algrien.
Or, le scoutisme est devenu une des formes les plus populaires
de l'ducation.
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le scoutisme
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LE PROBLEME DU COSTUME
L'quilibre traditionnel d'une socit tient un ensemble de
facteurs moraux et matriels. Le costume est un de ces facteurs
Le burnous fait partie de l'hritage d'une socit do.nt les
polarits mentales taient la contemplation et la jouissance.
mecan1c1en.
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L'ART
'
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l'art
Mais les dons seuls ne donnent qu'un feu de paille qui claire,
un instant, le nom d'un artiste et disparat en mme temps que les
illusions d'un public de plus en plus du. Oum Kalthoum tait
doue. Mais quoi l'ont amene ses dons?
Cette remarque vaut mme dans le sport o certains des ntres
favoriss par la nature apportent cette mentalit du moindre
effort avec laquelle ils aboutissent de pitoyables fiasco.
Il faut lier la notion des dons celle du travail pour vraiment
un art digne de ce nom. L'art, qui n'est que le snobisme
intempestif de certains artistes dbraills par raison d'originalit,
est du mme cru que le scoutisme reprsent par des jeunes
muscadins aux cheveux longs qu'on voit parfois dans les rues
d'Alger.
Les oisifs n'ont pas le droit de dshonorer notre got et nous
nous devons de le dfendre.
137
LE SOL
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140
le sol
141
Tche gigantesque?
Certes! Mais dans d'autres pays de pareilles tches ont t
entreprises et excutes grce au gnie et aux bras de l'homme.
En France notamment, o la question se posait vers 1850,
pour les Landes alors menaces par les sables du golfe de
Gascogne.
Le problme n'effraya pas les Gascons qui dcidrent, sous le
Second Empire, d'arrter cote que cote l'invasion du sable. Et,
dans l'espace d'une vingtaine d'annes, l'Atlantique vit surgir sur
son rivage, depuis Bordeaux jusqu' Biarritz, un rideau de pins
qui arrta la marche du sable.
Mais le rsultat dpassa en ralit le but: la contre nagure la
plus pauvre et la plus malsaine de France est, aujourd'hui, la
contre la plus riche et la plus salubre o l'on construit les
meilleurs sanatoriums.
Il est vrai que notre problme se pose dans des conditions un peu
particulires. Nous n'avons pas le magnifique rgime
hydrographique et hygromtrique de la France. C'est d'un sol sec et
d'une atmosphre sche qu'il s'agit chez nous. Il faudrait des essences
et une technique de reboisement spciales. D'abord, le reboisement
n'est plus possible sur les lieux-mmes affects par le saharanisme.
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le sol
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LE TEMPS
Le temps nou,; dvore.
Saint Augustin
Le temps est un vieux fleuve qui traverse le monde.
Il passe travers les cits, alimentant leur labeur de son
nergie ternelle ou berant leur sommeil de la complainte des
heures qui passent inutiles.
Il baigne galement l'aire de chaque peuple et de chaque tre
du flot ininterrompu de ses 24 heures quotidiennes.
Mais dans une aire, il devient de la ''monnaie'' et dans une
autre du ''nant''.
Il passe et se jette dans l'histoire avec la valeur que lui donne
le labeur accompli.
Mais c'est un fleuve silencieux et parfois on l'oublie.
Dans leur sommeil ou dans leur euphorie, les civilisations
oublient quelquefois sa valeur irrcuprable.
Cependant aux heures graves de l'histoire, le sens du temps se
confond avec l'instinct de conservation quand il se rveille.
A ces heures de sursaut vital, on oublie ici qu'il est de la
monnaie et l on estime qu'il n'est pas du ''nant''
Alors, quand il ne s'agit plus seulement de ''s'enrichir'' ou de
''se laisser vivre'', mais de survivre, on entend soudain la fuite
des heures et l'on saisit leur valeur irrcuprable.
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LE COEFFICIENT COLONISATEUR
Sans doute, en voudrait-on une tude qui, prtendant faire le
bilan de la renaissance en Algrie, passerait sous silence le fait
colonial.
Voil un silence qui paratrait assurment singulier, l'heure
qu'il est. Voyons donc la question.
L'efficacit de l'individu comme facteur de civilisation - c'est
l toute la question - est lie deux valeurs: l'une fondamentale
et l'autre accidentelle.
L'individu dtient sa valeur fondamentale de son hritage
biologique: c'est son aptitude se servir de son gnie, de son sol
et de son temps. Et, sous ce rapport, personne ne doute que
!'Algrien soit aussi bien partag, que toute l'espce humaine.
Depuis saint Augustin jusqu' Ibn Khaldoun, le gnie algrien n'a
cess de s'affirmer brillamment.
Quant sa valeur accidentelle, l'individu la doit son milieu
social.
Elle consiste essentiellement en la mthode et aux possibilits
qu'il emprunte ou qu'il doit emprunter au cadre social pour y
dvelopper sa personnalit, c'est--dire sa valeur fondamentale.
C'est l prcisment le rle de l'institution sociale, de l'ordre
public: l'cole, l'hpital et le reste.
C'est ici que le fait colonial intervient pour !'Algrien et
affecte finalement son existence d'un coefficient accidentel: en
Algrie, ce coefficient a son histoire.
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le coefficient colonisateur
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LE COEFFICIENT AUTO-REDUCTEUR
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le coefficient auto-rducteur
spciales les frapprent, peu prs dans tous les domaines: leurs
enfants exclus des coles, des lyces, leurs activits
conomiques rduites des limites troites.
En somme, en appliquant toute leur vie dans ses activits
intellectuelles, professionnelles et mme confessionnelles, un
coefficient rducteur par lequel on visait les diminuer
socialement et moralement.
Mais la raction des Isralites fut prompte: dans chaque
famille, des cours furent organiss avec des docteurs, des
ingnieurs, des avocats pour matres bnvoles. Jamais les
synagogues ne furent plus pleines, ni l'activit du commerce juif
plus dbordante.
La communaut juive a travers victorieusement les heures
dures, malgr le coefficient rducteur: les enfants juifs n'ont pas
perdu un seul cours, leurs parents n'ont pas perdu une boutique,
les synagogues n'ont pas perdu un seul fidle.
Les juifs ont triomph parce qu'ils ont limin en eux toute
cause de perte, de gaspillage, de dispersion, de superfluit.
Ils ont vcu le coefficient rducteur, parce qu'ils taient
exempts du coefficient auto-rducteur.
Cet exemple admirable n'expose pas seulement un cas assez
proche de celui o nous nous trouvons, mais il indique, en mme
temps, comment on peut y chapper. Notamment comment on
instruit ses enfants sans coles et sans professeurs patents.
Quand !'Algrien saura tayloriser sa pense et ses actes, son
temps, son argent et le bout de pain que lui donne le sol de son
pays, il aura vaincu la plupart des difficults actuelles.
En particulier, il triomphera du coefficient auto-rducteur.
157
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LE PROBLEME DE L'ADAPTATION
La loi d'adaptation et de raction s'impose en sociologie
comme elle s'impose en mcanique. Le fait colonial tant, en
gros, l'action particulire de la civilisation actuelle sur les
peuples coloniss, ceux-ci devaient fatalement ragir.
Nous avons aujourd'hui, sous les yeux, le rsultat de la
raction du peuple algrien depuis un sicle. Il faut d'abord
utiliser le terme conventionnel par lequel on peut tout de suite
fixer les ides.
En effet, en biologie comme en sociologie, cette raction est
caractrise comme l'adaptation de l'tre vivant au milieu et au
cadre dans lesquels il vit.
Nous savons qu'une des lois de l'adaptation rside dans le
mimtisme. Aussi, n'y a-t-il rien de surprenant rencontrer dans
la vie algrienne actuelle toutes sortes de formes, depuis les
formes archaques du milieu traditionnel, jusqu' celles de la
vamp et du zazou d'un certain milieu algrois o l'on ne roule pas
les ''r''.
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le problme de l'adaptation
La terre n'est pas encore ro:ide pour tout le monde. Les uns
vivent en 1368 et certains en 1948. D'autres sont entre ces deux
extrmes. C'est le drame de notre adaptation avec toute son
acuit, jusque dans nos relati~ns amicales et familiales. On a
l'impression de vivre dans un milieu hybride fait de mille
peuples, de mille cultures.
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161
Notre recherche nous a fait faire bien des faux pas qui nous
ont conduits notre dsordre actuel.
Est-ce dire qu'il faille arrter notre lan vers la civilisation?
Qu'il faille suspendre notre marche de peur des accidents ou du
ridicule?
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CONCLUSION
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Malek Bennabi a consacr tout son gnie, donn le meilleur
de lui-mme et pour tout dire toute sa vie, pour contribuer au
rtablissement de toute l'aire sud de la plante dans son droit
jouer pleinement son rle dans l'histoire et dpasser les
pitinements qui sabotent ses tentatives de rintgrer la
civilisation. D'o le titre gnral de son uvre: Problme de la
civilisation. L'approche indite, la mthode et la dmarche peu
communes dnotent une originalit certaine, dans un monde
musulman o les problmes sont abords spars ou ordonns au
gr des soucis propres et selon les domaines d'intrt. L'esprit
atomistique de 1'homme post-almohadien, pour reprendre 1' ide
de Hamilton Gibb, y est pour beaucoup.
Laissons l'histoire, et surtout l'objectivit, le soin de juger
les ides de Bennabi. Peu importe le verdict, bienveillant ou
hostile, pour peu que l'on tudie les ides exposes par Bennabi,
sans a priori et sans prjugs. Le plus grand tort, la plus grande
injustice et tout l'insens, c'est de juger l'homme et l'uvre
cavalirement, dans 1'ignorance de sa pense ou, au pire,
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Il est plus utile ainsi d'aborder une ide dans son cadre
contextuel, impos par l'espace et le temps. L'objectif tant de
raliser les finalits globales et de crer la possibilit d'une
interaction et d'une continuation pour un dcollage serein.
Esprons que cet ouvrage de la srie Problmes de la
civilisation soit adopt par tous ceux qui sont anims par un veil
de la conscience ci vilisationnelle.
Rahma Bennabi
Alger, 2001
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Le prsent et l 'Histoire
Stade pique guerrier et traditions .................................................. 21
Stade politique et ide ..................... .............................. ......... .. ......... 25
Stade de l'idole ......................................................................................... 31
DEUXIEME PARTIE
L'avenir
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Apologue ..................................................................................................... 41
De l'entassement la construction .................................................. 43
L'ternel retour ...................................................... .......................... .......... 51
Examen de la premire condition ........ .. ................... ....... .. ...... .. ... . 5 5
Examen de la deuxime condition ................................................... 63
Les richesses pe11nanentes .................................................................. 65
L'influence de l'ide religieuse ......................................................... 67
Le premier facteur: L'homme ................. ..................... ..... .. ... ... ........ 81
L'orientation ............................................................................................... 85
Orientation de la culture ...................................................................... 87
L'alphabtisme .......................................................................................... 91
Orientation thique ................................................................................. 97
Esthtique .................................................................................................... 99
Technique .................................................................................... ... ... ........ 103
105
107
115
119
123
Postface ... .... ........ ........ .... .................... ..... .... ... .... ........ .... .... ........ .............. 16 7
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