Drôle de vol
Les soirs de juin, on était toujours sûr de trouver un ami sur la place des
Félibres.
Au milieu des touristes qui affluaient à la belle saison, on se repérait vite, on s’attablait, le patron vous servait un rosé bien frais, les uns refaisaient le monde, les autres papotaient de tout et de rien.
C’était surtout le prochain mariage de Laure qui occupait la conversation : l’événement de l’année.
– Il ne faut pas exagérer. Elle a beau être la fille de maître Imbert et épouser le premier agent immobilier de la région, on ne va pas en faire tout un cinéma…
On se moqua du râleur :
– Tu es jaloux ?
Pierre Delage était la coqueluche de ses amis : on appréciait sa cordialité et sa simplicité. Il donnait de somptueuses fêtes dans le mas qu’il avait restauré – il l’avait rebaptisé « La Rabasse », clin d’œil à la truffière toute proche. Il y avait créé un centre équestre et Laure lui avait fait embaucher son cousin, Alexis, qui se destinait aux métiers du cheval. Il y avait parfois du tirage entre le jeune soigneur et son patron, mais Laure parvenait toujours à apaiser les tensions entre les caractères entiers des deux hommes. Il faut dire que bien peu résistaient au charme de la jeune femme.
Parmi les habitués de la place des Félibres en train de siroter leur rosé, quelqu’un apostropha le « râleur » :
– Ah ! Ah ! Tu avais des vues sur la belle Laure et tu t’es fait coiffer au poteau par Pierre ! Ton propre copain, hein !
– Idiot ! répliqua le râleur en haussant les épaules. Pierre n’est pas mon copain. Je ne l’ai connu qu’à l’occasion de la vente de ma maison. Quant à Laure…
Maître Imbert dirigeait la plus grosse étude notariale de la région qui attirait, par son climat méridional et son dynamisme économique, de plus en plus d’habitants. L’arrivée, cinq
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