Romancier

Romancier

Roman (littérature)

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Le roman est un narration fictionnelle plus ou moins longue, ce qui le distingue de la nouvelle. La place importante faite à l'imaginaire transparaît dans certaines expressions comme « C'est du roman ! » ou dans certaines acceptions de l'adjectif « romanesque » qui renvoient à l'extraordinaire des personnages, des situations ou de l'intrigue.

Le roman, très vite écrit en prose, dès la fin du XIIe siècle, se définit aussi par sa destination à la conte ou de l'orale. Le ressort fondamental du roman est alors la curiosité du lecteur pour les personnages et pour les péripéties, à quoi s'ajoutera plus tard l'intérêt pour un art d'écrire.

Au fil des derniers siècles, le roman est devenu le genre littéraire dominant avec une mutiplicité de sous-genres qui soulignent son caractère polymorphe.

Sommaire

Le texte romanesque

De manière synthétique et générale, on peut dire que le texte romanesque est un récit de taille très variable mais assez long, aujourd'hui en prose, qui a pour objet la relation de situations et de faits présentés comme relevant de l'invention même si l'auteur recherche souvent un effet de réel, ce qui le distingue du simple récit-transcription (autobiographie, témoignage...) mais aussi du merveilleux. La diversité des tonalités littéraires présentes dans les romans est d'ailleurs totale.

Le roman appartenant au genre narratif, on peut rendre compte de l'enchaînement plus ou moins complexe des événements d'un roman en établissant le schéma narratif de l'œuvre et définir le principe général de l'action par le schéma actanciel qui expose les différents rôles présents dans le récit. On peut également définir le statut du narrateur (ou des narrateurs), distinct(s) de l'auteur, ainsi que les points de vue narratifs choisis et la structure chronologique de l'œuvre. Genre polymorphe, le roman exploite aussi bien les différents discours (direct, indirect, indirect libre), la description (cadre spatio-temporel - portraits) que le récit proprement dit (péripéties), le commentaire ou l'expression poétique.

Le roman a été et est toujours l'objet de remises en question qu'il s'agisse pendant très longtemps de sa vanité et de son immoralité (jusqu'au XIXe siècle), puis de la mise en cause de la psychologie avec le Nouveau Roman, de l'éclatement de la narration (forme chorale avec la multiplication des narrateurs - perturbation de la chronologie...) ou de la séparation auteur/narrateur avec l'XVIIIe siècle comme un genre dominant dans la littérature occidentale en corrélation avec le développement de la notion d'Histoire et aussi avec la généralisation de l'apprentissage de la lecture par l'école et la diffusion imprimée. Le roman a ainsi supplanté le épopée qui marquent davantage les traditions d'autres civilisations (persane et roman chinois et du roman japonais traditionnel. Cet article présentant une histoire de la tradition romanesque occidentale, le lecteur est invité à se référer à ces pages spécifiques pour plus de détails.

Les origines du roman

D'une langue à un genre

Toute tentative de définition satisfaisante du roman est étroitement liée à l'identification de ses origines. Ainsi, nombreux sont les théoriciens du roman qui ont cherché à appuyer leurs théories génériques sur des théories génétiques. Voilà pourquoi une entrée satisfaisante pour tenter de définir le terme de roman peut se trouver dans l'origine même de ce mot. Ce terme sert originellement à désigner une langue utilisée au Moyen Âge, la langue d'oïl, qui prévaudra sur la langue d'oc du sud de la France. Cette langue, née de l'évolution progressive du France.

Romanus (ancien français). Les premiers écrits historiques sont apparus pendant la période de l'Iliade, l'Odyssée d'Énéide de Virgile et l'Histoire véritable de Lucien de Samosate en sont quelques exemples.

Ensuite, au Moyen Âge, l'usage du latin se restreint aux textes écrits tandis que les communications orales se font en langue romane. Le latin n'étant connu que d'une minorité de la population, constituée essentiellement de religieux et de lettrés, il faut alors transcrire ou écrire en langue romane certains textes afin de les rendre accessibles à un public plus large. Le terme « roman » est donc appliqué à tous les textes écrits en langue romane dans ce but, qu'ils soient en prose ou en vers, qu'ils soient narratifs ou non. Les romans s'opposent alors aux textes écrits en latin, notamment les textes officiels et sacrés. L'expression « mettre en roman », apparue vers 1150, signifie donc « traduire en langue vulgaire ». Pour désigner les textes qui appartiennent au genre narratif, les termes estoire et conte sont le plus souvent utilisés. Ainsi, Lancelot ou le Chevalier de la charrette, Chrétien de Troyes écrit-il : « puisque ma dame de Champagne veut que j'entreprenne un roman, je l'entreprendrai très volontiers ». Le terme commence alors à se rapprocher de son sens moderne, celui de récit fictif à épisodes centré autour d'un ou de plusieurs personnages. Le roman a tout d'abord été le récit d'une aventure fantastique, comprenant un personnage idyllique vivant une aventure idyllique elle-même. Les livres étaient au début destinés aux nobles et non au peuple.

Le genre littéraire

Jusqu'au XIIe siècle, la chanson de geste, la vision amoureuse de la poésie lyrique et puise dans les légendes celtiques.

Les sources du roman médiéval

La Chanson de Roland.

La poésie lyrique

La rupture littéraire amorcée par l'apparition du nouveau genre de la poésie lyrique ne doit pas pour autant masquer une large continuité dans les thèmes et les motifs évoqués par le roman. Il hérite en premier lieu des personnages stylisés de la poésie lyrique : la dame y est une femme mariée de condition supérieure à celle de son prétendant ; l'homme vassal est obéissant à la dame, il est timide et emprunté devant elle et le losengiers est un personnage fourbe, un traître en puissance. Il reprend également le thème de la fine amor, cet amour secret, sacré dans lequel la femme est divinisée, sacralisée. Il hérite aussi de la Reverdie. La Reverdie est un retour cyclique au printemps qui entraîne la contemplation de la dame par l'amant ainsi que son portrait élogieux fait d'associations entre la beauté de la nature et celle de la femme. La sonorité est également une partie intégrante de la poésie lyrique, car la poésie ne peut se faire sans rimes et le lyrisme ne peut se séparer des sonorités, du rythme.

Cependant, le romancier ne reprend pas ces thèmes à l'identique, très souvent il les réactualise, les modifie et les dramatise. Mais surtout, il substitue une nouvelle figure à celle du poète amoureux. Le modus operandi de la séduction évolue : la femme ne se séduit plus par des paroles et des chansons mais par des actions. Le personnage du poète est remplacé par le La chanson de geste

Le héros de la

par sa forme tout d'abord
La chanson de geste est une suite de laisses diégèse se restreint
On passe des immenses champs de bataille à des vergers ou à des champs, voire à de petites pièces ou des locus amoenus (lieu intime et paradisiaque règne la dame).
par les personnages 
La chanson de geste met en scène les exploits guerriers d'un groupe, d'une armée face à une autre, chaque armée ayant plusieurs héros dans leurs rangs. Dans le roman, au contraire, les exploits sont réalisés par un personnage seul.

Les thèmes et les motifs que l'on peut rencontrer dans le roman ne naissent donc pas ex nihilo, le nouveau genre s'inspire largement de ceux qui l'ont précédé tout en procédant à de larges modifications et innovations.

Les trois matières

Au-delà des thèmes et des motifs exploités, les sujets traités par le roman se caractérisent par leur originalité et leur diversité. Il est toutefois possible de les rassembler en trois grands sujets (dits matières:

  1. la matière de Rome, ou antique a inspiré le Roman de Thèbes, le Roman d'Énéas, le Roman de Troie et le Roman d'Alexandre ;
  2. la matière de France, récits de guerres et de prouesses militaires des Francs ;
  3. la matière de Bretagne, la plus féconde, a inspiré tous les romans dits « Henri II Plantagenêt et de sa femme Aliénor d'Aquitaine ainsi qu'à la cour de la fille d'Aliénor, Marie de France, en celtiques transmises oralement par les conteurs bretons et gallois. Bien que de nombreuses imprécisions demeurent sur son existence, Le roman en prose au XIIIe siècle
    Le Roman de la Rose (1420-30).

    Avant le XIIIe siècle, à l'exception des textes juridiques, peu de textes étaient écrits en prose. Mais à la fin du XIIe siècle et au début du XIIIe siècle, la prose prend de plus en plus d'importance dans les textes narratifs. Deux raisons peuvent expliquer cette tendance. D'une part, la prose augmente probablement la crédibilité des aventures racontées, par assimilation à la fiabilité des textes juridiques. D'autre part, le passage à la prose marque également un changement dans la manière de lire : la papier et le développement de l'écrit de manière générale favorisent cette évolution. Et de ce fait, la versification en tant qu'artifice mnémotechnique est de moins en moins nécessaire.

    Ces romans en prose s'inspirent du modèle de la Graal ou du Saint Calice.

    Les romans réalistes

    Ces romans apparaissent conjointement au développement de la Aristote accompagne ce renforcement du rationalisme au détriment d'une part de spiritualité et de merveilleux. Le Roman de la rose et Jehan et Blonde illustrent cette nouvelle orientation du genre. Les auteurs de ces romans choisissent de rester dans les limites du vraisemblable et rejettent le merveilleux arthurien. La géographie des lieux devient de plus en plus familière aux lecteurs, les personnages fictifs y rencontrent des personnages historiques (réels) et les héros choisis sont de plus en plus issus de milieux modestes et sont de moins en moins légendaires. Cependant, ce genre est marqué par un fort paradoxe : alors que la prose semble être la forme la plus adaptée à transcrire le réel avec crédibilité et alors que la majorité des romans sont désormais écrits en prose, ces romans réalistes continuent à être écrits en vers (couplets octosyllabiques). Conséquence ou non de ce paradoxe, ils disparaîtront progressivement devant le succès croissant des romans en prose.

    Naissance du roman moderne

    Au début de l'histoire du roman cohabitent deux traditions très contrastées. La première est celle du roman comique, engagée par Cervantès et XVIIe siècle, particulièrement en France et en Espagne. C'est un roman résolument parodique et réaliste, qui raille la littérature noble et les valeurs établies.

    La seconde est l'héritière du roman de chevalerie et du roman grec. Elle revendique une certaine noblesse des sentiments et de l'expression et un style sérieux. Avec l'avènement du roman historique, le merveilleux qui caractérisait cette tradition est progressivement abandonné au profit du réalisme.

    Au cours du XVIIIe siècle, ces deux traditions vont peu à peu fusionner pour donner naissance au genre que nous connaissons, avec son mélange caractéristique de sérieux et d'ironie.

    Les fondateurs

    La Pantagrueline Pronostication de 1532.

    On considère généralement que le roman moderne naît avec Rabelais (les Cinq livres, 1532-1564) puis Cervantès (1605-1615). De façon caractéristique, ces deux romans parodient le roman de chevalerie médiéval. À la langue noble et aux lieux communs du roman de chevalerie, ces auteurs opposent la diversité des langages de toute la société et un parti pris de réalisme, voire de trivialité.

    Le roman de chevalerie n'est pas le seul modèle dont se sont inspirés les premiers romanciers modernes. La nouvelle médiévale (et plus particulièrement le Boccace) ainsi que la littérature et la farce populaire furent des sources également influentes. L'influence de la littérature chrétienne, notamment franciscaine, sur l'œuvre de Rabelais a été également notée [1].

    Rabelais et Cervantès resteront une référence constante pour la quasi-totalité de la littérature romanesque.

    Le roman baroque

    Le roman baroque héroïque se développe au XVIIe siècle à la cour du roi de France. Inspiré du roman grec, c'est un roman sentimental et d'aventure, avec des accents champêtres (dans l'idylle) ou merveilleux. Deux amants sont séparés par le destin et se cherchent au cours d'aventures pleines de rebondissements imprévus au cours desquelles leur amour et leur détermination est mise à l'épreuve. Les amants se retrouvent à la fin ; leur amour est confirmé par les épreuves endurées.

    Les romans baroques sont des « romans-fleuves » très volumineux. Les dialogues amoureux y tiennent une place importante. On peut parler à ce propos d'une sorte de casuistique amoureuse (cf. la célèbre Le grand Cyrus de Georges et Madeleine de Scudéry, Honoré d'Urfé, Zayde de Madame de Lafayette.

    Publié en préface de Zayde, le célèbre Traité de l'origine des romans de Pierre-Daniel Huet, pose un certain nombre de questions touchant au genre romanesque : que nous apprennent les œuvres de fiction d'une culture étrangère ou d'une période éloignée sur ses créateurs ? À quels besoins culturels de telles histoires répondent-elles ? Existe-t-il des bases anthropologiques fondamentales incitant à la création de mondes fictifs ? Ces œuvres de fiction ont-elles été divertissantes et instructives ? Se sont-elles contentéesce qu'on pourrait supposer à la lecture des mythes antiques et médiévauxde fournir un produit de remplacement à une connaissance plus scientifique, ou ont-ils constitué un ajout aux luxes de la vie appréciés par une culture particulière ? Ce traité, qui a créé le premier corpus des textes à discuter, a été le premier à montrer comment interpréter les œuvres de fiction. Véhiculé dans un certain nombre d'éditions et traductions, le Traité de Huet a obtenu une position centrale parmi les écrits traitant de la fiction en prose.

    Le petit roman galant et historique

    Dans la deuxième moitié du XVIIe siècle, on voit apparaître un nouveau type de roman qui s'oppose radicalement à l'esthétique du roman baroque. Il s'agit de « petits romans » très courts (par opposition aux milliers de pages du roman baroque), et d'un style résolument réaliste. Alors que le roman baroque se situait dans un passé mythique, ces romanciers empruntent leur sujet au passé historique. Dans le roman baroque, les aventures se déroulent entièrement dans la sphère de la vie publique. Dans le petit roman, c'est la sphère privée qui est mise au centre du récit. D'autre part ces petits romans s'opposent aux romans comiques par un ton sérieux et l'emploi d'un style élevé. Pour ces raisons, on peut considérer que ces romans marquent la naissance de la forme romanesque telle que nous la connaissons encore aujourd'hui.

    Les exemples les plus significatifs sont Madame de Lafayette (1678) et César Vichard de Saint-Réal (1672). Alors que le premier roman de Madame de Lafayette, Zayde (1670), était une « histoire espagnole », son deuxième roman révèle un caractère plus typiquement français. Aux histoires de fiers Espagnols se battant en duel pour venger leur réputation succède un roman français plus volontiers porté à l'observation minutieuse du caractère et du comportement humains. L'héroïne, placée devant l'occasion d'un amour illicite, résiste non seulement à la tentation, mais se rend plus malheureuse en admettant ses sentiments à son mari.

    Le roman comique et picaresque

    Page de titre de 1554.

    C'est avec 1554, que commence la vogue du roman picaresque en Europe. Dans le roman picaresque, par moyen d´un récit linéaire un héros miséreux mais génialement débrouillard (le pícaro) traverse toutes les couches de la société au cours d'aventures pleines de rebondissements. 1626) donnera à ce genre son expression la plus aboutie.

    Près d'un siècle plus tard, le Français Alain-René Lesage reprend la tradition de Francisco de Quevedo avec l'1715-1735).

    Le roman picaresque restera un modèle pour le roman ultérieur : Robinson Crusoe, Till l'espiègle.

    Le roman au XVIIIe siècle

    C'est au XVIIIe siècle que le roman prend sa forme et sa place moderne au sens lon peut lentendre en 2009. Il se développe en Grande-Bretagne et sexporte vers la France puis la Prusse. Sil reste en quête de légitimation et de définition, comme le montrent les nombreuses réflexions quil suscite à lépoque, il connaît en même temps un essor considérable et ses sujets se diversifient. Le roman épistolaire, le roman-mémoire, le roman libertin et le roman utopique rencontrent particulièrement le goût du temps.

    Page de titre de Robinson Crusoë, édition de 1719.

    L'essor du roman en Grande-Bretagne

    C'est en XVIIIe siècle que le roman acquiert peu à peu la place centrale dans la littérature, par lintérêt que lui porte une population récemment alphabétisée. Les premiers romans à succès paraissent, tels Robinson Crusoe ou Tristram Shandy. Le renouveau du roman se propage rapidement à la France, puis à l'Allemagne, comme l'esprit des Lumières. Par ailleurs la forme et lesthétique du roman changent. Jusqualors, la fiction reste mise en avant de façon ludique, par des auteurs comme Robinson Crusoë de Robinson Crusoe, Rob Roy, Paméla, …

    Dans le foisonnement du roman anglais de l'époque, on peut distinguer les catégories suivantes.

    légende
    Genre Représentants Héritiers
    roman de mœurs Samuel Richardson, Jane Austen abbé Marivaux
    roman d'aventure et historique Walter Scott, roman comique Tobias Smollett Jean Paul
    roman gothique Matthew Gregory Lewis, William Thomas Beckford romantisme, marquis de Sade, Le roman épistolaire
    Page de titre de La Nouvelle Héloïse de Jean-Jacques Rousseau

    Le roman épistolaire apparaît en France en 1721, avec les Lettres persanes de Montesquieu mais rencontrera surtout le succès à la fin du siècle, après ceux de Paméla ou la Vertu récompensée (1740) et de roman sensible annoncent aussi le romantisme.

    Le roman libertin

    Le roman est une nouvelle forme dexpression du libertinage intellectuel des siècles précédents tout en donnant au mot un sens nouveau. La liberté de pensée et daction dérive, avec le roman, à une dépravation morale, une quête égoïste du plaisir. La vie en société est présentée comme un jeu de dupe, cynique avec ses codes et ses stratégies à apprendre ; la séduction y est un art complexe que lon entreprend par défi, désir ou amour-propre ; la femme est identifiée comme une proie qui finit plus ou moins rapidement par céder au « chasseur ». Contrairement à la littérature clairement licencieuse, la forme du roman libertin est choisie, fine, raffinée et allusive.