C’est l’heure de vérité pour les socialistes. Vont-ils redevenir un parti de gouvernement ou continuer à se soumettre à la stratégie groupusculaire de Mélenchon ? Unis pour voter à la quasi-unanimité de leurs députés la motion de censure, le seront-ils demain pour entrer dans une coalition qui les couperait des Insoumis ? En coulisses, les membres du bureau national opposés à l’alliance avec LFI sentent que l’heure de la rupture approche. « Notre tort, c’est d’avoir eu raison trop tôt sur la nécessité de s’affranchir de LFI et de leurs outrances », explique Baptiste Ménard, un proche d’Hélène Geoffroy. Le maire de Saint-Ouen, Karim Bouamrane, appelle ouvertement à « exclure LFI comme le RN du prochain gouvernement ». Favorable à un « accord de non-censure » depuis les résultats des dernières législatives, le député Philippe Brun, lui, plaide pour un accord avec le bloc central qui porterait sur les sujets les moins clivants : « École, santé, logement, prix de l’électricité ».
Le député européen Raphaël Glucksmann est moins précis, mais se dit « prêt à s’asseoir » avec « tous ceux qui sont certains qu’il ne faut pas laisser le RN mener la politique du pays »… tout en exigeant, comme Boris Vallaud, président du groupe socialiste à l’Assemblée, que soit nommé « un Premier ministre de gauche ».
Sentant la pression monter, à la surprise générale, le premier secrétaire, Olivier Faure, s’est déclaré prêt à négocier avec le centre et LR sur la base de « concessions réciproques ». Non sans se faire sèchement rappeler à l’ordre par son allié dominant. Mélenchon explique ne pas avoir « donné de mandat pour négocier ». Une énième rodomontade du leader insoumis, qui ne passe plus. Son meilleur ennemi, Fabien Roussel, a exprimé sa consternation sur X : « De mieux en mieux. Le PS doit avoir un “mandat” de LFI et de Mélenchon avant de prendre la parole. » Les sénateurs Laurence Rossignol et Rachid Temal ont vertement répondu que le PS n’était « ni une colonie ni une succursale de LFI ». Olivier Faure lui-même, plus timidement, lui a rappelé qu’il ne « recevait pas de mandat de lui » et parlait « au nom des socialistes […] pour sortir du blocage institutionnel ».
Véritable mue ou stratégie en vue du prochain congrès du parti (dont la date n’a toujours pas été fixée) ? Certains penchent pour la seconde option, comme ce défenseur du choix Cazeneuve pour Matignon : « Faure a compris que les oppositions contre lui seraient trop fortes, il a voulu les faire taire en montrant qu’il n’est pas hostile à ce que la gauche gouverne… tout en espérant secrètement que Macron appelle un Premier ministre de droite. » Si le pire n’est jamais sûr, les petits calculs ne sont jamais loin. Entre-temps, Mélenchon a annoncé qu’il était prêt à continuer le NFP… Sans le PS.