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L'architecture exposée dans son champ élargi

Introduction de l'ouvrage L'Objet de l'exposition : l'architecture exposée, Stéphane Doré, Frédéric Herbin (éd.), Bourges, Ecole Nationale Supérieure d'Art de Bourges, 2015, p. 6-20.

L’OBJET DE L’EXPOSITION : L’ARCHITECTURE EXPOSÉE DIRECTION Stéphane Doré Frédéric Herbin ÉDITION ENSA de Bourges FRÉDÉRIC HERBIN 6 7 INTRODUCTION : L’ARCHITECTURE EXPOSÉE DANS SON CHAMP ÉLARGI En 1981, l’éditorial de la Revue de l’art consacré aux musées d’architecture était l’occasion de faire le point sur l’actualité de ce sujet. On y rapportait les propos du président de la Confédération Internationale des Musées d’Architecture (ICAM), prononcés lors du congrès qui donnait naissance à cette institution en 1979 1 : « Aujourd’hui le musée d’architecture est un concept nouveau… et nous ne pouvons encore déterminer où le musée commence et où inissent les archives. »2 En effet, les pays qui ne possédaient pas de lieu dédié à la conservation et/ou à l’exposition de l’architecture étaient nombreux et il fallait encore – mais la question est-elle aujourd’hui déinitivement tranchée ? – déinir le périmètre d’action de ce musée, notamment en ce qui concerne sa capacité à rendre compte des contextes sociaux, économiques et politiques où s’inscrit l’architecture. De la sorte, tout en soulignant le fait que « l’idée d’’ exposer ’ – dans toutes les acceptions du terme – les formes architecturales est loin d’être neuve », l’éditorial de la revue pouvait conclure : « le musée d’architecture reste en grande partie à inventer. » 3 À la in de la décennie 1980, Werner Szambien faisait déjà un autre constat en signalant « la création récente de musées d’architecture en R.F.A., en Belgique, en Suisse et aux États-Unis » 4. Effectivement, de l’ouverture des Deutsches Architekturmuseum et Schweizerisches Architekturmuseum, respectivement à Francfort et à Bâle en 1984, jusqu’à celle du Centre Canadien d’Architecture à Montréal en 1989, s’amorçait un mouvement de multiplication des institutions consacrées à l’architecture qui ne s’est pas démenti depuis. En témoignent les inaugurations du Museo nazionale delle arti del XXI secolo, à Rome en 2010 et du nouveau bâtiment du Fonds Régional d’Art Contemporain de la région Centre, en 2013, qui lui permet désormais de montrer sa collection de façon permanente. Aujourd’hui, le musée d’architecture n’est donc plus un concept nouveau. Sa prolifération l’a inscrit toujours plus au sein des rapports que chacun (amateur, usager, commanditaire, professionnel) peut entretenir avec l’architecture. Ainsi, si l’on s’interroge moins sur le bien-fondé de l’existence du musée, on s’intéresse, par contre, de plus en plus aux moyens mis en œuvre pour médiatiser l’architecture, écrire son histoire et inventer son futur. Parmi ces moyens, l’exposition igure comme l’un des plus observés actuellement 5. S’étant déjà imposée comme un objet d’étude à même de déplacer le regard que l’on porte sur les arts plastiques et leur histoire – permettant de ce fait de renouveler leur approche –, l’exposition tend aujourd’hui à devenir très présente dans l’étude de l’architecture. À preuve, l’accroissement signiicatif du nombre de publications sur le sujet : les numéros thématiques des revues Log (n° 20, « Curating Architecture », automne 2010 6), Oase, (n° 88, « Exhibitions. Showing and Producing Architecture », octobre 2012 7) et Les Cahiers du Musée national d’art moderne (n° 129, « Exposer l’architecture », g 1 À propos du rôle charnière de cette année, voir : Stéphanie Dadour et Léa-Catherine Szacka, « Exposer l’architecture : enjeux, institutionnalisation et historicisation », Les Cahiers du Musée national d’art moderne, n° 129, « Exposer l’architecture », automne 2014, p. 4-5. g 2 John HARRIS,« The role and functions of Architectural Museums », in ICAM 1. 1st International Conference of Architectural Museums, 20-25 august 1979. Final Report, Helsinki, Museum of Finnish Architecture, 1980, p. 17 ; cité d’après « Les Musées d’architecture », Revue de l’art, n° 52, 1981, p. 5-8. g 3 « Les Musées d’architecture », idem, p. 5. g 4 Werner SZAMBIEN, Le musée d’architecture, Paris, Picard Éditeur, 1988, p. 8. g 5 Il faut également noter les recherches menées sur les revues d’architecture. Voir notamment : Revue de l’art, n° 89, « Revues d’architecture », 3e trimestre 1990 ; Jean-Michel LENIAUD, Béatrice BOUVIER (éd.), Les périodiques d’architecture : XVIIIe-XXe siècle. Recherche d’une méthode critique d’analyse, actes de journée d’étude (Paris, Collège de France, 2 juin 2000), Paris, École nationale des chartes, 2001 ; Hélène JANNIÈRE, Politiques éditoriales et architecture « moderne » : l’émergence de nouvelles revues en France et en Italie (1923-1939), Paris, Éditions Arguments, 2002 ; Hélène JANNIÈRE, Alexis SORNIN, France VANLAETHEM (éd.), Revues d’architecture dans les années 1960 et 1970 : fragments d’une histoire événementielle, intellectuelle et matérielle / Architectural periodicals in the 1960s and 1970s: towards a factual, intellectual and material history, actes de colloque (Montréal, Centre Canadien d’Architecture, 6-7 mai 2004), Montréal, Centre de Recherche en histoire de l’architecture, 2008. g 6 Numéro dirigé par Cynthia Davidson et Tina Di Carlo. g 7 Numéro dirigé par Véronique Patteeuw, Tom Vandeputte, Christophe Van Gerrewey. g 8 Numéro dirigé par Stéphanie Dadour et Léa-Catherine Szacka. g 9 Sarah CHAPLIN, Alexandra STARA (éd.), Abingdon, New York, Routledge.g 10 Aaron LEVY, William MENKING (éd.), Londres, Architectural Association. g 11 Thordis ARRHENIUS, Mari LENDING, Wallis MILLER, Jérémie Michael McGOWAN (éd.), Zurich, Lars Müller Publishers. g 12 Roberto GIGLIOTTI (éd.), Leipzig/Bolzano, Spector Books. g 13 Organisé par Carsten Ruhl et Chris Dähne, il s’est tenu les 14 et 15 novembre 2013. g 14 Ce colloque organisé par Stéphanie Dadour, Léa-Catherine Szacka, Jean-Pierre Criqui et Romain Lacroix, s’est déroulé les 16 et 17 janvier 2014 et a donné lieu à publication du numéro thématique de Les Cahiers du Musée national d’art moderne déjà cité. FRÉDÉRIC HERBIN automne 20148), ainsi que les ouvrages collectifs Curating Architecture and the City en 2009 9, Architecture on Display: on the History of the Venice Biennale of Architecture en 2010 10, Place and displacement: Exhibiting Architecture en 2014 11 et Displayed Spaces. New Means of Architecture (Re)Presentation Through Exhibitions en 2015 12. Cette production éditoriale accompagne, voire résulte, de la mise en place de programmes de recherche et de rencontres : conférences, séminaires, colloques… « Place and Displacement: Exhibiting Architecture » mené de 2011 à 2014 à l’Oslo Centre for Critical Architecture et à l’Oslo School of Architecture and Design est un bon exemple : ce programme donna lieu à de multiples conférences et colloques avant que n’advienne la publication qui en marquait le terme. Sans chercher à être exhaustif, nous pouvons encore mentionner le programme « Curating Architecture » dirigé par Andrea Phillips à Goldsmiths, Université de Londres, entre 2007 et 2009, ainsi que celui que Louise Pelletier a conduit à l’Ecole de design de l’Université du Québec à Montréal, entre 2011 et 2014 : « Exposer l’architecture – une pratique de l’éphémère : du pavillon temporaire à la maquette pleine échelle et installations multimédia ». Cette effervescence, qui montre sans équivoque l’intérêt grandissant que l’exposition d’architecture suscite dans le monde académique, touche également l’institution muséale. En 2013, le Deutsches Architekturmuseum accueillait le colloque « Architektur ausstellen – Zur mobilen Anordnung des Immobilen » 13. L’année suivante, c’était au Centre Pompidou que l’institution continuait de scruter ses pratiques et son histoire avec « Exposer l’architecture : espace discursif, espace scénographique » 14. L’OBJET DE L’EXPOSITION C’est au sein de ce mouvement d’intérêt théorique pour l’exposition d’architecture que s’inscrit ce livre. Il constitue l’aboutissement d’un programme de rencontres mené par le département d’histoire de l’art de l’Université François Rabelais de Tours et l’Ecole Nationale Supérieure d’Art de Bourges, en collaboration avec le Fonds Régional d’Art Contemporain de la région Centre et, pour la première année, avec le Centre de Création Contemporaine de Tours. Entre 2012 et 2014, les étudiants de Master en histoire de l’art (option médiation culturelle et pratiques de l’exposition) de l’Université de Tours et de Master en Art de l’ENSA Bourges ont suivi le séminaire « L’Objet de l’exposition : l’architecture exposée ». Partagé entre les différentes institutions impliquées dans ce projet, ce séminaire permit à ces participants d’approcher la question de manière théorique, mais aussi concrète, grâce à la visite de plusieurs expositions avec leurs commissaires. Les étudiants ont également pris part à l’élaboration de deux journées d’études internationales organisées avec le soutien du laboratoire InTRu (Interactions, transferts et ruptures artistiques et culturels, EA 6301). Ainsi, pendant deux années, un espace inédit en France de dialogue et de rélexion sur la problématique de l’exposition d’architecture s’est ouvert. Un espace qui, loin de ce que nous pouvions imaginer, répondait à une véritable attente de la part de nombre d’acteurs du champ culturel, dans son FRÉDÉRIC HERBIN 8 acception large – chercheurs, architectes, commissaires d’exposition, muséographes, artistes –, de partager des pistes de pensée, de tester des points de vue, des approches et de voir advenir une trace de ces échanges : de potentiels outils pour poursuivre plus avant les investigations. L’inscription institutionnelle de « L’Objet de l’exposition » a en grande part fait sa spéciicité. N’étant pas mené par des historiens de l’architecture – même s’il leur a largement donné la parole –, ce projet se plaçait délibérément dans une position périphérique par rapport à cette discipline. Cela nous permettait d’afirmer, avant toute autre chose, l’exposition en tant qu’objet d’étude à part entière. Il s’agissait de ne pas la réduire au seul statut de source pour l’histoire de l’architecture ou pour celle des institutions muséales. Pour nous, prendre l’exposition comme objet d’étude implique aussi de tenir compte de sa dimension technique, de ne pas perdre de vue qu’elle est devenue, petit à petit, une pratique spécialisée et donc lui reconnaître une part d’autonomie épistémologique15, même si celle-ci reste dificile à déinir16. C’est ce que semble également reconnaître Thordis Arrhenius quand il écrit : « En tant que matériel de recherche, l’exposition devient une entité ambiguë incorporant ses propres discours, idées et traditions qui, ensemble, génèrent une signiication culturelle au il du temps. »17 Aussi, bien que l’on puisse avancer l’idée que les méthodes de mise en exposition résultent du croisement de techniques partagées avec différents domaines – décoration, vente, spectacle, communication, pédagogie… –, il ne faut pas oublier qu’au sein du monde muséal elles se sont même imaginées « en tant que science, avec ses règles et ses lois. »18 Du reste, la plupart des théoriciens qui se sont penchés sur l’exposition lui ont reconnu un caractère discursif. En tant que telle, on doit considérer la mise en place d’une grammaire qui lui est propre : l’exposition se distingue de la plupart des autres formes de langage par sa capacité à les englober et à les organiser dans l’espace. Elle est, par essence, polysensorielle, voire immersive pour le spectateur, comme le constatait Jean Davallon : « L’exposition est un art du temps et de l’étendue. Du temps parce que de l’étendue. Comme un paysage ou une architecture, elle ‹ présente › si l’on peut dire, des parties cachées. Je dois m’avancer, me déplacer, m’arrêter, m’approcher, contourner, regarder, etc. Je dois développer toute une série d’activités diverses qui iniront par constituer un parcours, un itinéraire, un voyage : ma visite. »19 Ces caractéristiques font que l’étude de l’exposition est dificilement assimilable à un seul champ disciplinaire20 : elle appelle des approches ouvertes qui mobilisent des savoirs et des expériences multiples. Par contre, ces mêmes caractéristiques signent un rapprochement avec les pratiques artistiques contemporaines que l’on rassemble sous le terme « installation ». Cette idée que la pratique de l’exposition partage nombre de points communs avec celle de l’installation artistique n’est d’ailleurs pas nouvelle, Michael Archer le notait déjà dans les années 1990 : « l’installation, comme agencement de choses dans l’environnement d’une galerie, concurrence et/ou 9 g 15 Catherine Perret écrit ainsi : « L’exposition possède en effet aujourd’hui le statut de ce que Michel Foucault aurait appelé un « discours » ou « un savoir », sous la forme d’un territoire académique spéciique…». Cf. « Malaise dans l’exposition ou L’exposition en mal d’histoire », in Elisabeth CAILLET, Catherine PERRET (éd.), L’art contemporain et son exposition (2), Paris, L’Harmattan, 2007, p. 186. g 16 Le terme «expograhie», qu’André Desvallées avançait en 1993 pour désigner le « savoir-faire de l’exposition », ne s’est pas encore imposé, même si son usage se multiplie. Cf. André DESVALLÉES, « L’expression muséographique. Introduction », in Claude BADET, Jacqueline KERVEILLANT (éd.), Rencontres européennes des musées d’ethnographie. Actes des premières rencontres des musées d’ethnographie, (Paris, Musée national des Arts et Traditions populaires, Ecole du Louvre, 22-24 février 1993), Paris, Musée national des Arts et Traditions populaires, Ecole du Louvre, 1996, p. 174. g 17 Thordis ARRHENIUS, « Place and Displacement : Exhibiting Architecture », in Thordis ARRHENIUS, et al. (éd.), op. cit. p. 8 : « As research material, the exhibition becomes an ambiguous entity incorporating its own discourse, ideas, and traditions that collectively generate cultural meaning over time. » g 18 La Muséographie à l’Exposition internationale de 1937. Groupe I, classe III, musées et expositions. Section I. Muséographie, numéro spécial de L’Amour de l’Art, n° 6, 1937, p. 1. Voir à ce sujet : François MAIRESSE, Le Musée Temple Spectaculaire. Une histoire du projet muséal, Lyon, Presses Universitaires de Lyon, p. 69-75.g 19 Jean DAVALLON, « Gestes de mise en exposition », Jean DAVALLON (éd.), Claquemurer, pour ainsi dire, tout l’univers : la mise en exposition, Paris, CCI-Centre Pompidou, 1986 ; cité d’après idem, L’exposition à l’œuvre. Stratégies de communication et médiation symbolique, Paris, L’harmattan, 1999, p. 171-172. g 20 Sans prétendre à l’émergence d’une nouvelle discipline, le terme « expologie » se rencontre dans le domaine de la muséologie. Voir: André DESVALLÉES, François MAIRESSE (éd.), Dictionnaire encyclopédique de muséologie, Paris, Armand Colin, 2011, p. 158-163 : « Éléments d’expologie ». g 21 Michael ARCHER, « Musée », in Nicolas De OLIVEIRA, Nicola OXLEY, Michael PETRY (éd.), Installations : l’art en situation, Paris, Thames & Hudson, 1997 [1994 édition originale], p. 124. g 22 Kristin FEIREISS (éd.), The Art of Architecture Exhibitions, Rotterdam, NAi Publishers, 2001.g 23 Kristin FEIREISS, « Introduction – It’s not about art », in idem, p. 10-11 : « installation », « sculpture », « architectural building », « show ». Cette confusion était déjà notable dans Installations : l’art en situation, où le travail Line of Fire (1988, centre d’Art contemporain de Genève) de Daniel Libeskind était présenté, non comme celui d’un architecte, mais comme celui d’un artiste producteur d’installations : voir Nicolas De OLIVEIRA, et al. (éd.), op. cit., p. 164. g 24 Kristin FEIREISS, ibidem : « a new genre ».g 25 Hani RASHID, « Installing Space », in Kristin FEIREISS (éd.), op. cit., p. 37 : « An interesting tendency in contemporary installation work by architects is a blurring between building and art. » g 26 Sylvia LAVIN, « Showing Work », Log, n° 20, automne 2010, « Curating Architecture », p. 9 : « the architectural exhibit encroaches on the territory of social and relational art, installation, site-speciic work, and of course architecture itself. » g 27 Jean-Marc POINSOT, Quand l’œuvre a lieu. L’art exposé et ses récits autorisés, Genève, Musée d’Art Moderne et Contemporain, Dijon, Les presses du réel, 2008 [1999], p. 29. FRÉDÉRIC HERBIN interfère avec l’activité consistant à organiser l’exposition. » 21 Dans le cas de l’exposition d’architecture, cette contiguïté, qui peut aller jusqu’à une forme d’indistinction, apparaissait à travers un usage extensif du terme « installation » dans l’ouvrage fondateur The Art of Architecture Exhibitions, dirigé par Kristin Feireiss22. Quand celle-ci évoquait Beyond the Wall, 26.36°, l’intervention que l’architecte Daniel Libeskind réalisait en 1997 au sein du Netherlands Architectuurinstituut, elle avait alternativement recours aux termes « installation », « sculpture », « construction architecturale » ou « exposition »23. Kristin Feireiss faisait alors le constat d’une pratique hybride – un « nouveau genre »24 – qui brouillait les frontières entre installation artistique, architecture et exposition. Dans ce même volume, Hani Rashid, architecte fondateur de l’agence d’architecture Asymptote, marquait son engouement pour cette forme d’intermédialité, dont la mise en œuvre n’a cessé de se multiplier depuis : « une tendance intéressante dans le travail d’installation actuel mené par les architectes est le lou entre construction et art. »25 En effet, presque dix ans plus tard, cette nouveauté n’en est plus une : pour Sylvia Lavin, « l’expôt architectural empiète sur le territoire de l’art social et relationnel, de l’installation, du travail in situ et bien sûr sur celui de l’architecture elle-même. » 26 Le constat de cette évolution nous a amené à revendiquer la nécessité d’une prise en compte des pratiques artistiques contemporaines pour aborder l’exposition. Les artistes nous semblent même faire partie des premiers contributeurs à une rélexion sur ce sujet. Les recherches de Jean-Marc Poinsot l’ont montré, « les artistes ont très généralement intégré dans leur prestation esthétique les composantes du cadre muséal et d’exposition »27 – donc travaillé ces données – avant que les chercheurs ne les prennent en considération. Ainsi, pour aborder la monstration de l’architecture, nous avons aussi envisagé – sans restriction – les démarches artistiques qui mettent en scène, attirent l’attention ou déclenchent une rélexion sur l’architecture, ses enjeux, son histoire et son devenir. De cette manière, les stratégies et les méthodes utilisées par les artistes sont venues informer notre enquête sur la mise en vue de l’architecture, au même titre que les gestes auxquels on attribue plus volontiers le qualiicatif « curatorial ». Pour autant, il ne s’agissait pas de déplacer le problème et d’enfermer l’analyse dans d’autres schémas, cette fois, propres à l’art contemporain. Notre collaboration avec des institutions productrices d’expositions nous y aidant, en plus des artistes, nous avons voulu compter les conservateurs, les chargés d’exposition, les scénographes, les commissaires d’exposition, les spécialistes des sciences de la communication, etc., comme autant d’interlocuteurs incontournables pour penser l’exposition. C’est à travers cette résolution à diversiier les regards et les compétences, que nous avons cherché à favoriser de nouvelles approches sur l’exposition d’architecture et contribué à ouvrir ce champ de recherche au-delà des limites qui le déinissent parfois encore. FRÉDÉRIC HERBIN 10 UN CHAMP ÉLARGI DE L’EXPOSITION Si l’on comprend l’architecture comme ce qui s’inscrit sur un axe théorique allant de la construction fonctionnelle à l’idée – c’est-à-dire du bâti au non-bâti – il a trop souvent été considéré que l’exposition ne pouvait englober que ce qui se trouve à la seconde extrémité de cet axe : le projet, la représentation. Cette conception, qui va de pair avec le topos d’une architecture obligatoirement absente du lieu de sa monstration28, ne tient que par un retranchement de l’exposition sur sa dimension muséale traditionnelle. Qu’au sein du musée, les expositions de natures documentaire, informative ou scientiique s’emploient, la plupart du temps, à témoigner d’une situation qui n’est pas matériellement présente, est évident. Mais, face aux évolutions qu’a connues l’exposition d’architecture, notamment à travers la généralisation de pratiques de type « installation » qui brouillent, à la fois les frontières entre les différents arts et la linéarité d’un partage bâti/non-bâti, la situation muséale nous semble loin de régler l’ensemble de la question. Les contributions rassemblées dans cet ouvrage le montrent, parfois, l’exposition d’architecture excède le territoire du musée, comme celui de la totalité les institutions qui lui sont dédiées. Elle n’est pas non plus réductible à la seule prise en charge des dimensions projectuelle et documentaire de la construction. Cette distinction/distance, qui semblait infranchissable, entre le bâtiment existant et l’exposition de documents le représentant doit être dépassée. En effet, mettant l’accent sur des formes à chaque fois particulières, voire restrictives, de ce que peuvent être l’architecture et sa monstration – précisément celles qui apparaissent comme étant les plus éloignées – cette distinction n’a pas seulement incarné l’hypostase de la rélexion sur l’architecture exposée, elle a fait écran à la reconnaissance et à l’analyse de multiples autres situations. Adoptant une position inverse, ce livre engage la prise en compte d’un champ élargi de l’exposition d’architecture29. La maquette et le dessin d’architecture, que l’on rencontre logiquement dans les vitrines ou sur les cimaises des institutions qui les conservent, y ont leur place, mais la construction aussi, qu’elle se développe à l’intérieur de ce qu’on considère habituellement comme un espace d’exposition ou qu’elle existe au sein-même du tissu urbain. Ces différentes situations ne s’excluent pas. Au contraire, elles délimitent un terrain relativement large, qui n’est autre que celui sur lequel la question de l’exposition d’architecture se déploie. Les « objets » architecturaux, quels que soient leur nature, leur dimension ou leur contexte, ne s’y distinguent pas par leur capacité ou non à appartenir à l’exposition, mais en ce qu’ils impliquent divers gestes de mise en vue qui informent la pratique de l’exposition. Notre axe bâti/non-bâti doit donc être doublé d’un second qui comprend l’exposition comme la gamme de ces gestes. Quand l’architecture se matérialise dans une construction fonctionnelle, l’exposition ne peut plus l’englober, elle se réduit à son expression la plus simple : elle conduit le regard vers l’architecture. À l’inverse, lorsque l’architecture prend la forme du dessin, de l’archive ou de la maquette, l’exposition se fait 11 g 28 Voir : Marie Élizabeth LABERGE, « Communiquer l’architecture par le média exposition », MediaTropes, vol. III, n° 2, 2012, p. 84. [En ligne] www.mediatropes.com/ index.php/Mediatropes/article/ view/16897/13887 g 29 Le modèle d’analyse proposé par Rosalind Krauss (« La sculpture dans le champ élargi », in Rosalind KRAUSS, L’originalité de l’avant-garde et autres mythes modernistes, Paris, Macula, 1993, p. 111-127.) a déjà été convoqué au sujet de l’exposition d’architecture. Cf. Catherine DAVID, « Architecture in the Expanded Field », in Kristin FEIREISS (éd.), op. cit., p. 58-64 et Eszter STEIERHOFFER, « The Exhibitionary Complex of Architecture », Oase, n° 88, octobre 2012, « Exhibitions. Showing and Producing Architecture », p. 5-11. Voir également le texte d’Emmanuelle Chiappone-Piriou dans cet ouvrage : infra, p. 58-66. Pour nous, il s’agit surtout d’en retenir la capacité à établir une structure de compréhension qui ne soit pas entièrement soumise à un impératif d’historicisation. g 30 Il faut se rappeler le discours que Françoise Choay relevait déjà dans le Bulletin du ministère de la culture de janvier 1988 : « le lieu muséal est devenu le « geste architectural » par excellence de notre époque. « Les musées se visitent comme des monuments. L’écrin est un objet à voir comme un joyau. ». Françoise CHOAY, L’allégorie du patrimoine, Paris, Seuil, 1992, p. 245. g 31 Hubert DAMISCH, « L’architecture, au musée ? », Les Cahiers du Musée national d’art moderne, n° 42, hiver 1992, p. 72. g 32 L’exposition eut lieu du 10 février au 23 mars. Philip Johnson et Henry-Russell Hitchcock en était les commissaires. Voir : Terence RILEY, The International Style: Exhibition 15 and the Museum of Modern Art, cat. expo. (New York, Arthur Ross Architectural Gallery, 9 mars – 2 mai 1992), New York, Rizzoli International, 1992. FRÉDÉRIC HERBIN contenant et devient un milieu que l’on peut entièrement modeler et maîtriser : architecture autour des architectures. C’est à l’exploration du champ élargi que dessinent ces deux axes complémentaires que s’atèle cet ouvrage. L’ARCHITECTURE EXPOSÉE DANS SON PÉRIMÈTRE DÉDIÉ Les textes rassemblés dans cette première section abordent la situation telle qu’elle s’est développée au sein des lieux spécialisés dans la monstration de l’architecture. Ils interrogent les rapports (de forces) qui s’y établissent entre la représentation architecturale, l’institution qui la « produit » devant les spectateurs et l’architecture en tant que domaine professionnel et théorique spécialisé. Comme l’explique Pierre Chabard (« Ce que l’exposition fait à l’architecture : le cas du CCI dans les années 1980 »), la prise en charge de l’architecture par l’institution muséale a consacré son entrée dans le champ culturel. Dans le même mouvement, l’exposition s’est imposée comme un vecteur privilégié de médiation, voire de construction, de l’histoire de l’architecture et elle a contribué à autonomiser les « images d’architecture », devenus objets culturels et bientôt marchands. D’une certaine manière, l’exposition « Chefs-d’œuvre ? », présentée au Centre Pompidou-Metz entre mai 2010 et septembre 2011, marque l’aboutissement de cette trajectoire : l’architecture, via la maquette ou le dessin, y est portée au plus haut degré de la hiérarchie culturelle. Marie Civil (« Le musée exposé : mise en espace de l’histoire muséale ») proite de cette occasion pour souligner le « statut paradigmatique » de l’architecture du musée30. En effet, parmi les programmes architecturaux qui peuvent être montrés par l’institution, celui du musée est l’un des plus intéressants pour observer comment l’exposition entremêle écriture de l’histoire de l’architecture et légitimation des objets qu’elle contient – et qui la contiennent, en l’occurrence. À ce sujet, Hubert Damisch avait déjà conclu que l’institution « attend, en retour, de l’architecture que celle-ci non seulement lui procure les espaces dont elle a besoin, mais encore qu’elle conforte l’image que le musée entend donner de lui-même. »31 Plus tôt, nous avons noté que l’exposition revêt un caractère discursif ; ces exemples le montrent, l’énonciation qu’elle incarne n’est évidemment pas neutre. Non seulement elle découle d’une intention, mais, de plus, elle agit sur les objets qu’elle convoque. Cette seconde partie du mécanisme n’est que plus opérante à mesure que le capital symbolique de l’institution qui lui sert de cadre est important. Aussi, avec la multiplication des lieux consacrés à l’exposition de l’architecture, c’est leur capacité à « produire » les objets marquants de l’histoire de l’architecture qui va déinitivement les inscrire comme d’incontournables acteurs des débats à ce sujet. En remontant dans la chronologie, on sait bien que c’est depuis l’exposition du Museum Of Modern Art en 1932, « Modern Architecture : International Exhibition »32, qu’à la suite des expériences des avant-gardes, les institutions se sont emparées de la monstration pour en faire l’un des véhicules du discours architectural. En effet, FRÉDÉRIC HERBIN 12 quel qu’en soit le degré d’aboutissement, l’exposition a cet avantage de donner à voir – parfois à vivre – une matérialisation de ce discours. Dans les exemples qu’étudient Stéphanie Dadour et Léa-Catherine Szacka (« L’exposition comme vecteur de changement de paradigme : les cas de la Biennale d’architecture de Venise (1980) et de l’exposition ‹ House Rules › (1994) »), cette capacité de l’exposition à faire image, lieu et date tend à bouleverser la hiérarchie qui plaçait le support écrit comme le meilleur médiateur de la théorie architecturale. Dans les deux cas, l’exposition se fait chambre d’écho des débats et recherches qui animent le champ architectural à des moments charnières de son évolution : remise en cause de la norme par le postmodernisme en 1980, puis à l’aune des questions identitaires en 1994. Surtout, l’exposition s’impose alors comme le moyen de faire coïncider théorie et pratique dans un même lieu parce qu’elle devient le moteur d’une production architecturale. Avec la Biennale de 1980 et « House Rules », il ne s’agit plus seulement de montrer des représentations qui préexistent au projet de l’exposition, mais de répondre aux sollicitations du commissaire et de l’institution, qui se font aussi commanditaires pour l’occasion. De ce point de vue, la « Strada Novissima » marque une étape importante puisqu’elle déplace au sein d’un espace d’exposition qui la contient, ce qui ne s’était vu qu’à l’échelle de la ville, notamment avec la « rue des nations » lors de l’Exposition Universelle de 1878 à Paris33. L’architecture produite matérialise une rue qui est à la fois contenu de l’exposition, mais également structure et parcours de celle-ci. À ce stade, l’absence complète du bâti, par laquelle on a cru pouvoir caractériser l’exposition d’architecture, est déjà outrepassée. Cependant, on peut encore s’interroger sur la nature de cette construction. S’agit-il d’une architecture – qui existe pour elle-même – ou seulement d’une expression architecturée de l’exposition – qui fusionne judicieusement contenu et contenant ? En tout cas, l’exposition se révèle comme un potentiel site de matérialisation pour l’architecture, même à taille réelle. Mais peut-elle être pareillement le théâtre de son élaboration, voire de sa construction ? L’ARCHITECTURE EXPOSÉE DANS SON PROCESSUS Parmi les arguments utilisés pour discuter du bien-fondé de créer des musées d’architecture, il en est un qui se distingue par la résonance qu’il trouve dans les expositions d’architecture les plus récentes : la nécessité de rendre visible le processus d’élaboration de l’architecture. Ainsi, l’exemple du musée dit « de l’œuvre ou de la fabrique » évoqué dans l’éditorial de la revue de l’art en 198134, puis par Hubert Damisch35 et Fabienne Couvert36, semblait se proposer comme l’anti-modèle d’une institution muséale qui se tient à distance du bâti. Il s’agissait de renouer le contact avec la dimension constructive de l’architecture, tout en échappant au caractère iconique de l’édiice apparaissant en totalité. Si ce modèle paraît dépassé face aux évolutions qu’a connu la création architecturale depuis les années 1990, notamment par l’intermédiaire des progrès énormes de l’outil informatique, il semble toutefois que l’idée de 13 g 33 Il faut rappeler les propos des témoins de l’époque : « Jusqu’alors l’architecture ne s’était jamais trouvé représentée dans les expositions que par des dessins ; quelquefois, mais rarement, par de petits modèles en relief. Pour la première fois elle igurait, en 1867, avec des constructions, véritables spécimens […] de chacun des pays dont ils étaient originaires. C’est là l’une des innovations les plus heureuses, car elle donnait l’expression de toutes les formes connues de la construction. » Alfred NORMAND, L’architecture des nations étrangères : étude sur les principales constructions du parc à l’exposition universelle de Paris (1867), Paris, A. Morel, 1870, p. 1. g 34 « Les Musées d’architecture », art. cit., p. 5. g 35 Hubert DAMISCH, art. cit., p. 73. g 36 Fabienne COUVERT, Exposer l’architecture – le musée d’architecture en question, Rome, Diagonale, 1997, p. 38. g 37 C’était également l’idée que la revue Oase mettait en avant avec son numéro thématique. Cf. Véronique PATTEEUW, Tom VANDEPUTTE, Christophe VAN GERREWEY, « The exhibition as Productive Space », Oase, n° 88, op. cit., p. 1-4. FRÉDÉRIC HERBIN faire de l’exposition autre chose que le médiateur d’une construction terminée soit plus que jamais d’actualité ; les contributions de cette seconde section en témoignent. À ce titre, l’étude de l’évolution des monstrations qui ont eu lieu au Centre canadien d’architecture, menée par Louise Pelletier (« L’exposition d’architecture en mutation : le cas du Centre canadien d’Architecture »), est très éclairante. L’exposition de Peter Eisenman en 1994, « Les Cités de l’archéologie ictive », comme celle de Daniel Libeskind au Netherlands Architectuurinstituut, y a marqué un tournant vers la création d’interventions spatiales d’une nature nouvelle au sein de l’institution. En effet, l’enjeu n’était plus de produire un bâtiment dans le bâtiment, mais de traduire spatialement « sa pensée architecturale » par une forme qui brouillait les distinctions entre scénographie, installation et construction. L’exposition devenait ainsi le cadre d’une autre expression de la pratique architecturale, qui permettait un exercice d’autorélexion par sa nature expérimentale. Cet exemple, resté célèbre, constitue l’un des premiers jalons dans la redéinition de la pratique de l’exposition comme l’espace-temps d’une recherche architecturale en cours, dont la inalité n’est plus seulement dirigée vers la production d’une construction fonctionnelle. Ainsi, l’observation des expositions du CCA permet d’identiier de nouveaux paradigmes qui viennent à la suite de celui de la fabrique : par exemple, le « laboratoire » ou la « plateforme de discussion ». S’écartant de la tradition muséale, l’exposition n’y montre plus l’architecture comme objet/œuvre, avant tout inscrit dans un ordre historico-esthétique, mais permet de toucher à toutes les dimensions qui président à sa conception et, potentiellement, de la réinscrire dans un rapport de proximité avec le spectateur et les débats qui agitent la société. Emmanuelle Chiappone-Piriou (« L’architecture in vivo. L’exposition comme espace d’expérimentation ») s’emploie à esquisser les contours de ce nouvel état de l’exposition d’architecture. Son analyse conirme la mobilisation de l’exposition comme lieu de production de l’architecture et le changement qui s’opère dans ce mécanisme : plutôt que de devenir le théâtre de l’érection de bâtiments créés pour l’occasion – équivalents potentiels de ceux que l’on rencontre à l’extérieur – l’exposition s’impose comme particulièrement adaptée à l’expérimentation37. La monstration se distingue alors davantage comme un potentiel maillon de la chaîne d’élaboration de l’architecture, dont la qualité est la « suspension » d’une partie des contraintes qui accompagnent la mise en fonction d’une construction. Ce n’est plus la dimension discursive de la monstration qui prime dans ce cas, mais sa capacité à accueillir une architecture en train de se penser ou de se faire. Un déplacement du geste curatorial en résulte : il devient accompagnement de la production architecturale autant, voire plus, qu’il n’est mise en scène de celle-ci. Ainsi, l’exposition s’impose comme l’espace privilégié où l’architecture peut trouver les moyens d’une matérialisation qui ne rime pas forcément avec les habituelles étapes de projection ou de livraison. FRÉDÉRIC HERBIN 14 Cette nouvelle condition de l’exposition accompagne un bouleversement de la discipline architecturale, dont l’impact sur les pratiques reste encore à mesurer et à réfléchir. Marie-Ange Brayer (« L’exposition d’architecture comme artefact critique ») s’y attache en observant l’évolution des statuts et fonctions de la maquette. Elle montre comment cet objet s’est progressivement émancipé du référent bâti, en même temps que l’exposition. L’une et l’autre sont sorties de la fonction de représentation où elles étaient traditionnellement cantonnées pour devenir des formes architecturales en elles-mêmes, renversant ainsi les hiérarchies établies (bâti/non-bâti), mais également les limites entre les disciplines. C’est en effet au croisement entre art et architecture que ces formes prennent place. Suivant ce raisonnement, l’architecture « computationnelle » marque l’émergence d’un nouveau modèle de conception comme lux ininterrompu. Chaque matérialisation – maquette, installation, exposition ou construction fonctionnelle – n’y serait plus que l’expression provisoire d’un continuum créatif qui n’a pas d’aboutissement programmé. L’exposition, temporaire par essence, s’est révélée un milieu particulièrement adapté à l’accueil et à la mise en valeur de ces processus, rendant la temporalité habituelle du projet architectural caduque. De la sorte, si la fabrique a laissé place au laboratoire, il semble que l’exposition d’une architecture en train de se faire puisse désormais se référer au fonctionnement du fab lab (contraction de l’anglais fabrication laboratory) avec ses machines à commande numérique, notamment la fameuse imprimante 3D. Le témoignage de l’architecte Philippe Chiambaretta (« Exposer l’architecture ») permet de se rendre compte de cette place particulière que l’exposition occupe, aujourd’hui, au sein de la pratique. En effet, sa collaboration avec le Centre de Création Contemporaine de Tours donne à voir le caractère continu d’une démarche architecturale où les différentes matérialisations trouvent de plus en plus à s’exprimer dans le cadre d’une exposition. Son projet de façade, pensé sans perspective de réalisation, se manifeste alternativement sous forme de maquettes, d’images et d’installation interactive qui, toutes, donnent lieu à des monstrations, en amont et en aval d’une construction qu’elles vont inalement réussir à justiier. L’exemple est intéressant en ce qu’il démontre encore que c’est bien par l’exposition que l’on accède au processus architectural : cette dimension latente qui excède le bâtiment dans sa réalité statique et autonome. Il faut aussi noter la compréhension extensive de l’exposition dont fait preuve Philippe Chiambaretta quand il évoque sa collaboration avec le photographe Jean-Philippe Mesguen. En effet, au sein de son agence, la photographie intervient pareillement comme un moyen de témoigner du faire architectural au-delà de « l’objet ini, sculptural et iconique ». Toutefois, son rôle et son fonctionnement ne relèvent pas uniquement de la documentation. N’appartenant pas au travail de l’architecte et dépassant le seul rôle d’avoir à communiquer ce dernier, cette pratique photographique afirme son statut artistique propre et complexiie les visions historiques, systématiques et classiicatrices que le conservateur ou le commissaire peuvent développer 15 FRÉDÉRIC HERBIN dans leurs expositions. En même temps qu’il montre le processus architectural, cet objet plastique ouvre sur d’autres dimensions, notamment narrative et subjective, qui laissent entrevoir le potentiel apport des autres disciplines à l’exposition de l’architecture. L’ARCHITECTURE EXPOSÉE AUX AUTRES DISCIPLINES Les objets, œuvres, analysés dans cette troisième section mettent en jeu l’exposition d’architecture sans toutefois appartenir et se résumer entièrement à cette pratique. En effet, bien qu’elles participent à la mise en vue de l’architecture, les réalisations évoquées ne lui sont pas complètement dévouées – dans le sens où elles ne disparaissent pas derrière celle-ci. D’abord, elles résultent de démarches créatives (photographie, installation, plan-relief) qui ont une part d’autonomie par rapport à ce domaine. Ensuite, parce qu’elles ne nient pas la subjectivité du regard qu’elles portent sur l’architecture, ces réalisations dépassent les attentes traditionnelles de représentation, de témoignage ou de démonstration qu’appelle son exposition. C’est précisément à partir de cette position tangentielle entre les disciplines, que ces objets, ces œuvres, informent l’étude de l’exposition. S’intéresser à leurs modes d’actions, aux artiices qu’ils développent pour évoquer l’architecture, c’est se rappeler la nature de langage non neutre que revêt l’exposition et s’armer d’outils rélexifs, voire critiques, pour mieux en démonter et en comprendre les ressorts. Roberto Gigliotti et Giaime Meloni (« Usages de l’image photographique dans l’acte d’exposer l’architecture ») explorent l’étendue des emplois que l’on peut faire du médium photographique au sein de l’exposition. Leur enquête les amène à identiier deux niveaux d’intervention pour la photographie. En premier lieu, elle participe à l’évocation du bâti au sein de l’exposition envisagée comme une « ambiance immersive ». Dans ce cas, la photographie, souvent à grande échelle, intervient comme le moyen de produire une expérience perceptive proche de la réalité pour le spectateur. À l’inverse des moyens de représentations conventionnels que sont le dessin et la maquette, elle permet de (re)produire, de manière illusionniste, un espace pratiquement identique à la construction originale. Malgré sa nature plane, ce médium participe donc entièrement aux tentatives de faire de l’exposition le lieu d’une rencontre sensible avec l’espace architectural. En second lieu, la photographie se donne évidemment comme contenu. Elle constitue, pour les deux chercheurs, un outil privilégié de rélexivité sur l’architecture et sa perception. Ainsi, il ne s’agit pas de mettre en avant son apparente objectivité, mais au contraire d’en faire un objet d’investigation. La manière dont la photographie s’est imposée comme un élément fortement façonnant pour l’exercice du regard est l’un des enjeux que l’exposition investit. Interrogeant son caractère de document, la monstration peut aussi être le site d’une critique de l’image. Au inal, l’utilisation de la photographie est symptomatique des questions que soulève l’exposition d’architecture par rapport au réel. Elle démontre que la distinction bâti/non-bâti ne tient pas au lieu où se produit l’expérience FRÉDÉRIC HERBIN 16 perceptive que l’on fait de l’architecture puisque la revendication d’un contact direct – pur – avec le bâtiment tient presque du fantasme, tant notre regard est (dé)formé par l’image. De ce point de vue, l’exposition, grâce à la photographie, semble capable d’accomplir une démonstration critique que l’architecture peut dificilement mener par ses propres moyens. Dans le cas de l’installation, Utopia Bianca, de Christophe Berdaguer et Marie Péjus, ce n’est pas cette force de l’image qui compte, mais sa quasi-absence. L’œuvre évoque un projet architectural, le phalanstère, qui n’a jamais connu de réalisation complète. Comme le rappelle Florent Perrier (« Utopia Bianca de Berdaguer & Péjus ou le phalanstère membre fantôme »), malgré sa notoriété certaine, le projet imaginé par Charles Fourrier n’existe pratiquement que par l’écriture. L’installation intervient donc pour donner matière à ce qui n’en a pas dans la réalité. Toutefois, les artistes se refusent à ixer la forme de cette architecture. En lieu et place d’une construction ou du recours aux outils traditionnels de représentation de la discipline, ils rassemblent des modèles réduits du mobilier nécessaire à un phalanstère de 400 familles. De ce fait, ils associent une autre utopie politique à celle de Fourrier : le mobilier qu’ils ont choisi de reproduire a été conçu par Enzo Mari, dans les années 1970, comme une alternative « do it yourself » au marché. Recouverts de voiles de PVC, les meubles entassés sont en attentes d’une activation de l’utopie et pointent l’absence du bâti. On comprend bien avec le texte consacré, ici, à Utopia Bianca, que l’œuvre fait de cette absence une condition même de sa capacité à évoquer l’utopie du phalanstère. Le fait de ne convoquer l’architecture, ni en elle-même, ni pour ellemême, ébranle l’habitude de l’exposition de focaliser le regard sur des formes ixées, ne serait-ce que pour un temps. Par contre, Utopia Bianca souligne la possibilité que l’exposition devienne pleinement un espace de rencontre, sensible et mouvant, avec une pensée plus qu’avec les objets qu’elle a produits. C’est également ce que Manuel Royo (« La ‹ précession des simulacres › ou Rome ‹ comme si vous étiez › : le plan-relief de Paul Bigot substitut d’un discours historique sur l’espace urbain ») décèle derrière l’imposant objet que constitue le plan-relief de Rome de Paul Bigot. Envisagée au prisme de la notion de simulacre, la maquette historique de l’architecte apparaît comme une entreprise qui déie la réalité : elle n’est pas seulement sa représentation, mais tend à en créer une autre tout aussi vraisemblable. Fusionnant les strates historiques qui ont contribué à l’édiication de la ville, la Rome miniature de Bigot livre une vision idéale de l’espace urbain qui relève de la iction. Mais le degré d’élaboration de cette iction fait qu’elle le dispute à la réalité des vestiges visibles. C’est toute l’ambiguïté du modèle réduit, de la maquette, qui transparaît avec cet exemple : la représentation y rend réel quelque chose qui n’a pas obligatoirement été, qui n’est pas ou plus et qui ne sera jamais hors du simulacre. Partant, l’architecture et la ville réduites ne peuvent pas être considérées seulement comme des documents qui se contentent de reproduire, il faut les envisager comme les supports 17 g 38 Voir à ce sujet : Laurent JEANPIERRE, « La dialectique de l’art et de l’exposition » et Christian BESSON « Pour une anthropologie de la montre », artpress2, n° 36, « Les expositions à l’ère de leur reproductibilité », février/mars/avril 2015, p. 15-20 et p. 21-28. FRÉDÉRIC HERBIN ou les produits d’une élaboration intellectuelle qu’ils contribuent à imposer. Encore une fois, il s’agit donc d’interroger l’architecture exposée dans son rapport à un hypothétique référent construit (réel) ; un rapport qui ne repose déinitivement pas sur un schéma d’opposition ou d’exclusion entre ces deux termes, mais qui s’avère bien plus complexe et riche lorsque l’on se risque hors du champ stricte de l’exposition d’architecture. L’ARCHITECTURE EXPOSÉE EN/HORS CONTEXTE Tout comme la question de l’exposition d’architecture ne se limite pas aux pratiques propres à cette discipline, elle ne se cantonne pas aux lieux qui lui sont dédiés, ni même, plus généralement, à tous ceux qui sont consacrés à la monstration de formes artistiques. Il est aujourd’hui nécessaire de sortir hors du périmètre que l’on considère traditionnellement – mais de manière restrictive – comme étant le contexte où l’exposition a lieu pour mener plus avant son étude38. Les contributions rassemblées dans cette dernière section se proposent donc d’envisager une géographie étendue de l’architecture exposée, où les institutions qui ont pour mission de la montrer ne disparaissent évidemment pas, mais s’inscrivent comme un contexte possible parmi d’autres. De ce point de vue, l’exemple de la maison préfabriquée, étudié par Caroline Bougourd (« La maison préfabriquée : un objet idéal à exposer ? »), est presque emblématique. De manière ambiguë, elle incarne à la fois un programme architectural propice aux expérimentations prospectives, souvent sans lendemain, et le devenir objet de consommation d’une construction standardisée et produite en masse. Ainsi, elle montre deux importants visages de l’architecture médiatisée par l’exposition : le programme commercial que l’on doit communiquer largement et sa reconnaissance possible en tant que référence historique que l’on patrimonialise. Par conséquent, au cours de son histoire, on trouve la maison préfabriquée exposée aussi bien lors de biennales artistiques, que lors de foires et de salons internationaux, dans des musées tout autant que dans des magasins ou même un parc d’attraction. Si l’objet en lui-même se modiie peu, par contre, on comprend aisément que ces contextes le dénotent différemment. Etant donnée cette circulation, faire l’analyse ou l’histoire de l’exposition signiie d’obligatoirement prendre en compte ces multiples situations. On ne peut se contenter d’envisager l’architecture exposée dans les institutions dédiées à cette fonction, pas plus que dans des contextes artistique ou scientiique plus larges parce que le cadre y est souvent le même. Les limites qui circonscrivent traditionnellement cet objet d’étude ne tiennent d’ailleurs pas longtemps à l’évocation de cas comme le chantier d’expérimentation de Noisy-le-Sec : conçue comme une solution d’urgence pendant la période de reconstruction après la Seconde Guerre Mondiale, la maison préfabriquée s’y expose bien, mais construite et en usage. Les enjeux de la monstration sont indéniablement présents – les habitations sont régulièrement ouvertes aux visiteurs et servent la propagande pour l’action de l’Etat – même si le cadre institutionnalisé de l’exposition est absent. FRÉDÉRIC HERBIN 18 La perspective d’une architecture mise en exposition, mais bâtie, en fonction, au sein de la ville – on pourrait oser l’expression « en contexte » – mérite d’être envisagée 39. Plusieurs chercheurs ont déjà posés des jalons qui vont dans ce sens. Par exemple, il faut rappeler l’analogie que Jean Davallon pose entre l’exposition et le circuit culturel 40. Si l’objectif de son étude dépasse cette question, elle permet de considérer l’expérience d’un parcours aménagé dans la ville comme relativement semblable à celle que l’on fait lors d’une visite d’exposition. En effet, hors des institutions dédiées à l’exposition, Jean Davallon montre que le visiteur peut tout de même suivre une déambulation dirigée qui vise à produire du sens pour celui-ci. Toutefois, c’est plus récemment qu’on a cherché à explorer les potentialités du rapport entre ville et exposition. Pour Sarah Chaplin et Alexandra Stara, l’enjeu est d’envisager l’espace urbain à nouveaux frais : « Approcher la ville comme une collection devant être curatée [curated signiie à la fois exposé et conservé], que ce soit par des représentations ou in situ, ouvre de nouvelles possibilités pour explorer et enrichir le tissu urbain et la condition urbaine dans son ensemble. » 41 Pour nous, il s’agit de pointer et d’analyser les différents gestes de mise en vue, et ce, quels que soient l’échelle, le lieu ou le statut de l’architecture qu’on expose. La question de l’éclairage appartient à la gamme de ces gestes que l’on peut observer à travers des allers-retours entre l’exposition traditionnelle et l’espace de la ville, voire celui d’un territoire national. De la sorte, Eric Monin (« L’architecture surexposée ») révèle le point de rencontre que constitue l’Exposition internationale des arts et techniques dans la vie moderne, organisée à Paris en 1937. Cet événement donne lieu à une démonstration des possibilités techniques de l’éclairage électrique autant en terme de muséographie que d’illumination de bâtiments. En effet, c’est à cette occasion que les techniques d’exposition s’exposent pour la première fois en tant que telles et que l’ambition d’un « maillage lumineux du territoire » se met en œuvre. La maîtrise que montre alors ces deux pratiques trouve ses racines dans les expérimentations menées pour les besoins de l’éclairage commercial et des grandes expositions internationales, soulignant, une fois encore, le besoin d’envisager une généalogie plus vaste que celle du musée. Mais, dans un cas comme dans l’autre, la volonté est indubitablement la même : exalter l’objet que l’on expose. On le comprend, les bâtiments éclairés ne peuvent être compris comme de simples équivalents nocturnes de ce que l’on voit à la lumière du jour. La mise en lumière relève d’une véritable opération de mise en vue : elle oriente, concentre, voire change, le regard que l’on pose sur l’architecture tout comme le fait une monstration dans un lieu consacré à cette fonction. Il n’y a donc qu’un pas à faire pour considérer le Tour de France de la Lumière organisé par la Compagnie des Lampes Mazda en 1937, comme l’un des exemples les plus marquants de l’histoire des expositions d’architecture. L’œuvre de Peter Greenaway ouvre à de pareils questionnements 42. Sun Jung Yeo (« Maquettes, dessins, cartes : exposition de l’architecture chez Peter Greenaway ») étudie les dispositifs d’exposition de 19 g 39 Voir à ce propos : Fabienne COUVERT, op. cit., p. 88-91. g 40 Jean DAVALLON, L’exposition à l’œuvre. Stratégies de communication et médiation symbolique, op. cit., p. 145-155. g 41 « Introduction », in Sarah CHAPLIN, Alexandra STARA (éd.), Curating Architecture and the City, op. cit., p. 2 : « Approaching the city as a collection to be curated, whether through representations or in situ, opens up new possibilities for exploring and enriching the urban fabric and the urban condition as a whole. » g 42 Elle était déjà évoquée dans Fabienne COUVERT, op. cit., p. 90. g 43 Jérôme GLICENSTEIN, « Quelques questions posées par l’histoire de l’exposition », artpress2, n° 36, op. cit., p. 8-14. g 44 Idem, p. 11. FRÉDÉRIC HERBIN l’architecture que l’artiste développe à la fois dans le ilm Le ventre de l’architecte et lors de l’installation urbaine The Stairs : Genève, le cadrage. Le passage de la pellicule à l’espace de la ville marque une continuité certaine puisque, dans les deux cas, la démarche du réalisateur conduit le regard sur l’architecture à travers l’imposition d’un cadrage. Ainsi, les chambres optiques du peintre Canaletto et le plan de Rome de Giambattista Nolli, présentés dans l’exposition de l’œuvre de l’architecte Étienne-Louis Boullée autour de laquelle se noue la narration du ilm, trouvent un écho direct dans les éléments mis en œuvre pour l’installation de Genève. Cette dernière, s’inscrivant dans une entreprise de questionnement sur les constituants du cinéma, dispose une centaine d’escaliers surmontés d’un viseur dans la ville ; architectures légères incarnant un état « post-cinématographique » du cadrage. Localisés sur un plan de la ville, les escaliers induisent un parcours ponctué de stases qui réintègre le spectateur dans une corporéité et une temporalité qui s’oublient dans une salle de cinéma. Reposant sur le visuel, mais incorporant une déambulation physique et contextuelle dans la ville, The Stairs : Genève, le cadrage dépasse donc les limites de l’architecture montrée par le ilm en ayant recours aux qualités du parcours ou de l’exposition. Mais, on le constate, sortir de la salle de cinéma, tout comme du cadre institutionnalisé de l’exposition, n’implique pas de rupture dans les ressorts de la mise en vue de l’architecture. À cette extrémité du champ élargi de l’exposition, si l’architecture coïncide avec le bâti, les gestes de mise en vue ne disparaissent pas pour autant. Ils permettent encore de singulariser certains bâtiments, voire certaines de leurs caractéristiques, contredisant ainsi l’idée que hors de l’exposition on rencontrerait simplement l’architecture « réelle » dans son contexte. EN GUISE DE CONCLUSION D’OUVERTURE Nous l’avons dit, les recherches sur l’exposition se multiplient et les grandes lignes de son histoire sont en train d’être tracées. Pourtant, les perspectives de ce champ d’étude demeurent incertaines. Récemment, et de manière salutaire, Jérôme Glicenstein les questionnait 43. Il soulignait la dificulté à saisir cet objet qui induit autant d’histoires possibles que les acteurs, les objets et les contextes qui entrent en jeu dans sa réalisation. Dans ce domaine, l’entreprise historique doit donc accepter d’être une « tâche incertaine, fragmentaire, lacunaire s’il en est »44. Cet ouvrage n’y échappe pas. Plutôt que de prétendre construire une linéarité, il propose des jalons à l’intérieur d’un schéma qui se fait souvent plus territorial que temporel. Si quelques expositions, œuvres ou acteurs marquants s’y distinguent, les études monographiques sur l’un de ces éléments n’ont pas été privilégiées. La volonté d’établir une sorte de cartographie des positions à partir desquelles l’exposition d’architecture peut être pensée, nous a conduit à privilégier les démarches comparatives ou celles qui placent l’architecture au croisement d’autres domaines. Il s’agit ainsi de révéler les évolutions, mais aussi les circulations, que connaissent les objets exposés et leur FRÉDÉRIC HERBIN 20 statut, les discours et les pratiques architecturales, de mêmes que les techniques d’exposition, au sein d’un espace qui inclut différentes institutions dédiées à l’architecture et à l’art, mais aussi d’autres contextes : événementiels, commerciaux, urbains, etc. Ces ouvertures ménagées hors du cadre traditionnel de l’exposition d’architecture permettent d’éviter d’enfermer cet objet sur lui-même pour, au contraire, afirmer sa nécessaire connexion avec la société qui le produit. Toutefois, le périmètre dessiné appelle à inclure encore quelques territoires restés négligés. La question des spectateurs, par exemple, demeure trop absente des rélexions menées dans cet ouvrage. Il est pareillement nécessaire d’étendre l’ère culturelle étudiée, mais non pour seulement y rechercher l’assimilation d’une conception occidentale de l’exposition d’architecture. Ce n’est qu’en parcourant également ces pistes que l’on pourra prétendre avoir établi la topographie de l’architecture exposée. 162 163 TABLE DES MATIÈRES PRÉFACE Stéphane Doré 3 INTRODUCTION : L’ARCHITECTURE EXPOSÉE DANS SON CHAMP ÉLARGI Frédéric Herbin 6 L’ARCHITECTURE EXPOSÉE DANS SON PÉRIMÈTRE DÉDIÉ 21 Ce que l’exposition fait à l’architecture : le cas du CCI dans les années 1980 Pierre Chabard 22 Le musée exposé : mise en espace de l’histoire muséale Marie Civil 30 L’exposition comme vecteur de changement de paradigme : les cas de la Biennale d’architecture de Venise (1980) et de l’exposition « House Rules » (1994) Stéphanie Dadour, Léa-Catherine Szacka 38 L’ARCHITECTURE EXPOSÉE DANS SON PROCESSUS 47 L’exposition d’architecture en mutation : le cas du Centre Canadien d’Architecture Louise Pelletier 48 L’architecture in vivo. L’exposition comme espace d’expérimentation Emmanuelle Chiappone-Piriou 58 L’exposition d’architecture comme artefact critique Marie-Ange Brayer 67 Exposer l’architecture Philippe Chiambaretta 72 L’ARCHITECTURE EXPOSÉE AUX AUTRES DISCIPLINES 77 Usages de l’image photographique dans l’acte d’exposer l’architecture Roberto Gigliotti, Giaime Meloni 78 Utopia Bianca de Berdaguer & Péjus ou le phalanstère membre fantôme Florent Perrier 85 La « précession des simulacres » ou Rome « comme si vous étiez » : le plan-relief de Paul Bigot substitut d’un discours historique sur l’espace urbain Manuel Royo 93 L’ARCHITECTURE EXPOSÉE EN/HORS CONTEXTE 101 La maison préfabriquée : un objet idéal à exposer ? Caroline Bougourd 102 L’architecture surexposée Eric Monin 111 Maquettes, dessins, cartes : exposition de l’architecture chez Peter Greenaway Sun Jung Yeo 120 L’OBJET DE L’EXPOSITION : L’ARCHITECTURE EXPOSÉE (ARCHIVES) Séminaire 2012/2013 Séminaire 2013/2014 BIOGRAPHIES DES AUTEURS 129 130 142 157