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«Intelligence territoriale: constat, recherche, applications»

International Journal of Information Sciences for …

Laboratoire I3M-équipe d'accueil 3820

INTELLIGENCE TERRITORIALE : CONSTAT, RECHERCHE, APPLICATIONS Yann Bertacchini1, Maître de Confé[email protected] Laboratoire I3M-équipe d’accueil 3820 Résumé introductif Avec le recul, très court, d’une dizaine d’années d’un processus de type essaierreur engagé sur l’objet de notre article, l’intelligence territoriale, nous essaierons par cette contribution de proposer un cadrage de ‘l’intelligence territoriale’ en tant que capacité d’intelligence collective mobilisable sur un territoire ou résultat d’une démarche collective. Nous fonderons notre propos sur l’acquis cumulé d’un parcours professionnel et d’un ancrage théorique avec plusieurs expériences, Recherches, applications d’ordre pratique terminées, en cours et à venir dépassant en cela le cloisonnement ‘théorie-pratique’ obsolète. Nous poserons et décrirons le contexte informationnel et organisationnel de notre contribution dans une 1e partie, intitulée « Dispositifs et Organisation », conséquences issues du développement combiné du numérique et de la compétition économique contemporaine. La 2e partie définira et présentera l’intelligence territoriale en tant que champ scientifique, ses contraintes d’observation, d’analyse et de pratiques pour le chercheur-praticien. La 3e partie mettra l’accent, en l’illustrant, sur ce qui fait sens dans l’intelligence territoriale à savoir le transfert organisé des compétences entre les acteurs locaux. Ce que d’aucuns nomment la « transversalité » et qui appelle, à notre sens, une adaptation voire un changement des comportements. Nous illustrerons notre propos en prenant appui sur deux applications associées à des recherches doctorales. 1 Nous associons à notre contribution: Dr Ph.Herbaux, Dr Ch.Bois, Dr Y.Bouchet, Dr G.Perrin, ainsi que les doctorants suivants : P.Maurel (Ingénieur & doctorant), M.Rmili (doctorant), I.Thomas (doctorante) et toutes les personnes, acteurs locaux, chefs d’entreprise, avec qui nous avons échangeons et travaillons. Cet article est la synthèse de ces échanges. http://isdm.univ-tln.fr INTELLIGENCE TERRITORIALE : CONSTAT, RECHERCHE, APPLICATIONS 1. Dispositifs et Organisation : le constat La mise en contexte Dans un contexte économique et social marqué par la globalisation des économies, l’internationalisation des échanges et leur virtualisation par l’usage des Tic, les organisations marchandes et non marchandes (Pme/Pmi, ONG, Association, Université) ont à écrire le scénario de leur futur marqué par une crise exceptionnelle, que personne n’a prévu et dont on ne mesure pas complètement aujourd’hui les effets. La difficulté de cette écriture prospective réside dans la nécessité de conjuguer à la fois l’abandon d’une partie de la vision du monde de la modernité – séparation du monde en acteurs, institutions et territoires – et l’adoption d’une vision résolument novatrice « hypermoderne » qui met l’accent sur la médiation, le réseau, la traduction et, in fine, la mobilisation de compétences cultivées individuellement. http://isdm.univ-tln.fr La problématique Nous exposons ici la problématique de l’intelligence territoriale. Au niveau des acteurs La distance de relation : La numérisation des taches entraîne inexorablement la dématérialisation de la relation. « On ne connaît plus les gens » est l’antienne des acteurs de l’institution qui développent une nostalgie du « bon vieux temps ». Au niveau de l’organisation La distance des opérations : Les activités « spontanées », les procédures et les équipements intègrent cette ‘mise à distance’ par la mise en place du travail collaboratif à distance. L’écran et la mémoire de l’ordinateur deviennent les lieux où se passent les choses essentielles de l’organisation. Au niveau du territoire Combiner le physique et le virtuel, le proche, le local, et le lointain, le global, l’humain et le non humain : les tendances évoquées et précisées plus en avant se mesurent aux pratiques de délocalisation et d’aménagement du territoire. Acteurs économiques et sociaux, développeurs territoriaux s’interrogent sur les possibilités de maintenir et développer un tissu socio-économique tant en terme d’emploi que de création de valeur. -Comment créer, voire conserver localement la chaîne de valorisation territoriale morcelée tout en intégrant les contraintes exigeantes de la compétition internationale ? - Existent-ils encore aujourd’hui des activités qui ne soient pas déou relocalisables parce qu’elles supposent un contact étroit et permanent entre offreurs et demandeurs de biens et services ? Comment recourir aux technologies internet tout en évitant la dégradation de la valeur ? Les attendus de notre argumentation introductive Cette triple problématique de la distance qui touche acteurs, organisation et territoire ne saurait être abordée par les moyens de la Science « sédentaire » moderne, enfermée dans les murs. Le concept triple de « réseau, médiation, traduction » développé dans l’épistémè hypermoderne nous paraît par contre plus à http://isdm.univ-tln.fr même d’apporter une clarification des enjeux et des solutions possibles. Nous nous emploierons à justifier cette prise de position. Introduction Au 17e siècle et pour trois siècles et quelque, la modernité a instauré un credo de "séparation des genres" : les chercheurs d'un côté, les praticiens de l'autre, les lettres d'un côté, les sciences de l'autre, etc.. Bruno Latour souligne que cette approche a été très productive mais d’une manière assez surprenante. D’une part il y a l’idéal « officiel » de séparation des genres, de purification. D’autre part les acteurs doivent bien s’articuler à un réel qui se laisse mal découper, d’autre part les acteurs ont besoins de « comparses » hétérogènes. Le chimiste a besoin d’un mécanicien pour son équipement de laboratoire, l’économiste a besoin d’un Blaise Pascal pour lui inventer une machine à calculer, etc. Dans l'underground se pratique donc le contraire de la purification et de la séparation des genres : les hybrides terrain/concept sont choses courantes mais tout cela reste impensé, méconnu voire méprisé. Le saut réalisé par l’hypermodernité est en particulier de penser ces hybrides, de créer des équipes et des concepts entre disciplines, etc.. L’hypermodernité comme temps de la pensée et du dépassement de la modernité Le terme d'hypermodernité a pris de l'importance en 2004 avec la parution de deux ouvrages (Lypovetsky & Aubert). Pourtant Bruno Latour nous a expliqué, dès 1991, que "nous n'avons jamais été modernes". Nous n'avons jamais été modernes parce que, malgré les diktats du politique et du scientifique, nous enjoignant de ne pas hybrider les pratiques ni les systèmes de pensée nous n'avons jamais cessé de le faire. Dans le système éducatif, dans le système universitaire, dans les entreprises, dans les institutions territoriales, des îlots de résistance, des pratiques underground ont maintenu la pratique des hybrides. Les vocables de "recherche action", de "socio techniques", de "psycho linguistique" montrent que le primat de la séparation des genres n'a pas été respecté même si nous devons aller plus loin aujourd’hui. La naissance des sciences "multiples" sciences de l'éducation et de la formation, information et communication, champ dit "sciences techniques et société" témoigne certes d'un déclin de la puissance des forces séparatrices mais nous n’en sommes pas encore à pratiquer la ‘transversalité’ tant appelée de nos voeux. Vers la recherche multidimensionnelle non moderne Comme nous l’avons souligné plus haut, il ne s’agit pas de faire table rase des acquis de la modernité. Ses représentations avec des classes d'objet, des territoires pour ces objets, des schémas pour ces objets reste très pratique. Il n'y a problème que lorsque l'on se met à "croire" dans les systèmes de classification, à agir comme si effectivement les "cases", les "branches" étaient séparées, comme s'il n'y avait ni continuum ni hybrides. L’organisation et son territoire, les acteurs et les DISTICS (en fait, des dispositifs) sont à considérer comme des ensembles complexes – sans tomber, comme le souligne Bruno Latour (1991) – dans des abstractions qui ne peuvent se relier aux réalités du terrain. Un ensemble complexe se regarde d’abord selon ses différentes dimensions selon Edgar Morin. Par exemple, nous pouvons représenter les DISTIC dans un monde hypermoderne à l’aide du schéma suivant (1). http://isdm.univ-tln.fr Figure 1 : Matrice de concepts pour penser le DISTIC et son environnement dans l'institution hypermoderne Ce schéma est aidant en cela qu'il représente de manière matricielle les axes/concepts de technique, de langage et d'homme. Il est aidant en cela qu'il montre la place des "hybrides" des discours, usage et dispositif. Une approche hypermoderne (i) mathématise ce qui peut l’être mais pas plus (ii) laisse la place à un travail empirique, praxéologique qui fait remonter ce qui peut ressortir des pratiques des acteurs, des structures de l’organisation et des dynamiques du territoire. Il est un signe qui ne trompe pas lorsque l’on prend en main l’étude hypermoderne d’un objet : le foisonnement de matrices à trois dimensions ou plus. Michel Foucault (1966) a dès cette époque décrit les disciplines à l’aide d’un trièdre indispensable pour comprendre comment s’articulent les modes de pensée mathématique, empirique et herméneutique. Vers la Recherche multiréférentielle non moderne http://isdm.univ-tln.fr Jacques Ardoino (1988) en particulier souligne que le multidimensionnel n'est pas suffisant et suggère d’en faire une lecture multiréférentielle. Nous avons traduit le propos de Jacques Ardoino par le schéma suivant. Figure 2 : Quand le chercheur utilise 4 référentiels pour "regarder" 4 dimensions de son objet de recherche. Il n'est pas inutile de souligner que les dimensions n'appartiennent pas à l'objet réel mais sont un construit de recherche (2). Les référentiels, ce sont des modèles mathématiques, herméneutiques, etc. empruntés à différentes disciplines ou créés par le chercheur. Au croisement d'une dimension et d'un référentiel, on a un "îlot de discours" éventuellement porteur de savoirs (dès 1966, Michel Foucault proposait cette modestie pour les sciences humaines). Figure 3 : L’îlot de savoir au croisement de la dimension et du référentiel Dans le travail non moderne multiréférentiel on a le "vide http://isdm.univ-tln.fr essentiel" foucaldien à la fois entre dimensions et entre référentiels. Figure 4 : Entre îlots de discours/savoir, des fentes d'ignorance Le « credo » hypermoderne est qu’il vaut mieux une bonne construction dont on reconnaît les zones d’ombre qu’une construction où ces dernières sont ignorées. Ces Ne plus s’inspirer de la synthèse Un penseur clé de la modernité est Georg Wilhem Friedrich Hegel (1770-1831) qui, au début du XIXe siècle publie Science de la logique à l'usage des élèves du secondaire. C’est le même auteur qui propose dans La Raison dans l’Histoire : « L'esprit est pensant : il prend pour objet ce qui est, et le pense tel qu'il est». La dialectique qui y est exposée suppose qu'il est "couramment" possible de mener un raisonnement en trois temps : thèse, antithèse, synthèse. Or, en amont de la dialectique, il est nécessaire d'avoir "terriblement simplifié" (3), d'avoir transformé un réel complexe en objet de recherche/raisonnement simple. http://isdm.univ-tln.fr propos rejoignent les exigences de la posture en Intelligence territoriale que nous aborderons plus loin dans notre article. Car c'est seulement sur le simplifié que peut s'exercer le jeu thèse, antithèse, synthèse. Jacques Ardoino (1988) souligne que dans la vraie vie et, dans la vie de laboratoire en particulier, le maintien de la tension entre thèse et antithèse est tout à fait primordial. Peter Sloterdijk (2002) dans son introduction à sa trilogie Sphères souligne également l'écueil hégélien. La coexistence de lectures apparemment contradictoires du réel est ainsi un autre aspect de la non-modernité. Ce n'est donc pas tant la dialectique qui est "fausse" c'est surtout la nécessaire simplification en amont qui sort le problème de sa réalité complexe. Appliquer la méthode hypermoderne au triptyque ‘acteurs, organisation, territoire’ Figure 5 : Acteurs, organisation et territoire et DISTIC appropriés Notre propos est ici de suggérer une méthode, nous n’entrerons donc pas dans le détail. Nous compléterons dans la partie 2 réservée à l’intelligence territoriale. Ce qui nous intéresse c’est que nous avons le modèle du trièdre déjà mis en relief par Foucault Direction Cadres Opérateurs Cette approche très « moderne » nous permet de définir avons ainsi 6 groupes (DM, DO, CM, etc.). http://isdm.univ-tln.fr (1966) puis Perret (2004) et que nous pouvons utiliser pour représenter notre triple articulation. Cette phase est indispensable en amont de notre découpe des dimensions. Par exemple, nous pouvons sélectionner les axes « acteur » et « territoire » et les détailler : Métropole Outremer DM DO CM CO OM OO L’approche hypermoderne que nous décrivons ici consiste à penser ces 6 groupes avec le triple concept réseau, médiation, traduction. Figure 6 : Sortir les groupes de la matrice pour les penser en terme de réseau, médiation, traduction Soit, par exemple, une organisation dont le siège est à Nice et une unité dans l’île de La Réunion. Entre directions – DM et DO – il y a des concepts communs de management. Entre acteurs d’outremer – DO et OO – il y a une culture commune. Avec l’émergence du travail avec les DISTIC, avec l’émergence de nouveaux impératifs, il est de plus en plus probable que des échanges directes puissent se faire entre DM et OO sur des thèmes comme l’environnement ou la sécurité. L’organisation et les acteurs doivent se préparer à de telles éventualités. Les professionnels du territoire peuvent avoir un rôle préventif et sensibiliser les organisations à ce type de risque et aux solutions possibles. http://isdm.univ-tln.fr L’exemple peut paraître trivial mais nous le vivons presque au quotidien dans le cadre de nos missions diverses. Il nous sert ici d’illustration de l’approche hypermoderne qui consiste à (i) mettre les situations en matrice (ii) explorer les dimensions (iii) « démonter » les groupes de la matrice (iv) dessiner les réseaux, lignes de médiations et de traductions (v) penser chaque ligne selon une palette de référentiels de compétences à identifier puis mobiliser. L’intelligence territoriale, telle que nous la concevons et pratiquons vise à répondre à ces exigences contraignantes, qui appellent une formation autre et que nous pouvons observer au quotidien au contact des acteurs locaux. Nous en présentons maintenant ses principales caractéristiques et décrivons les conditions de son exercice pour le praticien-chercheur. 2.Intelligence territoriale : Posture théorique, hypothèses, définition L’intelligence territoriale, objet et champ scientifique reconnu par le Cnu 71e section en 2004, se pose à la convergence de l’information, de la communication et de la connaissance, traduit une relation ‘Espace-territoire’, succède à la territorialité, en tant que phénomène d’appropriation ou de réappropriation des ressources, enfin, permet l’énoncé du projet territorial lorsque l’échelon territorial arrive à le formuler. D’un point de vue épistémologique et méthodologique, l’expression, certes audacieuse, d’intelligence territoriale souligne la construction d’un objet scientifique qui conduit in fine à l’élaboration d’un métamodèle du système territorial 2 inspiré des travaux de Schwarz (Schwarz, 1997). Pour ce qui nous concerne, cette démarche ne vise pas 2 Schwarz E., « Toward a Holistic Cybernetics. From Science Through Epistemology to Being », Cybernetics and Human Knowing, Vol. 4 n° 1, Alborg, 1997. http://isdm.univ-tln.fr exclusivement à une modélisation de nature systémique associée à une matrice des processus territoriaux de nature structuraliste et fonctionnaliste. Nous inscrivons nos travaux en Sciences de l’Information et de la Communication et, en tant que tels, ils se référent aux approches sociales, c’est-à-dire inter relationnelle, à la théorie systémique, c’est-à-dire informationnelle (théorie de l’information et de l’énergie associée imputable, entre autre, aux Tic) enfin, au constructivisme, c’est-à-dire à une approche communicationnelle en référence à la territorialité qui compose et recompose le territoire. Nous compléterons cette nécessaire mais synthétique présentation en rappelant, comme l’ont souligné déjà d’autres travaux, dans d’autres disciplines, que l’étude d’un territoire sous tend une connaissance initiale incertaine, il est donc nécessaire de souligner le caractère heuristique de cette approche et que sur un plan ontologique, nous nous référons à une pragmatique du territoire et de ses acteurs, du Chercheur dans sa relation avec la Société. Enfin, nous croyons utile de préciser que l’intelligence territoriale ne saurait se limiter et être réduite à une démarche de veille mais, relève plutôt d’une logique de projet de type ‘Bottom up’ qui va tenter de diffuser les éléments d’une attitude pro-active ou d’anticipation des risques et ruptures qui peuvent affecter le territoire. Dans la poursuite de l’introduction à la 2e partie de notre contribution plutôt de nature théorique, nous préciserons que notre conception de l’intelligence territoriale met l’accent sur, la solidarité de destin en réponse à l’accroissement de la complexité comme l’évoque la proposition de Morin (Morin, 2005), p124 : « la solidarité vécue est la seule chose qui permette l’accroissement de la 3 complexité » et d’autre part, compte tenu de l’inscription de nos travaux en Sciences de l’Information et de la Communication, sur l’enjeu associé à ce champ, à savoir que la communauté des enseignants chercheurs en Sic est invitée à adopter une attitude résolument pro active dans les mutations en cours en s’emparant des opportunités offertes par les pôles de compétitivité tout en ayant présent à l’esprit le défi que souligne Mucchielli, (Mucchielli, 2004) p146 « Les années à venir nous diront si les sciences de l’information & de la communication parviendront à se fortifier dans leur interdisciplinarité. ». 3 Morin, E., Introduction à la pensée complexe, 158 p, « Points Essais », n°534, Seuil, Paris. http://isdm.univ-tln.fr De l’environnement et des ressources à mobiliser L'environnement du territoire et ses composants technologiques, financier, juridique, humain ont muté vers davantage de complexité. Mais, la complexification (Wagensberg, 1999) et son corollaire, l’incertitude, font peur. Les savoirs requis de la part des acteurs en charge de définir, d’appliquer et de suivre les réalisations d’une politique locale ont également évolué. Comment dès lors orchestrer ces mouvements pour bâtir une intelligence, que nous nommons territoriale en référence à un mouvement de développement du local, à partir des ressources localisées en mobilité ou latentes ? Nous présenterons dans notre contribution et ce, à partir de notre expérience, les hypothèses préalables à l’engagement ou Comment mobiliser des ressources locales après détecté leurs gisements de potentialités? Un préalable à la mise en commun d'expériences Pour prétendre à la dynamisation spatiale de leur contenu, les collectivités locales détectent puis combinent les compétences disponibles, localisées et/ou mobiles. Ce travail d’inventaire est opéré en vue de structurer leur capital de ressources et d’intelligences dans l’optique de faire aboutir une politique de développement. La connexion de ce capital latent ou révélé ne s’obtient pas dans tous les cas. Nous allons considérer le préalable à une tentative de développement territorial. Nous formulerons l’hypothèse suivante : «L'existence ou l'inexistence d'un réseau de relations entre acteurs locaux peut s'avérer être une barrière ou un catalyseur dans la construction ou la reconstruction du lien territorial.» (Bertacchini, 2004).Ce tissu relationnel, physique ou virtuel, permet la mobilisation des compétences locales autour d'un objectif partagé et dans l’hypothèse de compétences complémentaires à réunir, à faciliter leur acquisition par un mode d’apprentissage approprié. Ainsi, puisqu' il y a inégalités d'accès, ces dernières engendrent des asymétries dans les mécanismes d'évaluation des auteurs de l'histoire locale (Jayet et Wins, 1993,1996). Sur la base de cette hypothèse, les espaces engagés dans la voie de leur médiatisation ne possèdent pas tous la même capacité d’accès au développement. Les informations transmises, échangées par leurs membres sont entachées d'une déficience, d'une déformation de leur contenu et dans leur incapacité à former le réseau relationnel. A priori, l'histoire de ces acteurs http://isdm.univ-tln.fr locaux ne leur permet pas ou leur interdit d'investir dans leur futur. A posteriori, la déficience du contenu de l'information échangée ne favorise pas leur adhésion au réseau. Dès lors, les relations affichées mais non partagées autour de cet objectif ne peuvent se reproduire durablement et compromettent la valorisation territoriale. La construction du lien social échoue et la transmission d’un patrimoine collectif ne s’opère pas. La tentative de médiation (Bertacchini, 2007), l’intelligence territoriale, que nous proposons peut s’avérer être une réponse. Le point de départ et d’arrivée : le capital formel territorial A l’origine physiques, les échelons territoriaux ont intégré ou intègrent progressivement les TIC. Ces dernières brouillent les découpages administratifs et favorisent l’émergence de territoires virtuels. Ainsi, la " société de l'information " se construit. S’il est primordial que les territoires intègrent ces technologies de l’information et de la communication, il est tout aussi nécessaire qu’ils la nourrissent, au risque de se trouver marginalisés sur un plan national comme international. Le processus d’intelligence territoriale que l’on peut qualifier de démarche d’information et de communication territoriales trouve ici sa pleine justification dans l’aide apportée à la constitution du capital formel d’un échelon territorial (Bertacchini, 2007). A notre sens le capital formel d’un échelon territorial est le préambule à toute politique de développement, qu’il s’agisse de politique de mutation territoriale, de reconversion, ou d’innovation. Nous voyons bien ainsi, que les aspects portent en effet tout autant sur un volet infrastructures, réseaux de télécommunications à haut débit (tuyaux) que sur les supports et le contenu des documents numérisés créés grâce à ces outils. De tels enjeux intéressent tous les secteurs de la société, de l'éducation à l'économie en passant par la santé ; du monde de l'administration à celui de l'entreprise, en passant par le particulier. L’intelligence territoriale s’appuie sur un maillage de compétences pluridisciplinaires détenues par des acteurs locaux de culture et donc de codes différents. Les hypothèses de la grammaire territoriale D’un point de vue des S.I.C4, ce processus informationnel autant que anthropologique suppose la conjonction de trois hypothèses : 4 Sciences de l’information et de la communication http://isdm.univ-tln.fr -Les acteurs échangent de l’information (génération d’énergie à titre individuel et/ou collectif) ; -Ils accordent du crédit à l’information reçue (captationéchange de l’information); -Le processus de communication ainsi établi, les acteurs établissent les réseaux appropriés et transfèrent leurs compétences (mobilisation et transfert d’énergie : formulation du projet). Lorsque ces hypothèses sont réunies et vérifiées, les gisements potentiels de compétences peuvent être repérées à l’aide d’une action d’information et de communication territoriales puis mobilisés dans la perspective de l’écriture d’un projet de développement. Nous pensons qu’il s’agit du préambule à la définition d’une politique de développement local de nature endogène apte à répondre au rapport concurrentiel à venir entre les territoires. Innovation et local Le territoire sera prochainement plus orienté dans un rapport de force concurrentiel où le traitement de l’information sera essentiel (Herbaux, 2005). Les mutations culturelles liées au développement des TIC, les nouvelles formes d’affrontement indirect résultant de cette évolution technologique sont encore mal identifiées par les acteurs du territoire. En exemple, la captation de l’installation d’une entreprise et des taxes locales associées avaient trouvé une solution prompte dans les contrats d’agglomération et de communautés de commune qui en mutualisaient les recettes ; ce faisant elle en limitait de fait un processus d’apprentissage dans la conquête de ressources. La mondialisation, les délocalisations obligent les pays à puiser dans les projets à dominante culturelle et touristique pour espérer capter quelques revenus d’une population de nomades aisés. La concurrence épuise l’originalité des projets et leur essoufflement ne résidera pas dans un aspect uniquement technique. Le territoire doit évoluer dans sa culture et accéder à une véritable mutualisation de l’information au sein d’un processus d’intelligence territoriale dont Bertacchini (2004) Op.Cit propose la définition suivante : «On peut considérer l’intelligence territoriale comme un processus informationnel et anthropologique, régulier et continu, initié par des acteurs locaux physiquement présents et/ou distants qui s’approprient les ressources d’un espace en mobilisant puis en transformant l’énergie du système territorial en capacité de projet [...] L’objectif de cette démarche, est de veiller, au sens propre comme au sens figuré, à doter l’échelon territorial à développer de ce que nous avons nommé le capital formel territorial». http://isdm.univ-tln.fr Le territoire avec ses rites, ses héros, ses symboles et ses valeurs qui en constituent l’histoire, compose le théâtre d’un non-dit qui rythme les échanges entre les hommes. Il y a capitalisation d’une culture des signes et des postures (l’habitus de Bourdieu), (Bourdieu, 1994) p.24 qui établit une grammaire de communication et fonde l’identité du groupe local Ce constat se trouve au centre de la recherche sur les problématiques territoriales au Québec (Herbaux, 2004) Op.Cit et nous éloigne des prophéties béates sur les rôle des TIC (Sfez, 1991). Du territoire politique vers l’identité territoriale La création d’un environnement favorable est un pré requis de toute innovation émergente au sein de la société ; Il s’agit d’évoquer la supériorité des structures et dans les techniques d’encadrement. Un premier objectif est de créer localement un terrain institutionnel, informationnel, comportemental où les acteurs puissent exprimer leurs perceptions, enrichir leurs savoirs, affirmer leurs compétences et peser sur le processus de développement ; il porte sur l’environnement politique, la reconnaissance d’un pouvoir local, l’instrumentation technique et administrative et la remobilisation sociale des acteurs locaux. Les modalités d’échange des informations sont au centre de ces rapports. Cette approche du territoire consiste à définir le cadre conceptuel de l’accompagnement d’un processus démocratique ascendant et la proximité spatiale est au coeur de cette spécificité territoriale. Elle n’est pas forcément impliquante de proximité sociale et identitaire, mais relève d’une première étape de construction d’un nouveau territoire, à travers un processus graduel d’émergence d’appropriation territoriale, qu’il s’agit d’accompagner et de favoriser. Cette appropriation, phénomène de représentation symbolique par lequel les groupes humains pensent leur rapport à un espace matériel, ne peut se construire que par l’intégration progressive d’un sentiment local, au travers d’un processus mental collectif. Brunet (Brunet, 1990) nous a instruit que la prise en considération du seul espace vécu a montré ses limites et que l’émergence d’une identité territoriale ne peut pas se résumer à une activité économique, sociale ou culturelle commune dépourvue d’existence politique ou administrative reconnue. La seule facette du vécu au sein du local, n’est ni génitrice, ni constitutive du territoire. En témoignage, l’habitat de résidence secondaire n’est pas obligatoirement concourant à un engagement dans le projet local. Enfin, l’identité territoriale ne se http://isdm.univ-tln.fr réduit pas davantage à une identité politico juridique ou à l’enracinement dans un lieu ; il y faut cela, et quelque chose de plus : une conscience (Brunet, Op.Cit). Il s’agit ainsi de faire émerger un espace politique local (Levy, 1997), dont les acteurs se sentent responsables et où se jouent des relations de pouvoir (Bourdieu, 1980) en vue de son appropriation (Raffestin, 1981).Durkheim, (Durkheim, 1977), p. 138 avance «Pour que les suffrages expriment autre chose que les individus, pour qu’ils soient animés dès le principe d’un esprit » Les modalités de transfert de compétences entre les acteurs De très nombreux rapports nous ont certes éclairé sur les enjeux de l’introduction des technologies de l’information dans les cursus citoyens (C.G.P, 1994,1999), (Lefèvre et Tremblay, 1998) notamment en ce qui concerne l’éducation à l’emploi et à la citoyenneté. Ces rapports soulignaient que l’avènement de la société de l’information allait permettre la prise en compte des besoins des personnes en remettant l’élève au centre du système éducatif, le citoyen au cœur de la démocratie et le client à la base du marché. En même temps si cette société recèle la capacité en son sein de pouvoir universaliser l’accès au savoir et aux richesses culturelles de l’humanité, resserrer le lien social et donne leur chance aux petites sociétés innovantes (Etchegoyen, 1999), il y a loin de la coupe aux lèvres et nos observations au contacts des acteurs et du terrain nous montrent que nous sommes très éloignés d’un développement harmonieux et équilibré et qu’une concurrence effrénée existe entre les territoires. Nous aurons à composer voire nous débattre avec les effets de la crise exceptionnelle que nous traversons, et que personne, experts inclus, n’avait prévu. Selon Franck Sérusclat (1999) « les différentes pratiques tendent à se rejoindre et contribuent à l’élaboration, même dispersée, d’une pédagogie de l’autonomie et de la responsabilité qu’il faut autoriser. ». Les observations formulées par le rapport Sérusclat mentionnent également le fait que "les liaisons non linéaires entre éléments d’information rendent possible l’examen d’une question selon de multiples perspectives.". Par non linéaires, l’auteur entend des informations relatives à un même sujet ou un sujet proche et issues de sources multiples et sans liens apparents. Conjointement à ces observations, l'environnement du territoire et ses composants technologiques, financier, juridique, humain ont muté vers davantage de complexité. Mais, la http://isdm.univ-tln.fr complexification (Wagensberg, 1999) et son corollaire, l’incertitude (Filbet et Tazi, 1999) font peur. Les savoirs requis de la part des acteurs en charge de définir, d’appliquer et de suivre les réalisations d’une politique locale ont également évolué. Sur la base de ces observations, comment orchestrer ces mouvements pour bâtir une intelligence, que nous avons nommée territoriale en référence à un mouvement de développement du local, à partir des ressources localisées en mobilité ou latentes et aux travaux, recherches encours ou terminées que nous menons ? Nous présenterons trois applications dans la 3e partie de notre contribution et ce, à partir de notre expérience les hypothèses préalables à l’engagement ou Comment mobiliser des ressources locales après détecté leurs gisements? 3.Applications en Région Nord Pas de Calais et Midi Pyrénées Nous allons successivement évoquer les travaux, recherches et applications terminées (région Nord Pas de calais) ou en cours de développement (Midi Pyrénées). Les caractéristiques communes à ces recherches, que nous pouvons indiquer, sans prétendre à l’exhaustivité, sont les suivantes : Caractéristique générique -la contribution du doctorant s’inscrit dans une démarche d’intelligence territoriale telle que nous l’avons définie et présentée dans nos publications depuis 1996. -le recours aux NTIC est systématique : logiciel, Internet, moteur de recherche, système d’information, cartographie, traitement de l’information, base de données, etc Information/Processus/Communi cation -la recherche met en relation des catégories d’acteurs locaux de culture différente. -il s’agit de recherches appliquées en relation avec une commande institutionnelle et/ou formalisée. Observation/participation/Rec herche -la recherche est conduite par un doctorant qui ne se limite pas à un rôle d’observateur -la recherche s’inscrit dans un territoire ou un projet de territoire connu. Compétences/échanges/transf erts -le doctorant possède et mobilise plusieurs compétences par exemple : cartographique et géomatique ; économique et logicielle ; technologique et sociologique ; gestion et développement local etc, -la recherche instaure des échanges et communications régulières avec les autres parties prenantes au projet, formalisées et non formalisées. Technologies/numérique/rése aux Nous allons maintenant présenter les deux applications en détails. http://isdm.univ-tln.fr En Région Nord-Pas de Calais : Gérer la complexité (thèse soutenue en 2006 par Philippe Herbaux) En ce début du XXI° siècle, la reconnaissance de l’Etat pour les territoires à forte imprégnation culturelle ou sociale est notoire ; elle permet à ceux ci de retrouver leurs points d’ancrage naturel dans le concept territorial de « pays ». A la nation, disait Renan « qui n’est pas qu’un héritage de gloire et de regrets à partager », le pays reconquiert son caractère inducteur du futur à construire. Porté par les Lois de et décentralisation Loaddt5 notamment celle du 25 juin 1999, le pays est un espace présentant une cohésion géographique, historique, culturelle, économique et sociale. Ce concept réaffirmé réclame des acteurs du local un investissement 5 LOADT : Loi d’Orientation pour l’Aménagement et le Développement Durable du Territoire (portées par les ministres successifs Chevènement, Gayssot, Voynet) certain dans le partage d’un dessein que l’on souhaite porter par le plus grand nombre. Les acteurs locaux impliqués veillent ainsi à établir ou à conforter un environnement préservé des soubresauts de la mondialisation. Or, celle-ci est un fait qui agit sur le local ; le brouhaha exponentiel des informations et signaux obscurcit l’horizon du projet territorial ; il en rend la lecture et l’interprétation problématiques. La volatilité des projets et les changements brutaux des repères fondamentaux au sein du lieu de vie, crée un lieu de doute où tout un chacun s’interroge sur la nature de l’héritage symbolique qu’il veut défendre. Production d’informations, communications et décisions locales Au sein du territoire, l’information est un vecteur à retombée médiologique ; Réalité immatérielle, l’information connaît un cycle et renaît parfois au détour d’un échange « pour se travestir en un signe, un indice ou un symbole » Barthes (1992). Les décideurs du local, élus ou responsables d’organisation ont quelque peine, pour alimenter une réflexion politique, économique ou sociale, à traiter ce flux exponentiel d’informations. Chacun cherche dans le conseil de l’autre, l’avertissement salutaire qui préviendra la tempête en s’essayant dans le même temps à jouer les http://isdm.univ-tln.fr devins d’un avenir complexe et incertain. Le recueil, le traitement puis la mise en perspective des informations du territoire sortent du registre unique d’une compétence individuelle pour bénéficier d’un regard systémique et mutualisé. La « matière information » devient le substrat d’un projet collectif, engendrée et partagée par tous ses acteurs lors des processus de communication engagés ; elle est le vecteur d’un changement de culture. Dans les nouveaux paradigmes des sciences de l’information et de la communication avancés par Le Coadic (2005), celui-ci met en évidence trois révolutions : -le temps de la production de l’information, -le temps de la communication, -le temps de l’usage de l’information. Ces révolutions, toujours selon l’auteur, modifient le paradigme orienté documentaliste vers un paradigme orienté usager, remplacent également la gestion de « stock » d’informations vers une gestion des flux d’informations et enfin, transforment la gestion des savoirs individuels en gestion des savoirs collectifs. Cette nouvelle posture paradigmatique orientée vers les usagers, flux et savoirs collectifs selon Le Coadic (Op.Cit. § préc.), fonde alors, d’après nous, de nouvelles postures de recherche aptes à cerner les nouveaux contours du complexe territorial. Le territoire se doit de prendre en compte ces évolutions de flux communicants pour mieux servir le modèle qu’il souhaite promouvoir. Incertitude et bornage l’action territoriale de Le pays ne doit son existence que par la mise en commun d’un dessein partagé. Il assure à sa population la volonté de défendre l’enclos du local et à en prévenir les cahots ; il est porteur d’une vision du futur qui donnera à chacun un peu de mieux être dans une identité plus forte. Pour ce faire, il doit traiter de façon efficiente les embûches du projet et mieux, les anticiper ; or, le torrent exponentiel des données à recueillir et à traiter devient un exercice individuel périlleux pour le décideur. Cette problématique du quotidien est de plus, amplifiée dans un contexte d’incertitude où le recours systématique au principe de précaution peut aboutir à une caricature de gestion. Si la « matière information » au sein du local peut être identifiée et ainsi analysée, les signaux, matériaux précurseurs d’information, ne sont pas toujours pris en compte dans leur mise en perspective. Trois raisons principales l’expliquent : http://isdm.univ-tln.fr -Le décideur ne peut à lui seul capter et synthétiser la totalité du champ offert, -Le recours volontaire au principe de cécité peut parfois être considéré comme un impératif d’accompagnement de certaines décisions. -Ou alors la démarche de mutualisation des signaux et informations semble de nature trop complexe à mettre en œuvre par les élus au sein du territoire. Dans ce dernier cas, la capacité des organisations à poursuivre des chemins de décisions parsemés de pièges tient parfois de la pertinacité6. C’est ainsi que les politiques locales risquent d’évoluer entre les bornes de la réactivité et du principe de précaution ; ce faisant, elles ne font qu’adopter le profil minimal d’une mission à caractère statique (principe de précaution) ou d’intervention de secours (réactivité à une rupture). La posture d’anticipation, soit de pro-activité, n’est pas pour l’instant inscrit dans le quotidien des habitants du local. Elle s’illustre néanmoins au sein des communes et territoires pour 6 « L’esprit d’entreprise suppose l’imagination qui fait concevoir un projet, la volonté qui porte à sa réalisation, la pertinacité qui entête dans sa poursuite… » Bertrand de Jouvenel, notes inédites, in Bertrand de Jouvenel, itinéraire 1926-1976, p.27 Eric Roussel, Plon. 1993. les acteurs majeurs et élus, dans les secteurs bénéficiant d’une démarche qualité (cantine scolaire, sécurité des bâtiments, surveillance des feux de forêts). On peut constater que ces dispositifs de nature institutionnelle n’associent pas ou peu la population à ces problématiques. Or, l’accélération des menaces pesant sur le local comprime de façon dramatique les temps de réflexion nécessaire à une décision circonstanciée. Un traitement anticipatif fondé sur une mutualisation récursive des savoirs individuels offrirait les conjectures nécessaires au moment demandé. L’institution se cantonne ainsi dans un double rôle d’assureur et de responsable pour des phénomènes dont elle ne peut bien souvent déceler à elle seule, les signes précurseurs. On peut constater alors, que la principale préoccupation des élus en charge de ces responsabilités consiste en l’atténuation de leur responsabilité au détriment du problème en cause. Au sein de l’espace territorial défini comme endogène, le recueil des signaux et leur coagulation dans un ensemble de conjectures peuvent difficilement être confiés uniquement à des organismes tiers ; la multiplicité des menaces et des ruptures possibles offrent autant d’expressions de signaux complexes dont leur déchiffrage intéresse en premier lieu l’habitant du local. Les signes de crises dans http://isdm.univ-tln.fr certaines entreprises sont autant de facteurs d’amont bien souvent invisibles pour un observateur extérieur. Dans cet enclos du territoire où l’accélération des informations et des menaces sape le projet partagé, le pays peut-il faire l’impasse d’un schéma de mutualisation de l’information pour servir le dessein qu’il prétend défendre et adopter les processus de communication adéquats ? Le cadre conventionnel de la recherche-action : avantages et limites Les travaux de recherche-action conduits depuis 2001 sur l’environnement régional Nord-Pas de Calais, ont intéressé plus particulièrement un échantillon de ce territoire englobant la métropole lilloise, les pays de la Pévèle ainsi que les pays de l’Audomarois. Ils visaient à essayer d’apporter des éléments de réponse dans la mise en œuvre d’un schéma d’intelligence territoriale et de poser les questions de son efficience. Les travaux réalisés dès 1999 au sein de la cellule « intelligence territoriale » de l’université Lille2 constituaient alors un lieu balbutiant de ressources régionales Nord-Pas de Calais en matière de traitement de l’information et de la communication. Bien que les problématiques d’anticipation des menaces au sein du monde économique fussent un leitmotiv de travaux, le rôle de la transmission de l’information et de l’impact des technologies de l’information et de la communication (TIC) sur le tissu économique régional constituaient un champ de questionnement permanent. Une convention fût signé entre l’Etat et Université Lille – Droit et Santé- en date du 19 juillet 2001, et validée par le Secrétariat Général aux Affaires Régionales. Le chemin du projet et les actions associées : un processus réciproque d’apprentissage et de territorialité. L’aptitude à gérer une tâche ou une mission fait de l’opérateur un partenaire capable de s’inscrire dans un projet. Dans le cas de l’expérimentation, la posture constructiviste prise par l’opérateur dans la mise en oeuvre du projet, constitue un ensemble de décisions-renoncements aptes à faire évoluer le projet dans un sens ou l’autre. La réflexion de Bachelard (1971) « marcheur, le chemin se fait en marchant » est ici de circonstance. Le jeu de l’acteurobservant fut une source permanente de questionnements sur le fond et la forme, sur le pourquoi ?et le comment ? sur le poids de l’individuel et du collectif. Les limites de cette recherche http://isdm.univ-tln.fr s’inscrivent dans l’observation de l’évolution de la culture du territoire à travers sa capacité à échanger et à capitaliser l’information ; elles en épient les dimensions nouvelles provoquées par l’utilisation mutualisée des TIC et du lien sociétal que le territoire prétend réactiver. Les hypothèses l’expérimentation de Les recherches menées dans ce cadre ne se marquent pas dans un modèle établi de transmission des connaissances mais plutôt dans l’observation de démarches concourantes qui établiront les modalités de mutualisation des connaissances. Pour cela, nous avions posé au préalable trois hypothèses de travail associées à une hypothèse de synthèse: Hypothèse 1 : la perception des menaces et des futures ruptures est effective pour les acteurs et la population du territoire. Hypothèse 2 : les techniques de l’information et de la communication (TIC) sont incontournables d’une démarche de mutualisation de l’information au sein du territoire. Hypothèse 3 : le processus d’intelligence territoriale est en rapport avec un traitement prioritaire de l’information sur les champs économiques. L’hypothèse de synthèse : ‘L’intelligence territoriale se situe, au sein du territoire, entre information processus de communication’. et En région midi Pyrénées La contribution de l'information géographique à un projet territorial: entre participation & évaluation des usages' (thèse à soutenir en 2010 par Pierre Maurel) Une gouvernance territoriale de plus en plus intégrée et participative Deux tendances, soutenues par le Droit national et international, caractérisent les modalités actuelles de gouvernance territoriale : la gestion intégrée et la démocratie participative. - Gestion intégrée car les territoires sont de plus en plus traités sous l’angle élargi du développement durable - Démocratie participative car les acteurs concernés et les populations peuvent largement contribuer aux processus de planification et de gestion territoriale, soit par le biais de procédures participatives institutionnalisées, soit de manière spontanée et ascendante, soit encore par un mélange des deux approches. L’importance de la dimension géographique et des représentations spatiales http://isdm.univ-tln.fr La dimension physique et virtuel est en effet omniprésente dans la gestion des territoires : l’espace physique supporte et contraint les ressources, renouvelables ou pas, à préserver, à exploiter et à partager, les représentations interagissent avec le territoire physique. Nous avons alors fait l’hypothèse que l’espace géographique pouvait jouer un rôle d’intégrateur des connaissances dispersées chez différents acteurs, de support de réflexion sur la complexité du système territorial, ses composantes et leurs interrelations. Nous pensons qu’il peut également jouer un rôle de médiateur entre des acteurs (élus locaux, représentants d’associations ou de professions, fonctionnaires de l’Etat ou de collectivités territoriales, résidents, ….) qui entretiennent des relations très différentes à l’espace. L’appréhension de la réalité d’un territoire par le biais de représentations Notre position épistémologique est celle du constructivisme avec le parti du postulat que le rapport des gens à la réalité se faisait par le filtre de représentations cognitives et externes représentations qui peuvent éventuellement être échangées, confrontées, partagées avec les autres par des signes multiples qui relèvent communication. de la Le territoire, vu comme une construction sociale Une des définitions du terme « territoire » à laquelle la recherche se réfère est celle proposée par Roger Brunet (Brunet - 1990) : « Un espace géographique socialisé qui fait l’objet de sentiments d’appartenance et d’appropriation... Il tient à la projection des structures spécifiques d’un groupe humain, qui incluent le mode de découpage et de gestion de cet espace et son aménagement. C’est une notion à la fois juridique, sociale et culturelle, et même affective. Il contribue en retour à fonder cette spécificité, à conforter le sentiment d’appartenance. Il n’y a donc pas un territoire, mais des territoires, suivant que l’on privilégie l’un ou l’autre de ces aspects ». Nous proposons d’appréhender le territoire sous trois plans (physique, conceptuel, identitaire), chacun de ces plans faisant l’objet de représentations différentes selon les individus ou les groupes d’acteurs considérés. L’émergence et le maintien de territoires identitaires, au sens de Brunet Op.Cit, est un processus long qui peut résulter de dynamiques locales mais aussi de réponses à des injonctions par des http://isdm.univ-tln.fr autorités politiques ou administratives, notamment celles chargées de la planification et de l’aménagement des territoires (ex : DIACT au niveau national, Conseils Régionaux à un niveau plus local). Des outils réglementaires encadrent de manière plus ou moins stricte les processus d’élaboration de projets territoriaux et peuvent contribuer à l’identité des territoires : projet de Pays, Schéma de Cohérence et d’Orientation Territoriale, projet de Parc Régional, Pôles d’excellence, … Le processus socio-technique permet de décrire et analyser la capacité des sociétés à résoudre des problèmes (ici territoriaux) de manière collective. Ce type d’apprentissage repose sur un certain nombre de principes : -La nécessaire prise en compte du contexte dans lequel émerge et se déroule le projet : jeux d’acteurs, enjeux, conflits, habitudes en matière de gouvernance, procédures de régulation, maîtrise technique d’outils, capital de connaissances et d’expertise,... ; -La prise de conscience collective de la complexité du système et des interrelations, d’enjeux qui transcendent le syndrome NIMBY (Not In My Back Yard) – approche systémique ; -L’acceptation de la diversité des points de vue, des enjeux et des intérêts ; -La nécessité de coopérer pour résoudre de manière collective des problèmes en s’appuyant sur des connaissances et des savoirs-faire répartis (experts et profanes) – cognition distribuée ; -La nécessité d’intégrer dans le processus des phases réflexives pour prendre conscience et analyser les changements progressifs dans le mode de gouvernance – Apprentissage de 2ème niveau. L’interfaçage entre les dimensions techniques et sociales du projet s’obtient par l’intégration les trois étapes habituelles de l’action : un contexte (et ce que l’acteur ou les acteurs en perçoivent), le processus d’action lui même dont l’objet varie tout au long de la vie du projet (ex : diagnostic de la situation, scénarios possibles, choix et mise en œuvre d’une solution, suivi/évaluation) et le résultat de cette action. Dans le cas d’une action collective, les acteurs interagissent les uns avec les autres s’opposent, discutent, se coordonnent. Ces dynamiques sont rendues par l’élément « pratiques relationnelles » qui, est incluse dans le processus lui-même, ces échanges impliquant toujours une activité de la part des acteurs. Ces pratiques relationnelles comme les actions effectivement réalisées répondent à un certain nombre d’enjeux identifiés. http://isdm.univ-tln.fr Loin d’être un processus linéaire, la décision et l’action s’inscrivent ici dans une double boucle itérative. La première à l’intérieur même du processus permet de rendre compte de la complexité et de l’évolution même de la décision et de la mise en œuvre de cette décision autour des enjeux sociaux et matériels identifiés et promus par les acteurs. La seconde boucle illustre le fait que le résultat d’une action élémentaire ou d’un processus global change et modifie toujours le contexte de l’action suivante. Ce schéma d’analyse qui décline les processus de gestion collective sous la forme d’un apprentissage collectif peut être décliné en autant de processus élémentaires que de besoin. Ces processus élémentaires ont la même structure. Ils s’articulent pour former un processus global. Tout se passe comme si cette grille de lecture était une structure maintes fois répétée de l’élément (un événement particulier dans la construction d’un projet de territoire) à la superstructure (le projet dans son ensemble). Dans un contexte de développement territorial plus intégré et plus participatif, l’organisation des conditions de participation des acteurs devient fondamentale. Nous avons travaillé sur cet aspect essentiellement dans le cadre du HarmoniCOP. projet européen Concevoir et organiser un processus participatif de grande ampleur revient à mobiliser tout au long du projet différentes catégories d’acteurs (élus, services techniques de l’Etat et des collectivités territoriales, experts et scientifiques, acteurs économiques, associations, grand public, …) à différents niveaux de participation (sensibilisation, information, consultation, concertation, suivant l’échelle de la participation d’Arstein, 1969). Cette recherche sur l’organisation de processus participatifs basés sur l’apprentissage collectif a fait l’objet d’un guide méthodologique multilingue.7. Le système d’information en appui au développement territorial participatif, vu comme une construction sociale Le système d’information qui accompagne un processus participatif de construction de projet de territoire englobe les aspects informationnels (données et documents sur supports analogiques ou numériques), les aspects humains (ressources et compétences pour la production et la gestion des informations), les aspects techniques et informatiques, les aspects institutionnels (partenariats autour du système d’information), les aspects réglementaires (pour l’accès et la diffusion des informations). Le système d’information est vu comme une architecture distribuée (par opposition à une architecture centralisée) de sous-systèmes d’information répartis au sein de réseaux d’acteurs et capables d’échanger entre eux des données et des informations. Le SI d’information global peut être vu comme un objet immatériel d’accumulation du capital de données et d’informations mises au service du projet par les partenaires ou produites aux différentes étapes du projet. Ces données et ces informations qui alimentent les processus socio-techniques (synchrones ou asynchrones, processus P3 dans la figure précédente) de construction du projet de territoire sont véhiculées au moyen de différents outils ou artefacts d’information et de communication : Sites Web, catalogue de méta données sur un portail Web, système d’information géographique (SIG), diaporamas de présentation, cartes etc 7 La version en anglais du guide (HarmoniCOP Handbook) est téléchargeable sur le site http://www.harmonicop.info/ http://isdm.univ-tln.fr Les objectifs de la Recherche L’objectif général de la thèse de Pierre Maurel est d’analyser les différents usages de l’Information Géographique en appui aux projets territoriaux participatifs et d’évaluer leurs effets. Ce sujet s’appuie sur trois hypothèses : Hyp 1: L’information géographique, sous ses différentes formes, peut satisfaire plusieurs types d’usages : substantifs, relationnels et procéduraux. Hyp 2: L’information géographique permet de mettre en perspective et d’intégrer différents savoirs, scientifiques, techniques ou ordinaires. - Hyp 3 : en France, les concepteurs de processus participatifs dans des projets territoriaux n’intègrent pas comme acte intentionnel et finalisé le choix d’outils d’information et de communication. Assise théorique méthodologique et La thèse s’appuiera sur une recherche bibliographique pour compléter l’assise épistémologique et méthodologique des recherches déjà menées et évoquées ci-dessus : Théoriques : paradigme constructiviste, cognition distribuée, sémiotique, sociologie des objets, etc, - Méthodologiques, sur la place du chercheur dans un dispositif de http://isdm.univ-tln.fr recherche en partenariat et pour le recueil et l’analyse de données. Outils et méthodes Outils d’information et de communication à composante géographique :Si les outils que nous souhaitons étudier existent déjà, il y en a qui sont peu utilisés alors qu’ils nous paraissent présenter un potentiel original en terme d’usages et d’effets. Il s’agit notamment : - d’outils Web de catalogage de ressources informationnelles distribuées au sein d’un réseau d’acteurs (ex : outil MDWeb http://www.mdweb-project.org/) ; - d’outils Web de recueil d’avis sur support cartographique lors des phases de consultation du public ; - de maquettes physiques en 3D Méthodes pour caractériser les situations d’usage L’analyse intègrera les différentes composantes d’une situation d’usage : contexte initial, conditions d’émergence de l’outil, (co)conception ou (co)adaptation éventuelle de l’outil et du protocole d’usage, usage proprement dit. Méthodes pour évaluer les effets des usages Nous utiliserons les grilles d’évaluation mises au point à l’occasion des projets HarmoniCOP et CDE en les adaptant pour intégrer les résultats de la bibliographie. Méthodes de validation de la démarche suivie et des résultats Il s’agira tout d’abord de rechercher des régularités dans les résultats. Terrain principal d’étude Le terrain principal sera celui du territoire de Thau (34) sur lequel est en train de se mettre en place de manière coordonnée un Schéma de Cohérence et d’Orientation Territoriale (SCOT) et un Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SAGE). Conclusion : de l’Information et de la veille territoriale à l’intelligence territoriale En conclusion temporaire : une évolution de la posture informationnelle. Nous allons revenir, le temps de cette conclusion, sur la période couverte par nos recherches, travaux depuis plus de dix années. Cette capacité collective, l’intelligence territoriale, du territoire à anticiper les ruptures qui vont l’atteindre, nécessite la mise en œuvre d’une évolution de sa culture. Cette modification des relations et des échanges, une logique de projet, doit alors s’adosser à un autre traitement des signaux et des informations. Communiquer différemment en participant à un projet commun agit sur les liens http://isdm.univ-tln.fr individuels et modifie le rapport à l’autre ; ainsi la relation d’échange sort du quotidien pour accéder à une altérité du projet partagé puis il y a capitalisation et valorisation individuelles des missions ; cette mutualisation et mise en perspective des conjectures, sont autant d’opinions fondées sur les analyses d’hypothèses qui assurent un flux continu et interactif, formel et sémiologique d’une relation au groupe. La culture des organisations prend alors, par son aspect récursif, un caractère durable. Tout est affaire de sens. Au niveau de l’action de l’objet et dans l’identité acquise par l’acteur territorial ; il constitue ainsi un paradigme du sens et d’identité. Ainsi, la dynamique territoriale tire son existence de la complexification de ses réseaux agissant dans le débat social et l’énergie mise en oeuvre permet de faire évoluer un objet territorial nouveau. L’innovation territoriale endogène se nourrit de signaux internes et de flux d’informations externes. Il s’agit de capter des flux de données à traiter en continu pour dépister à temps la menace et éventuellement saisir l’opportunité. Les réponses collectées offrent un faisceau de nouvelles pistes à explorer dans le concept de mutualisation des connaissances. Cette capitalisation des signes et informations mise en perspectives, offre au local des futurs possibles aptes à déjouer la menace où l’incertitude. La création de cette posture d’anticipation porte en germe les attributs d’un outil démocratique partagé par les acteurs du local, les associant plus intimement à une vision stratégique territoriale. Le terme acteur, par la ressource partagée, prend alors tout son sens. Le Chercheur, dans notre conception, devient acteur du territoire. L'information territoriale ne prend sens et utilité que dans le contexte d'une communication entre compétences locales. Que cette communication ne peut se faire que dans un contexte cognitif, car l'information elle-même, composante de la communication, est fonction des structures cognitives, de leur mode de fonctionnement et de leurs niveaux d'abstraction. Enfin, la communication dépend aussi de notre rapport avec le temps et de notre capacité à nous aligner sur le temps exogène, -le temps des autres-, et de nos interactions avec l'environnement. On peut donc écrire que la communication s'inscrit dans une dimension d'espace-temps où l'information prend son sens dans un contexte d'interaction. Cette constatation montre tout l'intérêt d'identifier les modèles cognitifs des acteurs territoriaux pour pouvoir traiter de http://isdm.univ-tln.fr la communication dans le contexte de la concertation et susciter les interactions territoriales à la base du concept d’intelligence territoriale. Le territoire devient un lieu de ressources où les acteurs interviennent dans un jeu de pouvoirs construit autour des enjeux d'appropriation Sfez (Op.Cit), de légitimité, d'identité et qui, inévitablement, nécessite la résolution de conflits émergents dans le contexte de la concertation territoriale. Nous avions avancé l’hypothèse que la définition d’un système de veille territoriale et la pratique de celui-ci par les acteurs territoriaux pouvaient favoriser la concertation territoriale. Pour arriver à une résolution possible de ces conflits, la solution envisagée doit prendre en compte la problématique de la mise en réseau du couple "individu - collectivité", car c'est dans la résolution de cette problématique que résident les bases de la régulation sociale des interactions sur le territoire. Nous pouvons en tirer trois constats: -La concertation territoriale s'appuie sur le principe d'un «modelage mutuel d’un monde commun» par l'acte de communiquer, véritable «réseau de gestes conventionnels», Tetu, (1995) dans un jeu de recherche de communauté d'intérêt et d'affirmation d'identité. -L’objet territorial, qu'il soit physique, abstrait ou symbolique, joue un rôle central et permet de matérialiser le lien social et ses enjeux éventuels entre les acteurs sur le territoire. -La définition d’un système de veille territoriale est souhaitable s’il peut aider les acteurs locaux à la compréhension réciproque par l’apprentissage via l’instauration d’un réseau physique et/ou virtuel de compétences locales. Dans cette approche, nous avons privilégié la mise en valeur des éléments territoriaux. Les objets territoriaux sont d'abord des constructions humaines que ce soit dans leur représentation, physique ou virtuelle ou dans leur réalisation effective. Ils sont donc toujours, pour nous, associés à un sens, une logique, une histoire (Bertacchini, Op.Cit) Mais ils sont aussi objets de ressource pour les acteurs. Pour rendre compte du phénomène d'appropriation-constructionterritoriale, nous avons choisi de nous référer à un méta-modèle (Schwarz, Op.Cit). En effet, le territoire est avant tout un systèmeespace de ressources pour les acteurs, donc est sujet à appropriation. La concertation suscitée et apprise par une politique de développement adaptée au contexte local peut favoriser cette appropriation. La multiplicité des éléments d’information et l’objectif http://isdm.univ-tln.fr du transfert des connaissances entre les acteurs locaux, nous conduisent à imaginer un système de veille territoriale. La définition et la conception d’un système de veille territoriale peuvent aider au rapprochement des catégories d’acteurs locaux et mobiliser autour d’un tel projet en multipliant les occasions d’échanges et d’interactions. A notre sens l’élaboration de ce système d’information et de veille territoriales ou d’un réseau de cette nature peut favoriser la rencontre, la coordination et le transfert des compétences disponibles localement. Parce que sans ce transfert, le potentiel du territoire c’est-à-dire son passé et sa mémoire disparaîtront au rythme de fragmentation de ses parcelles et de la vitesse de nomadisation de ses citoyens. Tout en renforçant les exclusions que nous avons précédemment nommées : culturelles, économiques et technologiques. Nous pourrons par ailleurs constater que ce choix de présentation permet de mieux définir la notion de territorialité, ses dimensions et les pratiques sociales qui lui sont associées. Car, si nous pensons que c'est la territorialité, véritable phénomène informationnel, qui permet de transformer l'espace en territoire ce dernier, ne peut être construit qu’à l’aide du transfert des compétences locales identifiées. Or, la constitution des gisements de compétences et leur transférabilité repose sur l’engagement croisé et l’accompagnement des acteurs locaux. Mais dans un monde de mobilités et de compétition mondiale, un défi sans cesse renouvelé nous attend dès lors qu’un projet territorial nouveau est décidé. Eléments bibliographiques Ardoino, J., (ouvrage coll.), « Vers la multiréférentialité » in Perspectives de l’analyse institutionnelle, MéridiensKlinksieck, 1988, Paris. Arstein S. R., “A ladder of citizen participation in the USA”, Journal of american institute of planners, vol 35, 1969, p. 216-224. Aubert, N., (sous la direction de), L'individu hypermoderne, Edition Erès, coll. Sociologie Clinique, 2004. Bachelard, G., La formation de l’esprit scientifique, Paris :Vrin, 1971. Bertacchini, Y., « Du gisement des compétences locales & de leur transfert : quelles modalités ? », Questions de Communication, série Actes 3.2006, Formes de l’engagement & espace public, pp.437-447, septembre 2007. 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