senso e metropoli
19-09-2006
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Senso e metropoli
Per una semiotica della città
a cura di
Gianfranco Marrone e Isabella Pezzini
MELTEMI
senso e metropoli
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Indice
p.
7
Presentazione
Parte prima
Problemi teorici
13
La natura cartografica della città
Franco Farinelli
19
Il senso delle forme urbane
Pierre Pellegrino, Emmanuelle P. Jeanneret
31
Di città in città, da romanzo a romanzo. Leggere e narrare le città
Gabriella Turnaturi
39
Visioni di città e monumenti-logo
Isabella Pezzini
Parte seconda
Trasformazioni storiche e panorami contemporanei
51
Organizzazione dello spazio nei nuovi territori dell’arcipelago metropolitano e
processi di socializzazione
Francesco Indovina
61
La moda e la città: metafore della strada
Patrizia Calefato
69
La scena multimodale
Giovanni Anceschi
73
Città collage: conflitti di senso nei territori metropolitani, fra risemantizzazioni e
travestimenti
Paola Bonora
77
Spazi e non spazi: le articolazioni della consumosfera
Mauro Ferraresi
senso e metropoli
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Parte terza
Letture di città
91
Le sens de transformations urbaines: le cas de Tadmor-Palmyre
Manar Hammad
109
Mediterraneo: identità e border crossing fra terra e mare
Patrizia Violi, Andrea Tramontana
131
La metropoli tra set e palcoscenico.
Figure della città nel cinema italiano degli anni Trenta
Ruggero Eugeni
137
L’ovvio, la guglia e la camera troppo chiara. La Mole Antonelliana, Torino
Guido Ferraro
143
Arezzo: una città decapitata
Piero Ricci
149
Variazioni sull’architettura di Los Angeles e Las Vegas: dal segno all’icona al tema
Giovanna Franci
Parte quarta
Quattro laboratori
159
Mappe e rappresentazioni: città descritta e ritratti possibili
Ruggero Ragonese
171
Zone, frontiere, confini: la città come spazio culturale
Franciscu Sedda, Pierluigi Cervelli
193
Etnografia urbana: modi d’uso e pratiche dello spazio
Maria Pia Pozzato, Cristina Demaria
211
Luoghi pubblici e spazi commerciali: nuove forme di messa in comune del territorio urbano
Federico Montanari
217
Bibliografia
Palmyre, le sens des transformations urbaines
Présupposés et énonciation
Manar HAMMAD
ESIT, Paris III
0.
Remarques liminaires
Inscrit entre un travail antérieur1 et une suite en cours d’élaboration consacrée à la ville
antique de Palmyre, ce texte développe les conséquences d’une idée peu répandue dans les milieux
sémiotiques : celle de l’analyse énonciative des énoncés non-verbaux. Dès 1986, nous avons donné
une démonstration serrée de la possibilité d’une telle démarche2. Nous en tirons ici des conclusions
archéologiques et historiques, illustrant les possibilités pratiques devenues atteignables grâce à cette
idée théorique. De l’architecture, nous montrons qu’il est possible de tirer des conclusions non
triviales relatives à la manière de penser la ville et le territoire urbain, comme à la manière de penser
les relations de la ville avec ses voisins. Directement liées aux catégories de l’actorialisation, de la
spatialisation, et de la temporalisation (je, ici, maintenant), ces conclusions s’inscrivent dans le cadre
d’une énonciation énoncée analysée à l’aide des concepts narratifs3.
À Palmyre, la ville
matérielle observable est
la trace d’un processus
de stratiication long de
plusieurs
millénaires :
divers groupes sémites
dits Amorrites, Araméens,
Assyriens, Arabes… dont
la succession cumulative
constitue le fonds de la
population locale, ont été
suivis par des éléments
Grecs, Parthes, et Romains
dont l’empreinte culturelle
s’avère marquante. En
regardant l’allure de la ville,
on conclut que l’inluence
culturelle des derniers arrivés aurait modelé le bagage des premiers installés. Les vagues anciennes
du substrat humain n’ont pas déterminé l’expression des manifestations architecturales qui nous
sont parvenues. En d’autres termes, la culturogenèse de Palmyre ne relète pas son ethnogenèse.
Un décalage parallèle entre facteurs ethniques et culturels est manifesté par les usages
linguistiques de Palmyre : on y trouve près de trois mille inscriptions lapidaires en araméen, moins
Palmyre, le sens des transformations urbaines
1
Manar HAMMAD
de cinq cents en grec, un petit nombre en latin. Une hypothèse implicite, héritée du dix-neuvième
siècle et peu discutée, amène certains auteurs à supposer l’existence d’un groupe ethnique à partir du
constat de l’utilisation d’une langue4. Cependant, le bilinguisme des inscriptions palmyréniennes ne
devrait pas fausser la perspective. Car l’étude des noms propres attestés témoigne du petit nombre
des Hellènes dans cette ville, où la langue grecque est une langue de culture et d’expression politique.
L’onomastique témoigne aussi qu’une part appréciable de la population a été arabophone, à une
époque où la langue arabe ne s’écrivait pas encore : ce groupe n’a pas pu laisser d’inscriptions dans la
langue qu’il parlait. En bref, le bilinguisme épigraphique masque un trilinguisme verbal des habitants
et ne témoigne pas de la composition ethnique de la population.
Dans ce contexte historique, nous partirons des restes du monument le plus ancien de la
Palmyre qui nous ait été conservée, le sanctuaire de Bel, ain d’extraire de son architecture des
éléments susceptibles d’éclairer le processus de développement de la ville. Nous prendrons le terme
Ville sous les deux acceptions que lui reconnaît la langue française : la ville comme groupe humain
inscrit dans l’espace social, et la ville comme agglomération urbaine inscrite dans l’espace physique.
Entre le social et le physique, nous essaierons de repérer les organismes de gestion, les manières de
penser et de faire. Exposée en ses deux aspects aux inluences concomitantes des puissances voisines
et des populations locales, la ville traduit dans ses structures et ses formes l’équilibre dynamique qui
lui a permis de prospérer entre le premier siècle avant l’ère commune et le troisième siècle de celle-ci.
1.
Documents retenus
Tout en étant le plus ancien bâtiment observable, le sanctuaire de Bel5 est aussi le plus
important du point de vue de la taille, du style, et de la complétude. Les fouilles6 ont montré
que ce temple fut précédé
par un autre plus ancien
dont on a retrouvé des
fragments. Des sondages
récents7 effectués dans le
téménos à l’Est du temple
ont mis au jour des bases
de colonnes hellénistiques
appartenant à un état
antérieur du sanctuaire.
La reconstruction du
sanctuaire s’est faite à une
échelle inusitée : la ville
fut évacuée et le sanctuaire
occupa toute l’acropole. La
ville expulsée se développa
dans la petite plaine
située entre le tell et les
collines occidentales. Son
évolution et sa croissance
furent contemporaines des
chantiers du temple de
Bel puis de son péribole.
Ces deux développements
Palmyre, le sens des transformations urbaines
2
Manar HAMMAD
concomitants (le sanctuaire, la ville) ont exercé
une inluence l’un sur l’autre, même s’il n’y a
pas eu une coordination géométrique stricte.
D’où surgit une question intéressante : est-il
possible de repérer un lien entre les formes de
la ville et l’activité du temple ?
Le temple ayant un rôle rituel en
premier lieu, nous avons été amenés à étudier,
à partir de l’architecture, les rites repérables
et reconnaissables8. À ce corpus non-verbal
(sanctuaire, ville, rites), il est nécessaire
d’associer le corpus verbal des inscriptions,
ain de compléter l’un par l’autre. Le catalogue
des inscriptions araméennes de Palmyre9 de
Hillers et Cussini se voulait exhaustif au moment de sa préparation. Les trouvailles et publications
ultérieures l’ont rendu incomplet. Il n’en reste pas moins très commode pour l’étude des textes,
pourvu qu’on lise l’Araméen10. Si le contenu dédicatoire, honoriique ou funéraire11 de la majorité
des inscriptions n’offre que peu d’intérêt direct pour l’étude des formes physiques de la ville, il nous
informe sur sa forme sociale, en particulier sur ses structures familiales, claniques, économiques…
2.
Présupposés sémantiques de la reconstruction du sanctuaire de Bel
La reconstruction du sanctuaire de Bel fut une opération complexe dont la réalisation exigea
une vingtaine d’années pour la cella, et plus d’un siècle pour le téménos et le péribole. Elle constitue
un acte performatif susceptible d’être soumis à l’analyse sémantique.
2.1 Présupposés de l’acte de reconstruction
La re-construction d’un sanctuaire en activité n’est jamais un acte dénué de raisons. L’usure
et la vétusté de la structure antérieure sont parfois invoquées comme justiication : ainsi, Alexandre
entreprit de reconstruire la grande ziggourat de Babylone. Il n’est cependant pas dificile de lire,
dans le geste du conquérant macédonien et sous les pieuses motivations afichées, un projet politique
visant à lui rallier les populations locales assujetties. En d’autres circonstances et d’autres lieux, la
destruction et/ou la profanation de la structure antérieure furent invoquées : à Athènes, c’est le
saccage mède de – 480 EC qui fut mis en avant. On proita de l’occasion pour gommer toute
référence orientalisante12 et pour afirmer le style grec. À Jérusalem, au pillage et à la profanation
d’Antiochos IV en – 168 EC répondit la re-consécration du Temple en – 165 EC. Une nouvelle
dédicace à Yahvé fut ressentie comme nécessaire pour effacer l’intermède de la consécration à Zeus
Olympios.
Dans une telle perspective, il est logique de supposer que la reconstruction du sanctuaire de
Bel a été motivée, ne serait-ce que partiellement, par l’équipée infructueuse des cavaliers d’Antoine
en – 41 EC. La ville avait été évacuée, nous rapporte Appien13. Les temples, qui étaient les lieux
ordinaires de conservation des trésors collectifs des villes, furent certainement « visités » par des
soldats intéressés. La réparation de ce qui a pu paraître comme une profanation a pris l’allure d’une
reconstruction complète avec agrandissement. À l’appui d’une telle hypothèse, on peut citer l’intérêt
impérial romain, exprimé en 19 EC par la dédicace au sanctuaire de Bel d’une triple sculpture
représentant Tibère, Drusus et Germanicus. Or le temple ne fut inauguré qu’en 32 EC comme nous
Palmyre, le sens des transformations urbaines
3
Manar HAMMAD
l’apprend une inscription. Par conséquent, la dédicace impériale eut lieu en plein chantier, ce qui
fait supposer14 une contribution inancière romaine à l’œuvre d’édiication. Susceptible d’expliquer
en partie la célérité avec laquelle l’édiice fut achevé, cela inscrirait la reconstruction du temple de
Bel dans un processus de restauration de relations contractuelles entre le pouvoir central romain et la
ville périphérique de Palmyre postée aux conins de l’Empire.
L’acte de reconstruction du temple de Bel ne s’inscrirait donc pas uniquement sur la seule
dimension religieuse. Son volume, son style, les offrandes reçues témoignent de son inscription
simultanée sur la dimension politique. Il pouvait dificilement en être autrement : l’autorité impériale
pratiquait les cultes oficiels sur l’étendue de l’empire, tout acte politique devait recevoir une caution
religieuse, et tout geste religieux accompli à l’échelle d’une ville avait une incidence politique.
Replacée dans l’enchaînement des événements, la reconstruction du temple de Bel manifeste
les articulations d’une opération sémantique de dénégation (négation d’une négation, soit une
assertion forte) : sur le plan religieux, la re-consécration succéderait à une profanation ; sur le plan
politique, l’acte de donation succède à un acte de pillage. La reconstruction donne l’occasion de
développer, dans la pierre et en des termes non verbaux, le noyau dur d’une igure mythique, celle
du rétablissement de l’ordre après l’intrusion d’une perturbation. En résumé, on peut donc y lire, sur
le plan religieux, la restauration de la relation contractuelle entre une communauté et ses dieux, et
sur le plan politique, la restauration de la relation entre un territoire périphérique et un empereur.
2.2 Présupposés de la taille du sanctuaire
La taille du sanctuaire de Bel est signiiante. Il constitue la structure la plus grande de la ville15
qu’il domine de sa masse. À l’échelle régionale, il n’est comparable qu’aux sanctuaires de Baalbak,
qui lui sont postérieurs de plusieurs décennies. Au moment de sa construction, il apparaissait
comme le plus grand de la région. Il en découle que le temple de Bel ne peut avoir été conçu comme
le temple d’une petite ville provinciale. Occupant la surface du tell qui avait abrité la ville entière, le
téménos est capable d’accueillir la totalité de la population urbaine. Il pourrait même accueillir une
foule extra-urbaine pour un rite de circumambulation tel que le pratiquent les Sémites.
La construction d’un sanctuaire de cette taille équivaut à un acte énonciatif adressé par les
palmyréniens aux autres, i.e. aux populations extérieures à la ville, tant celles de la Palmyrène que
celles de Syrie et de Mésopotamie. Ce faisant, Palmyre se positionnait dans un univers dépassant
son territoire propre. Un parallèle pris dans la même région, mais emprunté à une autre époque, est
éclairant. Le chroniqueur Ahmad al Ya’qubi nous rapporte qu’en érigeant la mosquée dite Coupole
du rocher à Al Quds-Jérusalem, Abd al Malik bin Marwan (685-705 EC) avait l’intention de canaliser
vers Al Quds les lots de pèlerins à un moment où le séditieux Abdallah bin az Zubayr s’était emparé
de Makkat et s’y était proclamé calife. Un projet politique transparaît dans un programme qui aurait
Palmyre, le sens des transformations urbaines
4
Manar HAMMAD
pu se restreindre à celui d’une entreprise religieuse. En l’occurrence, la population invitée à se déplacer
pour prier en ce lieu était l’ensemble des musulmans.
Si un tel modèle est pertinent, sa projection dans le passé invite à déterminer la communauté
destinataire du message palmyrénien. Considérant que le sanctuaire est consacré à Bel, divinité
babylonienne attestée dès le milieu du deuxième millénaire, et que les Parthes installés en Mésopotamie
au deuxième siècle séparent la partie orientale du royaume séleucide de sa partie occidentale, il est possible
de supposer que le sanctuaire de Bel s’adressait à une population régionale qui se rendait auparavant
à Babylone pour ses dévotions et qui s’en trouvait coupée par les circonstances politiques. Palmyre
apparaîtrait dès lors comme une ville prétendant à une primauté religieuse régionale de substitution,
pour une population auparavant orientée vers la Mésopotamie. Une telle description conviendrait aux
populations araméennes de la Palmyrène, dont le commerce attesté par les inscriptions se fait avec la
Mésopotamie. D’autant plus que les palmyréniens se réfugient au-delà de l’Euphrate lorsqu’ils sont
attaqués. Leur mésopotropisme est récurrent.
Récapitulons : Par l’analyse de l’acte édilitaire et de la taille du sanctuaire, Palmyre est
positionnée en relation avec la sphère divine, l’empire romain, et les populations araméennes
alentour. Ce que l’on peut identiier comme les relations extérieures de la ville. Il convient maintenant
d’en examiner l’incidence sur ses structures internes.
2.3 Présupposés de l’évacuation du tell
Si la ville primitive, celle dont les ruines superposées ont constitué le tell (lequel contient des
éléments de l’Âge du Bronze ancien16) a été évacuée, expulsant l’ensemble des habitants de leurs
maisons, c’est qu’une décision a été prise. En l’absence d’un roi17, force est de supposer que la
décision fut prise par les habitants. Que pouvons-nous savoir à ce propos ?
Lorsqu’une divinité expulse les hommes de leur habitat pour mieux s’installer à leur place,
l’opération paraît « naturelle » à ceux qui pensent que la divinité est le propriétaire ultime de toute
chose, en particulier de l’espace de vie. En déplaçant ses idèles, elle ne fait qu’exercer son autorité
principielle et inaugurale. La terre qu’elle leur concède est un don auguste, les hommes n’étant que
des locataires chez des dieux propriétaires, dans un « toujours déjà là » mythique et intemporel.
Telle aurait été la situation de certains territoires mésopotamiens dévolus à des propriétaires
divins. Cependant, il ne semble pas qu’une telle conception ait prévalu à Palmyre, où le droit de
propriété est attesté dans les inscriptions des sépultures construites pour la famille de X ou de Y.
Le caractère clanique et collectif de ces sépultures autorise à postuler une propriété collective des
dites installations. Une telle hypothèse est d’autant plus plausible que la propriété collective et
indivise est encore attestée en Syrie rurale au début du vingtième siècle (régime dit Musha`)18. Si tel
avait été le cas pour l’habitat urbain palmyrénien, l’évacuation du tell ne fut pas simple : des clans
propriétaires sont plus dificiles à mouvoir que des individus.
L’évacuation effective manifeste l’existence d’une instance commune supérieure disposant
de l’autorité nécessaire. Nous ne savons ni la nommer ni la caractériser en termes institutionnels
(Polis à la grecque ? ou forme autochtone ?). Elle correspond à ce que l’on pourrait désigner par
La VILLE. À l’acte négatif destructeur succède un acte positif d’amplitude comparable : celui de
l’érection du temple de Bel. Par leur enchaînement, ces deux actes corrélés prouvent l’eficacité
d’une entité collective dotée d’un vouloir faire et d’un pouvoir faire.
En faisant ériger une triple sculpture dans l’enceinte du dit temple, Germanicus accomplit un
acte qui ne se restreint pas à la sphère religieuse : il prend acte de l’existence de l’entité politique
palmyrénienne et la légitime indirectement dans les termes de l’Empire. En choisissant de s’exprimer
sur la dimension religieuse, il fait preuve d’un sens diplomatique, sélectionnant une isotopie sémantique
Palmyre, le sens des transformations urbaines
5
Manar HAMMAD
moins sensible que le terrain explicite de l’autorité politique. Ce faisant, il reconnaît une forme de
légitimité à l’entité collective palmyrénienne à l’origine du projet religieux.
Si aucune inscription de nous a conservé la désignation de l’autorité publique palmyrénienne
à l’époque de cette opération, nous disposons d’un texte datant de l’an 35 EC 19 (soit peu après
l’inauguration du temple de Bel en 32 EC) où la collectivité est désignée par le vocable GBL (l’écriture
araméenne est consonantique, ne notant que les voyelles longues). Dans la version grecque parallèle,
le terme GBL est traduit par démos : il s’agit du peuple de la ville. Un terme phonétiquement
similaire, et dont la transcription consonantique est quasiment identique, existe dans la langue
arabe. Le dictionnaire Lisân al `Arab20 lui donne le sens « population nombreuse prise dans sa
totalité ». Ce terme, dont l’usage est devenu rare de nos jours, est occurrent deux fois dans le Coran
(début du 7°s EC), où il est vocalisé gibill. Or le texte épigraphique où ce terme est occurrent utilise
une variété de l’araméen d’empire dite Palmyrénien. Si le vocable GBL est à la fois araméen et arabe,
avec un sens similaire sinon identique dans les deux langues, son utilisation publique est porteuse
d’une information non triviale : la communauté palmyrénienne dans sa totalité est désignée par
un vocable accepté à la fois par les Arabes et par les Araméens cohabitant à Palmyre. C’est donc un
terme potentiellement fédérateur, uniicateur sur les deux plans de l’expression et du contenu. Son
utilisation à une telle date et dans un tel contexte est signiiante. Dans l’un des textes palmyréniens
ultérieurs où ce terme est occurrent21, le sens totalisant de GBL est conirmé par l’usage concomitant
de KLHN = tous.
Le terme MDYNT’, attesté en langue accadienne à Mari au – 18° s et désignant ultérieurement
les villes en araméen et en arabe, est utilisé à Palmyre pour qualiier la ville de Babel dans une
inscription de l’an 24 EC, mais n’est pas encore utilisé pour qualiier Palmyre même. Une différence
de statut est donc présupposée entre les deux villes. Le terme grec de Boulé, utilisé pour désigner
l’assemblée élective des cités hellénisées, ne sera utilisé que bien plus tard à Palmyre. En ces
premières années de l’ère commune, la seule attestation de l’existence de fonctions municipales
institutionnelles est la mention de trésoriers, dits ARGYROTAMIAI en Grec, ANOSH ANOSHTA
en Araméen. L’expression araméenne associant deux formes dérivées d’une racine unique témoigne
de l’existence d’une institution ayant des membres. En termes d’aujourd’hui, nous dirions qu’il y
avait des « trésoriers » appartenant à une « trésorerie ».
En 24 EC, les trésoriers sont associés à la communauté GBL pour honorer Malku ils de Nesha
dans une inscription. La formulation associant un petit groupe à un grand groupe évoque celle qui
deviendra la norme ultérieure, où la boulè est associée au démos pour honorer les citoyens. Ce texte
identiie donc, à cette période de la vie de Palmyre, une structure sociale urbaine à deux termes
institutionnels différenciés par la taille : un groupe réduit d’une part, une communauté étendue
rassemblant la population de l’autre. La présence des trésoriers doit remonter, comme le suppose
Teixidor, à l’époque séleucide, car l’administration macédonienne ne faisait pas payer l’impôt à des
individus mais à des collectivités (soit des villes soit des ethnoï ou peuples), et les trésoriers étaient
les interlocuteurs locaux du isc central. La structure que nous restituons serait donc la structure
sociopolitique de l’époque séleucide. Le fait qu’il y ait eu quatre trésoriers pourrait reléter l’existence
de quatre groupes de contribuables, soit les quatre regroupements qui recevront la dénomination de
tribus dans les inscriptions ultérieures. L’origine de ces tribus serait donc antérieure à l’administration
romaine.
Une autre forme d’organisation de la ville transparaît dans les inscriptions recueillies
au sanctuaire de Bel : quelques personnages palmyréniens irent de généreuses contributions
personnelles (MN KYSH = de sa poche) à l’édiication du temple. La dédicace de remerciement22,
offerte en contrepartie par les négociants palmyréniens de Babel et datée de 24 EC, ajoute que le
Palmyre, le sens des transformations urbaines
6
Manar HAMMAD
geste de Malku ils de Nesha ils de Bolha n’avait pas eu de précédent. Ce qui laisse entendre que le
inancement antérieur du sanctuaire n’avait pas de caractère individuel. Il était donc collectif.
La mention collective des « prêtres de Bel » dans un acte dédicatoire datant de – 44 EC23
invite à supposer que le sanctuaire jouissait de ce qu’on appellerait, en langage juridique moderne, la
personnalité morale, et qu’il disposait à ce titre de biens propres. On reconnaîtrait ainsi, à la personne
juridique « temple », le rôle de maître d’ouvrage inançant l’opération de reconstruction. De telles
ressources auraient un caractère semi-public24. Les archives des temples mésopotamiens attestent
que c’étaient de grands propriétaires terriens et qu’ils se livraient à un commerce international
à longue distance. Une situation similaire n’est pas impensable à Palmyre, mais les textes ne le
conirment pas. Dans l’inscription évoquée, qui se trouve être la plus ancienne connue à Palmyre,
l’ensemble des prêtres de Bel apparaît agissant de concert au titre d’un groupe constitué.
Revenons à l’inscription de l’an 24 EC honorant Malku : elle nous fait découvrir que la coutume
dite évergétisme en Grèce (pratique par laquelle les personnages éminents des villes inançaient sur
leurs biens propres des travaux d’intérêt public) fait son entrée à Palmyre. Développée en Grèce,
diffusée dans l’ensemble du monde hellénistique par les Macédoniens, la coutume s’est maintenue
en Orient à l’époque romaine. À Palmyre, son apparition témoigne que la vie publique s’hellénise
d’une part, et que les ressources du temple ou de la ville25 ne sufisent pas à l’ambition des travaux
lancés par la communauté. Une autre inscription, datée de l’an 19 EC26 atteste que Yedi`bel ils de
`Azyzo ils de Yedi`bel avait déjà fait un grand don pour la construction du sanctuaire de Bel. Cette
inscription est antérieure en date à celle de Malku ils de Nesha (19 < 24), mais les donations peuvent
avoir été effectuées dans l’ordre inverse avant que les inscriptions honoriiques ne soient gravées.
En tout cas, la date du mois de Ab 19 EC nous donne un terminus ante quem pour l’apparition de
l’évergétisme à Palmyre.
L’évergétisme deviendra une véritable institution à Palmyre : l’abondance des dédicaces
honoriiques, ainsi que les faits rapportés pour les justiier, témoignent que la pratique est adoptée
comme l’un des moyens préférés d’expression de la richesse et du pouvoir au sein de la communauté
marchande. Elle prendra les dimensions d’un véritable potlatch27 : les offrandes et dédicaces se
multiplient, rivalisant de richesse et de visibilité, advenant groupées dans le temps, soit au printemps
et à l’automne. Le constat d’un tel regroupement temporel autour des mois de Nisannu et de Tishry
invite à associer la pratique à des périodes festives. Le référencement tribal des donateurs renforce
le rapprochement avec le potlatch rituel tel que reconnu par les anthropologues. Nous aurons à y
revenir.
Récapitulons : au moment où le sanctuaire de Bel s’élève, la ville possède une entité collective
totalisante dite GBL, une trésorerie coniée à quatre trésoriers, peut-être quatre divisions politiques
dites tribus, un groupe de prêtres agissant de concert, et des notables engagés dans une compétition
évergétique apparentée à un potlatch clanique.
Pendant que le sanctuaire s’élève sur le tell, une ville s’étend en contrebas. En l’absence du
quadrillage orthogonal régulier dit hippodamien, nous supposons que l’extension résulte d’une
multiplicité d’actes individuels. Ce qui ne veut pas dire actes non coordonnés. Une coordination
sociale est à présupposer, ne serait-ce que sur le plan de l’allocation des espaces et de la transplantation
des habitants. Mais, la coordination sociale ne s’est pas exprimée par une coordination géométrique
imposée à la matière urbaine. Ce qui différencie l’opération de celles qui furent pilotées par des
Grecs en Asie Mineure ou en Sicile. Ni les autorités séleucides ni les autorités romaines n’ont laissé
des traces géométriques dans une opération où nous reconnaissons une manière sémitique.
Palmyre, le sens des transformations urbaines
7
Manar HAMMAD
2.4 Présupposés de la dédicace à Bel
Bel est un dieu urbain : ce n’est ni le dieu d’un clan ni celui d’une tribu. La remarque n’est
pas anodine. Dans les inscriptions palmyréniennes, les références lignagères, claniques et tribales,
déinissent les individus. La pratique est normative, que les inscriptions soient honoriiques,
funéraires ou cultuelles.
Le cadre de pensée clanique s’exprime nettement dans les sépultures (tour, maison ou hypogée) :
elles accueillent des groupes unis par des liens de parenté. Nous ne connaissons pas de sépulture
monumentale individuelle à Palmyre. Pour la maison d’éternité, comme disent les textes araméens,
tous les individus qui ont eu droit à une sépulture sont insérés dans des groupes. Les regroupements
dans la mort nous laissent présupposer des regroupements parallèles dans la vie : l’individu seul n’a
pas d’existence honorable à Palmyre.
Au même titre que les sépultures, les autres sanctuaires palmyréniens sont opposables au
sanctuaire de Bel28 en ce qu’ils apparaissent liés à des sous-groupes de la ville. Les inscriptions des
sanctuaires de Baalshâmîn et d’Allat mentionnent souvent les Bene Maazin, celles du temple d’Arsu
les Bene Mathabol, celles du sanctuaire de Nabû les Elahbel et les Belshuri… Cinq inscriptions,
étudiées par Daniel Schlumberger29 font référence à quatre sanctuaires attribués aux quatre tribus
de la ville.
De l’opposition architecturale du temple de Bel avec les installations funéraires ressort un
effet de sens d’une clarté lumineuse : les sépultures expriment le fractionnement clanique de la
société palmyrénienne, alors que son sanctuaire majeur en exprime l’unité.
édiices funéraires
clans tribaux
fractions lignagères
/vs/
/vs/
/vs/
sanctuaire de Bel
communauté tadmoréenne
unité politique
À l’opposé d’une pensée lignagère, l’érection du sanctuaire de Bel manifeste, par le contenu
territorial reconnu, l’existence d’une pensée territoriale prenant en charge à grande échelle la
dimension sociale. En termes grecs, on pourrait dire qu’une pensée poliade est à l’œuvre dans la
reconstruction du temple de Bel. Nous tenons ici la preuve matérielle qu’à Palmyre l’espace physique
(territorial) sert de référence au groupe social, lui fournissant la base d’un lien social qui ne dépend
pas de la iliation, laquelle constituait la référence ordinaire. Doté d’un fondement indépendant de
cette dernière, le lien territorial permet d’embrasser un groupe social d’une échelle supérieure, réunissant
des groupes qui seraient séparés du point de vue lignager. Il en résulte que la reconstruction du
sanctuaire de Bel contribue à édiier le concept d’un territoire rattaché à la ville de Palmyre et à en
marquer l’existence dans la réalité.
2.5 Présupposés du culte de Bel
Si le nom de Baal est connu dans toute l’aire ouest-sémitique (attesté à Ebla dès le 18°s et
à Ugarit au 16°s), la forme Bel du nom est babylonienne. La date d’inauguration du sanctuaire
palmyrénien (6 Nisannu), notée dans une dédicace, renvoie aux rites de l’Akîtu célébré à Babylone
à l’équinoxe du printemps. Tant le nom que la date renvoient vers la Mésopotamie, en particulier
Babylone, ville fondée par des Amorrites, i.e. des Sémites venus de l’Ouest.
Soit que Palmyre ait conservé une composante amorrite latente, soit que sa composante
araméenne ait eu des liens étroits avec Babel, elle marque, par la dédicace de son sanctuaire principal,
un lien avec la Babylonie au moment même où, par la triade divine et par le style architectural
elle marque un lien avec Rome et avec la culture grecque. Dans cette double référence, il y a une
recherche d’équilibre entre l’Est et l’Ouest. Rien ne prouve que Bel ait été la divinité dominante
de Palmyre plusieurs siècles avant la période qui nous intéresse. Il y est attesté, sans doute. Nous
connaissons avant l’ère commune des noms théophores comportant un Bol ou un Bel inal (tels
Palmyre, le sens des transformations urbaines
8
Manar HAMMAD
que Gaddibol, ou Zabdibel commandant des troupes arabes aux côtés d’Antiochos III à Raphia
en – 217 EC30). Les porteurs de tels noms sont dits palmyréniens. La reviviication, à l’occasion de
cette reconstruction, d’un culte dormant semble peu probable. Déjà pratiqué à Palmyre, le culte de
Bel semble prendre néanmoins une forme nouvelle dans un nouveau contexte sociopolitique.
Le mythe de Bel, tel qu’il est raconté par l’Enuma Elish31, fait du dieu le champion des eaux
douces (il est le ils d’Anu, ils d’Apsû) combattant et tuant Tiamat la déesse des eaux salées. À la
suite de quoi il devient un dieu souverain, établissant l’ordre des dieux et des choses dans le monde.
Bel est ainsi porteur d’un double système de valeurs : celui de la souveraineté dans l’espace social,
celui de la vie dans l’espace physique32. Porteur de telles valeurs, Bel dispose d’atouts majeurs pour
jouer un rôle uniicateur dans l’oasis de Palmyre.
2.6 Présupposés de la triade divine (Bel, `Aglibol et Yarhibol)
L’inscription la plus ancienne conservée à Palmyre, retrouvée dans les fondations du mur T
du sanctuaire33, datée du mois de Tishry – 44 EC, mentionne le dieu Bel seul, sans parèdres 34. Une
inscription de Doura Europos, datée de Siwan – 33 EC, associe les dieux Bel et Yarhibol dans la
dédicace d’un temple local. Ce n’est qu’en Tishry 45 EC qu’une inscription de Palmyre mentionne
la dédicace (ayant eu lieu en Nisannu 32 EC) du sanctuaire majeur de la ville aux dieux Bel,
Yarhibol et Aglibol. Nous suivrons donc Javier Teixidor dans son raisonnement lorsqu’il reconnaît
une évolution théologique, étendue sur une durée proche de 80 ans, faisant transiter d’un dieu isolé
à une triade divine en passant par une formule diadique intermédiaire. Ce changement conceptuel
s’accomplit au cours d’une période qui précède et inclut celle où l’on reconstruit le sanctuaire de
Bel. D’où l’interrogation sur le lien possible entre les deux transformations, celle qui concerne les
dieux, et celle qui transforme leur maison.
À Palmyre, Bel a été mis en équivalence avec Zeus en tant que divinité supérieure aux autres
dieux. L’étymologie sémitique du nom signiie maître, seigneur. Dans la triade, Yarhibol occupe
le second rang ; une dédicace de Doura Europos en fait dieu de la source35. D’autres inscriptions
disent que le curateur de la source Efqa était choisi par Yarhibol36. Le terme néo-assyrien YARHU37
signiiant bassin, le sufixe BOL voulant dire seigneur, le nom composé Yarhibol signiierait le
seigneur du bassin38. À partir de la langue arabe, l’étymologie sémantique montre que Yarhibol
pourrait être le dieu de l’espace euphorique conjoignant la terre et l’eau.
Le dieu Aglibol, placé au troisième rang de la triade, est pratiquement non mentionné seul. Il
partageait avec Malakbel (= l’envoyé de Bel) le sanctuaire du jardin sacré mentionné par certaines
inscriptions. Une analyse sémantique menée à partir de l’arabe39 permet d’attribuer à Aglibol
le rôle de seigneur des termes (initial et inal). Il serait proche du Janus latin assigné aux limites
spatiales et temporelles, doté de deux faces pour regarder simultanément les débuts et les ins. Ce
qui corrobore la mise en correspondance de Aglibol avec la lune dont les phases mesurent le temps :
Le changement de forme du croissant marque le passage du terme inal d’un mois au terme initial
du mois suivant, le passage de l’un à l’autre autorisant de penser l’indistinction possible du terme
initial et du terme inal.
Combinons ces éléments avec les conclusions de l’analyse architecturale du temple de Bel40:
en alignant la cella sur la direction Nord-Sud, le changement d’orientation inscrit dans l’architecture
une marque cosmique universalisante. L’hémisphère sculpté au plafond du thalamos nord inscrit
une isotopie astrologique spéciiant Bel comme le maître des cieux. En Yarhibol, il dispose d’un
parèdre qui maîtrise l’espace, celui où se rencontrent l’eau et la terre. En `Aglibol, il dispose d’un
parèdre qui maîtrise les termes temporels. Il se dégage dès lors une coniguration synthétique par
laquelle Bel règne directement sur l’espace cosmique des planètes, son règne étant indirect sur
l’espace terrestre et les termes, pour lesquels il passe par l’entremise des deux parèdres.
Palmyre, le sens des transformations urbaines
9
Manar HAMMAD
Les trois dieux forment une trilogie, soit une coniguration familière aux romains : la trilogie
capitoline (Jupiter, Junon, Minerve) succède à la trilogie fonctionnelle archaïque reconnue par
G. Dumézil (Jupiter, Mars, Quirinus). Elle offre une similitude avec les trilogies des sanctuaires
étrusques cités par Vitruve, comme elle ressemble à quelques trilogies divines de cette Égypte dont
l’inluence s’est exercée sur les rites funéraires palmyréniens (les corps sont momiiés, les sépultures
sont dites maisons d’éternité, l’organisation spatiale des hypogées rappelle celle des hypogées
alexandrins). Par cet air de famille, la société palmyrénienne serait en train d’offrir à ses puissants
voisins une image à leur ressemblance pour mieux s’intégrer à leur univers.
Une structure ternaire introduit un principe d’ordre parmi les dieux à un moment où la
société palmyrénienne introduit de nouvelles hiérarchies dans son jeu social. Les deux processus
sont probablement dépendants. Sous la réforme théologique, nous relevons la trace d’une réforme
sociopolitique affectant l’ensemble de la communauté, le mode d’expression religieux servant
comme terrain d’élaboration intellectuelle précédant la mise en application sociopolitique.
Récapitulons. Si Bel marque un projet de souveraineté non clanique sur la ville et sur le
territoire qui l’entoure, la trilogie de Bel, Yarhibol et Aglibol exprime, en dégageant un noyau
sémantique commun aux trois dieux, un projet de contrôle sur l’espace territorial (dans l’étendue
par Yarhibol, aux frontières – termes spatiaux – par Aglibol), introduisant une relation d’ordre dans
cet univers.
2.7 Présupposés des choix architecturaux
La forme donnée à la cella du temple de Bel est celle d’un temple grec pseudodiptère dont
le modèle, attribué à l’architecte Hermogène de Priène, est le temple d’Artémis à Magnésie du
Méandre. La référence formelle est donc grecque.
Simultanément, le caractère sémitique des cultes célébrés dans la cella transparaît par le
positionnement de la porte au tiers du grand côté, précédée par un portail monumental occupant
deux entrecolonnements. Quatre paires de fenêtres hautes trahissent un besoin d’éclairage intérieur
inhabituel en Grèce. Si, sous le niveau de la cimaise, tous les détails d’exécution obéissent aux stricts
canons grecs, un décalage est visible au niveau du couronnement : derrière des merlons festonnés,
une terrasse accessible a été aménagée pour les rites accomplis sur les toits. La forme des merlons
est attestée dans les représentations gravées assyriennes. Les rites de terrasse, accomplis la nuit avec
des torches, sont cités par des tablettes rituelles accadiennes41. Par cet ensemble de caractères, la
référence formelle est mésopotamienne.
À l’intérieur de la cella, la présence de deux thalamoï placés sur les petits côtés du rectangle
pose un problème d’interprétation. Le seul précédent connu d’une telle disposition se trouve au
Palais de Mari. Bien que cette ville ne soit distante que de quelque deux cents kilomètres, son palais
datant du Bronze Ancien se trouvait à l’époque enterré sous dix-huit siècles de terre et de poussière.
Une telle disposition amorrite ne pouvait avoir été directement connue par les constructeurs de
Palmyre. S’il ne s’agit pas d’une manifestation du hasard, il y eut des intermédiaires : soit des
édiices disparus, soit une description textuelle, soit des pratiques cultuelles similaires. La première
hypothèse est peu probable. Il reste les deux autres possibilités, qui ne sont pas exclusives.
La présence de trois escaliers tournants menant de la cella à la terrasse, dotés de cages et de
noyaux aux formes différentes (cercle, carré, rectangle), témoignent de l’importance des rites de
terrasse accomplis pour chacun des dieux de la triade. Ces faits, ainsi que la symétrie droite/gauche
des dispositifs puriicatoires et sacriiciels du téménos42, imposent une conséquence majeure : la
syntaxe spatiale réglant la disposition des éléments les uns par rapport aux autres est sémitique,
Palmyre, le sens des transformations urbaines
10
Manar HAMMAD
alors que le vocabulaire dans lequel les éléments sont exprimés est hellénistique. Nous tenons là une
caractéristique non triviale du sanctuaire de Bel. La combinaison décrite ne se réduit pas à admettre
deux inluences différentes, venant de l’Est et de l’Ouest. Si le vocabulaire hellénistique joue le rôle
d’un habit afiché et offert aux regards, la syntaxe sémitique se révèle être la structure porteuse de
l’ensemble, capable de lui donner son sens profond. Or la syntaxe surdétermine le vocabulaire et en
ixe le sens dans l’énoncé. Par conséquent, les éléments hellénistiques sont re-sémantisés par leur
mise en espace sémitique. Ceci se produit dans l’univers idéologique et conservateur de la religion.
La mise en œuvre architecturale de cette logique à l’orée de l’ère commune témoigne d’une pensée
localement ancrée, donnant la priorité à une articulation sémitique par rapport aux composantes
allogènes.
Une autre transformation advient, après la complétion de la cella, quand le péribole est mis en
chantier. L’opération est en partie justiiée par l’extension du téménos projeté (200 x 200 m env.).
Le tell originel, sur lequel la cella a été dressée, n’était pas assez étendu : il fallut élever des murs
de soutènement et remblayer pour en assurer l’extension. Or le tell était relativement élevé, ce qui
aurait entraîné un volume de remblais considérable. La solution adoptée it raser la partie sommitale
du tell, utilisant les déblais centraux comme remblais périphériques. L’économie de matériaux était
substantielle. Cependant, en créant une dénivellation de 91 cm, elle rendit l’emmarchement (crépis)
du temple impraticable. Il fut donc noyé dans un podium de style romain. Pour la première fois,
un caractère architectural proprement romain était apporté dans un environnement qui n’était,
jusqu’alors, qu’hellénistique et sémitique.
Simultanément, le niveau du sol des deux thalamoï intérieurs fut surhaussé. L’effet de cette
surélévation, combinée avec l’abaissement du niveau du téménos, fut celui d’augmenter la distance
entre le niveau des hommes (= téménos) et celui des dieux (= thalamos). Indépendamment de la
référence romaine du podium, la forme verticale des bords de ce dernier établissait une barrière
infranchissable43 entre le niveau du téménos et celui du péristyle de la cella.
Par conséquent, trois opérations architecturales distinctes (rabaisser le téménos, surhausser
les thalamoï, transformer l’emmarchement de la crépis en plateforme de podium) concourent à
augmenter la distance physique et sémantique entre le niveau des hommes et le niveau des dieux. Ce
qui est à mettre en parallèle avec ce que P. Brown décrit à partir des textes de l’antiquité tardive44,
montrant que les relations entre les dieux et les hommes subissent un changement profond, corrélatif
à la transformation des relations d’autorité entre les gouvernants et les gouvernés : ces relations se
distendent simultanément dans l’ensemble du monde romain. En d’autres termes, ce que nous
lisons, inscrit dans la pierre de Palmyre, est parallèle à ce que lit Peter Brown dans les textes grecs et
latins de l’empire. Ce qui signiie qu’en cette deuxième phase de transformations, repérable dans la
matière, Palmyre est intégrée à l’évolution du reste du monde antique et en suit les mouvements.
Elle ne joue plus un rôle périphérique. Le changement, dont nous avons repéré les prémisses au
moment de la construction du sanctuaire de Bel, qui est celui de l’intégration de Palmyre dans le
monde romain par le rétablissement de relations contractuelles entre ces deux termes, semble alors
achevé.
2.8 La polarisation de Palmyre autour du sanctuaire de Bel
Au cours de la période qui nous intéresse, celle de la in du règne séleucide et du début de
l’occupation romaine, le temple de Bel semble constituer le pôle principal de l’activité de Palmyre.
Non seulement les habitations sont déménagées, mais les structures politiques de la communauté
sont aménagées en fonction de la grande opération collective de construction. Le groupe des
palmyréniens adopte un nom sémitique (GBL) acceptable tant par les Araméens que par les Arabes,
Palmyre, le sens des transformations urbaines
11
Manar HAMMAD
quatre trésoriers gèrent les inances publiques, les notables sollicités se transforment en évergètes.
La pratique de l’évergétisme, qui dotera la ville d’un grand nombre de monuments, est adoptée
avec le chantier du temple de Bel. L’édiication du temple de Bel a donc eu un effet structurant sur
la ville. Durant une cinquantaine d’années, le potlatch des donations concurrentes s’exprimera
de préférence sur les colonnades du téménos de Bel. C’est là qu’est mise au point la formule des
consoles portant les statues honoriiques : J.Cantineau, H.Seyrig et D.Schlumberger ont montré qu’un
nombre considérable des inscriptions de ce site ont été regravées sur les consoles, alors qu’elles furent
à l’origine inscrites sur des piédestaux au sol. Le procédé libère la circulation de l’encombrement des
statues multipliées par la concurrence évergétique.
La polarisation est telle que l’on peut se demander si la ville ne se dédie pas au dieu Bel pendant
les années qui nous occupent. Un lien religieux privilégié entre la ville et le dieu Bel serait cohérent
avec le rôle de Palmyre en tant que centre de pèlerinage régional. On ne trouve pas de dédicace
formelle en ce sens, mais notre attention est attirée par les implications sémantiques de l’usage du
terme MHWZ pour désigner la ville de Palmyre. Cet usage change vers la moitié du premier siècle,
J.Teixidor45 le signale dans une étude du Tarif de Palmyre, daté en 137 EC. L’ancien terme sémitique
de MHWZ, qui fut courant dans la première moitié du premier siècle, n’y est plus occurrent. En
lieu et place, on trouve le terme LMN’, lequel n’est que la transcription araméenne du grec limên,
équivalent du latin portus. Pour l’administration romaine, portus désigne un lieu de perception des
octrois et péages, aussi bien en bord de mer que dans l’arrière-pays. Le sens latin de portus, perçu sous
la traduction grecque limên, a fait projeter sur MHWZ le sens de lieu de perception de taxes, et le
terme araméen peut se prêter à cette projection. Cependant, en Arabe, la racine HWZ sert à dériver
des termes relatifs à la possession et à la prise de possession, tant pour des biens matériels que pour
l’espace immatériel. Elle convient aussi pour désigner l’attribution du contrôle ou de la propriété. On
trouve aussi, dans des textes accadiens anciens46, l’usage du terme Mahâzu pour désigner une ville
consacrée à un dieu, site de temple et siège de culte. Nous tirerons de ce rapprochement établissant
une parenté des vocables accadien et arabe, une hypothèse de continuité dans la durée englobant
l’Araméen de Palmyre. Hypothèse qui reste à conirmer, qui entraînerait ceci : Le remplacement
du mot MHWZ par le mot LMN’ dans le texte du Tarif traduit un changement de la manière
administrative de voir Palmyre. Il marquerait la transformation, à une date qui reste à préciser, du
MHWZ en portus. MHWZ aurait désigné en Araméen, au début du premier siècle, une ville mise
en liaison étroite avec une divinité, en une manière sémitique apparentée à celle qui est désignée
par le terme accadien. Ce lien n’a jamais été hellénisé pour produire une consécration formelle du
territoire à la divinité, opération qui était pratiquée de jure à l’époque séleucide et servait d’étape
préalable à l’attribution du statut d’Asylie47 à une ville. Henri Seyrig48 fait remarquer que le statut
d’asylie n’a été attribué par les Séleucides qu’à des villes portuaires menacées par les pirates49. On
ne manquera pas de rapprocher ce fait du statut portuaire (au sens romain) de Palmyre, celui de la
présence de nomades pillards dans le désert voisin, avec la situation des villes maritimes menacées
par les pirates.
En Mésopotamie, les privilèges accordés à des villes pour des raisons religieuses sont attestés
dès le Bronze Ancien. Ils continuent à être pratiqués jusqu’à l’empire néo-babylonien, Nabonide
ayant conféré ou conirmé des privilèges à Harrân en l’honneur du dieu Sîn. La conception soustendant ce qui faisait désigner Palmyre par le terme MHWZ est une conception locale, apparentée
aux idées mésopotamiennes, et aux pratiques ouest-syriennes et/ou Arabes. Le temple d’Allat
jouissait à Palmyre d’une forme d’asylie attestée par l’inscription incisée sur la sculpture du lion
protégeant une gazelle à l’entrée de son téménos ; au 6° siècle la Makkat polythéiste jouit d’un statut
de Haram semblable à l’asylie. Maurice Sartre50 signale à la suite de Kent Rigsby51 que Tibère et le
Sénat Romain révisèrent en 22 EC les privilèges de l’asylie, mettant un terme à l’octroi de ce statut. La
Palmyre, le sens des transformations urbaines
12
Manar HAMMAD
raison de ce changement de politique résiderait dans la différence de conception que les Latins avaient
de l’asylie (opposée aux conceptions hellénistiques). Or la date du changement évoqué correspond
aux débuts de l’intervention systématique des romains dans les affaires de Palmyre. Dès lors, il
est plausible de conclure que l’abandon du vocable MHWZ au dernier quart du premier siècle,
pour peu que ce vocable ait été lié à l’idée d’asylie, s’inscrit dans le cadre de la révision générale
mentionnée. Tout en étant conjecturale, cette hypothèse projette sur Palmyre un éclairage qui en
modiie le statut en Syrie à la in de la période séleucide et aux débuts de la période romaine.
3
Conclusions
Souvent, l’analyse discursive privilégie les données véhiculées par la composante énoncive. En
privilégiant les valeurs sous-jacentes et présupposées, nous avons centré l’attention sur la composante
énonciative. Proitant de notre double position de sujet énonciataire pour les documents analysés
et de sujet énonciateur pour l’analyse réalisée, nous avons dirigé notre attention, et la vôtre par la
même occasion, vers un certain nombre de phénomènes énonciatifs, en particulier ceux qui sont
liés à une expression non verbale.
Par la reconstruction du sanctuaire de Bel, Palmyre s’est exprimée dans la pierre, élaborant
un discours non verbal explicitement inscrit sur la dimension religieuse, implicitement porteur
d’implications politiques et sociales. Ce faisant, elle accomplit un acte de type mythique rétablissant
des relations contractuelles avec les dieux d’une part et avec les nouveaux maîtres politiques de
l’autre. Simultanément, elle s’adressait à une population régionale, vis-à-vis de laquelle elle
s’afirmait comme une entité entretenant avec le dieu Bel une relation privilégiée. Dotant Bel de
deux parèdres, elle l’a présenté comme un dieu souverain et poliade, aux compétences territoriales.
L’intégration d’un vocabulaire architectural allogène dans une syntaxe indigène manifestait
la primauté fondamentale de cette dernière tout en faisant une concession à la nouveauté. En
s’exprimant de manière architecturale sur la dimension religieuse, Palmyre énonçait ses ambitions
de manière non verbale. Ce faisant, elle évitait des déclarations verbales qui auraient pu choquer par
leurs prétentions la puissance militaire romaine.
Ces résultats sont cohérents entre eux. L’image qu’ils permettent de donner des structures
sociales et politiques de Palmyre est plus ine qu’il n’aurait semblé possible de faire à partir d’un tel
matériau. Il n’en reste pas moins qu’il faut rechercher, à l’appui de ces déductions, des éléments de
cohérence externe susceptibles de jouer le rôle de réalité véridictoire.
Il serait aussi intéressant d’inventorier le vocabulaire institutionnel et politique de Palmyre. Les
nombreuses transcriptions phonétiques de termes grecs et latins (ex : stratégos, hégémon, centurion)
dans les inscriptions attestent que certains mots ont été adoptés sans traduction. Mais l’on est loin
d’être certain que ces termes n’ont pas subi, lors de l’emprunt, une distorsion sémantique qui les
aurait rendus plus adéquats à l’usage local qui en fut fait. En particulier, nous nous interrogeons sur
l’absence de termes qui, tels que le CIVIS latin ou le POLITÈS grec, auraient désigné les citoyens
communs et auraient caractérisé leurs liens mutuels implicites : la très belle analyse que fait Émile
Benveniste52 de ces termes est éclairante sur la différence conceptuelle profonde des Grecs et
des Latins à cet égard. Car en désignant le citoyen grec par POLITÈS, la koiné dérive son nom
commun du nom de la ville, POLIS, qui lui pré-existe donc sur le plan conceptuel. À l’opposé, en
dérivant CIVITAS de CIVIS, les Latins dérivent la ville de la relation contractuelle présupposée
entre des citoyens dont la communauté pré-existe à l’établissement urbain53. Or nous ignorons ce
que pouvaient dire les palmyréniens à ce propos en différentes périodes de leur histoire. L’analyse
sémantique du vocabulaire des institutions sémitiques reste à faire.
Palmyre, le sens des transformations urbaines
13
Manar HAMMAD
NOTES
1 HAMMAD, Manar, Sanctuaire de Bel à Tadmor-Palmyre, Centro Internazionale di Semiotica e di Linguistica,
Università di Urbino, Italia, 1 998.
2 HAMMAD, Manar, L’expression spatiale de l’énonciation, in Cruzeiro Semiotico 5, Porto, 1 986. Traduction
italienne dans Leggere le spazio, comprendere l’architettura, Meltemi editore, Roma, 2 003. Traduction
portugaise : Expressão espacial da enunciação, Ediçoes cps, Sao Paulo, 2005.
3 HAMMAD, Manar, L’énonciation énoncée, procès et système, in Langages 70, 1 983.
4 Au cours du 19°s, le réveil des nationalismes s’appuya sur la différenciation des langues, puisant dans la linguistique
naissante une caution dite scientiique à un argument spécieux selon lequel une langue renvoie à un groupe ethnique
d’une part, et sert de fondement à une nation de l’autre. L’histoire et la géographie fournissent de multiples preuves
du contraire.
5 Voir notre description et analyse du monument même, op.cit.
6 SEYRIG, Henri, Ornamenta Palmyrena Antiquiora, in SYRIA 1940, pp.277-328, repris in Antiquités Syriennes, 3º
série, pp. 64-114.
7 BOUNNI, Adnan et Université de Damas, 1 996.
8 HAMMAD, Manar, Sanctuaire de Bel à Tadmor-Palmyre, Centro Internazionale di Semiotica e di Linguistica,
Università di Urbino, Italia, 1 998.
9 HILLERS, D.R. & CUSSINI, E. Palmyrene Aramaic Texts, The Johns Hopkins University Press, Baltimore, 1 996.
10 Pour les traductions, il reste nécessaire de consulter des publications dispersées.
11 Ce sont les catégories sémantiques générales retenues par les auteurs du recueil pour classer les inscriptions. Nous les
reprendrons telles quelles, centrant notre approche sur les conditions de leur énonciation : Il est possible d’extraire
une information appréciable par l’analyse conjointe du contenu de l’inscription, de sa date et de son emplacement
dans la ville.
12 Manifestes dans les restes des sanctuaires antérieurs mis au jour par les fouilles.
13 Guerres Civiles, 5,9, pp. 37-42.
14 C’est l’opinion partagée par I.Browning, H.Stierlin, A.R.Colledge, E.Will.
15 Cella 13,9 x 39,4 m ; colonnes 18,5 m ; crépis 36,7 x 62,2 m ; téménos 200 x 200 m environ.
16 Du MESNIL du BUISSON, Robert, Première campagne de fouilles à Palmyre, CRAI 1 966.
17 Les rois séleucides préservaient jalousement le privilège de pouvoir fonder ou refonder les villes. S’ils l’avaient fait
pour Palmyre, il y en aurait des traces dans les textes d’une part, dans le tracé urbain de l’autre : partout où ils sont
intervenus, ils ont imposé des tracés hippodamiens.
18 WEULERSSE, Jacques, Paysans de Syrie et du Proche-Orient, Gallimard, Paris, 1 946.
19 CANTINEAU, Jean, Inventaire des inscriptions palmyréniennes IX, 12.
20 IBN MANDHOUR, Lisân al Arab, circa 1290, réédition du Caire, circa 1 979.
21 CANTINEAU, Jean, Inventaire des inscriptions palmyréniennes IX, 8. Voir aussi : Corpus Inscriptionum
Semiticarum 3 923. Date : 51 EC.
22 CANTINEAU, Jean, Inventaire des inscriptions palmyréniennes IX, 11.
23 CANTINEAU, Jean, Inventaire des inscriptions palmyréniennes XI, 100.
24 Le statut des « biens de l’église » sous l’ancien régime en France offre un point de comparaison intéressant. En
Orient, la civilisation islamique élaborera le statut original des « waqf, awqâf » ou « biens de main morte » destinés
à faire vivre les fondations pieuses.
25 Pour autant que celle-ci en dispose au titre d’une personnalité juridique.
26 CANTINEAU, Jean, Inventaire des inscriptions palmyréniennes IX, 6a.
27 Marcel MAUSS analyse l’institution du Potlatch, identiiée auparavant par les ethnologues chez les Amérindiens
Tlingit et Haïda sur la côte du Nord-Ouest américain, et reconnaît des pratiques structurellement identiques chez
plusieurs populations antiques, parmi lesquelles il cite les Galates (celtes) de l’Asie mineure, dont les coutumes
sont décrites par les auteurs grecs. Il donne un modèle général de l’institution dans son « Essai sur le don », dans
Sociologie et Anthropologie, PUF, Paris, 1 950.
28 WIEGAND, Th. Palmyra, Berlin, 1 932. Il avait relevé que les édiices les plus anciens qui nous soient conservés à
Palmyre sont des temples et/ou des sépultures.
29 SCHLUMBERGER, Daniel, Les quatre tribus de Palmyre, in SYRIA 48, 1 971.
30 SEYRIG, Henri, Antiquités Syriennes 93 in SYRIA 48, 1971, pp 85-86.
31 Poème akkadien narrant la cosmogénèse et la théogénèse.
32 Car l’eau douce assure la vie des nomades dans le désert comme elle assure la vie des agriculteurs sédentaires. Seule
l’eau douce est porteuse de vie, l’eau salée est porteuse de mort.
33 SEYRIG, Henri, Ornamenta Palmyrena Antiquiora, in SYRIA 1940, pp.277-328, repris in Antiquités Syriennes, 3º
série, pp. 64-114.
Palmyre, le sens des transformations urbaines
14
Manar HAMMAD
34 TEIXIDOR, Javier, The Pantheon of Palmyra, Brill, Leiden, 1979, p. 2.
35 du MESNIL du BUISSON, R., Inventaire des Inscriptions de Doura Europos, Geuthner, Paris, 1 939. Nº 33.
36 RSP 127. TEIXIDOR, J. The Pantheon of Palmyra, op.cit. pp. 32-33. STARCKY, J. ; GAWLIKOWSKI, M., op. cit,
p. 95.
37 S.Dalley in Bel at Palmyra and elsewhere in the Parthian Period, ARAM vol 7, 1995, p.140.
38 En position antéixe, le vocable Bel attribue le titre de «seigneur victorieux» au dieu qu’il qualiie. En position
postixe, le vocable Bol = Bel désigne le seigneur de l’élément qui le précède : ici, le seigneur du bassin.
39 L’Arabe est une langue sémitique apparentée à l’Araméen. Elle possède l’avantage d’être une langue vivante disposant
de l’ensemble des déclinaisons potentielles à partir des racines, ce qui facilite un travail d’interprétation. Dans la
mesure où la racine retenue est binaire, elle a de bonnes chances de relever d’un niveau pansémitique. Il va de soi
qu’on ne peut procéder ainsi sans précautions préalables et vériications a posteriori. La présence à Palmyre d’une
population arabe importante plaide en faveur de cette procédure.
40 HAMMAD, Manar, Sanctuaire de Bel à Tadmor-Palmyre, Centro Internazionale di Semiotica e di Linguistica,
Università di Urbino, Italia, 1 998.
41 THUREAU-DANGIN, F. Rituels accadiens, Ed. Ernest Leroux, Paris, 1921, pp. 39-41-45.
42 Pour tous ces faits d’architecture, se reporter à HAMMAD, Manar, Le sanctuaire de Bel à Tadmor-Palmyre »,
Urbino, 1 998.
43 Seule la rampe d’accès permettait le franchissement, dans l’axe de la porte de la cella.
44 BROWN, Peter, Genèse de l’antiquité tardive, Gallimard, 1 978.
45 Un port du désert, Palmyre et son commerce d’Auguste à Caracalla, Semitica 34, Librairie Adrien Maisonneuve,
Paris, 1 984. Pages 10 et 59.
46 THUREAU-DANGIN, F. Rituels accadiens, Éditions Ernest Leroux, Paris, 1921, p. 57.
47 L’Asylie mettait une ville en relation avec les dieux et à l’abri des guerres. L’homicide y était prohibé. Des
conventions formelles étaient passées en ce sens avec les autres villes, l’autorité royale les ratiiait.
48 SEYRIG, Henri, Antiquités syriennes 24, Les rois séleucides et la concession de l’Asylie, in SYRIA XX, 1939, pp
35-39.
49 À la seule exception d’Alabanda.
50 SARTRE, Maurice, D’Alexandre à Zénobie, Histoire du Levant antique, Fayard, Paris, 2 001. Page 704.
51 RIGSBY, Kent J. Asylia. Territorial inviolability in the Hellenistic world, Berkeley, University of California Press,
1 996.
52 BENVENISTE, Émile, Le vocabulaire des institutions indo-européennes, Éditions de Minuit, Paris, 1 969.
53 Le terme français de citoyen est un dérivé de dérivé, puis qu’il est issu de la chaîne CITÉ, CIVITAS, CIVIS.
Palmyre, le sens des transformations urbaines
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Manar HAMMAD