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Sémiotique des plans en architecture

1976, HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe)

Sémiotique des plans en architecture Manar Hammad, Yves Loicq, Eric Provoost, Michel Vernin To cite this version: Manar Hammad, Yves Loicq, Eric Provoost, Michel Vernin. Sémiotique des plans en architecture : considérés comme un moyen de représentation de l’espace (tome II). [Rapport de recherche] 0039/76, Groupe 107; Secrétariat d’état à la Culture / Secrétariat de la recherche architecturale (SRA). 1976. ฀hal-03086248฀ HAL Id: hal-03086248 https://hal.science/hal-03086248 Submitted on 22 Dec 2020 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of scientific research documents, whether they are published or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. 3030000162405 ECOLE D ’A RCHITECTURE DE VERSAILLES sémiotique des plans en architeiture, considérés comme un moyen de représent at ion de I' espace gi& (ff?0 groupe 107 1 0 T6 Cet ouvrage est le compte-rendu final d'une recherche effectuée par le GROUPE 107 pour le Comité de la Recherche et du Développement en Architecture (Contrat n° 75 73 001 00 202 75 01) Publications du GROUPE 107 Structures mentales de l'espace, Paris, 1972, UP6, Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts - mémoire de fin d'étude. Sémiotique de l'Espace, Etude exploratoire financée par la D.G.R.S.T., Paris, Novembre 1973. Sémiotique des Plans en Architecture, édité par le GROUPE 107, Paris, 1974. Compte-rendu des discussions du Colloque "Sémiotique de l'espace", Institut de l'Environnement, mai 1972, in Notes Méthodologiques en Architecture et en Urba­ nisme N° 3/4, mai 1974, Institut de l'Environnement, Paris. Sémiotique et Simulation, a paraître en 1976 dans "Simulation et Architecture", Unité Pédagogique N° 6, Paris Sémiotique de l'espace et sémiotique de l'Architecture, à paraître en 1976 dans "Actes du Premier Congrès de l'Association Internationale de Sémiotique, Milan 1974", éd. Mouton, La Haye. Analyse Sémiotique du Plan d'Architecte, à paraître en 1976 dans "Actes du Premier Congrès de 1 'Associa­ tion Internationale de Sémiotique, Milan 1974", éd. Mouton, La Haye. GROUPE 107 66, rue René Boulanger 2, rue d'Arcueil 75010 PARIS 75014 PARIS Equipe ayant travaillé à cette étude : Manar HAMMAD - Architecte D.P.L.G. Docteur de Troisième Cycle Yves LOICQ Eric PR0V00ST Michel VERNIN - Architecte D.P.L.G. - Architecte D.P.L.G. - Architecte D.P.L.G. Consultant :Claude LELONG TABLE DES MATIERES P § PREFACE 7 19 PREMIERE PARTIE : DU P LAN D'ARCHITECTE COMME LANGAGE 35 DEUXIEME PARTIE : ANALYSE D E L 'EXPRESSION 39 2.1 Axiologies 43 2.2 Axiologie de l'étude de l'expression algébrique 55 2.3 Axiologie géométrique 73 2.4 Axiologie de 97 2.5 Axiologie des la manifestation lois graphique d'appartenance TROISIEME PARTIE : ANALYSE DU CONTENU 113 117 3.1 Accès 125 3.2 Exemple au 129 3.3 Catégories 137 3.4 Catégorie de l'espace 155 3.5 Catégorie du faire 163 3.6 Catégorie des 173 3.7 Mise en contenu contenu de lecture du contenu relations relation des avec catégories les catégories du de 1'expression QUATRIEME PARTIE : REFLEXIONS A PROPOS DE CETTE ETUDE 187 189 4.1 Niveaux 191 4.2 Etude 195 4.3 Lexicalisation 199 4.4 Résultats 203 de du notre discours contenu et BIBLIOGRAPHIE projets PREFACE Il est courant de lire,au début d'un rapport de recherche , un avertissement signalant au lecteur que ce qui suivra n'est que provisoire, jalon dans un cheminement long et lent, et qu'il s'agit d'hypo­ thèses qui seront remises en cause dans le futur. Même si nous voulions nous démarquer par rapport à un tel début, il nous serait difficile d'échapper à une évaluation qui rend relatifs tous les résultats. D'ailleurs, il serait bien présomptueux de prétendre atteindre des résultats définitifs qui interdisent tout avancement ultérieur. Dans le cas précis de ce travail le contrat de recher­ che spécifie que seules seront couvertes trois parmi les huit étapes du programme global. Ainsi, en relation avec les limites temporelles de la recherche, se trou­ vent tracées les limites du contenu que nous aurons à exposer. Le lecteur trouvera donc des résultats à la fois partiels, dans le sens où ils ne correspondent pas aux buts ultimes que nous nous sommes fixés, et complets, dans le sens où ils satisfont les exigences de notre démarche systématique. Notre réflexion sur les expressions graphiques en architecture a démarré il y a plus de quatre ans.Nous avons essayé de la développer selon des schémas qui 8 répondent à nos propres exigences et non pas à celles d'autrui : dans les travaux qui nous étaient proposés, il y avait des "manques", des "trous", des "absences de réponse" à des questions que nous nous posions. C'est pourquoi nous avons tenté une autre approche présentée dans cette préface.Le rappport lui-même propose des éléments de réponse. Nous nous sommes efforcés de faire un exposé clair, logique, s'il n'est pas toujours énoncé de façon simple. Il nous a fallu construire des concepts,redé­ finir des notions, dresser des oppositions: tout cela passe par une terminologie qui ne doit pas être un obstacle, dans la mesure ou elle est définie. Pour des raisons de clarté, nous avons renoncé à reproduire notre démarche telle qu'elle a été pendant le travail, et nous avons adopté un ordre qui devait faciliter la saisie et l'évaluation de nos résultats. Le lecteur en jugera. Mais qui est notre lecteur? Nous supposons que, s'il n'est pas architecte, il est intéressé par les ques­ tions de l'architecture. S'il ne cherche que cela, il sera déçu. En premier lieu parce que nous parlons des plans et non pas d'architecture. En second lieu parce que nous discutons plus de la méthode d'étude de plans que des plans eux-mêmes. Nous reviendrons sur les raisons de ces deux choix, précisons tout de sui­ te deux choses : - L'étude des plans débouche dans une phase ultérieure sur l'étude de l'architecture. Cependant il faut défi­ nir avec beaucoup de soins les limites de cette étude médiatisée qui remplace un objet (l'architecture) par un autre objet (les plans) . Nous essaierons de voir quelles sont ces limites. \ 9 - Tout résultat qui se veut scientifique s'évalue en fonction de la méthode qui l'établit. La réflexion sur la méthode fait donc partie intégrante de notre travail. Pourquoi choisir les plans en architecture ? L'une des raisons qui nous les font choisir, c'est leur rô­ le dans la production de l'espace architectural. Les plans apparaissent comme un instrument, dépendant d'une méthode de travail et de certains rapports de production. Une étude socio-économique nous appren­ drait beaucoup sur cet aspect des choses, mais elle nous ferait dévier de nos objectifs et ne répondrait pas à nos questions. Par contre, elle nous amènerait à poser la question suivante : est-ce que les plans sont nécessaires dans la production du bâtiment et des autres espaces qui nous environnent ? Il est pos­ sible de construire sans plans, et les sociétés à "histoire lente" nous le montrent. On peut aussi construire en utilisant uniquement des maquettes, l'expérience de Jean Prouvé le démontre. Il y a des essais de conception à l'aide d'ordinateurs, avec ou sans sorties graphiques,en mode conversationnel ou selon des procédures plus rigides. Ces différentes observations pourraient nous amener à conclure : les plans sont appelés à disparaître à brève échéance, et ce n'est pas la peine de les étudier. Nous n'avons pas fait d'étude socio-économique pour répondre de façon certaine à cette affirmation hypothétique. Ce que nous pouvons constater, c'est que les plans sont en usage dans les agences d'architecture et les bu­ reaux d'études techniques, q u 'ils font partie des piè­ ces contractuelles et qu'ils priment juridiquement les pièces écrites qui les accompagnent, qu'ils ser- 10 vent de support aux décisions relatives à l'espace (concours, plans d'occupation des sols..)- Porteurs des indications relatives au découpage de l'espace, et réunissant les données qui permettent de coordon­ ner les différentes interventions, les plans appa­ raissent actuellement dans un rôle privilégié relalivement à la production de l'espace. Ce seul fait suffirait à en justifier l'étude. Mais ce n'est pas tout. Les plans jouent un rôle prin­ cipal dans la production de savoir à propos de l'espa­ ce. J. SUMMERSON (1) remarque que la réflexion théorique à propos de l'architecture ne s'est faite, en Occident, qu'à partir du moment où les plans ont pu être repro­ duits et communiqués de façon commode : leur circula­ tion semble avoir été une condition nécessaire à l'é­ closion d'un savoir théorique. Ce sont les plans qui restent le support de l'enseignement dans les écoles d'architecture, même si ces dernières introduisent d'autres moyens didactiques. Enfin, ils n'ont pas en­ core été remplacés dans l'étude de l'architecture an­ cienne ou contemporaine. Dans tous ces cas, ils jouent un rôle de succédané, ils comblent partiellement le manque créé par l'éloignement dans l'espace et dans le temps des lieux à étudier. En cela, ils jouent le mê­ me rôle que les mots et s'apparentent au langage. D'où l'hypothèse, que nous serons amenés à démontrer, que les plans fonctionnent comme un langage, et qu'on peut les qualifier de "langage artificiel". Une re­ marque historique s'impose : la mise au point du lan­ gage des plans est quasi contemporaine de celle de 1 'écriture ; on en trouve une preuve en Mésopotamie (1) in "The langage of Architecture", MIT Press. 11 " de deux lentilles (tablettes) scolaires... ramassées" à KISH , on peut conclure qu'on enseignait dans les écoles non seulement l'écriture, mais qu'on y donnait une formation ou tout au moins une initiation archi­ tecturale "(1). Cependant , les plans ne sont pas les seuls dessins utilisés dans la production de l'ar­ chitecture ou dans celle de la production de savoir sur l'architecture. Les raisons que nous avons développées ci-dessus s'appliquent tout aussi bien à l'ensemble des représentations architecturales. Les plans ne forment qu'une catégorie parmi les représentations graphiques en général. Pourquoi alors se restreindre aux plans ? Pour des raisons méthodologiques: il est plus simple de s'attaquer à un objet limité, plutôt que d'essa­ yer d'embrasser d'un seul coup un objet immense. D'ail -leurs, la catégorie des plans se révèle déjà très grande. Elle se situe entre deux pôles (le très sim­ ple et le très complexe) et se présente alors comme un objet de complexité moyenne, adapté à une première approche. Précisons tout de suite que les plans ne sont pour nous qu'une étape, et que nous voulons rendre compte de toutes les représentations graphiques. Que "dit" le plan ? Ou en d'autres termes, que nous apprend t-il ? Nous verrons dans la suite de l'étude qu'il décrit des lieux, des activités, et des rela­ tions entre ces différents termes. La description s'effectue à l'aide de qualités sélectionnées par le plan et en fonction desquelles il se développe : cha­ que plan a une (sinon plusieurs, mais en nombre limité) pertinence(s) d'analyse. (1) André PARROT, in Syria XLV, 1968, P. 157 Kish est une capitale mésopotamienne d'époque présargonique (antérieure à 2600 av. J. C.) i 12 Le plan se présente donc comme un discours descriptif et sa description ne se restreint pas aux seuls élé­ ments qu'il contient : de façon plus ou moins expli­ cite, il les oppose à des éléments proposés ailleurs, dans d'autres plans. On pourra nous objecter que ce n'est pas le plan qui oppose les éléments mais le lecteur. Nous répondrons que le lecteur ne peut effec­ tuer ces comparaisons inter-textuelles ou intra-textuelles que si le plan lui offre des éléments struc­ turés susceptibles de porter les oppositions compara­ tives . Cependant, s'il renvoit à un autre document par rapport auquel il apparaît comme un commentaire, le plan ne sem­ ble pas pouvoir jouer un rôle analytique (métalinguistique) complet : tous les plans que nous avons eu l'oc­ casion d'observer ont recours à des inscriptions en "langue naturelle" (c'est-à-dire le langage verbal ha­ bituel). Cette insuffisance est à mettre au compte de l'opposition entre langage restreint et langage passepartout décrite par HJELMSLEV (1). La langue naturelle dans laquelle tout contenu peut se traduire, est appe­ lée passe-partout. Par contre, les langages artificiels sont restreints car ils ne peuvent tout transcrire ou traduire. Sur un plan, l'écriture de la langue passepartout vient combler les vides du langage restreint et sur-déterminer ses éléments. L'aperçu que nous venons de donner ci-dessus s'appuie sur les résultats de l'étude qui suivra. Nous verrons que l'un des buts du plan est de décrire l'archi­ tecture. Mais si la "lecture" d'un plan nous apprend quelque chose sur l'espace et l'architecture, est-ce qu'elle diffère d'une saisie non sémiotique du conte­ nu d'un meme plan ? La lecture ne change pas quant au (1) La structure fondamentale du langage Ed. Minuit 1968 13 fond : Le plan parle du même espace, quelle que soit la manière dont on le questionne. Par contre, il y a un changement de finesse : La lecture sémiotique est plus fouillée, plus structurée ; elle permet de met­ tre en évidence des choses qui passeraient inaper­ çues lors d'une lecture non systématique. Sans qu'il y ait renouvellement du contenu, il y a re-structuration de ce dernier. Citons à titre d'exemple, l'appa­ rition dans l'analyse sémiotique de la catégorie du "faire" pour le contenu, l'investissement du trait pour exprimer les relations, et de façon plus géné­ rale, l'utilisation de l'opposition superposable/ non superposable pour articuler les espaces sur l'axe du' temps ou selon la troisième dimension. Dans notre recherche "sémiotique de l'espace", nous soutenons 1 'hypothèse que 1 'espace architectural fonctionne comme un langage. Par suite, le plan appa­ raît comme un métalangage descriptif, et sa descrip­ tion nous renseigne sur l'éspace architectural. Mais indépendamment de l'intérêt que nous portons à l ’es­ pace et à sa description, nous nous intéresserons ici aux mécanismes de la description. Nous séparerons ce qui est dit, de la manière dont il est dit, (par manière, il ne faut pas entendre une stylistique, mais une grammaire). Nous chercherons la syntaxe et les articulations du sens, privilégiant ce qui est fait dans l'acte descriptif, par rapport au contenu de la description. Ce choix se justifie de plusieurs manières : Le fait que nous lisions les plans ne doit pas nous faire oublier que nous ne savons pas com­ ment ils sont lus. Comme architectes, nous avons appris à les lire, par une pratique, sans avoir posé de questions sur le fonctionnement. Ainsi, nous é- 14 tions dans la situation de quelqu'un qui sait parler une langue sans jamais l'avoir étudiée : il l'utili­ se pour ses besoins, et elle lui est transparente, en ce sens qu'il ne la voit pas et que sa pratique ne la lui rend pas sensible. Dans la position que nous adoptons ici, nous rendons à cette langue son épaisseur ; nous nous intéressons à elle et non pas à ce qu'elle permet de dire. Ce nouvel intérêt pro­ duit un savoir, et cela seul suffirait à le justi­ fier. Mais il y a d'autres raisons, d'ordre prati­ que : une étude du moyen de communication permet de mieux comprendre et de mieux évaluer ce qui est vé­ hiculé. A partir de ces deux améliorations, on peut postuler la possibilité d'un "mieux élaborer", dans la mesure où les plans sont impliqués dans la con­ ception de l ’espace. D'ailleurs, dans la mesure où le nombre d'intervenants dans la conception ne cesse de croître, de même que dans les procédures de déci­ sion, il devient essentiel de contrôler l'informa­ tion qui circule et de s'assurer de sa bonne cir­ culation : tout malentendu sur le contenu des do­ cuments qui véhiculent l'information se répercute nécessairement sur la qualité du produit final. Ainsi vue, la clarification des mécanismes de la significarion apparaît comme une exigence de ratio­ nalisation. Enfin, si ces différentes raisons n'en­ visagent que le côté "lecture" du plan, il est pos­ sible de tirer d'une analyse linguistique des règles pour "l'écriture" des plans, c'est-à-dire leur éta­ blissement. Un tel développement de nos travaux aurait des applications pédagogiques intéressantes. Bien que nous ne l'envisageons pas dans un avenir immédiat, nous le signalons parmi les raisons qui justifient une analyse des mécanismes de la signi­ fication dans les plans. Pour clore ce sujet, disons 15 enfin que l ’explicitation des mécanismes de la signi­ fication, dans le cas des plans tracés dans les agen­ ces d'architecture, peut servir de clef pour clarifier les conditions de lecture des plans tracés par les sorties graphiques des ordinateurs lorsque ces der­ niers sont sollicités dans la conception architec­ turale. En effet, cette phase de lecture est parti­ culièrement critique puisque le concepteur est amené à interpréter puis à évaluer les propositions graphi­ ques de la machine, et que rien n'a été fait sur ce sujet : tout l'effort porte sur ce que fait la machi­ ne, et non pas sur l'activité de son usager. Notre proj-et, tel qu'il est présenté, n'est pas par­ ticulièrement original. Il y a déjà des chercheurs qui se sont intéressés au dessin et qui ont analysé la manière avec laquelle il s 'exprime. Quelques uns se sont même intéressés au dessin en architecture. Certaines de leurs études se réclament de l ’analyse historique ou esthétique ; d'autres sont issues des problématiques de la reconnaissance des formes ou de la cartographie ; d'autres enfin se réclament des ma­ thématiques et tentent de préciser dans quelle mesure le plan se ramène à une projection et quelles en sont les conventions. Toutes ces études sont insatisfai­ santes. En premier lieu, parce qu'elles adoptent le point de vue de celui qui inscrit. Il s'en suit que le scripteur lit ce qu'il a voulu inscrire. La ques­ tion de savoir si quelqu'un d'autre lit autre chose, de plus ou de moins, n'est pas posée. En secont lieu, elles sont toutes axées sur l'aspect instrumental des plans : elles supposent que les plans servent à cons­ truire ou se contentent de décrire en espace existant. Dans les deux cas, le lien avec la réalité du monde 16 est présupposé. C 'est pourquoi ces travaux rencon­ trent quelque difficulté à rendre compte des dessins relatifs à des projets jamais construits, à des dessins utopiques qui n'ont même pas formulé le projet de se faire réaliser. Or il y a un moyen de sortir de cet­ te situation : il suffit d'utiliser les concepts linguistiques de signifiant, signifié, et référent. Le signifiant correspond à l'élément graphique du plan. Le signifié peut correspondre à l'espace dé­ crit par le plan, indépendamment de son existence réelle. Le référent serait dans ce cas l'espace construit, s'il existe. Au cas contraire, il n'y a pas de référent. Dans les deux cas, le référent n'appartient pas au monde de la langue où se si­ tuent le signifiant et le signifié. L'emprunt que nous venons de faire à la linguistique est élémentaire, mais il est fructueux. Pour que la méthode d'analyse mise au point par les linguistes à propos de leur objet d'étude puisse s'appliquer au nôtre, il faudrait vérifier qu'il y a une ressem­ blance structurelle minimale : peut-on dire, d'une façon qui ne soit pas métaphorique, que les plans en architecture constituent un langage ? Nous démon­ trerons qu'on peut répondre par l'affirmative. Mais cela ne suffit pas. En effet, notre question pré­ supposé des préalables méthodologiques et épisté­ mologiques : le critère que nous posons pour attri­ buer le statut de langage est un critère structu­ ral , et nous voulons appliquer à ce langage une méthode qui est elle aussi structurale. Ce choix, pour un travail analytique qui s'appuie sur les relations entre les termes de l'étude, est issu de nos exigences et de nos questions vis à vis de l'espace. Il suppose que comprendre, c'est mettre en structure, et que expliquer , c'est pouvoir com­ parer et confronter. Dans ce cadre là, notre recours 17 à la sémiotique n'est pas dicté par une mode, mais il est issu de notre propre problématique. Notre ma­ nière de questionner les plans nous aurait amenés à réinventer la sémiotique. Il se trouve que nous pou­ vons profiter des travaux antérieurs dans ce domai­ ne. Nous y choisirons ceux qui sont les plus proches de nos présupposés ; il s'agit des travaux de Louis HJELMSLEV. Ceci nous amène au coeur du sujet. 21 Qu'est-ce qu'un langage ? Le ROBERT le définit ainsi : "Tout système de signes permettant de servir de com­ munication entre les individus, de rendre intelligi­ ble un ensemble complexe". Si on se tient à cette définition, les plans constituent assurément un langage. Il est clair par contre que cette définition est beau­ coup trop large, et que si elle est satisfaisante pour un dictionnaire, elle ne saurait l'être pour une recherche. Il nous faut une autre définition, et qui soit sémiotique, puisqu'il s'agit d'appliquer une méthodologie sémiotique. Il y a peu de définitions du langage : en général, les linguistes étudient un objet qu'il savent être une langue., et ils ne se posent pas la question de sa définition. Seuls les travaux qui se veulent dé­ ductifs proposent une définition. Nous avons choisi celle que donne HJELMSLEV dans "La structure fonda­ mentale du langage" (1). Ce choix se justifie prin­ cipalement par la coïncidence de nos options épis­ témologiques avec celles de HJELMSLEV : souci de généralité des résultats, démarche déductive, rigueur des enchaînements. Ces mêmes raisons font que la théorie de HJELMSLEV, ainsi que la méthode qu'il préconise, sont applicables à l'architecture ellemême ou à tout autre système signifiant. Elles per­ mettent de distinguer un langage d'un système qui n'est pas un langage, et dressent un typologie : langages symbologiques, langages restreints, langa­ ges passe-partout... Pour pouvoir appliquer la procédure analytique choi­ sie, il faut commencer par démontrer que l'objet de l'analyse est un langage. C'est ce que nous allons faire. (D êd. de Minuit, 1968 22 La structure fondamentale du langage se résume en cinq points. Tout système qui satisfait aux cinq conditions est un langage, au sens de HJELMSLEV. 1. Tout langage comprend deux choses : une expression et quelque chose qui est exprimé (désigné par le ter­ me "contenu"). C'est une structure à deux faces, ou deux niveaux, qui se présupposent réciproquement. 2. Tout langage connaît deux axes : le système et le procès. Ce qui est immédiatement observable, c'est le procès; dans notre cas, ce seront des plans particuliers. L'a­ nalyse du procès permet d'atteindre le système, qui est une construction structurale. 3. Les catégories de l'expression et du contenu d'un langage commutent entre elles : une relation entre deux unités d'une même face du langage, qui est liée à une relation entre deux unités de l'autre face de ce langage, est appelée commutation. Le birapport ainsi défini peut se ramener pratiquement à l'obser­ vation suivante : une modification des termes de l'expression entraîne une modification correspon­ dante au niveau du contenu. 4. Il existe des relations bien définies entre les unités linguistiques. Ces relations, (implication, présupposition, combinaison,...), sont décrites en termes logico-mathématiques. 5. Les deux niveaux de l'expression et du contenu d'un langage ne sont pas en conformité structurale. Si les deux niveaux s'articulent selon le même sché­ ma (et sont donc conformes), on parlera de langage symbolique et non pas de langage ; c'est le cas de No Lc 3.1 23 nq l'algèbre et des mathématiques en général. Nous allons voir que les plans satisfont à ces cinq conditions. La première semble être la plus simple à vérifier : aux dessins du plan, on peut faire correspondre des espaces décrits. Sur le dessin ci-contre, on peut lire la disposition des bâ­ timents de l'Ecole du Cerf, à côté d'une maternelle, de terrains de sports, etc. Cette lecture pose cependant un problème : quel statut doit-on donner à ce qui vient d'être lu ? S'agit-il d'objets du monde naturel ou bien d'espaces signifiés qui relèvent du langage des plans ? En général, les lecteurs du plan croient devoir rap­ porter les éléments graphiques au référent, ou en d'autres termes, au réel. Cette interprétation "naïve" conduit à des non-sens, et nous allons montrer ci-dessous qu'il faut la rejeter et adopter l'opposition linguistique entre expression et contenu. Les plans d'exécution appartiennent à la classe plus étendue des discours techniques qui visent une cer­ taine maîtrise du monde naturel, dit "réel". Sans rentrer dans la discussion de cette réalité, il est possible d'en faire une analyse linguistique: Estce que le signifié du discours technique coïncide avec le référent ? Et pour prendre un exemple, le "culbuteur" d'un manuel de mécanique automobile estil l'objet manipulable par le mécanicien ou bien at-il des propriétés qu'il doit au seul discours ? 24 Le manuel ne cite que quelques propriétés du culbuteur, ces propriétés étant jugées essentielles ou représen­ tatives de l'objet. Si l'objet est défini par un en­ semble de qualités, le signifié textuel (du manuel de mécanique) est un sous-ensemble de la définition com­ plète, puisqu'il ne reprend qu'un certain nombre de qualités. Un discours scientifique sur l'objet aurait pour but d'établir une liste exhaustive de ces quali­ tés ou, si on doit se satisfaire d'une liste limitée, de donner les qualités premières qui présupposent les classes des qualités suivantes. Le référent est extérieur à la définition du domaine linguistique. Donc, en toute rigueur, la comparaison n'est pas faisable dans l'univers du langage étudié, mais à l'extérieur de ce langage. Si le référent est défini par un ensemble de quali­ tés, c'est à l'intérieur d'un discours descriptif. Par conséquent, comparer un référent défini par un » ensemble de qualités, à un signifié défini lui aussi par un ensemble de qualités, revient à comparer deux discours descriptifs, et non pas un discours (le lan­ gage) avec un non discours (le réel). Avant de faire cette comparaison, il faut répondre à une question préalable : qu'est-ce que le référent ? Qu'est-ce qui en fait partie ? Il est de tradition que les objets en fassent partie, mais que peut-on dire des relations et des actions ? Prenons l'énoncé "le piston est dans le cylindre" et supposons que nous soyons effectivement en présence d'un moteur à explosion. Au terme "piston", il est possible de faire correspondre un objet réel, de même qu'au mot "cylindre". Qu'en est-il du terme "dans" ? A quel référent renvoit-il ? Il renvoit à une relation comme les mots "sur", "entre", "contre",... Les rela- 25 tions font-elles partie du référent ou bien sont-elles des constructions mentales élaborées pour décrire le référent ? Ce n'est pas tout. Toute description attribue des qualités. Quel est le référent d'une qualité ? Quel est le référent des déplacements, et en général, des transformations ? On voit ainsi augmenter la population des signifiants auxquels on ne peut attribuer un référent, mais un signifié. De plus, s'il semble qu'on puisse attribuer un référent à l'énoncé déictique "ce piston", quel référent peut-on attribuer à l'énoncé "tous les pis­ tons" ? Et si l'on a pu nourrir l'illusion qu'il est possible d'attribuer un référent à un "nom commun", on voit disparaître cette possibilité. La liaison entre un signifiant et un référent n'est donc qu'exceptionnelle. Le cas général, toujours vé­ rifié, c'est la liaison entre deux objets linguisti­ ques : le signifiant et le signifié, en d'autres ter­ mes, une unité de l'expression et une unité du conte­ nu. Pour des raisons de clarté, nous avons appuyé notre démonstration sur un exemple pris dans la langue na­ turelle. Il est possible de la refaire à propos de la portion de plan relative à l'Ecole du Buffle : y at-il un objet du monde naturel qu'on puisse identi­ fier avec les plans ? Au moment où les plans sont conçus, il n'y a certainement pas d'objet possédant les qualités décrites. Un tel obiet existera peutêtre, mais au moment de la lecture des ulans, il y a un "espace signifié" qui est exprimé. Si les plans ne sont jamais exécutés, il n'y aura pas de référent. 26 De toute évidence, seul l ’espace signifié est attaché à l'expression du plan, et leur couple constitue la base du langage des plans. L ’espace signifié ne peut être perçu s ’il n'est pas exprimé par les "dessins". Il les présuppose. Réciproquement, les dessins du plan expriment toujours un espace signifié. Ils le présupposent. Ainsi, entre l'expression et le contenu il y a prêsupposition réciproque. Si de plus nous considérons maintenant le signifiant comme un ensemble de qualités et que nous le compa­ rons au signifié et au référent, nous pourrons qualifier le degré de ressemblance. C'est à une telle comparaison du signifiant et du référent que s'appli­ quent les qualifications de "signe iconique" ou de "analogon" utilisées en sémiotique visuelle : "le si­ gne est dit iconique s ’il ressemble à son référent". Or, nous venons de voir qu'on ne peut parler de réfé­ rent qu'en très peu de cas, alors que l'usage des termes "signes iconiques" et "analogon" est beaucoup plus large. Force est donc de conclure que bon nom­ bre de sémioticiens amalgament signifié et référent (comme le fit d'ailleurs SAUSSURE dans sa démonstra­ tion de 1 ’arbitrarité du signe), et que la ressem­ blance impliquée par la pratique réelle des termes "signes iconiques" et "analogon" n ’est pas entre le signifiant et le référent, mais entre le signifiant et le signifié. Il ne sert à rien d'objecter qu'ils ne peuvent se ressembler car l'un est matériel et l'autre conceptuel : la matérialité et la conceptua lité ne sont que des qualités qui les opposent (et non des natures) alors qu'ils ont en commun un cer­ tain nombre d'autres qualités. Nous verrons, dans le cas des éléments signifiants non superposables, que les qualités communes au signifiant et au signifié 27 sont des qualités spatiales relatives aussi bien aux parties de l'élément qu'à ses combinaisons. Dans le cas des éléments superposables, seules les qualités spatiales relatives aux combinaisons sont communes au signifiant et au signifié. La deuxième condition se résume par l'opposition SYSTEME / PROCES Dans son acceptation la plus large, cette opposition n'est pas proprement linguistique : elle provient de l'épistémologie scientifique générale qui suppose une régularité sous l'aspect contingent des faits obser­ vables. Le procès, c'est le texte proposé à l'analyse, et le système correspond à la langue à partir de la­ quelle sont produits tous les textes. En ce qui con­ cerne les plans, cette hypothèse est sous-jacente à toute étude qui cherche à ne pas rester dans le cadre du document d'analyse, visant des résultats d'ordre plus général. Il n'est pas possible de montrer en peu de place qu'on peut construire un système à partir des plans proposés à notre observation, et en toute ri­ gueur une telle vérification ne peut se faire qu'à la fin d'une analyse sémiotique. On peut cependant don­ ner une démonstration par l'absurde : s'il n'existait pas un système sous-jacent à tous les plans, ces plans seraient incompréhensibles, et chacun d'eux nécessi­ terait un apprentissage spécial. Comme tel n'est pas le cas, l'hypothèse de non-existence du système doit être fausse. La troisième condition est celle de la commutation. Définie formellement comme un birapport entre des uni­ tés de l'expression et des unités de contenu, elle peut être présentée plus simplement de la façon sui­ vante : un changement au niveau de l'expression en­ traîne un changement au niveau du contenu. 28 Considérons le dessin cicontre, représentant une place inscrite entre qua­ tre bâtiments. Si on la replace dans le contexte du document original (plan 14 C de Grigny La Grande Borne), on peut dire qu'elle est gazonnée. Il est possible de la décrire comme une place sensible­ ment rectangulaire, rela­ tivement grande, avec quatre ouvertures, contenant un objet-monument linéaire matérialisant la direc­ tion Sud-Nord et dénommé "LE MERIDIEN DE GRIGNY". Effectuons la transformation suivante : plaçons, dans le dessin précédent, l'ensemble des éléments qui représentent un groupe de bâtiments du quartier des ENCLOS (cf plan 14 C). Ceci modifie complètement la lecture du dessin : il ne s'agit plus d'une gran­ de place, mais d'un groupe de bâtiments entourant une petite place, tout en ménageant quelques espaces libres entre les grands blocs ondulés et les petits immeubles. Une voie de circulation automobile vient faire une boucle sur la place, et ne serait-ce qu'en cet endroit,- on peut affirmer qu'il n'y a pas de ga­ zon. Il n ’y a plus de matérialisation du méridien local, ce qui annule la motivation de la dénomination du quartier. On voit donc que la commutation est possible. L'exem­ ple ci-dessus porte sur des unités complexes, mais il est facile de voir qu'on peut en effectuer sur des unités plus réduites. 29 La quatrième condition est celle de l'existence de re­ lations bien définies entre les unités linguistiques. Pour HJELMSLEV, il s'agit de relations logiques d'im­ plication, présupposition, etc. Nous avons relevé un grand nombre de telles relations dans notre travail "Sémiotique des Plans en Architecture" (1). Ces relations sont définies d'après les occurences dans le procès, et les commutations qu'on peut opérer. Nous allons donner un exemple. Le rond tracé en trait fin représente un arbre. Ce rond est occurrent dans divers contextes : il contient quel­ ques fois un carré tracé en trait fin, d'autres fois un carré poché noir, etc... Comme le carré poché et le carré non poché ne sont ja­ mais occurrents isolés, nous dirons qu'ils présupposent le rond. Par contre, si le rond ne présuppose ni l'un ni l'autre, il présuppose la classe des éléments qui en occupent le centre (et cela peut être aussi bien un point qu'un carré barré en diagonale, etc.) Sur le plan du contenu, cette classe représente le traitement du sol autour du tronc de l'arbre : bac, trou bétonné, gazon. .. Nous voyons ainsi qu'à la relation géométrique de l'in­ clusion se superpose une relation de présupposition simple dans un sens ou dans l'autre, selon les catégo­ ries d'éléments considérés. Ces relations servent à décrire le système et à décrire les syntaxes, comme on peut le voir dans S. P. A. (1) publié en 1974. Etant donné que nous aurons souvent à citer cet ouvrage, nous le désignerons par les lettres S- P. A. suivies du numéro de page ou de paragraphe. 30 La cinquième condition est celle de la non-confor­ mité des niveaux de l'expression et du contenu. Elle sert à distinguer un langage d'un langage symbolique, dont la description exhaustive n'exige pas la sépara­ tion en deux niveaux de l'expression et du contenu. En effet, si les deux niveaux sont conformes (ou iso­ morphes), la description de l'un suffit pour nous faire tout connaître de l'autre. C'est le cas, en particulier, de l'algèbre et de la géométrie : leurs niveaux de l'expression et du contenu y sont isomor­ phes, et il n'est pas utile de les distinguer. Par contre, un langage, même restreint, possède deux niveaux non-isomorphes. Un isomorphisme se définit en fonction de certaines relations. Soit I un isomorphisme entre deux ensem­ bles A et B. A tout élément X de A correspond par I un élément Y de B (dans notre cas, I serait la relation de sémiose). De plus, si on définit une relation R dans A telle que : X1.R.X2 alors on doit avoir dans B une relation Q telle que : Y1.Q.Y2 Pour montrer qu'il n'y a pas isomorphisme, il suffit de donner un seul contre-exemple. Soit la portion de plan suivante : 31 Niveau de l'expressicn : La région XI est simultané­ ment contiguë (en contact) avec les régions X2 et X3. Niveau du contenu : Le bâtiment Y1 est simultanément en contact avec la voie Y2 et l'espace vert Y3. Des deux transcriptions ci-dessus, on conclut qu'il y a conservation des correspondances entre éléments avec les relations spatiales. Il y a donc isomorphisme spa­ tial . Cependant, le niveau du contenu ne se restreint pas à un aspect spatial. Comme nous le verrons plus en détail dans la troisième partie (analyse du contenu), tout espace présuppose un faire. Ainsi, le bâtiment présuppose le faire "habiter". La voie présuppose le faire "circuler", l'espace vert présuppose le faire "se promener". Signalons ici qu'il ne faut pas con­ fondre "faire" et "fonction", et laissons la discus­ sion de cette distinction à l'analyse du contenu et à celle de notre discours descriptif. Cette précision étant donnée, regardons les relations entre les trois faire précités. Il n'y a pas de sens à dire que le faire "habiter" est simultanément en contact avec le faire "circuler" et le faire "se promener". Une telle relation spa­ tiale est hors de mise pour le concept de "faire", et il faut supposer d'autres relations. Dans le cas de notre exemple, les trois faire impliqués s'organi­ sent selon l'axe sémantique public/privé. voie jardin logement public--------------------------------- privé circuler se promener habiter Chacun des trois espaces peut à son tour être réor- 32 ganisé le long de l'axe public/privé. Cette mise en relation n'est pas isomorphe avec la mi­ se en relation par contact spatial. Ce seul contreexemple suffirait pour prouver que nous n'avons pas affaire à un langage symbolique niait à un langage. Soit l'élément de l'expression ci-contre Il signifie : en cet endroit, il y a un arbre . Or un arbre n'est jamais circulaire, et il serait aberrant de supposer que tous les arbres de GRIGNY (d'où est tiré cet exemple) sont circulaires et de diamètre constant : la forme d'un arbre varie selon son essence et selon son âge. Dans ce cas, il n'y a même pas isomorphisme spatial. Ce même raisonnement peut être tenu pour tous les élé­ ments superposables (voir la définition § 2.5) : la propriété essentielle de leur sémiose est de ne pas être en isomorphisme spatial. Par contre, les élé­ ments superposables peuvent connaître en certains cas des isomorphismes de caractère ordinal ou algébrique. Le trait illustre bien ce cas : l'ordre des épaisseurs du trait sert à exprimer le degré de pénétrabilité de l'espace cerné (voir analyse du contenu). Cet exemple n'est pas unique, et La Graphique de BERTIN se consacre presque entièrement à l'étude de tels isomorphismes. On peut opposer l'isomorphisme géométrique et les iso­ morphismes ordinal et algébrique, et à partir de cette opposition construire un carré sémiotique : X isomorphisme spatial isomorphisme ordinal ou algébrique non isomorphisme non isomorphisme ordinal ou algébrique spatial 33 La colonne de gauche correspond à des éléments nonsuperposables (ex : éléments signifiant les bâtiments, la voierie,...) ; celle de droite correspond aux traits et aux pointes (voir § 2.4). Les cartes de l'I. G. N., dans leur expression planimétrique, se placent sur la ligne du haut : elles représentent des régions dont l'expression et le contenu sont spatia­ lement isomorphes, de même que leurs mesures (ex : superficie) sont ordonnables et en isomorphisme algé­ brique. Par contre, des éléments tels que le cercle signifiant "arbre" ne connaissent ni un isomorphisme spatial, ni un isomorphisme algébrique. Les différents éléments du plan se distribuent entre les lignes et les colonnes du carré ci-dessus. Comme il suffit de l'existence d'éléments occupant la li­ gne inférieure pour que le système ne soit pas un langage symbolique, et que cette condition est sa­ tisfaite, nous pouvons dire que les plans en archi­ tecture sont un langage selon la définition de HJELMSLEV. Ayant démontré que nous avons affaire à un langage, nous justifions pleinement l'introduction de la mé­ thode sémiotique : nous ne faisons pas une comparai­ son, mais nous travaillons sur la base d'une identi­ té structurale. Nous aborderons séparément l'analyse de l'expression et celle du contenu, essayant de les rendre aussi indépendantes l'une de l'autre que pos­ sible. Nous ne prétendons pas que les deux niveaux soient indépendants, mais la clarté de l'exposé a tout à gagner d'une telle séparation, aussi artifi­ cielle qu'elle soit. Il se peut que l'exposé puisse paraître parfois dog­ matique et théorique. Cela serait dû à deux facteurs : 34 1 - Nous avons essayé de présenter des résultats re­ latifs au système du langage des plans, et non pas à propos de procès particuliers. De tels résultats sont nécessairement abstraits et théoriques. 2 - La méthode d'analyse que nous détaillons ci-après est le résultat d'un faire analytique : nous analy­ sons des plans particuliers depuis quatre ans, et ce sont ces analyses qui nous permettent d'affirmer l'exactitude et l'efficacité de la méthode. Une grande partie de ces analyses est rapportée dans no­ tre publication intitulée "Sémiotique des Plans en Architecture". C'est pourquoi nous y ferons des ren­ vois fréquents. Précisons enfin que l'étude du système d'un langage n'a de sens que par rapport à une communauté cultu­ relle qui l'utilise. Notre travail s'est situé à l'in­ térieur de la production des architectes français. Au stade actuel de notre recherche, nous ne pouvons ni affirmer ni nier la pertinence des frontières de la "langue naturelle" en ce qui concerne le langage des plans. Il y a une étude comparative à faire, mais elle devra s'appuyer sur une théorie du langage des plans, même si une telle théorie a été élaborée à partir d'un cas particulier. 37 Dans sa recherche des unités et des relations entre unités, la sémiotique a une démarche algébrique : les unités sont discrètes et s'opposent les unes aux au­ tres comme autant d'entités séparées. La manière dont elles s'organisent pour former le langage relève de la combinatoire (une partie de l'algèbre). Or, l'objet de notre' étude présente une certaine continuité : il porte des lignes, tracées sur une surface. Pour que cet objet continu puisse s'articuler en un système sémiotique, il faut qu'il puisse être découpé en uni­ tés discrètes. Nous avons vu (cf S. P. A. §§ 8, 9 et 10) qu'un tel découpage peut être produit de façon systématique et que les unités obtenues peuvent for­ mer des syntaxes (cf syntaxes formelles, S. P. A.§§ 11, 12, 13, 14, 15, 16 et syntaxes sémantiques S. P. A. § 17). Nous verrons ci-après un exposé de la méthode de découpage, ainsi qu'une analyse des raisons qui nous le font adopter. Ce sera l'objet des paragra­ phes 2.2 et 2.3. Le classement des unités obtenues permet de dépasser le caractère individuel de chacune d'elles et de définir des classes d'unités qui relè­ vent du système alors que les unités reconnues sur un document relèvent du procès. A l'intérieur du système, il est possible de distin­ guer un niveau profond et un niveau de surface : les unités définies au niveau profond peuvent se mani­ fester de plusieurs manières au niveau superficiel. Ce dernier est celui de la manifestation graphique (cf § 2.4), alors que le niveau profond est celui de l'algèbre et de la topologie (§§ 2.2 et 2.3). bnfin, l'analyse des relations d'appartenance d'un point à une ou plusieurs régions, permet de séparer les unités et leur manifestation en deux ensembles (nommés respectivement superposable et non-superpo­ sable, cf § 2.5). L'application à un document donné 38 de ces quatre pertinences d'analyse, que nous appe­ lons "axiologies de l'étude", produit les résultats consignés dans notre publication "Sémiotique des Plans en Architecture". Bien que notre recherche ait avancé depuis, et que notre manière de voir les choses ait évolué, ce document est toujours à l'ar­ rière-plan de notre réflexion, et sa lecture est in­ dispensable à la bonne compréhension de ce qui sui­ vra. 2.1 AXIOLOGIES DE L'ETUDE DE L'EXPRESSION L’expression (cf. SPA (1) Deuxième partie) est analysée selon quatre axiologies indépendantes : - l'axiologie algébrique (nous la désignerons par A), selon laquelle tout objet s'analyse en parties, et se combine avec d'autres objets pour former des objets plus importants. On retrouve ici la problématique de HJELMSLEV. - l'axiologie géométrique (nous la désignerons par G) qui définit l'élément minimal au niveau topologique, lui attribue d'autres qualités au niveau projectif, le qualifie encore au niveau métrique. Ces trois niveaux correspondant à trois géométries définies par leurs invariants et les transformations qu'elles admettent, sont logiquement dépendants : le niveau métrique im­ plique le niveau projectif qui implique le niveau topologiquc. - l'axiologie de la manifestation graphique (nous la désignerons par M) : tout élément conçu et analysé se­ lon les deux axiologies précédentes, ne peut exister qu'à travers une manifestation graphique qui peut re­ vêtir deux aspects : • la continuité • la discrétisation Dans les manifestations continues, il faut distinguer deux cas : • La ligne est définie comme une variation brutale de densité sur le support? (1) SPA : Sémiotique des Plans en Architecture 40 (opposition de deux couleurs, du noir et du blanc), auquel cas tout trait apparaît comme une région. . La ligne est équivalente au trait (cf SPA § 8.1). Dans les manifestations disconti­ nues, il faut ranger les li­ gnes interrompues, les ha­ chures, le grain (cf. BERTIN b6). - l'axiologie logique des lois d'appartenance (nous la désignerons par L) : l'analyse que nous avons déjà faite (SPA §§9.9 et 9.10) nous a montré la coexis­ tence, au sein du même corpus, de deux groupes d'élé­ ments signifiants, distingués selon une loi logique : . Pour les éléments non-superposables, un point pris à l'intérieur du contour d'un élément A appartient à A et ne peut appartenir à un autre élé­ ment ; . pour les éléments superposa­ bles, un tel point appartient simultanément à A et à un au­ tre élément qu'on peut préci­ ser selon les occurrences. Nous disons que ces quatre axiologies sont indépendan­ tes en ce sens qu'elles peuvent se combiner l'une à l'autre et que aucune ne peut se ramener à une combi­ naison des trois autres. Cependant, nous pouvons noter les liens qui les unissent : En premier lieu examinons les relations de présupposi­ tion, s'il y en a. 41 A ne présuppose ni G, ni M, ni L. C'est donc une axiologie principale, celle de HJELMSLEV et de BERTIN. G. Si la topologie ne présuppose pas l'algèbre, les au­ tres géométries introduisent des invariants algébri­ ques. Ainsi, G présuppose A. Elle ne présuppose pas M dans l'absolu car elle peut se manifester autrement que dans les deux dimensions du plan : soit dans l'es­ pace, soit sous forme algébrique. Cependant, dans le cas (qui est le nôtre) où le corpus analysé est bidi­ mensionnel, la géométrie présuppose une manifestation qui la propose à nos sens. M, la manisfestation graphique présuppose les géométries qu'elle manifeste . Donc M présuppose G qui présuppo­ se A, donc M présuppose A. On le voit facilement quand il s'agit de mesurer l'épaisseur d'un trait : il y a mesure, donc quantité et algèbre. M présuppose les lois d'appartenance comme cela sera mis en évidence par l'analyse. L présuppose M qui a servi à établir les lois (SPA §§ 9.6 à 9.9) et par conséquent, sans même chercher a voir les relations directes avec A et G, on peut dire que L les présuppose par transitivité. Cependant, la taxinomie connaît des lois de classification et d'appartenance indépendantes de la géométrie. En ré­ sumé, nous avons le schéma suivant : °u la flèche <— indique la présupposition simple et la double flèche «— >indique la présupposition réci­ proque. Si nous extrayons les structures topologiques de l'axiologie géométrique, et que nous les notons T, nous aurons le schéma : 42 En second lieu, examinons les combinaisons de ces axiologies. A priori, il y aurait six combinaisons deux à deux (AG. AM. AL. GM. GL. ML), quatre combinaisons trois à trois (AGM. AGL. AML. GML), et une combinai­ son des quatre. Les relations de présupposition faus­ sent ces cas théoriques, transformant AG et GM en AGM, lequel cas se ramène, on le verra, à AGML avec une seule loi d'appartenance qui passe au second plan du fait de sa constance. De même AL, GL, ML, AGL, GML, se ramènent à AGML. Enfin, AM et AML sont des struc­ tures algébriques manifestées de façon non géomé­ trique (contes, relations de parenté,...) ce qui les fait sortir du cadre de notre travail. En résumé, les quatre axiologies s'avèrent nécessai­ res pour l'étude de tout corpus graphique. Pour terminer, rappelons que ces axiologies se rappor­ tent au niveau de l'expression. Si elles ne s'appli­ quent pas toutes au niveau du contenu, (en particu­ lier celle de la manifestation graphique), nous ver­ rons qu'elles s'articulent sans exception avec le contenu, mais que cette articulation varie d'une axiologie à l'autre, entraînant la distinction de plu­ sieurs codes qui fonctionnent simultanément dans le plan. 43 2.2 AXIOLOGIE ALGEBRIQUE C’est 1'axiologie la plus générale parmi celles que nous utilisons. Elle se retrouve dans la démarche scien­ tifique comme dans celle de la "pensée sauvage". Nous allons essayer de l'analyser en fonction de ce que nous en appliquons dans notre travail. Toute chose soumise à un examen scientifique est un objet de savoir, aussi bien qu'une chose matériel­ le qu'une chose immatérielle (ex : concepts) , qu'elle ait existé (ne serait-ce que dans l'es­ prit de quelqu'un) ou non. Toute chose sur la­ quelle s'exerce notre entendement est ainsi trans­ formée en objet de savoir. Ci-dessous, nous dirons plus simplement "objet", par économie. L'objet sera examiné dans une perspective combinatoi­ re, mais de deux points de vue différents qu'on pour­ rait désigner, en les oppasant, par "intérieur" et "extérieur". Nous pouvons essayer de résumer chacun de ces points de vue en une phrase que nous analyse­ rons après. 2.21 point de vue "intérieur" : Tout objet est analysable en composantes dont il est un résultat combinatoire. 2.22 point de vue "extérieur" : Tout objet se combine avec d'autres objets pour don­ ner un objet composé. 44 La première affirmation (2.21) correspond à l'un des principes de la méthode de DESCARTES : pour étudier une question, il est possible de la diviser, d'en étu­ dier les parties, et de recomposer le tout par une synthèse. Il est évident que la même affirmation s'applique aux parties prises elles-mêmes en tant qu'objets. Si au­ cune restriction n'est apportée, la chaîne ne s'arrê­ te pas et devrait continuer indéfiniment. Nous savons que certaines démarches procèdent ainsi, alors que d'autres posent un point limite. Ainsi, HJELMSLEV propose de partir d'une langue et de poursuivre la division jusqu'aux figures, qui sont les composantes (des signes) auxquelles s'arrêtera la di­ vision. La deuxième affirmation (2.22) ne fait qu'étendre à l'objet lui-même la propriété combinatoire que DESCARTES reconnaissait aux parties. Là non plus, il n'y a aucune raison d'arrêter la chaîne logique, sauf si les propriétés mêmes des éléments assemblés, ou le résultat de l'assemblage s'y oppose. Ainsi, la physi­ que reconnaît une borne supérieure de la combinatoire de même qu'elle reconnaît, ne serait-ce que provisoire ment, une borne inférieure. Pour tout objet différent des bornes supérieure et in­ férieure (si elles existent dans l'univers considéré), les deux affirmations combinatoires sont posées comme vraies. Si nous décidons d'attribuer un rang (degré) à chaque objet ainsi analysable, et que ce rang soit dénommé n, cet objet sera mis en relation avec le de­ gré (n-1) de ses composantes par le point de vue "intérieur" et avec le degré (n+1) de ses composés par le point de vue "extérieur". 45 Au cas où l'affirmation (2.21) ne reçoit aucune limi­ tation, on dira que l'ensemble des objets analysés est continu. Formellement, cela se traduit par le fait que les parties seront aussi petites qu'on voudra. Ce fait d'être aussi petit qu'on voudra ne comporte aucune idée de mesure, et pour s'en assurer, il suffit d'énon­ cer le résultat ainsi : "il est possible de trouver,, pour toute partie, des parties qui y sont contenues sans être confondues avec elle". Cette propriété est topologique, elle caractérise le contenu mathé­ matique. Nous touchons ici l'un des liens entre les structures algébriques et les structures topologi­ ques . Au cas où l'affirmation (2.21) reçoit une limitation, c'est-à-dire que les découpages successifs connaissent une borne inférieure, on dira que l'ensemble des objets analysés est discret. La borne inférieure aura le rang zéro, les autres objets recevront un rang dépendant de leur complexité combinatoire. La linguistique a choisi un système discret pour étu­ dier les langues naturelles. C'est par ce système com­ binatoire que différents auteurs expliquent la riches­ se et l'économie du langage. Quelques uns y voient meme sa spécificité. De ce qui précède, il apparaît clairement que ce système n'est pas spécifique du lan­ gage, et que la combinatoire et la discontinuité (on ne dit pas "discrétion" !) se retrouvent dans nombre de structures scientifiques et relèvent du cadre algébri­ que. Ce qui est spécifique du langage, c'est la divi­ sion en deux niveaux (expression et contenu) et leur corrélation. Nous ne pouvons qu'être en accord total avec HJELMSLEV sur ce point. Quant au système continu, s'il a posé des problèmes aux philosophes antiques (paradoxe d'Achille et de la tortue, du coureur et de la flèche), il est bien ana­ lysé par les mathématiques et fonde les structures to­ pologiques. Nous y aurons recours pour l ’étude des plans en architecture, et nous nous retrouverons donc avec un système linguistique qui traite du continu. Nous verrons qu'il n'y a là rien d'insurmontable. Si nous partons du corpus entier, en appliquant la méthode analytique de HJELMSLEV au niveau de l'ex­ pression seul, il nous faut une méthode de décou­ page. Cette méthode, nous l'avons esquissée au pa­ ragraphe 2.1 en exposant les axiologies de l'étu­ de. Le produit de ce découpage serait qualifiable de "scientifique" par opposition à un découpage "sémiotique" (1). Non point que le découpage sémiotique ne soit point scientifique : il l'est certainement si l'application est rigoureuse, mais il se distingue des autres découpages scientifiques en ce qu'il tient compte de la bi-planarité du langage. Il est possible de produire un grand nombre de découpages scientifi­ ques d'un seul et unique objet. Si cet objet est un langage, l'un de ces découpages sera plus pertinent que les autres : celui qui tiendra compte de l'Ex­ pression et du Contenu en faisant jouer la commutation. Puisqu'il s'agit de deux découpages (scientifique et sé miotique) d'un même objet, il est légitime de poser la question suivante : sont-ils comparables ? En termes mathématiques, un découpage est une partition, et deux partitions sont comparables si toute classe de l'une peut s'écrire comme une réunion de classes de l'autre. Dans ce cas, la deuxième est dite plus fine que la pre­ mière. Si cette condition ne peut être remplie ni pour (1) Nous reprenons cette opposition à A.J. GREIMAS 47 l'une ni pour l'autre, on dit que les deux parti­ tions ne sont pas comparables entre elles. Rela­ tivement aux découpages sémiotique et scientifique, on peut affirmer avec certitude qu'il existe au moins une partition scientifique plus fine que le décou­ page sémiotique : - Tout découpage est fait selon des règles dépendant d'un point de vue donné. En changeant de point de vue et en conservant la rigueur d'application des règles, il est possible de définir plusieurs découpages scientifiques, dont quelques uns moins fins que le découpage scientifique, et d'autres non comparables. - Le découpage sémiotique est un type donné de dé­ coupage scientifique, possédant en outre la carac­ téristique de s'arrêter conventionnellement à des unités (qu'il appelle minimales) correspondant à un contenu. Il suffirait de découper ces dites unités selon un critère formel quelconque pour obtenir un découpage scientifique plus fin. Il existe donc toujours un découpage scientifique plus fin qu'un découpage sémiotique. Toute partition, quelle que soit sa finesse, s'occu­ pe de ranger les unités qü'elle produit : il s'agit de savoir lesquelles sont identiques (ou semblables) et lesquelles ne le sont pas. Ceci n'est ni plus ni moins qu'une opération taxinomique s'appuyant sur les relations qu'entretiennent les unités entre elles. Deux objets (unités) quelconques peuvent être compa­ rés (certains diront opposés) en définissant entre eux une relation qui s'exprime par un couple conjonc­ tion-disjonction. La conjonction est l'ensemble des qualités communes, ce qui en fait des objets sem­ blables. La disjonction est l'ensemble des qualités qui appartiennent à l'une sans appartenir à l'autre 48 (et inversement), ce qui permet de les différencier. Ces deux notions supposent que les objets à comparer sont définis comme des ensembles (de composants, de qualités, de relations,... peu importe : il s'agit d'ensembles, peut-être hétérogènes). La classiffication peut être analysée en une série d'opérations mettant en relation les unités deux à deux, et cela quel que soit le nombre total des uni­ tés. Ces relations sont dites alors binaires et peu­ vent être elles-mêmes caractérisées par leurs pro­ priétés formelles. Deux types de relations binaires sont nécessaires pour la classification : les rela­ tions d'équivalence et les relations d'ordre. Une relation R est dit d'équivalence si elle est : - symétrique (nous avons simultanément A.R.B. et B. R. A . , c'est-à-dire que l'objet A est à B ce que B est à A), - réflexive (on pourra dire A.R.A. A titre d'exemple, on peut citer la relation d'égalité : A=A) - transitive (si A.R.B. et B.R.C., alors A.R.C. exemples : A=B et B=C, alors A=C). Une relation d'équivalence permet de réunir en une même classe tous les objets entretenant entre eux la dite relation. Ces classes (d'équivalence) sont rangées et orga­ nisées par des relations d'ordre. Une relation bi­ naire est dit d'ordre si elle est: - transitive (voir définition ci-dessus) - antisymétrique (si A.R.B., c'est-à-dire : si A est en relation R avec B, alors B n'est pas en relation R avec A. Exemple : si A est contenu dans B, alors B n'est pas contenu dans A). Une relation d'ordre est dite réflexive si, en plus de la transitivité et de l'antisymétrie, elle offre la réflexivité (A est en relation R avec A. Exemple : A est "plus petit ou égal à" A). 49 Dans le cas général, une relation ne peut être qua­ lifiée ni comme relation d'équivalence, ni comme re­ lation d'ordre, alors qu'elle peut toujours être ana­ lysée en termes de conjonction et de disjonction. La raison en est dans le fait que ces dernières se trans­ crivent en termes de réflexivité et de symétrie, mais n'impliquent rien quant à la transitivité. La transi­ tivité apparaît donc comme une qualité fondamentale des relations permettant d'operer une classification. Il est à noter que la commutation est une relation d'équivalence produisant des classes d'équivalence que la linguistique appelle paradigmes. Un syntagme est une suite ordonnée d'éléments impliquant chacun un pa­ radigme. L'opposition système/procès qui sous-tend le couple paradigme/syntagme (cf. HJELMSLEV) repose donc, en dernière analyse., sur les relations transitives d'ordre et d'équivalence. L'intérêt de ces relations est tel qu'on cherche toujours à les mettre en évi­ dence par une définition adéquate des objets étudiés. La méthode traditionnelle d'étude des objets se can­ tonnait au découpage de l'objet en parties, et essa­ yait de le recomposer. Il s'agissait en fait de l'ex­ ploration de la relation entre le degré (n) de l'objet et le degré (n-1) des parties. On suppose ainsi que l'objet est entièrement déterminé par la combinatoire de ses parties (Exemple : en chimie, une molécule est analysée en éléments simples, un élément simple en no­ yau atomique et nuage électronique.) Plus récemment, on a essayé de définir les objets uni­ quement par l'étude de la relation des degrés (n) de l'objet et (n+1) de ses combinaisons. C'est ce qu'on a appelé la définition de l'objet par ses relations, ou par le réseau de ses relations. On suppose ainsi que l'objet est entièrement détermi­ né par la combinatoire dans laquelle il n'est qu'un 50 élément (Exemple : en géométrie, le point est intersec­ tion de deux droites, la droite est l'intersection de deux plans,...) En fait, s ’il est exact que certains objets sont dé­ terminés principalement par leurs parties, il n'en reste pas moins qu’ils tirent certaines de leurs pro­ priétés de leurs combinaisons. Et réciproquement. De plus, il est des objets dont les propriétés com­ binatoires proviennent de leurs parties (Exemple : les propriétés d'assemblage des bâtiments en portion de couronne de Grigny (SPA §§ 1.3 et suivants) pro­ viennent des murs aveugles droits et des façades per­ cées courbes qui en forment les faces). Ainsi une définition relationnelle des objets ne sau­ rait se cantonner à un niveau hiérarchique fixé à l'a­ vance (n-1, n, n+1). La comparaison des objets les uns aux autres conduit à leur attribuer des qualités. Cette mise en rela­ tion étant analysable en conjonction/disjonction, on en déduit qu'une relation est analysable en termes de présence ou d'absence de qualités. Si l'objet est descriptible par un ensemble de qualités, la relation s'appuie alors sur une partie de cet ensemble. De plus la relation possède ses propres qualités (Ex : réflexivité, transitivité, symétrie...) qui se pla­ cent à un niveau hiérarchiquement supérieur. On peut donc constater que les objets (la substance), et les relations entre objets (la forme) sont descriptibles en tant qu'ensembles de qualités. Cette consta­ tation empirique de la méthodologie est en accord avec une position épistémologique fondamentale : toute question à propos de la nature d'un objet ne peut re­ cevoir de réponse. Il n'y a donc aucun sens a la po­ ser. Tout ce qu'on peut dire d'un objet sert à le qualifier. 51 Il ne revient pas au même de dire, "un objet est un ensemble de qualités", ou "un objet est défini par un ensemble de qualités". La première proposition affirme quelque chose relativement à la nature de l'objet, la deuxième ne fait qu'énoncer une qualité de plus. C'est cette dernière que nous retiendrons. Les qualités d'un objet peuvent être nombreuses. Comme elles sont dépendantes à la fois du point de vue et de la mise en relation, on peut même envisa­ ger que ces qualités soient en nombre infini. Ce­ pendant, il n'est pas certain que toutes ces quali­ tés soient intéressantes, ni que leur prise en comp­ te donne quelque chose de très différent de ce qu'on pourrait obtenir en se restreignant à la manipula­ tion de quelques qualités, qu'on dira "significa­ tives", c'est-à-dire commodes et rentables. Cela revient à remplacer la suite infinie des qualités par un nombre fini. Si tout objet de connaissance est définissable comme un ensemble de qualités, nous n'avons pas en­ core dit ce qu'est une qualité. On peut dire qu'une qualité est la différence minimale entre un ou plu­ sieurs objets. Avec un tel énoncé, nous utilisons en fait la notion de relation pour définir la notion de qualité. Or, nous disions qu'un ensemble de qualités nous servirait à définir un objet. Il s'avère par conséquent que la définition est inversible : on peut remplacer qualité par objet et réciproquement. c 'est un cas typique de dualité entre deux notions dont l'une ne peut être première pour l'autre. Elles présupposent réciproquement. 52 Il importe de préciser qu'il n'y a pas ici de "cer d e vicieux" : il y a deux termes qui sont simulta­ nément premiers, l'un se définissant en relation avec l'autre, comparables en cela au couple signifiant/signifié ou au couple expression/contenu. Identité : Un objet est défini par un ensemble de qualités. Deux objets définis par les memes ensem­ bles de qualités sont indiscernables. En d'autres termes, deux objets ne peuvent être distingués l'un de l'autre s'ils entretienne! les mêmes relations avec le reste de l'univers d'étude. L'identité d'un objet est donc doublement dépendan­ te : de l'univers qui lui sert de reference. - du point de vue : on peut en effet réduire le nombre de qualités pertinentes pour la définition d'un ensemble d'objets. Ainsi, on peut, en modi­ fiant la définition, rendre répétitifs des objets qui, d'un autre point de vue sont distingués. A titre d'exemple, pour un statisticien, tous les français peuvent être identiques d'un certain point de vue : il dira il y a 56 millions [ou plus ou moins) de français. Peu lui importe que M. Dupont soit plus riche ou plus vieux que M. Durand. Il s'oc­ cupe simplement de la nationalité. Il y a donc une seule qualité (la nationalité) retenue pour exami­ ner l'univers des hommes habitant un pays. Ressemblance : La ressemblance de deux objets est dé­ crite par l'intersection des deux ensembles de quali­ tés correspondants. La ressemblance est une relation réflexive (A ressemble à A), symétrique [si A ressem à B, alors B ressemble à A) mais non transitive dans le cas général : 53 Ex : Mme Durand ressemble à son fils Pierre. Pierre ressemble à son père. On ne peut en déduire que M. et Mme Durand se res­ semblent : ils peuvent ressembler chacun à leur fils, sans se ressembler entre eux. La ressemblance devient transitive si on précise le sous-e'nsemble de qualités qui décrit la ressemblan­ ce : Ex : A et B se ressemblent car ils sont de grande taille. B et C se ressemblent car ils sont de grande taille. On peut en déduire que A et C se ressemblent car ils sont de grande taille. Si le point de vue se restreint aux qualités commu­ nes et qu’il ne s ’intéresse pas aux qualités qui per­ mettent de différencier deux (ou n) objets, la res­ semblance atteint un degré maximal : l’identité. "Définir les qualités communes" et "cerner la ressem­ blance" sont deux opérations équivalentes, dont les objets sont définis par des qualités. Ainsi, toute comparaison est possible, et l ’affirmation "ce sont des objets non comparables" devient relative : il faudrait plutôt dire "ce sont des objets non com­ parables de tel point de vue, selon telle pertinen­ ce". A titre d ’exemple, on pourra comparer une unité de l’expression à une unité du contenu : la première fait partie d ’une manifestation matérielle donnée, la se­ conde est de l ’ordre du concept. Leur comparaison n ’a de sens que par le fait q u ’elles sont toutes les deux exprimées en termes d ’ensemble de qualités, par­ mi lesquelles on trouvera : - Unité appartenant au niveau du contenu d ’un langage, 54 - Unité appartenant au niveau de l'expression d'un langage, à titre de qualités et non à titre de nature. De même on pourra comparer une unité de l'expression à un objet du monde naturel auquel elle pourrait être liée par une relation (ex : désignation : ceci est un texte). Cette procédure donnerait un sens à la comparaison d'un "signe" avec son "référent". Nous retrouverons cette problématique à propos des sémioses de la géométrie : l'espace signifiant res­ semble à l'espace signifié et à l'espace du référent. Cette ressemblance s'analysera avec les concepts ex­ posés ci-dessus. 2.3 AXIOLOGIE GEOMETRIQUE C'est 1'axiologie spécifique de l'étendue, introdui­ te dans -l'étude pour une raison double : l'expres­ sion des plans relève de l'étendue, de même que le sens véhiculé relève de l'étendue. Nous avons fait l'hypothèse que l'architecture est un langage, et que les plans sont un métalangage relatifs à l'architecture. Entre le métalangage et son langage objet, il y a une relation logique de présupposition (cf. SPA §4.3). Cependant, selon la pertinence géométrique, il y a une autre mise en relation possible entre l'expression du langage de l'architecture et celle du langage des plans : une mise en relation géométrique. L'expression du langa­ ge de l'architecture s'inscrit dans un espace à trois dimensions (nous préciserons plus loin cette notion de dimension), celle du langage des plans s'inscrit dans un espace à deux dimensions. Si chaque espace s'organise en système fermé, il n'en reste pas moins qu'une partie des lois de l'un régit les éléments de l'autre : il y a ressemblance structurale. Cette ressemblance sera analysée selon les règles ex­ posées dans 1'axiologie algébrique. Nous nous en ser­ virons pour expliciter les sémioses géométriques. Nous verrons ainsi s'établir une relation projective entre la forme de l'expression des plans et la forme de l'expression de "la sémiotique architecturale" (1). Cette relation pourra alors être généralisée et posée (1) Une sémiotique : un langage. 56 comme transformation allant d'une forme à l'autre, mettant en relation les éléments constitutifs de cha­ cune d'elles. Si une telle transformation doit être posée comme une sémiose particulière et réinsérée dans l'économie gene­ rale de l'étude, sa définition reste une question de géométrie, ou de géométries, comme nous allons le voir. Désignons par "CORPS" tout objet de l'espace "naturel” (celui de la vie quotidienne). Un corps segmente l ’es­ pace en au moins deux parties : - Si le corps est "plein", on peut distinguer ce qui est intérieur aux bornes et ce qui leur est extérieur. L ’intérieur serait relati­ vement impénétrable, à une échelle pertinente donnée : celle de l'expérience courante du monde naturel. L ’extérieur laisse à d'autres corps la possibilité d'être contigus à celui qui nous occupe. Remarquons au passage que l'opposition intérieur/extérieur est relative à la mesure des espaces : les bor­ nes segmentent l'espace en deux parties, qui, d'un point de vue neutre, sont tout aussi équivalentes que les deux moitiés d'un gâteau. En topologie (où on fait abstraction de la mesure), l ’opposition Intérieur/Extérieur perd son sens. - Si le corps est creux, il a des bornes qui ne sont pas d'un seul tenant (une sur­ face est d'un seul tenant si on peut aller de tout point de la surface à tout autre point de la même surface sans quitter la dite surface) et il segmente l'espace 57 en au moins trois parties : -Celle qu'il occupe entre ses bornes, -Celle qui est extérieure aux bornes, -Celles qui sont intérieures aux bornes. Quand nous parlerons des objets, nous commencerons par parler de leurs limites (ou bornes). Ce sont leurs premières qualités spatiales, et ces qualités leur sont nécessairement attachées : un corps ne peut exis­ ter s'il n'existe dans l'espace. Au cas où un objet n'existe pas dans l'espace, il sera uniquement un objet de pensée, un objet de savoir, relevant de l'i­ maginaire. La première phase d'une description de l'espace est l'étude de la segmentation de cet espace par des bor­ nes (limites, bords ou frontières). Dans l'espace à deux dimensions des plans en archi­ tecture, tout objet manifesté à nos sens par une dif­ férence de couleur ou de valeur va être analysé spa­ tialement. L'espace à deux dimensions sera donc seg­ menté par des lignes qui bordent des régions, les lignes elles-mêmes étant bordées par des points (cf. SPA §6.2). Toutes ces lignes et ces régions se­ ront relevées, décrites : a priori nous ne savons pas lesquelles sont pertinentes dans le fonctionnement linguistique des plans, et lesquelles ne sont pas per­ tinentes. Nous commençons par opérer un découpage scientifique, qui nous servira de référence à laquelle nous rapporterons le découpage sémiotique (qui se dé­ finit ici, par opposition, comme une structure d'usa­ ge) obtenu par l'épreuve de commutation après accès au contenu. Ainsi, la distinction forme/fond héritée de la gestalt-théorie est abolie, puisqu'elle provient d'une projection apriorique d'un contenu sur 1'ex­ pression. 58 Selon cette opposition, la forme est ce qui porte le sens, et le fond en est dénué. Or, nous verrons que, ne serait-ce que pour les plans en architecture, il n'y a pas de fond dénué de sens, ce qui justifiera à postériori l'attitude systématique adoptée dans cette partie de l'étude. L'analyse de l'expression fera l'inventaire de toutes les régions, sans leur attribuer de valeur sémantique. Ce choix est lourd de conséquences. C'est ce qui per­ met l'introduction de la relation de superposition (cf. SPA §9.7) qui divise le corpus graphique en deux classes : celle des régions superposables et celle des régions non-superposables. Cette distinc­ tion sera développée dans l'axiologie des lois d'ap­ partenance (ci-dessous § 2.5). Avant de continuer notre propos relatif aux parti­ tions et au découpage, faisons un retour en arrière, rendu nécessaire par l'usage que nous voulons faire de qualités "spatiales", et que nous n'avons pas en­ core explicitées. Jusqu'à présent, nous nous sommes adressés à l'intuition du lecteur et à sa connais­ sance personnelle de l'espace. Nous allons tenter une approche plus rigoureuse. L'espace n'est pas uniquement visuel (ce que les ar­ chitectes ont tendance à affirmer). Il n'est pas uniquement moteur non plus (nous avons parlé de 1 im­ pénétrabilité des objets pleins). L'espace est une construction faite à partir de nos sensations mises en relation pour structurer un continuum que nous avons appelé étendue (cf.§ 3.4). La première caractéristique formelle d ’un espace est son nombre de dimensions : elle en conditionne les opérateurs (points, lignes, plans,... ), les rela­ tions, et les principaux théorèmes. Nous avons dit ci-dessus que le monde naturel s'inscrit dans un es­ pace à trois dimensions et que le plan n'en possède que deux. Que veut-on dire par là ? On nous a souvent habitués à envisager les dimensions comme faisant partie d'un système de coordonnées cartésiennes (or­ thogonales et rapportées à des unités de mesure). Cette image est simpliste, et en tout état de cause, les coordonnées ne sont pas simplement juxtaposées les unes aux autres : elles sont liées par des rela­ tions structurelles. En voici une présentation clai­ re : "Je fonderai la détermination du nombre des dimen­ sions sur la notion de coupure. Envisageons d'abord une courbe fermée, c'està-dire un continu à une di­ mension ; si sur cette cour­ be nous marquons deux points quelconques par lesquels nous nous interdirons de passer, la courbe se trouve­ ra découpée en deux parties, et il deviendra impos­ sible de passer de l'une à l'autre en restant sur la courbe et sans passer par les points interdits. Soit au contraire une sur­ face fermée, constituant un continu à deux dimensions nous pourrons marquer sur cette surface un, deux, un nombre quelconque de points interdits ; la surface ne sera pas pour cela décomposée en deux parties, il restera possible d'aller d'un point à l'autre de cette surface sans rencontrer d'obstacle, parce qu'on pour­ ra toujours tourner autour des points interdits. Mais si nous traçons sur la surface une ou plusieurs courbes fermées et si nous les considérons comme des coupures que nous nous interdirons de franchir, la 60 surface pourra se trouver découpée en plusieurs par­ ties. "Venons maintenant au cas de l'espace ; on ne peut le décomposer en plusieurs par­ ties, ni en interdisant de passer par certains points, ni en interdisant de franchir certaines lignes ; on pourrait toujours tourner ces obstacles. Il faudra interdire de franchir certaines surfaces, c'est-àdire certaines coupures à deux dimensions ; et c'est pour cela que nous disons que l’espace a trois dimen sions". H. POINCARE Ou, d'une façon plus condensée : les lignes, qu'on peut diviser par des coupures qui ne sont pas des con tinus, sont des continus à une dimension ; les surfa­ ces qu'on peut diviser par des coupures continues à une dimension, sont des continus à deux dimensions ; et l'espace qu'on peut diviser par des coupures con­ tinues à deux dimensions, est un continu à trois di­ mensions. Le raisonnement qu'on vient de tenir est un raison­ nement topologique. La topologie est la géométrie qui a pour groupe principal le groupe des homéomorphies. Une homéomorphie est une transformation T entre les points de l'espace et satisfaisant aux conditions sui vantes : 1. Elle est biunivoque sans • _____ • • * exception, c'est-à-dire qu'elle fait correspondre à __________ !.. tout point un point et inver sement. 61 2. Elle fait correspondre aux points d'une courbe, les points d'une courbe. 3. A deux couples de points M, N, et P, Q, se séparant sur une courbe, elle fait correspondre deux couples de points M', N' et P', Q' se séparant sur la courbe homo­ logue. Il découle de ces conditions qu'une homêomorphie est une transformation continue (on dit dans certains cas, une déformation continue). Dire que la topologie admet pour groupe principal le groupe des homéomorphies re­ vient à dire que dans cette discipline sont équivalen­ tes toutes les figures qui se déduisent l'une de l'autre par transformation continue. Ainsi, un cercle est équi­ valent à une ellipse ou à toute autre courbe fermée, mais il n'est pas équivalent à un segment de droite parce que ce dernier n'est pas fer­ mé . Ce dernier énoncé manifeste une règle de la topologie : les continus d'un même nombre de dimensions (ici, le cercle et le segment sont des continus à une dimension) sont classés par la considération des coupures (il faut deux points pour couper le cercle en deux parties, il suffit d'un point pour en faire autant avec le segment). Les coupures jouent en fait un rôle fondamental en to­ pologie et permettent de lier cette dernière aux struc­ tures algébriques : toute classification (ou taxinomie, que nous avons vue être le résultat de l'application d'une relation d'équivalence sur un ensemble, avec éventuellement l'intervention d'une relation d'ordre) peut être considérée comme la segmentation d'un espace à n dimensions par un ensemble de coupures, les "volu­ mes" ainsi séparés correspondant aux diverses classes de la taxinomie. Découper signifie alors attribuer une identité à cha­ que "volume", cette identité étant fonction d'un en­ semble de qualités. A la dualité objets/qualités que nous connaissions dans l'axiologie algébrique corres­ pond la dualité volumes/coupures dans l'espace. Nous avons vu que la dimension d'un espace est fonc­ tion de la dimension des coupures minimales qui per­ mettent de le séparer en deux parties. Rappelons que pour séparer une région en deux, il ne suffit pas d'avoir des coupures ponctuelles : il est nécessaire que la coupure soit au moins une ligne à une dimension. Par conséquent, on pourra envi­ sager des coupures de deux dimensions dans un plan (ce sera à son tour une région). De manière plus gé­ nérale, un espace à n dimensions peut connaître des coupures à n dimensions. Nous retrouvons ce que nous présentions de façon intuitive p. 56 : il y a des corps qui traversent notre espace quotidien en le seg mentant en deux parties dont l'une, impénétrable, est dite "l'intérieur", l'extérieur étant pénétrable ; et d'autres corps qui segmentent l'espace en plus de deux parties, l'exemple type étant celui des boîtes, les maisons n'étant que des boîtes dont l'intérieur est cloisonné en d'autres boîtes... 63 Ces diverses coupures se retrouvent dans les deux di­ mensions du plan d'architecte, avec l'introduction au niveau du contenu d'un facteur supplémentaire : la pénétrabilité pour le corps humain tout entier. Un corps impénétrable est un objet, un corps pénétrable est un lieu. Revenons à la topologie. Tous les théorèmes de la topologie restent vrais si' les objets dont ils traitent subissent une déformation continue. Par contre, les déformations non-continues sont interdites : elles introduisent dans l'espace des perturbations rendant faux les dits théorèmes. Ce 'est n'est pas tout : "On peut (... ) déformer le plan de façon à obtenir une droite, pourvu que cette déformation ne soit pas continue. Cela serait impossible au contraire avec une déformation continue. Ainsi la question du nombre des dimensions est intimement liée à la notion de con­ tinuité et elle n'aurait aucun sens pour celui qui vou­ drait faire abstraction de cette notion". H. POINCARE Or, toutes nos géométries font appel à la dimensionnalité, ce qui implique la continuité des transforma­ tions par rapport auxquelles elles se définissent. Nous venons de le voir, la topologie se place au ni­ veau le plus élémentaire (au sens fort et non péjora­ tif de ce terme) de la géométrie. Elle permet d'iden­ tifier et de caractériser tout continu ou portion structurée de l'étendue, à plus forte raison les es­ paces eux-mêmes. Les premières manifestations de l'existence d'un élé­ ment de l'expression sont d'ordre topologique. A ces qualités viennent s'ajouter d'autres qualités qui, relevant de la mesure, marquent l'introduction des 64 structures algébriques. Avant d'arriver à ces géomé tries projective et métrique, notons que les relations topologiques entre éléments nous ont permis de propo­ ser la seule grammaire bidimensionnelle élaborée a ce jour (cf. SPA §12), laquelle grammaire devrait débou­ cher sur un classement morphologique des plans en architecture. 65 La géométrie projective introduit la ligne droite dans l'espace de la topologie. Le fait pour une ligne d'être droite n'est pas purement qualitatif : on ne peut s'assurer qu'une ligne est droite sans faire des mesures. Cependant, comparée à la géométrie métrique, la géométrie projective apparaît comme qualitative. Si nous dressons un axe allant du qualitatif (topolo­ gie) au quantitatif (la métrique), la géométrie pro­ jective se situe quelque part entre les deux. Qualitatif Topologie Quantitatif Projective Métrique Dans un espace à trois dimensions, la géométrie pro­ jective connaît trois figures (le point, la ligne, le plan) et six "formes" (1) fondamentales qui se corres­ pondent dans les opérations projectives (la projec­ tion et la section). Dans les deux dimensions du plan de l'architecte, seules subsistent : la ponctuelle, ou ensemble des points d'une droite, le faisceau de rayons, ensemble des droites passant Par un point et situées dans le plan, fl) Le mot "forme" est malheureux dans ce contexte, mais il est consacré par l'usage des géomètres 66 - le plan, ensemble des points et des droites qui y sont contenus. Deux "formes" sont dites "perspectives" quand l ’une est projection ou section de 1 autre. Outre l'investissement sémantique que connaît l'op­ position droite/courbe, la géométrie projective con­ naît depuis DESARGUES et PASCAL une interprétation très courante : elle représente l'espace visuel. A ce titre, elle a intéressé les peintres et les ar­ chitectes, pour lesquels elle a eu la réputation d'être "la représentation vraie" de l ’espace. La pro­ jection photographique obéissant aux memes lois est venue renforcer cette attitude, faisant croire à un "espace objectif". Nous ne souscrivons pas à ces interprétations, d au tant plus que la peinture et le dessin connaissent des représentations affines de l ’espace tridimension­ nel [une affinité conserve le parallélisme des droites sans conserver la valeur des angles). Ce n'est pas tout. L'espace projectif et l'espace affine se cor respondent de façon assez étroite, et si le premier correspond à l'espace visuel de l'expérience quoti­ dienne, le second correspondrait à l'espace visuel d'un observateur placé à l'infini. L ’introduction de la notion de distance transforme la géométrie affine en géométrie métrique dont le groupe fondamental est le groupe des déplacements (transla tion, rotation) : elle étudie les propriétés des fi­ gures qui sont invariantes pour les opérations du groupe des déplacements. Dans l'espace à trois dimen­ sions, cette géométrie correspond aux mouvements des corps solides, c'est-à-dire une idéalisation de notre 67 expérience motrice de l'espace pour rendre compte des changements de position des objets par rapport au corps humain, et inversement. On pourrait dire que si la géométrie projective est l'étude de l'espace vi­ suel, la géométrie métrique est l'étude de l'espace moteur. Ce n'est pas tout. Rien ne distingue une longueur observée directement de la moitié de cette longueur doublée par le microscope : le tout est homogène à la partie, et cela parce que nous avons affaire à deux continus, où le nombre des termes (les points) est infini. Cette opposition nous servira à illustrer deux propos : - La métrique définie (la mesure de la distance) peut être interne à chaque continu étudié, considéré alors comme un espace autonome. Nous reconnaissons ici "le point de vue interne" dont I--------- 1 I------ 1 I— I O O D O » J 1— 1 nous parlions dans l'axiologie algébrique, ce pour­ quoi nous parlerons ici de "métrique interne" ou de "métrique locale". La métrique peut être définie simultanément sur plu­ sieurs éléments, auquel cas nous parlerons de "métri­ que globale". L'opposition entre une géométrie locale et une géomémétrie globale est plus générale que le cas particu­ lier sur lequel nous l'avons montré ici : nous l'avons utilisée dans notre classification arborescente des éléments minimaux (cf. SPA §9). Elle est aussi mani- 68 festée par les syntaxes du corpus (dans la partie denommée MEDINA, quatre trames orthogonales peuvent etre localement relevées ; elles sont décalées entre elles et n'offrent aucune transition possible de l'une à l'autre). Si le plan proposé à notre analyse possède une échel le", s'il porte des mesures de distance et d'angle, nous dirons qu'il possède des qualités métriques, ana­ lysables par les outils des géométries métrique et euclidienne. La présence des qualités métriques implique la pré­ sence des qualités projectives, qui sont liées à la droite (alignements de points, concavité, convexité, cf. SPA §6.3). La présence de qualités projectives implique la présence de qualités topologiques, rela­ tives aux contiguïtés, connexités, segmentations, etc... (cf. SPA §6.2). En partant du document, nous appliquerons un découpa­ ge qui se déroulera simultanément sur deux axiologies - algébrique, puisqu’il s'agit d'une procédure combi­ natoire , - géométrique, puisque l'objet a découper possède deux dimensions, ainsi que les "accidents qu il porre Le découpage part des unités les plus grandes (dans notre cas, un plan d'urbanisme par exemple) et les divise en unités de plus en plus petites, en prenant garde à ne retenir que des unités dotées de sens. La commutation joue un rôle fondamental dans cette phase : elle permet de distinguer les unités qui sont expressions de signes, de celles qui ne le sont pas. Parmi les unités qui sont des expressions de signes, nous distinguerons les plus petites, et que nous dé­ signerons par "unités élémentaires" ou quelquefois par "éléments". En voici quelques exemples : 69 o o•oQ Du point de vue géométrique, ces éléments peuvent être classés selon leurs propriétés métriques, projectives, ou topologiques. Une telle classification peut être re­ présentée par un schéma arborescent, et au sommet de cet arbre, nous trouvons l'organisation topologique suivante : élément Si les éléments ainsi définis sont en nombre limité, ce qui satisfait les exigences méthodologiques d'une approche sémiotique, il y en a encore un nombre con­ sidérable (plus de cent sur un seul document), et il n'y a aucune raison pour qu'il n'y en ait pas plus sur d'autres plans.Par contre, le schéma ci-dessus montre à l'évidence que les éléments sont analysés de façon implicite, à l'aide de composants plus petits et qui n'ont pas été reconnus comme expressions de signes car ils ne correspondent pas à des unités de contenu. Ces composants sont la région, la ligne, et le point. Issus de l'analyse topologique, ils ont ici le statut 70 de "figures" telles que les définit HJELMLEV : les figures sont des grandeurs qui résultent du découpa­ ge et qui concourent à former des expressions de signe Dans le cas du plan, il n'y a que trois figures dont les combinaisons fournissent toutes les expressions de signes. Ces différents cas peuvent s'écrire : E = (R, L, P) où E note l'élément ou l'expression de signe R note les régions L note les lignes P note les points. Remarquons que les figures sont en définition rela­ tionnelle : Une région est bordée par des lignes, Une ligne est bordée par des points, Un point n'a pas de bords. Les différents éléments, qui n'ont pas le même nombre de figures, peuvent être décrits à l'aide de qualités relevant du niveau topologique, projectif, ou métri­ que. Nous verrons par la suite que les qualités dé­ gagées ainsi au niveau de l'expression sont quelques fois "transmises" au niveau du contenu (c'est le cas pour les éléments non superposables), et que d'autres fois elles ne le sont pas (c'est le cas de certains éléments superposables, dits "conventionnels"). Le fait que les qualités spatiales d'un élément de l'ex­ pression soient aussi des qualités spatiales d'un élé ment du contenu (à condition que l'élément de l'ex­ pression soit non superposable) justifie l'introduc­ tion des différentes géométries dans une étude sémio- 71 tique préoccupée par la saisie de la signification. Il n'en reste pas moins que l'usage de ces outils d'analyse se justifierait simplement par l'analyse systématique de l'expression, ce qui est une partie intégrale de l'étude sémiotique. ■ ■' ■ 2.4 AXIOLOGIE DE LA MANIFESTATION GRAPHIQUE Tout objet, pour s'offrir à nos sens, doit posséder une matière qui manifeste ses qualités (spatiales, combinatoires, etc... ). Nous avons déjà dit que cette matérialité doit être considérée comme une qualité parmi d'autres. Cependant, dans l'ensemble des quali­ tés, elle joue un rôle particulier : elle est présup­ posée par l'appartenance des objets de notre étude au niveau de l'expression. Nous avons fait appel aux différentes géométries pour décrire un objet dans l'espace. Si l'espace considéré reste une construction mentale, une telle description suffit. Si l'objet doit en plus avoir la qualité ma­ térielle, il faut que ses parties reçoivent une qua­ lité matérielle, et qu'elles offrent alors à nos sens des configurations ayant à la fois des qualités géo­ métriques et des qualités matérielles. Quand plusieurs formes matérielles sont susceptibles de nous offrir les mêmes qualités et relations que nous attribuons à l'objet de notre réflexion, il est de tradition de désigner par "manifestations" de telles réalisations matérielles correspondant à la "structure profonde" constituée par les qualités et et les relations. L'opposition profondeur/surface ne doit pas être confondue avec celle de système/procès. En effet, profondeur et surface se situent au niveau du système et se retrouvent dans l'analyse de tout procès, puisque celle-ci doit atteindre le système. L'intérêt de la distinction profondeur/surface est double : 74 - elle permet de séparer dans le système, deux niveaux d'abstraction différents. - le passage du niveau profond (et plus abstrait) au niveau de surface se fait par une transformation qu'on peut caractériser (continue ou discontinue). Simulta­ nément sur le plan du contenu, il y a qualification supplémentaire des éléments. Nous verrons cela par la suite. Les plans en architecture sont habituellement traces sur un support relativement mince par rapport à ses deux autres dimensions (longueur, largeur). Ce support est quelques fois opaque, d'autres fois^transparent, ce qui ne change rien aux qualités des éléments gra­ phiques qui sont tracés dessus à l ’aide de graphite, d'encres diverses, de pellicules rapportées, etc... Ces différents tracés apportent, par rapport au pa­ pier soit des changements de couleur, soit des chan gements de valeur. Les deux phénomènes peuvent se ra­ mener aux modalités de réflexion de la lumière sur le support : une modification qualitative de la lumière s'appelle couleur, une modification quantitative s'appelle valeur (une même couleur peut aussi appa­ raître avec diverses valeurs). Les modifications qualitatives et quantitatives peu­ vent revêtir deux aspects : progressif (ce qui leur donne un certain caractère de continuité) ou brutal (ce qui donne des divisions discrètes). Les plans en architecture pja se manifestent, en grande majorité, à l'aide de varia­ tions brutales de valeur ou de couleur. Les variations progressives actuellement pratiquées peuvent se ramener à des variations bruta­ les relatives à des éléments 75 plus petits (Ex : grain de certaines trames de gris). Le cas, possible mais rare dans notre cas, des varia­ tions continues irréductibles à des éléments discrets plus petits, sera non analysé ici. Notre corpus res­ treint ne connaît que des variations brutales, ce qui donne un caractère discret à la matière de l'expres­ sion. Ces variations manifestent les trois "figures" (point, ligne, région) dont les combinaisons donnent les divers éléments. Le point peut être manifesté par : a - une petite région, dont le bord est constitué par le changement brutal de • • • valeur entre l'encre et le blanc du papier, b - un point sans dimension. L'analyse montre que les deux interprétations sont faites par les dessinateurs, les architectes, et les autres usagers des plans. Par contre, il n'est pas possible de tirer une règle générale qui, s'appuyant sur des caractéristiques dimensionnelles, départagerait les taches lues comme points des taches lues comme petites régions. Nous reviendrons par la suite sur cette question. Pour faciliter les raisonnements et les renvois, adoptons la convention suivante : ■ le mot "point" sera réservé au niveau profond. Ce niveau est celui des géométries, et il est normal d'y conserver un terme consacré par un long usage. ' la région de petites dimensions manifestant le point selon la définition (a) sera dite une "pointe". 76 - la manifestation sans dimensions du point sera dite La ligne, telle qu’elle est définie par les différen­ tes géométries, est unidimensionnelle : c'est une pu­ re longueur, sans largeur ni épaisseur. Comme le point graphique, la ligne est manifestée par : a - un trait, c'est-à-dire une région dont les deux bords, rapprochés, sont cons­ titués par le changement bru­ tal de valeur entre l'encre et le blanc du papier, b - un bord unidimensionnel, frontière entre une région marquée (encre) et une région non marquée. Nous adopterons la terminologie suivante : - le mot "ligne" est réservé aux structures profondes, pour les mêmes raisons que le mot point. - la manifestation de type (a) sera dite "trait . - la manifestation de type (b) sera dite 'bord . Dans nos travaux antérieurs, et en particulier dans Sémiotique des Plans en Architecture, cette d i s t i n ­ c t i o n est faite (cf. SPA §8.1) 'mais nous n'en tirions pas toutes les conséquences : ;nous proposions l'identifi­ cation du "trait" avec la "ligne", et nous n'examinions pas le cas des "bords . Nous verrons ci-dessous le parti qu'on peut en tirer. 77 Quand la définition (b) est mise en oeuvre pour manifester une structure profonde, l'objet à mettre en relief (dans le proces­ sus de lecture) est poché à plat de noir ou de cou­ leur. Une habitude assez forte veut que ce soit la matière pleine, impénétra­ ble, qui soit traitée ain­ si, mais le cas inverse est aussi bien attesté. Si l'analyse du corpus de SPA était refaite en appl quant cette définition, nous verrions apparaître une segmentation différente du plan, correspon­ dant à une partition plus fine. L'ensemble des syn­ taxes s'en trouverait modifié. On pourrait ainsi réécrire totalement l'étude de SPA, bien que cela entraîne une plus grande dépense faudrait individualiser la région du trait pour ensuite l'éliminer. Nous retrouvons l'argument d'é­ conomie qui nous a fait opter pour la définition (a) et identifier le trait avec la ligne. Il n'en reste pas moins qu'il est des cas où l'hypothèse (a) s'avère totalement inefficace, et où il faut recourir à la définition (b), c'est-à-dire qu'il faudra poser tout bord comme ligne. 78 Remarque : Si nous nous proposions de décrire un plan où la dé­ finition (b) qui fonctionne seule (et c'est l'analy­ se de la sémiose et du contenu qui permet de l'affirmer), nous pouvons construire un métalangage descriptif verbal et dessiné où tout le corpus serait transcrit dans l'hypothèse (a), c ’est-à-dire en tra­ çant un trait pour chaque bord et en traitant les régions pochées d'une manière adéquate (couleur, valeurs de gris,...) On démontre ainsi qu'on peut passer d'un système construit selon la définition (b) à un système cons­ truit selon la définition (a), et inversement. Nous en déduirons qu'aucun des deux systèmes n'est hié­ rarchiquement supérieur à l'autre. Ce sont deux ty­ pes de manifestation des mêmes structures profondes. Nous verrons par la suite que chacun de ces modes de manifestation appartient à un code, ces deux codes coexistant dans le langage graphique. Nous définissons le code par : - Un ensemble de l'expression - Un ensemble du contenu - Une relation de sémiose précisant les modes de pas­ sage entre l'expression et le contenu. Ainsi formu­ lée, la définition du code est proche de celle du langage. La différence porte sur la relation de semiose, qui est ici plus restrictive que la relation de présupposition réciproque exigée par HJELMSLEV. Par conséquent, nos codes peuvent être les sousensembles d'un langage, et un langage donné pourra 79 se décomposer en plusieurs codes. La définition (a), identifiant dès le départ le trait avec la ligne, repose sur une comparaison mé­ trique entre l'épaisseur du trait et, d'une part sa longueur, d'autre part l'étendue des régions a- voisinantes. Si, dans ces deux comparaisons, l'épais­ seur du trait apparaît comme négligeable, il est identifié avec la ligne. Formellement, on peut classer les traits d'épaisseur uniforme selon deux relations : soient A et B deux traits : "A est aussi épais que B" est une relation symétri­ que, réflexive, et transitive, c'est donc une re­ lation d'équivalence regroupant dans la même classe tous les traits de même épaisseur. "A est plus épais que B" est une relation antisymé­ trique, non réflexive, et transitive. C'est donc une relation d'ordre, qui clas­ se selon un ordre strict les classes obtenues par la relation d'équivalence cidessus. Cet ordre peut être mis en relation avec un en­ semble sémantique ordonné lui aussi par une relation antisymétrique et transi­ tive (voir un exemple partiel dans SPA §17.54). bans cette mise en relation, la borne supérieure de l'ordre sémantique correspond au trait le plus épais, et corrélativement, la borne inférieure avec le trait le plus fin. Une remarque s'impose cependant : tout ordre dépend de la relation qui l'établit, et la corrélation de deux ordres peut se faire de deux façons différentes. Pr^r.jns un exemple : supposons qu'on veuille noter 80 les différentes hauteurs de murs d'enceinte en mo­ difiant l'épaisseur des traits qui les représentent. Si la relation est "X est plus haut que Y", on fera correspondre le trait le plus épais au mur le plus haut. Si la relation est "X est plus bas que Y", on fera correspondre le trait le plus épais au mur le le plus bas. Les deux systèmes fonctionnent parfai­ tement et le choix est arbitraire. Ce qui est important ici, c'est le fait que le trait peut supporter une structure, et que cette dernière peut être mise en relation avec le contenu : les différences du niveau de l'expression autorisent l'articulation du contenu. La région, telle qu'elle est définie en topologie, est un continu à deux dimensions, bordé par une ou plusieurs lignes. Graphiquement, nous retrouvons la région comme une partie du plan limitée par des manifestations de li­ gnes, et les modalités que peut revêtir la région proviennent en fait des modalités de ses frontières définies par des traits (définition (a)) ou par des bords (définition (b)). Il n'y aurait donc pas grand chose à ajouter si la région ne se trouvait quelques fois qualifiée par un ensemble d'éléments (points, lignes, régions) qui s'y trouvent inclus et s'y réfèrent à un niveau syntaxi­ que, hiérarchiquement supérieur. Nous y reviendrons. 81 Les deux définitions (a) et (b) du point correspon­ dent aux définitions (a) et (b) de la ligne, et nous l'avons déjà vu, sont à la base de deux codes différents de la manifestation graphique. Ces deux codes peuvent se traduire l'un dans l’autre. Il res­ te à savoir quelles sont leurs conditions d'utilisa­ tion. Une première question se pose, celle de l'homogénéi­ té. Un document est-il éta­ bli uniquement à partir d'un seul code (et en fonc­ tion de quoi se ferait alors le choix ?) ou bien les deux codes peuvent-ils coexister sur le même do­ cument ? Le corpus origine de SPA (réf. "T 14 B" de Grigny La Grande Borne, voir dépliant joint) est tracé uniquement en code (a). Par contre, les procédures d'agrandissement (p) 0 du corpus nous permettent de citer le plan "A 71 a" où les deux codes sont si­ X multanément utilisés. En­ fin le code (a) est utilisé pour établir la figure. Il semble que l'homogénéité T ■•*1 |ne soit pas un souci majeur H des dessinateurs-locuteurs, et que la plus grande partie des documents établis utilise simultanément les deux codes, comme elle uti­ lise simultanément les codes superposables et nonsuperposables (cf § 2.5). si les facteurs du choix sont nombreux, on peut les ranger en deux catégories principales : économie et lisibilité. Nous avons montré (§2.3) que la première 82 phase d'une description de l'espace consistait à en préciser la segmentation [ou partition). Ainsi, les lignes et les points jouant les rôles de limites doivent être notés. Comme les nombres des régions, lignes et points entretiennent des relations cons­ tantes sur une surface convexe (loi d'EULER ou de DESCARTES), l'économie ne peut provenir d'un simple décompte topologique. Elle proviendrait surtout de la mesure (longueur des lignes, surface des régions) liée aux outils du dessin (crayons et assimilés qui tracent et délimitent, pinceaux et assimilés qui étalent et remplissent). Les outils aigus qui tra­ cent sont adaptés à inscrire des lignes-traits (dé­ finition (a)). Les outils larges qui remplissent sont adaptés à l'inscription de régions entre les­ quelles apparaissent des lignes-bords (définition (b)). Que l'économie de l'inscription puisse amener à un choix (global ou local) entre les codes est in­ dubitable. Cependant, la lisibilité est une donnée tout aussi importante : le fait de traiter les ré­ gions géométriques en régions graphiques privilégie la lecture des régions par rapport aux lignes, ce qui sémantiquement serait privilégier la matérialité de l'objet opposée à ses limites et à ses accidents (plis, arêtes,...). Le fait de tracer des traits à la place des lignes privilégie la lecture des lignes par rapport aux ré­ gions, ce qui sémantiquement serait privilégier les limites et les accidents de l'objet par rapport à sa matérialité. Ainsi, si on admet que le traitement graphique d'un élément géométrique (point, ligne, ou région) met ce dernier en relief, le ''manifeste" mieux que l'élément dual dans cette opposition, chacun des deux codes est adapté à la manifestation d'une certaine classe de 83 qualités qu'il rend ainsi plus "lisibles". Le changement de code en fonction de l'échelle du des­ sin apparaîtra ici comme résultant du croisement des deux exigences d'économie et de lisibilité : Si les dimensions d'un objet à une échelle donnée font que ses limites selon le code (a) devraient être tra­ cées trop près l'une de l'autre, il est : - plus économique de remplir la surface de la région concernée de façon à ce que le contour extérieur cor­ responde aux limites'. - plus lisible de présenter un poché uniforme qui as­ sure une mise en relief d'un élément qui, étant par­ ticulièrement petit, risque d'échapper à l'attention du lecteur. Par la même occasion, on évite le problè­ me du tracé de deux traits rapprochés, ce qui conduit parfois à majorer les dimensions réelles de l'objet représenté (cas du réseau routier sur les cartes I.G.N. 1/25 000, 1/50 000, etc... et particulièrement des cartes Michelin). Les contraintes de lisibilité et de technique (instruments de traçage et supports) de la manifestation graphique imposent une limite au "aussi petit qu'on voudra" du continu mathématique. Encore faut-il préciser quelle sorte de limite. Nous avons vu que, si la manifestation graphique des régions ne posait aucun problème particulier, celle des lignes et des points plaçait devant un choix entre deux solutions contraires (et non contradictoires). Les problèmes proviennent de ce que le point géomé• trique sans dimensions (aussi • petit qu'on voudra) n'a la Possibilité de se manifester séparément qu'avec une ePaisseur discrète qui ne peut être aussi petite qu'on voudra : il doit être vu et doit se distinguer de ce qui l'entoure (par opposition de valeur ou de couleur). 84 De même la manifestation (a) de la ligne comme trait lui attribue une épaisseur, ce qui lui confère un carac­ tère discret. Par conséquent, si le trait conserve la qualité de continuité selon sa grande dimension (qui est celle de la ligne) il est discret selon la deuxième dimension (qui est celle de l'épaisseur). Enfin, si la région graphique offre deux dimensions continues, sa segmentation en parties aus­ si petites qu'on voudra" posera des problèmes au voi­ sinage des lignes et des points définis dans le code (a), c'est-à-dire au voisinage des traits et des poin­ tes. Cette difficulté ne pourra être levée qu'en at­ tribuant aux traits et aux points du code (a) un sta­ tut d'éléments superposables (cf. §2.5), ce qui res­ titue aux régions leur caractère topologique unifor­ mément continu en tout point, propriété qu'elles pos­ sèdent sans problèmes dans le code (b). Expliquons-nous : la définition de l'opposition super posable/non-superposable a été faite dans les para­ graphes 9.6 à 9.10 de Sémiotique des Plans en Archi­ tecture. Elle sera reprise plus en détail dans le paragraphe 2.5 ci-après. Cependant, pour la poursuite de notre analyse de la manifestation graphique, nous devons faire une incursion dans les logiques d'appar­ tenance. Rappelons brièvement la définition Non-superposable : superposable si pe A alors p ^ B p £ A et p £ B p'€A et p'£C 85 En d'autres termes, nous dirons que : un élément est non-superposable quand tout point appartenant à la région du dit élément ne peut appar­ tenir à aucun autre élément. un élément est superposable quand tout point appar­ tenant à la région du dit élément appartient simul­ tanément à un autre élément. Rappelons enfin que la propriété de superposabilité (nous désignerons par ce terme les deux possibilités d'être superposable ou non-superposable) était attri­ buée à l'élément tout entier E = (R, L, P) mais qu'elle est définie à partir de la région de ce der­ nier. Nous allons voir que l'étude de la manifes­ tation graphique entraîne une modification de cette définition. Soit une région A dont la frontière est manifestée par un trait. Nous avons vu qu'une région présuppose O l les lignes qui la bordent, et les points remarquables de ces lignes. Dans le cas simple qui nous occupe, il n'y a qu'une ligne fermée sans points remarquables, et elle est manifestée par un trait que nous appel­ lerons g. Nous pouvons donc écrire : E = A, g, 0 Or la limite de A est une ligne, qu'il ne faut pas confondre avec le trait g. Prenons le cas où cette ligne se confond avec le contour extérieur du trait g. Pour tout point p apparte­ nant à A et non situé sur g, il n'y a aucune ambiguïté. Par contre, si le point p est 86 pris dans l'épaisseur du trait g, il y a un problème : - le point p appartient au trait g, puisqu'il y est inscrit. - le point p appartient aussi à la région A, puisque la limite de cette dernière se confond avec le con­ tour extérieur du trait g. Il y aura problème et ambiguïté tant qu'on persistera à considérer le trait comme une ligne. Par contre, si on pose le trait comme une région, nous avons affaire à un point p appartenant simultanément à deux régions A et g. Il n'y a plus de problème, et nous sommes dans un cas de superposition. Comme la ligne frontière de A peut se manifester comme bord ou comme trait, ce n'est pas le statut de A qui change mais celui de la manifestation de sa frontière. Par conséquent, c'est la région g qui sera dite superposable, et non pas la région A (cela sans préjudice pour la superposabilité de la région A en fonction de sa mise en relation avec d'autres régions dans un autre contexte, mais dans le cas simple de notre exemple, A est non-superposable). Au cas où la limite de la région A se serait située sur le contour intérieur du trait g, la même démonstration peut être faite avec la région B extérieure à A. De même, au cas où la limite est située quelque part à l'intérieur du trait ; la démonstration peut se répé ter à partir de A et de B. Enfin, moyennant quelques retouches mineures, la même démonstration vaut pour les pointes (taches de peti­ tes dimensions manifestant un point) inscrites dans une région A. 87 En conclusion, TRAITS et POINTES apparaissent comme des REGIONS SUPERPOSABLES. Pour les analyser ainsi, il faut prendre en compte leurs bords. Par consé­ quent, le corpus doit être analysé comme s'il était entièrement manifesté selon la définition (b) qui pri­ vilégie les bords, et à partir d'une telle analyse, on cherchera quelles sont les régions correspondant à des traits, et quelles sont celles qui doivent être lues comme régions. Les résultats d'une telle démar­ che seront reportés dans l'inventaire des éléments minimaux et inscrits dans la notation ensembliste. Nous avions adopté la convention d'écriture suivante : E = R, L, P Appliquons-la à la notation d'éléments superposables et non-superposables, dans chacune des manifesta­ tions : Elément non-superposable, manifestation (a) E = (R, T, Pe) égions, de traits, et de pointes. Or nous venons de voir que les traits et les pointes sont superposables. Si nous disons que l'élément est non-superposable, c'est que la propriété lui est at­ tribuée par la région, et il faudra désormais l'in­ diquer. D'où l'indice n pour non-superposable. E = (Rn, T, Pe) Elément non-superposable, manifestation (b) 88 Eléments superposables, manifestation (a) E (R, T, Pe) Nous voyons que si la région ^oo oooo ooo n'était pas différenciée par un indice, cette écriture se confondrait avec celle de l'élément non-superposable, manifestation (a). D'où la nouvelle écriture . E = (Rs, T, Pe) Elément superposable, manifestation (b) : E = (Rs, B, Pu) Cette dernière formule peut paraître paradoxale': il s’a1agit d ’un élément superposable dont les frontières sont des Ilignes-bords qui peuvent pa­ raître non-superposables, étant donné qu’un bord unidemensionnel ne peut contrac­ ter une propriété attachée jusqu'à présent aux régions. Cependant, cette formule reçoit une interprétation consistante puisqu'elle traduit le cas du trait et de la pointe : T = (Rs, B, Pu) Pe = (Rs, B, Pu) Ce qui nous conduit à attribuer aux bords du trait et de la pointe le statut d'éléments superposables : il suffit pour s'en convaincre de placer le point p de la démonstration de la page 86 sur le bord du trait qui ne coïncide pas avec la limite de la région A. Il en sera de même pour les punts remarquables du trait et de la pointe. Par conséquent, nous sommes amenés à modifier les dé­ finitions faites dans SPA §9.6 à 9.10, et à qualifier 89 de superposables ou de non-superposables les FIGURES (c'est-à-dire point, ligne, région) qui, par combinai­ son, donnent les éléments. Les éléments eux-mêmes ne seront plus dits superposables ou non-superposables. De cette façon, nous évitons l'ambiguïté d ’appella­ tion de l'élément E = (Rn, T, Pe) dont la région seule est non-superposable alors que la frontière et les points remarquables sont mani­ festés superposables. D'un point de vue opérationnel, on constate rapide­ ment que la distinction du statut des régions est suffisante, d'autant plus que le trait et la pointe sont maintenant analysés comme régions au niveau de la manifestation. Par conséquent, pour une analyse de la manifestation sous la problématique de la superposabilité, il suffira d'inventorier les régions et d'en déterminer le statut (cf.§ 2.5). Le développement qui précède sur les lois d'apparte­ nance et la manifestation avait pour point de départ des considérations sur la continuité et la disconti­ nuité des éléments manifestés (cf. P. 84 ) Nous avons vu que la pointe possède un caractère dis­ cret marqué, que le trait est à la fois continu et discret, selon le point de vue, et que la région est continue. Un autre type de discrétisation apparaît dans la ma­ nifestation des plans et des cartes utilisés en ar­ chitecture. Elle concerne à la fois les points, les lignes (ce sont les traits interrompus et les ins­ criptions en langue naturelle), et les régions (le grain, les hachures, les semis symboliques). 90 Dans les deux cas, une première analyse géométrique de la manifestation graphique ne fournit ni ligne ni région uniques, mais un certain nombre d'éléments indépendants qui ne se ressemblent pas nécessaire­ ment. On peut classer ces éléments par les qualités qu'ils ont en commun, et essayer de voir si les clas­ ses qui en résultent ne sont pas ordonnées. Cette double opération (correspondant à deux types de re­ lations : les relations d'équivalence et les rela­ tions d'ordre) produit des syntaxes à une dimension (linéaire, d'où les lignes interrompues) ou à deux dimensions (d'où les régions couvertes de hachures, semis, etc...). Ainsi, lignes interrompues et régions couvertes d'un semis ne sont pas des données premières de l'analy­ se. Il semble cependant que ce soient des données premières de la lecture, et c'est ainsi que les trai­ te BERTIN . Nous sommes là devant un cas où la partition scientifique qui nous sert de référence est plus fine que la partition sémiotique tirée de l'usage. Pour reconstituer la deuxième à partir de la première, il nous faut passer par une syntaxe qui en rend compte. Si la topologie peut reconstituer les lignes interrompues par une opération dite de lissage, les semis et les hachures exigent une syn­ taxe projective (s'ils sont réguliers) ou métrique (statistique , pour les semis irréguliers). Une fois cette syntaxe définie, les lignes et les régions obtenues doivent participer à la segmentation défi­ nie antérieurement en première analyse, d'où une nouvelle partition du corpus de départ. Tel est le point de vue de la lecture. D'un autre point de vue, celui de l'inscription, la question change totalement de physionomie : un trait interrom­ pu est un trait dont on a effacé des parties , les 91 vides entre les traits appartiennent donc à la ligne. Un semis de points ou de hachures est un traitement graphique appliqué à une région déjà délimitée, et les points ou les traits sont des accessoires de ce trai­ tement. Deux remarques s'imposent : - la démarche de l'inscription coïncide avec celle de la lecture intuitive. Cette coïncidence ne doit pas être prise comme une donnée première, mais il serait utile de se demander dans quelle mesure la pratique de l'inscription n'a pas imposé des règles de lecture. - la symétrie des structures formelles de l'inscrip­ tion et de la lecture est un phénomène général. Ainsi, une personne désirant expédier une lettre à une con­ naissance commencera par inscrire M. Dupont, puis numéro Tant de la rue Untel, suivi de ville X, dépar­ tement Y, pays Z. Les organismes de distribution du courrier commenceront par expédier au pays Z qui en­ voie au département Y qui trie vers la ville X où un facteur va dans la rue Untel au numéro Tant livrer à M. Dupont sa lettre. La symétrie est parfaite. La recherche de syntaxe et la problématique lecture/ inscription relèvent d'une approche de l'expression en tant que phénomène uni, sans épaisseur. Or, nous avons été amenés à la scinder en deux niveaux : la surface et la profondeur. Si nous acceptons de voir Les semis, les hachures, et autres ensembles discon­ tinus comme la manifestation d'une structure pro­ fonde, il faudra réviser nos conceptions antérieures sur deux points : " les deux procédures de manifestation (a et b) que nous avons étudiées respectent la continuité dans une Large mesure : la manifestation (b) est strictement continue, la manifestation (a) fait correspondre une région à une région, et à une ligne fait correspondre un trait qui, par certains côtés, est linéaire. Cepen­ 92 dant, nous avons vu que le trait est en fait une ré­ gion. Le passage d'une ligne à un trait (région) chan­ ge le nombre de dimensions, et ne peut par conséquent être considéré comme une transformation continue. De même, la manifestation d'un point sans dimension par une région à deux dimensions est une transforma­ tion discontinue. Cependant, ces deux discontinuités passaient pratiquement inaperçues, couvertes par deux facteurs : 1) à une figure profonde d'un seul tenant correspond une manifestation d'un seul tenant, 2) les caractéristiques métriques de ces manifesta­ tions (la pointe est très petite, le trait est mince par rapport à sa longueur). La nouvelle procédure de manifestation à laquelle nous allons faire appel va apparaître bien plus discontinue si une telle expression peut avoir un sens. En effet, nous dirons que les trois figures (points, lignes, régions) peuvent se manifester chacune par une série de taches isolées discrètes, fractionnées en plusieurs tenants. A la figure unique correspondra une multiplicité de régions organisées de façon telle qu'elles puissent apparaître comme la manifestation de la dite figure située au niveau des structures profondes. La locution "organisées de façon telle que... " n'est qu'une manière de désigner les syntaxes dont nous parlions en page 90 , et qui se trouvent ici situées au niveau profond. Par extension, on serait en droit de se de­ mander si toute structure syntaxique ne doit pas aus­ si être située en profondeur, en particulier les syn 93 taxes géométriques. Nous donnerons ici un exemple d'application : une syntaxe géométrique prenant en compte des éléménts de l'expression considère ces der­ niers comme des objets ponctuels. La syntaxe est en fait une organisation de points, lesquels points sont les REPRESENTANTS des éléments en question. Il est clair que la structure et les représentants relèvent des structures profondes, car les points organisés peuvent être manifestés par un grand nombre d'éléments possibles. - Le deuxième point à réviser (nous serions tentés de dire "dogme") est celui de la toute puissance de la topologie dans l'étude de l'expression : la topologie dissèque et disperse les semis et les hachures, leur reconstitution est laborieuse, elle passe même par les autres géométries pour reconstituer des régions qu'il faudra recycler au niveau topologique. Une telle pro­ cédure est possible. L'insertion des syntaxes au ni­ veau des structures profondes est un argument en fa­ veur de cette procédure. Il n'en reste pas moins que ce chemin est long, et que le passage par le contenu et l'épreuve de commutation est un raccourci appréciaL'exemple ci-contre, schématisant gros­ sièrement un "dessin par les hachures", illustre la difficulté d'identifier une région unique là cù nous reconnaissons facilement une amphore. Il n'en reste pas moins que pour recevoir une description complète, les différentes figures discrè- 94 tes de la manifestation doivent être reconnues et iden­ tifiées par les différentes géométries (topologie, pro­ jective, et métrique). En somme, il nous semble avantageux d'admettre un troi­ sième mode de la manifestation, que nous appellerons le mode (c). Les différentes figures de cette manifes­ tation sont superposables, comme il est facile de le vérifier par le biais sémantique : les régions, traits et pointes en question n'ont aucune signification spa­ tiale attachée à leur implantation. La manifestation (c) se rattache alors à la manifes­ tation (a) qui, nous l'avons vu en page 84 fait appel à une procédure discontinue. D'où une nouvelle opposi­ tion entre les catégories du superposable et du nonsuperposable, les procédures de manifestation qui font appel à la superposition sont discontinues alors que la procédure de manifestation continue est spécifique du non-superposable. Avant de terminer, faisons une remarque qui se ratta­ che au §2.1 : notre analyse de la manifestation graphi­ que s'est appuyée sur notre instrumentation géométri­ que. Cette pratique peut s'analyser de deux façons : - Les systèmes algébriques et géométriques constituent le niveau profond du langage des plans en architecture, et la manifestation graphique en constitue le niveau de surface, avec diverses modalités.. Dans ce cas, le niveau de surface se laisse décrire avec les mêmes concepts que le niveau profond. - Les systèmes algébriques et géométriques constituent une structure scientifique de référence à laquelle nous rapportons la manifestation graphique comme nous lui rapportons le système sémiotique des plans. La manifestation graphique occupant le même statut que le système sémiotique entier,apparaît alors comme chargée de contenu, ce qui concorde avec la suite de notre ana­ lyse. 95 Dans les deux cas, la manifestation graphique présup­ pose les systèmes algébriques et géométriques, et la présupposition inverse n'est vraie que dans la premiè­ re mise en relation (profondeur/surface). 2.5 AXIOLOGIE DES LOIS D'APPARTENANCE Dans les paragraphes 9.6 à 9.10 de Sémiotique des Plans en Architecture, nous définissons formellement deux groupes d'éléments de l'expression tout en les dési­ gnant par les appellations "éléments superposables" et "éléments non superposables". Au paragraphe 2.4 ci-dessus, nous avons démontré qu'il convenait de déplacer la définition, et de qualifier les FIGURES plutôt que les ELEMENTS. Rappelons la définition formelle : non-superposable Si p e A alors p ^ B superposable p£.A et p £ B p'G A et p'É C Rappelons aussi que l'appellation "superposable" est métonymique : La figure superposable est quelquefois occurrente en intersection avec une autre figure (la superposition des régions est construite formellement à partir de l'intersection des contours), alors que d'autres fois, elle est occurrente sans intersection. c'est donc la capacité (la possibilité) de la figure de se trouver en superposition qui la caractérise et Sert à la définir. Par conséquent, la loi d'apparte­ 98 nance non exclusive s'étendra à toute occurrence de la figure superposable, que son contour soit ou ne soit pas en intersection avec un autre contour. C'est cette extension qui est à la base de la séparation du corpus en deux parties : l'ensemble des figures superposables et l'ensemble des figures non-superposables. Tel est le cadre initial différenciant ce que nous avons appelé deux "lois d'appartenance". En quoi ces lois sont-elles fondamentales et qu'est-ce qui justi­ fie le rôle d'axiologie que nous leur faisons jouer ? L'appartenance d'un point à une région relève de la topologie. Cependant, en topologie, un point ne peut appartenir à plusieurs régions en même temps : chaque région est individualisée, et toutes les régions ont le même statut ; elles ne peuvent pas se recouvrir les unes les autres. Ainsi, on ne peut pas reconnaître topologiquement dans B une intersection des régions A et C ; les trois régions A, B, et C sont équivalentes. L'introduction de la notion d'intersection fait appel à une notion projective étrangère à la topologie (cf. SPA §7.5) et encore faut-il préciser que l'inter­ section ne concerne alors que les lignes fermées fron­ tières des régions A et B. C'est uniquement parce que nous rattachons une région à un contour que nous pou­ vons introduire la notion de superposition; il est vrai que le couplage d'une ligne fermée avec une régi" on se justifie dans la mesure où toute ligne fermée dé­ coupe le plan en deux régions dont l'une, n'ayant au­ cun point à l'infini, est facilement repérable. La notion de superposition n'est donc pas première mais seconde, en ce sens qu'elle est construite. Le fait qu'elle puisse s'exprimer formellement, et que la 99 construction elle-même soit formelle, ne doivent pas nous faire oublier que cette notion véhicule du con­ tenu. Ce contenu n'est peut-être pas celui que nous attachons à l'opération de recouvrement que nous pou­ vons réaliser dans le monde naturel, mais il en procè­ de. Disons, par commodité, que la superposition serait une espèce d'abstraction du recouvrement. Nous voyons alors que nous sortons de la topologie du plan et que nous envisageons deux plans superposés et dont les figures se recoupent. C'est pourquoi nous proposons la séparation des deux corpus (cf. SPA §9.12) pour restituer cet état initial de deux plans, à l'inté­ rieur de chacun desquels la topologie pourrait rejouer au précepte de HJELMSLEV selon lequel il faut diviser le corpus en un nombre minimal de parties à chaque stade : ici, l'expression est divisée en deux expres­ sions, l'une superposable et l'autre non-superposable. l'appartenance d'un point à une région est un équiva­ lent commode pour l'appartenance d'un élément à un en­ semble, ce qui fait qu'on trouve souvent dans les ou­ vrages de présentation de la théorie des ensembles des schémas qui ont une allure topologique et qui semblent manifester des logiques d'appartenance. Ainsi, on peut trouver : 100 ce qui s'énonce : p appartient à A, et A est inclus dans B, donc p appartient à B ou, pour un autre cas de figure : ce qui s'énonce : p appartient à A, et p appartient à B, donc p appartient à l'intersection de A et B. Ce qui pourrait faire croire que les lois d'apparte­ nance relèvent de la topologie, et que de plus, la topologie ne connaît pas une seule loi d'appartenance mais plusieurs. Cette interprétation est fausse, et nous allons le montrer : ce dont il est question dans les formules ci-dessus, ce n'est pas l'appartenance d'un point à un espace, mais celle d'un élément à un ensemble. Il ne s'agit pas de topologie mais de théo­ rie des ensembles. En deuxième lieu, les figures qui sont tracées ne rendent pas compte d'une relation topologique mais représentent visuellemnt des rela­ tions algébriques. Il s'agit de représentation au même titre qu'un plan d'architecture peut être pris, d'un certain point de vue, pour une représentation de l'architecture. Cette représentation attribue à cha­ cune des régions A et B déterminées par des contours fermés sensiblement circulaires une identité propre qui n'est pas détruite par "l'intersection" ou "l'in­ terpénétration" des dits contours. La portion du plan où A et B se superposent porte non pas une région, mais deux régions. En cet endroit, le plan se dédou­ ble. Il est peu commode de dédoubler le plan localement surtout lorsque le cas se présente un grand nombre de fois. Il est plus simple de poser deux plans, et de distribuer les figures dans l'un ou dans l'autre. 101 Comme toutes les figures ne jouent pas le même rôle, et qu'on constate une dissymétrie des occurrences, les unes sont dites superposables et les autres non-super­ posables. Par voie de conséquence, les deux plans obtenus ne jouent pas un rôle symétrique. Nous y re­ viendrons . Résumons-nous:les lois d'appartenance marquent une intrusion du sens (en faible quantité) et ne relèvent pas simplement de la topologie. De plus, les deux lois que nous avons sont contraires, ce qui interdit de ma­ nipuler simultanément des figures relevant des deux lois. Enfin, rien ne limite le nombre de ces lois à deux, et nous pourrions en avoir plusieurs, bien que ce ne soit pas le cas dans notre corpus. Ces diverses raisons nous amènent à séparer l'étude des lois d'ap­ partenance de l'axiologie géométrique et de l'axiologie algébrique. Nous verrons que cette séparation se justifie a posteriori par les différentes relations entre l'expression et le contenu qu'entretiennent les éléments superposables ou non-superposables. L'établissement formel du statut superposable d'une figure est une procédure longue. De plus, elle exige au moins une occurrence de la superposition de la dite figure dans le corpus, ce qui présente quelques in­ convénients : l'agrandissement du corpus peut amener a considérer comme superposables des figures classées comme non-superposables dans le corpus précédent. Une Procédure plus rapide et indépendante des occurrences serait doublement intéressante. Si l'établissement d'un tel raccourci formel s'avère difficile au niveau de l'expression, il est plus faci­ le au niveau du contenu. Il suffit pour cela de mettre en oeuvre l'axiome suivant : "l'appartenance d'un P0m t à une région est aussi bien une propriété de 102 l'expression qu'une propriété du contenu". Cet axiome se justifie par l'analyse que nous faisions, au début de ce paragraphe, de la notion d'appartenance d'un point à une région, de l'identité de la région, et de l'intrusion du sens dans la définition des lois d'ap­ partenance. Nous retrouverons cette question quand nous parlerons des séraioses géométriques. Connaissant les différents éléments et leur contenu respectif, on peut établir rapidement l'appartenance d'un point à une ou plusieurs figures. Soit par exemple le cas des lettres de l'alphabet, transcrivant la langue naturelle. L ’inscription "sai­ s i e d'eau" offre une suite ® 3 de traits. Les lettres A et IL. c-> a D forment chacune une bou­ cle à laquelle est associée f la région qu'elle délimite. T Un point pris dans la bou­ cle du A appartient à la région associée à A. Comme le A ne segmente pas l'espace de la salle d'eau dési­ gnée, le même point appartient toujours à la salle d'eau. Tout point de la région de A ayant cette dou­ ble appartenance, on peut dire que la région considé­ rée est superposable, même si elle n'est traversée par aucune ligne du corpus. Par raison d'économie, nous utiliserons le raccourci sémantique plus souvent que la procédure formelle. Cette dernière sera quand même la règle à laquelle nous nous rapporterons en cas de litige. Le fonctionnement sémantique de la définition raccour­ cit de même la démonstration d'un autre point fonda­ mental : il est possible qu'un document graphique 103 manifeste plusieurs superpositions successives. Formellement, cela s'exprimerait par : p£)A et p£)C et pÇ) D. .. et p£)B C'est le cas en particulier des épures de géométrie descriptive et du dessin de machines, et en général de toute représentation plane d'un espace tridimen­ sionnel où coexistent plusieurs plans. Cette superpo­ sition est quand même limitée pour certaines variétés de figures : les lettres de l'alphabet ne peuvent se superposer impunément les unes aux autres, le message deviendrait vite illisible. En ce qui concerne le cor­ pus que nous nous sommes donnés, seules deux lois d'appartenance nous sont apparues pertinentes. La relation "obéir à la même loi d'appartenance" est une relation d'équivalence : elle est réflexive, sy­ métrique, et transitive. Le quotient du corpus par cette relation nous fournit deux classes d'équivalen­ ce qui, du point de vue géométrique, se présentent comme deux partitions planes : ce sont les deux plans dédoublés que nous retrouvons par un biais algébrique et que nous avions séparés dans"Sémiotique des Plans en Architecture"(§9.10) Pour chacune des deux partitions, le plan comme conti­ nuum est totalement segmenté, ce qui veut dire qu'il n'y a pas de "fond" par rapport auquel on définirait une "forme". Les éléments sont définis par les figures (points, lignes, régions) et tout élément peut être mis en relief par une opération de sélection qui lui fait jouer le rôle de "forme" par rapport au reste 104 qui est "fond". Tout élément peut jouer indifférem­ ment le rôle de forme ou de fond. Il n'y a pas d'élé­ ments qui soient signifiants alors que d'autres ne le sont pas : tous les éléments sont signifiants, selon des sémioses quelquefois différentes. S'il y a un "pavage signifiant" pour chacun des deux ensembles superposable et non-superposable , on peut dire que les lois d'appartenance attribuent à ce der­ nier un caractère "opaque" opposé à la "transparence" du superposable : tout se passe en effet comme si l'on voyait les éléments non-superposables à travers les éléments superposables. Cette transparence fait que l'ensemble des éléments non-superposables joue le rôle de fond (segmenté) pour l'ensemble des éléments superposables, ce qui entraîne une sémiose particu­ lière (voir analyse du contenu). De ce qui précède, on déduit que la taxinomie des figures selon les lois d'appartenance doit précéder toute tentative syntaxique : les syntaxes sont cons­ truites dans chaque ensemble puis on cherchera à mettre les deux ensembles en rapport (globalement et localement). Cette exigence formelle provient du fait que la syn­ taxe prend en compte des éléments géométriquement définis, ce qui aboutit à une méta-géométrie dont les éléments doivent être homogènes pour permettre une interprétation consistante. Et cette homogénéité est celle des lois d'appartenance. Un autre argument provient de la mise en relation avec le contenu : la sémiose attribue à la partition non-superposable le statut d'argument que viennent qualifier les différentes géométries et les éléments 105 superposables. Ainsi, les syntaxes du non-superposable qualifient le non-superposable de même que le font les syntaxes du superposable. En particulier, l ’implantation (qui est une syntaxe analysable selon nos divers outils géomé­ triques) des éléments superposables qualifie les points d'implantation (spécifie ce qui s'y trouve) et les régions d'implantation (en spécifiant les rela­ tions des points qualifiés). Nous en reparlerons cidessous . L'implantation n'est pas une qualité réservée au su­ perposable : tout ensemble d'éléments peut recevoir cette qualité géométrique particulière. Elle peut être ponctuelle pour une région (ex : point repré­ sentant les bâtiments dans une syntaxe géométrique) ou pour une ligne (ex :symbole des sommets montagneux pour certaines cartes) ou // Z 95 sjgnt pour un ensemble d'éléments S/8f Mtu, y-' (ex : lettres inscrivant le ^ nom d'un monument). Elle peut être linéaire pour un ensemble de points, de traits ou de régions (lignes interrompues, alignement) ou régionale (hachures, semis de points). Cette im­ plantation est rapportée au non-superposable et cons­ titue une part des relations formelles des deux ensem­ bles. Sur le plan du contenu, l'ensemble des éléments super­ posables apparaît comme métalinguistique par rapport a l'ensemble non-superposable. On peut le démontrer de la façon suivante : les ensembles superposable et non superposable se séparent à un niveau logique, ce­ lui des lois d'appartenance contraires. Cette différence impose, nous l'avons vu, la construction de deux syntaxes différentes, chacune étant propre à l'un 106 des ensembles. Chacun de ces ensembles de l'expres­ sion possède donc une syntaxe et une correspondance particulière avec le niveau du contenu , cette compo­ sition est celle que nous avons donnée du code. Cha­ cun des ensembles superposable et non-superposable s'articule donc en au moins un code. Or, le superposa­ ble présuppose le non-superposable par rapport auquel il se définit comme superposable. Cette présupposition apparaît alors comme une présupposition entre codes, c'est donc une relation métalinguistique. Rappelons qu'il ne faut pas confondre une relation métalinguis­ tique globale entre codes avec une relation locale qui ferait apparaître toute figure superposable comme métalinguistique par rapport à une figure non-super­ posable. La présupposition simple entre les classes superposable/non-superposable donne à cette dernière un carac­ tère plus fondamental, qui correspond d'ailleurs à la sémiose qui lui est attachée en particulier (dé­ crire aussi fidèlement que possible la segmentation de l'espace représenté). C'est l'ensemble non-superposable qui a été plus par­ ticulièrement étudié dans S.P.A. (§§ 12, 13, 17). Il correspond à peu près à ce que l'Institut Géogra­ phique National appelle la planimètrie d'une carte ou à ce que J. BERTIN appelle les deux dimensions Ox et Oy du plan (alors que les autres inscriptions provien­ draient d'une dimension Oz rabattue) ou enfin à ce que Ph. BOUDON appelle les signes iconiques opposés aux signes codés. A ces trois définitions issues d'une pratique de 1'inscription nous avons préféré une défi' nition formelle qui ne doit rien à une perception in­ tuitive de ce qui est représenté. Ce choix nous permet de contrôler notre analyse et de définir avec précision les sémioses qui nous donneront accès au contenu : l’un 107 des principaux avantages de cette définition est de prendre un départ formel (matériellement contrôlable) qui débouche sur le contenu, dont le domaine est plus flou et moins aisément manipulable. Alors que "Sémiotique des Plans en Architecture" lais­ se de côté l'ensemble superposable, nous allons lui consacrer ici beaucoup d'efforts puisque, comme nous le verrons, il a un rôle important dans la recherche du contenu. Les éléments superposables peuvent être rangés par des critères ne prenant en compte que l'expression. Ce rangement s'avère peu intéressant. L'intérêt se con­ centre plutôt ici sur des codes constitués indépendam­ ment des plans en architecture et au sujet desquels il est possible de trouver des textes méta-linguistiques. Citons en particulier : - L'écriture alphabétique de la langue naturelle, à laquelle on pourrait rattacher les abréviations. - L'inscription des chiffres et des nombres. - Les "signes conventionnels" de l'I.G.N., indiquant la matière, le type d'occupation de l'espace, la fonc­ tion. .. • L'orographie ou représentation du relief, est rattachable aux signes conventionnels, mais l'I.G.N. la distingue à juste titre car elle décrit conventionnel­ lement un corps (qui est le sol) d'un point de vue qui relève typiquement de la segmentation de l'espace, laquelle segmentation est habituellement décrite par des éléments non-superposables. Le quadrillage LAMBERT des cartographes et topogra­ phes qui, s'il ressemble aux trames des syntaxes, joue un rôle très différent. Chacun de ces codes doit être étudié en tant que sys­ tème ayant une structure interne, pour être mis ensui­ te en relation avec le corpus non-superposable. Enfin, 108 il faudra chercher ses liens avec d'autres codes su­ perposables. Il est possible de distinguer deux sortes de figures superposables, celles dont la structure profonde coïn­ cide avec une figure du nonsuperposable (c'est le cas des traits manifestant la frontière d'une région nonsuperposable). , et celles dont la structure profonde se rapporte à une figure non superposable qui ne leur est pas identique (ex : cercles dénotant les arbres, semis de traits dénotant l'eau,...). La comparaison dont il est question se passe au niveau profond, entre deux figures. Dans les deux cas, nous disons qu'une figure se rapporte à une autre figure. Nous noterons cela Fs = f (Fn) exprimant comme une fonction ce rapport entre la figure superposable et la figure non-superposable. Dans le premier cas, la fonction est l'identité d 'où (1) Profondeur (Fs = Fn) ou Pr (Fs = Fn) Dans le deuxième cas, la fonction est la différence, d 'où (2) Profondeur (Fs ? Fn) ou Pr (Fs ? Fn) Les figures superposables du premier cas sont celles de la manifestation pure : elles ne modifient en rien l'espace non-superposable auquel elles s'appliquent. La figure typique en est le trait : il manifeste la limite mutuelle de deux régions non-superposables et s'inscrit entre elles. Nous avons donc la chaîne mani- 109 festêe Surface (Rn . Rs . R'n) qui s'écrit aussi S (Rn . T . R'n) Or, au niveau profond, ce qu'il y a entre Rn et R'n est une ligne qui appartient simultanément à l'une et à l'autre, ou, comme une telle ligne est une cou­ pure, n'appartient ni à l'une ni à l'autre. On devrait donc écrire Pr (Rn . -L . R'n) Si la manifestation s'était réalisée dans la défini­ tion (b), la ligne L se serait traduite par un bord qui, étant une variation brutale de valeur, ne peut être modulé. Par contre, la manifestation de la li­ gne par un trait permet de moduler ce dernier puis­ qu'il possède une épaisseur qui en fait une région. Cette modulation pourra être investie de contenu, et le trait apparaîtra alors comme le moyen graphique permettant de qualifier le passage entre deux régions du superposable. Si d'autre part l'une des régions (soit Rn) dénote un contenu donné, et que le trait en dénote un aussi, cela permet d'attribuer un contenu à la deuxième région R'n mise en relation. Ce mécanisme est un déchiffrement par la géométrie et la manifes­ tation. Les figures superposables du deuxième cas Pu (Fs f Fn) sont nombreuses et plus variées. A titre d'exemple, les figures C --- ► Possèdent des structures profondes diverses, mais les deux premières se rapportent à des points du 110 non-superposable, la troisième se rapporte à une di­ rection. Ces figures dénotent soit des corps dans l'espace signifié, soit des figures non matérielles du dit espace, en aucun cas elles ne qualifient la transition entre deux espaces. Les deux cas que nous venons de voir peuvent être anlysés d'un autre point de vue mais par une méthode semblable : nous allons voir que ces deux types de figures superposables entretiennent le même type de relation entre (1) leur région de manifestation, notée S (Rs) et (2) la figure profonde du non-superposable à laquelle ils renvoient, et que nous noterons P (Fn) On constate en effet que les deux figures que nous posons comme termes de la comparaison sont toujours différentes. ex S (Rs) + P (R'n) Cas des drapeaux inscrits dans les frontières d'une carte géographique. C'est aussi le cas des semis et des hachures. S (Rs) f P (Ln) Tous les traits, y compris les traits interrompus. 111 S (Rs) ^ P (Pn) Toutes les pointes, y compris les groupes de tâches à implantation ponctuelle. Dans les trois cas ci-dessus, nous trouvons réunis dans la' même relation de différence avec les régions manifestées, les codes de manifestation (a) et (c), c'est-à-dire ceux qui correspondent à la procédure discontinue de manifestation. Si nous désignons par "figures superposables manifestées" les termes de gauche des trois équations ci-dessus, et par "repré­ sentants" les termes correspondants de droite dans les mêmes équations, nous pouvons dire que les fi­ gures superposables manifestées sont toujours diffé­ rentes de leurs représentants. Sous le terme repré­ sentant, nous trouvons les trois variétés d'implan­ tation définies par BERTIN et que nous avons évoquées en page 92 Nous pourrons opposer cette règle à celle qui ap­ paraît lorsque nous comparons les figures homologues tirées des figures non-superposables. Dans ce dernier cas, nous avons toujours S (Rn) = p (Rn) Soit en d'autres termes : les figures non-superposa­ bles manifestées sont toujours identiques à leurs représentants. L'opposition de ces deux règles peut servir de cri­ tère secondaire pour la reconnaissance des figures superposables. Nous disons secondaire car elle ne 112 fait que traduire sur le plan formel ce qu'on peut tirer d'une identification sémantique des figures en effet, le représentant n'est identifié que par le contenu. L'étude de l'expression que nous venons de faire tient compte du contenu. Néanmoins, elle ne met pas en place des concepts qui soient à même de ranger les éléments du niveau du contenu et d'y établir des catégories. Ces opérations sont necessaires à 1 ana­ lyse sémiotique, et nous allons essayer de les réali­ ser. La partie qui débute ici rend compte d'une pre­ mière division du contenu en catégories générales (l'espace, le faire, les relations) qui se définis­ sent les unes par rapport aux autres. Leur lien avec les catégories de l'expression n'est qu'esquissé. Par conséquent, il est trop tôt encore pour proposer une syntaxe qui prenne en compte simultanément les deux niveaux de l'expression et du contenu. L'étude du contenu semble, par certains côtés, moins élaborée que celle de l'expression. Il y a à cela deux raisons : - Les éléments de l'expression sont directement ac­ cessibles à nos sens, ils sont aisément reproducti­ bles et se prêtent bien à l'observation ainsi qu'à l'analyse. A l'opposé, les éléments du contenu ne sont pas directement accessibles à l'observation, d'où la difficulté de leur étude. ■ Nous avons commencé l'étude de l'expression en supposant que nous ignorions le contenu. Cette hy­ pothèse d'ignorance temporaire nous a permis de mettre au point une méthode rigoureuse d'analyse de l'expression . Simultanément, par la mise entre 116 parenthèses du contenu, elle retardait l'étude de celui-ci. En dernier ressort, la différence d'élabo­ ration des analyses des deux niveaux provient de la différence de temps investi dans l'une ou dans l'autre. Rappelons ici deux remarques que nous avons faites au début de ce rapport : - Il ne faut pas confondre analyse du niveau du con­ tenu, avec une analyse de contenu. Dans le premier cas, qui nous occupe, il s'agit de définir une partie de la structure d'un système sémiotique, alors que dans le second il s'agit d'articuler ce qui est ex­ primé par un procès particulier. Il est vrai que pour définir le système il faut passer par un procès, mais les résultats se placent à des niveaux d'abstraction et de généralité différents . - La recherche d'une définition du système vise, par­ mi d'autres buts, à rendre possibles une meilleure compréhension et une meilleure évaluation des con­ tenus des procès productibles à partir du système. Elle ne doit pas, pour cela, porter des jugements sur les contenus des procès qu'elle est appelée à considérer au cours de sa démarche. 3.1 L'ACCES AU CONTENU Nous parlerons ici, à titre méthodologique et pour fonder la connaissance du contenu dont nous ferons état dans la suite de l'étude, de la procédure qui nous a permis de contrôler le passage d'un ensemble de l'expresion donné (notre corpus) au contenu cor­ respondant. Ce qui est exprimé, étant supposé inconnu, ne peut être atteint qu'à travers une source que nous pourrions désigner par "informateur". Au paragraphe 17 de S.P.A.-, cet informateur était un architecte pra­ ticien. Dans les phases préparatoires de ce rapport, nous avons fait jouer le même rôle à des documents écrits. Quelquefois, nous faisons appel à notre connaissance du monde naturel, défini alors comme contexte du discours dessiné et non pas comme réfé­ rent (cf §3.6). Enfin, les relations relevées dans l'expression d'un procès, mises en rapport avec un domaine du sens, structurent ce dernier et articulent un contenu. Nous avons donc recours à quatre variétés d'informateurs» parmi lesquelles celle des documents écrits occupe une place particulière. En effet, ces derniers appartiennent à la classe des expressions graphiques et se trouvent soit sur les plans, soit accompagnant les plans, soit en liaison avec ces derniers grâce à des embrayeurs (au sens où les dé­ finit R. BARTHES : opérateurs permettant de passer d un systèmè à un autre). Dans le cas des plans en architecture, les noms de lieux et les noms des maîires d'oeuvre et maîtres d'ouvrage sont des embrayeurs entre les plans et le monde naturel d'une part, entre ies plans et différents discours tenus sur le monde 118 naturel d'autre part). Examinons de plus près le cas des "écritures" portées sur un plan. Elles relèvent du système de la langue naturelle. D'autre part, nous avons montré que les plans forment un langage. Il s'agirait donc de deux langages en coprésence, mis "l'un à côté de l'autre". Diverses hypothèses peuvent surgir relativement aux relations qu'entretiennent ces deux langages. La première, et la plus simple, est celle de la trans­ cription. Cela voudrait dire que nous disposerions réellemnt d'une "pierre de ROSETTE" juxtaposant deux textes identiques quant au fond mais inscrits de deux façons différentes. Deux observations nous amènent à abandonner cette hypothèse : I - La quantité d'inscription en langue naturelle est très variable selon les plans. Il est courant de voir des plans très voisins par le dessin et très diffé­ rents par les textes. Cette variation quantitative des inscriptions de l'un des langages par rapport à l'autre permet de douter du fait qu'il y ait trans­ cription. 2 - 1 1 apparaît très rapidement que les inscriptions en langue naturelle ne forment pas un discours suivi. Elles s'articulent rarement en phrases, et ces phrases ne sont jamais liées les unes aux autres. Il ne s'agit donc pas d'un discours, ou si l'on veut, d'un texte continu. II faut alors former une autre hypothèse que la trans­ cription, et l'appuyer sur les relations entretenues par les unités de l'écriture et les unités graphiques. Il est facile de constater que la relation métalinguistique existe en plusieurs endroits. A titre d'ex­ emple, la dénomination d'un plan (ici Grigny), portée 119 en grosses lettres dans un coin, équivaut à l'énoncé : GRI GN Y 3685 LOGE M t N TS LA GRANDE BORNE "ceci est Grigny". Cet énoncé appartient à la classe des prédications équationnelles analysées par R. JAKOBSON (cf. Essais de Linguistique Générale, Ch. 2) et identifiées comme typiquement métalinguistiques. Toute écriture toponymique fonctionne selon le même schéma. Nous verrons aussi qu'il y a une rela­ tion prédicationnelle allant du dessin vers l'ins­ cription et enrichissant le schéma métalinguistique simple (§§3.3 et 3.7). Le déchiffrement ne s'appuie donc pas sur deux en­ sembles qui se transcrivent mutuellement, mais sur deux ensembles dont une partie de l'un (au moins) est métalinguistique par rapport à l'autre. D'autre part, il ressort des observations 1 et 2 ci-dessus, qu'il n'y a pas d'inscriptions se rapportant à toutes les unités graphiques ou à tous les groupes d'unités. La correspondance entre les deux ensembles est donc partielle. Par conséquent, les inscriptions en lan­ gue naturelle ne pourront nous renseigner que sur une partie des divers documents dessinés, réunis pour l'étude. Deux cas peuvent se présenter : - Les diverses parties déchiffrables se recoupent mutuellement d'un document à l'autre, formant un recouvrement complet des différentes parties d'un Plan. Il devient alors possible de tout déchiffrer. - Les diverses parties déchiffrables se recoupent partiellement sans former un recouvrement complet du plan. Dans ce cas on peut essayer de construire Un niveau de contenu, à partir des éléments déchif­ frés et à l'aide de nouveaux documents dessinés et meme non dessinés relatifs soit au dessin d'archi­ 120 tecture en général, soit au domaine du contenu dé­ chiffré. Ce cas est en fait le nôtre : n'ayant pas obtenu un recouvrement total du domaine escompté (accessible grâce à des "informateurs vivants"), nous avons fait appel à des textes de caractères scientifique, technique et littéraire... et qui se rapportent d ’une manière ou d'une autre aux plans étudiés. En partant "d'îlots" déchiffrés, dont les éléments d'expression correspondent à un contenu précis, il y a une compréhension grossière du "texte dessiné". La confrontation de ces éléments entre eux, la comparaison des inscriptions en langue naturelle (et que nous désignons par le terme "écritures" uti­ lisé en cartographie), et surtout l'étude de la re­ lation entre les écritures et le dessin permettent de déduire un certain nombre de renseignements sur le contenu. A partir d'un certain degré de construc­ tion de ce dernier, il n'est plus nécessaire de recourir aux méta-textes : la production du sens peut devenir autonome, le "sentiment linguistique" est reconstitué à partir d ’un nombre fini de docu­ ments. Les plans fonctionnent alors comme un langage connu du lecteur. Le schéma d'identification du contenu, tel que nous l ’avons présenté ci-dessus, s'appuie sur les écritures inscrites sur le plan parmi les éléments dessinés. Or, le plan porte souvent des écritures inscrites en dehors des traits du dessin, ce dehors étant marqué par une ligne fermée (cadre) entourant soit le dessin, soit les écritures. Ces groupes d'écitures, qui concourent à la lecture, sont désignés par les termes "cartouche" et "légende", et s ’inscrivent le plus souvent près des bords de la feuille portant le plan. Alors que le cartouche identifie la globalité du document, la légende identifie les éléments per­ tinents du plan en ce qu'ils ont de neuf par 121 rapport aux autres plans. Une légende est un tableau à deux colonnes (le car­ touche n'a qu'une colonne, contenant une information par ligne), dont le nombre de lignes dépend de deux facteurs : - Le corpus commenté, - Le savoir supposé du lecteur. Si le lecteur est totalement ignorant, il faut lui expliquer tous les éléments du corpus, c'est-à-dire leur donner un équivalent connu. De plus,il serait logique de lui donner des indications relatives à la syntaxe des éléments, leur combinatoire, les rè­ gles permettant de les interpréter. Mais toutes ces questions sortent du cadre traditionnel de la légen­ de, et se trouvent rejetées dans divers manuels rédigés à l'intention du dessinateur et non du lec­ teur. Le lecteur devra donc faire deux opérations : - se reporter aux ouvrages en question, - transposer la problématique de l'inscription (qui y est exposée) en un problématique de lecture (décryptage). Ainsi, les légendes s'appuient sur des axiomes im­ plicites, plus complexes que la simple relation d'équivalence instituée entre le "signe" et sa "signification” (nous utilisons sciemment la termi­ nologie naïve, du fait de ses présupposés implicites) inscrits chacun dans une colonne. En particulier, toutes les légendes relatives aux "limites" supposent qu'on peut doublement définir une zone par ses limi­ tes : une définition géométrique, une identification fonctionnelle. Nous verrons cela en détail au para­ graphe 3.3. De plus, les légendes négligent les relations entre les éléments signifiants, et n'opèrent Pas d'embrayages inter-textuels : elles renvoient de la langue naturelle aux éléments de l'expression, et inversement. 122 Ainsi, il n'est pas de légende complète. D'ailleurs, une légende exhaustive ne peut exister car elle serait trop longue. Si elle existait, elle supposerait que les lecteurs éventuels ne savent pas lire et que les plans ne fonctionnent pas comme un langage. Et inver­ sement, le caractère incomplet des légendes par le savoir qu'il présuppose chez le lecteur, prouve que les plans forment un langage. Traditionnellement en France, la légende dispose dans la colonne de gauche les éléments inconnus et dans la colonne de droite leurs équivalents. Notons cependant que la liste des "signes conventionnels" du cadastre et de l'IGN, établie à l'intention des dessinateurs, adopte l'ordre inverse. L'inversion est due au fait que cette liste n'est plus une lé­ gende à proprement parler : elle est inscrite sur une feuille indépendante du document graphique luimême, et sert au dessinateur qui établit la carte. En fin de compte, la carte est livrée à l'usager sans sans légende, ce qui aboutit à la conclusion para­ doxale suivante : le lecteur est supposé connaître les équivalences, le dessinateur est supposé les ignorer. Nous avons là une trace manifeste d'un faire (cf. §§3.3 et 3.5) qui est celui de l'établis­ sement de la carte I.G.N. et du cadastre. L'utilisation conjointe de la légende et des indi­ cations métalinguistiques inscrites à côté des éléments de l'expression graphique permet des re­ coupements qui sont très précieux pour vérifier la cohérence de l'interprétation et mieux asseoir la définition des unités du contenu. En dernière analyse, c'est ce but qui est poursuivi par la procédure de déchiffrement que nous venons de décrire brièvement. 123 Nous avons appliqué la méthode ci-dessus à des cas précis, et elle s'est révélée parfaitement opérante La suite de l'étude supposera donc le contenu par­ faitement connu. Nous saurons ce qui signifie tout élément ou combinaison d'éléments. 3.2 EXEMPLE DE LECTURE LOCALE Nous prendrons notre exemple dans le quartier du LABYRINTHE dé GRIGNY LA GRANDE BORNE. Ce sera le sous-quartier du MENISQUE constitué par quatre groupes de bâtiments autour de la PLACE DU MENISQUE. Chacun des quatre groupes est constitué de deux unités de type 1 (cf. plan G 12), assemblées par l'un de leurs côtés droits, et formant par conséquent une portion de couronne ayant comme angle au centre 2ÏÏ/5. Les quatre groupes s'organisent en une couron­ ne circulaire rompue en quatre endroits, selon deux directions orthogonales correspondant sensi­ blement à NORD-SUD et EST-OUEST. Les quatre perce­ ments ainsi produits sont égaux, et correspondent à un angle au centre de 1T/10 chacun. Quatre chemins viennent de l'extérieur du sous-quartier et débouchent sur la place par les quatre percements cités, s'ar­ rêtant à une boucle de la chaussée carrossable in­ terdite aux véhicules automobiles (sauf pompiers, ambulances, et déménageurs). La dite boucle est aussi circulaire, de largeur constante, bordée d'une rangée d'arbres à l'extérieur; elle entoure un es­ pace libre circulaire occupé par "un bassin pour patauger (qui) domine une cuvette de sol pavé qui ne sert à rien, qu'à sy asseoir au hasard" (cf. Qu'estee qu'une ville, E. AILLAUD). La boucle de voie carrossable est reliée par une bretelle à la RUE DE LA SERPENTE. Entre la chaussée et les bâtiments, on rencontre successivement un anneau réservé aux Piétons et des jardinières, longues bandes plantées de fleurs, évitant le contact direct des façades 126 avec le sol cimenté. Un lampadaire est planté devant chaque bâtiment, sensiblement sur l'axe de ce dernier. Les bâtiments ont tous cinq étages de haut (quatre étages sur rez-de-chaussée) et s'opposent ainsi à ceux de la rue voisine, qui n'en possèdent que trois. Les dimensions de tous les éléments cites (sauf les lampadaires et les arbres) peuvent être lues sur le plan. De plus, nous connaissons la composition in­ terne de chaque bâtiment (par le plan G 12) . au rez-de-chaussée, il y a un appartement de deux pièces et un appartement de trois pièces, à chaque étage il y a un appartement de quatre pièces et un appartement de cinq pièces. Ces divers logements sont découpés d'une façon qui nous est accessible par les plans de détail. Cette lecture sommaire n'est pas la seule possible, en ce sens que nous aurions pu commencer par parler de la voierie, de la place, et finir par les bâti­ ments, ou adopter un ordre différent. Cependant, toutes les lectures de ce type que nous pourrions faire doivent obéir à plusieurs impératifs auxquels satisfait celle que nous avons faite ci-dessus. Ces impératifs sont les suivants : 1- inventaire et identification des éléments signi­ fiants , 2- description de chacun des éléments, 3- mise en relation des éléments appartenant à une même classe, 4- mise en relation des éléments appartenant à des classes différentes et mise en relation des classes. Les deux derniers points (3 et 4) sont réductibles aux premiers, en ce sens qu'ils reprennent le meme programme à propos d'unites composées de plusieurs éléments. Les impératifs de base sont donc les points 127 1 et 2 , et ils sont recyclés à chaque niveau d'organisation du plan (les degrés n de l'axiologie algébrique, §2.2). Nous allons les examiner plus en détail. 3.3 CATEGORIES DU CONTENU Tous les éléménts signifiants que nous avons identi­ fiés dans notre lecture (§3.2) obéissent à la défi­ nition de l'élément minimal que nous donnons au paragraphe 8.2 de Sémiotique des Plans en Architec­ ture, et que nous avons reprise dans la Deuxième Partie de cette étude. E = (R, L, P) Un élément est donc, en premier lieu, un opérateur dont l'existence est définie au niveau topologique : si on analyse le contenu en sujet et prédicat, ou en d'autres termes en "ce dont on parle" et "ce qu'on dit", on s'aperçoit que tout le contenu relatif à un élément se ramène à une chaîne de prédicats ayant une origine unique : l'élément défini au niveau topologique. Une telle chaîne peut s'exprimer en logique des prédicats par une série (PI, P2... Pn) de prédicats attachés à une variable E que serait l'élément. Seule la variable n'est pas un prédicat : elle correspond à un "être", à un corps dont on affirme l'existence. Si à la limite on peut la dé­ composer en deux termes, un prédicat "il existe" et un sujet "quelque chose", pour "il existe quel­ que chose", ce quelque chose est indécomposable. En dernier ressort, ce quelque chose signifié ne peut se manifester que par une région analysable comme pointe, trait, ou région, c'est-à-dire comme la manifestation d'un point, d'une ligne, ou d'une région. 130 L'existence d'un élément de l'expression est spa­ tiale. De plus, comme nous avons commencé par situer le lieu de notre analyse, la chaîne prédicative affirme "il existe ici". Le "ici" déictique est un prédicat dêcomposable en d'autres prédicats de caractère géométrique (spatial), selon un système de référence topologique, projectif, métrique. En somme, le "ici" désigne l'implantation (cf.§§ 2.3 et 2.4) que nous avons analysée comme une figure géométrique du niveau profond. Dans la chaîne prédicative (nous dirons désormais la chaîne, par économie), les prédicats sont rangés : en effet, toute qualité géométrique est ordonnable par rapport aux autres qualités géométriques, et cela par la relation de présupposition qui lie les géométries entre elles (cf. § 2.3). La chaîne est donc linéarisable. Reprenons un exemple : l'élément bâtiment. C'est une région unique, au contour simple. E = (1, 1, 0) La distinction de deux seg­ ments droits opposés à deux segments courbes relève de la géométrie projective et qualifie le contour de l'élément, et par ricochet, qualifie la région. La mesure de la longueur du seg­ ment droit et des rayons de courbure des segments cour­ bes relève de la métrique, et qualifie le contour. La mesure de l'angle au centre du secteur de couronne qua­ lifie simultanément le contour et la région dont il définit la superficie. La manifestation graphique du contour par un trait de 0,8 mm d'épaisseur qualifie le passage de l'extérieur vers l'intérieur de la région, et qualifie par là la 131 région elle-même. L'écriture 3 C/n précise que l'é­ lément, identifié grâce à la légende possède trois niveaux. L'écriture(T)précise que c'est un bâtiment de type 1, ayant au rez-de-chaussée un logement de deux pièces et un logement de trois pièces, et en étage un logement de quatre pièces et un logement de cinq pièces dont les plans de détail portent les références 33 et 36, 32 et 36, 31 (cf G12). Ces plans qualifient la région de l'élément (rappelons que cette région dite "intérieure au contour" est iden­ tifiée par la dimension au niveau métrique, par la relation du point à l'infini au niveau projectif, et par convention au niveau topologique). Cette chaîne de prédicats retrouve la progression du processus de génération des éléments minimaux (SPA, § 9), qu'elle prolonge par l'introduction des écritures et de la légende. Ecriture, légende et traitement graphique apparaissent alors comme der­ niers maillons prédicatifs, présupposant les qua­ lités spatiales déterminées par la géométrie. Cet ordre, de même que la relation de présupposition, sont conformes aux relations globales dont nous avons montré l'existence entre l'ensemble des dessins et l'ensemble des écritures d'un côté, et entre l'en­ semble des plans et les légendes d'un autre côté. Dans cette chaîne, nous pouvons relever deux caté­ gories de qualités : - des qualités spatiales, - des qualités attachées à l'usage qui est fait d'un espace Relèvent de la catégorie spatiale les régions, les segments droits, la portion de couronne, l'angle au centre, la circularité, les directions, l'orthogo­ nalité... (nous devrions dire, pour que ce soient des qualités : la régionalité, la rectitude, etc. 132 Ce serait trop lourd). Ces qualités rendent compte du découpage de l'espace et des relations des figures ainsi déterminées. Elles définissent un univers de contenu, une catégorie fondamentale, qui est celle de 1'ESPACE. Relèvent de la catégorie de l'usage les implications des identifications opérées : la lecture d'une "route" ou d'une "voie" à partir d'un élément de l'expression implique une mise en relation de cet élément du contenu avec un faire circuler attribué à l'usager de l'espace signifié. De même, un appar­ tement implique un faire habiter, une place, un faire jouer, etc. Les enchaînements de ce type, associant automatiquement un faire à un espace par la recon­ naissance de ce dernier, se ramènent à des défini­ tions des objets par l'usage qui en est fait, alors que la lecture spatiale définit les objets par leur forme. Nous regrouperons les qualités et définitions de ce type dans la catégorie du FAIRE, attribuant à cette dernière un statut comparable à celui de la catégorie de 1 'ESPACE. Remarque : nous adoptons le mot "faire" ici pour rappeler, à titre de référence, notre recherche sur l'architecture comme système sémiotique, et que nous avons publiée sous le titre "Sémiotique de l'espace" (DGRST, 1973). Par rapport à l'architecture comme langage, les plans apparaissent comme un métalangage descriptif. Entre les deux catégories de l'espace et du "faire" on peut définir des relations logiques : le faire présuppose l'espace, en dehors duquel il ne peut se 133 dérouler. Par contre, l'espace ne présuppose pas tou­ jours le faire : ce dernier présuppose un espace du mouvement. Or, l'espace se divise, d'un point de vue déductif, en deux classes : l'espace du mouvement et l'espace du non-mouvement. Si ce dernier est investi par le faire, le premier est investi par la matière, qui devrait apparaître dès lors comme une catégorie du contenu au même titre que le faire. Ainsi, c'est l'ensemble des catégories du FAIRE et de la MATIERE qui est présupposé par 1 'ESPACE. Le peu de place occupée dans notre lecture du § 3.2, par la catégorie de la matière est dû au type de plan que nous'avons là : il s'agit d'un plan de masse. Si nous avions pris un plan de détails, la matière occu­ perait une place prépondérante. D'ailleurs, si on se reporte à la portion de plan du §3.2, on s'aperçoit rapidement que la catégorie de la matière est pré­ sente, en particulier dans la forme et les limites des chemins qui arrivent sur la place : Les lignes qui les séparent de la région annulaire entourant la boucle de voierie indiquent le changement de matière entre les deux régions en contact. Notons que la matière retrouve la classe des objets pris en compte par notre sémiotique de l'espace, ce ûui confirme les deux recherches en même temps. Considérons maintenant les lignes qui sont frontières entre deux régions, et les traits qui les manifestent, dans le cas particulier de la PLACE DU MENISQUE. On peut dire qu'il y a deux épaisseurs de traits dif­ férentes : le trait fort est celui qui marque les limites extérieures des bâtiments. Le trait fin sert pour le reste : la voierie, les arbres, le bassin, ^es jardinières, et les murs mitoyens des bâtiments. 154 Le trait est donc modulé, mais de façon discrète : il y a un gros et un fin. Entre ces deux traits s'ins­ taure une relation hiérarchique au niveau de l'ex­ pression : l'un est plus fort que l'autre, ou plus épais. De ce fait, il devient plus visible et met en relief les lignes qu'il manifeste. Cette mise en re­ lief est transmise au contenu : ce sont les sépara­ tions entre l'intérieur des séquences de bâtiments et l'extérieur de ces dernières qui sont importantes au niveau du contenu. Ce qui est rendu important, c'est la frontière entre deux espaces, et cela par opposition à d'autres fron­ tières qui ne sont pas importantes. Ces dernières reçoivent toutes le même traitement graphique qui les met à égalité. Cette opposition est systématique. Or, qu'est-ce qui est marqué ici ? C'est la frontière en­ tre les espaces intérieurs et les espaces extérieurs, entre le privé et le public, entre l'intime et le non-intime. Il ne faut pas voir dans ce trait la représentation d'un mur plein, car dans ce cas, il aurait fallu mar­ quer les percements (portes et fenêtres) du dit mur. Ce qui est signifié, ce n'est pas un objet, c'est la différence entre deux espaces. Ce qui est qualifié, c'est la différence. La différence entre l'intérieur et l'extérieur des bâtiments est plus importante que la différence entre la voie de circulation et la cour pavée, ou entre la voie et les jardinières. Le trait qualifie la différence des espaces alors que le bord ne le peut pas : le bord, avec son absence de modulation possible, ne peut que manifester une existence sans lui adjoindre un prédicat, ce que le trait peut réaliser. Cette qualification de la différence peut être pré­ cisée : puisqu'il s'agit d 'intérieur/vs/extérieur et 135 de privé/vs/public, il s'agit aussi de non-pénétrable/vs/pénétrable : ou de l'axe "plus ou moins pénétrable". En effet, ce qui est public, c'est ce qui est accessible à toute personne, et ce qui est pri­ vé, c'est ce qui est réservé à quelques uns. Ainsi, le plan énonce des relations dans la catégorie du fairé, et s'appuie pour cela sur la manifestation graphique. Ces relations ne sont pas d'ordre spatial (ex : inclusion, contiguïté) ni présupposées par les unités de faire mises en relation. Elles sont posées par l'énonciateur du plan et à ce titre peuvent nous servir de point de départ à l'étude de l'énonciation. Ce n'est pas ce dernier aspect qui nous intéressera : nous nous' arrêterons ici sur l'existence de relations de contenu qui ne sont pas classables dans les caté­ gories de l'espace, du faire, ou de la matière. Il y a donc une quatrième catégorie à poser : celle des relations, parmi lesquelles les relations d'ordre jouent un rôle considérable. En particulier, l'or­ ganisation des relations d'ordre sur l'axe de la ahronologie permec d'inscrire de façon explicite le temps dans le plan, alors qu'il est présupposé par la catégorie de l'espace et du faire. Nous venons de dégager quatre catégories du contenu. Les présuppositions qui les lient Relations ière^---- Relations et la place qu'elles occupent dans la chaîne prédi­ cative font qu'on peut leur attribuer un rôle syn­ taxique. Nous laisserons cette question à une ana­ lyse ultérieure, et nous allons examiner chacune des ' les catégories seule, comme nous l'avons fait pour les axiologies de l'e l'expression. r , ' ■ 3.4 LA CATEGORIE DE L'ESPACE Les plans d'architecte parlent de l'étendue avec 1 'étendue. Nous utilisons l'opposition étendue/espace dans le même sens que GREIMAS : "Si tant est que toute connaissance du monde commen­ ce par la projection du discontinu sur le continu, on peut peut-être reprendre provisoirement la vieille opposition de : étendue/vs/espace. Pour dire que l'étendue prise dans sa continuité et dans sa plénitude, remplie d'objets naturels et ar­ tificiels, présente pour nous par tous les canaux sensoriels, peut être considérée comme la substance qui, une fois informée et transformée par l'homme devient espace, c'est-à-dire la forme, susceptible, du fait de ses articulations, de servir en vue de la signification." (In Sémiotique Topologique Actes du Colloque Sémiotique de l'Espace, I.E. 1972). Nous disons bien que les plans parlent de l'étendue et non pas qu' ils la représentent. En effet, ils la découpent, la qualifient, la décrivent. Ils y pro­ duisent ce que nous appelons l'espace, et qui est investi alors par le faire, la matière, et leurs relations. La première opération, présupposée par tout le reste, est celle du découpage de l'espace. c 'est elle qui pose une forme sur la substance qu'est 1 étendue, et en fait un support du contenu. Nous avons vu aussi que la problématique était voisine pour l'expression, dont la substance est une étendue a deux dimensions, structurée par le dessin qui y définit un ou plusieurs espaces. L'espace signifié est donc exprimé par un espace signifiant, d'où pro- 138 vient notre recours aux géométries pour pouvoir en ren dre compte. D'autre part, nous avons vu (§ 3.3) que l'existence d'un élément du contenu passe nécessairement par une affirmation spatiale, au niveau de la région, de la figure, ou du point. De plus, nous avons récusé l'oppo sition forme/fond : il n'y a pas des éléments qui si­ gnifient et qui s'opposent à une masse amorphe , la structure articule le continuum tout entier et les fi­ gures s'y combinent en éléments. Il en résulte un pa­ vage de l'espace : il est entièrement rempli, et sans omission. Cette affirmation est vraie aussi bien pour l'espace signifiant (niveau de l'expression) que pour l'espace signifié (niveau du contenu), la seule diffé­ rence "spatiale" entre les deux étant que le premier est à deux dimensions alors que le second en possède trois. Il y a deux manières d'envisager un tel pavage : 1 - en considérant les "pavés”, qui dans le cas de l'expression sont des régions. 2 - en considérant les "frontières" entre les "pavés", et ce sont les "coupures". La première manière insiste sur l'existence des élé­ ments, et ils apparaissent comme la projection d'une taxinomie sur l'ensemble des points de l'espace. La seconde insiste sur les frontières et les limites. Ces deux manières duales doivent être situées au ni­ veau des structures profondes, aussi bien pour le ni­ veau de l'expression que pour celui du contenu. Elles ne doivent pas être confondues avec la manifestation, qui est graphique pour l'espace signifiant, et qui englobe le "faire" et la matière pour l'espace signifié. 139 Nous avons vu à propos de l'espace signifiant que le découpage d'un objet, en éléments plus petits pour dé­ finir une combinatoire, est une opération algébrique appliquée à l'étendue. Or, cette opération peut être réalisée aussi bien par des figures inscrites dans l'étendue (point, ligne, région) que par un discours différent, verbal ou écrit. Ainsi, il est prévisible que nous puissions produire, sur un même espace si­ gnifié, deux découpages différents : - celui produit par les éléments graphiques de l'ex­ pression : c'est le découpage dessiné ; - celui produit par les écritures de l'expression : c'est le découpage écrit. Ces deux découpages s'appliquent au même objet (1), et il est intéressant dès lors de les comparer. La comparaison se fera en remarquant qu'un découpage est une partition, et nous retiendrons la définition ma­ thématique de la comparabilité : deux partitions sont comparables si toute partie de l'une peut s'écrire comme une réunion de parties de l'autre, ou inverse­ ment. A titre d'exemple, la partition dessinée, déterminée et décrite par les diverses géométries (cf S.P.A. § 6), nous servira de référence à laquelle nous rapporterons les partitions écrites : nous prendrons ces dernières dans un ordre progressif, en partant de l'espace en­ tier d'un plan donné (celui de GRIGNY LA GRANDE BORNE, plan 14 A). Première partition du document : Crigny/vs/hors Grigny La séparation est doublement marquée : sur le plan du contenu des écritures : tout ce qui (1) Cette identification résulte de la lecture des ecritures : elles désignent des parties de l'espace signifig par le dessin. 140 est hors Grigny est désigne par "propriété de..." ou "Etat par Ministère de la Justice" ou "Etat par Minis­ tère des travaux publics". Quant à Grigny même, elle est désignée par le cartouche... -sur le plan de l'expression : les inscriptions "propriété de..." ou "Etat par Ministère de ...." sont faites en écriture manuelle, trait fin. Toutes les inscriptions relatives à Grigny même sont faites mé­ caniquement, soit à l'aide de pochoirs, soit par trans fert (Letraset...). Ainsi l'opposition Grigny/hors Gri gny est signifiée par l'opposition écriture mécanique/écriture manuelle. Sur la partition graphique du 14 A, cette partition écrite correspond sensiblement à la définition du cor­ pus adoptée au paragraphe 5.1 de "Sémiotique des Plans en Architecture" : il suffit d'en enlever le cartouche et un rectangle mince entre le bord inférieur de la feuille et la voie à grande circulation qui lui est parallèle. Deuxième partition de Grigny : Division en quartiers. Grigny se divise en sept quar­ tiers désignée par : le Labyrinthe, le Méridien, la Ville Haute, les Tiroirs (ou les Enclos), la Peuple- 141 raie, les Radars, la Ville Basse (ou Médina). Cette deuxième partition de Grigny compte 8 classes : 7 quartiers + 1 hors Grigny (cf. ci-dessus). Sur la partition graphique du plan 14 A, cette deu­ xième partition écrite est difficile à référencier : en effet, rien n'indique les frontières des quartiers. D'où une question, qu'il aurait fallu poser aupara­ vant : est-ce que les 7 quartiers remplissent entiè­ rement Grigny ? En termes mathématiques, nous dirions : est-ce que les sept classes réalisent un pavage de la région connue sous le nom "Grigny" dans la première partition écrite ? Rien ne permet de répondre à partir du plan lui-même : ni le dessin, ni l'écriture. C'est là qu'on peut faire appel à la plaquette "Qu'est-ce qu'une ville" où E. AILLAUD décrit sa ville de Grigny. Les 7 quartiers sont décrits sous le chapitre "Urba­ nisme", en dehors duquel AILLAUD pose un système général de circulation formé d'une voie périphérique qui "longe des zones non aedificandi et sur ces zones sont situés : les parcs à voitures... des terrains de sport... les équipements scolaires. A cette voie pé­ riphérique accèdent d'étroites dessertes... qui permet­ tent à l'intérieur de la ville les circulations de service mais aucun stationnement..." •Ainsi, la deuxième partition de Grigny n'est pas celle qu'on lisait tout à l'heure dans les inscriptions du plan 14 A, puisque les 7 quartiers ne recouvrent pas entièrement l'une des deux classes de la première Partition. D où : deuxième partition corrigée s'inscrivant dans La classe "Grigny" de la première : intérieur de la ville"/vs/" système général de cir­ ulation ", "n fait, ces appellations dues à E. AILLAUD sont 142 inadéquates : le système général de circulation comprend la majorité des "bâtiments d'intérêt public (terminologie IGN, ou en d'autres termes, les équi­ pements socio-culturels). Les quelques équipements qui sont cités par le plan (Eglise, crèche... ) ne sont pas cités par AILLAUD "dans" la description de sa ville. Ils sont donc implicitement rejetés. D'où une nouvelle formulation de l'opposition : ville de 1'architecte/vs/ëquipements socio-culturels AILLAUD instaure dans le périmètre fourni par le maître d'ouvrage, une nouvelle partition intérieur/ extérieur. Soit en récapitulant les deux partitions : x Grigny du promoteur OPHLM Grigny de l'architecte hors Grigny Ensemble des équipements socio-culturels et des garages Propriétés privées propriétés de l'Etat il est facile de constater que l'opposition ville de 1'architecte/équipements socio-culturels n'est pas un simple jeu verbal : elle se concrétise dans la recherche formelle graphiquement inscrite sur le plan : tous les emplacements prévus pour les équi­ pements sont laissés en blanc, vierges de toute ins­ cription autre que l'écriture qui les désigne. Seul un trait fin marque des frontières nettes, faciles à relever. Cette deuxième partition est donc gra­ phiquement marquée. 143 Troisième partition : Il s'agit de la division de la ville de l'architecte en 7 quartiers et de l'ensemble des équipements et garages en installations différenciées. Equipements et garages sont nettement cernés et ne posent aucun problème d'identification sur la parti­ tion graphique. Par contre, les quartiers n'ont au­ cun contour permettant d'attribuer à un nom de quar­ tier une région ou un ensemble de régions de la partition graphique. Il s'agit donc d'une partition graphique floue, sans limites marquées, alors que la partition écrite est nette. Nous avons essayé dans "Sémiotique des Plans en Architecture" (§§ 14, 15, 16, 17) de donner une as­ sise formelle à une définition systématique et mi­ nimale des quartiers, fondée en partie sur les des­ criptions utilisées par AILLAUD. Ces tentatives peuvent être classées, du point de vue qui nous occupe ici, comme la recherche d'une partition graphique en fonction d'une partition écrite donnée, et cela par une procédure syntaxique. Nous obtenons alors une partition du plan en quar­ tiers formels, ainsi que nous obtenons une grande région vide de constructions, que nous avions ap­ pelée la zone centrale (SPA § 14) et qui n'est pas citée par AILLAUD au même niveau que les quartiers. Il en parle en passant, quand il parle du quartier du labyrinthe et qu'il en oppose les "espaces in­ térieurs" à "un espace extérieur". Nous retrouvons là, au niveau de la troisième par­ tition, une autre distinction intérieur/extérieur, enchâssée dans les deux précédentes signalées à propos des deux premières partitions. H D'où le schéma complété : hors Grigny Grigny du promoteur Grigny de 1'architecte Grigny des quartiers espace ext. de la zone centrale équipements écoles sports propriétés privées propriétés de l'Etat garages parkings Quatrième partition : Certains quartiers (le labyrinthe, le méridien) se divisent en sous-quartiers nommés (la demi-lune, le ménisque...)* D'autre part, les équipements se divi sent (sur le plan 14 C) en écoles nommées (école du 145 buffle, école de l'autruche... ). S'il est facile de reconnaître sur le plan les écritures relatives à ces éléments, il est plus difficile de savoir quelles sont les limites de la partition graphique correspon­ dante . Prenons le cas des écoles. L'école du buffle et l'é­ cole de l'autruche s'inscrivent, avec leurs dépendan­ ces, à l'intérieur du périmètre désigné par ECOLES A sur le plan 14 A. Il est aisé d'identifier les bâti­ ments de l'une et l'autre école par les relations de superposition et de voisinage définies précédemment. Mais il subsiste, à l'intérieur du même périmètre, le Réfectoire, le Logement des Professeurs, une Maternel­ le non nommée, et un terrain vide non départagé et qui appartient donc globalement aux écoles et à la maternelle. Là encore, la partition fait apparaître un intérieur et un extérieur. Plus, elle met en évi­ dence un fait qui aurait dû être relevé : ce qui appa­ raît comme extérieur est en quelque sorte une dépen­ dance de ce qui est intérieur. Si le mot dépendance est peu adéquat, on peut chercher à mieux cerner la notion : l'extérieur unique appartient en commun à la multiplicité des éléments classés "intérieur", semble être une nécessité dans ce système, dans la mesure ou aucun élément résultant de la partition écrite ne peut apparaître sans cet extérieur. Si on prend le problème dans l'ordre inverse, 1'ex­ térieur apparaît comme supplément à toute syntaxe i 'éléments : la syntaxe n'est pas purement additive. Elle donne quelque chose de plus, un extra. Quant aux suus-quartiers, ils portent les noms des Piaces qui apparaîtraient par division à la cinquième partition. On en déduit que chaque place annexe une portion (jusqu'à présent indéterminée) du quar­ tier et le met sous sa dépendance. 146 Cinquième partition : Les places et les rues apparaissent comme des sousensembles des sous-quartiers. Les équipements socio-culturels ne se divisent plus. Il y a deux définitions des places et des rues, mises en jeu dans ce plan : La première définition prend en charge, avec la rue, les bâtiments riverains. Cette définition correspond à la locution "j'habite telle rue", par laquelle la langue parlée annexe les bâtiments à la voierie. Nous avons pu constater que la voierie n'a reçu un nom que lorsqu'il fallait numéroter les bâtiments, ce qui démontre l'adéquation de cette définition, à propos de GRIGNY. La segmentation graphique des sous-quartiers en rues pourrait être précisée si on possédait une bonne défi­ nition graphique des sous-quartiers, ce qui n'est pas le cas. Il n'en reste pas moins que la netteté de la partition écrite et les configurations possibles des sous-quartiers permettent de prévoir l'apparition d'un reste, extérieur aux rues et places et intérieur aux sous-quartiers. Une deuxième définition est celle des Ponts et Chaussées, pour qui la rue est une voie de circulation, excluant les immeubles riverains. C'est cette définition qui est assumée par les topographes et cartographes, et nous la retrouvons dans la manière d'inscrire les noms des rues sur les plans : des noms de rues sont inscrits en sui­ vant le contour de la rue sans que l'écriture se su­ perpose aux traits marquant les bords de la voierie, ce qui entraîne une déformation. Cependant, cette définition ne donne pas toutes les limites de la région que nous serions fondes 147 à appeler "rue" : la rue est une voie publique inté­ rieure à la ville, bordée sur deux côtés par des zo­ nes où la circulation est interdite par des construc­ tions, plantations, cours d'eau,... Que se passe-t-il sur les autres côtés ? Combien y-at-il d'autres cô­ tés ? Dans le cas théorique le plus simple, il reste deux côtés, non matérialisés, au-delà desquels on trouve en général deux carrefours. La rue simple est donc un quadrilatère (courbe ou droit) allongé, pos­ sédant deux limites matérielles le long de ses plus longs côtés, et deux limites immatérielles. En France, la rue porte un nom, et les carrefours n'en portent pas. Le cas des routes et chemins est formellement comparable : ce sont des section dis­ crètes d'une voierie continue. Les bords de la voierie sont matériels. Les coupures instituant des par­ ties discrètes sont virtuelles. Cette situation se retrouve parfaitement dans le plan et'sur les cartes : la voierie est un continuum (nommé Tore n° 1 dans le paragraphe 12 de "Sémioti­ que des Plans en Architecture") qui est segmenté par les inscriptions qu'il porte : rues, places, allées, impasses, cours , ... Ici, la "partition écrite" est plus fine que la par­ tition graphique : l'écriture discrétise, divise le tore unique de la voierie. Si on extrait la rue deuxième définition de l'ensem­ ble graphique représentant la rue première définition, i l nous reste deux classes principales d'éléments : les bâtiments et les espaces libres entourant le r oobi l i er urbain. Encore une fois la partition fait aPparaître un intérieur et un extérieur. Au bout de la chaîne des enchâssements, l'élément le plus inté­ rieur est le bâtiment. C'est l'unité de base d'où 148 part la combinatoire mise en oeuvre par E. AILLAUD. Représentation arborescente de l'enchâssement des partitions Remarquer l'enchâssement type : X Intérieur Extérieur Une seule fois, la règle est transgressée, par un enchâssement dans un élément extérieur, cette dis­ torsion étant due à l'introduction du plan 14 C dans le système homogène constitué par le triplet (14 A, plaquette, analyse formelle). Divers indices, dont la date d'établissement (1973) et l'allègement de la 149 toponymie tendant à démontrer que le plan 14 C est uniquement destiné à montrer l'insertion des équipe­ ments dans le reste de l'opération. Une remarque pour terminer : si la partition écrite produit toujours des classes discrètes et bien sépa­ rées, la partition graphique correspondante est ra­ rement exprimée graphiquement, surtout en milieu ur­ bain ; il est souvent très difficile de séparer deux communes continguës en s'appuyant uniquement sur des critères formels de la partition fine qui lui sert de support. La délimitation des lignes de séparation se fait par appel aux textes administratifs. Un autre découpage du même espace signifié est offert par le "Planning de livraison" du plan T 14 B : l'es­ pace global de GRIGNY est divisé en "Zones" qui sont livrées à dates fixes. A l'intérieur de chaque zone, il y a des indications qui dénombrent le contenu de la livraison : tant de deux pièces, tant de trois piè­ ces, tant de magasins... Un calcul rapide, exploi­ tant les renseignements du Plan G 12 sur la composition de chaque bâtiment, per­ met de vérifier que les chiffres alignés correspon­ dent exactement aux bâtiments situés à l'intérieur de la zone considérée. Ce calcul prend en compte les aPpartements, les magasins, les loges de concierges, et les passages à travers les bâtiments. Or, une zone ne contient pas que des bâtiments : il Y a des éléments décrivant des voies carrossables, des chemins piétonniers, des plantations, des jeux, des places aménagées... Il y a aussi des équipements socio-culturels prévus. Tous ces éléments ne sont pas 150 énumérés par les listes de livraison par zone. On peut en déduire que ce qui n'est pas affirmé est im­ plicitement nié, et que le planning de livraison ne concerne que des immeubles d'habitation à l'exclusion de tout autre équipement. Une telle interprétation est confirmée par ce que nous savons de la pratique de la construction : on commence par construire le logement, qu'on livre, et le reste est fait avec un peu de retard. D'ailleurs, ce ne sont pas les mêmes équipes qui construisent des bâtiments, qui asphaltent des rues, ou qui plantent des arbres et des gazons. Si cette hypothèse est vraie, les zones ne concernent que les bâtiments qu'elles contiennent. Dans ce cas, elles ont une dé­ finition de type ensembliste, et la position spatia­ le des limites est indicative partout où il n'y a pas de bâtiments d'habitation. Si elles sont mani­ festées par un trait au niveau de l'expression, il ne leur correspond aucune manifestation faisant appel à la matière au niveau du contenu. Par conséquent, elles font appel à une manifestation liée à un "faire", qui est celui de la construction. Mais qui est le sujet de ce faire ? Qui construit ? Notre connaissance du monde naturel, et en particulier du monde de la construction immobilière, nous fait dire qu'à chaque zone correspond une "équipe" de chantier (sans préciser l'importance numérique de cette équipe). Inversement, on peut dire aussi qu'à chaque équipe est attribuée une zone dont elle a la charge, qu'elle doit construire et livrer à la date contractuelle. En d'autres termes, la zone est une région où s'exerce une certaine compétence territo­ riale liée à un actant collectif "équipe de chantier"Conséquemment, les limites d'une zone apparaissent comme les limites d'un "faire", ou plus précisément, comme celles d'une compétence territoriale compara­ 151 ble à celle d'une administration civile (département) ou militaire (territoire national). Ces limites de compétence ne sont pas matérielles. Notons que ce sont les seules limites virtuelles de l'espace si­ gnifié qui soient marquées sur le plan, et ce sont celles du faire "construire". Toutes les autre limi­ tes de l'espace signifiant, dont les limites signi­ fiées sont relatives au "faire" des habitants, sont des limites matérielles. La sémiotique de l'espace (cf. notre recherche DGRST) pose l'existence de li­ mites virtuelles pour le découpage de l'expression spatiale. La non-existence de telles limites sur les plans montre deux faits : - l'importance accordée au faire "construire" par les auteurs des plans ; - la théorie fonctionnaliste sous-jacente, puisque seuls les objets sont représentés, et les usagers oubliés, même s'ils sont présupposés. Ce sont les objets qui jouent un rôle, une fonction. Le trait qui manifeste la limite entre zones possède 3 mm d'épaisseur. C'est la plus forte épaisseur de trait dénotant une segmentation de l'espace (il y a des traits de 5 mm manifestant l'inscription T 14, et des traits de 6 mm manifestant les "Grands Chif­ fres" numérotant les zones). Ce trait, ayant le sta­ tut de région superposable, qualifie la ligne qu'il manifeste. Par son épaisseur exceptionnelle, il la place en haut de l'échelle hiérarchique des traits. Il affirme simultanément deux choses : l'importance de la distinction et de la séparation des zones ; la nécessité de lire cette séparation en premier. Les destinataires du plan de livraison et installa­ tion de chantier étant le maître d'ouvrage et les 152 équipes techniques constructrices, il fallait que ces lecteurs saisissent rapidement l'importance de la segmentation en zones. Cette importance est éva­ luée en fonction du "faire" des destinataires, et cela est exprimé aussi par l'organisation des zones les unes en fonction des autres, et en fonction de l'es­ pace global de GRIGNY : Les traits qui séparent les zones sont jointifs (à une exception près) et forment un arbre (au sens de la théorie des graphes). Ce fait est surprenant. En effet, une zone est une région, et comme elle est finie, elle doit avoir un bord. Or, un arbre a jus­ tement la propriété de ne jamais segmenter le plan en régions. S'il y a des régions effectivement dé­ limitées, cela ne peut se faire qu'à l'aide de bords qui n'appartiennent pas à l'arbre. Il suffit de se reporter au plan T 14 B pour s'apercevoir que ces bords manquants sont manifestés par deux éléments graphiques : - la "Rue de la Grande Borne" qui fait le tour d'une grande partie de l'opération et se referme par une route ; - la limite extérieure du corpus (telle qu'elle est définie dans S.P.A. § 5.3) autour du quartier de la Ville Basse ou Médina. On peut donner de cette situation une représenta­ tion schématique (ci-contre) où - le trait fort restitue l'organisation de l'arbre tracé en trait fort sur le plan ; - le trait fin représente la limite extérieure du corpus, 1 S3 - le trait interrompu représente la route qui en­ toure la plus grande partie de GRIGNY (remarquons au passage qu'il s'agit du bord exté­ rieur du Tore N° 1, cf. S.P.A. § 12). Remarquons tout de suite que ce découpage permet d'accéder directement de la route à chacune des dix-huit zones sans en traverser une autre. Ce fait assure une indépendance des zones de chantier visà-vis de questions d'approvisionnement en matériaux, et d'accès à la fin des travaux. C'est ce qui jus­ tifie en particulier le couloir desservant la zone 3 et passant entre les zones 6 et 9. Ces raisons relèvent du faire "construire”. Les différents exemples que nous venons de voir nous ont permis de poser la question de la manifestation des limites dans l'espace signifiant et dans l'es­ pace signifié. La question peut se résumer en quatre termes qui s'articulent selon un schéma carré : limites marquées dans l'expression (manifestation graphique) limites marquées dans le contenu (manifestation matérielle) t IX , i V ' > limites non marquées dans le contenu ♦---- -X f limites non marquées dans l'expression Les différents éléments des plans se distribuent sur les lignes et colonnes de ce carré : Les éléments non-superposables correspondent à la ligne supérieure. Les éléments superposables (sauf ceux qui corres­ pondent aux constructions provisoires, cf § 3.6) correspondent à la colonne de gauche ; nous y re­ trouvons les limites de "faire", en particulier les 154 limites entre zones de livraison. La colonne de gauche correspond aux limites virtuel­ les de rues et de quartiers, qui sont non marquées graphiquement mais se lisent grâce aux écritures ou à des documents annexes. La ligne inférieure correspond à ce qui est en de­ hors du système des plans, nié et non-existant. 3.5 CATEGORIE DU FAIRE Nous avons dit (§ 3.3) que le "faire" présuppose l'espace, puiqu'il ne peut y avoir un "faire" sans un espace qui le contienne. Mais il y a une présuppo­ sition inverse aussi : on ne peut avoir une percep­ tion de l'espace sans y accomplir, y voir, ou y ima­ giner un "faire". Accomplir ou voir un "faire" im­ pliquent que ce dernier existe, et la présupposition est satisfaite. Imaginer un "faire" implique que ce dernier n'existe pas mais qu'il est latent. Il s'agit du "faire" de l'usager, tel que nous l’avons défini pour une sémiotique de l'architecture. Nous verrons qu'il y a d'autres classes de "faire". Donnons ici un exemple. Les cartes IGN représentent la "planimétrie", qui est une segmentation de l'espa­ ce en corps ; puis les ré­ gions de la partition sont qualifiées graphiquement par un traitement des limi­ tes (traits) et des surfa­ ces. En particulier, les régions représentant les habitations sont hachurées par des traits parallèles, et celles indiquant des "bâtiments d'intérêt public" reçoivent des hachures croisées qui les rendent plus visibles ; de plus, ces dernières sont toujours identifiées par une écri­ ture qui précise la fonction du bâtiment en question. Un relevé de ces écritures montre qu'il s'agit d'é­ coles, de mairies, de châteaux, de garages... Ces édifices ne sont pas seulement d'intérêt public, ils sont aussi d'un certain usage public, ce qui impli- 156 que qu'ils sont accessibles, qu'on y peut rentrer. Entre la voie publique et l'appartement, il y a diver­ ses catégories de lieux (d'espaces) qu'on peut quali­ fier de plus ou moins publics, de plus ou moins pénétrables. Privé ___________________ _______________ public chambre à., salon., palier., magasins., rues coucher Un pavillon d'habitation est orienté, l'axe public/ privé coïncidant avec l'axe rue/jardin, et nous avons vu que AILLAUD a repris cet axe pour les logements de GRIGNY. La problématique du public et du privé est pertinente dans l'analyse du contenu. Nous allons la reprendre sur l'axe du plus ou moins accessible, plus ou moins pénétrable. Dans cette optique, le trait fort, manifestant la frontière qui sépare les bâtiments du reste de GRIGNY signifie impénétrabilité. Pour les plans 14 A, T 14 B, 14 C, et G 12, les bâ­ timents sont impénétrables. Ils sont opaques, durs, comme le caillou qu'on tiendrait à la main. Cette interprétation est confirmée par la manière dont est traité le passage à travers les bâtiments : nous savons par des plans de détail qu'on peut traverser tous les bâtiments car ils ont deux entrées, l'une côté rue, et l'autre côté jardin. Ces deux entrées communiquant par un couloir qui dessert l'escalier. Cependant, cette possibi­ lité de passage est niée par les plans cités cidessus, qui n'en font pas état, et représentent par contre des "passages publics" par une configuration spéciale (que nous avons appelée relation de pénétration, S.P.A. , §9.8). Ces passages publics se présentent comme des tunnels 157 qui traversent le bâtiment sans donnner sur une cage d'escalier ni se confondre avec une entrée d'immeuble. Ces derniers éléments apparaissent donc comme privés, et le public s'arrête aux murs, qu'ils soient percés ou non. Le fait d'entrer dans un espace est donc signifiant. Signifiant comme un faire en soi (il s'agit du dépla­ cement), mais aussi signifiant par rapport au faire particulier qui est présupposé par tout espace, et qui sert à définir cet espace. Nous avons vu que les éléments du plan recevaient tout des qualités fonc­ tionnelles au niveau du contenu, et ces qualités re­ lèvent du faire : un lieu se définit par ce qui s'y passe. Dans ce cas, passer d'un lieu à un autre, c'est passer d'un faire à un autre. S'il s'agit d'un même faire dans les différents espaces, la distinction du passage n'est pas pertinente, et c'est cette si­ tuation qui est offerte par les traits fins des plans 14 A, 14 C, T 14 B, G 12 : à l'extérieur des bâtiments, le déplacement est autorisé. On peut passer librement d'une région publique à une autre région publique, ce pourquoi la frontière n'est pas modulée (sur-marquée). Si pourtant cette frontière est marquée, c'est parce qu'il correspond à ces ré­ gions des subdivisions du faire : circuler, se pro­ mener, jouer,... A ce propos, la voierie nous renvoie au faire spatial par excellence : le déplacement. L'épistémologie des mathématiques montre que la notion d'espace est fon­ dée sur celle du déplacement. Certaines expériences de laboratoire montrent que la perception de 1 'es­ pace n'est possible que si l'organisme expérimente 158 lui-même les déplacements. La géométrie métrique elle-même est celle du groupe des déplacements. Ainsi, tout espace, qu'il relève de l'expression ou qu'il relève du contenu, présuppose le déplacement (des hommes dans l'espace signifié, d'un point mobi­ le dans l'espace du signifiant). Par conséquent, tout espace présuppose un faire, ne serait-ce que le fai­ re du déplacement. Nous pouvons relever aussi d'au­ tres faire impliqués par l'expression, et qui per­ mettent de définir d'autres domaines du sens que celui de l'usager de l'architecture : il y a un fai­ re "tracer" du dessinateur, un faire "lire" du lec­ teur des plans, un faire "construire" des entrepri­ ses qui fabriquent un référent aussi proche que pos­ sible de l'espace signifié... Cette liste n'est pas limitative. Elle s'étend en effet à tous les acteurs sociaux qui utilisent les plans dans la chaîne de production et de consomma­ tion de l'architecture. On peut y compter les urba­ nistes, les architectes, les dessinateurs, les bu­ reaux d'études techniques, les autorités administra­ tives, les entreprises de construction, les promo­ teurs, les responsables commerciaux, les usagers, ... Une liste plus complète, et plus structurée, ferait appel à une étude sociologique analysant les rapports de production, la division du travail, et les procé­ dures de décision. Situés dans une chaîne de production, les plans appa­ raîtraient comme un instrument de travail dont on pourrait retracer l'histoire, l'évolution, et les stades d'élaboration. Une telle étude échappe au cadre que nous nous sommes fixés pour cette étude, qui a pour premier but de montrer le statut lin­ guistique des plans et d'en détailler les mécanismes internes. Leur insertion dans les rapports sociaux 159 relève d !une analyse des mécanismes externes. Si nous nous restreignons à ce point de vue, c'est dans un but heuristique : il serait illusoire de vouloir tout saisir en même temps. L'analyse des structures inter­ nes est suffisamment complexe pour y consacrer la to­ talité de cette recherche. Dans une phase future, nous nous intéresserons à l'usage qui est fait de l'instrument que nous sommes en train d'étudier. En termes sémiotiques, nous nous inscrivons dans une étude de la signification et non dans une étude de la communication. Dans la mesure du possible, nous ne parlons que de ce qui est inscrit dans les plans, de façon explicite ou implicite (présupposée). Nous concentrons notre effort sur les mécanismes de la signification, ne nous occupant qu'accessoirement du message particulier des plans du corpus. Ainsi, nous ne retien­ drons du faire "dessiner" que les traces laissées sur le plan et qui ne ren­ voient à rien d'autre que le dessin. Il y a peu de traces répondant à cette exigence. Nous en pren­ drons comme représentant les petites croix allon­ gées placées au centre de rotation des segments courbes de la voierie. Ces croix servent au travail du dessinateur, comme sup­ port à son "faire". Elles permettent de positionner le compas qui trace les segments courbes. Ce sont 160 les traces d ’un traçage, et elles présupposent le faire "dessiner". Elles sont nettement visibles sur les plans au 1/500°, moins visibles sur les plans au 1/1000°. Ces deux séries de plans sont obtenues l'une de l'autre par réduction photographique, ce fait pouvant être déduit de l'identité exacte des tracés et de leurs défauts minimes. La mise en relation des traces du faire "dessiner" (ou "inscrire", ou "tracer"), avec l'ensemble du message dessiné, est une opération métalinguistique (1), En effet, les traces du faire présupposent le résultat du faire. De plus, elles peuvent servir à l'articuler en structure géométrique par la précision qu'elles apportent relativement aux alignements de points, aux figures formées par les centres de ro­ tation, et autres configurations relevant d'une syntaxe formelle de 1'expression, algébrique et topo­ logique , puisqu'elle se place au niveau des struc­ tures géométriques. Enfin, si les traces présupposent le dessiné, ce dernier ne peut être inscrit sans que le faire "dessiner" ne laisse de traces. Les traces sont donc présupposées, à leur tour, et la présupposition est mutuelle. Cependant, il est d'usage d'effacer les traces et le résultat seul est présenté à la lecture, c'est pourquoi il est rare de trouver une analyse du système sémiotique des traces. Pour terminer, rappelons que c'est à partir de la ca­ tégorie du faire qu'on peut démontrer la non-confor­ mité des niveaux de l'expression et du contenu, ce (1) qui est logiquement postérieure à l'étude du lan­ gage tel que nous le présentons à partir du faire de 1 'usager. 161 qui permet d'attribuer le statut de langage au sys­ tème des plans. La catégorie du faire est donc fonda­ mentale, et son étude doit être développé. Ceci se fera en liaison avec la sémiotique de l'architecture. r 3.6 CATEGORIE DES RELATIONS Nous avons vu (§ 3.3) que le plan exprime des rela­ tions entre les espaces et les faire. L'existence de relations entre les termes est une chose ordi­ naire dans une étude structurale et ne devrait pas constituer une catégorie. Ce qui justifie le statut que nous leur attribuons ici, c'est le fait qu'elles soient explicitées graphiquement : en dehors des re­ lations spatiales directement relevables à l'obser­ vation de l'expression, et des relations logiques et temporelles entre les unités du faire, le plan note (exprime, marque) des relations qui relèvent de champs spécifiques du contenu. L'articulation de la manifestation graphique superposable présuppose ces champs et les articule à leur tour : il y a con­ formité entre les niveaux de l'expression et du con­ tenu. La définition que nous donnons ci-dessus de la caté­ gorie des relations, l'identifie à ce que Jacques BERTIN appelle LA GRAPHIQUE. A l'aide d'éléments graphiques (qui se révèlent être tous superposables) la graphique note des relations entre des unités de contenu quelconques, identifiées par une inscription en langue naturelle. Comme le montre les analyses de BERTIN, la conformité des deux niveaux est né­ cessaire à une bonne compréhension du dessin. Si le système des plans ne comprenait que cette catégorie' des relations, il ne serait donc pas un langage au sens de HJELMSLEV. Nous avons vu que la catégorie du faire rompait la conformité, mais ce qu'on peut re­ marquer ici, c'est que la catégorie des relations, malgré la conformité de niveaux qu'elle implique, in troduit une non-conformité spatiale. Ainsi, un systè 164 me où il n'y aurait que les catégories de l'espace et des relations serait reconnu comme langage car il con­ naîtrait des conformités partielles qui introduisent des non-conformités l ’une par rapport à l ’autre.Ce décalage coïncide avec des coupures que nous avons connues au niveau de l'expression : l'articulation de la catégorie de l'espace est conforme à l'expression de celle-ci quand les éléments sont non-superposables, alors que la catégorie des relations est conforme à l ’articulation d'éléments superposables. De plus, les éléments superposables qui expriment des relations appartiennent tous au code (a) de la manifestation graphique (niveau de surface), alors que 1 'expresssion de la catégorie de l'espace conforme se fait au ni­ veau profond. Le lecteur pourra se reporter aux exemples des para­ graphes 3.2, 3.3, 3.4 et 3.5 où les unités du faire sont mises en relation par le graphisme : limites de compétence pour les zones de chantier, degré de pénétrabilité des espaces en contact (routes, espaces verts, bâtiments). Nous donnerons ci-dessous deux exemples qui manifestent des relations d'ordre : une relation d'inclusion spatiale, et une relation d'or­ dre temporel. Reprenons l'exemple du découpage spatial de GRIGNY en quartiers, sous-quartiers, ... Nous avons vu (§ 3.4) qu'il est signifié par des écritures dont la mise en relation, au niveau du contenu, produit cinq parti­ tions enchâssées qu’on peut représenter par un arbre (cf. p. 137). Ce découpage, que nous avons obtenu en considérant uniquement le contenu, est signifié par les caractères graphiques des écritures. 165 Les lignes d'écriture apparaissent comme des lignes interrompues mixtes dont les éléments se répartissent dans 52 classes différentes correspondant aux 26 lettres de 1 'alphabet sous les deux formes majuscu­ les et minuscules. Ces classes peuvent se définir par des tracés linéaires référentiels recevant des mani­ festations graphiques diverses qui n'altèrent pas leur schéma fondamental, ce qui permet de reconnaître les multiples formes manuscrites ou mécaniques qu’elles peuvent revêtir sur les plans. Une analyse complète des caractères de l ’alphabet ferait appel à plus de vingt descripteurs regroupés en couples d'oppositions : majuscules/minuscules ; manuelle/mécanique ; trait J\ Q A JV I f ^ d'épaisseur uniforme/trait présentant pleins et déliés; X YZ xyz trait gras/trait maigre ; grande hauteur/petite llïl V •■lr™ hauteur ; droites/italiques; étroites/dilatêes. .. aux- quels il faut ajouter les étiquettes attribuées à chaque "style" : bâton, univers, caravelle, olive, grotesque... La majeure partie de ces descripteurs peut donner lieu à des relations d'ordre qui permettraient,à chacune, de ranger les écritures selon un ordre strict. Cependant, la combinaison de ces relations ne permet pas de construire un ordre total puisque ce serait dans un espace à plusieurs dimensions. La seule possi­ bilité de construire un ordre dans un tel espace se­ rait de privilégier certaines relations par rapport à d'autres, ce qui revient à dire qu'il faudrait ren­ dre pertinents quelques-uns des descripteurs seule­ ment. Il s ’avère que c'est la solution adoptée à la 166 fois par les plans en architecture et par les cartes I. G. N. Pour les plans, sont distinctives les oppositions : exécution manuelle/mécani- M ONTS MONTS ROUEN COLM AR que, trait maigre/gras M ONTAGNE LA RÉOLE trait d'épaisseur cons- Montagne M urat tante/trait d'épaisseur Montagne Noyarey Montagne St- Jean variable. Un seul descripteur joue un rôle hiérarchique à l'intérieur des classes distinguées par les autres descripteurs : il s'agit de la hauteur des lettres, à laquelle se subordonne l'opposition majuscule/ minuscule. La première partition signifie 1 'opposition GRIGNY/vs/hors GRIGNY à l'aide de l'opposition : écriture mécanique/vs/écriture manuelle La deuxième partition signifie 1 'opposition GRIGNY de 1 ’architecte/vs/Equipements socio-culturels par écritures 9,5 mm de haut/vs/écritures 4,5 mm de haut, ou par écritures 9,5 mm de haut/vs/abréviations 13 mm. La troisième partition ne fait que séparer les deux oppositions de l'expression utilisées dans la deuxiè­ me. La quatrième partition signifie l'opposition sous-quartiers/vs/écoles, sports, par l ’opposition 4,5 mm/vs/3 mm et l'opposition espaces intérieurs/vs/espaces exté­ rieurs (annexes), 167 par l'opposition majuscules/vs/minuscules 3 mm. La cinquième partition signifie 1 'opposition rues/vs/bâtiments par l ’opposition 2,5 mm/vs/1,5 mm. Ainsi, à chaque niveau de découpage, la partition est doublement signifiée : par le contenu des écri­ tures, par le graphisme des écritures. Cette redondance sert d'aide-mémoire : les partitions du contenu sont implicites sur le plan et ne peuvent s'expliciter qu'en fonction d ’un texte commentateur, qui sert de clef pour le déchiffrement. Par consé­ quent, l'inscription graphique des relations rempla­ ce le texte commentateur et exprime, par les ca­ ractères graphiques des écritures, la hiérarchie de l'enchâssement des partitions. On peut d'ailleurs le vérifier en dressant un arbre montrant 1 'organi­ sation des écritures : 0 ■9,5 m a j . et 1,5 2,5 2 mm manuelle 19 3mm mm 4,5/13 mm m a j . ab. mm mécanique min. 0 mm 3 mm 3 mm 168 Contrairement à la transcription habituelle de la langue naturelle, où l'écriture cherche à être trans­ parente, à être là pour cette autre chose qu’ est le contenu de la chaîne sonore représentée, la trans­ cription sur les documents graphiques se charge d'une qualité graphique support de sens : elle signifie un système hiérarchique. Les oppositions utilisées appel­ lent quelques remarques : 1 - Seule l'opposition écriture mécanique/vs/écriture manuelle a un rôle distinctif. Les autres oppositions jouent un rôle hiérarchique. 2 - La hiérarchie des hauteurs n'est absolue qu'en remontant 1 arbre de bas en haut (ou d'une branche vers le tronc). Dans le sens contraire, il y a des choix et non pas un ordre strict construit sur la différence de hauteur. 3 - L'apparition des minuscules ne se fait que dans le bas de 1 'échelle des hauteurs : 1' opposition majuscule/minuscules est subordonnée à la hiérarchie des hauteurs. 4 - Ce ne sont pas les hauteurs absolues des lettres qui sont signifiantes, mais c'est le rapport des hau­ teurs, ainsi qu'on peut le constater en changeant de plan : le même découpage est signifié par des lettres de hauteurs différentes mais conservant les mêmes rapports et définissant le même arbre hiérarchique. Les relations du signifié sont exprimées par des relations du signifiant. Prenons le deuxième exemple : il articule des diffé­ rences de l'expression pour signifier des différences 169 dans le temps. Si le temps est impliqué par le faire, et donc par tous les éléments du plan, il est dénoté de façon plus immédiate par deux classes d'éléments de l'expression : les éléments sur-marqués et les éléments sous-marqués. Précisons tout de suite que sur-marqué et sous-marqué présupposent la catégorie du normalement marqué. Cette catégorie est celle de la majorité des éléments,qu'on peut retrouver dans le fond de plan. Eléments linéaires : j Sont sur-marqués les traits séparant les zones de li­ vraison du chantier. Ces traits n'ont de sens que par rapport à la durée du faire "construire". jjjzn Sont sous-marqués les traits la réalisation est différée, et les traits fins délimi­ tant les zones d'implanta---- - • •tion d'équipements collec­ tifs dont la conception est différée. Eléments régionaux : Sont surmarquées, les régions ■j des installations provisoi'{ res, qui reçoivent deux va- I .1 leurs de gris qui les distinguent entre elles en mê­ me temps qu'elles les dé- 170 marquent des autres régions. Sont sousmarquées, les ré­ gions destinées aux équi­ pements collectifs et dont l'absence de segmentation se lit comme une absence de marque. On peut dresser l'axe de la sur-marque à la sousmarque et noter les éléments de contenu correspon­ dants : sur-marqué marque sous-marqué lié au chantier le projet lui-même les projets du éléments définitif projet à concevoir ou provisoires à réaliser Ce schéma met en évidence un fait remarquable : le sur-marqué est lié à l'activité des entreprises ; le sous-marqué est lié à ce que le déchiffrement avait identifié comme non inclus dans le "Grigny de l'Architecte" bien qu'il soit inclus dans le "Grigny du Promoteur" ; Seul le normalement marqué correspond au "Grigny de l'architecte". Comme le temps s'exprime par le sur-marqué et le sous-marqué, le normalement mar­ qué n'exprime pas le temps. Il est en dehors du temps. "L'oeuvre" de l'architecte apparaît alors exprimée comme atemporelle, définitive. 171 Le temps est principalement articulé par des éléments superposables de l'expression, qu'il s'agisse de traits ou d'écritures. Nous pourrions multiplier les analyses et montrer les diverses modalités revêtues par l'expression des relations. Cela risquerait de nous entraîner trop loin. 3.7 MISE EN RELATION DES CATEGORIES DE L ’EXPRESSION AVEC DES CATEGORIES DU CONTENU. Les exemples que nous avons donnés mettent nécessai­ rement en relation les catégories de l'expression avec celles du contenu. Ce que nous tenterons ici, c'est une clarification de ces relations pour amor­ cer une approche syntaxique. 3.71 Identification et sémiose par les écritures Nous avons utilisé à plusieurs reprises les écritu­ res pour découper l'espace signifié et pour inter­ préter l ’espace signifiant. Entre l'écriture et l'ex­ pression de signe à laquelle elle se rapporte, il y a une relation de désignation et de transposition. Une écriture placée dans le voisinage immédiat d'une expression de signe se rap­ porte à cette dernière. Les modalités spatiales de ce rapport relèvent de l'étuQe de l'expression, ce pourquoi nous n'en parlerons pas ici. Précisons toutefois que nous en avons fait une étude complète, et nous nous intéresserons à la relation de sémiose qui, à travers l'écriture, per­ met d'attribuer un contenu à une unité de l'expres­ sion. Si X est l'unité de l ’expression et Y l'unité de contenu indiquée par une écriture, la désignation Peut se transcrire par : "X représente Y", Quand Y est un nom de lieu (ex : GRIGNY), cette dé­ signation opère une identification qui s ’analyse en deux niveaux : 174 - Il y a individuation spatiale, renvoyant à l'éspace signifié et y isolant une entité dénommée, éti­ quetée, dont on pourra parler et mettre en relation avec un référent (s’il existe). - La dénomination est une opération plus complexe que la simple identification qui isole un objet parmi d'autres : elle lui attribue un représentant aussi unique que lui, le nom, qui sera doté d'un rôle au­ tonome au niveau du discours, et qui pourra servir d'embrayeur avec d'autres textes. Quand Y est un nom commun (ex : crèche) , il y a une identification moins poussée : l'unité de l'expres­ sion est mise en relation avec une unité de contenu qui est une classe définissable par un ensemble de qualités. L'attribution à une classe existe aussi dans le cas de désignation par un nom propre, mais elle est moins explicite : le fait d'individuer l'objet est si fort qu'il oblitère un autre fait logiquement antérieur, celui de la spécification de la classe dans laquelle il y a individuation. D'autre part, l'énoncé "X représente Y" est une prédication équationnelle qui met en équivalence le signifiant graphique avec un signifié définissa­ ble dans la langue naturelle. Ce n'est pas tout. Un tel énoncé est métalinguistique par rapport au plan : attaché à l'écriture, il prend en charge le signi­ fiant et le signifié de la portion de plan désignée, vérifiant le schéma de la hiérarchie métalinguisti­ que formulé par R. BARTHES d'après HJELMSLEV : 175 Sé Sa Sé Sa investi de la façon suivante : énoncé implicite écriture expression contenu de de signe signe graphique Enfin, nous avons vu (§ 3.6) que la manifestation graphique des écritures est porteuse d'un contenu re­ lationnel. Ce contenu s ’articule sur le signe graphi­ que et apparaît alors comme connotatif puisqu'il vé­ rifie le schéma de la connotation formulé par BARTHES d'après HJELMSLEV : Sé Sa Sé Sa investi ici de la façon suivante : /Grigny/ Ceci est Grigny Grigny Ceci est la commune de Grigny (1) L'usage des termes /signifiant/ et /signifié/, notés /Sa/ et /Sé/, est plus commode que la terminolo­ gie hjelmslévienne/expression de signe/et/contenu de signe/. Cependant, nous visons à chaque fois les con­ cepts hjelmsiéviens. 176 - le signifiant de 1 ’êcriture/Grigny/ renvoie à - un signifié transcrit par "Ceci est Grigny" - Le couple signifiant/signifié de l'écriture est qua­ lifié par la manifestation graphique de cette derniè­ re (GRIGNY) : sur une carte IGN au 1/5000 °, une hauteur de 6 mm pour des lettres minuscules indique que le lieu-dit désigné est une commune. Nous lirons alors : "Ceci est la commune de Grigny". Cependant, la relation entre les écritures et les éléments graphiques ne se limite pas à ce seul schéma qui va de 1 'écriture vers le dessin : il y a une re­ lation en sens inverse, qui va du dessin vers l'écri­ ture, par la chaîne prédicative telle que nous l'a­ vons montrée au paragraphe 3.2. 3.72 Chaîne prédicative circulaire. Au paragraphe 3.2, l'élément qui affirme l'existence d'une expression de signe et initialise la chaîne prédicative est une figure topologique. La chaîne se transcrit donc par "la région (ou la ligne, ou le point) X de l'espace signifié qui a les qualités géo­ métriques Q1, Q2, ... est une église (ou un mur, un lampadaire...)" Mais la désignation par une écriture produit une autre lecture, qui se transcrit par : "L’église (ou, plus généralement, le lieu Y) a les qualités géométriques de la région X". Dans la première lecture, la désignation par l ’écri­ ture apparaît comme une qualité qui vient s ’ajouter à la chaîne des qualités géométriques. 177 Dans la deuxième lecture, les qualités géométriques viennent s ’ajouter à un terme initial qui est l'ob­ jet identifié par l'écriture. On pourrait être tenté de choisir entre ces deux lectures, et chercher des raisons pour un tel choix. Une telle attitude présuppose qu'une chaîne prédica­ tive est linéaire, et qu'elle possède un terme ini­ tial et un terme final. Or, la réunion des deux lec­ tures ci-dessus produit une chaîne prédicative circu­ laire sans terme initial, et où toute qualité se trouve insérée entre deux autres. Nous ne voyons pas pourquoi un tel modèle devrait être rejeté au profit d'un modèle linéaire, surtout que nous avons des raisons de le garder : il correspond bien à la lecture qui est faite dans les plans. Nous le con­ serverons donc. De plus, nous émettrons l'hypothèse qu'il caractérise le fonctionnement des documents graphiques. 3.73 Modalisation de l'énoncé. Considérons la chaîne prédicative comme un énoncé dont la transcription est : "L'objet signifié Y possède les qualités Q 1 , Q2, ..." Il est implicitement modalisé par l'énonciateur du plan entier : Un plan établi comme un relevé de lieux existants suppose la modalité du savoir : "sachez que les lieux sont ainsi". Un plan qui est un projet, et qui est fourni aux entreprises pour exécution suppose la mo­ dalité du vouloir : "je veux que les lieux soient ainsi". Il est possible de remplacer le "je veux" par Un "nous voulons" où "nous" vaut pour l'architecte, 178 le promoteur, les autorités qui délivrent le permis de construire, ... c'est-à-dire l'actant collectif qui décide. Un plan qui est un projet, et qui est présenté au maître de l'ouvrage (ou aux autorités pour demande d'autorisation) suppose les modalités du vouloir et du pouvoir : "nous voudrions que les lieux soient ainsi". Les modalités du savoir, du pouvoir, et du vouloir interviennent pour tout énoncé et s'articulent dif­ féremment selon les portions du plan : ces dernières n'ont pas toujours le même degré de définition, et appellent ainsi d'autres plans ou d'autres projets (ex : sur les plans de Grigny, il y a des régions qui marquent l'emprise d ’un projet futur d'école, de crèche, etc.) Néanmoins , la description des élé­ ments de contenu relevant de la catégorie de l'es­ pace n'est pas affectée par ces modalités . 3.74 A propos d'isomorphismes dans le langage des plans. La chaîne prédicative pose, nous venons de le voir, une série de qualités qu'elle organise. L'élément se définit donc par un ensemble ordonné de qualités, conformément aux exigences de l'axiologie algébri­ que (§ 2.2). C'est cette définition qui va nous per­ mettre de comparer le contenu de signe ainsi trans­ crit à l'expression de signe qui le signifie. Or, la lecture part de l'expression de signe qu'elle décrit. La comparaison des deux ensembles de qualités peut donc s'exprimer en termes de conjonction (qualités de l'expression "transmises" au contenu) et de disjonc­ tion (qualités de l'expression non transmises au con- 179 Dans la deux classes - ceux lecture qui du d ' e x p r e s s i o n s signifient "jardinière"... les et et propriétés ceux qui qui ne triques p a r a g r a p h e de qui "arbre", de rappelle avons faite fin fondes ou et la qui du ci-dessus, "voie"... qui de bles. sont des générale figures des les règle penser à la les mêmes (1) au : signifiant les dites figures opposant en permet à deux du que de nous "place", celles s u p e r p o s a ­ expressions tirer la de règle spatiales il d i ­ les que sont toutes et d ' a p ­ p r o ­ que alors des nous superposables ce des "transmises" n'en catégo r ies faite est p o s s é d a n t que de pas figures c a r t ographie et grandeur spatiales contenu en grandeur" vraie d ' u n 's i g n i f i a n t qualités (lois "bâtiment", p ropriétés sont que de superposables. vraie La 2.5 " l a mpadaire" figures, d i s t i n c t i o n niveau ... g é o m é ­ structures r e m arquer l'inve n t a i r e symbolique". cription ; celle éléments pouvons classes " r e p r é s e n t a t i o n tion les revenant n o n - s u p e r p o s a b l e s pour Cette de suivante c o ntenu même fortement des En "arbre", deux totalement propriétés n o n - s u p e r p o s a b l e s , L ' e x a m e n signes nous signes signifient (1) profonde p a r a g r a p h e superf i c i e l l e s expressions "voie", "lampadaire", leurs compa r a i t n o n - s u p e r p o s a b l e s . sions au à "place", : implantation. o p p o s i t i o n et relever signes structure Cette partenance) peut transm e t t e nt leur t r a nsmettent leur de on "bâtiment", s ignifient que 3.2, le entre " r e p r é s e n t a ­ n'est - fait à que l ' i n s ­ l'échelle signifié - auquel 180 il se rapporte, conserve des plantation Cette vons de des analyse la représentation qualités qu'elle mise permet et en spatiales attribue parallèle valider notre résultats déductive de au est du signifié très sur que intéressante. puisque cartographie fondée ne l'im­ signifiant. approche la symbolique des nous en Elle retrou­ partant considérations d'une théo­ riques . L'opposition plus s u p e r p o s a b 1 e / n o n - s u p e r p o s a b 1e générale que bol iquey'parce propres des ne y à qu'elle l ' expression articulations permettent le et problème qu'elle sémantiques du pas les approches "transmission" des qualités manière de parler "transmission" termes la en règle les des permet plan relations d'atteindre d'architecte traditionnelles. espaces signes tial avec leur sont propre L'isomorphisme, que les que Nous faite, par il ici sont en 2.5 à en : expressions isomorphisme Les expressions isomorphisme les conséquent, des expression. des espaces de spatial spa­ signes partiel expression. qu'il soit et celle total facile est de partiel, ne con­ La manifestation du ne sont voir contenu Une fois que directement détaillée. ou profondes. l'isomorphisme. est paragraphe matique ainsi propre à entre se réécrit qu'une la Par correspondant structures l'expression cernées leur : relations. ci-dessus correspondant n'est spatial correspondance n o n - s u p e r p o s a b 1 es total cerne la leurs signifiés superposables avec assure énoncée spatiales d'isomorphisme conservant signifiés de pose apparaît g r a n d e u r /Sym­ reviendrons . La de 1 'o p p o s i t i o n / v r a i e cette notre liée pas précision analyse avec la con­ du pr o b l é ­ 181 3.75 Du contenu posable Si les et férentes dénotent ce te, implicite, ce propos lèvent du toutes par que le superposable marquer que déduites à question. la un relais à pressions Nous voyons fiant ment : la avons ductible Si une nous voie gions de dont de les façon précise fa la syntaxe autres, voie, s'agira et de Nous : si que un Notons légende) se re­ demander apportée Il suffit répondre précisés par de re­ peuvent négativement fonctionne nouvel qu'elle par comme des d'un plan un ex­ sont est les qu'il les bâtiments bâtiments y a une sont série dans de d'habitations, ré­ une qu'il s'agif contenus segmenter critères accolés sont exemple de peut de un dé­ une d'autres en Nous comme classe série dimensions une identifié affirmer qu'on fonction é l é ­ comme donner comprises une un contenu. devant pouvons signi­ fonctionnel élément d'attente en un allons passer nous est fonctionne contenu Nous élément qu'elle correspond un champ et exp l i c i ­ fonctionnelles disons "Bâtiments" un aux ici dimensions Possibles, fonctionnelles, pas syntaxe d i f ­ superposables. syntaxe. donnée, n'est contenus circulation bâtiments. plus de parce sur la non- toutes légende pourrait pour la de surajoutée. (dont qu'on syntaxe laquelle la d'une et signifié), qualités qualités ci-dessus voyons fourchette la syntaxe. de au n o n - s u p e r p o s a b l e . signes à des écriture et apparaître parlé signifiant Cependant, signifiant expression au partir de du fonctionnelle de super­ spatiales non-1ransmis sion écritures certaines etre sémioses ou d'une les qualité du superposables deux deux superposable toute catégories l'intermédiaire ou si les éléments connaissent que à des spatiales soit par n o n - s u p e r p o s a b 1 e . (transmission qualités elles du catégories superposables les exprimé les chaque de uns côté réduites, etc... de de il : Ce dont il s'agit intégral par apporter la ne faisons sent contextes Cette a, des la non pas de catégories des du du déchiffrement contextes de que contenu. contenu, permet du d'un l'appoint l ' o btention reconn a î t re qui et cerner, le de peut Nous présuppo­ choix plus des en contenu correspondant à un l'absence d'indications suf­ déchiffré. se Or, fait en quelles l ' e x p l o i t a t i o n en n'est mais catégorie lecture fisantes. deux à syntaxiques près, élément y que ce syntaxe, syntaxe certaines plus vu, la ici, fait, par qu'on ces peut rapport possib i l i t é s écritures, sont à dernières faire un fond d ' e x p l i c i t a t i o n l'autre est des celle de : ? avons écritures. plan l'une du Nous Il donné, est celle traitement gra­ phique. Nous allons en exemple, pris PLACE DU MENISQUE. comme fond tition de dénotant nombre de on peut choisit un niveaux : y lire 5C/52 autre mode de il place densités selon est donc v é h i c u l é pas tout. 1 ' écriture pace Il y est au a de un même en le façons plus que Le de de Le du le même à d'occasions. Le en plan 14 nombre A de différentes ce graphique ci-dessus, et ces plan contenu différentes. général traitement b e a u c oup exemple gris d'étages. deux fait par­ inscrit sur exemple. de la bâtiments. r e p r é s e n t a t i o n trames nombre remplace signifiant tenons le des par Prenons éléments niveaux abréviation : la plan les des bâtiments 12 dans un no n - s u p e r p o s a b l e considérons G donner Si Ce propos de n'est : l'es­ nous nous 1 ' i n s c r i p t i o n Cl 183 dénote que permet de le b â t iment tition intérieure ne pas Un autre exemple de bains peut sin d'une on peut de la t ions peut être être : est le un de graphiques, et les y point vue, les deux procédés selon les deux s i g n i fications ce mot : le préciser, Tant que l'élément gner plusieurs grande une termin o l o g i e minuer Le b 1e le que la partie de Ch. BERTIN, opposées "on peut le même propos des deux le que sens. peut son est du peut son notre ce du en é d i ­ du s u p e r p o ­ n o n — s u p e r p o s a — du v é h ic u l é e s u p e r p o s a ­ par le n o n — s u p e r p o s a b 1 e , la chaîne gros, le de troisième au c o n j o i n t e m e n t fond, à p r é d i ­ l'ouvrage à propos des n o n — s u p e r p o s a ­ superposable). sont, L compréhension. p o s s i bilité de utiliser viennent c o m p t e - r e n d u (en d é s i ­ extension pour c a t égorie réalise cette avoir d ’évoluer. il i nguistique v a r i ables que message". 11 à plan la la d'éléments contenu du sont de m é dans de penser qui graphique, augmenter sens du aux (s o u s - e n s e m b 1 e distincts et entre v o y a i t ble) certain l 'empêcher logique statut METZ, dimensions un traditionnelle. mais deux surtout de la é q u i ­ est arrêtent contenu, bien, indica petite, c o n j o n c t i o n cative. de une les D spécifié, ou c o m p r é h e n s i o n le le superposable, et pas éléments p r é c isent Une aussi traitement des r e n f o r c e ble. sa l ' e x t e n s i o n fait sable et ou et n'est catégories est criture, f onctionnelles. d e s ­ limites donc équiv a l ence salle le ... et aux Arrêter une des a et p a r ­ par l'inté r ieur relative de qualités : bidet, Il 1, la 1. plan écritures cette type même type un un bains". entre du sur à de plan ailleurs lavabo, écrire "salle possible pris signifiée baignoire, salle sur c a r a c t é r i s t i q u e simplement valence considéré dessiner dimension Il écrit deux l'oeuvre codes dans : 184 Nous souscrivons nous avons tion étaient l'autre. d'une se entièrement montré avons relation aussi au (écritures, ces le se trouve quement, mer la puisque chaîne ter, à des ne titre signifiant les nous de contenus et exprimés superposables permet Expression} vu que pas d'exemple, par nous les par en dans récipro­ transfor­ éléments Un le su­ pouvons de ci­ signes inventaire expressions dresser qu'elle cyclique. expressions les ; et Nous "lampadaire". de à catégories peut les rôle. ques­ n o n - s u p e r p o s a b 1e qu'on tous en voyons linéaire ce et s'agissait graphique) le vue, rapport qu'il certaines par de de codes superposable, avons suite jouent "arbre" de traitement le deux l'un mais véhiculé prédicative tout perposables codes, par point aussi niveau contenu précisé Précisons que précisé entre d'unités cas, 2.5) ce m é t a 1inguistiques Nous vérifie (§ à de schéma signes suivant : Contenu matière dans qui un est plan différent signifié par de celui l'expression non-superposable dans .de un temps différent l'usager tracer superposable terme unique : n o m propre, nomenclature identification classe non : nom commun spatial qualification : expression trait, les de relations grains, la par valeur le 185 sur lequel on voit que perposables à gnifiés expressions alors un des que celles espace qui différent expressions différence de sur la à de signes propos que dans ce cette dernière de qui sur BERTIN appelle et être aussi re t rouve donc les du l'espace. bien les cette temps, Notons tous troisième par que d imension de pouvant si­ expriment signifié r e g roupe la les spatial est la d i m e n s i o n su­ n o n - superposables, c o n t e n u n o n - s u p e r p o s a b les, soit signes q ualifient signes un celui Jacques qu'il spatial de ont troisième tenus expres s i o ns non s'articule soit ce c o ntenu les ces c o n ­ dimension, spatiale que n o n - s p a t i a l e . Notre analyse et de la en les 3.76 cartographie, intégrant Chaîne Reprenons la des Les éléments de de isomorphisme figures total Par et le du total système superposables entre les système perposable l ' i s o m o r p h i s m e partiel. alliant donc le un n'y langage qui de elles et p a r ­ à leur avait que écart s u p e r p o s able de serait attaché, l ' e x p r ession statut en symbolique. est un des sont l ' i s om o r p h i s m e introduisent n i v e a u x possède à correspondent S'il un partiel formité loin générale. lesquelles serait figures Un de spatial avec ou plus BERTIN isomor p h i smes n o n - s u p e r p o s a b l e s , l'isom o r p h i s m e tenu. et de contenu. c o ntenu signe poussant théorie p ro b l é m a t i q u e catégories expressions les une p r é d i c a t i v e tir des dans en résultats de et au du les c o n ­ c o n ­ non-su- langage. Les éléments de contenu relatifs au faire et à la matière sont en non-isomorphisme, nous l'avons déjà vu. C'est sur le faire que s'est appuyée notre dé­ 186 m o n s t r a t i o n tie et c'est d u c tion Les en de de n o n - i s o m o r p h i s m e ainsi la éléments que m é thode de i s o morphisme nous avons la première justifié par­ l'i n t r o ­ sémiotique. contenu non dans relatifs spatial avec aux relations des éléments sont de 1 ' exprès s i o n . Ces ne Par trois catégories p r é d i c a t i v e conséquent, partagée en d'autres qui est vraie une n'en que non-s u p e r p o s a b l e ) te par la présentes transc r i vant chaîne segments quel sont chaîne. soit le toute expression prédicative r e levant relèvent de une dans se de Cette statut l ' e x p ression signe. trouve d ' i s o morphismes pas. chaî­ et (superposable de en affirmation signe ou transcri­ 4.1 NIVEAUX DE NOTRE DISCOURS La théorie de la hiérarchie linguistique, élaborée par L. HJELMSLEV et reprise par GREIMAS nous four­ nit un cadre d'analyse pour notre propre discours analytique. Le langage des plans étant le discours objet de notre analyse, notre propre discours est donc métalinguistique par rapport à ce langage-objet. Ce métalangage d ’analyse est réglé par un niveau méthodologique qu’il présuppose. Les discours métho­ dologiques auxquels nous avons recours sont princi­ palement ceux de HJELMSLEV, GREIMAS, et POINCARE. Ces discours présupposent à leur tour un niveau épis­ témologique sur lequel ils appuient leurs termes non-définis ou non-démontrés. Dans le discours que nous tenons dans cette étude, on peut reconnaître ces différents niveaux. Celui du langage-objet se retrouve sous deux formes : une forme graphique, faite d ’illustrations qui ne font que reproduire des parties du discours étudié, et une forme verbale, écrite en langue naturelle, et qui n ’est que la transcription du discours graphi­ que ; en particulier, c ’est le cas du déchiffrement opéré pour les besoins de l ’étude. Le niveau méta­ linguistique est celui de nos analyses, mises en structure, commentaires, etc... On peut le quali­ fier de niveau cognitif puisqu' il produit un savoir à propos des plans en architecture. Le niveau mé­ thodologique se retrouve dans les citations directes ou indirectes que nous faisons, emprunts conceptuels qui nous servent d ’arrière-plan et permettent de référencier nos travaux. Ce niveau est principalement un niveau référentiel. Il faut ajouter à ce niveau notre auto-référence : nous faisons appel à des ré- 190 sultats que nous avons déjà établis dans nos recher­ ches antérieures ("Sémiotique de l'Espace", et "Sémio­ tique des Plans en Architecture"). Le niveau épisté­ mologique est peu marqué dans notre discours. Ce qui domine, quantitativement, dans notre discours, ce sont les niveaux du métalangage et du langage objet. Notre métalangage est essentiellement des­ criptif : nous ne nous sommes pas donnés pour tâche de porter des jugements sur le langage objet. Ce qui nous intéresse, ce n'est pas ce qu'il dit mais com­ ment il le dit. Un comment qui n'est pas celui de la stylistique mais celui des mécanismes. Sans prêter attention au contenu du discours, nous nous efforçons d'atteindre les articulations de ce discours, sa grammaire, ses catégories fondamentales. Or, pour mener à bien ce programme, et de façon convaincante, il fallait montrer l'élaboration des structures, à partir du matériau lui-même. D'où la présence du dis­ cours-objet à l'intérieur de notre étude, et sa pré­ sence sous deux formes : - une reproduction partielle - une transcription verbale, puisqu'il faut en parler. Pour communiquer avec notre lecteur, qui n'est pas censé connaître le langage-objet de notre étude, nous utilisons la langue naturelle qui véhicule simulta­ nément notre description et des segments de trans­ cription. La transcription est réglée par un niveau métalinguistique implicite et qui ne s'avoue pas. C'est le cas de toute traduction. Dans notre cas, la régulation est effectuée de manière explicite quand il s'agit de déchiffrement ; elle est implicite dès que nous supposons que nous savons lire sans fai* re l'effort d'un déchiffrement systématique. 4.2 ETUDE DU CONTENU Une analyse de contenu révèle toujours des options implicites qui, dans le cas de l'architecture, sont d'ordre économique, idéologique, plastique, ... ou identifiables aussi par un terme complexe : fonction­ naliste. Ces différents contenus apparaîtront à notre lecture, et dans la mesure où nous opérons une trans­ cription, seront reproduits dans notre texte. Cela ne veut pas dire que nous les reprenons à notre comp­ te. L'absence d'un désaveu systématique de notre part, de même que l'absence d'évaluation, ne signifient pas une démission ou une position politique à leur égard. Simplement, nous nous intéressons plus aux structu­ res du langage qu'à ce qu'il véhicule. Nous nous sommes fixés une priorité : celle de montrer les mécanismes d'un langage pour en permettre une analy se plus fine et une compréhension plus détaillée. Avec un tel outil, il sera possible de faire des analyses en vue de porter des jugements évaluatifs. Du fait de la transcription opérée dans le déchif­ frement, nous retrouvons dans notre etude un dis­ cours architectural, dans la mesure où les plans de Grigny parlent d'architecture, et un discours ur­ banistique, dans la mesure où ces mêmes plans sont des plans-masse et que l'opération concerne un nom­ bre important de logements. De plus, il s'avère que ces deux discours ont des résonnances fonctionnalis­ tes. On peut penser que ce dernier aspect des choses est dû au fait qu'il s'agit d'un programme H.L.M. assez réglementé, et qu'une bonne part des solutions est imposée. De plus, l'option que nous avons prise de vouloir déchiffrer le plan provoque un grossisse­ ment de la lecture fonctionnaliste : en effet, 192 l'identification d'un objet quelconque passe par son insertion dans un réseau plus large où il "sert" à quelque chose. La vision mécaniste continue à condi­ tionner la définition de tout objet, et nous en avons une illustration éloquente dans la lexicologie : les dictionnaires définissent les objets plus par leur "utilité" que par les conditions de leur production ou le système de leurs relations. En résumé, il se peut que l'urbanisme de Grigny soit moins fonction­ naliste qu'il ne le paraisse à travers les segments transcrits que nous utilisons dans notre étude. Superposés à ce discours "fonctionnaliste", nous pou­ vons reconnaître deux discours esthétiques qui pré­ supposent le premier : -un discours esthétique de l'espace signifié, - un discours esthétique du graphisme dessiné. Dans une analyse linguistique stricte, nous devons fondre ces deux discours en un seul, puisque l'un se rapporte au niveau du contenu et l'autre au ni­ veau de 1'éxpression. Le décalage terminologique pro­ vient du sens que nous attribuons au mot "esthétique". Ce sens est issu d'une pratique de l'architecture, où la qualité "beau" est attachée aux propriétés formelles, d'où la possibilité de l'attacher soit à l'expression soit au contenu. Si on se replace dans une définition plus conforme à l'usage littéraire, le discours esthétique apparaît dans une certaine adéquation de l'expression au contenu. En d'autres termes, le discours esthétique s'efforce d'être mo­ tivé, et de dénoter un contenu grâce aux qualités formelles de l'expression (1). En cela, il est proche (lj cf. Essais de Sémiotique poétique. Sous la direction de A. J. GREIMAS, ed. Larousse 1972 193 de l'esthétique fonctionnaliste. Il est possible de lire le discours objet selon d ’au­ tres points de vue, d'autres pertinences, pour en dégager un contenu différent. On peut en parler selon la problématique de : - découpage de l'espace et articulation de ce décou­ page. - faire présupposé par les espaces segmentés. - fonctions : une vision finaliste du faire précé­ dent, avec l'oblitération de l'usager. - l'instrumentation : le plan comme outil dans la chaîne de production. - la description : le plan est un métalangage des­ criptif du monde naturel articulé lui-même en lan­ gage. - la plastique de l'objet construit, ou la plastique de l'objet graphique tel qu'il est dessiné (rappelons ici l'usage esthétique des plans qu'avait imposé l'an­ cienne Ecole des Beaux Arts). - les traces du dessin ou les traces de la conception. Toutes ces problématiques constituent des domaines du contenu, dans le champs d'attente du sens, aux­ quels correspondent des éléments de l'expression re­ pérables et structurables. La multiplicité de ces champs ne doit pas nous éton­ ner : rien, à priori, ne permet de restreindre les contenus exprimables par un plan. Le plan ne change pas avec le point de vue selon lequel on le question­ ne. Il s'agit plutôt d'une accumulation de signifi­ cations liées aux contextes dans lesquels on peut placer le plan, et en fonction desquels il révèle une partie de son contenu. Il en est de même pour le discours en langue naturelle. . ■ ■ ii 4.3 LEXICALISATION La transcription est une traduction, et elle s ’appuie sur la propriété fondamentale des langues naturelles celle de pouvoir traduire tous les autres langages. Au cours d ’une telle opération, il arrive que des unités du langage du plan puissent être traduites par un lexème unique de la langue naturelle. Dans ce cas, on peut dire que ces unités se trouvent "lexicalisées". Cette coïncidence des unités de deux langages différents est l'expression de la congruence locale des découpages qu'ils opèrent à leurs niveaux respectifs, de l ’expression et du contenu. La lexicalisation doit être manipulée avec précau­ tions, les études sur la traduction des langues montrant la rareté de la correspondance exacte entre les lexèmes de deux langues naturelles. Si ce fait est déjà rare pour deux langages proches, puisque verbaux, il doit être encore plus rare entre un lan­ gage dessiné et une langue naturelle. En particulier, qu'une unité graphique soit lexica­ lisée ou qu'elle ne le soit pas ne préjuge en rien de son statut linguistique dans le langage des plans. En tout état de cause, son contenu peut être para­ phrasé et transcrit. Par contre, la transcription inscrite par le dessinateur du plan est signifiante par ses oublis et par ses insistances. Un élément graphique transcrit en langue naturelle est affirmé, marqué, en même temps que son contenu se trouve 196 sur-déterminé, fixé, alors q u ’un élément graphique de la même catégorie mais non transcrit se trouve impli­ citement nié, renvoyé à l'arrière plan. Lexèmes et paraphrases transcrivent des unités de contenu sans transcrire la totalité du discours gra­ phique. Un essai de mise en structure du champs du contenu, basé uniquement sur de telles unités, n'ap­ porte qu'un point de vue strictement linguistique. Ce serait même une restriction lexicologique de la linguistique : les lexèmes traduisent un découpage que la langue effectue sur les deux niveaux conjoints de l'expression et du contenu. Les travaux linguis­ tiques ont déjà établi que ce découpage dépend des cultures et des communautés linguistiques, et qu'en tout état de cause il ne recouvre pas le découpage que ces mêmes communautés appliquent au monde natu­ rel. Si de plus nous considérons les plans comme un langage descriptif du monde naturel, et que ce langage établit son découpage propre, nous nous trouvons devant trois systèmes : a - le découpage du monde naturel, b - le découpage de la langue naturelle, c - le découpage du langage des plans. Les systèmes b et c se donnent pour but de décrire le système a en le redécoupant à leur propre manière. A priori, il n'y a aucune raison pour laquelle ces trois découpages seraient comparables (au sens mathé­ matique du terme) et leurs congruences devraient être rares. C'est ce que confirme notre étude : il y a très peu d'éléments graphiques qui soient lexicalisables. En particulier, la majeure partie des lexèmes (bâti­ ment, rue, jardin,... ) désignent des éléments gra­ phiques à région unique. Très peu d'assemblages d'éléments reçoivent un lexème (ex : quartier, par 197 king), alors qu'on peut les transcrire plus facile­ ment à l'aide d'un syntagme (ex : aire de jeu, espace vert, centre commercial). Ces deux types de trans­ cription concernent des éléments ; les relations sont aussi transcriptibles (ex : contiguïté, inclusion) mais il ne faut pas les placer au même niveau : elles appartiennent à notre métalangage descriptif. Les limites du lexique (nous désignons ainsi, par abus de langage, l ’ensemble des lexèmes transcrivant des unités graphiques) sont dues à plusieurs facteurs parmi lesquels la catégorie de plan étudié occupe une grande place. En effet, les plans qui nous ont servi de corpus sont des plans de masse, à mi-chemin entre les plans de bâtiments et les plans d'urbanisme. Le domaine du contenu qu'ils impliquent est donc limité, et cela se répercute sur les lexèmes de trans­ cription. De plus, l'auteur de ces plans a probablement une influence sur le lexique, puisqu’il agit sur les unités graphiques qui sont ultérieurement lexicalisées. Enfin, le corpus littéraire que nous avons utilisé pour mener notre déchiffrement nous replace à l'inté­ rieur d'un cadre culturel déterminé sur les niveaux historique, sociologique, technique... ce qui limite le lexique de la transcription. On ne peut cependant pas prendre argument des limites du lexique pour analyser le caractère "restreint" du langage des plans. En effet, HJELMSLEV oppose les langages restreints aux langages passe-partout que sont les langues naturelles et qu'il dénomme ainsi parce qu'ils permettent de tout transcrire. A l'opposé, les langages restreints ne peuvent transcrire tout langage et leur restriction s'exprime plutôt au ni­ veau du contenu qu'au niveau de l'expression : les 198 langages restreints ne peuvent véhiculer qu'un cer­ tain nombre de messages ; les catégories du contenu y sont en nombre limité, ainsi que les unités à l'in­ térieur de chaque catégorie. Dans la terminologie que nous avons proposée, on peut parler d'une restriction du "champ d'attente du sens!' 4.4 RESULTATS ET PROJETS L'attention spéciale accordée à toute l'expression, avant que ne viennent dominer les problèmes de con­ tenu, a permis de dégager ce résultat nouveau par rapport aux analyses précédentes : il n'y a pas une forme inscrite sur un fond, toute figure rentre dans un élément signifiant. Nous avons pu voir que les plans connaissent un code "transparent", qui s ’ins­ crit par dessus un fond, et il s'agissait du code superposable. C'est ce qui nous pousse à dire que la problématique forme/fond est issue de l ’examen de l'écriture (qui est un code superposable parti­ culier), et que sa généralisation est abusive, surtout en ce qui concerne les plans en architecture. La considération d ’une "forme" est une opération de mise en relief de certains éléments, accompagnée de l'oblitération partielle des autres éléments, ce qui en fait une opération logique particulière, limitée, effectuée dans un but heuristique. D ’autre part, l'analyse de la manifestation graphi­ que des plans de notre corpus nous a permis de dif­ férencier un espace du mouvement autorisé, et un espace du mouvement interdit (et qui de ce fait est impénétrable). Or les plans que nous avons étudiés en détail sont des "PLANS DE MASSE". Nous pouvons dès lors formuler l'hypothèse suivante : les plans de masse se caractérisent par le fait qu'ils posent les bâtiments comme impénétrables, et q u ’ils s ’in­ téressent à 1 ’organisatiqn de l ’espace extérieur aux bâtiments, précisant du même coup les relations entre les bâtiments. 200 Cette opération est paradoxale, puisque ce sont justement les bâtiments qui sont habitables et pour lesquels on aménage le reste. Le plan de masse opère donc un renversement sémantique, circonscrit dans le temps, pour mieux définir l'environnement des bâti­ ments. Cette procédure fait partie d'un faire parti­ culier, celui de l'urbanisme. L ’hypothèse que nous venons d'émettre se propose de caractériser un certain type de plans. Il s'agit donc d'une hypothèse taxinomique sur l'ensemble des plans. Or une telle taxinomie ne peut se faire qu'à partir d'une étude morphologique des plans, ce que nous n ’avons pas tenté de faire : nous nous sommes occupés de la micro-structure des plans, celle qui définit les unités minimales et leurs combinatoires. L'étude morphologique devrait suivre. Disons cepen­ dant que, parmi les résultats que nous avons obtenus il nous semble que nous disposons déjà de l'outil qui nous ouvrira la porte de la morphologie des plans : il s ’agit de la syntaxe topologique (cf. SPA § 12) dont la généralité et la puissance laissent prévoir une grande richesse d'exploitation. Il faudrait appliquer la méthode topologique à un grand nombre de plans pour essayer d ’en dégager les variants, les invariants, et les transformations particulières. C'est à ce moment-là seulement que nous pourrons dresser une typologie des plans et pré­ tendre fixer les limites de notre corpus : en effet, notre objet d'étude, défini graphiquement jusqu’à présent, devra recevoir une définition structurale qui en précise les éléments et le groupe de trans­ formations. Un corpus est un ensemble à l'intérieur duquel se referme la structure : tout transformé d ’un élément de l'ensemble est un élément de l'ensem* ble. 201 Dès lors, on peut poser la question des unités pertinentes pour lesquelles poser les transformations. Nous pourrions ne considérer que des unités du conte­ nu. Il nous semble cependant qu'il faut considérer aussi les sémioses (nous avons vu le parti qu’on peut tirer du carré relatif aux sémioses) et les unités de l'expression. On pourrait reprendre à ce propos ce que nous disions au début de cette étude : les plans parlent de l'étendue avec l'étendue. Or, si nous avons vu que l'espace du monde naturel a trois dimensions, on pourrait se poser la question des di­ mensions de tout discours spatial sur l'architecture. Comme il est impossible de tenir un discours spatial à quatre dimensions, tout discours à propos de l'es­ pace aura trois, deux, ou une dimension. Un discours tridimensionnel (ex : maquette) sortant du cadre des documents dessinés en architecture, il nous reste les discours à deux et une dimension. Nous n'avons fait qu'examiner des discours à deux dimensions. Or nous connaissons des discours unidi­ mensionnels à propos d'architecture : il s'agit des réseaux, graphes, et algorithmes d'aide à la concep­ tion qui sont élaborés depuis quelques années à propos d'architecture. Ces discours, même s'ils sont inscrits sur des feuilles à deux dimensions sont unidimensionnels, et il faudrait que nous les ana­ lysions pour deux raisons : - ils font partie des documents dessinés en architec­ ture , - ils sont présupposés par les discours bidimension­ nels que nous analysons. Par conséquent, même si l'expression ne peut suffire à définir un langage, elle entraîne un agrandissement du corpus. Rappelons que nous n'avons encore analysé ni coupes ,ni perspectives... Notre étude ici n'est qu'un épannelage, un débroussaillage qui permet 202 d'installer une méthode et des résultats partiels. Nous espérons pouvoir la continuer. Avril 1976 BIBLIOGRAPHIE Le lecteur trouvera une bibliographie systématique dans notre publication "Sémiotique des Plans en Architecture". Etablie en 1974, elle est assez com­ plète. Nous citons ci-dessous les ouvrages fondamen­ taux dont nous nous servons, et quelques nouvelles parutions. (1) AILLAUD, Emile. Qu'est-ce qu'une ville, in Cahiers de l'IAURP, Paris, Déc. 1968. (2) ALEXANDROFF, Paul. Elementary Concepts of Topology, N.Y. Dover, 1961. (3) BARBUT et MONJARDET. Ordre et classification, Paris, Hachette, 1970. (4) BARTHES, Roland. Seuil, 1967. (5) BENZECRI, J.P. Le système de la mode, Paris, La taxinomie, Paris, Dunod,1973. (6) BERTIN, Jacques. Sémiologie graphique, Paris, Gauthier-Villars, 1967. (7) BOUDON, Philippe. La figuration graphique en architecture, fascicule 3a : sémiologie des figures et syntaxe des formes. DGRST, Paris 1974. 204 (8) COUET et DUBUISSON. Cours de dessin topographique Paris, Eyrolles, 1967. (9) DEVY [A) et GASSIOT-TALABOT CG), La Grande Borne à Grigny, Ville d'Emile Aillaud, Paris, Hachette, 1972. (10) GREIMAS, A.J. Du Sens, Paris, Seuil, 1970. (11) GREIMAS, A.J. Pour une sémiotique topologique, in Compte rendu du colloque sémiotique de l'espace, Paris, Institut de l'Environnement, 1972 (12) GROUPE 107. Sémiotique de l'Espace, Paris, DGRST, 1974. (13) GUILBAUD, G.Th. Les discours d'espace et leurs formes mathématiques, 14ème journée d'étude de 1'APSLE, avril 1972. (14) HAUMONT, N. et A. L'habitat pavillonaire, Paris, CRU, 1966. (15) HJELMSLEV, Louis. Le Langage, Paris, éd. de Minuit, 1966. (16) HJELMSLEV, Louis. Prolégomènes à une théorie du Langage, Paris, éd. de Minuit, 1971. (17) JAKOBSON, Roman. Essais de Linguistique Générale, Paris, éd. de Minuit, 1963. (18) METZ, Christian. Réflexions sur la "Sémiologie graphique" de Jacques BERTIN, in Annales, n° 3, 1971, pp. 741-770. 205 (19) MOULIN, Raymonde . Les Architectes, métamor­ phoses d'une profession libérale, Recherche DGRST éd. Caïman Levy, Paris, 1973. (20) POINCARE, Henri. La Science et l'Hypothèse, Paris, Flammarion, 1902-1968 (21) POINCARE, Henri. La Valeur de la Science, Paris, Flammarion, 1905-1970. (22) POINCARE, Henri. Dernières Pensées, Paris, Flammarion, 1912. (23) SAUSSURE, Ferdinand de. Cours de Linguistique Générale, Paris, Payot, 1949-1966 Achevé d'imprimer sur les presses de Copédith 7 rue des Ardennes, 75019 Paris. Dépôt légal n° 53 92 - 2è trim. 1976 OFFICE PUBLIC O HABITATION UE 32. QUAI OCS CEI ESTINS s Oè o o o o ô ^ G R IG N Y 9 0 80 70 60 40 30 20 10 36 8 5 LO G EM EN TS LA GRANDE BORNE SPORTS ARCHITECTE STHONORE l,ysT»'aL»BE LABYRINTHE COLLEGES LE MARI GOT L’ Œ UF STADE LE PONT S PO RTS -- LES TIROIRS VI LLAGE LE MENI SQUE LA VILLE SPORTS LE MERIDIEN MAI SON DES L ' ELL I PS E LA DEMI LUNE PERSONNES AGEES MAI SON DES! JEUNES L’ETANG N. LES .RAPA: •L A MONTAGNE LA V ILLE-HAUTE :t£ïiùk ;60qv.