Papers by Philippe Glatre
Cahiers de littérature orale, 2024
À travers l’étude anthropologique comparative des « modernités littéraires alternatives » que son... more À travers l’étude anthropologique comparative des « modernités littéraires alternatives » que sont le slam, le fonnkèr, pratique poétique orale réunionnaise, et en filigrane, le rap, cet article vise à comprendre les processus transculturels qui se jouent dans ces formes contemporaines. En réfléchissant depuis La Réunion sur un corpus de performances, d’entretiens, d’observations participantes et d’affiches, nous verrons en quoi ces hybridations comportent une dimension performative qui s’articule autour de la langue, des canons poétiques et de ce que Homi Bhabha appelle les « lieux de la culture ». Si elles sont souvent reléguées au rang de pratiques subalternes, ces poésies orales favorisent l’émergence des minorités en engageant des pratiques qui réarticulent cultures lettrées et populaires. Elles font ainsi place à des énonciations féminines, tout en se distinguant les unes des autres sur les questions postcoloniales qui sont au cœur du discours du fonnkèr. Par des procédés stylistiques et rythmiques dans lesquels on perçoit une intention à la fois performancielle et performative, elles instaurent également un rapport autant ludique que conflictuel avec les canons poétiques français. Leurs divergences de positionnement vis-à-vis du fait urbain, enfin, indiquent des rapports différents aux espaces où se joue une négociation entre visibilité et authenticité.
Pratiques de Formation/Analyses, 2024
ATER en sciences de l'éducation à l'université Paul-Valéry Montpellier 3, rattaché au laboratoire... more ATER en sciences de l'éducation à l'université Paul-Valéry Montpellier 3, rattaché au laboratoire Lirdef. Il a soutenu en 2022 une thèse en anthropologie à la Sorbonne Nouvelle qui portait sur la poésie orale réunionnaise. Son terrain est notamment constitué des nombreux projets socioculturels qu'il a menés dans le champ de l'éducation populaire à La Réunion. Martine Morisse Enseignante-chercheuse en sciences de l'éducation et de la formation à l'université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis, rattachée au laboratoire Experice. Ses objets de recherche portent sur les pratiques langagières en lien avec l'expérience, la formation et l'émancipation dans des milieux associatifs et professionnels. Sébastien Pesce Professeur en sciences de l'éducation à l'université de Tours, rattaché à l'équipe d'accueil Éducation, Éthique, Santé. Ses travaux de recherche portent sur les pédagogies coopératives et institutionnelles, les approches sémiotiques de l'éducation et de la formation, et les approches sociocliniques.
Pratiques de Formation/Analyses, 2024
Docteure en sciences de l'éducation, chercheuse associée, Experice, Université Paris 8 Vincennes-... more Docteure en sciences de l'éducation, chercheuse associée, Experice, Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis. Formatrice depuis 1996 au sein de fédérations, associations et coopérative, d'éducation populaire, conseillère Éducation populaire et de jeunesse depuis 2017. Coanimatrice de recherche-action et démarches réflexives en éducation, impliquée dans l'offre publique puis civile de réflexion sur l'avenir de l'éducation populaire (1998-2007), elle poursuit ses recherches sur l'éducation populaire contemporaine, notamment politique. Philippe Glâtre Anthropologue, ATER en sciences de l'éducation à l'université Paul-Valéry Montpellier 3, Lirdef.
Pratiques de formation/Analyses, 2023
Enseignante-chercheuse en sciences de l'éducation et de la formation à l'université Paris 8 Vince... more Enseignante-chercheuse en sciences de l'éducation et de la formation à l'université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis (laboratoire Experice). Ses objets de recherche portent sur les pratiques langagières en lien avec l'expérience, la formation et l'émancipation dans des milieux associatifs et professionnels. Philippe Glâtre Attaché temporaire d'enseignement et de recherche (ATER) en sciences de l'éducation à l'université Paul-Valéry Montpellier 3. Il a soutenu une thèse en anthropologie à la Sorbonne nouvelle qui portait sur la poésie orale réunionnaise. Son terrain est notamment constitué des nombreux projets socio-culturels qu'il a menés dans le champ de l'éducation populaire à La Réunion. Sébastien Pesce Professeur en sciences de l'éducation à l'université d'Orléans, rattaché à l'équipe d'accueil ERCAE. Ses travaux de recherche portent sur les pédagogies coopératives et institutionnelles, les approches sémiotiques de l'éducation et de la formation, et les approches socio-cliniques. 01/09/2023 L'éducation populaire (EP) a connu des sens, des significations et des pratiques très différentes, voire concurrentes, en fonction des époques et de ses porte-paroles 1. 1 Frédéric Chateigner, 2012, « Éducation populaire : les deux ou trois vies d'une formule », thèse de doctorat, sous la
Pratiques de formation/Analyses, 2023
Enseignante-chercheuse en sciences de l'éducation et de la formation à l'université Paris 8 Vince... more Enseignante-chercheuse en sciences de l'éducation et de la formation à l'université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis (laboratoire Experice). Ses objets de recherche portent sur les pratiques langagières en lien avec l'expérience, la formation et l'émancipation dans des milieux associatifs et professionnels. Philippe Glâtre Attaché temporaire d'enseignement et de recherche (ATER) en sciences de l'éducation à l'université Paul-Valéry Montpellier 3. Il a soutenu une thèse en anthropologie à la Sorbonne Nouvelle qui portait sur la poésie orale réunionnaise. Son terrain est notamment constitué des nombreux projets socio-culturels qu'il a menés dans le champ de l'éducation populaire à La Réunion. Sébastien Pesce Professeur en sciences de l'éducation à l'université d'Orléans, rattaché à l'équipe d'accueil ERCAE. Ses travaux de recherche portent sur les pédagogies coopératives et institutionnelles, les approches sémiotiques de l'éducation et de la formation, et les approches socio-cliniques.
Glottopol, 2023
À l’Ile de La Réunion, la relation diglossique entre le français et le créole, incorporée dès l... more À l’Ile de La Réunion, la relation diglossique entre le français et le créole, incorporée dès le plus jeune âge par les enfants réunionnais, entraîne souvent un bilinguisme non harmonieux qui aboutit à des pratiques littéraciées monolingues. Dans cette situation sociolinguistique inconfortable, les ateliers de poésie orale que nous avons menés avec des étudiants démontrent qu’une négociation entre les langues autorise la traduction interculturelle et par là même le développement de compétences plurilingues. Parallèlement, cette médiation rend possible une biographisation qui favorise l’émergence d’une langue propre, empêchée par l’institution scolaire, et de capacités narratives acquises au cours de la socialisation langagière. Souvent en lien avec un genre de discours familier, l’actualisation de ces savoirs associée à un travail rythmique orientent alors les performances vers le développement d’un style propre, dans lequel se ressent la dimension musicale de la langue.
Cahiers de littérature orale, 2020
Congrès Mondial de Linguistique Française, Université Paul Valéry, Montpellier, 2020
Si l'histoire des rapports entre écriture et oralité met en perspective des agencements permanent... more Si l'histoire des rapports entre écriture et oralité met en perspective des agencements permanents, la Modernité occidentale a donné une place prépondérante à la littératie. Dans la France hexagonale des XIXè et XXè siècles, la tradition orale et les langues régionales ont alors connu une dépréciation au profit de la langue nationale écrite. En même temps que des pratiques oratoires telles que la rhétorique et la poésie orale étaient exclues de l'enseignement, les écrits en langue minoritaire, particulièrement s'ils étaient à visée littéraire, étaient assignés à la littératie vernaculaire et la culture populaire. Le retour contemporain de l'oralité, particulièrement visible dans l'émergence du slam, se heurte donc au statut prépondérant donné à l'écrit et à la langue hégémonique. Dans les sociétés coloniales françaises, le système scripturaire a également été conçu comme un instrument de civilisation, mais réservé à une élite favorable au système colonial. La scolarisation a donc été basée sur la francisation, restreignant ainsi l'éducation des subalternes à une littératie rudimentaire. Ce processus de minorisation a eu des conséquences sociolinguistiques importantes dans les territoires français d'Outre-mer, qui conjuguent diglossie et colonialité. A l'Île de La Réunion, où le créole est la langue première de la majorité de la population, le rapport à l'écrit et à la langue dominante a ainsi longtemps participé d'une exclusion des textes créolophones de la littérarité. Il faudra attendre la fin du XX è siècle pour que soit remise en cause une littératie monolingue et que la tradition orale créole retrouve sa propre historicité linguistique et culturelle.
Abstract. Orality and coloniality through the prism of the Reunionese literary diglossy. By developing an overview of the permanent historical arrangements that define the relation between writing and orality, we seek to demonstrate that Western Modernity assigned to literacy a predominant status. In France, during the XIX th and the XX th centuries, oral tradition and regional languages have been depreciated in favor of the written national language. As oratory practices like rhetoric and oral poetry were excluded from schooling, literary writings in minorized languages were assigned to vernacular literacy and folklor. The contemporary comeback of orality, particularly noticeable in the emergence of slam poetry, meets with the predominant status given to written and hegemonic language. In the French colonial societies, the scriptural system was also conceived as an instrument of civilization, but reserved for an elite favorable to the colonial system. Learning was therefore based on francization, thus restricting the education of subalterns to rudimentary literacy. This minorization had important sociolinguistic consequences on French Overseas Territories, 1 [email protected]
Actes du Colloque "Pratiques sociales et apprentissages", Université Paris 8 Vincennes - Saint-Denis, 2017
Mémoire de Recherche - Master 2 EFIS Éducation Formation et Intervention Sociale, Spécialité Éducation Tout au Long de la Vie, Université Paris 8 Vincennes - Saint-Denis, 2016
A mes directrices de recherche, Nacira GUENIF-SOUILAMAS et Martine MORISSE, dont les orientations... more A mes directrices de recherche, Nacira GUENIF-SOUILAMAS et Martine MORISSE, dont les orientations m'ont permis d'explorer le slam réunionnais dans des directions que je n'aurais pu envisager seul. A Marie, ma compagne, qui a fait tout son possible pour que je puisse écrire ce mémoire dans des conditions confortables.
Book Reviews by Philippe Glatre
Cahiers de littérature orale n°85, 2019
Communications by Philippe Glatre
13è Colloque de l'International Society for Oral Literatures of Africa : 8-10 juillet 2021, Nairobi, Kenya, 2021
Issue d’une recherche en anthropologie langagière sur la poésie orale à l’Île de La Réunion, ma c... more Issue d’une recherche en anthropologie langagière sur la poésie orale à l’Île de La Réunion, ma communication propose une réflexion sur les canons (Bornand & Derive, 2018) du fonnkèr, art oratoire qui s’invente dans un territoire marqué par le colonialisme et la subalternisation. Dans sa version contemporaine, il s’inscrit depuis la seconde moitié du siècle dernier comme un genre poétique créolophone en résistance à la culture dominante occidentale (Hélias, 2014). Son ancrage est donc principalement africain, issu des kabary pratiqués en Afrique de l’Est et particulièrement à Madagascar (Wells, 2018), et met en avant la créolité réunionnaise dans ses dimensions culturelles et linguistiques. Depuis le milieu des années 2000, il doit cependant se réinventer, dans une négociation avec le slam, qui dans son principe s’apparente au fonnkèr, mais oblige ce dernier à préciser ses branchements.
A travers un corpus issu d’observations participantes, de vidéos de performances, d’ateliers de poésie orale et de flyers d’événements artistiques, nous verrons que le fonnkèr est tiraillé entre plusieurs axes. Au niveau linguistique, dans son intention de valorisation de la langue créole réunionnaise, il oscille entre usage d’un lexique oublié et innovations stylistiques performatives (Carinos & Hammou, 2017). Dans sa dimension spatiale, il cherche une liminalité entre une écopoésie (Lorin, 2018) ancrée dans une nature omniprésente, et un besoin de visibilité, qui l’oriente vers des espaces performanciels urbains soutenus par les institutions dominantes (Da Lage, 2008), là où ses performances se pratiquent traditionnellement dans des ron fonnkèr, en milieu rural ou rurbain.
Entre héritage et émergence, le fonnkèr réunionnais illustre donc les tensions qui se jouent dans l’invention d’une poésie orale à la fois africaine et occidentale, et les transformations qui s’imposent à ses poètes du fait de la situation postcoloniale réunionnaise. Notre tentative de préciser les canons contemporains du fonnkèr illustre alors une vision du monde créole, qui use du mimétisme pour favoriser une émergence de la subalternité.
46è Congrès annuel de la Société d’Histoire Coloniale Française (SHCF), 28 au 31 mai 2020 - Buffalo, NY, États-Unis, 2020
Communication au colloque international Poésies performatives : théories et pratiques. Perspectives comparatistes - Université de Lisbonne, 2018
Proposition de communication « Les lieux de la culture des poésies orales : une anthropologie com... more Proposition de communication « Les lieux de la culture des poésies orales : une anthropologie comparative depuis La Réunion » Intitulée « Les lieux de la culture des poésies orales : une anthropologie comparative depuis La Réunion », cette proposition de communication s'appuie sur une thèse en anthropologie, en cours de réalisation, portant sur le slam à l'Île de la Réunion, territoire particulièrement intéressant de par son contexte plurilingue et postcolonial. A la fois ancrée, impliquée et comparative, cette recherche est transversale à plusieurs axes du colloque Poésies performatives : théories et pratiques. Perspectives comparatistes, et nous permet de proposer une réflexion, depuis l'Océan Indien, sur les hybridations à l'oeuvre dans les poésies orales contemporaines, à travers trois dimensions : la langue, le rythme et l'espace. Nous verrons que, si elle est souvent reléguée au rang de pratique subalterne, la poésie orale participe de l'émergence (Santos, 2011) d'alternatives littéraires permettant l'inclusion des minorités (Magdelaine-Andrianjafitrimo, 2008, Paré, 2015), en perpétuant des pratiques qui renouvellent le continuum entre écriture et oralité (Manca, 2008). Elles permettent également une diversité et une création linguistique (Vorger, 2011), où l'on perçoit une intention performative (Butler, 2008), qui peut toutefois être empêchée par la situation postcoloniale qui tend à imposer un monolinguisme (Derrida, 1996) et une littératie dominante. Nous nous intéresserons ensuite aux processus rythmiques (Vettorato, 2013) et d'improvisation, qui permettent de préciser en quoi les performances poétiques sont des espaces de négociation mettant en jeu musicalité (Lortat-Jacob, 2010) et métrique (Meschonnic, 2009). Nous verrons enfin que le
The location of culture of oral poetry - Conference Performative poetry - Lisbon, Portugal, 2018
The location of culture of oral poetry : a comparative anthropology from Reunion Island » Entitle... more The location of culture of oral poetry : a comparative anthropology from Reunion Island » Entitled « The location of culture of oral poetry : a comparative anthropology from Reunion Island », this communication is based on a thesis in anthropology in progress, dealing with slam poetry on Reunion Island, an area of particular interest because of its plurilingual and postcolonial context. At the same time grounded, involved and comparative, this research is transversal to several axes of the conference Performative poetry: theories and practices. Comparative perspectives, and allows us to propose a reflection, from the Indian Ocean, on the hybridizations at work in contemporary oral poetry, through three dimensions : language, rhythm and space.
Colloque international Les langues dans la famille : attitudes, usages, politiques, histoires - Université Sorbonne Nouvelle, Université Paris Descartes et Inalco, 5-7 décembre 2019, 2019
Issue d’une recherche qualitative et impliquée à l’Île de La Réunion, ma communication propose un... more Issue d’une recherche qualitative et impliquée à l’Île de La Réunion, ma communication propose une réflexion sur les branchements langagiers en contexte plurilingue et postcolonial. A travers une approche anthropologique et sociolinguistique, il s’agira d’analyser un corpus d’ateliers de poésie orale pour éclairer les pratiques linguistiques réunionnaises au regard de la socialisation langagière.
Nous verrons alors que, dans un contexte où les idéologies linguistiques des familles entrent souvent en conflit avec celles véhiculées par l’école, la poésie orale peut induire de nouveaux branchements linguistiques et ainsi favoriser le développement de compétences langagières.
Nous verrons tout d’abord que la relation diglossique entre le français et le créole réunionnais reproduite par l’école, impose une idéologie langagière assignant le créole à la subalternité. Ce phénomène, incorporé dès le plus jeune âge par les enfants réunionnais, entraîne souvent un développement non harmonieux (De Houwer, 2006) et aboutit à un monolinguisme au profit des détenteurs de la langue dominante (Canut, 2001).
Malgré cette situation sociolinguistique inconfortable, les ateliers de poésie orale, dès lors qu’ils proposent un apprentissage moins formel et une négociation (Bhabha, 2007) entre les langues, autorisent la traduction interculturelle et par là même le développement de compétences plurilingues. Parallèlement, cette pratique rend possible un récit de soi qui favorise l’émergence d’une langue propre, bien souvent empêchée par l’institution scolaire (Miller, Cho & Bracey, 2012).
Enfin, en rétablissant un continuum entre littératie et oralité, nous verrons que la poésie orale peut induire la réémergence de compétences narratives incorporées lors de la socialisation langagière (Duranti, Ochs & Schieffelin, 2012). La réactualisation de ces savoirs, souvent en lien avec un genre de discours familier, oriente alors les apprentissages vers le développement d’un style propre.
Cinquième colloque international Langue et Territoire, 14-20 juin 2021, Université Paul Valéry, Montpellier, 2021
Issue d’une recherche en anthropologie langagière à La Réunion, ma communication propose une réfl... more Issue d’une recherche en anthropologie langagière à La Réunion, ma communication propose une réflexion sur la négociation entre hégémonie et diversité dans un territoire marqué par les idéologies langagières. Avec l’invention de l’État-nation, la modernité occidentale a imposé une subalternisation des cultures périphériques, induisant à La Réunion un rapport diglossique et racialisé à la langue. Cette situation postcoloniale, façonnée par le mythe du monolinguisme, peut être éclairée par une étude comparative du slam et du fonnkèr, poésie orale réunionnaise, qui s’inventent entre mimétisme et résistance (Bhabha, 2007). Le slam, pratique occidentale, s’y positionne du côté de la francophonie, s’appropriant la langue nationale, quand le fonnkèr participe d’une résistance du créole réunionnais face à l’hégémonie du français (Jaffe, 2008). Deux territorialisations se confrontent alors : l’une se branchant sur une culture mondialisée, s’affirmant comme ouverte, l’autre revendiquant plutôt une tradition africaine et indiaocénique, minorisée, porteuse d’une diversité circonscrite, mais qui participe d’une renégociation du centre et de la périphérie (Baneth, 2010). Ce faisant, ces deux formes de poésie orale inventent des écopoétiques (Lorin, 2018) dans lesquelles les territoires sont représentés en fonction de la langue et des branchements culturels favorisés par leurs locuteurs. Le slam se revendiquant d’une pratique dite urbaine, alors que le fonnkèr propose souvent un discours agençant nature et société réunionnaises, créant un canon littéraire qui reterritorialise et réhistoricise la langue et la culture créoles. Dans la cohabitation de ces deux arts oratoires, ce sont donc deux altérités qui se créent, donnant lieu à des pratiques mimétiques aux objectifs différents. Quand les tenants du slam réunionnais font un pas du côté de la langue créole, c’est souvent pour subalterniser une culture qui lui préexistait, là où le fonnkèr peut mimer la poésie française autant pour se l’approprier que pour revendiquer une pratique autre, basée sur la langue minorisée, mais qui lui est propre (Courouau, 2006).
Conference Presentations by Philippe Glatre
Quand la diversité est empêchée : subalternisation par la monoculture dans le système éducatif réunionnais, 2024
Ma communication propose une réflexion sur la façon dont la diversité, au fondement de la société... more Ma communication propose une réflexion sur la façon dont la diversité, au fondement de la société réunionnaise, est combattue par l’idéologie monoculturelle. A travers une historicisation des politiques éducatives, éclairées par les histoires de vie de poètes réunionnais recueillies pendant mon terrain de thèse, il s’agira de comprendre les effets d’un monolinguisme promu au profit des enseignants non créolophones, mais qui défavorise les élèves dans leur appropriation de la littératie et de la littérarité, ainsi que des langues créole, nationale et étrangères.
Humains et non-humains dans les arts de la parole en Afrique. Narrativités et poétiques environnementales à l'aube de la crise climatique, Inalco, Paris, 5-8 juillet, 2023
Ce colloque propose d’investiguer le thème écologique, à la pointe de la demande scientifique et ... more Ce colloque propose d’investiguer le thème écologique, à la pointe de la demande scientifique et sociale, dans les littératures orales en Afrique et sa diaspora par la perspective de plusieurs approches qui posent au centre de la recherche les rapports entre les arts de la parole et l’environnement.
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Papers by Philippe Glatre
Abstract. Orality and coloniality through the prism of the Reunionese literary diglossy. By developing an overview of the permanent historical arrangements that define the relation between writing and orality, we seek to demonstrate that Western Modernity assigned to literacy a predominant status. In France, during the XIX th and the XX th centuries, oral tradition and regional languages have been depreciated in favor of the written national language. As oratory practices like rhetoric and oral poetry were excluded from schooling, literary writings in minorized languages were assigned to vernacular literacy and folklor. The contemporary comeback of orality, particularly noticeable in the emergence of slam poetry, meets with the predominant status given to written and hegemonic language. In the French colonial societies, the scriptural system was also conceived as an instrument of civilization, but reserved for an elite favorable to the colonial system. Learning was therefore based on francization, thus restricting the education of subalterns to rudimentary literacy. This minorization had important sociolinguistic consequences on French Overseas Territories, 1 [email protected]
Book Reviews by Philippe Glatre
Communications by Philippe Glatre
A travers un corpus issu d’observations participantes, de vidéos de performances, d’ateliers de poésie orale et de flyers d’événements artistiques, nous verrons que le fonnkèr est tiraillé entre plusieurs axes. Au niveau linguistique, dans son intention de valorisation de la langue créole réunionnaise, il oscille entre usage d’un lexique oublié et innovations stylistiques performatives (Carinos & Hammou, 2017). Dans sa dimension spatiale, il cherche une liminalité entre une écopoésie (Lorin, 2018) ancrée dans une nature omniprésente, et un besoin de visibilité, qui l’oriente vers des espaces performanciels urbains soutenus par les institutions dominantes (Da Lage, 2008), là où ses performances se pratiquent traditionnellement dans des ron fonnkèr, en milieu rural ou rurbain.
Entre héritage et émergence, le fonnkèr réunionnais illustre donc les tensions qui se jouent dans l’invention d’une poésie orale à la fois africaine et occidentale, et les transformations qui s’imposent à ses poètes du fait de la situation postcoloniale réunionnaise. Notre tentative de préciser les canons contemporains du fonnkèr illustre alors une vision du monde créole, qui use du mimétisme pour favoriser une émergence de la subalternité.
Nous verrons alors que, dans un contexte où les idéologies linguistiques des familles entrent souvent en conflit avec celles véhiculées par l’école, la poésie orale peut induire de nouveaux branchements linguistiques et ainsi favoriser le développement de compétences langagières.
Nous verrons tout d’abord que la relation diglossique entre le français et le créole réunionnais reproduite par l’école, impose une idéologie langagière assignant le créole à la subalternité. Ce phénomène, incorporé dès le plus jeune âge par les enfants réunionnais, entraîne souvent un développement non harmonieux (De Houwer, 2006) et aboutit à un monolinguisme au profit des détenteurs de la langue dominante (Canut, 2001).
Malgré cette situation sociolinguistique inconfortable, les ateliers de poésie orale, dès lors qu’ils proposent un apprentissage moins formel et une négociation (Bhabha, 2007) entre les langues, autorisent la traduction interculturelle et par là même le développement de compétences plurilingues. Parallèlement, cette pratique rend possible un récit de soi qui favorise l’émergence d’une langue propre, bien souvent empêchée par l’institution scolaire (Miller, Cho & Bracey, 2012).
Enfin, en rétablissant un continuum entre littératie et oralité, nous verrons que la poésie orale peut induire la réémergence de compétences narratives incorporées lors de la socialisation langagière (Duranti, Ochs & Schieffelin, 2012). La réactualisation de ces savoirs, souvent en lien avec un genre de discours familier, oriente alors les apprentissages vers le développement d’un style propre.
Conference Presentations by Philippe Glatre
Abstract. Orality and coloniality through the prism of the Reunionese literary diglossy. By developing an overview of the permanent historical arrangements that define the relation between writing and orality, we seek to demonstrate that Western Modernity assigned to literacy a predominant status. In France, during the XIX th and the XX th centuries, oral tradition and regional languages have been depreciated in favor of the written national language. As oratory practices like rhetoric and oral poetry were excluded from schooling, literary writings in minorized languages were assigned to vernacular literacy and folklor. The contemporary comeback of orality, particularly noticeable in the emergence of slam poetry, meets with the predominant status given to written and hegemonic language. In the French colonial societies, the scriptural system was also conceived as an instrument of civilization, but reserved for an elite favorable to the colonial system. Learning was therefore based on francization, thus restricting the education of subalterns to rudimentary literacy. This minorization had important sociolinguistic consequences on French Overseas Territories, 1 [email protected]
A travers un corpus issu d’observations participantes, de vidéos de performances, d’ateliers de poésie orale et de flyers d’événements artistiques, nous verrons que le fonnkèr est tiraillé entre plusieurs axes. Au niveau linguistique, dans son intention de valorisation de la langue créole réunionnaise, il oscille entre usage d’un lexique oublié et innovations stylistiques performatives (Carinos & Hammou, 2017). Dans sa dimension spatiale, il cherche une liminalité entre une écopoésie (Lorin, 2018) ancrée dans une nature omniprésente, et un besoin de visibilité, qui l’oriente vers des espaces performanciels urbains soutenus par les institutions dominantes (Da Lage, 2008), là où ses performances se pratiquent traditionnellement dans des ron fonnkèr, en milieu rural ou rurbain.
Entre héritage et émergence, le fonnkèr réunionnais illustre donc les tensions qui se jouent dans l’invention d’une poésie orale à la fois africaine et occidentale, et les transformations qui s’imposent à ses poètes du fait de la situation postcoloniale réunionnaise. Notre tentative de préciser les canons contemporains du fonnkèr illustre alors une vision du monde créole, qui use du mimétisme pour favoriser une émergence de la subalternité.
Nous verrons alors que, dans un contexte où les idéologies linguistiques des familles entrent souvent en conflit avec celles véhiculées par l’école, la poésie orale peut induire de nouveaux branchements linguistiques et ainsi favoriser le développement de compétences langagières.
Nous verrons tout d’abord que la relation diglossique entre le français et le créole réunionnais reproduite par l’école, impose une idéologie langagière assignant le créole à la subalternité. Ce phénomène, incorporé dès le plus jeune âge par les enfants réunionnais, entraîne souvent un développement non harmonieux (De Houwer, 2006) et aboutit à un monolinguisme au profit des détenteurs de la langue dominante (Canut, 2001).
Malgré cette situation sociolinguistique inconfortable, les ateliers de poésie orale, dès lors qu’ils proposent un apprentissage moins formel et une négociation (Bhabha, 2007) entre les langues, autorisent la traduction interculturelle et par là même le développement de compétences plurilingues. Parallèlement, cette pratique rend possible un récit de soi qui favorise l’émergence d’une langue propre, bien souvent empêchée par l’institution scolaire (Miller, Cho & Bracey, 2012).
Enfin, en rétablissant un continuum entre littératie et oralité, nous verrons que la poésie orale peut induire la réémergence de compétences narratives incorporées lors de la socialisation langagière (Duranti, Ochs & Schieffelin, 2012). La réactualisation de ces savoirs, souvent en lien avec un genre de discours familier, oriente alors les apprentissages vers le développement d’un style propre.