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'''Valet de Carreau''' (en {{lang-ru|Бубновый валет}}) est un mouvement pictural moscovite des années 1910-1913, dont les buts reposent sur l'interprétation des leçons de [[Paul Cézanne]] et du [[postimpressionnisme]] français, du [[fauvisme]] et de l'[[expressionnisme]] allemand du ''{{lang|de|[[Blaue Reiter]]}}'' (Le Cavalier bleu). Il fut, pendant deux ans, le mouvement phare de l'avant-garde russe. C'est aussi le nom de l'exposition organisée par les [[aveniristes]], [[Bourliouk]] et [[Larionov]], en 1910, et qui fut à l'origine du mouvement. Elle fut suivie d'autres expositions du même nom jusqu'en 1916.
'''Valet de Carreau''' (en {{lang-ru|Бубновый валет}}) est un mouvement pictural moscovite des années 1910-1913, dont les buts reposent sur l'interprétation des leçons de [[Paul Cézanne]] et du [[postimpressionnisme]] français, du [[fauvisme]] et de l'[[Expressionnisme allemand |expressionnisme]] allemand du ''{{lang|de|[[ Le Cavalier bleu |Blaue Reiter]]}}'' (Le Cavalier bleu). Il fut, pendant deux ans, le mouvement phare de l'avant-garde russe. C'est aussi le nom de l'exposition organisée par les [[aveniristes]], [[ David Bourliouk |Bourliouk]] et [[Michel Larionov|Larionov]], en 1910, et qui fut à l'origine du mouvement. Elle fut suivie d'autres expositions du même nom jusqu'en 1916.


== Histoire ==
== Histoire ==
Le nom de ''Valet de Carreau'' est trouvé par Larionov. Il passait l'été de 1909 dans la famille des frères Bourliouk, à Tchernianka en [[Ukraine]], leur séjour campagnard, à l'embouchure du [[Dniepr]]<ref group=Note>C'est le nom de cette région qui donne son nom à un autre groupe : [[Gileia]] fondé par les [[aveniristes]].</ref>. C'est au cours de cet été qu'ils commencent à élaborer un style moins apparenté à l'école française. Ensemble avec [[Aristarkh Lentoulov]], ils préparent aussi une exposition des [[aveniristes]] à laquelle ils donnent ce nom de '' Valet de Carreau''. Elle a lieu en décembre 1910-janvier 1911 et a un [[succès de scandale]]. D'abord parce que [[Ilia Répine]], en entrant dans la salle, crache pour exprimer son mépris à la russe et sort immédiatement. Les œuvres exposées, au lieu de visions extatiques, montrent le vulgaire et le laid. C'est le début du déclin de l'[[Âge d'argent (Russie)|Âge d'argent]]<ref>John E. Bowlt, Moscou et Saint-Pétersbourg, 1900-1920, Hazan 2008, {{p.|308}}, {{ISBN|978-2-7541-0303-9}}.</ref>. Ensuite, parce que le choix des 38 artistes présentant 250 œuvres représente une confrontation internationale qui allait encore plus loin que [[Venok]] (La Guirlande) dans sa volonté de créer l'art du {{s-|XX|e}} et de mettre fin à l'ancien. Des peintres français sont invités. [[Alexandre Mercereau]] est chargé de choisir les œuvres de peintres français représentés à l'exposition ([[Jean Metzinger]], [[Albert Gleizes]], [[Henri Le Fauconnier]], [[André Lhote]])<ref name="Camilla Gray">Camilla Gray, L'Avant-garde russe dans l'art moderne, 1863-1922 , Édition Thames et Hudson 2003 {{p.|122}}, {{ISBN|2-87811-218-0}}.</ref>. Des Italiens, des Russes de [[Munich]] (dont [[Kandinsky]], [[Alexej von Jawlensky]]) et une pléiade de Russes dont le cœur était quatre étudiants du Collège de Moscou renvoyés pour « gauchisme » : [[Piotr Kontchalovski]], [[Aristarkh Lentoulov]], [[Robert Falk]] et [[Ilia Machkov]]<ref name="Camilla Gray" />{{,}}<ref>Valentine Marcadé, Le Renouveau de l'art pictural russe, Édition l'Âge d'homme, Lausanne, 1971 {{p.|204}}.</ref>. [[Malevitch]] expose trois tableaux<ref group=Note>Deux sont connus '' Fruits '' et '' Servantes avec des fleurs ''. V. Jean-Claude Marcadé {{Opcit}}, {{p.|66}}.</ref>. Il participe également aux expositions qui suivent, un peu en guise de protestation, suite à une querelle avec Larionov.
Le nom de ''Valet de Carreau'' est trouvé par [[Michel Larionov]]. Il passait l'été de 1909 dans la famille des frères Bourliouk, à [[Tchernianka]] en [[Ukraine]], leur séjour campagnard, à l'embouchure du [[Dniepr]]<ref group=Note>Cette région donne son nom à un autre groupe : [[Gileia]] fondé par les [[aveniristes]].</ref>. C'est au cours de cet été qu'ils commencent à élaborer un style moins apparenté à l'école française. Ensemble, avec [[Aristarkh Lentoulov]], ils préparent aussi une exposition des [[aveniristes]] à laquelle ils donnent le nom de '' Valet de Carreau''. Elle a lieu en {{date-|décembre 1910}}-{{date-|janvier 1911}} et a un [[succès de scandale]]. D'abord parce qu'[[Ilia Répine]], en entrant dans la salle, crache pour exprimer son mépris à la russe et sort immédiatement. Les œuvres exposées, au lieu de visions extatiques, montrent le vulgaire et le laid. C'est le début du déclin de l'[[Âge d'argent (Russie)|Âge d'argent]]<ref>[[John Ellis Bowlt]], ''Moscou et Saint-Pétersbourg, 1900-1920'', Hazan, 2008, {{p.|308}}, {{ISBN|978-2-7541-0303-9}}.</ref>. Ensuite, parce que le choix des 38 artistes présentant 250 œuvres représente une confrontation internationale qui allait encore plus loin que [[Venok]] (La Guirlande) dans sa volonté de créer l'art du {{s-|XX|e}} et de mettre fin à l'ancien. Des peintres français sont invités. [[Alexandre Mercereau]] est chargé de choisir les œuvres de peintres français représentés à l'exposition ([[Jean Metzinger]], [[Albert Gleizes]], [[Henri Le Fauconnier]], [[André Lhote]])<ref name="Camilla Gray">[[Camilla Gray]], ''L'Avant-garde russe dans l'art moderne, 1863-1922'', Édition Thames et Hudson, 2003, {{p.|122}}, {{ISBN|2-87811-218-0}}.</ref>. Des Italiens, des Russes de [[Munich]] (dont [[Kandinsky]] et [[Alexej von Jawlensky]]) et une pléiade de Russes dont le cœur étaient des étudiants du Collège de Moscou renvoyés pour « gauchisme » : [[Piotr Kontchalovski]], et son élève [[Vladimir Boberman]]<ref>Ingolf Scola, '' Voldemar Boberman (1897-1987), un peintre dans les turbulences du XXe siècle'', Société des Écrivains, 2015, 336.p.</ref>, [[Aristarkh Lentoulov]], [[Robert Falk]] et [[Ilia Machkov]]<ref name="Camilla Gray" />{{,}}<ref>[[Valentine Marcadé]], ''Le Renouveau de l'art pictural russe'', Édition l'Âge d'homme, Lausanne, 1971, {{p.|204}}.</ref>. [[Malevitch]] expose trois tableaux<ref group=Note>Deux sont connus '' Fruits '' et '' Servantes avec des fleurs''. Voir [[Jean-Claude Marcadé]] {{Opcit}}, {{p.|66}}.</ref>. Il participe également aux expositions qui suivent, un peu en guise de protestation, à la suite d'une querelle avec Larionov.
Après cette période 1910-1913, et jusqu'en 1917, le Valet de Carreau accepte des peintres de courants [[cubo-futurisme|cubo-futuriste]]s les plus extrêmes (Malevitch, Morgounov, Lioubov Popova, A. Exter) puis des [[suprématisme|suprématistes]] (à l'exposition de 1916, Malevitch expose cinquante-neuf toiles). Le groupe publie également des œuvres concernant la théorie de l'art.
[[Fichier:Pyotr Konchalovsky cassis-the-view-from-the-window-1913.jpg|vignette|left|Piotr Konchalovski, ''Cassis vue de la fenêtre'', 1913.]]


Après cette période 1910-1913, et jusqu'en 1917, le Valet de Carreau accepte des peintres de courants [[cubo-futurisme|cubo-futuristes]] les plus extrêmes (Malevitch, Morgounov, Lioubov Popova, A. Exter) puis des [[suprématisme|suprématistes]] (à l'exposition de 1916, Malevitch expose cinquante-neuf toiles). Le groupe publie également des œuvres concernant la théorie de l'art.
[[Georges Braque|Braque]] et [[Pablo Picasso|Picasso]] ont participé plusieurs fois aux expositions du ''Valet de Carreau'' en Russie<ref name="ReferenceA">Jean-Claude Marcadé, L'avant-garde russe, Flammarion 2007 {{p.|64}}, {{ISBN|978-2-0812-0786-8}}.</ref>
[[Fichier:Pyotr Konchalovsky cassis-the-view-from-the-window-1913.jpg |vignette |left| [[Piotr Kontchalovski]], ''Cassis vue de la fenêtre'', 1913.]]
qui suivirent la première de 1909 et qui se poursuivent jusqu'en 1916. Selon Jean-Claude Marcadé le groupe a fait partie de l'avant-garde russe entre 1910 et 1913, le temps de quatre expositions. Pourtant, [[Marie Laurencin]], qui a rompu avec eux dès novembre [[1912]], y expose elle aussi en 1913.

[[Georges Braque|Braque]] et [[Pablo Picasso|Picasso]] ont participé plusieurs fois aux expositions du ''Valet de Carreau'' en Russie<ref name="ReferenceA">[[Jean-Claude Marcadé]], ''L'avant-garde russe'', Flammarion 2007 {{p.|64}}, {{ISBN|978-2-0812-0786-8}}.</ref>
qui suivirent la première de 1909 et qui se poursuivent jusqu'en 1916. Selon [[Jean-Claude Marcadé]] le groupe a fait partie de l'avant-garde russe entre 1910 et 1913, le temps de quatre expositions. Pourtant, [[Marie Laurencin]], qui a rompu avec eux dès novembre [[1912]], y expose elle aussi en 1913.
Ses représentants les plus célèbres sont entre autres [[Alexandra Exter]], le couple [[Michel Larionov]] et [[Nathalie Gontcharova]], [[Piotr Kontchalovski]], [[Aristarkh Lentoulov]], [[Robert Falk]]. Toutefois, [[Michel Larionov]] et [[Nathalie Gontcharova]] abandonnent rapidement ce mouvement pour créer celui de la [[Queue d'Âne (groupe d'artistes)|Queue d'Âne]] dès 1911.
Ses représentants les plus célèbres sont entre autres [[Alexandra Exter]], le couple [[Michel Larionov]] et [[Nathalie Gontcharoff]], [[Piotr Kontchalovski]], [[Aristarkh Lentoulov]], [[Robert Falk]]. Toutefois, Michel Larionov et Nathalie Gontcharoff abandonnent rapidement ce mouvement pour créer celui de la [[Queue d'Âne (groupe d'artistes)|Queue d'Âne]] dès 1911.
Dès le début de l'organisation du mouvement du Valet de Carreau il y eut une lutte de pouvoir entre Larionov et les « maîtres du cézanisme russe » qu'étaient [[Ilia Machkov]], [[Aristarkh Lentoulov]], [[Piotr Kontchalovski]]. Ces derniers, marqués au départ par le [[loubok]], se sont vite laissés dominer par la « peinture civilisée » des ateliers et des académies devenant petit à petit un « académisme d'avant garde » comme le nomme Jean-Claude Marcadé<ref name="ReferenceA"/>. Larionov et Gontcharova refusaient de collaborer plus longtemps avec ces artistes du groupe lié aux Bourliouk. Ils considèrent rapidement que les artistes du groupe Valet de Carreau piétinent et copient aveuglément Cézanne sans apporter d'idée nouvelle dans l'art<ref name="ReferenceA"/>. Mis à part les Bourliouk, les acteurs cézanistes du Valet de Carreau devinrent vite des « peintres de salon »
Dès le début de l'organisation du mouvement du Valet de Carreau il y eut une lutte de pouvoir entre Larionov et les « maîtres du cézanisme russe » qu'étaient [[Ilia Machkov]], [[Aristarkh Lentoulov]], [[Piotr Kontchalovski]]. Ces derniers, marqués au départ par le [[loubok]], se sont vite laissés dominer par la « peinture civilisée » des ateliers et des académies devenant petit à petit un « académisme d'avant garde » comme le nomme [[Jean-Claude Marcadé]]<ref name="ReferenceA"/>. Larionov et Gontcharoff refusaient de collaborer plus longtemps avec ces artistes du groupe lié aux Bourliouk. Ils considèrent rapidement que les artistes du groupe Valet de Carreau piétinent et copient aveuglément Cézanne sans apporter d'idée nouvelle dans l'art<ref name="ReferenceA"/>. Mis à part les Bourliouk, les acteurs cézanistes du Valet de Carreau devinrent vite des « peintres de salon »
qui ne faisaient que répéter les mêmes refrains<ref name="ReferenceA"/>.
qui ne faisaient que répéter les mêmes refrains<ref name="ReferenceA"/>.


== Œuvres exposées ==
== Œuvres exposées ==
Ce sont des natures mortes ou ici des portraits, des sujets extrêmement simples et insignifiant de manière à éviter l'anecdotique et le pittoresque. Ce sont des recherches pour leurs expériences abstraites dans la composition formelle et la couleur<ref>Camilla Gray, {{Opcit}}, {{p.|126}}.</ref>.
Ce sont des natures mortes ou ici des portraits, des sujets extrêmement simples et insignifiants de manière à éviter l'anecdotique et le pittoresque. Ce sont des recherches pour leurs expériences abstraites dans la composition formelle et la couleur<ref>[[Camilla Gray]], {{Opcit}}, {{p.|126}}.</ref>.


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File:Falk Mikhad Refatov 1915.jpg|Robert Falk : Mikhad Refatov 1915
File:Falk Mikhad Refatov 1915.jpg| [[Robert Falk]] : ''Mikhad Refatov'', 1915
File:Mashkov Portrait-of-a-lady-in-a-chair-1915.jpg| Ilia Mashkov : Portrait d'une femme sur une chaise-1915
File:Mashkov Portrait-of-a-lady-in-a-chair-1915.jpg| [[Ilia Machkov]] : ''Portrait d'une femme sur une chaise'', 1915
File:George Yakulov by P.Konchalovsky (1910, GTG).jpg|George Iakulov par P. Konchalovski (1910, GTG)
File:George Yakulov by P.Konchalovsky (1910, GTG).jpg|[[Gueorgui Iakoulov]] par [[Piotr Kontchalovski]] (1910, GTG)
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Le ''portrait de Georges Iakoulov'' est une des œuvres les plus significatives de l'esthétique du groupe à cette époque. L'exotisme orientaliste qui émane du décor et du personnage à la limite de la caricature et proche du primitivisme<ref>[[Jean-Claude Marcadé]], {{Opcit}}, {{p.|61}} et {{p.|62}}.</ref>.
Le ''portrait de Gueorgui Iakoulov'' est une des œuvres les plus significatives de l'esthétique du groupe à cette époque. L'exotisme orientaliste qui émane du décor et du personnage à la limite de la caricature et proche du primitivisme<ref>[[Jean-Claude Marcadé]], {{Opcit}}, {{p.|61}} et {{p.|62}}.</ref>.


== Expositions ==
== Expositions ==
* Les peintres russes de Valet de Carreau, entre Cézanne et l'[[avant-garde (art)|avant-garde]], Salle d'expositions de la [[Principauté de Monaco]], 2004.
* Les peintres russes de Valet de Carreau, entre Cézanne et l'[[avant-garde (art)|avant-garde]], Salle d'expositions de la [[Monaco|principauté de Monaco]], 2004.


== Bibliographie ==
== Bibliographie ==
*Catalogue de cette exposition : Palace Éditions Europe {{ISBN|978-3-935298-83-4}}
* Catalogue de cette exposition : Palace Éditions Europe {{ISBN|978-3-935298-83-4}}
*Jean-Claude Marcadé, L'avant-garde russe 1907- 1927, Flammarion 2007. {{ISBN|978-2-0812-0786-8}}.
* [[Jean-Claude Marcadé]], ''L'avant-garde russe 1907-1927'', Flammarion, 2007. {{ISBN|978-2-0812-0786-8}}.


==Note==
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== Références ==
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[[Catégorie:Mouvement artistique]]
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[[Catégorie:Avant-garde russe]]
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Dernière version du 1 avril 2024 à 02:05

Piotr Kontchalovski : Natacha sur une chaise (1910).

Valet de Carreau (en russe : Бубновый валет) est un mouvement pictural moscovite des années 1910-1913, dont les buts reposent sur l'interprétation des leçons de Paul Cézanne et du postimpressionnisme français, du fauvisme et de l'expressionnisme allemand du Blaue Reiter (Le Cavalier bleu). Il fut, pendant deux ans, le mouvement phare de l'avant-garde russe. C'est aussi le nom de l'exposition organisée par les aveniristes, Bourliouk et Larionov, en 1910, et qui fut à l'origine du mouvement. Elle fut suivie d'autres expositions du même nom jusqu'en 1916.

Le nom de Valet de Carreau est trouvé par Michel Larionov. Il passait l'été de 1909 dans la famille des frères Bourliouk, à Tchernianka en Ukraine, leur séjour campagnard, à l'embouchure du Dniepr[Note 1]. C'est au cours de cet été qu'ils commencent à élaborer un style moins apparenté à l'école française. Ensemble, avec Aristarkh Lentoulov, ils préparent aussi une exposition des aveniristes à laquelle ils donnent le nom de Valet de Carreau. Elle a lieu en - et a un succès de scandale. D'abord parce qu'Ilia Répine, en entrant dans la salle, crache pour exprimer son mépris à la russe et sort immédiatement. Les œuvres exposées, au lieu de visions extatiques, montrent le vulgaire et le laid. C'est le début du déclin de l'Âge d'argent[1]. Ensuite, parce que le choix des 38 artistes présentant 250 œuvres représente une confrontation internationale qui allait encore plus loin que Venok (La Guirlande) dans sa volonté de créer l'art du XXe siècle et de mettre fin à l'ancien. Des peintres français sont invités. Alexandre Mercereau est chargé de choisir les œuvres de peintres français représentés à l'exposition (Jean Metzinger, Albert Gleizes, Henri Le Fauconnier, André Lhote)[2]. Des Italiens, des Russes de Munich (dont Kandinsky et Alexej von Jawlensky) et une pléiade de Russes dont le cœur étaient des étudiants du Collège de Moscou renvoyés pour « gauchisme » : Piotr Kontchalovski, et son élève Vladimir Boberman[3], Aristarkh Lentoulov, Robert Falk et Ilia Machkov[2],[4]. Malevitch expose trois tableaux[Note 2]. Il participe également aux expositions qui suivent, un peu en guise de protestation, à la suite d'une querelle avec Larionov.

Après cette période 1910-1913, et jusqu'en 1917, le Valet de Carreau accepte des peintres de courants cubo-futuristes les plus extrêmes (Malevitch, Morgounov, Lioubov Popova, A. Exter) puis des suprématistes (à l'exposition de 1916, Malevitch expose cinquante-neuf toiles). Le groupe publie également des œuvres concernant la théorie de l'art.

Piotr Kontchalovski, Cassis vue de la fenêtre, 1913.

Braque et Picasso ont participé plusieurs fois aux expositions du Valet de Carreau en Russie[5] qui suivirent la première de 1909 et qui se poursuivent jusqu'en 1916. Selon Jean-Claude Marcadé le groupe a fait partie de l'avant-garde russe entre 1910 et 1913, le temps de quatre expositions. Pourtant, Marie Laurencin, qui a rompu avec eux dès novembre 1912, y expose elle aussi en 1913.

Ses représentants les plus célèbres sont entre autres Alexandra Exter, le couple Michel Larionov et Nathalie Gontcharoff, Piotr Kontchalovski, Aristarkh Lentoulov, Robert Falk. Toutefois, Michel Larionov et Nathalie Gontcharoff abandonnent rapidement ce mouvement pour créer celui de la Queue d'Âne dès 1911. Dès le début de l'organisation du mouvement du Valet de Carreau il y eut une lutte de pouvoir entre Larionov et les « maîtres du cézanisme russe » qu'étaient Ilia Machkov, Aristarkh Lentoulov, Piotr Kontchalovski. Ces derniers, marqués au départ par le loubok, se sont vite laissés dominer par la « peinture civilisée » des ateliers et des académies devenant petit à petit un « académisme d'avant garde » comme le nomme Jean-Claude Marcadé[5]. Larionov et Gontcharoff refusaient de collaborer plus longtemps avec ces artistes du groupe lié aux Bourliouk. Ils considèrent rapidement que les artistes du groupe Valet de Carreau piétinent et copient aveuglément Cézanne sans apporter d'idée nouvelle dans l'art[5]. Mis à part les Bourliouk, les acteurs cézanistes du Valet de Carreau devinrent vite des « peintres de salon » qui ne faisaient que répéter les mêmes refrains[5].

Œuvres exposées

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Ce sont des natures mortes ou ici des portraits, des sujets extrêmement simples et insignifiants de manière à éviter l'anecdotique et le pittoresque. Ce sont des recherches pour leurs expériences abstraites dans la composition formelle et la couleur[6].

Le portrait de Gueorgui Iakoulov est une des œuvres les plus significatives de l'esthétique du groupe à cette époque. L'exotisme orientaliste qui émane du décor et du personnage à la limite de la caricature et proche du primitivisme[7].

Expositions

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Bibliographie

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  1. Cette région donne son nom à un autre groupe : Gileia fondé par les aveniristes.
  2. Deux sont connus Fruits et Servantes avec des fleurs. Voir Jean-Claude Marcadé op. cit., p. 66.

Références

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  1. John Ellis Bowlt, Moscou et Saint-Pétersbourg, 1900-1920, Hazan, 2008, p. 308, (ISBN 978-2-7541-0303-9).
  2. a et b Camilla Gray, L'Avant-garde russe dans l'art moderne, 1863-1922, Édition Thames et Hudson, 2003, p. 122, (ISBN 2-87811-218-0).
  3. Ingolf Scola, Voldemar Boberman (1897-1987), un peintre dans les turbulences du XXe siècle, Société des Écrivains, 2015, 336.p.
  4. Valentine Marcadé, Le Renouveau de l'art pictural russe, Édition l'Âge d'homme, Lausanne, 1971, p. 204.
  5. a b c et d Jean-Claude Marcadé, L'avant-garde russe, Flammarion 2007 p. 64, (ISBN 978-2-0812-0786-8).
  6. Camilla Gray, op. cit., p. 126.
  7. Jean-Claude Marcadé, op. cit., p. 61 et p. 62.