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« Sacas de presos » : différence entre les versions

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[[Fichier:San cristobal corredores.jpg|thumb|La plupart desdites « sacas » finissent en [[Exécution par arme à feu|pelotons d'exécution]] massifs. Photo du {{Lien|fr=Fort de San Cristóbal (Navarre)|lang=es|trad=Fuerte de San Cristóbal (Navarra)|texte=Fort de San Cristóbal}}, en [[Communauté forale de Navarre|Navarre]], une prison improvisée pendant le conflit.]]

Les '''''{{Lang|es|sacas de presos}}''''' (littéralement « sortie de prisonniers » en français), ou '''''{{Lang|es|sacas}}''''', selon l'usage familier de l'époque, furent des situations de violence ayant eu lieu dans les [[prison]]s de différents lieux d'[[Espagne]], pendant la [[Guerre d'Espagne|Guerre civile espagnole]], qui consistèrent à sortir massivement et systématiquement des prisonniers des prisons dans le but officiel de les libérer, mais pour finalement les [[Exécution par arme à feu|exécuter]] ou les transférer.
Les '''''{{Lang|es|sacas de presos}}''''' (littéralement « sortie de prisonniers » en français), ou '''''{{Lang|es|sacas}}''''' ('''''saca''''' au singulier), selon l'usage familier de l'époque, furent des situations de violence ayant eu lieu dans les [[prison]]s de différents lieux d'[[Espagne]], pendant la [[Guerre d'Espagne|Guerre civile espagnole]], qui consistèrent à sortir massivement et systématiquement des prisonniers des prisons dans le but officiel de les libérer, mais pour finalement les [[Exécution extrajudiciaire|exécuter]] ou les transférer.


Ces actes eurent lieu principalement pendant les six premiers mois de la guerre (de juillet à décembre [[1936]]) et furent commis par les deux camps, pour des motifs politiques, militaires et religieux. Cependant, seuls les actes commis par les [[républicains espagnols|républicains]] firent l'objet d'une enquête et de procès officiels, avec la ''{{Lien|Causa General|lang=es}}'' impulsée par les [[franquistes]] en [[1940]], un an après qu'ils gagnèrent la guerre civile.
Ces actes eurent lieu principalement pendant les six premiers mois de la guerre (de juillet à décembre [[1936]]) et furent commis par les deux camps, pour des motifs politiques, militaires et religieux. Cependant, seuls les actes commis par les [[républicains espagnols|républicains]] firent l'objet d'une enquête et de procès officiels, avec la ''{{Lien|Causa General|lang=es}}'' impulsée par les [[franquistes]] en [[1940]], un an après qu'ils gagnèrent la guerre civile.


== Contexte et définition ==
== Contexte et définition ==
À partir du {{Date|18|juillet|1935}}, dans l'Espagne dominée par le [[Front populaire (Espagne)|Front populaire]] et suite à l'augmentation importante de prisonniers, le gouvernement habilite de nouvelles prisons dans des édifices publics ou religieux<ref name="causageneral7">{{Lien web|langue=es|url=http://www.causageneral.org/07.htm|titre=Capítulo VII : Cárceles y asesinatos colectivos de presos|site=causageneral.org|auteur=|année=|consulté le=05/09/2013}}</ref>, tels que des terrains de [[cesta punta]]<ref name="represionroja">{{Lien web|langue=es|url=http://www.represionrioja.com/Unidad%20didactica/LECTURA.pdf|titre=Las Sacas|site=represionrioja.com|auteur=Patricio Escobal|année=|consulté le=02/09/2013}}{{pdf}}</ref>, des châteaux<ref>{{Harvsp|Alcalá|2007|texte=Las checas del terror|p=154}}</ref> ou des forts<ref name="ezkaba">{{Lien web|langue=es|url=http://www.losfugadosdeezkaba1938.com/el-cuarto-fugado/los-presos-en-el-fuerte-de-ezkaba/las-sacas-de-presos/|titre=Las sacas de presos|site=losfugadosdeezkaba1938.com|auteur=|année=|consulté le=02/09/2013}}</ref>.
À partir du {{date|18 juillet 1935}}, dans l'Espagne dominée par le [[Front populaire (Espagne)|Front populaire]] et à la suite de l'augmentation importante de prisonniers, le gouvernement habilite de nouvelles prisons dans des édifices publics ou religieux<ref name="causageneral7">{{Lien web|langue=es|url=http://www.causageneral.org/07.htm|titre=Capítulo VII : Cárceles y asesinatos colectivos de presos|site=causageneral.org|auteur=|année=|consulté le=05 septembre 2013}}.</ref>, tels que des terrains de [[cesta punta]]<ref name="represionroja">{{Lien web|langue=es|url=http://www.represionrioja.com/Unidad%20didactica/LECTURA.pdf|titre=Las Sacas|site=represionrioja.com|auteur=Patricio Escobal|année=|consulté le=02 septembre 2013|brisé le = 2023-12-02}}{{pdf}}.</ref>, des châteaux{{sfn|Alcalá|2007|texte=Las checas del terror|p=154}} ou des forts<ref name="ezkaba">{{Lien web|langue=es|url=http://www.losfugadosdeezkaba1938.com/el-cuarto-fugado/los-presos-en-el-fuerte-de-ezkaba/las-sacas-de-presos/|titre=Las sacas de presos|site=losfugadosdeezkaba1938.com|auteur=|année=|consulté le=02 septembre 2013|brisé le = 2023-12-02}}.</ref>.


Avec le consentement de certains représentants politiques du Front populaire, mais sans que le gouvernement soit officiellement au courant, l'autorité des fonctionnaires du Corps des prisons est annulée, et les règlements pénitentiaires ne sont plus respectés. Ces fonctionnaires sont remplacés — voire parfois maltraités ou fusillés — par des [[milice|miliciens]] armés qui suppriment la plupart des droits des détenus et les maltraitent psychologiquement et physiquement<ref>{{Harvsp|Alcalá|2007|texte=Las checas del terror|p=138}}</ref>.
Avec le consentement de certains représentants politiques du Front populaire, mais sans que le gouvernement soit officiellement au courant, l'autorité des fonctionnaires du Corps des prisons est annulée, et les règlements pénitentiaires ne sont plus respectés. Ces fonctionnaires sont remplacés — voire parfois maltraités ou fusillés — par des [[milice|miliciens]] armés qui suppriment la plupart des droits des détenus et les maltraitent psychologiquement et physiquement{{sfn|Alcalá|2007|texte=Las checas del terror|p=138}}.
La {{Lien|fr=Dirección General de Seguridad|lang=es|trad=Dirección General de Seguridad|texte=Direction Générale de Sécurité}} (DGS) ayant attribué à ces entités toutes les facultés d'intervention sur les prisonniers, elles procède à des premières ''{{Lang|es|sacas}}'' individuelles, en déclarant officiellement des détenus libres et à disposition de la DGS, afin de les faire sortir des prisons et les assassiner, une fois dehors, ou de les livrer au Comité d'Investigation et de Vigilance, c'est-à-dire, aux agents des ''{{Lang|es|checas}}''<ref name="causageneral7"/>.


La ''[[Dirección General de Seguridad]]'' (DGS) ayant attribué à ces entités toutes les facultés d'intervention sur les prisonniers, elles procède à des premières ''{{Lang|es|sacas}}'' individuelles, en déclarant officiellement des détenus libres et à disposition de la DGS, afin de les faire sortir des prisons et les assassiner, une fois dehors, ou de les livrer au Comité d'Investigation et de Vigilance, c'est-à-dire, aux agents des [[Checa (Espagne)|''{{Lang|es|checas}}'']]<ref name="causageneral7"/>.
À partir de juillet [[1936]] commence la Guerre civile espagnole, et avec elle une féroce opposition entre les troupes, agents gouvernementaux et civils (milices) [[franquiste]]s, sous les ordres de [[Franco]], et [[républicains espagnols|républicains]] du gouvernement [[Social-démocratie|socialiste]] du [[Marxisme|marxiste]] [[Francisco Largo Caballero]].
[[Fichier:Círculo de Bellas Artes (Madrid) 05.jpg|thumb|Édifice du [[Círculo de Bellas Artes (Madrid)]], dont le sous-sol hébergeait de nombreuses ''{{Lang|es|checas}}'', appelées alors ''{{Lang|es|Checas de Bellas Artes}}'', et qui étaient en réalité un organisme officiel appelé Comité Provincial d'Investigation Publique.]]
En marge des différents faits de guerre<ref name="cervera">{{Harvsp|Cervera Gil|1998|texte=Madrid en guerra : la ciudad clandestina, 1936-1939|p=88-110}}</ref>, les deux camps organisent des ''{{Lang|es|sacas de presos}}'', des ''{{Lang|es|paseos}}'' ou des ''{{Lang|es|checas}}'' (qui consistent, de la part des républicains, à arrêter, interroger, juger sommairement, puis exécuter tout suspect de sympathiser avec le camp adverse<ref>{{Harvsp|Alcalá|2007|texte=Las checas del terror|p=204-206}}</ref>{{,}}<ref>{{Harvsp|Hugh|1976|texte=La Guerra Civil Española|p=301}}</ref>) pour supprimer un maximum d'opposants en peu de temps, sur des critères globaux, militaires, religieux (selon l'[[Église catholique]], près de {{nombre|10000}} religieux espagnols auraient été assassinés entre 1936 et 1937 — ils sont appelés les martyres du {{s|XX|e}}, et un millier d'entre eux a été béatifié, tandis que 11 ont été sanctifiés<ref>{{Lien web|langue=es|url=http://www.ideal.es/jaen/20130328/local/jaen/seis-religiosos-jaen-asesinados-201303281539.html|titre=Seis religiosos de Jaén asesinados en la Guerra Civil serán beatificados|site=ideal.es|auteur=|année=2013|consulté le=05/09/2013}}</ref>), de statut social, etc.<ref>{{Harvsp|Casanova|Juliá Díaz|2005|texte=Víctimas de la guerra civil|p=138}}</ref>


À partir de juillet [[1936]] commence la guerre civile espagnole, et avec elle une féroce opposition entre les troupes, agents gouvernementaux et civils (milices) [[franquiste]]s, sous les ordres de [[Francisco Franco|Franco]], et [[républicains espagnols|républicains]] du gouvernement [[Social-démocratie|socialiste]] du [[Marxisme|marxiste]] [[Francisco Largo Caballero]].
Les ''{{Lang|es|sacas}}'' en particulier, sont parmi les faits de guerre les plus controversés et polémiques de la Guerre civile. Ils furent réalisés par les deux camps<ref name="esperanzapersecucion">{{ouvrage|langue=es|prénom1=Santiago|nom1=Vega Sombría|titre=De la esperanza a la persecución : la represión franquista en la provincia de Segovia|sous-titre=|éditeur=Editorial Crítica|volume=|lieu=|année=2005|pages totales=584|passage=99|isbn=978-84-8432-612-0|lire en ligne=http://books.google.fr/books?id=cDSFWUWEDX0C&printsec=frontcover&dq=De+la+esperanza+a+la+persecuci%C3%B3n+:+la+represi%C3%B3n+franquista+en+la+provincia+de+Segovia&hl=fr&sa=X&ei=6oAoUpjpNLKnsQSnioCwCw&ved=0CDQQ6AEwAA#v=onepage&q=De%20la%20esperanza%20a%20la%20persecuci%C3%B3n%20%3A%20la%20represi%C3%B3n%20franquista%20en%20la%20provincia%20de%20Segovia&f=false}}</ref>{{,}}<ref name="mujeresencarceladas">{{ouvrage|langue=es|prénom1=Fernando|nom1=Hernández Holgado|titre=Mujeres encarceladas : la prisión de Ventas, de la República al franquismo|sous-titre=|éditeur=Marcial Pons Ediciones de Historia|volume=|lieu=|année=2003|pages totales=|passage=|isbn=978-84-95379-64-1|lire en ligne=http://books.google.fr/books?id=ZE4_Z3IY3c8C&printsec=frontcover&dq=Mujeres+encarceladas+:+la+prisi%C3%B3n+de+Ventas,+de+la+Rep%C3%BAblica+al+franquismo&hl=fr&sa=X&ei=XYIoUqfnFczWsAS8ioCQCg&ved=0CDQQ6AEwAA#v=onepage&q=Mujeres%20encarceladas%20%3A%20la%20prisi%C3%B3n%20de%20Ventas%2C%20de%20la%20Rep%C3%BAblica%20al%20franquismo&f=false}}</ref>, principalement à la fin de l'année [[1936]].


[[Fichier:Círculo de Bellas Artes (Madrid) 05.jpg|thumb|Édifice du [[Círculo de Bellas Artes (Madrid)]], dont le sous-sol hébergeait de nombreuses ''{{Lang|es|checas}}'', appelées alors ''{{Lang|es|Checas de Bellas Artes}}'', et qui étaient en réalité un organisme officiel appelé Comité provincial d'investigation publique.]]
La définition de ''{{Lang|es|saca}}'' peut provenir du verbe ''{{Lang|es|sacar}}'' (« sortir ») ou du substantif ''{{Lang|es|saco}}'' (« un paquet », dans le sens de « grande quantité »). ''{{Lang|es|presos}}'' signifiant « prisonniers », il s'agissait donc de « sorties de prisonniers » ou de « paquets de prisonniers », qui étaient donc sortis des prisons pour être emmenés à leur lieu d'exécution.

En marge des différents faits de guerre<ref name="cervera">{{Harvsp|Cervera Gil|1998|texte=Madrid en guerra : la ciudad clandestina, 1936-1939|p=88-110}}</ref>, les deux camps organisent des ''{{Lang|es|sacas de presos}}'', des ''{{Lang|es|{{Lien|fr=Paseo (Guerre d'Espagne)|trad=Paseo (fusilamiento)|lang=es|texte=paseos}}}}'' ou des ''{{Lang|es|[[Checa (guerre d'Espagne)|checas]]}}'' (qui consistent, de la part des républicains, à arrêter, interroger, juger sommairement, puis exécuter tout suspect de sympathiser avec le camp adverse{{sfn|Alcalá|2007|texte=Las checas del terror|p=204-206}}{{,}}{{sfn|Hugh|1976|texte=La Guerra Civil Española|p=301}}) pour supprimer un maximum d'opposants en peu de temps, sur des critères globaux, militaires, religieux (selon l'[[Église catholique]], près de {{nombre|10000}} religieux espagnols auraient été assassinés entre 1936 et 1937 — ils sont appelés les martyrs du {{s|XX}}, et un millier d'entre eux a été béatifié, tandis que 11 ont été sanctifiés<ref>{{Lien web|langue=es|url=http://www.ideal.es/jaen/20130328/local/jaen/seis-religiosos-jaen-asesinados-201303281539.html|titre=Seis religiosos de Jaén asesinados en la Guerra Civil serán beatificados|site=ideal.es|auteur=|année=2013|consulté le=05 septembre 2013}}.</ref>), de statut social, etc.{{sfn|Casanova|Juliá Díaz|2005|texte=Víctimas de la guerra civil|p=138}}

Les ''{{Lang|es|sacas}}'' en particulier, sont parmi les faits de guerre les plus controversés et polémiques de la guerre civile. Ils furent réalisés par les deux camps<ref name="esperanzapersecucion">{{Ouvrage|langue=es|prénom1=Santiago|nom1=Vega Sombría|titre=De la esperanza a la persecución : la represión franquista en la provincia de Segovia|éditeur=Editorial Crítica|année=2005|pages totales=584|passage=99|isbn=978-84-8432-612-0|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=cDSFWUWEDX0C&printsec=frontcover&dq=De+la+esperanza+a+la+persecuci%C3%B3n+%3A+la+represi%C3%B3n+franquista+en+la+provincia+de+Segovia}}</ref>{{,}}<ref name="mujeresencarceladas">{{Ouvrage|langue=es|prénom1=Fernando|nom1=Hernández Holgado|titre=Mujeres encarceladas : la prisión de Ventas, de la República al franquismo|éditeur=Marcial Pons Ediciones de Historia|année=2003|pages totales=369|isbn=978-84-95379-64-1|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=ZE4_Z3IY3c8C&printsec=frontcover&dq=Mujeres+encarceladas+%3A+la+prisi%C3%B3n+de+Ventas%2C+de+la+Rep%C3%BAblica+al+franquismo}}</ref>, principalement à la fin de l'année [[1936]].

La définition de ''{{Lang|es|saca}}'' peut provenir du verbe ''{{Lang|es|sacar}}'' (« sortir ») ou du substantif ''{{Lang|es|saco}}'' (« un paquet », dans le sens de « grande quantité »). ''{{Lang|es|presos}}'' signifiant « prisonniers », il s'agissait donc de « sorties de prisonniers » ou de « paquets de prisonniers », qui étaient donc sortis des prisons pour être emmenés à leur lieu d'exécution.


== Histoire ==
== Histoire ==


=== La ''Cárcel Modelo'' de Madrid ===
=== La ''Cárcel Modelo'' de Madrid ===
[[Madrid]] est dans le camp républicain, pendant le conflit, et donc sous la domination « rouge ».
[[Madrid]] est dans le camp républicain, pendant le conflit, et donc sous la domination « rouge ».
Plusieurs prisons sont le théâtre de violences gratuites envers les détenus et de ''{{Lang|es|sacas}}'', dont les plus célèbres sont la ''{{Lien|fr=Cárcel Modelo de Madrid|lang=es|trad=Cárcel Modelo de Madrid|texte=Cárcel Modelo}}'', la ''{{Lien|fr=Cárcel de Porlier|lang=es}}'' (ou « prison provinciale d'Hommes {{numéro|1}} »), la ''{{Lien|fr=Escuelas Pías de San Antón|lang=es|trad=Escuelas Pías de San Antón|texte=Cárcel de San Antón}}'' (ou « prison provinciale d'Hommes {{numéro|2}} »), la ''{{Lien|fr=Cárcel de mujeres de Ventas|lang=es|trad=Cárcel de mujeres de Ventas|texte=Cárcel de Ventas}}'' (ou « prison provinciale d'Hommes {{numéro|3}} »), la ''{{Lang|es|Cárcel de Duque de Sesto}}'' (ou « prison provinciale d'Hommes {{numéro|42}} ») et la ''{{Lang|es|Cárcel de Toreno}}''.
Plusieurs prisons sont le théâtre de violences gratuites envers les détenus et de ''{{Lang|es|sacas}}'', dont les plus célèbres sont la ''{{Lien|fr=Cárcel Modelo de Madrid|lang=es|trad=Cárcel Modelo de Madrid|texte=Cárcel Modelo}}'', la ''{{Lien|fr=Cárcel de Porlier|lang=es}}'' (ou « prison provinciale d'Hommes {{numéro|1}} »), la ''{{Lien|fr=Escuelas Pías de San Antón|lang=es|trad=Escuelas Pías de San Antón|texte=Cárcel de San Antón}}'' (ou « prison provinciale d'Hommes {{numéro|2}} »), la ''[[Prison pour femmes de Ventas|Cárcel de Ventas]]'' (ou « prison provinciale d'Hommes {{numéro|3}} »), la ''{{Lang|es|Cárcel de Duque de Sesto}}'' (ou « prison provinciale d'Hommes {{numéro|42}} ») et la ''{{Lang|es|Cárcel de Toreno}}''.


Alors que la Guerre civile vient de commencer et que le peuple vivait dans la terreur permanente, les madrilènes qui sont emmenés à la prison Modelo, prison officielle dans la province où siège le gouvernement du Front populaire, considère qu'il s'agit d'un privilège, étant donné qu'ils connaissent l'existence de prisons clandestines. Ils s'attendent à être traité avec respect et à être protégé par les autorités<ref>{{Harvsp|Alcalá|2007|texte=Las checas del terror|p=245}}</ref>.
Alors que la guerre civile vient de commencer et que le peuple vivait dans la terreur permanente, les Madrilènes qui sont emmenés à la prison Modelo, prison officielle dans la province où siège le gouvernement du Front populaire, considèrent qu'il s'agit d'un privilège, étant donné qu'ils connaissent l'existence de prisons clandestines. Ils s'attendent à être traités avec respect et à être protégés par les autorités{{sfn|Alcalá|2007|texte=Las checas del terror|p=245}}.


Mais les prisons sont désormais occupées par les miliciens (fondamentalement de la [[Confédération nationale du travail (Espagne)|CNT]]).
Mais les prisons sont désormais occupées par les miliciens (fondamentalement de la [[Confédération nationale du travail (Espagne)|CNT]]).
Le {{Date|22|août|1936}}, des hommes politiques et militaires qui y sont détenus, tels que [[Melquíades Álvarez]], leader du {{Lien|fr=Partido Republicano Liberal Demócrata|lang=es}}, républicain de droite ; {{Lien|fr=José María Albiñana Sanz|lang=es}}, chef du {{Lien|fr=Partido Nacionalista Español|lang=es}} d'extrême droite ; les ex-ministres de la République [[Manuel Rico]] et [[José Martínez de Velasco]] ; le [[Phalange espagnole|phalangiste]] et pilote du vol Madrid-Buenos Aires de l'avion « ''Plus Ultra'' » {{Lien|fr=Julio Ruiz de Alda|lang=es}} ; le général {{Lien|fr=Osvaldo Capaz Montes|lang=es}} (qui avait pris possession du territoire [[Ifni]]) ; le général {{Lien|fr=Rafael Villegas Montesinos|lang=es}} (qui a conspiré contre la Seconde république et était à la tête du soulèvement à Madrid) ; le capitaine de cavalerie {{Lien|fr=Fernando Primo de Rivera y Sáenz de Heredia|lang=es}} (fils du dictateur [[Miguel Primo de Rivera]] et frère du fondateur de la [[phalange espagnole]] [[José Antonio Primo de Rivera]])<ref name="joseantoniointimo">{{ouvrage|langue=es|prénom1=José Antonio|nom1=Primo de Rivera|titre=José Antonio íntimo : textos biográficos y epistolario|sous-titre=|éditeur=Ediciones del Movimiento|volume=|lieu=Madrid|année=1968|pages totales=641|passage=|isbn=|lire en ligne=}}</ref> ; le poète, avocat et homme politique conservateur [[José María Hinojosa]], son père et son frère ; Luis Altolaguirre (frère de [[Manuel Altolaguirre]]) ; et plus de 30 autres<ref>{{Harvsp|Hugh|1976|texte=La Guerra Civil Española|p=437-438}}</ref>, sont fusillés face au mur du cimetière de San Rafael par un groupe de miliciens de l'[[Armée populaire de la République espagnole]], qui ont auparavant pris possession de la prison comme représailles des bombardements sur les dépôts de la {{Lien|fr=CAMPSA|lang=es}} effectués par l'aviation franquiste<ref name="ruizgibert193">{{article|langue=es|prénom1=Rosa|nom1=Ruiz Gisbert|lien auteur1=|titre=José María Hinojosa, el gran olvidado|périodique=Isla de Arrariarán|lien périodique=|lieu=Malaga|éditeur=Asociación Cultural Isla de Arriarán|volume=|numéro=29|jour=|mois=|année=2007|pages=193|issn=1133-6293|url texte=http://dialnet.unirioja.es/descarga/articulo/3045501.pdf|consulté le=01/09/2013}}</ref>. Au total, les 22 et 23 août, 50 personnes sont assassinées.
Le {{date|22 août 1936}}, des hommes politiques et militaires qui y sont détenus, tels que [[Melquíades Álvarez (homme politique)|Melquíades Álvarez]], leader du [[Parti républicain libéral démocrate]], républicain de droite ; [[José María Albiñana|José María Albiñana Sanz]], chef du {{Lien|fr=Partido Nacionalista Español|lang=es}} d'extrême droite ; les ex-ministres de la République [[Manuel Rico]] et [[José Martínez de Velasco]] ; le [[Phalange espagnole|phalangiste]] et pilote du vol Madrid-Buenos Aires de l'avion « ''Plus Ultra'' » [[Julio Ruiz de Alda]] ; le général {{Lien|fr=Osvaldo Capaz Montes|lang=es}} (qui avait pris possession du territoire [[Ifni]]) ; le général {{Lien|fr=Rafael Villegas Montesinos|lang=es}} (qui a conspiré contre la Seconde république et était à la tête du soulèvement à Madrid) ; le capitaine de cavalerie [[Fernando Primo de Rivera y Sáenz de Heredia]] (fils du dictateur [[Miguel Primo de Rivera]] et frère du fondateur de la [[phalange espagnole]] [[José Antonio Primo de Rivera]])<ref name="joseantoniointimo">{{Ouvrage|langue=es|prénom1=José Antonio|nom1=Primo de Rivera|titre=José Antonio íntimo|sous-titre=textos biográficos y epistolario|lieu=Madrid|éditeur=Ediciones del Movimiento|année=1968|pages totales=641}}</ref> ; le poète, avocat et homme politique conservateur [[José María Hinojosa]], son père et son frère ; Luis Altolaguirre (frère de [[Manuel Altolaguirre]]) ; et plus de 30 autres{{sfn|Hugh|1976|texte=La Guerra Civil Española|p=437-438}}, sont fusillés face au mur du cimetière de San Rafael par un groupe de miliciens de l'[[Armée populaire de la République espagnole]], qui ont auparavant pris possession de la prison comme représailles des bombardements sur les dépôts de la [[CAMPSA]] effectués par l'aviation franquiste<ref name="ruizgibert193">{{article|langue=es|prénom1=Rosa|nom1=Ruiz Gisbert|lien auteur1=|titre=José María Hinojosa, el gran olvidado|périodique=Isla de Arrariarán|lien périodique=|lieu=Malaga|éditeur=Asociación Cultural Isla de Arriarán|volume=|numéro=29|jour=|mois=|année=2007|pages=193|issn=1133-6293|url texte=http://dialnet.unirioja.es/descarga/articulo/3045501.pdf|consulté le={{date-|1 septembre 2013}}}}</ref>. Au total, les 22 et 23 août, 50 personnes sont assassinées.


En apprenant les faits, le président [[Manuel Azaña]] est consterné et pense à démissionner<ref>{{Harvsp|Martínez Barrio|1983|texte=Memorias|p=375}}</ref>. Le gouvernement réagit en créant un « Comité de contrôle » des prisons, formé par des représentants de tous les partis et les entités syndicales du Front Populaire, et confie la garde intérieure du bâtiment aux « milices d'arrière-garde », qui remplaceront à terme les fonctionnaires du Corps des prisons — malheureusement, cette mesure facilite le contrôle des prisons par les milices, et donc les ''{{Lang|es|sacas}}'' qui auront lieu, notamment dans cette même prison, en octobre, novembre et décembre 1936. Par ailleurs, le gouvernement interdit la publication par la presse de toute mention aux assassinats, publiant au contraire une note évoquant un incendie provoqué par les détenus fascistes dans l'édifice qui a été étouffé rapidement grâce aux milices<ref>{{Harvsp|Alcalá|2007|texte=Las checas del terror|p=247}}</ref>.
En apprenant les faits, le président [[Manuel Azaña]] est consterné et pense à démissionner{{sfn|Martínez Barrio|1983|texte=Memorias|p=375}}. Le gouvernement réagit en créant un « Comité de contrôle » des prisons, formé par des représentants de tous les partis et les entités syndicales du Front Populaire, et confie la garde intérieure du bâtiment aux « milices d'arrière-garde », qui remplaceront à terme les fonctionnaires du Corps des prisons — malheureusement, cette mesure facilite le contrôle des prisons par les milices, et donc les ''{{Lang|es|sacas}}'' qui auront lieu, notamment dans cette même prison, en octobre, novembre et décembre 1936.

Parallèlement, le gouvernement crée les « Tribunaux Pupulaires »<ref>{{Harvsp|Hugh|1976|texte=La Guerra Civil Española|p=291}}</ref> afin de contrôler les les exécutions arbitraires et sans jugement des « fascistes », mises en œuvre par des dizaines de « tribunaux révolutionnaires », également connus comme ''{{Lang|es|checas}}'', montés par les organisations et partis ouvriers qui ont imposé la « [[Terreur rouge (Espagne)|Terreur rouge]] » à Madrid et ailleurs. Pourtant, si la volonté est de procéder à des jugements justes, ces tribunaux n'empêchent guerre les activités des ''{{Lang|es|checas}}'', qui continuent à assassiner des « fascistes » par le biais des ''{{Lang|es|paseos}}'' (des détentions illégales qui finissent par l'assassinat du détenu et dont le cadavre est jeté dans un caniveau ou contre le mur d'un cimetière) ou des ''{{Lang|es|sacas}}''<ref>{{Harvsp|Casanova|Juliá Díaz|2005|texte=Víctimas de la guerra civil|p=303-304}}</ref>.
C'est un [[libertaire]] [[humaniste]], [[Melchor Rodríguez García]], nommé en novembre, ''Délégué spécial aux prisons'' par le ministre [[anarchiste]] de la Justice [[Juan García Oliver]], qui met fin aux exécutions en décembre<ref>Bartolomé Bennassar, Histoire de Madrid, EDI8, 2013, [https://books.google.be/books?id=FbWBAAAAQBAJ&pg=PT236 page 236].</ref>{{,}}<ref>Danielle Corrado, ''La Guerre d'Espagne en héritage: entre mémoire et oubli, de 1975 à nos jours'', Presses universitaires Blaise Pascal, 2007, [https://books.google.be/books?id=_6KvqwOk0kgC&pg=PA299 page 299, note 12].</ref>{{,}}<ref>Ricardo de la Cierva, ''La guerre d'Espagne revisitée'', Economica, 1989, [https://books.google.be/books?id=-d21AAAAIAAJ&q=%22Melchor+Rodriguez%22 page 45].</ref>.

Par ailleurs, le gouvernement interdit la publication par la presse de toute mention aux assassinats, publiant au contraire une note mensongère évoquant un incendie provoqué par les détenus fascistes dans l'édifice qui a été étouffé rapidement grâce aux milices{{sfn|Alcalá|2007|texte=Las checas del terror|p=247}}.
Parallèlement, le gouvernement crée les « Tribunaux populaires »{{sfn|Hugh|1976|texte=La Guerra Civil Española|p=291}} afin de contrôler les exécutions arbitraires et sans jugement des « fascistes », mises en œuvre par des dizaines de « tribunaux révolutionnaires », également connus comme ''{{Lang|es|checas}}'', montés par les organisations et partis ouvriers qui ont imposé la « [[Terreur rouge (Espagne)|Terreur rouge]] » à Madrid et ailleurs. Pourtant, si la volonté est de procéder à des jugements justes, ces tribunaux n'empêchent guère les activités des ''{{Lang|es|checas}}'', qui continuent à assassiner des « fascistes » par le biais des ''{{Lang|es|paseos}}'' (des détentions illégales qui finissent par l'assassinat du détenu et dont le cadavre est jeté dans un caniveau ou contre le mur d'un cimetière) ou des ''{{Lang|es|sacas}}''{{sfn|Casanova|Juliá Díaz|2005|texte=Víctimas de la guerra civil|p=303-304}}.


=== Autres événements de l'été 1936 ===
=== Autres événements de l'été 1936 ===
[[Fichier:Santa Cruz del Valle de los Caídos.jpg|thumb|Vue de la croix du [[Valle de los Caídos]].]]
[[Fichier:SPA-2014-San Lorenzo de El Escorial-Valley of the Fallen (Valle de los Caídos).jpg|thumb|Vue de la croix du [[Valle de los Caídos]].]]
==== Province de Ségovie ====
==== Province de Ségovie ====
Pendant ce temps, non loin de Madrid, dans la [[province de Ségovie]], les franquistes procèdent eux aussi à des ''{{Lang|es|sacas}}'', la région étant depuis le début du conflit au mains du [[bando nacional]] (les opposants à la République), particulièrement comme représailles aux bombardement de l'aviation républicaine du {{Date|15|août|1936}}<ref name="esperanzapersecucion"/>.
Pendant ce temps, non loin de Madrid, dans la [[province de Ségovie]], les franquistes procèdent eux aussi à des ''{{Lang|es|sacas}}'', la région étant depuis le début du conflit aux mains du [[bando nacional]] (les opposants à la République), particulièrement comme représailles aux bombardements de l'aviation républicaine du {{date|15 août 1936}}<ref name="esperanzapersecucion"/>.


==== Province de Valence ====
==== Province de Valence ====
Les nuits des {{Date|28|août|1936}} et {{Date|29|août|1936}}, les miliciens de [[Castellón de la Plana]], accompagnés de plusieurs représentants des partis marxistes et républicains ainsi que des syndicats ouvriers, pénètrent à bord du navire ''Isla de Menorca'', transformé en prison, sortent les 56 détenus qui s'y trouvent, leur attachent les mains par groupes de deux, puis les assassinent une fois débarqués, dans divers endroits du port<ref>{{Harvsp|Ministère de la Justice espagnol|2008|texte=Causa general : la dominación roja en España|p=204}}</ref>.
Les nuits des {{date|28 août 1936}} et {{date|29 août 1936}}, les miliciens de [[Castellón de la Plana]], accompagnés de plusieurs représentants des partis marxistes et républicains ainsi que des syndicats ouvriers, pénètrent à bord du navire ''Isla de Menorca'', transformé en prison, sortent les 56 détenus qui s'y trouvent, leur attachent les mains par groupes de deux, puis les assassinent une fois débarqués, dans divers endroits du port{{sfn|Ministère de la Justice espagnol|2008|texte=Causa general : la dominación roja en España|p=204}}.


Dans les nuits du {{Date||13|septembre|1936}} et {{Date|14|septembre|1936}} les miliciens sortent de la prison provinciale Castellón de la Plana plusieurs prêtres et religieux, avant de les assassiner, sans qu'ils aient fait l'objet d'une sentence de la part des Tribunaux Populaires ; ce genre d'exactions gratuites profitent en plus du consentement, voire de l'assistance des dirigeants du Front Populaire<ref name="causageneral7"/>.
Dans les nuits du {{Date|13|septembre-|1936-}} et {{date|14 septembre 1936}} les miliciens sortent de la prison provinciale [[Castelló de la Plana]] plusieurs prêtres et religieux, avant de les assassiner, sans qu'ils aient fait l'objet d'une sentence de la part des Tribunaux populaires. Ce genre d'exactions gratuites profitent en plus du consentement, voire de l'assistance, des dirigeants du Front populaire<ref name="causageneral7"/>.


==== Province de Navarre ====
==== Province de Navarre ====
Pendant la période appelée « ''{{Lang|es|terror caliente}}'' » (ou « terreur chaude », en français), la [[Communauté forale de Navarre|Navarre]] est aussi fortement sujette à de nombreuses exécutions extrajudiciaires, aux ''{{Lang|es|paseos}}'' et aux ''{{Lang|es|sacas}}'' de détenus<ref>{{Harvsp|Casanova|Juliá Díaz|2005|texte=Víctimas de la guerra civil|p=56}}</ref>.
Pendant la période appelée « ''{{Lang|es|terror caliente}}'' » (ou « terreur chaude », en français), la [[Communauté forale de Navarre|Navarre]] est aussi fortement sujette à de nombreuses exécutions extrajudiciaires, aux ''{{Lang|es|paseos}}'' et aux ''{{Lang|es|sacas}}'' de détenus{{sfn|Casanova|Juliá Díaz|2005|texte=Víctimas de la guerra civil|p=56}}.


À proximité de [[Pampelune]], le {{Lien|fr=Fuerte de San Cristóbal (Navarra)|lang=es|trad=Fuerte de San Cristóbal (Navarra)|texte=Fort de San Cristóbal}}, où sont détenus des centaines de républicains tout au long du conflit, est le théâtre de nombreuses tueries. En effet, selon les sources, à cet endroit sont tués sans jugement entre 283 et 469 détenus sur le seul deuxième semestre de 1936, contre environ 80, qui bénéficient d'un jugement et restent détenus jusqu'à la fin du conflit<ref name="ezkaba"/>.
À proximité de [[Pampelune]], le {{Lien|fr=Fuerte de San Cristóbal (Navarra)|lang=es|trad=Fuerte de San Cristóbal (Navarra)|texte=Fort de San Cristóbal}}, où sont détenus des centaines de républicains tout au long du conflit, est le théâtre de nombreuses tueries. En effet, selon les sources, à cet endroit sont tués sans jugement entre 283 et 469 détenus sur le seul deuxième semestre de 1936, contre environ 80, qui bénéficient d'un jugement et restent détenus jusqu'à la fin du conflit<ref name="ezkaba"/>.


==== Catalogne ====
==== Catalogne ====
À [[Tarragone]], pour suppléer les prisons officielles déjà pleines, deux navires sont reconvertis en prison. Il s'agit des navires ''Cabo Cullera'' et ''Río Segre'', étant ce dernier le plus important. On y installe les détenus dans des cales, puis, de nouveau à cause de leur surnombre, dans les sous-cales. Ils sont dans l'attente d'un jugement sensé avoir lieu quelques mois plus tard. Certains sont transférés à la ''{{Lien|Cárcel Modelo de Barcelona|lang=es}}'' ou au [[château de Montjuïc]], tandis que d'autres subissent les ''{{Lang|es|sacas}}'' auxquelles procèdent les patrouilles de contrôle sans jugement ni discernement. Après que la zone portuaire est déclarée zone de guerre, les détenus sont transférés vers d'autres prisons<ref>{{Harvsp|Alcalá|2007|texte=Las checas del terror|p=226}}</ref>.
À [[Tarragone]], pour suppléer les prisons officielles déjà pleines, deux navires sont reconvertis en prison. Il s'agit des navires ''Cabo Cullera'' et ''Río Segre'', étant ce dernier le plus important. On y installe les détenus dans des cales, puis, de nouveau à cause de leur surnombre, dans les sous-cales. Ils sont dans l'attente d'un jugement censé avoir lieu quelques mois plus tard. Certains sont transférés à la [[prison Model de Barcelone]] ou au [[château de Montjuïc]], tandis que d'autres subissent les ''{{Lang|es|sacas}}'' auxquelles procèdent les patrouilles de contrôle sans jugement ni discernement. Après que la zone portuaire est déclarée zone de guerre, les détenus sont transférés vers d'autres prisons{{sfn|Alcalá|2007|texte=Las checas del terror|p=226}}.


==== Andalousie ====
==== Andalousie ====
La nuit du 30 au {{Date|31|juillet|1936}}, dans le village de [[Úbeda]], les milices rouges sortent 47 prisonniers politiques de la prison locale et les assassinent, ne laissant que deux survivants<ref name="causageneral7"/>.
La nuit du 30 au {{date|31 juillet 1936}}, dans le village de [[Úbeda]], les milices rouges sortent 47 prisonniers politiques de la prison locale et les assassinent, ne laissant que deux survivants<ref name="causageneral7"/>.


=== Les Massacres de Paracuellos à Madrid ===
=== Les massacres de Paracuellos à Madrid ===
{{article détaillé|Massacres de Paracuellos}}
{{article détaillé|Massacres de Paracuellos}}
[[Fichier:20070519 - Puerta cementerio Paracuellos.jpg|thumb|Le cimetière de [[Paracuellos de Jarama|Paracuellos]], près du [[Jarama]], où ont eu lieu les [[massacres de Paracuellos]]. Il est construit à la mémoire des victimes de cette tragédie. En arrière-plan, à gauche, sur la colline San Miguel, l'énorme croix blanche est visible depuis l'[[Aéroport international de Madrid-Barajas]].]]
[[Fichier:20070519 - Puerta cementerio Paracuellos.jpg|thumb|Le cimetière de [[Paracuellos de Jarama|Paracuellos]], près du [[Jarama]], où ont eu lieu les [[massacres de Paracuellos]]. Il est construit à la mémoire des victimes de cette tragédie. En arrière-plan, à gauche, sur la colline San Miguel, l'énorme croix blanche est visible depuis l'[[Aéroport international de Madrid-Barajas]].]]
La violence des ''{{Lang|es|sacas}}'' voit son apogée du {{Date|7|novembre|1936}} au {{Date|4|décembre|1936}}<ref name="cervera" />. Massives, elles ont lieu dans plusieurs villages près de Madrid, dont la plupart à Paracuellos de Jarama, dans le ruisseau de San José et dans le bois d'Aldovea, à [[Torrejón de Ardoz]].
La violence des ''{{Lang|es|sacas}}'' voit son apogée du {{date|7 novembre 1936}} au {{date|4 décembre 1936}}<ref name="cervera" />. Massives, elles ont lieu dans plusieurs villages près de Madrid, dont la plupart à Paracuellos de Jarama, dans le ruisseau de San José et dans le bois d'Aldovea, à [[Torrejón de Ardoz]].

L'une des plus polémiques et sanglantes — elle continue d'alimenter les débats — est celle réalisée dans la ''{{Lang|es|Cárcel Modelo}}'' le 7 novembre, quand les troupes révolutionnaires arrivent à la {{Lien|Ciudad Universitaria de Madrid|lang=es}}, et où les troupes républicaines fusillent environ {{nombre|2000}} personnes : il s'agit des « [[Massacres de Paracuellos]] »<ref>{{Harvsp|Hugh|1976|texte=La Guerra Civil Española|p=523-524}}</ref>. Alors qu'il y a encore des détenus à l'intérieur, le bâtiment de la prison est très proche des combats du front de la ''{{Lang|es|Ciudad Universitaria}}''.
L'une des plus polémiques et sanglantes — elle continue d'alimenter les débats — est celle réalisée dans la ''{{Lang|es|Cárcel Modelo}}'' le 7 novembre, quand les troupes révolutionnaires arrivent à la {{Lien|Ciudad Universitaria de Madrid|lang=es}}, et où les troupes républicaines fusillent environ {{nombre|2000}} personnes : il s'agit des « [[Massacres de Paracuellos]] »{{sfn|Hugh|1976|texte=La Guerra Civil Española|p=523-524}}. Alors qu'il y a encore des détenus à l'intérieur, le bâtiment de la prison est très proche des combats du front de la ''{{Lang|es|Ciudad Universitaria}}''.

[[Melchor Rodríguez García]] met fin au massacre le 3 décembre<ref>Écrits de Paris : revue des questions actuelles, Centre d'études des questions actuelles, politiques, économiques et sociales, 1984, [https://books.google.be/books?id=ricdAQAAMAAJ&q=%22Melchor+Rodriguez%22 page 144].</ref>.


=== Autres événements de l'automne 1936 ===
=== Autres événements de l'automne 1936 ===
==== Pays basque ====
==== Pays basque ====
Le {{Date|25|septembre|1936}}, depuis que les sirènes de la ville de [[Bilbao]] annoncent la présence de l'aviation nationale, la foule, majoritairement féminine et avec l'appuis des gardiens de prison, se prépare à massacrer les détenus. Une fois les bombardements finis, elle se dirige vers les quais proches de l'usine ''Altos Hornos'', où les bateaux ''Altuna-Mendi'' et ''Cabo Quilates'' ont été transformés en prison. Des groupes montent à bord en gabares, et le massacre commence à bord du ''Cabo Quilates'', où des détenus sont abattus sur le pont, tandis que d'autres sont incinérés dans les cales. À bord du ''Altuna-Mendi'', les détenus sont obligés à resté les bras en l'air plusieurs heures sous peine d'être abattu par arme à feu. Sur les deux bateaux meurent ainsi 70 détenus (41 et 29, respectivement)<ref name="checas231">{{Harvsp|Alcalá|2007|texte=Las checas del terror|p=231}}</ref>{{,}}<ref name="causageneral7"/>.
Le {{date|25 septembre 1936}}, depuis que les sirènes de la ville de [[Bilbao]] annoncent la présence de l'aviation nationaliste, la foule, majoritairement féminine et avec l'appui des gardiens de prison, se prépare à massacrer les détenus. Une fois les bombardements finis, elle se dirige vers les quais proches de l'usine ''Altos Hornos'', où les bateaux ''Altuna-Mendi'' et ''Cabo Quilates'' ont été transformés en prison. Des groupes montent à bord en gabares, et le massacre commence à bord du ''Cabo Quilates'', où des détenus sont abattus sur le pont, tandis que d'autres sont incinérés dans les cales. À bord du ''Altuna-Mendi'', les détenus sont obligés à rester les bras en l'air plusieurs heures sous peine d'être abattu par arme à feu. Sur les deux bateaux meurent ainsi 70 détenus (41 et 29, respectivement)<ref name="checas231">{{Harvsp|Alcalá|2007|texte=Las checas del terror|p=231}}</ref>{{,}}<ref name="causageneral7"/>.


Quelques jours plus tard, le {{Date|2|octobre|1936}}, un groupe de marins et autres officiers de la [[Armada espagnole|Marine]] montent à bord du ''Cabo Quilates'' et assassinent 38 autres détenus, avant d'être dépouillés de tous leurs biens<ref name="checas231"/>{{,}}<ref name="causageneral7"/>.
Quelques jours plus tard, le {{date|2 octobre 1936}}, un groupe de marins et autres officiers de la [[Armada espagnole|Marine]] montent à bord du ''Cabo Quilates'' et assassinent 38 autres détenus, avant de les dépouiller de tous leurs biens<ref name="checas231"/>{{,}}<ref name="causageneral7"/>.


Le {{Date|4|janvier|1937}}, dans plusieurs prisons de Bilbao, les forces « rouges », dont la milice et plusieurs compagnies de l'armée et sous des ordres officiels, assassinent et pillent un total de 209 détenus. Le président du [[Gouvernement basque]] demande des explications au commandant du batallon « Malatesta » et se voit répondre qu'{{citation|il y aura des tueries jusqu'à ce que le peuple soit convaincu qu'il ne reste plus le moindre fasciste dans les prisons<ref name="causageneral7"/>}} C'est ainsi que José Antonio Aguirre, qui n'a jusque là pris aucune mesure pour éviter ces crimes, et sous les demandes insistantes des fonctionnaires des prisons impuissants, charge le Secrétaire de la Guerre de faire cesser les massacres, qui cessent alors rapidement, mais tard<ref name="causageneral7"/>.
Le {{date|4 janvier 1937}}, dans plusieurs prisons de Bilbao, les forces « rouges », dont la milice et plusieurs compagnies de l'armée et sous des ordres officiels, assassinent et pillent un total de 209 détenus. Le président du [[Gouvernement basque]] demande des explications au commandant du bataillon « Malatesta » et se voit répondre qu'{{citation|il y aura des tueries jusqu'à ce que le peuple soit convaincu qu'il ne reste plus le moindre fasciste dans les prisons<ref name="causageneral7"/>}} C'est ainsi que José Antonio Aguirre, qui n'a jusque là pris aucune mesure pour éviter ces crimes et sous les demandes insistantes des fonctionnaires des prisons impuissants, charge le Secrétaire de la Guerre de faire cesser les massacres, qui cessent alors rapidement mais tard<ref name="causageneral7"/>.


== La ''Causa General'' et les futures investigations sur ces crimes ==
== La ''Causa General'' et les futures investigations sur ces crimes ==
{{article détaillé|Causa general}}<!--Cet article est en cours de rédaction (05/09/2013)-->
[[Fichier:Roma martires 1.jpg|thumb|Cérémonie de béatification des [[martyrs de la guerre d'Espagne]], [[Vatican]], octobre 2007.]]
[[Fichier:Roma martires 1.jpg|thumb|Cérémonie de béatification des [[martyrs de la guerre d'Espagne]], [[Vatican]], octobre 2007.]]
Suite à l'[[Offensive finale de la guerre d'Espagne]], [[Francisco Franco]] déclare le {{Date|1er|avril|1939}} sa victoire avec [[La guerre est finie (document)|son dernier communiqué de guerre]]. S'établit alors la [[Espagne franquiste|Dictature de Franco]] qui durera jusqu'à sa mort en [[1975]].
À la suite de l'[[offensive finale de la guerre d'Espagne]], [[Francisco Franco]] déclare le {{Date|1er|avril|1939}} sa victoire avec [[La guerre est finie (document)|son dernier communiqué de guerre]]. S'établit alors la [[Espagne franquiste|dictature de Franco]], qui durera jusqu'à sa mort en [[1975]].


La guerre finie, le camp républicain est accusé par le camp des « révoltés », les franquistes, de la répression en zone républicaine pendant la Guerre civile espagnole depuis les premiers jours de celle-ci. Les principales accusations portent sur les [[martyrs de la guerre d'Espagne]], c'est-à-dire sur la persécution religieuse<ref>{{Harvsp|Hugh|1976|texte=La Guerra Civil Española|p=295}}</ref>, la création de centres de détention semi-clandestins (les ''{{Lang|es|checas}}'') et la réalisation d'assassinats massifs (les ''{{Lang|es|sacas de presos}}''), tels que ceux de la Cárcel Modelo<ref>{{Harvsp|Hugh|1976|texte=La Guerra Civil Española|p=437}}</ref> ou les massacres de Paracuellos<ref>{{Harvsp|Hugh|1976|texte=La Guerra Civil Española|p=523}}</ref>.
La guerre finie, le camp républicain est accusé par le camp des « révoltés », les franquistes, de la répression en zone républicaine pendant la Guerre civile espagnole depuis les premiers jours de celle-ci. Les principales accusations portent sur les [[martyrs de la guerre d'Espagne]], c'est-à-dire sur la persécution religieuse{{sfn|Hugh|1976|texte=La Guerra Civil Española|p=295}}, la création de centres de détention semi-clandestins (les ''{{Lang|es|checas}}'') et la réalisation d'assassinats massifs (les ''{{Lang|es|sacas de presos}}''), tels que ceux de la Cárcel Modelo{{sfn|Hugh|1976|texte=La Guerra Civil Española|p=437}} ou les massacres de Paracuellos{{sfn|Hugh|1976|texte=La Guerra Civil Española|p=523}}.


C'est ainsi que le régime franquiste promeut une importante investigation sur ces faits, connue comme la « ''{{Lang|es|[[Causa General]]}}'' »<ref>{{Lien web|langue=es|url=http://www.causageneral.org/|titre=La Causa General|site=causageneral.org|auteur=|année=|consulté le=05/09/2013}}</ref>{{,}}<ref>{{Harvsp|Ministère de la Justice espagnol|2008|texte=Causa general : la dominación roja en España|p=1-126}}</ref>, qui, malgré sa réalisation tout à fait partiale car instruit par le [[Ministère public]] du gouvernement de Franco et sans les garanties de procédure suffisantes, compte d'abondantes preuves documentées et attestées.
C'est ainsi que le régime franquiste promeut une importante investigation sur ces faits, connue comme la « ''{{Lang|es|[[Causa General]]}}'' »<ref>{{Lien web|langue=es|url=http://www.causageneral.org/|titre=La Causa General|site=causageneral.org|auteur=|année=|consulté le=05 septembre 2013}}.</ref>{{,}}{{sfn|Ministère de la Justice espagnol|2008|texte=Causa general : la dominación roja en España|p=1-126}}, qui, malgré sa réalisation tout à fait partiale, car instruit par le [[Ministère public]] du gouvernement de Franco, et sans les garanties de procédure suffisantes, compte d'abondantes preuves documentées et attestées.


Par contre, les délits des vainqueurs n'ont jamais fait l'objet d'une investigation ou d'un procès officiels. Cependant, de nombreuses voix importantes du milieu juridique, telles que [[Baltasar Garzón]] (ancien magistrat espagnol de l'[[Audiencia Nacional d'Espagne]]), ainsi que diverses associations de victimes du franquisme, soutiennent que le camp des révoltés a commis des actes de [[génocide]] et de [[crime contre l'humanité]], car dans les documents désormais disponibles, comme les archives militaires de l'époque, il a été démontré des plans incluant l'extermination et la persécution systématique de l'opposition politique, la violation des femmes républicaines<ref>{{ouvrage|langue=es|prénom1=Iñaki|nom1=Egaña|titre=Los crímenes de Franco en Euskal Herria, 1936-1940|sous-titre=|chapitre=Ultrajadas y violadas|éditeur=Txalaparta|volume=|lieu=|année=2009|pages totales=503|passage=237|isbn=9788481365597|lire en ligne=http://books.google.es/books?id=PucipZwqWoQC&pg=PA237&lpg=PA237&dq=%22Dar+patadas+y+berrear+no+las+salvar%C3%A1%22&source=bl&ots=hHxr1qA6ki&sig=JknCgYltXYbEHg8x_e7YbXIzgTY&hl=es&sa=X&ei=isXnT9CbJKb80QWtq6GSCQ&redir_esc=y#v=onepage&q=%22Dar%20patadas%20y%20berrear%20no%20las%20salvar%C3%A1%22&f=false}}</ref>, l'imposition de tests physiques et psychologiques à des détenus pour véhiculer leur idéologie avec des maladies mentales, ou encore l'[[Affaire des enfants volés du franquisme|enlèvement d'enfants systématique]] à leurs parents républicains pour éliminer la « contamination idéologique ».
Par contre, les délits des vainqueurs n'ont jamais fait l'objet d'une investigation ou d'un procès officiels. Cependant, de nombreuses voix importantes du milieu juridique, telles que [[Baltasar Garzón]] (ancien magistrat espagnol de l'[[Audience nationale]]), ainsi que diverses associations de victimes du franquisme, soutiennent que le camp des révoltés a commis des actes de [[génocide]] et de [[crime contre l'humanité]] puisque dans les documents désormais disponibles, comme les archives militaires de l'époque, il a été démontré des plans incluant l'extermination et la persécution systématique de l'opposition politique, le viol des femmes républicaines<ref>{{Ouvrage|langue=es|prénom1=Iñaki|nom1=Egaña|titre=Los crímenes de Franco en Euskal Herria, 1936-1940|éditeur=[[Txalaparta (maison d'édition)|Txalaparta]]|année=2009|pages totales=503|passage=237|isbn=978-84-8136-559-7|lire en ligne=https://books.google.es/books?id=PucipZwqWoQC&pg=PA237&dq=%22Dar+patadas+y+berrear+no+las+salvar%C3%A1%22|titre chapitre=Ultrajadas y violadas}}</ref>, l'imposition de tests physiques et psychologiques à des détenus pour imputer leur idéologie à des maladies mentales ou encore l'[[affaire des enfants volés du franquisme|enlèvement d'enfants systématique]] à leurs parents républicains pour éliminer la « contamination idéologique ».


En considération de tels actes, Baltazar Garzón initie un procès pour en faire l'investigation. Il argumente entre autres l'accusation de génocide<ref>L'article 607 du Code Pénal espagnol exige que pour avérer un délit d'homocide, l'auteur {{citation|ait le but de détruire totalement ou partiellement un groupe national, ethnique, racial, religieux ou déterminé par l'incapacité de ses intégrants}}.</ref> citant l'arrêt 211/2008 du Jury Central d'Instruction {{numéro|2}} (Cas « SS-Totenkopf », ou génocide nazi), selon lequel est considéré un délit de génocide et de lèse-humanité les actes commis contre les Espagnols dans les camps de concentration national-socialistes pour des motifs politiques ou idéologiques<ref>[http://www.elpais.com/elpaismedia/ultimahora/media/200810/16/espana/20081016elpepunac_4_Pes_PDF.doc Arrêt du {{Date|16|octobre|2008}}], Jury Central d'Instruction {{numéro|005}}, Audience Nationale, Madrid. {{doc}}</ref>{{,}}<ref>[http://www.elpais.com/elpaismedia/ultimahora/media/200811/18/espana/20081118elpepunac_1_Pes_PDF.doc Arrêt du {{Date|18|novembre|2008}}], Jury Central d'Instruction {{numéro|005}}, Audience Nationale, Madrid. {{doc}}</ref>{{,}}<ref>[http://ocw.um.es/gat/contenidos/evarubio/dipu/material_clase/AutoProce17sep2009.doc Arrêt d'accusation de Johann Leprich, Anton Tittjung et Josias Kumpf pour actes de persécution contre des détenus espagnols dans les camps national-socialistes de Mauthausen et Sachsenhausen], Jury Central d'Instruction {{numéro|002}}, Audience nationale, Madrid. {{doc}}</ref>.
En considération de tels actes, Garzón ouvre un procès pour en faire l'investigation. Il argumente, entre autres, l'accusation de génocide<ref>L'article 607 du Code Pénal espagnol exige que pour avérer un délit d'homocide, l'auteur {{citation|ait le but de détruire totalement ou partiellement un groupe national, ethnique, racial, religieux ou déterminé par l'incapacité de ses intégrants}}.</ref> citant l'arrêt 211/2008 du Jury Central d'Instruction {{numéro|2}} (Cas « SS-Totenkopf », ou génocide nazi), selon lequel est considéré un délit de génocide et de lèse-humanité les actes commis contre les Espagnols dans les camps de concentration nationaux-socialistes pour des motifs politiques ou idéologiques<ref>[http://www.elpais.com/elpaismedia/ultimahora/media/200810/16/espana/20081016elpepunac_4_Pes_PDF.doc Arrêt du {{date-|16|octobre|2008}}] {{Lien archive|url=http://www.elpais.com/elpaismedia/ultimahora/media/200810/16/espana/20081016elpepunac_4_Pes_PDF.doc |horodatage archive=20121024031820 |titre=Copie archivée }}, Jury Central d'Instruction {{numéro|005}}, Audience nationale, Madrid. {{doc}}</ref>{{,}}<ref>[http://www.elpais.com/elpaismedia/ultimahora/media/200811/18/espana/20081118elpepunac_1_Pes_PDF.doc Arrêt du {{date-|18|novembre|2008}}], Jury Central d'Instruction {{numéro|005}}, Audience nationale, Madrid. {{doc}}</ref>{{,}}<ref>[http://ocw.um.es/gat/contenidos/evarubio/dipu/material_clase/AutoProce17sep2009.doc Arrêt d'accusation de Johann Leprich, Anton Tittjung et Josias Kumpf pour actes de persécution contre des détenus espagnols dans les camps national-socialistes de Mauthausen et Sachsenhausen], Jury Central d'Instruction {{numéro|002}}, Audience nationale, Madrid. {{doc}}</ref>.
L'Audience Nationale décide à la majorité de votes et sans étude préalable des faits incriminés que le Jury Central d'Instruction {{numéro|005}} dirigé par Garzón manque de compétence objective pour en faire l'investigation, considérant caduque la possible responsabilité pénale des accusés<ref>Annexe : voir la {{Lien|fr=Anexo:Imputados en el auto de 16 de octubre de 2008 del Juzgado Central de Instrucción nº 005 de la Audiencia Nacional|lang=es|trad=Anexo:Imputados en el auto de 16 de octubre de 2008 del Juzgado Central de Instrucción nº 005 de la Audiencia Nacional|texte=liste des accusés}} dans l'arrêt du {{Date|16|octobre|2008}} du Jury Central d'Instruction {{numéro|005}} de l'Audience Nationale à Madrid.</ref>, ceux-ci étant tous décédés. Les magistrats minoritaires considèrent que le jury est bien compétent du fait que les faits étudiés sont des « délits de lèse-humanité et génocide », car ils constituent une « élimination systématique et massive des adversaires politiques après la Guerre civile<ref>{{Lien web|langue=es|url=http://elpais.com/diario/2010/04/22/espana/1271887204_850215.html|titre=Yo discrepo pero no prevarico|site=elpais.es|auteur=Clara Bayarri|année=2010|consulté le=05/09/2013}}</ref> ».
L'Audience nationale décide à la majorité de votes et sans étude préalable des faits incriminés que le Jury central d'instruction {{numéro|005}}, dirigé par Garzón, manque de compétence objective pour en faire l'investigation, considérant caduque la possible responsabilité pénale des accusés<ref>Annexe : voir la {{Lien|fr=Anexo:Imputados en el auto de 16 de octubre de 2008 del Juzgado Central de Instrucción nº 005 de la Audiencia Nacional|lang=es|trad=Anexo:Imputados en el auto de 16 de octubre de 2008 del Juzgado Central de Instrucción nº 005 de la Audiencia Nacional|texte=liste des accusés}} dans l'arrêt du {{date|16 octobre 2008}} du Jury Central d'Instruction {{numéro|005}} de l'Audience nationale à Madrid.</ref>, ceux-ci étant tous décédés. Les magistrats minoritaires considèrent que le jury est bien compétent du fait que les faits étudiés sont des « délits de lèse-humanité et génocide » puisqu'ils constituent une « élimination systématique et massive des adversaires politiques après la Guerre civile<ref>{{Lien web|langue=es|url=http://elpais.com/diario/2010/04/22/espana/1271887204_850215.html|titre=Yo discrepo pero no prevarico|site=elpais.es|auteur=Clara Bayarri|année=2010|consulté le=05 septembre 2013}}.</ref> ».

== Bibliographie ==
* {{ouvrage|langue=es|prénom1=|nom1=Ministère de la Justice espagnol|titre=Causa general : la dominación roja en España|sous-titre=|éditeur=Akrón|volume=|lieu=|année=2008|pages totales=548|passage=|isbn=978-84-936011-8-8|lire en ligne=http://editorialakron.es/cms/uploads/File/CAUSA%20GENERAL%20ebook%20Muestra.pdf{{pdf}}}}
* {{ouvrage|langue=es|prénom1=César|nom1=Alcalá|titre=Las checas del terror|sous-titre=|éditeur=LibrosLibres|volume=|lieu=Madrid|année=2007|pages totales=227|passage=|isbn=978-84-96088-59-7|lire en ligne=http://books.google.es/books?id=6-a1HgDQl2AC&printsec=frontcover&hl=es#v=onepage&q&f=false}}
* {{ouvrage|langue=es|prénom1=Javier|nom1=Cervera Gil|titre=Madrid en guerra : la ciudad clandestina, 1936-1939|sous-titre=|éditeur=Alianza Editorial|volume=|lieu=|année=1998|pages totales=536|passage=|isbn=978-84-206-2908-7|lire en ligne=}}
* {{ouvrage|langue=es|prénom1=Julián|nom1=Casanova|prénom2=Santos|nom2=Juliá Díaz|titre=Víctimas de la guerra civil|sous-titre=|éditeur=Editorial Planeta DeAgostini|volume=|lieu=Madrid|année=2005|pages totales=440|passage=|isbn=978-84-674-1746-3|lire en ligne=http://books.google.fr/books?id=w4ZpAAAAMAAJ}}
* {{ouvrage|langue=es|prénom1=Thomas|nom1=Hugh|traducteur=Neri Daurella de Nadal|titre=La Guerra Civil Española|sous-titre=|éditeur=Grijalbo Mondadori|volume=I et II|lieu=|année=1976|pages totales=1174|passage=|isbn=84-253-2768-7|lire en ligne=}}
* {{ouvrage|langue=es|prénom1=Diego|nom1=Martínez Barrio|titre=Memorias|sous-titre=|éditeur=Planeta|volume=|lieu=|année=1983|pages totales=430|passage=|isbn=84-320-5690-1|lire en ligne=}}


== Notes et références ==
== Notes et références ==
{{Références}}
{{Références|colonnes=2}}

== Annexes ==
=== Bibliographie ===
* {{Ouvrage|langue=es|nom1=Ministère de la Justice espagnol|titre=Causa general|sous-titre=la dominación roja en España|lieu=Astorga|éditeur=Akrón|année=2008|pages totales=548|isbn=978-84-936011-8-8|lire en ligne=http://editorialakron.es/cms/uploads/File/CAUSA%20GENERAL%20ebook%20Muestra.pdf}} {{pdf}} {{plume}}
* {{Ouvrage|langue=es|nom1=[[César Alcalá]]|titre=Las checas del terror|sous-titre=la desmemoria histórica al descubierto|lieu=Madrid|éditeur=LibrosLibres|année=2007|pages totales=227|isbn=978-84-96088-59-7|lire en ligne=https://books.google.es/books?id=6-a1HgDQl2AC}} {{plume}}
* {{Ouvrage|langue=es|prénom1=Javier|nom1=Cervera Gil|titre=Madrid en guerra|sous-titre=la ciudad clandestina, 1936-1939|éditeur=[[Alianza Editorial]]|année=1998|pages totales=536|isbn=978-84-206-2908-7}} {{plume}}
* {{Ouvrage|langue=es|prénom1=Julián|nom1=Casanova|prénom2=Santos|nom2=Juliá Díaz|titre=Víctimas de la guerra civil|lieu=Madrid|éditeur=Editorial Planeta DeAgostini|année=2005|pages totales=440|isbn=978-84-674-1746-3|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=w4ZpAAAAMAAJ}} {{plume}}
* {{Ouvrage|langue=es|prénom1=Thomas|nom1=Hugh|traducteur=Neri Daurella de Nadal|titre=La Guerra Civil Española|volume=I et II|éditeur=Grijalbo Mondadori|année=1976|pages totales=1174|isbn=84-253-2768-7}} {{plume}}
* {{Ouvrage|langue=es|prénom1=Diego|nom1=Martínez Barrio|titre=Memorias|éditeur=Planeta|année=1983|pages totales=430|isbn=84-320-5690-1}} {{plume}}


== Voir aussi ==
=== Articles connexes ===
=== Articles connexes ===
* [[Guerre d'Espagne|Guerre civile espagnole]]
* [[Guerre d'Espagne|Guerre civile espagnole]]
* [[Corvée de bois]]
* [[Corvée de bois]]
* [[Loi des fuites]]
* [[Massacres de Septembre]]
* ''{{Lien|Causa General|lang=es}}''
* ''{{Lien|fr=Paseo (Guerre d'Espagne)|trad=Paseo (fusilamiento)|lang=es|texte=paseos}}''
* ''[[Checa (Guerre d'Espagne)|checas]]''


=== Liens externes ===
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* {{Lien web|langue=es|url=http://www.fotosimagenes.org/sacas-de-presos|titre=Galerie de photos relatives aux ''Sacas de presos''|site=fotosimagenes.org|auteur=|année=|consulté le=05/09/2013}}
* {{Lien web|langue=es|url=http://www.fotosimagenes.org/sacas-de-presos|titre=Galerie de photos relatives aux ''Sacas de presos''|site=fotosimagenes.org|auteur=|année=|consulté le=05 septembre 2013}}
* {{Lien web|langue=es|url=http://archivoweb.carm.es/archivoGeneral/arg.muestra_detalle?idses=0&pref_id=2288570|titre=« Detalle del documento ''Pieza 3 : Cárceles y sacas'' » — archives d'investigations réalisées par l'Instructeur Fiscal de la ''Causa General'' de Murcia, Cardiel Escudero|site=http://archivoweb.carm.es/|auteur=|année=|consulté le=05/09/2013}}
* {{Lien web|langue=es|url=http://archivoweb.carm.es/archivoGeneral/arg.muestra_detalle?idses=0&pref_id=2288570|titre=« Detalle del documento ''Pieza 3 : Cárceles y sacas'' » — archives d'investigations réalisées par l'Instructeur Fiscal de la ''Causa General'' de Murcia, Cardiel Escudero|site=archivoweb.carm.es|auteur=|année=|consulté le=05 septembre 2013}}
* {{Lien web|langue=es|url=http://www.plataforma2003.org/memoriahistorica/las_sacas_de_los_presos.htm|titre=« ''Las sacas de los presos'' » — récit d'un témoin|site=plataforma2003.org|auteur=Adelardo Fernández Arias|année=2003|consulté le=05/09/2013}}
* {{Lien web|langue=es|url=http://www.plataforma2003.org/memoriahistorica/las_sacas_de_los_presos.htm|titre=« ''Las sacas de los presos'' » — récit d'un témoin|site=plataforma2003.org|auteur=Adelardo Fernández Arias|année=2003|consulté le=05 septembre 2013|brisé le = 2023-12-02}}
* {{Lien web|langue=fr|url=http://www.bastamag.net/Dictature-franquiste-loi-d|titre=Dictature franquiste : loi d’amnistie égale pacte d’amnésie|site=bastamag.net|auteur=Basta!|année=2010|consulté le=08 janvier 2014}}


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Les sacas de presos (littéralement « sortie de prisonniers » en français), ou sacas (saca au singulier), selon l'usage familier de l'époque, furent des situations de violence ayant eu lieu dans les prisons de différents lieux d'Espagne, pendant la Guerre civile espagnole, qui consistèrent à sortir massivement et systématiquement des prisonniers des prisons dans le but officiel de les libérer, mais pour finalement les exécuter ou les transférer.

Ces actes eurent lieu principalement pendant les six premiers mois de la guerre (de juillet à décembre 1936) et furent commis par les deux camps, pour des motifs politiques, militaires et religieux. Cependant, seuls les actes commis par les républicains firent l'objet d'une enquête et de procès officiels, avec la Causa General (es) impulsée par les franquistes en 1940, un an après qu'ils gagnèrent la guerre civile.

Contexte et définition

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À partir du , dans l'Espagne dominée par le Front populaire et à la suite de l'augmentation importante de prisonniers, le gouvernement habilite de nouvelles prisons dans des édifices publics ou religieux[1], tels que des terrains de cesta punta[2], des châteaux[3] ou des forts[4].

Avec le consentement de certains représentants politiques du Front populaire, mais sans que le gouvernement soit officiellement au courant, l'autorité des fonctionnaires du Corps des prisons est annulée, et les règlements pénitentiaires ne sont plus respectés. Ces fonctionnaires sont remplacés — voire parfois maltraités ou fusillés — par des miliciens armés qui suppriment la plupart des droits des détenus et les maltraitent psychologiquement et physiquement[5].

La Dirección General de Seguridad (DGS) ayant attribué à ces entités toutes les facultés d'intervention sur les prisonniers, elles procède à des premières sacas individuelles, en déclarant officiellement des détenus libres et à disposition de la DGS, afin de les faire sortir des prisons et les assassiner, une fois dehors, ou de les livrer au Comité d'Investigation et de Vigilance, c'est-à-dire, aux agents des checas[1].

À partir de juillet 1936 commence la guerre civile espagnole, et avec elle une féroce opposition entre les troupes, agents gouvernementaux et civils (milices) franquistes, sous les ordres de Franco, et républicains du gouvernement socialiste du marxiste Francisco Largo Caballero.

Édifice du Círculo de Bellas Artes (Madrid), dont le sous-sol hébergeait de nombreuses checas, appelées alors Checas de Bellas Artes, et qui étaient en réalité un organisme officiel appelé Comité provincial d'investigation publique.

En marge des différents faits de guerre[6], les deux camps organisent des sacas de presos, des paseos (es) ou des checas (qui consistent, de la part des républicains, à arrêter, interroger, juger sommairement, puis exécuter tout suspect de sympathiser avec le camp adverse[7],[8]) pour supprimer un maximum d'opposants en peu de temps, sur des critères globaux, militaires, religieux (selon l'Église catholique, près de 10 000 religieux espagnols auraient été assassinés entre 1936 et 1937 — ils sont appelés les martyrs du XXe siècle, et un millier d'entre eux a été béatifié, tandis que 11 ont été sanctifiés[9]), de statut social, etc.[10]

Les sacas en particulier, sont parmi les faits de guerre les plus controversés et polémiques de la guerre civile. Ils furent réalisés par les deux camps[11],[12], principalement à la fin de l'année 1936.

La définition de saca peut provenir du verbe sacar (« sortir ») ou du substantif saco (« un paquet », dans le sens de « grande quantité »). presos signifiant « prisonniers », il s'agissait donc de « sorties de prisonniers » ou de « paquets de prisonniers », qui étaient donc sortis des prisons pour être emmenés à leur lieu d'exécution.

La Cárcel Modelo de Madrid

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Madrid est dans le camp républicain, pendant le conflit, et donc sous la domination « rouge ». Plusieurs prisons sont le théâtre de violences gratuites envers les détenus et de sacas, dont les plus célèbres sont la Cárcel Modelo (es), la Cárcel de Porlier (es) (ou « prison provinciale d'Hommes no 1 »), la Cárcel de San Antón (es) (ou « prison provinciale d'Hommes no 2 »), la Cárcel de Ventas (ou « prison provinciale d'Hommes no 3 »), la Cárcel de Duque de Sesto (ou « prison provinciale d'Hommes no 42 ») et la Cárcel de Toreno.

Alors que la guerre civile vient de commencer et que le peuple vivait dans la terreur permanente, les Madrilènes qui sont emmenés à la prison Modelo, prison officielle dans la province où siège le gouvernement du Front populaire, considèrent qu'il s'agit d'un privilège, étant donné qu'ils connaissent l'existence de prisons clandestines. Ils s'attendent à être traités avec respect et à être protégés par les autorités[13].

Mais les prisons sont désormais occupées par les miliciens (fondamentalement de la CNT). Le , des hommes politiques et militaires qui y sont détenus, tels que Melquíades Álvarez, leader du Parti républicain libéral démocrate, républicain de droite ; José María Albiñana Sanz, chef du Partido Nacionalista Español (es) d'extrême droite ; les ex-ministres de la République Manuel Rico et José Martínez de Velasco ; le phalangiste et pilote du vol Madrid-Buenos Aires de l'avion « Plus Ultra » Julio Ruiz de Alda ; le général Osvaldo Capaz Montes (es) (qui avait pris possession du territoire Ifni) ; le général Rafael Villegas Montesinos (es) (qui a conspiré contre la Seconde république et était à la tête du soulèvement à Madrid) ; le capitaine de cavalerie Fernando Primo de Rivera y Sáenz de Heredia (fils du dictateur Miguel Primo de Rivera et frère du fondateur de la phalange espagnole José Antonio Primo de Rivera)[14] ; le poète, avocat et homme politique conservateur José María Hinojosa, son père et son frère ; Luis Altolaguirre (frère de Manuel Altolaguirre) ; et plus de 30 autres[15], sont fusillés face au mur du cimetière de San Rafael par un groupe de miliciens de l'Armée populaire de la République espagnole, qui ont auparavant pris possession de la prison comme représailles des bombardements sur les dépôts de la CAMPSA effectués par l'aviation franquiste[16]. Au total, les 22 et 23 août, 50 personnes sont assassinées.

En apprenant les faits, le président Manuel Azaña est consterné et pense à démissionner[17]. Le gouvernement réagit en créant un « Comité de contrôle » des prisons, formé par des représentants de tous les partis et les entités syndicales du Front Populaire, et confie la garde intérieure du bâtiment aux « milices d'arrière-garde », qui remplaceront à terme les fonctionnaires du Corps des prisons — malheureusement, cette mesure facilite le contrôle des prisons par les milices, et donc les sacas qui auront lieu, notamment dans cette même prison, en octobre, novembre et décembre 1936.

C'est un libertaire humaniste, Melchor Rodríguez García, nommé en novembre, Délégué spécial aux prisons par le ministre anarchiste de la Justice Juan García Oliver, qui met fin aux exécutions en décembre[18],[19],[20].

Par ailleurs, le gouvernement interdit la publication par la presse de toute mention aux assassinats, publiant au contraire une note mensongère évoquant un incendie provoqué par les détenus fascistes dans l'édifice qui a été étouffé rapidement grâce aux milices[21]. Parallèlement, le gouvernement crée les « Tribunaux populaires »[22] afin de contrôler les exécutions arbitraires et sans jugement des « fascistes », mises en œuvre par des dizaines de « tribunaux révolutionnaires », également connus comme checas, montés par les organisations et partis ouvriers qui ont imposé la « Terreur rouge » à Madrid et ailleurs. Pourtant, si la volonté est de procéder à des jugements justes, ces tribunaux n'empêchent guère les activités des checas, qui continuent à assassiner des « fascistes » par le biais des paseos (des détentions illégales qui finissent par l'assassinat du détenu et dont le cadavre est jeté dans un caniveau ou contre le mur d'un cimetière) ou des sacas[23].

Autres événements de l'été 1936

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Vue de la croix du Valle de los Caídos.

Province de Ségovie

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Pendant ce temps, non loin de Madrid, dans la province de Ségovie, les franquistes procèdent eux aussi à des sacas, la région étant depuis le début du conflit aux mains du bando nacional (les opposants à la République), particulièrement comme représailles aux bombardements de l'aviation républicaine du [11].

Province de Valence

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Les nuits des et , les miliciens de Castellón de la Plana, accompagnés de plusieurs représentants des partis marxistes et républicains ainsi que des syndicats ouvriers, pénètrent à bord du navire Isla de Menorca, transformé en prison, sortent les 56 détenus qui s'y trouvent, leur attachent les mains par groupes de deux, puis les assassinent une fois débarqués, dans divers endroits du port[24].

Dans les nuits du et les miliciens sortent de la prison provinciale Castelló de la Plana plusieurs prêtres et religieux, avant de les assassiner, sans qu'ils aient fait l'objet d'une sentence de la part des Tribunaux populaires. Ce genre d'exactions gratuites profitent en plus du consentement, voire de l'assistance, des dirigeants du Front populaire[1].

Province de Navarre

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Pendant la période appelée « terror caliente » (ou « terreur chaude », en français), la Navarre est aussi fortement sujette à de nombreuses exécutions extrajudiciaires, aux paseos et aux sacas de détenus[25].

À proximité de Pampelune, le Fort de San Cristóbal (es), où sont détenus des centaines de républicains tout au long du conflit, est le théâtre de nombreuses tueries. En effet, selon les sources, à cet endroit sont tués sans jugement entre 283 et 469 détenus sur le seul deuxième semestre de 1936, contre environ 80, qui bénéficient d'un jugement et restent détenus jusqu'à la fin du conflit[4].

À Tarragone, pour suppléer les prisons officielles déjà pleines, deux navires sont reconvertis en prison. Il s'agit des navires Cabo Cullera et Río Segre, étant ce dernier le plus important. On y installe les détenus dans des cales, puis, de nouveau à cause de leur surnombre, dans les sous-cales. Ils sont dans l'attente d'un jugement censé avoir lieu quelques mois plus tard. Certains sont transférés à la prison Model de Barcelone ou au château de Montjuïc, tandis que d'autres subissent les sacas auxquelles procèdent les patrouilles de contrôle sans jugement ni discernement. Après que la zone portuaire est déclarée zone de guerre, les détenus sont transférés vers d'autres prisons[26].

La nuit du 30 au , dans le village de Úbeda, les milices rouges sortent 47 prisonniers politiques de la prison locale et les assassinent, ne laissant que deux survivants[1].

Les massacres de Paracuellos à Madrid

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Le cimetière de Paracuellos, près du Jarama, où ont eu lieu les massacres de Paracuellos. Il est construit à la mémoire des victimes de cette tragédie. En arrière-plan, à gauche, sur la colline San Miguel, l'énorme croix blanche est visible depuis l'Aéroport international de Madrid-Barajas.

La violence des sacas voit son apogée du au [6]. Massives, elles ont lieu dans plusieurs villages près de Madrid, dont la plupart à Paracuellos de Jarama, dans le ruisseau de San José et dans le bois d'Aldovea, à Torrejón de Ardoz.

L'une des plus polémiques et sanglantes — elle continue d'alimenter les débats — est celle réalisée dans la Cárcel Modelo le 7 novembre, quand les troupes révolutionnaires arrivent à la Ciudad Universitaria de Madrid (es), et où les troupes républicaines fusillent environ 2 000 personnes : il s'agit des « Massacres de Paracuellos »[27]. Alors qu'il y a encore des détenus à l'intérieur, le bâtiment de la prison est très proche des combats du front de la Ciudad Universitaria.

Melchor Rodríguez García met fin au massacre le 3 décembre[28].

Autres événements de l'automne 1936

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Pays basque

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Le , depuis que les sirènes de la ville de Bilbao annoncent la présence de l'aviation nationaliste, la foule, majoritairement féminine et avec l'appui des gardiens de prison, se prépare à massacrer les détenus. Une fois les bombardements finis, elle se dirige vers les quais proches de l'usine Altos Hornos, où les bateaux Altuna-Mendi et Cabo Quilates ont été transformés en prison. Des groupes montent à bord en gabares, et le massacre commence à bord du Cabo Quilates, où des détenus sont abattus sur le pont, tandis que d'autres sont incinérés dans les cales. À bord du Altuna-Mendi, les détenus sont obligés à rester les bras en l'air plusieurs heures sous peine d'être abattu par arme à feu. Sur les deux bateaux meurent ainsi 70 détenus (41 et 29, respectivement)[29],[1].

Quelques jours plus tard, le , un groupe de marins et autres officiers de la Marine montent à bord du Cabo Quilates et assassinent 38 autres détenus, avant de les dépouiller de tous leurs biens[29],[1].

Le , dans plusieurs prisons de Bilbao, les forces « rouges », dont la milice et plusieurs compagnies de l'armée et sous des ordres officiels, assassinent et pillent un total de 209 détenus. Le président du Gouvernement basque demande des explications au commandant du bataillon « Malatesta » et se voit répondre qu'« il y aura des tueries jusqu'à ce que le peuple soit convaincu qu'il ne reste plus le moindre fasciste dans les prisons[1] » C'est ainsi que José Antonio Aguirre, qui n'a jusque là pris aucune mesure pour éviter ces crimes et sous les demandes insistantes des fonctionnaires des prisons impuissants, charge le Secrétaire de la Guerre de faire cesser les massacres, qui cessent alors rapidement mais tard[1].

La Causa General et les futures investigations sur ces crimes

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Cérémonie de béatification des martyrs de la guerre d'Espagne, Vatican, octobre 2007.

À la suite de l'offensive finale de la guerre d'Espagne, Francisco Franco déclare le sa victoire avec son dernier communiqué de guerre. S'établit alors la dictature de Franco, qui durera jusqu'à sa mort en 1975.

La guerre finie, le camp républicain est accusé par le camp des « révoltés », les franquistes, de la répression en zone républicaine pendant la Guerre civile espagnole depuis les premiers jours de celle-ci. Les principales accusations portent sur les martyrs de la guerre d'Espagne, c'est-à-dire sur la persécution religieuse[30], la création de centres de détention semi-clandestins (les checas) et la réalisation d'assassinats massifs (les sacas de presos), tels que ceux de la Cárcel Modelo[31] ou les massacres de Paracuellos[32].

C'est ainsi que le régime franquiste promeut une importante investigation sur ces faits, connue comme la « Causa General »[33],[34], qui, malgré sa réalisation tout à fait partiale, car instruit par le Ministère public du gouvernement de Franco, et sans les garanties de procédure suffisantes, compte d'abondantes preuves documentées et attestées.

Par contre, les délits des vainqueurs n'ont jamais fait l'objet d'une investigation ou d'un procès officiels. Cependant, de nombreuses voix importantes du milieu juridique, telles que Baltasar Garzón (ancien magistrat espagnol de l'Audience nationale), ainsi que diverses associations de victimes du franquisme, soutiennent que le camp des révoltés a commis des actes de génocide et de crime contre l'humanité puisque dans les documents désormais disponibles, comme les archives militaires de l'époque, il a été démontré des plans incluant l'extermination et la persécution systématique de l'opposition politique, le viol des femmes républicaines[35], l'imposition de tests physiques et psychologiques à des détenus pour imputer leur idéologie à des maladies mentales ou encore l'enlèvement d'enfants systématique à leurs parents républicains pour éliminer la « contamination idéologique ».

En considération de tels actes, Garzón ouvre un procès pour en faire l'investigation. Il argumente, entre autres, l'accusation de génocide[36] citant l'arrêt 211/2008 du Jury Central d'Instruction no 2 (Cas « SS-Totenkopf », ou génocide nazi), selon lequel est considéré un délit de génocide et de lèse-humanité les actes commis contre les Espagnols dans les camps de concentration nationaux-socialistes pour des motifs politiques ou idéologiques[37],[38],[39]. L'Audience nationale décide à la majorité de votes et sans étude préalable des faits incriminés que le Jury central d'instruction no 005, dirigé par Garzón, manque de compétence objective pour en faire l'investigation, considérant caduque la possible responsabilité pénale des accusés[40], ceux-ci étant tous décédés. Les magistrats minoritaires considèrent que le jury est bien compétent du fait que les faits étudiés sont des « délits de lèse-humanité et génocide » puisqu'ils constituent une « élimination systématique et massive des adversaires politiques après la Guerre civile[41] ».

Notes et références

[modifier | modifier le code]
  1. a b c d e f g et h (es) « Capítulo VII : Cárceles y asesinatos colectivos de presos », sur causageneral.org (consulté le ).
  2. (es) Patricio Escobal, « Las Sacas »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur represionrioja.com (consulté le )[PDF].
  3. Las checas del terror, p. 154.
  4. a et b (es) « Las sacas de presos »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur losfugadosdeezkaba1938.com (consulté le ).
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  36. L'article 607 du Code Pénal espagnol exige que pour avérer un délit d'homocide, l'auteur « ait le but de détruire totalement ou partiellement un groupe national, ethnique, racial, religieux ou déterminé par l'incapacité de ses intégrants ».
  37. Arrêt du « Copie archivée » (version du sur Internet Archive), Jury Central d'Instruction no 005, Audience nationale, Madrid. [doc]
  38. Arrêt du , Jury Central d'Instruction no 005, Audience nationale, Madrid. [doc]
  39. Arrêt d'accusation de Johann Leprich, Anton Tittjung et Josias Kumpf pour actes de persécution contre des détenus espagnols dans les camps national-socialistes de Mauthausen et Sachsenhausen, Jury Central d'Instruction no 002, Audience nationale, Madrid. [doc]
  40. Annexe : voir la liste des accusés (es) dans l'arrêt du du Jury Central d'Instruction no 005 de l'Audience nationale à Madrid.
  41. (es) Clara Bayarri, « Yo discrepo pero no prevarico », sur elpais.es, (consulté le ).

Bibliographie

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Articles connexes

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Liens externes

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