Cours de Droit Du Sport Xxx

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INTRODUCTION GENERALE DU COURS DE DROIT DU SPORT

Pour l’entame de ce cours, il est nécessaire de définir ce qu’est le droit du sport


pour faire apparaître sa spécificité par rapport aux autres disciplines juridiques.
Pour ce faire, il s’impose d’abord, de préciser l’objet du droit du sport ; ensuite,
l’on analysera la question de l’autonomie de ce droit par rapport aux autres
branches du droit. Enfin, l’on montrera la méthode suivie pour son
enseignement.

I- L’OBJET DU DROIT DU SPORT

L'objet de cet ouvrage qui a pour thème le « droit du sport », consiste tout
d'abord, à s'interroger sur la manière dont, le sport a été saisi par le droit dans le
monde, en Afrique et en Côte d’Ivoire. À l’évidence, l’on note que seule
l’organisation des compétitions, justifie l’application de règles juridiques
particulières. La présentation des sources du droit du sport sera alors l'occasion
de constater que ses règles sont issues des groupements sportifs eux-mêmes.
Ceux-ci constituent un ordre juridique sportif à part entière que des pouvoirs
publics Ivoirien et des Institutions de l’Union Africaine et de l’Union
Européenne.

En effet, toute activité sportive n’est possible et n’a de sens que si elle
procure la discipline, l’ordre, l’égalité des chances et même la justice. À cette
fin, l’activité sportive est régit par toute sorte de règles de droit, notamment les
lois étatiques, les Règlements des Organisations Internationales auxquelles
s’ajoutent les Règlements et les Décisions des instances juridictionnelles du
mouvement sportif olympique et fédéral. Cet ensemble de règles de droit
appliqué à l’activité sportive est regroupé sous le vocable de droit du sport,
entendu par-là, la lex-sportiva1. Avant de revenir sur la définition du droit du
1
Franck LATTY, La lex sportiva -Recherche sur le droit transnational, thèse de doctorat en droit public, Paris
2007, 823p.

[Date] 1
sport, il importe de déterminer, ce qu’est-ce alors le sport auquel s’applique ce
droit nouveau.

En effet, le sport est un phénomène incontournable de la vie sociale : source


de plaisir devenu aujourd’hui, un secteur économique et financier majeur. Le
domaine sportif est donc naturellement encadré par un nombre important de lois
et de règles. Ainsi, que le sport soit pratiqué en amateur ou au niveau
professionnel, il reste soumis à un ensemble de règles et de lois régionales,
fédérales, nationales et internationales, qu’il importe de connaître.

Comment le définir donc ? Pour le réussir, il faut se référer aux définitions


proposées par les textes de loi qui l’organisent. Ainsi, les différentes lois 2 des
États africains sur le sport ont souvent une approche similaire du mot sport.
Certains textes le définissent avec assez de précisions, d’autres se contentent de
préciser les grands principes qui l’encadrent sans pouvoir dire, ce qu’il est
véritablement. En Côte d’Ivoire, l’article 1 de la loi n° 2014-856 du 22
décembre 2014 relative au sport, définit le sport comme « tout mouvement du
corps spontané ou réfléchi, toute activité physique exercée dans un cadre
informel ou codifié à but éducatif ou de détente, accomplie dans le sens du jeu
individuel ou collectif, pouvant donner lieu à compétition ou nécessitant
l’effort »3.

Au Cameroun, la loi n° 2018/014 du 11 juillet 2018 portant organisation et


promotion des activités physiques et sportives, définit le sport comme un «
ensemble d’exercices physiques et intellectuels codifiés se pratiquant sous forme
de jeux individuels ou collectifs pouvant donner lieu à des compétitions »4.

2
Joseph-Marie BIPOUN-WOUM « Recherche sur les aspects actuels de la réception du droit Administratif
dans les États d’Afrique Noire d’expression française : le cas du Cameroun » in RJPIC, t. 26, N°3 1972, p. 364.
3
Voir le chapitre 1 art. 1 de la loi n° 2014- 856 du 22 décembre 2014 relative au sport.
4
Voir Loi N° 2018/014 du 11 juillet 2018 portant organisation et promotion des activités physiques et sportives
au Cameroun.

[Date] 2
Au Sénégal, la loi n° 1984/59 du 23 mai 1984 portant Charte du sport ne
définit pas le sport, elle se contente d’indiquer les grands principes généraux
pour justifier sa raison5 d’être, et non ce qu’il est réellement.

En plus des définitions précédentes, il convient d’ajouter celle proposée par


la Commission de l’Union Africaine dans son rapport sur l’architecture des
sports en Afrique (ASA). Selon cette définition, le sport est « une activité
physique compétitive faisant intervenir l’utilisation d’aptitudes et des talents des
personnes de façon prescrite par les règles établies par un organisme régissant
ladite activité »6.

Toutes ces définitions font intervenir la notion de compétition, d’aptitude et


de talent ; le tout chapeauté par les règles qui régissent son exercice. La
compétition évoque l’idée d’affrontement, de concurrence voire de rivalité entre
des individus utilisant les mêmes ressources 7. La compétition se caractérise par
la recherche d’un résultat8. La compétition se résume en une sorte de lutte, de
combat qui se réalise dans des enceintes très variées. Quoi qu’il en soit, que
« l’adversaire soit incarné par la nature ou par un être humain, le sport
consiste toujours à livrer un combat contrôlé sur un champ de bataille
imaginaire »9.

Perçue comme une activité publique, l’organisation de compétition dans une


discipline est pour le Conseil d’État français, un critère qui lui permet de décider
5
Martin BLÉOU, « Le service public dans la jurisprudence de la Chambre administrative de la Cour suprême
de Côte d’Ivoire », in Espaces du service public, Mélanges en l’honneur de Jean du Bois de GAUDUSSON, T.
1, Droits d’ailleurs, Pesant, PUB, 2013, pp. 45-55 ; Souleymane DOUMBIA, « Recherches sur les actes
administratifs édictés par les personnes privées en droit ivoirien (Étude conduite à la lumière de la jurisprudence
de la Chambre administrative de la Cour suprême) », RID, 2009, pp. 54-102.
6
Rapport de la Commission de l’Union Africaine sur l’Architecture des sports en Afriques. Web site :
www.africa-union.org
7
Voir Francisco Djédjro MELEDJE « L’équité dans délimitations maritimes », in Espaces et ressources
maritimes, 1996, pp. 162-189.
8
Elias DUNNING, Sport et civilisation, Fayard, 1998, p. 32.
9
Grégory MOLLION, Les Fédérations sportives : Le droit administratif à l’épreuve de Groupements privés.
Thèse en droit public, Université Pierre Mendès France (Grenoble II), LGDJ 2006 p.12.
En outre, l’alpinisme consiste notamment en un affrontement où la montagne tient lieu d’adversaire à l’individu.
L’adversaire, peut en outre, être directe comme au cours d’un match de tennis, ou indirecte comme au cours
d’une épreuve de plongeon ou de gymnastique.

[Date] 3
si une activité est seulement une activité physique ou sportive 10. Un autre critère
non moins déterminant dans la définition du sport réside dans le phénomène de
sa « réglementation et de son institutionnalisation »11. Philippe JESTAZ
souligne que « Le sport et la règle sont, en effet, consubstantiels »12. Pour cet
auteur, courir et sauter des obstacles ont toujours été le propre de l’homme.
L’aptitude dans ce processus prend une part significative, puisqu’elle témoigne
de la possibilité pour l’athlète de parvenir à sa fin : celle de remporter la victoire.
Le talent relève quant à lui, du génie personnel ; il est inné et le plus souvent
enfoui dans notre inconscient et, c’est à l’occasion d’un évènement qu’il se
révèle à la conscience. Que signifie l’expression, droit du sport ?

L’expression droit du sport, s’entend, le droit appliqué au sport, ou le droit


aménagé pour le sport. C’est l’ensemble des règles de droit destinées à la
régulation de l’activité sportive. C’est aussi, une branche nouvelle du droit des
Etats et des institutions sportives privées à l’instar du droit de l’environnement,
de la santé, de l’informatique, du numérique… Ce droit relève d’une pluralité
d’ordre juridique publics et privés. Les identifier, c’est donc découvrir « un
univers de subordination, de pouvoir variés assis sur des règlementations
généralement denses et pourvues d’organes chargés d’interpréter la teneur des
normes édictées ou d’en sanctionner la violation »13. Les comprendre, c’est
souligner l’attraction ou l’emprise plus ou moins vigoureuse de l’Etat sur
l’institution sportive.

Il résulte de ce qui précède, que le droit du sport est la discipline juridique


qui soumet la pratique de l’activité sportive au droit. Le mouvement sportif et
10
La décision de la haute juridiction administrative s’appuie sur le contenu des dispositions de la loi n°84-610 du
16 juillet 1984 relative à l’organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, JO, 17 juillet 1984,
p. 2288.
11
Grégory MOLLION, Les Fédérations sportives : Le droit administratif à l’épreuve de Groupements privés
préc. p.12
12
Philippe JESTAZ, François ALAPHILIPPE, « Spectacle sportif et droit du sport », in Le spectacle sportif,
PUF, 1981, p. 315. Une autre raison de l’existence de la règle est d’ordre sociologique. Le jeu a de tout temps
servit de cadre de lutte, d’affrontement entre les Hommes, mais la réglementation du jeu a permis d’atténuer
progressivement le caractère très violent des combats. Christian POCILLO, Les cultures sportives, PUF, 1999,
p. 103.
13
Jean Pierre KARAQUILLO, le droit du sport, 4e édition, Dalloz, p. 57.

[Date] 4
l’Etat qui possèdent le pouvoir suprême dans l’organisation des compétitions
sportives sont liés par ce droit. Ils doivent veiller à son application et garantir
son respect par l’imposition des sanctions en cas de sa méconnaissance. Que
dire de l’autonomie de ce droit ?

II- L’AUTONOMIE DU DROIT DU SPORT

L’autonomie du droit du sport se prouve. À cet effet, la doctrine des juristes


sportifs14 qui soutiennent fermement le pluralisme juridique, s’est montrée plus
prolifique sur cette question. Ainsi, pour les tenants du pluralisme juridique,
l’autonomie du droit du sport est indissociablement liée à son appartenance à
deux ordres juridiques différents. Il s’agit, d’un côté de l’ordre juridique étatique
et de l’autre côté, de l’ordre juridique sportif. L’idée ici est que l’Etat ne serait
en aucun cas, être la source unique du droit du sport. Il en ressort que plusieurs
ordres juridiques coexisteraient en même temps sur un territoire. Il en va ainsi,
du mouvement sportif qui, bien qu’étant sur le territoire de l’Etat, défend
fréquemment l’existence de son « ordre juridiques sportif ». Suivant notamment
le positiviste de l’italien Santi Romano, à l’opposé de thèse normativiste de
Hans Kelsen, cette conception de l’ordre juridique ne repose pas sur une fiction ;
mais elle se fonde sur l’existence d’un ordre social organisé15.

La reconnaissance des règles créées par les décisions des instances sportives
pose parfois problème. La pratique du sport professionnel dépend des règles qui
concourent à sa stabilité. Ces règles, comme l’affirme Philippe JESTAZ, « en
sont des composantes inéluctables et non un simple adjuvant ou lubrifiant »16.
Ces règles en un mot, sont la condition d’existence de l’activité sportive elle-
même. La question qui se pose est de savoir, si ces règles sont des normes
juridiques ? Ne sont-elles pas différentes des règles de droit créés par les
pouvoirs publics ? La question n’est pas définitivement tranchée et le débat
14
Mathieu Maisonneuve, L’arbitrage des litiges sportifs, L. G. D. J lextencio édition 2009.
15
Frédérique BUY, Jean- MICHEL Marmayou Didier Poracchia et Fabrice Rizzo, Droit du sport
16
Philippe JESTAZ, « Des chicanes sur une chicane, Réflexions sur la nature de la règle sportive », RJERn°13,
1990

[Date] 5
subsiste en doctrine. La grande majorité de la doctrine 17 considère que les règles
sportives créées par les organismes privés constituent des règles de droit. Pour
ces derniers, il n’est point de doute que ces règles constituent des règles de droit
à part entière, même s’ils reconnaissent que ces règles ne s’intéressent qu’à la
seule sphère du sport.

Ils refusent par ailleurs, le fait qu’on réduise ces règles de droit au rang
d’un code de bienséance. Pour Jean Pierre KARAQUILLO, ces règles
constituent des dispositions qui régulent la vie des institutions sportives à
l’instar des règles de droit sécrétées par la puissance publique. Il écrit à ce
propos : « Peut-on sérieusement prétendre que les préceptes, les règlements
techniques, les règlements administratifs, les statuts édictés par les
communautés sportives ne constituent pas des règles ? Pour cela il faudrait
démontrer qu’il ne s’agit que d’actes individuels, qu’ils ne s’appliquent pas à
un ensemble d’individu, de manière permanente, répétitive. Il faudrait aussi
prouver que ces dispositions n’ont pas pour finalité d’organiser et de régenter
les relations entre les personnes physiques et morales. Qu’elles non pas pour
vocation de réguler la vie des institutions qui les produisent. Ce raisonnement
serait voué à l’échec tant il serait en discordance avec la réalité des choses 18 ».
Encore que les modalités de reconnaissance des décisions des instances
sportives, principale source19 du droit du sport diffèrent fondamentalement du
mode classique d’intégration d’une norme internationale. Avant d’y revenir, il
17
Jean Pierre KARAQUILLO, le droit du sport, 4e édition, Dalloz, p. 54. Voir également,
Mathieu MAISONNOEUVE, L’arbitrage des litiges sportifs, Bibliothèque de droit public tome 267, L.G.D.J,
Lextensio édition, p.461.
18
Jean Pierre KARAQUILLO, le droit du sport, 4e édition, Dalloz, p. 57.
19
Marcel WALINE, « Le pouvoir normatif de la jurisprudence », in Mélanges Georges SCELLE, t. 2, LGDJ,
1950, p. 613 et s. ; Jacques MAURY, « observation sur la jurisprudence en tant que source du droit », in
Mélanges G. Ripert, t. 1, LGDJ, 1950, p. 28, spéc. P. 30 et 43 ; Olivier DUPEYROUX, « La jurisprudence
source abusive du droit », in Mélanges Jacques MAURY, t. 1, Dalloz-Sirey, 1960, p. 349, spéc. P. 3354 ;
Michel VIRALLY, La pensée juridique, LGDJ, 1960, p. 166 ; René CHAPUS, « de la soumission au droit des
règlements autonomes », D., 1960, chron. P. 119 ; Charles EISENMANN, « la justice dans l’État », in la
justice, PUF, 1961 ; François TERRÉ, introduction générale au droit, 8eéd., Dalloz, 2009 n° 360 ; Frédéric
ZENATI, La jurisprudence, Dalloz, spéc. P. 115 et s. Après avoir posé les termes du débat, l’auteur conclut que
« le débat sur la normativité de la jurisprudence ne peut être concluant si l’on fait l’économie d’une ontologie
juridique. C’est à ce niveau essentiel que se situe la divergence, le surplus n’étant que rhétorique. De même que
l’approche positiviste du droit conduit normalement à exclure la jurisprudence des sources du droit, d’autres
conceptions de la règle de droit admettent le contraire », p. 147.

[Date] 6
convient d’insister sur le fait que lorsque les règles recommandent aux
pratiquants des disciplines sportives le respect des consignes de jeu, il s’agit là
bien entendu, des principes qu’ils énoncent. Il en va de même pour les règles qui
repartissent les pouvoirs, des obligations et des prérogatives des licenciés au sein
des fédérations sportives. Il en va également de même pour les règles qui
définissent les statuts dans les groupements sportifs, ainsi que celles qui
organisent et déterminent les rapports entre les clubs et leurs joueurs.
L’ensemble de ces dispositions sont des règles qui participent de façon directe à
des modes originaux de régulation.

Cependant, il convient de s’interroger si ces dispositions 20 originales sont


vraiment des règles de droit ? Ne leur manque-t-il pas la contrainte légitime ? En
clair, les règles sportives seraient-elles, au besoin sanctionnées en cas de leur
manquement par la contrainte étatique comme c’est le cas de la règle de droit ?
En effet, la règle de droit, c’est-à-dire la règle juridique, parce qu’elle est
obligatoire pour tous, sa violation est sanctionnée par la puissance publique qui
est la seule à disposer de la contrainte légitime. Certes, ces arguments ne
manquent pas de pertinence étant entendu que, ceux qui les soutiennent ne sont
pas des moindres21. L’argument selon lequel, la règle de droit est une règle
juridique du fait de l’ordre juridique étatique qui lui est consubstantielle est
l’œuvre du positivisme juridique développé par le théoricien du droit, Hans
Kelsen22. Ce dernier soutient qu’il n’y a d’ordre juridique qui existe que celui
émanant de l’État et non en dehors de lui. L’ordre juridique, selon KELSEN est
d’inspiration étatique. Si l’on admet pour vraie la théorie kelsénienne, nous
pouvons aisément soutenir que les sentences arbitrales rendues par le Tribunal
20

21
Hans KELSEN, Théorie pure du droit, trad., de la 2e éd., Dalloz, 1962, spéc. P. 42 et s.
22
Hans KELSEN distingue deux types de normes : les normes prévoyant des sanctions qualifiées de normes
primaires ; les normes prévoyant des obligations appelées normes secondaires. Au contraire, chez Hart (Le
concept de droit, faculté universitaire de Saint-Louis, 1976), les normes primaires sont des normes de conduite et
les normes secondaires sont celles qui prévoient des procédures à suivre pour créer, modifier, appliquer ou
reconnaître les normes primaires. La différenciation entre les deux auteurs n’entache pas la reconnaissance de
l’ordre juridique sportive au sens normativiste. Les normes qui composent les ordres sportifs sont en effet tout
autant des normes de sanction que des normes de procédure ou des normes de conduite.

[Date] 7
Arbitral du Sport (TAS) en matière sportive, du simple fait qu’elles se rattachent
à un ordre juridique sportif, ne constituent pas pour autant des normes juridiques
susceptibles d’être invoquées comme précédent.

La conception de l’ordre juridique dans l’entendement de Hans KELSEN et


ses adeptes se rattache à l’institution étatique. Ainsi, dans ce sens, « l’ordre
juridique est un système de norme juridiques »23. Bien entendu dans ce système,
le critère de juridicité n’est absolument pas le critère le plus décisif. Mathieu
MAISONNEUVE estime plutôt que « c’est la juridicité du contenant et non la
juridicité du contenu qui permet de qualifier de juridique une norme sociale »24.
Bien avant lui, Hans KELSEN lui-même écrivait à ce propos, que « une norme
donnée est une norme juridique en tant qu’elle appartient à un ordre
juridique25 ». Il résulte de cette conviction que l’ordre juridique et la norme
juridique se trouvent dans une relation étroitement imbriquée, au point où l’on
ne peut pas connaître l’une sans s’interroger sur ce qu’est l’autre. Du reste, s’ils
sont « des ordres de la conduite humaine, ceux-ci sont aussi et surtout des
ordres de contraintes en ce qu’ils prescrivent certaines conduites humaines en
attachant aux conduites opposées des actes de contraintes qui sont dirigés
contre ceux qui les adoptent26 ».

Pour Hans KELSEN, il ne s’agit pas de n’importe quelle contrainte, mais de


la contrainte physique27 : c’est-à-dire le recours à la force pour obtenir
l’exécution d’une obligation en cas d’une inexécution volontaire. Or, l’exécution
d’une obligation dans de telles circonstances, ne peut se concevoir que si, l’on se
trouve dans le cadre d’une institution étatique bien organisée. C’est d’ailleurs
cette forme de contrainte physique que fustige Georges GURVITCH en ces
termes : « quand on parle de la liaison nécessaire du droit avec la contrainte,

23
Hans KELSEN, théorie pure du droit, trad. De la 2e éd. Dalloz, op. cit. p 43.
24
Mathieu MAISONOEUVE, L’arbitrage des litiges sportifs, op. cit. p. 460.
25
Hans KELSEN, théorie pure du droit, trad., op.cit., p 43.
26
Hans KELSEN, théorie pure du droit, op. cit., p. 46.
27

[Date] 8
on commet bien souvent une autre erreur très grave : on identifie toute
contrainte avec la contrainte inconditionnée de l’État ; et en insistant sur le
caractère indispensable de la contrainte, on arrive ainsi à la théorie étatiste du
droit, si non tout le droit, au moins du droit positif. Contre cette conception,
fondée sur une double erreur, rappelons que non seulement, la contrainte ne
peut accompagner toutes manifestations du droit, mais encore que de très
importantes et efficaces espèces de contraintes ont un caractère conditionnel et
sont exercées par des organismes non étatiques tels que les Organisations
Internationales, l’Église, les organisations économiques globales, les syndicats,
et divers Associations particulières » 28.

Pour les opposants29 de Kelsen par contre, l’existence d’un ordre juridique
est indépendamment indifférente de celle d’un État. Elle l’est encore moins du
fait de la reconnaissance de la part de celui-ci, cela ne dépend guère d’un
postulat doctrinal30. Une norme sportive ne saurait être regardée comme une
norme juridique que, lorsque cette dernière repose sa valeur juridique sur une
norme étatique ou interétatique : c’est-à-dire que la norme sportive n’est
considérée comme juridique que lorsque le fondement sur lequel elle tient sa
valeur est un droit fondamental d’un ordre juridique étatique ou d’un ordre
juridique interétatique31.

L’interprétation à contrario de ce que, malgré la réduction des normes


juridiques sportives en des normes infra-étatiques, celles-ci ne peuvent, bien
évidemment pas être regroupées dans une sous-catégorie d’ordre juridique
sportif. Certes, poser l’existence d’un ordre juridique qui soit totalement
affranchi des ordres juridiques étatiques relèverait de l’utopie. La raison en est
simple et les arguments ne manquent vraisemblablement pas. En effet, jusqu’ici
28
Georges GURVITCH, L’idée du droit social, Sirey, 1932, p. 110.
29
Santi ROMANO, l’ordre juridique, trad.de la deuxième éd. Italienne, Dalloz, 1975.
30
Mathieu MAISONNOEUVE, L’arbitrage des litiges juridiques, préc. p. 460.
31
Voir en ce sens, Mark Van HOECKE, « des ordre juridiques en conflit : sport et droit », Revue
interdisciplinaire d’études juridiques, 1995, spéc., p. 91 ; Margareta BADDELEY, « Le sport, sujet ou objet ?
La protection de la personnalité du sportif », Revue de droit suisse, 1996, p. 147.

[Date] 9
à moins qu’on nous démontre le contraire, pas même une des institutions
sportives, pour ne citer que : le Comité International Olympique et les
fédérations sportives internationales ne doivent leur « existence à une norme
interétatique, toutes sont des personnes morales régies par le droit de l’État
dans lequel elles ont leur siège »32.

À la lumière de la théorie du droit pur développée par Hans KELSEN, il est


clair que les ordres juridiques sportifs sont des sous ordres étatiques 33. Il écrit à
propos des organismes de droit privé que « l’ordre normatif qui fonde la
corporation est son statut ; ce statut est établi et mis en vigueur par un acte
juridique prévu par l’ordre étatique. Les statuts des corporations constituent
des ordres juridiques partiels englobés dans un ordre juridique total qui est
l’ordre juridique étatique »34. Lorsqu’on fait le parallèle de la démonstration de
KELSEN, on est tenté d’admettre que le statut de chaque groupement sportif
représente une norme de base au même titre que d’autres ordres juridiques
sportifs. Citons le cas des sports de combat. Les statuts des Fédérations
Ivoirienne de Lutte, des Fédérations Sénégalaises de Lutte traditionnelle, et des
Fédérations Camerounaises de Box sont des normes juridiques. Elles-mêmes
font partie intégrante d’une autre norme juridique sportive spécifique, l’ordre
juridique du Sénégal, du Cameroun et celui de la Côte d’Ivoire.

Ce cours présente un intérêt juridique important, dans la mesure où cette


étude nous invite à explorer une nouvelle branche du droit qui est peu connue.
Aussi l’intérêt de ce cours ne se limite-t-il pas uniquement à son aspect

32
Mathieu MAISONNEUVE, L’arbitrage des litiges juridiques, op. cit. p. 461.
33
Michel VIRAL LY a schématisé la théorie de Hans KELSEN en ayant recours à une grappe ou à un essaim,
ainsi, il écrit : « si toutes les normes constitutives d’un ordre juridique se rattachent ainsi, en dernière analyse, à
une norme unique, on peut se les représenter comme une grappe, ou un essaim, suspendu à une norme. Dans le
cas où cette dernière appartiendrait elle-même à un ordre juridique à la fois plus large et plus élevé, on voit
apparaître une unité supérieure qui englobe les deux ordres considérés et résulte elle-même de la norme
fondamentale qui fait l’unité du second. Et ainsi de proche en proche, peut s’organiser un système de groupes
rattachés les unes aux autres, dont on peut déduire l’existence d’un ordre juridique global, intégrant dans une
unité parfaite l’ensemble des ordres juridiques partiels qui le composent tout en respectant leur individualité ».
La pensée juridique, LGDJ, 1960, p. 184-185.
34
Hans KELSEN, Théorie pure du droit, op, cit., p. 235.

[Date] 10
juridique, car sur le plan pratique, ce cours représente un véritable outil de
pacification des relations entre le mouvement sportif et ses licenciés.

Par ailleurs, l'encadrement en Côte d’Ivoire des activités sportives par


l'État, lequel s'est doté d'administrations spécialement destinées à appliquer sa
politique sportive et à accompagner le mouvement sportif, a emporté la
soumission de la plupart des fédérations sportives à un régime juridique
particulier de droit public. Ainsi, alors même que lesdites fédérations sont
constituées sous forme d'associations de droit privé, l'étude de leur statut et de
leur régime juridique spécifiques s'impose pour appréhender la particularité du
droit qui leur est applicable.

L'examen de la diversité des statuts des compétiteurs, qu'ils soient des


sportifs individuels ou des clubs, ainsi que les règles applicables en matière de
responsabilité civile, concourent à la démonstration de la complexité des
qualifications juridiques applicables en matière sportive. Il en va de même pour
la prise en compte par le législateur et les juges, des spécificités liées à la
compétition sportive. Le droit du sport ainsi esquissé, par quel cheminement
précis en entreprendre l’analyse ? Autrement dit, comment étudier le droit du
sport ?

L’étude du droit du sport se fait d’une part par, par l’examen de la législation du
sport première partie, et d’autre part par la régulation du sport deuxième
partie.

Première partie : LA LÉGISLATION DU SPORT

L’activité sportive ne saurait se concevoir en dehors des règles qui


proviennent d’institutions d’origines privées et publiques. En effet, les règles
sportives constituent la condition indispensable à une bonne organisation des
compétitions sportives. Leurs conceptions et leurs diffusions incombent aux
pouvoirs publics et au mouvement sportif. Le droit appliqué à l’activité sportive

[Date] 11
demeure principalement dans la mise en lumière de la spécificité, de la nature,
du rôle et des pouvoirs de l’instance fédérale. Cette reconnaissance de la part des
pouvoirs publics qui confère la légitimité de l’ordre juridique sportif concourt à
la qualification de l’activité fédérale en « puissance sportive35 ». En effet,
comme le souligne si bien le Professeur Gérald Simon « le constat est
manifeste », car l’activité sportive est aujourd’hui un monde du droit, autour
duquel domine la règle. Que le sport soit pratiqué en salle, sur un terrain de
football ou sur une autre aire de jeu, la pratique du sport obéit à un ensemble de
règles codifiées qu’on regroupe sous le vocable de règlements généraux, de
règlement techniques ou de lois du jeu. Ces différentes règles témoignent de
l’intensité de l’activité législative ou règlementaire dans le domaine du sport. Ce
foisonnement de règles fait dire à J. M. BROHM que « le sport est un univers de
règles et de lois36 ». Il va sans dire que la règlementation du sport, constitue à
n’en point douter, son sens et sa raison d’être. Les règles sportives ont leurs
sources (chapitre 1), elles sont l’œuvres des institutions (chapitre 2) et elles ont
un contenu (Chapitre 3)

Chapitre 1 : LES SOURCES DU DROIT DU SPORT

L’activité sportive n’a d’équivalent dans le domaine des activités sociales,


en ce qui concernent la diversité des règles auxquelles elle est soumise. Elle a
cette particularité d’être à la fois soumise aux règles étatiques et aux règles
dérivées du mouvement sportif. Pour ce qui est des règles étatiques, il s’agit des
règles édictées par les pouvoirs publics notamment, le Parlement ivoirien et le
Gouvernement. Le parlement ivoirien à travers la loi n° 2014- 856 du 22
35
Gérald Simon, Puissance sportive et ordre juridique étatique : Contribution à l’étude des relations entre la
puissance publique et les Institutions Privées. L.G.D.J, 1990
36
J. M. BROHM, Sociologie politique du sport Ed. Universitaires 1976 p. 57

[Date] 12
décembre 2014 relative au sport à tracé le cadre juridique de toute l’activité
sportive en Côte d’Ivoire. Cette loi donne un statut aux groupements sportifs.
Elle crée en outre un véritable régime de police administrative de l’Etat sur les
activités physique et sportive en instituant un mécanisme permettant au Ministre
des Sports de déléguer aux fédérations, le pouvoir d’autoriser la tenue des
compétitions sportives. En plus de la loi, la jurisprudence administrative
française constitue une source du droit du sport. Par ailleurs, le mouvement
sportif s’est illustré positivement dans la création des sources de ce droit. Ainsi,
si le droit du sport est aujourd’hui, une discipline autonome, l’on doit cette
autonomie à cette diversité de source qui émanent tant de l’Etat (section 1) que
des organisations sportives (section 2).

Section 1 : Les sources étatiques

L’Etat joue un rôle très important dans la création de la règle de droit. Si ce fait
est incontestable dans les autres secteurs d’activités, il n’en irait pas autrement
dans le domaine de l’activité sportive. L’intervention de l’Etat dans autres
domaines d’activités est presqu’exclusive. En effet, l’Etat dispose d’une
compétence exclusive pour ce qui relève de l’encadrement juridique des

[Date] 13
activités économiques autres que l’activité sportive dans les limites de son
territoire. Mais l’activité sportive a ceci de particulier en ce qu’elle est encadrée
juridiquement par deux ordres juridiques différents. L’ordre juridique sportif et
l’ordre juridique étatique ; dans le second, deux organes se partage la création du
droit : il s’agit du pouvoir politique incarné par le pouvoir législatif et le pouvoir
exécutif (paragraphe 1), et du pouvoir judiciaire (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : L’apport du pouvoir politique dans la création du droit du


sport

Le pouvoir politique doit s’entendre, le parlement et l’exécutif. La loi


fondamentale de l’Etat c’est-à-dire, la constitution se charge de repartir les
domaines de compétence entre les deux pouvoirs. Ainsi, la loi, œuvre du
parlement a pour vocation d’énoncer des règles générales de portée normative
(A). À l’opposé, le règlement, œuvre du pouvoir exécutif constitue également
une source non négligeable du droit du sport Ivoirien (B).

A- La loi, une source certaine du droit du sport

L’activité sportive en côte d’Ivoire est juridiquement encadrée par deux textes
de lois. Il s’agit notamment, de la loi n° 60-415 du 21 septembre 1960 relative
aux Associations et de la loi n° 2014- 856 du 22 décembre 2014 relative au
sport. Si le premier texte cité l’est dans une moindre mesure, il n’en est de même
pour le second. En effet, les fédérations sportives et le Comité National
Olympique en tant qu’acteurs clés dans l’organisation, la promotion et la
régulation du sport en Côte d’Ivoire sont constitués sous forme d’Association de
droit privé. Pour leur constitution, ces deux entités se sont conformé aux
dispositions de la loi sur les Associations. Et c’est, ce fait qui nous permet
d’inclure la loi du 21 septembre 1960 relative aux Associations dans les sources
législatives du droit du sport. Pour ce qui est de la loi du 22 décembre 2014

[Date] 14
relative au sport, elle représente le fondement juridique du droit du sport en Côte
d’Ivoire en ce qu’elle constitue la loi d’orientation, encore appelé la loi cadre
dans le domaine du sport. En effet, la loi d’orientation est une loi dont, le
contenu est très général et qui définit les grandes orientations d’une réforme ou
d’une politique dont les domaines d’applications sont fixés par des décrets.
Ainsi, l’article 3 de la loi sur le sport fait de la pratique du sport, un droit
fondamental reconnu à tous. Il s’agit ici, de toute personne physiques sans
distinction aucune. C’est en cela que l’Etat ivoirien a fait de la promotion et du
développement du sport, des activités d’intérêt général. Il s’en suit que son
organisation relève de la compétence de l’Etat. Mais l’Etat partage en réalité
cette compétence avec le mouvement sportif national à savoir : le Comité
national Olympique et paralympique, les fédérations sportives, les associations
sportives, les sociétés sportives et les collectivités territoriales. Ce partage de
compétence de l’Etat avec les entités citées s’opère par le procédé de la
délégation. L’article 5 de la loi précitée dispose que « L’organisation du sport
relève de la compétence de l’Etat ». Ce faisant, « l’Etat délègue une partie de
ses prérogatives aux collectivités territoriales, aux comités nationaux olympique
et paralympique, aux fédérations sportives, aux associations sportives ou à
toute autre organisation sportive ». En fait, les avantages financiers
considérables qu’offre désormais l’activité sportive 37 surtout les sports
olympiques obligent les dirigeants de la Côte d’Ivoire avec le concours de leurs
partenaires privés à mettre le sport au rang des priorités sociales. Dès lors, le
sport cesse d’être considéré comme une simple activité de loisir sans incidence
économique pour devenir un enjeux économique et financier. Il suffit de voir les
montants colossaux des transferts des sportifs de haut niveau des différents clubs
africains vers les grands clubs européens pour s’en convaincre. C’est toute une
conception nouvelle et suffisamment dosée de considérations mercantilistes qui
constituent pour ainsi dire, le leitmotiv des États africains en matière sportive.

37
L’activité sportive aujourd’hui à une très forte valeur économique, elle fait vivre des sportifs professionnels.

[Date] 15
En effet, le développement des activités physiques et sportives de même que
leur promotion sont considérés comme d’intérêt général 38 et donc
rigoureusement encadrés39 par l’État. Celui-ci donne un agrément 40 aux
fédérations sportives qui participent alors à la mise en œuvre d’une mission de
service public des sports. Ce faisant, dans chaque discipline sportive, une seule
fédération sportive agréée reçoit de plein droit, délégation du Ministre des
Sports41 pour organiser les compétitions, procéder aux sélections et édicter des
règles techniques régissant sa discipline. La compétence des fédérations
sportives s’étend aussi sur l’élaboration des règles relatives à l’organisation des
manifestations ouvertes à ses licenciés. Qu’en est-il du règlement ?

B- Le règlement, une source non négligeable

Le règlement constitue de près comme de loin, une source du droit du sport


en Côte d’Ivoire. Le mot règlement renferme une diversité d’actes juridiques,
notamment, le règlement en tant qu’acte administratif unilatéral de caractère
normatifs à portée générale. Il s’agit de règlement d’application et de règlement
autonome. Mais le règlement qui est ici visé est celui d’application. C’est l’acte
de l’autorité gouvernementale qui vient déterminer avec plus de précision la
manière dont, un texte de loi doit être exécuté. Nous avons entre autres, le
Décret n° 2016-476 du 07 juillet 2016 relatif aux modalités de la délégation
38
L’article 46 al. 1 de la loi n° 2018/014 du 11 juillet 2018 portant organisation et promotion des activités
physiques et sportives au Cameroun dispose que « Les fédérations sportives participent à l’exécution d’une
mission de service public ». Au Sénégal, l’article 37 de la loi n ° 1984/59 du 23 mai 1984 dispose que « Il peut
être constitué, au niveau national, pour chaque discipline sportive, une fédération dirigeante chargée par
délégation d’administrer, d’animer, de développer la discipline considérée ». En Côte d’Ivoire, la loi n° 2014-
856 du 22 décembre 2014 relative au sport dispose en son article 3 que « La pratique du sport est un droit
reconnu à toutes les catégories de la population sans distinction d’âge, de sexe, de race, de religion, d’état
physique ou mental. Sa promotion et son développement sont d’intérêt général ». L’article 23 alinéa 2 dispose
quant à lui que « Les fédérations sportives participent à l’exécution d’une mission d’intérêt général ».
39
En Côte d’Ivoire, le sport est régi par la nouvelle loi n° 2014-856 du 22 décembre 2014 ; au Cameroun
l’encadrement du sport par l’État est le fait de la loi n° 2018/014 du 11 juillet 2018 portant organisation et
promotion des activités physiques et sportives au Cameroun ; au Maroc, c’est la loi n°30-09 promulguée par le
dahir N°1-10-150 du 24 Août 2010.
40
L’article 25 alinéa 1 de la loi nouvelle loi ivoirienne sur le sport précité dispose que « Les Fédérations
sportives régulièrement déclarées et publiées doivent être agréées par le Ministre en charge des sports ».
41
L’alinéa 2 de l’article 25 de la même loi Ivoirienne dispose quant à lui que « toute fédération sportive agréée
reçoit de plein droit délégation du Ministre des Sports ».

[Date] 16
des pouvoirs aux Fédérations sportives, ce texte règlementaire dispose que les
Fédérations sportives reçoivent délégation de pouvoirs en matière de
développement et de promotion du Sport dans leurs disciplines
respectives pour : coordonner les activités des Associations sportives affiliées
sur le territoire national ; promouvoir le genre dans le domaine du sport ;
organiser des compétitions avec délivrance de titres nationaux et internationaux
sous l’égide des Fédérations internationales concernées. Elles participent
également à la détection des talents sportifs, à la sélection des sportifs
professionnels aux compétitions internationales, sous réserve des règles et
usages en matière de sélection des Athlètes pour les compétitions olympiques et
paralympiques… Le Décret n° 2016-694 du 07 septembre 2016 relatif au
statut de sportif de haut niveau fixe quant à lui, les règles relatives au statut du
sportif de haut niveau conformément aux dispositions des articles 56 à 59 de la
Loi n° 2014-856 du 22 décembre 2014 relative au sport. Le Décret N° 2017-111
du 15 février 2017 fixe le seuil des ressources annuelles permettant aux
fédérations sportives de designer un commissaire aux comptes. Ce texte indique
le seuil de ressources annuelles, au-delà duquel, toute fédération sportive est
tenue de désigner un commissaire aux comptes pour assurer le contrôle de sa
gestion financière, conformément aux dispositions de l’article 32 de la loi n°
2014-856 du 22 décembre 2014 relative au Sport. Comme on peut le constater,
ces textes de sources règlementaire, ne constituent pas moins de véritables
sources du droit du sport en Côte d’Ivoire.

Paragraphe 2 : La découverte par le juge d’un service public des sports

La doctrine des juristes sportive avait posé la question de savoir la nature


juridique de l’activité sportive, et le régime juridique qui devait s’appliquer à
elle. Ce débat sera tranché par le juge administratif qui décidera dans sa décision
F.I.F.A.S un service public administratif des sports. Ainsi, si le juge
administratif, se présente comme le gardien de l’ordre juridique étatique (A). Le

[Date] 17
juge judiciaire, tout en s’alliant sur son homologue administratif, reconnaît un
droit transnational sportif (B).

A- Le juge administratif, gardien de l’ordre juridique étatique

Jean-Claude BONICHOT soulignait, il y a quelques années déjà que l'évolution


du contentieux sportif « allait dans le sens d'un élargissement de la compétence
administrative, le juge administratif devenant de plus en plus le juge naturel des
fédérations sportives, considérées désormais comme de véritables groupements
administratifs »42. Cette extension se réalise pour faire prévaloir l'ordre juridique
étatique. L'origine de la jurisprudence en la matière remonte à l'arrêt FIFAS de
1974 à l'occasion duquel le Conseil d'Etat a raisonné en termes de «
compétences implicites » ou « impliquées ».
Le juge est protecteur des règles d'ordre public. La confrontation de l'ordre
juridique étatique et de l'ordre juridique sportif sur le terrain de l'ordre public
n'implique pas une sanction systématique des pratiques constatées. Le juge
assure l'ordre dans les ordres. La fonction d'ordonnancement des ordres
juridiques est au cœur de sa fonction de juger. L'ordonnancement permet le
dépassement de la simple hiérarchisation pour permettre la coordination d'ordres
juridiques nécessairement complémentaires. Le contentieux sportif impliquant
des normes transnationales, a fortiori le contentieux sportif relatif au football, est
rare ; mais à chaque fois qu'il a eu l'occasion, le juge administratif n'a laissé
aucune place au doute sur sa position. Sans se cantonner exclusivement au
secteur du football, nous allons essayer d'illustrer par quelques décisions la
position du juge administratif. Citons tout d'abord l'affaire Pingeons, du nom du
cycliste français, contrôlé positif en Belgique, et suspendu par la fédération
beige. En application de l'article des Règlements généraux de l‘Union cycliste
internationale, la fédération française avait notifié au coureur l'extension de la
mesure au territoire français, sans conduire de nouvelle procédure disciplinaire.

42
BONICHOT Jean-Claude « Le Conseil d’État et les fédérations sportives », R.J.E.S. n°3, 1987, pp. 3-30.

[Date] 18
Cet article, disait la fédération française, la plaçait dans une situation de
compétence liée vis-à-vis de l’UCI. Le commissaire du gouvernement avait pour
sa part estimé que la fédération française ne détenait pas de compétence liée
quant à l'extension des sanctions prononcées par une fédération étrangère. De ce
fait Ie commissaire a estimé que le juge administratif pouvait se dispenser de
trancher la question de la valeur du règlement UCI en droit français. Citons
encore l’affaire Bunoz. Dans l'espèce, un nouveau règlement de la Fédération
Française de Basketball (FFBB) limitait Ie nombre de joueurs étrangers dans le
championnat national par référence aux critères de qualification de la FIBA pour
les compétitions internationales. Ce règlement prévoyait qu'une équipe ne
pouvait inscrire sur la feuille de match au maximum deux joueurs non
sélectionnables en équipe de France selon Ie critère FIBA régissant Ie statut
national du joueur. Le Conseil d'Etat jugea en l'espèce que Ie règlement de la
FFBB était illégal parce qu'il méconnaissait les dispositions du code de la
nationalité qui interdisent d'établir des distinctions entre les français de
naissance et ceux ayant acquis la nationalité française postérieurement (la FBBB
avait ajouté au critère de nationalité française une condition d'ancienneté : cinq
ans d'affiliation). Le juge administratif français fait systématiquement preuve
d'une réticence voire d'une hostilité de principe vis-à-vis du droit transnational,
qui contraste un peu avec la position bienveillante du juge judiciaire.

B- La reconnaissance par le juge judiciaire d’un droit transnational


sportif
Le juge judiciaire, contrairement au juge administratif, ne contredit pas la
possibilité pour les sujets de l'ordre juridique sportif d'édicter des règlements à
caractère commercial par exemple. En effet, pour le juge judiciaire, cette activité
normative n'est pas en soi étrangère à l'activité des groupements sportifs, mais
elle peut être invalidée en raison des effets qu'elle produit sur un marché. Ce
faisant, ils admettent la possibilité pour ces groupements et notamment, pour les

[Date] 19
fédérations délégataires d'édicter des règlements de droit privé en sus de ceux
créés en application de leur mission de service public. Les juridictions
judiciaires reconnaissent donc un pouvoir normatif propre aux groupements
sportifs qui constituent le fondement de l'ordre juridique sportif. Ils peuvent
également conférer la formule exécutoire sur les sentences du TAS qui leur sont
soumises dans le cadre de la procédure d'exequatur. Dans cette hypothèse, les
juridictions judiciaires sont loin de manifester la volonté de replacer l'activité
des sujets de l'ordre juridique sportif dans le giron de l'Etat. Elles reconnaissent
au contraire la capacité de ces sujets d'organiser un mode de règlement de leurs
différends, légitimant d'autant les sentences du TAS. Prenons pour exemple la
décision rendue par une Cour d'Appel dans cette affaire, le juge étatique a assuré
la promotion d'une règlementation privée, en l'occurrence le règlement de la
FIFA concernant le statut et le transfert des joueurs. En effet, les juges ont
estimé qu’il « est constant que ce règlement régit les transferts internationaux
de joueurs professionnels de football et qu'il est « applicable de plein droit ».
En suggérant que les règles non étatiques pourraient directement accéder « au
rang de droit applicable », sans délégation de la lex contractus, l'arrêt rapporté
exprime son adhésion à la théorie du « contrat sans loi ». D'après la doctrine,
pour qui adhère aux thèses du positivisme, c'est-à-dire à l'idée qu'il n'y aurait de
sources « que par délégation de l'Etat », Ie règlement FIFA pourrait produire
effet en tant qu'usage conventionnel. L'arrêt ne démentirait pas forcément cette
analyse puisqu'on peut lire que « la convention ne vient pas en contradiction
avec ce règlement puisqu'elle ne fait que confirmer que, sur ce point, la SA
Racing club de Lens ne devait pas débourser de somme supplémentaire ».
Pour les tenants de la thèse du pluralisme juridique, Ie règlement FIFA serait
directement appliqué en tant que norme de droit objectif. Sans même aller
jusqu'à reconnaître qu'une entité privée aurait la capacité à produire du droit
positif, il suffirait d'admettre que la règle FIFA, en tant qu'elle est
systématiquement appliquée à l'échelle mondiale pour régir les opérations de

[Date] 20
transferts internationaux, a engendré un « droit spontané » qui mériterait d'être
accueilli pour ce qu'il est, c'est-à-dire une vraie règle de droit, générale et
permanente.
Cependant, dans un arrêt plus récent, Ie juge judiciaire a semble-t-il fait marche
arrière et a refusé de donner effet à une disposition du règlement de la FIFA.
Alors que la FIFA, dans son règlement gouvernant l'activité des agents de
joueurs, semblait clairement préciser qu'un litige international impliquant un
agent devait être soumis à la commission du statut du joueur de la FIFA, un tel
contentieux a été accueilli par Ie juge judiciaire français. Pour la Cour de
cassation, la disposition réglementaire en question n'excluait pas l'exercice direct
d'un recours devant une juridiction étatique. Dans cette affaire un agent
néerlandais, après que l’Olympique lyonnais a refusé de lui payer sa commission
d'agent relative à sa rémunération lors du transfert du joueur malien Mahamadou
Diarra, en 2002, du club de Vitesse Arnhem, aux Pays-Bas, vers le club
rhodanien, a attaqué le club français devant le tribunal de commerce de Lyon.
Les juges de première instance se sont déclarés compétents, mais les juges
d'appel ont estimé le contraire. En effet la cour d'appel de Lyon, dans un arrêt du
26 mars 2009, a jugé que l'article 22 du règlement de la FIFA gouvernant
l'activité des agents de joueurs, dans sa rédaction du 10 décembre 2000
applicable aux faits de l'espèce, imposait de saisir, non une juridiction française,
mais la commission du statut du joueur de la FIFA. La Cour de cassation, dans
l’arrêt précité, a infirmé la décision des juges d'appel. Pour elle, la disposition
réglementaire sur laquelle s'est fondée la cour d'appel liait bien les parties, mais
ne leur interdisait nullement de préférer saisir une juridiction étatique. Ainsi, «
Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites
» et c'est à ce titre, d'après le visa de l'arrêt commenté, que le règlement de la
FIFA gouvernant l'activité des agents de joueurs est ici applicable.

Section 2 : Les sources non étatiques

[Date] 21
Les sources non étatiques concernent les sources provenant du mouvement
sportif national et international. Le mouvement sportif national comprend : les
Fédérations sportives, les sociétés sportives, et le comité national olympique et
paralympique (paragraphe 1). Le mouvement sportif international comprend, les
institutions de conception et les institutions de régulation (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Les institutions de conception et de régulation


On entend par institution de conception et de régulation, les organisations
sportives internationales qui ont pour vocation de créer les règles qui gouvernent
la pratique du sport et au besoin à sanctionner la violation de celles-ci. Ce sont :
les institutions sportives internationales à compétence générales (A) et les
instances de régulations à compétence sectorielle (B).

A- Les institutions sportives internationales à compétence générales

Les usagers du sport n’agissent pas de manière isolée mais, déploient leurs
activités au sein des organisations structurellement organisées et disciplinées,
qu’on appelle : le mouvement sportif. Il s’agit notamment, d’organisations
étroitement imbriquées que sont, les comités olympiques et les fédérations
sportives. En effet, la Charte olympique de 2017, révèle que le mouvement
olympique comprend, outre le Comité international olympique (CIO), les
fédérations internationales de sports (FI), les comités nationaux olympiques

[Date] 22
(CNO), les comité d’organisations des jeux olympiques (COJO), les
Associations nationales (les fédérations sportives nationales)

B- La jurisprudence du TAS, une source plosive du droit du sport

Les sentences rendues par le TAS constituent une jurisprudence certaine qui
participe à la construction d’un droit qui se développe en s’alignant sur les
sources classiques du droit. À l’instar de la jurisprudence administrative,
judiciaire, pénale et commerciale, la jurisprudence arbitrale en matière sportive
est devenue une réalité qui s’affirme de plus en plus. Elle donne naissance à des
solutions de droit concordantes.

Il est souvent des cas où les arbitres déclarent ne pas être tenus ou liés par les
sentences qu’ils rendent par le passé dans une affaire identique. Mais n’empêche
qu’ils ne recourent pas moins à certains dispositifs passés comme précédant
pour solutionner le litige qu’ils ont à trancher. Dans certaines sentences, les
arbitres n’ont pas manqué de dire que « Il n’y a pas de règles du précédent
obligatoire, ou staredecisis. Cependant, une formation du TAS devra
évidemment essayer, si les éléments le permettent, d’arriver à la même
conclusion sur une question de droit qu’une précédente formation du TAS »43.
D’ailleurs, c’est cette voie qui est la plus exploitée lorsque les arbitres du TAS
sont confrontés à des difficultés d’espèce. Face à un cas de figure, la solution
consiste pour les arbitres à jeter un regard rétrospectif sur la jurisprudence du
TAS existante et de s’en inspirer. C’est ainsi, que dans une affaire, quand bien
même que la formation des arbitres ait déclaré détenir un plein pouvoir de revoir
l’affaire « sans être liés par l’autorité des précédents », les arbitres n’ont pas
manqué de révéler pour tant que, les circonstances de l’affaire nouvelle qu’ils
ont à trancher, diffèrent fondamentalement de celle précédente. Mais devant

43
CAS, aff. 2004/A/ 628, IAAF c/J. Young et al. Sentence du 28 juin 2004, publ. Sur internet ; voir de même
CAS OG, aff. 08/005, Fédération Azerbaïdjanaise de hockey sur gazon et al c/ FIH, sentence du 08 août 2008,
publ. Sur internet, p. 4.17, Rev., arb., 2008, p. 538, obs. M. MAISONNEUVE.

[Date] 23
l’aveu des arbitres et malgré le fait qu’il n’existe pas « d’autorité obligatoire de
précédent devant le TAS »44, les arbitres n’ont eu aucun mal à statuer en
s’appuyant sur les sentences précédentes pour trancher le litige qui leur est
soumis.

Mieux, il est rare de voir des sentences du TAS qui ne s’inspirent pas des
solutions d’autres sentences rendues dans le passé par le même tribunal. C’est
sans nul doute la raison pour laquelle un nombre important d’auteurs est
unanime sur le fait que, « l’importance donnée aux précédents dans les
sentences rendues sous l’égide du Tribunal arbitral du sport »45 constitue sans
exagération aucune, un moyen de la rapidité de la procédure d’appel devant la
formation du TAS. Antonio RIGOZZI estime quant à lui que « L’on ne
rencontre pratiquement plus de sentences du TAS qui ne se réfère à un
précédent pour asseoir la décision de la formation »46.

Franck LATTY soutient de son côté que « la pratique des formations


arbitrales montre un besoin sinon une tendance constante des arbitres à
augmenter leurs décisions en se référant aux sentences, aux avis consultatifs,
voire aux ordonnances, antérieurement rendus par le Tribunal arbitral du
sport »47. Dans plusieurs espèces d’affaires, le Tribunal arbitral du sport ne s’est
pas moins inspiré de sa jurisprudence antérieure pour trancher des litiges qu’il
avait à connaître.

Le propre de la jurisprudence, comme le soutiennent les arbitres eux-


mêmes, est de leur permettre, soit d’avoir une réponse précise à la question de
droit que pose le cas d’espèce qui leur est soumis, soit de confirmer une règle de
droit déjà émise. On est dans une situation de la reconduction de la

44
CAS, aff. 2005/A/895, B. Lissarague et al c/FEI, sentence du 9 mars 2006, JDI, 2009, p. 303, &49 note D.
HASCHER.
45
Eliane LOQUIN, « Sport et droit international privé », in Didier PORACCHIA et Fabrice RIZZO (dir)
Lamy droit du sport, 2003, n° 186-150, Voir également du même auteur obs. sous CAS OG, aff. 02/001, S.
Prusis et al. c/ CIO et al., sentence du 5 février 2002, JDP, 2003, p. 268.
46
Antonio RIGOZZI, l’arbitrage international en matière de sport, préc. ? 2005, n° 1261. P. 78.
47
Franck LATTY, La lex sportiva, recherche sur le doit transnational, thèse, Paris X, 2005, p. 277.

[Date] 24
jurisprudence existante, ou encore, on pose une nouvelle règle de droit et on
parle cette fois ci, d’un revirement jurisprudentiel. On peut, à titre d’exemple
citer quelques solutions de litiges données par les arbitres eux-mêmes, et qui
s’appuient sur des précédents bien établis 48. Il en va ainsi d’une jurisprudence
qui rappelle chaque fois que cela est du possible, l’application de certains
principes généraux du droit en matière sportive. L’un de ces principes veut que
« Au regard de la jurisprudence du TAS, le principe de la justice procédurale
est sans aucun doute au rang des principes non écrits du droit des sports qui
doivent être respectés par les Fédérations sportives internationales »49. Les
autres : « le principe d’égalité de traitement et le principe de proportionnalité,
sont des principes auxquels la jurisprudence du TAS fait un recours constant »50.
Franck LATTY renchérit en ajoutant que la valeur des précédents de ces
principes y compris d’autres principes est telle qu’elle n’est plus à démontrer. Il
conclut qu’il : « saute aux yeux lorsqu’est analysée la pratique arbitrale »51.

Comme on peut le constater, certains principes bien connus des autres


branches du droit, en dépit de transcription directe dans le droit du sport ne
doivent pas pour autant être méconnus par les arbitres. Ils sont tenus de les
appliquer lorsque la situation le commande. En d’autres termes, en absence de
tout texte, les arbitres doivent garder en mémoire que, pour une bonne
administration de la justice sportive, ils doivent être en phase avec l’esprit du
juge ordinaire. Ils doivent le faire pour réduire au maximum les critiques
négatives que pourraient faire l’objet leurs sentences.

L’on peut également citer d’autres solutions jurisprudentielles consacrées


par le TAS qui sont d’une importance particulière. Ainsi : « selon la

48
Mathieu MAISONNEUVE, « L’arbitrage des litiges juridiques » préc., p. 449.
49
Sentence TAS, 22 juillet 1996, Arbitrage JO 96/001, US Swimming c/ FINA, in Recueil des sentences du TAS
1986-1998, p. 381, para. 15 ; Sentence du 22 juillet 1996, TAS arbitrage, 96/153, Watt. c/ ACF, p. 341, para. 10 ;
CAS, aff. 98/200 AEK, Athènes et al. c/ UEFA, sentence du 20 août 1999, Rec. TAS II, p. 105 & 158.
50
TAS, JO, aff. 00/004, J. Kibunde et al. c/AIBA, sentence du 18 septembre 2000 Rec. TAS II, p. 617, spéc. P.
623, & 12.
51
Franck LATTY, « La lex sportiva, recherche sur le droit transnational », préc., p. 269.

[Date] 25
jurisprudence constante du TAS, un vice de procédure n’est pas en lui-même
suffisant pour annuler une décision contestée ; il doit être établi que le vice de
procédure a influé sur le résultat de l’affaire. Quand un vice de procédure ou
une injustice dans la procédure interne à un organisme sportif a pu être réparé
par le biais de la procédure équitable offert par le TAS, et la décision contestée
était la bonne sur le fond, les formations du TAS n’ont pas d’hésitation à
confirmer la décision contestée »52. En vertu de cette solution, les arbitres sont
réticents quant à l’idée de privilégier leurs propres opinions au détriment de
celles qui ont guidées les auteurs de la décision qui est déférée à leur censure.

La tâche des arbitres dans de pareilles situations consiste à apprécier la


décision prise par l’autorité fédérale conformément aux dispositions pertinentes
contenues dans le règlement sportif sur lequel s’est appuyée cette autorité pour
motiver sa décision. L’objet de cette vérification est de s’assurer que l’autorité
fédérale n’a pas été guidée par la mauvaise foi dans la prise de la décision
contestée. Le contentieux dans lequel les arbitres ont le plus souvent recours à la
jurisprudence du TAS est celui des affaires se rapportant à la répression du
dopage sportif.

Il en va ainsi, selon la jurisprudence du TAS que « les fédérations


internationales jouissent de la compétence principale au regard de la lutte
contre le dopage. La conséquence naturelle de cela est que en cas de
contradiction, leurs règles prévalent sur celles qu’un comité national olympique
ou une autorité sportive nationale pourrait avoir édictée »53.

Un autre fait remarquable est que, dans le partage de compétences entre les
autorités privées et publiques dans la lutte contre le dopage, en milieu sportif, il

52
CAS, aff. 2004/ A/777, Arcycling AG c/ UCI, sentence du 31 janvier 2005, publ, sur internet para. 104 dans le
même sens, voir CAS aff. 2005/A/835 & 942, PSV Eindhoven, L., Do Bomfim et al., sentence du 3 février 2006,
publ. Sur internet. Voir encore TAS aff. 2004/A/761, Olympique de Marseille, M. Flamin et al. Sentence du 31
octobre 2005, publ. Sur internet para. 58 ; TAS aff. 2003/A/490, Fédération française d’équitation c/FEI,
sentence du 5 février 2004, publ. Sur internet, para. 19.
53
CAS, aff. 98/192, UCI, c/ S., DanmarkCykle Union and DanmarkIdraets-Forbund, sentence du 21 octobre
in M. Reeb éd, Recueil des sentences du TAS II 1998-2000, haye, 2002, p. 205 et s.

[Date] 26
« ressort de la jurisprudence du TAS que le pouvoir des fédérations
internationales, telles que l’UCI, s’exerce quand bien-même que le contrôle et
la sanction du dopage seraient confiés à une autorité publique » 54. Il en résulte
qu’en cas de constatation d’une infraction de dopage d’un athlète, la compétence
pour connaître ce contentieux est partagée entre le pays sur le territoire duquel
l’infraction a été commise et la fédération sportive internationale qui est
l’instance suprême de la fédération nationale.

Relativement aux règles antidopage à proprement parler, la jurisprudence du


TAS sur la question semble ne pas faire l’unanimité chez les arbitres. La
divergence d’interprétation se trouve au niveau de l’acceptation de la règle de la
responsabilité objective créée par TAS55. Selon ce principe, si un sportif est
coupable d’une infraction de dopage, c’est-à-dire, si le résultat de ses
prélèvements se révèle positif, la conséquence de ce résultat doit être sa
disqualification de la compétition. Cette sanction doit pouvoir s’appliquer dans
toute sa rigueur même en absence de toute faute commise par l’athlète sur l’aire
de jeu.

Le problème qui pourrait se poser est celui de la sincérité, voire la véracité


du test que les médecins sont emmenés à faire sur le sportif. A ce propos, une
jurisprudence bien établie du TAS n’en dit pas moins, lorsqu’elle indique en des
termes clairs que « Les écarts par rapport à la procédure de test prévue par les
règles fédérales pertinentes invalideront les résultats d’une analyse seulement
lorsqu’ils sont suffisamment substantiels pour remettre en question la fiabilité
du test »56. Le recours des arbitres à la jurisprudence du TAS n’est pas
uniquement circonscrit aux questions de fond du droit, il vise aussi les questions
de forme.
54
TAS, aff. 2006 / A/1119, UCI c/ I Landaluze et al., sentence du 19 décembre 2006, publ. internet, para 44
55
TAS, aff. 94/126, Nagel c/ FEI, sentence du 9 décembre 1998, Rec., TAS II, p. 129, spéc. P. 133, & 6.
56
C. c/ IPF, CAS 98/188, sentence du 31 juillet 1998, p. 9 ; C. c/ FEI, CAS 98/184, sentence du 25 septembre
1998, p. 11 ; ITF c/ K. CAS 98/223, sentence du 31 août 1999, Recueil du TAS II, p. 345, 353 ; CAS
2000 /A/281, H. c/ FIM, Recueil du TAS II, p. 410-419 ; CAS, aff. 2003/A/ 385, I, Tchachina c/ FIG, sentence du
23 janvier 2003, Rec, TAS, III, p. 339-340, para. 15.

[Date] 27
Nous entendons la forme du droit, les questions d’ordres procédurales, en
l’occurrence le prononcé des mesures provisoires ou conservatoires. Il en va
ainsi, conformément à la jurisprudence du TAS : « lorsqu’il s’agit de suspendre
l’exécution d’une décision contestée, il faut considérer (a) si l’appel a prima
facie une chance raisonnable de succès au fond ; (b) si l’appelant risque de
subir un préjudice grave et irréparable du fait de l’exécution de la décision ; et
(c) la balance des intérêts entre les parties »57.

Par ailleurs il faudrait souligner le fait que, la jurisprudence du TAS


n’est pas uniforme, c’est-à-dire qu’elle n’est pas homogène. Elle ne forme pas
un bloc dans lequel on peut retrouver des solutions tout à fait identiques. Il
existe au sein de cette jurisprudence une variété de solutions. Mathieu
MAISONNEUVE estime que ce n’est pas « l’homogénéité absolue des
solutions, mais leurs homogénéité globale »58. La doctrine est partagée sur la
diversité des solutions jurisprudentielles du TAS. Cette diversité de solutions
jurisprudentielles fait que certains auteurs refusent qu’on admette les décisions
du TAS comme étant un phénomène jurisprudentiel 59. Certains se fondent sur la
définition de la jurisprudence qui veut qu’elle soit « l’ensemble des solutions
suffisamment concordantes rendues par les juridictions sur une question de
droit ». Cette définition de André-Jean ARNAUD, comme nous l’avons
souligné un peu plus haut, rejoint celle de Gérard CORNU qui définit la
jurisprudence comme étant « l’habitude de juger dans un certain sens, et
lorsque celle-ci est établie, le résultat de cette habitude »60.

Franck LATTY pense le contraire de ce que, ses homologues défendent avec


vigueur. Il dit que « Les contradictions relevées n’attentent pas à l’unité globale

57
CAS, aff., 2008/A/1525, Apollon Kalamarias FC c/ Fédération grecque de football et al. Sentence du 21 avril
2008, publ. sur internet, para. 62 ; Rev., arb., 2008 p. 569, obs., M. PELTIER.
58
Mathieu MAISONNEUVE, « L’arbitrage des litiges juridiques » préc., p. 449.

59
Andrea PINNA, « Le concept de jurisprudence arbitral et son application à la matière sportive », Gaz, Pal.,
15-17 octobre 2006, p. 28 et s.
60
Voir note de bas de page p. 109.

[Date] 28
des solutions apportées par le TAS, elles ne sont que des arbres top épars pour
cacher une forêt touffue de solutions jurisprudentielles concordantes 61 ».

Nous, nous pensons que ni l’un ni l’autre ne détient la solution pour le


problème posé, car les arguments de chaque partie comportent une part de vérité
qu’il ne faut pas passer sous silence. Mais si une proposition devait primer sur
l’autre, nous porterions notre choix sur celle des auteurs qui soutiennent que la
divergence de solutions que propose la jurisprudence du TAS n’a aucune
incidence pratique sur les questions de droit. En revenant sur la responsabilité
objective que crée la jurisprudence du TAS, le problème de discorde se situerait
au niveau de la faute.

En d’autres termes, faut-il tenir compte de la faute disciplinaire qui ouvre


droit à la répression de l’infraction pour faits de dopage ? Quelle est la position
des arbitres sur cette question ? Mathieu MAISONNEUVE donne une réponse
nette. Il dit que « s’il a toujours été admis qu’un contrôle positif en compétition
était de nature à entraîner la disqualification automatique du sportif concerné,
indépendamment de la question de savoir s’il avait commis une faute subjective
ou non, les arbitres du TAS sont en revanche partagés sur la question de savoir
si une telle faute est ou non un élément nécessaire au prononcé d’une
suspension disciplinaire »62.

Aujourd’hui, le débat sur la responsabilité objective n’a plus sa raison d’être


puisque, le code mondial antidopage l’a entériné. En outre, toutes les
fédérations sportives l’ont adopté dans leur règlement intérieur. Le code
dispose : « l’infraction de dopage est constituée dès lors qu’un athlète a ingéré
une substance interdite ou fait usage d’une méthode interdite, indépendamment
de son éventuelle faute ou négligence »63. Le code poursuit en indiquant que
« un athlète qui parvient à prouver qu’il n’a commis aucune faute ou négligence
61
Franck LATTY, La lex sportiva, thèse Paris X, 2005, p. 293.
62
Mathieu MAISONNEUVE, L’arbitrage des litiges sportifs, Bibliothèque de droit public Tome 267, LGDJ
Lextenso édictions p. 451.
63
Article 25 du Code Mondial antidopage adopté en mars 2003 et entré en vigueur en janvier 2009.

[Date] 29
échappe à tout suspension disciplinaire 64». Aussi, les aspects de divergences
évoqués par Andreas PINNA portent sur la modulation des sanctions, c’est-à-
dire l’inflexion des sanctions du délinquant coupable d’infraction de dopage.
L’application des sanctions n’échappe pas à la divergence des opinions
doctrinales. Les juges du TAS sont également partagés. Alors que tous les
arbitres préconisent dans l’application des sanctions, le respect du principe de
proportionnalité, il y en a certains qui sont pour une application stricte des
sanctions contenues dans les règlements sportifs de la fédération dont le sportif
est poursuivi pour faute disciplinaire. D’autres par contre demandent à leurs
collègues d’aller au-delà des sanctions prévues par les règlements sportifs dès
lors que, ceux-ci ne leur donnent pas plus de marge de manœuvres suffisantes.

À l’heure actuelle, un consensus a été trouvé par les arbitres du TAS : il


s’agit d’un équilibre trouvé. Cet équilibre tient compte du principe de
proportionnalité qui fait partie des principes généraux du droit. Il est de
jurisprudence constante du TAS qui indique qu’« une sanction infligée ne doit
pas être évidemment et grossièrement disproportionnée par rapport à la
faute »65. Hormis ce qui vient d’être évoqué, la recherche d’autres désaccords
sur la jurisprudence du TAS va s’articuler autour des circonstances de faits. Face
à ces circonstances, les arbitres n’ont d’autres options que d’en tenir compte
dans l’appréciation de la proportionnalité des sanctions qu’ils prononcent et
contrôlent. Dans ces circonstances, l’âge de l’athlète est parfois pris en compte.
D’autres circonstances factuelles entrent en jeu dans l’existence du phénomène
jurisprudentiel.

L’arbitrage des litiges sportifs, bien que très proche des autres systèmes
d’arbitrage commercial, il conserve tout de même quelque chose de particulier.
64
Article 25 du Code Mondial antidopage adopté en mars 2003 et entré en vigueur en janvier 2009.
65
CAS. 2004/A/690, Hipperdinger c/ ATP Tour, Inc., para., 86 ; CAS 2005/A/830, Squizzato., c/ FINA, para.,
10.26 ; CAS 2005/C/976 & 986, FIFA & WADA, para., 143. ACS, aff., 2007A/1217, Feyenoord Rotteram c/
UEFA, sentennce du 20 avril 2007, publ. Sur internet, & 12,4 ; CAS., af., 2006/A/1175, E. Daniute c/ IDSF,
sentence du 26 juin 2007 publ. Sur internet para. 91, Rev. arab., 2008, p.551, obs. Cécile CHAUSSARD. Voir
de même CAS. Aff. 2005/A/847, H. Knauss c/ FIS, sentence du 20 juillet 2005, JDI, 2007, spéc., p. 244.

[Date] 30
Il s’agit d’une part de son cadre organisationnel et d’autre part de la spécificité
des litiges sportifs. Relativement au cadre organisationnel, pour ne prendre que
l’exemple du tribunal arbitral du sport. Il faut souligner que l’organisation
administrative, ainsi que les différentes procédures qui sont applicables
concourent à prononcer des sentences cohérentes qui obéissent à une logique
jurisprudentielle. En effet, les arbitres du tribunal arbitral du sport, tirent leur
pouvoir de jugement dans l’institution arbitrale qui les nomme.

La plupart des arbitrages en matière sportive est organisée autour d’un


centre d’arbitrage et tous ces centres d’arbitrage ont presque tous une emprise de
fait. On pourrait assimiler ce fait à un monopole au plan national comme
international sur les arbitres qu’ils désignent. Au plan national par exemple au
Cameroun, c’est la Chambre de conciliation et d’arbitrage du Comité national
olympique du sport qui est le seul centre habilité à connaître tous les litiges qui
intéressent le milieu sportif. Au niveau international, c’est le centre international
d’arbitrage en matière sportive, avec pour juridiction le tribunal arbitral du sport.

Le TAS a pour mission principale de résoudre tous les litiges sportifs


desquels il est saisi en application de ces procédures 66. Il est en outre chargé de
l’administration de la quasi-totalité des arbitrages en matière sportive 67. C’est ce
qui justifie que les sentences rendues par lui ne sont pas uniquement considérées
comme relevant de sa seule sphère jurisprudentielle. Elles doivent pouvoir
représenter la jurisprudence arbitrale sportive. Ces arguments, s’ils peuvent
prospérer devant l’arbitrage en matière de sport, ils ne sauraient pour longtemps
résister en matière de l’arbitrage commercial. En effet, l’arbitrage en matière
commercial utilise des centres d’arbitrages dispersés. Ce qui ne permet pas la
cohérence entre les sentences rendues par les différents centres, alors même que
le propre de la jurisprudence commerciale exige une certaine cohérence dans les
sentences que rendent tous ces centres d’arbitrages. Dans le domaine du sport,
66
Mathieu MAISONNEUVE, L’arbitrage des litiges sportifs, op., cit. p.453.
67
Philippe FOUCHARD, L’arbitrage commercial international, Dalloz, p. 147.

[Date] 31
lorsqu’on parle de la jurisprudence arbitrale du sport, il faut se référer à la
jurisprudence du TAS. Mathieu MAISONNEUVE aborde le système de liste
fermée des arbitres du TAS. Il donne les avantages en ce qu’il permet une
certaine lisibilité sur le profil des arbitres choisis, mais en même temps, il ne
manque pas de dénoncer ce système de liste fermée qui selon lui : « est de
nature à créer un esprit de corps entre leurs membres qui incite à ne pas mettre
radicalement en cause les solutions de droit consacrés par d’autres dans de
précédentes affaires »68.

Un autre fait qui doit être indiqué est que dans le cadre du TAS, sur la liste
des arbitres choisis, sur un nombre avoisinant les trois cents arbitres, seul
quelques-uns parmi eux sont chaque fois désignés. Cette façon de faire, doit
toutefois être mise sur le compte de l’organisation technique de l’institution
arbitrale.

Mais la cohérence des sentences arbitrales du TAS est aussi assurée par la
promotion des décisions arbitrales que l’autorité du centre d’arbitrage entend
ériger en jurisprudence. Cela peut se faire en dehors de toute procédure
juridictionnelle. C’est l’occasion de rappeler l’importance du système de liste
indiquée dans le paragraphe précédent. La formation de ces arbitres au travers
des séminaires organisés par le centre d’arbitrage 69 est un moyen approprié pour
eux de mettre à profit certaines solutions de litiges jugés par le tribunal. Ainsi, le
Tribunal fédéral suisse a reconnu au système de liste, qu’en permettant aux
arbitres du TAS « d’être régulièrement informés de l’évolution du droit du sport
et de la jurisprudence de ce tribunal, celui-ci a le mérite d’assurer une certaine
unité de la doctrine dans les décisions rendues 70 ». Hormis la possibilité de
promouvoir la jurisprudence arbitrale du TAS en dehors de toute procédure
juridictionnelle, l’on peut le faire au cours d’une procédure arbitrale.

68
Mathieu MAISONNEUVE, L’arbitrage des litiges sportifs, préc. p.453.
69
Mathieu MAISONNEUVE, L’arbitrage des litiges sportifs, préc. p. 192.
70
Trib. Féd., 27 mai 2003, L. Lazutina c/CIO et al., ATF, 129 III 457.

[Date] 32
Par ailleurs, l’une des particularités de l’arbitrage en matière sportive est
que les arbitres bénéficient d’une investiture, non pas des États comme on peut
le constater au niveau commercial, mais du centre international d’arbitrage dont
dépend le TAS. Il semblerait que la mission des arbitres en matière commerciale
est de résoudre les litiges commerciaux, et ce dans les limites des pouvoirs fixés
par les États. Cette habilitation étatique n’est pas de nature à garantir la
cohérence des sentences rendues. Elle concourt bien entendu à une meilleure
prise en charge des intérêts des États, lesquels sont consignés dans leurs lois de
police71. Si ce sont les intérêts des parties au procès et ceux de l’État qui guident
les solutions des arbitres dans les litiges commerciaux, en matière sportive, ce
sont les intérêts individuels des parties et des considérations qui sont en rapport
avec l’intérêt supérieur du mouvement sportif international qui comptent. Il
s’ensuit que l’existence d’une jurisprudence en matière sportive est une réalité
qui relève du droit processuel et des éléments factuels dont, son apport pour le
droit du sport n’est pas moins déterminant. Ainsi, l’articulation du dialogue
normatif entre l’ordre juridique étatique et l’ordre juridique sportif nous a sans
doute permis de connaître leur point de rencontre, mais aussi, il nous a
également permis d’entrevoir son issue.

Chapitre 2 : LE RÔLE DES INSTITUTIONS SPORTIVES DANS LA


DÉFINITION DES RÈGLES DU DROIT SPORTIF

La hiérarchisation et la mondialisation du phénomène sportif ont engendré, la


multiplication du niveau de production normative. Il s’ensuit que les institutions
chargées de légiférer en matière sportive diffèrent, selon qu’on se trouve dans les Etats
ou qu’on est à l’international. Ainsi, au plan international, certaines institutions
disposent de compétences les plus étendues pour réguler le sport (Section 1). Dans

71
Ibrahim FADLALLAH, « L’ordre public dans les sentences arbitrales », Rec., cours La Haye, 1994, t.249,
p. 385.

[Date] 33
l’ordre juridique national, d’autres institutions interviennent dans l’édiction des règles
sportives (Section 2)

Section 1 : Les Institutions à compétence générale

La mondialisation du sport de compétitions et de loisir exige des politiques de


régulation coordonnées au niveau des instances de régulation. En effet, l’activité
sportive va avec des maux tels que : corruption, dopage, fraudes financières et quelque
fois même, le phénomène du racisme ; pour les endiguer, il est nécessaire qu’on
définisse un ensemble de politiques concertées et applicables sur les territoires
concernés par la pratique du sport. Pour atteindre cet objectif, quelques Institutions
internationales publiques se sont vues attribuer des compétences en matière de
règlementation sportive. Il s’agit notamment, des organisations onusiennes à
compétence universelle (paragraphe 1) et les organisations à compétence régionale
(paragraphe 2)

Paragraphe 1 : L’action directe des Organisations Onusiennes dans la régulation


du sport mondial

En matière sportive, l’Onu dispose d’une compétence normative générale lui


permettant soit de conclure des accords internationaux, soit de résoudre des crises ou
de faire des recommandations. L’Onu a, à cet effet, montrer à plusieurs reprises, de
façon indirecte, son intérêt pour les questions sportives. Ainsi, pour prendre en compte
la dimension internationale du sport, l’Onu intervient dans plusieurs domaines relatifs
au sport. Mais que l’action de l’Onu soit directe (A) ou indirecte (B), cette action, au
regard du droit est dépourvue d’effets juridiques contraignants.

A- Les actions directes de l’Onu en matière sportive

L’Onu a directement influé sur la règlementation du sport dans le monde. Son


intervention résulte d’une invitation de la communauté internationale qui a vu dans le
sport, un moyen de tolérance, d’acceptation, d’épanouissement et de cohésion des
peuples de toutes horizon. Les interventions de l’Onu dans la création des règles
devant servir à la promotion du sport dans le monde, ne s’auraient à dire vrai, être
qualifiées de droit du sport. La raison évoquée est que, les principes dégagés par l’Onu

[Date] 34
dans ses recommandations sur le sport n’ont aucun caractère contraignant pour les
Etats. En clair, les Etats ne sont pas tenus de rendre compte de l’application correcte
desdites règles et de leur inobservation. Les recommandations de l’Onu dans le
domaine du sport constituent le soft Law72 pour des raisons évoquées plus haut.
Néanmoins, interviendra directement dans le sport pour le hisser au rang de droit
fondamental de l’homme quand bien même que, les Etats sont un peu hésitant à
reconnaître ce droit, comme étant un droit fondamental à l’instar des autres droits
fondamentaux. Sur ce point, on peut lire au terme de l’article premier de la Charte
Internationale de l’éducation physique et du sport adoptée sous l’égide de l’Unesco le
21 novembre 1978 que « la pratique de l’éducation physique et du sport est un droit
fondamental pour tous ». L’on comprend pourquoi l’Onu a combattu la discrimination
raciale (l’Apartheid) en Afrique du Sud en milieu sportif. L’Onu est également
intervenu dans le sport pour combattre les discriminations basées sur genre. À ce
propos, on peut citer, la Convention Internationale sur l’élimination de toutes les
formes de discriminations à l’égard des femmes adoptée le 18 décembre 1989. Ce
texte dispose en son article 1 que les femmes ont « les mêmes possibilités de participer
activement aux sport ». Par ailleurs, l’Onu par l’intermédiaire de l’Unesco a pris en
compte la problématique de la lutte contre le dopage en milieu sportif. C’est ainsi,
qu’en 2003 l’Unesco sera mandatée par l’Assemblée Générale de l’Onu à l’effet de
coordonner l’élaboration d’une convention internationale de lutte contre le dopage en
milieu sportif. A côté de cette action directe de l’Onu, s’ajoute celle de l’utilisation du
sport au service du développement et de la paix. En fait, le sport a un ancrage
incontestable sur la politique. C’est sans doute, un instrument puissant de mobilisation
des masses populaires pour servir la cause du politique. Il suffit de se rappeler des
effets de la suspension de la Russie de la participation de la coupe du monde qui se
jouera en 2024. Parfois, pour rechercher la paix et la stabilité internationale, les nations
ont recours au boycott73 en milieu sportif. Celui-ci est une arme plus efficace en milieu
sportif qu’il ne l’est en milieu politique.

72
Frédéric Buy Jean-Michel Marmayou Didier Poracchia Fabrice Rizzo, Droit du sport, 5e édition LGDJ 2018.
73
Franck LATTY, « Le boycott des jeux Olympique à l’épreuve du droit ». Gal. Pal. 19-21 oct. 2008, P. 16

[Date] 35
Par ailleurs, le sport représente pour les Nations-Unis, un moyen de
développement économique, culturel et social des Etats, c’est sans nul doute de près,
un puissant levier en terme de création d’emploi. C’est, cette dimension du sport qui a
été mise en exergue dans le rapport publié en 2003, intitulé « le sport au service du
développement et de la paix ». L’Onu est aller plus loin en prenant une résolution qui a
proclamé l’année 2005, comme étant « Année Internationale du sport et de
l’éducation physique en tant que moyen de promouvoir l’éducation, la santé, le
développement et la paix74 ». En outre, en 2013, un autre évènement marquera cette
année. Il s’agit de la proclamation par l’Onu de la « journée internationale du sport au
service du développement et de la paix75 ». Ces différentes interventions de l’Onu dans
le sport mondial témoignent de l’intérêt que les Nations Unis ont pour le sport et le
souci de le règlementer. Mais hormis ces actions directes, l’Onu a recours à certaines
de ses structures spécialisées pour réglementer la pratique seine du sport. Cette
intervention est qualifiée d’indirecte ou concertée.

B- L’action indirecte de l’Onu

Le développement et la paix sociale sont intimement liés à une politique savamment


menée avec tous les acteurs intervenant dans un environnement donné. L’Onu étant
conscient de ce postulat va influer, même sensiblement, sur la politique sportive via les
institutions sportives que sont : le Comité international Olympique (CIO) et les
Fédérations Sportives Internationales. L’Onu aura pour partenaire, le CIO ; leur
collaboration leur permettra de bénéficier réciproquement d’une légitimité 76 auprès de
leur auditoire. Ce partenariat permettra au CIO d’avoir en 2009, le statut
d’Observateur auprès des Nations Unis. Cela représente, pour une organisation non
Gouvernementale, comme le CIO, une grande distinction. Cette qualité a des
conséquences positives sur les relations diplomatiques qu’entretient le CIO avec les
Etats. En retour, l’Onu a recours au mouvement sportif international pour étendre ses
actions de développement économique, social et culturel dans les pays du tiers monde.

74
Résol. AG. ONU, 58/3 nov. 2003.
75
Résol. AG. ONU, 67/ 296., 23 août 2013
76
Résol. AG. ONU, 69/6, 31 oct. 2014, « Le sport le moyen de promouvoir l’éducation, la paix et le
développement » Dans cette résolution, l’ONU « appuie l’indépendance et l’autonomie du sport ainsi que la
mission du CIO, qui est de conduire le mouvement Olympique »

[Date] 36
En outre, le CIO va s’approprier les luttes contre le SIDA, l’exploitation du travail des
enfants, l’intolérance, le racisme, les discriminations ethniques et sexistes…

L’idéologie prônée par le CIO à propos de la trêve olympique a eu le soutien


favorable de l’Onu. Les Nations-Unis vont utiliser cette opportunité pour tenter de
résoudre durablement les conflits entre les Etats, et limiter leurs impacts négatifs sur la
sécurité des populations. Pour ce faire, l’Onu a dès lors encourager « les Etats
membres à prendre l’initiative de respecter la trêve olympique et à œuvrer pour le
règlement pacifique de tous les différends internationaux conformément aux buts et
aux principes de la Charte des Nations Unis77 ». Cette volonté de l’Onu et du CIO
s’est renforcée et la coopération entre les deux institutions a donné naissance à la
Fondation pour la trêve Olympique.

Paragraphe 2 : L’action indirecte de l’Onu dans la création des règles sportifs

L’Onu intervient dans le milieu sportif par l’intermédiaire de son institution


spécialisée qu’est l’UNESCO. Cette institution Onusienne a officiellement intégré
dans son champ de compétence le sport et les activités sportives. Cette inscription du
sport et des activités sportives vise à garantir et à renforcer la dimension éducative de
sa pratique. Ainsi, pour atteindre ses objectifs, l’UNESCO s’est doté d’efficaces
moyens d’intervention (A), lesquels lui permettent d’agir dans des domaines variés
(B).

A- L’efficacité des moyens d’intervention

Pour atteindre ses objectifs dans le domaine sportif, l’UNESCO s’est doté de cinq
moyens qui sont en relation d’interdépendance. Il s’agit d’un texte créateur, de deux
organes spécialisés, d’un fond de ressources institutionnalisé qui finance les actions de
l’Organisation en rapport avec le sport.

Le texte qui marque le fondement de l’action de l’UNESCO dans le sport est : la


Charte Internationale de l’éducation physique et sportive. Ce texte a été adopté le 21
novembre 1978, il s’apparente aux recommandations de l’Onu dans le sport, en ce sens
que ces textes n’ont pas de force contraignantes. Il s’agit également d’un soft law (le

77
Résol. AG ONU, 48/10, 2 nov., 1993.

[Date] 37
droit doux), car les Etats signataires ne sont, en aucun cas, tenus des obligations qui en
découlent. Mais, s’il n’a pas de force contraignante, il ne demeure pas moins, un texte
pionnier en ce qu’il consacre la pratique du sport comme étant un droit fondamental.
De plus, ce texte définit de manière précise, les objectifs de la politique de l’Unesco en
rapport avec le développement du sport mondial. Dans cet élan, la Charte se fonde sur
une Coopération Internationale plus poussée avec tous les acteurs de la société
international, à savoir : les Etats, les Organisations non gouvernementales telles que le
Comité International Olympique (CIO) et les Organisations gouvernementales
spécialisées. La finalité de cette Coopération est de faire en sorte que, en dépit du
caractère non contraignant des déclarations de l’ONU, celles-ci aient une portée
juridique contraignante dans les Etats, grâce à des relais efficaces que sont : les
Comités nationaux olympiques et surtout, la Conférence internationale des Ministres et
hauts fonctionnaires de l’éducation physique et du sport. Ce deuxième instrument à
relent politique et sportif, vise à mesurer la portée sociale du sport et de l’éducation
physique dans le monde entier. Un autre instrument aussi important que les deux
premières est : le Comité intergouvernemental pour l’éducation physique et le sport
(CIGEPS). Cet instrument crée en 1977 est l’organe de décision de l’Unesco dans le
sport. Il est pour l’essentiel composé de représentants des Etats membres de l’Unesco.
Ces derniers sont élus pour quatre (4) ans pour représenter chaque continent. Ce
comité est aidé dans sa mission par un Comité consultatif composé d’instance sportive
internationales. Il s’agit entre autre, du Comité International Olympique, du Conseil
international pour l’éducation physique et la Science du sport, l’Assemblée générale
des Fédérations internationales de sport et la Fédération mondiale d’industrie du sport.
Ce Comité se réunit tous les deux ans, et à principalement pour missions, de fixer la
politique de l’Unesco pour la promotion du sport et la paix dans le monde.

B- Le Domaine d’Action

L’Action de l’UNESCO en matière de sport traduit les différents objectifs qu’elle s’est
fixés. Ainsi s’attache-t-elle à développer la pratique du sport et les structures du monde
sportif, à s’assurer de la protection et de l’épanouissement de la jeunesse dans et par le
sport, à encourager la présence des femmes dans les structures sportives et à leur

[Date] 38
garantir une égalité de traitement. De même considère-t-elle le sport comme un facteur
de développement économique et social. En outre, l’Unesco perçoit le sport comme un
vecteur de paix et d’amitié entre les peuples.

Surtout, depuis peu, elle se préoccupe, compte tenu des dérives constatées dans le
sport de compétition, d’une meilleure exemplarité du sport. La Question du dopage
occupe à ce titre une bonne place. En effet, la lutte contre le dopage représente peut-
être une des réalisations les plus concrètes de l’Unesco en matière de sport. Lors du
33e session de la conférence générale de l’Unesco, tenue à Paris en octobre 2005, une
« Convention Internationale contre le dopage dans le sport » fut adoptée à l’unanimité.
Cette convention constitue un instrument juridique visant l’éradication du dopage et
possédant à la fois un caractère contraignant et une portée universelle. Elle a pour objet
d’harmoniser les efforts contre le dopage et de fournir un cadre légal dans lequel tous
les gouvernements peuvent s’attacher à éradiquer le dopage dans le sport. Elle engage,
notamment les Etats à conformer leurs pratiques aux principes énoncés dans le Code
mondial antidopage de l’Agence mondiale antidopage (AMA), mais aussi à collaborer
entre eux et avec les organismes supranationaux chargés de la lutte antidopage. La
Convention est rentrée en vigueur 30 jours après la trentième ratification, soit le 1 er
février 2007. La France l’a ratifiée par une loi n° 2007-129 du 31 janvier 2007, et
publiée par un décret du 2 avril. La Côte d’Ivoire et 50 Etats Africains ont également
ratifié la Convention de l’Unesco.

Pour garantir l’efficacité de cette Convention, l’Unesco assiste les gouvernements dans
le développement des programmes antidopage nationaux et offre du conseil politique
visant à assurer une conformité avec la Convention. Elle entreprend par ailleurs, des
programmes de recherches scientifiques et a complété sa stratégie globale de lutte
contre le dopage pour la création d’un « fond pour l’élimination du dopage dans le
sport », constituées par les contributions des gouvernements et du secteur privé.

Section 2 : Le cas particulier de l’Etat Suisse et des institutions à vocation


régionale

L’Etat suisse est, si non représente le paradis terrestre du mouvement sportif


international. Il participe aussi à la régulation directe et même indirecte du sport

[Date] 39
mondial. Il se présente comme un législateur international du sport (paragraphe 1).
Cela relève plus d’un fait que du droit. L’Etat suisse déploie son action de régulateur
au côté d’autres Institutions à vocation régionale (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : l’Etat Suisse dans la construction du droit du sport

L’Etat Suisse a joué et continu de jouer un rôle très important dans la création, la
diffusion et la régulation du droit sportif. Cela est d’autant plus vrai en ce qu’il
constitue le paradis juridique d’un grand nombre de d’Institutions Internationales en
matière sportive (A) aussi son droit sert-il de fondement juridique des Institutions
sportives Internationales (B).

A- Siège des grandes Institutions sportives

Mettre l’Etat Suisse au rang des législateurs internationaux du sport, relève non d’une
règle juridique de primauté normative mais d’une observation de la réalité : un très
grand nombre d’Institutions privées à vocation Internationale sont établies en Suisse.
Cela n’enlève rien à quelques autres Etat tels que Monaco (athlétisme), l’Angleterre
(voile), l’Espagne (Canoe), ou la Corée (Judo) qui accueillent eux aussi sur leur
territoire le siège de grandes Fédérations sportives, mais la législation Suisse a un rôle
plus important dans la régulation du sport. Pour autant, le droit Suisse ne doit être
perçu autrement comme une source mineure du droit du sport, le droit sportif d’origine
privée n’existant qu’en vertu d’une autorisation de l’Etat Suisse. En effet, l’importance
du droit Suisse se mesure surtout en creux, pour les libertés qu’il offre.

Le Sport est organisé selon un modèle pyramidal, les Associations et les clubs
obéissent à leurs fédérations nationales et ces dernières se soumettant à une fédération
internationale elle-même partiellement assujetties au CIO. Or, les grandes instances
supérieures du sport ont presque toutes situé leur siège dans un des Etats de la
Confédération helvétique pour des raisons historiques, géographiques, politiques,
financières mais surtout juridiques. Pour les fédérations sportives internationales
désireuses d’un peu « d’autonomie » normative la Suisse représente à n’en pas douter
un « paradis juridique ». Deux considérations expliquent cet attrait : l’ordre public
international du point de vue des juridictions suisses est lui aussi de très faible densité ;

[Date] 40
l’ordre public international du point de vue des juridictions suisses est lui aussi de très
faibles densité surtout si l’on prend en considération la position du Tribunal fédéral
suisse à propos de l’ordre public communautaire.

On ne s’étonnera donc pas de l’installation à Lausanne du CIO, du Tribunal arbitral du


sport(TAS), de l’Association des fédérations internationales des sports olympiques
d’été (ASOIF), de l’Agence mondiale antidopage(AMA) et de nombres de fédérations
sportives internationales. Sachant que, de son côté, Zurich accueille notamment
l’Association des fédérations internationales des sports olympiques d’hiver (AIOWSF)
ou la Fédération internationale de football (UEFA) est installée à Nyon, comme la
Fédération internationale de l’automobile(FIA) et que l’Union cycliste internationale
(UCI) a établi son siège à Aigle.

B- Le droit Suisse, droit de référence des Institutions sportives Internationales

Toutes ces instances, juridiques sont des associations ou des fondations(AMA) de droit
privé suisse, sont soumises au droit étatique helvète pour leurs statuts et leurs activités
civiles et commerciales (droit suisse des contrats, droit pénal suisse, droit suisse de la
concurrence : etc.). Certes le CIO bénéficie de quelques dispositions dérogatoires
accordées par les autorités helvètes, relativement à ses obligations fiscales ou à la
législation sur le travail des étrangers en suisse, mais de manière générale, ce dernier
reste soumis au droit commun suisse.

Plus largement, il faut bien être convaincu que les institutions sportives internationales
ne sont que des personnes privées régies par le droit de l’Etat dans lequel elles ont fixé
leur siège et par le droit de chacun des Etats dans lesquels elles déploient leurs
activités. Elles ne disposent en aucune manière d’une personnalité juridique
internationale qui leur permettrait de se croire totalement « autonomes » au sens
étymologique du terme.

Le droit suisse a par ailleurs vocation à s’appliquer lorsque la fédération internationale


intègre dans ses statuts, à côté de la clause compromissoire donnant compétence au
TAS, une clause attributive de compétence, complémentaire, au profit des juridictions
suisses. Dans cette hypothèse, la quasi-totalité des contentieux impliquant la fédération

[Date] 41
internationale seront donnés au for suisse soit comme juge d’appui, soit comme juge
ordinaire. L’efficacité de ce type de montage est reconnue au regard de la convention
de Lugano du 16 septembre 1988.

La loi suisse a en outre une place particulière en ce que la Confédération helvétique


accueille sur son territoire le TAS, institution arbitrale à vocation internationale. Ainsi,
la loi fédérale sur le droit international privé, et plus particulièrement son chapitre 12
sur arbitrage international (art. 176 à 194), s’applique-t-elle aux procédures engagés
devant le TAS. Cette application n’est pas négligeable puisqu’elle a par exemple
conduit à réformer en profondeur le fonctionnement du TAS pour lui conférer une plus
grande indépendance vis-à-vis du CIO et des fédérations internationales. Pareillement,
si les voies de recours contre les sentences du TAS sont réduites s’agissant d’arbitrage,
il n’en reste pas moins qu’une violation des principes suisses de compétence, de
procédure, de garanties fondamentales et plus largement d’ordre public pourrait être
connue du juge étatique helvète et donc soumise au droit commun suisse.

Paragraphe 2 : Les Institutions Internationales à vocation régionale

De multiples Institutions Internationales préoccupées par les questions sportives


peuvent être signalées, notamment le Conseil supérieur du sport en Afrique (CSSA)
qui associe les Ministres chargés de sport des pays membres de l’Union Africaine aux
représentants du monde sportif africain (A). A côté de cet organisme, existe
l’Organisation de la Francophonie (B).

A- Le Conseil Supérieur du Sport en Afrique

Le Comité permanent du sport africain est créé en juillet 1965 à Brazzaville, à


l'occasion des premiers Jeux africains.

Le CPSA devient le Conseil supérieur du sport en Afrique (CSSA) le 14 décembre


1966 à Bamako, et établit son siège à Yaoundé. Le Conseil est vu comme un outil de
coordination du mouvement sportif africain et un moyen de lutte contre l'apartheid et

[Date] 42
le colonialisme par le sport. Elle est aussi de par sa nature un instrument politique de
l'Organisation de l'unité africaine, dont il devient une entité le 3 juillet 19771.

Le CSSA organise les Jeux africains. Elle est incorporée à l'Union africaine après la
dissolution de l'OUA en 2002.

Le CSSA devient critiqué de par son immobilisme, son manque de leadership et son
mode de fonctionnement dépassé, dans un continent où colonialisme et apartheid
n'existent plus, et qui se focalise moins sur le sport que sur la politique et les
souscriptions financières des nations. Sa nature même d'agence gouvernementale pose
question.

Sa dissolution est discutée depuis la fin des années 2000 et une assemblée
extraordinaire est programmée en janvier 2012 pour acter la décision. Après de
multiples tergiversations, une réunion des ministres des sports en novembre 2012
renvoie à nouveau la décision à une assemblée générale extraordinaire en mars 2013
à Brazzaville ; deux camps s'opposent alors, entre les partisans de la dissolution
(Afrique du Sud, Botswana, Côte d'Ivoire) et les partisans d'une réforme
(Algérie, Kenya, Nigeria).

Finalement, la Conférence des ministres des Sports en Afrique de juillet 2013


à Abidjan acte la dissolution du Conseil supérieur du sport en Afrique. L'organisation
des Jeux africains est alors transférée à l'Association des comités nationaux
olympiques d'Afrique (ACNOA) et l'Union des confédérations africaines des
sports (UCAS).

B- L’Organisation Internationale de la Francophonie

L’organe de la Francophonie qui s’occupe du sport en Afrique est la Conférence des


Ministres de la jeunesse et des sports des pays ayant le Français en commun. La
(CONFEJES) a vu le jour le jour à Paris en décembre 1960. Les Ministres de la
Jeunesse et des ports des pays d’expression française y ont pris la décision de se réunir
une fois par an. Ils ont entériné le protocole qui régit l’organisation et le

[Date] 43
fonctionnement de la CONFEJES en 1975. Il faudra toutefois attendre jusqu’à janvier
1987 pour que les Statuts de la CONFEJES soient adoptés. L’organisation de la
CONFEJES repose sur quatre instances ayant chacune des pouvoirs décisionnaires
spécifiques : la Conférence le bureau, la Commission des experts et le Secrétariat. La
CONFEJES est une institution de l’OIF depuis 2005.

Dans le cadre d’une programmation quadriennale, la CONFEJES administre des


programmes de soutien à la mise en place et à la structuration de politiques sportives
dans les pays membres, ainsi que des programmes de soutien au développement du
sport (Sport de Haut niveau et Sport de proximité et de formation et perfectionnement
des cadres. La CONFEJES participe également au financement et à l’administration de
centre de haut niveau pour les sportifs Africain.

Pour ses missions, la CONFEJES a développé deux fonds spécifiques : le programme


de promotion de l’entrepreneuriat des jeunes (anciennement dénommé FIJ (fond
d’insertion des jeunes)

Chapitre 3 : Le Sportif professionnel

L’activité sportive est caractérisée par une grande diversité des situations juridiques.
Des considérations d’ordre économique et social conduisent à distinguer, le sportif
amateur du sportif professionnel (section 1). Mais avant tout, il importe de d’évoquer
la problématique de la nationalité du sportif qu’il soit amateur ou professionnel
(section 2).

[Date] 44
Section 1 : Le sportif professionnel

La notion du sportif professionnel n’est pas aisément donnée à la première lecture, du


fait de ses sens multiples. En effet, le professionnel peut désigner, toute personne
exerçant une ou plusieurs activités sportives aux fin de réaliser, non seulement une
performance, mais encore des bénéfices lui procurant un revenu nécessaire à son
existence.

Il peut est aussi défini comme tout salarié titulaire d’un contrat de travail. Le sportif
professionnel peut enfin désigner, certains salariés.

On étudiera les règles relatives à la formation du contrat du sportif professionnel


(paragraphe 1), et celles se rapportant à la circulation du sportif (professionnel 2).

Paragraphe 1 La formation du Contrat du sportif professionnel

L’activité du sportif professionnel n’est pas semblable aux autres activités dans la
société. Cela ne sous-entend pas que le sportif ne puisse pas être regardé comme un
salarié qui se trouve dans un lien contractuel (A), néanmoins, la relation entretenue
entre le sportif professionnel et son employeur, n’est pas toujours emprunte de lien de
subordination (B).

A- Le Contrat du sportif professionnel

Le sportif professionnel évolue dans sa carrière, dans un lien contractuel avec son
employeur. Le contrat du sportif professionnel est de type particulier, mais ce régime
particulier est indissociable de celui du droit commun des contrats. En France, la
nature du contrat du sportif professionnel en vertu de la loi du 27 novembre 2015 en
son article L. 222-2-3 du Code du sport, est un contrat à durée déterminée (CDD).
L’on peut lire au terme de cet article que « tout contrat pour lequel une association
sportive ou une société sportive s’assure, moyennant rémunération, le concours
d’un sportif professionnel salarié est un contrat de travail à durée déterminée ». Il
s’agit officiellement pour l’employeur, d’assuré la protection des sportifs et entraîneurs
professionnels et de garantir l’équité des compétitions. Le CDD n’est pas que possible,
il s’impose aux parties contractantes.

[Date] 45
Par ailleurs, pour ce qui est de la formation du contrat, c’est le principe de la liberté
contractuelle qui prévaut. Ce principe recommande que soit conclu un pré-contrat.
Selon les cas, l’accord des parties peut avoir scellé un simple contrat de négociation ou
bien, un contrat près à l’emploi qui ne donne qu’à être ratifié dans un délai après que
certaines formalités auront été remplies. Les cocontractants peuvent prévoir dans leur
contrat définitif, une clause d’annulation stipulant que les accords antérieurs à leur
convention sont nuls. Au contraire de la conclusion du contrat sportif qui se fonde sur
le consensualisme entre l’employeur et l’employé, la liberté reconnue à l’employeur
quant au choix de ses salariés ne va pas de même en ce qui est de l’embauche. En
effet, l’embauche des sportifs est soumise au respect du principe de non-discrimination
des individus pour des raisons tenant à leur état de santé pour des contrats conclus sous
condition d’aptitude constatée par un autre médecin autre que le médecin du sport.

Par ailleurs, en la forme, le contrat doit être établi par écrit en au moins trois
exemplaires ; deux pour les cocontractants, et le troisième pour les autorités sportives.
Aussi doit-il comporter, une série de mentions obligatoires (identité, adresse, date
d’embauche, emploi occupé, rémunération, caisses de retraite complémentaire et de
prévoyance organisme assurant la couverture maladie complémentaire). Le contrat,
une fois conclu, doit être transmis par l’employeur au sportif dans un délai raisonnable
ne pouvant dépassé cinq jours. En France, si ces formalités ne sont pas respectées dans
la conclusion du contrat, le contrat à durée déterminée (CDD) qui caractérise le contrat
sportif est réputé être un CDI. En cas de récidive, l’employeur encourt une peine de
privation de liberté. En outre, en France toujours, le contrat de travail du sportif doit
être homologué. C’est une pratique sportive qui est constante, elle vise à réguler la
compétition. C’est la raison pour laquelle, toute décision de refus, lorsqu’elle vient
d’une ligue, constitue un acte administratif. Que dire de l’exécution du contrat du
sportif professionnel ?

B- L’exécution du contrat du sportif professionnel

L’exécution du contrat du sportif professionnel ne diffère guère de celui du contrat de


travail, puisqu’il s’agit d’une composante du contrat de travail. Dans l’exécution de ce

[Date] 46
contrat, l’employeur dispose des mêmes pouvoir. Il s’agit entre autre du pouvoir de
direction, du pouvoir règlementaire, et du pouvoir disciplinaire.

Le pouvoir de direction permet à l’employeur de donner des ordres et des directives au


salarié et de contrôler l’exécution de son travail. Le pouvoir réglementaire permet
quant à lui d’édicter des normes à caractère obligatoire. Le pouvoir disciplinaire sert à
punir en sanctionnant les écarts de conduite, les sanctions dans ce cas, commencent
par des avertissements et se terminent par la rupture du contrat en passant par la mise
en pied pour un temps où la suspension.

Si dans l’exécution du contrat de travail du sportif professionnel, celui-ci est soumis au


pouvoirs de l’employeur, il faut toutefois reconnaître que le sportif dispose de
certaines prérogatives et droits jugés fondamentaux. Ces privilèges ne sont pas
seulement spécifiques au sport. Ainsi, le sportif jouit de sa liberté d’expression dans
l’entreprise tout comme en dehors de celle-ci. Il n’en abuse pas lorsqu’il entretient une
polemique médiatique avec son entraineur. Des restrictions justifiées par la nature des
tâches accomplir et proportionné au but recherché peuvent certes lui être apportées,
mais le club ne peut en profiter, par exemple pour obliger le salarié à émettre une
opinion publiquement.

Le sportif a également droit au respect de sa vie personnelle. Les clauses ou directives


qui empiètent sur cette dernière (l’obligation de bonne conduite, obligation de se
maintenir en bonne forme physique, etc) sont apriori suspectes : elles ne sont valables
qu’à condition d’être justifiées et proportionnées. Il est par ailleurs difficile pour
l’employeur de sanctionner le sportif en raison de fait commis en dehors du club. Le
fait imputé au salarié, lorsqu’il relève de sa vie personnelle, ne peut en effet constituer
une faute. La jurisprudence admet toutefois, qu’il puisse en aller autrement en cas de
« un manquement à une obligation découlant du contrat de travail », ce qui n’est pas
très éclairant. Certaines décisions insistent également sur les répercutions que le fait de
vie personnelle, par exemple un état d’alcoolémie, pourrait avoir sur la qualité du
travail fourni par le sportif, ce qui est une façon commode d’éluder la question de
l’empiètement sur la vie privée.

[Date] 47
Le joueur est ainsi tenu d’exécuter un certain nombre de prestations d’ordre sportif,
sans qu’il doive pour autant en garantir la qualité. L’aléa sportif confère à ses
obligations la nature d’obligations de moyens, sur lesquelles le contrat ne saurait avoir
de prise.

Aux prestations spécifiquement sportives, s’ajouteront souvent des prestations de


nature commerciale. Le club employeur, quant à lui, est tenu de payer les
rémunérations promises, en tenant compte des minima légaux ou conventionnel et de
l’éventuel plafonnement de la masse salariale qui peut être décidé par la fédération.
Les rémunérations comprennent un salaire fixe et des avantages en nature valorisés
dans le contrat. Elles peuvent également comprendre des primes d’éthique, d’assiduité,
de participation ou de résultat versées sous forme de salaire ou dans le cadre d’un plan
d’intéressement ou d’épargne salariale ou dans le cadre d’un accord de participation.

Le club doit également fournir un travail au salarié. S’il n’en découle aucun droit de
jouer, le sportif doit néanmoins se voit offrir, (des conditions de préparation et
d’entrainement équivalentes à celles des autres sportifs professionnels salariés de
l’association ou de la société). Un arrêt a également suggéré que l’employeur ne
pourrait pas non plus refuser d’inscrire le joueur sur les feuilles de matchs ; mais cela a
été jugé dans des circonstances très particulières.

Il s’agit enfin, de garantir au salarié des conditions de travail convenables et donc, en


particulier, de prévenir les risques du travail. Cette question revêt ici un aspect
essentiel car (l’activité sportive a une certaine propension à abimer les corps).

Paragraphe 2 : La circulation du sportif professionnel

La question de la circulation du sportif se trouve à l’origine de la rencontre entre le


sport et le droit des Etats et cristallise, aujourd’hui encore, une grande partie du
contentieux suscité par cette rencontre. Ce n’est qu’au début des années 70 avec les

[Date] 48
arrêts Dona et Walrave que se sont posées les premières interrogations relatives aux
relations entre l’ordre juridique Européen et l’activité réglementaire des Fédérations
sportives. Au terme de deux arrêts importants, la Cour de justice des Communautés
Européennes a énoncé trois principes fondamentaux :

- dès lors que l’activité sportive revêt un caractère économique, elle apparaît
susceptible de relever du domaine d’application du droit européen, Africain...
- Dans la mesure de cette activité économique, les normes adoptées par les
Fédérations sportives doivent respecter les libertés fondamentales, de l’ordre
juridique européen, notamment la liberté de circulation des travailleurs, la
liberté d’établissement, la libre prestation de service et la libre concurrence.
- Les règles purement sportives peuvent justifier une restriction au champ
d’application des dispositions Européennes sous réserve qu’elles demeurent
strictement limitées à leur objet.

La CJCE a donc clairement indiqué que les règlements fédéraux limitant la circulation
des sportifs professionnels, en raison notamment de leur nationalité, n’étaient pas
conforme au principe essentiel de la libre circulation des travailleurs au sein de
l’Union européenne. Néanmoins, à la suite de ces arrêts, et malgré des contacts
réguliers établis dès les années quatre-vingt avec la Commission Européenne, les
grandes fédérations sportives, notamment la FIFA et l’UEFA, ont refusé de modifier
leurs réglementations afin de respecter les principes du droit Européen et notamment
celui de la libre circulation des travailleurs. Le monde du sport, reposant sur une
organisation spécifique et régi par des règles qui lui sont propres, s’est toujours appuyé
sur cette double caractéristique pour affirmer son indépendance à l’égard de toute
autorité publique.

La soumissions des fédérations sportives au droit Européens ; l’arrêt BOSMAN a créé


un véritable choc psychologique dans la mesure ou, pour la première fois, les mondes
sportif et politique, mais aussi l’opinion publique, ont réellement pris conscience de
l’impossibilité d’éviter la soumission des normes produites par les autorités fédérales
au droit Européen. La Cour a confirmé sa position adoptée dans les affaires Dona et
Walrave en rappelant que les réglementations arrêtées par les fédérations sportives

[Date] 49
doivent respecter les libertés fondamentales prévues par les traités et notamment le
principe de libre circulation inscrit à l’article 45 du TFUE. Quelles sont les conditions
d’applications du principe de la libre application des sportifs (A) et quels en sont ses
effets ? (B)

A- Les conditions d’application du principe de la libre circulation des sportifs

L’article 2 du Traité fondateur de l’Union Européenne a défini une condition dite


fondamentale et la jurisprudence de la Cour de justice de la Communauté Européenne
en a dégagé une autre condition non négligeable.

En effet, l’article 2 du Traité susindiqué, donné de constater que le sport relève du


champ d’application du droit Européen, et précisément, aux dispositions traitant de la
libre circulation des personnes dans l’Union. Cette position a été confirmée par la
CJCE dans plusieurs arrêts, jusqu’à ce que l’arrêt Bosman et les jurisprudences
ultérieurs viennent appuyer la même position. La deuxième condition définie par les
jurisprudences Walrave et Dona est que les sportifs professionnels ou semi-
professionnels ont une activité économique dès lors qu’ils exercent leur sport en
qualité de salariés ou de prestataires de services rémunérés. En d’autre termes, le
sportif qui entend se prévaloir du principe de la libre circulation des personnes doit
exercer son activité sportive en contrepartie d’une rémunération, que ce soit sur le
fondement d’un contrat de travail établi entre lui et l’employeur ou à titre indépendant,
moyennant des prestations de service rémunérés. Le principe de la libre circulation des
personnes à un effet horizontal en ce qu’il s’applique non seulement aux dispositions
législatives, réglementaires et administratives adoptées, mais aussi, et surtout aux
règlementations édictées par les personnes morales de droit privé, telles que les
Fédérations sportives nationales ou internationales et les clubs sportifs ayant pris la
forme de société sportifs ou d’Associations sportives à but non lucratif. Il en va de
même en ce qui concerne les règles édictées par le mouvement sportif olympique
national et international. Que signifie donc le principe de la libre circulation des
sportifs ?

En effet, le principe signifie que les discriminations fondées sur la Nationalité des
sportifs sont interdites. Ce principe est mis en œuvre par l’arrêt Bosman, Dans cette

[Date] 50
affaire, l’employeur d’un joueur professionnel belge s’est vu proposer le
renouvèlement de son engagement contractuel avec, une réduction de son salaire à
75%. Refusant cette offre, M. Bosman a été mis sur la liste des transferts par son club.
Après plusieurs tractation, M. Bosman n’a pu participer aux compétitions au cours de
l’Année 1990-1991. M. Bosman porte l’affaire devant la justice Belge et Cour d’Appel
a posé la question préjudicielle à la Cour de Justice de la Communauté Européenne
(CJCE). A la question de savoir si « les articles 48, 85 et 86 du Traité de Rome (pages
41, 101 et 102 du Traité Fondateur de l’Union Européenne) doivent être interprétés
dans le sens d’interdire qu’un club de Football puisse exiger et percevoir le paiement
d’une somme d’argent à l’occasion de l’engagement d’un de ses joueurs, arrivé au
terme de son contrat par un nouveau club employeur ; que les Fédérations ou
Associations sportives nationales et internationales puissent prévoir dans leurs
règlementations sportives respectives, des dispositions limitant l’accès des joueurs
étrangers ressortissant de la Communauté Européenne des compétions qu’elles
organisent ». La Cour a répondu en ces termes : « l’article 48 du TFUE s’oppose à
l’application des de règles édictées par des Associations sportives, selon lesquelles :

- qu’un jouer professionnel de Football ressortissant d’un Etat membre de


l’Union, à l’expiration du contrat qui le lie à un club, ne peut être employé par
un club d’un autre Etat membre que si ce dernier a versé au club d’origine une
indemnité de transfert, de formation ou de promotion ;
- Lors des matchs de compétition qu’elle organise, les clubs de football ne
peuvent aligner qu’un nombre limité de joueurs professionnels ressortissant
d’autres Etats membres.

Dans la mesure où la Cour a considéré les indemnités de transfert et les clauses de


Nationalité incompatibles avec le principe de la libre circulation, elle ne s’est pas
prononcée sur leur légalité au regard des articles 85 et 86 (101 et 102, du TFUE). En
ce qui concerne les sportifs ressortissant d’Etats signataires de Conventions
d’Associations et de Coopération avec l’UE, notamment l’accord de Cotonou avec la
zone Afrique-Caraïbes-Pacifique, ces Conventions contiennent des clauses de non-
discrimination applicables aux personnes travaillant légalement au sein de l’UE. Selon

[Date] 51
ces accords, les ressortissants des Etats signataires d’un accord de coopération
légalement employées sur le territoire d’un Etat membre de l’Union ne doivent faire
l’objet, par rapport aux ressortissants l’Union Européen d’aucune discrimination
fondée sur la Nationalité en ce qui concerne les conditions de travail de rémunération
ou de licenciement. Cependant, ces personnes ne peuvent revendiquer un droit d’accès
au territoire.

B- La limitation des entraves non discriminatoires à la libre circulation des


sportifs.

On peut décrire de manière schématique, le régime juridique applicable aux transferts


à travers deux séries de règles édicter par les autorités fédérales. La première catégorie
de normes gouverne la conclusion et l’exécution d’une convention permettant à un
club d’exiger d’un autre, le versement d’une somme d’argent en contrepartie de
l’acceptation de libérer un joueur de ses obligation contractuelles et d’annoncer à la
fédération nationale et, le cas échéant internationale, la disponibilité de ce joueur pour
un enregistrement auprès de son nouveau club. Le plus souvent, cette somme d’argent
représente la « valeur marchande » du joueur calculée en fonction de divers paramètres
comme son statut international. La finalité du second groupe de règle consiste à
assurer la régularité des compétitions. Les Fédérations sportives déterminent une ou
plusieurs périodes au cours desquelles, les opérations de transferts sont admises. En
dehors de ces délais, les joueurs ne sont pas autorisés à changer de club sous peine des
sanctions sportives.

Ces règles et bien d’autres, créent un dispositif juridique restreignant la liberté pour les
sportifs de changer de club et donc d’exercer leur activité en qualité de salariés ou de
prestation de services. Néanmoins, elles n’établissent pas de discrimination fondées
sur la Nationalité, car elle concerne tous les joueurs désireux de changer de club à
l’intérieur ou à l’extérieur d’un Etat, que le joueur soit ressortissant du pays ou
étrangers. Aussi s’agit-il de dispositions indistinctement applicables à tout sportif
quelle que soit leur Nationalité. Dans deux affaires, la CJCE a eu à apprécier la légalité
de ce dispositif juridique relatif aux transferts de joueurs au regard du principe de la
libre circulation des personnes. Sur la question du délai du transfert, la CJCE, sur la

[Date] 52
question préjudicielle qui lui a été adressée par le Tribunal de première Instance Belge
a constaté d’abord que les délais de transfert constituent des entraves à la libre
circulation des travailleurs dans la mesure où en interdisant les opérations de mutation
sportif après une date déterminée, ils empêchent les sportifs professionnels de joindre
le club de leur choix dans un autre Etat membre de l’Union Européenne que le leur.
Mais elle a admis la justification des périodes de transfert par des motifs économiques
intéressants uniquement le sport stricto census. Il s’agit de « l’objectif d’assurer la
régularité des compétitions sportives ». Elle a souligné que des transferts tardifs
seraient susceptibles de modifier sensiblement la valeur sportive de tel ou tel équipe au
cour du championnat, remettant ainsi en cause la comparabilité des résultats entre les
différentes équipes engagés dans ce championnat, par conséquent, le bon déroulement
du championnat dans son ensemble ». Il faut retenir de cet arrêt que le juge Européen
déclare valable les principes d’une date limite de transfert au nom de l’exigence de
régularité des compétitions sportives.

Section 2 : La Nationalité du sportif professionnel

La Charte Olympique et la grande majorité des statuts des fédérations sportives


nationales et internationales contiennent des dispositions relatives à la nationalité des
athlètes. Aux terme de ces textes, la nationalité constitue notamment, l’une des
conditions de participation des sportifs aux compétions internationales en qualité de
membre de la sélection représentant leur pays ; la référence à la nationalité, en qualité
de condition de l’inscription aux épreuves internationales, participe ainsi à la
construction d’une véritable identité sportive qui conduit à ce que les athlètes et les
sélections nationales représentent leurs fédérations, mais plus encore leurs Etats. Au
demeurant, afin de garantir l’intérêt du succès auprès du public des jeux olympiques et
des grandes compétitions internationales, les pouvoirs sportifs, comme les Etats
instrumentalisent la nationalité des athlètes ; des drapeaux et les hymnes nationaux
accompagnent les cérémonies d’ouverture des épreuves et de remises de trophées et de
médailles. Une telle utilisation de la nationalité permet aux pouvoirs sportifs
d’organiser, pour le plus grand plaisir du public un affrontement sportif des Etats

[Date] 53
Aux côtés de la nationalité octroyée par l’Etat, les instances fédérales et olympique
ont élaboré, sans y faire expressément référence dans leur textes ce que l’on peut
dénommer une « Nationalité sportive » selon le Tribunal arbitral du sport, la
nationalité a trait au statut personnel découlant de la citoyenneté d’un ou
plusieurs Etats alors que la nationalité sportive constitue un concept uniquement
sportif qui détermine les règles de qualification des joueurs en vue de leur
participations à des compétions nationales. Il estime que les deux notions relèvent
d’ordre juridique distincts qui n’entrent pas en conflit. Il en déduit que les normes
gouvernant la nationalité sportives d’un athlète ne portent pas atteinte à la souveraineté
et aux compétences des Etats en matière de nationalité. Pour certains, l’élévation du
terme « nationalité sportive » au rang de concept juridique peut être source de
confusion, ce qui explique certainement que les règlements des fédérations
internationales et la Charte olympique préfèrent utiliser les termes de « nationalité des
concurrents » ou bien encore d « éligibilité des joueurs » en sélection nationales.
Comment détermine-t-on cette nationalité sportive ? Comment s’effectue son
changement ?

Paragraphe 1 : La Nationalité sportive d’origine

L’attribution de la Nationalité du sportif relève exclusivement du pouvoir des


Instances sportives Internationales. En effet, la Nationalité est un lien juridique et
politique qui rattache un individu à un Etat. Elle est attribuée selon des critères définis
par des Etats concernés. De son côté, la Nationalité sportive (A) est octroyée par la
Fédération Internationale pour tous les athlètes qui relève de la discipline concernée
quel que soit leurs nationalités étatiques (B).

A- Les critères de la Nationalité sportive

La Fédération Internationale décide seule de l’aptitude des athlètes à représenter un


Etat selon des critères définis par elle et commun à tous les pays. Ces normes
matérielles élaborées par les fédérations internationales ont un champ d’application
spatial illimité, car elle concerne les sportifs quels que soient leur Nationalité et le lieu
où ils se trouvent. En revanche, leur domaine de compétence se limitent aux seules
compétitions organisées sous l’égide des Fédérations internationales. C’est la raison

[Date] 54
pour laquelle les critères de la Nationalité sportive applicable pour représenter un pays
aux jeux Olympique sont déterminés par la Charte Olympique du CIO. Quoi qu’il en
soit, les critères posés par les Instances sportives Internationales diffèrent selon que les
athlètes bénéficient ou pas d’une pluralité de Nationalités.

Les Instances sportives élaborent leurs propres critères pour déterminer la Nationalité
sportive d’un athlète. Parmi ces critères, la Nationalité légale est un élément majeur.
Par exemple, selon l’article 41-1 de la Charte olympique : « Tout concurrent aux Jeux
Olympiques doit être ressortissant d’un pays du CNO qui l’inscrit ». En clair, un
nageur qui participe aux Jeux Olympiques avec la sélection Ivoirienne de natation
dispose d’une Nationalité étatique Ivoirienne. Le TAS exige à cet effet que l’athlète
soit dans ce cas en mesure de fournir les documents officiels qui attestent de sa
Nationalité pour pouvoir représenter son pays. Il suit de ce qui précède que la
Nationalité sportive de l’athlète et sa Nationalité étatique coïncident. Une telle
coïncidence ne surprend guère quand on sait que le mouvement sportif s’est construit
sur le modèle des Etats nations et de la division territoriale du Monde.

Par ailleurs, le critère fondé sur la Nationalité étatique n’est toujours pas suffisant pour
se voir attribuer la Nationalité sportive. Il est des fois où pour être éligible à une
sélection Nationale, d’autres considérations sportives entrent en compte. En absence
de référence à la Nationalité étatique, l’Instance sportive internationale a la possibilité
de fixer ses propres critères d’acquisition de la Nationalité sportive sans aucune
référence à la Nationalité légale. Par exemple dans le règlement de la Fédération
internationale de Rugby, le principal critère à satisfaire pour être sélectionnable par
une Fédération nationale est d’être né dans le pays concerné et non pas d’en avoir la
Nationalité. C’est ainsi que le Rugbyman qui désire être sélectionné dans une
Fédération nationale n’a qu’à prouver que l’un au moins de ses parents est né dans ce
pays ou bien qu’il y réside depuis 36 mois consécutives avant la date de la sélection ou
60 mois à compter de 2020.

Au demeurant, les critères d’attribution de la Nationalité sportive diffèrent largement


en fonction des règles propres de chaque Fédération Internationale. Il en va ainsi, pour
les sportifs ayant depuis leur naissance de plusieurs Nationalités.

[Date] 55
B- Le Sportif plurinational

En matière de nationalité sportive, c’est le principe de l’unicité de la Nationalité qui


prévaut. Néanmoins, les cas de sportifs plurinationales sont relativement nombreux en
raison du mode de vie des sportifs professionnels. Qui sont habitués à changer de pays
au gré des évolutions de leur carrière. Pour éviter le phénomène de « Nations
shopping » et pour protéger l’intégrité et l’équité des compétitions internationales, les
Fédérations internationales décident le plus souvent qu’un athlète ne peut être
sélectionné que par une fédération nationale qu’il doit impérativement choisir. Son
choix est en principe irréversible, ce qui rend le sportif inéligible à l’avenir pour les
pays qu’il n’a pas choisi, mais dont il possède la Nationalité. Ainsi, l’ordre juridique
du sport est dominé par le principe de l’unicité de la Nationalité sportive qui procède
de l’interdiction opposée à un athlète qui a représenté un Etat lors d’une compétition
internationale de représenter par la suite un autre Etat. Il commande parmi toutes les
nationalités du sportif de n’en retenir qu’une seule afin d’identifier l’Etat représenté
par l’athlète. Le Tribunal arbitral du sport reconnait la légitimité de ce principe et
exclut tout grief d’arbitraire car il « répond au souci légitime d’empêcher que les
changements de nationalités (sportives) ne dépendre du bon vouloir ou des intérêts du
joueur ». Par ailleurs, la grande majorité des Instances internationales laissent au
sportif le choix de sa Nationalité étatique dont il se veut prévaloir. L’athlète peut donc
opter pour une Nationalité sportive qui ne corresponde pas à sa Nationalité étatique
effective. Toutefois, certains règlements sportifs apportent des restrictions à cette
liberté du sportif. Par exemple, selon l’article 6 du règlement d’application des statuts
de la FIFA, la Nationalité sportive choisie par le joueur doit résulter d’une de ces
Nationalité l’égale corroborée par un critère supplémentaire qui peut être son lieu de
naissance, celui de ses ascendants ou encore son lieu de résidence pendant au moins
deux années consécutives. La volonté de la FIFA est d’essayer de garantir une certaine
effectivité du lien entre le joueur et l’Etat dont il essaie d’intégrer la sélection
nationale. Parfois, les Fédérations Internationales imposent à l’athlète la date à laquelle
il doit faire son choix. Ainsi, le point 1. 1 033 du règlement de l’Union du Cyclisme

[Date] 56
international exige-t-il que la décision du sportif soit prise au jour de l’obtention de sa
première licence.

Il faut souligner que le fait d’abandonner au sportif le choix du pays qu’il souhaite
représenter en compétition internationale est bien souvent contesté au sein du monde
du sport. C’est le cas notamment lorsqu’un jeune sportif formé dans un pays dont il a
la Nationalité choisit finalement de porter les couleurs d’un autre Etat dont il possède
également la Nationalité. C’est la raison pour laquelle certains textes offrent la
possibilité aux sportifs de changer de Nationalité sportive lorsque son choix initial a
été fait au cours de sa minorité.

Paragraphe 2 : Le Changement de Nationalité sportive

MAQUETTE DE COURS DÉTAILLÉ DE DROIT DU


SPORT LICENCE 2 ET 3

NOMBRE D’HEURES
DISCIPLINES UE1 EPREUVES
CM TD

UE 1 : LE CADRE JURIDIQUE DU SPORT

SOMMAIRE

[Date] 57
INTRODUCTION …………………………………………………………………………………………………………………………1

I- Le droit du sport
A- Définition
B- La juridicisation du phénomène sportif
II- L’autonomie du droit du sport
A- L’existence d’un ordre juridique sportif autonome
B- Le dépassement de la division classique du droit public droit privé

TITRE 1 : Les législateurs du sport

Chapitre 1 : Les institutions internationales

Section 1 : Les institutions internationales publiques

Paragraphe 1 : L’implication des institutions internationales publiques

A- Une implication directe de l’État suisse


B- Une implication indirecte des autres acteurs

Paragraphe 2 : Le rôle déterminant des institutions internationales publiques

A- Les moyens d’interventions


B- Le domaine d’interventions

Section 2 : Les institutions internationales privées

Paragraphe 1 : Le Mouvement sportif international

A- Le Comité international olympique (CIO)


B- Le mouvement sportif fédéral

Paragraphe 2 : Les institutions de régulation

A- Le Conseil international d’arbitrage sportif


B- Le Tribunal arbitral du sport et l’Agence mondial antidopage

Chapitre 2 : Les institutions nationales

Section 1 : Les institution nationales publiques

Paragraphe 1 : L’implication générale des États

A- L’existence d’un ministère des sports


B- La reconnaissance de compétence sportive au parlement

Paragraphe 2 : Le rôle déterminant de l’État suisse

A- Un paradis juridique du mouvement sportif international


B- Un droit souple, favorable à l’éclosion du sport mondial

Section 2 : Les institutions nationales privées

[Date] 58
Paragraphe 1 : Le Comité national olympique

A- Organisation
B- Attributions

Paragraphe 2 : Les Fédérations sportives

A- Organisation
B- Attributions

TITRE 2 : Les normes sportives

Chapitre 1 : Une pluralité de lois

Section 1 : Les normes de sources privées

Paragraphe 1 : Les actes bilatéraux du mouvement sportif

A- Les contrats sportifs


B- Les conventions collectives

Paragraphe 2 : Les actes unilatéraux du mouvement sportif fédéral

A- Une nature juridique variée


B- Un régime juridique ambivalent

Section 2 : Les normes de sources étatiques

Paragraphe 1 : l’apport du droit étatique

A- Un apport innovant
B- Un droit permissif

Paragraphe 2 : Le droit supra-étatique

A- L’action déterminent de l’Union Africaine


B- L’action de la Francophonie

Chapitre 2 : La rencontre des normes d’origines diverses

Section 1 : L’identification du droit applicable

Paragraphe 1 : L’application du droit étatique

A- Le domaine d’application
B- Les incertitudes persistantes

Paragraphe 2 : L’application du droit dérivé

A- L’application d’un droit dérivé d’un ordre juridique a-national


B- Les principes de la Lex Sportiva

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