Bda 152 Nov 06
Bda 152 Nov 06
Bda 152 Nov 06
Odile Tobner 1
Dans le cas de la France et de la Belgique, il s’agit d’une acceptation
de prendre en charge des dossiers cas par cas, c' est-à-dire après
examen de l’opportunité de s’en charger.
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Est-ce bien raisonnable ? Que le TPIR soit dans l’obligation de d’appliquer les lourdes sanctions qui s’imposent
transférer ailleurs des dossiers en souffrance est une chose. Qu’il (notamment dans le domaine pétrolier), on se demande à quoi
les confie à un pays qui n’a su que laisser traîner, depuis des sert ce voyage.
années, les dossiers de présumés génocidaires (contre lesquels Le Conseil de Sécurité a adopté, le 31 août dernier, la
des plaintes sont déposées devant la justice française) vivant sur résolution 1706 autorisant l’envoi d’une force internationale au
son sol en est une autre. Rappelons, par exemple, le cas de Darfour afin d’y mettre fin aux massacres des populations civiles ;
l’Abbé Wenceslas Munyeshyaka 1, qui « traîne » depuis 1995, et le président soudanais s’est immédiatement opposé à cette
au sujet duquel la France a été condamnée par la Cour décision de l’ONU en la traitant de « colonialiste » et en
européenne des droits de l’Homme (décision de la CEDH du 8 menaçant de combattre cette force si elle arrivait. Depuis lors, le
juin 2004, affaire Mutimura contre France). En 1995, des familles gouvernement soudanais, face à une absence de volonté
de victimes du génocide des Tutsi rwandais ont engagé des politique, poursuit ses crimes et continue de gagner la partie. Le
poursuites contre le prêtre rwandais, accusé d’y être impliqué, et chapitre VII de la charte des Nations Unies (Action en cas de
qui avait trouvé refuge en France. Neuf ans après, la CEDH a menace contre la paix, de rupture de la paix et d’acte
estimé que « la durée de la procédure constitue une violation du d’agression) permet d’intervenir en cas de nécessité : les morts et
droit à un procès dans un délai raisonnable ». Malgré cette les déplacés de la région en représentent une. Comme l’écrit
décision de la Cour européenne, l’affaire attend toujours dans les l’International Crisis Group : « La communauté internationale a
tiroirs de la justice française. Selon certaines sources, la juge accepté la responsabilité de protéger les populations civiles
d’instruction en charge de ce dossier doit se rendre au Rwanda atteintes de crimes contre l’humanité lorsque leur propre
en novembre, dans le cadre d’une commission rogatoire liée à gouvernement ne peut ou ne veut le faire »2.
l’affaire. Ça en fait des années que nous voyons passer, des Par ailleurs, il ne semble pas que Jacques Chirac ait profité de
annonces du déplacement du magistrat dont nous entendons sa tournée d’agent commercial en Chine pour inciter Pékin à
parler... suivis du calme plat. exercer des pressions appropriées sur Khartoum. Il aurait pu
Dans un article paru dans le quotidien Le Monde (20/10, expliquer à ses interlocuteurs que, maintenant qu’ils ont rejoint le club
Stéphanie Maupas et Jean-Pierre Stroobants) il est écrit : « À des Grands, ils ont intérêt à respecter l’usage qui veut que l’on
l’époque [depuis une dizaine d’années en somme, NDLR] les plaintes fasse semblant de se soucier du respect des droits humains. [SC]
déposées en France n’étaient pas assez fournies et les juges
peinaient à démêler l’écheveau politique rwandais ». Sic ! L’article
poursuit, au sujet de la commission rogatoire dont il est question Somalie - Éthiopie - Djibouti :
plus haut, en disant qu’elle devrait pouvoir être exécutée « alors du chaos incontrôlable à un conflit imminent
que cette possibilité a longtemps été suspendue au bras de fer sous l’œil indifférent de la France et des USA
politique entre Paris et Kigali ». Cette affirmation est fausse. Que
Paris et Kigali se regardent en chien de faïence, certes. Mais Somalie 1991 - le chaos s’installe immédiatement après la chute du
Kigali ne s’oppose pas à la venue sur son sol de magistrats dictateur Siad Barreh
français dans le cadre de tels dossiers. Il est par contre exact que Depuis la chute du régime dictatorial de Siad Barreh en 1991,
la justice hexagonale a de quoi rougir en la matière. Alors, lui la Somalie n’a cessé de sombrer dans le chaos, victime des
confier de nouveaux dossiers ? On peut se dire qu’il serait affrontements incessants entre des chefs de guerre avides
intéressant de connaître les « cas » dont elle accepterait d’argent et de pouvoir, mais incapables d’affirmer leur autorité sur
d’assumer la charge. Certainement pas ceux d’accusés le pays...
susceptibles d’évoquer l’implication de la France au Rwanda. Refusant cette spirale, deux provinces ont déclaré leur auto-
[Sharon Courtoux] indépendance : le Somaliland en 1991 et le Puntland en 1998.
Leur statut n’a toujours pas été reconnu officiellement par la
communauté internationale, en dépit des efforts de
Douste-Blazy à Khartoum, pour quoi faire ? communication de leurs dirigeants et partisans.
Le 20 octobre, l’Union Européenne a appelé la communauté L’opération Restore Hope : l’ingérence humanitaire se
internationale à exercer « les pressions maximales » sur le transforme en affrontements sanglants.
Soudan pour l’envoi urgent d’une force de maintien de la paix de Constatant une situation humanitaire tragique, largement
l’ONU au Darfour, « seule option viable et réaliste ». Ce message relayée par les média, l’ONU mandate la communauté
a été livré par le Premier ministre finlandais, Matti Vanhanen, internationale pour une intervention humanitaire. C’est une
dont le pays exerce actuellement la présidence de l’UE. Par véritable armada qui a débarqué le 9 décembre 1992, sous la
« pressions maximales », on entend au moins de rapides et bannière US, à grands renforts d’argent, privilégiant une
lourdes sanctions diplomatiques et économiques. Or, en dépit médiatisation tous azimuts. (Au total, plus de 40 000 membres
d’une situation dont la gravité s’étale à la une, la France (membre dont 30 000 américains poseront le pied à Mogadiscio).
de l’UE sauf erreur) n’envisage aucune sanction de cet ordre Même l’heure (de nuit) du débarquement « Restore Hope »
dans l’immédiat. avait été choisie en fonction des heures de grande écoute des
Le 18 octobre, à l’Assemblée Nationale, le ministre des Affaires journaux télévisés aux USA ! On se souvient aussi de la photo de
étrangères, Philippe Douste-Blazy, en réponse à une question Bernard Kouchner débarquant sur une plage près de Mogadiscio,
d’actualité, s’est exprimé en ces termes : « Vous connaissez trop un sac de riz sur les épaules. On parlait à l’époque d’un nouveau
les affaires internationales [...] pour ne pas savoir que le rôle de la droit : « celui de l’ingérence humanitaire ».
France est primordial, d’abord en affirmant ses valeurs, le respect Très vite, les Américains ont découvert et compris que l’aide
de la souveraineté d’un pays, le respect de l’indépendance d’un alimentaire ne pourrait être acheminée vers les populations en
pays. Cela ne veut pas dire que l’on ne fait rien, je me rendrai détresse que si elle était protégée militairement. Acheter la
moi-même à Khartoum dans quelques jours, justement pour coopération des Chefs de Guerre, dont les retournements
demander au Président Béchir d’accepter qu’il y ait un passage d’alliance étaient plus rapides que les alliés ne pouvaient
de témoin efficace entre L’Union Africaine et les Nations Unies ». l’imaginer, s’est vite révélé insuffisant, inefficace et d’une fiabilité
Si le ministre ne doit pas lui annoncer sa ferme volonté non prouvée...
Les USA ont dû se rendre à l’évidence. Pour ne pas perdre la
1
Ce n’est pas le seul, il y en a une demi douzaine, dont celui, bien connu,
2
de l’ancien Préfet Laurent Bucyibaruta. Traduit de l’anglais par nos soins.
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face, ils ont été contraints d’employer directement des moyens En tout cas, bien que se refusant d’admettre
militaires pour ouvrir la voie aux convois humanitaires et pour les qu’ils armaient les milices, les USA ont reconnu
protéger. Plusieurs combats ont fait des victimes parmi les « forces publiquement qu’ils donnaient de l’argent à leurs chefs.
de la paix ». 24 Pakistanais ont péri le 5 juin 1993, 4 journalistes Certainement pour acheter des glaces...
le 12 juillet et, en octobre, des milliers de morts Somaliens. Pourquoi financer des milices incontrôlables qu’ils avaient
Le dernier épisode a été la bataille de Mogadiscio lancée par combattu en 1992 / 1993 ? La réponse nous paraît simple.
les Américains (passant outre le mandat de l’ONU) pour capturer Effectivement, ces milices avaient prouvé leur valeur guerrière en
Mohamed Aidid. Les forces US ont perdu cette bataille le 3 battant les Américains, pourtant équipés de matériel supérieur.
octobre 1993, abandonnant sur place du matériel militaire de Les Américains ne souhaitaient plus prendre le risque de les
haute technologie, y compris des hélicoptères abattus par les affronter de nouveau et avaient trouvé plus intelligent de
milices somaliennes. s’assurer leur coopération en les achetant...
Constatant leur incapacité à maintenir l’ordre et à assurer une
mission qui était déjà très éloignée des objectifs humanitaires, les Djibouti - Le double jeu de Guelleh
USA et leurs alliés se retirent sans bruit, en 1994... Il facilite l’approvisionnement des milices du Gouvernement de
Depuis ces événements, plusieurs états voisins et l’OUA ont transition. Grâce à ces financements US, les chefs de milice ont
tenté de réunir des conférences pour trouver une solution et pour rénové leur armement. Beaucoup d’observateurs pensent
soutenir l’ébauche d’une autorité centrale. qu’Ismaël Omar Guelleh, le dictateur djiboutien, a pu contribuer
directement et indirectement au transfert d’arme, pourtant interdit
La conférence d’Arta : début de vives tensions Djibouti-Éthiopie par les résolutions de l’ONU.
Le premier, en juillet 2001, le dictateur de Djibouti, Ismaël Omar Les Français n’ont rien vu passer. En tout cas, ils n’ont rien dit...
Guelleh, avait réuni à Arta (près de Djibouti) des représentants Les milices sont parties au combat contre les organisations
des différentes communautés, « leur distribuant les aides islamistes. Battues à de nombreuses reprises, elles ont d’abord
internationales » pour les contraindre à s’accorder au final sur le perdu la bataille de Mogadiscio, puis elles ont abandonné
nom d’Ali Mahdi, en qualité président du Gouvernement de progressivement les grandes villes se retrouvant à Baïdoa autour
transition. Contestée de toutes parts, son autorité n’a jamais été du Président de transition... La majorité a préféré rejoindre les
véritablement établie par la suite. rangs des vainqueurs, lui apportant armes, munitions et soutien.
Cette Conférence d’Arta avait déclenché une vive réaction de Bien qu’affirmant le contraire, les tribunaux islamistes qui
l’Éthiopie, et les relations entre les deux régimes dictatoriaux se dirigent de fait toutes les actions civiles et militaires, ont instauré
sont gravement dégradées, ne tenant plus qu’à un fil : la ligne de la Charia et ont suspendu toutes les libertés. Les instructions sont
chemin de fer Djibouti-Addis Abeba, qui est vitale pour l’Éthiopie, claires : Quiconque est surpris à ne pas prier à l’appel du
qui n’a plus aucun accès à la mer depuis l’indépendance de Muezzin doit être exécuté sur le champ... Interdiction de
l’Érythrée. rassemblement, des media étrangers, etc.
Ensuite, le Kenya a abrité plusieurs conférences, qui ont abouti Si cette situation ne fait pas l‘affaire des Américains, qui ont
à la nomination d’un nouveau gouvernement de transition dirigé atteint l’inverse de leurs objectifs, elle ne rassure pas non plus les
par Abdullahi Yusuf Ahmed, installé à Baïdoa, mais qui n’a jamais Éthiopiens qui ont une crainte affreuse de l’influence islamiste sur
réussi à imposer son autorité sur le pays. Son Premier Ministre leur territoire.
Ali Mohamed Ghedi, très contesté, a dû faire face à l’assassinat Pour gagner les batailles, les tribunaux islamistes ont eu besoin
de l’un de ses ministres, puis à la démission de la quasi-totalité d’armes ! Qui les a fournies ? D’après un article publié par Les
de son gouvernement en août 2006... Nouvelles d’Addis, qui affirme détenir les informations de sources
sérieuses, l’Érythrée aurait été l’un des fournisseurs des
Les Américains débarquent et s’installent en « dur » tribunaux islamiques, et les armes auraient transité par Djibouti.
En 2002, les Américains débarquent à Djibouti et s’installent Curieux ! Quel qu’ait été le réseau de fourniture d’armes, ni les
dans un ancien camp français, proche de l’aéroport : le camp Américains, ni les Français, disposant à eux deux de plus de
Lemonnier. Très vite, ils vont construire « en dur » et recevoir des 8 000 hommes et des moyens les plus sophistiqués d’écoute, de
renforts importants. Après un an, ils seront plus nombreux que les surveillance et de renseignements n’ont vu quoi que ce soit !
forces françaises. Djibouti étant la base française la plus Pourtant ces armes allaient être livrées à ceux que les américains
importante en dehors du territoire national. combattaient par milices interposées...
L’arrivée des Américains provoque une surenchère dont le
dictateur djiboutien profite avec délectation : les Français cèdent Un jeu diplomatique dangereux qui peut conduire dans un avenir
rapidement au chantage et Mme Alliot-Marie annonce que la très proche à un embrasement de la Corne...
France accepte de multiplier par cinq le loyer qu’elle payait Après le refroidissement de ses relations avec Addis Abeba,
auparavant pour son implantation militaire... La population Guelleh s’est retourné vers son ennemi de toujours, l’Érythrée,
djiboutienne n’en bénéficiera pratiquement pas, tous ces avec lequel l’Éthiopie est toujours en situation de conflit latent.
montants étant détournés au profit du Président et de son Auparavant, les relations djibouto-érythréennes étaient
entourage proche, dont il achète la fidélité. détestables. Djibouti accusait l’Érythrée, où vit une importante
Officiellement, l’implantation américaine n’a aucun lien avec la population d’origine Afar, d’avoir soutenu le FRUD dans les
guerre en Irak. Elle serait motivée uniquement par la lutte contre années 1991-93.
le terrorisme international. Qui peut savoir les véritables Avoir un ennemi commun a rapproché les deux dictatures, et
objectifs ? On a remarqué aussi des détachements allemands et plusieurs voyages présidentiels et diplomatiques croisés ont
espagnols à cette époque à Djibouti. permis la normalisation rapide des relations bilatérales...
Si l’Érythrée soutient les tribunaux islamiques, c’est qu’elle y
Somalie - L’agissement maladroit des USA provoque l’arrivée des trouve un intérêt majeur. Plus les tribunaux islamiques somaliens
islamistes et de leurs tribunaux. seront puissants, plus l’Éthiopie sera obligée de concentrer des
En avril-mai 2006, nous avons appris que les Américains
avaient choisi de financer les chefs de guerre pour qu’ils traquent
les membres d’Al-Qaïda installés en Somalie. Les Américains plusieurs dépêches avaient signalé le décollage d’Afghanistan de deux
détenaient-ils des informations permettant de penser que Ben Laden avions légers qui se seraient posés en Somalie. On pourrait imaginer que
Ben Laden était à bord de l’un d’entre eux...
serait réfugié et à l’abri en Somalie ? Cela n’est pas à exclure 1. Ndlr : Par ailleurs, on lira avec profit l’article de Gérard Prunier dans le
Monde diplomatique de septembre 2006, Liaisons dangereuses de
1
On se souviendra peut-être qu’au moment de l’intervention américaine, Washington en Somalie.
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troupes à cette frontière, non seulement pour empêcher toute la dépêche part vers la France, depuis le bureau de
infiltration, mais aussi pour être prête à intervenir dans l’avenir vu l'
ambassade de France « le juge Bernard Borrel s' est
le risque majeur d’embrasement régional (il y a probablement eu donné la mort ».
« Votre mari s' est suicidé », c' est ainsi que la nouvelle est annoncée à
pénétration en territoire somalien, mais à petite échelle).
Élisabeth Borrel, tout d' abord entourée de silence et de non-information.
En faisant ainsi, elle dégarnit obligatoirement le front avec
Élisabeth Borrel demande la vérité : elle se heurte aux autorités,
l’Érythrée, qui pourra attaquer de nouveau son ennemi de toujours : djiboutiennes et françaises qui mettent en œuvre tous les moyens
l’Éthiopie ! On signale d’ailleurs des escarmouches de plus en plus possibles pour accréditer la thèse du suicide, impossible lorsqu' on connaît
fréquentes à la frontière imposée par la communauté internationale... les lieux. L' examen du corps (ce n' est pas une autopsie, car il n' y a soi
disant pas de salle d' autopsie à l' hôpital militaire de Djibouti, dit-on, ce qui
Une belle pagaille en perspective, mais surtout des risques sérieux est faux) n' a pas vu la trace d' un coup mortel sur le derrière du crâne. Les
d’embrasement sous l’œil silencieux des français et des américains. radiographies effectuées lors de cette autopsie disparaissent. Et la suite
Guelleh vend des armes à tous les acheteurs qui ont la est de la même veine.
capacité de payer : il n’a pas d’état d’âme dans ce domaine... En On en rajoute pour faire croire au suicide. Revenue en France, Élisabeth
principe, il est dans le camp occidental, et surtout américain, mais Borrel demande qu' une information judiciaire soit ouverte au tribunal de
dans une interview, il n’a pas hésité à donner raison aux grande instance de Toulouse pour "recherches des causes de la mort".
Tribunaux islamiques. Elle doit se battre pour que des investigations réelles soient faites, et pour
Les milices payent les armes en dollar avec l’argent américain. que la justice puisse s' exercer : demande d' une 2éme, puis d' une 3ème
ème
autopsie, car lors de la 2 autopsie pratiquée sur le corps exhumé, les
Les tribunaux islamiques payent aussi, mais on ignore leurs
résultats sont encore partiellement occultés. La plainte déposée prendra
sources de revenus. Al-Qaïda ? Pourquoi pas ? Les pays
des mois, puis des années avant d' être suivie d' effets et de déclencher de
islamiques de la région ? Certainement pour partie, mais vraies analyses.
discrètement pour ne pas déplaire aux Américains... Les premières années, Élisabeth Borrel se bat presque seule, soutenue
Américains et Français sont muets sur le sujet. Et on tue tous par quelques personnes dont Yvette Roudy, ancienne ministre, maire de
les jours en Somalie ! On tue des Somaliens, des civils, des Lisieux, Anne Crenier Vaudano, alors présidente du Syndicat de la
1
femmes et aussi des journalistes européens... magistrature, quelques magistrats et avocats, quelques associations, et
Aujourd’hui, plusieurs observateurs craignent l’entrée de surtout François-Xavier Verschave, président de Survie, qui a compris les
l’Éthiopie dans le conflit interne en Somalie (certainement avec le mécanismes de ce qui se trame derrière cette mort.
En 1996, le suicide est requalifié en « mort suspecte », puis en
soutien américain). Le 27 octobre, Libération consacre un article
« assassinat », en avril 2000, via les conclusions de plusieurs experts. En
à cette situation sous le titre : Matt Bryden, analyste à
juin 2000, après une reconstitution et une mise en scène de la mort de
l'International Crisis Group, évoque les signes d' une confrontation Bernard Borrel pour le moins étranges (et refusant la présence de la
imminente «L' Éthiopie ne veut pas d' une base arrière islamiste en partie civile, Élisabeth Borrel et son avocat), les magistrats alors en
Somalie», sous la plume de Léa-Lisa Westerhoff. charge de l' instruction, i.e. les juges Le Loire et Moracchini, sont dessaisis
Comme tant d’autres, la situation en Somalie ne fait pas les de l'affaire. Après avoir été confiée au juge Jean-Baptiste Parlos, elle est
gros titres de la presse française et européenne. Ce conflit est désormais entre les mains de Sophie Clément.
pourtant décrit comme l’un des plus meurtriers d’Afrique – Plus 31 octobre 2002. Une nouvelle expertise conclut à l' assassinat. Deux
de 300 000 Somaliens auraient perdu la vie. La situation autres réalisées en 2003 livreront les mêmes conclusions. Le 14
novembre 2003. Sophie Clément demande la déclassification de certains
humanitaire est catastrophique. La loi du plus fort y est la seule loi.
documents classés "secret de la Défense nationale". Elle obtient
Il semble, d’après une dépêche récente de l’AFP que l’UE a
partiellement satisfaction en mars 2004.
enfin pris conscience de la gravité de la situation et qu’elle se Octobre 2004. Le bâtonnier de Djibouti est entendu à Versailles sur une
mobiliserait pour réduire l’instabilité de la région. Vœu pieux ou éventuelle subornation de témoins. Convoqué un peu plus tard par la
volonté réelle ? On peut se le demander, car vu le manque de justice pour être écouté sur cette affaire, le procureur de la République de
réaction des puissances installées solidement à Djibouti, on se Djibouti ne se présente pas.
pose de sérieuses questions. Octobre 2005 : l' avocat d’Élisabeth Borrel demande la déclassification
Quant au Puntland et au Somaliland, ils essayent de conserver de nouveaux documents "secret défense" utiles dans le dossier. Sans
leur indépendance en se tenant à l’écart et de maintenir une réponse. La République de Djibouti saisit le prétexte du dossier Borrel, et
relative sécurité à l’intérieur de leurs frontières, même si leurs rompt les accords de coopération judiciaire avec la France.
28 Juin 2006 : l' émission de Bernard Nicolas sur Canal+ relance le
régimes ne présentent pas toutes les qualités démocratiques
débat, avec deux faits nouveaux : des tests ADN sur le short du magistrat
requises... assassiné, et un nouveau témoignage. Les présomptions se resserrent.
Quant au Président de Djibouti, son régime survit grâce au La république de Djibouti fait savoir qu' elle ne coopérera pas avec la
soutien inconditionnel et abusif que lui accordent la France et France pour l' élucidation de l' affaire. Et la riposte politique ne se fait pas
aussi les USA (même s’ils sont plus critiques2) et il fait face à ces attendre : côté Djibouti, début juillet 2006, la famille d' un des témoins
contradictions diplomatiques. Les derniers développements de capitaux de l' affaire, alors en exil au Somaliland pour échapper aux
l’affaire Borrel et sa possible mise en cause en tant que pressions, se voit cernée par des miliciens djiboutiens et menacée d' être
commanditaire de l’assassinat, commencent à lui poser des ramenée de force par avion spécial, sur Djibouti. Côté France, quelques
problèmes et on parle d’un grand climat d’inquiétude au Palais jours après, c' est toute l'émission de Canal+ qui se voit désormais arrêtée
d'antenne...
présidentiel. [Jean-Loup Schaal, ARDHD]
Octobre 2006 : le dossier et le soutien à Élisabeth Borrel s' intensifient.
Les magistrats français viennent de lancer un mandat d'arrêt
Repères sur... l’assassinat du juge Borrel à Djibouti en 1995 international visant le procureur général et le chef des services
Pourquoi tant d'obstructions et d'intimidations, pour étouffer la secrets de la République de Djibouti pour tentative et subornation de
vérité et la justice ? témoins. Malgré un avis négatif donné par le procureur de Paris
nouvellement nommé, la juge Sophie Clément passe outre, et le 19
L'
historique de l'
affaire : depuis 1995, une suite d'
écrans de fumée, octobre 2006, pour le 11e anniversaire de l' assassinat du juge Bernard
et de dénis Borrel, elle lance effectivement les deux mandats d' arrêt.
Dans les dernières semaines, les annonces se sont multipliées :
Au matin du 19 octobre 1995, le corps du magistrat Bernard Borrel était délivrance de mandats d' arrêts internationaux, mise en examen de
retrouvé, à demi-calciné, à 80 km de Djibouti. Avant même toute analyse, l'
ancien porte-parole du Quai d' Orsay, etc.
1 3
En compagnie, entre autres, de Bernard Kouchner et Hélène Carrère Et accessoirement une bonne opération marketing : « On ne pouvait pas
d’Encausse, selon la Lettre du Continent du 12 octobre. espérer une plus belle promo pour le film ! » s’est exclamé Debbouze sur
2
Mais pas tout à fait inédit : on se souvient de Joseph Kabila déclarant Canal plus lundi 25 sept. On notera également au sujet du film qu’il n’a
devant le Sénat belge en février 2004 : « L' histoire de la République pas suscité, de l’autre côté de la Méditerranée, la même émotion qu’en
démocratique du Congo, c' est aussi celle des Belges, missionnaires, France. Plusieurs journaux algériens ont notamment regretté que les
fonctionnaires et entrepreneurs qui crurent au rêve du Roi Léopold II de engagés volontaires joués par Debbouze et ses compagnons ne soit pas
bâtir, au centre de l'
Afrique, un Etat. Nous voulons rendre hommage à la représentatifs de la réalité historique où l’enrôlement forcé lié à la
mémoire de tous ces pionniers. » domination coloniale était la norme.
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fonctionnaires civils et militaires : la retraite du combattant et les non plus de rattrapage. La revalorisation
pensions militaires d’invalidité. Sont laissées de côté toutes les s’appliquera seulement pour ceux qui sont encore
autres prestations, en particulier les pensions civiles et militaires en vie au 1er janvier 2007. Le contentieux des pensions des
de retraite et les pensions de réversion. A minima : parce que les anciens combattants étrangers est donc loin d’être soldé.
deux prestations revalorisées portent sur des montants L’injustice de la cristallisation des pensions continuera à faire de
dérisoires : 450 euros par an pour la retraite du combattant à taux nombreuses victimes. L’attitude minimaliste du gouvernement
plein et moins de 700 euros pour une pension d’invalidité à taux traduit une fois de plus la désinvolture de la France à l’égard des
plein. À la suite de l’arrêt Diop par lequel le Conseil d’État avait vieux immigrés qui ont combattu ou travaillé pour elle, et n’en
censuré la loi de cristallisation en 2001, le gouvernement Jospin récoltent qu’indifférence ou mépris. » Alors, notre bon roi, encore
avait évalué le coût de la revalorisation totale des pensions à 1,8 un effort... [VS]
milliards d’euros par an, 10 milliards d’euros avec le paiement
des arriérés sur les 4 dernières années. On est bien loin du
compte aujourd’hui avec les 110 millions annoncés. Pas question
(Achevé le 29/10/2006)
* # $ # )))
Mondialisation mis en place. Près de 80 % des banques commerciales dans le
monde respectent ces principes lorsqu' elles financent des projets.
Les grandes banques chinoises, elles, ne les appliquent pas.
« Vous avez demandé à la France des efforts supplémentaires en
C'est vrai qu' elles sont relativement nouvelles dans ce genre
faveur de l'
Afrique. À quoi pensez-vous précisément ?
d'activité en Afrique. Mais il ne faudrait pas qu'elles commettent
[...] Nous avons discuté de priorités avec le gouvernement les mêmes erreurs que la France et les États-Unis avec le Zaïre
français : quels pays doivent bénéficier de programmes d'aide, de Mobutu... Soyons honnêtes, cela a été terrible, un véritable
dans quels secteurs, quels donateurs doivent être maîtres scandale. [...]
d'œuvre.
L'une des réponses au mal-développement est la lutte contre la
Autre sujet de discussion, la quinzième reconstitution des fonds corruption. Quelle a été la réaction des industriels français quand
de l' Association internationale de développement (AID), qui vous leur avez présenté votre stratégie, au Medef ?
assure la part concessionnelle des activités de la Banque
Les industriels français soutiennent fortement notre action mais
mondiale, sous forme de prêts à faible taux ou de dons. La
estiment, et j'
en conviens, que ces problèmes ne pourront pas
France est leader en ce domaine et l' Afrique en est le principal
être réglés en une nuit. Mais ce qui m' a le plus impressionné,
bénéficiaire avec 4,5 milliards de dollars l'an dernier. C'est encore
c'
est leur engagement à créer un environnement où leurs
très insuffisant. Même si les pays riches sont confrontés à des
décisions puissent être basées sur des considérations
problèmes budgétaires, ce serait une erreur de réduire des
économiques et non sur l' attribution de “récompenses” plus ou
financements qui représentent peu de chose compte tenu de
moins généreuses.
leurs ressources. J' aimerais que le Japon et les États-Unis
fassent plus. C' est dans leur intérêt. Mais, selon les sondages, les En fait, les pays où sévit la corruption changent s'
ils en ont la
électeurs américains sont persuadés qu' une part importante du volonté et non quand les décisions sont imposées de l' extérieur.
budget fédéral est destinée à l' aide au développement. Ce qui Les populations sont souvent les premières à exiger des
n'est pas le cas. Ils estiment aussi que l' argent dédié à cette aide institutions responsables, à même de rendre des comptes. C' est
va être gaspillé. Ce qui fut le cas, malheureusement, dans le de plus en plus souvent le cas en Afrique, même si le mouvement
passé au Congo, qui est un exemple type de ce que l' on ne doit n'est encore ni général ni uniforme.
pas faire en matière d' aide. Quelles incitations et quelles sanctions envisager ?
Après avoir bénéficié d'une annulation de leur dette, certains pays L' outil le plus puissant, c'
est d'impliquer les gens eux-mêmes.
pauvres se réendettent, sans aucune conditionnalité, auprès de pays En mettant en lumière ce qui se passe dans l' ombre, cela freine
comme la Chine et l'
Inde. Cela vous inquiète-t-il ? parfois la corruption. Publier les avoirs des personnalités
C'est un problème qui ne se limite pas à la Chine et à l' Inde. officielles par exemple, suivre l'
utilisation des ressources tirées du
Vous pourriez ajouter le Venezuela. Il est vrai qu' il existe un pétrole, assurer la transparence de la part des gouvernements et
risque réel de voir les Pays pauvres très endettés qui ont des compagnies pétrolières pour s' assurer de l'absence de pots-
bénéficié d' un allégement de dette redevenir à nouveau très de-vin dans les contrats. C' est un important début.
endettés. Nous essayons de gérer ce problème en fixant les Sur le terrain de l'
aide, la Banque mondiale est concurrencée par
limites d'une dette soutenable à long terme. C' est complexe car les « nouveaux philanthropes » tels que Bill Gates, Warren Buffett,
tout dépend de l' utilisation des nouveaux emprunts. S' il s'agit Bill Clinton, Soros, dont les fondations ont des moyens supérieurs
d'acheter des voitures de luxe pour les ministres, c' est de la aux vôtres. Quel reste votre rôle ?
mauvaise dette. En revanche, une bonne dette procure un haut Ce ne sont pas des concurrents. Il y a un tel besoin de
rendement, relève le revenu national et facilite le remboursement ressources qu'il est bon de voir arriver de nouveaux acteurs. La
de la dette nationale dans le futur. Ce qui est crucial, c'est d'avoir question est de savoir où va l'argent, s' il est utilisé de manière
tous les éléments sur la table, de savoir ce que font réellement appropriée pour le développement et où chacun doit travailler. »
emprunteurs et prêteurs. (Paul WOLFOWITZ, président de la Banque mondiale. Propos
Certains dénoncent les méfaits environnementaux liés aux projets recueillis par Françoise Crouïgneau et Richard Hiault, Il ne faut pas que la
chinois d'exploitation des matières premières, en particulier au Chine commette en Afrique les erreurs passées de la France et des États-
Gabon. Partagez-vous ces craintes ? Unis, Les Échos le 24/10).
Mon inquiétude porte sur l' ensemble de l' Afrique. Les principes
[Il faut des programmes d’aide. Il ne faut pas réduire les
de l'Équateur [pour déterminer, évaluer et gérer les risques sociaux et
financements Nord-Sud. Mais il ne faut surtout pas des financements
environnementaux dans le domaine des financements de projets] ont été Sud-Sud, sinon on ne contrôlerait plus rien, ce qui constituerait un vrai
" ’&
&- . ’ ° )!
désastre humanitaire pour nos banques. Des pauvres qui se financent n’ont qu’à s’en occuper eux-mêmes que diable ! C’est très
entre eux, quelle horreur ! Certes nous avons financé toutes les fortunes simple, il n’y a qu’à vérifier les comptes dans tous les
gigantesques, et pas seulement les 4x4, des chefs d’État des pays sous- paradis fiscaux, demander aux patrons et aux présidents la liste de leurs
développés, depuis des décennies, nous avons financé aussi des projets biens. C’est pas sorcier ! – OT]
inutiles et ruineux, sauf pour nos entreprises. Nous sommes donc très
bien placés pour savoir ce qu’il ne faut pas faire et nous ne le ferons plus
Françafrique
bien sûr, c’est juré, serment d’ivrogne. Nos chefs d’entreprise sont
devenus des champions de vertu. La preuve, le 15 novembre prochain,
moi Paul Wolfowitz, je vais participer aux journées européennes sur le « Je n’adhère pas à la Françafrique [...] J’ai des amis politiques
développement. Denis Sassou Nguesso viendra nous dire comment faire partout ; à gauche comme à droite »
pour sortir les peuples africains de la pauvreté. C’est un expert. Il s’est,
(Denis SASSOU NGUESSO, sur Europe 1, le 15/10).
lui-même et sa famille, très bien sorti de la pauvreté. Et s’il n’y avait pas
Bill Gates, que deviendraient les pauvres ? Quant à la corruption, c’est
vrai, moi, président de la Banque mondiale, je n’y peux pas grand-chose, [Voilà une drôle de preuve !]
comme on a pu le vérifier depuis que la banque existe, mais les pauvres
& ' $ 2
Françafrique Génocide Tutsi
AFP Libreville, Protection de l'environnement : volée de bois Agence Hirondelle, D’importants témoins attendus pour la défense
vert contre le Gabon, 16/10 (Philippe ALFROY) : « Alors que des anciens responsables militaires rwandais, Arusha 05/10 :
depuis quelques semaines le débat fait rage entre les partisans « Le général Marcel Gatsinzi, ministre rwandais de la défense,
du développement du pays et ceux de la conservation de son ainsi que des officiers français présents au Rwanda au début du
patrimoine naturel, le gouvernement gabonais a clairement génocide, sont attendus pour témoigner en faveur d’anciens
affiché sa priorité dans un communiqué publié à l' issue du responsables militaires rwandais jugés devant le Tribunal pénal
conseil des ministres de jeudi. international pour le Rwanda (TPIR). [...]
La loi “autorise et stipule que, si une richesse minière ou L’audition des militaires français dans le procès militaires qui
pétrolière est découverte dans une aire protégée, elle peut et doit doit se finir d’ici la fin de l’année fait, depuis de longs mois, l’objet
être exploitée afin de favoriser l'
essor économique et social du de nombreuses tractations entre les équipes de défense de
pays”, a-t-il déclaré. Avant d'inviter les sociétés pétrolières ou Theoneste Bagosora et d’Aloys Ntabakuze, le TPIR et les
minières présentes sur son territoire à y “poursuivre sereinement ministères français de la Défense et des Affaires étrangères. La
leur travail”. » défense de Bagosora voudrait faire témoigner M. Jean-Jacques
Maurin, qui était lieutenant-colonel en 1994 et occupait le poste
d’adjoint à l’attaché de défense de l’ambassade de France à
[Si l’exploitation des richesses du Gabon, depuis des décennies,
Kigali. Dans ce but le défenseur principal de Bagosora, Me Raphaël
avaient abouti à un quelconque développement, cela se saurait. Le
scandale est justement qu’aucun “essor économique et social” n’a
Constant, a déjà rencontré M. Maurin à Paris en présence d’un
caractérisé le Gabon de Bongo depuis qu’il existe. La seule chose qui représentant du ministère de la Défense et du ministère des Affaires
s’est développée c’est la fortune de Bongo et de sa famille. On s’étonne étrangères. Pour Aloys Ntabakuze, son avocat, Me André
donc de voir l’AFP tomber dans un panneau aussi grossier et présenter Tremblay, a cité M. Grégoire de St-Quentin, qui était lieutenant-
comme “partisans du développement” ceux qui ont fait que le Gabon colonel lors des faits et aidait à la formation du bataillon de para
s’est développé mille fois moins qu’il ne l’aurait pu et dû. – OT] commando que dirigeait Ntabakuze. Son témoignage était prévu
dans les prochains jours, la présente session de ce procès
devant se terminer mi-octobre mais il semble que des difficultés
de dernières minutes l’aient retardé. Dans une décision rendue le
20 septembre, la chambre a fixé les modalités de cette
comparution, la première d’un officier français devant le TPIR.
Anciens numéros disponibles sur http://www.survie-france.org
M. de St Quentin, officier d’active qui a maintenant le grade de
Abonnez-vous : colonel et dont le nom est cité dans la décision, témoignera sous
France : 20 € Étranger : 25 € un pseudonyme, à huis clos, en présence d’un représentant du
Soutien : à partir de 24 € gouvernement français qui pourra «demander que le témoin soit
(chèque bancaire ou postal à l’ordre de Survie) dégagé de l’obligation de répondre à certaines questions pour
NOM : ...................................................................................... préserver la sécurité nationale». En outre sa déposition ne sera
Prénom : ................................................................................... pas communiquée à d’autres parties que celles du procès.
Adresse : .................................................................................. D’autres officiers canadiens, belges ou d' autres nationalités
.................................................................................................. servant au titre des Nations Unies ont déjà témoigné à plusieurs
Code postal : .............. Ville :.................................................. reprises lors de procès devant le TPIR, sans que la moindre
Abonnez un(e) ami(e) : limite soit imposée à leurs interrogatoires. »
France : 20 € Étranger : 25 € Soutien
NOM : ...................................................................................... [Préserver la sécurité nationale ? Un danger nous guette ? On
Prénom : ................................................................................... peut en douter, si ce n’est l’étalement de certaines vérités dangereuses
Adresse : .................................................................................. pour l’honneur de la France. Ainsi nous ne saurons pas ce que diront ces
.................................................................................................. militaires français à Arusha (sans doute à l’avantage des accusés
puisqu’ils sont convoqués par la défense de ces derniers), ni si, au cours
Code postal : .............. Ville :..................................................
des auditions, ils seront « dégagés de l’obligation de répondre » à des
Je souhaite recevoir une plaquette de présentation de l’association Survie.
questions de la défense ou à celles de l’accusation. Si la France n’a rien
(à envoyer à SURVIE 210 rue Saint-Martin, F75003–Paris)
à se reprocher, pourquoi aller se cacher derrière un huis clos ? – SC]
" ’&
&- . ’ ° )
Eric TOUSSAINT, Banque mondiale, le coup d' État permanent, Xavier Harel, Afrique, pillage à huis clos. Comment une
CADTM-Syllepse-CETIM, Paris, 2006 (310 p., 18 €) poignée d’initiés siphonne le pétrole africain, Fayard 2006
(280 p., 19 €).
Au cours de ses soixante années d’existence, la Banque
mondiale a soutenu activement toutes les dictatures et tous les On entend dire un peu partout que le pétrole est une malédiction pour le
régimes corrompus du camp allié des États-Unis, et saboté pays qui en possède. Si le citoyen angolais ou camerounais, privé des
activement les trop rares expériences progressistes. Elle a droits élémentaires, peut dire cela, avec une ironie amère, il est indécent
d’entendre cette assertion dans la bouche du président de la Banque
même soutenu quelques régimes de l’autre camp afin d’affaiblir
mondiale, Paul Wolfowitz (cf. Ils ont dit) ou dans un séminaire de l’AFD
l’URSS. (Agence française de développement), puisque ces organismes n’ont de
Elle a, de par le monde, renforcé systématiquement les raison d’exister que s’ils mettent en œuvre efficacement les moyens dont
entreprises privées et affaibli à la fois les pouvoirs publics et les ils disposent pour instaurer une saine gestion dans les pays dont ils
petits producteurs. Évasion fiscale, fuite des capitaux et prétendent s’occuper. Autant se dissoudre eux-mêmes s’ils constatent
corruption en sont les corollaires obligés. La dette du Tiers leur impuissance. Mais ce n’est pas d’impuissance qu’il faut parler à leur
monde, inique et proliférante, a depuis longtemps inversé les flux sujet, c’est plutôt de passivité et de complicité.
monétaires : c’est maintenant, durablement, le « Sud » qui Le pétrole n’est une malédiction ni pour la Norvège, ni pour l’Arabie
finance le « Nord ». Saoudite, ni pour le Venezuela. Si différents que soient ces pays, ils ont
Agissant en étroite concertation avec le FMI (Fond monétaire en commun qu’ils sont ou sont devenus, par leur tradition, leur richesse,
ou leur volonté, indépendants des organisations internationales
international) et l’OMC (Organisation mondiale du commerce), la
dominées par les grandes puissances. Ce n’est donc pas le pétrole qui
Banque mondiale tente maintenant de poursuivre cette politique
est une malédiction, mais la dépendance. La malédiction des Africains
sous le masque de discours sur la lutte contre la pauvreté – mais c’est d’être la proie d’une oligarchie corrompue liée aux puissances
impose aux pays écrasés par la dette un agenda diamétralement financières et politiques extérieures. C’est l’activité de cette « poignée
opposé à la satisfaction des droits humains fondamentaux. d’initiés » que décrit remarquablement Xavier Harel. Ils sont capables de
Les mécanismes politiques, économique et financiers de cette ruiner les pays les plus riches comme le Congo, l’Angola ou le Nigeria. Si
macabre histoire, sont complexes – et ceux qui les manient font un Patrick Maugein ou un Marc Rich sont une malédiction pour l’Afrique,
tout pour les rendre obscurs. Un des éléments méconnus de c’est parce que nous tolérons les agissements de Jacques Chirac
légitimant Denis Sassou Nguesso. Il y a le triangle infernal formé par un
cette histoire est le mécanisme des dettes coloniales, où
affairisme monstrueux, couvé par le couple maudit que forment le roi
comment la Banque Mondiale a accordé des prêts pour servir
nègre et le président blanc, indissolublement rivés l’un à l’autre. Dans ce
les intérêts financiers d’un certain nombres de puissances triangle circulent l’argent et les armes qui nourrissent le parasite en un
coloniales, parfois juste avant les indépendances (intérêts cercle vicieux. Plus il est nocif, plus il est fort. En Afrique et en Afrique
miniers de la France en Mauritanie par exemple), dettes qui seulement le pétrole est une malédiction, parce que l’Afrique a été
seront léguées aux pays nouvellement indépendants comme réduite en esclavage. Il ne faut guère compter sur le parasite à trois têtes
autant de nœuds coulants. pour cesser de pomper la substance dont il se nourrit. Et on sait qu’il faut
Éric Toussaint en met la compréhension à la portée de tous, couper les trois têtes en même temps, si on ne veut pas qu’elles
éclairant ainsi le présent pour mieux concevoir comment repoussent. [OT]
changer l’avenir.
Un ouvrage de référence de lecture aisée, en 24 courts chapitres
Pierre Laniray (coordonné par)
que l’on peut aussi bien consulter indépendamment que dévorer
à la file. Les chiffres, il en faut en la matière, illustrent le texte en
François-Xavier Verschave
un petit nombre de tableaux et graphiques d’une grande lisibilité, L’homme qui voulait soulever les montagnes
allégeant la lecture au lieu de l’alourdir. Un vrai plaisir à lire, si le Éd. les Arènes, juin 2006, 202 pages, 18,00 €
sujet n’était pas si sinistre. [François Lille] François-Xavier Verschave fut pendant vingt ans l’adversaire redouté
de la Françafrique. Il croyait à la démocratie et aux engagements
publics. Puisque la République violait en Afrique ses principes
François Lille fondamentaux, il avait décidé de porter la plume dans la plaie. Avec une
où est l'espoir ? écrit des livres marquants, lancé une commission d’enquête citoyenne
sur le Rwanda, animé d’innombrables conférences. Grâce à François-
Éd. Tribord, juin 2006, 4,50 € Xavier Verschave, la Françafrique a été mise en procès. L’homme qui
Dans les termes les plus simples et généralisables, on peut proposer voulait soulever les montagnes retrace l’itinéraire de ce citoyen absolu,
trois définitions basiques : le bien commun, c' est ce qui appartient à tout rassemblant ses pages les plus éclairantes et les témoignages de ceux
le monde au présent et au futur. Le bien public, c' est ce à quoi tout le qui l’ont connu. [... 4ème de couverture]
monde doit avoir droit, ici et maintenant. Le service public, c' est la
manière dont doivent être gérés, produits et distribués ces biens Directrice de la publication : Odile Biyidi Awala.
communs et publics. Directeur de la rédaction : Pierre Caminade.
Le passage de l' idée de l'aide à celle des biens publics, c'
est celui de Comité de rédaction : Pierre Caminade, Sharon Courtoux, Sisulu
l'
assistance aux droits des peuples et des gens. L' une se quémande, les Mandjou Sory, Victor Sègre, Odile Tobner.
autres se revendiquent et s' exigent. Ont aussi participé : Alain Deneault, Anne-Marie de Vaivre, François
Tracer l' espace des biens mondiaux les plus essentiels est Lille, Jean-loup Schaal.
indissociable aussi d' une réflexion sur l' usage des biens privés, qu' ils Abonnements : Antonin Wattenberg.
soient de production ou de consommation, et plus globalement sur le Coordination : Olivier Thimonier.
caractère illimité du droit à la propriété. Ne faudra-t-il pas le replacer Association Survie, 210 rue Saint-Martin, F75003 – Paris –
comme un droit second, dérivé en quelque sorte du droit d' usage Commission paritaire n° 0211G87632 – Dépôt légal : novembre 2006 –
équitable des choses ? Locke, Voltaire et plus tard Robespierre, entre ISSN 1155-1666 – Imprimé par nos soins –
autres, en préconisaient déjà la limitation. La torrentielle expansion du Abonnement : 20€ (Étranger : 25€ ; Faible revenu : 16€) –
capitalisme a balayé leurs intuitions prémonitoires, mais la question reste
Tél. (33 ou 0)1 44 61 03 25 – Fax (33 ou 0)1 44 61 03 20 –
ouverte.
http://www.survie-france.org – [email protected]