Conflit Au Cambodge

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LES CONFLITS AU CAMBODGE

Collège interarmées de défense

7°promotion

MEMOIRE DE GEOPOLITIQUE

1 - Les conflits au Cambodge


2 - Colonel KHUON Muy – huot
3 - 29 février 2000
4 - Division A
5 - Mémoire de géopolitique
6 - Le Cambodge est depuis près de 1000 ans, une terre d’affrontement.
Cependant, depuis 1970, les combats se sont intensifiés et ont abouti au
génocide du peuple cambodgien, puis à son invasion par le Vietnam.
Aujourd’hui, le processus démocratique naît véritablement au Cambodge.
7 – mots clés : Cambodge, génocide, Vietnam, Chine, URSS, USA.

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LES CONFLITS AU CAMBODGE

SOMMAIRE

I LA DIVERSITE DU CAMBODGE
11 UN CADRE PHYSIQUE CONTRASTE
12 UNE POPULATION HETEROGENE ET DE FAIBLE DENSITE

II LE POIDS DE L’HISTOIRE ET SON IDEOLOGIE


21 LES HANDICAPS HERITES D’UNE HISTOIRE TOURMENTEE
22 LE VOILE IDEOLOGIQUE
23 LES GUERRES, CAUSES D’UN IRREVERSIBLE DECLIN DE
SOUVERAINETE
24 LES GRANDES PUISSANCES ET LE CAMBODGE
25 LES INTERETS DES GRANDES PUISSANCES AU CAMBODGE
26 LE RÔLE DE LA CHINE
27 L’INFLUENCE DE LA CHINE
28 LE RÔLE DU VIETNAM

III LES OBJECTIFS DES GRANDES PUISSANCES


31 LES OBJECTIFS SOVIETIQUES
32 LES OBJECTIFS DES USA

IV LES CAUSES DE L’INVASION DU CAMBODGE


41 LES PEURS DU VIETNAM
42 LE MOMENT PROPICE POUR LE VIETNAM

V LE CAMBODGE A LA RECHERCHE DE SA STABILITE


51 LES PREMIERES ELECTIONS CAMBODGIENNES
52 LE PROCESSUS ELECTORAL LEGITIME PAR LA COMMUNAUTE
INTERNATIONALE

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Introduction .

L’Indochine (le Sud-Est Asiatique ) désigne une vaste péninsule située à la


charnière des deux grands blocs asiatiques, l’Inde et la Chine. Par suite des énormes
difficultés de communications que représentent le massif Tibétain et plus au nord les
déserts de l’Asie centrale, c’est par l’Indochine que passent les liaisons terrestres et
maritimes entre le monde hindou et le monde chinois. L’Indochine est la partie Est de
cette péninsule.

Le Cambodge fait partie de l’Indochine. Il est essentiellement un don du MEKONG.


En effet, c’est une vaste plaine alluviale formée de l’accumulation des limons de ce
fleuve. La partie vitale ( le Cambodge utile ) est constituée par les plaines du
MEKONG et du TONLE SAP. Elle s’ouvre largement au Sud-Est sur la Cochinchine .
Cette vaste plaine est encadrée par des montagnes et des plateaux. Les
cambodgiens vivaient dans les plaines riches.

Sur le drapeau bleu et rouge, les cinq tours d’ANGKOR VAT en blanc ( vue aérienne)
témoignent d’une splendeur passée du Cambodge qui au cours de l’histoire s’est
réduit comme une peau de chagrin. Sa situation géographique et ses immenses
richesses naturelles créent la jalousie et surtout la volonté de conquête de ses
voisins . Ces derniers ont fait subir au Cambodge de lourdes tragédies durant des
siècles. Depuis 1970, date à laquelle le prince Norodom Sihanouk est renversé et
surtout depuis l’extension de la guerre Américaine du Vietnam au Cambodge, ce
pays vit un nouveau drame.

Le paroxysme est atteint entre 1975 et 1978 . Pendant cette période, la folie Khmer
Rouge a tué et laissé mourir de faim plus de 3 millions de victimes . Le nouveau
régime communiste installé à PHNOM PENH par Hanoi en Janvier 1979 est
d’obédience soviétique. L’espoir mis par la population dans les vietnamiens qui les
ont sauvés d’une mort certaine disparaît lorsqu’elle comprend que l’intervention
vietnamienne se transforme en occupation militaire, en installation de colons, en
ouverture de prisons publiques, en interdits religieux. Enfin, le travail obligatoire tuera

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des milliers de personnes à cause de l’explosion de mines ou en raison du


paludisme.

Aidée par la Chine et la Thaïlande, la guérilla Khmer Rouge fait ensuite peau neuve.
En octobre 1991 : des accords de paix sont signés à Paris qui mettent un terme à la
fois à ce qu’on a appelé « la troisième guerre d’Indochine » et à une guerre civile
vieille de 21 ans. Confronté à des handicaps très lourds, le royaume Khmer semble
condamné par sa situation historique et actuelle à être un pays sous influence.

Quels sont les facteurs principaux qui poussent le Cambodge à tomber dans ce
drame récurrent ?

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I- LA DIVERSITE DU CAMBODGE :

1 1 – Un cadre physique contrasté

Dans l’ensemble géographique constitué par le pays du Sud-Est asiatique, le


Cambodge est un pays de taille relativement modeste avec 181.035 km2 (à titre de
comparaison, la Thaïlande voisine a une superficie de 514.000 km2 et le Vietnam
334.000 km2 ). Si l’Egypte est un don du Nil on peut dire du Cambodge qu’il est un
don du Mékong.

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Le MEKONG, « la mère des eaux » prend sa source au mont Tibet à 5000 mètres
d’altitude. IL a la longueur de 4340 km. Il baigne le Laos sur 1865 km et le
Cambodge sur 500 km. Il coule du nord au sud . Le rôle joué par ce fleuve est
essentiel. Le MEKONG draine un bassin d’alimentation soumis au rythme des
moussons. Son débit au moment des crues est évalué à environ 60.000 m3/s et à
15.000m3/s en saison sèche. Le MEKONG dépose, chaque année sur les territoires
immergées en saison des hautes eaux une couche de limons fertiles qui favorise la
vie des êtres vivants et des plantes. Le trop plein d’eau ne pouvant être évacué vers
la mer est d’abord rejeté vers le TONLE SAP puis déborde dans la plaine . Le bassin
du TONLE SAP est donc un régulateur qui draine les eaux de la plaine centrale et
reçoit une grande partie des eaux du Mékong pour que des inondations fortes ne
puissent pas se produire pendant la saison des pluies . A la saison des basses eaux
, le TONLE SAP refoule ses eaux vers la mer . Le TONLE SAP se vide peu à peu
mais les eaux qui y ont séjourné ont laissé en se retirant une partie de leur richesse,
du limon pour assurer la récolte du riz . Dans le TONLE SAP, la production de
poissons est l’une des plus importantes du monde (8 tonnes par km²). En 1989 la
production totale de poissons d’eau douce aurait été de 82.000 tonnes .

La forme géographique du Cambodge est presque celle d’un polygone régulier . Sa


longueur du Sud vers le Nord et la largeur de l’Est vers l’Ouest sont respectivement
de 560km et 440km . Il a 2600 km de frontière dont les cinq sixième sont terrestres .
Le Nord du Cambodge , dans la région des bas plateaux est fermé au Nord par la
falaise verticale des DANGREK qui court d’Est en Ouest sur près de 200 km . Cette
région est constituée par des grès gris et par des coulées volcaniques anciennes .
Le long de sa frontière du Sud-Ouest vers le Nord s’étend une chaîne montagneuse .
Ces régions sont relativement accidentées , difficiles à contrôler . Elle rendent plus
faciles les trafics en tout genre et les manœuvres des mouvements de guérilla .

12 – Une population hétérogène et de faible densité :

La population est peu dense. Ainsi, le problème majeur asiatique , celui d’un monde
surpeuplé n’existe pas au Cambodge .

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En 1970 la population est évaluée à 7millions d’habitants soit environ 40 habitants


par km²( chiffre faible ) . Le Nord du Cambodge est à peu près vide d’habitants. Cette
région a en effet perdu des hommes au profit des plaines centrales . Les densités
élevées se trouvent immédiatement à l’Ouest et au sud de PHNOM PENH( en
particulier dans la province de KANDAL et celle de TAKEO). Le Cambodge est donc
très inégalement peuplé . Sur les berges du MEKONG, du BASSAC et du TONLE
SAP se trouvent de fortes densités de population. PHNOM PENH avait 30.000
habitants en 1875 , 108.000 en 1939 , 111.000 en 1948. A cette époque la plus
grande partie de la population était chinoise, vietnamienne. De plus, nous trouvons
des chams souvent musulmans . Une mutation considérable s’est produite à partir de
1948 . La population a été gonflée par un considérable exode rural ; elle s’est accrue
( 335.000habitants en 1958 610.000 en 1968 ) et en même temps « Khmerisée » dès
1958 .

La population du Cambodge compte 7.870.000 habitants ( estimation de 1989 ) avec


un taux de croissance de 2 ,5% par an et 43,5 habitants au km² . 85 à 90% est
Khmer et constituée d’ethnies installées depuis longtemps comme les Phnongs ,
Khas , Pors , Kuoys , Steangs , Kolas et Sarès .

- Le type Khmer :

Le Khmer est grand par rapport aux autres ethnies de la péninsule Indochinoise . Le
Khmer est surtout agriculteur. Il construit sa maison sur pilotis au milieu de ses
rizières ..

- Le Khmer Islam :

Le Khmer Islam est un cambodgien de religion musulmane . Les Cambodgiens


l’appellent « Chams » car il est issue d’immigrants Chams qui vivaient depuis des
siècles de la côte d’Annam après la destruction de leur empire (Champa) par les
Vietnamiens .

- Les Vietnamiens :

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L’immigration vietnamienne remonte au 19ième siècle dès la première intervention de


l’Annam au Cambodge . Très tôt , les vietnamiens furent nombreux à PHNOM
PENH, sur les berges du MEKONG et dans le lac du TONLE SAP . Au temps du
protectorat , ils se sont infiltrés discrètement et vont s’installer dans les différentes
villes . Ils sont petits commerçants (photographes , tailleurs , cordonniers , vendeurs),
ouvriers et à la campagne cultivateurs et pêcheurs . Ils peuplent les berges des
fleuves , des rivières et des lacs . Ils pêchent également dans les villages installées
en forêt inondée ou sur les bords des lacs et des cours d’eau.

Peuplé dès le paléolithique ( civilisation de HOA BINH et de BAC SON ) le delta du


fleuve Rouge voit se constituer le peuple vietnamien pendant le 1ère millénaire avant
notre ère et s’épanouir une civilisation du bronze . En 208 avant JC le royaume de
NAM-VIET englobe le delta et la chine du Sud . A son apogée sous LE THANH TON,
la dynastie LE annexe progressivement le Champa , vaincue en 1471 et impose sa
suzeraineté au royaume Laos . Après ces deux conquêtes le vietnamien poursuit sa
poussée expansionniste vers le Sud et au 17ème siècle occupe inégalement le delta
du MEKONG, territoire qui appartenait à l’origine à la partie Sud-Est du Cambodge .

- Les Chinois :

Les Chinois se sont assimilés en pratiquant des mariages mixtes avec les
cambodgiens . Ils ont quitté leur pays pour former une nouvelle colonie . Ils font du
commerce, activité dans laquelle ils se révèlent très habiles et intelligents . Ils sont
réparateurs de bicyclettes , brocanteurs , restaurateurs , propriétaires des rizeries ou
d’autocars.

L’immigration chinoise est très ancienne , elle remonterait au premier siècle de notre
ère et ceux-ci étaient déjà nombreux à Angkor au 13ème siècle selon TCHOU TA
KOUAN (missionnaire chinois) . L’activité essentielle des Chinois réside dans le
commerce de détail et un artisanat divers et varié entièrement entre leurs mains.

Avec une population de 10,3 millions d’habitants en 1995 , le Cambodge est l’un des
pays Indochinois le moins peuplé .(densité 56,6habitants au km²) par rapport au pays
qui l’entourent .

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II – LE POIDS DE L’HISTOIRE ET DE L’IDEOLOGIE :

21-Les handicaps hérités d’une histoire tourmentée

Il est certain qu’au 11ème siècle les ténèbres s’abattent sur le Cambodge . Pendant la
période des annales, sous le régime de PARAMATHAKHEMARAJA, les Siamois
(Thaïlandais) passent à l’attaque (1349-1369) . Le roi d’AYUTHYA (Siam)
entreprend le siège Angkor en 1357 . Au cours de cette longue agonie de seize mois
le roi du Siam mourut . L’armée siamoise victorieuse dévaste les récoltes , pille les
trésors et emmène les prisonniers Khmers en esclave . Le Cambodge aura été
gouverné successivement par trois rois siamois. Cependant, le roi cambodgien
réussit à chasser les Siamois six ans plus tard.

Vers 1404 , le roi Siam fit de nouveau un interminable siège d’Angkor . Une fois de
plus la région est dévastée et le conquérant retourne à son pays avec 40.000 captifs.
Ila laissé son fils comme gouverneur. Ce dernier est rapidement assassiné. Le roi
khmer a pris le pouvoir. Ce nouveau monarque réside à Angkor où il est sacré vers
1420 puis il s’installe à BASAN avant de s’établir , l’année suivante, à PHNOM
PENH. Le règne suivant est assombri par les luttes intestinales. Les Siamois en
profitent pour occuper KHORAT et CHANTABUN (dans l’Est de l’actuelle Thaïlande).
On y trouve aujourd’hui encore de très beaux temples de type Khmer. Profitant de la
discorde qui régnait dans la famille royale et dans le pays au sujet du jeune roi
mineur, les siamois tentent de s’emparer de LOVEK, nouvelle cité investie par le roi
Khmer et qui sera pillée deux ans plus tard .

L’écroulement de l’empire Cambodgien sous l’assaut des Thaïs amène de profonds


changements : disparition d’une féodalité très développée et développement du
bouddhisme petit véhicule qui remplace celui du grand véhicule. Ayant compris le
danger, les Siamois s’emparent de LOVEK la nouvelle capitale Khmer. Enfin les rois
Khmers s’installent définitivement sur la plaine des quatre bras et la cour se
transporte à Oudong situé à 30km de PHNOM PENH (la capitale du Cambodge
actuelle) .

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La route de l’amont est bloquée. Les Khmers se tournent vers l’aval, dans le delta,
qu’ils considéraient jusqu’alors comme une province mineure mais ils se heurtent à
un autre ennemi traditionnel, les Chams ( la prise d’Angkor par les Chams ne se
traduit pas seulement par le pillage du trésor royal et les biens des habitants. Ils
s’installent également comme maître dans Angkor). Le système religieux était
caduque. La lutte contre les Chams fut longue, pénible et sans merci . Pour les
prendre à revers, les Cambodgiens font alliance avec les Vietnamiens. Grâce aux
Vietnamiens, les Khmers anéantissent les Chams mais ce nouvel allié a les dents
longues car les Vietnamiens ne cesseront plus de grignoter le Cambodge, parvenant
peu à peu à arracher des portions du territoire Khmer. Les luttes intestinales contre
les agresseurs font perdre au Cambodge de nombreuses provinces.

A la fin du 17ème siècle, le seul membre vivant de la famille royale Khmer, le roi est
encore jeune. Il continue à diriger le royaume mais il est pris en étau entre un Siam
et un Vietnam, qui, enfin unifiés, décident de contrôler, chacun à son profit, le bassin
du Mékong en mettant sous tutelle la couronne Cambodgienne.

Malgré les difficultés, le roi Khmer réussit à mettre en place une politique de
redressement et de modernisation du Cambodge. Il desserre l’étau Siamo-
Vietnamien en s’ouvrant sur les réseaux de la mer de Chine. Depuis 1779, les rois du
Cambodge sont couronnés en Thaïlande et le Vietnam réclame aussi la suzeraineté.
Alors à ce moment , éclate une guerre qui ne prend fin qu’en 1834 quand le royaume
Khmer devient le vassal du Siam et du Vietnam.

2 2 – Le voile idéologique :

Le terme de géopolitique a commencé à réapparaître dans les médias occidentaux ,


non pas durant la guerre de Corée, ni durant la guerre d’Indochine, lorsque l’Est et
l’Ouest s’affrontaient durement mais seulement à partir de 1978-1979, lors du conflit
Cambodge -Vietnam .

Pour la première fois, de manière éclatante, un litige frontalier et des droits


historiques sur un territoire l’emportaient sur la lutte du communisme international
contre l’impérialisme. Ce nouveau conflit démontrait qu’au sein du bloc communiste,

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les rivalités territoriales pouvaient être plus importants. La guerre qui éclata entre les
Khmers Rouges et les communistes vietnamiens pour le contrôle d’une partie du
delta du Mékong contribua fortement à la réapparition du mot géopolitique pour
désigner les antagonismes beaucoup moins idéologiques que territoriaux.

Au Cambodge, en avril 1975 les Khmers Rouges prennent PHNOM PENH. Le


nouveau régime est prochinois. Au printemps 1978, un conflit frontalier (bec du
canard) éclate entre le Cambodge et le Vietnam. Hanoi étant soutenu par Moscou,
en janvier 1979, se produit une attaque vietnamienne massive. Un mois plus tard, les
Chinois contre –attaquent en territoire vietnamien et occupe la capitale de LAOCIA.

La bipolarité avait figé en quelques sortes les conflits géopolitiques. Deux blocs
idéologiques relativement cohérents s’affrontaient par guerres interposées, en
général dans le pays du Tiers-Monde que la fragilité économique et politique rendait
facile à instrumentaliser.

23 – Les guerres , cause d’un irréversible déclin de souveraineté :

Le protectorat français trouva l’un de ses fondements dans l’incapacité du


Cambodge à se garder de l’appétit territorial de ses voisins. L’ennemi héréditaire
vietnamien ayant été pour un temps lui aussi placé sous protection française, c’est
avec la Thaïlande que sont longtemps demeurés en suspens les litiges territoriaux.
Ces litiges se sont réveillés et exprimés avec force pendant la seconde guerre
mondiale et l’occupation Japonaise de l’Indochine française. Depuis la fin de la
période coloniale, les troupes internes du royaume Khmer et la réunification
vietnamienne ont précipité les appétits des grands voisins du Cambodge.

En 1970, profitant de l’anarchie consécutive au coup d’état du maréchal LON NOL,


ils ont accentué leur pression pour s’approprier certains territoires et îles côtières. En
1979, le régime pro-vietnamien mis en place à PHNOM PENH après la chute des
Khmers Rouges a signé avec Hanoi un traité qui présente un tracé désavantageux
pour le Cambodge par rapport à celui de 1954, conduisant ainsi à la perte d’une
partie des provinces frontalières.

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LES CONFLITS AU CAMBODGE

24- Les grandes puissances et le Cambodge :

Lorsque, au cours de l’hiver 1979, l’armée vietnamienne envahit le Cambodge et


renversa le régime de Pol Pot, le conflit était considéré par de nombreux
observateurs comme une guerre par procuration entre Moscou et Pékin. La signature
d’un traité d’amitié entre Hanoi et l’Union Soviétique et la livraison massive de
matériel militaire russe qui avait précédé l’invasion par le Vietnam du Kampuchéa
démocratique (Khmer Rouge) soutenu par les chinois semblaient fournir une
crédibilité à cette interprétation.

Mais dix ans plus tard, lorsque les protagonistes du conflit Cambodgien et leurs
soutiens étrangers se sont rencontrés à Paris (juillet - août 1989) pour négocier un
règlement de paix, les efforts se sont brisés sur l’attitude intransigeante des parties
Khmères. Malgré une amélioration spectaculaire de leurs relations, ni les Soviétiques
ni les Chinois ne purent imposer un règlement à leurs alliés récalcitrants. En fait cette
conférence de Paris n’a fait que confirmer ce qui était amplement indiqué par le
déroulement de ce conflit vieux de onze ans, à savoir que, en dépit de l'implication
importante de puissances extérieures, la lutte au Cambodge n’était pas une guerre
« par procuration ».

L’incapacité des grandes puissances à résoudre le conflit cambodgien ne doit toute


fois cacher le fait que le Cambodge a servi d’autre intérêts des grandes puissances.
Ainsi, il a aidé la Chine à émerger en tant que puissance régionale, ensuite il a fourni
à l’Union Soviétique l’occasion d’occuper une nouvelle position en Asie, enfin il a
donné à Washington des moyens de consolider ses liens avec la Chine a permis à
l’Association des Nations du Sud-Est Asiatique (ANSEA) d’émerger en tant que
groupe influent sur le scène mondiale.

25 – Intérêts des grandes puissances au Cambodge :

Comment un pays pauvre et petit comme le Cambodge a-t-il pu devenir l’arène d’une
lutte des grandes puissances?

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La réponse est simple: en raison de sa situation géographique. En effet, le


Cambodge se trouve être un théâtre de la lutte globale entre les superpuissances.
Toutefois, le Cambodge ne s’est pas contenté d’être une victime passive des
interférences étrangères. Les tensions internes et la volatilité du Cambodge ont été
un élément clé pour amener les puissances étrangères à intervenir. Si l’élite
cambodgienne ne s’était pas tournée contre son dirigeant patriarcal, le prince
Norodom Sihanouk et si les luttes intestinales entre les éléments différents de
gauche du Cambodge n’avaient pas été si intenses les possibilités d’interventions
étrangères auraient été limitées. Un témoignage de la vulnérabilité du faible
Cambodge se trouve dans le fait que ses récents dirigeants du roi Anduong à
Norodom Sihanouk et à Pol Pot ont dû faire appel à des puissances éloignées pour
qu’elles interviennent et protègent leur pays. Les interventions qui s’en sont suivies
ont plus servi les puissances étrangères que le Cambodge .

26 – Rôle de la Chine :

Au cours des mois qui ont suivi la victoire des Khmères Rouges (1975) la Chine a
fourni au Cambodge une aide importante. Dans le même temps, Pékin refusait une
nouvelle aide au Vietnam sous le prétexte de difficultés économiques. Bien que le
leadership pragmatique qui émergeait en Chine en 1978 ait été gêné par la politique
ultra gauchiste poursuivie par les Khmères Rouges, la Chine a néanmoins offert son
assistance totale à PHNOM PENH dans sa confrontation avec le Vietnam.

Si le Cambodge était devenu une partie du bloc Indochinois la Thaïlande aurait été
obligée de conclure des accords avec le groupe dirigé par Hanoi, entraînant la
disparition des possibilités d’effet de levier de la Chine sur les pays continentaux du
Sud-Est asiatique.

L’installation de bases militaires soviétiques au Vietnam qui a suivi l’invasion


vietnamienne du Cambodge a également fait naître le spectre d’un encerclement
soviétique de la Chine. L’aide soviétique pour le renversement d’un régime ami de
Pékin était un nouveau défi pour la Chine.

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LES CONFLITS AU CAMBODGE

Au milieu des années1970, profitant de la défaite des Etats-Unis au Vietnam, l’Union


soviétique lança des offensives visant à appliquer sa politique de marche en avant
vers le sud. D’une part, elle accorda son soutien à l’invasion du Cambodge par le
Vietnam en expédiant sa flotte du Pacifique jusqu’en mer de Chine méridionale et
dans le Sud-Est asiatique , de l’autre, elle lança une agression directe contre
l’Afghanistan pour s’ouvrir une voie vers le golfe, tout en renforçant sa présence
militaire en Extrême-Orient. Par l’accroissement de ses forces militaires dans la
région Asie Pacifique, l’URRS cherchait à établir une zone de contrôle maritime
s’étendant de la mer de Chine méridionale en passant par la mer du Japon. Dans
l’éventualité d’une guerre, elle pouvait non seulement briser le blocus des Etats-Unis
et du Japon dans les détroits de Tsugaru, de Soya et de Tsushima, mais encore
contrôler ou interdire le détroit de Malacca d’importance vitale pour les Etats-Unis et
le Japon et pénétrer dans l’océan Indien et le Golfe, tout en encerclant l’ Europe de
l’autre côté (l’encerclement de la Chine vu par Pékin).

L’obstacle numéro un à la normalisation entre les deux géants communistes restait


donc la question indochinoise. Pour Pékin, la poursuite par Hanoi de son objectif
« d’hégémonie régionale était en fait complémentaire, ou même une extension de
l’hégémonisme globale soviétique ». En soutenant matériellement la résistance
Khmer, la Chine se donnait également les moyens de jouer un rôle du premier plan
dans le conflit, de même que les affrontements frontaliers avec le Vietnam
permettaient à la fois d’affaiblir le Vietnam et par voie de conséquence l’URSS qui
était obligée de soutenir une grande partie de l’effort de guerre. En faisant ainsi
augmenter le coût de l’assistance Soviétique à son allié, la Chine espérait attiser les
discordes éventuelles entre les deux pays et amener à terme l’URSS à faire pression
sur le Vietnam afin qu’il trouve une issue honorable au conflit .

La politique que Pékin a poursuivie depuis la prise de PHNOM PENH par l’armée
d’invasion vietnamienne le 7 janvier 1979 a consisté à maintenir une pression
militaire sur Hanoi et à tenter de l’isoler de l’aide internationale, y compris de celle
provenant de l’URSS. Pour atteindre ce but, le principal élément de la stratégie de la
Chine a été de consolider les restes du Kampuchéa démocratique, de reconstruire sa
capacité de lutte armée et de défier les Vietnamiens sur les champs de bataille du
Cambodge comme devant les instances internationale. On estime que la Chine a

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LES CONFLITS AU CAMBODGE

beaucoup dépensé au cours des onze dernières années pour aider les Khmers
Rouges. Le principal allié de la Chine dans cette opération a été la Thaïlande, qui
voyait une menace directe contre sa sécurité dans l’occupation vietnamienne du
Cambodge.

Un autre élément de la stratégie de Pékin a été la formation d’un front uni


international contre l’occupation vietnamienne du Cambodge avec, pour clef de
voûte, sa coalition avec l’Association des Nations du Sud-Est Asiatique (ANSEA).
Cette coalition d’Etat avait pour objectif le maintien de l’occupation du siège du
Cambodge aux Nations Unis par le Kampuchéa Démocratique (Khmers Rouges) et
l’adoption d’une résolution appelant au retrait des troupes vietnamiennes. Aux
Nations Unis, une solide majorité a soutenu la résolution de l’ANSEA sur le
Cambodge. Pour surmonter la répulsion des nations occidentales à l’encontre des
Khmers Rouges, Pékin était prêt à reconnaître que Pol Pot avait fait « des erreurs »
et à accepter un rôle subsidiaire pour les Khmers Rouges dans le statut politique
ultérieur.

Un troisième élément de la stratégie chinoise fut de faire campagne pour un


isolement politique et économique du Vietnam et de faire pression sur Moscou pour
qu’elle mette fin à son soutien de l’occupation vietnamienne du Cambodge. Bien que
les nations occidentales apportent généralement leur soutien à l’embargo
économique du Vietnam sous la pression de la Chine et des Etats-Unis.

Avec l’ouverture des pourparlers de normalisation avec Moscou en 1982 apparut une
quatrième composante de la stratégie chinoise, une pression directe sur les
Soviétiques pour qu’ils mettent fin à l’occupation vietnamienne au Cambodge. Bien
que son soutien apporté aux Khmers Rouges ait été une source de difficultés
diplomatiques pour Pékin la profonde antipathie des Khmers rouges à l’égard du
Vietnam faisait de la permanence de leur rôle au gouvernement du pays une
garantie solide contre l’hégémonie de Hanoi en Indochine. Aussi, malgré une
pression internationale grandissante pour qu’ils abandonnent les Khmers Rouges,
les Chinois sont restés fermes sur leurs positions et ont insisté pour que ces
derniers fassent partie d’un gouvernement quadripartie provisoire avant qu’ils ne

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LES CONFLITS AU CAMBODGE

mettent fin à leur aide militaire. Ainsi la Chine a réussi à obtenir l’isolement et
l’affaiblissement du Vietnam et le retrait de ce dernier du Cambodge.

Si le Vietnam est actuellement l’une des nations les plus pauvres de cette terre et
diplomatiquement l’une des plus isolées, la Chine peut considérer qu’elle en est l’un
des artisans.

De plus, le rôle moteur de la Chine dans l’opposition à l’occupation vietnamienne au


Cambodge a non seulement renforcé ses liens avec son ancien ennemi, la
Thaïlande, mais a de plus installé Pékin en tant que puissance régionale dont les
désirs doivent être pris en compte pour résoudre les problèmes de l’Asie du Sud-Est
.
27 – Influence de la Chine :

La Chine a toujours considéré le Cambodge comme son « petit frère ». la présence


d’une force minorité chinoise n’y est sans doute pas étrangère. On connaît les liens
forts qui existent entre la diaspora et sa métropole. Mais la rivalité ancestrale qui
oppose le « pays du milliard d’hommes » à son voisin vietnamien est probablement
la raison majeure qui motiva la politique de la Chine au Cambodge.

Dans « la politique asiatique de la Chine », François Joyaux explique que «la


politique de Pékin en Indochine s’explique en grande partie par des conceptions qui
datent d’une période ancienne pendant laquelle la Chine impériale faisait figure de
superpuissance dans la région. Forte de son idéologie anti-impérialiste, la
République Populaire de Chine poursuivit tout naturellement dans ce sens ». La
rivalité sino-soviétique a certes disparu avec l’un des deux protagonistes et n’est plus
alimentée de l’extérieu . Il empêche que, pendant des décennies, le Cambodge s’est
trouvé instrumentalisé par la Chine dans un conflit qui le dépassaient. Le soutien des
communistes chinois aux Khmers Rouges en a bien sûr été l’élément le plus visible.
Mais également, les rapports ambigus entretenus par Sihanouk avec Pékin ont sans
doute pesé plus qu'on l'imagine dans l’imbroglio cambodgien. Le souverain ne se
rend-t-il pas régulièrement en Chine pour s’y faire soigner et probablement pour y
négocier quelque discrète influence de son puissant allié sur la scène intérieure
Khmer.

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LES CONFLITS AU CAMBODGE

28- Rôle du Vietnam :

La Chine et le Vietnam sont au centre du dispositif, celui-ci poursuivant son ambition


historique de réunir sous sa tutelle ses voisins laotien et cambodgien, tandis que
celle-là s’efforce pour plus de sûreté de diviser pour régner.

Dressée contre ce vassal prétentieux et ingrat qui à divers titre la nargue et non
content de s’être allié à l’URSS, elle envahit le Cambodge pour régler une fois pour
toute leur compte aux Khmers Rouges, ses anciens alliés. La Chine fomente donc
une coalition hétéroclite, englobant d’une part les nationalistes Khmer, prince
Sihanouk en tête et les innombrables mouvements que l’opposition interne aux
gouvernements de Hanoi suscite, d’autre part la Thaïlande et avec elle tous les pays
de l’ANSEA, qui, bien que méfiants envers la Chine populaire, sont unanimes à
condamner l’agression vietnamienne contre PHNOM PENH. Enfin, même les Etats
Unis, lointains et discrets dès lors qu’il s’agit d’un conflit entre communistes où ils ne
peuvent décemment apparaître comme soutiens de Pol Pot et de son régime mais
inquiets de l’avancée aérienne et navale des Soviétique et de leur implantation à
proximité des détroits et des bases américaines en Philippine.

Protagoniste central du troisième conflit Indochinois, il semblait en 1985-86 que le


Vietnam avait résolument choisi de régler la question cambodgienne par la force et
qu’il n’était disposé à aucune concession significative sur le fond. La « vieille garde »
politique de Hanoi paraissait convaincue que le temps travaillait en faveur du
Vietnam et qu’il fallait appliquer à la lettre cette leçon apprise lors des deux
précédents conflits, qui consistait à ne venir à la table des négociations qu’en
position de forces, c’est-à-dire en position de supériorité sur le champ de bataille.

17
LES CONFLITS AU CAMBODGE

III – LES OBJECTIFS DES GRANDES PUISSANCES :

31 – Les objectifs soviétiques :

A la différence de la Chine, de sa protection séculaire à la suzeraineté sur l’Asie du


Sud-Est et de ses inquiétudes portant sur la sécurité en Indochine, les intérêts de
l’URSS au Cambodge sont la conséquence de sa politique globale. Si , au cours des
années soixante et au début des années soixante-dix, le Cambodge était important
pour la compétition globale des Soviétiques contre les Etats-Unis et la Chine, au
cours des années quatre-vingt, il était d’une valeur discutable pour les intérêts
stratégiques soviétiques.

Bien que Moscou ait décidé de soutenir les ambitions vietnamiennes en 1977-1978,
il devient rapidement évident que les intérêts soviétiques et vietnamiens n’était pas
complémentaires. La mise en place d’un régime à sa solde pouvait satisfaire les
problèmes de sécurité du Vietnam, mais elle ne fournissait à Moscou que peu
d’avantage stratégique.

La capacité soviétique de défendre ses intérêts nationaux grâce au Cambodge


dépendait de son influence sur PHNOM PENH et Hanoi autant que de sa capacité à
traiter avec les principaux acteurs. Les instruments essentiels de l’influence
soviétique en Indochine étaient son aide économique et militaire à Hanoi (1,5milliard
de dollars par an ), un montant d’aide au Cambodge moins important et sa présence
aéronautique et navale à Cam Ranh et Danang. A la veille de l’achèvement du
retrait troupes vietnamiennes du Cambodge le 26 septembre 1989, Moscou a
complété à la hâte sa livraison à PHNOM PENH de matériel militaire pour une valeur
de plusieurs millions de dollars .

Avec la reprise de dialogue sino-soviétique en mars 1982, à la suite de l’appel du


président Léonid Brejnev pour une amélioration des relations entre la Chine et
l’URSS, le Cambodge a été totalement intégré dans leurs pourparlers. Malgré les
affirmations publiques de Moscou selon lesquelles les pourparlers de normalisation
sino-soviétiques ne traiteraient pas des problèmes des pays tiers, les concessions

18
LES CONFLITS AU CAMBODGE

des Soviétiques sur le Cambodge ont constitué un élément important de leur


réconciliation avec Pékin.

Depuis l’accession au pouvoir de Mikhail Gorbatchev en 1985 et en raison du grand


intérêt qu’il portait à l’amélioration des relations avec la Chine, le Cambodge passa
au premier plan des négociations . Gorbatchev formula un dramatique appel pour la
normalisation des relations avec la Chine lors d’une allocution à Vladivostok le 28
juillet 1986. Il reconnut le fait que le Cambodge était un problème de sécurité pour la
Chine en appelant à un règlement entre Pékin et Hanoi et en les exhortant à mettre
fin à leurs suspicions mutuelles.

Moscou fait pression sur le Vietnam pour qu’il annonce une date de fin du retrait de
ses troupes du Cambodge et achève ce retrait rapidement. La preuve la plus
intéressante de la pression soviétique sur le Vietnam pour qu’il accélère son retrait
au cours de la visite de Linh à Moscou. La position conciliante des soviétiques et
l’action des vietnamiens convainquent la Chine. Comme la déclaration en 9 points
sur le Cambodge émise au cours du voyage de Checardnadzé en Chine en février
1989 l’a montré, des différences substituaient. Mais les deux puissances en étaient
arrivées à une compréhension mutuelle suffisante pour ne plus considérer les
différences comme d’importance fondamentale. La déclaration conjointe sur le
Cambodge, en fait, fut utilisée pour dégager formellement la voie pour le sommet
Sino-Soviétique de Mai 1989.

32- Les objectifs des Etats-Unis :

Après la chute du régime Lon Nol et l’arrivée des Khmers Rouges en Avril 1975,
Washington croyait pouvoir désormais reléguer le Cambodge dans l’oubli.

Le rejet par le Kampuchéa démocratique d’une démarche de l’Administration de


Carter(président des Etats-Unis) pour établir des contacts en 1976 a effectivement
clos la possibilité d’une réconciliation d’après-guerre entre le Cambodge et les Etats-
Unis. Non seulement le Cambodge était démuni de toute valeur stratégique pour ses
derniers mais en plus, Washington ne pouvait pas faire grande chose d’autre que de
condamner les Khmers Rouges comme les « pires violateurs des droits de

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LES CONFLITS AU CAMBODGE

l’homme ». L’invasion vietnamienne du Cambodge non seulement fit naître des


inquiétudes concernant la sécurité des amis et des alliés de l’Amérique dans la
région, mais encore toucha un nerf sensible chez les responsables de la politique
américaine, qui ressentaient toujours de manière cuisante la défaite au Vietnam.
Comme durant la seconde guerre d’Indochine, le Cambodge pour Washington,
n’était qu’un élément secondaire dont l’importance ne tenait qu’à son association
avec d’autres éléments qui, eux, étaient essentiels. A ce moment, c’étaient les
préoccupations au sujet de l’expansionnisme vietnamien et de ses conséquences
pour la région.

L’objectif américain depuis l’invasion vietnamienne au Cambodge en décembre 1978


est composé de trois éléments. D’abord, forcer les vietnamiens à se retirer du
Cambodge, ensuite permettre l’autodétermination du peuple cambodgien de
s’exprimer, enfin empêcher le retour des Khmers Rouges au pouvoir.

Par ailleurs, un objectif non exprimé mais important de sa politique au Cambodge a


été d’utiliser le conflit pour raffermir les relations des Etats-Unis avec la Chine et
également pour renforcer l’unité de l’ANSEA contre la menace venant de l’Indochine
communiste. En 1979-1980, les Etats-Unis ont été au premier rang dans l’effort
international pour loger et nourrir les certaines de milliers de réfugiés cambodgiens
qui déferlaient en Thaïlande. Les réfugiés comprenaient des soldats Khmers
Rouges, leurs familles et la population sous leur contrôle. En les aidant en même
temps qu’ils aident d’autres civils par l’intermédiaire d’une opération des Nations
Unies et de la Croix- Rouge, les Etats-Unis permettent également aux Khmers
Rouges de se regrouper et de reconstituer leurs forces. Ils ferment aussi les yeux sur
la collaboration sino-thaï pour ré-équiper et armer les Khmers Rouges. Malgré des
critiques contre la présence des Khmers Rouges aux Nations Unies, les Etats-Unis
ne cessent de soutenir leur position.

La politique consistant à soutenir la position de l’ANSEA sur le Cambodge mise au


point au cours des années Carter a été poursuivie avec une rigueur accrue par
l’Administration Reagan (successeur du président Carter), car la principale motivation
de la politique de l’ANSEA concordait avec la doctrine de Reagan de soutien de
toutes les « libérations nationales » anticommunistes. Etant donné que la politique de

20
LES CONFLITS AU CAMBODGE

consensus de l’ANSEA était essentiellement dictée par « l’Etat frontière » (la


Thaïlande ) et par son proche allié, la Chine, la politique consistant à suivre les
dirigeants de l’ANSEA a également aidé à consolider les liens stratégiques Sino-
américains. En 1985 elle obtient du congrès d’autorisation de fournir 5 millions de
dollars d’aide à la résistance cambodgienne non communiste. Elle choisit de
n’apporter qu’une aide sans armement, telle que des uniformes, des médicaments ou
de l’équipement radio.

Les Etats-Unis se sont efforcés de résoudre la contradiction inhérente à une politique


consistant à fermer les yeux sur la capacité grandissante des Khmers Rouges à
s’opposer au Vietnam, alors qu’il souhaitaient les exclure du pouvoir par une formule
dénommée « troisième force ». Washington prétendait qu’avec une aide légère, une
troisième force non communiste entraînée par Sihanouk et Son San serait
probablement capable de résister à la tentative de domination des Khmers Rouges
ou de la République Populaire du Kampuchea . En réalité, l’aide apportée aux non-
communistes ne pouvait pas être séparée d’un soutien aux Khmers Rouges. Tandis
que les Etats-Unis demandaient publiquement à Pékin de réduire son aide aux
Khmers Rouges, leur propre contribution aux opérations de l’ONU d’aide aux
frontières continuait à soutenir 350.000 réfugiés Khmers, y compris les caps Khmers
Rouges, à la frontière de la Thaïlande.

A partir de l’an 1987, une gêne de plus en plus grande régnait à Washington en
raison de la faiblesse continue de la résistance non communiste et du
découragement politique du camp de Son San, alors que le pouvoir des Khmers
Rouges paraissait grandir.

Le retrait des Vietnamiens du Cambodge, commencé à la hâte en 1988 et achevé en


septembre de l’année suivante, nécessita de Washington qu’il fasse des efforts
supplémentaires pour obtenir un règlement qui empêche une prise de pouvoir par les
Khmers Rouges. Au cours le l’été 1989, les Etats Unis furent prêt à soutenir une
coalition entre la résistance non communiste et le régime de PHOM PENH si elle
pouvait être mise en place par Sihanouk. La politique consistant à s’appuyer sur
Sihanouk déboucha néanmoins sur des difficultés, car plusieurs séries de rencontres
avec Hun Sen en France et la conférence de Paris échouèrent. Le prince Sihanouk

21
LES CONFLITS AU CAMBODGE

refusa de rompre avec les Khmers Rouges, prétendant qu’un accord sans eux
entraînerait une guerre civile.

L’échec de la conférence de Paris sur le Cambodge a prouvé les limites de la


capacité des grandes puissances à contrôler leurs clients locaux et peut être montré
les limites de leur volonté de transiger sur les questions stratégiques essentielles.
Moscou voulait bien faire pression sur Hanoi et sur PHNOM PENH pour qu’ils soient
conciliants, mais pas au point d’obliger à un règlement qui eût brisé leurs relations et
entraîné une perte d’influence. Pékin voulait bien faire pression sur les Khmers
Rouges pour qu’ils acceptent une coalition avec le régime de PHNOM PENH mais ne
voulait pas les abandonner complètement et perdre son influence au Cambodge et
dans toute la région.

Néanmoins, malgré la démonstration des limites des grandes puissances, le conflit


au Cambodge n’a pas été une mauvaise affaire pour elles. Seul l’infortuné peuple
cambodgien n’a aucun motif de consolation.

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LES CONFLITS AU CAMBODGE

IV –CAUSES DE L’INVASION AU CAMBODGE :

41- Les peurs du Vietnam :

Tout au long des années soixante, la Chine pousse le Vietnam à adopter une
stratégie de guerre prolongée, craignant les risques d’escalade où la Chine pourrait
être impliquée contre son gré. Le Vietnam savait déjà qu’il ne pouvait compter sur un
engagement direct de la Chine et sembla se rapprocher de plus en plus de l’URSS
qui lui fournissait des armements modernes en grande quantité, susceptible de lui
permettre de mener une guerre plus offensive à laquelle la Chine n’était pas
favorable.

Dès le mois de Mai 1975, des unités Khmers Rouges attaquaient des villes
frontalières de la province vietnamienne de Tay Ninh dans le nord du Bec de canard.
D’autres forces lançaient une attaque contre les îles Tho Chu et Pho Quoc. Les
Vietnamiens contre –attaquèrent et repoussèrent les Khmers Rouges. A travers ces
opérations on devinait que les rapports fraternels entre régime révolutionnaire allait
être mis à rude épreuve. On peut relever trois facteurs à l’origine de ces
affrontements et de la détérioration subséquente des relations khméro-
vietnamienne :
1- L’existence d’un différent frontalier ancien et délicat .
2- La crainte cambodgienne de l’expansionnisme vietnamien,
augmentée par une idéologie ultra nationaliste.
3- La crainte du Vietnam d’être pris en tenaille entre la Chine au
nord et le Kampuchéa au sud.

Le différent frontalier était à la fois maritime et terrestre, mais c’est de loin ce dernier
qui compta le plus durant ces quelques années d’affrontements sporadiques. En fait
le régime Khmer Rouge ne réclamait rien de moins que l’ensemble de la
Cochinchine, autrefois cambodgienne et dénommée Kampuchéa Krom. Les Français
avaient reconnu le statut particulier de ce territoire et les Cambodgiens du temps
même du prince Sihanouk avaient demandé le rattachement de ce territoire au
Cambodge. Or en 1949 la Cochinchine fut intégré à l’Etat uni du Vietnam (mais pas

23
LES CONFLITS AU CAMBODGE

encore souverain) provoquant une protestation officielle de PHNOM PENH. Les


amputations territoriales successives du territoire cambodgien au profit du
Vietnamien depuis des siècles, la fameuse descente vers le Sud (Nam Tien)
entraînèrent le ressentiment, «la haine raciale »des Khmers à l’égard des
Vietnamiens ».

Selon les Khmers Rouges, une formation politique nationale de leur peuple pouvait à
la fois intimider les Vietnamiens et réveiller la grandeur passée du peuple Khmer. Pol
Pot confiait à des journalistes en mars 1978 que le Vietnam avait l’ambition de
« s’emparer de tout le Cambodge, en l’intégrant à une fédération Indochinoise ». Le
risque étant alors que « le peuple du Cambodge ne devienne une simple minorité
nationale ». Alors les Khmers Rouge fixent leurs objectifs : « Nous devons non
seulement arrêter les Vietnamiens et les repousser de notre territoire mais aussi
prendre les devants et franchir la frontière pour les anéantir sur leur propre sol. Cela
afin de leur causer davantage de problèmes et d’augmenter la crainte qu’ils ont de
nous. Ainsi au bout de quelque temps, ils n’oseront plus envahir notre pays et ce
sera à leur tour d’être sur la défensive ».

De son côté, le Vietnam craignait par dessus tout d’être pris en tenaille entre la Chine
et le Cambodge prochinois au sud . Le Vietnam n’avait certainement pas oublié que
depuis presque mille ans (le Vietnam se dégagea de la tutelle chinoise au X° Siècle)
les guerres sino –vietnamiennes avaient pratiquement toutes été liées à des conflits
entre le Vietnam et ses voisins du Sud (royaume du Champa , du Cambodge ou du
Siam) .

42- Moment propice pour le Vietnam :

Dans l’intervalle, la République Khmer est proclamée le 9 octobre 1970.

Les espoirs sont rapidement déçus. Cette déception et ce désarroi s’accentuent


après l’échec de la deuxième offensive contre les Khmers Rouges. La bourgeoisie
citadine commence à émigrer, la corruption atteint des sommets, les étudiants
s’agitent et les paysans chassés par la guerre affluent dans les grandes centres
urbains.

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LES CONFLITS AU CAMBODGE

Le retrait des troupes Américaines du Vietnam, en mars 1973 va précipiter les


événements. Dès février 1974, les Khmers Rouges bombardent PHNOM PENH. La
ville est isolée. Les bombardements massifs américains ainsi que les offensives de
l’armée républicaine réussissent à dégager la ville.

L’espoir n’est que de courte durée, les américains annoncent l’arrêt de leur aide. Le
premier janvier 1975, les Khmers Rouges lancent une nouvelle offensive avec l’aide
des forces nord-vietnamiennes. La capitale de PHNOM PENH est de nouveau
encerclée et bombardée. Le 1 er janvier 1975, le Maréchal Lon Nol quitte le pouvoir et
s’exile.

Le 17 avril 1975, les forces Khmers Rouges entrent dans la capitale. La première
décision des nouveaux dirigeants cambodgiens est de vider les villes de leurs
occupants. Un exode massif débute. Le peuple cambodgien est soumis à un régime
de travaux forcés sur l’ensemble du pays. Les élites de l’ancien régime (
fonctionnaires, officiers, médecins, intellectuels ….) sont systématiquement
recherchées et exécutées. Les Khmers Rouges désorganisent totalement le pays et
la famine domine dans toute la société. Cet exode forcé va tuer les malades,
infirmes, femmes enceintes, enfants et les vieillards. Les Khmers Rouges ont tué et
laissé mourir de faim près de 3 millions de personnes. Le parti communiste, avec à
sa tête Pol Pot, dirige le Cambodge d’une main de fer au sens propre et figuré, en
appliquant l’idéologie pure et dure. Le pays se ferme à l’occident et à la presse.

Les atrocités commises par les Khmers Rouges fournissent aux Vietnamiens ce que
l’on appelle « le moment propice » pour intervenir militairement au Cambodge sous
couvert d’assistance humanitaire. Pourtant, rien ne fut plus éloigné de l’esprit des
dirigeants vietnamiens que l’idée d’une intervention armée au Cambodge afin de
sauver le peuple Khmer de l’auto-génocide. Ce thème de propagande fut toute fois
utilisé largement par les responsables vietnamiens à partir du milieu de l’année 1978.

Le 7 janvier 1979, le front de libération Khmer avec les soldats vietnamiens


renversent ce régime et chassent les Khmers Rouges vers la frontière de la
Thaïlande.

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LES CONFLITS AU CAMBODGE

V- LE CAMBODGE A LA RECHERCHE DE SA STABILITE :

51 - Les premières élections Cambodgiennes :

Le Cambodge s’éveille lentement d’un cauchemar attesté par le terrible musée de


Tuol Sléng (centre d’extermination et de torture de Pol Pot) où, sur des
photographies fanées, le regard des morts témoigne des horreurs d’une guerre
fratricide. En juillet 1988, le Vietnam commence à retirer ses troupes, laissant peu à
peu le Cambodge s’assumer et en 1989, le reste de son armée reprend le chemin
du Vietnam. Initialement ce retrait était prévu pour la fin l’année 1990. En juillet
toujours, les partis politiques se rencontrent à Djakarta (Indonésie) et discutent des
plans de paix proposé par Sihanouk et Hun Sen. L’année 1989 débute par un ballet
diplomatique qui abouti à la tenue à Paris d’une Conférence Internationale de Paix
sur le Cambodge (CIPC) coprésidé par la France et l’Indonésie. 19 pays y participent
ainsi que les quatre partis cambodgiens. Le 23 octobre 1991, le Cambodge accepte
un contrôle permanent de l’ONU . La question des droits de l’homme fait partie des
engagements signés par tout les ennemis d’hier. Les Khmers Rouges participent au
processus de paix. Son San, président du front national de libération du peuple
khmer (FNLPK) et Khieu Samphan (un des principaux dirigeants Khmers Rouges )
deviennent membres du Conseil National Suprême (CNS). Le 14 novembre 1991 le
prince Sihanouk revient au pouvoir comme président du CNS du Cambodge. Celui-ci
est, en attendant les élections libres prévues en mai 1993, composé des quatre
factions .

Bien que paraissant avoir investi plus de deux milliards de dollars dans une
pacification manquée du Cambodge, l’ONU depuis 1993 a toutefois contribué à
ouvrir la voie du mariage de raison entre la monarchie qui demeure encore et l’Etat
du Cambodge, dont la mise en place s’est amorcée dans les années 80 sous la
protection et le soutien du Vietnam. Les Cambodgiens ont voté sans crainte pour
élire leurs députés.

Après les élections en 1993 le Cambodge vit sous un régime de monarchie


constitutionnelle et accepte le multipartisme. Le 26 juillet 1998, la quasi-totalité des
électeurs cambodgiens s’est rendu aux urnes pour désigner une assemblée de 122

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LES CONFLITS AU CAMBODGE

députés dont ils espèrent la paix et la stabilité. Cette campagne a été beaucoup
moins violente que celle de 1993 . Ce scrutin représente donc un grand jour pour la
démocratie au Cambodge.

52 – Le processus électoral légitimé par la communauté internationale :

La communauté internationale qui a financé des observateurs électoraux aux


Cambodge , a déclaré valides les élections. Le groupe d’observateur international
conjoint a jugé que le vote et le dépouillement des bulletins ont constitué un
processus libre et honnête dans la mesure où ils reflètent de façon crédible la
volonté du peuple cambodgien. M.Jacques Carrio, membre de la mission de L’ONU
coordonnant les 678 observateurs étrangers dont 187 issus de l’Union Européenne a
confirmé que cette évaluation générale est bonne. Selon les calculs d’observateurs
européens, les incidents rapportés sont mineurs et ne portent que sur 1% du vote.
L’Union européenne, le Canada, le Japon, l’Australie et l’ONU estiment que ces
élections reflètent la volonté des cambodgiens. L’ANSEA a donné une appréciation
favorable du scrutin cambodgien. Quant à la Chine, elle est sortie de son habituelle
réserve pour demander aux cambodgiens de résoudre pacifiquement leurs différents
sous l’égide du roi.

La médiation du roi Norodom Sihanouk demeure un élément clef pour une solution
du conflit entre les groupements politiques rivaux au Cambodge. Le roi est
actuellement en train de jouer un rôle de médiateur et s’il n’y arrive pas , personne ne
pourra le faire.

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LES CONFLITS AU CAMBODGE

CONCLUSION :

Le Cambodge aborde cette année une nouvelle page de son histoire. Les
mouvements armées de l’opposition regroupés au sein d’un gouvernement ont
appliqué le plan de paix tracé par l’accord de Paris. Les principaux adversaires d’hier
semblent s’entendre, sans rappeler les faits et les erreurs commis dans le passé par
chacun deux.

La disparition de Pol Pot a pratiquement clos les activités militaires des Khmers
Rouges. La politique gouvernementale de Hun Sen a permis le ralliement progressif
des principaux dirigeants Khmers Rouges et la soumission des forces armées du
Kampuchéa Démocratique aux Forces Armées Royales Khmères (FARK). La guérilla
commandée par le chef de guerre Ta Mok est militairement anéantie. De plus le
jugement des divers responsables Khmers Rouges constitue un pas nécessaire vers
la réconciliation nationale, vers l’établissement d’un Etat de droit dans un pays où la
société a été déstructurée par trente années de guerres et de massacres.

Les élections législatives de juillet 1998 ont constitué un mouvement important pour
le Cambodge. A la différence celles de 1993, leur organisation était de la seule
responsabilité des autorités cambodgiens. Le scrutin a été jugé libre et équitable par
le groupe conjoint des observateurs internationaux. Ces élections ont permis la mise
en place d’une nouvelle Assemblée et l’investi d’un nouveau gouvernement. Ensuite,
le nouveau gouvernement s’est mis au travail avec détermination pour commencer à
mettre en œuvre son programme de développement du pays. La lutte contre la
pauvreté est son premier objectif. La mobilisation de l’aide internationale est aussi
essentielle pour poursuivre la reconstruction du tissu social, économique et les
infrastructures.

La population Khmère qui vient de sortir d’une période de guerre chronique, veut et
voudra déjouer la guerre.

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LES CONFLITS AU CAMBODGE

Ces trois éléments permettent, pour les cambodgiens épris de pays, de fonder les
espoirs dans une stabilité durable sans laquelle aucun développement n’est possible.

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LES CONFLITS AU CAMBODGE

BIBLIOGRAPHIE

1 -- Le Cambodge dans la tourmente, collection peuple et stratégie, le troisième


conflit indochinois 1978-1979, fondation pour les études de défense nationale,
édition L’Harmattan (par Nicolas Regaud ).

2 – Le Cambodge, domaine Asie du Sud-Est, Edition peuple du monde (par


E.Brisbois )

3 – Extrait revue politique étrangère, Paris IFRI n°4 (par Chanda Nayan ).

4 – Que sais-je ? Le Cambodge


presse universitaire de France (par Jean Delvert )

5 – Que sais-je ? L’histoire du Cambodge


presse universitaire de France (par Madeleine Giteau ).

6 – Défense Nationale, Etudes politiques et stratégiques, militaires, économiques,


scientifiques, droit de l’homme, valeur occidentale et asiatique (par Jean Pierre
Gomane )

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