Mariama Bâ - Un Chant Écarlate
Mariama Bâ - Un Chant Écarlate
Mariama Bâ - Un Chant Écarlate
UN CHANT ECARLATE
« Ils prennent leur élan et sortent du tremplin : Dieu les prend dans sa
main et les rend aériens en suspendant leur chute. » Ces vers du poéte
Jean Sarment s’imposent 4 nous 4 la pensée de Mariama Ba, disparue
« en plein bond ». C’est, en effet, aussitét aprés son retour de la Foire
de Francfort (Octobre 80) ot l’attribution du prix Noma 4 son livre
UNE SI LONGUE LETTRE avait fait d’elle, pour une semaine, le
porte-parole glorifié de toute la littérature africaine, que Mariama Ba a
senti les premiéres atteintes du mal pernicieux qui devait l’emporter
moins d’un an plus tard (aodt 1981).
Notre maison, dont le premier roman de Mariama Ba reste un fleu-
ron, en déplorant la perte d’un auteur qui lui était attaché, pleure plus
encore l’amie souriante, l’étre au grand cceur qui avait fait de la
défense de la femme dans nos sociétés en voie de transformation, une
cause personnelle.
On retrouvera dans « Un chant écarlate », la Croisée mobilisée contre
les injustices sociales, ajoutant ici un plaidoyer pour des valeurs
d’identité dont les aspects négatifs, cependant, ne lui échappaient pas.
C’est sans doute l’histoire d’un amour, mais, au-dela, investigué
avec une sensibilité qui n’enléve rien 4 l’intelligence, un aspect de la
tragédie de l’aventure humaine, ou |’amour ne triomphe pas toujours
des préjugés et incompréhensions qui font partie de l’héritage culturel
que chacun de nous porte comme une richesse ou un fardeau.
Mariama Ba s’est vu mourir. Cette femme au grand cceur n’a eu tout
au long de son bref calvaire ni une révolte ni une malédiction. Elle
pleurait quelquefois, mais sa grande foi islamique lui avait dicté
d’accepter un sort injuste. Nous accepterons donc avec elle qu’elle soit
si tt partie, mais rien ne fera taire nos regrets.
L’Editeur
A mon oncle Ousmane Macoumba DIOP
Mariama Ba
PREMIERE PARTIE
© Les Nouvelles Editions Africaines du Sénégal - Dakar - 1981
1.
Usine Niari Talli” secouait sa torpeur nocturne, sous le
soleil qui s’ébrouait. Les derniéres ombres se dessou-
daient, restituant aux choses formes et couleurs.
A cette heure du jour Ousmane ne dormait plus. Dans
un délicieux engourdissement, les yeux mi-clos, ii accor-
dait, dans sa pensée, les bruits 4 des gestes précis...
Trass ! trass ! trass !\e pas de Yaye Khady !
Trass ! trass ! trass ! Des pas résolument dirigés vers sa
fenétre...
Un coup, un autre coup, plusieurs coups suivis et cha-
que fois, le diminutif de son prénom, « Oussou ! », répété
impérieusement.
« Oussou ! Oussou ! » Le tambourinement saccadé per-
sistait, lui arrachant des houm intermittents de plus en
plus nets, qui l’aidérent 4 vaincre les derniéres résistances
de son inertie.
Aussi finit-il par se dégager du désordre de la couver-
ture, finit-il par bdiller, s’étirer, badiller encore, rassembler
ses sandales et déverrouiller sa porte.
Il se dirigea alors vers la « douchiére » de l’habitation,
coin protégé par des feuilles de zinc rouillées et tapissé de
pierres noires.
(1) Quartier du Grand-Dakar au nom inspiré par les deux chaussées paralléles qui le
traversent et la proximité de l’Usine de la Biscuiterie.
(8) Celui qui, circoncis en méme temps que vous a subi dans la méme case, les €épreuves
virilisantes.
(9) Le maitre de la maison.
14 MARIAMA BA
(1) Jeu qui consiste 4 retrouver un objet caché (corde, baton...). Le chanceux qui décou-
vre l’objet a le droit d’en user pour corriger ses camarades qui courent pour échapper a
la correction.
18 MARIAMA BA
ne veut pas d’un garcon qui balaie, porte des seaux d’eau
et sent le poisson sec. »
Ces paroles blessérent profondément Ousmane dont les
yeux s’embuérent des larmes de l’adolescence si promptes
a perler.
Les affres de la jalousie le torturaient. Mais il avait de la
dignité une haute conception, née de |’exaltation de ses
aieux par son pére.
Il était Guéye, « Lébou pur », de ceux qui forgérent la
célébrité du Cap-Vert, de ceux qui domptérent la mer
pour conquérir la richesse, de ceux qui frayérent avec les
rab et les tour.
L’ami griot de son pére, Lamane Mboup, aprés avoir
énumeéré la longue lignée des Guéye, ne manquait jamais
d’exhumer |’exploit de celui qui avait été l’ancétre si entre-
prenant qu’il séduisit une «rab». Et cet ancétre se
réveilla, 4 l’aube de ses premiéres noces, dans une cour
envahie de calebasses de /4kh fumant, participation 4 la
féte de son épouse invisible.
Que représentait Ouleymatou, comparée aux épouses
« rab » dont on vantait la beauté limpide comme un clair
de lune, les yeux immenses lumineux et les longs cheveux
de soie qui couvraient leur dos et leurs hanches ?
Et puis, il connaissait les épreuves de son pére au dahra.
Djibril Guéye lui avait conté sa mésaventure une nuit de
tornade opaque. En revenant d’un village ot il s’était
attardé pour renouveler ses hardes et améliorer sa pitance,
il s’était trompé de chemin. Le vent violentait ses oreilles
et il se battait désespérément contre les ombres et le sol
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(1) Maison.
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quoi as-tu cédé 4 mon désir d’étudier ici ? Pour moi, cer-
tes, Mais aussi pour ton image de marque. Cela fait bien,
la fille d’un, diplomate étudiante 4 l’Université du pays ou
résident ses parents. Cela fait « idées généreuses »,
« options avancées », tant de termes criés avec force, qui
ne recouvrent aucune grandeur. Tu as ébranlé ma con-
fiance et décu mon affection. J’aime, tu entends. J’aime un
Négre, noir comme de la houille. Noir ! Noir ! Je l’aime et
je ne renonce pas 4 cet homme simplement parce qu’il est
noir. »
L’assaut était amour, violence et sincérité et dressait une
jeune fille contre des « vérités » inculquées. Monsieur de
La Vallée ne pouvait rien contre les torrents millénaires de
la passion déchainée. Déséquilibré par la surprise et le ver-
tige des mots, il maitrisait sa colére en serrant avec énergie
ses poings. Ses machoires claquaient :
« Tu es mineure! Mineure! Bon sang! Trop jeune
pour comprendre. J’ai la mission de te protéger. Je le ferai,
malgré toi. Tu rejoins notre pays dés ce soir. »
Il se détourna. Mireille hurlait encore :
— Ne compte pas sur un suicide. Chaque pulsation de
mon cceur tendra désormais 4 mon rapprochement avec
Ousmane. Ousmane ! Tu entends ? Ousmane !
Elle s’engouffra dans sa chambre et croula, la téte la pre-
miére sur ses draps.
Calmée, elle clarifiait ses idées....
Sa pensée se tourna affectueusement vers sa mére. Elle
lui téléphona pour lui demander de la recevoir. Sa mére se
déroba. Le domestique lui apprit que Madame était trés
fatiguée :
— Le médecin est revenu trois fois depuis hier.
« Un choc dur ! » admit Mireille.
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Ousmane,
Nos embrassades ne précéderont plus nos cours. Nous ne
fuirons plus ensemble l’ennuyeux Mr’ Sy et sa voix morne,
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(1) Sauce a base de feuilles de choux et d’arachides crues pilées qui accompagne le cous-
cous.
(2) Brevet d’Etudes du Premier Cycle.
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pour elle. Moi qui révais d’une bru qui habiterait ici et me
remplacerait aux taches ménagéres en prenant la maison
en mains, voila que je tombe sur une femme qui va empor-
ter mon fils. Je créverai, debout dans la cuisine.
Djibril Guéye rétorqua calmement :
— Si tu avais aidé Coumba, Mariéme serait restée avec
nous.
Yaye Khady fit front :
— Je préfére me dresser contre cette étrangére que me
dresser contre Coumba, ta sceur. Je ne regrette pas mon
attitude. Je reste 4 la cuisine mais reine chez moi.
Mariéme ici, j’aurais cohabité avec Coumba. Tu le sais,
Coumba aurait été la directrice de mon foyer.
Djibril Guéye s’emporta :
— Tu ne préféres pas l’étrangére. On ne peut aimer ce
qu’on ne connait pas.
Rasséréné, il ajouta :
— Accueillons ce mariage comme le « mal » nécessaire 4
notre survie. Nous alimentons la haine, l’envie depuis la
réussite de notre fils.
Il empoigna son chapelet. Il en égrena lentement les
grosses perles noires et continua, de plus en plus serein :
— Yaye Khady, taisons notre douleur. Il y a en ce
moment oW nous nous plaignons, des 4dmes que Dieu
emporte. Entre la mort et notre souffrance, il y a un
abime. Rendons grace 4 Dieu de nous asséner des coups
que nous pouvons supporter. Le hasard ne marie pas un
homme et une femme. Le mariage est une ceuvre divine.
Yaye Khady maitrisait sa rancceur. Mais elle rejetait
Vidée que cette Blanche était un « mal » nécessaire. Elle
sortit précipitamment, laissant Djibril Guéye 4 son chape-
let.
UN CHANT ECARLATE 103
Elle se calma :
« Il n’y a pas de comparaison possible entre Moussa et
« Oussou. Je remercie Dieu ! »
« Pourtant Ousmane et Moussa étaient au monde par la
méme voie, tous deux fruits de l’amour! ». Ni Yaye
Khady, ni Kiné n’avaient subi de pression pour se marier.
Elles avaient aimé leur homme. Presque 4 la méme
période, elles avaient porté leur grossesse. Elles s’étaient
émerveillées du rebondissement de leur ventre, de la vie
qui s’y agitait, des coups que ces vies donnaient dans leurs
flancs.
« Un espoir immense et un bonheur orgueilleux habi-
tent chaque femme en état de gestation. Elle sent mirir
avec volupté le fruit du don de sa personne. Elle subit avec
patience toutes les rigueurs nécessaires au bon déroule-
ment de sa grossesse ! » Kiné, qui avait été délivrée la pre-
miére, lui révéla :
— Une douleur 4 nulle autre pareille, l’enfantement !
— Comme un mal de dent ? s’était inquiétée Yaye Khady.
— Tu verras, avait conclu Kiné, orgueilleusement.
Et Yaye Khady n’avait pas « vu », mais « senti » comme
la rupture de ligaments dans ses entrailles. On lui avait
prédit que |’enfant naitrait lorsque, du sable pressé dans sa
main, jaillirait de l’eau. Elle n’avait pas pressé de sable,
dirigée vers la Maternité Mandel.
Ses reins battus par une douleur infernale et le feu bria-
lant son bas-ventre, la souffrance avait perlé en gouttelet-
tes sur son front.
Son bébé sur ses genoux avait été le bonheur de sa vie.
Elle méditait : « Chaque mére porte au chevet de son
enfant ses espérances. Elle réve pour son petit une desti-
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(1) La croyance populaire investit la femme de deux sortes d’intestins (le nom du
deuxiéme, littéralement se traduit : intestin de gestation).
UN CHANT ECARLATE 131
c’est moi qui taperai sur la table. Elle t’intéresse plus que
ta femme, en vérité.
Guillaume ravalait ses mots. Mais il était hanté par la
« Belle et la Béte », surnom qu’il avait donné au couple
mixte. I] n’aimait certes pas Mireille, mais les couples
mixtes le hérissaient. Cependant, il entretenait de bonnes
relations avec ses collégues négres, hommes et femmes,
dont il appréciait l’amitié et l’hospitalité.
Le couple avait partagé avec « la Belle et la Béte », le riz
au poisson cuisiné par Soukeyna. II avait ri avec eux des
coquilles qui émaillaient les copies des lycéens.
Ousmane Guéye, curieux, avait demandé 4 Guillaume :
— Comment juges-tu tes éléves ? Sont-ils d’un niveau
plus bas que ceux d’avant ?
Il avait répondu, sincére :
— Ni plus bétes, ni plus intelligents. Mais plus travail-
leurs ici. Chez nous, pour ne pas « frustrer », pour ne pas
« brimer », que sais-je, toutes ces « inventions » pour
adoucir le sort de l’éléve et embéter |’éducateur, rendent
paresseux les gosses. Le moindre effort !
Ousmane Guéye prévenait’:
— Ces « saloperies » commencent aussi a infester ici.
Alors que je faisais des kilométres 4 pieds pour aller en
classe, je vois mes éléves arriver 4 vélo ou a moto. Mais le
cahier du cours est oublié. Les péres s’inquiétent de la dis-
tance, mais pas des lecons.
Ousmane approfondissait parfois la discussion :
— Nous sommes tous de la génération de Mai 68. Nos
motivations étaient différentes, mais nous étions portés
par le méme réve de bouleverser et de réformer. Chers col-
légues, aujourd’hui que vous étes dans le camp des « crou-
lants », que pensez-vous de I’attitude des étudiants ?
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(1) Circoncis.
(2) Sorciers.
(3) Chants initiatiques des circoncis.
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Ici, donner, plus que partout ailleurs, résoud bien des pro-
blémes !
Et Mireille s’exténuait 4 suivre les directives de son
amie. Mais l’habitude est souveraine. Modifier son com-
portement, assigner 4 sa vie un but différent de ses aspira-
tions sont traumatisants. « Laissez les habitudes 4 la porte
d’une maison. Elles courent vous rejoindre si vous tardez
a les reprendre », dit-on. Et Ousmane Guéye se moquait
visiblement des efforts d’adaptation de son épouse.
Aussi, Mireille eut-elle t6t fait d’oublier les conseils de
Rosalie. Distribuer quotidiennement de 1l’argent ne
Penchantait guére. Les copains qui trainaient dans son
salon la contraignaient 4 les mettre 4 la porte.
— Icin’est pas un fourre-tout.
Les « repas » qu’elle destinait 4 Djibril Guéye, le samedi
soir, déclenchaient les moqueries de Yaye Khady.
— Un poulet dans une soupiére, pour le pére de votre
mari! On n’a pas idée. Pour le beau-pére, on cuit au
moins cing poules.
Quelles amies convoquerait-elle pour témoigner des
« téranga »") de Mireille ? Ses amies seraient stupéfaites
de voir, dans sa « mare de sauce », « un maigre poulet ».
Et Mireille se fachait. Le gaspillage auquel on la con-
viait dépassait son entendement. A la fin de chaque mois,
ne portait-elle pas au logis de ses beaux-parents la somme
destinée 4 leurs « dépenses » ? Vexée, elle supprima « les
repas » du samedi.
Yaye Khady la stigmatisait :
— Celui qui ne fait rien, n’entend rien. L’argent se gagne
(1) Hospitalité.
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(2) Littéralement lavage. Echange de dons lors d’un baptéme entre les familles des
parents.
(3) Infortune qui ne manque pas dans chaque vie.
162 MARIAMA BA
écartées. Elle offrait tout son corps aux caresses tiédes des
nuages.
Des colliers blancs tirés d’une boite, garnirent ses reins
de leurs ceintures sonores. Elle choisit un pagne assez
léger pour laisser deviner ses formes tout en restant
décent. Elle déplia un soutien-gorge blanc spécialement
acheté, pour faire valoir sa poitrine.
Elle noua, dans de la mousseline, de la poudre de gongo
et glissa la boule aux effluves suaves entre ses seins.
Ayant acquis l’art de se maquiller, elle poudra son
visage, redressa ses cils en appuyant leur noirceur, tira
deux légers traits 4 l’emplacement de ses sourcils rasés.
Un tube de marron 4 lévres alourdit les contours de sa
bouche. Sous ses aisselles et entre ses seins, le chatouille-
ment des gouttes de « Sabrina », le parfum en vogue !
Un boubou en tissu léger laissait entrevoir, dans le
déplacement de ses pans, tantét une épaule charnue, tan-
tét des seins dans leur prison de dentelles, tantét les sail-
lies des rangs de perles 4 ses hanches.
Ses pieds furent introduits dans des babouches rouges
qui rehaussérent leur teinte noire de henné.
Thiokéte ! thiokéte ! Elle se déplacait avec prudence
pour ne pas soulever le sable de la rue.
Elle croisa mére Fatim, la premiére épouse de son pére,
qui la dévisagea, soupconneuse. Elle la calma :
— Jereviens. Je ne ferai pas long feu !
Au carrefour, elle héla un taxi dont le conducteur, guidé
par sa voix assourdie par |’émotion, la déposa au bon
endroit.
Ouleymatou sourit :
— C’est normal. Mais donne-moi de quoi prendre un
taxi. J’ai droit 4 « ta sueur », frére de case d’Ousseynou.
Ousmane acquiesga :
— Vrai. Tiens ! Excuse mon oubli, j’aurais di y penser.
— Merci, et Ouleymatou de son pas « thiokéte!
thiokéte ! » plein de grace, retraversa la cour.
Bien loin du lycée, elle ouvrit sa paume droite. Elle y
vit, réduit et froissé un « bleu ». Elle le déploya, le lissa.
«Un bleu! Mon petit bleu, redeviens neuf »,
chantonna-t-elle.
Elle ironisa : « Djibril Guéye, ton fils paie largement la
lessive de tes boubous... Mille francs iront 4 ta femme
quand méme... Mille francs 4 ma mére ! »
Le reste ? Elle révait d’un boubou rose sur son corps
noir. Ousmane Guéye verra... S’il tenait jusqu’a sa pro-
chaine visite prévue dans un mois, pour éloigner tout
soup¢on.
Et puis, elle n’était pas femme pour rien! Elle avait
percu l’embarras d’Ousmane et le léger tremblement de sa
voix ne lui avait pas échappé. Son empressement 4 la quit-
ter dénoncait son trouble.
Elle avait eu raison de croire: « Allah! Allah! Béye sa
tole »“. Tl faut aider la chance ! » |
Ousmane Guéye, aprés l’apparition gracieuse et parfu-
mée, eut bien du mal 4 se concentrer sur la dissertation
qu’il corrigeait.
Un tumulte intérieur distrayait son raisonnement. II
dominait mal son excitation.
(3) Désigne dans le langage populaire le billet bleu de cinq mille francs.
(4) Béye sa tole : cultive ton champ.
170 MARIAMA BA
*
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(6) Oba et Yaboye : poissons de mer a la chair exquise, mais truffée d’arrétes.
3.
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(6) Les femmes ne désigne jamais leur ami, amant ou mari par leur prénom, par poli-
tesse.
180 MARIAMA BA
*
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(4) Somme que l’on remet aux parents de l’accouchée pour les-frais du baptéme.
194 MARIAMA BA
(5) Noble.
(6) Coutume persistante malgré le régne de I’électricité.
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(2) Echange de civilités matérielles entre les familles des deux conjoints lors d’un bap-
téme ou d’un mariage.
UN CHANT ECARLATE 199
(4) Gendre.
204 MARIAMA BA
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* Lane-la : Litt : Qu’est-ce qu’il y a ? Cri d’angoisse pour percer le contenu de l’événe-
ment tragique.
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Sy
Illustration de couverture :
par Evelyne Laperrousaz
Quoi gu ‘elle fit, Mariama Ba n’arrivait pas a convaincre oO
que les événements contés dans Une si longue lettre ne rele-
vaient pas de son experience personnelle, en d’autres ter-
mes, que le récit ne fat pas, pour une large Pate ee
graphique.
Avec Un Chant écarlate, la question ne se posera pas ;:a ao
s’agit, en effet, d’un univers résolument vu de l’extérieur,
Nous avons affaire a un roman important par le nembre FF
des personnages et par la complexité de Vintrigue.
L’analyse situationnelle est menée d’une plume qui ne ;
s’essoufle pas, les psychologies individuellessont fouillées
et les structures sont mises en place d’une main ferme.La
sensibilité, bien stir, reste celle de cette romanciére dontle
premier livre avait enlevé les coeurs d’assaut, et dont les
_ Lettres Senégalaises deplorent la disparition pren !
(Taott a
ce
UNE SI LONGUE LETTRE a recu le Prix Noma
1980, est A sa sixiéme éditionet a été
oe
traduiten3
douze langues.
ne
Couverture : Hibiscus.
. i par Evelyne LAPERROUSAZ. ~
a