Ll12 La Madeleine Corrig

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1èreG LL12 : corrigé

LL12 : LA MADELEINE
LE CORRIGÉ

Introduction :

Amorce :
Du côté de chez Swann, publié en 1913 est le premier roman du cycle À la recherche du temps
perdu. Dans cet ensemble autobiographique, Marcel Proust met en scène un narrateur qui se
prénomme comme lui, Marcel. Ce narrateur fait une peinture des milieux mondains de la Belle
Époque et raconte également son enfance tout en invitant à réfléchir sur la mémoire et la
manière de retrouver son passé. L’extrait proposé relate un épisode célèbre, à tel point qu’il est
rentré dans le langage commun : « une madeleine de Proust » désigne un élément, une
sensation qui parvient à faire resurgir le passé, l’enfance.

Présentation du texte :
Dans ce passage, le narrateur décrit l’intense, mais fugitif bien-être éprouvé en dégustant cette
madeleine trempée dans son thé. Il cherche à en comprendre l’origine.

Problématique :
Comment l’auteur nous fait-il ressentir la magie d’un instant unique ?

Annonce des mouvements :

- L. 1 à 9 : Un personnage peu heureux

- L. 10 à 18 : Une dégustation unique

- L. 19 à 22 : La fin de l’expérience

----------------

Mouvement 1 : L. 1 à 9 : Un personnage peu heureux

L.1-4 : « Il y avait déjà bien des […] un peu de thé.» :


- La première phrase, très longue, est constituée d’une imbrication de propositions qui
permettent de poser la situation initiale de ce récit : le narrateur, en hiver, rentre chez lui,
glacé, et sa mère lui propose un thé pour le réchauffer.
- Toutefois, le narrateur, avant de présenter ces circonstances, prend soin de faire comprendre
qu’elles annoncent un événement en relation avec ses souvenirs d’enfance.
à En effet, il commence par déplorer qu’il ne lui reste de son enfance à Combray que le seul
souvenir de son coucher douloureux. Le groupe nominal « le théâtre et le drame de mon
coucher » (l. 1-2) permet de caractériser cet épisode. -
- Mais la proposition subordonnée circonstancielle « quand un jour d’hiver, comme je
rentrais à la maison » (l. 2-3) annonce un changement. (L’implicite) étant qu’il va retrouver
d’autres souvenirs de son enfance à Combray et on peut faire l‘hypothèse que ces souvenirs
seront plus heureux.
Il souligne que cette modification va se faire de manière fortuite, puisque cela se produit à
cause d’une modification de ses habitudes de vie : « me faire prendre contre mon habitude un
peu de thé » (l. 3-4).

L.4-5 : Je refusai […] ravisai.

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- La deuxième phrase, beaucoup plus brève, met aussi en avant la place du hasard, puisque
dans un premier temps, le narrateur refuse de prendre du thé. Il finit tout de même par
accepter : « Je refusai d’abord […], me ravisai » (l. 4-5). Ainsi les deux verbes s’opposent.
- L’interrogation indirecte « je ne sais pourquoi » (l. 4) en incise entre les deux propositions
souligne encore à quel point cet événement est assez incompréhensible.

L.5-7 : Elle […] Saint-Jacques.

- Pour accompagner ce thé, sa mère envoie acheter des madeleines. Elles sont désignées d’abord
dans une périphrase qui dévoile leur apparence « un de ces gâteaux courts et dodus », avant
d’être nommées « Petites madeleines » puis ensuite caractérisées par une métaphore qui révèle
une certaine littérarité de l’auteur. En effet, les rainures présentes sur le dos des madeleines
« semblaient avoir été moulées dans la valve rainurée d’une coquille Saint- Jacques ».

L.7-9 : Et bientôt, […] de madeleine.


- La conjonction de coordination et l’adverbe temporel « Et bientôt » semble annoncer un
évènement imminent mais le champ lexical de la tristesse (« accablé » L.7, « morne » et
« triste » L. 8) continue de décrire le narrateur comme un être triste et passif.
- Le rapport au temps semble douloureux, comme le prouve le rythme binaire mettant en valeur
les deux synonymes qui caractérisent le lexique du temps : « « la morne journée » et « d’un
triste lendemain » (l. 7-8) L’adverbe de manière « machinalement » (l. 7) renforce cette
impression de tristesse.
- Mais l’événement rapporté paraît dérisoire. En effet, le narrateur porte à ses lèvres une cuillérée
de thé, mais pas n’importe quelle cuillérée. Une proposition subordonnée relative vient en
préciser le contenu : « où j’avais laissé s’amollir un morceau de madeleine » (l. 8-9).

Mouvement 2 : L. 9 à 18 : Une dégustation unique

L.9-11 : Mais à l’instant […] en moi.


- La conjonction de coordination « Mais » (l. 9) introduit ainsi une forte rupture pour mettre
en valeur « l’instant » (l. 9) où le narrateur déguste cette gorgée. Il précise que tout se passe
au moment précis où la gorgée « toucha » son palais (l.10).
- Ce long complément circonstanciel de temps souligne le caractère unique de ce moment et
sa rapidité par l’emploi du passé simple.
- La réaction immédiate du narrateur est mise en valeur dans la proposition principale brève et
encadrée par deux virgules : «, je tressaillis, » (l. 10). Cette réaction physique est la conséquence
d’une impression intérieure définie par l’adjectif mélioratif et hyperbolique « extraordinaire »
(l. 11).
- En outre, le narrateur précise qu’il devient « attentif » (l. 11), adjectif qui s’oppose à
l’adverbe « machinalement » de la ligne 7 et qui souligne bien la transformation du narrateur
liée à la dégustation des miettes de madeleine trempées dans du thé.

L.11-18 : Un plaisir délicieux […] Où l’appréhender ? »

- S’ensuit alors une longue pause dans le récit, de la ligne 11 à 18, perceptible dans l’usage
dominant de l’imparfait et du plus-que-parfait, pour décrire cet intense plaisir.

- Le vocabulaire mélioratif et les hyperboles dominent dans la célébration de ce moment

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magique et inattendu : « Un plaisir délicieux » (l. 11), « une essence précieuse » (l. 14), «
cette puissante joie » (l.16), « elle le dépassait infiniment » (l.17).

L.11-12 : Un plaisir délicieux, m’avait envahi, isolé, sans la notion de sa cause.


- Le groupe nominal « un plaisir délicieux » est sujet de la phrase tandis que le narrateur,
désigné par le pronom personnel « m’ » devient le complément d’objet direct : « m’avait
envahi » (l. 11-12), « m’avait aussitôt rendu » (l. 12). Cela contribue à conforter l’impression de
submersion par une sensation non contrôlée, ce qui est confirmé par le complément
circonstanciel de manière « sans notion de sa cause » (l.12).

L.12-13 « les vicissitudes de la vie indifférentes, ses désastres inoffensifs, sa brièveté


illusoire »
- Le narrateur est ainsi passé de l’accablement à l’exaltation et au bonheur car ses angoisses
existentielles ont momentanément disparu comme il l’exprime dans l’énumération lyrique L12-
13. Le lecteur saisit le rapport de cause à effet entre la madeleine et le plaisir ressenti.

L.13-14 : de la même façon qu’opère l’amour, en me remplissant d’une essence précieuse


Pour faire comprendre la sensation éprouvée, il utilise une comparaison qui assimile cette
sensation à celle provoquée par l’amour : « de la même façon qu’opère l’amour, en me
remplissant d’une essence précieuse » (l. 13-14). Encore une fois, le pronom personnel
« me »(L.14) qui désigne le narrateur est en complément d’objet direct pour signifier qu’il ne
contrôle rien, mais n’est que le réceptacle de ces sensations involontaires.

L.14-15 : « ou plutôt cette essence n’était pas en moi, elle était moi.

- Après réflexion, le narrateur comprend que cette sensation n’est pas en lui, mais le constitue
pleinement : « [elle] n’était pas en moi, elle était moi. » (l. 14).
- Cette prise de conscience se traduit par la réaffirmation du narrateur qui place à nouveau le
pronom personnel de la première personne en sujet de la phrase suivante en ouverture : «
J’avais cessé de me sentir, médiocre, contingent, mortel. » (l.15-16).

L.15-16 : « J’avais cessé de me sentir médiocre, contingent, mortel. »

- Cette prise de conscience se traduit par la réaffirmation du narrateur qui place à nouveau le
pronom personnel de la première personne en sujet de la phrase suivante en ouverture :
« J’avais cessé de me sentir, médiocre, contingent, mortel. » (l. 15).
- Notons que le rythme ternaire qui clos cette phrase brève installe une tonalité lyrique. Les
adjectifs sont organisés en une gradation qui montre comment le narrateur a surmonté toutes
ses insatisfactions, de la plus quotidienne à la plus existentielle : la peur de mourir.

L.16-18 : D’où avait pu […] Où l’appréhender ? »

- La multiplication des questions souligne l’incompréhension du narrateur devant ce


phénomène incroyable qui le dépasse et dont il cherche l’origine, comme le prouve la récurrence
de l’adverbe interrogatif « où » (l.16, 18).

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à Notons que cette pause descriptive, qui a permis de mettre en valeur ce moment magique,
contraste avec le caractère très éphémère et fugace de la sensation, comme dans un désir de la
fixer par les mots, de suspendre le cours du récit, mais aussi celui du temps.

Mouvement 3 : L.18 à 21 : La fin de l’expérience

L.19-20 : Je bois une seconde […] que la seconde.

- Le narrateur reprend le présent qui est un présent de narration, ce qui est une manière de
nous faire sentir à quel point l’auteur est attentif et à l’écoute de ses sensations. Pourtant cet
instant est fugitif et la 2ème gorgée n’amplifie pas le plaisir. La négation partielle constitué par le
pronom indéfini « rien » souligne ce manque.
- La 3ème « apporte un peu moins que la seconde » ce qui est confirmé par la proposition « la
vertu du breuvage semble diminuer ».

L.20-22 : Il est temps que je m’arrête, la vertu du breuvage semble diminuer. Il est clair
que la vérité que je cherche n’est pas en lui, mais en moi.

C’est la fin de l’expérience que le narrateur acte par une phrase : « Il est temps que je
m’arrête » (l. 20) et par une conclusion : ce n’est pas tant le breuvage que quelque chose en lui
qui provoque ce plaisir intense. Ce n’est finalement rien d’autre que le plaisir d’une sensation de
l’enfance enfouie au fond de lui qui a resurgi, celle de ce petit gâteau qu’il mangeait enfant à
Combray et dont il a retrouvé le goût.

Conclusion :
Dans ce texte, le narrateur décrit le plaisir éprouvé à la dégustation d’une madeleine trempée dans
le thé. C’est l’occasion de célébrer un moment unique et magique. Il cherche la cause de ce plaisir
intense, même si la première phrase du texte laissait entendre que cette sensation provoquée par
un concours de circonstances inespéré a fait resurgir un moment heureux de son enfance, alors
même qu’il ne lui restait que des souvenirs peu heureux. Proust célèbre donc ici un instant magique
qui abolit le temps. Colette, en 1908, a également trouvé le « philtre magique » (« Le Dernier Feu
») qui abolit les années. Pour elle, ce sont les violettes, dont les couleurs et le parfum la replongent
dans les jours heureux de son enfance. Mais, à la différence de Proust, elle ne cherche pas à
décrypter, à analyser ce processus de la mémoire involontaire et affective, elle le vit pleinement et
le restitue dans une écriture lyrique et sensuelle.

- Une proposition incise est une proposition indépendante (ou principale), généralement courte, qui est
insérée entre des virgules ou d'autres signes de ponctuation dans le corps d'une phrase ou bien rejetée à la fin
d'une phrase. Elle sert soit à indiquer que l'on rapporte les paroles de quelqu'un, soit à faire une sorte de
parenthèse dans l'énoncé principal :

- Littérarité : Caractère qui distingue la littérature des autres activités du langage, qui distingue un texte
littéraire des autres textes.

- COD : Le complément d'objet direct est un mot ou (groupe de mots) qui se joint au verbe SANS
PREPOSITION pour en compléter le sens. Il subit l'action accomplie par le sujet.

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