Fabrique Urbaine A New Concept in Urban history-FR
Fabrique Urbaine A New Concept in Urban history-FR
Fabrique Urbaine A New Concept in Urban history-FR
🎓 Citation Information:
🌌 Contextual Insight:
🧭 Purpose/Objective:
Goal: L'objectif principal de l'article est de définir le concept de "fabrique urbaine"
comme un outil analytique pour délimiter la relation entre l'espace et la société dans
un milieu urbain non planifié.
Research Questions/Hypotheses:
o Comment l'histoire sociale contribue-t-elle au développement du motif
parcellaire des villes et bourgs?
o En quoi la "fabrique urbaine" offre-t-elle une alternative à l'analyse de
l'urbanisation planifiée?
o Comment la notion de "fabrique urbaine" peut-elle être appliquée dans la
recherche urbaine contemporaine?
Significance: L'article vise à proposer un nouveau cadre conceptuel et analytique pour
mieux comprendre les processus de développement des villes et bourgs en intégrant
les dimensions sociale et spatiale de manière dialectique.
🎓 Background Knowledge:
Core Concepts:
o Morphologie urbaine: Étude des formes bâties de la ville afin d'expliquer
l'agencement et la composition des structures urbaines, des espaces libres, leurs
caractères matériels et leur signification symbolique.
o Tissu urbain: Ensemble cohérent de bâtiments et d'espaces publics qui se
répètent selon un modèle défini.
o Temporalités sociales: Moments historiques qui marquent l'évolution des
pratiques et des représentations sociales dans un espace urbain.
Preliminary Theories:
o Typomorphologie: Approche qui analyse les formes architecturales et
urbaines en les classant en "types" pour comprendre leur genèse et leur
évolution.
o Cycle Burgage: Théorie de M. R. G. Conzen qui décrit les phases de
développement des parcelles dans les villes médiévales britanniques.
o Frange urbaine: Concept de M. R. G. Conzen qui désigne les zones
périphériques des villes en développement.
o Dialectique hégélienne-marxiste: Théorie philosophique qui met en avant
l'interaction et la contradiction entre des forces opposées dans le processus
historique.
Contextual Timeline:
o Début du XXe siècle: Émergence de la morphologie urbaine comme
discipline, notamment grâce aux travaux de M. R. G. Conzen et de l'école
italienne de Muratori et Caniggia.
o Années 1970: Le terme "fabrique urbaine" apparaît dans les travaux des
géographes et architectes français.
o Années 1990: Fondation de l'ISUF (International Seminar on Urban Form),
favorisant les échanges interdisciplinaires en morphologie urbaine.
Prior Research:
o M. R. G. Conzen: Ses études sur la ville d'Alnwick ont contribué à la
formalisation de concepts clés de la morphologie urbaine, notamment le cycle
burgage et la frange urbaine.
o L'école italienne de Muratori et Caniggia: A développé l'approche
typomorphologique, qui a influencé la recherche sur les formes urbaines dans
toute l'Europe.
o M. Roncayolo: Ses travaux sur Marseille ont mis en évidence l'importance de
la "division sociale de l'espace urbain".
Terminology:
o Fabrique urbaine: Concept qui met en avant l'interaction entre les pratiques
sociales et la forme spatiale d'une ville, en soulignant l'importance du
processus de développement plutôt que du résultat final.
o Temporalités sociales: Moments historiques qui marquent l'évolution des
pratiques et des représentations sociales dans un espace urbain.
o (Urban fabric): Terme anglais qui désigne le tissu urbain.
Essential Context:
o L'article s'inscrit dans un contexte de regain d'intérêt pour l'histoire urbaine et
la morphologie urbaine, qui s'éloigne de l'approche strictement planifiée et
consciente de l'urbanisation.
📝 Methodology:
Research Design & Rationale: L'article utilise une approche diachronique (historique)
et multi-scalaire, en analysant les villes à travers les époques et en comparant les
différentes échelles spatiales. La fabrique urbaine est appréhendée à travers
l'interaction dialectique entre la structure spatiale et l'histoire sociale.
Participants/Subjects: L'article ne se base pas sur une étude de terrain impliquant des
participants. Il s'appuie sur l'analyse de sources documentaires, telles que les plans
cadastraux français et les sources écrites médiévales.
Instruments/Tools:
o Plans cadastraux français (XIXe siècle)
o Sources écrites médiévales (chartes, cartulaires)
Data Collection: Les données sont collectées à partir de sources documentaires et
d'archives.
Data Analysis Techniques:
o Analyse morphologique: Étude des formes spatiales (parcelles, rues, îlots) et
des réseaux de voirie.
o Analyse historique: Étude des pratiques sociales, des événements historiques et
des représentations de la ville.
o Analyse dialectique: Identification des relations d'interaction et de
contradiction entre les structures spatiales et les faits sociaux.
Ethical Considerations: L'article n'aborde pas explicitement les considérations éthiques
car il s'appuie sur des sources documentaires historiques.
Comparison to Standard: La méthodologie est en ligne avec les pratiques standard de
la recherche historique et de la morphologie urbaine.
Replicability Score: 6/10. L'article fournit suffisamment d'informations pour permettre
la réplication de la méthode d'analyse, mais il nécessite une connaissance approfondie
des sources documentaires et des méthodes de la morphologie urbaine.
📊 Main Results/Findings:
List of metrics:
o Densité des parcelles: Indicateur de la compacité et de l'organisation spatiale
du tissu urbain.
o Configuration des parcelles: Forme et disposition des parcelles dans le tissu
urbain (bande, îlots, etc.).
o Réseau viaire: Organisation et structure du réseau de rues.
o Temporalités sociales: Moments historiques qui ont contribué à façonner la
forme de la ville.
Graphs/Tables:
o Figure 1: Carte de Marseille en 1840 illustrant la division sociale de l'espace
urbain.
o Figure 2: Plan de voirie de Tours, montrant les différents motifs parcellaires.
o Figure 3: Plan du quartier Saint-Julien à Tours, illustrant l'évolution du tissu
urbain.
Outcomes:
o La "fabrique urbaine" est un processus continu d'interaction entre l'histoire
sociale et la forme spatiale des villes et bourgs.
o La structure spatiale des villes est le résultat d'une longue accumulation
d'événements sociaux et historiques, souvent non planifiés.
o Les structures spatiales héritées du passé influencent les pratiques sociales et
les formes d'urbanisation ultérieures.
o La "fabrique urbaine" est un processus d'autorégulation, où la forme spatiale et
les pratiques sociales s'influencent mutuellement.
Data & Code Availability: L'article ne fournit pas accès aux données ni au code, car il
s'appuie sur l'analyse de sources documentaires historiques.
Statistical Significance: L'article ne contient pas d'analyse statistique, car il se base sur
une interprétation qualitative des données historiques.
Unintended Findings: L'article ne mentionne pas d'observations inattendues.
Authors' Views: L'auteure soutient que la "fabrique urbaine" est un concept pertinent
pour comprendre le développement des villes et bourgs, car il tient compte de l'histoire
sociale et de la forme spatiale de manière intégrée.
Comparative Analysis: L'auteure compare sa méthode d'analyse avec d'autres
approches de la morphologie urbaine, notamment celles de M. R. G. Conzen et de
l'école italienne de Muratori et Caniggia. Elle souligne les limites de l'analyse de
l'urbanisation planifiée et montre comment la "fabrique urbaine" offre une perspective
plus riche et plus réaliste.
Contradictions: L'auteure ne met pas en évidence de contradictions entre ses
conclusions et les travaux antérieurs.
❌ Limitations:
List:
o L'article ne s'appuie que sur l'analyse de deux cas d'études (Marseille et Tours)
et ne généralise pas ses conclusions à d'autres villes.
o La méthodologie qualitative ne permet pas de quantifier les impacts des
différents facteurs sociaux et spatiaux.
o L'article ne prend pas en compte les dimensions environnementales et
économiques dans l'analyse de la "fabrique urbaine".
Mitigations: L'article ne propose pas de solutions pour pallier les limitations de sa
méthodologie.
Conclusions:
Takeaways:
o Le développement des villes et bourgs est un processus complexe qui s'inscrit
dans une longue durée et qui est influencé par une multitude de facteurs
sociaux et spatiaux.
o La "fabrique urbaine" est un concept pertinent pour analyser les processus
d'urbanisation en s'appuyant sur l'interaction dialectique entre la forme spatiale
et l'histoire sociale.
o La prise en compte de l'histoire sociale est essentielle pour comprendre les
formes urbaines actuelles et pour concevoir des projets d'aménagement
durables.
Practical Implications:
o Les conclusions de l'article peuvent aider les architectes et les urbanistes à
mieux comprendre les processus de développement des villes et à concevoir
des projets plus respectueux de l'histoire et du tissu urbain.
o La "fabrique urbaine" peut servir de modèle pour l'analyse et la gestion des
espaces urbains, en intégrant les dimensions sociales, historiques et spatiales.
🚀 Future Work:
Notable Citations:
o Lepetit, B. (1996) ‘La ville: cadre, objet, sujet. Vingt ans de recherches
françaises en histoire urbaine’, Enquête 4, 18.
o Conzen, M. R. G. (1960) Alnwick, Northumberland: a study in town-plan
analysis Institute of British Geographers Publication 27 (George Philip,
London).
o Roncayolo, M. (1996) Les grammaires d'une ville. Essai sur la genèse des
structures urbaines à Marseille (EHESS, Paris).
🎯 Relevance:
Significance: Cet article est pertinent pour les chercheurs et professionnels intéressés
par l'analyse des processus de développement des villes et bourgs, en intégrant les
dimensions sociales et spatiales. Il fournit un cadre conceptuel et analytique innovant
pour comprendre la genèse des structures urbaines.
Real-world Implications: La "fabrique urbaine" peut être utilisée pour guider les
projets d'aménagement urbain, en tenant compte de l'histoire et du tissu urbain
préexistant. Elle peut également contribuer à la gestion et à la revitalisation des
quartiers urbains en s'appuyant sur une compréhension fine des interactions entre
l'espace et les populations.
Introduction:
o Contexte historique de la recherche urbaine
o Le besoin d'une approche interdisciplinaire
o Présentation du concept de "fabrique urbaine"
Un champ de recherche en construction:
o Les contributions de différentes disciplines à la morphologie urbaine
o La distinction entre la tradition anglo-saxonne et la tradition latine
o Les principaux représentants de chaque tradition
o L'importance de l'ISUF (International Seminar on Urban Form)
Définitions de la notion émergente de fabrique urbaine:
o L'origine du terme "fabrique urbaine"
o Les connotations d'évolution, de dynamisme et de processus
o Les différents domaines d'utilisation du terme
o La distinction entre les pratiques sociales et la fabrique urbaine
L'espace urbain : produit d'un processus non planifié:
o La difficulté d'expliquer l'urbanisation spontanée
o La rareté de la planification consciente
o L'importance de la pratique sociale dans la formation de la ville
o La nécessité d'analyser l'interaction entre la société et l'espace
Marseille:
o La division sociale de l'espace urbain
o L'opposition du nord et du sud
o L'héritage médiéval et les transformations du tissu urbain
o Les tentatives de régénération et leurs échecs
Tours:
o L'analyse du cadastre napoléonien
o Les deux tissus urbains contrastés (Saint-Julien et Bourg Saint-Martin)
o L'évolution du quartier Saint-Julien à travers cinq étapes
o La persistence du modèle parcellaire du XVe siècle
o L'impact du monastère de Saint-Julien sur l'urbanisation
o La comparaison entre Marseille et Tours
Utilisation du terme fabrique urbaine: avantages et inconvénients:
o Les avantages du terme "fabrique urbaine"
o Les limites sémantiques du terme
o Les alternatives possibles
o L'importance du raisonnement sous-jacent
Conclusion:
o L'importance de la fabrique urbaine pour la recherche et la pratique
o L'intégration de la "fabrique urbaine" dans les projets d'aménagement
o La nécessité de faire connaître ce concept aux architectes et urbanistes
🌟 Key Quotes:
"Le concept de fabrique urbaine peut être décrit comme un processus socio-spatial de
développement des villes et bourgs ordinaires." (Résumé)
"L'une des difficultés de ce champ de recherche réside dans la séparation, selon la
discipline, des questions et des objets : nous nous tournons vers les sciences spatiales
pour l'analyse des formes urbaines, tandis que les sciences historiques ont à leur
disposition les éléments historiques nécessaires pour effectuer une analyse des formes
qui prend en compte les processus sociaux." (p. 57)
"Le motif parcellaire est le résultat d'un long processus qui peut être reconstitué en
examinant le fonctionnement des sociétés passées." (p. 56)
"La structure spatiale des villes est le résultat d'une longue accumulation d'événements
sociaux et historiques, souvent non planifiés." (p. 60)
"La fabrique urbaine est un processus d'autorégulation, où la forme spatiale et les
pratiques sociales s'influencent mutuellement." (p. 64)
"À mon avis, une forme « réussie » est celle qui cristallise le temps, à long terme ;
tandis qu'une forme « ratée » est celle qui nie le temps." (p. 65)
🧠 Personal Insights/Comments:
Cet article offre une approche rafraîchissante et pertinente de l'analyse urbaine. La "fabrique
urbaine" représente un outil puissant pour mieux comprendre la complexité des processus de
développement des villes et la relation dynamique entre l'espace et la société. L'accent mis sur
l'histoire sociale et les temporalités permet de déconstruire la vision simpliste d'une
urbanisation uniquement planifiée et consciente. Cependant, il serait intéressant d'étudier la
"fabrique urbaine" dans un contexte plus globalisé et en tenant compte des dimensions
environnementales et économiques.
Résumé. Le concept de fabrique urbaine peut être décrit comme un processus socio-spatial de
développement des villes et bourgs ordinaires. Les pratiques et représentations des habitants
et autres utilisateurs des zones urbaines doivent d'abord être analysées comme une série de
moments historiques, que l'on peut qualifier de « temporalités sociales ». Ensuite, la structure
spatiale de la ville, en particulier ses parcelles, l'agrégation des parcelles en îlots et le réseau
viaire, peuvent être précisément décrites, mais avec leurs propres temporalités, et seulement
comme le résultat final de l'histoire des habitants. Le lien entre l'histoire sociale et la
morphologie urbaine est, à bien des égards, indirect : les temporalités sociales ne sont pas des
étapes conscientes dans le processus de développement du tissu urbain. Néanmoins, il existe
une interaction dialectique entre ces deux ordres de faits. Cette méthode d'articulation du
développement historique des zones urbaines est illustrée par des études de villes françaises.
Mon propre domaine est l'histoire médiévale. Travailler sur des sources écrites médiévales a
suscité mon intérêt pour la morphologie urbaine. Cela a conduit finalement à ma thèse de
doctorat sur la ville de Tours. Le point de départ de ma recherche est morphologique,
commençant par des observations de la forme urbaine. Je me sers de documents
planimétriques : notamment le cadastre français, datant
du début du XIXe siècle. Après avoir identifié ce matériau spécifique, il faut l'utiliser pour
fournir des explications historiques. Et c'est là que les spécialistes des premières périodes ont
un rôle à jouer. Il me semble que ce qu'il faut, c'est aller au-delà de la simple observation
morphologique et chercher à comprendre comment les choses en sont arrivées là. Comment
pouvons-nous expliquer les différences de structure spatiale d'un quartier à l'autre ? Pourquoi
certains espaces contiennent-ils des formes plus denses et plus diversifiées que d'autres ?
L'analyse du plan de voirie et du motif parcellaire présentée dans cet article pourrait être
considérée comme une description assez simple des structures spatiales. Cependant, l'objectif
principal est de mettre au jour les liens entre la morphologie et les faits sociaux dans le
contexte d'une croissance urbaine spontanée et non planifiée. En réalisant cela, nous
montrerons comment la notion de fabrique urbaine contribue à l'explication du
développement du motif parcellaire des XIXe et XXe siècles, sans se référer aux intentions
des urbanistes. De plus, les faits sociaux sont considérés dans une perspective à long terme et
à travers des sources écrites médiévales (principalement des sources diplomatiques, à la fois
originales et copies conservées dans des cartulaires ultérieurs). Le motif parcellaire est le
résultat d'un long processus qui peut être reconstitué en examinant le fonctionnement des
sociétés passées. Les chercheurs spécialisés dans les premières périodes (en particulier
l'Antiquité et le Moyen Âge) détiennent la clé du matériel explicatif mais manquent de
connaissances des formes urbaines les plus récentes qui en ont résulté. La recherche
géographique et architecturale contemporaine se concentre directement sur la ville (le
produit final) mais remonte rarement au-delà du XVIIe et du XVIIIe siècles, sauf en ce qui
concerne la planification urbaine. Cependant, la plupart des villes françaises ont un « centre
historique » dont la structure spatiale souvent non planifiée est le résultat d'un long
processus historique. Le problème est de relier l'héritage historique à la structure
morphologique de la ville. Le concept de fabrique urbaine offre une solution possible.
définie comme un outil analytique possible pour délimiter la relation entre l'espace et la
société dans un milieu urbain non planifié. Pour étayer la définition théorique, deux exemples
concrets seront fournis qui mettent en évidence l'utilité du concept comme outil de recherche
urbaine. Enfin, le terme fabrique urbaine sera exploré. Étant donné que la signification de
fabrique urbaine n'est pas identique en français à celle de sa traduction littérale (« urban
fabric » en anglais), la traduction anglaise est évitée.
Ces différences entre les disciplines se retrouvent dans une différence linguistique. En fait,
nous trouvons deux traditions distinctes – l'une anglo-saxonne, l'autre latine. Le principal
représentant de la tradition anglo-saxonne est M. R. G. Conzen. Le groupe latin comprend un
certain nombre de chercheurs français et italiens familiers avec le travail des uns et des
autres.3 Jusqu'à récemment, il y avait peu de communication entre ceux qui travaillaient dans
les deux traditions.4 Cependant, avec la fondation de l'ISUF en 1994,5 cette lacune a
commencé à être corrigée.
Les Anglo-Saxons comprennent des historiens britanniques de l'urbanisme tels que H. J. Dyos
et A. R. Sutcliffe, mais surtout des géographes urbains, notamment Conzen. Dans son étude
d'Alnwick, Conzen a développé plusieurs concepts, en particulier liés à la période
morphologique, aux séries parcellaires, au cycle burgage et à la frange urbaine.6 Ceux-ci ont
influencé à la fois les géographes urbains, tels que J. W. R. Whitehand,7 et
Conzen a accordé une attention particulière au tissu urbain. Dans ses recherches sur le réseau
de rues, les parcelles et les bâtiments, il a analysé en détail les plans historiques des villes.
La tradition latine a sans doute une généalogie plus complexe que son homologue anglo-
saxon. Elle a été davantage influencée par les sciences historiques. Certains chercheurs de la
première moitié du XXe siècle (notamment M. Poëte, M. Halbwachs et L. Febvre) dont les
travaux englobaient à la fois les domaines de la sociologie et de l'histoire ont eu une influence
durable sur les chercheurs français, tels que l'historien de l'art P. Lavedan et le géographe M.
Roncayolo, et les chercheurs italiens, tels que C. Aymonino et A. Rossi. Plusieurs écoles
italiennes – d'abord celle de Muratori et Caniggia, puis celle d'Aymonino et Rossi – ont jeté
les bases d'une approche typomorphologique, qui a donné un élan à la recherche sur l'analyse
des formes urbaines en architecture et en urbanisme au nord des Alpes.9 En France, en dehors
du monde de l'architecture et de l'urbanisme, d'importants géographes et historiens qui ont
travaillé sur l'analyse de la forme urbaine sont restés relativement isolés.10 B. Rouleau, O.
Zunz et A.-S. Clémençon en sont des exemples. Le seul chercheur français à avoir créé une
véritable école de pensée est M. Roncayolo.
Malgré les barrières entre les disciplines et entre les langues, les travaux des différents
chercheurs en morphologie urbaine présentent de nombreuses caractéristiques communes.
Premièrement, il y a l'étude précise de la dimension spatiale, tenant compte de trois
composantes : les rues, les parcelles et les bâtiments.11 L'accent est mis sur le motif des
parcelles et la construction de cartes des motifs parcellaires passés est fondamentale. Cela
diffère de l'approche de la plupart des architectes, qui ont tendance à mettre l'accent sur les
bâtiments, et de la plupart des historiens, qui ont tendance à mettre l'accent sur le plan de
voirie. Deuxièmement, une perspective temporelle intégrée est un aspect fondamental de la
morphologie urbaine. Cela implique de reconstituer les processus historiques qui ont donné
naissance à la ville d'aujourd'hui. Troisièmement, il y a la relation du développement des
formes urbaines aux changements sociaux, démographiques, économiques et politiques.12
Quatrièmement, il y a la multiplicité des périodes historiques. Celles-ci ne sont pas analysées
séparément (comme cela se produit généralement lorsque nous employons les trois périodes
de Braudel) mais elles sont traitées comme se chevauchant.
Il convient également de souligner l'utilisation du terme anglais « urban fabric », qui est à
l'origine du terme français fabrique urbaine.16
Le terme fabrique urbaine a fait son apparition pour la première fois dans le monde anglo-
saxon avec la connotation physique de « urban fabric ». Néanmoins, selon Pierre Merlin,
contrairement au terme latin équivalent en usage courant chez les Français et les Italiens
depuis Muratori et Caniggia, il a des connotations d'évolution, de dynamisme et de
processus.17 Le terme commence à apparaître fréquemment à partir des années 1970 dans
les travaux des géographes et des architectes.18 Il a également été utilisé en archéologie et
en histoire.19
En France, l'expression fabrique urbaine, qui est moins courante, est utilisée de manière plus
variée, la plupart étant plus ou moins conceptuelle. On la trouve en sociologie, en géographie
et en histoire. Alors que les sociologues20
utilisent le terme pour désigner l'étude des représentations de la ville et des acteurs qui ont fait
la ville, les géographes21 et, plus sporadiquement, les historiens22 ont, comme leurs
collègues anglo-saxons, porté un intérêt à
les formes physiques de l'espace urbain, même si très peu ont sérieusement pris en compte le
motif des parcelles. Bien que Roncayolo n'emploie pas directement le terme de la manière
indiquée, tous ses travaux sont imprégnés du raisonnement sous-jacent qui donne à la
fabrique urbaine le sens conceptuel suggéré ici :23 à savoir l'interaction entre les facteurs
sociaux à un instant donné et les formes héritées du passé.
C'est l'archéologue français formé en Grande-Bretagne Henri Galinié qui a poussé le plus
loin la réflexion théorique sur cette nouvelle notion.24 Il a été en mesure de synthétiser des
éléments tirés des sociologues Max Weber et Norbert Elias, de l'historien Lepetit, et des
géographes Roncayolo, Jacques Lévy, et Michel Lussault. Son travail met en évidence la
distinction entre l'étude des pratiques sociales (qu'il appelle « fonction ») à l'échelle de la
prise de décision humaine et l'étude de la fabrique urbaine considérée comme urbanisation à
une échelle de temps beaucoup plus longue. Le plus difficile est d'expliquer le processus
d'urbanisation. La plupart du temps, il ne peut pas être expliqué en termes de planification au
sens d'un projet social intentionnel. Exigeant, comme il le fait, des siècles de développement,
le processus d'urbanisation ne peut être correctement compris à l'échelle de la vie humaine
individuelle ou de la convention sociale. L'urbanisation est l'un de ces processus qui exige
une finesse d'analyse comparable à celle nécessaire pour comprendre le processus de
civilisation, étudié par Elias,25 ou l'individualisme croissant des sociétés contemporaines. De
tels processus se poursuivent pendant des siècles. Le changement, lorsqu'il survient, n'est
généralement pas prévisible ni systématiquement initié par des individus particuliers. Bien
que non planifié, le processus existe réellement. Les caractéristiques de l'espace urbain ne se
sont pas développées au hasard, même si, la plupart du temps, elles ne sont pas
consciemment organisées par des actions humaines. Il est vrai que dans de nombreux cas,
des plans et des opérations de lotissement existent, mais cette construction consciemment
programmée de l'espace urbain est quantitativement rare par rapport à l'urbanisation non
planifiée, souvent qualifiée de « spontanée » ou « organique ». Cependant, l'analyse
bibliographique suggère que le nombre d'ouvrages consacrés à l'urbanisation planifiée
dépasse largement celui consacré
à son homologue non planifié, que ce soit en architecture, en histoire ou en géographie. C'est
peut-être parce qu'il est plus facile d'analyser le matériel planifié, à la fois pratiquement (en
raison de la disponibilité de documents) et conceptuellement : l'explication de la forme
urbaine peut être directement liée aux intentions des planificateurs dans une relation de cause
à effet quasi-mécanique.26
L'espace urbain peut être décrit et caractérisé avec précision, mais il est rarement réfléchi au
préalable et planifié délibérément. Une façon de l'enquêter est d'utiliser le concept de
fabrique urbaine de Galinié. Sa démonstration dans le présent article nécessite l'analyse
séparée de deux ordres de réalité : d'abord, la pratique sociale, au sens large du terme, et
ensuite, la ville telle qu'elle se manifeste comme matière dans l'espace. Enfin, les deux sont
mis en relation, et leur influence mutuelle est examinée.
Pour décrire les pratiques sociales, il est nécessaire de comprendre comment les gens vivent
et s'impliquent dans un espace particulier, avec leurs projets, leurs réalisations, leurs conflits
et leurs accords. Toutes ces choses ont leurs propres résultats, qu'il est nécessaire de
découvrir. L'inadvertance, mais l'importance fondamentale, de nombreux développements est
évidente dans les résultats urbains de l'émergence de la bourgeoisie en Europe occidentale
au XIIe siècle. La bourgeoisie ne désirait pas particulièrement fonder une ville ou d'organiser
l'espace d'une manière spécifique. Ce qu'elle voulait, c'était sa part des récompenses de
l'activité économique urbaine, ainsi qu'un certain degré d'autonomie et de reconnaissance
sociale de la part des seigneurs. De même, au XIIIe siècle, les frères mendiants ne se sont
généralement pas installés dans les zones périphériques des villes avec l'intention d'étendre
la zone urbaine. Leur objectif était, en fait, d'être proches et d'aider les pauvres sans emploi
qui étaient censés habiter les faubourgs. Selon les termes de Lepetit, nous devons comprendre
comment et de quelle manière, à plusieurs moments de l'histoire d'une ville, un accord social
a été trouvé.27 L'objectif est de comprendre comment les gens s'accordent pour faire quelque
chose.
La description de l'espace urbain avec précision en termes de ses trois constituants (le motif
des parcelles, l'infrastructure de la voirie et les
bâtiments) pose un problème car pour les premières périodes, il existe rarement des
enregistrements de bâtiments sur de vastes zones.28 Nous ne devrions pas, cependant, copier
la majorité des historiens et nous concentrer sur l'infrastructure de la voirie. Ce qu'il faut, c'est
une analyse approfondie de l'espace urbain. Nous ne devrions pas réduire la ville à une simple
topographie urbaine, dont les points de référence sont, en général, limités aux murs de la ville
et aux sièges du pouvoir. Il ne suffit pas de décrire la ville en termes de points et de lignes.
Celles-ci peuvent fournir une structure, mais des parcelles sont également nécessaires pour
fournir la dimension de surface. L'objectif ici est de décrire la structure de l'espace urbain qui
est le produit d'un processus d'urbanisation qui s'est poursuivi pendant des siècles. Il est
possible de se servir des sources d'information les plus anciennes disponibles sur les
parcelles : les plans cadastraux français et italiens datant du début du XIXe siècle. Notre
analyse doit se concentrer sur les caractéristiques morphologiques à l'échelle des quartiers
urbains qui ont un lien avec les périodes antérieures, comme le Moyen Âge. Ce qu'il faut, c'est
discerner la présence d'ensembles homogènes de parcelles, de séries parcellaires selon les
termes de Conzen, dont la formation doit beaucoup au Moyen Âge, étant situées dans une
zone qui était déjà urbanisée à cette époque.
La troisième et dernière étape de l'analyse consiste à relier les deux analyses distinctes :
l'histoire des pratiques sociales d'une part et la structure spatiale de la ville d'autre part. Le
point de vue adopté ici est que la relation entre ces deux ordres de réalité est
fondamentalement dialectique. Dans cette optique, nous devons rechercher dans l'histoire des
pratiques sociales des séquences qui ont un lien indirect avec la forme spatiale et qui sont plus
susceptibles de se trouver dans l'histoire sociale et économique que dans l'histoire strictement
politique. Placées dans un contexte historique, ces séquences sociales seront considérées
comme ayant au moins une influence indirecte sur l'espace urbain.
processus à long terme, caractérisé par l'interaction permanente et dialectique entre l'espace
urbain et les différentes formes d'activité sociale. On peut la comparer à une longue chaîne
dans laquelle chaque maillon est à la fois la conséquence du maillon précédent et
prédétermine celui qui le suit. Il est donc nécessaire de réaliser que l'idée d'histoire urbaine
comme récit continu n'est plus viable. Dans cette vision classique, qui est fausse à mon avis, il
y a une tendance à voir l'espace urbain comme une finalité : il conduit à des activités sociales
qui n'ont pas été initialement conçues comme étant urbaines, devenant ainsi caractérisées
comme telles. Dans cet article, nous allons examiner comment la dimension spatiale de la
ville, composée du motif des parcelles, de l'infrastructure de la voirie et des bâtiments, a été,
en partie, déterminée par les pratiques sociales de ses habitants, mais aussi comment cette
dimension spatiale a à son tour influencé les fonctions sociales.
Deux exemples seront décrits. Le premier exemple est le produit d'une synthèse des travaux
de Roncayolo sur Marseille. Le second est basé sur ma propre thèse de doctorat sur l'histoire
médiévale de Tours. Dans chaque cas, l'accent est mis sur les zones du cœur urbain : à
Marseille, le quartier nord de la rive nord du Vieux Port à la Joliette ; à Tours, le quartier
Saint-Julien.
Marseille
est une question d'acceptation passive. En revanche, au sud et au sud-est, la nouvelle ville
créée par l'agrandissement de 1666 s'étend vers le sud le long du prestigieux axe du Prado.
C'est le quartier chic par excellence ; le quartier résidentiel de la bourgeoisie, avec ses
boutiques, ses banques et ses lieux de divertissement.
Roncayolo31 a conclu que ce motif est totalement non planifié et imprévu. La ségrégation
socio-spatiale ne peut être attribuée à un moment précis ni à un acteur particulier. Elle n'est le
fruit d'aucune stratégie particulière mais d'une succession d'événements se renforçant
mutuellement. Voici la succession d'événements qui a conduit à la dégradation non planifiée
de la zone nord.
rivière Neuve, il est clair que la majeure partie de l'activité du port et de la fabrication s'est
développée au nord, principalement parce que c'est là que se trouvait la main-d'œuvre.
Troisièmement, dans les années 1750-1770, l'aspect quelque peu rédhibitoire de ce secteur
nord a été renforcé par le retour des institutions charitables. L'Hôtel-Dieu a été reconstruit
en 1753 et est resté au nord. Les cimetières paroissiaux ont été transférés dans l'espace qu'il
a libéré.
Quatrièmement, le site de la construction du port de la Joliette au nord a été choisi entre 1842
et 1844, et il a commencé à fonctionner dès les années 1850. Ce nouveau port a donné
naissance à la « troisième ville » de Marseille, qui était nécessaire pour loger la main-d'œuvre
du port et les activités économiques liées au commerce maritime.
Enfin, la proposition de construire Fos sur l'étang de Berre a émergé dès les années 1920,
mais le complexe n'a commencé à fonctionner que dans les années 1970. Enfant du modèle de
développement industriel qui prévalait au moment de sa conception, Fos n'a commencé à
fonctionner que lorsque le modèle de développement industriel du XIXe siècle était en crise.
Un certain nombre de tentatives ont été faites pour régénérer la ville nord. En 1752, le projet
Belle-Isle visait à ouvrir le tissu urbain de la Vieille Ville en construisant plus de rues, mais le
projet a été abandonné. Le projet des frères Benet et de leur représentant Clapier au début du
XIXe siècle était de démolir 500 maisons dans la vieille ville, mais celui-ci a également été
abandonné. Il y avait aussi le plan Mirès, que les frères Pereire ont repris sous une forme plus
modérée pendant le Second Empire. L'idée était de construire des logements privés pour les
classes moyennes et supérieures à proximité de la Joliette et d'attirer les grandes institutions
capitalistes de Marseille. Cela devait créer un axe reliant la nouvelle ville de la Joliette et la
nouvelle ville du sud en construisant la rue Impériale (l'actuelle rue de la République).
Cependant, la reprise espérée de la zone ne s'est pas produite.
L'opération Bourse des années 1960 était une tentative de pousser les activités commerciales
et les zones d'attraction nord de la Canebière.
Malgré la construction d'un centre commercial et d'un jardin public paysager, utilisant les
vestiges archéologiques de l'ancien port, la zone a été occupée par les marginaux et les parias
de la société.
Ces tentatives de régénération ont été soit abandonnées, soit conduites à l'échec. Chaque
étape de la spirale descendante a peut-être eu sa propre cause particulière, mais il est clair
que ces projets allaient à l'encontre des forces prédominantes qui influençaient la forme de la
ville. C'était comme si ces projets niaient l'existence de la vieille ville. La vieille ville a agi
comme une sorte d'obstruction entre la ville bourgeoise et la Joliette, la troisième ville, et a
empêché toute modification significative de la configuration socio-spatiale de Marseille. Une
force d'inertie structurait les activités sociales. Par exemple, à la fin du XVIIIe siècle, la
politique de relégation des institutions charitables au nord a été en partie conditionnée par
l'image dévalorisée de cette partie de la ville en raison de ses usines et de ses pauvres
habitants qui étaient les patients des hôpitaux. Plus tard, cette ceinture d'institutions de
protection sociale, qui concentrait les pauvres et les malades dans cette zone, a alimenté le
mythe, évident dans les années 1830, d'une vieille ville rebutante articulée par les partisans
de l'hygiène sociale. À ce stade, il devient clair comment cette politique médicale a contribué
indirectement à l'échec de Mirès, qui, dans les années 1850, a essayé de faire déménager des
citoyens aisés plus près des zones qui, selon les défenseurs de l'hygiène sociale, étaient de
véritables taudis ou ghettos, d'où toute personne bien élevée s'enfuirait. À chaque occasion,
l'action sociale a réactivé la vieille opposition entre les villes anciennes et nouvelles, d'abord
dans l'opposition entre la ville proprement dite et le port, et plus tard entre les banlieues et le
centre-ville. Tout en étant cohérent avec sa propre logique, chacun de ces moments est à la
fois la conséquence du précédent et l'une des causes du suivant : c'est cette chaîne
d'événements, non planifiée mais réelle dans ses effets, que nous appelons fabrique urbaine.
Tours
cadastre napoléonien32 révèle deux tissus urbains très différents. Le premier, dans la zone
Saint-Julien (Figure 2, Zone 1), a un réseau de rues simple et une densité de parcelles
relativement faible. Il y a un contraste entre les grandes parcelles de l'intérieur des îlots et les
petites parcelles en bande le long des côtés des rues. Le second tissu urbain se trouve dans la
zone du Bourg Saint-Martin (Figure 2, Zone 2). Ici, le plan de voirie est complexe et
entrecoupé de plusieurs places. La densité des parcelles est beaucoup plus élevée.
à des ouvriers laïcs de l'extérieur. Le vaste enclos monastique a peu changé jusqu'à la
Révolution française.
Deuxièmement, à partir du milieu du XIe siècle au plus tard, les travailleurs laïcs de Saint-
Julien (le boulanger, le cuisinier, le cordonnier et le portier) étaient logés bien en dehors de
l'enclos monastique. Les moines estimaient que leur proximité perturberait le bon
fonctionnement du monastère et ils ont été déplacés à Saint-Martin. Pour atteindre l'enclos
monastique, les travailleurs laïcs devaient traverser une zone inhabitée de vignes et de terres
arables à l'intérieur de grandes parcelles dans l'intérieur des îlots.
Troisièmement, en 1114, les moines de Saint-Julien ont obtenu l'accord du comte pour fermer
une route qui avait été récemment construite près de leurs murs après que la Loire a débordé
de ses rives. Cela a contribué à maintenir la faible densité des parcelles autour de Saint-Julien.
Cet accord a été, en partie, responsable de maintenir le paysage dégagé. L'accès à la Loire
était impossible et tout l'espace autour de Saint-Julien était bouclé. En interdisant tout
mouvement de personnes et de marchandises près de l'enclos monastique, les moines ont
empêché l'installation d'un marché.
Figure 2. Motifs parcellaires dans une partie de Tours, d'après le cadastre napoléonien (1836).
Saint-Martin ont loué une parcelle de terre relativement importante aux moines de Cluny.
C'est là que les moines de Cluny ont construit le prieuré monastique de Saint-Michel-de-la
Guerche (Figure 3). Cela s'accorde avec la nature dialectique du processus de fabrique
urbaine. Un espace peu peuplé avec peu de variété d'utilisation des terres a été maintenu.
L'une des raisons de la volonté des chanoines de céder cet espace est que Saint-Michel-de-la-
Guerche était, à la fin du XIIe siècle, encore entouré de vignes et de champs. Il n'y avait pas
de possibilité de développement immédiate. Le développement d'un marché comme celui de
Saint-Martin près de la Loire aurait nécessité une planification importante, une construction
considérable et le déplacement de personnes dans la zone. Remplies de dissensions internes,
comme elles l'étaient, les chanoines n'avaient pas l'impulsion de lancer quoi que ce soit de ce
genre. Cette combinaison de facteurs a conduit au maintien d'un motif parcellaire presque
rural : les moines ont freiné l'urbanisation de la zone parce que leurs infrastructures
monastiques « ont gelé » cet espace.
Cinquièmement, entre les années 1420 et 1430, le prix des parcelles constructibles a
commencé à augmenter dans la zone Saint-Julien.33 Tout au long du XIVe siècle, il y avait eu
une tendance continue à la baisse, l'offre dépassant la demande. À partir de 1445, cependant,
les moines ont commencé à vendre une partie de leur enclos. Des maisons ont été construites
sur la Grande Rue (Figure 3) et louées à des locataires privés. Ces parcelles sont parmi les
parcelles en bande qui se trouvent en grande densité le long des rues. Cet accord entre les
moines et les habitants à la fin du XVe siècle constitue une nouvelle étape dans le processus
de fabrique urbaine. L'urbanisation a été rendue possible parce qu'il existait déjà un réseau de
routes. Pour les habitants, qui devaient être bien positionnés et se déplacer librement, les
résidences les plus souhaitables étaient celles qui étaient situées près des voies de circulation
les plus fréquentées, comme celles de la Grande Rue. Cela explique pourquoi l'urbanisation
s'est développée de manière linéaire. Il y avait, cependant, une influence majeure sur la
structure du motif parcellaire. Étant donné que les maisons ont été construites le long des
principales voies de circulation, les champs, les vignes et les terres ouvertes se trouvaient
maintenant derrière elles et étaient inaccessibles à l'intérieur des îlots. La seule façon
d'accéder à ces parcelles murées était par des passages étroits et inconfortables. Cela est
devenu un obstacle majeur à la construction de logements plus denses dans cette partie de la
ville.