Recherche Enseignements Hijazi Mrini Attaoui Bensaid Zineb

Télécharger au format docx, pdf ou txt
Télécharger au format docx, pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 13

Université Hassan II de Casablanca

Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociale Ain Sebaa


Années Universitaire : 2023/2024

PROFESSEUR SARHIRI MUSTAPHA

RECHERCHE DE / HIJAZI ABDELFATTAH

AMAL MRINI

ZAKARIA ATTAOUI

ZINEB BENSAID

FATIMA TERROUK

Recherche sur l’éducation au Maroc /

Grève des enseignantes et étudiantes médecines


INTRODUCTION

Le système éducatif marocain est caractérisé par la cohabitation du système public


et privé et de l'enseignement francophone et arabophone. Le système public est géré
par le ministère de l’Éducation nationale du royaume du Maroc alors que les
systèmes privés sont gérés par des entreprises privées ou par des structures
étrangères d'enseignement, publiques ou mixtes, comme l'Agence pour
l’enseignement français à l’étranger (AEFE). Le réseau de l'enseignement catholique
au sein du royaume du Maroc est placé sous la responsabilité de l'archevêque de
Rabat 1. Les taux brut de scolarisation et taux de d’achèvement du primaire des
Marocains n'ont cessé d'augmenter régulièrement à tous les niveaux2,3. Le taux
d'alphabétisation des adultes marocains atteignait 78 % en 2020 contre 52 % en
20044. Le système éducatif marocain doit faire face à de très fortes inégalités. Ainsi,
les élèves des milieux aisés et des classes moyennes sont envoyés dans des
structures francophones, privées ou publiques, et suivent souvent des parcours
d'excellence au Maroc (médecine, ingénierie, comptabilité, etc.) ou en France
(universités renommées et Grandes écoles). Il est à noter que le système éducatif
public soure de graves problèmes : bien qu'il arrive à produire quelques très brillants
élèves, ses résultats sont globalement faibles selon les classements internationaux
des étudiants qui parlent arabe ; il est de plus régulièrement critiqué par les journaux
et médias audio-visuels, les milieux patronaux marocains (CGEM), ainsi que par
toutes les organisations internationales (Banque mondiale BMCI, UNESCO, BAD,
UNICEF, BERD, OCDE, FMI). Avant le protectorat français - 1912/1956 -,
l'enseignement était principalement lié au statut des écoles coraniques. Au cours de
la période du protectorat français, quelques établissements publics et privés en
langue française s'implantent et sont fréquentés par des jeunes Français et des
étrangers ou par des jeunes Marocains, issus de familles aisées car les frais de
scolarité et d'inscription sont élevés. L'immense majorité des Marocains , quand ils
vivaient en zone rurale, ne lisait ni ne parlait l'arabe littéral. La première université du
Maroc, l'université Al Quaraouiyine de Fès, est créée en 859. La première université
moderne au Maroc fut créée le 21 décembre 1957 par le roi du Maroc ; il s'agit de
l'Université Mohammed V de Rabat qui est restée pendant de nombreuses années la
seule université marocaine. En 1955, 96 % des enseignants marocains et 42 % des
enseignantes marocaines ne disposaient d'aucune formation pédagogique. Post-
indépendance L'école est devenue obligatoire pour tous les enfants marocains âgés
de 6 à 13 ans en 19635. Il n'y a en eet pas de système de maternelle au Maroc, la
plupart des enfants commençant l'école à 6 ans. Pour les parents souhaitant insérer
leurs enfants plus tôt dans le système éducatif, il y a soit les écoles étrangères soit
les écoles privées marocaines. Ces dernières sont bien souvent réservées aux
enfants de familles aisées en raison de leur coût global de revient (inscription, achats
de matériel divers) qui ne correspond pas au revenu moyen d'un ménage marocain.
Islamisation et arabisation À la -n des années 1970, le système éducatif est arabisé
et islamisé. En 1977, Azzedine Laraki, militant pour l’arabisation de l’enseignement,
est nommé par le roi Hassan II ministre de l’Éducation nationale avec le soutien du
parti nationaliste-conservateur de l'Istiqlal. Dès lors, le nouveau ministre interdit tous
les cours de philosophie. Ensuite, il s'attaque aux cours de sociologie : l'école de
sociologie marocaine est interdite et les rares sociologues étrangers sont expulsés.
Plusieurs fois reconduit jusqu'en 1986 dans ses fonctions de ministre de l'Éducation
nationale au sein de gouvernements successifs, puis nommé Premier ministre (de
septembre 1986 à août 1992), Azzedie Laraki continue sa politique d'arabisation
avec l'instauration de cours obligatoire d'études islamiques. Par la suite, toutes les
matières sont rapidement arabisées, le français étant maintenu en tant que langue
étrangère. En 1989, l'arabisation et l'islamisation du système éducatif public sont
achevées. Les rares familles marocaines aisées qui envoyaient encore leurs enfants
dans des écoles publiques francophones cessent de le faire. Le français reste
toutefois conservé comme langue d'enseignement des matières scienti-ques dans
les écoles techniques et professionnelles du secondaire, les établissements
d'enseignement technique, les écoles supérieures de technologie et les universités6.
En 1999, le gouvernement se lance dans un vaste programme de réforme, avec
l'adoption de La Charte nationale de l'éducation en 1999 et la période 2000-2009
devient « décennie de l’éducation ». Le Maroc a également réussi à améliorer l’accès
au système éducatif de base avec l'aide de la Banque mondiale et d'autres
organismes multilatéraux. En 2006, le roi Mohammed VI , arrivé au pouvoir à
compter du décès de son père, le roi Hassan II, en 1999, décide de créer le Conseil
supérieur de l'enseignement. Le Maroc se dote en 2009 d'un Programme d'urgence
pour l'éducation [archive] a-n de rattraper le lourd retard du pays. Le plan d'urgence
couvre la période 2009-2012 et s'appuie sur les leçons apprises au cours de la
décennie précédente. Dans ce contexte, le gouvernement marocain demande à cinq
bailleurs de fonds importants l'Union européenne (UE), la Banque européenne
d'investissement (BEI), l'Agence française de développement (AFD), la Banque
africaine de développement (BAD) et la Banque mondiale — d'aider à la mise en
œuvre du programme de réforme du plan d'urgence11. Le 10 février 2016, le roi
Mohamed VI ''court-circuite'' le chef du gouvernement en ordonnant directement lui-
même une réforme de la langue utilisée dans le système éducatif dès la première
année du primaire12. Cette mesure intervient après avoir créé des sections
internationales dans plusieurs établissements du royaume, à compter de la rentrée
scolaire 2013/201413,14. La réforme est accentuée par le ministre de l'éducation
nationale en juillet 2017 pour la rentrée suivante avec l'instauration obligatoire de 2
heures de français dès la première année du primaire15. quels sont les de-ts de l’
enseignement et des Etudiants ? Faisant face à un grand dé-cit en enseignants, le
gouvernement marocain a procédé, en novembre 2016, à une large opération de
recrutement sous contrats à durée déterminée (CDD). L’objectif était de recruter et
de former 11 000 enseignants1 dans les plus brefs délais2. Dans la pratique, et vu
l’urgence, les candidats retenus ont aussitôt rejoint les classes et commencé à
exercer leurs fonctions avec peu de formation. En eet, les formations, suivies en
parallèle, notamment pendant les vacances scolaires, ont été de très courte durée3.
En dépit des critiques, les opérations de recrutement se sont poursuivies à un rythme
eréné (24 000 enseignants en 2017, 20 000 en 2018, 15 000 en 2019…). Au total,
près de 100 000 enseignants ont été recrutés depuis 2016, ce qui équivaut à près de
40 % de l’eectif global4. Au Maroc, le cycle secondaire est divisé en deux
composantes : le collégial qui dure trois ans (du (...) Avant d’en arriver là, les
politiques de recrutement et de formation des enseignants fonctionnaires avaient
connu plusieurs évolutions ces dix dernières années. Pendant longtemps, les
conditions d’entrée dans le métier et la durée des formations, ainsi que les centres
où elles se déroulaient, diéraient selon le cycle d’enseignement. Ainsi, les
enseignants du primaire devaient être titulaires du baccalauréat et suivre deux
années de formation dans les centres de formation des instituteurs (CFI). Les
enseignants du secondaire collégial, quant à eux, accédaient aux centres
pédagogiques régionaux (CPR) après un diplôme d’études universitaires générales
(DEUG) et y restaient pour une année de formation. En-n, les écoles normales
supérieures (ENS) se chargeaient de la formation des enseignants du secondaire
quali-ant5 qui, pour y accéder, devaient disposer d’une licence de l’enseignement
supérieur. Décret no 2.11.672 du 23 décembre 2011, BO 6018 (02/02/2012). En
2012, le gouvernement a décidé de regrouper les centres de formation des
enseignants du primaire et du secondaire collégial (CFI et CPR) dans une seule
institution en créant les centres régionaux des métiers de l’éducation et de la
formation (CRMEF)6. Le concours d’accès à ces derniers est ouvert aux candidats
titulaires d’une licence de l’enseignement supérieur. Et, comme auparavant pour les
CFI et les CPR, l’admission dans ces CRMEF équivaut à un recrutement dans la
fonction publique au terme de la formation

I - LES REFORMES ET DEFIS DE L’ENSEIGNEMENT AU MAROC


A- Les Réformes de l’Etat et les solutions approximatives :
L’idée que se font les enseignants de leur métier et de leur rôle professionnel s’ancre
dans une conception traditionnelle qui fait la part belle à la « transmission des
connaissances ». Ainsi, quand on demande aux enseignants en quoi consiste leur
métier, la réponse qui revient souvent et d’une manière spontanée est « la
transmission des savoirs et connaissances aux élèves ». La réponse est souvent
concise et sans développements, et la majorité des enseignants éprouve une
certaine gêne ou un malaise à s’attarder sur la question. Dans un second temps, les
enseignants évoquent « l’éducation des enfants », car : Ce n’est pas pour rien que
l’intitulé de notre ministère est l’« Éducation nationale ». D’ailleurs, l’éducation vient
avant l’enseignement. Le rôle de l’école est justement de faire de ces enfants des
citoyens bien éduqués. Bien que cette conception traditionnelle soit prédominante, il
n’en demeure pas moins que des nuances sont perceptibles quand on relie cette
question aux motivations d’entrée dans le métier. Ainsi, cette conception est plus
marquée chez les enseignants qui sont venus au métier « par défaut » ou à la
recherche d’un emploi stable (qui constituent la majorité des nouveaux enseignants).
En revanche, ceux et celles qui évoquent un choix délibéré (rêve d’enfant ou autre)
essayent de construire un discours qui va au-delà de ce « cœur de métier » en
évoquant, par exemple, l’épanouissement des élèves : Mon rôle est aussi de faire de
l’école et de la classe un espace de bien-être pour les élèves, où ils se sentent à
l’aise. Parce que si ce n’est pas le cas, ils ne pourront pas évoluer dans leur scolarité
; j’en suis convaincue. (Houa, enseignante du primaire dans une école rurale) Au-
delà des divergences de perception du rôle professionnel, il faut signaler deux points
communs à ces deux catégories. Le premier est l’absence de référence ou de cadre
normatif – qu’il soit institutionnel ou idéologique – qui structure leur façon de voir leur
métier et guide leurs actions. Qu’il s’agisse de ceux qui mettent l’accent sur « la
transmission des connaissances » – qui sont majoritaires – ou des partisans d’une
approche plus axée sur l’élève et son bien-être, personne n’évoque les textes ou
documents du ministère de l’Éducation nationale, par exemple. Et quand on leur
demande s’il existe des textes qui régissent leurs rôle et missions, les réponses
oscillent entre « ça doit exister », « je ne sais pas » et « on n’a rien eu à ce sujet ».
Le deuxième point commun est la bonne volonté et le fort engagement des
enseignants – indépendamment de leurs caractéristiques –, qui se disent conscients
de leurs responsabilités et devoirs (envers les élèves) et prêts à faire les eorts
nécessaires pour combler leurs lacunes a-n d’être à la hauteur. 34Cependant, ces
deux façons de concevoir le rôle professionnel sont mises à rude épreuve
lorsqu’elles font face aux dures réalités de l’exercice du métier. Surcharge des
classes, manque de matériel pédagogique, dé-cit des élèves en termes d’acquis…
Les partisans de « la transmission des connaissances » comme les défenseurs
d’une approche individualisée axée sur l’élève évoquent des dicultés insurmontables
et, parfois, des dilemmes cornéliens : Lors de ma première année, on m’a chargé
d’une classe de 3e année. J’étais frappé par le nombre d’élèves qui n’arrivaient pas
à suivre le cours, qui ne comprenaient pas ce que je disais. Bien sûr, j’ai essayé de
simpli-er et de réexpliquer, mais je me suis rendu compte qu’ils avaient de grands
dé-cits ; ils étaient incapables de suivre. Je parle là de presque la moitié de la classe.
C’était hallucinant. J’ai demandé à mes collègues plus expérimentés, ils m’ont dit
que ça n’a rien de surprenant, une bonne partie des élèves dans chaque classe
n’arrive pas à suivre. Ça m’a choqué. Que faire ? Mes collègues m’ont conseillé de
ne pas perdre mon temps avec eux car ça ne servait à rien. Mais si je ne fais rien
pour eux, ça veut dire que je ne fais pas mon métier. En même temps, je suis tenu
par un calendrier, et moi seul je n’y peux rien. Mais je ne baisse pas les bras, j’essaie
et j’essaie… (Nourredine, enseignant du primaire dans une école urbaine) Il ressort
aussi des entretiens avec les enseignants que leur rôle est circonscrit à l’intérieur de
la classe et en lien direct – voire exclusif – avec les élèves. La participation à la
gestion administrative et pédagogique de l’établissement, la collaboration avec les
collègues ou des partenaires externes, l’implication dans les conseils d’établissement
prévue par l’arrêté no 2.02.376 (conseil de gestion, conseil pédagogique…)

B - Les Défis de l’enseignement au Maroc :


Dans leur parcours d’apprentissage du métier, la grande majorité des enseignants
interrogés évoquent la langue comme première diculté. Venant de disciplines très
variées (économie, histoire, droit, philosophie, études islamiques…), ils sont en eet
appelés à enseigner en arabe ou en français, chose qui ne va pas de soi. Plusieurs
rapports et études se sont arrêtés sur le faible niveau de maîtrise des langues, en
particulier du français, des enseignants marocains (ONDH, 2017). Le manque de
formation et d’encadrement est une circonstance aggravante pour les enseignants
contractuels. Plusieurs d’entre eux rapportent des éléments qui en disent long sur la
fragilité des situations d’enseignement. Du côté de la langue française, la question
est encore plus délicate. La majorité des enseignants reconnaît sa faiblesse en la
matière et le vit très mal. Les enseignants attirent l’attention sur le fait qu’ils sont en
position de faiblesse. Au moment de l’aectation des classes en début d’année, tous
les enseignants contractuels arment qu’ils sont les « mal lotis », c’est-à-dire qu’ils
récupèrent les classes les plus diciles, notamment l’enseignement de la matière
française, après que les enseignants fonctionnaires » ont fait leur choix avec l’aval
du directeur de l’établissement. Les enseignants contractuels ont choisi de mener
leur mouvement en créant ce cadre (coordination), (...) Devant cette situation, les
enseignants semblent adopter une stratégie en deux axes. Le premier, qui s’inscrit
dans une logique pragmatique et court-termiste, consiste à bien préparer les -ches
des cours, généralement partagées par des collègues qui ont enseigné la matière les
années précédentes, et à les apprendre par cœur en anticipant ce qui pourrait se
passer en classe (questions des élèves, par exemple), laissant ainsi peu de place au
hasard. Les élèves, de leur côté, sont appelés à préparer à la maison les cours de la
séance suivante pour faciliter la tâche à l’enseignant. De ce point de vue, il faut
signaler le fort esprit de partage, de solidarité et de communication entre les
enseignants contractuels, qui sont organisés dans le cadre d’une « coordination
nationale9 », avec des rami-cations territoriales (au niveau local, provincial et
régional), et dont l’objectif est de défendre leur cause principale, à savoir l’intégration
dans la fonction publique. Le deuxième axe, lui, s’inscrit dans le moyen terme et
renvoie à un investissement personnel de la part des enseignants contractuels
(lectures, recherches, formation continue…) pour « se mettre à niveau » et pallier
leurs lacunes linguistiques et professionnelles. Plusieurs travaux s’étant intéressés à
cette question au Maroc (Pellegrini, 2019 ; Bou-serdane, 2015) ont relevé cette
pratique des enseignants qui consiste à encourager vivement les élèves à bien
préparer, voire à apprendre par cœur les leçons avant le cours, en valorisant leur
capacité de mémorisation-récitation. Ici, les enseignants s’astreignent à faire pareil «
pour être à la hauteur » ou « pour ne pas se faire démasquer »
II LA GREVE DES ENSEIGNANTS ET ETUDIANTS MEDECINE :
A- LA GREVE DES ENSEIGNANTS ET PROBLEMES AVEC LE GOUVERNEMENT :

Le Maroc est témoin de protestations massives dans le secteur de l’éducation qui se


sont transformées en grèves continues paralysant les écoles publiques d’une
manière sans précédent au cours des vingt dernières années. Même au plus fort du
mouvement social qu'ont connu les pays arabes en 2011, y compris notre pays, les
grèves n'ont pas atteint le sommet auquel nous assistons aujourd'hui, malgré la large
participation des professeurs aux troubles dont a été témoin la rue marocaine à cette
époque, où la colère a été absorbée en activant le mécanisme d’emploi direct des
hauts diplômés. Il est vrai que le rythme des grèves a connu une escalade
significative après l’instauration de la contractualisation par le ministère de
l'Éducation nationale en 2016, nous faisant traverser ainsi un tunnel obscur dont
nous ne sommes pas sortis à ce jour, à tel point que nos écoles ont été fermée pour
195 jours au cours des quatre dernières années. Cependant, la situation s'est
aggravée d'une manière encore plus grave au début de la saison scolaire en cours,
de sorte que les cours ont été suspendus pour plus d'un mois et demi, ce qui
constitue la quasi-totalité du temps scolaire prévu pour la première session. En outre,
le nombre de participants à la grève est plus élevé que les années précédentes, car
le nombre de grévistes s'est élargi pour inclure des groupes autres que les
d’académies, sachant que le nombre de ces derniers augmente régulièrement
chaque année. Comment en est-on arrivé à cette situation et quelles en sont les
causes profondes ?

Revenir sur l'histoire des protestations des enseignants au Maroc au cours des vingt
dernières années met en évidence la prédominance du caractère corporatiste des
grèves. Les catégories concernées menant souvent des manifestations ou des
grèves limitées, dans un cadre syndical soutenant leurs revendications, faisait que
les acquis scolaires des apprenants n’étaient que peu affectés. Après 2016, il y a eu
un changement fondamental dans la logique d'emploi du ministère de l'Éducation
nationale, selon laquelle le recrutement dans le cadre de la fonction publique a été
remplacé par la contractualisation, qui s'est ensuite transformée en un recrutement
dans le cadre des académies régionales d'éducation et de formation. Peu à peu, la
principale justification de toutes les grèves est devenue la non-intégration de ces
cadres dans la fonction publique. Avec l'érosion du pouvoir d'achat des citoyens ces
dernières années et l'engagement du gouvernement actuel d'augmenter les salaires
des nouveaux professeurs de 2 500 dirhams, les exigences financières sont passées
au premier plan des revendications des ressources humaines de l'éducation.
Répondre aux exigences financières des fonctionnaires de certains secteurs, comme
celui de la santé et celui de l’enseignement supérieur par exemple, a également
accru les attentes des acteurs éducatifs, ce qui explique le calme qui a régné dans le
secteur au cours de l'année écoulée, en espérant une issue heureuse des
négociations sur le nouveau statut.

Malgré les acquis que ce dernier a apportés à certaines catégories professionnelles,


il n'a pas fourni la réponse adéquate aux questions d'intégration dans la fonction
publique et d'augmentation du salaire minimum que perçoivent les enseignants en
début de carrière. Si l'on ajoute à cela l'adoption par ce statut de certaines règles de
la nouvelle gestion publique, comme lier la promotion à la performance, instaurer
l'évaluation régulière afin de punir ou de motiver, et assigner aux enseignants de
nouvelles tâches dont la portée peut être élargie par une simple décision
ministérielle, en plus de ne pas préciser les horaires de travail, tout cela a mis les
enseignants dans une situation inconfortable, ce qu'elles ont exprimé dans les
protestations du 5 octobre, envoyant ainsi un message limpide aux personnes
concernées. Alors qu'on espérait que le gouvernement recevrait ce message avec
suffisamment de sérieux et de vigilance, il a pris l'initiative inverse en publiant le
décret controversé au Journal officiel et en lançant une campagne de communication
à laquelle le ministère de l'Éducation nationale a participé fortement, avec le but de
mettre en exergue les points positifs que contient le décret, ignorant les critiques des
enseignants contestataires au point que Youssef Saadani, conseiller du ministre de
l'Éducation nationale, a déclaré dans une interview à un journal que le « Statut
n’apporte que des avantages, il n’y a pas le moindre inconvénient ». Ce qui veut
simplement dire que les contestataires, qui constituent la majorité du corps
enseignant, sont soient des aveugles ou des gens de mauvaise foi, et dans les deux
cas ils sont complétement dans le tord du point de vue du ministère.

Si l’on admet que le document contient effectivement des points positifs, il n’est pas
sans doute pas exempt de points négatifs que nous avons présentés dans un article
précédent et qu’il n’est pas nécessaire de les étayer ici. Mais indépendamment de
l'évaluation objective du nouveau décret, et compte tenu de la sensibilité de la
situation et de son extrême tension, sa gestion rationnelle devrait éviter certaines
sorties déplacées de la part de quelques responsables du ministère, et certains
discours provocateurs de la part des responsables du gouvernement, sans oublier
certaines décisions inappropriées aux circonstances actuelles, comme la déduction
des salaires des grévistes. Car le sort scolaire de nos enfants est en danger réel, et il
est du devoir de toutes les parties concernées d’agir en toute sagesse et
responsabilité. En outre, promouvoir des réussites imaginaires ou imaginées, qui
sont en fait démenties par la réalité et contredites par la logique scientifique, ne fait
qu'empirer les choses. Comme par exemple annoncer d’une manière euphorique le
succès présumé des écoles pionnières, qui ont réussi l’exploit inimaginable de
rattraper deux années de retard scolaire en seulement deux mois de soutien
pédagogique. Une prouesse que même les pseudo-chercheurs au niveau
international n’ont jamais osé revendiquer, car ils savent que personne ne peut croire
une telle prétention irréaliste. En tout cas, c’est un exploit qui nous vaudra le grand
privilège de pouvoir exporter notre recette magique dans de nombreux pays du
monde, y compris les pays développés.

Il est donc clair que l’origine du mal qui a conduit à la tension dans le domaine de
l’éducation aujourd’hui est principalement due au fait de continuer à gérer plus de 40
% des ressources humaines du ministère de l’Éducation nationale en dehors de la
fonction publique, avec l’élargissement prévu de ce type de gestion pour inclure tous
les employés du ministère toutes catégories confondues dans un délai de dix ans.
Cette approche gouvernementale peut avoir ses justifications, notamment au niveau
du maintien des équilibres financiers et macroéconomiques, bien que la justification
associée à la réduction de la masse salariale, avancée par certains, ne résiste pas
au maintien par l’État du paiement des salaires à tous le monde, y compris les
cadres d’académies. Sauf que le gouvernement n’a pas clarifié à l’opinion publique
éducative les justifications du recours à cette solution pour la convaincre de sa
pertinence. De plus, le ministère n’a pas communiqué avec les acteurs de l’éducation
pour expliquer sa vision de la gestion du secteur, qui tire ses fondements de la
théorie de la théorie du nouveau management public, dont l’application nécessite
l’adoption de nouvelles pratiques qui contredisent largement les pratiques
profondément enracinées qui ne peuvent jamais être modifiées par un simple décret.

Faire face à la situation actuelle, qui a induit les grèves en cours, nécessite une
réflexion sérieuse sur les causes qui y ont conduit en prescrivant un traitement
efficace de l'origine du mal, qui s'est aggravée depuis sept ans, sachant que le reste
des dossiers, dont certains ont trouvé des solutions dans le nouveau statut et
d'autres peuvent trouver leur chemin vers une solution facilement. En général,
l'efficacité du traitement dépend de l'apport d'un ensemble d'ingrédients, dont les
plus importants sont :

1. L’engagement indéfectible envers les références de la réforme : Au premier


rang d'entre eux figure la loi-cadre, dont le gouvernement devrait accélérer la
traduction en textes législatifs et réglementaires nécessaires à sa mise en
œuvre, notamment le cadre de référence pour les emplois et les compétences,
qui est le document contraignant qui précède toute révision du statut des
cadres de l’éducation nationale. La deuxième référence est le programme
gouvernemental qui oblige le gouvernement à augmenter de 2500 dirhams les
salaires des enseignants au début de leur carrière. Un engagement clair qui ne
peut pas se traduire, comme l'a dit le chef du gouvernement, par une
augmentation en fin de carrière, car celle-ci est une promotion alors que celle-
là est une augmentation de salaire. Sans oublier l’autre engagement
gouvernemental, même s’il est implicite, qui consiste à inclure dans le nouveau
statut le personnel éducatif du préscolaire, qui rappelons-le appartient à un
cycle d’enseignement auquel le ministère attache la plus grande importance.
2. Garantir l’équité entre toutes les catégories professionnelles : d’une manière
qui leur assure un parcours professionnel égal et motivant, et préserve leur
dignité à l’instar de ce qui est appliqué dans d’autres secteurs publics selon
une nouvelle perspective de justice salariale qui revoit radicalement le système
salarial dans le secteur public. En plus de veiller à fixer des critères précis
d’attribution des tâches en fonction du cadre de référence des emplois et des
compétences, et déterminer les critères pour bénéficier d’une rémunération
selon des règles et des conditions claires, et faire de la méritocratie le critère
exclusif de l’entrée dans la profession enseignante, sans la restreindre à un
certain âge qui peut conduire à l’exclusion de personnes qui remplissent les
conditions de qualité requises.
3. Parvenir à l’égalité entre tous les salariés : en tranchant d’une manière
définitive le dossier des cadres des académies. Soit en les intégrant dans la
fonction publique, ce que le gouvernement ne semble pas en phase de le faire,
notamment après avoir remplacé le ministre chargé de la réforme de
l’administration par le ministre du travail dans le comité ministériel que le chef
du gouvernement a chargé du dossier. Soit en siégeant avec les représentants
des cadres d’académies afin de clarifier toutes les circonstances liées à la
question, et de les convaincre des justifications objectives qui ont nécessité
que le gouvernement adopte le choix relatif à leur situation statutaire, figurant
dans le nouveau statut.
4. Adopter la franchise et la transparence dans la gestion du dossier : afin de
restaurer la confiance perdue entre le gouvernement et le reste des parties
prenantes, y compris les quatre syndicats qui ont participé au dialogue. De
nombreux points du nouveau statut doivent être discutés en toute franchise
avec les acteurs de l’éducation, y compris sur leurs soubassements, et ne pas
prôner coûte que coûte la logique de tout justifier de manière parfois peu
convaincante, tels que cela s’est fait dans le cas des tâches du personnel
enseignant, du système de sanctions, du système d’incitation, du nombre
d’heures de travail et du statut des cadres des académies.
5. Adopter une approche participative véritable : en abandonnant le travail dans le
cercle étroit des syndicats les plus représentatifs, et en élargissant l’approche
participative à l’ensemble des syndicats ainsi qu’aux autres instances
représentatives, d’autant plus que toutes les coordinations ou presque se sont
réunis dans le cadre d’une seule coordination nationale parlant désormais en
leurs noms. La légitimité du nouveau statut sera également renforcée par sa
soumission à l’avis du Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la
recherche scientifique.

B – PROBLEME ETUDIANTS MEDECINE :

Dans toutes les facultés de médecine du Maroc, les étudiants font entendre
leur colère depuis quelques semaines, multipliant sit-in et marches, allant
jusqu’à boycotter les cours, les terrains de stage et les examens semestriels.
Le tout pour manifester leur rejet de la réforme de leur cursus d’études, dont
la durée a été réduite de 7 à 6 ans. Les étudiants grévistes estiment que cette
réforme, en l’absence de mesures d’accompagnement, risque de ne pas
produire les résultats escomptés, car, à leurs yeux, elle privilégierait la
quantité à la qualité.

Contactée par Le360, une source au ministère de l’Enseignement supérieur a


bien voulu nous éclairer sur la vision du département de tutelle et sa lecture
des revendications des étudiants en médecine. «La réduction de la durée de
formation en médecine de 7 à 6 ans n’est pas un acte isolé. Cette décision
s’inscrit dans le cadre d’un vaste chantier royal de réforme du système de
santé et a pour but de combler le manque criant de médecins et de
professionnels de santé», affirme d’emblée notre source.

Un benchmark international
Le gouvernement a ainsi procédé à un benchmark international, et a constaté
que le Maroc est le seul pays, avec la France, à avoir une formation en
médecine s’étendant sur 7 ans. «Il a aussi été constaté que la septième
année ne prévoit pas de cours et se limite à des stages. Les étudiants, n’étant
pas pressés, prennent du temps avant de finir leurs projets de thèse, et
tentent quelques stages dans les provinces en contrepartie d’une
rémunération spécifique», a noté notre interlocuteur.

Les doyens des facultés de médecine ont été unanimes à relever que cette
septième année du cursus n’était pas adossée à un programme pédagogique
spécifique. Partant de ce constat, la décision a été prise de passer à six ans, à
l’instar de nombreux autres pays (Allemagne, Espagne, Italie, etc.).

«L’idée consiste à demander aux étudiants de travailler un peu plus pour finir
leurs thèses en sixième année. On a discuté avec les étudiants, qui ont
adhéré à cette réforme introduisant de nouveaux outils (intelligence artificielle,
télémédecine, simulation, etc.)», explique la même source.

Lire aussi : Les étudiants en médecine maintiennent leur grève et alertent sur
le risque d’une année blanche

Sachant que l’arrêté actant le basculement vers une formation de six ans est
sorti il y a plus d’un an et demi, se pose la question des raisons qui ont
poussé les étudiants à revenir à la charge et rejeter une réforme… qu’ils
avaient pourtant approuvé deux ans plus tôt.

«Il y a des gens qui poussent à l’extrême. Certains étudiants essaient de


surfer sur la vague de la grève des enseignants pour hausser la barre»,
argumente notre interlocuteur. Lors de son passage devant le Parlement,
lundi 29 janvier dernier, le ministre de l’Enseignement supérieur, Abdellatif
Miraoui, avait d’ailleurs laissé entendre que ce dossier a été «politisé en
dehors de l’hémicycle», faisant allusion au mouvement islamiste Al Adl wal
Ihssane, soupçonné d’être l’instigateur de cette nouvelle vague de
contestation estudiantine.

Concernant le cursus de formation, Abdellatif Miraoui a égrené ses


arguments, notamment contre ceux qui auraient fait croire aux étudiants que
le diplôme de six ans va les priver de partir travailler en France. «Est-ce que
nous formons des médecins pour aller travailler dans un autre pays?», a lancé
le ministre devant les députés, précisant qu’un étudiant en médecine coûte
chaque année à l’État une enveloppe de 60.000 dirhams, voire 70.000
dirhams dans le cas d’un étudiant en médecine dentaire.

Le ministre a aussi indiqué que son département délivre chaque année


environ 3.000 diplômes de médecine d’équivalence issus de pays comme
l’Ukraine, la Russie et la Roumanie. «Voulez-vous qu’on forme des médecins
au Maroc et que notre pays devienne un hub de formation en médecine en
Afrique, ou bien laisser nos enfants revenir se former au milieu de la guerre en
Ukraine?», renchérit le ministre.

«Une question de souveraineté nationale»

Pour Abdellatif Miraoui, la formation en médecine devient une question de


«souveraineté nationale». Tous les moyens sont désormais mobilisés pour
former plus de médecins et accompagner l’ambitieux chantier de la
généralisation de la couverture médicale (AMO pour tous). En effet, le nombre
de sièges pédagogiques a augmenté de 38% cette année, tandis que de
nouvelles facultés de médecine ont ouvert leurs portes à Béni Mellal, Guelmim
et Errachidia.

Selon notre interlocuteur, il est faux de penser que le diplôme de six ans ne
sera pas accepté en France. «La plupart des médecins roumains, qui ont fait
des études de six ans, partent en France. Les Français cherchent des bras
pour les gardes et savent que les étrangers qui arrivent mettront du temps
avant de devenir des médecins aguerris», poursuit-il.

Attirer les talents, notamment les professionnels de santé, fait l’objet d’une
compétition internationale importante. La France (qui attire, avec l’Allemagne,
jusqu’à 1.500 jeunes médecins marocains chaque année) a fait de ce sujet
une priorité, exprimée au plus haut sommet de l’État. Ainsi, lors de sa
déclaration de politique générale, le mardi 30 janvier, le nouveau premier
ministre français Gabriel Attal a fait part de sa volonté de régulariser la
situation des praticiens étrangers venus en France, confirmant ainsi l’objectif
annoncé quinze jours plus tôt par le président Emmanuel Macron. Gabriel
Attal est même allé plus loin, annonçant la nomination d’un émissaire «chargé
d’aller chercher à l’étranger des médecins qui voudraient venir exercer en
France».

Abdennasser Naji

PhD, President of IFEAS MENA, President of AMAQUEN Think Tank

https://journals.openedition.org/remmm/20346?lang=fr

Les enseignants contractuels au Maroc.


Entrée dans le métier et apprentissage « sur
le tas » de ses ficelles
Contract Teachers in Morocco. Entering the Profession and Learning
its Tricks on the Job

"‫ "عن طريق الممارسة‬، ‫ دخول المهنة وتعلم أسرارها ارتجااًل‬.‫المدرسون المتعاقدون في المغرب‬
Tarik Hari

https://fr.le360.ma/politique/enseignement-superieur-la-nouvelle-greve-des-etudiants-en-medecine-
est-elle-justifiee_Y6M63WKOU5FJZPXWWJELWGH24I/

https://fr.wikipedia.org/wiki/Syst%C3%A8me_
%C3%A9ducatif_au_Maroc

Vous aimerez peut-être aussi