Prevalence Des Infections Associees Aux Soins en R
Prevalence Des Infections Associees Aux Soins en R
Prevalence Des Infections Associees Aux Soins en R
Dicko H1, Kassogué A1, Soumaré M2, Beye SA1, Diallo B1, Coulibaly M3, Dembélé AS4, Tembiné L5, Keita M1,
Doumbia D1, Dao S2, Coulibaly Y1.
1
Département d’anesthésie-réanimation et des Urgences, CHU Point G, Bamako – Mali.
2
Service de Maladies infectieuses et tropicales, CHU Point G, Bamako – Mali.
3
Département d’Anesthésie-Réanimation et des Urgences, Hôpital Mère-enfant « le Luxembourg », Bamako - Mali.
4
Service d’anesthésie, CHU IOTA, Bamako – Mali.
5
Centre d’Infectiologie Charles Mérieux, Bamako – Mali.
Résumé
Introduction : Ce travail a été initié pour faire un état des lieux des infections associées aux soins en
réanimation et identifier les pathogènes en causes.
Méthodes : Une étude prospective descriptive a été menée en réanimation à l’hôpital universitaire du Point
G, Bamako. L’échantillon était constitué de 218 patients hospitalisés avec une durée de séjour de plus de
48 heures et qui ont été interrogés à l’aide d’un questionnaire standardisé. Notre étude s’est déroulée sur
une période de 09 mois, Septembre 2020 à Juin 2021.
Résultats : Notre étude a permis de recenser 64 patients atteints d’une infection associée aux soins. La
prévalence était de 29,4%. Le taux d’incidence global d’épisode infectieux était de 33,5%. On notait une
égalité entre les deux sexes avec un ratio de 1. L’âge moyen des patients était de 47,1 ± 22,2 ans. Les
facteurs de risque ont été : la gravité de l’état pathologique des malades, les comorbidités associées et la
fréquence des dispositifs médicaux invasifs. Parmi les infections associées aux soins, les bactériémies ont
été les plus fréquentes (44,8%.), suivies des infections urinaires (32,9%.) et des PAVM (22,3%).
L’hémoculture a été l’examen le plus réalisé (64) avec un taux de positivité de 50%. Les microorganismes
retrouvés étaient les entérobactéries (bacilles Gram négatifs fermentant) ont été plus fréquents avec 36,8%,
suivis des bacilles Gram négatifs non fermentant (23,7%), les levures (23,7%) et les Cocci Gram positif
(15,8%). La mortalité était de 68,8%.
Conclusion : au terme de cette étude, il ressort une augmentation de la prévalence des infections associées
aux soins en réanimation avec une mortalité élevée.
Mots clés : bactéries, infections associées aux soins, prévalence.
Abstract
Introduction: This work was initiated to make an inventory of healthcare associated infections in intensive
care and identify the pathogens involved.
Methods: A prospective descriptive study was conducted in intensive care at point G University Hospital,
Bamako. The sample consisted of 218 hospitalized patients with a length of stay of more than 48 hours and
who were interviewed using a standardized questionnaire. Our study took place over a period of 09
months, September 2020 to June 2021.
Results: Our study identified 64 patients with a healthcare-associated infections. The prevalence was
29.4%. The overall incidence rate of infectious episode was 33.5%. There was equality between the two
sexes with a ratio of 1. The average age of patients was 47.1 ± 22.2 years. The risk factors were: the
severity of the patients' medical condition, the associated comorbidities and the frequency of invasive
medical devices. Among healthcare-associated infections, bacteremia was the most common (44.8%),
followed by urinary tract infections (32.9%) and PAVM (22.3%). Blood culture was the most performed
examination (64) with a positivity rate of 50%. The microorganisms found were enterobacteria (fermenting
Gram-negative bacilli) were more common with 36.8%, followed by non-fermenting Gram-negative bacilli
(23.7%), yeasts (23.7%) and Gram-positive Cocci (15.8%). Mortality was 68.8%.
Conclusion: at the end of this study, there is an increase in the prevalence of infections associated with
intensive care with high mortality.
Keywords: bacteria, Healthcare-associated infections, prevalence.
lesquels 64 ont eu au moins une infection Chez 89,1% des patients une assistance
associée aux soins soit 29,4%. (Tableau I) respiratoire était nécessaire avec mise en place
Tableau I : les caractéristiques de la d’une prothèse endotrachéale. La durée
population d’étude moyenne d’assistance respiratoire était de 7,12
± 5,03 jours. Parmi les patients intubés, 71,8 %
Variable Effectif Fréquence (%)
ont dû être ré intubés au moins une fois. Les
Sexe
patients trachéotomisés étaient au nombre de 4.
Masculin 32 50
Les différents dispositifs invasifs utilisés sont
Féminin 32 50
répertoriés sur le tableau II. Dans tous les cas
Origine une sonde urinaire (SU) à demeure était mise
Même structure 45 70, 3 en place avec une durée moyenne de 11,06
Autre structure 19 20,7 jours ± 7,06. Les durées moyennes
Pathologies sous-jacentes d’exposition du cathétérisme veineux
Asthme 1 2,5 périphérique et central étaient de 11, 52 ±8,78
Diabète 11 27,5 jours et 9,60 ± 6,73 jours respectivement.
HTA 26 65,0 Parmi les sites d’insertion des CVC, la voie
Insuf. Rénale 2 5,0 fémorale était majoritaire dans 70,9 % suivie
Motif de la voie jugulaire interne avec 20 %.
Détresse 29 45,3 (Tableau III).
Respiratoire
Tableau III : les types d’infections associées
Détresse 21 32,8
Neurologique aux soins et les épisodes infectieux
Détresse 2 3,1 Episode IAS Effectif Fréquence (%)
Cardio- 1 épisode 25 53,2
circulatoire 2 épisodes 18 38,3
Détresse 7 10,9 3 épisodes 4 8,5
Métabolique Infections
Surveillance 5 7,9 Infections 25 32,9
Post opératoire urinaires
On notait une égalité entre les deux sexes avec Bactériémie 34 44,8
un ratio de 1. L’âge moyen des patients était de
47,1 ± 22,2 ans avec des extrêmes allant de 15 PAVM 17 22,3
à 90 ans. La détresse respiratoire était le motif IAS : infection associée aux soins
le plus fréquent d’admission des malades. Les PAVM : pneumopathie acquise sous
caractéristiques de la population d’étude sont ventilation mécanique
répertoriées sur le tableau I. Chez 62,5% des En ce qui concerne les infections, 64 patients
patients on retrouvait au moins une soit 29,35 % ont présenté au moins une
comorbidité dont l’hypertension artérielle était infection. Vingt-cinq patients ont présenté un
la plus fréquente avec 65% des cas. (Tableau seul site d’infection. Dix-huit patients ont
II). présenté deux infections de sites différents soit
Tableau II : les dispositifs médicaux invasifs 36 dont 15 bactériémies, 15 infections
utilisés selon leur durée urinaires et 6 PAVM et quatre patients ont
Variables Effectifs Fréquence (%) présenté 3 infections soit 12 dont 4
VVP 64 100,0 bactériémies, 4 infections urinaires et 4
VVC 58 90,6 PAVM. Le taux d’incidence global d’épisode
Sonde urinaire 64 100,0 infectieux était de 33,5%. Sur le tableau III
Sonde gastrique 60 93,8 sont retrouvés les différents types d’infections
Sonde IOT 57 89,1 associées aux soins et les épisodes infectieux.
Trachéotomie 4 6,3 Parmi les infections associées aux soins, les
Cathé sus –pubien 1 1,6 bactériémies étaient les plus fréquentes avec
Drain Thoracique 3 4,7 44.8% suivie de l’infection urinaire avec
Drain Abdominal 4 6,3 32.9%. Les PAVM ont occupé la troisième
VVP : voie veineuse périphérique cause d’infections associées aux soins avec
VVC : voie veneuse centrale 22.3%. (Tableau IV)
IOT : intubation oro-trachéale
Tableau IV : Les germes isolés selon les types Dans les bactériémies, les germes retrouvés
étaient Klebsiella pneumoniae (17.1%) suivis
d’IAS
d’Escherichia coli (12.8%) et de Candida
Germes isolés Bactériémie Inf. PAVM albicans (10.7%). Les infections urinaires ont
urinaire été causées en majorité par Candida albicans
BGN fermentant (24.4%) suivis d’Escherichia coli (14.7%).
K. pneumoniae 8 4 6 Acinetobacter baumanii (26.8%) a été le germe
Escherichia coli 6 6 6 le plus fréquent responsable de pneumopathie
E. cloacace 1 1 0 acquise sous ventilation mécanique suivi de
E. faecium 0 1 0 Klebsiella pneumoniae (23.1%) et Escherichia
Proteus hauseri 0 0 1 coli (23.1%). La mortalité était de 68,8%.
P. stuartii 0 1 0 Discussion
Panteoa Spp 1 0 0 L’objectif principal de cette étude était
BGN non fermentant d’estimer la prévalence des infections
A. baumanii 2 4 7 associées aux soins chez les patients
A. lwoffi 2 3 0 hospitalisés en milieu de réanimation au CHU
A. faecalis 4 0 2 du Point G et celle des microorganismes
P. aeruginosa 0 0 2 responsables. Pour répondre à cet objectif, une
S. ucimobilis 1 0 0 enquête prospective de 9 mois a été conduite
Cocci à Gram positif dans ce service. De nombreuses études ont été
E. faecalis 4 3 0 publiées concernant les infections associées
E. faecium 2 1 0 dans les pays développés et les pays en
E. gallinarum 0 1 0 développement et plus particulièrement en
S. haemolyticus 3 0 0 Afrique. La comparaison des taux de
S. aureus 1 0 1 prévalence rapportés dans notre travail avec les
S. hominis 2 0 0 valeurs rapportées dans certains pays
développés (USA, Canada, France et Belgique)
Levures
et en développement (Albanie, Brésil, Tunisie,
C. albicans 1 10 0
Maroc, RD Congo, Tanzanie) est difficile à
C. tropicalis 5 4 0
cause de différences d’ordre méthodologique.
C. lusitaniae 1 1 0
C. famata 1 0 0 Ces différences concernent les critères de
définition des infections associées aux soins, le
C. glabrata 0 1 0
mode de recueil de données, le nombre de sites
C. parapsilosis 1 0 0
infectieux investigués, ainsi que le type
C. laurentii 1 0 1
d’hôpital ou la capacité d’hospitalisation du
service étudié.
Chez les 64 patients infectés, 130 prélèvements
Nous avons observé une fréquence des
ont été effectués : dix-sept pour confirmer une
infections associées aux soins de 29,4% dans
PAVM, quarante-neuf examens
notre série. Cette fréquence se rapproche de
cytobactériologiques des urines.
celle trouvée par Géraud & al (7) dans le
L’hémoculture a été effectuée chez tous les cas
service de réanimation du CHU de point G en
suspects avec une positivité dans 50%. Le délai
2009 avec 26,7%, de Khairallah&al (8) en
de rendu des résultats microbiologiques était
Tunisie avec 25,6% en 2007.
4,8 jours avec un écart type de 2,21 pour
Cependant ce taux reste supérieur à celui
l’hémoculture ; 3,9 jours avec un écart type
trouvé dans le cadre de l’enquête nationale de
1,79 pour l’examen cytobactériologique des
prévalence (ENP) des infections nosocomiales
urines et 2,67 jours avec un écart type de 0,65
(IN) et des traitements anti-infectieux (AI) (2)
avec des extrêmes de 2 et de 4 jours. Quant à
réalisée en France en 2017 dans 403
l’analyse du liquide bronchique, les
établissements de santé (5,2%) ; Maiga
entérobactéries (bacilles Gram négatifs
A&al(6) ont trouvé 9,2% en 1999 dans le
fermentant) ont été plus fréquentes avec
service de réanimation du CHU du Point G ;
36,8%, suivies des bacilles Gram négatifs non
AbegheAngoué(9) avec ( 12,3%) dans 10
fermentant (23,7%), les levures (23,7%) les
services du CHU de point G en 2019 ; Kakupa
Cocci Gram positif (15,8%).
et al(3) aux Cliniques Universitaires de
Lubumbashi en République Démocratique du
Congo en 2016 (22,2%) ; Keita & al (10) dans prévention de ces infections repose avant tout
deux hôpitaux de Guinée Conakry en 2016 sur la maitrise des risques évitables et vise
(20%) . essentiellement la réanimation et les soins
Ce chiffre reste inférieur à ceux rapportés par intensifs. Elle consiste souvent en une
Oubihi&al (11) avec 38,5% en milieu de désinfection et une stérilisation soigneuse des
réanimation à MARRAKECH en 2015, appareils de ventilation, des aspirateurs et des
Secher I (12) en réanimation médico- nébuliseurs (22).
chirurgicale au CHU Angoulême (43,7%), Les bactériémies ont occupé la première place
Craven DE (13) dans 2 unités de soins intensifs parmi les IAS avec une fréquence de 44,8%.
au Pakistan (39,7%) . Ceci peut s’expliquer par la systématisation
Notre résultat montre une progression de la des prélèvements d’hémocultures chez les
prévalence d’IAS en réanimation par rapport patients qui ont répondu aux critères
aux études antérieures menées dans le service d’inclusions.
en 1999 (6) et en 2009 (7). Ceci pourrait Les infections urinaires ont été le deuxième
s’expliquer par l’absence de programme de type d’infections associées aux soins avec une
prévention et de surveillance des IAS dans nos prévalence de 32,9%. Le sondage urinaire
hôpitaux et l’insuffisance des mesures en représente l’un des principaux gestes de soins à
matière d’hygiène hospitalière. risque d’infection associée aux soins. La pose
Le taux d’incidence des IAS diminue dans les de sonde urinaire constitue le facteur de risque
pays développés ou la prévention des IAS est majeur des infections urinaires et exige qu’elle
devenue une priorité. Haley a démontré qu’un soit un acte médical (23). L’évaluation des
programme dont la surveillance est un axe pratiques de sondage et la mise en place de
central peut réduire l’incidence des IAS de mesures pour diminuer ce risque sont
plus de 30 % (14). Ces grandes tendances nécessaires. Ces actions vont de la suppression
illustrent les progrès en terme de techniques et des sondes inutiles à la limitation des sondes
de la qualité des soins (15). exploratrices et l’introduction du système de
Les données françaises s’appuient sur la sonde Clos.
surveillance nationale du réseau REA-Raisin, Notre enquête offre aussi une description de
qui l’écologie bactérienne liée aux infections
regroupe 213 services et presque la moitié des associées aux soins. Dans notre étude, 114
lits de réanimation français(16). microorganismes ont été isolés. Les
Quant aux sites de prédilection des IAS en entérobactéries (bacilles Gram négatifs
réanimation, la revue de la littérature montre fermentant) ont été plus fréquentes avec
que ce sont souvent les PAVM qui sont 36,8%, suivis des bacilles Gram négatifs non
prédominantes dans la plupart des pays tels fermentant (23,7%), les levures (23,7%) les
que la Turquie (17), la Chine (18) et l’Inde Cocci Gram positif (15,8%). Notre résultat est
(19) où les fréquences sont de l’ordre de 33 %, conforme aux données de la littérature(25,26).
68,4 % et 59,7 % respectivement suivies par Ces données sont comparables à celles
les infections urinaires sur sonde ou les rapportées par AngoueAbeghe qui a trouvé une
bactériémies primaires. Ces mêmes tendances fréquence plus élevée des entérobactéries
ont été aussi observées aux États-Unis(20), en (bacilles Gram négatifs fermentant) avec
France(2) et même en Tunisie (21). Cette 61,1%, suivis des bacilles Gram négatifs non
distribution des IAS selon le site anatomique fermentant (22,2%), les Cocci Gram positif
ne se confirme pas au sein du service de (11,1%) et les levures (5,5%) (9). Cependant,
réanimation du CHU Point G, lieu de cette Cherkaoui et al (26) au Maroc en 2016 ont
étude où les PAVM ont constitué 22,3% et trouvé un taux de bacille Gram négatif plus
elles ont été le troisième type d’infection élevé (60%), tandis que Oubihi(11) dans le
associée aux soins. Les infections pulmonaires même pays une année plus tôt avait trouvé un
étaient retrouvées fréquemment dans notre taux plus élevé de bacille Gram négatif
étude du fait du risque infectieux élevé chez les (72,9%), suivi des Cocci Gram positif (24,7%).
patients en soins intensifs portant des sondes Dans notre étude, les microorganismes les plus
nasogastriques ou trachéo-bronchiques. La fréquemment isolés étaient : Escherichia coli
ventilation artificielle constitue le principal (15,8%), Klebsiella pneumoniae (15,8%),
facteur de risque dans la survenue des Acinetobacter baumanii (11,4%) et Candida
infections pulmonaires nosocomiales (22). La albicans (9,6%).