Rciu
Rciu
Rciu
intra-utérin
Aspects cliniques et fondamentaux
Dans la même collection
Conseillers éditoriaux
Jacques Lansac, Philippe Descamps
Le retard
de croissance
intra-utérin
Aspects cliniques et fondamentaux
Coordonné par
Vassilis Tsatsaris
Préface de D. Cabrol
Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés, réservés pour tous pays.
Toute reproduction ou représentation intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, des pages publiées
dans le présent ouvrage, faite sans l’autorisation de l’éditeur est illicite et constitue une contrefaçon. Seules sont
autorisées, d’une part, les reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une uti-
lisation collective et, d’autre part, les courtes citations justifiées par le caractère scientifique ou d’information de
l’œuvre dans laquelle elles sont incorporées (art. L. 122-4, L. 122-5 et L. 335-2 du Code de la propriété
intellectuelle).
Je tiens à remercier les auteurs des différents chapitres pour leur contribution à ce projet et pour leur
remarquable énergie déployée au partage de leurs connaissances.
Vassilis Tsatsaris
V
Liste des auteurs
VII
Liste des auteurs
Morel Olivier, service de gynécologie-obsté- Tarrade Anne, UMR INRA-ENVA 1198 Biologie du
trique, CHU de Nancy, Nancy. Développement et Reproduction, Jouy-en-Josas.
Pannier Emmanuelle, maternité Port Royal, groupe Tsatsaris Vassilis, maternité Port-Royal, hôpital
hospitalier Cochin-Broca-Hôtel-Dieu, Paris. Cochin, AP-HP, DHU Risques et Grossesse,
Parat Sophie, service de médecine néonatale, hôpi- Université Paris-Descartes, fondation PremUP,
tal Cochin, AP-HP, DHU Risques et Grossesse, Paris.
Université Paris-Descartes, fondation PremUP, Vaiman Daniel, INSERM Equipe 21, U567
Paris. INSERM-UMR 8104 CNRS (Institut Cochin),
Picone Olivier, service de gynécologie-obsté- DHU Risques et Grossesse, Université Paris-
trique, médecine de la reproduction, hôpital Foch, Descartes, Paris
Neuilly. Vauloup-Fellous Christelle, laboratoire de viro-
Proulx Francine, service de gynécologie-obsté- logie, hôpital Antoine-Béclère, APHP, Université
trique, médecine de la reproduction, hôpital Paris XI, Clamart.
Antoine-Béclère, Clamart. Viot Géraldine, maternité Port-Royal, hôpital
Senat Marie-Victoire, service de gynécologie- Cochin, AP-HP, Paris-Descartes, fondation PremUP,
obstétrique, hôpital Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre. Paris.
VIII
Abréviations
IX
Abréviations
X
Préface
C'est un privilège et pour moi un réel plaisir que d'avoir à écrire une préface
pour un ouvrage consacré au retard de croissance intra-utérin, tant cette patho-
logie est un souci permanent pour les cliniciens périnatologistes. Cette ano-
malie du développement est une cause très importante de mortalité et de
morbidité périnatale volontiers associée à une prématurité, fréquemment
induite, mais qui a au-delà des conséquences morbides à moyen et à long terme
pour les survivants.
S'intéresser au retard de croissance intra-utérin, c'est aborder un problème
d'une grande complexité. À commencer par les définitions et la confusion fré-
quente entre retard de croissance intra-utérin, hypotrophie et « petit poids de
naissance »…
Cet ouvrage entend apporter quelques éclaircissements sur ces difficultés de
définition, mais aussi et surtout sur les physiopathologies et les étiologies mul-
tiples de ce syndrome. On mesurera à la lecture de ces chapitres l'immense
champ qui reste offert à la recherche dans ce domaine.
L'autre aspect développé dans cet ouvrage, et qui lui aussi ne peut que bénéfi-
cier du développement de la recherche, concerne la prise en charge pratique
actuelle pendant la grossesse, l'accouchement et la période postnatale de ces
mères et de ces enfants.
Les auteurs, chercheurs et cliniciens qui ont contribué à l'élaboration de ce
livre ont été choisis pour leur compétence dans ce domaine, qu'ils soient ici
remerciés pour leur participation. En ce qui concerne le coordinateur de l'ou-
vrage, je souhaite exprimer ma très grande considération pour le professeur
Vassilis Tsatsaris. J'ai la chance de travailler avec lui depuis de nombreuses
années, au court desquelles j'ai pu apprécier ses qualités et ses capacités
humaines et médicales.
Il a réussi à fédérer autour de lui des chercheurs et des cliniciens dont je ne
doute pas qu'ils nous aideront à progresser dans nos connaissances et partant
dans l'amélioration des soins que nous dispensons aux femmes enceintes et à
leurs nouveau-nés.
Professeur Dominique Cabrol
XI
Définition du retard Chapitre 1
de croissance intra-utérin
Jean-Patrick Le Meaux
lisé. Enfin, RCIU équivaut, en anglais, au terme chez un individu à la répartition des valeurs de cette
intra-uterine growth restriction (IUGR). variable dans la population, on utilise principale-
ment les unités de mesure descriptives suivantes.
3
Partie I. Définition et épidémiologie
4
Chapitre 1. Définition du retard de croissance intra-utérin
une prise en charge inutile). Les choix de la description générale des poids de naissance ne
variable utilisée, du référentiel et du seuil servant tenant pas compte des déterminants physiolo-
de norme sont déterminants dans l'optimisation giques de la croissance fœtale propres à l'individu
des performances diagnostiques. étudié (sexe, origine géographique, taille des
parents, etc.).
Choix de la variable Le développement de courbes de croissance indivi-
duelles ajustées (customisées) sur ces principaux
La variable utilisée pour diagnostiquer la patholo- déterminants physiologiques de la croissance
gie doit être aisément accessible à la mesure et dis- fœtale présente l'avantage de s'affranchir de ce
criminante. Sa mesure doit par ailleurs être valide biais de confusion. Ces courbes sont obtenues par
(représenter la réalité) et fiable (répétable et repro- modélisation mathématique de la croissance indi-
ductible). S'agissant du dépistage du RCIU, l'esti- viduelle d'un fœtus à partir de variables person-
mation échographique du poids fœtal (EPF) et la nelles (sexe fœtal, parité, origine géographique,
mesure du périmètre abdominal (PA) sont les plus taille et poids préconceptionnels de la mère). Le
couramment utilisées. Elles présentent des per- développement des modèles permettant la créa-
formances diagnostiques similaires. tion des courbes individuelles doit cependant être
propre à chaque population et nécessite donc un
Choix d'un référentiel important travail de recueil de données épidé-
miologiques et de validation de ces modèles.
L'utilisation d'un référentiel décrivant la distribu- Cette méthode représente vraisemblablement une
tion de la variable étudiée dans la population avancée importante dans l'amélioration des per-
générale permet de comparer la valeur observée formances du dépistage anténatal du RCIU.
chez l'individu soumis au dépistage. Cette distri-
bution doit correspondre à celle de la population Choix d'un seuil
dont est issu l'individu dépisté.
S'agissant de l’estimation du poids fœtal, les valeurs Le seuil choisi afin de considérer un individu
observées d'EPF chez les individus devraient être comme « malade » doit être le plus discriminant
idéalement comparées à des courbes décrivant la possible, en offrant une Se et une Sp maximales
répartition des EPF dans la population. Mais l'ab- afin de limiter le nombre de faux négatifs et de
sence de disponibilité de courbes d'EPF validées fait faux positifs.
souvent préférer, comme référentiel, les courbes de Un seuil trop élevé (20e percentile) dépistera la
poids de naissance. Cependant, l'utilisation de ces plupart des cas de RCIU (vrais positifs) mais
dernières est la source d'un biais de sélection res- considérera comme atteints de nombreux fœtus
ponsable d'une diminution de la Se du dépistage. En sains (faux positifs), source d'autant de prises en
effet, le RCIU représente un important facteur de charge inutiles voire iatrogènes. A contrario, un
risque de prématurité, principalement induite. La seuil trop faible (3e percentile) manquera nombre
proportion des fœtus atteints d'un RCIU augmente d'authentiques cas de retard de croissance (faux
donc avec la diminution de l'âge gestationnel (cor- négatifs), source de morbimortalité néonatale. Il
rélation négative). Ainsi, pour les âges gestationnels limitera cependant le nombre de faux positifs. Le
peu avancés, comparer l'EPF d'un individu à une seuil diagnostique communément admis, qu'il
distribution des poids de naissance pour cet âge, où s'agisse du PA ou de l'EPF, est le 10e percentile.
il existe une surreprésentation des cas de RCIU,
pourra mener à le considérer à tort comme eutrophe
(faux négatif), car au-delà du seuil diagnostique
communément admis. Pour s'affranchir de ce biais
Prévalence et conséquences du
inhérent aux courbes de poids de naissance, le seuil retard de croissance intra-utérin
diagnostique devrait donc diminuer avec l'augmen-
tation de l'âge gestationnel. Prévalence
Par ailleurs, les courbes d'EPF et de poids de nais- La fréquence théorique de l'hypotrophie et donc
sance en population ne représentent qu'une de sa cause, le RCIU, est de 10 %, car elle est
5
Partie I. Définition et épidémiologie
6
Chapitre 1. Définition du retard de croissance intra-utérin
McIntire DD, Bloom SL, Casey BM, Leveno KJ. Birth Neitzke U, Harder T, Plagemann A. Intrauterine growth res-
weight in relation to morbidity and mortality among triction and developmental programming of the meta-
newborn infants. N Engl J Med 1999 ; 340 (16) : bolic syndrome : a critical appraisal. Microcirculation
1234–8. 2011 ; 18 (4) : 304–11.
Meas T, Deghmoun S, Armoogum P, Alberti C, Levy- Paz I, Laor A, Gale R, Harlap S, Stevenson DK,
Marchal C. Consequences of being born small for ges- Seidman DS. Term infants with fetal growth restric-
tational age on body composition : an 8-year follow-up tion are not at increased risk for low intelligence
study. J Clin Endocrinol Metab 2008 ; 93 (10) : 3804–9. scores at age 17 years. J Pediatr 2001 ; 138 (1) : 87–91.
7
Conséquences Chapitre 2
médicoéconomiques
du retard de croissance
intra-utérin
Vassilis Tsatsaris, Antoine Agman
Les coûts médicosociaux liés au retard de crois- considérable. À titre d'exemple, un nouveau-né
sance intra-utérin (RCIU) sont mal évalués, mais prématuré et hypotrophe qui reste en réanima-
les données actuellement disponibles montrent tion pendant 21 jours puis passe en néonatologie
qu'ils sont majeurs. En effet, nous disposons de pendant 4 semaines représente un coût de
peu d'études s'intéressant précisément aux consé- 33 200 euros (évaluation T2A selon la grille 2007).
quences médicoéconomiques liées au RCIU. Le Par la suite, les enfants nés avec un RCIU néces-
plus souvent, il s'agit d'études pédiatriques s'inté- sitent un suivi pédiatrique vigilant et sont expo-
ressant aux coûts des enfants nés avec un très petit sés, à l'âge adulte, aux complications métaboliques
poids de naissance (low birth weight des Anglo- (diabète, troubles lipidiques) et aux maladies car-
Saxons), ce qui correspond essentiellement à des diovasculaires. Aux États-Unis, une évaluation du
enfants prématurés. Ces études ne tiennent pas surcoût des enfants de 0 à 15 ans nés avec un petit
compte des surcoûts prénatals liés à la prise en poids a été effectuée en 1995. Il représentait 6 mil-
charge obstétricale, des surcoûts périnatals liés à liards de dollars de plus que si ces enfants étaient
l'excès de morbidité des enfants hypotrophes par nés à terme et de poids normal. Les auteurs
rapport aux enfants eutrophes, ni des surcoûts concluaient que les coûts des enfants nés avec un
indirects à long terme liés aux conséquences petit poids de naissance représentaient 10 % de
métaboliques du RCIU (diabète, troubles lipi- tous les coûts de santé pédiatrique, et étaient plus
diques, maladies cardiovasculaires). Une étude importants que les coûts directs de personnes
réalisée au Royaume-Uni, publiée en 2009, a mon- séropositives pour le virus de l'immunodéficience
tré que la prise en charge jusqu'à l'âge de 18 ans humaine (VIH), tous âges confondus.
© 2012, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
9
Partie I. Définition et épidémiologie
(HAD) ou la surveillance par télémonitoring, dont biologiques était également significativement plus
les coûts ne peuvent être évalués par la comptabilité important. Au total, les coûts étaient de 10 087 €
des séjours hospitaliers conventionnels. Aucune éva- par patiente en cas de RCIU contre 955 euros par
luation du surcoût obstétrical n'est actuellement dis- patiente pour le groupe témoin. La part la plus
ponible dans la littérature. importante de ces surcoûts était liée aux journées
En 2011, nous avons réalisé une étude préliminaire d'hospitalisation conventionnelle et aux examens
du coût obstétrical de la prise en charge du RCIU biologiques. Cette étude, bien que grossière,
dans notre maternité. Il s'agissait d'une étude montre l'importance des surcoûts prénataux liés
rétrospective cas/témoin portant sur 35 patientes au RCIU et confirme la nécessité de les évaluer
présentant une RCIU et 35 patientes avec une plus précisément.
grossesse menée à terme sur la même période. Il ne
s'agissait que de grossesses uniques. Nous avons
effectué une évaluation des coûts maternels directs
à partir du moment où le RCIU a été diagnostiqué
Surcoûts pédiatriques liés au
jusqu'à la sortie de la maternité. Comme attendu, retard de croissance intra-utérin
les patientes du groupe RCIU présentaient
significativement plus de césariennes (83 % contre Le surcoût économique lié aux enfants de petit
17 %), plus de prééclampsies (71 % contre 8 %), poids de naissance a été évalué à 10 % des dépenses
un âge gestationnel à la naissance plus précoce de santé pédiatrique aux États-Unis. Une aug-
(33 semaines d'aménorrhée [SA] + 5 j contre 40 SA mentation de 250 g de poids de naissance ferait
+ 4 j) et un poids de naissance plus faible (1391 g réaliser une économie de 12 000 à 16 000 $ de
contre 3332 g). On notait plus de consultations soins durant la première année de vie.
spécialisées, notamment dans l'unité de diagnostic Une récente étude norvégienne a évalué les coûts
anténatal, plus de gestes invasifs (amniocentèses, directement liés aux hospitalisations d'enfants nés
biopsies de villosités choriales), plus d'hospitalisations avec un petit poids de naissance (< 1500 g). La
conventionnelles mais aussi en hôpital de jour ou en durée d'hospitalisation est d'autant plus impor-
HAD. Comme précédemment décrit dans la tante que l'âge gestationnel à la naissance était
littérature, le nombre d'échographies et d'examens précoce. Comme le montre la figure 2.1, les coûts
180 000
Initiale
160 000 1re année
2e année
140 000 3e année
4e année
120 000
100 000
€
80 000
60 000
40 000
20 000
0
23 24-25 26-27 28-29 30-31 ≥ 32 Tous
Âge gestationnel à l’accouchement
Figure 2.1. Coûts liés aux hospitalisations lors des 4 premières années après la naissance.
D'après Korvenranta et al., 2010.
10
Chapitre 2. Conséquences médicoéconomiques du retard de croissance intra-utérin
étaient majeurs (en moyenne 100 000 € par enfant Tableau 2.1. Morbidité néonatale parmi
né entre 26 et 28 SA) et directement liés à l'âge les enfants prématurés nés hypotrophes
gestationnel à la naissance. ou eutrophes.
Une seconde étude réalisée par la même équipe a Poids de naissance
évalué l'impact des très petits poids de naissance ≤3 e
25e–75e
sur les coûts de santé pendant les 5 premières percentile percentile
années de vie. Cette étude a montré qu'au-delà des pH artériel au cordon 1,3 % 0,9 %
coûts liés aux séjours hospitaliers prolongés, les < 7,0
enfants nés avec un petit poids de naissance VIH grade 3 ou 4 3,2 %* 1,5 %
(< 1500 g) sont très consommateurs de soins
extrahospitaliers, et cela était également d'autant Complications 22,5 %* 12,6 %
respiratoires avec
plus marqué que l'âge gestationnel à la naissance ventilation mécanique
était précoce (figure 2.2).
Entérocolite 1,1 % 0,6 %
Comme nous l'avons vu, ces coûts ne concernent
pas spécifiquement les enfants hypotrophes, mais Sepsis 2,1 % 1,2 %
tous les enfants prématurés. On peut penser que les Décès 6,9 %* 2,0 %
coûts de santé sont plus importants pour les enfants * Différence significative.
hypotrophes que pour les enfants eutrophes. En D'après McIntire et al., 1999.
effet, il est maintenant bien démontré que les
enfants hypotrophes présentent un excès de mor-
bidité par rapport aux enfants eutrophes. L'étude Surcoûts à long terme liés au
princeps est celle de McIntire publiée dans le New retard de croissance intra-utérin
England Journal of Medicine en 1999 (tableau 2.1),
mais ces données ont été confirmées dans l'étude Une étude américaine publiée en 2010 a évalué
Epipage par Larroque et al. le devenir à l'âge adulte des individus nés avec
3500
3000
2500 Autres
Orthophonistes
Infirmières
2000 Psychologues
Euros Kinésithérapeutes
1500 Diététiciens
Hospitalisations
Cs hors urgences
1000
Cs aux urgences
500
0
24-25 26-27 28-29 30-31 32+ Terme
Âge gestationel (SA)
Figure 2.2. Coûts moyens lors de la 5e année de vie en fonction du terme de naissance.
D'après Korvenranta et al., 2010.
11
Partie I. Définition et épidémiologie
12
Biométries fœtales1 Chapitre 3
Gilles Grangé
1. Ce chapitre est issu de l'ouvrage Guide pratique de l'échographie obstétricale et gynécologique, de G. Grangé, hors
collection, Elsevier-Masson, 2012.
13
Partie I. Définition et épidémiologie
14
13
12
Âge gestationnel et SA
11
10
9
8
7
6
5
4
0 10 20 30 40 50 60 70 80
LCC en mm
Figure 3.2. Courbe de l'âge gestationnel (en semaines d'aménorrhée) en fonction de la longueur
craniocaudale (en millimètres).
D'après Wisser et coll., 1994.
neutre : la tête ne doit être ni fléchie, ni en hyper transverse et la longueur de la diaphyse fémorale
extension. La mesure se fait du sommet de la tête (appelée « fémur » en clinique). Parmi ces quatre
jusqu'à la partie la plus basse des fesses (l'extré- paramètres, c'est le PC qui est le plus précis, même
mité caudale). en cas de retard de croissance intra-utérin (RCIU)
Cette mesure est rendue au millimètre près (tableau 3.1).
(figure 3.2). Une mesure au dixième de millimètre Plus la date de l'accouchement se rapproche et
n'a aucun sens, car d'une part elle dépasse les capa- plus la datation est difficile. Vers 32 semaines
cités biophysiques des ultrasons, et d'autre part elle d'aménorrhée (SA), le PC permet une datation à
serait bien en deçà de la variabilité intraobserva- ± 3 semaines, alors qu'elle est de ± 2 semaines
teur de cette mesure. vers 22 SA (au 95e percentile). En cas de difficul-
Plusieurs courbes de référence existent dans la lit- tés persistantes après cette première échographie
térature. Elles sont cohérentes entre 10 et 60 mm. tardive, une deuxième peut être proposée 2 à
Ce n'est pas le cas en deçà ou au-delà. La meilleure 3 semaines plus tard pour évaluer la croissance
variabilité se trouve dans cet intervalle. Il faut et conclure sur le terme.
donc attendre au moins 10 mm de longueur La datation de grossesse consiste actuellement à
embryonnaire pour faire une datation précise. estimer la date la plus probable de début de gros-
L'intervalle de prédictivité de la LCC est de ± 3 jours sesse grâce à l'échographie et à l'interrogatoire. En
pour 75 % des embryons, de ± 4 jours pour 90 % des fait, plusieurs travaux ont montré que l'échogra-
embryons, de ± 5 jours pour 95 % des embryons et phie était plus précise pour calculer la durée res-
de ± 8 jours pour la quasi-totalité des embryons. tante de la grossesse plutôt que la durée déjà
Ces chiffres sont communs à toute la littérature. écoulée. Comme la date exacte de conception nous
intéresse peu, il est probable qu'un jour nous date-
Ainsi, retenons l'intervalle de prédictivité au
rons les grossesses en temps restant théorique.
95e percentile : ± 5 jours, c'est-à-dire 10 jours. Ces
notions sont applicables quelles que soient les cir-
constances ou les variabilités maternelles.
Biométries de croissance
Deuxième et troisième trimestres
Définitions
Aux deuxième et troisième trimestres, quatre para-
mètres ont été étudiés largement dans la littérature : La biométrie de trophicité a pour objectif de
le diamètre bipariétal, le PC, le diamètre cérébelleux dépister une hypotrophie. L'hypotrophie est par
14
Chapitre 3. Biométries fœtales
15
Partie I. Définition et épidémiologie
16
Chapitre 3. Biométries fœtales
que la focale se mette automatiquement à mi-hau- dans la littérature pour interpréter des courbes de
teur de l'image en regard du fémur. Celui-ci doit croissance, comme la biométrie conditionnelle ou
être parfaitement horizontal sur l'écran afin que, d'autres évaluations chiffrées de la vitesse de
notamment au troisième trimestre, les épiphyses croissance. En pratique, ces méthodes sont seule-
n'apparaissent pas échogènes (figure 3-5). ment intéressantes pour la recherche. D'autres
Il faut également être attentif aux images qui peuvent paramètres de croissance ont été étudiés dans la
se situer entre la sonde et le fémur, particulièrement littérature comme l'épaisseur de la graisse sous-
un membre supérieur. En effet, un cône d'ombre lié cutanée, la distance joue à joue, etc. Tous se sont
à un avant-bras peut se projeter en regard d'une révélés de performance inférieure à la mesure du
extrémité fémorale raccourcissant artificiellement PA seul.
la mesure. L'image doit être suffisamment agran-
die pour occuper les deux tiers de l'écran. Quel est le meilleur paramètre
Les épiphyses ne doivent pas être prises dans la pour dépister un retard
mesure. Seule la diaphyse est prise en compte. Il
s'agit donc de la mesure de la seule diaphyse
de croissance intra-utérin ?
fémorale. L'examen des courbes ROC (receiver operating
À l'échographie, ce n'est pas toute l'épaisseur de la characteristics) comparant les différents para-
diaphyse fémorale qui est visible, mais sa surface. mètres échographiques montre la supériorité du
En effet, la différence d'impédance entre la struc- PA sur les autres paramètres échographiques et
ture osseuse et musculaire est telle que tous les son égalité avec l'estimation du poids fœtal
ultrasons sont réfléchis. En dessous, un cône (EPF) dans les populations à bas risque.
d'ombre est visible. C'est donc ce paramètre qui doit retenir l'attention.
Ainsi, si le fémur n'est pas parfaitement horizontal, Il faut être extrêmement prudent dans l'interpréta-
une image en club de golf est visible : c'est la lar- tion des autres mesures. En effet, un PA ou un fémur
geur de la diaphyse à sa jonction avec l'épiphyse. aux alentours du 3e percentile n'ont pas de significa-
tion particulière si leur croissance est régulière.
Performances d'une échographie La tentation habituelle consiste à rechercher un
maximum de paramètres pour augmenter la sensi-
La France offre une échographie au troisième tri- bilité au détriment de la spécificité. En réalité, si le
mestre de la grossesse aux environs de 32 SA. paramètre n'est pas adapté à ce qui est recherché, la
Plusieurs études ont recherché la performance de spécificité baisse et la sensibilité n'est pas améliorée.
cette échographie pour dépister les fœtus hypo- Dans les populations à haut risque de RCIU, un
trophes. Pour une spécificité de 95 %, l'ensemble des critère composite comme l'EPF est préférable. Il
études montrent une sensibilité de 50 % environ. convient d'associer au moins le fémur à la mesure
La performance de l'échographie est donc modeste du PA, ce qui se fait grâce à une formule d'estima-
si l'on considère de façon isolée l'examen du troi- tion de poids fœtal. La littérature en montre plu-
sième trimestre. Mais ce dernier doit être interprété sieurs intéressantes.
dans son contexte, c'est-à-dire : en fonction de Par son ancienneté, son universalité et son
l'échographie du deuxième trimestre, des antécé- adaptation à toutes les populations, c'est la for-
dents, du déroulement de la grossesse, de l'examen mule de Hadlock qui est la plus utilisée à travers
clinique, et si nécessaire des Doppler et de la vitalité le monde.
fœtale au sens large.
Pour améliorer les performances de l'échogra-
phie, il n'y a pas lieu de faire systématiquement log10 EPF = 1,326 + 0,0107 PC + 0,0438
une échographie supplémentaire en fin de gros-
sesse, sauf de façon argumentée par le clinicien. (
PA + 0,158 LF + 0,00326 PA × LF )
La performance de l'échographie pour dépister
un RCIU dépend de nombreux paramètres. Elle existe aussi avec deux paramètres (PA et lon-
Différentes méthodes mathématiques existent gueur du fémur [LF]) ou quatre (BIP, PC, PA et LF).
17
Partie I. Définition et épidémiologie
Elle est parfaitement adaptée aux hypotrophes au-dessus du 95e percentile), la différence entre
de toute étiologie dont ceux d'origine vascu- deux mesures est au-delà de ces chiffres.
laire, aux fœtus de poids standard et aux Par exemple : pour un PA de 200 mm, 95 % des
macrosomes. mesures d'un opérateur donné doivent être entre
Dans des mains entraînées, la qualité de la mesure 194 et 206 mm et pour deux opérateurs différents,
du PA n'est pas touchée par la quantité de liquide entre 190 et 210 mm. Ceci tient notamment à
amniotique ou le nombre de fœtus. Il convient l'obliquité de la coupe.
d'être minutieux et patient pour obtenir la meil-
leure coupe.
Il est préférable de prendre en compte la mesure du Conclusion
meilleur cliché, plutôt qu'une moyenne qui ne
serait alors que le reflet de l'imprécision de Au premier trimestre, la datation est la plus pré-
l'opérateur. cise pour une LCC entre 10 et 60 mm. Aux deu-
xième et troisième trimestres, c'est le PC qu'il faut
utiliser, quelles que soient les circonstances. Le
Pièges de la biométrie de trophicité meilleur paramètre pour évaluer la croissance
Quand a débuté la grossesse ? fœtale est le PA en population à bas risque ou
l'EPF en population à haut risque. Le paramètre
Avant de suspecter une hypotrophie, il faut véri- doit être évalué à plusieurs reprises au cours de la
fier la date de début de grossesse par tous les grossesse. Son analyse est inséparable d'une
moyens cliniques et échographiques possibles. approche de la vitalité fœtale et de l'examen
Doppler. L'approche de la biométrie de trophicité
Combien de temps faut-il entre se fait donc différemment en dépistage ou en
deux examens biométriques ? population à risque. Un quelconque facteur de
risque amène à augmenter le seuil de vigilance (le
Il existe une variabilité inter- et intraobservateur 10e percentile est utilisé), c'est-à-dire la sensibilité
sur les mesures biométriques. La croissance au détriment de la spécificité. En l'absence de fac-
fœtale entre deux examens doit donc être suffi- teur de risque, il faudra privilégier la spécificité,
sante pour être au-dessus de cette variabilité. En c'est-à-dire diminuer les faux positifs en baissant
pratique, pour deux opérateurs différents, il faut le seuil d'alerte (le 3e percentile est utilisé).
au moins 2 semaines d'intervalle pour que la pro-
babilité de conclure à tort à une hypotrophie soit
de moins de 10 %, l'idéal étant d'attendre
Références
3 semaines. Un examen biométrique a été fait au Altman DG, Chitty LS. New charts for ultrasound dating
temps T1 et un autre au temps T2 ; chaque mesure of pregnancy. Ultrasound Obstet Gynecol 1997 ; 10
est entachée d'une erreur (imprécision) liée à la (3) : 174–91.
variabilité alors que la croissance fœtale représen- Grangé G, Pannier E, Goffinet F, Cabrol D, Zorn JR.
tée par la courbe est régulière. Il suffit que la Dating biometry during the first trimester : accuracy
of an everyday practice. Eur J Obstet Gynecol Reprod
mesure au temps T1 ait été un peu surestimée et
Biol 2000 ; 88 (1) : 61–4.
celle au temps T2 un peu sous-estimée pour qu'il
Grangé G, Pannier E, Goffinet F, Zorn JR, Cabrol D.
soit conclu à tort à un RCIU. Ainsi, avec deux opé- Précision de la biométrie de datation a l'échographie
rateurs différents, à 32 et 34 SA, la probabilité de du premier trimestre dans la pratique courante.
conclure à tort à un RCIU est de 17 %. J Gynécol Obsté Biol Reprod 2003 ; 32 (3Pt 1) : 221–6
(Paris).
Hadlock FP, Harrist RB, Carpenter RJ, Deter RL, Park
Variabilité de la mesure SK. Sonographic estimation of fetal weight. The
du périmètre abdominal value of femur length in addition to head and abdo-
men measurements. Radiology 1984 ; 150 (2) :
Au 95e percentile, la variabilité interobservateur 535–40.
est de 5 % et la variabilité intraobservateur de 3 %. Jouannic JM, Grangé G, Goffinet F, Benachi A, Carbrol D.
C'est-à-dire que pour 1 fœtus sur 20 (les 5 % Validity of sonographic formulas for estimating fetal
18
Chapitre 3. Biométries fœtales
weight below 1250 g : a series of 119 cases. Fetal Salomon LJ. Comment déterminer la date de début de
Diagn Ther 2001 ; 16 : 254–8. grossesse ? J Gynécol Obstét Biol Reprod (Paris) 20
Kayem G, Grangé G, Bréart G, Goffinet F. Comparison of 11 ; 40 (8) : 726–33 (Paris).
fundal height measurement and sonographically Salomon LJ, Duyme M, Crequat J, Brodaty G, Talmant C,
measured fetal abdominal circumference in the pre- Fries N, et al. French fetal biometry : reference equa-
diction of high and low birth weight at term. tions and comparison with other charts. Ultrasound
Ultrasound Obstet Gynecol 2009 ; 34 (5) : 566–71. Obstet Gynecol 2006 ; 28 (2) : 193–8.
Mongelli M, Ek S, Tambyrajia R. Screening for fetal Wisser J, Dirsheld P. Estimation of gestationnal age by
growth restriction : a mathematical model of the transvaginal sonographic measurement of grea-
effect of time interval and ultrasound error. Obstet test embryonic length in dated human embryos.
Gynecol 1998 ; 92 : 908–12. Ultrasound Obstet Gynecol 1994 ; 4 : 457–62.
19
Courbes de croissance Chapitre 4
et définition du retard
de croissance intra-utérin
Anne Ego
L'impact de la prématurité et du retard de crois- aussi de faire un état des lieux sur leur évaluation
sance intra-utérin (RCIU) sur la santé périnatale dans la littérature, et de discuter les implications
est connu depuis très longtemps. Cependant, liées à leur utilisation dans la pratique clinique en
dans les années 1950–1960, l'âge gestationnel à médecine périnatale.
l'accouchement était mal connu ; les larges études
étudiant la relation entre poids et morbidité péri-
natale ont donc utilisé le critère grossier mais pré-
cis du faible poids de naissance, souvent considéré
Courbes de poids en population
comme un poids inférieur à 2500 g. Or il était bien Le poids de naissance est une mesure simple d'im-
sûr indispensable de distinguer le faible poids de portance majeure dans l'analyse et la surveillance
naissance de la prématurité et du RCIU. de la santé périnatale. La distribution du poids est
Les premières courbes de poids de naissance selon un des 10 indicateurs de santé fœtale et néonatale
l'âge gestationnel à l'accouchement ont été publiées utilisés dans l'étude PERISTAT de 2003. Depuis
dans les années 1960, rapidement suivies par de près d'un siècle, les courbes de poids à la naissance
nombreuses courbes de référence dans chaque se sont succédé dans la littérature. À partir des
pays. Ont suivi plus récemment des courbes de mots clés « norms », « references », « standards »,
référence de poids fœtal in utero. Ces deux types « charts » ou « curves », et de « fetal birthweight » ou
de courbe ont permis d'identifier les enfants de « neonatal birthweight », on peut recenser dans
petit poids pour un âge gestationnel donné, ce PubMed environ 80 références bibliographiques
défaut de poids étant défini par rapport au poids internationales présentant des courbes de poids.
moyen pour l'âge gestationnel. Les connaissances Certaines références ont maintenant plusieurs
sur ce facteur de risque, son contexte d'apparition
© 2012, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
La question de la définition du RCIU n'est cepen- courbe de croissance depuis les recommandations
dant pas résolue. Ces 20 dernières années, un nou- de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en
veau concept selon lequel la norme de poids doit 1978. Il reste néanmoins difficile pour les clini-
être définie individuellement pour chaque enfant, ciens de trouver une courbe qui les satisfasse tota-
selon son potentiel de croissance, est largement lement. Beaucoup sont basées sur des séries
débattu. L'objectif de ce chapitre est de présenter hospitalières et présentent des biais de sélection
les différentes courbes de croissance existantes en liés à l'environnement de la population concernée,
montrant leurs principes de construction. C'est à ses caractéristiques sociodémographiques ou à la
21
Partie I. Définition et épidémiologie
particularité des services. Les courbes les plus 1967 à 1998 montre un gain de poids moyen à
anciennes regroupent fréquemment filles et gar- 40 semaines de 3,68 ± 0,05 g par an, soit un gain
çons, d'autres, plus récentes, multiplient au d'environ 100 g en 30 ans. On constate cette
contraire les paramètres de spécification du poids, même tendance dans l'Enquête nationale périna-
donnant des références par sexe, parité, ethnie… tale entre 1981 et 1995, avec une augmentation
ce qui complique leur utilisation. du poids des garçons de 3 459 à 3 510 g et des
De nombreuses disparités sont observées dans filles de 3 313 à 3 361 g à 40 semaines d'aménor-
les seuils de poids retenus par ces courbes. Elles rhée (SA). Cette évolution pourrait s'expliquer
s'expliquent par les caractéristiques des popula- dans certains pays par l'augmentation de l'indice
tions sélectionnées, ainsi que par des facteurs de masse corporelle en début de grossesse et de la
méthodologiques. prise de poids en cours de grossesse, ainsi que
par la diminution du tabagisme maternel.
Facteurs expliquant
les différences observées Origine des populations
Entre pays ou population, le travail réalisé par l'In-
Rôle du facteur temps ternational Collaborative Effort (ICE) on Birthweight
On constate d'importantes disparités du poids a montré que les écarts constatés sont parfois consi-
de naissance moyen à 40 semaines d'un pays à dérables. L'étude EuroNatal réalisée en Finlande,
l'autre, mais aussi d'une période à une autre Suède, Norvège, Danemark, Écosse, Pays-Bas et
dans des échantillons issus d'un même pays Belgique a vérifié l'hypothèse que le poids optimal
(figure 4.1). Globalement, on voit une tendance à moyen par population (celui associé à la plus faible
l'augmentation du poids de naissance au cours mortalité périnatale) était variable, et a conclu à
des décennies, et il existe des variations impor- l'importance de développer des références de
tantes de cette augmentation d'un pays à l'autre. poids de naissance spécifiques à chaque pays.
Plusieurs décennies se sont écoulées depuis la Compte tenu de l'origine ethnique et des caracté-
publication des premières courbes de croissance, ristiques anthropométriques d'une population,
et quelques travaux ont montré que le poids de la parité des femmes, des comportements ali-
moyen des nouveau-nés à terme a augmenté de mentaires, des caractéristiques géographiques du
50 à 100 g en une vingtaine d'années au Canada, lieu de résidence des patientes (l'altitude plus
au Royaume-Uni, en Finlande ou en Inde. particulièrement), le poids moyen des nouveau-
L'étude du registre des naissances en Norvège de nés peut varier de quelques centaines de grammes
3700
3650 Norvège
3600 RU
Suède Canada
3550 Irlande RU
Canada Australie
3500 Canada Allemagne USA
Poids (g)
3450
RU RU Italie Allemagne
3400 France
France
3350
3300
USA
3250
USA
3200
1950 1960 1970 1980 1990 2000
Année d’inclusion
Figure 4.1. Poids moyen (ou 50e percentile) à 40 semaines d'âge gestationnel suivant les années
d'inclusion dans les courbes étudiées.
D'après Ego et al., 2006.
22
Chapitre 4. Courbes de croissance et définition du retard de croissance intra-utérin
3700
3200
Poids moyen (g)
2200
1700
32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44
Âge gestationnel (sem)
Figure 4.2. Poids moyen en fonction de l'âge gestationnel dans les courbes de poids à la
naissance au Royaume-Uni.
D'après Ego et al., 2006.
23
Partie I. Définition et épidémiologie
aboutissent à l'exclusion de 7,5 % de la popula- diabète…) étant plus fréquentes parmi les nais-
tion. La proportion de mères d'origine étrangère sances prématurées, cette sélection concerne
selon les échantillons peut aussi expliquer des plus fréquemment les petits âges gestationnels
écarts importants. que les enfants à terme. Cette perte d'effectif
peut poser des difficultés en réduisant les effec-
Choix de la population et norme tifs déjà faibles de l'extrême prématurité.
Dans l'ensemble des courbes disponibles dans la
littérature, la plupart des auteurs sélectionnent un Aspects méthodologiques
échantillon de nouveau-nés « en bonne santé », de dans la construction des
croissance supposée optimale, plutôt qu'un échan-
tillon représentatif de la population générale. Pour
courbes de poids de naissance
l'obstétricien ou le pédiatre, une bonne courbe de Datation clinique ou
poids est une courbe qui permettra d'identifier
échographique de la grossesse
correctement un retard de croissance, en raison
de son association avec la morbidité et la morta- Au fil des années, l'échographie obstétricale a
lité néonatales. La préoccupation liée au dépis- supplanté l'utilisation de la date des dernières
tage du retard de croissance est privilégiée par règles pour dater la grossesse. D'une courbe de
rapport à la perspective de décrire l'ensemble de la poids à la naissance à l'autre, la datation est tantôt
population. Dans le premier cas, l'échantillon doit basée sur la date des dernières règles seule, ou
sélectionner des nouveau-nés dont la croissance associée à la clinique, tantôt échographique seule,
est idéale, nouveau-nés qu'on peut qualifier de tantôt mixte. Le retentissement de l'utilisation de
« supernormaux » ; dans le second, l'échantillon de l'une ou l'autre de ces méthodes n'est pas négli-
population doit être représentatif de l'ensemble des geable, et le débat opposant les deux méthodes
nouveau-nés. dans la construction des courbes est ancien.
Lorsqu'une courbe de poids est réalisée avec l'en- Lorsque la date des dernières règles est utilisée,
semble de la population, elle donne le poids moyen des métrorragies du premier trimestre peuvent
des nouveau-nés, quel que soit leur état de santé. être confondues avec un cycle menstruel et le
Elle est un indicateur descriptif de santé périnatale terme de la grossesse est alors sous-estimé. Mais
qui peut être comparé d'une population à l'autre le plus souvent, la mesure de l'âge gestationnel est
ou dans le temps. La sélection d'enfants vivants surestimée, en raison de l'allongement de la phase
sans pathologie répond à un autre objectif, celui folliculaire qui retarde la date de la fécondation.
d'utiliser la courbe de poids comme un outil de D'après Kramer et al., sur 8 nouveau-nés considé-
dépistage du retard de croissance. L'utilisation rés comme post-terme (42 semaines et plus) avec
d'une courbe « supernormale » conduit à définir la datation échographique, 7 sont en réalité des
des seuils de poids de naissance plus élevés et per- enfants à terme lorsque la date des dernières règles
met le dépistage de davantage d'enfants de petit est utilisée. Cette erreur aboutit à l'observation de
poids pathologique. Les limites fixant la « norma- poids de naissance relativement bas chez des
lité » sont variables suivant les auteurs. enfants considérés comme post-termes, et
À l'exception de quelques courbes, la population explique en partie l'infléchissement des courbes
d'analyse élimine très fréquemment les mort- de croissance au-delà de 40 semaines, par exemple
nés. Les critères d'exclusion parfois très nom- celle de Milner et al. (figure 4.2). Cette diminu-
breux – mort-nés, grossesses gémellaires, tion du poids post-terme n'a pas d'explication
pathologies maternelles (infection, diabète, ané- physiologique, et les courbes échographiques ne
mie, infection urinaire…) et fœtales (malforma- retrouvent pas cette tendance. En pratique cli-
tions) – aboutissent à éliminer jusqu'à 25 % de la nique, lorsque la mesure de l'âge gestationnel est
population dans certains cas. La variabilité de différente de celle utilisée dans la courbe, l'esti-
ces critères rend difficiles les comparaisons mation de la proportion de retards de croissance
entre courbes de poids à la naissance. Enfin, les peut être sur- ou sous-estimée.
affections retenues (mort-nés, malformations et Mongelli et al. ont étudié plusieurs stratégies de
anomalies congénitales, pathologie vasculaire, datation : l'échographie a une meilleure valeur
24
Chapitre 4. Courbes de croissance et définition du retard de croissance intra-utérin
prédictive de la date d'accouchement chez les en moyenne 120 g de plus que les filles à 40 SA.
enfants à terme que l'association échographie- Les courbes par sexe semblent néanmoins peu
date des dernières règles ou la date des dernières utilisées en France : on peut supposer que la prise
règles seule. Cependant, la datation échogra- en compte du sexe fœtal complique la surveillance
phique peut entraîner des erreurs, car elle utilise de la croissance, et rend plus difficile le respect du
la biométrie fœtale – la taille et donc indirecte- choix des parents de connaître ou non le sexe de
ment le poids du fœtus – pour déterminer l'âge leur enfant.
gestationnel, et est affectée par les variations de
ceux-ci. Une étude canadienne portant sur la dif-
férence entre datation clinique et échographique a
Gestion des aberrations
montré que lorsque la datation basée sur la date entre âge gestationnel et poids
des dernières règles était supérieure à la datation La construction de courbes de poids à la naissance
échographique de 7 jours et plus, le poids de nais- fait appel à l'utilisation de bases de données
sance moyen des nouveau-nés était plus faible que importantes issues d'un recueil de données en
le poids des enfants dont les datations concor- routine dans des registres de naissance ou des
daient. Cette association restait significative après maternités. L'étude de la qualité des données doit
ajustement sur les facteurs physiologiques et tenir compte en particulier de la cohérence entre
pathologiques affectant le poids fœtal. âge gestationnel et poids. L'hypothèse sous-
Une datation plus élevée à partir de la date des jacente est que la distribution du poids par âge
dernières règles est plus fréquente pour les fœtus gestationnel doit être normale. Les erreurs consta-
de sexe féminin, les fœtus malformés, les primi- tées sont de diverses origines : le plus souvent, il
pares, les fumeuses, et les mères présentant cer- s'agit d'erreurs humaines, de saisie en particulier,
taines pathologies pendant la grossesse. On peut qui sont indépendantes du poids et de l'âge
donc supposer que l'observation d'une petite taille gestationnel.
– et donc indirectement d'un petit poids – en Selon l'âge gestationnel, les erreurs ont des consé-
début de grossesse amène à sous-estimer le terme quences différentes. Des erreurs aléatoires clas-
de la grossesse, et à augmenter l'écart entre data- sant à tort des prématurés parmi les enfants à
tion échographique et clinique. La datation écho- terme influencent peu la distribution du poids à
graphique tend donc à gommer les différences de terme, alors que des erreurs classant des enfants à
poids, en donnant un âge gestationnel moindre terme parmi les prématurés ont un retentisse-
aux petits fœtus, et inversement un terme supé- ment plus important en raison du faible effectif
rieur aux grands – gros – fœtus. Les conséquences des prématurés (figure 4.3). Ainsi, lorsqu'on
sur une courbe de poids à la naissance sont de res- représente la distribution du poids de naissance
serrer les 10e et 90e percentiles autour de la par âge gestationnel, le poids moyen aux petits
moyenne. En pratique, la datation échographique âges gestationnels peut être dévié « vers la droite »
est donc vraisemblablement plus exacte, mais et le 90e percentile être surestimé en raison de
diminue l'identification des enfants porteurs de quelques enfants présentant un poids important
retard de croissance et de macrosomie. incompatible avec l'âge gestationnel. On peut
constater des écarts importants dans ce cas entre
Courbes par sexe 50e percentile et moyenne.
Le sexe du nouveau-né modifie le poids de façon Certains auteurs proposent d'éliminer clinique-
majeure indépendamment d'autres facteurs, et le ment les datations aberrantes par l'utilisation du
poids plus faible des filles par rapport aux garçons score de Dubowitz et al. à la naissance. Plusieurs
n'est pas un facteur de risque de morbidité néo méthodes statistiques sont également proposées
natale. L'utilisation de courbes regroupant filles et dans la littérature pour tester la normalité de dis-
garçons conduit à méconnaître un retard de crois- tribution du poids par âge gestationnel, éliminer
sance chez des bébés garçons et à le diagnostiquer les données aberrantes ou les corriger.
chez des filles en bonne santé. La recherche des L'exclusion des données manquantes entraîne
facteurs physiologiques affectant le poids des vraisemblablement un biais, car ces cas corres-
enfants en Europe montre que les garçons pèsent pondent le plus souvent à des patientes mal
25
Partie I. Définition et épidémiologie
Médiane 2
30
25 Médiane 1
20
A
15
10
% 0
Médiane 2
15
Médiane 1
10 B
5
0
15 Médiane 2 Médiane 1
10
C
5
0
1000 2000 3000 4000 5000
Poids de naissance (grammes)
90%
4000 75%
50%
Poids de naissance (grammes)
25%
3000
10%
2000
1000
22 24 26 28 30 32 34 36 38 40 42 44
Semaines d’aménorrhée
Figure 4.3. Conséquences des aberrations de valeurs d'âge gestationnel et de poids de naissance.
Les graphiques A, B, et C représentent la distribution du poids de naissance respectivement à 25, 30 et 35 semaines
d'âge gestationnel.
Le graphique sous-jacent illustre la courbe de poids de naissance correspondante.
D'après David et al., 1983.
26
Chapitre 4. Courbes de croissance et définition du retard de croissance intra-utérin
suivies, de milieu socioculturel défavorisé : le auteurs préfèrent cependant respecter les valeurs
poids moyen des enfants exclus pour âge gesta- fluctuantes de poids de naissance observées et les
tionnel incertain est inférieur de 80 g au poids interpréter selon l'âge gestationnel.
moyen des nouveau-nés inclus dans la courbe de
Thomson et al. au Royaume-Uni. En outre, le
pourcentage de cas exclus est très variable et doit
alerter le lecteur lorsqu'il est important : il est de
Courbes ajustées
27 et 39 % dans les courbes de Leroy et Lefort et individuelles de poids fœtal :
de Lubchenco et al. contexte et méthodes
Lissage des courbes Remise en question des courbes
en population
Très peu de courbes sont présentées sans que soit
réalisé en dernier lieu un lissage des valeurs de L'utilisation des courbes de poids de naissance est
poids pour donner à la croissance une allure régu- remise en question dans la littérature depuis une
lière. Cela consiste à modéliser le poids fœtal en vingtaine d'années. L'apparition d'une nouvelle
fonction de l'âge gestationnel à l'aide d'un modèle terminologie en témoigne. L'argumentation avan-
polynomial, le plus souvent de degré 3 ou 4. cée porte sur le défaut d'identification du faible
L'opération peut être répétée pour chaque percen- poids chez les prématurés, mais aussi sur la remise
tile. Aux petits âges gestationnels, les effectifs plus en question du concept de norme de poids en
faibles peuvent entraîner des irrégularités impor- population.
tantes liées aux fluctuations d'échantillonnage
(figure 4.4). La solution qui consiste à pondérer Terminologie autour du faible
cette modélisation par l'inverse des effectifs par âge
gestationnel (ou par un de ses produits) permet de
poids de naissance
donner une importance moindre aux valeurs des Historiquement, le faible poids a longtemps été
petits échantillons en privilégiant l'allure de la défini comme un poids de naissance inférieur à
courbe déterminée par les enfants plus matures, en 2 500 g. La publication des premières courbes de
plus grand nombre par âge gestationnel. Certains poids de naissance a permis de faire évoluer cette
1691
Poids moyen (g)
1580 1547
1500
1433
1343
1219 1285
1083 1126
1000 986 1065
906 909 879
823
752
676 672
599 625
500 518
446
0
24 25 26 27 28 29 30 31
Âge gestationnel (sem)
Figure 4.4. Estimation du poids moyen et de son intervalle de confiance à 95 % de 24 à 31 SA sur
la courbe de Keen et al. (n = 449).
D'après Ego et al., 2006.
27
Partie I. Définition et épidémiologie
28
Chapitre 4. Courbes de croissance et définition du retard de croissance intra-utérin
de variation (rapport écart-type/moyenne) semble début des années 1990, une définition de la crois-
constant quel que soit l'âge gestationnel et varie de sance fœtale, ajustée sur des paramètres indivi-
11 à 13 % selon les auteurs. La critique à leur égard duels constitutionnels et respectant l'allure de la
est liée à l'imprécision des mesures permettant croissance observée in utero.
l'estimation du poids fœtal, la faiblesse des échan-
tillons et l'enregistrement variable (unique, mul- Principes du modèle
tiple, longitudinal) des poids.
Quatre étapes, chacune s'appuyant sur une hypo-
Vers une norme individuelle thèse (en italique), peuvent être schématiquement
résumées dans la construction des courbes ajus-
Cette remise en question est née de l'analyse des tées individuelles de poids fœtal dans le modèle
facteurs intervenant dans la relation entre le poids de Gardosi.
de naissance et les résultats sur la santé. Il a ainsi
été constaté qu'un même faible poids n'était pas Étape 1
systématiquement associé à une augmentation du Chaque individu dispose d'un potentiel de crois-
risque de décès périnatal. Dans une étude sué- sance dépendant de paramètres constitutionnels.
doise en population réalisée en 1998, Cnattingius Cette étape est réalisée à partir d'un échantillon
a montré que parmi les enfants de faible poids représentatif de naissances vivantes à terme, et
(birthweight ratio ≤ 0,75), le taux de mortinatalité permet le calcul du poids optimal à terme
était plus faible parmi les femmes de petite taille (40 semaines) après ajustement.
ainsi que chez les patientes non hypertendues et
les non-fumeuses. Le rôle des facteurs génétiques Étape 2
et intergénérationnels et leur association avec le La croissance fœtale est d'allure linéaire, comme le
poids ont progressivement été analysés. Plusieurs suggèrent les courbes in utero. Pour définir la
travaux ont montré qu'en dehors de pathologies croissance, Gardosi a repris un travail réalisé par
maternelles et fœtales, de nombreux facteurs Hadlock en 1991, décrivant l'évolution du poids
étaient associés à un faible poids de naissance : le fœtal en fonction de l'âge gestationnel (log poids
poids de naissance de la mère, sa taille, son poids fœtal estimé = 0,578 + 0,332 AG – 0,00354 AG2).
en début de grossesse, le gain de poids en cours de
Cette formule permet de calculer le poids fœtal par
grossesse, son âge, sa parité, l'origine ethnique, le
jour de gestation de 168 à 294 jours (soit de 24 à
tabagisme, la taille et le poids du père, l'altitude, le
42 semaines) et de l'exprimer en proportion par rap-
niveau socioéconomique.
port au poids à 40 semaines (soit 19 % à 24 semaines,
Le caractère héritable du poids de naissance a été 54 % à 32 semaines et 100 % à 40 semaines). Ce
estimé à 30 % du poids chez les enfants à terme et pourcentage est lui-même exprimé en fonction de
entre 25 et 40 % chez des nouveau-nés de gros- l'âge gestationnel : % poids = 299,1 – 31,85 × AG +
sesses multiples. Cependant, la transmission inter- 1,094 × AG2 – 0,01055 × AG3.
générationnelle des caractéristiques génétiques
Il permet de faire abstraction des poids observés
peut être perturbée. Les caractéristiques environ-
par Hadlock et représente l'évolution du poids au
nementales et familiales peuvent limiter l'expres-
50e percentile par rapport au poids à terme. Il peut
sion du potentiel génétique, en particulier en
être appliqué au poids optimal à terme calculé
agissant sur le développement et la taille d'un indi-
après ajustement (étape 1) pour obtenir les valeurs
vidu : une anomalie de développement des organes
de poids optimal par jour de 24 à 41 semaines.
génitaux maternels liée à une malnutrition peut
par exemple influencer les caractéristiques anthro- Étape 3
pométriques de la génération suivante. Le poids se distribue de façon normale et la dévia-
tion standard (ds), en proportion par rapport à la
Principes et construction moyenne (my), est constante. La déviation standard
des courbes individualisées retenue est celle observée chez la primipare euro-
péenne non fumeuse à 40 semaines de l'échantil-
Compte tenu des travaux précédemment publiés, lon, soit 389 g dans l'échantillon anglais. Ce choix
Jason Gardosi a proposé au Royaume-Uni, au est guidé par le fait que le modèle est centré sur ces
29
Partie I. Définition et épidémiologie
30
Chapitre 4. Courbes de croissance et définition du retard de croissance intra-utérin
tabac, à l'exception du modèle néo-zélandais. échantillons respectifs (161 contre 165 cm, et 59
Les différences des constantes de poids sont contre 70 kg).
importantes, allant de 3 269,7 g dans le modèle Les différences d'influence des paramètres mater-
espagnol à 3 530 g dans le modèle néo-zélandais, nels sont en revanche modérées entre les six
et reflètent les caractéristiques moyennes de modèles, la plupart des intervalles de confiance
taille et poids maternels observées dans ces des coefficients se recoupant. L'influence de la
Tableau 4.1. Résultats des analyses par une régression linéaire multiple des facteurs associés
au poids de naissance à terme (de 37 à 42 semaines) dans trois échantillons français, anglais
et européens.
Pays France (2006)* Royaume-Uni (1995) Europe (2000)*&
(année de
publication)
Paramètres Enquête nationale périnatale Échantillon de la maternité Échantillon EUROPOP
1998 (n = 11 671) de Nottingham 1987–1991 1994–1997 (n = 6 460)
(n = 38 114)
Coefficients et IC 95 % Coefficients et IC 95 % Coefficients et IC 95 %
Âge gestationnel centré sur 280 jours soit 40 SA
AG 16,1 [14,7–17,5] 20,7 [20,2 ; 21 ; 2]
AG2 –0,24 [–0,41 ; –0,07] –0,21 [–0,25 ; –0,17]
AG 3
0,0023 [–0,0068 ; 0,0114] –0,0002 [–0,0031 ; 0,0028]
Taille de la centrée sur 163,7 cm centrée sur 162,3 cm
mère
Taille 5,7 [4,5 ; 7,0] 7,8 [7,4 ; 8,2] 8,8 [7,1 ; 10,4]
Taille2
Taille3
Poids début centré sur 60,1 kg centré sur 64,3 kg
de grossesse
Poids 8,6 [7,8 ; 9,4] 8,7 [8,5 ; 8,9] 7,2 [6,0 ; 8,4]
Poids2 –0,13 [–0,18 ; –0,08] –0,12 [–0,13 ; –0,10] –0,14 [–0,22 ; –0,05]
Poids 3
0,0007 [–0,0002 ; 0,0007 [0,0005 ; 0,0010] 0,0014 [0,0003 ;
0,0016] 0,0032]
Parité (centrée sur parité 0)
Parité 1 110,3 [94,2 ; 126,4] 108,0 [91,7 ; 124,3] 87 [66 ; 108]
Parité 2 124,0 [103,1 ; 144,9] 148,6 [135,1 ; 162,1] 148 [117 ; 179]
Parité 3 149,2 [115,6 ; 182,8] 149,9 [134,0 ; 165,8] 128 [80 ; 176]
Parité 4 + 160,6 [117,7 ; 203,5] 149,8 [131,2 ; 168,4] 140 [88 ; 191]
Sexe (+ –77,8 [–84,7 ; –70,8] –58,4 [–62,6 ; –54,2] –66 [–74 ; –56]
garçon, – fille)
Tabac (nb de cigarettes/j)
1–9 –143,9 [–163,7 ; –124,2] –152,5 [–166,1 ; –138,9] –157 [–188 ; –125]
10–19 –201,3 [–227,8 ; –174,9] –214,5 [–229,3 ; –199,7] –128 [–167 ; –89]
20 + –286,5 [–334,1 ; –238,9] –246,0 [–260,7 ; –231,3] –182 [–252 ; –113]
(Suite)
31
Partie I. Définition et épidémiologie
Tableau 4.2. Résultats des analyses par une régression linéaire multiple des facteurs associés
au poids de naissance à terme (de 37 à 42 semaines) dans quatre échantillons néo-zélandais,
australien, espagnol et américain.
Pays Nouvelle-Zélande Australie (2007)** Espagne (2008) États-Unis
(année de (2004)* (2011)**
publication)
Paramètres Échantillon du registre Échantillon de la Échantillon de Échantillon de
de naissances 1993– maternité de Sydney la maternité de la maternité
2000 (n = 4964) 1999–2003 (n = 12420) Barcelone 2001–2005 de Washington
(n = 11197) 1990–2009
(n = 42277)
Coefficients et IC 95 % Coefficients et IC 95 % Coefficients et IC Coefficients
95 % et IC 95 %
Âge gestationnel (centré sur 280 jours soit 40 SA)
AG 19,5 [17,0 ; 22,0] 19,1 [18,1 ; 20,1] 16,7 [15,37 ; 18,4 [17,5 ;
18,0] 19,2]
AG2 –0,28 [–0,46 ; –0,10] –0,34 [–0,44 ; –0,24] –0,39 [–0,31 ;
–0,46]
AG3 0,0006 [–0,0092 ; –0,005 [–0,001 ;
0,0104] –0,008]
32
Chapitre 4. Courbes de croissance et définition du retard de croissance intra-utérin
33
Partie I. Définition et épidémiologie
taille maternelle varie entre 5,7 [4,5–7,0] et 9,6 + 0,0023 × (280 – 14)3 ;
[6,7–12,5] g/cm. Le coefficient français est signifi- • taille : + 5,7 × (170 – 163,7) ;
cativement plus faible que celui du Royaume-Uni,
• poids : + 8,6 × (70 – 60,1) – 0,13 × (70 – 60,1)2 +
de l'Espagne et de l'échantillon européen. Le gain
0,0007 × (70 – 60,1)3 ;
de poids fœtal avec le poids maternel varie signifi-
cativement entre les modèles australien et espa- • parité : + 124,0 ;
gnol de 6,9 [5,9–7,9] à 9,0 [8,2–9,8] g/kg. • sexe : + 77,8 ;
L'augmentation du poids entre le premier et le • constante : + 3 343,9.
deuxième enfant varie de 87 [66–108] à 110,3
[94,2–126,4] g. À partir du deuxième enfant, Soit un total de 3 356 g.
l'augmentation du poids de naissance est incons- Si cette même patiente attendait un premier
tante selon les modèles. Le facteur sexe montre un enfant de sexe féminin, le poids attendu au même
gain de poids de 77,8 [70,8–84,7] g dans le modèle terme serait de 3 106 g.
français chez le garçon, valeur significativement Si, cette fois, il s'agissait de nouveau d'un troi-
supérieure à celle du modèle anglais, néo- sième enfant de sexe masculin mais chez une
zélandais, espagnol et américain. Ces différents femme mesurant 1,58 m et pesant 51 kg, le poids
modèles expliquent environ 20 à 30 % de la varia- attendu au même terme serait de 3 146 g.
bilité du poids de naissance à terme (R 2 de 23,7 %,
27 % et 30 % dans les modèles espagnol, français
et américain, et néo-zélandais). Place dans les recommandations
L'utilisation de ces coefficients se fait de la de pratique clinique actuelle
manière suivante si on considère trois exemples pour le dépistage et le diagnostic
successifs en France. de RCIU
Pour une femme mesurant 175 cm, pesant 70 kg, En France, des recommandations sur les modali-
attendant son troisième enfant de sexe masculin, tés d'accouchement des enfants de faible poids ont
le poids attendu à 38 semaines de cet enfant, été publiées en 1998 par le CNGOF (Collège natio-
compte tenu des différents facteurs pris en nal des gynécologues obstétriciens français) [http:
compte, sera de : //www.cngof.asso.fr/D_PAGES/PURPC _04.
• âge gestationnel : 16,1 × (280 – 14) – 0,24 × (280 – 14)2 HTM], mais il n'existait pas de conclusion sur le
34
Chapitre 4. Courbes de croissance et définition du retard de croissance intra-utérin
choix d'une méthode ou d'une courbe de référence outils de construction des courbes y sont téléchar-
pour diagnostiquer le RCIU. Les recommanda- geables (www.gestation.net). Le développement infor-
tions professionnelles de la Haute Autorité de matique d'applications locales ou accessibles sur
santé (HAS) de 2007 sur le suivi et l'orientation des Internet ne pose pas de problème technique parti-
femmes enceintes en fonction des situations à culier. L'ajout de références ajustées individuelles de
risque identifiées ne détaillent pas la prise en poids peut aussi s'envisager dans les dossiers périna-
charge spécifiquement recommandée en cas de tals informatisés ou dans les logiciels installés sur
RCIU. les appareils d'échographie.
Il existe en revanche des recommandations aux En pratique, la saisie de quatre informations sup-
États-Unis et au Royaume-Uni, publiées respecti- plémentaires par enfant est nécessaire : taille,
vement en 2000 et 2002, sur la prise en charge du poids en début de grossesse et parité de la mère,
RCIU, produites par les Collèges des gynécolo- sexe chez l'enfant. Le respect du choix des parents
gues obstétriciens (www.rcog.org.uk et www. vis-à-vis de la connaissance du sexe de leur enfant
acog.org). Les recommandations américaines doit être pris en compte dans l'édition de comptes
sont focalisées sur l'étiologie, le diagnostic et rendus ou l'impression de courbes. L'accès aux
la prise en charge du RCIU, défini comme une courbes ajustées individuelles doit probablement
estimation de poids fœtal inférieur au 10e percen- être double, par utilisation d'un logiciel installé
tile d'une courbe de poids. Les auteurs constatent sur l'appareil d'échographie, de manière à obtenir
que cette définition réunit des enfants de faible un percentile ajusté individuel après avoir pro-
poids « bien portants » comme des enfants n'attei- cédé de manière habituelle à l'estimation de poids
gnant pas leur potentiel de croissance en raison fœtal, mais aussi par une application locale isolée,
d'une pathologie. Aucune recommandation sur un site Internet ou un module de dossier médical
le choix de la courbe de référence n'est donnée. informatisé de manière à être utilisable en consul-
Selon ce texte, l'intérêt de l'utilisation de courbes tation, par exemple.
tenant compte de l'ethnie et des caractéristiques Le recours aux courbes de référence peut avoir lieu
géographiques de la population dans un pays est en anténatal comme en postnatal. En échographie,
insuffisamment démontré, et la distinction des consultation ou hospitalisation anténatale, le poids
situations individuelles est difficile à mettre en fœtal estimé peut être reporté sur la courbe de
œuvre dans un pays dont la population est hété- croissance attendue pour chaque enfant. En post-
rogène et migre fréquemment. natal, les néonatologistes utilisent habituellement
Les recommandations anglaises abordent en des courbes de poids de naissance pour prescrire
revanche la question du choix de la courbe de l'alimentation du prématuré, mais rien ne s'op-
référence. Leurs préconisations sont la prise en pose à ce que l'évaluation de la croissance postna-
compte des facteurs physiologiques influençant le tale se fasse au moyen des courbes ajustées
poids fœtal. L'utilisation de courbes ajustées indi- individuelles. Cette évolution serait aussi l'occasion
viduelles de référence de hauteur utérine et de d'une harmonisation des pratiques souvent hétéro-
poids fœtal au cours du dépistage est donc privilé- gènes, parfois au sein d'une même maternité.
giée. Les niveaux de preuves associés à ces recom-
mandations sont de niveau II (études contrôlées
sans randomisation ou enquêtes quasi expéri-
mentales) et III (enquêtes non expérimentales) sur Intérêt de l'utilisation
une échelle allant de I à IV. des courbes ajustées
individuellement :
Comment utiliser en pratique les données scientifiques
courbes ajustées individuelles ?
Principaux travaux publiés
L'institut périnatal de Birmingham, dirigé par Jason
Gardosi, a développé un site Internet très docu- Jusqu'à présent, la majorité des travaux utilisant les
menté sur lequel cinq modèles adaptés respective- courbes ajustées individuelles sont des études rétros-
ment à cinq pays différents sont accessibles ; des pectives visant à démontrer que cette définition
35
Partie I. Définition et épidémiologie
améliore l'identification d'enfants à risque par rap- l'utilisation de ces courbes individualisées dans
port à une définition en population. Ainsi, neuf la prise en charge des grossesses à risque ou en
études analysent spécifiquement l'état de santé des population générale. Ainsi, les niveaux de
enfants reclassés RCIU ou au contraire non RCIU, preuve de la pertinence de l'utilisation de ces
lorsqu'on applique les courbes ajustées individuelles courbes ne pourront pas être élevés.
au lieu d'une courbe en population, que ce soit des Les neuf études sélectionnées viennent de diffé-
courbes de poids de naissance ou des courbes de rents pays : deux sont des enquêtes en popula-
poids fœtal in utero. Le tableau 4.3 synthétise les tion en Suède ; six autres sont des enquêtes
caractéristiques de ces différentes études. réalisées à partir de séries hospitalières de gros-
En dehors de ces principaux articles, d'autres sesses à bas risque au Royaume-Uni, à haut
méthodes sont utilisées pour étudier la pertinence risque aux Pays-Bas, dans un contexte de suspi-
de la définition ajustée individuelle du faible cion anténatale de RCIU en Nouvelle-Zélande,
poids par rapport aux courbes en population, en à partir de maternités universitaires, de niveau
particulier des études de qualités diagnostiques III ou dites « de référence » en Espagne, en France
des courbes pour prédire des événements mor- et aux États-Unis, ou à partir d'un échantillon
bides associés au RCIU. Ces travaux ne se sont pas multicentrique aux États-Unis. La courbe de
spécifiquement intéressés aux enfants reclassés, référence en population est variable selon ces
mais évaluent la valeur prédictive du RCIU en études : il s'agit de courbes de poids de nais-
fonction de sa définition, pour identifier la mort sance adaptées au pays ou à l'échantillon dans
fœtale in utero ou le décès néonatal. sept cas, de courbes de poids in utero dans les
En revanche, il n'existe aucune étude compara- deux autres. Seules quatre d'entre elles ne sont
tive, randomisée ou non, ayant testé l'impact de pas ajustées sur le sexe.
Tableau 4.3. Synthèse des travaux publiés sur la comparaison entre courbes ajustées
individuelles selon le modèle de Gardosi et courbe de référence en population
dans l'identification d'enfants à risque.
Auteur Pays Échantillon Courbe de Fréquence Fréquence des Association des groupes
référence du RCIU reclassements (1) et (2) avec la morbidité
en Courbe en (1) RCIUpop– et mortalité néonatale
population population nonRCIUaj (référence = nonRCIUpop-
Courbes (2) nonR- nonRCIUaj)
ajustées CIUpop–RCIUaj Indicateur 1 Indicateur 2
individuelles
OR [IC 95 %] OR [IC 95 %]
Clausson Suède Registre Courbe de MFIU Apgar 5 min
et al., national, 326 poids de 9,4 % (1) 2,7 % (1) 1,2 <4:
2001 377 naissances, naissance [0,8–1,9] (1) 1,2
singletons sans (ajustée 9,4 % (2) 2,7 %
(2) 6,1 [0,9–1,5]
malformations sur le sexe)
congénitales [5,0–7,5] (2) 2,2
[1,9–2,7]
De Jong Pays- Maternité Courbe 14 % (1) 0 %
et al., Bas universitaire de poids de 31 % (2) 17 %
1997 d'Amsterdam : naissance
217 naissances de en
mères primipares, population
hypertendues, (ajustée
fumeuses et/ou ≥ sur le sexe)
35 ans, et de mères
multipares avec
antécédents de RCIU
ou prééclampsie
36
Chapitre 4. Courbes de croissance et définition du retard de croissance intra-utérin
37
Partie I. Définition et épidémiologie
38
Chapitre 4. Courbes de croissance et définition du retard de croissance intra-utérin
présence d'un RCIU défini rétrospectivement par l'état de santé rassurant des enfants de faible poids
les courbes ajustées individuelles. constitutionnel est peut-être le fait d'une surveil-
Cette étude apporte deux éléments intéressants. lance accrue, et on ne peut pas affirmer qu'il est
Le premier est de montrer que parmi l'ensemble légitime de réduire le suivi des mères concernées.
des RCIU définis par le modèle ajusté individuel Le classement des enfants à partir du poids de
(12,6 %), 62 % étaient méconnus et n'avaient pas naissance ne reflète pas forcément le classement
bénéficié de surveillance particulière (échogra- qui pourrait être réalisé en cours de grossesse sur
phie tous les 15 jours et Doppler ombilical). Ces l'estimation du poids fœtal.
enfants ne présentaient pas d'excès de risque de L'apport de l'utilisation des courbes ajustées indi-
décès périnatal, mais on constatait chez leur mère viduelles devrait être interprété en tenant compte
2 fois plus de prééclampsie, et des taux de césa- des autres arguments utilisés par le clinicien pour
rienne pour souffrance fœtale ainsi que d'Apgar apprécier le bien-être fœtal (évolution de la crois-
inférieur à 7 à la naissance 3 fois plus fréquents sance, Doppler, rythme cardiaque fœtal) et porter
comparés aux non-RCIU. une conclusion clinique en faveur ou non d'une
Le second résultat porte sur l'apport du Doppler suspicion de RCIU.
ombilical. Parmi les 38 % restants correspondant Par ailleurs, l'extrapolation des résultats publiés
à des cas « concordants » et donc identifiés en est d'autant plus difficile que les courbes de crois-
période anténatale, 19 % présentaient un faible sance utilisées en France sont hétérogènes, et que
poids associé à des anomalies du Doppler ombili- les pratiques actuelles de dépistage et de surveil-
cal et 81 % un faible poids isolé. L'excès de morbi- lance de la croissance fœtale sont mal connues.
dité (Apgar ou pH bas, césarienne avant travail ou Idéalement, seule une étude comparative, au
transfert en néonatologie) constaté parmi ces mieux randomisée, comparant l'utilisation des
deux sous-groupes d'enfants était de l'ordre de courbes individualisées à l'utilisation des courbes
2 et 4. Certains auteurs ont fait l'hypothèse que la habituelles permettrait de conclure sur les béné-
présence d'un Doppler ombilical pathologique fices et inconvénients, mais cette étude n'existe
permettait de distinguer le faible poids constitu- pas actuellement.
tionnel du faible poids pathologique. Ce dernier
Au total, les données montrent que le groupe des
résultat semble montrer que l'absence d'anomalies
RCIU reclassés (identifiés eutrophes avec les
du Doppler ombilical ne permet pas d'être rassuré
courbes habituelles) grâce à l'utilisation des courbes
sur le pronostic des enfants.
individualisées est exposé à une augmentation
importante du risque de morbidité et de mortalité
Limites méthodologiques périnatale. Même si le risque associé est probable-
desdonnées disponibles ment intermédiaire par rapport à celui observé
dans le groupe des RCIU communs aux deux
Interprétation des résultats définitions, la prise en compte de ce groupe de
fœtus permettrait une meilleure estimation des
Malgré de nombreuses analyses sur l'amélioration
risques périnatals liés au RCIU en général. Par
potentielle de l'état de santé périnatale, il est diffi-
ailleurs, la surveillance de certains enfants de
cile de conclure pour plusieurs raisons.
faible poids constitutionnel pourrait être allégée
La nature rétrospective des travaux limite l'inter- sans nuire à leur santé. Cependant, il n'existe pas
prétation des résultats. Des données plus détail- de données comparatives pour conclure au béné-
lées sur le contenu de la surveillance prénatale et fice en termes de santé périnatale de l'utilisation
des pratiques dont ont pu bénéficier les enfants des courbes individualisées.
seraient nécessaires pour mieux interpréter les
résultats. Remise en question
Si un excès de risque est constaté chez les « nou- de la pertinence du modèle
veaux cas » de RCIU, on ne peut pas affirmer que
ces enfants correspondaient réellement à des ajusté individuel
RCIU non diagnostiqués, et que la morbimorta- Récemment sont apparues dans la littérature des
lité constatée pourrait être évitée. Inversement, discussions méthodologiques sur la conception
39
Partie I. Définition et épidémiologie
du modèle, notamment sur les paramètres d'ajus- connaissances, cette discussion ne progresse pas
tement dans l'ensemble de la population, comme en l'absence d'études prospectives intervention-
la taille ou la parité chez la mère. En effet, le prin- nelles. La diffusion des courbes ajustées indivi-
cipe est de tenir compte des facteurs modifiant duelles dans les recommandations et dans la
physiologiquement la croissance. Or la petite taille pratique clinique reste rare. Cependant, elle est
maternelle peut être liée à un contexte de malnu- probablement imminente compte tenu de l'intérêt
trition, par exemple. De même, les primipares des cliniciens pour ce concept, et de la simplicité
sont plus fréquemment exposées aux pathologies des outils permettant leur utilisation. La mise en
vasculaires comme la prééclampsie. Dès lors, œuvre d'études interventionnelles prospectives
considérer comme « normal » le faible poids des évaluant l'impact de l'utilisation de ces courbes
enfants de ces femmes peut conduire à mécon- sur la santé périnatale serait justifiée, mais pose
naître d'authentiques RCIU. des problèmes de faisabilité. D'autres perspectives
L'étude multicentrique française n'a pas mis en de recherche peuvent néanmoins s'envisager. Ces
évidence de bénéfice à exclure la parité du modèle, nouvelles références de poids constituent très pro-
bien que cette simplification permette effective- bablement un progrès pour un petit groupe de
ment d'identifier de nouveaux cas chez des primi- femmes et d'enfants et sont une opportunité à
pares présentant souvent une pathologie vasculaire. une harmonisation de la définition du RCIU dans
La critique adressée au modèle par Hutcheon et le domaine clinique comme dans le domaine de la
Platt est de dire que le rôle des caractéristiques recherche.
maternelles (taille, poids, parité) est marginal par
rapport au sexe et à l'âge gestationnel, et que Références
l'ajustement sur ces facteurs améliore très faible-
ment la prédiction de la morbimortalité associée Altman DG, Hytten FE. Intrauterine growth retardation :
let's be clear about it. Br J Obstet Gynaecol 1989 ; 96
au RCIU. (10) : 1127–32.
La même équipe a publié dans The Lancet en 2011 American College of Obstetricians and Gynecologists.
une large étude internationale montrant une mor- Intrauterine growth restriction. Washington, DC :
bimortalité comparable chez les RCIU, qu'ils soient American College of Obstetricians and Gynecologists ;
identifiés par une courbe avec ou sans ajustement 2000.
individuel. Les auteurs concluent à l'inutilité Cnattingius S, Haglund B, Kramer MS. Differences in
d'ajuster individuellement les références de poids, late fetal death rates in association with determi-
l'essentiel étant de disposer d'une référence adap- nants of small for gestational age fetuses : popula-
tion-based cohort study. BMJ 1998 ; 316 (7143) :
tée à la population d'un pays. Cet article a suscité 1483–7.
plusieurs commentaires. Effectivement, dans David RJ. Population-based intrauterine growth curves
cette étude comme dans les précédentes, parmi from computerized birth certificates. South Med J
l'ensemble des RCIU identifiés par le modèle 1983 ; 76 (11) : 1401–6.
ajusté ou une autre référence, environ les trois Ego A, Blondel B, Zeitlin J. Birthweight curves : a review
quarts sont classés RCIU quelle que soit la réfé- of the literature. J Gynecol Obstet Biol Reprod (Paris)
rence, et le contraste lié aux RCIU discordants est 2006 ; 35 (8Pt 1) : 749–61.
difficile ou impossible à mettre en évidence si on Ego A, Subtil D, Grangé G, Thiébaugeorges O, Sénat MV,
s'intéresse globalement à l'ensemble des RCIU Vayssière C. Customized versus population-based
sans isoler les enfants reclassés. birth weight standards for identifying growth restric-
ted babies : a French multicenter study. Am J Obstet
Gynecol 2006 ; 194 : 1042–9.
Ego A, Zeitlin J, Goffinet F. Utilisation des courbes indi-
Conclusion vidualisées de croissance fœtale : intérêt pour la pra-
tique et la recherche. In : Collège national des
Le débat en cours dans la littérature sur l'intérêt gynécologues obstétriciens français. Mises à jour en
gynécologie obstétrique. Paris : Vigot ; 2011. p.
de l'utilisation des courbes ajustées individuelles 63–90.
de poids fœtal reste ouvert, comme en témoignent
Gardosi J, Chang A, Kalyan B, Sahota D, Simonds EM.
une controverse ainsi que deux revues de la litté- Customised antenatal growth charts. The Lancet
rature en 2010 et 2011. Mais en l'état actuel des 1992 ; 339 : 283–7.
40
Chapitre 4. Courbes de croissance et définition du retard de croissance intra-utérin
Gardosi J, Figueras F, Clausson B, Francis A. The custo- Hutcheon JA, Zhang X, Platt RW, Cnattingius S, Kramer
mised growth potential : an international research MS. The case against customised birthweight stan-
tool to study the epidemiology of fetal growth. dards. Paediatr Perinat Epidemiol 2011 ; 25 (1) : 11–6.
Paediatr Perinat Epidemiol 2011 ; 25 (1) : 2–10. Marsál K, Persson PH, Larsen T, Lilja H, Selbing A, Sultan
Gardosi J, Mongelli M, Wilcox M, Chang A. An adjustable B. Intrauterine growth curves based on ultrasoni-
fetal weight standard. Ultrasound Obstet Gynecol cally estimated foetal weights. Acta Paediatr 1996 ;
1995 ; 6 : 168–74. 85 (7) : 843–8.
Goldenberg RL, Cutter GR, Hoffman HF, Foster JM, Resnik R. To customise or not to customise : that is the
Nelson KG, Hauth JC. Intrauterine growth retarda- question. Paediatr Perinat Epidemiol 2011 ; 25 (1) :
tion : standards for diagnosis. Am J Obstet Gynecol 17–9.
1989 ; 161 : 271–7. Royal College of Obstetricians and Gynaecologists. The
Hadlock FP, Harrist RB, Matinez-Poyer J. In utero analy- investigation and management of the small-for-ges-
sis of fetal growth : a sonographic weight standard. tational-age fetus. RCOG Guidelines Guideline
Radiology 1991 ; 181 : 129–33. 2002 ; 31.
41
Vascularisation Chapitre 5
utéroplacentaire
Vassilis Tsatsaris, Olivier Morel,
Édouard Lecarpentier, Thierry Fournier
sang maternel traverse le myomètre via les centaire est dépendante du remodelage de la paroi
artères utéroplacentaires, remodelées par les cel des artères utéroplacentaires. En effet, d'après la loi
lules trophoblastiques, et entre dans la chambre de Poiseuil, le débit d'un fluide dans un cylindre est
intervilleuse sous forme d'un jet produit par la proportionnel au rayon à la puissance 4. Toute
Le retard de croissance intra-utérin
pression artérielle maternelle. Le sang maternel variation de calibre des artères a donc des consé
circule ensuite autour des villosités placentaires quences majeures sur la perfusion de la chambre
permettant les échanges entre la mère et le intervilleuse. En fin de grossesse, la chambre inter
fœtus. Le drainage vers la circulation maternelle villeuse contient environ 150 ml de sang maternel,
systémique se fait via des plexus veineux myo un volume totalement renouvelé 3 à 4 fois par minute.
métriaux organisés en un système anastomo Il faut noter que, lors des contractions utérines, le
tique. Cette circulation est schématisée dans la débit utéroplacentaire diminue mais le volume
figure 5.1. total de placenta reste constant, ce qui suggère que
45
Partie II. Physiopathologie
1 2 3 4 5
Arbre villositaire Circulation fœtale Circulation maternelle Passage du sang maternel Marge placentaire
en coupe par la chambre intervilleuse
Figure 5.1. Illustration de la circulation utéroplacentaire selon Ramsey et Donner.
(Carnegie Institute of Washington, 1961-62. Contributions to Embryology series, plate 10).
le volume total de sang maternel demeure stable (le l'invasion trophoblastique ne concerne que la
sang maternel n'est pas chassé hors de la chambre portion terminale des artères spiralées, condition
intervilleuse lors des contractions utérines). De ce non suffisante pour expliquer la très forte aug
fait, les transferts en oxygène de la mère au fœtus mentation du débit utéroplacentaire au cours de la
sont maintenus. grossesse. Différents mécanismes sont donc dans
le remodelage généralisé de la vascularisation de
l’utérus.
Circulation du sang maternel
dans la chambre intervilleuse
Interaction directe entre le
Les modes circulatoires du sang maternel au sein
de la chambre intervilleuse sont très mal connus, trophoblaste extravilleux et les
en particulier la répartition des flux et les méca composants de la paroi artérielle
nismes responsables du brassage du sang mater
Le remodelage vasculaire est en partie induit
nel. Ces phénomènes jouent cependant un rôle
par une interaction directe entre le tropho
capital dans les échanges entre la mère et le fœtus.
blaste extravilleux et les composants de la paroi
artérielle.
La confirmation que les cellules envahissant les
Mécanismes impliqués dans le artères spiralées sont bien d'origine trophoblas
remodelage des vaisseaux utérins tique date des travaux de Kaufmann et coll. Le
remodelage vasculaire par le trophoblaste (d'ori
Il a longtemps été admis que l'augmentation du gine endovasculaire ou interstitielle) induit une
débit sanguin utéroplacentaire était le fait du pro interaction directe entre le cytotrophoblaste extra
cessus d'invasion trophoblastique. En fait, le villeux et les composants de la paroi artérielle (cel
remodelage de la paroi vasculaire induit par lules musculaires lisses et cellules endothéliales). Il
46
Chapitre 5. Vascularisation utéroplacentaire
en résulte une destruction de la paroi musculaire Cette théorie a été vivement critiquée, mais les
lisse de ces vaisseaux, qui est remplacée par une récents travaux de Jauniaux et Burton ont confirmé
substance acellulaire éosinophile. Initialement, ce l'hypothèse initiale de Schaaps et Hustin. En effet,
processus d'invasion trophoblastique n'a pas pour au premier trimestre de la grossesse, la cellule tro
conséquence l'augmentation de la perfusion de la phoblastique se développe en conditions d'hypoxie.
chambre intervilleuse, mais son interruption. En D'après Jauniaux et Burton, cette hypoxie est
effet, quelques années plus tard, Hustin et Schaaps nécessaire à la survie de la cellule trophoblastique
montraient qu'au premier trimestre de la grossesse, qui, à l'origine, possède peu de défenses antioxy
le processus d'invasion trophoblastique est telle dantes (catalase, glutathion peroxydase, super
ment intense que les cellules trophoblastiques oxyde dismutase). Cette hypoxie est rendue possible
endovasculaires obstruent la lumière des artères grâce aux bouchons trophoblastiques obstruant la
spiralées (figure 5.2). La formation de ces bou lumière de la partie terminale des artères spiralées.
chons trophoblastiques (« plugs » trophoblastiques) Ces bouchons disparaissent progressivement vers
empêche le passage des hématies fœtales dans la 9–10 SA, ce qui permet une perfusion progressive
chambre intervilleuse. Ainsi, durant le premier tri de la chambre intervilleuse et une augmentation
mestre de la grossesse, la chambre intervilleuse est graduelle de la pression partielle en oxygène.
perfusée par un ultrafiltrat plasmatique contenant Parallèlement, on observe une augmentation pro
de l'oxygène dissout. gressive des défenses antioxydantes au niveau
47
Partie II. Physiopathologie
48
Chapitre 5. Vascularisation utéroplacentaire
d'anastomoses artérioveineuses dans le lit placen pressions constantes dans la chambre intervil
taire. La chambre intervilleuse est située non pas leuse. Ce point est déterminant car la villosité
en série mais en dérivation de la circulation choriale ne comporte aucune structure rigide et sa
maternelle (figure 5.3). Ce réseau anastomotique conformation tridimensionnelle dans la chambre
est un réel shunt vasculaire qui a de multiples intervilleuse dépend de la pression au sein des
fonctions. capillaires fœtaux ainsi que de la pression dans la
Tout d'abord, il permet, au premier trimestre, la chambre intervilleuse. Dans les artères ombili
vascularisation de l'utérus sans perfusion de la cales, la pression sanguine est égale à 50 mmHg et
chambre intervilleuse. Le sang maternel est dérivé passe par les ramifications qui traversent la
en sous-placentaire vers le réseau veineux et seul plaque choriale pour arriver dans les capillaires,
l'oxygène dissout passe dans la chambre intervil dans lesquels la pression tombe à 30 mmHg.
leuse par percolation à travers les bouchons tropho Dans les veines, la pression est de 20 mmHg.
blastiques constitués par le processus d'invasion Ainsi, la pression dans les vaisseaux fœtaux et
trophoblastique de la partie terminale des artères leurs ramifications villositaires est toujours supé
spiralées. rieure à celle qui règne dans la chambre intervil
leuse (10 mmHg).
Aux deuxième et troisième trimestres, ce vaste
réseau anastomotique se comporte comme un Si la pression dans la chambre intervilleuse augmente,
« tampon hémodynamique ». Ce shunt vasculaire les vaisseaux se collabent. À l'inverse, si la pression
absorbe les à-coups hypo- ou hypertensifs systé diminue, les villosités deviennent hydropiques. De
miques maternels, permettant de maintenir des plus, ce réseau anastomotique conditionne les débits
Circulation maternelle
Circulation maternelle
Réseau vasculaire
myométrial
Villosités Villosités
Circulation fœtale
Circulation fœtale
49
Partie II. Physiopathologie
50
Circulation fœtale
Jean-Marie Jouannic
Chapitre 6
(pour oxygéner le cerveau et le cœur), alors que le tion terminale donne en effet plusieurs branches
sang désoxygéné rejoint préférentiellement le destinées au lobe gauche du foie, puis elle bifurque
cœur droit puis, court-circuitant la circulation pour confluer avec la veine porte. À partir de cette
Le retard de croissance intra-utérin
pulmonaire à haute résistance, est éjecté dans connexion, plusieurs branches naissent pour ali-
l'aorte descendante au travers du canal artériel menter le lobe droit du foie. Bien que la propor-
pour finalement regagner le compartiment pla- tion du sang provenant de la veine ombilicale
centaire à basse résistance. La circulation fœtale destinée au foie fœtal paraisse plus importante
est également caractérisée par l'existence de sys- chez l'homme, ce sang continue de représenter
tèmes de shunt en amont et en aval du cœur qui une source importante du sang oxygéné dérivé
vont permettre une adaptation dans la répartition vers le cœur gauche, car l'extraction d'oxygène au
des flux sanguins, avec le plus souvent comme cours du passage hépatique est relativement faible.
51
Partie II. Physiopathologie
La répartition du flux sanguin ombilical entre le Chez l'agneau, cette distribution est facilitée par
canal d'A rantius d'une part et le système porte la présence de valvules à l'abouchement du canal
d'autre part est soumise à une régulation très d'Arantius et de la veine hépatique gauche dans la
fine qui pourrait occuper une place prépondé- VCI, forçant ainsi le flux sanguin vers le foramen
rante dans les phénomènes d'adaptation de la ovale. De telles valvules n'existent pas chez le
circulation fœtale à diverses situations patholo- fœtus humain. Deux phénomènes se conjuguent
giques. Toute diminution de pression dans la pour permettre cette dérivation préférentielle du
veine ombilicale entraîne une diminution plus sang oxygéné vers le cœur gauche au travers du
marquée du débit hépatique que du débit dans foramen ovale chez le fœtus humain. Au cours du
l'A rantius. Par ailleurs, des travaux récents ont cycle cardiaque, les mouvements coordonnés de la
montré que le tonus du canal d'A rantius était valve d'Eustachi et de la partie inférieure du sep-
contrôlé par de nombreux médiateurs vasocons- tum interauriculaire pourraient représenter une
tricteurs (contrôle adrénergique) et vasodilata- sorte de canal fonctionnel orientant le flux san-
teurs (monoxyde d'azote, prostaglandines). guin le plus oxygéné qui occupe la partie anté-
Plusieurs cas d'agénésie de l'Arantius ont été rap- rieure de la VCI vers le foramen ovale. Récemment,
portés dans la littérature. Chaque fois, cette ano- Kiserud a proposé une théorie séduisante en étu-
malie a été associée à une anasarque fœtale et à diant les vitesses de circulation des flux sanguins
des anomalies cardiaques. À la lecture de ces cas, dans la VCI. Les vitesses de circulation dans la
il est cependant difficile de savoir quel a été pré- portion terminale de l'Arantius (environ 60–85 cm/s
cisément le rôle joué par l'absence de canal en deuxième partie de gestation) sont très supé-
d'Arantius. Dans une étude descriptive longitu- rieures à celles du flux sanguin cave. Il existe ainsi
dinale du Doppler de l'Arantius chez 197 fœtus, une grande différence d'énergie cinétique entre
un cas d'agénésie complète a été rapporté. ces deux secteurs qui pourrait faciliter le passage
L'évolution pour ce fœtus a été normale, avec du sang le plus oxygéné au travers du foramen
naissance à terme d'un enfant de poids normal. ovale.
Cette observation pourrait suggérer que le canal Le débit au travers du foramen ovale chez le fœtus
d'Arantius n'est pas un élément clé de la circula- humain, estimé par écho-Doppler, représenterait
tion fœtale en conditions physiologiques. Quoi environ 34 % du débit cardiaque combiné à
qu'il en soit, ce cas isolé ne permet pas de remettre 20 semaines d'aménorrhée (SA), puis environ 18 %
en cause la place importante jouée par le canal à 30 SA. Globalement, le débit au travers du fora-
d'Arantius dans les situations d'insuffisance men ovale semble plus faible chez le fœtus humain
placentaire. que chez le fœtus d'agneau, ce qui suppose, comme
nous le verrons plus bas, un débit artériel pulmo-
naire supérieur chez le fœtus humain.
52
Chapitre 6. Circulation fœtale
53
Partie II. Physiopathologie
54
Chapitre 6. Circulation fœtale
55
Programmation fœtale : Chapitre 7
concept et conséquences
Anne Tarrade, Olivier Morel, Charlotte Dupont,
Pascale Chavatte-Palmer
57
Partie II. Physiopathologie
58
Chapitre 7. Programmation fœtale : concept et conséquences
59
Partie II. Physiopathologie
obésogène, a également été remarquée. Les effets mais aussi la sévérité de la contrainte nutrition-
paternels observés ne se limitent pas à la première nelle appliquée à la génération F0 influent sur le
génération mais touchent également la seconde. phénotype des générations suivantes.
Les mécanismes impliqués demeurent inconnus ; La machinerie épigénétique, qui régule l'expres-
néanmoins, il est légitime de supposer que ces sion des gènes sans altérer la séquence d'ADN,
effets phénotypiques chez les descendants serait un des processus mis en jeu. Le code épigé-
résultent de modifications, au sein des cellules nétique inclut notamment la méthylation de
germinales paternelles, de la chromatine ou de l'ADN et les modifications post-traductionnelles
l'ADN (acide désoxyribonucléique), sans altéra- des histones. Dans des conditions normales, la
tion de la séquence. machinerie épigénétique intervient dans le
contrôle de l'expression temporelle et tissu spéci-
Effets inter- et/ou fique des gènes. Ainsi, certains gènes sont actifs et
d'autres silencieux, de manière stable ou réver-
transgénérationnels ; sible au cours du développement. Lors de pertur-
rôle de l'épigénome bations environnementales au cours de fenêtres
spatiotemporelles critiques du développement
Les multiples exemples cités précédemment fœtal et postnatal, la transmission du phénotype
démontrent que l'environnement parental nutri- sur une ou plusieurs générations nécessite, via la
tionnel a un impact sur la descendance, mais ces machinerie épigénétique, des changements irré-
effets ne se limitent pas exclusivement à la pre- versibles de l'expression de gènes impliqués dans
mière génération. Dans l'étude des effets de la les voies de signalisations métaboliques et des
famine en Hollande pendant l'hiver 1944–1945, il processus de contrôle de l'homéostasie. Chez la
a été montré que les filles issues des mères sous- souris mutante agouti viable yellow (Avy), la colo-
alimentées avaient donné naissance à des enfants ration du pelage agouti dépend du niveau de
de petit poids. Chez les Indiens d'Amérique du méthylation d'une séquence située dans le promo-
Nord, il a été montré que la restriction nutrition- teur de ce gène. La supplémentation maternelle
nelle maternelle au cours de la grossesse est asso- durant la gestation de ces souris, en micronutri-
ciée à un risque de diabète de type 2 transmis sur ments donneurs de groupements méthyl, comme
plusieurs générations. De même, le diabète gesta- les folates, a pour conséquence une modification
tionnel induit des perturbations métaboliques de la couleur du pelage de jaune à pseudo-agouti,
propices à l'obésité chez la descendance et cet d'une manière dose-dépendante.
environnement est à son tour favorable à l'appari- De plus, l'épigénome est également sensible aux
tion d'un diabète gestationnel qui induira alors modifications des apports en macronutriments,
l'obésité de la deuxième génération, ceci ad infini- puisqu'une restriction protéique chez des rates ges-
tum. L'étude de Stewart en 1975 confirme l'hypo- tantes conduit à l'hypométhylation du promoteur
thèse d'une transmission transgénérationnelle du gène PPARα (Peroxisome Proliferator-Activated
grâce à une restriction protéique réalisée chez des Receptor) et du récepteur aux glucocorticoïdes de la
rats sur douze générations. Ces rats présentaient descendance. Cette hypométhylation favorise l'ex-
une réduction de leur masse corporelle, une alté- pression de ces récepteurs et donc modifie la régu-
ration de leur comportement ainsi que des diffi- lation des voies métaboliques hépatiques. Il est
cultés d'apprentissage. intéressant de noter que l'hypométhylation de
Les modifications phénotypiques observées chez PPARα est observée à la génération F1 et F2 mais pas
les générations F1 et F2 impliqueraient que les cel- F3. Outre les perturbations nutritionnelles, des
lules germinales F1, à l'origine de la génération F2, changements des flux utéroplacentaires chez le rat
subissent les altérations de l'environnement de la peuvent être à l'origine de modifications des
grand-mère (F0) au cours de son développement marques épigénétiques dans le foie et le cerveau de
anténatal. Le phénotype de la génération F2 serait la descendance.
donc le reflet des modifications de la lignée ger- Les effets transgénérationnels impliquent néces-
minale F1. De plus, il semble que la fenêtre d'inter- sairement une transmission via les cellules germi-
vention nutritionnelle (gestation et/ou lactation) nales. Les mécanismes ne sont pas encore élucidés,
60
Chapitre 7. Programmation fœtale : concept et conséquences
mais il est probable que des marques épigénétiques l'injection de l'exendine 4, analogue de l'hormone
apposées sur le génome de ces cellules soient pré- glucagon-like peptide 1 qui stimule la synthèse et
servées de la déméthylation globale du génome la sécrétion d'insuline, au cours la période néona-
embryonnaire faisant suite à la fécondation soient tale, prévient le développement du diabète, en évi-
ainsi transmises à la descendance. On sait en effet tant le déclin des cellules β du pancréas chez les
déjà que près de 10 % des transposons gardent ratoms en RCIU. Les effets de l'exendine 4 sur
leurs marques épigénétiques au moment de ce pro- l'homéostasie du glucose sont permanents, ce qui
cessus. D'ailleurs, une étude récente renforce cette augmente la durée de vie des animaux. Dans
hypothèse puisque les profils de méthylation des d'autres modèles animaux, cette molécule aug-
spermatozoïdes des souris soumises à un régime mente la sensibilité à l'insuline, diminue la prise
hypoprotéique présentent des modifications post- alimentaire et augmente la satiété. La leptine a
traductionnelles de certaines histones au niveau également été testée en raison de ses effets sur
des promoteurs des gènes monoamine oxydase et l'axe hypothalamo-hypophysaire. Ainsi, l'admi-
du facteur d'élongation Eftud1 (Elongation factor nistration de leptine chez des ratons ou des porce-
Tu GTP binding domain containing 1). lets ayant subi une sous-nutrition in utero peut
permettre de prévenir le développement d'un syn-
drome métabolique.
61
Partie II. Physiopathologie
le placenta représente l’« archive » de la nutrition incident coronary heart disease. Lancet 1996 ; 30 :
fœtale et sa structure ou sa fonction sont directe- 1478–80.
ment reliées au devenir de la descendance. Une Gluckman PD, Hanson MA. Living with the past : evolu-
fois ce facteur de risque analysé, des stratégies tion, development, and patterns of disease. Science
2004 ; 305 (5691) : 1733–6.
thérapeutiques de prévention ou de traitement
pourraient être envisagées, comme des modifica- Hales CN, Barker DJ. The thrifty phenotype hypothesis.
Br Med Bull 2001 ; 60 : 5–20.
tions diététiques associées ou non à un traitement
Hanson M, Godfrey KM, Lillycrop KA, Burdge GC,
thérapeutique, en particulier pendant l'enfance,
Gluckman PD. Developmental plasticity and deve-
en raison de la plasticité de l'épigénome. lopmental origins of non-communicable disease :
theoretical considerations and epigenetic mecha-
Références nisms. Prog Biophys Mol Biol 2011 ; 106 (1) :
272–80.
Barker DJ. The fetal origins of diseases of old age. Eur J Hochberg Z, Feil R, Constancia M, Fraga M, Junien C,
Clin Nutr 1992 ; 46 (Suppl 3) : S3–9. Carel JC, et al. Child health, developmental plasti-
Catalano PM, Ehrenberg HM. The short- and long-term city, and epigenetic programming. Endocrine Rev
implications of maternal obesity on the mother and 2011 ; 32 (2) : 159–224.
her offspring. BJOG 2006 ; 113 (10) : 1126–33. McCance RA. Food, growth, and time. Lancet 1962 ; 2 :
Crume TL, Ogden L, Daniels S, Hamman RF, Norris JM, 621–6.
Dabelea D. The impact of in utero exposure to dia- McMillen IC, Robinson JS. Developmental origins of the
betes on childhood body mass index growth trajec- metabolic syndrome : prediction, plasticity, and pro-
tories : the EPOCH Study. J Pediatrics 2011 ; 158 (6) : gramming. Physiol Rev 2005 ; 85 (2) : 571–633.
941–6. Newnham JP, Ross MG. Early life origins of human health
Ferguson-Smith AC, Patti ME. You are what your dad ate. and disease. Basel : Karger ; 2009.
Cell Metab 2011 ; 13 (2) : 115–7. Ruager-Martin R, Hyde MJ, Modi N. Maternal obesity
Frankel S, Elwood P, Sweetnam P, Yarnell J, Smith GD. and infant outcomes. Early Human Dev 2010 ; 86
Birthweight, body-mass index in middle age, and (11) : 715–22.
62
Épigénétique Chapitre 8
et croissance fœtale
Daniel Vaiman
nue par une série de mécanismes dits « épigéné- l'histone est installée. Des domaines d'interac-
tiques », terme que l'on peut comprendre au sens tion de protéines impliquées dans ces méca-
étymologique « épi », par-dessus, et « génétique », en nismes sont rencontrés pour la méthyltransférase
relation avec les gènes. La génétique classique a mis de la lysine 4 de l'histone H3 MLL1, qui contient
en évidence les mécanismes de transmission des un domaine d'interaction avec les CG. Selon les
gènes de génération en génération ; sous le terme mêmes auteurs, SET, qui présente une activité
« épigénétique », on regroupe l'ensemble des méca- enzymatique similaire à celle de MLL1, interagit
nismes moléculaires qui orchestrent le contrôle avec la protéine CFP1 qui présente un domaine
63
Partie II. Physiopathologie
d'interaction avec les CG. L'existence de methyl- croissance, plus pratiquement caractérisé par
binding domains au sein de l'histone méthyl- une rupture in utero de la courbe de croissance
transférase SETDB1 illustre les mêmes possibilités fœtale.
de communication entre mécanismes épigéné-
tiques. Cette vision est encore illustrée par les
interactions de DNMT1 avec des protéines Régulation des gènes
capables de lier méthylation des histones et soumis à empreinte
méthylation de l'A DN.
Un aspect particulièrement important du placenta
En conclusion, il est clair que la régulation épigé-
est qu'il est un lieu majeur d'expression d'une caté-
nétique forme un tout avec des marques plus ou
gorie de gènes cruciaux pour la régulation des
moins stables ou labiles qui dirigent l'expression
échanges maternofœtaux : les gènes soumis à
des gènes dans les différents types cellulaires et,
empreinte. En l'état actuel des connaissances, il
surtout, en réponse aux possibles agressions de
s'agit d'une petite centaine de gènes sur les 25 000
l'environnement cellulaire. Les altérations de
du génome, qui présentent la particularité de n'être
l'environnement cellulaire peuvent prendre des
exprimés que par l'un des allèles (soit l'allèle pater-
formes physiques (température, pression, forces
nel, soit l'allèle maternel). Les gènes soumis à
de cisaillement), chimiques (hypoxie, hyperoxie,
empreinte ont apparemment évolué avec l'appari-
exposition à des radicaux libres, altérations du
tion du placenta chez les mammifères marsupiaux
pH, déficit en molécules permettant la biosyn-
et placentaires, à partir de prémisses qui auraient
thèse de molécules biologiques) ou biologiques
existé chez les monotrèmes. Les mécanismes per-
(exposition à des parasites ou à des molécules
mettant l'extinction d'un des allèles et l'expression
d'origine microbienne) ; on peut avancer que
de l'autre sont de nature épigénétique. Par consé-
dans les cas où ces altérations perdurent durant
quent, l'empreinte parentale est un cas particulier
plus d'une génération cellulaire, des anomalies
de régulation épigénétique, appliquée à un groupe
épigénétiques peuvent s'installer sur la chroma-
de gènes très limité en quantité, mais d'une
tine et concourir à une expression aberrante des
importance considérable pour gérer les échanges
gènes. De telles conditions peuvent se rencontrer
nutritionnels maternofœtaux. Des expériences
dans le contexte de maladies neurologiques
d'invalidation de nombreux gènes soumis à
(Alzheimer, schizophrénie, autisme), du cancer,
empreinte, tels Igf2, H19, Peg10, Mash-2, ont mon-
de pathologies allergiques (asthme). Le placenta,
tré des effets directs sur la structure du placenta et
par son statut d'organe transitoire mais avec une
le développement fœtal. L'extension de ces résultats
durée de vie conséquente (la gestation, soit
à l'espèce humaine a donné quelques résultats
9 mois dans l'espèce humaine), à développement
concordants. Par exemple, PHLDA2, ILK2, NNAT,
rapide, exposé à des variations importantes de
CCDC86 et PEG10 présentent une expression aug-
l'environnement (nutriments, oxygène), est une
mentée dans les placentas issus de RCIU, tandis
cible désignée pour l'accumulation d'anomalies
qu'au contraire PLAGL1, DHCR24, ZNF331 et
épigénétiques.
CDKAL1 sont diminués. Il est par ailleurs connu
que de rares pathologies humaines, tels le syn-
drome de Beckwith-Wiedemann (BWS) et le syn-
Placenta : fonctions drome de Silver-Russel, associés à des phénotypes
et épigénétique opposés (surcroissance et RCIU, respectivement),
sont liées à des dérégulations de l'expression de
Le placenta est l'organe clé de réalisation de la gènes soumis à empreinte, en particulier IGF2, qui
croissance fœtale. De très nombreux exemples se trouve exprimé par deux allèles au lieu d'un dans
de dysfonction placentaire sont connus chez le BWS.
les espèces modèles et chez l'homme, qui abou-
tissent en général à un défaut de croissance Autres gènes du placenta
nommé retard de croissance intra-utérin
(RCIU), état défini comme une incapacité du Outre l'implication cruciale des mécanismes épi-
fœtus à atteindre son potentiel génétique de génétiques dans la régulation de l'expression des
64
Chapitre 8. Épigénétique et croissance fœtale
65
Partie II. Physiopathologie
17
16
contrôles
9
8
7
6
5
4
3
2
1
0
PE PER RCIU d’origine placentaire
A
allèles G et T sont aussi probables dans les popula- MZF1 et ZBTB7B). Par des approches de biologie
tions caucasiennes. Nous avons d'abord montré que cellulaire, nous avons montré que ces facteurs étaient
l'allèle T était corrélé à une forte expression de la en mesure d'induire l'expression d'un gène rappor-
SERPINA3, au contraire de l'allèle G dans le pla- teur contrôlé par les deux versions de l'élément de
centa (figure 8.2), puis, par analyse génétique de 446 paires de bases du promoteur, et ce de façon
cohortes de patientes et de contrôles, nous avons non différentielle.
montré que l'allèle T dans le placenta prédispose au Ce résultat nous a conduits à faire intervenir une
RCIU. Par analyse bio-informatique, nous avons régulation par la méthylation des deux versions
aussi montré que le SNP (single-nucleotide polymor- du promoteur, méthylation que nous avons réali-
phism) affectait potentiellement la fixation de trois sée in vitro. Dans ce cas, enfin, nous avons pu
facteurs transcriptionnels à doigts de zinc (SP1, détecter une réponse différentielle des deux
66
Chapitre 8. Épigénétique et croissance fœtale
600
500
400
300
200
100
0
GG (n=5) GT (n=16) TT (n=11)
Figure 8.2. Le niveau de l'expression de la SERPINA3 varie en fonction de la présence d'un G ou
d'un T au niveau d'un élément promoteur de 446 paires de bases.
L'allèle T est associé à une expression plus élevée de la SERPINA3. Les placentas de génotype hétérozygote GT ont un
niveau d'expression intermédiaire.
Illustration : D. Vaiman.
67
Partie II. Physiopathologie
20
Induction du gène rapporteur (luciférase) en unités arbitraires
18
16
14
12
Allèle T
10 Allèle T + ZBTB7B
Allèle T méthylé
8
Allèle T méthylé + ZBTB7B
Allèle G
6
Allèle G + ZBTB7B
4 Allèle G méthylé
0
T
7B
lé
7B
lé
7B
B7
hy
hy
le
le
TB
TB
TB
lè
ét
lè
ét
BT
Al
ZB
ZB
ZB
Al
m
m
+Z
T
+
+
lé
le
T
lé
le
hy
lè
hy
le
lè
le
Al
ét
lè
Al
lè
ét
m
Al
Al
m
T
G
le
le
lè
lè
Al
Al
deux enzymes de restriction reconnaissant le site facteur transcriptionnel PDX1, gène que nous avi-
CCGG, MspI insensible et HpaII sensible à la méthy- ons identifié comme jouant un rôle primordial
lation. Nous avons constaté que le promoteur de dans le placenta RCIU dans un modèle rat. Comme
TBX15 est déméthylé dans les placentas RCIU, et pour la SERPINA3, nous avons pu montrer un
que ceci est lié à une diminution de l'expression du effet différentiel de PDX1 selon que le promoteur
gène. Nous avons même pu corréler le niveau de était méthylé ou non. Le message, dans ce cas, est
méthylation du promoteur avec la stature des nou- que la déméthylation du promoteur en RCIU,
veau-nés, montrant que plus le promoteur est combinée avec l'induction de PDX1 dans ce cas,
méthylé, plus ceux-ci sont de grande taille et de conduit à une induction similaire de TBX15 à celle
poids élevé (figure 8.5). D'un point de vue plus rencontrée dans les placentas normaux, chez qui le
mécanistique, nous avons observé que des cellules promoteur est méthylé d'origine. À nouveau,
où l'on inhibe la méthylation de l'ADN voient l'ex- l'ajustement de l'expression se fait par une combi-
pression de TBX15 divisée par 5. Nous avons identi- naison de régulations épigénétiques et de facteurs
fié dans le promoteur des sites de fixation pour le transcriptionnels.
68
Chapitre 8. Épigénétique et croissance fœtale
chroniqué
Hypoxie
Allèle G
Allèle T ZBTB7B
Déméthylation ZBTB7B
Production de SERPINA3
=> Adaptation
3 3
2 2
1 1
Méthylation
0 0
−3 −2 −1 0 1 2 3 −3 −2 −1 0 1 2 3
−1 −1
−2 −3
Figure 8.5. La méthylation du promoteur de TBX15 varie de façon corrélée avec le poids des
nouveau-nés.
Dans le cas spécifique de ce gène, une forte méthylation est associée à une forte expression du gène, tandis qu'une
déméthylation est associée à une extinction transcriptionnelle. On peut voir dans ces associations une adaptation
placentaire du métabolisme lipidique. En RCIU, le promoteur est déméthylé ; la diminution de l'expression du gène qui
pourrait y être associée est à rapprocher du fait que TBX15 s'exprime dans la graisse périviscérale des patients maigres,
tandis que son expression s'éteint au-dessus d'un BMI de 27. En fait, cette association n'a pas lieu car plusieurs facteurs
transcriptionnels (tels PDX1) viennent équilibrer la transcription du gène de façon compensatoire.
Illustration : D. Vaiman d'après Chelbi et al., 2001.
69
Partie II. Physiopathologie
Figure 8.6. Le transcriptome de plusieurs organes dans un modèle de RCIU chez le rat.
Les bandes vertes correspondent à une induction des gènes, tandis que le rouge correspond à une extinction. On voit
clairement que les organes se regroupent indépendamment et donc que les conséquences du RCIU sont différentes dans
chaque organe. L'étude hiérarchique prouve que le placenta et le rein répondent de façon similaire, tandis que le cœur,
le foie et le poumon se regroupent de façon opposée.
Illustration : D. Vaiman.
70
Chapitre 8. Épigénétique et croissance fœtale
1,2 1,2
Bromodomaines DNA methyl transférases
1 1
0,8 0,8
Augmenté Augmenté
0,6 0,6
Inchangé Inchangé
0,4 Diminué 0,4 Diminué
0,2 0,2
0 0
Poumon Foie Rein Cœur Placenta Poumon Foie Rein Cœur Placenta
1,2 1,2
Histone déacétylases Chromodomaines
1 1
0,8 0,8
Augmenté Augmenté
0,6 0,6
Inchangé Inchangé
0,4 Diminué 0,4 Diminué
0,2 0,2
0 0
Poumon Foie Rein Cœur Placenta Poumon Foie Rein Cœur Placenta
1,2 1,2
Histone transférases Tous effecteurs épigénétiques
1 1
0,8 0,8
Augmenté Augmenté
0,6 0,6
Inchangé Inchangé
0,4 Diminué 0,4 Diminué
0,2 0,2
0 0
Poumon Foie Rein Cœur Placenta Poumon Foie Rein Cœur Placenta
Figure 8.7. Les gènes modulant la régulation épigénétique (méthylation de l'ADN, structure de la
chromatine par modification post-traductionnelle des histones) réagissent différemment au RCIU
induit dans un modèle de rat soumis à un régime alimentaire induisant un retard de croissance.
Illustration : D. Vaiman.
71
Partie II. Physiopathologie
Constancia M, Hemberger M, Hughes J, Dean W, Slack JM. Conrad Hal Waddington : the last Renaissance
Ferguson-Smith A, Fundele R, et al. Placental- biologist ? Nat Rev Genet 2002 ; 3 : 889–95.
specific IGF-II is a major modulator of placental and Thomas CP, Raikwar NS, Kelley EA, Liu KZ. Alternate pro-
fetal growth. Nature 2002 ; 417 : 945–8. cessing of Flt1 transcripts is directed by conserved cis-
Diplas AI, Lambertini L, Lee MJ, Sperling R, Lee YL, elements within an intronic region of FLT1 that
Wetmur J, et al. Differential expression of imprinted reciprocally regulates splicing and polyadenylation.
genes in normal and IUGR human placentas. Nucleic Acids Res 2010 ; 38 : 5130–40.
Epigenetics 2009 ; 4 : 235–40. Vaiman D, Gascoin-Lachambre G, Boubred F, Monodn F,
Lander ES, Linton LM, Birren B, Nusbaum C, Zody MC, Feuerstein JM, Ligi L, et al. The intensity of IUGR-
Baldwin J, et al. Initial sequencing and analysis of the induced transcriptome deregulations is inversely
human genome. Nature 2001 ; 409 : 860–921. correlated with the onset of organ function in a rat
Minard ME, Jain AK, Barton MC. Analysis of epigenetic model. Plos One 2011 ; 6 (6) : e21222.
alterations to chromatin during development. Venter JC, Adams MD, Myers EW, Li PW, Mural RJ,
Genesis 2009 ; 47 : 559–72. Sutton GG, et al. The sequence of the human genome.
Rassoulzadegan M, Grandjean V, Gounon P, Vincent S, Science 2001 ; 291 : 1304–51.
Gillot I, Cuzin F. RNA-mediated non-mendelian Weksberg R, Shuman C, Beckwith JB. Beckwith-Wiedemann
inheritance of an epigenetic change in the mouse. syndrome. Eur J Hum Genet 2010 ; 18 : 8–14.
Nature 2006 ; 441 : 469–74.
Sibley CP, Turner MA, Cetin I, Ayuk P, Boyd CA, D'Souza
SW, et al. Placental phenotypes of intrauterine
growth. Pediatr Res 2005 ; 58 : 827–32.
72
Régulation Chapitre 9
de la croissance fœtale :
quelle place pour
quelles hormones ?
Jean Guibourdenche
La croissance fœtale est un processus complexe de d'hypothyroïdie congénitale ont une taille nor-
par son déroulement et son intensité. Elle résulte male à la naissance, avec néanmoins un retard de
de facteurs génétiques, endocrines et environne- maturation osseuse. Ces hormones sont en fait
mentaux plus ou moins intriqués, qu'ils soient principalement impliquées dans la maturation
d'origine fœtale, maternelle ou placentaire. des fonctions tissulaires et métaboliques du fœtus.
Différentes hormones sont détectables dès la fin L'insuline et les insuline-like growth factors (IGF)
du premier trimestre dans le sang fœtal, et ce à des jouent un rôle essentiel dans la croissance
concentrations parfois élevées, comme la thy- embryonnaire puis fœtale. Ces facteurs de crois-
roxine LT4 et l'hormone de croissance hypophy- sance modulent en effet les étapes de migration et
saire (hGH). Elles résultent d'une production de différenciation cellulaire. Ils interviennent
fœtale, puisque le placenta est imperméable à la ensuite dans la croissance staturale et pondérale
plupart des hormones maternelles, à l'exception de du fœtus, puisqu'à leurs effets mitogènes s'ajoutent
la LT4 qui le traverse faiblement. Le placenta exerce leurs effets métaboliques. L'insuline et son récep-
même un effet protecteur vis-à-vis des hormones teur sont détectables dans les tissus fœtaux dès la
maternelles en inactivant le cortisol maternel en fin du premier trimestre. Sa sécrétion est modulée
cortisone sous l'action d'une déshydrogénase. par la glycémie fœtale dès le deuxième trimestre.
L'altération de cette activité enzymatique expose le Le fœtus, de par son immaturité enzymatique, ne
fœtus à un risque d'hypercortisolémie associée à produit pas de glucose et sa glycémie dépend donc
des retards de croissance intra-utérins (RCIU). Les uniquement du transfert placentaire du glucose
récepteurs de ces hormones s'expriment précoce-
© 2012, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
73
Partie II. Physiopathologie
74
Chapitre 9. Régulation de la croissance fœtale : quelle place pour quelles hormones ?
IGF-1
Métabolisme maternel:
lipides, glucides....
Adipokines pGH
Placenta
Glucose, O2 : Facteurs
Hormones métabolisme de croissance
(thyroxine,cortisol) fœtal (IGF)
Maturation Croissance
fœtale
75
Principales étiologies Chapitre 10
génétiques du retard
de croissance
intra-utérin
Géraldine Viot
Les pathologies fœtales rendent compte, quant à terminales. Le caryotype fait donc partie du
elles, d'environ 15 % des RCIU. Elles sont variées, bilan de tout RCIU dont l'origine semble fœtale.
à type d'infections, de malformations mais aussi Il peut être complété par des techniques ciblées
de maladies génétiques et chromosomiques. d'hybridation in situ.
Enfin, les pathologies placentaires sont respon- Les disomies uniparentales (DUP) ainsi que les
sables d'environ 5 % des RCIU. Dans ces condi- mosaïques confinées au placenta (MCP) peuvent
tions, on comprend l'intérêt de proposer une également être à l'origine de RCIU.
79
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
80
Chapitre 10. Principales étiologies génétiques du retard de croissance intra-utérin
81
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
élargie. Le rachis et le crâne sont normaux. Par la absent (figure 10.1). Les os des membres sont très
suite, la séquence d'éruption dentaire est pertur- courts, les métaphyses larges et en cupules avec
bée. Les dents sont petites, écartées, avec fusion des éperons latéraux. Le nanisme est majeur. Le
possible. Les cardiopathies, rapportées dans un tronc est court et large. Le pronostic vital est en jeu
tiers des cas, sont principalement des communi- à très court terme. Les corps vertébraux et le
cations interauriculaires (CIA) et des communi- sacrum ne sont pas ossifiés. En revanche, les dis-
cations interventriculaires (CIV). Classiquement, tances interpédiculaires des dernières vertèbres
il n'y a pas de déficit intellectuel associé. lombaires ne sont pas réduites. Les ailes iliaques
L'évolution de cette entité est variable mais il sont petites, le bord interne est concave en dedans.
semble qu'en cas de malformation cardiaque Le toit du cotyle est horizontal, parfois légèrement
associée, l'évolution soit plus sévère. Lorsque les concave en bas. Les branches ischiopubiennes sont
enfants survivent, la taille moyenne attendue à mal ou pas ossifiées. Les omoplates sont petites.
l'âge adulte est aux alentours de 1,50 m, avec des Les os des mains et des pieds sont trapus. À l'histo-
écarts toutefois importants. Cette affection auto- logie, on retrouve une augmentation de la densité
somique récessive se rattache au gène EvC. des cellules du cartilage dont les capsules sont très
grandes. Il existe par ailleurs une sclérose des
Fibrochondrogenèse canaux vasculaires qui traversent le cartilage.
Cette affection, autosomique dominante, s'ex-
La limite de la métaphyse des os longs est élargie plique par des mutations du collagène de type II.
dans cette affection. Les os des mains et des pieds
sont trapus. Les corps vertébraux ont une forme de Atélostéogenèse type II
poire avec effilement de leur partie postérieure qui
n'est pas fusionnée avec l'arc vertébral. Il existe une Cette entité se traduit par un élargissement méta-
fibrose du cartilage de conjugaison. Cette affection physaire des os longs avec métaphyse bifide au
se transmet sur un mode autosomique récessif. niveau de l'humérus. Le cubitus et le péroné sont
particulièrement courts, massifs et incurvés. Les
ailes iliaques ont un aspect carré. Les os des mains
Achondrogenèse type II sont extrêmement brefs avec duplication de la pre-
Cette maladie se caractérise par une brièveté mière phalange du pouce. Cette affection est
majeure des os longs associée à un développement autosomique récessive et s'explique par des muta-
excessif du crâne. Le massif nasal est quasiment tions du gène DTDST.
82
Chapitre 10. Principales étiologies génétiques du retard de croissance intra-utérin
84
Chapitre 10. Principales étiologies génétiques du retard de croissance intra-utérin
avec un RCIU plus modéré. Il existe peu ou pas de enfant sur dix est porteur d'une cardiopathie
modifications faciales. Les membres inférieurs associée. La moitié des enfants atteints décèdent
sont souvent incurvés (figure 10.3). Les os longs au cours de la première année de vie.
sont trapus, avec élargissement métaphysaire. La Différents sous-groupes ont été individualisés.
hauteur des ailes iliaques est réduite et le toit des
cotyles est horizontal. Les distances interpédicu- Chondrodysplasie ponctuée rhizomélique
laires des dernières vertèbres lombaires se rétré- Le raccourcissement des humérus et des fémurs est
cissent ou n'augmentent pas. La transmission de majeur, avec élargissement et irrégularité des méta-
cette maladie est autosomique dominante. Il physes. Les calcifications se situent électivement au
existe une hétérogénéité génétique, mais la majo- niveau des hanches, des genoux et des coudes. Des
rité des cas s'expliquent par une mutation du gène fissures des corps vertébraux sont également pré-
FGFR3 au codon 540. sentes. Des cardiopathies, des cataractes et un déficit
intellectuel complètent cette entité. Les chondrodys-
Chondrodysplasies ponctuées plasies ponctuées rhizoméliques se transmettent de
façon autosomique récessive et s'accompagnent d'un
Elles se caractérisent par des calcifications se pronostic vital rapidement défavorable. Ce type est
localisant principalement au niveau des zones secondaire à des anomalies peroxysomales (pertur-
articulaires et des pièces osseuses d'origine bations du métabolisme des plasmalogènes dans le
enchondrale. Ces calcifications disparaîtront sous-type I et du catabolisme de l'acide phytanique
dans les premiers mois de vie. S'associent un rac- pour le sous-type II).
courcissement rhizomélique des membres acces-
sible en anténatal, un aspect trapu des mains et Chondrodysplasies de type
des pieds, des caractéristiques faciales dans 50 % Conradi-Hünerrmann
des cas avec en particulier une dépression du mas- Elles se traduisent par un raccourcissement asy-
sif nasal. Une cataracte est présente chez 1 enfant métrique des os longs et des calcifications tou-
sur 3. Des atteintes cutanées sont rapportées dans chant également le rachis. Une dysmorphie faciale
les mêmes proportions à type d'épaississement est classiquement associée, mais moins marquée.
cutané, d'hyperkératose, d'érythrodermie. Un Ichtyose et cataracte peuvent compléter le tableau
déficit intellectuel est classiquement associé. Un clinique. Nous n'aborderons que le sous-type
85
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
Ostéogenèse imparfaite
L'ostéogenèse imparfaite (OI) fait partie des mala-
dies avec transparence osseuse excessive. Nous
n'aborderons que les deux formes de début anténa-
tal. Tout d'abord, la forme létale se traduit par une
brièveté des os longs qui sont élargis, trapus et
incurvés. La déminéralisation des os du crâne est
majeure avec élargissement crânien sur le plan
transversal. Le nez est en bec d'aigle. Le menton est
petit. Le thorax est étroit, avec des côtes larges en
bambou, aux cals nombreux et dont les fractures Figure 10.4. Ostéogenèse imparfaite de type
létal.
sont innombrables. Ce thorax en cloche est respon-
Aspect en bambou des os, secondaire à des cals multiples
sable d'une défaillance respiratoire dès la nais- survenus après fractures.
sance. En anténatal, l'hyperclarté nucale est D'après Maroteaux et al., Maladies osseuses de l'enfant,
fréquente (figure 10.4). 4e édition, Flammarion, 2002.
La forme sévère de l'OI est plus fréquente.
L'atteinte des os longs existe, mais est moins fréquentes. Cette maladie est autosomique domi-
sévère. L'ossification du crâne est très insuffi- nante par atteinte du gène COL2A1.
sante, avec de nombreux os wormiens. Il existe
également des cals osseux sur les côtes, mais Dysplasie spondyloépiphysaire
beaucoup plus graciles que dans la forme létale. Il
est plus difficile de prédire l'évolution de cette congénitale
forme, le décès de l'enfant pouvant survenir dès Cette maladie se traduit par la réduction de la taille
la naissance mais aussi plus tardivement. La des os longs et du tronc de début anténatal. Il existe
croissance staturopondérale est ralentie en post- une cyphose dorsale d'aggravation progressive ainsi
natal. Le nombre de fractures est très variable. qu'une hyperlordose lombaire. Les mouvements
Ces deux formes sont de transmission autoso- articulaires sont souvent réduits. Radiologiquement,
mique dominante et s'expliquent par des muta- les anomalies touchent électivement le rachis (aspect
tions des gènes COL1A2 et COL1A1. trapézoïde des corps vertébraux) et les hanches
(retard d'ossification des branches ischiopubiennes ;
Maladie de Kniest les ailes iliaques sont trapues). Par ailleurs, les côtes
sont un peu courtes avec un élargissement de leur
Dans cette affection, le tronc et les membres sont partie antérieure. La partie supérieure des fémurs est
courts. Les corps vertébraux ont une hauteur irrégulière et élargie. La tête et le col fémoraux sont
réduite. Les articulations ont un volume aug- tout à fait anormaux. La diaphyse des os longs est
menté avec une mobilité réduite. Avec l'âge, les courte, parfois incurvée. Une myopie est très fré-
épiphyses ont un développement excessif. Le quemment associée. La transmission est autoso-
visage est arrondi avec aplatissement de la racine mique dominante par atteinte du collagène de type
du nez et fente palatine. Myopie et surdité sont II (COL2A1 en 12q13.11).
86
Chapitre 10. Principales étiologies génétiques du retard de croissance intra-utérin
87
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
type II, plus sévère, se caractérise par des malfor- retard. Les enfants présentent une dysmorphie
mations multiviscérales. Au niveau génique, le faciale caractérisée par une face triangulaire, une
type I est secondaire à l'association d'une muta- rétraction de l'étage moyen, un nez bulbeux, une
tion majeure associée à une mutation mineure du columelle large, un philtrum court, une lèvre
gène DHCR7 alors que dans le type II, les enfants supérieure fine. Le retard porte essentiellement
sont porteurs de deux mutations majeures du sur le langage. Ce syndrome, de relativement bon
gène DHCR7. pronostic sur le plan intellectuel, semble se trans-
mettre sur un mode autosomique dominant. La
majorité des cas sont sporadiques. Un âge paternel
Syndrome de Hallermann-Streiff-
élevé est fréquemment associé.
François
À côté de ces syndromes, d'autres beaucoup plus
Ce syndrome associe un retard de croissance har- rares se caractérisent également par un RCIU
monieux, de début anténatal. La dysmorphie comme les syndromes de Dubowitz, de Bloom, de
faciale est caractéristique avec micrognatisme, Johanson-Blizzard, de Short (dysmorphie faciale,
nez busqué avec hypoplasie cartilagineuse, bra- lipoatrophie, retard de croissance, anomalie de
chycéphalie, hypoplasie malaire, palais arqué, Rieger, etc.). Les cytopathies mitochondriales
dents néonatales, hypodontie, atrophie cutanée, peuvent également se révéler en anténatal par un
hypotrichose généralisée (alopécie), microphtal- retard de croissance.
mie, cataracte congénitale, défaut d'ossification
du crâne, retard de fermeture des sutures. La plu-
part des enfants ont un développement psycho- Conclusion
moteur normal. Tous les cas rapportés à ce jour
sont sporadiques. Le RCIU est peu spécifique en anténatal et ses ori-
gines sont multiples. Toutefois, il est important de
Syndrome de Seckel rechercher d'autres malformations associées ainsi
qu'une dysmorphie faciale qui conduiront à évo-
Dans ce syndrome, le retard statural est sévère. Le quer un syndrome génétique. Alors, le pronostic
poids moyen de naissance à terme est de 1500 g. À de ce RCIU sera celui de l'entité identifiée. Le
l'âge adulte, la taille avoisine les 100 cm. Le déficit bilan en anténatal n'est pas facile, mais il est
intellectuel est marqué, avec 1 enfant sur 2 pré- important de s'aider des outils radiologiques,
sentant un QI inférieur à 50. La dysmorphie cytogénétiques et moléculaires pour asseoir l'hy-
faciale associe une microcéphalie avec front pothèse diagnostique et définir l'évolution future.
fuyant, un nez proéminent, des oreilles dyspla- Il existe aussi un réel intérêt à proposer un exa-
siques avec absence de lobe. Au niveau des mains, men placentaire avec en particulier la recherche
il existe une clinodactylie des cinquièmes doigts, des MCP ou DUP.
une agénésie de certaines phalanges. Les têtes
radiales et fémorales sont luxées, les rotules hypo- Références
plasiques. Des malformations cérébrales variées
Anderson IJ, Goldberg RB, Marion RW, Upholt WB,
sont rapportées (agénésie du corps calleux, ano- Tsipouras P. Spondyloepiphyseal dysplasia congeni-
malies corticales, pachygyrie, etc.). Ce syndrome, tal : genetic linkage to type II collagen (COL2A1).
autosomique récessif, est caractérisé par une hété- Am J Hum Genet 1990 ; 46 : 896–901.
rogénéité génétique (ATR en 3q23, CEP152 en Braverman N, Lin P, Moebius FF, Obie C, Moser A,
15q21.1 et trois autres loci en 13q12.12, 14q21q22, Glossmann H, et al. Mutation in the gene encoding
18p11.31q11.2). 3beta-hydroxysteroid-D8, D7-isomerase cause
X-linked dominant Conradi-Hünermann syndrome.
Nature Genet 1999 ; 22 : 291–4.
Syndrome de Floating-Harbor Cohen M. Hallermann-Streiff syndrome : a review. Am J
Med Genet 1991 ; 41 : 488.
Toutes les mensurations de naissance sont au Cohen-Sohal L, Bonaventure J, Maroteaux P. Dominant
3e percentile, le retard de croissance statural s'ac- mutations in familial lethal and severe osteogenesis
centuant en postnatal. L'ossification est très en imperfecta. Hum Genet 1991 ; 87 : 297–301.
88
Chapitre 10. Principales étiologies génétiques du retard de croissance intra-utérin
Faivre L, Le Merrer M, Lyonnet S, Plauchu H, Dagoneau N, Petrij F, Giles RH, Dauwerse HG, Saris JJ, Hennekam RC,
Campos-Xavier AB, et al. Clinical and genetic hete- Masuno M, et al. Rubinstein-Taybi syndrome caused
rogeneity of Seckel syndrome. Am J Med Genet by mutations in the transcriptional co-activator CBP.
2002 ; 112 : 379. Nature 1995 ; 346 : 348.
Gillis LA, McCallum J, Kaur M, DeScipio C, Yaeger D, Rossi A, Bonaventure J, Delezoide AL, Cetta G, Superti-
Mariani A, et al. NIPBL mutational analysis in Furga A. Undersulfation of proteoglycans synthe-
120 individuals with Cornelia de Lange syndrome sized by chondrocytes from a patient with
and evaluation of genotype-phenotype correlations. achondrogenesis type 1B homozygote for an L483P
Am J Hum Genet 2004 ; 75 : 610. substitution in the diastrophic dysplasia sulfate
Godfrey M, Hollister D. Type II achondrogenesis-hypo- transporter. J Biol Chem 1996 ; 271 : 18456–64.
chondrogenesis : identification of abnormal type II Rousseau F, Bonaventure J, Legeai-Mallet L, Pelet A,
collagen. Am J Hum Genet 1988 ; 43 : 904–13. Rozet JM, Maroteaux P, et al. Mutations in the gene
Hannula K, Kere J, Pirinen S, Holmberg C, Lipsanen- encoding fibroblast growth factor receptor-3 gene in
Nyman M. Do patients with maternal uniparental achondroplasia. Nature 1994 ; 371 : 252–4.
disomy for chromosome 7 have a distinct mild Rousseau F, Bonaventure J, Legeai-Mallet L, Schmidt H,
Silver-Russell phenotype ? J Med Genet 2001 ; Weissenbach J, Maroteaux P, et al. Clinical and gene-
38 : 273. tic heterogeneity of hypochondroplasia. J Med Genet
Heymans HSA, Oorthuys JWE, Nelck G, Wanders RJA, 1996 ; 33 : 749–52.
Dingemans KP, Schutgens RBH. Peroxisomal abnor- Rousseau F, Saugier P, Le Merrer M, Munnich A,
malities in rhizomelic chondrodysplasia punctata. Delezoide AL, Maroteaux P, et al. Stop codon FGFR3
J Inher Metab Dis 1986 ; 9 : 329–31. mutations in thanatophoric dwarfism type I. Nat
Lazzaroni-Fossati F, Stanescu V, Stanescu R, Serra G, Genet 1995 ; 10 : 11–2.
Magliano P, Maroteaux P. La fibrochondrogenèse. Ruiz-Perez VL, Ide SE, Strom TM, Lorenz B, Wilson D,
Arch Fr Péd 1978 ; 35 : 1096–104. Woods K, et al. Mutations in a new gene in Ellis van
Maroteaux P, Le Merrer M. In : Maladies osseuses de l'en- Creveld syndrome and Weyers acrodental dysosto-
fant. 4e éd Paris : Flammarion ; 2002. sis. Nat Genet 2000 ; 24 : 283–6.
Opitz J, de La Cruz F. Cholesterol metabolism in the Sillence DO, Kozlowski K, Rogers JG, Sprague PL,
RSH/Smith-Lemli-Opitz syndrome : summary of Cullity GJ, Osborn RA. Atelosteogenesis : evidence
an NICHD Conference. Am J Med Genet 1994 ; for heterogeneity. Pediatr Radiol 1987 ; 17 : 112–8.
50 : 326. Winterpacht A, Hilbert M, Schwarze U, Mundlos S,
Patton MA, Hurst J, Donnai D, McKeown CM, Cole T, Spranger J, Zabel BU. Kniest and Stickler dysplasia
Goodship J. Floating-Harbor syndrome. J Med phenotypes caused by collagen type II gene
Genet 1991 ; 28 : 201. (COL2A1) defect. Nature Genet 1993 ; 3 : 323–6.
89
Retard de croissance Chapitre 11
intra-utérin et anomalies
chromosomiques
Aurélie Coussement, Agnès Choiset, Jean-Michel Dupont
l'anomalie ;
puisqu'elles seraient responsables d'environ
• le type III, le plus rare, où les deux lignées cellu-
20 % des RCIU, surtout s'ils sont de début pré-
laires sont concernées.
coce (début avant 26 semaines d'aménorrhée
Le retard de croissance intra-utérin
[SA]). En dehors des classiques aneuploïdies, un Ces MCP, qui sont retrouvées dans environ 2 %
certain nombre d'anomalies de structure désé- des grossesses, résultent d'une malségrégation
quilibrées, principalement des délétions, peuvent chromosomique survenue soit pendant la méiose,
s'accompagner de retard de croissance. Certaines soit en postzygotique, lors d'une division mito-
ont permis d'identifier des régions du génome tique au cours du développement embryonnaire
associées à un trouble de la croissance et parfois précoce.
91
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
Syncytiotrophoblaste
92
Chapitre 11. Retard de croissance intra-utérin et anomalies chromosomiques
d'un dysfonctionnement placentaire lié à la chez les embryons aneuploïdes, soit par perte du
lignée cellulaire anormale, soit en raison d'une chromosome surnuméraire en cas de trisomie,
disomie uniparentale (DUP) associée. soit par duplication du seul chromosome présent
en cas de monosomie (figure 11.3). Plus excep-
tionnellement, une DUP peut être la conséquence
Disomies uniparentales : des d'une complémentation gamétique, c'est-à-dire de
la fécondation d'un gamète nullisomique pour un
« anomalies chromosomiques » chromosome donné (gamète à 22 chromosomes
pas comme les autres au lieu de 23) par un gamète disomique pour cette
même paire (gamète à 24 chromosomes). Quel
La DUP, dont le concept a été publié pour la pre- que soit le mécanisme en cause, on retrouve à leur
mière fois au début des années 1980 par Eric Engel, origine une non-disjonction le plus souvent méio-
correspond à la situation où les deux chromosomes tique, et toutes les situations à risque accru de
homologues d'une même paire chromosomique non-disjonction (âge maternel élevé, anoma-
sont transmis par le même parent. Il n'y a donc pas lie chromosomique parentale…) sont associées à
à proprement parler d'anomalie chromosomique, une fréquence plus élevée de DUP. L'existence
mais une perte de la transmission biparentale de d'une MCP constitue donc un signe d'appel
l'information génétique portée par la paire chromo- important de DUP, puisque la MCP est souvent la
somique concernée. On distingue l'hétérodisomie conséquence d'une non-disjonction méiotique.
uniparentale quand le sujet reçoit les deux homolo- Le retentissement fonctionnel des DUP est la
gues de son parent, et l'isodisomie uniparentale qui conséquence soit d'une perturbation de l'expres-
résulte de la transmission en double exemplaire sion de gènes de croissance soumis à empreinte
d'un des deux homologues parentaux (figure 11.2). parentale, soit d'une perte d'hétérozygotie qui
Les DUP sont la conséquence des mécanismes révèle une mutation récessive dans le cas de
régulateurs qui visent à restaurer un état diploïde l'isodisomie.
Transmission biparentale
93
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
Correction d’aneuploïdie
Iso-ou hétérodisomie
Isodisomie
Complémentation gamétique
Fécondation
Iso-ou hétérodisomie
Figure 11.3. Différents mécanismes de correction d'aneuploïdie.
Illustration : Pr J.-M. Dupont.
94
Chapitre 11. Retard de croissance intra-utérin et anomalies chromosomiques
plusieurs fragments répartis sur la face fœtale) et Temple IK, et al. Duplications of chromosome 11p 15 of
du c aryotype sanguin. maternal origin result in a phenotype that includes
growth retardation. Hum Genet 2002 ; 111 (3) : 290–6.
En cas d'identification d'une anomalie de nombre
Kalousek DK, Vekemans M. Confined placental mosai-
en mosaïque lors d'une biopsie de villosité cho- cism. J Med Genet 1996 ; 33 (7) : 529–33.
riale, il est nécessaire d'évoquer la possibilité de Kalousek DK. Pathogenesis of chromosomal mosaicism
rechercher une DUP si le chromosome impliqué and its effect on early human development. Am J
est porteur d'une région soumise à empreinte Med Genet 2000 ; 91 (1) : 39–45.
(chromosomes 6, 7, 11, 14, 15 et 20 essentielle- Lestou V, Kalousek D. Confined placental mosaicism and
ment). En effet, dans le cas d'une MCP résultant de intrauterine fetal growth. Arch Dis Child Fetal Neonatal
la correction d'un embryon initialement triso- Ed 1998 ; 79 (3) : F223.
mique, la perte aléatoire de l'un des trois chromo- Monk D, Moore GE. Intrauterine growth restriction : genetic
somes aboutit 1 fois sur 3 à la formation d'une causes and consequences. Semin Fetal Neonatal Med
DUP par conservation des deux chromosomes 2004 ; 9 (5) : 371–8.
(sur les trois) transmis par le même parent. En Robinson WP, Barrett IJ, Bernard L, Telenius A,
dehors de ces situations, c'est-à-dire pour les paires Bernasconi F, Wilson RD, et al. Meiotic origin of tri-
somy in confined placental mosaicism is correlated
chromosomiques sans région soumise à empreinte, with presence of fetal uniparental disomy, high levels
l'intérêt clinique de la recherche de DUP est discu- of trisomy in trophoblast, and increased risk of fetal
table dans la mesure où il est difficile de faire la intrauterine growth restriction. Am J Hum Genet
part des rôles respectifs de la DUP et de l'aneuploï- 1997 ; 60 (4) : 917.
die en mosaïque dans la survenue des éventuels Rogan PK, Seip JR, Driscoll DJ, Papenhausen PR,
signes cliniques associés. Johnson VP, Raskin S, et al. Distinct 15q genotypes
in Russell-Silver and Ring 15 syndromes. Am J Med
Genet 1996 ; 62 (1) : 10–5.
Références Schinzel A. Genomic imprinting : consequences of unipa-
rental disomy for human disease. Am J Med Genet
Concolino D, Rossi E, Strisciuglio P, Iembo MA, Giorda R, Suppl 1993 ; 46 : 683–4.
Ciccone R, et al. Deletion of a 760 kb region at Snijders RJ, Sherrod C, Gosden CM, Nicolaides KH. Fetal
4p 16 determines the prenatal and postnatal growth growth retardation : associated malformations and
retardation characteristic of Wolf-Hirschhorn syn- chromosomal abnormalities. Am J Obstet Gynecol
drome. J Med Genet 2007 ; 44 (10) : 647–50. 1993 ; 168 (2) : 547–55.
Cooper WN, Luharia A, Evans GA, Raza H, Haire AC, Spence JE, Perciaccante RG, Greig GM, Willard HF,
Grundy R, et al. Molecular subtypes and phenotypic Ledbetter DH, Hejtmancik JF, et al. Uniparental
expression of Beckwith-Wiedemann syndrome. Eur disomy as a mechanism for human genetic disease.
J Hum Genet 2005 ; 13 (9) : 1025–32. Am J Hum Genet 1988 ; 42 (2) : 217.
DeLozier-Blanchet C, Vekemans M. Mosaïque chromoso- Stetten G, Escallon CS, South ST, McMichael JL, Saul DO,
mique et retard de croissance intra-utérin. Arch Blakemore KJ. Reevaluating confined placental
Pédiat 1997 ; 4 (9) : 815–7. mosaicism. Am J Med Genet A 2004 ; 131 (3) :
Eggermann T, Meyer E, Obermann C, Heil I, Schüler H, 232–9.
Ranke MB, et al. Is maternal duplication of 11p 15 Tamura T, Tohma T, Ohta T, Soejima H, Harada N, Abe
associated with Silver-Russell syndrome ? J Med K, et al. Ring chromosome 15 involving deletion of
Genet 2005 ; 42 (5) : e26. the insulin-like growth factor 1 receptor gene in a
Engel E. A new genetic concept : the uniparental disomy patient with features of Silver-Russell syndrome.
and its potential effect, the isodisomy. J Genet Hum Clin Dysmorphol 1993 ; 2 (2) : 106–13.
1980 ; 28 (1) : 11–22. Wolstenholme J. Confined placental mosaicism for triso-
Engel E. La disomie uniparentale : revue des causes et mies 2, 3, 7, 8, 9, 16, and 22 : their incidence, likely
conséquences en clinique humaine. Ann Génét 1995 ; origins, and mechanisms for cell lineage compart-
38 (3) : 113–36. mentalization. Prenat Diagn 1996 ; 16 (6) : 511–24.
Fisher AM, Thomas NS, Cockwell A, Stecko O, Kerr B,
95
Quand suspecter Chapitre 12
l'origine infectieuse
d'un retard de
croissance intra-utérin ?
Anne-Gaelle Cordier, Olivier Picone, Christelle Vauloup-Fellous,
Alexandra Benachi
97
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
tardifs. Une diminution des divisions cellulaires, sérologiques (maladies auto-immunes, traitement
un ralentissement des mitoses avec inhibition de par immunoglobulines, autre infection). De plus,
l'assemblage de l'actine (risque de cassures chro- des IgM résiduelles sont fréquemment détectées
mosomiques) et une nécrose non inflammatoire plusieurs mois après la contamination ou la vacci-
sont probablement impliqués, l'atteinte étant nation (notamment dans le cas de la rubéole). En
variable selon les organes. Le type de lésions, présence d'IgM spécifiques, il est indispensable de
notamment cérébrales, dépend de la date de conta- réaliser des examens complémentaires, notam-
mination du fœtus. Pendant les 4 premières ment la mesure de l'indice d'avidité des IgG. Cette
semaines de l'infection surviennent des lésions de avidité est fonction de l'ancienneté de l'infection,
cytolyse, de vascularite. Elles sont responsables de de l'agent infectieux en cause, du patient testé, de
la constitution, au cours des semaines suivantes, de la technique utilisée. Une avidité faible est en
zones de nécrose et de sclérose, de thromboses et faveur d'une infection récente, tandis qu'une avi-
de nodules microgliaux. Il en résulte une destruc- dité élevée évoque une infection ancienne (plus de
tion plus ou moins étendue du tissu cérébral. Des 2 à 4 mois en général) et est donc à interpréter en
processus destructifs peuvent également avoir lieu fonction du terme de la grossesse.
dans l'infection à CMV. En résumé, en l'absence d'IgG, il est exclu que le
Le processus de RCIU peut donc être dû soit à RCIU soit dû à l'infection. Si l'on objective une
l'atteinte placentaire et à la perturbation des infection postconceptionnelle mais datant de plus
échanges maternofœtaux, soit à l'atteinte directe de 1 mois au moment de la constatation du RCIU,
des organes fœtaux. on peut proposer une évaluation fœtale (amnio-
centèse). Si l'infection est très récente (moins de
1 mois), il est peu probable que l'éventuel retentis-
Diagnostic sement sur la croissance fœtale puisse déjà être
objectivé à l'échographie. Enfin, en cas de primo-
Première étape : anamnèse infection à CMV antérieure à la grossesse en
cours, l'étiologie virale ne peut être exclue, car les
Devant la constatation d'un RCIU et pour étayer infections secondaires (réinfection ou réactiva-
une origine infectieuse, on recherchera tout tion) peuvent être à l'origine d'infections congéni-
d'abord un contage, une éruption, la survenue tales symptomatiques.
d'une hyperthermie ou d'un syndrome grippal ou Dans tous les cas, le dialogue clinicobiologique
mononucléosique. est essentiel, car les résultats biologiques sont
L'infection maternelle passe le plus souvent ina- toujours à interpréter en fonction de la clinique.
perçue en raison de signes cliniques absents ou Il est souvent nécessaire de se procurer des
peu spécifiques (exemple : fatigue). En effet, 20 % sérums datant du début de la grossesse (dosage
seulement des infections maternelles à CMV de βHCG) ou, mieux, d'avant celle-ci (grossesse
seraient symptomatiques et une éruption n'est précédente).
retrouvée que dans 50 % des cas de rubéole. Le
contexte environnemental et familial pourra Échographie
orienter vers l'étiologie infectieuse virale, en parti-
culier en cas de contact personnel ou professionnel Elle recherche les signes évoquant une contamina-
avec des enfants en bas âge. tion fœtale et évalue son degré de sévérité. En effet,
les RCIU d'origine infectieuse sont souvent asso-
Seconde étape : analyses ciés à d'autres signes échographiques pouvant
orienter le diagnostic, mais aucun signe n'est patho-
sérologiques gnomonique d'un agent infectieux particulier.
La mise en évidence d'IgM peut faire suspecter De façon non spécifique, l'examen doit tout d'abord
une infection récente, mais elle n'est pas suffisante confirmer le RCIU, en s'attachant particulièrement
pour l'affirmer. Des IgM non spécifiques par sti- au périmètre crânien (PC), en respectant les cri-
mulation polyclonale non spécifique du système tères de qualité dictés par les recommandations du
immunitaire peuvent interférer dans les réactions Comité technique national (Rapport du comité
98
Chapitre 12. Quand suspecter l'origine infectieuse d'un retard de croissance intra-utérin ?
99
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
100
Chapitre 12. Quand suspecter l'origine infectieuse d'un retard de croissance intra-utérin ?
Varicelle-zona
Parmi les éléments du syndrome de varicelle congé-
nitale (embryofœtopathie varicelleuse), on peut
dépister échographiquement des atteintes céré-
brales et extracérébrales. L'atteinte du système ner-
veux central (SNC) peut se présenter par une
hydrocéphalie, une microcéphalie avec microphtal-
Figure 12.5. Rubéole congénitale, vue faciale : mie, voire une atrophie corticale et cérébelleuse
cataracte (16 SA). avec des kystes porencéphaliques. Les lésions tissu-
laires regroupent des hypotrophies et des hypopla-
sies musculaires, des hypoplasies de membres, des
membres en flexion, des malpositions multiples des
extrémités. L'atteinte peut également être squelet-
tique, avec des hypoplasies des côtes, des clavicules,
de la mandibule, ou encore un hémithorax. La topo-
graphie des lésions musculosquelettiques est géné-
ralement la même que celle des lésions cutanées
(atteinte métamérique). Les lésions urodigestives
sont plus rares, de type sténose duodénale, atrésie
sigmoïdienne, calcifications hépatospléniques, et
hydronéphroses ou reflux vésico-urétéral.
La revue de la littérature résumée dans le tableau
12.1 retrouve 30 % de RCIU, 55 % d'hypoplasies de
Figure 12.6. Rubéole congénitale, vue faciale :
membres, 57 % d'atteintes du SNC (dont les atteintes
microphtalmie unilatérale (16 SA).
ophtalmiques), 23 % de calcifications hépatiques.
Les autres lésions sont non dépistables à l'écho-
graphie : cicatrices cutanées pigmentées (100 %),
nécessaire de s'attacher à la dynamique de crois- paralysie faciale, surdité, syndrome de Claude
sance et à en rechercher une altération. L'infection Bernard, choriorétinite, cataracte, paralysie phré-
congénitale rubéoleuse est devenue très rare dans nique ou bulbaire.
101
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
Syphilis
C'est une infection bactérienne à évoquer, puisque
son incidence augmente à nouveau depuis
quelques années (prévalence 0,005 %). La popula-
tion urbaine hétérosexuelle multipartenaire est la
Figure 12.7. Toxoplasmose congénitale, coupe plus exposée, et elle est associée dans 10 % des cas
transversale : dilatations ventriculaires (25 SA). à la découverte d'une séropositivité VIH (virus de
l'immunodéficience humaine). En raison de la dis-
sémination hématogène du Treponema pallidum,
la transmission au fœtus est possible à tout
moment de la grossesse, en particulier après 16 SA
ou 20 SA selon les études. Ceci justifie le dépistage
et le traitement de toute syphilis primaire active au
premier trimestre de grossesse. La transmission
maternofœtale est de 70 à 100 % si la syphilis est
primaire et non traitée, de 40 % si elle est latente
précoce et de 10 % si elle est latente tardive. On
observe une atteinte fœtale symptomatique dans
50 % des cas de syphilis primaire et secondaire et
dans 10 % des formes tardives. Ces risques
deviennent quasiment nuls si la patiente est traitée.
Le risque de mort fœtale in utero passe de 30,4 %
Figure 12.8. Toxoplasmose congénitale, coupe sans traitement à 5,5 % après une thérapeutique
sagittale : calcifications intracérébrales complète. De même, la prématurité est multipliée
périventriculaires (29 SA). par 4,3 en cas d'atteinte fœtale. Un RCIU est
102
Chapitre 12. Quand suspecter l'origine infectieuse d'un retard de croissance intra-utérin ?
103
Tabagisme et retard de Chapitre 13
croissance intra-utérin
Gilles Grangé
105
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
106
Chapitre 13. Tabagisme et retard de croissance intra-utérin
107
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
Obstétriciens et sages-femmes peuvent aider les smoke during pregnancy on birth weight. Acta Obstet
familles en étant attentifs à cette question. Gynecol Scand 2006 ; 85 : 675–81.
Jaddoe VW, Troe EJ, Hofman A, Mackenbach JP, Moll HA,
Steegers ET, et al. Active and passive maternal smo-
Références king during pregnancy and the risk of low bir-
Aagaard-Tillery K, Spong CY, Thom E, Sibai B, Wendel G, thweight and preterm birth : the Generation R Study.
Wenstrom K, et al. Pharmacogenomics of maternal Paediatr Perinat Epidemiol 2008 ; 22 : 162–71.
tobacco use : metabolic gene polymorphisms and risk Jeanty P, Cousaert E, de Maertelaer V, Cantraine F.
of adverse pregnancy outcomes. Obstet Gynecol Sonographic detection of smoking-related decreased
2010 ; 115 : 568–77. fetal growth. J Ultrasound Med 1987 ; 6 : 13–8.
Agaard-Tillery KM, Porter TF, Lane RH, Vamer MW, Kharrazi M, DeLorenze GN, Kaufman FL, Eskenazi B,
Lacoursiere DY. In utero tobacco exposure is asso- Bemert JT, Graham S, et al. Environmental tobacco
ciated with modified effects of maternal factors on smoke and pregnancy outcome. Epidemiology 2004 ;
fetal growth. Am J Obstet Gynecol 2008 ; 198 : 66 15 : 660–70.
e1-6. Leonardi-Bee J, Smyth A, Britton J, Coleman T.
Bardy AH, Seppälä T, Lillsunde P, Kataja JM, Koskela P, Environmental tobacco smoke and fetal health : sys-
Pikkarainen J, et al. Objectively measured tobacco tematic review and meta-analysis. Arch Dis Child
exposure during pregnancy : neonatal effects and Fetal Neonatal Ed 2008 ; 93 : F351–61.
relation to maternal smoking. Br J Obstet Gynaecol Lumley J, Chamberlain C, Dowswell T, Oliver S, Oakley L,
1993 ; 100 : 721–6. Watson L. Interventions for promoting smoking
Barker DJ. Adult consequences of fetal growth restriction. cessation during pregnancy. Cochrane Database Syst
Clin Obstet Gynecol 2006 ; 49 : 270–83. Rev 2009 ; (3) CD001055.
Butler NR, Goldstein H, Ross EM. Cigarette smoking in Martinez FD, Wright AL, Taussig LM. The effect of pater-
pregnancy : its influence on birth weight and perina- nal smoking on the birthweight of newborns whose
tal natality. Br Med J 1972 ; 2 : 127–30. mother did not smoke. Group Health Medical
Cnattingius S. The epidemiology of smoking during pre- Associates. Am J Public Health 1994 ; 84 : 1489–91.
gnancy : smoking prevalence, maternal characteris- McCornick MC. The contribution of low birth weight to
tics, and pregnancy outcomes. Nicotine Tob Res infant mortality and childhood morbidity. New Eng
2004 ; 6 (Suppl 2) : S125–40. J Med 1985 ; 312 : 82–90.
Ekblad M, Korkeila J, Parkkola R, Lapinleimu H, Haataja McCowan LM, Dekker GA, Chan E, Stewart A, Chappell
L, Lehtonen L, PIPARI Study Group. Maternal smo- LC, Hunter M, et al. Spontaneous preterm birth and
king during pregnancy and regional brain volumes small-for-gestational-age infants in women who stop
in preterm infants. J Pediatr 2010 ; 156 : 185–90. smoking early in pregnancy : prospective cohort
Ellard GA, Johnstone FD, Prescott RJ, Ji-Xian W, Jian-Hua study. BMJ 2009 ; 338 : b1081.
M. Smoking during pregnancy : the dose dependence Mongelli M, Gardosi J. Fetal growth velocity. Lancet 1999 ;
of birthweight deficits. Br J Obstet Gynaecol 1996 ; 353 : 2156.
103 : 806–13. Pallotto EK, Kilbride HW. Perinatal outcome and later
England LJ, Kendrick JS, Gargiullo PM, Zahniser SC, implications of intrauterine growth restriction. Clin
Hannon WH. Measures of maternal tobacco expo- Obstet Gynecol 2006 ; 49 : 257–69.
sure and infant birth weight at term. Am J Epidemiol Pipkin FB ; Genetics of Preeclampsia Consortium. Smoking
2001 ; 153 : 954–60. in moderate/severe preeclampsia worsens pregnancy
George L, Granath F, Johansson AL, Cnattingius S. Self- outcome, but smoking cessation limits the damage.
reported nicotine exposure and plasma levels of coti- Hypertension 2008 ; 51 : 1042–6.
nine in early and late pregnancy. Acta Obstet Gynecol Prabhu N, Smith N, Campbell D, Craig LC, Seaton A,
Scand 2006 ; 85 : 1331–7. Helms PJ, et al. First trimester maternal tobacco
Goel P, Radotra A, Singh I, Aggarwal A, Dua D. Effects of smoking habits and fetal growth. Thorax 2010 ; 65 :
passive smoking on outcome in pregnancy. J Postgrad 235–40.
Med 2004 ; 50 : 12–6. Simpson WJ. A preliminary report on cigarette smoking
Gomez C, Berlin I, Marquis P, Delcroix M. Expired air and the incidence of prematurity. Am J Obstet
carbon monoxide concentration in mothers and Gynecol 1957 ; 73 : 807–15.
their spouses above ppm is associated with decreased Wang X, Tager IB, Van Vunakis H, Speizer FE, Hanrahan JP.
fetal growth. Prev Med 2005 ; 40 : 10–5. Maternal smoking during pregnancy, urine cotinine
Hegaard HK, Kjaergaard H, Møller LF, Wachmann H, concentration, and birth outcomes. A prospective
Ottesen B. The effect of environmental tobacco cohort study. Int J Epidemiol 1997 ; 26 : 978–88.
108
Chapitre 13. Tabagisme et retard de croissance intra-utérin
Wang X, Zuckerman B, Pearson C, Kaufman G, Chen C, during pregnancy and impact on birth weight :
Wang G, et al. Maternal cigarette smoking, metabo- retrospective study using Millenium Cohort. BMC
lic gene polymorphism, and infant birth weight. Public Health 2007 ; 16 : 7–81.
JAMA 2002 ; 287 : 195–202. Zhang J, Merialdi M, Platt LD, Kramer MS. Defining nor-
Ward C, Lewis S, Coleman T. Prevalence of maternal smo- mal and abnormal fetal growth : promises and chal-
king and environmental tobacco smoke exposure lenges. Am J Obstet Gynecol 2010 ; 202 : 522–8.
109
Lupus érythémateux Chapitre 14
systémique et grossesse
Véronique Le Guern, Emmanuelle Pannier, Francine Proulx
111
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
d'une poussée au cours de la grossesse. Certains grossesse), un bilan urinaire (protéinurie, sédi-
traitements de fond doivent être poursuivis. ment urinaire).
À l'inverse, il est raisonnable de contre-indiquer
une grossesse en cas de poussée récente ou pré-
Conséquences de la grossesse
sente de lupus, d'une insuffisance rénale chro-
nique définie par une clairance de la créatinine sur le lupus
inférieure à 40 ml/min, d'une valvulopathie mal Fréquence des poussées
tolérée ou d'une corticodépendance supérieure à
0,3 mg/kg. Les poussées de lupus modérées à sévères sont
finalement peu fréquentes, objectivées au cours
de 15 à 30 % des grossesses lupiques. Le risque
Traitements d'une poussée lupique augmente considérable-
ment si le LES est actif cliniquement et biologi-
Avant d'autoriser une grossesse chez une patiente quement dans les 6 mois qui précèdent la
lupique, la corticothérapie doit être ramenée à sa grossesse. Le principal facteur de risque est l'ar-
dose minimale efficace. L'hydroxychloroquine, rêt des antimalariques de synthèse avant la
l'azathioprine peuvent et doivent être maintenues, grossesse.
lorsque cela est nécessaire. En revanche, les autres
immunosuppresseurs tels que le cyclophospha-
mide, le méthotrexate, le mycophénolate mofétil Types des poussées
doivent impérativement être interrompus au Les organes les plus habituellement concernés par
moins 3 mois avant la conception. Les traitements une exacerbation des signes de la maladie sont la
antihypertenseurs tels que les inhibiteurs de l'en- peau et les articulations. Un risque de survenue
zyme de conversion et les antagonistes des récep- d'arthrites vraies est observé au cours d'environ
teurs de l'angiotensine II seront interrompus au 20 % des grossesses, alors que la plupart des femmes
profit d'antihypertenseurs que l'on peut mainte- ne rapportent que quelques manifestations arthral-
nir au cours de la grossesse tels que la méthyl- giques. On assiste également à une majoration des
dopa, le labétalol ou les inhibiteurs calciques. signes généraux, en particulier de l'asthénie. Les
manifestations hématologiques, et notamment les
cytopénies auto-immunes, sont de la même façon
Prise en charge pluridisciplinaire
rapportées au cours de la grossesse lupique.
Une patiente lupique débutant une grossesse Le risque de glomérulonéphrite lupique au cours
doit idéalement être prise en charge conjointe- d'une grossesse lupique est estimé entre 4 % et
ment par un médecin spécialiste de sa maladie 30 % selon les études, plus important en cas d'an-
(rhumatologue, interniste) et un obstétricien au técédent de néphrite lupique. La poussée de lupus
sein d'une maternité habituée à prendre en peut être observée à n'importe quel terme de la
charge des pathologies maternelles lourdes. Il grossesse, mais aussi au cours des semaines et des
est utile de proposer une visite mensuelle à par- mois qui suivent l'accouchement.
tir de la 12e semaine d'aménorrhée (SA) com-
portant un examen clinique, un examen
obstétrical, une échographie fœtale avec une
étude de la croissance fœtale et des Doppler uté- Conséquences du lupus
rins et ombilicaux, une surveillance de la sur la grossesse
conduction auriculoventriculaire en cas d'anti-
corps anti-SSA chez la mère (entre la 16 e et la L'activité de la maladie, en particulier un antécé-
24 e SA), un enregistrement du rythme cardiaque dent de néphrite lupique, augmente le risque de
fœtal après 28 semaines, un bilan biologique complications obstétricales. Par ailleurs, un LES
comportant une numération globulaire, une actif cliniquement et biologiquement augmente le
surveillance de la fonction rénale, des anti-ADN taux de pertes fœtales, multiplié par 3 par rap-
natif, les fractions C3 et C4 du complément (aug- port aux patientes avec une faible activité de la
mentation physiologique du C3 pendant la maladie.
112
Chapitre 14. Lupus érythémateux systémique et grossesse
113
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
114
Chapitre 14. Lupus érythémateux systémique et grossesse
Figure 14.1. Mesure de l'espace PR sur la Figure 14.3. Mesure de l'espace PR sur la
coupe valve mitrale-aorte. coupe veine cave supérieure-aorte
ascendante.
115
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
116
Chapitre 14. Lupus érythémateux systémique et grossesse
multidisciplinaire en centres spécialisés de ces gros- review of the literature. J Gynécol Obstét Biol
sesses qui restent à risque, avec une surveillance Reprod] Paris 2006 ; 35 (2) : 146–56.
clinique, biologique, échographique régulière, per- Dhar JP, Essenmacher LM, Ager JW, Sokol RJ. Pregnancy
mettant une adaptation des traitements. outcomes before and after a diagnosis of systemic lupus
erythematosus. Am J Obstet Gynecol 2005 ; 193 (4) :
1444–55.
Références Friedman HS. Heart rate variability in atrial fibrillation
Andelfinger G, Fouron JC, Sonesson SE, Proulx F. Reference related to left atrial size. Am J Cardiol 2004 ; 93 (6) :
values for time intervals between atrial and ventricular 705–9.
contractions of the fetal heart measured by two Doppler Gordon M, D'Cruz D. Systemic lupus erythematosus in
techniques. Am J Cardiol 2001 ; 88 (12) : 1433–6 A8.. pregnancy. Obst Gynaecol 2004 ; 6 : 80–7.
Boumpas DT, Austin III HA, Vaughan EM, Yarboro CH, Khamashta MA. Systemic lupus erythematosus and pre-
Klippel JH, Balow JE. Risk for sustained amenor- gnancy. Best Pract Res Clin Rheumatol 2006 ; 20 (4) :
rhea in patients with systemic lupus erythematosus 685–94.
receiving intermittent pulse cyclophosphamide Le Thi Huong D, Wechsler B, Piette JC. [Ovulation induc-
therapy. Ann Intern Med 1993 ; 119 (5) : 366–9. tion therapy and systemic lupus erythematosus].
Bramham K, Hunt BJ, Bewley S, Germain S, Calatayud I, Ann Méd Interne (Paris) 2003 ; 154 (1) : 45–50.
Khamashta MA, et al. Pregnancy outcomes in syste- Li DK, Liu L, Odouli R. Exposure to non-steroidal anti-
mic lupus erythematosus with and without previous inflammatory drugs during pregnancy and risk of
nephritis. J Rheumatol 2011 ; 38 (9) : 1906–13. miscarriage : population based cohort study. BMJ
Brucato A, Frassi M, Franceschini F, Cimaz R, Faden D, 2003 ; 327 (7411) : 368.
Pisoni MP, et al. Risk of congenital complete heart Lima F, Buchanan NM, Khamashta MA, Kerslake S,
block in newborns of mothers with anti-Ro/SSA Hughes GR. Obstetric outcome in systemic lupus erythe-
antibodies detected by counterimmunoelectrophore- matosus. Semin Arthritis Rheum 1995 ; 25 (3) : 184–92.
sis : a prospective study of 100 women. Arthritis
Lockshin MD, Sammaritano LR. Corticosteroids during
Rheum 2001 ; 44 (8) : 1832–5.
pregnancy. Scand J Rheumatol Suppl 1998 ; 107 :
Buyon JP. Neonatal lupus syndromes. Curr Opin 136–8.
Rheumatol 1994 ; 6 (5) : 523–9.
Magid MS, Kaplan C, Sammaritano LR, Peterson M,
Chakravarty EF, Nelson L, Krishnan E. Obstetric hospita- Druzin ML, Lockshin MD. Placental pathology in
lizations in the United States for women with syste- systemic lupus erythematosus : a prospective study.
mic lupus erythematosus and rheumatoid arthritis. Am J Obstet Gynecol 1998 ; 179 (1) : 226–34.
Arthritis Rheum 2006 ; 54 (3) : 899–907.
Moroni G, Ponticelli C. The risk of pregnancy in patients
Clowse ME. Lupus activity in pregnancy. Rheum Dis Clin with lupus nephritis. J Nephrol 2003 ; 16 (2) : 161–7.
North Am 2007 ; 33 (2) : 237–52.
Nield LE, Silverman ED, Smallhorn JF, Taylor GP, Mullen
Clowse ME, Magder L, Petri M. Cyclophosphamide for JB, Benson LN, et al. Endocardial fibroelastosis asso-
lupus during pregnancy. Lupus 2005 ; 14 (8) : 593–7. ciated with maternal anti-Ro and anti-La antibodies
Clowse ME, Magder L, Witter F, Petri M. Hydroxychloroquine in the absence of atrioventricular block. J Am Coll
in lupus pregnancy. Arthritis Rheum 2006 ; 54 (11) : Cardiol 2002 ; 40 (4) : 796–802.
3640–7. Nii M, Hamilton RM, Fenwick L, Kingdom JC, Roman KS,
Clowse ME, Magder LS, Witter F, Petri M. The impact of Jaeggi ET. Assessment of fetal atrioventricular time
increased lupus activity on obstetric outcomes. intervals by tissue Doppler and pulse Doppler echo-
Arthritis Rheum 2005 ; 52 (2) : 514–21. cardiography : normal values and correlation with
Costedoat-Chalumeau N, Amoura Z, Duhaut P, fetal electrocardiography. Heart (British Cardiac
Huong DL, Sebbough D, Wechsler B, et al. Safety of Society) 2006 ; 92 (12) : 1831–7.
hydroxychloroquine in pregnant patients with Norgard B, Pedersen L, Fonager K, Rasmussen SN,
connective tissue diseases : a study of one hundred Sorensen HT. Azathioprine, mercaptopurine and
thirty-three cases compared with a control group. birth outcome : a population-based cohort study.
Arthritis Rheum 2003 ; 48 (11) : 3207–11. Aliment Pharmacol Ther 2003 ; 17 (6) : 827–34.
Costedoat-Chalumeau N, Amoura Z, Le Thi Huong D, Temprano KK, Bandlamudi R, Moore TL. Antirheumatic
Wechsler B, Piette JC. [Pleading to maintain hydr drugs in pregnancy and lactation. Semin Arthritis
oxychloroquine throughout Lupus pregnancies]. Rev Rheum 2005 ; 35 (2) : 112–21.
Méd Interne 2005 ; 26 (6) : 467–9. Villain E. Is isolated congenital heart block with mater-
Costedoat-Chalumeau N, Amoura Z, Villain E, Cohen L, nal antibodies a distinct or more severe form of
Fermont L, Le Thi Huong D. [Obstetrical manage- the disease in childhood ? Heart Rythm 2005 ; 2
ment of patients at risk of neonatal lupus syndrome : (5) : S45.
117
Retard de croissance Chapitre 15
intra-utérin et
thrombophilie
Michaela Fontenay
La prévalence du retard de croissance intra-utérin risque thrombotique est associé aux mutations
(RCIU) est de 3 à 10 % des grossesses. Son étio hétérozygotes des gènes codant l'AT, la PC et la PS,
logie est complexe. Les études épidémiologiques aux mutations homozygotes ou hétérozygotes des
concluent à la contribution de plusieurs facteurs facteurs V ou II, et au génotype hétérozygote com-
favorisants tels que le tabac (30–40 %), des facteurs posite FVL/FII 20210A. Il a été suggéré qu'une élé-
génétiques en lien avec diverses anomalies chro- vation modérée de l'homocystéinémie induirait
mosomiques (20–30 %), des facteurs nutritionnels une altération de la fonction endothéliale et un
(10–15 %), la parité et les morbidités maternelles risque accru de thrombose. En revanche, le poly-
(5–10 %). La grossesse est un état d'hypercoagula- morphisme 677T ou variant thermolabile du gène
bilité qui induit un risque de maladie thromboem- méthylène tétrahydrofolate réductase (MTHFR), s'il
bolique veineuse (MTEV) 5 fois plus élevé que chez peut modifier la conversion de l'homocystéine en
les femmes du même âge non enceintes (1 grossesse méthionine, n'est pas significativement associé au
sur 1000), responsable de 5 à 10 décès par an en risque de thrombose même lorsqu'il est présent à l'état
France. La thrombophilie a été proposée comme homozygote.
facteur prédisposant à la survenue d'un RCIU. À côté de ces facteurs génétiques, le syndrome des
antiphospholipides (SAPL), qui associe un antécé-
Définition de la thrombophilie dent de thrombose veineuse ou artérielle ou à un
accident obstétrical de caractère primitif ou
secondaire à une maladie auto-immune sous-
La thrombophilie a une définition essentiellement
jacente et à la présence d'un anticorps antiphos-
clinique qui repose le plus souvent sur la mise en
pholipide (APL), ou le diagnostic de syndrome
évidence d'une MTEV récidivante documentée.
myéloprolifératif (SMP), le plus souvent de type
© 2012, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
119
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
confirmée par l'augmentation des fragments F1+2 Tableau 15.1. Prévalence des facteurs
de la prothrombine et des complexes thrombine- génétiques de risque de thrombose.
antithrombine. L'augmentation des D-dimères Facteurs Prévalence dans la
témoigne d'une fibrinolyse réactionnelle due à la population générale
protéolyse de la fibrine par la plasmine. Il est Déficit AT 0,02 %
observé une diminution de la PS anticoagulante
Déficit PC 0,2−0,4 %
dès le premier trimestre de la grossesse et plus
inconstamment un phénotype acquis de résis- Déficit PS 1%
tance à la PC activée. En fin de grossesse, l'activité Facteur V Leiden 2-10 %
fibrinolytique du plasma diminue du fait d'une hétérozygote
élévation du taux de l'inhibiteur de l'activateur du Facteur II 20210A 2%
plasminogène de type 2 (PAI-2). Outre le risque hétérozygote
de thrombose périphérique, la thrombophilie
génétique ou acquise induirait une augmentation
du risque de pathologie vasculaire placentaire
(PVP) dont le RCIU et les pertes fœtales, du fait critères cliniques de RCIU sont hétérogènes : poids
d'un possible risque de thrombose placentaire. En de naissance inférieur au 10e percentile ou au
effet, des thromboses de la chambre intervilleuse 3e percentile, Doppler des artères utérines anormal,
qui se traduisent par des occlusions vasculaires croissance dysharmonieuse ; elles n'excluent pas
placentaires peuvent être observées chez les toujours les RCIU non vasculaires (tableau 15.2).
femmes avec thrombophilie ayant un enfant avec
RCIU.
De nombreuses études ont été menées pour tester Mutations FVL, FII 20210A,
l'association entre le RCIU et les facteurs de risque
génétiques ou acquis de thrombophilie. Elles sont
polymorphisme MTHFR 677TT
hétérogènes quant aux critères cliniques définis- et déficits en AT, PC, PS
sant le RCIU :
Parmi les études cas-contrôles, six suggèrent qu'il
• un poids de naissance inférieur au 10e existe un lien entre le risque de RCIU inférieur au
percentile ; 10e percentile ou au 5e percentile et les mutations
• un poids de naissance inférieur au 3e FVL et FII 20210A ou le polymorphisme homo-
percentile ; zygote MTHFR 677TT. Par exemple, l'étude de
• un Doppler des artères utérines anormal ; Martinelli montre que parmi 63 femmes avec
RCIU sévère défini par un poids moyen de nais-
• une croissance dysharmonieuse.
sance de 1584 ± 586 g et une délivrance à 35 ± 3
Elles n'excluent par ailleurs pas toujours les étiolo- semaines, 13 % avaient une mutation FVL, contre
gies non vasculaires de RCIU, dont le tabagisme. 2,2 % dans le groupe de 93 femmes contrôles, et
Cependant, l'hétérogénéité vient surtout de la 12 % avaient une mutation FII 20210A, contre
complexité des tableaux cliniques, le RCIU n'étant 2,2 % dans le groupe contrôle. Cette étude sug-
pas isolé mais souvent associé à une autre PVP gère, par un modèle de régression, que ces throm-
telle que prééclampsie, hématome rétroplacen- bophilies sont des facteurs de risque indépendants
taire et/ou mort fœtale in utero (MFIU). de RCIU. Dans l'étude de Küpferminc, le lien avec
la thrombophilie est retrouvé pour les RCIU
sévères avec un poids moyen de naissance de 1387
Facteurs de risque génétiques ± 616 g et un terme prématuré de 33 ± 4 semaines
de grossesse.
La prévalence des facteurs de risque génétique de Cependant, les deux études qui recensent le plus
thrombose dans la population générale est indi- grand nombre de patientes ne confirment pas ces
quée dans le tableau 15.1. Sur les 20 études réperto- données : l'étude d'Infante-Rivard montre que la
riées (11 cas-contrôles, 9 études de cohortes), les prévalence de thrombophilie chez les mères de
120
Chapitre 15. Retard de croissance intra-utérin et thrombophilie
gestationnel
Alfirevic Rétrospective FVL, RPCA, 102 cas Accouchement Tout facteur de
et al., 2001 cas-contrôles FII 20210A, MTHFR 44 contrôles provoqué avant la 36e risque confondu :
677T, AT, PC, PS, semaine 1,8 [0,9−3,7]
Küpferminc Rétrospective FII 20210A 72 cas Poids de naissance < FII : 5,4 [1,8−16,3]
et al., 2000 cas-contrôles 156 contrôles 10 percentile pour l'âge
e
gestationnel
Küpferminc Rétrospective FVL, 26 cas Poids de naissance < FVL : 13,2
et al., 2002 cas-contrôles FII 20210A, MTHFR 52 contrôles 5e percentile pour l'âge [2,6−67,4]
677T, AT, PC, PS gestationnel FII : 4,6 [0,8−26,7]
Martinelli Rétrospective FVL, RPCA, 63 cas Poids de naissance < FVL : 6,9 [1,4−33,5]
et al., 2001 cas-contrôles FII 20210A, MTHFR 93 contrôles 10e percentile pour l'âge FII : 11,9 [1,4−99,6]
677TT, AT, PC, PS, gestationnel
Franchi et al., Rétrospective FVL, 47 cas Poids de naissance < FVL : 1,9 [0,4−10,0]
2004 cas-contrôles FII 20210A, MTHFR 88 contrôles 10e percentile pour l'âge FII : 0,2 [0,0−3,8]
677T gestationnel, Doppler
des artères utérines
anormal
Verspyck Rétrospective FVL, 97 cas Poids de naissance < FVL : 4,1 [0,4−37,6]
et al., 2004 cas-contrôles FII 20210A 97 contrôles 3e percentile pour l'âge FII : 3,1 [0,3−30,0]
gestationnel
Jarvenpaa Rétrospective FVL, ? Poids de naissance < FVL : 7,7 [2,0−13,4]
et al., 2006 cas-contrôles FII 20210A, 10e percentile pour l'âge
gestationnel
MTHFR 677T
Ozbek et al., Rétrospective FVL, 66 cas Poids de naissance < Pas d'association
2008 cas-contrôles FII 20210A, 107 contrôles 10 percentile à terme
e
MTHFR 677T
McCowan Rétrospective FVL, RPCA, 145 cas Poids de naissance < FVL : 0,7 [0,2−2,3]
et al., 2003 cas-contrôles FII 20210A, MTHFR 290 contrôles 10 percentile pour l'âge
e
FII : 0,9 [0,3−2,9]
677T gestationnel et le sexe
Infante-Rivard Rétrospective FVL, 493 Poids de naissance < FVL : 1,1 [0,6−2,2]
et al., 2002 cas-contrôles FII 20210A, MTHFR nouveau-nés 10e percentile pour l'âge FII : 1,0 [0,5−2,4]
677TT 472 contrôles gestationnel
Lindqvist Cohorte FVL 2480 femmes 1re visite de suivi de FVL : 0,9 [0,5−1,8]
et al., 1999 prospective grossesse
Murphy et al., Cohorte FVL 588 femmes Exclusion des FVL : 0,0 [0,0−19,0]
2000 prospective antécédents d'HTA
gravidique et thrombose
Grandone Cohorte FVL, 755 femmes Antécédents de perte FVL : 1,1 [0,6−2,0]
et al., 2002 rétrospective FII 20210A 1103 fœtale ou d'HTA FII : 2,1 [1,4−3,1]
nouveau-nés gravidique
(Suite)
121
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
Nurk et al., Cohorte FVL, 5874 femmes Toutes PVP confondues FVL : 1,3 [1,0−1,7]
2006 rétrospective MTHFR 677T
Dudding Cohorte FVL, 6755 paires Poids de naissance < Pas d'association
et al., 2008 prospective FII 20210A mère-enfant 10e percentile pour l'âge
gestationnel
Karakantza Cohorte FVL, 392 femmes Poids de naissance < Pas d'association
et al., 2008 prospective FII 20210A 5e percentile pour l'âge
gestationnel
Said et al., Cohorte FVL, 1707 femmes Toutes PVP confondues FII : 3,6 [1,2−10,6]
2010 prospective FII 20210A,
MTHFR 677T
Silver et al., Cohorte FII 20210A 4167 femmes Cohorte de faible risque Pas d'association
2010 prospective
Stonek et al., Cohorte MTHFR 677T 1675 femmes Toutes PVP confondues MTHFR 677T : 1,3
2007 prospective [1,0−1,8]
Travail de compilation réalisé par Michaela Fontenay.
493 enfants nés avec un RCIU non sévère et un C677T hétérozygote serait plus fréquent chez les
accouchement entre 36 et 40 semaines de gesta- femmes avec enfants de petit poids.
tion n'est pas augmentée par rapport à celle obser-
vée dans le groupe de 472 contrôles. L'évaluation Que faut-il retenir de ces études ?
du risque de RCIU lié aux déficits hétérozygotes
en AT, PC ou PS faite sur un très petit nombre de Dans la méta-analyse de Roberston, la compilation
patientes ne permet pas de conclure. de six études rétrospectives cas-contrôles (n = 195)
Parmi les études de cohorte répertoriées, l'étude montre une tendance générale à l'augmentation du
prospective de Lindqvist a inclus 2480 femmes risque de RCIU en cas de thrombophilie. Howley
avec RCIU quelle qu'en soit la cause. Dans le et al. retrouvent un lien entre RCIU et FVL hétéro-
groupe des femmes présentant une mutation FVL, zygote ou FII 20210A hétérozygote dans les études
l'incidence de RCIU est de 3,3 %, contre 3,6 % chez cas-contrôles, alors que l'analyse de cinq cohortes
les femmes sans mutation. Dans l'étude prospec- ne retrouve pas ce lien. Facco et al. trouvent un lien
tive de Murphy qui inclut 588 femmes, aucune statistique entre mutation FVL hétérozygote et
femme avec mutation FVL n'a accouché d'un RCIU principalement du fait des études cas-
enfant trop petit, mais l'incidence du RCIU est très contrôles, alors qu'elle n'est significative ni pour FII
faible (1,5 %), ce qui limite la puissance de l'analyse 20210A ni pour MTHFR 677TT. Enfin, une méta-
statistique. L'étude rétrospective de Grandone analyse des cohortes prospectives montre l'absence
trouve en revanche une association entre RCIU et d'association entre RCIU et FVL ou FII 20210A
mutation FII 20210A, mais pas de lien avec la hétérozygote. Il existe un biais dans les publica-
mutation FVL dans une cohorte de femmes avec tions, puisque les associations ne sont significatives
antécédents de pertes fœtales ou d'hypertension que dans les études cas-contrôles les plus anciennes.
artérielle (HTA) gravidique, donc une incidence En conclusion, il n'y a pas d'association prouvée
forte de 15 % de RCIU. Enfin, l'étude de Stonek entre les marqueurs génétiques de thrombophilie
et al. suggère que le polymorphisme MTHFR et le risque de RCIU.
122
Chapitre 15. Retard de croissance intra-utérin et thrombophilie
123
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
124
Chapitre 15. Retard de croissance intra-utérin et thrombophilie
125
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
126
Chapitre 15. Retard de croissance intra-utérin et thrombophilie
factor II A (20210) mutations. Haematologica 2002 ; Melillo L, Tieghi A, Candoni A, Radaelli F, Ciancia R,
87 (2) : 177–81. Specchia G, et al. Outcome of 122 pregnancies in
Howley HEA, Walker M, Rodger MA. A systematic essential thrombocythemia patients : a report from the
review of the association between factor V Leiden Italian registry. Am J Hematol 2009 ; 84 (10) : 636–40.
and prothrombin gene variant and intrauterine Miyakis S, Lockshin MD, Atsumi T, Branch DW, Brey RL,
growth restriction. Am J Obstet Gynecol 2005 ; Cervera R, et al. International consensus statement
192 : 694–708. on an update of the classification criteria for definite
antiphospholipid syndrome (APS). J Thromb
Infante-Rivard C, Rivard GE, Yotov WV, Génin E, Guiguet
Haemost 2006 ; 4 (2) : 295–306.
M, Weinberg C, et al. Absence of association of throm-
Murphy RP, Donoghue C, Nallen RJ, D'Mello M, Regan C,
bophilia polymorphisms with intrauterine growth res- Whitehead AS, et al. Prospective evaluation of the
triction. N Engl J Med 2002 ; 347 (1) : 19–25. risk conferred by factor V Leiden and thermolabile
Jarvenpaa J, Pakkila M, Savolainen ER, Perheentupa A, methylenetetrahydrofolate reductase polymor-
Jarvela I, Ryynanen M. Evaluation of factor V Leiden, phisms in pregnancy. Arterioscler Thromb Vasc Biol
prothrombin and methylenetetrahydrofolate reduc- 2000 ; 20 (1) : 266–70.
tase gene mutations in patients with severe pre- Nurk E, Tell GS, Refsum H, Ueland PM, Vollset SE. Factor
gnancy complications in northern Finland. Gynecol V Leiden, pregnancy complications and adverse out-
Obstet Invest 2006 ; 62 (1) : 28–32. comes : the Hordaland Homocysteine Study. QJM
Karakantza M, Androutsopoulos G, Mougiou A, 2006 ; 99 (5) : 289–98.
Sakellaropoulos G, Kourounis G, Decavalas G. Ozbek N, Atac FB, Verdi H, Cetintas S, Gurakan B,
Inheritance and perinatal consequences of inherited Haberal A. Relationship between small-for-age
thrombophilia in Greece. Int J Gynaecol Obstet births and maternal thrombophilic mutations.
2008 ; 100 (2) : 124–9. Thromb Res 2008 ; 122 : 175–8.
Katano K, Aoki A, Sasa H, Ogasawara M, Matsuura E, Passamonti F, Randi ML, Rumi E, Pungolino E, Elena C,
Yagami Y. Beta2-Glycoprotein I-dependent anticar- Pietra D, et al. Increased risk of pregnancy complications
diolipin antibodies as a predictor of adverse pre- in patients with essential thrombocythemia carrying the
gnancy outcomes in healthy pregnant women. Hum JAK2 (617V>F) mutation. Blood 2007 ; 110 (2) : 485–9.
Reprod 1996 ; 11 (3) : 509–12.
Robertson L, Wu O, Langhorne P, Twaddle S, Clark P,
Kramer MS, Olivier M, McLen FH, Willis DM, Usher RH. Lowe GDO, et al. Thrombophilia in pregnancy : a
Impact of intrauterine growth retardation and body systematic review. Br J Haematol 2005 ; 132 : 171–96.
proportionality on fetal and neonate outcome.
Rodger MA, Betancourt MT, Clark P, Lindqvist PG,
Pediatrics 1990 ; 86 : 707–13.
Dizon-Townson D, Said J, et al. The association of
Küpferminc MJ, Eldor A, Steinman N, Many A, Bar-Am A, factor V Leiden and prothrombin gene mutation and
Jaffa A, et al. Increased frequency of genetic throm- placenta-mediated pregnancy complications. A sys-
bophilia in women with complications of pregnancy. tematic review and meta-analysis of prospective
N Engl J Med 1999 ; 340 : 9–13. cohort studies. Plos Medicine 2010 ; 7 : e1000292.
Küpferminc MJ, Many A, Bar-Am A, Lessing JB, Ascher- Said JM, Higgins JR, Moses EK, Walker SP, Borg AJ,
Landsberg J. Mid-trimester severe intrauterine Monagle PT, et al. Inherited thrombophilia poly-
growth restriction is associated with a high preva- morphisms and pregnancy outcomes in nulliparous
lence of thrombophilia. BJOG 2002 ; 109 : 1373–6. women. Obstet Gynecol 2010 ; 115 (1) : 5–13.
Küpferminc MJ, Peri H, Zwang E, Yaron Y, Wolman I, Seligsohn U, Lubetsky A. Genetic susceptibility to venous
Eldor A. High prevalence of the prothrombin gene thrombosis. N Engl J Med 2001 ; 344 : 1222–31.
mutation in women with intrauterine growth retar-
Silver RM, Zhao Y, Spong CY, Sibai B, Wendel G Jr,
dation, abruptio placentae and second trimester loss.
Wenstrom K, et al. Prothrombin gene G20210A
Acta Obstet Gynecol Scand 2000 ; 79 (11) : 963–7.
mutation and obstetric complications. Obstet
Lindqvist PG, Svensson PJ, Marsaál K, Grennert L, Gynecol 2010 ; 115 (1) : 14–20.
Luterkort M, Dahlbäck B. Activated protein C resis-
Steegers-Theunissen RP, Van Iersel CA, Peer PG, Nelen
tance (FV : Q506) and pregnancy. Thromb Haemost
WL, Steegers EA. Hyperhomocysteinemia, pre-
1999 ; 81 (4) : 532–7.
gnancy complications, and the timing of investiga-
Martinelli P, Grandone E, Colaizzo D, Pavone G, Paladini tion. Obstet Gynecol 2004 ; 104 : 336–43.
D, Martinelli P, et al. Familial thrombophilia and the
Stonek F, Hafner E, Philipp K, Hefler LA, Bentz EK,
occurrence of fetal growth restriction. Haematologica
Tempfer CB. Methylenetetrahydrofolate reductase
2001 ; 86 : 428–31.
C677T polymorphism and pregnancy complica-
McCowan LM, Criague S, Taylor RS, Ward C, McLintock C, tions. Obstet Gynecol 2007 ; 110 (2Pt 1) : 363–8.
North RA. Inherited thrombophilia are not increased
Verspyck E, Borg JY, Le Cam-Duchez V, Goffinet F,
in idiopathic small-for-gestational age pregnancies.
Degré S, Fournet P, et al. Thrombophilia and fetal
Am J Obstet Gynecol 2003 ; 188 : 981–5.
127
Partie III. Étiologies du retard de croissance intra-utérin
growth restriction. Eur J Obstet Gynecol Reprod Biol Wright CA, Tefferi A. A single institutional experience
2004 ; 113 : 36–40. with 43 pregnancies in essential thrombocythemia.
Vollset SE, Refsum H, Irgens LM, Emblem BM, Tverdal A, Eur J Haematol 2001 ; 66 (3) : 152–9.
Gjessing HK, et al. Plasma total homocysteine, pre- Yasuda M, Takakuwa K, Tokunaga A, Tanaka K.
gnancy complications and adverse pregnancy out- Prospective studies of the association between anti-
comes : the Hordaland Homocysteine Study. Am cardiolipin antibody and outcome of pregnancy.
J Clin Nutr 2000 ; 71 : 962–8. Obstet Gynecol 1995 ; 86 (4Pt 1) : 555–9.
128
Apport du Doppler Chapitre 16
dans le diagnostic
et la surveillance
du retard de croissance
intra-utérin
Marie-Victoire Senat
Le Doppler utérin fournit une méthode non inva- En cas de retard de croissance intra-utérin (RCIU)
sive pour l'exploration de la circulation utéropla- d'origine vasculaire, le processus d'envahissement
centaire. par le trophoblaste s'arrête au segment décidual
des artères spiralées. Cela entraîne la conserva-
Spectre normal tion des résistances périphériques et une diminu-
tion de la vascularisation du lit utéroplacentaire.
La mesure se fait au niveau du tronc principal de La conséquence est une hypoperfusion utéropla-
l'artère utérine, qui correspond à la résultante des centaire objectivée par l'élévation des résistances
résistances des artères arquées et spiralées. Son vasculaires à l'exploration des artères utérines par
spectre est caractéristique de tous les vaisseaux à le Doppler.
basse résistance avec une composante diastolique Les deux artères utérines étant explorées systé-
élevée (figure 16.1). On retrouve en général un matiquement, le résultat est pathologique si
flux résiduel diastolique d'au moins 40 % du flux l'on retrouve une diminution de la diastole ou
maximal en systole. Le pic systolique présente la présence d'une incisure protodiastolique sur
une phase ascendante verticale puis une phase une des artères, appelée « notch ». Un spectre
descendante moins aiguë, suivie d'un deuxième
© 2012, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
131
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
Figure 16.2. Spectre avec un notch et une diastole basse au niveau de l'artère utérine.
132
Chapitre 16. Apport du Doppler dans le diagnostic et la surveillance du retard de croissance intra-utérin
133
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
risque relatif [RR] de 0,31) et de la prééclampsie diastole (figure 16.3). Cette diastole représente en
(4,7 % contre 23,3 %, soit un RR de 0,2). L'incidence moyenne 30 à 40 % du flux observé en systole au
de l'hypertension artérielle avant 37 SA est aussi cours d'une grossesse normale. L'aspect est donc
significativement diminuée (2,3 % contre 20,9 % soit, celui d'un vaisseau vascularisant un organe à
un RR de 0,22). La réduction de l'incidence du RCIU basse résistance, ici le placenta.
n'est en revanche pas significative (2,3 % contre 7 %).
Index utilisés
Conclusion
Les quatre index définis dans le premier paragraphe
L'ensemble des études montrent que la mesure du peuvent être utilisés en pratique. Il n'existe pas de
Doppler des artères utérines au premier trimestre données permettant d'affirmer la supériorité de
semble relativement sensible mais très peu spéci- l'un de ces index, que ce soit sur l'évaluation tech-
fique. Cette mesure permettrait de discriminer un nique ou sur l'évaluation clinique. L'intérêt d'utili-
groupe de patientes à haut risque vasculaire en ser l'IP par rapport à l'IR est qu'en cas de diastole
population générale qui pourraient éventuellement nulle, contrairement à l'IR, l'IP continue à varier.
bénéficier d'un traitement préventif par aspirine. À L'IP est donc quantifiable en cas de diastole nulle
l'heure actuelle, un seul essai randomisé a montré ou de reverse flow, ce qui n'est pas le cas pour l'IR.
une diminution des complications vasculaires d'une
telle stratégie. D'autres études doivent venir confir-
mer celle-ci avant qu'une telle pratique puisse être Spectre pathologique
diffusée et encouragée en pratique clinique.
Une mesure est considérée comme pathologique
lorsque la vélocité diastolique est trop basse par
Doppler à l'artère ombilicale rapport à la vélocité systolique (figure 16.4). La
plupart des auteurs estiment que la limite au-delà
Spectre normal de laquelle un index doit être considéré comme
pathologique se situe au 90e ou au 95e percentile,
Les deux artères ombilicales peuvent être explo- ou encore au-delà de 2 déviations standard. Le
rées indifféremment. Le spectre normal du stade ultime pathologique est représenté par un
Doppler à l'artère ombilicale (Doppler ombilical) indice diastolique nul (IR =1) pouvant aller jusqu'à
se caractérise par une onde systolique ample sui- une inversion du flux en diastole ou reverse flow
vie d'une décroissance progressive au cours de la (figures 16.5 et 16.6).
134
Chapitre 16. Apport du Doppler dans le diagnostic et la surveillance du retard de croissance intra-utérin
Doppler ombilical et retard ses complications. Ces pathologies sont des causes
de croissance intra-utérin majeures de morbidité et de mortalité mater-
nelles. Les conséquences fœtales sont représentées
L'augmentation des résistances mesurées au niveau principalement par le RCIU qui est, avec la pré-
du placenta est le plus souvent due à une patholo- maturité, la cause principale de mortalité et de
gie gravidique complexe à point de départ proba- morbidité périnatales, et par la souffrance fœtale
blement placentaire. Cette maladie vasculaire chronique, associée ou non à un RCIU.
placentaire peut entraîner un certain nombre de Les résultats des différentes études montrent que,
pathologies maternelles et fœtales. Les consé- dans une population de RCIU ou de grossesses à
quences maternelles sont représentées principale- haut risque de RCIU, le Doppler artériel ombili-
ment par l'hypertension artérielle gravidique et cal permet de distinguer les fœtus à haut risque
135
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
136
Chapitre 16. Apport du Doppler dans le diagnostic et la surveillance du retard de croissance intra-utérin
Place de l'utilisation du Doppler entre les deux groupes, mais avec parfois des pro-
ombilical dans la décision longations importantes dans le groupe expecta-
tive. On peut donc en conclure qu'une anomalie
d'extraction isolée du Doppler ombilical, même s'il existe un
Seul un essai randomisé pragmatique a évalué la reverse flow, ne doit pas entraîner une extraction
décision d'extraction dans une population de systématique immédiate, l'âge gestationnel à l'ac-
RCIU après une évaluation par le Doppler ombili- couchement restant un facteur pronostic indé-
cal et d'autres examens de surveillance fœtale. pendant majeur.
L'hypothèse initiale étant qu'en cas de doute sur
une hypoxie fœtale, il semble préférable d'extraire
le fœtus rapidement plutôt que d'attendre. Lorsque
l'équipe obstétricale se posait la question d'une
Doppler aux artères cérébrales
extraction fœtale mais avait un doute quant à la L'utilisation du Doppler cérébral s'adresse à une
décision, la patiente était incluse dans l'essai. Si population sélectionnée à risque d'hypoxie fœtale
l'équipe estimait qu'il était préférable d'attendre avec souvent un Doppler ombilical montrant des
ou au contraire qu'il fallait faire une césarienne, la résistances élevées.
femme ne pouvait pas faire partie de l'étude. Les
patientes étaient tirées au sort : un groupe extrac-
tion immédiate dès la cure de corticoïdes réalisée Spectre normal
et un groupe extraction différée avec surveillance
De nombreuses études sur la faisabilité des mesures
jusqu'à aggravation de la vitalité fœtale.
Doppler au niveau des artères cérébrales ont été
Cinq cent quarante-huit femmes ayant accouché publiées, et il est possible de réaliser des mesures
dans 69 hôpitaux (de 13 pays européens) présen- au niveau de la carotide interne, du tronc basilaire
tant un RCIU avec un Doppler ombilical entre et des artères cérébrales antérieure, moyenne et
24 et 34 SA et un doute concernant la nécessité de postérieure.
décider une extraction ont été incluses dans l'essai
L'artère cérébrale moyenne ou artère sylvienne est
GRIT. Le critère de jugement principal était le
le site d'exploration le plus facile à repérer ; en rai-
décès ou un retard psychomoteur à 2 ans. Les
son de la petite taille des principales artères du
anomalies du Doppler ombilical étaient consti-
cerveau, la mesure nécessite l'utilisation du sys-
tuées par, dans les deux groupes, un tiers de
tème mixte écho-Doppler.
reverse flow et un tiers de diastole nulle. Le délai
moyen d'extraction était de 0,9 jours dans le Le spectre des vaisseaux cérébraux est caractéris-
groupe extraction immédiate et de 4,9 jours dans tique et similaire d'un vaisseau à l'autre. La vitesse
celui de l'extraction différée. La mortalité périna- maximale en systole est élevée, la vitesse diminue
tale était comparable dans les deux groupes, avec régulièrement, du début à la fin de la diastole, avec
12 % dans le groupe extraction immédiate contre des vitesses très basses en télédiastole (figure 16.7).
11 % dans le groupe expectative. On observait Les quatre index définis peuvent être utilisés en
dans le groupe extraction différée par rapport au pratique, mais les deux les plus souvent employés
groupe extraction immédiate plus de décès in sont l'IR et l'IP. Les vitesses en diastole et en sys-
utero (9 contre 2) mais moins de décès néonatals tole dans les vaisseaux cérébraux reflètent une
(12 contre 23), le nombre de décès postnatals étant adaptation vasculaire physiologique à l'oxygéna-
comparable. tion fœtale.
Les résultats importants concernent l'état des
enfants à 2 ans dans le groupe le plus à risque, Spectre pathologique
celui des 24–30 SA à l'inclusion dans l'essai. Le
nombre d'enfants survivants avec un handicap Une mesure pathologique est représentée par
était plus de 2 fois plus fréquent dans le groupe une augmentation de la composante diastolique
d'extraction immédiate par rapport à l'extraction (figure 16.8).
différée (13 % contre 5 %), bien qu'il n'y ait que Celle-ci est interprétée comme une réponse vaso-
4 jours de différence de terme d'accouchement motrice physiologique à l'hypoxie fœtale. Ce
137
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
Figure 16.8. Spectre au niveau de l'artère cérébrale moyenne avec une diastole trop élevée.
phénomène, appelé brain-sparing effect par les témoin d'une hypoxie cérébrale. La limite donnée
Anglo-Saxons, a été bien démontré chez l'animal. par les différents auteurs et pour les différents
En effet, dès que l'hypoxémie passe au-dessous index est représentée par le 90e percentile, le
d'un seuil limite, il y a mise en place d'un réflexe 95e percentile ou 2 déviations standard.
passant par les chémorécepteurs carotidiens sen-
sibles à l'hypoxémie, l'hypercapnie et l'acidose.
Cette réponse permet, dans un premier temps, Doppler cérébral et retard
d'assurer une oxygénation suffisante au cerveau de croissance intra-utérin
fœtal, mais aussi aux surrénales et au cœur. Ce
phénomène permettrait de dépister les fœtus à L'évaluation a été réalisée uniquement sur des
risque avant la survenue d'un RCF anormal, populations à haut risque, le plus souvent sur des
138
Chapitre 16. Apport du Doppler dans le diagnostic et la surveillance du retard de croissance intra-utérin
grossesses, avec suspicion ou diagnostic de RCIU. moins associé à une modification des Doppler
L'objectif était de déterminer quels fœtus étaient artériels. Bien que l'introduction du Doppler
réellement à haut risque périnatal. ombilical dans la surveillance du RCIU ait conduit
Il s'agit d'études prospectives sur des populations à une diminution significative de la morbidité et
à haut risque de RCIU ou présentant une hyper- de la mortalité périnatale, la transition entre
tension artérielle gravidique. Les mesures Doppler adaptation et décompensation due à l'hypoxie
sont réalisées après 26 SA dans ces études. Les fœtale est difficile à évaluer. L'utilisation du
résultats sur l'asphyxie in utero montrent une sen- Doppler cérébral dans la prise en charge du
sibilité allant de 68 à 87 %, une spécificité allant RCIU, par sa corrélation entre les modifications
de 62 à 80 %, une VPP allant de 80 à 95 %, une de son spectre et le risque d'hypoxie/acidémie,
VPN allant de 89 à 95 %. Le niveau de cette valeur permet de définir l'adaptation du fœtus à l'hy-
prédictive permet de dépister une grande partie poxie. Cependant, ces mécanismes d'adaptation
des RCIU et des fœtus malades, avec peu de faux sont d'un intérêt décisionnel limité dans la
positifs et très peu de faux négatifs, de manière mesure où le maximum de la vasodilatation des
plus pertinente qu'avec les mesures de l'artère artères cérébrales est observé au moins 2 semaines
ombilicale. Même s'il n'existe pas d'essai rando- avant l'apparition de décélérations tardives.
misé pour démontrer un éventuel bénéfice cli- C'est pourquoi, ces dernières années, des
nique, le bénéfice en termes de valeur prédictive, études sur le système veineux fœtal ont été
par rapport à l'utilisation de l'artère ombilicale menées afin d'une part d'évaluer de manière
seule, est évident et il semble légitime de le propo- plus précise l'hémodynamique fœtale, et
ser systématiquement aux populations à haut d'autre part de trouver des indicateurs plus
risque. Cependant, aucun essai randomisé n'a précis permettant d'évaluer la capacité fœtale à
évalué la place exacte de l'utilisation du Doppler l'hypoxie entre les quelques jours à quelques
cérébral dans la décision d'extraction fœtale. semaines séparant la survenue des modifica-
tions du système artériel et les anomalies du
RCF. Ce, pour tenter de déterminer un âge ges-
tationnel de naissance optimal.
Doppler veineux et retard
de croissance intra-utérin Rappel sur la circulation
veineuse fœtale
Les fœtus porteurs de RCIU et notamment ceux
d'origine vasculaire sont responsables de morbi- La circulation pulmonaire n'est in utero que d'une
dité et de mortalité périnatale. Cette morbimor- importance mineure ; elle permet un développe-
talité est en partie due à l'hypoxémie et à ment harmonieux des poumons. C'est une circu-
l'acidémie. Reuss est le premier à avoir montré lation à haute résistance en raison de la faible
chez l'animal l'existence de mécanismes d'adap- capacité vasculaire. Un système de shunts com-
tation cardiovasculaires comprenant des modifi- pense l'impossibilité de la circulation pulmonaire
cations affectant à la fois les systèmes artériel et à recevoir la totalité du débit sanguin issu de
veineux. l'oreillette droite.
L'étude initiale des Doppler artériels et notam- Le foramen ovale, communication interauriculaire
ment cérébraux a montré, en cas d'hypoxie fœtale, directe, est le premier shunt physiologique. Il per-
un phénomène d'adaptation. Cela se traduit au met le passage direct de sang de l'oreillette droite à
niveau du spectre Doppler par une dilatation des l'oreillette gauche. Le canal artériel, en aval du
artères cérébrales permettant un phénomène cœur droit, est le deuxième shunt ; il fait communi-
« d'épargne cérébrale » qui correspond à une redis- quer le tronc pulmonaire et l'aorte descendante en
tribution du sang oxygéné vers les organes vitaux dessous de la circulation brachiocéphalique.
et donc au maintien d'une oxygénation normale à Ces deux shunts ne sont pas utilisés indifférem-
court terme de ces organes. ment mais permettent au contraire la coexistence
La décision d'extraction des RCIU est habituelle- de deux circuits différents au sein des mêmes
ment prise sur la base d'un RCF anormal plus ou structures anatomiques.
139
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
140
Chapitre 16. Apport du Doppler dans le diagnostic et la surveillance du retard de croissance intra-utérin
positive. Les spectres de la VCI et des veines télédiastole qui est positive en situation normale
hépatiques comportent de manière physiolo- (figure 16.11). Le profil d'écoulement dans le duc-
gique une onde a négative, ce qui correspond à tus venosus reflète les variations de pressions
un spectre pathologique pour le ductus venosus entre cette structure et les cavités cardiaques : la
et qui explique les conséquences lourdes d'une vitesse d'écoulement est maximale pendant la
éventuelle confusion. systole auriculaire (onde S) puisqu'elle correspond
Le spectre au niveau du ductus venosus est un à la phase de remplissage rapide des oreillettes ; le
spectre triphasique avec une onde S de systole ini- deuxième pic correspond au début de la diastole
tiale positive, suivie d'une onde D de diastole ventriculaire (onde D), puis le flux est minimal
positive et d'une onde a correspondant à la lors de la contraction auriculaire (onde a).
141
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
142
Chapitre 16. Apport du Doppler dans le diagnostic et la surveillance du retard de croissance intra-utérin
Figure 16.12. Spectre pathologique : diastole nulle et reverse flow dans le ductus venosus.
320 avec Doppler veineux normaux et 202 avec périnatale. Dans le groupe d'enfants nés avant
Doppler veineux anormaux. En dehors de l'enté- 32 SA, l'IP du ductus venosus et la variabilité à
rocolite ulcéronécrosante, la fréquence des autres court terme ont montré une évolution en miroir
complications telles que la maladie des mem- dans les jours précédant l'accouchement. La mor-
branes hyalines, la dysplasie bronchopulmonaire, talité périnatale a été significativement plus
l'hémorragie intraventriculaire ainsi que la mor- importante si les deux variables étaient anor-
talité périnatale était plus élevée dans le groupe males, comparé aux cas où une seule variable était
des fœtus porteurs de RCIU avec Doppler veineux anormale (13/33 soit 39 % contre 4/60 soit 7 %).
anormaux comparativement au groupe où les
Doppler veineux étaient normaux.
Hecher et al., dans une étude multicentrique lon- Conclusion
gitudinale, ont évalué, dans une population de
RCIU inférieurs au 3e percentile avec augmenta- Les Doppler veineux apparaissent comme des
tion des résistances placentaires et redistribution outils potentiellement intéressants dans l'aide à la
artérielle cérébrale, la relation entre l'IP du ductus décision d'extraction des fœtus porteurs de RCIU
venosus, la variabilité à court terme et la mortalité avant 32 SA en complément de l'âge gestationnel,
143
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
144
Chapitre 16. Apport du Doppler dans le diagnostic et la surveillance du retard de croissance intra-utérin
Haugen G, Kiserud T, Godfrey K, Crozier S, Hanson M. Rochelson BL, Schulman H, Fleischer A, Farmakides G,
Portal and umbilical venous blood supply to the liver Bracero L, Ducey J, et al. The clinical signifance of
in the human fetus near term. Ultrasound Obstet Doppler umbilical artery velocimetry in the small
Gynecol 2004 ; 24 (6) : 599–605. for gestationnal age fetus. Am J Obstet Gynecol
Hecher K, Bilardo CM, Stitger RH, Ville Y, Hackeloer BJ, 1987 ; 156 : 1223–6.
Kok HJ, et al. Monitoring of fetuses with intrauterine Rizzo G, Capponi A, Talone PE, Arduini D, Romanini C.
growth restriction : a longitudinal study. Ultrasound Doppler indices from inferior vena cava and ductus
Obstet Gynecol 2001 ; 18 : 564–70. venosus in predicting pH and oxygen tension in
Hofstaetter C, Gudmundsson S, Dubiel M, Marsal K. umbilical blood at cordocentesis in growth-
Ductus Venosus velocimetry in high-risk pregnancies. retarded fetuses. Ultrasound Obstet Gynecol 1996 ;
Eur J Obstet Gynecol Reprod Biol 1996 ; 70 : 135–40. 7 : 401–10.
Hofstaetter C, Gudmundsson S, Dubiel M, Marsal K. Thornton JG, Hornbuckle J, Vail A, Spiegelhalter DJ,
Venous Doppler velocimetry in the surveillance of Levene M. The GRIT Study Group. Infant wellbeing
severely compromised fetuses. Ultrasound Obstet at 2 years of age in the Growth Restriction
Gynecol 2002 ; 20 : 233–9. Intervention Trial (GRIT) : multicentred randomised
Hollis B, Prefumo F, Bhide A, Rao S, Thilaganathan B. controlled trial. Lancet 2004 ; 364 (9433) : 513–20.
First trimester artery blood flow and birth weight. Trudinger BJ, Giles WB, Colleen MC. Flow velocity wave-
Ultrasound Obstet Gynecol 2003 ; 22 : 373–6. forms in the maternal uteroplacental and fetal umbi-
Kiserud T, Eik-Nes SH, Blaas HG, Hellevik LR. Foramen lical placental circulations. Am J Obstet Gynecol
ovale : an ultrasonographic study of its relation to the 1985 ; 152 : 155–63.
inferior vena cava, ductus venosus and hepatic veins.
Vainio M, Kujansuu E, Iso-Mustajärvi M, Maenpaa J. Low
Ultrasound Obstet Gynecol 1992 ; 2 (6) : 389–96.
dose acetylsalicylic acid in prevention of pregnancy-
Martin AM, Bindra R, Curcio P, Cicero S, Nicolaides KH. induced hypertension and intrauterine growth retar-
Screening for pre-eclampsia and fetal growth restric- dation in women with bilateral uterine artery
tion by uterine artery Doppler at 11-14 weeks of ges- notches. BJOG 2002 ; 109 : 161–7.
tation. Ultrasound Obstet Gynecol 2001 ; 18 : 583–6.
Vainio M, Kujansuu E, Koivisto AM, Maenpaa J. Bilateral
Muller T, Nanan R, Rehn M, Kristen P, Dietl J. Arterial
notching of uterine arteries at 12-14 weeks of gesta-
and Ductus Venosus Doppler in fetuses with absent
tion for prediction of hypertensive disorders of pre-
or reverse end-diastolic flow in the umbilical artery :
correlation with short-term perinatal outcome. Acta gnancy. Acta Obstet Gynecol Scand 2005 ; 84 :
Obstet Gynecol Scand 2002 ; 81 : 860–6. 1062–7.
Ozcan T, Sbracia M, d'Ancona RL, Copel JA, Mari G. Van Den Elzen HJ, Cohen-Overbeek TE, Grobbee DE,
Arterial and venous Doppler velocimetry in the seve- Quartero RWP, Wladimiroff JW. Early uterine
rely growth-restricted fetus and associations with artery Doppler velocimetry and the outcome of pre-
adverse perinatal outcome. Ultrasound Obstet gnancy in women aged 35 years and older.
Gynecol 1998 ; 12 : 39–44. Ultrasound Obstet Gynecol 1995 ; 5 : 328–33.
145
Place de l'IRM fœtale Chapitre 17
dans la prise en charge
des fœtus avec retard
de croissance
intra-utérin
Jean-Marie Jouannic
seule anomalie mise en évidence lors des écho- malies, fait suspecter un RCIU vasculaire par
graphies de dépistage de la grossesse. Dans cette insuffisance placentaire. Cependant, cette étude
situation, lorsqu'une anomalie fœtale (malforma- Doppler est parfois prise à défaut et peut omettre
Le retard de croissance intra-utérin
tion ou anomalie du caryotype) a été éliminée, le le repérage prénatal d'un RCIU vasculaire.
RCIU d'origine vasculaire (par insuffisance pla- Les capacités d'adaptation du fœtus à l'hypoxie
centaire) associé ou non à une hypertension fœtale chronique sont connues depuis longtemps,
maternelle ou à une prééclampsie demeure l'étio- en particulier par l'étude des phénomènes de
logie la plus fréquente. redistribution vasculaire favorisant les territoires
Comme nous l'avons vu dans les chapitres précé- supra-aortiques, dont le but est de maintenir un
dents, le terme de RCIU est communément utilisé niveau d'oxygénation suffisant du cerveau et du
pour décrire des fœtus petits dont le poids est cœur fœtal. Actuellement, plusieurs outils sont
147
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
utilisés dans l'appréciation de la tolérance fœtale à l'imagerie est de mettre en évidence des éléments
l'hypoxie, et la décision de faire naître un fœtus prédictifs du devenir neurologique ultérieur de
présentant un RCIU vasculaire repose sur la prise l'enfant. Parallèlement, de nouvelles séquences
en compte de plusieurs paramètres : Doppler d'IRM ont vu le jour, telles que les séquences
ombilical, cérébral et du canal d'Arantius, score pondérées en diffusion ou la spectroscopie de
biophysique de bien-être fœtal, analyse du rythme protons en résonance magnétique (SRM). La
cardiaque fœtal (RCF) classique ou couplée à SRM est limitée en prénatal par le rapport signal
l'étude automatisée de la variabilité (VCT). En sur bruit et les artéfacts de mouvement du fœtus.
dehors de l'apparition d'anomalies du RCF, aucun Les séquences de diffusion semblent plus pro-
de ces outils ne permet de définir de valeur seuil metteuses pour la détection ultraprécoce d'ano-
au-delà de laquelle une décision de naissance malies du parenchyme cérébral, avant même
pourrait améliorer le devenir périnatal. Il demeure l'apparition d'anomalies visibles en séquences
un assez large consensus sur le fait qu'une poli- conventionnelles.
tique d'extraction sur la seule donnée, par exemple,
d'une valeur de VCT diminuée ou de l'apparition
d'anomalies de l'Arantius (comme une onde A
nulle ou négative) améliore le devenir postnatal de
Les grandes étapes
ces fœtus. A fortiori, aucune donnée d'évolution du développement cérébral
de l'imagerie cérébrale en prénatal n'est actuelle-
ment utilisée pour la détection d'une situation Le développement cérébral se déroule schémati-
d'oxygénation précaire du cerveau fœtal. quement selon deux grandes étapes. En première
partie de gestation, les éléments du système ner-
Le cerveau fœtal en développement est très sen-
veux central (prosencéphale, rhombencéphale et
sible à l'hypoxie, que celle-ci soit chronique
télencéphale) se mettent en place et sur le plan
(comme dans le cadre d'un RCIU par insuffisance
anatomique, les structures cérébrales sont en place
vasculaire placentaire) ou aiguë (comme on peut
à 15 semaines d'aménorrhée (SA). Au cours de
l'observer pendant le travail). Les outils actuelle-
cette période se produit un phénomène de neuro-
ment utilisés pour la surveillance des fœtus pré-
genèse qui correspond à la multiplication des pré-
sentant un RCIU vasculaire, représentés par
curseurs neuronaux à partir de la zone germinale
l'échographie-Doppler et l'enregistrement du RCF,
périventriculaire. Parallèlement s'opère un pro-
ont pour but de tenter de déterminer la limite au-
cessus de migration neuronale avec mise en place
delà de laquelle l'hypoxie chronique risque d'ex-
des couches corticales, achevé vers 22 SA.
poser le fœtus à un risque d'accident aigu ou de
lésions cérébrales ischémiques irréversibles. Dans À partir de 20 SA débute le phénomène de myéli-
cette situation, la décision d'une naissance doit nisation qui progresse selon un axe caudorostral
faire peser les risques liés à une prématurité à partir de la moelle épinière jusque vers le
induite et les risques liés à une hypoxie dont la télencéphale. Parallèlement, les connections
tolérance fœtale n'est plus certaine. synaptiques se mettent en place et le cortex
connaît un développement considérable aboutis-
Actuellement, l'imagerie cérébrale du cerveau
sant à un phénomène de plissements formant les
fœtal n'a de place que dans la discussion des cas de
circonvolutions.
RCIU associés à une possible anomalie malfor-
mative du cerveau dans un cadre syndromique ou
d'une fœtopathie infectieuse. Elle repose sur
l'échographie et l'imagerie par résonance magné- Principes de base concernant
tique nucléaire (IRM) en séquences convention- l'IRM du fœtus
nelles, en particulier pour explorer une anomalie
de la giration. L'IRM cérébrale fœtale a été proposée en complé-
Les techniques d'imagerie cérébrale du nouveau- ment de l'étude par échographie en 1983. Cette
né ont connu un développement important dans technique a depuis connu un développement
les dernières années. Qu'il s'agisse de l'échogra- rapide et la majorité des centres périnataux fran-
phie ou de l'IRM conventionnelles, le but de çais en disposent actuellement. Un appareillage
148
Chapitre 17. Place de l’IRM fœtale dans la prise en charge
classique (0,5 à 1,5 tesla) est utilisé. La patiente est pour concerner l'étage sus-tentoriel vers 34 SA,
installée en décubitus dorsal et l'examen dure 20 à débutant au niveau des bras postérieurs de la cap-
30 minutes avec parfois, selon les équipes, une sule interne. Les techniques d'IRM de perfusion
prémédication par benzodiazépine pour obtenir comprenant l'injection d'un produit de contraste
une sédation fœtale. L'examen débute par des tel que le gadolinium ne sont pas utilisées chez le
acquisitions permettant un repérage dans les trois fœtus humain.
axes du fœtus. Théoriquement, l'IRM cérébrale
permet une étude anatomique du cerveau dès
5 mois, mais à ce stade de la grossesse cet examen
n'apporte guère plus d'informations qu'une écho-
Nouvelles techniques d'IRM
graphie réalisée par un opérateur de référence. À Plusieurs nouvelles techniques d'IRM ont été
partir de 26–28 SA, l'IRM apporte des informa- développées dans la dernière décennie, permet-
tions supplémentaires, en particulier pour l'étude tant une étude à la fois plus précise et plus précoce
de la giration ou la mise en évidence d'anomalies de phénomènes d'agression du parenchyme céré-
de la migration neuronale. bral tels que l'ischémie. Ces techniques connaissent
Les acquisitions utilisées pour l'imagerie fœtale un développement important en médecine adulte
sont des séquences rapides obtenues en environ et en médecine néonatale. Elles sont depuis
1 seconde et correspondant à des coupes de 3 à quelques années appliquées au fœtus humain et
5 mm d'épaisseur. L'examen standard permet d'ob- leur contribution potentielle à l'exploration de la
tenir dans les trois plans de l'espace des séquences souffrance cérébrale chez le fœtus en situation
pondérées en T2 et en T1. Les séquences pondérées d'hypoxie chronique dans le cadre du RCIU vas-
T2 permettent une étude anatomique et biomé- culaire sera discutée plus bas.
trique des structures cérébrales et l'étude de la
giration. Ces séquences sont cependant insuffi-
santes pour le diagnostic de certaines anomalies de
Étude de la diffusion
petite taille intéressant le parenchyme. Des et du tenseur de diffusion
séquences particulières en écho de gradient T2
Des séquences particulières dites de diffusion
(T2*) permettent de mettre en évidence des lésions
peuvent être réalisées. Elles explorent les mouve-
hémorragiques anciennes ou calcifiées. Les
ments microscopiques des molécules d'eau dans
séquences pondérées T1 requièrent un temps d'ac-
les tissus qui peuvent être mesurés sous la forme de
quisition plus long. Elles ne permettent pas une
coefficient apparent de diffusion. Les séquences de
étude anatomique aussi précise des structures céré-
diffusion correspondent à des séquences dites en
brales, mais elles peuvent être utiles pour la mise
« single shot echoplanar » utilisant des gradients de
en évidence de certaines lésions comme un foyer
diffusion pulsés. La force du gradient de diffusion
hémorragique récent ou la présence de tubers dans
est exprimée en unité de valeur « b », en secondes
le cadre d'une sclérose tubéreuse de Bourneville.
par millimètres carrés. Une première séquence est
Elles permettent par ailleurs de mieux rendre
réalisée avec un b égal à 0 puis une ou plusieurs
compte des phénomènes de myélinisation.
séquences sont réalisées avec un gradient supé-
En IRM, le parenchyme cérébral apparaît sous rieur (de 200 à 800–1000 s/mm2).
forme de strates avec la zone germinative profonde
La technique de tenseur de diffusion (diffusion ten-
qui apparaît en hypersignal T1 (blanche) et en
sor imaging) est dérivée de la technique précédente
hyposignal T2 (noire), une zone intermédiaire et
et donne une information sur le sens de déplace-
un cortex qui apparaît, comme la zone germina-
ment des molécules d'eau. Elle apporte donc des
tive, en hypersignal T1 et en hyposignal T2. À par-
renseignements sur l'architecture fine des struc-
tir de 30 SA, cette organisation en strates est moins
tures explorées, comme l'organisation de faisceaux
nette. La myélinisation débute vers 20 SA au
de neurones pour le cerveau.
niveau du tronc cérébral, se traduisant par un
hypersignal T1 qui reflète à la fois une grande Au cours du développement cérébral, il existe une
richesse cellulaire et la richesse en substance lipi- diminution des coefficients de diffusion qui tra-
dique. Ce processus de myélinisation se poursuit duit à la fois l'appauvrissement du contenu en eau
149
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
150
Chapitre 17. Place de l’IRM fœtale dans la prise en charge
151
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
de larges variations des coefficients de diffusion normalisation avait été la plus lente et souvent
mesurées au niveau de la substance blanche. Pour incomplète à distance de l'ischémie aiguë. À par-
la majorité des auteurs, les coefficients de diffu- tir d'un modèle d'ischémie prénatale chez le rat, il
sion sont plus élevés au sein de la substance a pu être démontré qu'il existait une parfaite cor-
blanche frontale par rapports aux valeurs mesu- rélation entre les anomalies de la diffusion au
rées en occipital. Cette tendance pourrait être le niveau de la substance blanche et les lésions histo-
reflet d'une myélinisation plus précoce en région logiques caractérisant l'ischémie de ces mêmes
occipitale. Par ailleurs, plusieurs études ont mis en territoires associant activation microgliale, acti-
évidence une diminution de la diffusion avec l'âge vation macrocytaire et phénomène de gliose
gestationnel. cicatricielle.
Les différences observées dans ces travaux préli- À ce jour, la contribution de l'étude de la diffusion
minaires, en particulier pour la substance blanche, dans une situation prénatale à risque d'hypoxie-
illustrent les limites que cette technique connaît ischémie cérébrale fœtale n'a été rapportée chez
chez le fœtus. D'une manière générale, avec les l'homme qu'au travers de cas isolés. Dans un cas,
équipements habituellement utilisés, le rapport des lésions ischémiques multifocales ont été sus-
signal-bruit et la résolution axiale sont nettement pectées à 33 SA dans le cadre d'une malformation
moins bons chez le fœtus que chez le nouveau-né. artérioveineuse de Galien avec des valeurs de
Les artéfacts liés aux mouvements fœtaux sont coefficient de diffusion diminuées en région
susceptibles d'influencer les valeurs des coeffi- pariétale et frontale. Dans un autre cas, il a été mis
cients de diffusion mesurés. De la même manière, en évidence une diminution significative des
un décalage du cerveau fœtal par rapport à l'iso- coefficients de diffusion au niveau de la substance
centre magnétique est susceptible d'influencer la blanche frontale des deux hémisphères lors d'un
mesure. Le choix initial de la force du gradient examen réalisé dans les 48 heures suivant un dia-
pulsé « b » (qui varie de 0 à 1000 s/mm2) est suscep- gnostic de mort fœtale in utero compliquant une
tible d'influencer les valeurs observées. Enfin, la grossesse monochoriale biamniotique à 24 SA.
taille et le positionnement de la région d'intérêt Les séquences conventionnelles réalisées lors du
(ROI) étudiée peuvent également influencer le même examen chez ce fœtus survivant étaient
résultat si cette dernière comprend par exemple normales. Un contrôle réalisé 2 semaines plus
une zone de cellules migrantes au sein de la subs- tard a mis en évidence des lésions étendues de
tance blanche (aboutissant à une diminution arté- cavitations au niveau de la substance blanche
factuelle du coefficient de diffusion pour la zone périventriculaire frontale.
de substance blanche considérée). Aucune étude à large échelle n'a été réalisée chez le
Plusieurs travaux réalisés chez l'animal suggèrent fœtus humain dans le cadre du RCIU vasculaire.
que l'étude de la diffusion pourrait permettre de Une étude récente a porté sur un effectif très réduit
mettre en évidence à un stade précoce des lésions de fœtus avec RCIU vasculaire (8 cas) pour lesquels
d'ischémie cérébrale. Chez la lapine gestante, une les coefficients de diffusion ont été mesurés à 37 SA
hypoxie fœtale aiguë induite par une occlusion et comparés à 5 témoins. Ces auteurs ont rapporté
temporaire de l'aorte sous-rénale conduit au déve- une diminution non significative des coefficients
loppement chez les nouveau-nés d'un tableau neu- de diffusion dans le groupe RCIU pour le faisceau
rologique voisin du tableau d'infirmité motrice pyramidal et la substance blanche du lobe frontal,
cérébrale décrit chez l'homme. Une occlusion a alors qu'aucune différence n'a été observée pour les
été réalisée pendant 40 minutes à 0,78 de la gesta- noyaux gris centraux. Ces résultats sont à inter
tion (dernier tiers) et une étude de la diffusion préter avec la plus grande précaution, eu égard aux
cérébrale a été réalisée au moment de l'hypoxie grandes variations des valeurs observées dans les
aiguë, puis 4 heures, 24 heures et 48 heures sui- plus larges séries de fœtus normaux.
vant l'occlusion. Les fœtus les plus sévèrement
touchés (mort in utero, naissance vivante avec Place de l'IRM spectroscopique
séquelles) étaient ceux pour lesquelles la diminu-
tion de la diffusion avait été la plus grande au L'IRM spectroscopique permet de réaliser une
cours de l'épisode aigu et pour lesquels la sorte de cartographie métabolique du cerveau.
152
Chapitre 17. Place de l’IRM fœtale dans la prise en charge
Des études longitudinales conduites chez le surveillance des fœtus présentant un RCIU vascu-
fœtus normal ont mis en évidence des modifica- laire. Les nouvelles techniques d'IRM avec étude
tions de l'expression de différents métabolites qui de la diffusion ou étude métabolique en spectro-
reflètent les phénomènes de maturation cérébrale métrie pourraient permettre d'identifier de telles
physiologique. Les métabolites étudiés sont : le lésions avant l'apparition d'anomalies constituées
NAA qui est un marqueur neuronal, la créatine mises en évidence plus tardivement par les tech-
qui reflète l'intensité du métabolisme cellulaire, niques de neuro-imagerie prénatale classiques.
la choline qui est un constituant membranaire et Ces nouvelles techniques apporteront sans nul
un marqueur des processus de myélinisation, et doute des informations capitales à la compréhen-
le myo-inositol (Myo-Ino) qui est un marqueur sion des phénomènes de souffrance cérébrale
astrocytaire. En conditions physiologiques, on observés dans ce cadre, qui demeurent respon-
n'observe pas de pic de détection correspondant à sables d'une lourde morbidité postnatale. Elles
la production de lactates (associée au méta devraient ainsi enrichir les connaissances actuelles
bolisme anaérobie). concernant la neuroprotection en période périna-
Il existe une modification des profils de détection tale. Parallèlement, ces outils pourraient représen-
de ces métabolites au cours du développement ter une aide précieuse dans la discussion des cas de
cérébral. Entre 22 et 28 SA, deux pics dominent, RCIU situés aux frontières des capacités de prise
correspondant au myo-inositol (rendant compte en charge périnatale actuelles. Enfin, ces tech-
de la relative densité en cellules gliales) et à la cho- niques permettront peut-être dans l'avenir d'enri-
line. Il existe ensuite une diminution progressive chir la palette des outils dont les périnatologistes
du pic de choline qui traduit la progression de la disposent pour décider du terme de naissance adé-
myélinisation. La choline entre dans la composi- quat des fœtus présentant un RCIU vasculaire.
tion des phospholipides membranaires. Seule la
fraction libre de choline est identifiée en IRM Références
spectroscopique. Ainsi, la diminution du pic de
Abe S, Takagi K, Yamamoto T, Kato T. Assessment of cor-
choline rend compte de son intégration pour la tical gyrus and sulcus formation using magnetic
biosynthèse de phosphatidylcholine et la produc- resonance images in small-for-gestational-age
tion de myéline. Le pic de NAA est faible à 22 SA fetuses. Prenat Diagn 2004 ; 24 : 333–8.
et augmente en intensité en deuxième partie de Abe S, Takagi K, Yamamoto T, Okuhata Y, Kato T.
gestation, rendant compte du développement Assessment of cortical gyrus and sulcus formation
dendritique et des synapses. Ces modifications using MR images in normal fetuses. Prenat Diagn
sont en accord avec celles observées chez les nou- 2003 ; 23 : 225–31.
veau-nés prématurés d'âge gestationnel équiva- Abernethy LJ, Palaniappan M, Cooke RW. Quantitative
lent. Enfin, à partir de 34 SA, le spectre observé magnetic resonance imaging of the brain in survi-
vors of very low birth weight. Arch Dis Child 2002 ;
est comparable à celui obtenu chez le nouveau-né 87 : 279–83.
à terme.
Adamsbaum C, Gelot A, André C. Atlas d'IRM du cer-
Chez le fœtus de mouton, une étude a permis de veau fœtal. Paris : Masson ; 2001.
mettre en évidence qu'une hypoxie fœtale indui- Adamsbaum C, Mezzetta L, Hornoy P. Actualité sur
sait l'apparition d'un pic de lactates corrélée à la l'imagerie par résonance magnétique (IRM) fœtale.
diminution du pH mesuré sur le sang fœtal ainsi Arch Péd 2010 ; 17 : 1749–60.
qu'à une diminution du pic de NNA. Chez Baldoli C, Righini A, Parazzini C, Scotti G, Triulzi F.
l'homme, seules quelques observations isolées ont Demonstration of acute ischemic lesions in the fetal
rapporté des modifications similaires. brain by diffusion magnetic resonance imaging.
Ann Neurol 2002 ; 52 : 243–6.
Battaglia FC, Lubchenko LO. A practical classification of
Conclusion newborn infants by weight and gestational age.
J Pediatr 1967 ; 71 : 159–63.
Baud O, Daire JL, Dalmaz Y, Fontaine RH, Krueger RC,
La mise en évidence de stigmates d'ischémie céré- Sebag G, et al. Gestational hypoxia induces white mat-
brale en rapport avec une hypoxie fœtale pourrait ter damage in neonatal rats : a new model of periven-
dans l'avenir représenter un outil majeur dans la tricular leukomalacia. Brain Pathol 2004 ; 14 : 1–10.
153
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
Beaulieu C, D'Arceuil H, Hedehus M, de Crespigny A, Gilbert WM, Danielsen BP. Pregnancy outcomes associa-
Kastrup A, Moseley ME. Diffusion-weighted magne- ted with intrauterine growth restriction. Am J Obstet
tic resonance imaging : theory and potential applica- Gynecol 2003 ; 188 : 1596–601.
tion to child neurology. Semin Pediatr Neurol 1999 ; Girard N, Chaumoitre K, Confort-Gouny S, Viola A,
6 : 87–100. Levrier O. Magnetic resonance imaging and the
Brunel H, Girard N, Confort-Gouny S, Viola A, detection of fetal brain anomalies, injury, and phy-
Chaumoitre K, D'Ercole C, et al. Fetal brain injury. siologic adaptations. Curr Opin Obstet Gynecol
J Neuroradiol 2004 ; 31 (2) : 123–37. 2006 ; 18 : 164–76.
Cady EB. Metabolite concentrations and relaxation in Goffinet F, Grangé G. Retard de croissance intra-utérin.
perinatal cerebral hypoxic-ischemic injury. In : Cabrol D, Pons JC, Goffinet F, éds. Traité d'obs-
Neurochem Res 1996 ; 21 : 1043–52. tétrique. Paris : Médecine-Sciences Flammarion ;
Cannie M, De Keyzer F, Meersschaert J, Jani J, Lewi L, 2003. p. 328–52.
Deprest J, et al. A diffusion-weighted template for Hadi HA. Fetal cerebral maturation in hypertensive disor-
gestational age-related apparent diffusion coefficient ders of pregnancy. Obstet Gynecol 1984 ; 63 : 214–9.
values in the developing fetal brain. Ultrasound Inder TE, Wells SJ, Mogridge NB, Spencer C, Volpe JJ.
Obstet Gynecol 2007 ; 30 : 318–24. Defining the nature of the cerebral abnormalities in
Cartry C, Viallon V, Hornoy P, Adamsbaum C. Diffusion- the premature infant : a qualitative magnetic reso-
weighted MR imaging of the normal fetal brain : nance imaging study. J Pediatr 2003 ; 143 : 171–9.
marker of fetal brain maturation. J Radiol 2010 ; Jouannic JM, Chanelles O, Rosenblatt J, Antonetti E,
91(5Pt 1) : 561–6. Demaria F, Benifla JL. Screening and timing for the
Charles-Edwards GD, Jan W, To M, Maxwell D, Keevil SF, delivery of fetuses with intrauterine growth restric-
Robinson R. Non-invasive detection and quantifica- tion of vascular origin. Gynecol Obstet Fertil 2006 ;
tion of human foetal brain lactate in utero by magne- 34 (3) : 248–53.
tic resonance spectroscopy. Prenat Diagn 2010 ; 30 : Jouannic JM, Fermont L, Brodaty G, Bonnet D, Daffos F.
260–6. An update on the fetal circulation. J Gynecol Obstet
Daneman A, Epelman M, Blaser S, Jarrin JR. Imaging of Biol Reprod 2004 ; 33 (4) : 291–6.
the brain in full-term neonates : does sonography Kok RD, van den Berg PP, van den Bergh AJ, Nijland R,
still play a role ? Pediatr Radiol 2006 ; 36 : 636–46. Heerschap A. Maturation of the human fetal brain as
Danielsen ER, Ross BD. In : Magnetic resonance spectros- observed by 1H MR spectroscopy. Magn Reson Med
copy of diagnosis of neurological diseases. New 2002 ; 48 : 611–6.
York, Basel : Marcel Dekker ; 1999. Kreis R, Ernst T, Ross BD. Development of the human
De Vries LS, Groenendaal F. Patterns of neonatal hypoxic- brain : in vivo quantification of metabolite and water
ischaemic brain injury. Neuroradiology 2010 ; 52 : content with proton magnetic resonance spectro
555–66. scopy. Magn Reson Med 1993 ; 30 : 424–37.
Derrick M, Luo NL, Bregman JC, Jilling T, Ji X, Fisher K, Leijser LM, Steggerda SJ, de Bruïne FT, van der Grond J,
et al. Preterm fetal hypoxia-ischemia causes hyperto- Walther FJ, van Wezel-Meijler G. Brain imaging fin-
nia and motor deficits in the neonatal rabbit : a dings in very preterm infants throughout the neona-
model for human cerebral palsy ? J Neurosci 2004 ; tal period. Part II. Relation with perinatal clinical
24 : 24–34. data. Dev Neuropsychol 2011 ; 36 : 118–35.
Drobyshevsky A, Derrick M, Prasad PV, Ji X, Englof I, Tan Manganaro L, Perrone A, Savelli S, Di Maurizio M, Maggi
S. Fetal brain magnetic resonance imaging response C, Ballesio L, et al. Evaluation of normal brain deve-
acutely to hypoxia-ischemia predicts postnatal out- lopment by prenatal MR imaging. Radiol Med 2007 ;
come. Ann Neurol 2007 ; 61 : 307–14. 112 (3) : 444–55.
Figueras F, Gardosi J. Intrauterine growth restriction : McIntire DD, Bloom SL, Casey BM, Leveno KJ. Birth
new concepts in antenatal surveillance, diagnosis, weight in relation to morbidity and mortality among
and management. Am J Obstet Gynecol 2011 ; 204(4) newborn infants. N Engl J Med 1999 ; 1234–8.
: 288–300. Nicolaides KH, Economides DL, Soothill PW. Blood
Garel C. Le développement du cerveau fœtal : atlas IRM et gases, pH, and lactate in appropriate- and small-for-
biométrie. Montpellier : Sauramps Médical ; 2000. gestational-age fetuses. Am J Obstet Gynecol 1989 ;
Garel C. New advances in fetal MR neuroimaging. Pediatr 161 : 996–1001.
Radiol 2006 ; 36 (7) : 621–5. Nosarti C, Al-Asady MH, Frangou S, Stewart AL, Rifkin
Garel C, Chantrel E, Brisse H, Elmaleh M, Luton D, L, Murray RM. Adolescents who were born very pre-
Oury JF, et al. Fetal cerebral cortex : normal gesta- term have decreased brain volumes. Brain 2002 ; 125
tional landmarks identified using prenatal MR (Pt 7) : 1616–23.
imaging. AJNR Am J Neuroradiol 2001 ; 22 : Nosarti C, Walshe M, Rushe TM, Rifkin L, Wyatt J,
184–9. Murray RM, et al. Neonatal ultrasound results
154
Chapitre 17. Place de l’IRM fœtale dans la prise en charge
following very preterm birth predict adolescent Sanz-Cortés M, Figueras F, Bargalló N, Padilla N, Amat-
behavioral and cognitive outcome. Dev Neuropsychol Roldan I, Gratacós E. Abnormal brain microstruc-
2011 ; 36 : 118–35. ture and metabolism in small-for-gestational-age
Panigrahy A, Borzage M, Blüm S. Basic principles and term fetuses with normal umbilical artery Doppler.
concepts underlying recent advances in MRI of the Ultrasound Obstet Gynecol 2010 ; 36 : 159–65.
developing brain. Semin Perinatol 2010 ; 34 : 3–19. Schaefer PW, Copen WA, Lev MH, Gonzales RG. Diffusion-
Pugash D, Krssak M, Kulemann V, Prayer D. Magnetic weighted magnetic resonance imaging in acute stroke.
resonance spectroscopy of the fetal brain. Prenat Neuroimaging Clin N Am 2005 ; 15 : 503–20.
Diagn 2009 ; 29 : 434–41. Schneider JF, Confort-Gouny S, Le Fur Y, Viout P,
Righini A, Bianchini E, Parazzini C, Gementi P, Ramenghi Bennathan M, Chapon F, et al. Diffusion-weighted
L, Baldoli C, et al. Apparent diffusion coefficient imaging in normal fetal brain maturation. Eur
determination in normal fetal brain : a prenatal MR Radiol 2007 ; 17 (9) : 2422–9.
imaging study. AJNR Am J Neuroradiol 2003 ; 24 Schneider MM, Berman JI, Baumer FM, Glass HC, Jeng S,
(5) : 799–804. Jeremy RJ, et al. Normative apparent diffusion coef-
Righini A, Kustermann A, Parazzini C, Fogliani R, ficient values in the developing fetal brain. AJNR Am
Ceriani F, Triulzi F. Diffusion-weighted magnetic J Neuroradiol 2009 ; 30 (9) : 1799–803.
resonance imaging of acute hypoxic-ischemic cere- Seeds JW, Peng T. Impaired growth and risk of fetal
bral lesions in the survivor of a monochorionic twin death : is the tenth percentile the appropriate stan-
pregnancy : case report. Ultrasound Obstet Gynecol dard ? Am J Obstet Gynecol 1998 ; 178 : 658–69.
2007 ; 29 : 453–6. Smith FW, Adam AH, Philips WD. NMR imaging in pre-
Roelants-van Rijn AM, van der Grond J, Stigter RH, de gnancy. Lancet 1983 ; 1 : 61–2.
Vries LS, Groenendaal F. Cerebral structure and Van Cappellen AM, Heerschap A, Nijhuis JG, Oeseburg B,
metabolism and long-term outcome in small-for- Jongsma HW. Hypoxia, the subsequent systemic
gestational-age preterm neonates. Pediatr Res 2004 ; metabolic acidosis, and their relationship with cere-
56 : 285–90. bral metabolite concentrations : an in vivo study in
Rutherford M, Biarge MM, Allsop J, Counsell S, Cowan F. fetal lambs with proton magnetic resonance spectro
MRI of perinatal brain injury. Pediatr Radiol 2010 ; scopy. Am J Obstet Gynecol 1999 ; 181 : 1537–45.
40 : 819–33. Warach S, Chien D, Li W, Ronthal M, Edelman RR. Fast
Salomon L, Garel C. Magnetic resonance imaging exami- magnetic resonance diffusion-weighted imaging of
nation of the fetal brain. Ultrasound Obstet Gynecol acute human stroke. Neurology 1992 ; 42 (9) : 1717–23.
2007 ; 30 : 1019–32.
155
Décisions aux limites Chapitre 18
de la viabilité en cas
de retard de croissance
intra-utérin
Élie Azria
que rarement de décision idéale. Par essence, naissance, car ce que nous pourrons proposer
décider c'est trancher dans une alternative où devra s'intégrer dans une stratégie de soin plus
chacun des termes comporte son lot d'espé- large où toutes les attentions devront être por-
rances, mais aussi de risques. Toutefois, si l'on tées sur la cohérence du projet de soins anté- et
sait d'avance que nos décisions sont dans une postnatal. C'est ainsi non seulement aux moda-
certaine mesure des paris qui reposent sur un lités de la surveillance et des soins anténatals
savoir probabiliste, ne pas s'impliquer dans un qu'à la prise en charge postnatale qu'il faut
processus de décision par peur de faire le penser.
157
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
158
Chapitre 18. Décisions aux limites de la viabilité en cas de retard de croissance intra-utérin
leur pronostic modifié favorablement par une Ce sont donc au total ces cinq attitudes qui, dans
extraction anticipée, même si celle-ci les expose à ces situations de RCIU sévères d'installation pré-
une prématurité parfois très importante avec tout coce, doivent être discutées : extraction immé-
son cortège de risques. La question qui se pose est diate, surveillance et éventuelle extraction en cas
ainsi de savoir à partir de quel seuil une extrac- d'aggravation, expectative vraie en suspendant
tion fœtale prématurée apparaît « raisonnable ». toute surveillance un temps donné, abandon
Nous reviendrons plus loin sur la question de fœtal en attendant une MFIU et IMG.
seuil et sur celle de viabilité, mais dans l'immédiat
voyons les termes de l'alternative. S'agit-il de dire
qu'au-delà d'un seuil fixé, une extraction fœtale
est envisageable si les paramètres de surveillance Facteurs pronostiques
montrent des altérations sévères de l'hémodyna- et décisionnels
mique fœtale, et qu'en deçà il faudrait surseoir à la
césarienne ? Cette attitude paraît sensée, mais ne Les données disponibles portant directement sur
peut en aucun cas constituer la seule ligne direc- les RCIU très précoces sont assez peu nombreuses
trice. D'autres attitudes que l'alternative binaire et c'est souvent sur des arguments indirects, et
extraction immédiate contre expectative doivent notamment à partir de travaux menés à des
être envisagées. C'est ainsi que l'interruption termes plus avancés, qu'il nous faut raisonner. Un
médicale de grossesse (IMG), telle qu'elle est défi- certain nombre de paramètres pronostics et déci-
nie en France par la loi de 1975, peut constituer sionnels ressortent néanmoins et jouent un rôle
une option. Si cette attitude pourra s'imposer d'autant plus déterminant que nous sommes à des
d'elle-même dans certaines situations où le pro- âges gestationnels extrêmes. Parmi ces facteurs,
nostic maternel est mis en jeu par la présence de l'âge gestationnel et le poids sont bien sûr au tout
prééclampsie, elle pourra aussi être discutée dans premier plan. Existent de plus des données sur les
des RCIU isolés très précoces et sévères. éléments de surveillance constituant une aide à la
Lorsqu'il est question d'attitude expectative, il décision.
convient de préciser que le sens donné à cette Indépendamment de tout RCIU, on sait que la
attente ne sera pas le même en fonction de la sur- mortalité et la morbidité néonatales dépendent en
veillance qui sera proposée au cours de cette phase. très grande partie de l'âge gestationnel. Les
Si une surveillance intensive du RCF ou des para- grandes cohortes, EPIPAGE en France et EPICure
mètres échographiques est entreprise, qu'une cure au Royaume-Uni, montrent très clairement ce lien
de corticoïdes est administrée et qu'un transfert in entre la survie et l'âge gestationnel à la naissance.
utero vers un centre périnatal de type 3 est effec- Dans l'étude en population EPIPAGE portant sur
tué, c'est en général pour qu'une extraction puisse les naissances entre 22 et 32 semaines d'aménor-
être réalisée en cas d'aggravation et que la prise en rhée (SA), le taux de survie est nul à 23 SA, passe à
charge postnatale soit optimale. 31 % des naissances vivantes à 24 SA, 50 % à 25 SA
À l'inverse, on peut aussi choisir de ne pas surveil- pour atteindre 71 % à 27 SA. Les taux de survie
ler les paramètres fœtaux, de ne pas administrer de rapportés dans certaines études hospitalières sont
corticoïdes et de surseoir au transfert tout en parfois sensiblement différents, pouvant aller
acceptant le risque qu'une dégradation occasionne jusqu'à 82 % des naissances vivantes à 24 SA
une mort fœtale. Cette dernière attitude, retenue lorsqu'un choix prénatal de réanimation immé-
en général lorsqu'il est considéré qu'une attitude diate est fait.
active constituerait une forme d'obstination dérai- L'association entre l'âge gestationnel et la morbi-
sonnable, est parfois présentée sous le nom dité néonatale et à plus long terme est également
d’« abandon fœtal ». Enfin, autre choix possible, avérée. Ainsi, la nécessité d'effectuer une cure
celui de ne pas entreprendre immédiatement une chirurgicale du canal artériel, ou le risque de sur-
surveillance fœtale après le diagnostic d'un RCIU venue d'une dysplasie bronchopulmonaire se
précoce et d'attendre pour cela qu'un terme donné manifestant par la persistance d'une oxygéno
soit atteint. Ce choix implique d'accepter la possi- dépendance à 36 semaines d'âge postmenstruel
bilité d'une mort fœtale dans l'intervalle. sont directement corrélés à l'âge gestationnel à la
159
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
160
Chapitre 18. Décisions aux limites de la viabilité en cas de retard de croissance intra-utérin
avant le terme de 33 SA. En plus de l'âge gestation- permettant d'étudier la réponse cardiovasculaire
nel et du poids estimé échographiquement, il est fœtale à la dysfonction placentaire comme les
donc important de pouvoir se reposer sur d'autres Doppler ombilicaux artériels, cérébraux et le duc-
éléments afin de nous aider à identifier le moment tus venosus.
où une extraction ne peut plus être différée sous Le problème de toutes les études menées avant
peine d'une MFIU ou d'un retentissement 27 semaines est celui de l'impact en termes de
neurodéveloppemental. morbidité et de mortalité du facteur prématurité.
Parce qu'il existe une association entre la dégra- Celui-ci est tel qu'il empêche de dégager le rôle
dation de l'hémodynamique fœtale en rapport et pronostique des différents indicateurs dont l'inté-
un risque accru de séquelles neurologiques, deux rêt ressort, en revanche, clairement après ce terme.
essais ont été entrepris dans le but de rechercher Il apparaît, en effet, après 27 semaines, chez les
les éléments de surveillance clinique qui pour- fœtus avec un RCIU et une diastole ombilicale
raient nous aider à trouver le moment où la nulle, que le rapport flux ombilical/flux cérébral
balance bénéfice/risque de l'extraction serait la est un bon critère pour prédire la mortalité et la
plus favorable. Il s'agit, pour le premier essai, du morbidité sévère. Toutefois, l'utilisation du
GRIT déjà mentionné plus haut, où, en cas de Doppler ombilical seul ou couplé au Doppler de
doute du clinicien sur l'intérêt d'une extraction l'artère cérébrale moyenne conduisant souvent à
immédiate, la randomisation orientait la patiente des extractions qui auraient certainement pu être
incluse vers le groupe extraction immédiate ou a différées de quelques jours, c'est vers le ductus
contrario expectative. Si le délai moyen entre les venosus que les équipes qui prennent en charge ces
deux groupes n'était que de 4 jours, les résultats à RCIU se sont tournées. On a pu montrer que les
2 ans de vie montraient néanmoins davantage anomalies du Doppler du ductus venosus étaient
d'infirmités cérébrales avant 31 SA dans le groupe également un bon critère pour prédire une sur-
« extraction immédiate ». L'extraction fœtale en morbidité néonatale, pouvant, à ce titre, constituer
l'absence de signes évidents d'extraction n'a donc un critère d'extraction. De plus, contrairement aux
pas la vertu neuroprotectrice qu'on pouvait espé- autres paramètres Doppler qui peuvent s'altérer
rer et, inversement, elle est susceptible de générer précocement, le ductus venosus présente cet inté-
une morbidité liée aux quelques jours de vie in rêt qu'il s'altère à un stade plus avancé, et qu'en
utero perdus, même si l'évaluation à plus long dépit d'anomalies au niveau ombilical, sa norma-
terme des enfants de cet essai n'a plus retrouvé de lité pourrait permettre de différer une extraction
différence. Ces résultats amènent également à se fœtale.
demander si les lésions cérébrales ne sont pas déjà
constituées au moment où nous nous posons la
question de l'extraction. Positionnement parental
Le second essai est une autre étude multicen- et information
trique européenne qui se propose d'évaluer le
moment optimal de l'extraction fœtale à partir de En dehors des paramètres de surveillance fœtale
seuils définis d'anomalies du RCF et du ductus qui permettent d'appuyer nos décisions afin de
venosus. Pour cette étude appelée TRUFFLE trouver le meilleur compromis entre la très grande
(Trial of Umbilical and Fetal Flow in Europe), les prématurité, assortie de sa morbimortalité très
inclusions viennent seulement de s'achever et les lourde, et les risques de mort fœtale ou de séquelles
résultats ne sont pas encore disponibles. Outre neurodéveloppementales, un certain nombre d'élé-
cet essai, les auteurs d'un certain nombre de tra- ments doivent être pris en compte. Parce qu'en
vaux récents se sont intéressés à cette question et dépit des progrès réalisés dans le domaine de la
ont évalué la capacité de différents paramètres de surveillance fœtale ou de la réanimation néonatale,
surveillance fœtale à nous aider à prendre des les risques aux termes extrêmes dont il est question
décisions, celle notamment de différer une restent très importants, la décision anténatale ne se
extraction fœtale afin de gagner sur la morbidité réduit pas au choix du moment optimal pour effec-
en lien avec la prématurité. Parmi ces paramètres tuer une extraction fœtale, et se doit de considérer
figurent la variabilité à court terme et les éléments les options évoquées plus haut. Il faut décider si les
161
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
risques qui planent sur le fœtus puis le nouveau-né scientifique pour décider de la stratégie de soin à
ne nous mènent pas, par nos interventions, vers proposer dans une situation de RCIU très précoce.
une obstination déraisonnable. La décision ne peut être purement technique,
Plaçant notre propos dans le contexte de ces purement médicale. Ce d'autant plus que les caté-
termes où peuvent commencer à s'envisager des gories conceptuelles que nous utilisons pour
réanimations lourdes, mais où des séquelles irré- structurer notre raisonnement médical, comme
versibles peuvent aussi remplacer la mort, la défi- celle du seuil de viabilité ou celle du RCIU, sont
nition du raisonnable est loin d'être univoque, et loin d'être sans faille.
les obstétriciens ne peuvent en être les seuls inter- À propos du seuil de viabilité, rappelons qu'il
prètes. La collaboration obstétricopédiatrique répond à une définition changeante dans le temps,
est, à ce titre, fondamentale ; elle l'est également qui avance avec les progrès de la médecine néo
en ce qu'elle permet de garantir une cohérence natale et qu’il est susceptible de reculer quelques
entre les périodes anté- et postnatale. Toutefois, années plus tard avec les résultats à distance de
cette intersubjectivité née de l'interdisciplinarité l'application de ces techniques. La définition de ce
n'est pas suffisante et seuls les parents, par leur seuil est également changeante dans l'espace, d'un
positionnement et par la perception qu'ils ont des pays à l'autre, mais aussi d'une maternité ou d'un
risques, sont en mesure de nous orienter vers ce service de soins intensifs à un autre, et même par-
qu'ils perçoivent comme raisonnable et de nous fois d'un praticien à un autre, comme le montrent
indiquer ce qui, à leurs yeux, constitue la fron- des travaux sur la diversité des pratiques euro-
tière de l'irraisonnable. D'où l'importance de péennes. Si ce seuil existe, il désigne le terme à
l'information, autre objet majeur de cette colla- partir duquel un fœtus peut naître et vivre, sans
boration obstétricopédiatrique précédemment préjuger des moyens mis en œuvre pour assurer sa
évoquée. survie, ni des conditions de sa vie future. Ce seuil,
Le couple doit être informé de la situation, mais s'il en est, consisterait ainsi en une limite hermé-
aussi des choix qui s'offrent à lui, de leurs consé- tique entre l'impossible et le possible. Il est évident
quences possibles et prévisibles. Cette informa- que la définition de la vie se trouve bien changée
tion est certes une obligation légale et, selon les par les techniques actuelles de réanimation, et que
termes de la loi, elle se doit d'être claire, loyale et la vie ne sous-entend plus une autonomie biolo-
appropriée, mais plus encore, elle doit être perçue gique et mécanique permanente. On peut donc
comme un soin à part entière. considérer comme viable un enfant nécessitant à
la naissance le recours à une assistance venti
Notre propos n'est pas d'affirmer que l'avis des
latoire ou d'un autre type, à condition que celle-ci
parents doit être dans tous les cas le déterminant
soit temporaire.
absolu des décisions, mais il doit être pris en compte
et intégré aux paramètres du choix. Impliquer les La pratique et les résultats du suivi des grandes
parents ne signifie pas leur laisser la responsabilité cohortes de prématurés mentionnées précédem-
d'une telle décision, ce pour deux raisons évidentes. ment nous montrent le caractère poreux de cette
Tout d'abord, la passion parfois engendrée par une frontière, qui ne peut de plus être résumée à un
telle situation peut ne pas être propice à une déci- âge gestationnel ou à un poids de naissance. Ce
sion adaptée. La seconde raison est l'insupportable seuil fait, en outre, implicitement référence à la
sentiment de culpabilité qui menace un couple déci- capacité à vivre d'un nouveau-né, sans considérer
sionnaire dans un cas comme celui-ci, avec ses les conditions de vie futures de cet enfant. Or, la
conséquences sur chacun des conjoints et sur l'unité problématique de la grande prématurité et du
même du couple. RCIU sévère n'est pas tout entière dans l'incerti-
tude quant à la survie, mais aussi dans le risque du
handicap. De l'évocation de ces limites au concept
Conclusion de seuil de viabilité, on comprendra donc bien
l'importance d'intégrer d'autres critères que l'âge
Nous avons pu voir la nécessité de mobiliser des gestationnel et, parmi eux, le poids du fœtus et le
registres aussi divers que le positionnement paren- contexte dans lequel la naissance se produit. C'est
tal et les données pronostiques de la littérature ainsi que les Anglo-Saxons utilisent désormais
162
Chapitre 18. Décisions aux limites de la viabilité en cas de retard de croissance intra-utérin
davantage l'idée de « grey zone », idée reprise par confère à l'embryon un statut au sein de la famille
les Français dans un texte de réflexion sur les que n'avait auparavant que l'enfant après la nais-
dilemmes posés par la prématurité extrême. sance. Tout ceci concourt à l'élaboration idéale
La seconde catégorie conceptuelle qui mérite d'une image de l'enfant avant même qu'il n'ait une
d'être un peu bousculée, et qui l'est d'ailleurs par existence extra utero, à laquelle les parents s'at-
un certain nombre d'auteurs, est celle du RCIU. tachent. Les critères de cet idéal sont bien sûr dif-
Au même titre que n'importe quelle entité noso férents selon les parents et les individus qui
logique, il convient de rappeler le caractère arbi- composent les couples, et l'idéal d'une personne
traire et réducteur qu'il peut y avoir à regrouper peut être bien éloigné de celui d'une autre. Malgré
sous des appellations des situations plus spéci- cette diversité, il existe des critères propres à une
fiques et complexes que ce qu'un terme unique est société qui seront partagés par une majorité d'in-
en mesure de désigner. La médecine occidentale dividus au sein d'un groupe. La crainte du handi-
s'est construite sur cette croyance en l'existence cap, lorsque les possibilités de prise en charge
d'entités appelées « maladies », qui, comme le sou- solidaire offertes sont très largement insuffi-
ligne François Dagognet, « transforment une réa- santes, est un exemple de ces critères. La société
lité brouillée, bariolée et touffue en un tableau change et ses valeurs aussi. Le médecin, à qui
explicatif de toute symptomatologie ». S'il faut revient la lourde charge de prendre des décisions,
reconnaître le caractère très opératoire de la noso- se doit également de prendre en compte les
logie qui permet aux soignants de communiquer, normes sociales en vigueur.
d'enseigner, de faire progresser les savoirs, il est
nécessaire, pour l'utiliser au mieux, de mesurer Références
les limites de nos outils. Concernant le RCIU, c'est A randomised trial of timed delivery for the compromised
précisément parce que les limites de cette entité preterm fetus : short term outcomes and Bayesian
entravent les progrès dans ce domaine que cer- interpretation. BJOG 2003 ; 110 (1) : 27–32.
tains proposent, avec des approches plus indivi- Azria E, Bétrémieux P, Caeymaex L, Debillon T, Fournié A,
duelles, d'en redessiner les contours. Huillery ML, et al. [Information in perinatal medi-
Après ce détour critique vers des outils concep- cine : ethical aspects]. Gynécol Obstét Fertil 2008 ; 36
(4) : 476–83.
tuels qui nous sont indispensables, évoquons pour
Barker DJ. Fetal growth and adult disease. Br J Obstet
terminer d'autres éléments non moins indispen-
Gynaecol 1992 ; 99 (4) : 275–6.
sables à toute réflexion devant conduire à une
Baschat AA. Neurodevelopment following fetal growth
décision relative à autrui dans un état de droit. Il restriction and its relationship with antepartum
s'agit d'éléments d'ordre juridique, déontologique, parameters of placental dysfunction. Ultrasound
éthique, institutionnel et sociologique. Le cadre Obstet Gynecol 2011 ; 37 (5) : 501–14.
juridique que nul n'est censé ignorer fait figure Baschat AA, Cosmi E, Bilardo CM, Wolf H, Berg C,
d'impératif catégorique. Nos références législa- Rigano S, et al. Predictors of neonatal outcome in
tives seront aussi bien la législation sur l'IMG que early-onset placental dysfunction. Obstet Gynecol
la loi relative aux droits des malades et à la fin de 2007 ; 109 (2Pt 1) : 253–61.
vie, dite loi Leonetti (22 avril 2005), ou celle, dite Baschat AA, Gembruch U, Harman CR. The sequence of
loi Kouchner (4 mars 2002), relative aux droits des changes in Doppler and biophysical parameters as
severe fetal growth restriction worsens. Ultrasound
malades et à la qualité du système de santé. Obstet Gynecol 2001 ; 18 (6) : 571–7.
Outre ce cadre juridique, il existe un autre impé- Baschat AA, Gembruch U, Reiss I, Gortner L, Weiner CP,
ratif, celui du questionnement éthique. Enfin, le Harman CR. Relationship between arterial and
contexte sociologique ne peut être méconnu. venous Doppler and perinatal outcome in fetal
L'investissement des parents n'est plus aujourd'hui growth restriction. Ultrasound Obstet Gynecol
le même que ce qu'il a été. L'enfant fait l'objet d'un 2000 ; 16 (5) : 407–13.
désir accru, et sa naissance est souvent planifiée. Baschat AA, Odibo AO. Timing of delivery in fetal growth
restriction and childhood development : some uncer-
C'est là une conséquence, mais aussi un facteur
tainties remain. Am J Obstet Gynecol 2011 ; 204 (1) :
déterminant de deux évolutions importantes : la 2–3.
maîtrise de la fécondité et la baisse de la mortalité Baschat AA, Weiner CP. Umbilical artery doppler screening
infantile. De plus, l'échographie anténatale for detection of the small fetus in need of antepartum
163
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
surveillance. Am J Obstet Gynecol 2000 ; 182 (1Pt 1) : Larroque B, Bréart G, Kaminski M, Dehan M, André M,
154–8. Burguet A, et al. EPIPAGE Study Group. Survival of
Bernstein IM, Horbar JD, Badger GJ, Ohlsson A, Golan A. very preterm infants : Epipage, a population-based
Morbidity and mortality among very-low-birth- cohort study. Arch Dis Child Fetal Neonatal Ed
weight neonates with intrauterine growth restric- 2004 ; 89 (2) : F139–44.
tion. The Vermont Oxford Network. Am J Obstet Marlow N, Wolke D. Bracewell MA, Samara M ; EPICure
Gynecol 2000 ; 182 (1Pt 1) : 198–206. Study Group. Neurologic and developmental disabi-
Bilardo CM, Wolf H, Stigter RH, Ville Y, Baez E, Visser lity at six years of age after extremely preterm birth.
GH, et al. Relationship between monitoring parame- N Engl J Med 2005 ; 352 (1) : 9–19.
ters and perinatal outcome in severe, early intraute- Ministère de la Santé publique et de l'Assurance maladie.
rine growth restriction. Ultrasound Obstet Gynecol Décret 95-1000 du 6 septembre 1995. In : Code de
2004 ; 23 (2) : 119–25. déontologie médicale. 1995. p. 133305–10.
De Leeuw R, Cuttini M, Nadai M, Berbik I, Hansen G, Mongelli M, Ek S, Tambyrajia R. Screening for fetal
Kucinskas A, et al. Treatment choices for extremely growth restriction : a mathematical model of the
preterm infants : an international perspective. effect of time interval and ultrasound error. Obstet
J Pediatr 2000 ; 137 (5) : 608–16. Gynecol 1998 ; 92 (6) : 908–12.
Engineer N, Kumar S. Perinatal variables and neonatal Moriette G, Rameix S, Azria E, Fournié A, Andrini P,
outcomes in severely growth restricted preterm Caeymaex L, et al. [Group de réflexion sur les
fetuses. Acta Obstet Gynecol Scand 2010 ; 89 (9) : aspects éthiques de la périnatologie]. [Very prema-
1174–81. ture births : dilemmas and management. Part 1.
Ferrazzi E, Bozzo M, Rigano S, Bellotti M, Morabito A, Outcome of infants born before 28 weeks of post-
Pardi G, et al. Temporal sequence of abnormal menstrual age, and definition of a gray zone]. Arch
Doppler changes in the peripheral and central circu- Pédiatr 2010 ; 17 (5) : 518–26.
latory systems of the severely growth-restricted Owen P, Burton K, Ogston S, Khan KS, Howie PW. Using
fetus. Ultrasound Obstet Gynecol 2002 ; 19 (2) : unconditional and conditional standard deviation
140–6. scores of fetal abdominal area measurements in the
Gardosi J. Individualized fetal growth assessment and prediction of intrauterine growth restriction.
accuracy of prediction. Ultrasound Obstet Gynecol Ultrasound Obstet Gynecol 2000 ; 16 (5) : 439–44.
1996 ; 7 (6) : 462–3. Thornton JG, Hornbuckle J, Vail A, Spiegelhalter DJ,
Gardosi J. New definition of small for gestational age Levene M. GRIT study group. Infant wellbeing at 2
based on fetal growth potential. Horm Res 2006 ; 65 years of age in the Growth Restriction Intervention
(Suppl 3) : 15–8. Trial (GRIT) : multicentred randomised controlled
trial. Lancet 2004 ; 364 (9433) : 513–20.
Garite TJ, Clark R, Thorp JA. Intrauterine growth restric-
tion increases morbidity and mortality among pre- Torrance HL, Krediet TG, Vreman HJ, Visser GH, van Bel
mature neonates. Am J Obstet Gynecol 2004 ; 191 F. Oxidative stress and proinflammatory cytokine
(2) : 481–7. levels are increased in premature neonates of pree-
clamptic mothers with HELLP syndrome.
Hecher K. Assessment of ductus venosus flow during the Neonatology 2008a ; 94 (2) : 138–42.
first and early second trimesters : what can we
expect ? Ultrasound Obstet Gynecol 2001 ; 17 (4) : Torrance HL, Voorbij HA, Wijnberger LD, van Bel F,
285–7. Visser GH. Lung maturation in small for gestational
age fetuses from pregnancies complicated by placen-
Herber-Jonat S, Schulze A, Kribs A, Roth B, Lindner W, tal insufficiency or maternal hypertension. Early
Pohlandt F. Survival and major neonatal complica- Hum Dev 2008 ; 84 (7) : 465–9.
tions in infants born between 22 0/7 and 24 6/7
weeks of gestation (1999-2003). Am J Obstet Gynecol Turan S, Miller J, Baschat AA. Integrated testing and
2006 ; 195 (1) : 16–22. management in fetal growth restriction. Semin
Perinatol 2008 ; 32 (3) : 194–200.
Keogh J, Sinn J, Hollebone K, Bajuk B, Fischer W, Lui K.
Consensus Workshop Organising Committee. Vergani P, Roncaglia N, Locatelli A, Andreotti C, Crippa
Delivery in the « grey zone » : collaborative approach I, Pezzullo JC, et al. Antenatal predictors of neonatal
to extremely preterm birth. Aust N Z J Obstet outcome in fetal growth restriction with absent end-
Gynaecol 2007 ; 47 (4) : 273–8. diastolic flow in the umbilical artery. Am J Obstet
Gynecol 2005 ; 193 (3Pt 2) : 1213–8.
Larroque B, Ancel PY, Marret S, Marchand L, André M,
Arnaud C, et al. EPIPAGE Study Group. Walker DM, Marlow N, Upstone L, Gross H, Hornbuckle
Neurodevelopmental disabilities and special care of J, Vail A, et al. The Growth Restriction Intervention
5-year-old children born before 33 weeks of gestation Trial : long-term outcomes in a randomized trial of
(the EPIPAGE study) : a longitudinal cohort study. timing of delivery in fetal growth restriction. Am
Lancet 2008 ; 371 (9615) : 813–20. J Obstet Gynecol 2011 ; 204 (1) : 34 e1-9.
164
Modalités de prise Chapitre 19
en charge du corps
en cas de décès périnatal
Michèle Goussot-Souchet
gestion commune avec les parents. Ce débat en bracelets d'identité, photos, empreintes des mains
2005 a révélé à la société une procédure datant de et des pieds comme traces mémorielles. Il s'agit de
1993 selon laquelle la ritualisation du deuil photographies réalisées en dehors du contexte
Le retard de croissance intra-utérin
concernant le corps d'un fœtus mort n'était pos- d'autopsie, elles seront prises avec soin dans le but
sible qu'au-delà des seuils de viabilité théorique d'être données aux parents s'ils les souhaitent.
proposés par l'Organisation mondiale de la santé Le corps sera identifié avec deux bracelets sur les-
(OMS). quels seront indiqués le nom de la mère et la date
En France, depuis 2008, des décisions de justice de naissance. Il sera conservé à 4 °C en attendant
(jurisprudence) et les textes de lois qui y ont fait l'acheminement à la chambre mortuaire dans les
suite régissent la prise en charge du corps. meilleurs délais.
165
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
166
dans le dossier CERTIFICAT M
.. ..........................................................................................................
de civil)
Sage-femme
CERTIFIE QUE :
___________________________________________________________ |
|__|__|__|__|__|__|__|__| |__|__|h_____mn
167
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
le registre « naissances » que sur le registre « décès » le livret de famille. Il est prudent de signifier aux
de l'état civil. Les parents obtiendront un acte de parents que seule la partie décès est remplie sur le
naissance et un acte de décès pour leur enfant. livret de famille pour la naissance d'un enfant
L'enfant a une filiation, un nom de famille et ses mort-né. L'enfant n'a pas de filiation et ne porte
parents sont dans l'obligation de le prénommer. Il pas de nom.
sera inscrit sur le livret de famille (parties nais- La sage-femme ou l'obstétricien remplira le certi-
sance et décès). Les rites funéraires, inhumation ficat médical d'accouchement (figure 19.1) en vue
ou crémation, sont obligatoires et organisés par d'une demande d'établissement d'un acte d'enfant
les parents après démarches auprès d'un conseiller sans vie selon le décret no 2008-200 du 20 août
funéraire (pompes funèbres). Dans le cas où le 2008 pris en application de l'article 79-1 alinéa 2
décès survient avant l'inscription à l'état civil, il du code civil. Ce certificat comporte deux parties.
peut être consigné la naissance et le décès sur le La partie supérieure sera conservée dans le dos-
même certificat médical. En application du code sier médical. Elle distingue deux situations. Dans
civil, article 79-1 créé par la loi no 93-22 du 8 jan- celle ouvrant droit à l'établissement d'un acte
vier 1993, « lorsqu'un enfant est décédé avant que d'enfant sans vie, quand le clinicien atteste d'un
sa naissance ait été déclarée à l'état civil, l'officier accouchement spontané ou d'une interruption
de l'état civil établit un acte de naissance et un médicale de grossesse (en opposition à une fausse
acte de décès sur production d'un certificat médi- couche précoce ou à une interruption volontaire
cal indiquant que l'enfant est né vivant et viable et de grossesse), il est noté le prénom, le nom, la date
précisant les jour et heure de sa naissance et de de naissance de la parturiente, le lieu d'accouche-
son décès ». ment, la date et l'heure de l'acte ainsi que le nom et
la qualité du praticien.
Fœtus né sans vie à un terme Dans la partie inférieure du certificat le praticien,
supérieur ou égal à 22 SA docteur en médecine ou sage-femme, certifie que
et/ou pesant plus de 500 g la parturiente a accouché d'un enfant mort-né ou
non viable. Sont consignés l'identité de la patiente,
La mise au point de la conduite à tenir figure la date, l'heure ainsi que le lieu d'accouchement. Ce
dans la circulaire DGCL/DACS/DHOS/DGS/ certificat pourra être utilisé pour demander une
DGS no 2009-182 du 19 juin 2009 relative à l'enre- inscription à l'état civil. L'acte d'enfant sans vie est
gistrement à l'état civil des enfants décédés avant certes délivré par le bureau de l'état civil, mais n'est
la déclaration de naissance et de ceux pouvant pas à proprement parler un acte d'état civil, car il
donner lieu à un acte d'enfant sans vie, à la déli- n'est pas créateur de droits. Pour un couple non
vrance du livret de famille, à la prise en charge des marié et dont c'est le premier enfant, l'arrêté du
corps des enfants décédés, des enfants sans vie et 20 août 2008 permet la délivrance d'un livret de
des fœtus. La présente circulaire a pour objet l'en- famille : « Un livret de famille est remis, à leur
registrement à l'état civil, le devenir des corps des demande, aux parents qui en sont dépourvus par
enfants soit décédés avant la déclaration de nais- l'officier de l'état civil qui a établi l'acte d'enfant
sance, soit pouvant être déclarés sans vie. Elle sans vie. Il comporte un extrait d'acte de naissance
propose des recommandations pour l'accompa- du ou des parents ainsi que l'indication d'enfant
gnement du deuil des familles dans son annexe I sans vie, la date et le lieu de l'accouchement. »
et décrit, à des fins épidémiologiques, les modali-
tés de recueil d'informations d'activités médi- Fœtus né vivant avant 22 SA et de
cales relatives aux mort-nés dans son annexe II.
moins de 500 g (donc « non viable »)
L'inscription à l'état civil est facultative ; la mère
doit en faire la demande sans limite dans le temps. L'inscription à l'état civil est facultative. Si la famille
De même, le certificat peut être rédigé à distance la demande, l'enfant figurera uniquement dans le
par le clinicien disposant des éléments cliniques registre « décès ». Il est considéré comme décédé
permettant d'affirmer l'existence de l'accouche- uniquement, non comme né vivant ; il sera délivré
ment. Les parents ont le choix de prénommer ou un acte d'enfant né sans vie. Les parents ont le
non l'enfant, de faire inscrire ou non l'enfant sur choix de prénommer ou non l'enfant, de le
168
Chapitre 19. Modalités de prise en charge du corps en cas de décès périnatal
mentionner ou non sur le livret de famille. Il est d'un corps formé – y compris congénitalement
prudent de leur signifier que seule la partie décès malformé – et sexué, quand bien même le proces-
est remplie sur le livret de famille pour la naissance sus de maturation demeure inachevé et à l'exclusion
d'un enfant mort-né. Pour les parents non mariés, des masses tissulaires sans aspect morphologique »,
dont c'est le premier enfant, l'arrêté du 20 août 2008 précise la circulaire de 2009.
modifie les textes de juin 2006 et permet la déli-
vrance d'un livret de famille : « À la demande des
parents qui en sont dépourvus, à l'occasion de l'éta- Prise en charge concrète
blissement d'un acte d'enfant sans vie. »
du corps : les rites funéraires
En France, deux modes de sépulture sont autori-
Fœtus né sans vie avant 22 SA sés : l'inhumation et la crémation.
et de moins de 500 g (donc « non
viable ») Inhumation
Les nouveaux textes juridiques émanent de la
L'inhumation est plus proche de nos traditions
situation de ces très jeunes fœtus. Auparavant en
culturelles. Le choix du cimetière est commandé
deçà de la limite théorique de viabilité, les fœtus
par le droit. Seule peut être inhumée dans le cime-
étaient considérés comme des « déchets anato-
tière d'une commune : une personne qui y est
miques ». La présence concrète du fœtus mort
domiciliée (domicile des parents dans le cas de la
doit aujourd'hui être prise en compte, puisque sa
mort périnatale), une personne qui y est décédée,
mort représente une réelle perte pour les parents
ou une personne ayant droit à sépulture car pos-
qui l'ont vu à l'échographie. Dès lors est possible,
sédant une sépulture familiale. Lorsqu'il n'y a pas
pour ceux qui le souhaitent et sans l'imposer à
de sépulture existante, différentes possibilités
tous, une reconnaissance de ce deuil par l'entou-
sont envisageables : soit fonder une sépulture clas-
rage et une forme de ritualisation autour des
sique (qui pourra devenir la sépulture de famille),
corps. Comme le souligne Axel Honneth dans ses
soit, dans certaines communes, telle Paris, acqué-
travaux sur la reconnaissance, celle-ci doit savoir
rir un terrain de 1 m2, adapté à la taille de l'enfant.
intégrer trois valeurs essentielles : l'amour, le res-
Les parents peuvent opter pour le terrain com-
pect des droits (au sens de règles collectives) et le
mun, c'est-à-dire une sépulture gratuite pour une
respect de la dignité. On peut considérer que c'est
durée de 5 ans non renouvelable, disponible dans
ce qui est en jeu dans le cadre du questionnement
toutes les communes. Cependant, lorsque la
sur le devenir des fœtus morts. Il convient néan-
famille ne passe pas par un lieu de culte, ce qui est
moins de souligner ici que d'autres couples, en
habituel pour un enfant né sans vie, il n'est pas
pareille situation, n'accordent pas les mêmes
aisé de trouver un espace adapté à la cérémonie. Il
symboliques au fœtus ou ne souhaitent pas entrer
faut se renseigner auprès de la chambre mortuaire
dans cette logique de la reconnaissance, qu'elle
de l'hôpital, du crématorium ou du funérarium.
soit collective avec rite funéraire ou individuelle,
Pour les personnes ayant droit à sépulture à Paris,
tel par exemple l'habillage du corps fœtal, qui
ces emplacements sont situés dans le Jardin des
personnifie le fœtus comme l'enfant qu'il aurait
lumières du cimetière parisien de Thiais (94).
dû être. C'est pourquoi il conviendra de ne pas
Pour les Parisiens, une brochure est réalisée par le
imposer une même démarche à tous et de ne pas
cimetière du Père-Lachaise afin d'informer les
stigmatiser les choix. Le législateur a reconnu ce
familles.
besoin de reconnaissance symbolique, et a rendu
facultative la délivrance d'un acte d'enfant né sans Lors des démarches auprès du conseiller funéraire,
vie. Il laisse au clinicien qui prend en charge la il est préférable que les parents endeuillés soient
patiente le soin d'entendre la demande de recon- accompagnés par un membre de la famille ou un
naissance et de rédiger le certificat médical d'ac- ami, moins investi affectivement. Le coût des
couchement. La réalité d'un accouchement relève obsèques est fonction des prestations choisies par
de l'appréciation médicale des praticiens, sage- les parents et même s'il est moindre que pour un
femme ou obstétricien. Cela « implique le recueil adulte, il nécessite parfois la demande de plusieurs
169
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
devis et une réflexion quant au type de cérémonie confidentiellement sous la seule responsabilité de
et au mode de sépulture : crémation, inhumation l'hôpital et des services funéraires. Une traçabilité
dans un caveau de famille, lieu des obsèques. rigoureuse est assurée. Les informations sont trans-
La mutuelle pour certains et parfois la mairie de la mises en fin de processus à la chambre mortuaire de
commune peuvent aider les familles pour tout ou l'établissement concerné et les parents peuvent être
partie des frais d'inhumation, le clinicien ou l'as- informés du jour de la crémation. Pour des raisons
sistant social orientera les parents vers le Centre évidentes de secret médical, ces crémations sont
communal d'action sociale auprès desquels ils anonymes. Seul l'hôpital est détenteur de toutes les
devront justifier de leurs ressources à l'aide de informations ; le crématorium n'a aucun renseigne-
leur déclaration de revenus. ment nominatif à sa disposition.
170
Chapitre 19. Modalités de prise en charge du corps en cas de décès périnatal
pour tout enfant né après le délai légal de 22 SA. grossesse ayant démarré le 14 mars, la prime de
Ce congé dure de 11 à 18 jours calendaires et est naissance sera versée si l'accouchement d'un
cumulable avec le congé de naissance de 3 jours. Il enfant sans vie intervient après le 1er septembre
est ouvert à tout père salarié, ainsi que demandeur de la même année. Les parents doivent retirer un
d'emploi ou stagiaire en formation profession- dossier de demande de Paje auprès de leur caisse
nelle. Le père doit produire un acte d'enfant né d'allocations familiales.
sans vie et un certificat d'accouchement attestant
de la viabilité de l'enfant. Ce congé compassionnel Allocation de base
permettant d'entourer la mère endeuillée ne de la prestation d'accueil
nécessite pas la preuve de filiation, celle-ci n'exis-
tant pas pour un enfant né sans vie. du jeune enfant
En ce qui concerne l'allocation de base, l'article
Droits à la retraite L.531-1 du code de santé publique prévoit que « l'al-
location est attribuée à compter de la date de nais-
La production d'un acte d'enfant né sans vie ou sance du ou des enfants ». La finalité de cette
d'un justificatif d'accouchement délivré par les allocation est de « compenser le coût lié à l'entretien
cliniciens permet une majoration de la pension de de l'enfant » : pour en bénéficier, les parents doivent
retraite pour les assurés qui ont eu ou élevé au présenter les actes de naissance et de décès. En
moins trois enfants. Ces assurés ont également l'état du droit, la naissance est la condition ouvrant
droit à des trimestres de majoration de leur durée droit à cette prestation, or c'est sur le registre décès
d'assurance. Enfin, ils ont droit à des trimestres de l'état civil qu'est inscrit l'enfant né sans vie, donc
de bonification de leur durée de service au titre de l'allocation de base ne pourra être accordée dans ce
la naissance de l'enfant (art. 9 du décret no 2008- cas.
637 du 30 juin 2008).
171
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
172
Chapitre 19. Modalités de prise en charge du corps en cas de décès périnatal
Honneth A. La lutte pour la reconnaissance. In : Rusch P, Moutel G, Goussot-Souchet M, Plu I, Pierre M, Leclercq T,
editor. Paris : Éditions du Cerf ; 2000 (édition origi- Coffin JC, et al. Corps des fœtus mort-nés. Médecine/
nale : 1992). Sciences 2010 ; 26 : 772–7.
Ministère de la Santé. Circulaire du 30 novembre 2001 rela- Organisation mondiale de la santé. Manuel de la
tive à l'enregistrement à l'état civil et à la prise en Classification internationale des maladies, trauma-
charge des corps des enfants décédés avant la déclara- tismes et causes de décès. Genève : OMS ; 1968.
tion de naissance, citant la circulaire du 22 juillet 1993 Organisation mondiale de la santé. Rapport technique
relative à la déclaration des nouveau-nés décédés à no 457, prévention de mortalité et de la morbidité
l'état civil et la circulaire conjointe des ministères de la périnatales. Genève : OMS ; 1970.
Solidarité, de la Justice et de l'Intérieur en date du Pignotti MS. The definition of human viability : a histori-
30 novembre 2001. cal perspective. Acta Paediatr 2010 ; 99 : 33–6.
173
Critères d'extraction Chapitre 20
en cas de retard
de croissance
intra-utérin isolé
Jacques Lepercq
fonction du poids de naissance et du sexe. Une présentant un RCIU. Il existe une association
étude rétrospective a évalué la survie des enfants entre un flux diastolique nul ou inversé au niveau
nés entre 22 et 32 semaines d'aménorrhée (SA) de l'artère ombilicale et les complications périna-
dans la région de Trent, dans le Dorset, au tales. Le délai entre flux diastolique nul et appari-
Royaume-Uni, de 1994 à 1997 : parmi les fœtus tion d'anomalies du rythme cardiaque fœtal
vivants à l'entrée en travail à 27 SA, le taux de sur- (RCF) varie de 1 à 26 jours. La réalisation d'un
vie variait de 55 % pour les enfants dont le poids de Doppler ombilical a été comparée à l'absence de
naissance était inférieur au 10e percentile à 80 % Doppler ombilical en cas de RCIU dans une
175
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
méta-analyse de cinq essais randomisés (1292 pour anomalies du RCF (RR : 2,2 ; IC 95 % :
patientes). La mortalité périnatale était compa- 1,5– 3,4) et à des scores d'Apgar inférieurs à 7 à
rable dans les deux groupes (2,3 % contre 3,3 % ; 5 minutes (RR : 5,2 ; IC 95 % : 2,4–11,3). Cependant,
risque relatif [RR] : 0,72 ; intervalle de confiance une corrélation faible a été observée entre l'index
[IC] 95 % : 0,38–1,35). Dans cette même revue, amniotique et l'acidose néonatale dans la seule
l'utilisation du Doppler ombilical a été comparée étude ayant étudié ce paramètre.
au RCF dans six études (572 patientes). La morta- La fréquence de la surveillance fœtale a été éva-
lité périnatale était comparable dans les deux luée dans une analyse secondaire d'un essai théra-
groupes (0,3 % contre 1,7 % ; RR : 0,33 ; IC 95 % : peutique et a inclus 167 grossesses uniques entre
0,05–2,09). 24 et 36 SA dont le fœtus avait un périmètre abdo-
L'enregistrement du RCF avec analyse visuelle ou minal inférieur au 10e percentile et un index de
informatisée de la variabilité à court terme (VCT), résistance de l'artère ombilicale supérieur au
moins subjective, a été évalué dans une méta-ana- 95e percentile. Les examens réalisés étaient le pro-
lyse de six essais randomisés (2 105 femmes) dans fil biophysique, le RCF et les Doppler utérins,
un contexte assez général incluant le RCIU. ombilicaux et cérébraux avec une fréquence
L'enregistrement du RCF n'était pas associé à une bihebdomadaire dans un bras et bimensuelle dans
diminution de la mortalité périnatale (2,3 % l'autre. Aucune différence sur les complications
contre 1,1 % ; RR : 2,05 ; IC 95 % : 0,95–4,42). périnatales n'a été observée dans cette analyse
L'analyse informatisée comparée à l'analyse visuelle secondaire, mais l'absence de calcul d'effectif et le
du RCF était, elle, associée à une réduction de la manque de puissance ne permettaient pas de
mortalité périnatale (0,9 % contre 4,2 % ; RR : conclure sur la fréquence optimale de la surveil-
0,23 ; IC 95 % : 0,04–0,88), mais non à une dimi- lance en cas de RCIU.
nution des décès potentiellement évitables. Cette Du fait de la qualité des études, les résultats
méta-analyse manquait de puissance pour doivent être interprétés avec prudence. Notamment,
conclure sur cet effet. Aucune étude n'a comparé l'insuffisance placentaire doit être définie claire-
l'analyse informatisée du RCF à l'absence de RCF. ment et l'intérêt potentiel des différents examens
Bien que la VCT soit moins subjective et poten- complémentaires et du Doppler en d'autres sites
tiellement intéressante, son apport doit être (artère cérébrale moyenne, canal d'Arantius) doit
confirmé par d'autres études dans le contexte du être confirmé à différents âges gestationnels avant
RCIU. Le seuil d'action actuellement suggéré se d'être utilisable en pratique clinique. Des études
situe à 3 ms en cas de grande prématurité. Le de suivi à plus long terme des enfants doivent être
Groupe d'études européen sur l'essai interven- menées. En l'état actuel des connaissances,
tionnel en cas de RCIU (Growth Restriction aucune recommandation fondée sur un niveau de
Intervention Trial [GRIT]) a proposé les limites preuve suffisant ne peut être émise sur la fré-
suivantes : 2,6 ms à 28 SA, 3,0 ms à 30 SA et 3,7 ms quence des examens complémentaires et leur uti-
à 32 SA. lité pour indiquer l'extraction fœtale.
Le profil biophysique seul ou modifié (associé au
RCF) a été comparé à l'enregistrement du RCF
dans une méta-analyse de cinq essais randomisés Extraction fœtale
(2974 femmes). La réalisation du profil biophy-
sique n'était pas associée à une réduction de la Les critères du choix dépendent dans chaque cas
mortalité périnatale (RR : 1,33 ; IC 95 % : 0,60– des éléments suivants : existence d'une pathologie
2,98), et une augmentation du taux de césarienne maternelle, terme, estimation pondérale et vitalité
a été observée dans certaines études. fœtales, conditions obstétricales (localisation pla-
L'existence d'un oligoamnios a été corrélée à la centaire, cicatrice utérine, présentation), environ-
mortalité périnatale dans des études anciennes. nement pédiatrique, attitude obstétricale et
Dans une méta-analyse totalisant 10 551 femmes, information et consentement des parents.
un index amniotique inférieur ou égal à 5 cm Le Doppler ombilical est le premier examen
comparé à un index amniotique supérieur à 5 cm d'orientation. S'il est normal, une surveillance
a été associé à une augmentation des césariennes hebdomadaire ou bimensuelle est habituellement
176
Chapitre 20. Critères d'extraction en cas de retard de croissance intra-utérin isolé
proposée. S'il est altéré, et en fonction du terme, la extraction différée (13 % contre 5 %). Le score de
réalisation répétée de Doppler en d'autres sites développement mental de Griffith était compa-
artériels et veineux et d'enregistrements du RCF rable dans les deux bras. Le suivi à 6–13 ans de la
avec analyse visuelle ou informatisée est indiquée moitié des enfants de la cohorte originale n'a pas
avec une fréquence non définie actuellement et observé de différence du taux de séquelles neuro-
variable d'une équipe de périnatalité à l'autre. En logiques et des scores de développement psycho-
fonction du terme, l'indication d'extraction sera moteurs entre les deux bras. Bien que des biais de
posée individuellement, en concertation avec les sélection aient été invoqués, les résultats de cette
néonatologistes et, sauf urgence, après maturation étude unique ne soutiennent pas une extraction
pulmonaire fœtale avant 34 SA. immédiate dans ce contexte et atténuent l'hypo-
Nous proposons de distinguer les trois périodes sui- thèse du retentissement cérébral lié au maintien
vantes : avant 34 SA, entre 34–37 SA et après 37 SA. in utero en cas de RCIU.
L'utilisation du Doppler du canal d'Arantius per-
mettrait de sélectionner les fœtus à haut risque de
Avant 34 semaines d'aménorrhée complications périnatales et d'indiquer la date
d'extraction. L'étude multicentrique TRUFFLE
Le risque de retentissement cérébral associé à
(Trial of Umbilical and Fetal Flow in Europe) a
l'hypoxie est à mettre en balance avec les
pour objectif de comparer le Doppler du canal
séquelles neurologiques associées à la prématu-
d'Arantius à la VCT pour indiquer l'extraction
rité induite. L'étude d'intervention GRIT a été
fœtale en cas de RCIU entre 26 et 32 SA. Le critère
réalisée chez 547 femmes (587 enfants) dans 69
de jugement principal est la survie sans séquelles
centres répartis dans 13 pays européens de 1993
à 2 ans de vie. Les résultats de cette étude sont en
à 2001. Les critères d'éligibilité étaient un RCIU
attente.
ou une prééclampsie entre 24 et 36 SA et la réali-
sation d'un Doppler ombilical. La participation à
l'étude était proposée en cas d'incertitude de Entre 34 et 37 semaines
l'obstétricien quant à l'indication d'extraction.
d'aménorrhée
Après tirage au sort, soit l'extraction était immé-
diate, 48 heures après la corticothérapie, soit À ce terme, le risque de complications associées à
l'extraction était différée et décidée en cas d'ag- la prématurité induite est moindre. Nous ne dis-
gravation ou si l'obstétricien estimait que la posons que d'une cohorte prospective (459 gros-
balance bénéfice/risque était en faveur de ce sesses uniques compliquées d'hypertension
geste. Le flux diastolique ombilical était réduit, artérielle ou de RCIU) menée dans neuf centres
nul ou inversé chez 70 % des fœtus. Trente-huit répartis dans sept pays européens de 1991 à 1993.
grossesses gémellaires et une grossesse triple ont Les issues de grossesse étaient analysées selon le
été incluses. Les critères de jugement étaient la flux diastolique de l'artère ombilicale (positif :
mortalité périnatale et le développement de l'en- 214 ; nul : 178 ; inversé : 67). La mortalité péri
fant à 2 ans. L'analyse a été effectuée en intention natale était multipliée par un facteur de 4,0 ou
de traiter. Le délai moyen entre l'inclusion et 10,6 en cas de flux diastolique nul ou inversé en
l'extraction était de 0,9 contre 4,9 jours entre les comparaison à un flux diastolique positif. Les
deux bras et la mortalité périnatale comparable risques de détresse respiratoire et d'entérocolite
dans les deux bras (10 % contre 9 %), au détri- n'étaient pas influencés par l'existence d'un flux
ment de la mortalité néonatale dans le bras diastolique nul ou inversé. À partir de 34 SA,
extraction immédiate et de la mortalité fœtale l'existence d'un flux artériel ombilical nul ou
dans le bras extraction différée. inversé est pour beaucoup une indication d'ex-
Le suivi à 2 ans a été réalisé chez 98 % des enfants. traction dans un centre périnatal adapté. Lorsqu'il
Le taux de décès ou de séquelles neurologiques persiste un flux ombilical diastolique, le Royal
était comparable dans les deux bras (19 % contre College of Obstetricians and Gynaecologists
16 %), mais le taux de séquelles neurologiques des (RCOG) recommande l'expectative sous surveil-
enfants nés avant 31 SA était plus important dans lance jusqu'à 37 SA. Les modalités de cette sur-
le bras extraction immédiate que dans le bras veillance ne sont pas précisées.
177
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
178
Chapitre 20. Critères d'extraction en cas de retard de croissance intra-utérin isolé
Figueras F, Figueras J, Meler E, Eixarch E, Coll O, The Growth Restriction Intervention Trial (GRIT) Study
Gratacos E, et al. Customised birthweight standards Group. A randomised trial of timed delivery for the
accurately predict perinatal morbidity. Arch Dis compromised preterm fetus : short-term outcomes
Child Fetal Neonatal Ed 2007 ; 92 : F277–80. and Bayesian interpretation. BJOG 2003 ; 110 : 27–32.
Gardosi J. GRIT : concern about external validity. Lancet The Growth Restriction Intervention Trial (GRIT) Study
2005 ; 365 : 384. Group. When do obstetricians recommend delivery
Grivell RM, Alfirevic Z, Gyte GML, Devane D. Antenatal car- for a high-risk preterm growth-retarded fetus ? Eur J
diotocography for fetal assessment. Cochrane Database Obstet Gynecol Reprod Biol 1996 ; 67 : 121–6.
of Systematic Reviews. 2010 Issue 1, CD007863. Thornton JG, Hornbuckle J, Vail A, Spiegelhalter DJ,
Karsdorp VH, van Vugt JM, van Geijn HP, Kostense PJ, Levene M. The Growth Restriction Intervention
Arduini D, et al. Clinical significance of absent or Trial (GRIT) Study Group. Infant wellbeing at 2
reversed end diastolic velocity waveforms in umbili- years of age in the Growth Restriction Intervention
cal artery. Lancet 1994 ; 344 : 1664–8. Trial (GRIT) : multicentred randomised controlled
trial. Lancet 2004 ; 364 : 513–20.
Lalor JG, Fawole B, Alfirevic Z, Devane D. Biophysical profile
for fetal assessment in high risk pregnancies. Cochrane Trial of umbilical and fetal flow in Europe (TRUFFLE) : a
Database of Systematic Reviews. 2008, Issue 1, CD000038. multicentre randomised study. https : //trufflestudy.
org/truffle/docutruffle/LancetProtocolNew.pdf.
McCowan LM, Harding JE, Roberts AB, Barker SE, Ford C,
Stewart AW. A pilot randomized controlled trial of Turan OM, Turan S, Gungor S, Berg C, Moyano D,
two regimens of fetal surveillance for small-for- Gembruch U, et al. Progression of Doppler abnorma-
gestational-age fetuses with normal results of umbili- lities in intrauterine growth restriction. Ultrasound
cal artery Doppler velocimetry. Am J Obstet Gynecol Obstet Gynecol 2008 ; 32 : 160–7.
2000 ; 182 : 81–6. Walker DM, Marlow N, Upstone L, Gross H, Hornbuckle J,
Royal College of Obstetricians and Gynecologists. The Vail A, et al. The Growth Restriction Intervention
investigation and management of the small-for-
Trial : long-term outcomes in a randomized trial of
gestatational-age fetus. Guideline, n° 31. Londres : Royal timing of delivery in fetal growth restriction. Am J
College of Obstetricians and Gynecologists ; 2002. Obstet Gynecol 2011 ; 204 : 34.e1–9.
179
Modalités Chapitre 21
d'accouchement
de l'enfant hypotrophe
Camille Le Ray
181
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
césarienne systématique se pose néanmoins chez inférieur au 10e percentile nés après un déclen-
les femmes porteuses d'un fœtus présentant un chement (le plus souvent réalisé pour pathologie
RCIU. maternelle hypertensive) à celles des enfants pré-
Six essais randomisés colligés dans une méta- sentant également un RCIU mais nés après tra-
analyse de la Cochrane Database ont tenté de vail spontané. Les données de 367 prématurés et
répondre à cette question. Il n'était pas retrouvé 3921 enfants à terme ont été analysées dans cette
de bénéfice en termes de mortalité et de séquelles étude. Les issues néonatales étaient comparables
neurosensorielles à la césarienne systématique. dans les groupes déclenchement et travail spon-
Cependant, ces études étaient hétérogènes, avec tané, et ce chez les prématurés et les enfants nés à
un faible nombre de patientes – certains essais terme. Le taux de césarienne était comparable
ayant même été arrêtés pour défaut d'inclusion. À dans les deux groupes en cas de naissance préma-
terme, il ne semble donc pas justifié de proposer turée. En revanche, à terme, les femmes déclen-
systématiquement une césarienne. Mais, en cas chées avaient plus souvent été césarisées (20 %
d'anomalies du rythme cardiaque fœtal (RCF) contre 10 %).
préexistantes ou de RCIU avec des Doppler Certains auteurs se sont également demandés, en
fœtaux pathologiques, le haut risque de césa- cas de RCIU, à terme si un déclenchement était
rienne en cours de travail justifie souvent la déci- préférable à une expectative. Un essai randomisé,
sion de césarienne avant travail. l'essai DIGITAT (Disproportionate Intrauterine
En cas de prématurité sévère, certains auteurs ont Growth Intervention Trial At Term), publié en
retrouvé une diminution de la mortalité néona- 2010, a tenté de répondre à cette question chez les
tale en cas de césarienne avec une diminution du fœtus suspects de RCIU (périmètre abdominal
risque de décès, en particulier avant 30 semaines < 10e percentile ou EPF < 10e percentile ou inflé-
d'aménorrhée (SA). Cependant, il s'agit d'une chissement de croissance) entre 36+ 0 et 41+ 0 SA. Il
étude de cohorte rétrospective sans données sur était retrouvé une fréquence plus élevée des RCIU
l'estimation du poids fœtal (EPF) en anténatal, le inférieurs au 3e percentile dans le groupe expecta-
RCF, les anomalies Doppler, et sans données spé- tive, mais une absence de différence concernant
cifiques sur les décisions de voie d'accouchement. l'état néonatal entre les groupes déclenchement
Un biais d'indication ne peut donc être exclu ; systématique et expectative. Les taux de césa-
pour les enfants initialement très malades in utero rienne étaient également comparables dans les
avec de faibles chances de survie, la voie basse deux groupes ; en revanche, les femmes du groupe
avait peut-être été préférée. On ne peut donc pas expectative avaient plus souvent eu une évolution
conclure, en considérant ces seules données, de leur pathologie hypertensive lorsque celle-ci
qu'une césarienne doit être systématiquement était associée.
réalisée en cas de RCIU avant terme. À noter qu'il n'existe pas d'essai randomisé com-
parant césarienne systématique et déclenchement
en cas de RCIU à terme.
Peut-on réaliser
un déclenchement ? Technique de déclenchement
Concernant la technique du déclenchement en cas
de RCIU, les études sont de faible niveau de
Déclenchement ou expectative
preuve. Plusieurs auteurs utilisent des prostaglan-
Comme nous venons de le voir, la voie basse est dines (PGE2) à visée de maturation cervicale si
donc une option possible en cas de fœtus porteur nécessaire. Dans une étude rétrospective observa-
de RCIU. Bien entendu, l'idéal est une mise en tionnelle, il n'était pas retrouvé d'augmentation
travail spontané. Dans certains cas cependant, la du risque de césarienne ou de complications néo-
question du déclenchement peut se poser, par natales immédiates en cas de déclenchement par
exemple pour indication maternelle (hyperten- prostaglandines pour RCIU (ayant un RCF et
sion artérielle, prééclampsie, etc.). Une étude un score de Manning normaux) comparative-
rétrospective a comparé les issues obstétricales ment à un groupe de fœtus eutrophes en travail
et néonatales des enfants présentant un RCIU spontané.
182
Chapitre 21. Modalités d'accouchement de l'enfant hypotrophe
À la maternité Port-Royal, lorsque le col est relati- site donc une surveillance continue du RCF pen-
vement favorable, qu'il s'agit d'un RCIU modéré dant le travail.
avec Doppler et RCF normaux, un déclenchement Le pH au scalp est l'examen de seconde ligne de
est proposé en cas d'indication médicale. Nous ne référence en cas de RCIU. Mais, comme précisé
réalisons pas de façon systématique un déclenche- dans les recommandations pour la pratique cli-
ment pour hypotrophie fœtale modérée isolée à nique sur la surveillance du travail publiées en
terme en l'absence d'autre indication fœtale ou 2007, chez les fœtus porteur d'un RCIU, « en cas
maternelle. Le Syntocinon® (ocytocine) est le plus d'anomalies sévères du RCF, sa réalisation ne doit
souvent utilisé. En cas de col défavorable, si les pas retarder l'extraction en raison de la rapidité de
PGE2 sont nécessaires, nous utilisons des gels de décompensation chez ces fœtus ». Il n'existe pas de
PGE2 (type Prostine®) plutôt qu'un dispositif données concernant le poids minimum pour réa-
intravaginal (type Propess®) afin d'avoir une sur- liser un pH au scalp. En revanche, il est habituel
veillance continue du RCF lors de la maturation de contre-indiquer le pH au scalp avant 34 SA.
cervicale.
Concernant les autres examens de seconde ligne
(oxymétrie, électroencéphalogramme fœtal), les
données de la littérature sont trop pauvres pour
Déroulement du travail recommander leur utilisation, hors protocoles de
recherche, chez les fœtus ayant un RCIU, lors du
Quel type d'anesthésie choisir ? travail.
183
Partie IV. Prise en charge clinique anténatale
d'hémorragie intra- et périventriculaire avec ces scalp si l'âge gestationnel est supérieur à 34 SA,
deux interventions. mais celui-ci ne doit pas retarder la prise en charge
Lorsqu'une extraction instrumentale est indiquée en cas d'anomalies sévères du RCF.
pour raison maternelle ou fœtale, il n'existe pas de En cas de césarienne, celle-ci doit être réalisée
données privilégiant un instrument par rapport à selon la technique habituelle en évitant les hystéro-
un autre. En revanche, en cas de prématurité infé- tomies corporéales verticales. Il n'y a aucune justi-
rieure à 34 SA, la ventouse devrait être contre- fication à réaliser une extraction instrumentale ou
indiquée ; elle devrait être discutée pour les fœtus une épisiotomie systématique lors de la naissance
ayant un poids inférieur à 2000 g. d'enfants hypotrophes.
184
Prise en charge Chapitre 22
du nouveau-né
prématuré hypotrophe
Emmanuel Lopez, Pierre-Henri Jarreau
naissance. hypotrophe
Ce chapitre s'attache à décrire l'augmentation de On distingue deux types cliniques d'hypotro-
la morbimortalité néonatale chez les nouveau-nés phie.
Le retard de croissance intra-utérin
187
Partie V. Prise en charge postnatale
Tableau 22.1. Principales étiologies L'examen clinique doit être répété afin d'éliminer
de l'hypotrophie. une dysmorphie faciale s'inscrivant dans un syn-
drome polymalformatif. Un examen clinique réa-
Causes fœtales Causes maternelles
lisé par un généticien permet de diagnostiquer ces
Anomalies Facteurs démographiques formes syndromiques.
constitutionnelles et socioéconomiques
L'enquête étiologique comprend la recherche de
Trisomie 13,18, 21 Niveau socioéconomique
CMV (cytomégalovirus) urinaire, une échographie
Délétions (4p-) Mensurations maternelles transfontanellaire, une radiographie de squelette,
Triploïdie Âge maternel un caryotype, un examen anatomopathologique
Syndromes Ethnie du placenta, une vérification des sérologies
polymalformatifs Malnutrition maternelles.
Pathologies acquises Pathologies chroniques
Rubéole congénitale Paludisme
Infection à CMV Hypertension artérielle Mortalité néonatale
congénitale Néphropathie du nouveau-né prématuré
Syphilis congénitale Drépanocytose homozygote hypotrophe
Varicelle congénitale
Pathologies vasculaires
Prééclampsie Les études comparant au sein d'une cohorte un
groupe de nouveau-nés prématurés eutrophes
Pathologies utérines
avec un groupe de prématurés hypotrophes
et annexielles
(poids de naissance < 10e percentile), mettent en
Hypoplasie utérine évidence une augmentation du risque de morta-
Anomalies funiculaires lité de 3 à 4 fois chez les nouveau-nés prématurés
et placentaires hypotrophes (tableau 22.2). Bernstein et al. ont
Addictions étudié la mortalité et la morbidité des nouveau-nés
Tabac, alcool, cocaïne, prématurés hypotrophes à partir d'une cohorte
héroïne prospective américaine de 19 759 nouveau-nés
Médicaments
prématurés de moins de 1500 g. La mortalité néo-
natale était de 10 % dans l'ensemble de la popula-
Corticoïdes et tion avec une augmentation du risque de mortalité
immunosuppresseurs
chez les nouveau-nés hypotrophes après ajuste-
Bétabloquants ment sur les covariables significatives (risque rela-
Antiépileptiques tif [RR] ajusté : 2,77 ; intervalle de confiance [IC]
Altitude 95 % : 2,31–3,33). Regev et al., à partir d'une
Grossesses multiples cohorte israélienne de 2764 nouveau-nés préma-
turés de moins de 1500 g, ont montré une préva-
chromosomiques, les infections congénitales, la lence de mortalité de 33,5 % chez les nouveau-nés
prise de toxiques ou l'exposition à des agents téra- hypotrophes et de 20 % chez les nouveau-nés
togènes. Le pronostic dépend de l'origine de eutrophes (p < 0,01). Après un ajustement sur
l'hypotrophie. les facteurs de risque périnatals, les nouveau-nés
hypotrophes avaient un risque de mortalité aug-
Hypotrophie dysharmonieuse menté de 4,52 fois (IC 95 % : 3,24–6,33). Reiss
et al., à partir d'une cohorte allemande de 1365
ou asymétrique
enfants de moins de 32 semaines d'aménorrhée
Le poids est inférieur au 10e percentile et les autres (SA), ont rapporté 11 % de mortalité chez les nou-
mensurations sont conservées. L'origine de cette veau-nés eutrophes, contre 23 % chez les nou-
hypotrophie est un défaut d'oxygénation et de nutri- veau-nés hypotrophes (p < 0,001). L'hypotrophie
tion au troisième trimestre. Le pronostic est meilleur était associée significativement à la mortalité
qu'en cas d'hypotrophie harmonieuse. néonatale avec un odds ratio (OR) de 4,54
188
Chapitre 22. Prise en charge du nouveau-né prématuré hypotrophe
(IC 95 % : 2,56–8,04). Westby et al., à partir d'une 25e percentile permettait donc d'identifier les
cohorte norvégienne de 365 enfants de moins de enfants à haut risque de mortalité.
28 SA, ont mis en évidence une augmentation du L'augmentation du risque de mortalité des nou-
risque de mortalité chez les nouveau-nés hypo- veau-nés prématurés hypotrophes est liée à l'hy-
trophes (OR = 3,8 ; IC 95 % : 1,3–11). Garite et al., poxie chronique in utero, à l'asphyxie périnatale et
à partir d'une cohorte américaine de 29 916 aux malformations congénitales.
enfants de moins de 34 SA, ont montré qu'à
chaque âge gestationnel entre 25 et 32 SA, l'hypo-
trophie était associée à une augmentation de la
Morbidités néonatales
mortalité. Après correction sur l'âge gestationnel du nouveau-né prématuré
et d'autres facteurs confondants, cette association hypotrophe
restait significative (OR = 2,80 ; IC 95 % :
2,20–3,30). Asphyxie périnatale
Deux études ont mis en évidence une augmentation
du risque de mortalité à un seuil de poids de nais- Les nouveau-nés à terme hypotrophes pré-
sance supérieur comme le 25e percentile. McIntire sentent une plus grande vulnérabilité au stress
et al., à partir d'une cohorte de 12 317 enfants pré- durant le travail et au moment de la naissance
maturés de moins de 36 SA, ont montré que la mor- du fait de l'hypoxie chronique intra-utérine et
talité néonatale était de 2 % pour un poids de de faibles réserves glucidiques. Ils présentent
naissance entre le 26e et le 75e percentile comparée à un risque augmenté de score d'Apgar bas et de
3 % pour un poids de naissance entre le 16e et le pH artériel au cordon inférieur à 7,0 par rapport
25e percentile (p < 0,05), 4,1 % pour un poids de aux nouveau-nés à terme eutrophes (Apgar < 3
naissance entre le 6e et le 10e percentile (p < 0,05) et à 5 minutes : 0,2 % contre 0,1 % ; pH artériel au
6,9 % pour un poids de naissance inférieur au cordon < 7,0 : 0,9 % contre 0,4 %, p < 0,05).
3e percentile (p < 0,05). Zeitlin et al., à partir d'une Cette augmentation n'est pas retrouvée lorsque
cohorte européenne de 4525 nouveau-nés prématu- l'on compare les nouveau-nés prématurés hypo-
rés (< 31 SA), ont montré que la mortalité néonatale trophes et eutrophes (pH artériel au cordon
était de 12,7 % dans le groupe de référence (poids de < 7,0 : 1,3 % contre 0,9 %).
naissance entre le 50e et le 74e percentile), de 25,8 % Une étude cas-témoins a mis en évidence une
dans le groupe poids de naissance inférieur au association entre l'hypotrophie et l'encéphalopa-
10e percentile, soit un OR ajusté de 3,98 (IC 95 % : thie anoxo-ischémique. Dans le groupe encé-
2,79–5,67), et de 19,6 % dans le groupe poids de phalopathie anoxo-ischémique, 33 % des enfants
naissance entre le 10e et le 25e percentile, soit un OR étaient hypotrophes contre 2,4 % dans le groupe
ajusté de 2,15 (IC 95 % : 1,54–3,00). Un seuil au contrôle, soit un OR de 20,5 (IC 95 % : 2,2–114).
189
Partie V. Prise en charge postnatale
Cette association restait significative après ajuste- prévention de la MMH chez les nouveau-nés
ment sur l'âge gestationnel et le poids. hypotrophes.
Compte tenu du risque de mortalité et de morbi- Dans les études les plus récentes, l'hypotrophie chez
dité, la présence d'un pédiatre en salle de naissance le nouveau-né prématuré de moins de 1500 g est un
est nécessaire pour la prise en charge de ces nais- facteur de risque modéré de MMH : l'OR est de 1,19
sances à risque. (IC 95 % : 1,03–1,36) dans l'étude de Bernstein et al.
et de 1,09 (IC 95 % : 1,02–1,16) dans l'étude de Regev
et al. Une autre étude montre que l'hypotrophie n'est
Maladie des membranes hyalines
pas associée à la MMH. Le tableau 22.3 résume les
L'augmentation du risque de maladie des mem- résultats des différentes études.
branes hyalines (MMH) chez le prématuré hypo-
trophe est controversée. Certains auteurs ont Dysplasie bronchopulmonaire
avancé le concept de maturation pulmonaire
fœtale accélérée par le retard de croissance intra- L'augmentation du risque de dysplasie broncho-
utérin. Cette maturation serait induite par le pulmonaire chez le nouveau-né prématuré hypo-
stress environnemental et la production de glu- trophe est, quant à elle, bien établie. Les différentes
cocorticoïdes surrénaliens. Pour d'autres, l'inci- études retrouvent une augmentation de 3 à 4 fois
dence de la MMH chez le prématuré hypotrophe du risque de dysplasie bronchopulmonaire chez
dépendrait de l'âge gestationnel. Entre 25 et les nouveau-nés prématurés hypotrophes compa-
28 SA, le risque de MMH serait augmenté chez rés aux nouveau-nés prématurés eutrophes. Les
les nouveau-nés hypotrophes comparés aux résultats de ces études sont résumés dans le
nouveau-nés eutrophes (OR : 1,98 ; IC 95 % : tableau 22.4. Cette augmentation de risque de
1,12–3,52). Entre 29 et 32 SA, le risque de MMH dysplasie bronchopulmonaire est également
chez les hypotrophes serait diminué (OR : 0,52 ; retrouvée pour un poids de naissance entre le 10e
IC 95 % : 0,34–0,80). Les corticoïdes anténatals et le 24e percentile (OR : 3,13 ; IC 95 % : 2,23–4,37).
auraient une moins bonne efficacité sur la Une mesure continue en fonction du percentile
Tableau 22.3. Maladie des membranes hyalines chez les nouveau-nés prématurés hypotrophes.
Étude Population MMH OR ou RR (IC 95 %)
Eutrophes Hypotrophes p
Ley 1997 25−28 SA 63,7 % 77,6 % 1,98 (1,12−3,52)
29−32 SA 39,9 % 27,5 % 0,52 (0,34−0,80)
Bernstein 2000 < 1500 g 1,19 (1,03−1,36)
Regev 2003 < 1500 g 68,4 % 71,4 % 1,09 (1,02−1,16)
Reiss 2003 < 32 SA 55 % 54 % 0,735
Travail de compilation réalisé par Emmanuel Lopez.
190
Chapitre 22. Prise en charge du nouveau-né prématuré hypotrophe
du poids de naissance permet de mesurer plus jus- Par la suite, l'enfant sera placé en incubateur fermé
tement le risque de dysplasie bronchopulmonaire avec un niveau d'humidité adéquat. Un monito-
chez le nouveau-né prématuré. rage continu de la température corporelle du nou-
D'un point de vue physiopathologique, cette aug- veau-né devra être réalisé.
mentation de risque peut être expliquée par des
anomalies métaboliques secondaires au RCIU, Troubles métaboliques
une réponse inflammatoire systémique secon-
daire à l'hypoxie chronique. De plus, la maladie Hypoglycémie
pulmonaire initiale est plus sévère. McIntire et al. Le risque d'hypoglycémie est majoré par l'hypotro-
décrivent une détresse respiratoire nécessitant phie dans les 72 premières heures de vie. Elle est
une ventilation dans les 24 premières semaines de liée à de faibles réserves en glycogène, une diminu-
vie dans 22,5 % des cas chez les nouveau-nés pré- tion de la néoglucogenèse, la polyglobulie, l'hy-
maturés de poids de naissance inférieur au poxie et l'hypothermie. Les épisodes d'hypoglycémie
3e percentile contre 12,6 % chez les nouveau-nés peuvent être traités par une nutrition entérale à
prématurés de poids de naissance compris entre le débit continu par sonde gastrique ou par l'apport
26e et le 75e percentile. Enfin, l'oxygénothérapie de glucose par voie parentérale. Une surveillance
chez ces patients peut être responsable de lésions rapprochée des glycémies devra être réalisée.
secondaires au stress oxydatif.
Une stratégie de protection pulmonaire doit être Intolérance glucidique
particulièrement respectée chez ces nouveau-nés
à haut risque de développer une dysplasie bron- Chez le nouveau-né prématuré de moins de 1500 g,
chopulmonaire. En salle de naissance, l'utilisation spécialement chez le nouveau-né hypotrophe, l'in-
d'un système de ventilation manuelle à pression cidence d'hyperglycémie est importante (20 à
contrôlée de type Neopuff™ permet de prévenir le 86 %), et est associée à la fois à la mortalité et à la
barovolotraumatisme. Dès la naissance, une pres- morbidité. La physiopathologie de l'hyperglycé-
sion expiratoire positive devra être appliquée mie du nouveau-né prématuré hypotrophe est
ainsi qu'une administration précoce de surfactant complexe. Il existe une diminution de l'insuliné-
exogène. Une ventilation endotrachéale la moins mie chez les nouveau-nés hypotrophes par dys-
agressive possible et de durée la plus courte pos- fonction pancréatique. Le nouveau-né prématuré
sible devra être mise en place avec une utilisation présente à la fois un dysfonctionnement des cel-
large de la ventilation non invasive permettant lules β des îlots de Langherans et une insulinoré-
une extubation précoce. sistance. Cette diminution de la sensibilité à
l'insuline est retrouvée à l'âge prépubertaire chez
l'enfant né hypotrophe. Une insulinothérapie sera
Hypothermie débutée en cas d'hyperglycémie supérieure à
Le risque d'hypothermie est augmenté chez le 10 mmol/l et une glycosurie sera réalisée sur deux
nouveau-né à terme hypotrophe. Chez le nou- prélèvements successifs à 3 heures d'intervalle.
veau-né prématuré, le risque d'hypothermie est le
plus important pour les plus faibles poids de nais- Hypocalcémie
sance. Le nouveau-né hypotrophe va présenter C'est une complication fréquente de l'hypotrophie.
des difficultés à maintenir sa température corpo- Les facteurs aggravants sont l'asphyxie périnatale
relle du fait de perturbations du métabolisme glu- et la prématurité. L'hypocalcémie du nouveau-né
cidique et lipidique, d'une diminution de prématuré est en rapport avec un déficit en para-
l'isolation adipeuse sous-cutanée et d'une grande thormone par immaturité des glandes parathy-
perméabilité de l'épiderme entraînant des pertes roïdes, une réponse inadéquate des cellules
hydriques élevées. tubulaires rénales à la parathormone et une sécré-
Une prévention de l'hypothermie devra être réali- tion de calcitonine exagérée. L'hypocalcémie du
sée dès la salle de naissance par le séchage de la nouveau-né hypotrophe est en rapport avec une
peau, l'utilisation d'un bonnet et d'un sac en poly- hyperphosphorémie provenant des cellules lésées
éthylène et la réanimation en incubateur ouvert. par l'hypoxie chronique.
191
Partie V. Prise en charge postnatale
Infections
Entérocolite ulcéronécrosante
Le risque de sepsis est augmenté chez les nouveau-
La prématurité et le faible poids de naissance sont nés prématurés hypotrophes comparés aux nou-
les facteurs de risque principaux de l'entérocolite veau-nés prématurés eutrophes (OR : 1,9 ; IC 95 % :
ulcéronécrosante (ECUN). Dans les études com- 1,0–3,6 ; p = 0,04). Cette susceptibilité aux infec-
parant le risque d'ECUN chez le nouveau-né tions s'explique par un déficit de l'immunité
prématuré hypotrophe ou eutrophe, les résultats humorale et cellulaire (diminution de la concen-
sont discordants. Certaines études retrouvent une tration en IgG et de l'index phagocytaire) et par
augmentation du risque, d'autres non (tableau 22.5). une neutropénie fréquente. Cependant, l'utilisa-
D'un point de vue physiopathologique, en anténatal, tion du facteur de croissance granulocytaire
l'hypoxie chronique entraîne une redistribution du GM-CSF en prophylactique n'a pas montré son
sang en faveur du cerveau aux dépens de la vascula- efficacité dans la prévention des sepsis secondaires
risation mésentérique, fragilisant ainsi la muqueuse chez le nouveau-né prématuré hypotrophe.
intestinale. En postnatal, les nouveau-nés hypo-
trophes présentent des troubles de la motricité intes-
tinale et des sécrétions digestives ainsi que des
Anomalies hématologiques
modifications des propriétés de la muqueuse. Ces Une polyglobulie est fréquemment retrouvée chez
anomalies sont responsables d'une stase digestive et le nouveau-né hypotrophe. Elle est secondaire à
d'une colonisation bactérienne pathologique. l'augmentation d'érythropoïétine induite par
Différentes études ont recherché une association l'hypoxie chronique. Elle constitue un facteur
entre les anomalies Doppler anténatales et de risque d'hypoglycémie, d'hyperbilirubinémie,
l'ECUN. Une méta-analyse regroupant 14 études de thrombose, d'entéropathie et d'ECUN.
192
Chapitre 22. Prise en charge du nouveau-né prématuré hypotrophe
193
Partie V. Prise en charge postnatale
194
Chapitre 22. Prise en charge du nouveau-né prématuré hypotrophe
195
Partie V. Prise en charge postnatale
Lucas A, Cole TJ. Breast milk and neonatal necrotising premature infants : a population-based study.
enterocolitis. Lancet 1990 ; 336 (8730) : 1519–23. J Pediatr 2003 ; 143 (2) : 186–91.
Mautone A, Giordano P, Montagna O, Quercia M, Altomare Reiss I, Landmann E, Heckmann M, Misselwitz B,
M, De Mattia D. Coagulation and fibrinolytic systems Gortner L. Increased risk of bronchopulmonary dys-
in the ill preterm newborn. Acta Paediatr 1997 ; 86 (10) : plasia and increased mortality in very preterm
1100–4. infants being small for gestational age. Arch Gynecol
McIntire DD, Bloom SL, Casey BM, Leveno KJ. Birth Obstet 2003 ; 269 (1) : 40–4.
weight in relation to morbidity and mortality among Rosenberg A. The IUGR newborn. Semin Perinatol 2008 ;
newborn infants. N Engl J Med 1999 ; 340 (16) : 32 (3) : 219–24.
1234–8. Schanler RJ, Shulman RJ, Lau C. Feeding strategies for
Miller SS, Lee HC, Gould JB. Hypothermia in very low premature infants : beneficial outcomes of feeding
birth weight infants : distribution, risk factors and fortified human milk versus preterm formula.
outcomes. J Perinatol 2011 ; 31 (Suppl 1) : S49–56. Pediatrics 1999 ; 103 (6Pt 1) : 1150–7.
Mitanchez-Mokhtari D, Lahlou N, Kieffer F, Magny JF, Spinillo A, Capuzzo E, Egbe TO, Fazzi E, Colonna L,
Roger M, Voyer M. Both relative insulin resistance Nicola S. Pregnancies complicated by idiopathic
and defective islet beta-cell processing of proinsulin intrauterine growth retardation. Severity of growth
are responsible for transient hyperglycemia in extre- failure, neonatal morbidity and two-year infant neu-
mely preterm infants. Pediatrics 2004 ; 113 (3Pt 1) : rodevelopmental outcome. J Reprod Med 1995 ; 40
537–41. (3) : 209–15.
Mitsiakos G, Giougi E, Chatziioannidis I, Karagianni P, Tourneux P, Libert JP, Ghyselen L, Léké A, Delanaud S,
Papadakis E, Tsakalidis C, et al. Haemostatic profile Dégrugilliers L, et al. [Heat exchanges and ther-
of healthy premature small for gestational age neo- moregulation in the neonate]. Arch Pédiatr 2009 ; 16
nates. Thromb Res 2010 ; 126 (2) : 103–6. (7) : 1057–62.
Moriette G, Maury L, Le Huidoux P, Jarreau PH. [Lung Veening MA, Van Weissenbruch MM, Delemarre-Van De
protective strategies for premature infants]. Arch Waal HA. Glucose tolerance, insulin sensitivity, and
Pédiatr 2005 ; 12(5) : 573–8. insulin secretion in children born small for gestatio-
Morsing E, Asard M, Ley D, Stjernqvist K, Marsál K. nal age. J Clin Endocrinol Metab 2002 ; 87 (10) :
Cognitive function after intrauterine growth restric- 4657–61.
tion and very preterm birth. Pediatrics 2011 ; 127 (4) : Watts TL, Murray NA, Roberts IA. Thrombopoietin has a
e874–82. primary role in the regulation of platelet production
Patole SK, de Klerk N. Impact of standardised feeding in preterm babies. Pediatr Res 1999 ; 46(1) : 28–32.
regimens on incidence of neonatal necrotising ente- Westby Wold SH, Sommerfelt K, Reigstad H, Rønnestad
rocolitis : a systematic review and meta-analysis of A, Medbø S, Farstad T, et al. Neonatal mortality and
observational studies. Arch Dis Child Fetal Neonatal morbidity in extremely preterm small for gestational
Ed 2005 ; 90 (2) : F147–51. age infants : a population-based study. Arch Dis
Pilling EL, Elder CJ, Gibson AT. Growth patterns in the Child Fetal Neonatal Ed 2009 ; 94 (5) : F363–7.
growth-retarded premature infant. Best Pract Res Yu VY, Upadhyay A. Neonatal management of the
Clin Endocrinol Metab 2008 ; 22 (3) : 447–62. growth-restricted infant. Semin Fetal Neonatal Med
Regev RH, Reichman B. Prematurity and intrauterine 2004 ; 9 (5) : 403–9.
growth retardation : double jeopardy ? Clin Perinatol Zeitlin J, El Ayoubi M, Jarreau PH, Draper ES, Blondel B,
2004 ; 31 (3) : 453–73. Künzel W, et al. MOSAIC Research Group. Impact of
Regev RH, Lusky A, Dolfin T, Litmanovitz I, Arnon S, fetal growth restriction on mortality and morbidity
Reichman B. Israel Neonatal Network. Excess morta- in a very preterm birth cohort. J Pediatr 2010 ; 157
lity and morbidity among small-for-gestational-age (5) : 733–9 e1.
196
Prise en charge du Chapitre 23
nouveau-né hypotrophe
en l'absence de
prématurité
Sophie Parat
retard de croissance n'a pas justifié d'extraction tique (5 et 6 %) sont significativement plus
avant terme et qu'une cause fœtale grave de l'hy- fréquents dans la population des hypotrophes par
potrophie a pu être exclue, le pronostic est souvent rapport aux nouveau-nés eutrophes, alors que les
Le retard de croissance intra-utérin
favorable avec une prise en charge postnatale hypoglycémies asymptomatiques (glycémie infé-
adaptée. Il persiste cependant des risques qui jus- rieure à 2,2 mmol/l) ne sont pas significativement
tifient d'être prévenus. Kramer, dans une popula- augmentées. La fréquence élevée des hypoglycé-
tion d'enfants hypotrophes à terme, retrouve une mies symptomatiques contrastant avec la rareté
fréquence augmentée de mort fœtale in utero des hypoglycémies asymptomatiques s'explique
(MFIU), d'anomalies du RCF (rythme cardiaque dans cette étude par le caractère non systématique
fœtal), d'hypoglycémie, de polyglobulie et d'Ap- de la surveillance glycémique des hypotrophes
gar bas à 1 minute. Ces anomalies augmentent (seulement 47 % des enfants).
197
Partie V. Prise en charge postnatale
Malgré une adaptation néonatale correcte des est fonction de l'état de l'enfant, mais gagne à être
enfants hypotrophes à terme, les risques d'hypo- pratiquée si la surveillance de l'enfant est attentive
thermie et d'hypoglycémie restent réels, d'autant pendant cette période. Par la suite, le portage
plus que l'hypotrophie est sévère. Le risque d'hy- maternel en peau à peau est encouragé, car il a
poglycémie serait majoré par l'utilisation de l'intérêt, en dehors de ses effets directs de stabili-
courbes de croissance customisées écartant les sation de la température, de limiter le stress du
enfants petits constitutionnellement, ceux-ci étant nouveau-né, de faciliter l'allaitement, de diminuer
cependant à risque d'hypothermie. Ces courbes l'anxiété maternelle et d'améliorer les interactions
permettent d'identifier les réelles anomalies de mère-enfant. C'est la méthode kangourou, mise en
croissance in utero, dont le risque périnatal est œuvre pour les enfants de faible poids de nais-
significativement augmenté, en prenant en compte sance, y compris prématurés, dans les pays en voie
le potentiel de croissance individuel de chaque de développement, mais dont les effets bénéfiques
fœtus. Elles sont encore peu utilisées dans le dans les pays favorisés sont désormais reconnus :
monde pédiatrique. On retient cependant que plus l'enfant nu (avec bonnet et chaussons) en couche
l'hypotrophie est sévère, plus le risque d'avoir un est placé directement sur la peau de sa mère, verti-
réel RCIU est important. calement, le corps entre les deux seins, sa tête
étant tournée sur le côté. Le portage est facilité par
l'utilisation d'une ceinture en coton extensible
Prise en charge de l'enfant dans laquelle l'enfant est glissé. La sécrétion d'ocy-
tocine chez la mère pendant la mise en peau à peau
La présence du pédiatre à la naissance d'un enfant explique une partie des effets bénéfiques de ce
diagnostiqué comme ayant un RCIU est justifiée type de portage.
par le risque de mauvaise adaptation néonatale. En dehors des périodes de peau à peau, l'enfant
Nous décrirons la prise en charge de l'enfant à est placé en berceau chauffant jusqu'à autonomi-
terme présentant une hypotrophie isolée, qui lui sation thermique. Le bain est évité tant que l'en
permettra le plus souvent de rester avec sa mère en fant n'a pas stabilisé sa température de façon
maternité. En effet, grâce à la présence de pédiatres autonome.
dans les maternités, des soins autrefois réalisés en
unité de néonatologie sont pratiqués depuis 20 ans Prévention de l'hypoglycémie
en maternité. Dans certains cas, il existe une
structure de néonatologie au sein de la maternité La prévention de l'hypoglycémie passe par la
de type kangourou. Dans d'autres cas, l'enfant limitation des pertes énergétiques et par une ali-
reste dans le secteur des suites de couches, mais mentation précoce, lorsqu'elle est possible, et
l'ensemble du personnel y a été formé à la prise en fractionnée.
charge du tout-petit. Ceci permet à la mère de par- La surveillance des glycémies capillaires prépran-
ticiper activement à la prise en charge de son diales est débutée dans les premières heures de
enfant, facilite l'allaitement lorsqu'il est souhaité, vie et répétée de façon espacée, les 3 premiers
évite la séparation mère-enfant et son retentisse- jours le plus souvent. Le niveau d'intervention
ment psychologique inévitable et raccourcit la thérapeutique chez l'enfant hypotrophe est plus
durée d'hospitalisation du nouveau-né. élevé que chez l'enfant à terme (glycémie infé-
rieure à 2,5 mmol/l dans les 48 premières heures)
afin d'avoir une certaine marge de sécurité en cas
Prévention de l'hypothermie
d'abaissement des glycémies en deçà de cette
L'hypothermie est liée à un plus grand rapport valeur.
surface cutanée/poids de l'enfant. Elle augmente L'allaitement maternel, lorsqu'il est souhaité par la
les pertes énergétiques et favorise l'hypoglycémie. mère, est soutenu activement pour tous ses béné-
Sa prévention débute dès la naissance, avec le fices déjà reconnus dans la population générale et
séchage de l'enfant, l'utilisation systématique d'un chez les enfants de faible poids. La mère doit être
bonnet et une température élevée de l'atmosphère particulièrement rassurée sur la qualité de son lait
des salles. La mise en peau à peau dès la naissance et sa capacité à assurer une prise de poids adéquate
198
Chapitre 23. Prise en charge du nouveau-né hypotrophe en l'absence de prématurité
pour son enfant. En effet, un meilleur rattrapage formules enrichies pour prématurés sont généra-
en poids, taille et périmètre crânien dans les 3 pre- lement utilisées jusqu'au rattrapage pondéral. Le
miers mois de vie a été retrouvé chez des nouveau- risque de syndrome métabolique à l'âge adulte
nés hypotrophes à terme nourris au sein, par incite à être très attentif à la croissance de l'en-
rapport à ceux nourris par un lait standard pre- fant afin de revenir à un lait standard dès que la
mier âge (poids de naissance moyen : 2600 g, âge courbe pondérale entre dans la norme.
gestationnel moyen : 38,7 semaines d'aménorrhée
[SA]). Ces effets persistent à l'âge de 1 an.
Prévention de l'ictère
L'observation du nouveau-né est essentielle afin
de percevoir les signes qui montrent que l'enfant La polyglobulie liée à un excès d'érythropoïétine est
est disposé à téter, stratégie beaucoup plus utile plus fréquente chez l'enfant hypotrophe. Elle peut
que des réveils à heures fixes, parfois totalement être responsable d'hyperviscosité augmentant le
intempestifs, aboutissant à des échecs de tétée et risque de thrombose ou d'entérocolite ulcéronécro-
augmentant l'anxiété maternelle. Ces signes sont sante, rares chez l'enfant à terme. La complication la
enseignés précocement à la mère qui, en tant plus fréquemment observée est l'ictère, qui est sur-
qu'observatrice privilégiée, pourra mettre son veillé quotidiennement dans cette population par
enfant au sein sans restriction de fréquence. Le mesure de la bilirubine transcutanée, complétée par
portage en peau à peau optimise la production de une bilirubinémie en cas de chiffre élevé.
lait maternel, entraîne une meilleure stimulation
de l'enfant et est associé à une durée d'allaitement Prévention de l'hypocalcémie
plus prolongée. En fonction du poids de l'enfant
et des glycémies, l'allaitement maternel est com- L'hypocalcémie est plus fréquente chez l'enfant
plété le plus souvent jusqu'à la montée de lait par hypotrophe à terme (17 % dans certaines études).
un lait enrichi (formules pour prématuré). La Elle est maximale au 3e jour, ce qui incite à la
méthode d'administration de ce complément contrôler systématiquement chez l'enfant asymp-
reste débattue entre le biberon et les méthodes tomatique lors du prélèvement de Guthrie.
alternatives (sein, doigt, dispositif d'aide à l'allai-
tement) qui permettent de ne pas entraîner de Examen pédiatrique
confusion sein-tétine. Actuellement, la littérature
et explorations
ne permet pas de trancher totalement sur le béné-
fice des méthodes alternatives, les populations L'examen pédiatrique recherche des malforma-
étudiées étant très diverses en âge gestationnel. tions, une dysmorphie, des anomalies cliniques
Ces méthodes sont cependant souvent conseillées suggérant une fœtopathie infectieuse, qui auraient
dans les premiers jours de vie. pu échapper au diagnostic anténatal. Parfois,
Lorsque l'allaitement maternel est difficile, l'ex- l'anamnèse obstétricale explique parfaitement l'hy-
pression précoce du lait permet de donner à l'en- potrophie. Certaines causes (décrites dans d'autres
fant le lait maternel et de continuer à stimuler la chapitres) nécessitent une prise en charge spéci-
lactation tant que l'enfant est trop faible pour être fique que nous ne détaillerons pas (toxicomanie,
autonome au sein. Dans certains cas, le recours à malformation, etc.). L'ensemble des mensurations
la nutrition entérale est nécessaire du fait d'hypo- fœtales permettent de juger de l'importance de
glycémie ou de prise de poids insuffisante pou- l'hypotrophie – qui conditionne la fréquence des
vant être responsable d'ictère traînant. anomalies métaboliques – et de son caractère
Lorsque l'allaitement choisi est artificiel, il est symétrique ou non (le caractère asymétrique orien-
également fractionné dans la journée autour de tant plus facilement vers une cause placentaire).
7 à 8 fois par jour selon le poids de l'enfant, son La recherche de CMV (cytomégalovirus) dans les
éveil et les quantités absorbées. Là encore, les urines est pratiquée systématiquement en cas de
périodes d'éveil calme doivent être privilégiées contexte ou de signes associés évocateurs. En
et les horaires sont souples, particulièrement les dehors de ces cas, elle reste discutée, car la fréquence
premiers jours, avec un nombre plus important de l'infection dans les populations d'hypotrophes
de tétées chez les enfants qui boivent peu. Les est très variable d'une étude à l'autre (0–13 %).
199
Partie V. Prise en charge postnatale
200
Retard de croissance Chapitre 24
intra-utérin et
développement
neurocognitif
Olivier Baud
tifier les enfants n'ayant pas atteint leur potentiel chiatrique accrue. Le stress maternel, l'insuffisance
de croissance fœtale. L'important est d'identifier utéroplacentaire et la prise en charge postnatale des
les fœtus présentant un ralentissement, voire un complications liées à une prématurité induite
Le retard de croissance intra-utérin
arrêt de croissance témoignant d'un processus exposent le fœtus puis le nouveau-né à un excès de
pathologique, car ce sont eux qui sont à risque de corticostéroïdes circulants pouvant induire des
mort in utero (MFIU) ou de souffrance fœtale retards neurodéveloppementaux. Des troubles de
chronique. Le RCIU est considéré comme symé- l'hémodynamique placentaire peuvent être res-
trique quand la restriction de croissance touche à ponsables d'épisodes d'hypoxémie répétés. De
la fois l'estimation de poids, de taille et de péri- plus, le placenta est un organe endocrine important
mètre crânien, et asymétrique quand seul le poids dont le dysfonctionnement aura des répercussions
est atteint. Cette distinction est surtout utile dans sur l'état nutritionnel, la croissance et la fonction
201
Partie V. Prise en charge postnatale
endocrinienne du fœtus avec, notamment, une paralysie cérébrale (PC) que les bébés d'un poids
dysrégulation de l'axe corticotrope. Ces perturba- correspondant à l'âge gestationnel : dans une
tions peuvent persister à long terme et augmenter cohorte nationale historique née entre 1959 et 1966,
les risques d'hypertension, d'hyperlipidémie et de les taux de PC étaient de 3,3/1000 enfants hypo-
diabète de type II à l'âge adulte. trophes et 0,6/1000 enfants eutrophes. Les données
Les nouvelles techniques avancées de neuro-ima- les plus récentes corroborent ces chiffres avec un
gerie par IRM (diffusion, tractographie et spec- risque multiplié par 4–6 comparé chez les hypo-
troscopie) ont permis de mieux caractériser les trophes par rapport aux enfants de poids de nais-
modifications du développement cérébral résul- sance compris entre les 25e et 75e percentiles.
tant d'une altération du milieu fœtal ou postnatal. La relation entre restriction de croissance et PC
Chez les prématurés avec RCIU, il existe : chez les prématurés est beaucoup moins claire.
• une diminution de volume de l'hippocampe, Dans une étude australienne, le risque de PC
structure impliquée dans les fonctions de associée à un RCIU semblait dépendre de l'âge
mémoire et d'apprentissage très vulnérable à gestationnel, le risque étant plus élevé en cas de
l'hypoxie, au déficit de nutriments et aux hor- naissance entre 34 et 37 SA avec un poids de nais-
mones du stress ; sance inférieur au 3e percentile (odds ratio [OR] :
19,6 ; intervalle de confiance [IC] 95 % : 8,1–47).
• un retard de maturation des faisceaux de subs-
En cas de naissance avant 34 SA, aucune associa-
tance blanche habituellement en cours de myéli-
tion entre RCIU et PC n'a été retrouvée dans ces
nisation entre 34 et 40 semaines d'aménorrhée
études épidémiologiques. D'autres auteurs ont
(SA) ;
également rapporté que l'hypotrophie n'aggravait
• un retard de développement de la connectivité pas significativement le risque de PC en cas de
interhémisphérique ; naissance avant 32 SA. Cependant, les études se
• des modifications de la créatine et du lactate, fondant uniquement sur le poids de naissance et
deux métabolites impliqués dans les méca- non pas sur l'âge gestationnel induisent une
nismes énergétiques cérébraux. grande hétérogénéité de la maturité du nouveau-
né. Ainsi, on considère que, chez les grands pré-
Ainsi, l'exposition fœtale à une restriction calorique
maturés, l'impact de l'immaturité sur le cerveau
entraîne des modifications de nombreux méca-
en développement peut masquer largement un
nismes impliqués dans le métabolisme énergétique,
effet spécifique du RCIU sur l'incidence de la PC.
la structure cellulaire, la neurotransmission et donc
sur le développement cérébral global. Le concept de Une analyse plus détaillée des cohortes en popu-
plasticité développementale ou de rupture du pro- lations suivies en Europe suggère que l'utilisation
gramme de développement peut interférer dans la de courbes de croissance fœtale normatives révèle
survenue de handicaps ultérieurs. La plasticité céré- une association similaire entre poids de naissance
brale représente la capacité du cerveau à se réorga- et risque de PC quel que soit l'âge gestationnel.
niser et à récupérer d'une situation défavorable Maintenant que l'incidence des PC spastiques
grâce à des mécanismes d'adaptation. Une modifi- bilatérales observées chez les nouveau-nés de
cation de la plasticité structurelle neuronale et non poids à la naissance compris entre 1000 et 1499 g
neuronale est de plus en plus reconnue comme un est devenue plus faible, il est possible qu'un impact
déterminant majeur de troubles développementaux plus marqué du RCIU sur le handicap neurocog
avec des conséquences à long terme. nitif apparaisse dans cette sous-population. Il a
ainsi été démontré que 22 % du risque de PC est
attribuable à une restriction de croissance infé-
rieure au 10e percentile.
Impact du retard de croissance Par ailleurs, la discordance de relation entre RCIU
intra-utérin sur la paralysie et PC observée entre les nouveau-nés à terme et les
cérébrale prématurés pourrait être le résultat :
• d'une différence entre ces deux populations
Depuis assez longtemps, il est établi que les nou- dans l'étiologie du RCIU en fonction de l'âge
veau-nés à terme hypotrophes sont plus à risque de gestationnel de découverte ;
202
Chapitre 24. Retard de croissance intra-utérin et développement neurocognitif
• d'un effet protecteur du RCIU sur d'autres une possible indication d'extraction fœtale.
causes de PC chez les prématurés ; Plusieurs études ont corrélé ce critère avec le deve-
• de l'impact majeur de la prématurité elle-même nir neurocognitif à long terme des nouveau-nés.
sur l'apparition d'une PC en raison des lésions Chez des enfants suivis en Suède, une diastole
cérébrales survenant chez les nouveau-nés les ombilicale anormale était associée à l'âge de
plus immatures ; 6–7 ans à des scores cognitifs et moteurs altérés
ainsi qu'à une augmentation de la pression arté-
• d'un processus anténatal associé au RCIU et
rielle. Dans la sous-population de jeunes adultes
perturbant le développement cérébral au cours
suivis jusqu'à l'âge de 19 ans, une réduction de la
du 3e trimestre de grossesse.
fonction cognitive persiste. Une autre étude
concernant des enfants âgés de 5 à 12 ans rapporte
Retard de croissance intra- que seul le reverse flow en fin de diastole (et non la
diastole nulle) était corrélé à la réduction des
utérin et développement scores cognitifs et des anomalies neurologiques
neurocognitif en cas de RCIU.
Plus récemment, plusieurs auteurs ont étudié l'in-
L'hypotrophie à la naissance est associée à une térêt du débit sanguin régional du fœtus comme
cognition et à des performances scolaires plus marqueur de la perfusion placentaire et l'apport
faibles, à une moindre sociabilité et à des pro- en substrats énergétiques au fœtus. En effet, en
blèmes comportementaux. Historiquement, il a cas de restriction de la vascularisation placen-
été rapporté une forte corrélation entre l'âge ges- taire, le fœtus redistribue le débit sanguin vers les
tationnel à la naissance et le développement neu- organes essentiels comme le cerveau ou le cœur.
rocognitif, la limite de 36 SA étant déterminante Scherjon et al. ont évalué l'impact des change-
pour le pronostic à long terme. Une première ments de la vitesse du flux sanguin cérébral sur le
cohorte longitudinale d'enfants à terme présen- devenir à long terme. Dans une étude de cohorte
tant un RCIU, suivie par Harvey et al., montrait longitudinale de 106 enfants hypotrophes nés
une corrélation entre la croissance cérébrale et le entre 26 et 33 SA, il existe une accélération de la
devenir neurocognitif. En cas de RCIU, les enfants maturation visuelle observée sur des potentiels
dont l'altération de la croissance cérébrale sur- évoqués visuels corticaux, phénomène d'abord
vient avant 26 SA sont plus vulnérables à de mul- considéré comme un processus adaptatif béné-
tiples déficits moteurs ou cognitifs, à des troubles fique. Cependant, après une nouvelle évaluation à
de l'attention et à un échec scolaire par rapport à 5 ans, ces changements de la maturation visuelle
ceux dont la croissance cérébrale est préservée. ont été associés à une réduction du score cognitif
Des résultats similaires sur la réduction des scores de 9 points. Ainsi, malgré des processus adaptatifs
de développement cognitif et moteur ont été sou- précoces, les anomalies Doppler en période anté-
lignés dans les études longitudinales rapportées natale sont associées à un mauvais pronostic neu-
par Leitner et al. Dans ces études, par rapport aux rocognitif à long terme.
témoins appariés pour la prématurité et les fac- De nouvelles études randomisées devraient aider à
teurs d'environnement familial et socioécono- déterminer le meilleur moment d'extraction fœtale
miques, le RCIU a été associé à des déficits de la en cas de RCIU afin de ne pas induire de handicap à
mémoire à court terme, mais avec la préservation long terme : ni trop tôt, avec l'impact majeur de la
de la mémoire de reconnaissance et à long terme, prématurité induite, ni trop tard, avec l'impact céré-
suggérant une altération spécifique des fonctions bral de la redistribution vasculaire. À ce jour, seule
exécutive et d'attention. l'étude GRIT (Growth Restriction Intervention
Un marqueur associé au RCIU et au bien-être Trial) a étudié spécifiquement ce paramètre en cas
fœtal est le Doppler de l'artère ombilicale. Une d'indécision fœtale et/ou maternelle. À l'évaluation
réduction du flux sanguin diastolique, impliquant neurocognitive de 2 ans, aucune différence n'a été
une augmentation des résistances vasculaires pla- notée entre prise en charge active immédiate
centaires aboutissant à une diastole nulle ou à un (extraction médicalement décidée) et prise en
reverse flow, est un critère de souffrance fœtale et charge retardée (expectative). De même, à l'âge
203
Partie V. Prise en charge postnatale
scolaire (6–13 ans), aucune différence n'a pu être Fitzhardinge PM, Steven EM. The small-for-date infant.
démontrée entre les deux types de prise en charge, II. Neurological and intellectual sequelae. Pediatrics
1972 ; 50 : 50–7.
sur les scores moteur, cognitif et de comportement.
Ainsi, une attitude interventionniste en cas de doute Gabbe SG, Baschat AA, Galan HL, Ross MG. Intrauterine
growth restriction. In : Gabbe SG, Niebyl JR,
sur le bien-être fœtal ne semble pas apporter de Simpson JL, éds. Obstetrics : normal and problem
bénéfice en l'absence de toute indication formelle pregnancies. 3e éd New York : Churchill Livingstone ;
d'extraction. Une autre étude en fin de recrutement 1996. p. 863–86.
(Trial of Umbilical and Fetal Flow in Europe Geva R, Eshel R, Leitner Y, Fattal-Valevski A, Harel S.
[TRUFFLE]) devrait rapidement apporter de nou- Memory functions of children born with asymmetric
velles données à ce sujet. intrauterine growth restriction. Brain Res 2006 ; 1117 :
186–94.
Gluckman PD, Harding JE. The physiology and patho-
Conclusion physiology of intrauterine growth retardation. Horm
Res 1997 ; 48 (suppl 1) : 11–6.
Le RCIU a un retentissement important sur le Gross TL, Sokol RJ, Wolfe HM, Gross TL. Increased risk
développement cérébral et le devenir neurocogni- to the growth retarded fetus. In : Gross TL, Sokol J,
editors. Intrauterine growth retardation : a practical
tif à long terme. Les déficits des fonctions cogni- approach. Chicago : Year Book Medical Publishers ;
tives, exécutives, motrices et comportementales 1989. p. 111–24.
décrits à court terme semblent persister au cours Hack M, Flannery DJ, Schluchter M, Cartar L, Borawski E,
de la vie adulte avec de plus un risque de syndrome Klein N. Outcomes in young adulthood for very-low-
métabolique surajouté. Les décisions d'extraction birth-weight infants. N Engl J Med 2002 ; 346 :
fœtale restent débattues tant que de nouvelles don- 149–57.
nées épidémiologiques ne seront pas disponibles Harvey D, Prince J, Bunton J, Parkinson C, Campbell S.
sur de larges populations. La compréhension des Abilities of children who were small-for-gestational-
effets d'un RCIU sur le développement structurel age babies. Pediatrics 1982 ; 69 : 296–300.
et fonctionnel du cerveau est essentielle pour Hüppi PS. Advances in postnatal neuroimaging : rele-
l'amélioration des soins périnataux et la prise de vance to pathogenesis and treatment of brain injury.
Clin Perinatol 2002 ; 29 : 827–56.
décisions d'extraction plus rationnelles. Elle per-
Hüppi PS. MR imaging and spectroscopy of brain deve-
mettra ainsi l'évaluation de traitements de préven-
lopment. MRI Clinics North Am 2001 ; 9 : 1–17.
tion des troubles neurodéveloppementaux.
Hüppi P, Sizonenko S, Amato M. Lung disease and brain
development. Biol Neonate 2006 ; 89 : 284–97.
Références Hüppi PS, Warfield S, Kikinis R, Barnes PD, Zientara GP,
Jolesz FA, et al. Quantitative magnetic resonance
Allen MC. Developmental outcome and follow-up of the imaging of brain development in premature and
small for gestational age infant. Semin Perinatol mature newborns. Ann Neurol 1998 ; 43 : 224–35.
1984 ; 8 : 123–56. Isaacs EB, Lucas A, Chong WK, Wood SJ, Johnson CL,
Breeze AC, Lees ML. Prediction and perinatal outcomes Marshall C, et al. Hippocampal volume and eve-
of fetal growth restriction. Semin Fetal Neonatal ryday memory in children of very low birth weight.
Med 2007 ; 12 : 383–97. Pediatr Res 2000 ; 47 : 713–20.
Brodszki J, Länne T, Marsál K, Ley D. Impaired vascular James DK, Parker MJ, Smoleniec JS. Comprehensive fetal
growth in late adolescence after intrauterine growth assessment with three ultrasonographic characteris-
restriction. Circulation 2005 ; 111 : 2623–8. tics. Am J Obstet Gynecol 1992 ; 166 : 1486–95.
Casey BJ. Brain plasticity, learning, and developmental Jarvis S, Glinianaia SV, Arnaud C, Fauconnier J, Johnson
disabilities. Ment Retard Dev Disabil Res Rev 2003 ; A, McManus V, et al. Case gender and severity in
9 : 133–4. cerebral palsy varies with intrauterine growth. Arch
De Jong CL, Francis A, Van Geijn HP, Gardosi Dis Child 2005 ; 90 : 474–9.
J. Customised fetal weight limits for antenatal detec- Jarvis S, Glinianaia SV, Blair E. Cerebral palsy and intrau-
tion of fetal growth restriction. Ultrasound Obstet terine growth. Clin Perinatol 2006 ; 33 : 285–300.
Gynecol 2000 ; 15 : 36–40. Jarvis S, Glinianaia SV, Torrioli MG, Platt MJ, Miceli M,
Ellenberg JH, Nelson KB. Birth weight and gestational age Jouk PS, et al. Cerebral palsy and intrauterine growth
in children with cerebral palsy or seizure disorders. in single births : European collaborative study. Lancet
Am J Dis Child 1979 ; 133 : 1044–8. 2003 ; 362 : 1089–90.
204
Chapitre 24. Retard de croissance intra-utérin et développement neurocognitif
Johnston MV. Clinical disorders of brain plasticity. Brain Scherjon SA, Oosting H, Smolders-DeHaas H, Zondervan
Dev 2004 ; 26 : 73–80. HA, Kok JH. Neurodevelopmental outcome at three
Leitner Y, Fattal-Valevski A, Geva R, Eshel R, Toledano- years of age after fetal « brain-sparing ». Early Hum
Alhadef H, Rotstein M, et al. Neurodevelopmental Dev 1998 ; 52 : 67–79.
outcome of children with intrauterine growth retar- Scherjon SA, Smolders-DeHaas H, Kok JH, Zondervan
dation : a longitudinal, 10-year prospective study. HA. The « brain-sparing » effect : antenatal cerebral
J Child Neurol 2007 ; 22 : 580–7. Doppler findings in relation to neurologic outcome
Ley D, Laurin J, Bjerre I, Marsal K. Abnormal fetal aortic in very preterm infants. Am J Obstet Gynecol 1993 ;
velocity waveform and minor neurological dysfunc- 169 : 169–75.
tion at 7 years of age. Ultrasound Obstet Gynecol Schreuder AM, McDonnell M, Gaffney G, Johnson A,
1996a ; 8 : 152–9. Hope PL. Outcome at school age following antenatal
Ley D, Tideman E, Laurin J, Bjerre I, Marsal K. Abnormal detection of absent or reversed end diastolic flow
fetal aortic velocity waveform and intellectual func- velocity in the umbilical artery. Arch Dis Child Fetal
tion at 7 years of age. Ultrasound Obstet Gynecol Neonatal Ed 2002 ; 86 : F108–14.
1996b ; 8 : 160–5. SCPE. Surveillance of cerebral palsy in Europe : a collabo-
Lodygensky GA, Seghier ML, Warfield SK, Tolsa CB, ration of cerebral palsy surveys and registers. Dev
Sizonenko S, Lazeyras F, et al. Intrauterine growth Med Child Neurol 2000 ; 42 : 816–24.
restriction affects the preterm infant's hippocampus. Seckl JR. Glucocorticoid programming of the fetus : adult
Pediatr Res 2008 ; 63 : 438–43. phenotypes and molecular mechanisms. Mol Cell
McKinstry RC, Mathur A, Miller JH, Ozcan A, Snyder Endocrinol 2001 ; 185 : 61–71.
AZ, Schefft GL, et al. Radial organization of develo- Strauss RS, Dietz WH. Effects of intrauterine growth
ping preterm human cerebral cortex revealed by retardation in premature infants on early childhood
non-invasive water diffusion anisotropy MRI. Cereb growth. J Pediatr 1997 ; 130 : 95–102.
Cortex 2002 ; 12 : 1237–43. Teberg AJ, Walther FJ, Pena IC. Mortality, morbidity, and
McMillen IC, Adams MB, Ross JT, Coulter CL, Simonetta G, outcome of the small-for-gestational age infant.
Owens JA, et al. Fetal growth restriction : adaptations Semin Perinatol 1988 ; 12 : 84–94.
and consequences. Reproduction 2001 ; 122 : 195–204. Thornton JG, Hornbuckle J, Vail A, Spiegelhalter DJ,
Neerhof MG. Causes of intrauterine growth restriction. Levene M. GRIT study group. Infant wellbeing at
Clin Perinatol 1995 ; 22 : 375–85. 2 years of age in the Growth Restriction Intervention
O'Keeffe MJ, O'Callaghan M, Williams GM, Najman JM, Trial (GRIT) : multicentred randomised controlled
Bor W. Learning, cognitive, and attentional pro- trial. Lancet 2004 ; 13 : 513–20.
blems in adolescents born small for gestational age. Tideman E, Marsal K, Ley D. Cognitive function in young
Pediatrics 2003 ; 112 : 301–7. adults following intrauterine growth restriction with
Ozanne SE, Fernandez-Twinn D, Hales CN. Fetal growth abnormal fetal aortic blood flow. Ultrasound Obstet
and adult diseases. Semin Perinatol 2004 ; 28 : 81–7. Gynecol 2007 ; 29 : 614–8.
Parkinson CE, Scrivener R, Graves L, Bunton J, Harvey D. Topp M, Langhoff-Roos J, Uldall P, Kristensen J.
Behavioural differences of school-age children who Intrauterine growth and gestational age in preterm
were small-for-dates babies. Dev Med Child Neurol infants with cerebral palsy. Early Hum Dev 1996 ;
1986 ; 28 : 498–505. 44 : 27–36.
Platt MJ, Cans C, Johnson A, Surman G, Topp M, Torrioli Walker DM, Marlow N, Upstone L, Gross H, Hornbuckle
MG, et al. Trends in cerebral palsy among infants of J, Vail A, et al. The Growth Restriction Intervention
very low birthweight (< 1 500 g) or born prematurely Trial : long-term outcomes in a randomized trial of
(< 32 weeks) in 16 European centres : a database timing of delivery in fetal growth restriction. Am
study. Lancet 2007 ; 369 : 43–50. J Obstet Gynecol 2011 ; 204 : 34.e1–9.
Powell TG, Pharoah PO, Cooke RW, Rosenbloom Wilcox M, Gardosi J, Mongelli M, Ray C, Johnson I. Birth
L. Cerebral palsy in low-birthweight infants. II. weight from pregnancies dated by ultrasonography
Spastic diplegia : associations with fetal immaturity. in a multicultural British population. BMJ 1993 ;
Dev Med Child Neurol 1988 ; 30 : 19–25. 307 : 588–91.
Scherjon S, Briët J, Oosting H, Kok J. The discrepancy Yeh TF, Lin YJ, Lin HC, Huang CC, Hsieh WS, Lin CH.
between maturation of visual-evoked potentials and Outcomes at school age after postnatal dexametha-
cognitive outcome at five years in very preterm sone therapy for lung disease of prematurity. N Engl
infants with and without hemodynamic signs of fetal J Med 2004 ; 350 : 1304–13.
brain-sparing. Pediatrics 2000 ; 105 : 385–91.
205
Index
207
Index
208
Index
209
Index