Vers Une Gestion Écologique Des Hammams À Marrakech
Vers Une Gestion Écologique Des Hammams À Marrakech
Vers Une Gestion Écologique Des Hammams À Marrakech
I- Introduction
Cette étude est réalisée dans le cadre du projet REMEE (redécouvrons ensemble les mémoires de
l’eau en méditerranée). Il s’agit d’approcher la problématique de consommation de l’eau dans les
hammams. Le cas de Marrakech est pris ici comme modèle de ville urbaine avec une population qui
approche le million (RGPH 2004).
La question de la surconsommation de l’eau est soulevée un peu partout dans les pays
méditerranéens par rapport aux besoins réels de la population. Nombreuses fois la pratique de l’Homme
est mise en question plutôt que le manque hydraulique.
Le cas de hammam est un exemple de gaspillage de l’eau. La consommation ni contrôlée, ni
réglementée dans ce service, participe largement au gaspillage non encore incriminé par les pouvoirs
publiques.
A part la réglementation relative à l’interdiction de l’utilisation de l’eau potable depuis une dizaine
d’année, et l’incitation à au forage, aucune autre exigence n’est constatée par rapport à la consommation
de l’eau dans les hammams.
Les vestiges de Marrakech ont montré l’existence du hammam le plus ancien du Maroc : le hammam
de la ville historique appelée Aghmat (20 km au sud de Marrakech, voir annexe 1 ou cahier intérieur).
Le hammam est lié à la construction de la ville. L’exemple de la ville d’Aghmat (20 km au sud de
Marrakech) est la preuve puisqu’il constitue le site historique de la première ville de Marrakech.
Pratiquement dans tous les noyaux anciens de la ville de Marrakech, le hammam est un élément
omniprésent. Il fait partie d’un complexe socioreligieux urbain vu l’importance lié à la purification
nécessaire avant d’aborder la prière obligatoire. Le musulman est appelé à se purifier à chaque fois
qu’il considère qu’il est impure ou violer l’un des principes de la purification qui sont au nombre de
seize.
On compte environs 6000 Hammams au Maroc, dont 250 à Marrakech(900.000 hab). La répartition
des hammams dans la ville de Marrakech se caractérise par une concentration historique dans le tissu
urbain ancien (médina). Mais la tradition du hammam, comme lieu de propreté par excellence, a permis
d’assurer sa distribution dans la nouvelle ville.
Au travers l’histoire, on trouve le hammam pratiquement dans chaque quartier. Cette entité urbaine
est caractérisée par la présence d’un noyau, constant dans les villes islamiques anciennes, composé
d’un complexe socioreligieux dont les éléments se déclinent en 7 composantes:
- Une grande mosquée (jâmea’) (par opposition à la petite mosquée : masjid)
- Une fontaine (sekkâyat)
- Une latrine (mirhâd)
- Un hammâm (bain maure)
- Un four à pain (ferrâne : pour cuire le pain du public)
3 - Une école coranique (msîd)
- Une zaouiat (siège d’une confrérie religieuse).
Statut du hammam
Le hammam fait partie du complexe religieux, généralement construit par des bienfaiteurs, par les
princes ou rois, a historiquement un statut de « legs ». Le hammam et le four à pain constituent des
services payants et les gains sont destinés à assurer l’entretien et le fonctionnement de la mosquée et
de l’école coranique)
Si l’existence du hammam peut se justifier historiquement par l’absence de l’eau dans les habitations
des quartiers de Marrakech, ce phénomène est soutenu aujourd’hui par la perpétuation d’une tradition
d’assurer la propreté ou/et la purification qui ne peut se faite que par l’eau chaude. Espace domestique
non encore à la porté de tout le monde comme c’est le cas en occident. Mais au-delà de l’assurance d’un
espace adéquat et conforme à une tradition séculaire, la présence du hammam dans les mœurs
marocaines est signe de purification religieuse ou spirituelle.
La propagation des hammams dans le nouveau tissu urbain accompagne à nouveau le maintien de
cette tradition et le renforcement d’une croyance populaire relative à la notion de purification.
Les contraintes urbanistiques sont la cause actuelle de la disparition du modèle du noyau historique
socioreligieux dans les quartiers nouvellement créés, mais le hammam répond à ce besoin qui se
détache de son noyau classique. Le hammam est répandu maintenant dans les quartiers de Marrakech
comme tout commerce où seule la logique commerciale justifie le choix de son implantation.
Vu le souci plus marqué que les musulmans porte à l'hygiène corporelle, on se rend au hammam
rarement pour le simple plaisir. Mais certaines fréquentations existent liées aussi aux vertus
thérapeutiques de la chaleur : La thermothérapie, confirmée aujourd’hui pour soulager les douleurs
musculaires.
Le hammam est un phénomène social, le pauvre ou le riche peut se retrouver dans ce lieu public.
Il se compose souvent de trois chambres de lavage, de l’accueil et du vestiaire. La salle d’accueil,
souvent de forme ronde ou carrée et vaste est le lieu de palabrâtes, d’échanges d’informations, ou de
nouvelles connaissances.
Les hammams de Marrakech sont d'époques différentes. On trouve très peu d’écrits sur les
hammams.
Côté architecture, il n’existe aucun rapport entre l’esthétique d’un hammam, à la manière ancienne, et
celle des douches très sophistiquées et suréquipées qui existent aujourd’hui. Par rapport aux descriptions
des hammams à la manière romaine ou turcs, les hammams de Marrakech sont pour la plus part d’une
architecture sobre et pratique.
Le hammam traditionnel est généralement pourvu d’un vestibule, lequel donne accès à une première
pièce, la salle de déshabillage et de repos, souvent couverte d’une coupole. De la salle de déshabillage,
on passe à la salle dite froide (frigidarium), puis à la salle tiède (tépidarium). En profondeur, la chambre
chaude ou étuve (caldarium).
La lumière du jour est traditionnellement dispensée à travers des petits trous fermés par des vitres
dans le plafond concave. Cette structure est restée la même jusqu’à nos jours. Les seuls changements
ont trait à l’habillage des murs et du parterre, de carrelage ou de marbre à la place de l’enduit à chaud
(tadellakt : surface imperméable), ainsi qu’aux installations de distribution d’eau chaude et froide. Au lieu
d’une vasque d’eau (borma), attenant à la chambre de combustion (fernatchi) située à l’extérieur, où les
baigneurs remplissent leurs seaux, on a installé des robinets d’eau chaude et froide.
Le système de chauffage du hammam traditionnel est construit par des artisans confirmés maîtrisant
les secrets du métier. Ainsi, les professionnels du hammam parlent de «chebka» (ou réseau de tunnel)
creusé dans le sous-sol de la chambre chaude, traversé d’une chicane conduisant la chaleur de la salle
de combustion vers la salle chaude où les murs et le sol sont chauffés.
La chicane est construite à partir d’un mortier fait d’argile, de sel et de chaux, matière très résistante à
la chaleur. On utilise aussi de la brique rouge en terre cuite.
Traditionnellement, les baigneurs s’assoient directement au sol. Les nouveaux hammams adoptent
4 des banquettes en ciment surtout dans la chambre chaude. Ou encore des tabourets en plastique pour
s’assoir et éviter les eaux de lavage du voisin.
II- Méthodologie
2. Questionnaire :
Le questionnaire porte les points suivants liés à l’usage de l’eau dans le hammam et les habitudes de
lavage, afin de dégager les particularités de chaque étape de lavage en relation avec l’usage de l’eau.
III- Résultats
Les usagers favorables (95%) à l’usage du hammam public et d’une façon fréquente ont répondu
à cette question par le fait que le hammam est:
- Un espace agréable
- Abondance de l’eau
- Chaleur agréable
- Toujours prêt, il n’y rien à préparer ni nettoyer
- La baignade à la maison ne donne pas le même résultat (n’enlève pas la peau morte)
- Aide à la détente
- Risque d’attraper froid surtout en hivers
- Absence du hammam chez soi
- Le hammam public assure des conditions favorables à la propreté
- Facile et proche
- Je n’ai pas d’autres choix
- Aussi de voir des voisines et de bavarder
- Un accompagnement agréable surtout les après-midis (réponse des femmes).
Les usagers occasionnels du hammam public ont répondu à cette question par :
Ils vont au hammam lors d’un problème technique dans le hammam domestique, ou certaines
périodes très froides et manque de chauffage chez soi. Il faut signaler que cette catégorie du
public est aisé, avec surtout la présence de douche chaude chez soi, et qui a pris l’habitude de
se laver presque quotidiennement. Par contre les femmes vont au hammam un peu plus que
leurs maries sous prétexte de se laver les cheveux de façon correcte et d’enlever la peau morte
au moins une fois par mois.
Parmi le public qui fréquente régulièrement le hammam, 82% y vont au moins une fois par semaine
dans les périodes normales, en plus des occasions multipliées lors des fêtes, d’invitations à des
cérémonies ou de sensation de fatigue. Les questionnés laissent l’impression que le hammam est
toujours le bien venu sinon au moins une fois par semaine. Par contre, seulement 18% des
questionnés se sont exprimés que la fréquentation est plutôt obligatoire au moins une fois sur 15
8 jours.
En général, la fréquentation est régulière hebdomadairement sauf des empêchements majeurs. Ce
qui montre que la pratique du hammam reste encore répandu malgré l’existence de la douche chez
soi, souvent froide. Ceci confirme aussi la dimension des biens faits et le rôle social qu’occupe ce lieu
dans la vie des habitants de Marrakech. Cette pratique est beaucoup plus remarquée dans le cas de
la proximité du hammam comme dans les milieux populaires. On entend par là les quartiers dont
l’urbanisme favorise les relations de proximité où les hammams sont plantés favorablement au milieu
des quartiers.
Le soir parait attirer plus de monde (54% des usagers) pour des raisons de fatigue et la préparation au
repos de la semaine. Car on préfère se débarrasser de la crasse de travail et soulager le corps de la
fatigue quand on veut changer d’activités : présence avec la famille, recevoir et sortir. Par contre
d’autres préfèrent aller tôt le matin ou au milieu de la journée pour éviter les heures de pointes. Les
jours de la semaine paraissent moins importantes, ils changent souvent, il n’y pas de jour fixe, mais
une tendance donne que l’usage du hammam augmente les 3 derniers jours de la semaine du
vendredi au dimanche.
Tout d’abord, les seaux utilisés sont pour la majorité de volume de 20-22 litres. Les
femmes ont tendance à utiliser des seaux plus volumineux de 30 litres. Les seaux fournis
au hammam sont de volume, un peu moins, de 15-18 litres. Dans le hammam des
hommes, les seaux sont fournis par le gardien du vestiaire au nombre de 2 par personne,
mais on arrive toujours à récupérer d’autres seaux chez les sortants puisqu’il n’existe pas
d’obligation de les rendre au vestiaire. L’un des propriétaires a constaté certaines
personnes ne côtoyaient plus son hammam lorsqu’il a instauré la règle de rendre les
seaux à la sortie, ce qui lui a obligé de se rétracter de cette décision pour donner plus de
liberté aux usagers de son hammam. L’existence du hammam à proximité laisse le choix
aux gens de choisir le service le plus confortable.
Dans le hammam des femmes, la règle est plus acceptée car chaque usagère doit payer
1 dirham par seau, mais les femmes préfèrent ramener leurs seaux, au moins deux par
femme surtout les plus volumineux du marché ; ceux de 30 litres.
Le rituel du hammam est inculqué à chaque usager dès son jeune âge. On commence à
fréquenter le hammam avec les parents, bien sûr en respectant la séparation des sexes
dès son jeune âge.
Phase 3 :
Temps 4 : Le champoing, le rasage de la barbe, le rasage des aisselles ou parfois les
poils pubiens, constitue un autre moment de finition. L’eau accompagne chaque moment,
1 à 2 seaux sont obligatoires pour terminer cette phase.
Temps 5 : L’usager passe à la dernière chambre, froide, pour temporiser le corps avant
de sortir au vestiaire. Un seau est utilisé généralement pour ceux qui se sentent obliger
de pratiquer les grandes ablutions.
On a remarqué d’ailleurs que le seau destiné à être utiliser pour les grandes ablutions est
10 relavé soigneusement pour le purifier des saletés éventuelles qui pourraient se coller aux
parois. Au minimum un demi-seau est consommé pour ce lavage, avant de le remplir et
passer au lavage du corps en suivant un rituel bien précis. On commence par le haut du
corps vers le bas avec un léger frottement à la main chaque partie du corps. C’est un
grand moment de sensation de purification spirituelle.
Un dernier acte clôture le hammam est le lavage des ustensiles utilisés : gan, brosse de
cheveux, gan de savon, l’extérieur de la bouteille de champoing, le slip et les seaux
personnels. Un seau parfois y passe pour cette dernière partie.
Le rituel respecté d’une façon presque mécanique par chaque usager du hammam donne
le sentiment parfois d’actes instinctifs. La quantité d’eau utilisée ne compte pas puisque
les phases doivent être exécutées presque spontanément pour valider la purification du
corps avant de passer à la phase de la purification spirituelle.
Une quantité d’eau pas moins de :
Ceci montre bien que la quantité d’eau utilisée soit par les hommes ou par les femmes est
à peu près égale. L’observation des comportements des usagers au hammam par rapport
à l’eau permet de constater un abus, et aucun souci n’est porté à cet égard. Les deux
tiers trouvent que l’eau consommée dans le hammam est mérité. Des fuites aussi ont été
11 constatées lors du remplissage des seaux ou pendant le refroidissement de l’eau parfois
bouillante (on laisse parfois le robinet ouvert tandis qu’on est entrain de passer un savon
ou aller faire un tour dans la chambre froide, etc.)
Toutefois certains le 1/3 des usagers du hammam (33%) avouent qu’ils y’a un gaspillage
de l’eau, mais déclarent par ailleurs qu’ils ne font pas d’effort pour diminuer leur
consommation propre. Ils disent entraînés par l’ambiance.
1. Propos des usagers : la discussion avec les usagers autour de la consommation de l’eau ne
nous a pas donné le sentiment qu’il y a un souci par rapport à la surconsommation de l’eau. Beaucoup
même parmi eux considère que si on a payé l’entrée c’est pour se laver et le hammam est fait pour ça.
Les possibles solutions à mettre en place pour réduire la consommation de l’eau dans le hammam
tirées des discussions avec les usagers et les propriétaires montrent bien une certaine volonté de
limiter ce gaspillage en limitant surtout le temps de séjours au hammam. Par contre augmenter le prix
n’est pas une solution souhaitée par les usagers. Les propriétaires réclament cette solution, mais n’est
pas pour le même objectif.
2. Propos des propriétaires : Les propriétaires se plaignent plutôt de la facture énergétique mais
pas de la surconsommation de l’eau, argument qu’ils avancent pour augmenter les tarifs. Les discussions
avec eux ont permis de dégager le lien entre l’eau consommée et l’énergie nécessaire. C’est à ce
moment là qu’ils ont réagi pour avancer la possibilité de réglementer l’accès au hammam : prix, temps et
les seaux utilisés. Certains parmi eux proposent que l’état doit les aider à instaurer ces règles et même
de participer aux aménagement nécessaires pour arriver à limiter la surconsommation de l’eau.
Les propriétaires sont pour la plupart des personnes qui portent le capital nécessaire. Aucune
instruction, ni conscience environnementale n’est constatée chez eux. Soulever ces problèmes avec
eux relèvent de la fiction par rapport à la concurrence dans le marché des hammams. C’est une
affaire qui marche puisque l’eau n’est pas payée, elle est puisée sur la nappe phréatique. Presque
90% des hammams fonctionnent avec l’eau de puits. Les autres n’ayant pas de solution pour creuser
un puits à cause de leur situation défavorable par rapport à la nappe.
Ceux là, utilisent d’autres méthodes pour limiter la facture d’eau. Pendant les ruches, ils diminuent le
débit. C’est une autre façon d’obliger l’usager de mieux gérer lui-même sa consommation s’il est
pressé de partir. Mais on n’a aucune idée réellement sur le gain découlée de cette pratique.
3. Propos de l’administration :
12 Habous (administration gérant les legs religieux) : Le hammam traditionnellement a été géré par
un dahir (loi chérifienne), qui stipule que le hammam est un legs. Ce statut historique découle en fait que
la hammam traditionnellement étant un élément dans le complexe socioreligieux (voir p….). le hammam
constitue par ailleurs un investissement dont les gains sont destinés pour l’entretien du complexe et
particulièrement la mosquée. Avec l’extension des villes, et le besoin de hammams dans les nouveaux
quartiers, ce statut n’est plus à jour et le hammam est devenu un simple investissement commercial. Le
habous n’a pas de réflexion par rapport à cette question.
Municipalité : A part le suivi de l’hygiène, la municipalité n’a pas d’avis sur la question de la
consommation de l’eau dans les hammams.
Les comportements constatés des usagers du hammam laissent à penser que l’utilisation de l’eau à
volonté est ressentie comme un privilège ou un élément de loisirs plus qu’un simple acte de propreté ou
de purification.
Malgré l’existence d’une morale relative à l’usage de l’eau dans la tradition marocaine (d’origine
religieuse), les pratiques de tous les jours émanant des hommes et des femmes, jeunes et moins jeunes,
démentissent le respect à cette morale.
L’existence de cette situation par ailleurs, comme dans les fontaines encore ouvertes à la population,
nécessite fondamentalement un acte citoyen en plus d’une réglementation pour rationaliser la
consommation de l’eau dans de tels services, combien utiles et socialisants.
Il ne s’agit pas de priver la population d’un élément vital pour leurs besoins quotidiens, ou surenchérir
sur un sujet pour ouvrir la voix à des actes commerciales, fortement déconseillés et impopulaires
(antidémocratiques), mais plutôt d’assoir une conscience citoyenne, humaine et morale par rapport à cet
élément. Si l’association du plaisir -ressentie quant à l’utilisation de cet élément naturel- au besoin vital
n’est pas incompatible, un effort d’éducation et de responsabilité est fortement indispensable aujourd’hui
pour parvenir à l’utilisation optimale et bénéfique pour tout le monde.
Le sens de responsabilité est majeur dans de telle situation car les contraintes économiques à elles
seules sont insuffisantes pour contourner la bêtise : consommer sans mesure.
Aujourd’hui, les réclamations des propriétaires des hammams intéressent simplement leurs factures
énergétiques, non l’eau (pour augmenter le prix d’accès au hammam). Même si des voies considèrent
peut-être cette voie comme possible pour réduire aussi la «facture hydraulique».
Conditions préalables :
Les fouilles archéologiques se sont poursuivies au hammam d'Aghmat durant le mois de juin 2007. Elles ont
permis d'approfondir le travail de la mission maroco-américaine et d'élargir le champ de son travail. Elles ont
dévoilé une page glorieuse de l'histoire datée du 10e Siècle de la première capitale du Sud et démontré un
savoir faire architectural et artisanal exceptionnel.
La troisième mission de fouille du hammam d'Aghmat, qui a eu lieu du 4 au 22 juin 2007, s'est fixée pour
objectif de continuer le processus de fouille vers le sud du bâtiment du hammam pour découvrir ses
dépendances. Pour mieux cerner le contexte environnant de l'édifice, une prospection magnétique et par
pénétration radar a été programmée.
L'ensemble hydraulique
Au cours de la précédente mission, nous avions découvert une canalisation médiévale alimentant en eau
potable le hammam et d'autres bâtiments environnants. Continuer son dégagement cette année, nous a permis
de dévoiler une pièce d'un puzzle encore en construction. En effet, cette canalisation, orientée nord-sud, fait
partie d'un réseau complexe et performant, permettant d'alimenter la ville et chacun de ses bâtiments en eau
potable. Dans sa partie nord, elle est divisée en deux branches dont l'une se dirige vers la vasque octogonale et
l'autre vers l'intérieur du hammam.
La datation précise
Avec le sondage effectué à l'intérieur de la salle froide du bâtiment, nous avons prouvé sa profondeur
historique : quatre sols ont été mis au jour sous le sol d'occupation actuel.
En outre, cette démarche nous a permis de collecter des éléments carboniques afin de pouvoir dater par
carbone 14 les différents niveaux du hammam. En effet, son niveau de construction originel date du 10e siècle,
et la dernière tranche de la fin du 14e siècle.
Ainsi, le hammam correspond à une étape glorieuse de la ville d'Aghmat, à savoir le moment où elle jouissait
encore de son rôle de capitale régionale, plus d'un siècle et demi avant la fondation de Marrakech.
Elargir le contexte
Pour placer le hammam dans son contexte urbain, la compréhension de ce qui l'entoure s'avère de plus en plus
nécessaire. Au vu des moyens et du temps qui sont les nôtres, il est impossible de procéder uniquement par la
fouille. C'est pour cette raison que nous avons programmé une prospection magnétique et par pénétration
radar, capable de détecter les structures enfouies à plusieurs mètres du sol actuel. Cette méthode économique
a permis de dessiner la trame des bâtiments et des espaces qui entourent l'édifice du hammam. Une carte est
aujourd'hui en cours de réalisation et saura orienter les travaux des fouilles ultérieures.
■ Abdellah Fili
Enseignant chercheur, archéologue
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