Tumeurs Urotheliales de La Vessie
Tumeurs Urotheliales de La Vessie
Tumeurs Urotheliales de La Vessie
Les tumeurs urothéliales sont des tumeurs fréquentes notamment dans la vessie. Le carcinome urothélial
est la plus fréquente des tumeurs vésicales. Les tumeurs de la vessie sont caractérisées principalement
par leur caractère récidivant et par un risque de progression en stade (infiltration des tissus) et en grade
(différenciation histologique) pour les patients concernés : 70 % des tumeurs non infiltrantes récidivent et
10 à 20 % progressent vers un stade invasif. Elles concernent principalement les hommes et le tabac est
leur principal facteur de risque. L’hématurie macroscopique, parfois les troubles irritatifs du bas appareil,
est la symptomatologie la plus fréquente. Le diagnostic repose sur des examens d’imagerie (échographie
et uroscanner, si l’échographie est non contributive sur la vessie ou pour vérifier l’absence d’extension au
haut appareil urinaire) et sur la résection de la tumeur à visée anatomopathologique. La résection endo-
scopique est le traitement initial de toutes les tumeurs vésicales. Le traitement complémentaire dépend
du grade et du stade. La cytologie urinaire est utile pour les tumeurs de haut grade, moins performantes
pour les tumeurs de bas grade. Le traitement des tumeurs n’infiltrant pas le muscle est effectué par la
résection endoscopique, associée éventuellement à des instillations intravésicales adjuvantes en fonction
du risque de récidive. Le traitement de référence des tumeurs de vessie infiltrantes est la cystectomie totale.
La chimiothérapie et la radiothérapie sont les modalités de traitement des tumeurs métastasiques. Les
tumeurs de la voie excrétrice supérieure sont plus rares que les formes vésicales. La néphro-urétérectomie
totale est le traitement de référence de ces lésions.
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Plan Introduction
■ Introduction 1 Les tumeurs urothéliales sont fréquentes dans la population
■ Épidémiologie 1 française. Le cancer de vessie est le cinquième cancer par ordre
■
de fréquence, et est à l’origine de 3 % des décès par cancers.
Anatomopathologie 2
Les tumeurs urothéliales représentent une entité nosologique aux
Généralités 2
formes et aux pronostics divers : tumeurs de vessie n’infiltrant pas
Grade tumoral 2
le muscle (TVNIM) ou infiltrantes (TVIM), tumeurs vésicales ou du
Stade tumoral 2
haut appareil urinaire. Ces tumeurs ont un fort potentiel de réci-
Carcinome in situ 2
dive et de progression vers une forme plus grave, ce qui nécessite
Risque de progression 2
une surveillance étroite et prolongée des patients.
■ Présentation clinique 3
■ Examens paracliniques 3
Diagnostic
Bilan d’extension
3
3
Épidémiologie
■ Stratégie thérapeutique 4 Les tumeurs urothéliales sont un problème de santé publique
Tumeurs de la vessie 4 important. Lorsque l’on s’intéresse aux tumeurs vésicales, on
Tumeurs de la voie excrétrice supérieure 5 observe à l’échelle mondiale une incidence de l’ordre de 3,3 %,
■ Conclusion 6 soit un peu moins de 340 000 nouveaux cas par an. L’incidence
est stable en France, de l’ordre de 10 000 nouveaux cas par an.
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Tumeurs urotheliales de la vessie et de la voie excrétrice supérieure 5-0610
“ Point fort
Catégories des tumeurs de la vessie en fonction de
leur risque de récidive et de progression
• Faible risque : Ta, unique, bas grade, de moins de 3 cm,
sans récidive
• Risque intermédiaire : Ta bas grade multifocale ou réci-
divante, lésion T1 bas grade
• Haut risque : lésion Ta haut grade, T1 haut grade ou
récidivant, présence de Cis
Présentation clinique
L’hématurie macroscopique est le mode de révélation le plus
fréquent des tumeurs urothéliales. Cette hématurie peut être
abondante, responsable de caillots pouvant entraîner une réten-
tion aiguë d’urine. Il est indispensable de rechercher une tumeur
urothéliale devant tout épisode d’hématurie macroscopique,
même en présence de facteurs pouvant favoriser celle-ci, comme
la prise d’anticoagulants.
Les tumeurs vésicales peuvent également se révéler par des Figure 1. Visualisation endoscopique d’une tumeur de la vessie au cours
troubles irritatifs du bas appareil à type de douleurs vésicales, d’une résection trans-urétrale.
impériosités, pollakiurie ; l’examen cytobactériologique des urines
(ECBU) retrouvent des urines stériles.
En cas de tumeurs plus évoluées, la symptomatologie ressen-
tie par le patient peut être en rapport avec des complications de La cytologie urinaire est un examen de très bonne sensibilité
la tumeur : douleurs lombaires, voire pyélonéphrite en rapport pour les tumeurs de haut grade, mais qui est en revanche moins
avec une obstruction urétrale sur son trajet ou au méat, douleurs performant pour les tumeurs de bas grade. Elle nécessite d’être
osseuses en rapport avec une métastase. réalisée par des cytologistes entraînés à sa lecture car il existe de
Le diagnostic de tumeur urothéliale peut aussi être évoqué nombreuses sources de faux positifs. Elle peut être couplée à cer-
à la suite d’examens complémentaires demandés dans le cadre taines recherches de marqueurs tumoraux afin d’en améliorer la
d’autres pathologies, sans que la tumeur ait jusqu’alors manifesté sensibilité.
sa présence. Ainsi, on peut découvrir une image de polype intra- La recherche systématique de marqueurs tumoraux n’a à l’heure
vésical ou une dilatation des cavités pyélocalicielles lors d’une actuelle pas de place dans le bilan diagnostique d’une tumeur
échographie vésicorénale ou une insuffisance rénale, en rapport urothéliale. Il n’y a pas non plus d’indication actuellement pour
avec une obstruction urétérale, sur un ionogramme sanguin. un dépistage de masse, les tumeurs asymptomatiques étant très
L’examen clinique est souvent pauvre dans le cadre des tumeurs rares.
peu avancées. Il est possible de palper une masse vésicale lors L’endoscopie (fibroscopie souple) réalisée en consultation per-
de la palpation abdominale vessie vide, ou de sentir une infil- met de visualiser la ou les lésions intravésicales. Elle permet de
tration des tissus contigus à la vessie aux touchers pelviens, dans confirmer l’indication de résection endoscopique de cette lésion
le cadre des tumeurs avancées. Lorsqu’elles deviennent percep- qui seule permet d’obtenir une évaluation anatomopathologique.
tibles à l’examen clinique, les tumeurs vésicales sont souvent déjà En cas de confirmation par l’imagerie de la présence d’une lésion
au-delà des ressources thérapeutiques curatives. vésicale, l’endoscopie n’est pas obligatoire avant la résection
L’examen clinique est le plus souvent normal en cas de tumeur (Fig. 1).
du haut appareil urinaire.
Bilan d’extension
Examens paracliniques Une fois établi le diagnostic de tumeur intravésicale, il est pri-
mordial, si cela n’a pas déjà été fait, de réaliser une imagerie
On peut distinguer deux catégories d’examens du haut appareil urinaire par un uroscanner. En effet, compte
complémentaires : à visée diagnostique, puis dans un second tenu du potentiel de multifocalité des tumeurs urothéliales, il
temps à visée de bilan d’extension de la tumeur. faut s’assurer de l’intégrité de la voie excrétrice supérieure, la
prise en charge thérapeutique étant différente en cas d’atteinte de
celle-ci.
Dans un second temps, et si l’examen anatomopathologique
Diagnostic d’un polype réséqué retrouve une tumeur infiltrante, il faut
Le bilan initial lorsque l’on suspecte une tumeur urothéliale demander par ailleurs une scanner abdominopelvien injecté afin
repose sur la réalisation d’un ECBU afin d’éliminer une cause de préciser l’extension extravésicale de la tumeur et l’existence
infectieuse pouvant expliquer la symptomatologie, d’une écho- d’éventuelles métastases ganglionnaires ou viscérales. Une scinti-
graphie, complétée d’un uroscanner si l’échographie se révèle graphie osseuse sera demandée seulement en cas de suspicion de
non contributive, et d’une endoscopie en consultation qui va métastase osseuse. La place de l’imagerie par résonance magné-
permettre de visualiser une lésion intravésicale. tique est surtout dans l’exploration locorégionale de la cavité
La sensibilité de l’échographie varie de 61 à 84 % pour les pelvienne, principalement pour les tumeurs de stade supérieur
tumeurs de plus de 5 mm. Une échographie normale ne permet à T3.
pas de se passer de la cystoscopie. L’uroscanner est le meilleur exa- Il n’y a pas à ce jour de place pour la réalisation systématique
men pour l’étude de la voie excrétrice supérieure, des reins et de d’une tomographie par émission de positons-scan au 18-FDG (18-
la vessie. fluorodésoxyglucose).
BCG
+
surveillance cytologique et
endoscopique tous les 3 mois la
première année, tous les 6 mois
la 2e année, puis 1/an pendant
15 ans au moins
+
uro-TDM tous les 2 ans
Progression ou persistance
à 6 mois
Exérèse radicale
Figure 2. Arbre décisionnel. Prise en charge des tumeurs de la vessie n’infiltrant pas le muscle. IPOP : instillation postopératoire précoce ; RTUV : résection
endoscopique de vessie ; BCG : bacille de Calmette et Guérin ; TDM : tomodensitométrie.
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Conclusion Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts en
relation avec cet article.
Les tumeurs urothéliales ont un pronostic et un traitement très
variables en fonction du type de lésion observée, mais il est pri-
mordial d’insister sur la nécessité d’une surveillance rapprochée
après un traitement initial afin de dépister suffisamment précoce- Références
ment une récidive potentiellement plus grave. La suppression des
facteurs de risque de tumeur, passant par l’arrêt de l’intoxication [1] Pfister C, Roupret M, Neuzillet Y, Larrée S, Pignot G, Quintens H,
tabagique ou le reclassement professionnel, est aussi importante et al. Recommandations du CCAFU 2013 : tumeurs de la vessie. Prog
pour diminuer le risque de récidive. Urol 2013;23(Suppl. 2):S105–25.
[2] Babjuk M, Burger M, Zigeuner R, Shariat SF, van Rhijn BW, Comperat
E, et al. EAU guidelines on non-muscle invasive urothelial carcinoma
of the bladder: update 2013. Eur Urol 2013;64:639–53.
“ Points essentiels [3] Stenzl A, Cowan NC, DeSantis M, Jakse G, Kuczyk M, Merseburger
AS, et al. Guidelines on bladder cancer, muscle-invasive and metastatic.
EAU; 2008.
• Les tumeurs urothéliales sont des tumeurs fréquentes, [4] Raman JD, Scherr DS. Management of patients with upper uri-
nary tract transitional cell carcinoma. Nat Clin Pract Urol 2007;4:
potentiellement graves, à fort risque de progression et
432–43.
récidive. [5] Tomaszewski JJ, Smaldone C, Ost MC. Endourologic management
• La forme vésicale est plus fréquente que les tumeurs du of upper tract transitional cell carcinoma following cystectomy and
haut appareil. urinary diversion. Adv Urol 2009 [976401].
• Le tabac est un facteur de risque majeur ; il existe aussi [6] Pfister C, Roupret M, Neuzillet Y, Larré S, Pignot G, Quintens H, et al.
des formes professionnelles. Recommandations du CCAFU 2013 : tumeurs de la voie excrétrice
• La surveillance à long terme est indispensable. supérieure. Prog Urol 2013;23(Suppl. 2):S126–32.
• En cas de tumeur n’infiltrant pas le muscle, le traitement
est la résection transurétrale endoscopique, éventuelle-
ment associée à des instillations.
Pour en savoir plus
• Le traitement de référence des tumeurs infiltrantes est Association française d’urologie : www.urofrance.org/.
la cystectomie totale ; plusieurs modes de dérivation des Bladders tumors. Campbell-Walsh Urology, Philadelphia, PA: Saunders
urines sont envisageables en fonction des patients. Elsevier; 2007.
Gattegno B, Chopin D. Tumeurs superficielles de la vessie. Rapport du
• La radiochimiothérapie ou la chimiothérapie s’adresse
congrès de l’AFU 2001. Prog Urol 2001;(11).
aux tumeurs métastatiques ou au-delà du stade T3. Rouprêt M, Cussenot O. Les tumeurs de la voie excrétrice urinaire supé-
• Le traitement de référence des tumeurs de la voie excré- rieure. Pathologie Science. Paris: John Libbey; 2008.
trice supérieure est la néphro-urétérectomie totale. Zerbib M, Bouchot O. Les traitements des tumeurs infiltrantes de la vessie.
Rapport du congrès de l’AFU 2002. Prog Urol 2002;(12).
M. Rouprêt ([email protected]).
C. Billault.
Service d’urologie de l’Hôpital Pitié-Salpêtrière, AP–HP, Faculté de médecine Pierre-et-Marie-Curie, Université Paris-6, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651
Paris cedex 13, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Rouprêt M, Billault C. Tumeurs urotheliales de la vessie et de la voie excrétrice supérieure. EMC - Traité
de Médecine Akos 2014;9(4):1-6 [Article 5-0610].
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