Exam ED 3 Agreg - Interne - 2011

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AGRÉGATION INTERNE

DE MATHÉMATIQUES
Session 2011, épreuve 2
–2–

Dans tout le problème, les espaces vectoriels sont des espaces vectoriels sur le corps R des nombres
réels.

• On note BC 0 (R, R) l’espace vectoriel des fonctions continues et bornées de R dans R. Cet espace
vectoriel est muni de sa norme naturelle � · �∞ définie par :
∀φ ∈ BC 0 (R, R), �φ�∞ = sup |φ(x)| .
x∈R

On sait que muni de cette norme, BC 0 (R, R) est un espace de Banach (c’est-à-dire un espace
vectoriel normé complet).

• On note BC 1 (R, R) l’espace vectoriel des fonctions φ de classe C 1 de R dans R telles que φ et
φ� soient bornées. On admettra qu’il s’agit d’un espace de Banach pour la norme � · �BC 1 définie
par :
∀φ ∈ BC 1 (R, R), �φ�BC 1 = �φ�∞ + �φ� �∞ .

• On rappelle que si E et F sont deux espaces vectoriels normés, un homéomorphisme de E sur F


est une application bijective de E sur F , continue et dont la bijection réciproque est continue.

• On rappelle que si (E, � · �E ) et (F, � · �F ) sont deux espaces vectoriels normés, une application
linéaire L : E → F est continue si et seulement s’il existe une constante C ∈ R+ telle que pour
tout x ∈ E,
�L(x)�F � C�x�E .

Étant donnée une fonction continue f : R → R, on considère les applications (en général non linéaires)
Nf : BC 0 (R, R) → BC 0 (R, R) et Lf : BC 1 (R, R) → BC 0 (R, R), dont l’existence sera justifiée en
I-1., définies par :
∀φ ∈ BC 0 (R, R), Nf (φ) = f ◦ φ ,
∀φ ∈ BC 1 (R, R), Lf (φ) = φ� + f ◦ φ .

Le but du problème est d’étudier l’inversibilité de l’application Lf , ce qui revient essentiellement à


étudier les solutions bornées d’une équation différentielle de la forme y � + f ◦ y = h, la fonction h
étant elle-même continue et bornée sur R.
On démontrera notamment un cas particulier du théorème suivant :

Théorème. Les assertions suivantes sont équivalentes :


(i) L’opérateur Lf : BC 1 (R, R) → BC 0 (R, R) est un homéomorphisme.
(ii) La fonction f : R → R est un homéomorphisme.

La partie I fait établir plusieurs résultats utiles dans les parties suivantes.
La partie II propose une étude limitée au cas où f est linéaire.
La partie III propose l’étude de l’opérateur Nf : φ �→ f ◦ φ et fait établir l’implication suivante : si
Lf est un homéomorphisme, alors f est un homéomorphisme.
La partie IV propose d’établir que Lf est un homéomorphisme si f vérifie une hypothèse additionnelle
(H) plus restrictive que la stricte monotonie.
Enfin, la partie V propose l’étude d’un exemple.
–3–

Partie I : Préliminaires
I-1. Existence de Nf et de Lf
Soit f ∈ C 0 (R, R).
a) Soit y ∈ BC 0 (R, R). Montrer que f ◦ y est continue et bornée.
On donne ainsi un sens à Nf comme application de BC 0 (R, R) dans lui-même.
b) Montrer de même que Lf est bien définie comme application de BC 1 (R, R) vers BC 0 (R, R).
I-2. Un opérateur intégral
Soit b ∈ R∗+ et g ∈ BC 0 (R, R).
a) Montrer que la formule
� x
−bx
Tg (x) = e ebs g(s) ds
−∞

permet de définir une fonction Tg de BC 1 (R, R), solution sur R d’une équation différentielle linéaire
que l’on écrira.
b) Donner un majorant de �Tg �BC 1 en fonction de b et de �g�∞ .
I-3. Caractérisation des homéomorphismes de R
L’objet de cette question est d’établir l’équivalence entre les assertions :
(i) f : R → R est continue et bijective.
(ii) f : R → R est un homéomorphisme de R sur lui-même.
a) On suppose que f : R → R est continue et injective. Soit Π+ = {(x, y) ∈ R2 / x < y} et ∆ la
fonction définie sur Π+ par ∆(x, y) = f (x) − f (y). En étudiant le signe de ∆ sur Π+ , démontrer que
f est strictement monotone sur R.
b) Justifier que si f : R → R est continue et bijective, alors f −1 est continue.
c) Conclure.
I-4. Solutions d’une équation différentielle non linéaire
Soit y une solution sur R de l’équation différentielle

(E) y� + f ◦ y = h ,

où f désigne une fonction continue sur R et h une fonction de BC 0 (R, R).


Démontrer que si y appartient à BC 0 (R, R) alors elle est aussi dans BC 1 (R, R).

Partie II : Le cas linéaire


Soient une fonction h ∈ BC 0 (R, R) et un nombre a ∈ R fixés. Dans toute cette partie, on considère
l’équation différentielle linéaire :
(EL ) y � + ay = h .

On rappelle que les solutions (maximales) de (EL ) sont définies sur R. On cherche à savoir s’il existe
des solutions y de (EL ) qui appartiennent à BC 1 (R, R).
II-1. On suppose dans cette question que a = 0.
a) La fonction h étant donnée, montrer que :
• ou bien toutes les solutions de (EL ) de classe C 1 sur R sont bornées ;
• ou bien aucune des solutions de (EL ) de classe C 1 sur R n’est bornée.
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b) Montrer que chacun de ces deux cas peut se produire.


II-2. L’objectif de cette question est de montrer que si a est non nul alors l’équation (EL ) admet une
solution bornée sur R et une seule.
a) On suppose que a > 0.
En utilisant la question I-2., mettre en évidence une solution y0 de (EL ) qui appartient à BC 1 (R, R).
Donner un majorant de �y0 �BC 1 en fonction de �h�∞ et de a.
b) Démontrer que si a > 0 alors (EL ) possède une et une seule solution bornée sur R.
c) On suppose que a < 0. Démontrer que (EL ) possède une et une seule solution bornée sur R. On
pourra introduire la fonction z telle que, pour tout x ∈ R, z(x) = y(−x) .
II-3. On considère la fonction f : x �→ ax de R dans lui-même et on définit l’application linéaire
Lf : BC 1 (R, R) → BC 0 (R, R) par l’expression : Lf (y) = y � + ay .
Démontrer que f est un homéomorphisme si et seulement si Lf est un homéomorphisme.

Partie III : À propos des opérateurs Nf et Lf


Dans cette partie, f désigne une fonction continue de R dans R.
Pour les questions III-2. et III-4., on note, pour tout réel α, hα : R → R la fonction constante
x �→ α.
III-1. Continuité de l’opérateur Nf
On veut établir que Nf : BC 0 (R, R) → BC 0 (R, R) est continu. Soit g ∈ BC 0 (R, R), et (gn )n∈N une
suite d’éléments de BC 0 (R, R) convergeant vers g au sens de la norme � · �∞ .
a) Justifier l’existence du nombre réel ρ = sup �gn �∞ et montrer que �g�∞ � ρ.
n∈N
b) En utilisant la restriction de f à [−ρ, ρ] , montrer que Nf (gn ) tend vers Nf (g) (au sens de la
norme � · �∞ ) lorsque n tend vers +∞. Conclure.
III-2. Cas où Nf est un homéomorphisme
On souhaite établir dans cette question que f est un homéomorphisme si et seulement si Nf est un
homéomorphisme.
a) On suppose d’abord que f est un homéomorphisme.
Vérifier que Nf est bijectif et que Nf−1 = Nf −1 . En déduire que Nf est un homéomorphisme.
b) Réciproquement, on suppose que l’opérateur Nf est un homéomorphisme de BC 0 (R, R) sur lui-
même. Soit y ∈ R arbitraire ; justifier l’existence de ξ ∈ BC 0 (R, R) telle que Nf (ξ) = hy . Démontrer
que ξ est constante (on pourra introduire, pour a ∈ R fixé, la fonction η définie par η(x) = ξ(x + a)
et considérer Nf (η) ). En déduire que f est un homéomorphisme de R sur R.
III-3. L’opérateur différentiel Lf
Démontrer que Lf est une application continue de BC 1 (R, R) vers BC 0 (R, R).
III-4. Cas où Lf est un homéomorphisme
Dans cette question, on suppose que l’opérateur Lf est un homéomorphisme de BC 1 (R, R) sur
BC 0 (R, R).
a) Soit y ∈ R et soit ξ ∈ BC 1 (R, R) telle que Lf (ξ) = hy . Montrer que ξ est une fonction constante.
b) Démontrer que f est surjective.
c) Démontrer que f est injective.
d) En déduire que f est un homéomorphisme de R sur R.
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Partie IV : Un problème de point fixe


Dans cette partie, on considère une fonction continue f ∈ C 0 (R, R) .
• Rappel : une fonction f réelle de variable réelle est dite k−lipschitzienne (k étant un réel positif
fixé), ou encore lipschitzienne de rapport k, si on a
∀(x, y) ∈ R2 , |f (x) − f (y)| � k|x − y| .
• On dira que f satisfait la propriété (H) s’il existe deux nombres réels m et M , strictement positifs,
et tels que : � �
f (y) − f (x)
∀(x, y) ∈ R , (x �= y) ⇒ m �
2
�M .
y−x
On notera qu’on a nécessairement m � M .
IV-1. Dans cette question seulement, on suppose que f est dérivable sur R ; donner une condition
nécessaire et suffisante pour que f satisfasse la propriété (H).

On suppose dans toute la suite de la partie IV que f satisfait la propriété (H).

IV-2. Démontrer que f est un homéomorphisme de R sur R.


IV-3. On pose k = m+M 2 , et on introduit la fonction réelle de variable réelle Fk : x �→ f (x) − kx.
Démontrer que Fk est lipschitzienne d’un rapport L que l’on déterminera.
IV-4. Soit h et φ deux éléments de BC 0 (R, R). Démontrer que la fonction s �→ −Fk (φ(s)) + h(s)
est bornée sur R. En déduire que la fonction G qui à h et φ fait correspondre
� x
−kx
� �
G(h, φ) : x �→ e eks −Fk (φ(s)) + h(s) ds
−∞

est bien définie et que G(h, φ) appartient à BC 0 (R, R).


IV-5. Démontrer que les applications partielles φ �→ G(h, φ) (pour h ∈ BC 0 (R, R) fixée) et h → �
G(h, φ) (pour φ ∈ BC (R, R) fixée) sont lipschitziennes ; on précisera leurs rapports en fonction de
0

L et k.
IV-6. Démontrer que G(h, φ) appartient à BC 1 (R, R) et que
G(h, φ)� = k(φ − G(h, φ)) − f ◦ φ + h .

IV-7. Soient deux fonctions h et φ dans BC 0 (R, R). Démontrer que la relation G(h, φ) = φ a lieu
si et seulement si φ appartient à BC 1 (R, R) et que Lf (φ) = h.
IV-8. L’opérateur Lf comme bijection
Soit une fonction h ∈ BC 0 (R, R). Démontrer que φ �→ G(h, φ) a un unique point fixe dans BC 0 (R, R).
En déduire que l’opérateur Lf : BC 1 (R, R) → BC 0 (R, R) est une bijection.
IV-9. L’opérateur Lf comme homéomorphisme
a) Soient h1 , h2 , φ1 , φ2 des éléments de BC 0 (R, R) tels que φ1 = G(h1 , φ1 ) et φ2 = G(h2 , φ2 ).
Déduire de la question IV-5. qu’il existe un réel r > 0 vérifiant l’inégalité suivante :
1
�φ1 − φ2 �∞ � r�φ1 − φ2 �∞ + �h1 − h2 �∞ .
k
b) Démontrer que l’opérateur L−1f : BC (R, R) → BC (R, R) est lipschitzien ; on précisera son
0 1

rapport.
c) En déduire que l’opérateur Lf : BC 1 (R, R) → BC 0 (R, R) est un homéomorphisme.
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Partie V : Un exemple
On s’intéresse à l’équation :
(F) φ� + (2φ + sin2 (φ)) = h ,
où h est une fonction continue et bornée sur R.
V-1. Vérifier que les résultats de la partie IV s’appliquent.
V-2. On suppose dans cette question que h est constante.
Existe-t-il une solution bornée non constante de (F) ?
V-3. On revient au cas général (h arbitraire dans BC 0 (R, R)).
a) Montrer que l’équation (F) a une unique solution bornée φ0 .
b) Soit φ une solution maximale de (F), a priori définie sur un intervalle ouvert J =]u, v[. Démontrer
que φ� + 2φ est bornée sur J.
c) On suppose que v est fini. On introduit la fonction γ telle que, pour tout x ∈ J, γ(x) = e2x φ(x).
Démontrer que γ admet une limite à gauche au point v, et en déduire une contradiction.
d) Déduire de ce qui précède que J = R et que φ est bornée sur R+ .
V-4. On prend désormais h = sin. Soit φ une solution arbitraire de l’équation (F) distincte de φ0 .
On note ψ = φ − φ0 .
a) Démontrer que la fonction φ0 est périodique (on donnera une période de φ0 ).
b) Démontrer qu’il existe une fonction w de BC 0 (R, R) telle que ψ vérifie :

∀x ∈ R, ψ � (x) + 2ψ(x) = w(x) .

Démontrer que ψ ne s’annule pas.


c) Démontrer que :
∀x ∈ R+ , |ψ(x)| � |ψ(0)|e−x .

d) Trouver une constante α ∈ R telle que :

∀c ∈ R, ∃(x1 , x2 ) ∈ [c; +∞[2 , φ(x1 ) < α < φ(x2 ) .

Comment peut-on interpréter ce résultat ?

FIN DU SUJET

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