These Mnaouri Abderrafia 2015
These Mnaouri Abderrafia 2015
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A ma mère
A ma femme et ma fille
2
Remerciements
m’a accordée.
travaux.
3
« (…) tel est le sort des choses humaines, qu’on ne peut éviter un
)Niccolo Machiavelli,Dscorsi sopra la prima deca di Tito Livio, Livre I, chapitre VI(
4
Sommaire
INTRODUCTION GENERALE............................................................ 8
5
Abréviations
6
RAID : Recherche Assistance Intervention Dissuation
RCADI : Recueil des cours de l’Académie de droit international
RGDIP : Revue générale de droit international public
RJCS : Revue de la jurisprudence de la Cour suprême
SDN : Société des nations
v. : Voir
vol. :Volume
7
INTRODUCTION GENERALE
8
Les actes de terrorisme commis aux Etats Unis le 11 septembre 2001 contre
les villes de New York et Washington ont constitué un grand revirement dans
l'action de la communauté Internationale envers le terrorisme International.
Le terrorisme est un crime grave qui vise la destruction des biens publics et
privés, l'intimidation des personnes et la dégradation des acquis civilisationnels
dans le monde tout en sous-estimant les droits de l'homme et les valeurs prônées
par les religions, et particulièrement la religion Islamique qui repose sur les
principes de la tolérance, le rejet de la violence et l'interdiction d'homicide, de
l'intimidation et de la terreur. C'est un acte qui représente un danger pour la paix
internationale et les services vitaux des Etats, tout en constituant un phénomène
dont les origines, les causes et les explications varient d'un Etat à l'autre.
C'est ainsi que le Conseil de Sécurité des Nations Unis a adopté la résolution
1373 du 28 septembre 2001, soit dix sept jours après les attentats de New York
et Washington, requérant tous les Etats à prendre des mesures supplémentaires
pour réprimer sur leurs territoires, par tous les moyens licites, le financement et
la préparation de tout acte de terrorisme, incriminer l'acte de fourniture ou de
collecte délibérée par leurs nationaux ou sur leur territoire, par quelque moyen que
ce soit, directement ou indirectement, de fonds susceptibles d'être utilisés pour
perpétrer des actes de terrorisme, geler les fonds des personnes qui commettent
ou tentent de commettre de tels actes, refuser de donner asile à ceux qui financent,
1
Abdeslam Bohouche et Abdelmajid Chafik, Le crime terroriste dans la législation marocaine,
Librairie Al Karama, 2004, p. 10.
9
organisent, appuient ou commettent des actes de terrorisme ou en recèlent les
auteurs, interdire ces mouvements de terroristes ou de groupe de terroristes en
instituant des contrôles efficaces aux frontières, ainsi que des contrôles lors de la
délivrance de documents d'identité et de documents de voyage et en prenant des
mesures pour empêcher la contrefaçon, la falsification ou l'usage frauduleux de
papiers d'identité et de documents de voyage2.
2
La résolution 1373 adoptée par le Conseil de Sécurité des Nations Unies prévoit d’autres
mesures importantes visant à lutter efficacement contre le terrorisme et l’instauration d’un
système de coopération mutuelle entre Etats. Et c’est la première fois que le terrorisme est
considéré comme un acte qui menace la paix et la sécurité internationales.
3
La Convention arabe pour la lutte contre le terrorisme, in Droit du terrorisme, Remald,
Collection «Textes et Documents», n° 89, 1ère éd. 2003, p. 284.
10
terrorisme international, s'est vu dans l'obligation de répondre aux menaces que
constitue le terrorisme4.
4
La Convention de l’Organisation de la Conférence Islamique pour la lutte contre le terrorisme, in
Droit du terrorisme, Remald, Collection «Textes et Documents», n° 89, 1ère éd. 2003, p.269.
Il y a lieu d’indiquer que cette convention et la convention arabe pour la lutte contre le terrorisme
préserve le droit des peuples de lutter avec les armes contre toute occupation étrangère en vue
de libérer leur territoire et le droit des peuples à disposer d’eux mêmes et ce, conformément
aux dispositions de la charte des Nations Unies.
5
La période de douze jours qui sépare la date des attentats terroristes de Casablanca et celle
de la promulgation de la loi 03-03 relative à la lutte contre le terrorisme ne signifie pas que
ladite loi n’a été préparée et soumise au parlement qu’après le 16 mai. Cette loi a été soumise
à la discussion par les membres du parlement avant cette date mais quelques oppositions de
la part de certains partis politiques et de la société civile demeuraient. D’ailleurs, Sa Majesté
le Roi a qualifié ces oppositions dans son discours à l’occasion de la fête du Trône en 2003 de
systématiques aux orientations des pouvoirs publics.
11
à la législation française dans de nombreux domaines et il n'est pas étonnant
que certaines lois qui datent du protectorat français demeurent toujours en
vigueur 6.
1. L’intérêt du sujet
Les études menées dans ce domaine par les chercheurs, les spécialistes, les
instituts d'études et les services de police n'ont pas réussi à résoudre le problème,
à connaître ses causes, à y mettre fin ou, tout simplement, à l'apaiser.
Il est difficile de cerner tous les aspects relatifs au terrorisme dans cette
humble recherche en raison des contraintes de sécurité qui favorisent le principe
du secret professionnel, que ce soit par les services de sécurité ou les groupes
terroristes eux mêmes.
En effet, chaque partie du conflit est consciente que l'information est une
arme entre les mains de ceux qui la détiennent, et que la discrétion est un moyen
de protéger la circulation de cette information surtout dans le combat entre
services de sécurité et terroristes.
6
Le droit foncier par exemple date de 1912.
12
Le Maroc, a connu le même sort et de l’année 2003 jusqu'à présent les
autorités marocaines ne cessent de démanteler des organisations terroristes qui
ont l’intention de perpétrer des actes terroristes pour troubler gravement l’ordre
public. Les deux pays ont à la fois connu, mais dans des périodes différentes, ce
genre de menaces statistiquement importantes quant au nombre de victimes et
dégâts qui en sont résultés.
7
Mais, cette loi a été complétée par la loi n° 43-05 du 17 avril 2007 relative à la lutte contre le blanchiment
de capitaux qui considère les infractions terroristes comme acte de blanchiment, et la loi 62-06 du
23 mars 2007 modifiant le code de nationalité qui prévoit la déchéance de la nationalité marocaine
des personnes qui l’ont acquis lorsqu’elles sont condamnées pour infraction terroriste, ainsi que
la loi n°13-10 promulguée par le Dahir n°1-07-79 du 17 Avril 2007 et la loi 86-14 du 20 Mai 2015.
8
Le terme «transnational» est juridiquement utilisé pour designer un crime qui affecte plusieurs
Etats, contrairement au terme «internationale» qui renvoie à une qualification politique d’un acte.
13
conclue à Strasbourg le 27 janvier 1977. Cette convention repose sur l’idée que
certains actes de terrorisme sont tellement graves, en raison de la méthode
employée ou des résultats, par rapport à leurs mobiles, qu’il n’est plus permis de
les considérer comme des infractions politiques 9.
9
Alberto Perduca et patrick Ramael, Le crime international et la justice, flammarion, 1998.
10
Henri LABAYLE et Anne WEYEMBERGH, Code de droit pénal de l’Union Européenne, Brulant,
2005.
14
2. Evolution du terrorisme
11
Luigi BONANATE, Le terrorisme international XX siècle, casterman, 1994, p. 9.
12
Jean-Claude Chesnais, Histoire de la violence en Occident de 1800 à nos jours, Paris, Robert
Laffont, 1981, p. 299.
15
de l’« hyperterrorisme, conjonction de la destruction de masse, rendue possible
par l’accès aux technologies contemporaines, et de la nature apocalyptique des
organisateurs des attentats 13 ».
Son évolution, ses manifestations ainsi que ses connotations n’ont pas cessé
de subir les averses politiques et sociales des Etats. L’incrimination juridique
est un moyen de lutte contre l’expansion du phénomène. Le Maroc, où ce genre
de menace était inconnu, n’en a pas été épargné, quand des attentats suicides
perpétrés dans la ville de Casablanca ont troublé la tranquillité et accéléré
l’adoption d’une loi antiterroriste.
13
Julie Alix, Terrorisme et droit pénal : étude critique des incriminations terroristes, Dalloz,
Paris, 2010, p.2.
14
Isabelle Sommier, Le terrorisme, Flammarion, 2000, p.11.
15
Tahar ATTAF, «La politique criminelle en matière de lutte contre le terrorisme», livre des
exposés du 27ème congrès du Barreau de la Cour d’appel d’Agadir et Laayoune, en arabe, les 26-
27-28 mai 2001, Imprimerie Annajah Aljadida, Casablanca, p. 407.
16
Connaître l’évolution du terrorisme c’est puiser dans l’histoire des actions
terroristes et les réactions qu’elles ont suscitées, que ce soit chez leurs auteurs,
dans la société, ou dans les cercles étatiques officiels. Chacune de ces parties
interprète l’action selon les objectifs et l’idéologie qu’elle prône, la place qu’elle
occupe dans la hiérarchie de l’Etat, et les intérêts qu’elle défend.
La loi, elle-même, est créée selon la vision du législateur qui tend à réprimer
des actes, tout en assurant une conformité entre les nécessités de la répression, et
la sauvegarde des libertés. Le législateur marocain n’a pas dérogé à cette règle.
Le terrorisme n'est pas un acte exercé seulement par les personnes ou les
groupes. C'est un acte auquel recourent certains Etats favorisant ainsi le droit de
16
Parmi les Etats développés, on peut citer les Etats Unis d’Amérique qui ont fait l’objet de
l’attaque terroriste du 11 septembre 2001, et la France où une usine dans la ville de Toulouse a
été complètement détruite par une explosion le 17 septembre 2001.
17
Gérard Chaliand est Directeur du centre européen d’études des conflits (FRS).
18
Ce que G. Chaliand qualifie de terrorisme, d’autres le considère une lutte légitime contre
l’occupation étrangère que la charte des Nations Unis autorise.
17
la force sur la force du droit pour répandre leurs idéologies politiques ou préserver
leurs intérêts nationaux.
Si l'on adopte ces trois référents, on pourrait dire qu'il n'y a pas de terrorisme
moderne et de terrorisme non moderne parce que chaque acte terroriste, vu du
point de vue de ses circonstances historiques, sa nature et ses moyens est moderne
par rapport à sa date de perpétration.
19
Abdeslam Bouhouche et Abdelmajid Chafik ,op. cit.
18
inférieur à l'Etat, le régime de la terreur était un moyen de pouvoir instauré par le
gouvernement révolutionnaire alors mis en place 20.
20
Bruce Hoffman, La mécanique terroriste, nouveaux horizons, Londres, 1998.
21
Robespierre Maximilien était l’un des plus grands leaders de la révolution française. Il a été né
en 1758 et décédé en 1794 et c’est lui qui a mis en place le régime de la terreur et a conquis tous
ses opposants politiques.
22
B. Hoffman ; op. cit.
23
Ibid.
19
Selon Bruce Hoffman, le père fondateur de ce genre de terrorisme fut
probablement l'extrémiste républicain Italien Carlo Pisacane, auteur de la théorie
de la "propagande par l'action". Dans ce contexte, il écrivait que : "la propagande
de l'idée est une chimère. Les idées résultent d'actions, et non pas l'inverse, et le
peuple ne sera pas libre quand il sera instruit, mais instruit quand il sera libre" 24.
20
Pendant la révolution Chinoise, Mao Tse-Tung déclara qu'il refuse le
terrorisme sous toutes ses formes, mais il établit, en même temps, le principe
de l'usage de la violence armée, comme il institua une stratégie formée de deux
étapes : la première étape commença par une guérilla 28
qui se développa en
guerre. Ensuite, après la réussite de la révolution vint l'étape du terrorisme comme
instrument efficace pour la protéger et la défendre contre les opposants 29.
28
La guérilla est une petite guerre. Le terme est né entre 1807 et 1812 pour désigner la résistance
espagnole contre les armées napoléoniennes.
29
Sami Jade Abderrahmane Wassel, op. cit., p. 13.
30
Bruce Hoffman, op. cit., p. 29.
31
La qualification de la lutte pour la libération des terres occupées d’actes terroristes donne lieu
à controverses et nous allons exposer celles-ci ci-dessous.
32
Bruce Hoffman, op. cit.
33
Ibid.
21
L'expression "combattants de la liberté" a été utilisée par les pays du tiers
monde pour ne pas qualifier les militants contre le colonialisme de "terroristes"
mais des "combattants de la liberté".
Le débat divisa les Etats Parties à l'Organisation des Nations Unies ; une
majorité soutint le secrétaire général et une minorité, composée particulièrement
des pays du tiers monde, s’y opposa et l'ONU prit parti pour le fort contre le faible
34
Yasser Arafat, Discours prononcé devant l’Assemblée générale des Nations Unies le 13 nov.
1974, cité par B. Hoffman, op. cit.
35
Sami Jade Abderrahmane Wassle , op. cit.
36
Bruce Hoffman , op. cit.
22
en condamnant le terrorisme 37 et en rendant la tache de le définir très difficile eu
égard à la division au sein de l'ONU.
La coopération pénale entre les deux parties s’inscrit dans le but de lutter
contre ce danger qui les menace. Mais avant d’aborder le sujet, il est indispensable
d’étudier certains concepts clés comme le djihad ainsi que le martyr.
37
Il y a lieu d’indiquer que ce débat survint suite à l’attentat perpétré contre 11 athlètes israéliens
lors des Jeux Olympiques de Munich en 1972 par un groupe palestinien, et c’est pour cela que
les Etats du tiers monde ont considéré que la condamnation du terrorisme par l’ONU est une
condamnation portée contre toute lutte de libération ou contre les colonisateurs à tel point que
Chen Chu, représentant de la Chine populaire, déclara que l’ONU, en agissant ainsi, proposait de
«priver les nations et les peuples opprimés» de la seule arme efficace dont ils disposaient pour
s’opposer «à l’impérialisme, au colonialisme, au néo-colonialisme, au racisme et au sionisme».
38
Présentation du commandant de la police nationale de France, Jeremy Menahem, BRI de Paris
au cours d’une formation à l’Académie nationale du FBI aux Etats-Unis du 6 avril au 16 juin
2013 dans le cours de la lutte contre le terrorisme. Donc, il parait que la collecte d’argent et la
richesse sont les vraies motivations des terroristes islamistes ce qui est contraire aux préceptes
de l’Islam qui ne permettent de disposer que du strict minimum d’argent nécessaire pour la
vie et prescrivent la distribution du surplus aux gents pauvres suivant les règles de l’aumône,
Zakate en arabe.
23
Les termes « djihad et martyr » sont des formes de combat qui nous
intéressent dans le cadre de notre recherche puisqu’une grande partie de la
violence politico-religieuse aujourd’hui s’inscrit selon l’interprétation de certains
groupuscules terroristes, dans une logique du djihad.
a. Le djihad
39
Ali BOLAC, Le djihad, terrorisme et attentats suicides, Caglayan Matabaasi 2005, Izmir,
Turquie, p. 56 ; El Azzouzi El Idrissi, La coopération pénale euro-marocaine en matière de
lutte contre le terrorisme, thèse de doctorat, université Toulouse 1, 2013.
40
Wahba AZOUHAILI, sujets de la pensée et la pensée morale, p. 402, Dar Alfikr, 2006, Damas.
41
Jean FLORI, Guerre sainte djihad, croisade, éd. du Seuil , juin 2002.
24
la Mecque ». Le « djihad » dans la terminologie coranique et prophétique prend
aussi le sens d’acte spirituel pour atteindre l’accomplissement moral et spirituel.
« Le plus grand djihad, c’est l’effort interne contre soi-même ». L’objectif est de
purifier son âme pour s’élever spirituellement, être un citoyen exemplaire au sein
d’une société musulmane.
b. Le martyr
Chaque fois qu’il est question de « mourir pour Allah », ce sont des
expressions comme « périr sur le chemin de Dieu » (sourate 2, verset 154,
« tomber sur le chemin de Dieu » (s. 3, v. 157), « être tué sur le chemin de Dieu »
(s.3, v. 169), « combattre sur le chemin de Dieu » ( s.4, v.74), « faire exode sur le
chemin de Dieu et y être tué ou mort » (s. 22, v.58) que l’on rencontre 45.
25
comme témoin et martyr 46. L’expression renvoie aux martyrs musulmans tombés
au champ de bataille dans la lutte contre les infidèles avec la promesse de grandes
gratitudes dans l’au-delà puisque dans l’islam c’est le combat pour la cause de
Dieu qui entraîne la mort en martyr comme dit la Sourate 4 (Les Femmes), verset
74 : « A ceux qui combattent pour la Cause de Dieu, qu’ils se fassent tuer ou qu’ils
soient vainqueurs, Nous accorderons une immense recompense » 47.
« Tuer et se faire tuer » : c’est sur cette phrase clé de la sourate Le Repentir
que se fonde en principe la justification du martyre en islam. Que l’on tue ou que
l’on se fasse tuer, c’est le paradis qui est promis. Ce texte fondateur ne mentionne
pas, comme on l’a dit, l’expression martyr chahid ou martyre chahâdat qui
deviendra par la suite une notion clé de la mort sacrée. L’idée de mort sacrée
« pour défendre la Cause de Dieu » y est cependant explicitement formulée et
sera reprise dans diverses traditions islamiques 49.
46
El Azzouzi El Idrissi, op. cit.
47
Ibid. ; Mohamed Chiadmi, op. cit.
48
Ibid,p. 204.
49
Le Noble Coran, op.cit., p.113.
50
El Azzouzi El Idrissi, op. cit.
26
Le verset 190 de La Sourate 2 dit : « Combattez dans la Voie de Dieu ceux
qui vous combattent, sans jamais outrepasser les limites permises, car Dieu
n’aime pas ceux qui les transgressent » 51.
Les versets cités plus haut présentent l'attitude que doit adopter un
musulman à l'égard des non-musulmans. Il doit traiter gentiment tous les non-
musulmans et s'abstenir de se lier d'amitié avec seulement ceux qui montrent
une attitude hostile envers l'islam. Au cas où cette hostilité causerait des attaques
violentes menaçant l'existence des musulmans, à savoir une guerre contre eux,
alors les musulmans doivent répondre justement en considérant les dimensions
humaines de la situation. L'islam interdit toutes formes de barbarisme, d'actes de
violence gratuite et d'agressions injustes. Dans un autre verset, Dieu avertit les
musulmans et rappelle que la rage éprouvée à l'égard des ennemis ne doit pas les
amener à l'injustice 54.
51
Ibid, p. 29.
52
Ibid, p. 150.
53
Le Noble Coran, op. cit., p. 550.
54
Harun YAHYA, «Le pacifisme de l’Islam», www,partie 1-2, http://com/article.php3?id-
article=333; El Azzouzi El Idrissi, op. cit.
55
M. Elhalouji, «la notion de jihad dans les écoles françaises», partie 1-2, http://com/article.
php3?id-article=333 ; El Azzouzi El Idrissi, op. cit.
27
«Or le djihad en islam est autorisé non seulement pour défendre la religion,
mais aussi en cas de légitime défense (défendre sa vie, ses biens, les siens, sa
liberté).
4. Définition du terrorisme
Définir, c’est expliquer une chose par des attributs qui la distinguent.
La définition est un préalable indispensable à la mise en place d’un traitement
spécifique d’un comportement, lui-même spécifique 58
. Malgré la diversité des
formes, des idéologies des cibles et des méthodes qui caractérise le terrorisme,
toute définition tend, par essence, à réduire 59
la diversité d’un phénomène à la
singularité d’un concept.
56
El Azzouzi El Idrissi, op. cit.
57
Le Noble Coran, op.cit., p.34.
58
Julie Alix, Terrorisme et droit pénal, op. cit., p. 30.
59
Ibid, p. 31.
28
Comment peut-on définir le "terrorisme" ? Plusieurs personnes ont une
idée imprécise de ce terme et perçoivent de manière confuse de quoi il s'agit. Elles
qualifient de "terrorisme" tout acte mettant en cause une violence particulièrement
atroce et perçue comme dirigée contre la société. Le point commun des différentes
définitions linguistiques, doctrinales et juridiques semble résider dans la référence
à la violence.
a- Le sens linguistique
60
Sally Wehmeier, Oxford Advanced Learner’s Dictionnary, 6ème éd. Sally, Oxford University
press, 2000.
61
Ibid.
29
Quant au dictionnaire : "Le Petit Robert", il définit le terrorisme comme: 1.
La politique de terreur des années 1793-1794 en France, 2. L’emploi systématique
de violence pour atteindre un but politique (prise, conservation, exercice du
pouvoir …), et spécialement un ensemble des actes de violence, des attentats, des
prises d'otages civils qu'une organisation politique commet pour impressionner
un pays (le sien ou un autre) 62.
D'autres écrits énoncent que le mot terreur vient du latin terror, qui signifie
effroi (ou qui inspire l'effroi). Il est dérivé de "terrer", effrayer. Ces écrits indiquent
que le terrorisme et les terroristes n'apparaissent qu'en 1794 et désignent une
terreur institutionnelle 63.
62
Le Petit Robert, Dictionnaire de la langue française, Paris.
63
Il y a ici référence à la terreur institutionnalisée par la révolution française pour garder sa
continuité et garantir sa réussite.
64
«Histoire d’un mot, avenir d’une politique», document tiré de l’internet, 19-10-2006.
30
b- Le sens doctrinal
Ensuite, M. Hardman utilise l'expression "… réaliser des buts déclarés" sans
pour autant préciser la nature exacte de ces buts : politique, sociale, économique
etc.
65
O. Ben Jomaa, «Le terrorisme : vues linguistiques, canoniques et juridiques comparées», en
arabe, Al Bayane, n° 73, 2006, p. 58.
66
Ahmed Fellah, «Les causes de l’évolution du phénomène du terrorisme», Revue de l’Académie
arabe de Naif pour les sciences de sécurité, Riyad, 1999, p. 74.
31
l'intimidation et la terreur collective. Il vise ainsi toute la population d'un Etat ou
une partie de cette population en tant que groupe social déterminé" 67.
Cette définition est très importante dès lorsqu'elle est concise et recueille
tous les éléments contribuant à définir l'état psychologique des auteurs d'actes
terroristes, leurs buts et motifs. C'est une définition qui décrit le comportement
des terroristes au lieu de décrire l'acte terroriste ; ce qui la distingue de la plupart
des définitions.
67
Abdeslam Bouhouch et Abdelmajid Chafik , op. cit, p. 46.
68
Voir la définition de Charif Basyouni citée infra.
69
O. Ben Jomâa , op. cit.
32
sein d'une partie exclusive d'une société donnée pour arriver au pouvoir, ou pour
faire la publicité à une revendication ou une injustice, nonobstant le fait que les
auteurs de la violence le font pour leur intérêt ou pour l'intérêt d'un Etat" 70.
Nous pensons que la définition présentée par Charif Basyouni est suffisante
pour caractériser la notion du terrorisme dès lors qu'elle englobe tous les éléments
qui connotent l'acte terroriste aujourd'hui tels la violence, les motifs doctrinaux
ou idéologiques et l'intimidation (violence horrible). Elle fait aussi mention du
terrorisme d'Etat par sa référence à l'intérêt des auteurs des actes terroristes
selon la formule indiquée à la fin de la définition notamment :"… pour l'intérêt
d'un Etat".
Mais, ce qui nous semble un peu incongru et décalé avec la réalité actuelle
du terrorisme est l'indication par Charif Basyouni selon laquelle l'acte terroriste
vise une partie exclusive d'une société donnée. Cette indication ne répond pas
aux aspects du terrorisme actuel qui cible toute la société (et non pas seulement
une partie) sans distinction aucune entre ses différentes composantes et sans
considération de la religion, la race, le sexe ou l'âge des personnes.
On peut dire que cette indication pourrait être vraie s'il s'agissait des formes
de violence décidées et imposées par un Etat à ses propres citoyens comme c'était
le cas dans l'Allemagne nazie, l'Italie fasciste et la Russie stalinienne. De toutes
les manières, il parait difficile de saisir toutes les facettes du phénomène même en
ayant recours aux écrits doctrinaux, ce qui rend indispensable de se pencher sur
le sens juridique du terme. L’importance de la définition juridique du phénomène
demeure dans son aspect exhaustif et limitatif incarné par le recours à des actes
déterminés et expressément énumérés.
c- Le sens juridique
70
O. Ben Jomâa , op. cit.
33
La raison en est évidente : sans une définition précise du terrorisme, il peut être
aisé de qualifier de terrorisme des activités qui ne le sont pas. N’est ce point cela
qui est en train de se produire un peu partout dans le monde ?Or, comment
envisager les aspects violents qui résultent parfois de l’usage du droit des peuples
à l'autodétermination ? Y a-t-il une distinction juridique possible entre la guérilla
et le terrorisme ? Où se trouvent les repères et les différenciations entre la guerre
et le terrorisme ? 71
éléments avec plus de détails dans la partie réservée aux lois antiterroristes.
La plupart des Etats sont aujourd'hui dotés d'un instrument juridique dans
leur arsenal législatif relatif à la lutte contre le terrorisme. Il y a parmi ces Etats
ceux qui ont connu des actes terroristes sur leur territoire, ceux qui sont menacés
par ces actes, et ceux qui ne le sont pas, mais se sont vus obligés d'adopter une
législation contre le terrorisme dans le cadre de la coopération internationale
instaurée par les Nations Unies ou par les Etats eux mêmes.
71
E. PECK, ancien chef de mission des États-Unis en Irak et ambassadeur en Mauritanie a
exprimé l’opinion suivante : « En 1985, quand j’étais directeur adjoint de la Task Force sur
le terrorisme de Reagan, […] ils nous ont demandé de produire une définition du terrorisme
qui pourrait être utilisée par tout le gouvernement. Nous en avons produit environ six, et dans
absolument chaque cas, elles furent rejetées, parce qu’une lecture attentive indiquait que notre
propre pays avait été impliqué dans une de ces activités. […] Après que la Task force ait terminé
son travail, le Congrès s’y est mis d’accord, et vous pouvez regarder dans le Code U.S. Titre
18, Section 2331, et lire la définition américaine du terrorisme. Et l’un d’eux là dedans dit --
un des termes, “terrorisme international,” signifie “activités qui,” je cite, “apparaissent avoir
pour but d’affecter la conduite d’un gouvernement par destruction de masse, assassinat ou
kidnapping.” […] Oui, bien, certainement, vous pouvez penser à un certain nombre de pays
qui ont été impliqués dans de telles activités. Le nôtre en est. Israël en est un autre. Et donc,
le terroriste, bien sûr, est dans l’œil du spectateur. Cité par le site Internet wikipedia http://
fr.wikipedia.org, le 23 mars 2008.
72
S. GLASER, «Culpabilité en droit international pénal», RCADI, 1960, I, t. 99, pp. 501-502.
34
Nous allons nous pencher, en premier lieu, sur la définition adoptée par le
législateur français, ensuite sur celle adoptée par le législateur marocain, étant
entendu, d’une part, que la législation française constitue la première source
d’inspiration pour le droit marocain, non seulement au niveau pénal, mais au
niveau de la procédure pénale ou civile. De même, il nous parait utile de citer
certaines définitions prévues par des conventions régionales ou internationales,
qui constituent des références pour les législations nationales, voire des sources
de droit desquelles les lois nationales se sont inspirées et auxquelles elles doivent
se conformer dans le cadre de la lutte globale contre le terrorisme 73.
1. En droit national
a- Le Droit français
35
3° Les infractions en matière de groupes de combat et de mouvements
dissous définies par les articles 431-13 à 431-17 et les infractions définies par les
articles 434-6 et 441-2 à 441-5 ;
36
De même, l'article 421-2-2 prévoit que : "Constitue également un acte
de terrorisme le fait de financer une entreprise terroriste en fournissant, en
réunissant ou en gérant des fonds, des valeurs ou des biens quelconques ou en
donnant des conseils à cette fin, dans l'intention de voir ces fonds, valeurs ou
biens utilisés ou en sachant qu'ils sont destinés à être utilisés, en tout ou partie,
en vue de commettre l'un quelconque des actes de terrorisme prévus au présent
chapitre, indépendamment de la survenance éventuelle d'un tel acte" 74.
L’article 421-2-4 punit « le fait d’adresser à une personne des offres ou des
promesses, de lui proposer des dons, présents ou avantages quelconques, de la
menacer ou d’exercer sur elle des pressions afin qu’elle participe à un groupement
ou une entente prévu à l’article 421-2-1 ou qu’elle commette un des actes de
terrorisme mentionnés aux articles 421-1 et 421-2 est puni, même lorsqu’il n’a
pas été suivi d’effet, de dix ans d’emprisonnement et de 150 000 € d’amende ».
74
Ainsi, pour le législateur français, le terrorisme est caractérisé par un objectif, celui de « troubler
gravement l’ordre public », et par une méthode : l’intimidation et la terreur. De plus, le Code
pénal français ne fait aucune référence à la nature politique de l’infraction. Par comparaison,
certains législateurs invoquent la notion de terrorisme sans même la déterminer, tel est le cas
du législateur allemand (article 129-a du Code pénal allemand), du législateur italien( article
270 bis du Code pénal italien) ou encore espagnol ( article 8 de la loi pénal espagnole). Pour
une lecture des articles de ces codes consulter la base de données juridiques du service de
prévention juridique de l’ONUDC qui compile l’ensemble des législations nationales en matière
de lutte contre le terrorisme :www.unodc.org.
37
De plus, l’article 421-2-6 créé par la loi du 13 novembre 2014 constitue
un grand apport à la liste initiale des infractions terroristes, car il réprime les
nouveaux actes terroristes qui constituent un pôle d’attractivité majeure pour
l’ensemble de la mouvance Djihadiste internationale depuis mars 2011 à cause de
la guerre en Syrie.
38
2° Soit un des actes de terrorisme mentionnés au 2° du même article
421-1, lorsque l'acte préparé consiste en des destructions, dégradations ou
détériorations par substances explosives ou incendiaires devant être réalisées
dans des circonstances de temps ou de lieu susceptibles d'entraîner des atteintes
à l'intégrité physique d'une ou plusieurs personnes ;
b- Le Droit marocain
75
Le Dahir est l’acte par lequel le Roi exerce les pouvoirs qui lui sont expressément réservés par
la Constitution et ce d’après l’article 42 de la Constitution marocaine.
76
Parmi les pouvoirs qui sont dévolus à Sa Majesté le Roi en vertu de la Constitution, il y a la
promulgation de la loi. C’est ainsi que l’article 50 de la Constitution Marocaine énonce que :
«Le Roi promulgue la loi dans les trente jours qui suivent la transmission au gouvernement de
la loi définitivement adoptée».
77
Cet article prévoit que : « Le titre premier du livre III du Code pénal approuvé par le Dahir
n° 1-59-413 du 26 novembre 1962 est complété par le chapitre bis suivant ».
39
2° la contrefaçon ou la falsification des monnaies ou effets de crédit
public, des sceaux de l'Etat et des poinçons, timbres et marques, ou le faux ou la
falsification visés dans les articles 360, 361 et 362 du présent code ;
40
le fait de recevoir ou de tenter de recevoir un entraînement ou une formation
quelle qu’en soit la forme, la nature ou la durée à l’intérieur ou à l’extérieur du
territoire du Royaume du Maroc, en vue de commettre un acte de terrorisme à
l’intérieur ou à l’extérieur du Royaume, indépendamment de la survenance d’un
tel acte ;
Les actes précités sont punis de la réclusion de cinq à quinze ans et d’une
amende de 50.000 à 500.000 dirhams.
Dans le même sens, l'article 218-2 ajoute ce qui suit : «Est puni d'un
emprisonnement de 2 à 6 ans et d'une amende de 10.000 à 200.000 dirhams,
quiconque fait l'apologie d'actes constituant des infractions de terrorisme, par les
discours, cris ou menaces proférés dans les lieux ou les réunions publics ou par
des écrits, des imprimés vendus, distribués ou mis en vente ou exposés dans les
lieux ou réunions publics soit par des affiches exposées au regard du public par
les différents moyens d'information audio-visuels et électroniques».
«Est puni de la même peine, quiconque fait, par l’un des moyens prévus au
premier alinéa du présent article, la propagande, l’apologie ou la promotion des
entités, organisations, bandes ou groupes, terroristes» 79.
78
Introduit dans le Code pénal en verftu de la loi n° 86-14 modifiant et complétant certaines
dispositions du Code pénal et Code de procédure pénale, relative à la lutte contre le terrorisme
publiée par Dahir n°1-15-53 du 20 mai 2015, Bull. Officiel n° 6365 du 1 juin 2015.
79
Ibid.
41
L'article 218-3 dispose que : "Constitue également un acte de terrorisme,
au sens du premier alinéa de l'article 218-1 ci-dessus, le fait d'introduire ou de
mettre dans l'atmosphère, sur le sol, dans le sous-sol ou dans les eaux, y compris
celles de la mer territoriale, une substance qui met en péril la santé de l'homme
ou des animaux ou le milieu naturel".
Enfin, l'article 218-4 prévoit ce qui suit : "Constituent des actes de terrorisme
les infractions ci-après :
De même, l’article 218-5 prévoit que : «Quiconque, par quelque moyen que
ce soit, persuade, incite ou provoque autrui à commettre l’une des infractions
prévues par le présent chapitre, est puni de la réclusion de cinq à quinze ans et
d’une amende de 50.000 à 500.000 dirhams 80 ».
Cette définition des actes terroristes aussi large que vague est « susceptible
d’entraîner des violations de la liberté d’association, au nom des considérations
liées à la nécessité de protéger l’ordre public et la sécurité de l’Etat ».
42
pénal qui présente autant de difficultés techniques et qui pose autant de cas de
consciences que d’autres problèmes criminels à prétention idéologique. Pour
éviter tout amalgame nous allons nous contenter de l’objectivité des actes de
violence dont il est l’objet. Et ce n’est pas par sa finalité, puisque notre étude ne
concerne que la comparaison pénale de point de vue strictement juridique.
2. En droit international
La ligue des États Arabes, dont le Maroc est membre, définit le terrorisme
dans sa Convention pour la lutte contre le terrorisme du 22 avril 1998 à l’alinéa 2
de l’article premier comme étant :« Tout acte de violence ou menace de violence,
82
Jean- BOURGUIRE, «De la terreur jacobine au terrorisme», Esprit, Dossier, « Terrorisme »,
novembre 1984, p. 157-160.
83
Ibrahim ABRACH, in Revue point de vue, en arabe numéro 12-13.
84
L’ex-président Américain George BUCH a dit dans son discours suite aux attentats terroristes
du 11 septembre que ceux qui ne rejoignent pas la lutte contre le terrorisme sont contre les
USA.
43
quels qu'en soient les causes et les buts, commis pour mettre en œuvre un projet
criminel individuel ou collectif et visant à semer la terreur parmi les gens ou à les
effrayer en leur portant atteinte ou en mettant en péril leur vie, leur liberté ou leur
sécurité ou à porter atteinte à l'environnement, à l'un des services publics, aux
biens publics ou privés, ou à les occuper ou à s'en emparer, ou encore à mettre en
danger l'une des ressources nationales ».
44
5. La problématique
Pour la France et presque dans tout les Etas du monde, ce sont les mêmes
raisons qui ont amené les autorités législatives à promulguer des lois pour lutter
contre le terrorisme. Toutefois, l’adoption de ces instruments juridiques n’a pas
permis l’éradication totale du terrorisme même si elle en a réduit l’importance.
A vrai dire, ces lois ont permis aux Etats d’agir dans la légalité, mais c’est grâce à
la lutte sécuritaire basée sur le renseignement et l’information que le phénomène
s’est rétréci que ce soit en France ou au Maroc.
Dans ce cadre, le présent travail vise à vérifier les différences et les similarités
entre les lois française et marocaine en matière de lutte contre le terrorisme, à
travers une comparaison transversale des dispositions qui en sont prévues.
88
Notamment la coopération policière qui s’est intensifiée avec certains pays européens dans le
domaine de lutte contre le terrorisme comme la France et l’Espagne. Dans ce sens, un accord
de coopération policière a été signé entre le ministre de l’intérieur marocain et son homologue
espagnol le 16 novembre 2010 à Séville. Maroc journal, http://www.marocjournal.net/
actualites-maroc/26590.html.
45
en particulier, aux dernières recommandations des instances internationales
dans le domaine de la lutte contre le terrorisme.
6. Plan du sujet
89
En France comme au Maroc ou encore dans d’autres pays d’Europe on ne cesse de dissoudre
des cellules terroristes complotant contre l’ordre public dans le cadre d’entreprises terroristes,
comme la cellule d’Amgala au Sud du Maroc dissoute en 2011 où un arsenal d’arme de guerre
a été trouvé enfoui sous le sable et saisi. Aussi, au Maroc 132 cellules ont été démantelées
depuis 2002 et 2720 personnes ont été interpellées et 276 projets avortés, dont 119 projets
d’attentats à l’explosif, 109 projets d’assassinat, 7 projets d’enlèvements et 41 projets d’attaques
à main armée. Abdelhak Khiame, préfet de police, directeur du Bureau central d’investigations
judiciaires de la DGST, conférence de presse tenue le 23 mars 2015. Aux Etats-Unis on a vécu
les souffrances des habitants de la ville de Boston en 2013 à cause de l’explosion au « Boston
Marathon ». J’avais la chance d’être à cette date à l’Académie nationale du FBI en Virginie car
l’agent spécial James Hughes, conseiller de ma section, a obtenu l’autorisation de nous amené
aux laboratoires du FBI pour voir les indices et les preuves qui ont été collectés de la scène de
crime et analysés dans ces laboratoires. Nous avons vu 20 indices et preuves qui mettent en cause
les personnes arrêtées et prouvent qu’il s’agissait d’un attentat terroriste à vocation islamiste.
46
La deuxième partie traite des dispositions pénales et procédurales relatives
au terrorisme en droits français et marocain suivant une approche transversale
mettant en parallèle les dispositions des deux droits dans le but de relever leurs
convergences et leurs divergences, d’une part, et leur efficacité et leur clarté
d’autre part. Etant donné que la législation française en matière de lutte contre
le terrorisme a connu une évolution importante, contrairement à celle existante
au Maroc, nous estimons que l’exposé de cette évolution sera d’un grand apport
pour le lecteur, marocain surtout, et servira à souligner l’écart séparant l’évolution
législative dans les deux pays et à émettre des suggestions à ce propos.
47
Première partie
48
Comme il a été indiqué précédemment, les Etats se sont vus obligés de
coopérer dans le domaine de la lutte contre le crime international dont les effets
sont transfrontaliers et généraux. François Terré remarque dans ce contexte,
que : « A mesure que les voyages et les communications se sont développés dans le
monde, les problèmes sont devenus de plus en plus complexes, ce qui a provoqué
corrélativement la multiplication de traités et de conventions internationales
d’ampleur et de qualité des plus variables » 90.
Il s'ensuit que les Etats ont convenu d'établir des conventions réprimant
limitativement certains actes commis de manière dangereuse et perpétrés
aveuglement sans distinction des cibles ou des victimes, et qui sont considérés
par plusieurs Etats comme des actes terroristes. La lutte unifiée contre le
terrorisme n’est pas un nouveau chantier ; on en trouve les premières prémisses
dans certains traités d’extradition ou autres textes relatifs à l’extradition. Lors
des conférences internationales pour l’unification du droit pénal, certains Etats
ont tenté plusieurs fois d’établir des textes pour lutter contre le terrorisme.
90
François Terré, Le droit du terrorisme, Flammarion, 1999, p.25.
91
Charif Atlam, coordonnateur régional des services consultatifs du comité international de la
croix rouge en Afrique du Nord et Moyen Orient lors d’un colloque organisé à l’Institut royal de
police à Kenitra sur le thème du droit international humanitaire le premier avril 2014. Toujours
selon Charif Atlam il n’existe pas de définition unique et internationale du terrorisme accepté
par tous les Etats car certains d’entre eux refusent de reconnaître aux groupes de résistance
leur légitimité ou la qualité de combattant.
49
La première conférence tenue à Varsovie du 1er au 5 novembre 1927, n’a pas
abouti à l’institution de véritables règles définissant le terrorisme. Par ailleurs,
elle a condamné « tout emploi intentionnel de tous moyens capables de faire
courir un danger commun ». Ce n’est qu’au cours de la cinquième conférence
tenue à Madrid du 14 au 20 octobre 1934, que les Etats concernés ont arrivé
à énumérer certains actes graves qui devaient être jugés selon les règles de la
compétence territoriale ou de la compétence universelle, et pouvoir donner lieu
à l’extradition 92
.
Dans ce cadre le terme « terreur » a été utilisé pour la première fois dans la
sixième conférence qui a condamné « les attentats ayant crée un danger commun
ou un état de terreur ». En outre, elle permet, en cas de refus d’extradition de
poursuivre les criminels devant une juridiction pénale internationale sauf
jugement par l’Etat requis 93. On remarque l’utilisation du mot terreur impliquant,
si l’on adopte la lecture spéculative, que les attentats dont résulte l’état de terreur,
sont des actes de terrorisme, selon la terminologie utilisée actuellement par les
droits internes français et marocain.
92
Jean-François Prevost, «Les aspects nouveaux du terrorisme international», in annuaire
français de droit international, volume 19, 1973, p. 580.
93
Ibid. p. 581.
94
Cette clause tient son nom de la modification en date du 18 décembre 1855 de la loi belge sur
l’extradition du 1er octobre 1833. Cette révision législative fut la conséquence d’une demande
du gouvernement français relative à l’extradition de certains ressortissants français accusés
d’avoir tenté de faire sauter un train dans lequel se trouvait Napoléon III. Cette clause a été
incluse, par la suite, dans de nombreux traités bilatéraux. (Annales parlementaires, Chambre
des représentants, session du 18 décembre 1855, p. 312.
95
Jean-François Prevost, op. cit., pp. 581-582.
50
contre le terrorisme est primordial. La France a abrité les travaux de la cinquième
conférence de l’unification du droit pénal du 27 au 30 décembre 1931. En outre,
le seul traité qui a réellement eu pour objectif de lutter contre le terrorisme au
niveau de la communauté internationale fut élaboré à l’initiative du gouvernement
français à la suite de l’assassinat à Marseille, le 9 octobre 1934, du roi Alexandre
de l’ex-Yougoslavie 96. Il s’agit de la convention pour la prévention et la répression
du terrorisme du 16 novembre 1937, conclue à Genève sous les auspices de la
Société des Nations. Les rédacteurs de cette convention utilisent expressément
l’expression « activités terroristes » dans son premier article.
96
Jean-François Prevost, op. cit., p. 582.
97
André Huet, Renée Koering, Droit pénal international, presse universitaire de France, 2ème
éd. 2001.
51
régionale qui constitue, bien plus, un appui essentiel à la base légale de la
coopération internationale.
52
Titre I :
53
En matière de coopération internationale, les droits internes ont un impact
plus ou moins négatif, quand il s’agit de la procédure d’application des conventions
internationales. Qu’elles soient multilatérales ou bilatérales, ces conventions
doivent être ratifiées par les États pour pouvoir être incorporées dans leur droit
interne et permettre par la suite, la mise en œuvre de la coopération entre les
parties. La ratification est une procédure obligatoire pour qu’un texte international
soit appliqué par les Etats Parties à une convention. Cette démarche diffère aussi
entre le Maroc et la France, qui font l’objet de notre recherche (Chapitre I). Nous
examinons cette procédure car elle permet de déterminer le degré d’engagement
de chacun des deux Etats vis-à-vis des instruments internationaux de droit
et les éventuels obstacles que la procédure de ratification dresse devant leur
applicabilité.
Cette convention qui a été finalement adoptée en 1937, n’est jamais entrée
en vigueur et c’est ainsi que la communauté internationale a depuis adopté,
par le truchement de l’Assemblée générale et les institutions spécialisées de
l’ONU, 16 conventions et protocoles relatives à des secteurs déterminés de
98
C. Bassiouni, Introduction au droit pénal international, éd. Bruylant, Bruxelles, 2002, p. 169.
Le système d’application directe concerne la sanction internationale.
99
«Le rôle du Comité contre le terrorisme et de sa Direction exécutive dans le cadre des efforts
déployés au niveau international pour lutter contre le terrorisme», Bureau de l’information,
[email protected], www.un.org/fr/sc/ctc/, document non officiel, p. 1.
54
terrorisme, allant du détournement d’avions et de la prise d’otages à l’utilisation
éventuelle d’armes nucléaires par des terroristes. Ces instruments de l’ONU
sont connus sous l’appellation de «conventions sectorielles» (Chapitre II).
• l’application de la règle aut dedere, aut judicare 100 en vertu de laquelle est prévue
l’obligation alternative d’extrader ou poursuivre conformément au principe
d’universalité des poursuites ;
100
Dès la première version du Dictionnaire de l’Académie française de 1694 ce dernier précisait que
rien n’alimente les désordres que l’impunité des crimes, les forts se réjouissent de l’impunité.
La conscience accrue de la nécessité de mettre fin à cette impunité et instaurer l’ordre a
progressivement poussé les Etats à reconsidérer la question et lutter contre cette menace, au
moment où la démocratie est devenue une norme de référence où l’impunité est incompatible
avec la démocratie. De la sorte s’est forgé le principe aut dedere aut judicare obligeant les Etats
à poursuivre ou extrader. Sur le plan étymologique le verbe latin judicare signifie dire le droit
ou juger définitivement et le verbe latin dedere signifie mettre à disposition ou livrer. Marie
FERNANDEZ MORCILLO, Le principe Aut dedere Aut judicare, Mémoire Master II, Faculté
de Droit de GRENOBLE, 2012- 2013.
101
El Azzouzi El Idrissi, op. cit.
55
Chapitre I :
56
Dans le domaine de la coopération internationale les conventions, qu’elles
soient internationales ou régionales ne peuvent être appliquées par les juridictions
des Etats qui l’ont signées qu’après leur ratification par l’autorité compétente. Les
démarches juridiques relatives à la procédure de ratification varient d’un Etat à
l’autre (Section 1). Bien plus, même après ratification, l’application des conventions
internationales ou régionales par les juges demeure confrontée au principe de la
primauté des lois, lui-même sujet à des dispositions limitatives constitutionnelles
comme nous allons voir pour les cas français et marocain (Section 2).
102
Le Maroc a ratifié plus de 24 conventions internationales relatives à la lutte contre le terrorisme
en moins de 4 mois, Hebdomadaire Assahifa, en arabe, n° 153, 12-18 mars 2004. En réalité,
c’est le changement de la politique Américain envers la lutte contre le terrorisme qui a contraint
la plupart des Etats a signé ces conventions relatives à la lutte contre le terrorisme( Martha
Crenshaw, Terrorism, strategies, and Grand Strategies, in Terrorism and Counterterrorism
understanding the new security envirenment, Readings and interpretations, fourth edition.
McGraw-Hill Companies, 2012, p. 490). L’histoire montre que la politique étrangère américaine
ne réagit qu’au choc et il était inévitable que seule une attaque terroriste détruisant et causant
des milliers de victimes civiles sur le sol américain peut apporter un changement fondamental
de cette politique. (Ibid). C’est ainsi qu’après le choc du 11 septembre, l’administration Bush a
déclaré la guerre contre le terrorisme utilisant des moyens considérés auparavant inacceptables
politiquement comme l’intervention militaire terrestre pour bouleverser les régimes qui
soutiennent le terrorisme. Ainsi, les alliances régionales et internationales ont commencé à
supporter cette campagne et une coalition internationale est formée par les Etats-Unis pour
légitimiser la guerre contre le terrorisme et les services de police et de renseignements, de
l’Europe jusqu’à l’Asie, ont été mobilisés pour appréhender les membres d’Al-Qaeda et assainir
leurs sources financières.( Ibid, p. 491). Dans le même cadre, le rapport annuel du Département
57
ratifier plusieurs conventions relatives à la lutte contre ce phénomène. Nous
allons voir la procédure relative à la ratification des conventions internationales
(A), avant de se pencher sur la transposition de ces instruments dans les droits
nationaux français et marocain (B).
d’Etat Américain de 2001 appelle à la pression sur les Etats qui supportent le terrorisme pour
les pousser à changer leurs comportements et requiert de la communauté internationale de
déployer des efforts dans tous les domaines, à savoir la diplomatie, le renseignement, la police
judicaire et le financement, en général, le document appelle à une coopération internationale
sur tous les fronts d’après l’expression suivant « international cooperation on all fronts »
(Ibid). La coopération internationale est toujours mentionnée dans la stratégie des Etats-
Unis visant à lutter contre le terrorisme. Ainsi, en 2002 The national security strategy of the
United States of America (Stratégie nationale de sécurité des Etats-Unis d’Amérique) a été
lancée dans laquelle il est précisé que les Etats-Unis chercheront le support international dans
la lutte contre le terrorisme (Ibid p. 492. On voit la même confirmation dans l’avenant intitulé
(National strategy for combating terrorism (stratégie nationale de lutte contre le terrorisme)
publié en 2003 dans lequel il est précisé que les Etats-Unis ne vont pas attendre jusqu’à ce que
les terroristes actent, au lieu ils vont adopter une stratégie offensive et agressive basée sur la
police judiciaire, le renseignement, la puissance militaire et la coopération internationale pour
bloquer le financement du terrorisme (Ibid). On constate donc que la coopération internationale
était prêchée voire imposée par les Etats-Unis sur la communauté internationale : les Etats-
Unis disent aux autres : agissez avec moi ou bien nous agirons seules.
103
El Azzouzi El Idrissi, op. cit.
104
N. Guyen Ouec Dinh, Droit international public, LGDJ,p. 79.
58
1. La procédure avant la ratification
C’est une matière de droit international qui puise son fondement dans
les différents droits internationaux, dès lors que l’action de cet organe étatique
s’exerce dans le cadre juridique international et les effets juridiques qui en
résultent se répercutent sur cet ordre.
La question donc est de savoir qui est l’organe étatique investi de l’exercice
du droit de négocier les traités et qui en conséquence, peut décider de l’initiative
de conclure les traités.
105
L’État initiateur peut être soit un des deux qui feront partie au futur traité, soit un État qui offre
simplement ses services aux futures puissances contractantes du traité.
106
Le prince qui incarnait l’Etat lequel était investi de la souveraineté exerçait le pouvoir soit
personnellement soit par des mandataires, qu’il nommait pour chaque cas déterminé, le droit de
négocier. Mais lorsque la souveraineté se déplaça de la personne du prince à la nation, ce principe
devint pratiquement inapplicable. Le souverain populaire était incapable d’exercer lui-même sa
souveraineté par ricochet le droit de négocier des traités. Aussi, il a été emmené à confier l’exercice
de ses droits souverains à des représentants qui partagèrent les attributions qu’autrefois, dans le
temps de la monarchie absolue, le prince concentrait en sa personne. Georges NINICOLOPOULUS,
L’acte de ratification et sa place dans la procédure diplomatique de la conclusion des traités,
Thèse soutenue à l’Université de Lyon- Faculté de droit 1942. BOSC Frères M. & L. RIOU.
59
dans une totale liberté juridique et politique.
Nous avons souligné plus haut que les négociations d’un traité nécessitent
la discrétion, ce qui va à l’encontre du contrôle parlementaire qui suppose des
débats et des discussions publiques.
60
l’une ou l’autre partie, ce qui peut conduire à des concessions chaque jour des
négociations.
C’est ainsi que tout contrôle de la part du parlement ne peut être efficace
que si le projet est définitif. Mais les membres du parlement avancent la possibilité
de pouvoir solliciter du gouvernement d’enclencher des négociations et d’en être
informés en vue de pouvoir exercer leur contrôle dans ce sens 109.
61
l’authentification du texte d’un traité, pour exprimer le consentement de l’Etat à
être lié par un traité ou pour accomplir tout acte à l’égard du traité ».
Ainsi, les négociateurs d’un traité doivent détenir les peins pouvoir pour
engager l’Etat. Toutefois, l’article 7 de la Convention de Vienne dispose que les
fonctions de certaines personnes leur confère un titre particulier à représenter
l’Etat, sans avoir à fournir de peins pouvoirs. Il en est ainsi des « chefs d’Etats,
chefs de gouvernements et ministres des affaires étrangères, pour tous les actes
relatifs à la conclusion d’un traité ». Conformément à l’article 52 de la Constitution
française le Président de la République « négocie » les traités, ce qui implique
aussi le pouvoir de les signer 111.
Même pouvoir est prévu pour « les chefs de missions diplomatiques pour
l’adoption du texte d’un traité entre l’Etat accréditant et l’Etat accréditaire »; Cette
compétence est limitée aux accords bilatéraux entre les deux Etats. Il en est de même
pour les « représentants accrédités des Etats à une conférence internationale ou
auprès d’une organisation internationale ou de l’un de ses organes, pour l’adoption
du texte d’un traité dans cette conférence, cette organisation ou cet organe ».
Dans tous les cas, celui chargé de la conclusion du traité est connu des
quatre parties par une notification officielle. Toutefois, seuls les chefs d’Etats,
chefs de gouvernements et ministres des affaires étrangères sont habilités à
conclure n’importe quel traité sans détenir de peins pouvoirs . La conclusion
112
du traité est accomplie lorsque les négociateurs apposent leurs paraphes sur le
document, mais la signature elle-même est distincte si l’autorité politique tient à
marquer la solennité du traité 113.
111
Justine FAURE et Yannick PROST, Relations internationales, Histoire, Questions régionales,
Grands enjeux, Ellipses, 2004, p. 401.
112
Suzanne BASTID, op.cit.
113
EL AZZOUZI El Idrissi, op.cit.
62
Il convient de noter tout d’abord que la ratification porte exclusivement sur le
projet définitif du traité signé par les négociateurs et dont l’objectif est de rendre
applicable et obligatoire ses dispositions pour les signataires.
bonne foi 116. Mais, les Etats peuvent être confrontés à un conflit de traités quand
un traité antérieur organise un domaine traité par un autre postérieur 117. Aucun
problème d’application ne peut être soulevé quand les parties contractantes
sont les mêmes, et ce conformément au principe lex posteriori derogat priori,
impliquant que la volonté actuelle l’emporte sur la volonté ancienne 118.
Par contre, des problèmes surgissent lorsque les parties ne sont pas
les mêmes puisqu’il ne peut être prévu de disposition pour autrui en droit
international, qui engage un Etat sans la condition nécessaire du consentement.
Pour pallier à cette difficulté, des Etats insèrent dans un traité des règles qui
prévoient expressément la supériorité de la nouvelle règle qu’ils adoptent et ainsi
ils règlent le conflit d’incompatibilité 119.
Nous allons exposer dans ce point les systèmes de transposition en droit marocain
(a), et en droit français (b).
114
Ibid.
115
Justine FAURE et Yannick PROST, op. cit. p. 403.
116
Article 2 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, appelée aussi la convention des
conventions.
117
Ibid.
118
Ibid.
119
Ibid.
63
1. La transposition judicaire des conventions internationales
au Maroc
64
transposition en reprenne le contenu pour les rendre applicables dans le droit
interne 123.
Il est admis qu’avant même l’entrée en vigueur du traité un Etat est obligé
de s’abstenir de comportements qui tendent à réduire à néant l’objet du traité.
Une telle obligation peut exister lorsqu’un Etat a signé le traité sous réserve
de modification des dispositions de son droit interne en conflit avec celles du
traité. En effet, quand il y a conflit entre un traité et une loi interne certains Etats
n’acceptent pas dans leurs constitutions la primauté des traités sur le droit interne.
C’est dans cette optique que le juge marocain, lorsque mis devant les
dispositions d’une convention internationale et celles d’une loi nationale, recours
d’une manière générale à l’application des dispositions de la convention 126
.
Dans le cas où le juge marocain est saisi d’une affaire auquel serait applicable
une loi contraire à un traité, il ne pourrait certainement pas déclarer la loi
inconstitutionnelle, étant admis qu’au Maroc le contrôle juridictionnel de la
constitutionalité des lois après leur promulgation n’existe pas comme aux Etats
Unis ou en Allemagne.
Il a été signalé ci-dessus que « le Roi signe et ratifie les traités. Toutefois,
les traités en gageant les finances de l’Etat ne peuvent être ratifiés sans avoir
123
EL AZZOUZI El Idrissi, op.cit.
124
L’article 55 de la Constitution française dispose que : « Les traités ou accords régulièrement
ratifiés ou approuvés ont dès leur publication une autorité supérieure à celle des lois, sous
réserve pour chaque accord ou traité de son application par l’autre partie ».
125
Voir à ce sujet le discours du premier président de la Cour suprême prononcé à l’occasion de
l’audience solennelle d’ouverture de l’année judicaire 2001.
126
En 1972, la chambre administrative de la Cour suprême marocaine a rendu un arrêt dans
lequel il considère que la convention internationale ne peut être appliquée sauf dans le cas
ou la convention a déjà été publiée dans le bulletin officiel marocain. Arrêt de la chambre
administrative publié par le secrétariat d’Etat aux affaires administratives. Edition premier,
p. 365, 1971- 1972.
65
été préalablement approuvés par la loi ». S’agissant de l’application anticipée
des conventions internationales, les juges marocains refusent de recourir à ce
principe dès lors que ces conventions n’ont pas en principe d’existence juridique
dans le droit interne 127.
66
subordonne lui aussi la ratification de certains traités à l’approbation du parlement.
Bien plus, l’alinéa 3 du même article donne la possibilité au Roi de soumettre au
parlement tout traité autre que ceux compris dans l’alinéa 2.
131
Suzanne BASTID, op, cit. p. 43.
132
Le décret du 14 mars 1953 a prévu et organisé cette publication pour les traités, ainsi que pour
d’autres actes établis par une procédure internationale et de nature à affecter les droits et les
obligations des particuliers.
67
14 mars 1953, complété par le décret du 11 avril 1986 133.
133
Décret du 11 avril 1986 modifiant le décret du 14 mars 1953 relatif à la ratification et la publication
des engagements internationaux souscrits par la France.
68
1. Sur le plan constitutionnel
134
On remarque cette réalité surtout dans les affaires des droits de l’homme. Ainsi, la chambre
criminelle de la Cour de cassation française a énoncé le premier juin 1995 que les dispositions
du statut du Tribunal militaire international de Nuremberg annexées à l’Accord de Londres du
8 août 1945 ont été régulièrement intégrées à l’ordre juridique interne ; en effet, aux termes
mêmes de son art. 7, cet accord est entré en vigueur au jour de sa signature ; en outre il a été
promulgué par décret du gouvernement provisoire de la République française, en date du 6 oct.
1945. Bull. crim. n° 202.
135
Le Royaume du Maroc a connu depuis son indépendance l’adoption de cinq textes
constitutionnels en vertu de référendums dans les années 1962, 1970, 1972, 1996 et 2011.
Les textes constitutionnels avant celui de 2011 ne parlent pas de la situation juridique du
«préambule». C’est ainsi que le débat divisait toujours les juristes constitutionnalistes dont
certains arguent que le préambule ne constitue pas une partie de la constitution, alors que d’autres
voient le contraire. La nouvelle Constitution de 2011 a mis un terme à ces controverses.
69
traités contenant ces principes, droits et obligations auront tel ou tel rang dans
l’ordonnancement juridique 136.
ou les Etats du Maghreb arabes très handicapée par rapport aux Etats de l’Union
européenne, dont la France est pionnière, qui sont passés de l’Union Economique
à l’union politique.
136
Mohammed Amine BENABDELLAH, «Les traités en droit marocain», Remald, n° 94, septembre
2010.
137
Voir le dernier paragraphe du préambule de la nouvelle constitution promulguée par Dahir
numéro1-11-91 du 29 juillet 2011. Ensuite, il conviendra de souligner que cette nouvelle
constitution consacre, pour la première fois et de manière expresse, l’égalité du préambule face
aux autres dispositions de la constitution, en énonçant que : « Ce préambule fait partie intégrante
de la présente Constitution ». Notons que la primauté des conventions internationales sur le
droit marocain interne n’est pas absolue. Le préambule apporte des restrictions à ce principe
en énonçant qu’il doit être tenu lieu du cadre des dispositions de la constitution et des lois
marocaines, ainsi que le respect de l’identité nationale immuable. Cette dernière expression
est rédigée de manière très large et pourrait donner lieu à des interprétations contradictoires à
l’esprit du principe de la primauté des conventions internationales. De même, la question qui
se pose est de savoir pourquoi le constituant marocain a opté pour cette solution au lieu de tout
simplement prévoir la primauté des traités dans un article indépendant de la Constitution, à
l’instar du Constituant français, et éviter ainsi toute éventuelle controverse sur cette question.
Nous pensons qu’il aura toujours des controverses dans ce sens tant qu’il n’y a pas un article
indépendant qui accorde la suprématie des traités sur les lois internes, malgré le fait que la
Constitution marocaine dispose que le préambule y fait partie intégrante. L’expression « partie
intégrante » ne détermine pas le rang accordé aux traités en droit interne, elle ne détermine
non plus sa valeur par rapport aux articles. Le constituant marocain aurait du ajouté une autre
expression comme suit : « Ce préambule fait partie intégrante de la présente Constitution et
a la même valeur que ses autres articles », parce qu’il va de soit que le préambule fait partie
intégrante de la Constitution, mais a-t-il la même valeur ou non, et c’est ça la lecture qu’on doit
donner à cette expression.
138
Najib Ba Mohammed, Les libertés publiques, Maroc, Gaetan Morin éditeur, 1996, p. 67.
70
A titre comparatif, il conviendra d’indiquer que le Constituant français
a affirmé la primauté du droit international sur le droit interne expressément
à l’article 55 de la Constitution de 1958, ainsi libellé : « Les traités ou accords
régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité
supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son
application par l’autre partie ».
139
Pour éviter la controverse traditionnelle soulevée au sujet de la valeur constitutionnelle du
préambule, la Constitution marocaine a expressément disposé que le préambule fait partie
intégrante de la constitution. Mais, cet alinéa, en plus de sa situation au préambule, il vient
dans son dernier rang.
71
été ratifiées ou approuvées par l’exécutif et qu’elles sont appliquées par les autres
États signataires.
Le Code de procédure pénale marocain dispose dans son article 713 que :
« Les conventions internationales ont la priorité sur les lois nationales concernant
la coopération judiciaire avec les Etats étrangers. Les dispositions du présent titre
ne reçoivent application qu’en l’absence ou dans le silence des conventions sur les
dispositions de ce titre » 140. De même, l’article premier du Code de la nationalité
marocaine du 6 septembre 1958 141 dispose que : « Les dispositions relatives à la
nationalité marocaine sont fixées par la loi et éventuellement, par les traités ou
accords internationaux ratifiés et publiés. Les dispositions des traités ou accords
internationaux ratifiés et publiés prévalent sur celles de la loi interne ».
Dans le même sens, on peut relever que l’article 68 de la loi relative aux
droits d’auteurs et droits voisins 142
précisent clairement que « Les dispositions
140
Cette disposition a été introduite dans le Code de procédure pénale marocain en vertu du Dahir
numéro 1-02-225 du 3 octobre 2002 portant promulgation de la loi numéro 22-1 formant code de
procédure pénale. Cette modification a été donc adoptée sous l’empire de l’ancienne constitution de
1996 qui ne comportait aucune disposition organisant la situation des conventions internationales
dans le droit marocain interne. L’article 713 du CPP est inclus dans le titre III intitulé : « Des
rapports judiciaires avec les autorités étrangères » ; qui comprend six chapitres traitant des
commissions rogatoires, de la reconnaissance de certaines sentences pénales étrangères, de
l’extradition, de la citation des témoins et de dénonciation officielle. Ainsi, nous pensons par
ricochet que le champ de l’entraide judiciaire demeure limitativement déterminé et limité.
141
Cette loi a été modifiée par la loi n° 62-06 promulguée par Dahir n° 1-07-80 du 23 mars 2007,
BO n° 5514 du 5 avril 2007.
142
Loi n° 2-00 relative aux droits d’auteurs et droits voisins promulguée par Dahir du 15 février
2000, BO du 6 juillet 2000.
72
d’un traité international concernant le droit d’auteur et les droits voisins auquel
le Royaume du Maroc est partie sont applicables aux cas prévus dans la présente
loi ». Et, il est ajouté, que : « En cas de conflit entre les dispositions de la présente
loi et celles d’un traité international auquel le Maroc est partie, les dispositions du
traité international seront applicables ». Ces dispositions sont sectorielles et ne
peuvent s’appliquer que pour les cas entrant dans le champ des lois qui les édictent.
Pour ce qui est du Maroc, depuis les années soixante dix jusqu'à la fin des
années quatre vint dix, la Cour de cassation marocaine était réticente quand à
l’adoption d’une position confirmant la primauté des Conventions internationales
sur le droit interne. L’arrêt numéro 754 du 19 mai 1999 a affirmé que la Convention
des Nations Unies relative au transport des marchandises signée à Hambourg le
31 mars 1978 et à laquelle le Maroc a adhéré le 17 juillet 1978, s’applique depuis le
premier novembre 1992 et qu’à compter de cette date, elle a force de loi à l’échelle
nationale.
143
Crim. 1er décembre 1966.
144
Crim. 26 janvier 1984.
145
Frédéric Desportes et Francis Le Gunehec, Droit pénal général, Economica, Paris, 2006,
p.205.
73
De même, la Cour, dans le cadre d’une affaire de contrainte par corps
soulevée sur la base de l’article 11 du Pacte international des droits civils et
politiques ratifié par le Maroc en 1979, a rendu l’arrêt numéro 426 du 22 mars
2003, toutes chambres réunies, en faveur de l’application de l’article 11 du Pacte
précité 146. Mais en faisant la différence entre deux situations : celle où le débiteur
est solvable et celle où il ne l’est pas. « Mais, attendu que si l’article 11 du pacte des
Nations unies du 16 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques, approuvé
par le Maroc le 18 novembre 1979, dispose que : « Nul ne peut être emprisonné pour
la seule raison qu’il n’est pas en mesure d’exécuter une obligation contractuelle »,
l’arrêt contesté qui a approuvé le jugement en premier ressort fixant la durée de la
contrainte par corps contre le requérant en cas de refus de paiement et ne l’a pas
fixé dans le cas où il ne serait pas en mesure de payer ou celui de son incapacité,
n’est pas en contradiction avec l’article précité ; et, de ce fait, le moyen est sans
fondement » 147.
146
Bensalem Oudija, «La politique pénale au Maroc : réalités et perspectives», Actes des assises
nationales organisées par le Ministère de la Justice, Meknès, les 9,10 et 11 décembre 2004 ,
p. 212, Tome 2, première édition, Publications de l’association de diffusion de l’information
juridique et judiciaire, Rabat. En ce qui concerne l’article 11 du Pacte international relatif aux
droits civils et politiques, il dispose que : « Nul ne peut être emprisonné pour la seule raison
qu’il n’est pas en mesure d’exécuter une obligation contractuelle.
147
Mohammed Amine BENABDELLAH, op. cit. p.16.
74
de ces deux parties, il convient de souligner que la doctrine marocaine disponible
jusqu'à présent est celle parue avant les nouvelles dispositions.
148
Le Maroc à ratifié la Convention de Vienne le 26 septembre 1972. Qui prévoit également dans
l’article 26 que : « Toute convention validée engage les parties qui doivent l’appliquer de bonne
foi. », l’article 27 énonce que : « Les parties ne peuvent prétendre l’application du droit national
pour justifier la non exécution de la convention qu’ils ont ratifiée. ».
149
Abdessadek Rabiaa devient en 1974 Directeur des études législatives au Secrétariat Général du
Gouvernement marocain. Dès 1979, il est membre de la Chambre constitutionnelle et en 1985,
Conseiller juridique de l’Ordre national des médecins.
75
internationale n’a de force obligatoire qu’à l’encontre de l’Etat, obligé de modifier
sa législation interne pour réaliser la conformité avec la convention signée 150.
- Quand le traité est adopté après la loi interne, cela suppose que cette loi soit
abrogée de facto ;
- Quand la loi interne est adoptée après le traité, cela suppose que le législateur
renonce aux dispositions des traités antérieurs, et le juge dans ce cas est tenu
d’appliquer la loi interne 151.
150
Unité didactique 2, « La coopération judiciaire internationale au Maroc. Le cadre normatif
international, Le paysage conventionnel », www.justice.gov.ma. Consulté le 12 décembre
2009.
151
EL AZZOUZI El Idrissi, op.cit.
76
Conclusion du chapitre I
Ainsi et suite à ce qui est dit plus haut, la primauté des traités ou accords
régulièrement ratifiés sur le droit interne français est consacrée par un article
indépendant de la Constitution, contrairement à la Constitution marocaine où la
question est traitée dans le préambule, qui en fait, néanmoins, partie intégrante 152.
Bien plus, L’article 55 de la Constitution de 1958 ne pose qu’une seule réserve,
notamment le fait que chaque accord ou traité soit appliqué par l’autre partie,
c’est le principe de réciprocité.
152
Pour éviter la controverse traditionnelle soulevée au sujet de la valeur constitutionnelle du
préambule, la Constitution marocaine a expressément disposé que le préambule fait partie
intégrante de la constitution. Mais, cet alinéa, en plus de sa situation au préambule, il vient
dans son dernier rang.
77
immuable. Contrairement à la Constitution française, la Constitution marocaine
ne fait aucune référence au principe de réciprocité qui est fondamental dans les
relations entre Etats.
78
Chapitre II :
79
Dans ce chapitre, nous allons traiter de trois Conventions internationales
essentielles à savoir la Convention relative aux infractions et à certains actes
survenant à bord des aéronefs, la Convention pour la répression de la capture
illicite d'aéronefs et la Convention pour la répression d'actes illicites dirigés contre
la sécurité de l'aviation civile.
Le choix de ces trois conventions n’est pas arbitraire, mais commandé par
plusieurs considérations que nous allons citer. D’abord, ces conventions répriment
des actes terroristes ayant une gravité spécifique tenant à la fois à la gravité elle-
même et au lieu de la commission, qui est en général, un moyen de transport
en vol, à bord duquel se trouvent des personnes vulnérables, sans présence des
autorités de prévention et de répression, en l’occurrence les services de police.
L’importance de la menace contre l’aviation civile existait avant les attentats du
11 septembre contre l’Amérique. Une autre raison peut être soulevée en ce qui
concerne le choix de ces conventions, c’est le fait qu’il n’existe pas une convention
relative aux actes de terrorisme perpétrés à l’aide des armes de guerre ou des
petites armes comme celles ayant été utilisées dans les attentats de janvier 2015
à Paris. La convention relative à la prévention et la répression des infractions
contre les personnes jouissant d’une protection internationale, y compris les
agents diplomatiques peut concerner de tels actes, mais il ne concerne que les
personnes jouissant d’une certaine immunité comme son titre l’indique.
80
des 16 instruments internationaux contre le terrorisme en vigueur jusqu'à présent.
Les attentats terroristes contre les Etats-Unis en 2001 ont mis la lutte contre le
terrorisme au centre des priorités des Etats.
Avec l’adoption de la résolution 1373, dans laquelle il est demandé aux Etas
de devenir parties à ces instruments de lutte contre le terrorisme, environ deux
tiers des membres des Nations Unies ont soit ratifié soit accédé à au moins dix
des seize instruments concernés.
154
Mohammed Fakir, Le terrorisme au Maroc entre l’approche politique et juridique, Thèse de
doctorat en droit public et sciences politiques, Faculté des sciences juridiques, économiques et
sociales de Casablanca, Maroc, p.91, année scolaire 2004-2005.
155
Ibid , p. 92.
156
Ibid, p. 93.
157
Le premier acte de détournement d’avion civil a été commis en 1930 par des opposants au
régime gouvernant le Pérou qui se sont emparés d’un avion appartenant à une compagnie
locale dans le but de fuir le pays. Une série de vol d’avions civils survint entre 1947 et 1953 aux
pays de l’Europe de l’Est qui interdisaient à leurs citoyens le contacte avec le monde extérieure,
surtout en Yougoslavie, Pologne, Tchécoslovaquie, Roumanie et Bulgarie.
81
de ces actes dangereux contre les avions civils, l’Organisation de l’aviation civile
internationale s’est vue obligée de prendre les mesures susceptibles de lutter
efficacement contre tous les actes constituant une menace à la sécurité à bord des
aéronefs (section 1), ou en s’emparant de l’appareil en général (section 2).
158
Selon l’article 2 de la Convention de Genève ces infractions englobent :
(1) Les faits intentionnels dirigés contre la vie, l’intégrité corporelle, la santé ou la liberté : a) Des
chefs d’Etats, des personnes exerçant les prérogatives du chef d’Etat de leurs successeurs
héréditaires ou désignés ; b) Des conjoints des personnes ci-dessus énumérées ; c) Des
personnes revêtues de fonctions ou de charges publiques lorsque ledit fait a été commis en
raison des fonctions ou charges que ses personnes exercent.
(2) Le fait intentionnel consistant à détruire ou à endommager des biens publics ou destinés à un
usage public qui appartiennent à une autre Haute Partie contractante ou qui relèvent d’elle.
(3) Le fait intentionnel de nature à mettre en péril des vies humaines par la création d’un danger
commun.
(4) La tentative de commettre les infractions prévues par les dispositions ci-dessus du présent
article.
(5) Le fait de fabriquer, de se procurer, de détenir ou de fournir des armes, munitions, produits
explosifs ou substances nocives en vue de l’exécution, en quelque pays que ce soit, d’une
infraction prévue par le présent article. Cette Convention conçu suite à l’attentat contre
Alexander de Yougoslavie et Louis Barthou, a tenu compte des circonstances de conception
et de perpétration de cet attentat par le membre d’une organisation terroriste internationale
et organisée et a prévu dans l’article 3 les infractions de l’association ou l’entente en vue de
l’accomplissement de tels actes, l’instigation à de tels actes lorsqu’elle a été suivi d’effet, la
participation intentionnelle et toute aide donnée sciemment en vue de l’accomplissement
d’un tel acte.( Julie Alix, op, Cit. p. 136).
82
La Convention relative aux infractions et à certains actes survenant à bord
des aéronefs a été signée à Tokyo le 14 septembre 1963. Elle a été signée par la
France le 11 juillet 1969, entrée en vigueur le 10 décembre 1970 et publiée par
décret numéro 71-151 du 19 février 1971.
Ensuite, l'alinéa 3 du même article énonce que l'aéronef est en état de vol
depuis le moment où la force motrice est employée pour décoller jusqu'au moment
où l'atterrissage a pris fin. Les dispositions de la Convention ne concernent que
les avions civils excluant ainsi de son champ d'application les aéronefs utilisés à
des fins militaires, de douane, ou de police, et ce conformément aux dispositions
de l'alinéa 4 du premier article.
83
De toute les manières, la répression concerne toutes les infractions prévues
dans la loi interne de l'Etat d'immatriculation de l'aéronef. Cela inclut aussi bien
les simples infractions comme le vol, l'injure, les coups et blessures que celles
graves telles l'homicide volontaire ou le viol. A s'en tenir à l'élément de la "terreur"
qui caractérise les crimes terroristes, on peut dire que les infractions citées au
dessus sont ordinaires et non pas des crimes terroristes.
B. Compétence de l’Etat
Toutefois, un aéronef en vol ne peut être gêné par un Etat qui n'est pas l'Etat
d'immatriculation, même s'il est contractant, en vue d'exercer sa compétence
pénale à l'égard d'une infraction commise à bord, sauf dans le cas où cette
infraction a produit effet sur le territoire dudit Etat, a été commise par ou contre
un ressortissant dudit Etat ou une personne y ayant sa résidence permanente, la
sécurité dudit Etat est compromise, l'infraction constitue une violation des règles
ou règlements relatifs au vol ou à la manoeuvre des aéronefs en vigueur dans
ledit Etat et dans le cas où l'exercice de cette compétence est nécessaire pour
84
assurer le respect d'une obligation qui incombe audit Etat en vertu d'un accord
international multilatéral.
Les mesures portées ci-dessus sont prises par le commandant pour garantir
la sécurité de l'aéronef ou de personnes ou de biens à bord, maintenir le bon ordre et
la discipline à bord et remettre ladite personne aux autorités compétentes ou de la
débarquerconformémentauxdispositionsénoncéesdansletitreIIdelaConvention 159.
159
Nous voyons que la convention est devenue obsolète en ce qui concerne le pouvoir de contrainte
ou d’arrestation des personnes dangereuses à bord des aéronefs. La sécurité à bord ne peut être
accomplie par le commandant dont la mission principale est d’assurer la sécurité de la conduite
de l’aéronef, et non pas la prévention et la répression des infractions. Plus grave encore, une
intervention du commandant pour arrêter une personne peut compromettre la conduite
normale de l’aéronef. La preuve de ce que nous venons de dire nous a été fournit par l’incident
du crash de la Germanwings par le copilote qui a saisi la sortie du commandant de la cabine et
a perpétré son acte criminel. Après cet incident, s’il est devenu dangereux pour le commandant
de quitter la cabine, comment il peut faire donc pour appréhender toute personne dangereuse
se trouvant à bord. C’est ainsi que la convention doit être révisée pour inclure des dispositions
prévoyant la création d’un personnel policier naviguant chargé de la sécurité de l’avion et de la
contrainte des personnes dangereuses.
85
prend toutes autres mesures en vue d'assurer la présence de toute personne auteur
présumé d'un acte visé à l'article 11 160, paragraphe 1, ainsi que de toute personne
qui lui a été remise. Cette détention et ces mesures doivent être conformes
à la législation dudit Etat ; elles ne peuvent être maintenues que pendant le
délai nécessaire à l'engagement de poursuites pénales ou d'une procédure
d'extradition.
Cette disposition, nous semble t-il, est génératrice de conflit entre Etats dans
le cas où la loi nationale de l'Etat du lieu de l'infraction prévoit que l'extradition
ne peut être accordée si l'infraction est commise sur son territoire, alors que
l'Etat d'immatriculation requiert l'extradition d'une personne ayant commis une
infraction sur la base de l'article 16 alinéa 1 précité et vice versa.
C'est le cas, par exemple, dans le Code de procédure pénale marocain qui
énonce dans son article 721 alinéa 3 que l'extradition ne peut être accordée si "les
crimes ou délits sont commis sur le territoire du Royaume du Maroc".
160
L’article 11 concerne les infractions de gêne illicite, avec violence ou menace de violence, de
l’exploitation d’un aéronef en vol, la capture illicite, par violence ou menace de violence, d’un
aéronef en vol, l’exercice du contrôle, par violence ou menace de violence, d’un aéronef en vol
et la tentative d’accomplir de tels actes.
161
Nous pensons que l’article 16 alinéa 1 va à l’encontre de l’esprit du principe de la territorialité
de la loi selon lequel l’Etat sur le territoire duquel une infraction est commise est compétent
pour connaître de cette infraction. Les rédacteurs de la convention auraient dû prévoir la
mesure du transfert des personnes condamnées qui permet de transférer, toute personne ayant
commis une infraction dans un Etat et juger définitivement selon la loi de cet Etat, à son pays
d’origine pour purger la peine ou le reste de la peine dont il a fait l’objet dans l’Etat du lieu de
l’infraction.
86
Par ailleurs, la France a introduit dans sa Constitution l’article 88-2
portant sur la reconnaissance des règles relatives au mandat d’arrêt européen.
Dans la majorité des cas, ce mandat remplace les dispositions de la Convention
européenne d’extradition du 27 septembre 1996, dite de « Dublin ». C’est dire
que la procédure ancienne d’extradition dans le cadre de l’Union européenne
est remplacée par un mandat d’arrêt directement transmis d’autorité judiciaire
à autorité judicaire 162. Ici, le principe n’est plus une coopération accordée par
un Etat à un autre Etat, mais une reconnaissance mutuelle de l’exécution directe
d’une décision.
Selon Jean Pradel, le nouvel instrument est plus simple dès lors que la
nécessité pour l’Etat requis de prendre un décret d’extradition disparaît, ce qui
a pour effet de soumettre la matière à la souveraineté de la justice, et non pas à
l’administration 163.
A notre avis, c’est une mesure importante qui, si elle est adoptée au niveau
de la coopération internationale, contribuera efficacement à circonscrire les
mouvements des terroristes et leurs activités.
Il convient de noter que cette Convention est limitée dans sa portée, dès lors
qu’elle laisse certains actes dirigés contre l’aviation civile impunis, en l’occurrence
le détournement d’aéronefs ; la piraterie aérienne qui se révélera difficile à mettre
en mouvement sur la base du seul article 11 de cette Convention qui traite de la
capture illicite d’aéronefs.
162
Note verbale n° 124 /12/ OSC de la Représentation française de la France auprès de l’OSCE,
transmettant la réponse de la France au questionnaire sur le Code de conduite relatif aux
aspects politico-militaires de la sécurité, au titre de l’année 2012. p. 13.
163
Jean Pradel, Le mandat d’arrêt européen : un premier pas vers une révolution copernicienne
dans le droit français de l’extradition, Dalloz 2004, année 180, 1er cahier n° 21/7162, p. 1469.
87
La convention se limite ensuite à rendre obligatoire la restitution du
contrôle de l’appareil à son commandant légitime et à permettre aux passagers de
continuer leur voyage. Nous estimons que c’est pour cette raison que les Nations
Unies ont relevé les lacunes inhérentes à ladite Convention, tout en réfléchissant
à les combler par l’adoption d’un autre instrument réprimant exclusivement l’acte
de la capture illicite d’aéronefs.
Certains lecteurs diront, peut-être que l’objet des deux conventions est le
même, et que nous aurions dû exposer un autre instrument international de lutte
contre le terrorisme. Mais, nous avons choisi cette Convention car, d’une part, elle
est considérée comme une nouvelle version améliorée de la première et, d’autre
part, les lacunes qu’on vient de relever ci-haut, rende notre approche préférable,
car elle assure une certaine continuité dans le cadre du présent chapitre.
164
Ces gouvernements sont désignés comme dépositaires selon l’article 13, alinéa 2 de la Convention
concernée.
88
1. L’acte incriminé
La conjonction "ou" utilisée dans l’article pour énumérer ces faits confirme
cette interprétation. Elle sert aussi à indiquer que les infractions visées par la
Convention se réalisent dès lorsqu'elles sont connexes soit à la violence, soit à la
menace de violence. Ce sont deux circonstances essentielles qui ne doivent pas
être connexes à l'infraction les deux à la fois ; la réalisation de l'une suffit pour
caractériser l'infraction concernée.
89
Mais, une lecture minutieuse de l’article premier alinéa (b) ne va pas
dans le sens avancé par Mankiewics, dès lors qu’il ne comporte aucun terme ou
expression pouvant être interprété comme tel. Si non, que dire des personnes qui
financent l’acte ou présentent les armes aux auteurs sans qu’ils voyagent à bord
de l’aéronef visé ? Les dispositions relatives à la complicité, soit en droit français
soit en droit marocain, considèrent cet exemple un cas de complicité.
90
La lecture minutieuse de cet article donne lieu à la question suivante: Que
dire dans le cas d'un aéronef en vol intérieur où le lieu de décollage est, dans
la plupart des cas, le territoire de l'Etat d'immatriculation ? En général, il s’agit
d’une disposition très restrictive.
Nous estimons que les aéronefs civils utilisés à des fins militaires sont
réputés être un matériel militaire. A titre comparatif, la chambre criminelle de
la Cour suprême française appuie cette déduction, en statuant comme suit : « En
revanche, justifie la mise en accusation du prévenu pour le crime d’entrave à la
circulation de matériel militaire, l’arrêt qui constate que le convoi de chemin
de fer, à la marche duquel il a été fait obstacle, était exclusivement affecté à un
transport de troupes et employé au service de l’armée » 168.
168
Crim. 24 fév.1959, Bulletin criminel n° 127.
91
1. Compétence juridictionnelle
De même, tout Etat Partie prend les mesures nécessaires pour établir sa
compétence aux fins de connaître de toute infraction dont l'auteur présumé se
trouve sur son territoire, s'il ne l'extrade pas vers les Etats visés dans le paragraphe
précédent selon les dispositions de l'article 8.
169
René Mankiewicz, «L’Organisation de l’aviation civile internationale (Capture et détournements
illicites d’aéronefs)», op. cit.p. 477.
92
présumé de l'infraction, a le droit de recourir à sa détention si les circonstances
le justifient. La détention, mesure privative de liberté, n'est pas le seul moyen
susceptible d'assurer la poursuite de la personne suspectée. Concernant l’auteur
présumé, l'Etat contractant doit prendre toutes les mesures pour assurer la
présence de cette personne.
Ces mesures, à notre avis, sont superflues car elles ont leur place dans les
lois internes des Etats, et ne doivent pas être retenues dans cette Convention. Elles
doivent être passées conformément aux lois des Etats qui devraient les prendre,
dès lors que les auteurs de la Convention ne les précisent pas et n’en donnent pas
d’exemples spécifiques à suivre.
2. Assistance judiciaire
93
comprendre l'infraction comme cas d'extradition dans tout traité d'extradition à
conclure entre eux".
Autrement, les Etats contractants qui ne sont liés par aucun traité
d'extradition, peuvent recourir à cette Convention en cas d'une demande de l'un
ou de l'autre Etat concernant un cas d'extradition relatif à une infraction prévue
par la Convention même si l'un de ces Etats la subordonne à l'existence d'un
traité 170.
170
Voir l’alinéa 2 de l’article 8 de la convention pour la répression de la capture illicite
d’aéronefs.
171
Voir l’article 15, alinéa 1, 2 et 3 de la convention.
94
Nous avons choisi de parler de cette Convention, qui concerne aussi les
attentats contre l’aviation civile parce que c’est un instrument international qui
vient pour compléter les règles du droit pénal international instaurées par la
Convention de Tokyo relatives aux infractions et à certains autres actes survenant
à bord des aéronefs et la Convention de La Haye relative à la répression de la
capture illicite d’aéronefs.
Elle est entrée en vigueur en France le 30 juillet 1976 et publiée par décret
numéro 76-923 du 2 octobre 1976. Pour le Maroc, la Convention a été publiée le
premier février 1978 en vertu du Dahir 1-76-264 du 16 février 1977, soit environ
deux ans après la France.
172
Voir point (a) de l’alinéa 1 de l’article premier de la Convention.
173
Voir point (b) de l’alinéa 1 de l’article premier de la Convention.
174
La Convention réprime la complicité de la commission de l’acte ou de la tentative de la
Commission de cet acte.
95
A cet effet, l'article premier dispose que :
96
Un aéronef est considéré comme étant en vol si, l'embarquement terminé,
toutes ses portes extérieures ont été fermées jusqu'au moment où l'une de ces
portes est ouverte en vue du débarquement.
175
Voir alinéa (a) de l’article 2 de la convention.
176
René Mankiewicz, op. cit. p. 858.
97
B. Compétence territoriale
Ainsi, dans les cas d'un acte de violence à l'encontre d'une personne se
trouvant à bord d'un aéronef en vol et de nature à compromettre la sécurité de cet
aéronef 177, d'un acte de sa destruction ou son endommagement le rendant inapte
au vol et compromettant sa sécurité en vol 178, d'un acte de placement sur un aéronef
d'un dispositif ou des substances propres à le détruire ou à l'endommager 179, ou
d'un fait de communication d'une information fausse compromettant la sécurité
d'un aéronef en vol 180, la Convention ne s'applique que si le lieu réel ou prévu du
décollage ou de l'atterrissage de l'aéronef se trouve hors du territoire de l'Etat de
son immatriculation, ou si les infractions précitées sont commises sur le territoire
d'un Etat autre que celui d'immatriculation de l'aéronef.
Nous estimons que ces conditions sont, d’une part, nécessaires car si
lesdites infractions sont commises sur le territoire de l'Etat d'immatriculation,
c'est sa loi interne qui est applicable, et d’autres part, superfétatoires, dès lors que
les Etats considèrent leurs aéronefs compris par leur compétence territoriale.
177
Voir infraction définie par l’alinéa (a) de l’article premier.
178
Voir infraction définie par l’alinéa (b) de l’article premier.
179
Voir infraction définie par l’alinéa (c) de l’article premier.
180
Voir infraction définie par l’alinéa (e) de l’article premier.
181
Alinéa (d) de l’article premier de la convention.
182
Alinéa (5) de l’article quatre de la convention.
98
Ensuite, l'article 5 de la Convention ordonne à tous les Etats contractants de
prendre les mesures nécessaires pour établir leur compétence aux fins de connaître
des infractions prévues par la présente Convention si elles sont commises sur
leurs territoires, à l'encontre ou à bord d'un aéronef immatriculé dans son Etat,
si l’aéronef objet de l'infraction atterrit sur son territoire avec l'auteur présumé
de l'infraction se trouvant encore à bord, et enfin, si l'infraction est commise à
l'encontre ou à bord d'un aéronef donné en location sans équipage à une personne
qui a le siège principal de son exploitation ou, à défaut, sa résidence permanente,
dans ledit Etat.
D’une manière générale, les Conventions aussi bien de 1963 que de 1970
constituaient à l’époque une réaction aux tentatives de détournement visant
à s’emparer d’un aéronef en vol. Les actes de terrorisme visant la destruction
d’aéronefs ont donné lieu à l’élaboration de la Convention de 1971 pour la
répression d’actes illicites dirigés contre la sécurité de l’aviation civile, qui fait
aux Parties l’obligation de réprimer les attaques dirigées contre un aéronef non
seulement en vol mais aussi en service, c’est-à-dire depuis le moment où le
personnel au sol commence à préparer l’aéronef en vue du vol jusqu’à l’expiration
d’un délai de 24 heures suivant l’atterrissage, les actes incriminés étant des
actes de violence dirigés contre les aéronefs, les personnes se trouvant à bord
ou les installations de navigation aérienne pouvant compromettre la sécurité de
l’appareil. La répression doit également s’étendre à la tentative et à la complicité,
sans la restriction figurant dans la Convention de 1970, selon laquelle ces actes
devaient être commis en vol.
99
Conclusion du chapitre II
183
Le processus de formation du droit international reflète ce principe : « la règle ne précède jamais
les comportements criminels, n’anticipe pas sur eux, ne se préoccupe guère de la coexistence
des différents instruments juridiques en vigueur. Elle se borne à condamner le terrorisme et
l’élaboration des conventions est rythmée par la propagation de ce dernier ». Cette règle est
conforme à la logique juridique des choses et les expériences en prouvent la véracité. L’exemple
de l’assassinat de Louis Barthou et du roi de Yougoslavie à Marseille était la cause directe du
premier mouvement conventionnel lancé par la Société des Nations et aboutira à la conclusion
des deux conventions de Genève de 1937. Henry Labayle, «Droit international et lutte contre le
terrorisme», Annuaire français de droit international, volume 32, 1986, p. 108.
184
Ibid, p. 110.
100
Conclusion du titre I
Et comme nous l’avons exposé plus haut, c’est au nom de l’efficacité que la
plupart des conventions qu’on a vues établissent une répression internationale
de certaines infractions, en recourant à une technique législative caractéristique,
celle de la fragmentation, dictée par des besoins ponctuels. Mais, l’efficacité du
dispositif reste relative se contentant d’édicter des normes de conduite, et on peut
aller jusqu'à parler d’un droit de « nécessité » dont l’ONU est à l’origine et qui
se caractérise par son application sélective, « à la carte » par les Etats, dans une
sorte « taylorisme du terrorisme » 185.
185
Expression du Ministre français Dominique De Villepin.
186
De Visscher (C), Théories et réalités en droit international public, Pedone, Paris, 1970, p.142.
101
Il convient de souligner donc que l’ONU, n’a pas examiné le terrorisme
directement en adoptant une convention dédiée exclusivement à la lutte contre
le phénomène en lui apportant une définition internationale claire. Au lieu de
ça, l’ONU n’a fait qu’aborder le problème sous un angle restreint en examinant
séparément diverses manifestations terroristes ; de là la floraison de textes
conventionnels visant certaines particularismes du terrorisme international,
situation qui satisfait la susceptibilité des Etats en leur permettant de ne porter le
discrédit que sur un type bien précis d’infractions sans pour autant les engager à
se déterminer sur le problème dans son entier.
102
Titre II :
103
Nous avons choisi d'exposer, dans ce titre, certains instruments juridiques
européens contre le terrorisme parce que la réflexion concernant la lutte juridique
contre ce phénomène en Europe remonte à l'année 1977. En date du 27 janvier
1977, les Etats membres du Conseil de l'Europe, soucieux de réaliser une union
plus étroite entre eux, ont signé la Convention européenne pour la répression du
terrorisme.
L’introduction du droit européen dans cette étude n’est pas sans importance,
mais dictée par le fait que le droit européen est devenu une source importante dans
la détermination des incriminations et des sanctions en droit français 187. C’est
une obligation qui a été imposée par « le pilier pénal » du Traité de Maastricht
dont le titre 4 a pour objet d’assurer « la prévention de la criminalité organisée ou
autre, et la lutte contre ce phénomène, notamment le terrorisme, la traite d’êtres
humains et les crimes contre les enfants, le trafic de drogues, le trafic d’armes, la
corruption et la fraude» 188.
Dans le même cadre, l’article 31(e) du traité dispose que les Etats membres
doivent « adopter progressivement des mesures instaurant des règles minimales
relatives aux éléments constitutifs des infractions pénales et aux sanctions
applicables dans les domaines de criminalité organisée, du terrorisme et du
trafic de drogue, et ce en vue d’assurer une coopération en commun en matière
pénale».
Bien plus, l’Europe, étant une grande puissance au monde, s’est trouvée
confrontée à de multiples attentats terroristes, et à devoir payer un grand prix pour
187
Frédéric Desportes et Francis Le Gunehec, Droit pénal général, 3e éd., Economica, Paris 2006,
p.196.
188
Article 29 du traité publié dans le Code de droit pénal de l’Union européenne de Henry
LABAYLE et Anne WEYEMBERGH, Série Codes en poches, Bruylant, Bruxelles, 2005, p.10.
104
la lutte antiterroriste. Les pays européens ont été la scène de plusieurs attentats
terroristes qui ont atteint 757 actions terroristes pendant la décennie de 1968 à
1978, dont plus que la moitié sont perpétrés dans quatre pays, en l’occurrence la
France, l’Italie, la Grande Bretagne et la République fédérale d’Allemagne 189.
En ce qui concerne la France, elle a été visée par une série successive d’actes
terroristes internes et internationaux, lesquels se sont multipliés dans les années
quatre vingt. Cela explique pourquoi la France s’est dotée en 1986 du premier
dispositif juridique portant sur la lutte contre le terrorisme 190. Nous citons cette
réalité dans cette présentation introductive, pour confirmer que la réflexion à la
lutte contre le terrorisme était en premier lieu un atelier entamé par les Etats du
Conseil de l’Europe.
189
Luigi Bonanate, Le terrorisme international, Casterman, 1994, p.13. Les actions terroristes
ayant trait à un conflit intérieur comme en Irlande du Nord, sont exclues du chiffre mentionné
en haut.
190
Pierre MAZEUD, «La lutte contre le terrorisme dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel»,
p. 1, Legifrance.gouv.fr.
191
Aomar BAGHZOUZ, «Le rapprochement des dispositifs européen et maghrébin en matière
sécuritaire et de gestion des flux migratoires : coopération ou sous- traitance ?», Rémald,
collection Thèmes actuels, 2012, n° 81, p.104.
192
Ibid. p. 104.
105
Cet impact de l’Europe sur le Maroc était accentué, du moins dans sa forme
sécuritaire après les attentats du 11 septembre 2001 contre les Etats-Unis. Ces
événements ont amené le Continent européen à solliciter l’assistance du Maroc
pour former une zone de sécurité 193. Notons ensuite que le Maroc entretient une
coopération bilatérale riche caractérisée par la signature de 36 conventions avec
14 pays européens dont 7 avec la France 194.
Eu égard aux indications mentionnées plus haut nous allons voir dans ce titre
certains instruments juridiques européens relatifs à la lutte contre le terrorisme
(Chapitre I) ainsi que la convention arabe sur le terrorisme et la stratégie de lutte
contre ce phénomène (chapitre II).
193
Ibid. p.98.
194
Mohamed JAOUHAR, «La lutte contre le crime organisé et la question de la coopération
internationale verticale et horizontale», Rémald, collection Thèmes actuels, 2012, n° 81,
p.137.
106
Chapitre I :
107
Si les économistes prônent les avantages de la mondialisation économique,
les juristes devraient, quant à eux, considérer la dangerosité de la mondialisation
du crime 195. L’évolution du crime international et la diversité des systèmes
juridiques des Etats compliquent le travail des enquêteurs et des magistrats 196.
Cette situation bénéficie amplement aux criminels qui l’exploitent pour commettre
leurs crimes sans être appréhendés, surtout en l’absence de coopération judiciaire
ou policière. D’où l’importance de promouvoir l’élaboration de conventions
régionales.
195
Alberto Perduca et Patrick Ramael, Le crime internationale et la justice, Flammarion, France,
1998, p. 15.
196
Ibid.
197
La décision et la décision cadre sont de nouveaux instruments créés par le Traité sur l’Union
européenne dans son titre 4 relatif à la coopération policière et judiciaire en matière pénale
et qui ont remplacé l’instrument intitulé « action commune » depuis l’entrée en vigueur du
traité d’Amestrdam. La décision cadre est utilisée pour rapprocher les dispositions législatives
et réglementaires des Etats membres. Proposée sur l’initiative de la Commission européenne
ou d’un Etat membre, elle doit être adoptée à l’unanimité. Elle lie les Etats membres quant
au résultat à atteindre et laisse les instances nationales décider de la forme et des moyens
pour ce faire. La décision concerne tout autre objectif que le rapprochement des dispositions
législatives et réglementaires des Etats membres. Glossaire interactif des termes de l’espace de
liberté, de sécurité et de justice. http://www.eu-logos.org. Dans le même cadre, une décision
cadre ne peut édicter elle-même des sanctions pénales, elle peut obliger les Etats membres
d’en prévoir pour réprimer tel ou tel comportement. Elle peut aussi déterminer le domaine
de la répression en précisant les conditions d’incrimination du complice ou des personnes
morales ou le niveau voulu des peines. Plusieurs décisions cadres ont donné lieu à l’adoption
des dispositions légales créant ou modifiant des incriminations ou augmentant la répression,
par exemple la loi n° 2005-750 du 4 juillet 2005 relative à diverses dispositions d’adaptation
au droit communautaire dans le domaine de la justice : v.Frédéric Desportes et Francis Le
Gunehec, Droit pénal général, op. cit., p.199.
108
Nous avons opté pour ces instruments car, d’une part, ils concernent tous
la lutte contre le terrorisme, et d’autre part, à l’exception de la Convention du 27
janvier 1977, ils ont tous été adoptés après les attentats du 11 septembre, dans le
cadre de la guerre internationale contre le terrorisme, menée par les Etats-Unis
et l’Europe. Concrètement, ces actes terroristes ont assuré au traité de Maastricht
sur l’Union européenne la continuité de son rôle pénal et judiciaire, resté ineffectif
depuis la signature du traité le 2 février 1992.
Cette Convention est entrée en vigueur le 4 août 1978, soit trois mois après
la date du dépôt auprès du Secrétaire général du Conseil de l'Europe du troisième
instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation, conformément à
l'article 11, paragraphe 1 et 2. La France a signé la Convention européenne pour la
198
Alberto P. et Patrick R. op. cit. p.33.
199
Jean- François Gayraud illustre bien cette tendance terrifiante des terroristes en faisant la
différence entre le crime organisé et le terrorisme. Il argue que visant le pouvoir ou le triomphe
d’une idée, le terrorisme recourt aux moyens de destruction du système qu’il prend comme
cible et s’affirme ainsi comme extérieur à lui. La dangerosité des entités terroristes réside dans
le fait qu’elles naissent et croissent dans le secret, et leur genèse est faite dans la discrétion.
Mais, cette discrétion n’est qu’une étape entre deux émersions (attentats, revendications,
doctrine) pour un groupe terroriste. Donc, les terroristes doivent pour exister apparaitre de
temps à autre parce que leur sort est fatalement répercutant et leur justification ultime repose
peu ou prou sur la reconnaissance publique, que son mode soit terrifiant ou non. A un certain
moment, les terroristes doivent se montrer dans une forme « éruptive » et terrible : Jean. F. Le
Monde des mafias, Géopolitique du crime organisé, Odile Jacob, Paris, 2008, p. 39.
109
répression du terrorisme, faite à Strasbourg le 27 janvier 1977. La loi ordinaire n°
87-542 du 16 juillet 1987 a autorisé sa ratification.
A. Considérations générales
200
Rapport explicatif de la convention européenne pour la répression du terrorisme sur http://
conventions.coe.int
201
Ibid
110
Il s’ensuit que doivent être protégés non seulement les droits des personnes
accusées ou condamnées du chef d’infractions terroristes, mais aussi ceux des
personnes susceptibles de se trouver victimes de tels actes 202. Du fait que ces
crimes sont caractérisés par leur nature et leurs ramifications transnationales,
l’arrestation de leurs auteurs pourrait être opérée sur le territoire d’un autre Etat
que celui où le crime a été commis. En raison de ce fait, l’extradition est une
mesure très efficace pour lutter contre le terrorisme.
B. L’extradition
202
Voir l’article 17 de la convention européenne des droits de l’homme.
203
Jean –François (G) et David Sénat, Le terrorisme, Que sais – je ?, Puf, Paris, 2006, p. 87.
204
Alberto P. et Patrick R. op. cit. p.33. Il n’est pas sans intérêt de voir dans cette note une petite
vue sur l’évolution de la question d’extradition qui, jusqu’à la fin du 19ème siècle, quand la carte
de l’Europe est retracée à la suite du succès des premières luttes de libération nationale, « la
règle juridique fondamentale est celle du droit d’asile, qui interdit l’extradition en cas de crime
ou de délit à caractère politique. Ce principe était considéré comme un instrument de défense
des minorités confrontées à des régimes qui ne brillaient pas toujours par leur attachement
aux valeurs démocratiques. Un tel principe avait été introduit pour la première fois dans la
Constitution de la Belgique, un Etat né en 1830. Ainsi un délit considéré comme ayant été sous-
tendu par des motivations politiques ne pouvait-il valoir à son auteur d’extradition automatique.
La règle de l’asile politique se diffuse très vite au sein de la communauté internationale, non sans
donner lieu à de multiples controverses en même temps qu’à de graves difficultés diplomatiques.
C’est encore la Belgique qui, la première en 1856 va limiter le principe de non-extradition. A la
suite d’un bras de fer avec la France au sujet du cas de Celestin et Jules Jacquin, qui ont tenté
de tuer l’empereur Napoléon III, la Belgique accepte de faire une entorse au principe du droit
d’asile en cas d’attentat contre la personne d’un chef d’Etat ou d’un membre de sa famille.
Cette décision du gouvernement belge, plus connue sous le nom de « clause belge » adoptée
le 22 mars 1856 a donc restreint le droit d’asile en matière de délit politique, alors appliqué
dans toute l’Europe et constituait au sein de la communauté internationale le grand antécédent
111
convention d’extradition de 1957, qui constitue le traité d’extradition servant de
base juridique.
Cet article donne aux Etats la possibilité d’élargir la liste de ces infractions
de manière à obtenir l’extradition systématique. En empruntant l’avis de Fraysse
Druesne on peut dire que « si toutefois la liste dressée par l’article premier s’avérait
incomplète, on voit mal comment les dispositions de l’article 2 pourraient ne pas
suffire à la compléter puisque toute violence grave de nature à compromettre
112
directement ou même indirectement la vie, l’intégrité corporelle ou la liberté des
personnes est susceptible de tomber sous le régime du droit commun quel que
soit le but poursuivi par son auteur. Et ce, du seul fait de l’appréciation d’un Etat
d’ouvrir toute grande la porte du subjectif et de l’aléatoire » 210.
113
La disposition pourrait envisager aussi les autres cas dans lesquels l’Etat requis
ne sera pas tenu d’accorder l’extradition 214.
214
Ibid.
215
Ibid. Dans le même sens, Tulkens conçoit l’entraide judiciaire essentiellement comme un
complément de l’extradition, tout en faisant la différence entre l’extradition complément
direct lorsque la procédure est effectuée et complément indirect lorsque l’Etat requis refuse
l’extradition. Françoise Tulkens, op. cit., p. 235. Aussi, le préambule de la convention européenne
d’entraide judiciaire du 20 avril 1959 corrobore cette idée en énonçant que « considérant que
l’entraide judiciaire est une matière connexe à celle de l’extradition qui a déjà fait l’objet d’une
convention en date du 13 décembre 1957 ». Voir le préambule de la convention européenne
d’entraide judiciaire du 20 avril 1959.
114
les Etats membres d’accorder l’extradition si « l’Etat requis a des raisons sérieuses
de croire que la demande d’extradition motivée par une infraction visée à l’article
1ou 2 a été présentée aux fins de poursuivre ou de punir une personne pour des
considérations de race, de religion, de nationalité, ou d’opinions politiques, ou
que la situation de cette personne risque d’être aggravée pour l’une ou l’autre de
ces causes ».
Julie Alix ne tient pas le même avis. Pour cet auteur, la dépolitisation de
l’infraction terroriste est une source « d’intensification répressive », apparue en
droit interne afin d’interdire que la peine de mort ne soit pas prononcée contre des
auteurs de crimes politiques, elle s’est ensuite confirmée en droit extraditionnel,
en vue d’interdire l’application aux auteurs d’infractions terroristes les avantages
des délinquants politiques 218.
A notre avis, dans les deux cas, il convient de faire la différence entre
l’expression « infraction politique », citée dans l’article 1 de la convention et
l’autre « considérations d’opinions politiques » mentionnée dans l’article 5. Dans
l’article premier, il s’agit du cas où une infraction politique est effectivement
commise et qu’une demande d’extradition en est formulée à son sujet.
216
Yves Mayaud, Le terrorisme, Dalloz, Paris, 1997, p.116.
217
Ibid.
218
Julie Alix, op.cit., p. 387.
115
infraction politique n’est commise, et l’Etat requérant souhaite abusivement
punir une personne qui a exprimé une opinion contre le gouvernement ou le
régime politique en place.
Ainsi, dans l’un et l’autre cas, aucune mesure de souplesse ne doit être
déduite des dispositions de l’article 5, dès lors qu’il renvoie à « des considérations
politiques » et non pas à des « infractions politiques », comme c’est le cas dans
l’article 1. La dépolitisation est toujours déniée aux infractions terroristes prévues
par la convention, et constitue une source d’aggravation répressive, comme le
retient Julie Alix.
219
Conseil de l’Europe, Bureau des traités sur http://conventions. coe.int
220
Ibid.
116
Même avec le raisonnement que nous avons exposé en haut, le problème
demeure toujours posé, et seule une définition précise et unifiée de l'infraction
politique peut répondre à la question suivante : faut-il considérer une infraction
motivée par des considérations d’opinions politiques ou dont le mobile est politique
comme une infraction politique ? 221 L’on se demande aussi si le motif politique
suffit pour considérer les infractions terroristes comme infractions politiques ?
221
Avant l’apparition du terme « terrorisme » dans le vocabulaire juridique, on se référait à
l’expression « infraction politique » pour determiner le mobile du criminel et qualifier son acte
comme relevant du droit commun. Isabelle Sommier, Le terrorisme, Flammarion, 2000, p.100.
Mais, la définition du crime politique revêt un caractère confus et imprécis à tel point qu’il est
difficile de le différencier du crime normal. Le 6ème congrès international pour l’unification
des lois pénales tenu à Copenhague en 1935 définit le crime politique comme un crime qui vise
l’organisation de l’Etat. Il est aussi définit comme un crime dont le mobile est politique ou qui
vise la réalisation d’un but politique. D’autres auteurs notamment Fellah El Amouch, disent
que tout crime perpétré contre l’Etat est un crime politique dès lors qu’il porte atteinte à sa
sécurité intérieure ou extérieure.
222
Voir le rapport explicatif de la convention européenne pour la répression du terrorisme sur le
site mentionné plus haut.
223
Charles Vallée, «La Convention européenne pour la répression du terrorisme», Annuaire
français de droit international, volume 22, 1976, p. 763.
224
Ibid.
225
Françoise Tulkens, «Analyse critique de la convention européenne pour la répression du
terrorisme», in : Déviance et société, 1979- vol. 3 – N°3, p. 232.
117
raison les effets juridiques de l’examen des éléments constitutifs de l’infraction,
en l’occurrence le caractère nécessairement politique de l’infraction si celle-ci
vise l’ordre politique, élément matériel, et si elle est motivée par une intention
politique, élément moral.
En définitif, il ressort de ce qui est indiqué plus haut que la convention présente
un flou juridique dû à l’absence de définition du terrorisme, dès lors que le texte ne
cherche pas à créer une nouvelle incrimination mais implique au contraire que les
comportements visés soient déjà incriminés. De même, la procédure d’extradition
est caractérisée par son inadaptation aux conditions d’efficacité de la répression
en matière de terrorisme puisque les demandes d’extradition sont échangées
administrativement de gouvernement à gouvernement, rendant le processus long
et complexe. Ce constat a rendu nécessaire l’adoption au sein de l’Union européenne
du mandat d’arrêt européen qui remplace la procédure d’extradition à partir du 1er
janvier 2004 227.
226
Jean-François Lachaume, Annuaire français de droit international, année 1979, volume25, p.860.
Dans cet arrêt, Klaus Croissant, avocat allemand des membres de Bader, refugié en France, fait
recours devant le Conseil d’Etat, pour excès de pouvoir, contre le décret ordonnant son extradition
vers l’Allemagne invoquant à l’appui de sa demande que l’article5 alinéa 2 de la loi du 10 mars
1927 relative à la procédure d’extradition, interdit toute extradition requise pour un but politique.
227
Jean –François (G) et David Sénat, op.cit., p. 89. La décision-cadre du Conseil du 13 juin
2002 relative au mandat d’arrêt européen modifie considérablement les règles applicables aux
procédures classiques d’extradition. Son importance réside dans la rapidité des procédures de
remise et amélioration de la coopération pénale entre Etats. Le premier considérant du texte de
la décision-cadre énonce, en plus de la suppression de la procédure formelle d’extradition entre
Etats membres, qu’il convient « d’accélérer les procédures d’extradition relatives aux personnes
soupçonnées d’avoir commis une infraction ». Cet accélération se fait notamment par la «
judiciarisation » de la procédure de remise, ce qui revient à dire, selon l’expression utilisée par
M. Massé qu’elle est devenue purement judiciaire en mettant hors circuit des ambassades et des
gouvernements (Massé M. , La décision-cadre, in Cartier M. E. ( dir), le mandat d’arrêt européen,
Collection Droit de l’Union européenne, Bruylant, Bruxelle, 2005, p. 49). Ainsi, selon l’article 6 de
la décision-cadre les expressions « Etat requérant » et « Etat requis » sont remplacées par celles «
d’autorité judiciaire d’émission » et « d’autorité judiciaire d’exécution ». Il ne s’agit donc pas d’une
coopération entre Etats, mais de l’exécution directe d’une décision judiciaire émanant d’un Etat
membre légale dans l’ensemble de l’Union européenne sans intervention du pouvoir politique.
L’importante nouveauté du mandat d’arrêt européen réside dans les dispositions de l’article17 de
la décision-cadre qui imposent des délais fixes pour la prise d’une décision de remise. Ainsi, s’il ya
consentement de remise de la personne soupçonnée l’exécution doit intervenir dans un délai de
dix jours, et dans le cas de non consentement la décision doit être prise dans les soixante jours qui
suivent l’arrestation et quatre vint dix jours s’il ya circonstances exceptionnelles ( voir décision-
cadre du 13 juin 2002 relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre Etats
membres, Journal officiel des communautés européennes, n° L 190 du 18 juillet 2002, p. 1 et s.
118
Tableau illustrant les Etats liés par la convention
Signature Ratification Entrée en vigueur Renv. R. D. A. T. C. O.
Albanie 4/4/2000 21/9/2000 22/12/2000
Allemagne 27/1/1977 3/5/1978 4/8/1978 X X
Andorre 8/11/2001
Arménie 8/11/2001 23/3/2004 24/6/2004
Autriche 27/1/1977 11/8/1977 4/8/1978
Azerbaïdjan 7/11/2001 11/2/2004 12/5/2004 X X
Belgique 27/1/1977 31/10/1985 1/2/1986 X X
Bosnie- 17/3/2003 3/10/2003 4/1/2004
Herzégovine
Bulgarie 11/9/1997 17/2/1998 18/5/1998 X
Chypre 27/1/1977 26/2/1979 27/5/1979 X X
Croatie 7/11/2001 15/1/2003 16/4/2003 X
Danemark 27/1/1977 27/6/1978 28/9/1978 X X
Espagne 27/4/1978 20/5/1980 21/8/1980
Estonie 3/5/1996 27/3/1997 28/6/1997 X
Finlande 16/11/1989 9/2/1990 10/5/1990 X
France 27/1/1977 21/9/1987 22/12/1987 X X X
Géorgie 11/5/2000 14/12/2000 15/3/2001 X
Grèce 27/1/1977 4/8/1988 5/11/1988 X
Hongrie 3/5/1996 6/5/1997 7/8/1997 X
Irlande 24/2/1986 21/2/1989 22/5/1989
Islande 27/1/1977 11/7/1980 12/10/1980 X X
Italie 27/1/1977 28/2/1986 1/6/1986 X
Lettonie 8/9/1998 20/4/1999 21/7/1999
L'ex-République
yougoslave de 8/11/2001 29/11/2004 1/3/2005 X
Macédoine
Liechtenstein 22/1/1979 13/6/1979 14/9/1979
Lituanie 7/6/1996 7/2/1997 8/5/1997
Luxembourg 27/1/1977 11/9/1981 12/12/1981
Malte 5/11/1986 19/3/1996 20/6/1996 X
Moldova 4/5/1998 23/9/1999 24/12/1999
Monaco 18/9/2007 18/9/2007 1/1/2008 X
Monténégro 15/5/2003 15/5/2003 6/6/2006 56 X
Norvège 27/1/1977 10/1/1980 11/4/1980 X
Pays-Bas 27/1/1977 18/4/1985 19/7/1985 X X
Pologne 13/9/1995 30/1/1996 1/5/1996
Portugal 27/1/1977 14/12/1981 15/3/1982 X
République 13/2/1992 15/4/1992 1/1/1993 17
tchèque
Roumanie 30/6/1995 2/5/1997 3/8/1997
Royaume-Uni 27/1/1977 24/7/1978 25/10/1978 X
Russie 7/5/1999 4/11/2000 5/2/2001 X
Saint-Marin 8/11/2001 17/4/2002 18/7/2002 X
Serbie 15/5/2003 15/5/2003 16/8/2003 56 X
Slovaquie 13/2/1992 15/4/1992 1/1/1993 17
Slovénie 28/3/2000 29/11/2000 1/3/2001
Suède 27/1/1977 15/9/1977 4/8/1978 X
Suisse 27/1/1977 19/5/1983 20/8/1983 X
Turquie 27/1/1977 19/5/1981 20/8/1981
Ukraine 8/6/2000 13/3/2002 14/6/2002
Nombre total de signatures non suivies de ratifications : 1
Nombre total de ratifications/adhésions : 46
Source : Bureau des traités sur http://conventions.coe.int
119
Section 2. Décision-cadre du 13 juin 2002 relative à la lutte
contre le terrorisme
120
La décision-cadre répond aux principes et valeurs universels de dignité
humaine, de liberté, d'égalité et de solidarité et du respect des droits de l'homme
et des libertés fondamentales auxquels le terrorisme constitue l'une des plus
sérieuses violations en tant que menace pour la démocratie, le libre exercice des
droits de l'homme et le développement économique et social.
121
En outre, l’utilisation du verbe « pouvoir » va à l’encontre de la précision
et la clarté qu’un texte juridique doit revêtir à moins que la volonté du législateur
en décide autrement en favorisant les raisons de sécurité sur celles de liberté.
Il s’ensuit que la formule « peuvent porter gravement atteinte à un pays ou une
organisation internationale » est ouverte sur plusieurs interprétations 235. A
notre avis, il est difficile pour le juge de faire la distinction entre un acte qui peut
porter gravement atteinte et un autre qui ne le peut pas. Cela peut engendrer des
atteintes aux droits des personnes et se répercuter négativement sur les droits de
l’homme. Il ya lieu de faire une distinction catégorique ; soit l’acte porte atteinte
grave ou ne le porte pas. Il est suggéré à ce que le verbe « pouvoir » soit remplacé
par le verbe « devoir ».
Cette façon vague de définir les choses exprime la volonté des auteurs des
discours politiques qui évoquent certaines menaces, tant dans les législations
nationales que dans les politiques communes au niveau européen, pour justifier des
dispositions répressives « toujours renforcées dont l’objectif est paradoxalement
de protéger les droits et libertés de l’ensemble des citoyens honnêtes menacés par
la déstabilisation des institutions garantes de ces mêmes libertés » 236.
235
Ibid.
236
Vinvent THIBAUD, op. cit., p.1.
237
Ibid. p. 74.
238
Emilie ROBERT , op. cit., p. 74.
122
fonder avec d’autres syndicats et de s’affilier à des syndicats pour la défense de ses
intérêts, et le droit de manifester qui s’y rattache ».
123
comme infractions terroristes les actes visés (…), qui, par leur nature ou leur
contexte, peuvent porter gravement atteinte à un pays ou à une organisation
internationale lorsque l’auteur les commet dans le but de :
243
Beernaert Marie-Aude, «La décision-cadre du 13 juin 2002 relative à la lutte contre le
terrorisme », Revue internationale de droit pénal, 2006/1 Vol. 77, p. 279.
244
Ibid.
245
La grève par exemple est un moyen de contrainte exercé contre un pouvoir public ou une
organisation internationale mais il ne constitue pas une atteinte grave.
124
Il est clair aussi que l’infraction terroriste est politique au regard de la
décision-cadre dès lors que les deuxième et troisième points de l’article premier
renvoient respectivement aux « pouvoirs publics » et « structures fondamentales
politiques ». Les termes utilisés sont vagues et peuvent avoir différentes
interprétations, tout en risquant de qualifier de terroristes des actes perpétrés à
« des fins de revendications sociales, environnementales ou autres 246.
246
Emilie ROBERT, op. cit. p. 70.
247
Beernaert Marie-Aude, op. cit. p.279.
125
h) la perturbation ou l’interruption de l’approvisionnement en eau, en électricité
ou toute autre ressource naturelle fondamentale ayant pour effet de mettre en
danger des vies humaines ;
i) la menace de réaliser l’un des comportements énumérés aux points a) à h).
C’est un ensemble d’actes déjà incriminés dans les lois nationales des Etats
membres et qui a fait aussi l’objet de certains critiques de la part de certaines
organisations non gouvernementales comme étant «trop excessive, ouverte
sur des interprétations variables et de nature à donner lieu à des qualifications
inexactes et débordements inacceptables» 249.
248
Décision-cadre, 2008/919/JAI du Conseil du 28 nov. 2008, Emilie ROBET, op. cit. p. 72.
249
Ibid.
126
Le terme "association structurée" désigne une association qui ne s'est pas
constituée au hasard pour commettre immédiatement une infraction et qui n'a pas
nécessairement de rôles formellement définis pour ses membres, de continuité
dans sa composition ou de structure élaborée 250.
D’après les éclaircissements cités plus haut, on peut dire que les infractions
terroristes prévues par la décision-cadre sont déjà réprimées par la plupart des
législations des Etat membres, mais devront être considérées en tant qu'infractions
terroristes dès lors que l'intention terroriste est réalisée 252.
250
Alinéa 1 de l’article premier de la décision.
251
Voir points (a) et (b) de l’alinéa 2 de l’article premier.
252
Marie –Aude, Revue internationale de droit pénal, 2006/1 vol.77.p.278.
253
Ibid., p. 279.
254
Emilie ROBERT, op. cit. p. 73.
127
linguistiques de généralité ostensibles » 255 qui s’affirment dans l’emploi des
articles définis dans l’énoncé de tous les comportements incriminés par la décision-
cadre (les atteintes, l’enlèvement, la capture, la perturbation, la menace…).
B. Les sanctions
1. Personnes physiques
255
Gérard Cornu, Linguistique juridique, 2ème éd. , Montchrestien, Paris, 2000, p. 277.
128
membres et est largement appliqué par la Cour de justice des Communautés
européennes» 256.
256
Emilie ROBERT, op. cit. p. 95.
257
Ibid., p. 96.
258
Julie Alix, op. cit., p. 68.
129
la mesure où l’infraction visée à l’article 2, paragraphe 2, point a), ne concerne
que l’acte visé à l’article 1er, paragraphe 1, point i), la peine maximale ne peut pas
être inférieure à huit ans.
Il s'agit d'une disposition appelant les Etats membres à réduire les peines
lorsque l'auteur de l'infraction renonce à ses activités terroristes et fournit aux
autorités administratives ou judiciaires des informations les aidant à prévenir
ou à limiter les effets de l'infraction, à identifier ou à traduire en justice
les autres auteurs de l'infraction, à trouver des preuves ou à empêcher que
d'autres infractions prévues aux articles 1er à 4 soient commises 259. Il faut que
ces informations soient déterminantes et qu’elles n’auraient pu être obtenues
autrement. Il s’agit ici néanmoins d’une simple faculté laissée aux Etats ; et il
semble que ce caractère optionnel ait été prévu à la demande de la Belgique qui
ne souhaitait pas récompenser par réduire les peines à l’encontre des terroristes
dits repentis 260.
A notre avis la responsabilité des personnes morales est très large et peut
conduire à des qualifications inexactes quand l’infraction est le résultat d’un
259
Article 6, alinéas (a) et (b).
260
Marie-Aude Beernart, op.cit.,P. 281.
130
« (…) défaut de surveillance ou de contrôle de la part d’une personne habilitée à
exercer un contrôle (…) ». Plusieurs questions peuvent être relevées au sujet de la
signification du terme « défaut ». Est-ce que le terme « défaut » signifie « faute » ?
Est-ce que le « défaut » est un comportement intentionnel ou non intentionnel ?
Selon nous, le défaut est un comportement non intentionnel et de ce fait on ne
peut pas qualifier un comportement résultant d’un défaut en tant qu’infraction
terroriste, dès lors que les infractions terroristes sont intentionnelles.
261
Ibid.
262
Le principe de responsabilité pénale des personnes morales fit par ailleurs l’objet en 1981 et
1988 des Recommandations 12 et 18 du comité des ministres du Conseil de l’Europe sur la
criminalité d’affaires, incitant les Etats à appliquer « la responsabilité et les sanctions pénales
aux entreprises lorsque la nature de l’infraction, la gravité de la faute de l’entreprise, les
conséquences pour la société et la nécessité de prévenir d’autres infractions l’exigent »Fédéric
Desportes et Francis Le Gunehec, op. cit., p. 568. Les considérations utilitaristes motivant ces
recommandations ont sans doute influencé le législateur européen et français car même en
France la responsabilité pénale des personnes morales n’a été introduite dans la loi pénale
qu’après la réforme pénale du 1er mars 1994 comme nous allons voir dans la deuxième partie
de cette thèse.
131
Section 3. La coopération policière face aux menaces terroristes
A la fin des années 60 et au début des années 70, alors que le terrorisme
international se développe, la position d’Interpol va évoluer sur ce sujet, avec
l’adoption de 21 résolutions sur le terrorisme et ses diverses formes 264.
132
Le colloque organisé sous le thème : « Troisième colloque international sur
la violence en bandes organisées communément dénommé terrorisme » eut lieu
du 12 au 15 mars 1984, et s’est terminé par l’approbation d’un texte que l’Assemblée
générale devait adopter plus tard intitulé « principes généraux appliqués par le
secrétaire général concernant l’article 3 du statut » 267.
267
Salim El Amrani, op. cit., p. 171.
268
Ibid.
269
Ibid, p. 172.
270
Ibid.
133
que confère cette qualification aux auteurs, alors qu’elles ne le sont pas en réalité.
D’ailleurs, l’organisation se réfère aux conventions régionales pour affirmer
qu’elles « n’admettent pas l’exception politique en matière d’extradition pour
certains crimes graves commis dans le cadre du terrorisme » 271.
2. Le groupe Trevi
134
concernent la question du terrorisme. Le paragraphe 2 du programme d’action y
est entièrement réservé à six thèmes principaux, en l’occurrence :
135
frontières pour recourir à leurs activités et se déplacer facilement d’un Etat à
l’autre. C’est pourquoi, la Convention prévoit la possibilité pour un Etat de rétablir
les contrôles dans le cas où : « L’ordre public ou la sécurité nationale doivent
exiger ce rétablissement des contrôles aux frontières communes » 276.
Le 8 janvier 2015, Amedy Coulibaly tue par balle une policière municipale
et blesse grièvement une autre personne à Montrouge. Le lendemain, il prend en
otage les clients d’une supérette cachère à la porte de Vincennes à Paris. Il en tue
quatre, et est finalement abattu lors d’un assaut du RAID et de la BRI. Ces actions
ont été coordonnées avec celles des frères Kouachi 279.
276
Article 2. Paragraphe 2 de la convention.
277
Paris Match, n° 3427 du 20 au 28 janvier 2015.
278
http:/www.lemonde.fr, 9 janvier 2015.
279
Ibid.
136
Pour appuyer le fait que la suppression des frontières en Europe facilite
le trafic d’armes, il parait très intéressant d’évoquer l’histoire d’un immigrant
marocain en Belgique qui a servi un groupe terroriste avec les armes avant de
devenir un agent secret collaborant avec les services secrets belges, français et
américains. Et sur demande de ses services, il a voyagé en Afghanistan et a infiltré
les camps d’Al-Qaeda en Afghanistan. Cet agent a écrit son histoire à l’intérieur
de l’organisation terroriste Al-Qaead intitulé : « Inside the jihad, my life with
Al-Qaeda » (A l’intérieur du Djihad, ma vie avec Al-Qaeda) signée sous le nom
d’Omar Naciri.
«Quand ils ont mentionné les Kalachnikovs (il se réfère à deux de ses amis)
j’ai écouté attentivement(…) ils parlent de munitions, ils ont besoin de balles pour
les kalachnikovs. «On ne peut pas les trouver en Belgique, il y en a beaucoup en
Allemagne mais ils sont très chères», dit Amine (…) je savais que l’Allemagne est
saturé des armes de l’ancien Union soviétique (…) dans ce cas le prix était très
élevé : ils payaient 13 francs pour chaque balles et j’ai y vu une opportunité pour
faire de l’argent. J’ai leur dit : «probablement je peux vous obtenir des balles,
combien vous payez ?». Ils ont commencé à rire en répondant que je venais
d’arriver et que je ne sais rien du tout sur ce sujet (…). Le jour suivant je suis allé
à Schaerbeek au centre de Bruxelles dont la plupart des habitants sont des Turks
et des Nord Africains (…). J’ai trouvé un dealer à qui j’ai demandé s’il connaît
un trafiquant d’armes (…), dans la nuit il m’a fait rencontré un certain Laurent
on a monté à bord de sa voiture, il conduisait à travers une zone industrielle et
entrait dans un garage (…) il a ouvert le coffre et tiré un grand sac qui contenait
cinq pistolets automatiques de marque CZ. Je savais que c’était un test et j’ai
répondu que je ne voulais pas de pistolets mais des milliers de balles pour des
kalachnikovs (...) après négociations on a fixé la quantité à 5000 balles à un prix
de 11,35 francs la balle (…) » 280.
280
Omar Nasiri, Inside the Jihad- my life with Al Qaeda, A spy’s story, Basi books, New York,
2006, p. 30-32.
137
Dans un autre passage, Omar Nasiri raconte comment il a pu conduire une
voiture chargée d’explosifs de Bruxelles jusqu'à Algesiras, pire encore si on sait
qu’il s’agit d’une ancienne voiture:
« La voiture était chargée de toutes les sortes de chose : tapis, grosses boites
et matériel électronique pour que nous ressemblions à un couple d’immigrés
retournant dans leur pays pour visiter leur famille ( …), on est sorti de Bruxelles
vers Paris, et on s’est arrêté après avoir passé Lille de vingt kilomètres, la voiture
est tombée en panne, on l’a remorqué à bord d’un camion grue et retourner à
Bruxelles pour changer le moteur et on a repris la route, la voiture est tombée en
panne encore une fois au sud de la France (…) un mécanicien l’a réparée, mais
elle est tombée en panne encore juste après avoir passé la frontière espagnole et
une quatrième fois aux Pyrénées (…). A soixante quinze kilomètres d’Algesiras, la
voiture est tombée en panne encore au milieu de la route (…) ensuite j’ai vu une
voiture de police venant vers notre direction, j’ai expliqué aux policiers que nous
avions des troubles avec la voiture (…) ils ont pris un câble et ils nous ont tiré par
le véhicule de police environ 25 kilomètres jusqu'à un garage de mécanicien dans
un petit village (…) et ils nous ont souhaité bonne chance » 281.
C. Europol
281
Ibid.p.66-67.
282
François Labrouillère et Aurélie Raya, Paris Match, n°3427 du 20 au 28 janvier 2015.
138
Il visait la mise en place d’une structure de renseignement, de coordination et
d’échange des données à caractères criminelles entre les Etats membres de la
Communauté 283.
Ainsi, la création de l’Office européen de police n’est pas liée aux attentats
du 11 septembre 2001, mais l’évolution de ses attributions et ses pouvoirs est une
conséquence directe de ces actes terroristes.
« Sans nul doute, la mise en place d’Europol peut être considérée comme
une initiative politique avec comme objectif politique clair, une lutte plus efficace
au niveau européen contre le trafic de stupéfiants toujours croissant et ensuite
contre les activités terroristes transnationales » 285.
Confirmé par le traité d’Amsterdam dans ses alinéas 29 et 30, l’Office a pour
vocation de constituer une agence d’information au service des polices d’Europe
sans aucun pouvoir opérationnel. Son principal objet d’étude est la criminalité
transfrontière. Ce type d’instance semble très utile vu le développement important
des activités terroristes. C’est pour cela que dans la première phase son activité se
concentrerait essentiellement autour de la lutte contre le terrorisme, le trafic de
stupéfiants, le trafic de produits radioactifs et le blanchiment d’argent 286.
283
Salim Elamrani, op.cit., p. 201.
284
Notamment la France et ce avant les attentats de l’été 1995, et lors de la réunion des ministres
de l’intérieur des Douze du 30 décembre 1994 le ministre français Charles Pasqua a exprimé sa
méfiance envers cet embryon de police européenne. Le Monde, 1er juillet 1995.
285
Genson R. et Zanders P., «Le développement de la coopération policière dans l’Union
européenne- Quel avenir pour Europol» ?, Revue du marché commun et de l’union européenne,
n° 504, janvier 2007, p.6.
286
Salim Elamrani,op.cit., p.202.
139
qui nomme le directeur et les directeurs adjoints 287. Les activités de l’office sont
gérées par un conseil d’administration constitué d’un représentant de chaque Etat
membre, qui en plus doit désigner une unité spéciale de police nationale chargée
des relations avec Europol et délègue des officiers de liaison qui contribuent aux
travaux d’échange d’information et d’analyse 288.
L’organisation compte dans ses effectifs 700 personnes dont 130 officiers
de liaison et est financée par une contribution annuelle volontaire des Etats
membres calculée en fonction de leur PNB 289. En 2011, le budget d’Europol était
de l’ordre de 83,9 millions d’euros. La contribution française est accordée à partir
du budget de la police nationale 290.
Au sein d’Europol, une force d’intervention (task force) a été créée suite
aux attentats du 11 septembre en vue de porter aide et concours aux groupes
communs d’enquêtes et permettre un échange d’expériences et de pratiques
contre la criminalité transfrontalière 291. Il convient de souligner qu’au début cette
force a connu un manque d’efficacité et a été démantelée juste deux ans plus tard
pour être reconstituée suite aux attentats de Madrid du 11 mars 2004 292.
287
Mario BETTATI, Le terrorisme- les voies de la coopération internationale, Odile Jacob, Paris,
2013, p. 186.
288
Ibid., p.186.
289
Ibid.
290
Ibid.
291
Ibid.
292
Emilie ROBERT, op.cit., p. 191.
140
Conclusion du chapitre I
141
Chapitre II :
142
L’Organisation de la Ligue des Etats arabes dont le siège est situé au Caire
et qui compte aujourd’hui 22 membres 294 a été créée le 22 mars 1945 par le
protocole d’Alexandrie. Ses objectifs principaux résident dans la coordination des
politiques des Etats membres pour protéger leur sécurité nationale.
Depuis le début des années 80, les pays arabes et musulmans vivent une
crise d’identité. Le monde islamique couvrant une partie géographique vaste
dans laquelle, depuis la colonisation, plusieurs mouvements extrémistes prônant
parfois le recours à la violence armée, dont le terrorisme est un aspect, pour faire
chuter les régimes en place et les remplacer par des systèmes fondamentalistes
mêlant religion et politique.
294
Les membres de la Ligues arabe sont : Arabie –Saoudite, Maroc, Algérie, Bahreïn, Comores,
Djibouti, Egypte, Emirats arabes unis, Irak, Jordanie, Koweït, Liban, Libye, Mauritanie,
Oman, Qatar, Somalie, Soudan, Syrie, Tunisie et Yémen ainsi que le représentant de l’Autorité
nationale palestinienne.
143
Cet appel au Djihad (guerre sainte) qui remonte à 1979, date de la révolution
chiite iranienne, crée des solidarités par essence supérieures à l’obligation citoyenne
qui lie chaque sujet à son propre Etat et qui se manifestent de plusieurs façons 295.
Mais, à notre avis l’appel au djihad, au sens de l’Islamisme radical, ne date pas
de 1979, mais bien avant cette date, ce qui nous mène à éclaircir cette réalité.
A. L’islamisme radical
C’est l’islamisme qui peut prendre plusieurs formes. Il peut être politique
dans ses fins ou non, comme il peut être radical ou non dans ses moyens. L’islamisme
est politique quand il reconnaît les moyens démocratiques de prendre le pouvoir
et pour cette fin ces partisans participent aux élections et à la vie politique en vue
de s’emparer du pouvoir et instaurer ensuite la forme qu’ils prônent 296.
L’islamisme radical est celui qui rejette ces moyens car la démocratie
pour ses partisans est une hérésie contre l’Islam. Ces partisans peuvent alors
recourir au terrorisme pour s’emparer du pouvoir 297. L’islamisme radical n’est
pas un phénomène nouveau, mais il n’a connu son apogée qu’avec l’apparition du
mouvement Al-Qaeda qui constitue encore une menace transnationale à la paix
et la sécurité internationales.
295
Le terrorisme islamiste contemporain n’a rien à voir avec la religion islamique profondément
tolérante dans laquelle rien ne peut justifier l’attaque de victimes innocentes. Voir l’étude
de SCWARTZ ( DA), « International terrorism and Islamic law », Columbia journal of
transnational law, vol. 29, n° 3, 1991,p. 629. Voir également les travaux de la table ronde
intitulée « L’intrusion du radicalisme islamique dans les relations internationales », colloque,
« L’ONU et l’Afghanistan », Aix en Provence, 17 janvier 2003.
296
Ahmed Chaarani, La mouvance islamiste au Maroc du 11 septembre 2001 aux attentats de
Casablanca du 16 mai 2003, éd. Karthala, Paris, 2004, p. 123.
297
Ibid., p. 125.
144
C’est pour cette raison que nous nous contentons dans cette section de voir
l’histoire de cette organisation terroriste. Pour bien comprendre la création et
l’évolution de cette organisation, il faut comprendre d’abord l’histoire de son chef
Osama Binladen.
De même, la plupart des écrits sur Osama Binladen ne parlent que de sa vie
en relation avec Al-Qaeda et omettent de revenir sur son enfance ou sa jeunesse
et comment il a été influencé par son père.
298
Lawrence Wright, The looming Tower, Al-Qaeda and the road to 9/11, Vintage books, USA,
2007.
145
et constructeurs 299. Ils pratiquèrent le commerce à travers une route du sud
d’Arabie au long de la côte Est de la mer rouge jusqu’au Hedjaz, la terre où l’Islam
est apparu 300.
A partir de là, beaucoup d’entre eux ont regagné le Levant 301 et le Sud-Est de
l’Asie et même le Philippine formant ainsi une large communauté de marchands
et hommes d’affaires. Au début des années 1930 une sécheresse catastrophique
est survenue et des milliers des Hadramis ont quitté leur pays à la recherche non
seulement d’opportunités mais aussi de la survie 302.
Mohamed Binladen était parmi ceux-ci. Après avoir passé un certain temps
en Ethiopie, il a pris le bateau pour Jizan 303 et de là il a rejoint une caravane
pour Djeddah à l’âge de 23 304. Quand il est arrivé en Arabie saoudite en 1931, le
royaume naissant était dans un état économique périlleux et sa principale source
de revenue venait des pèlerins qui la visitent pour accomplir le Haj (pèlerinage) à
la Mecque et à Médine.
299
Lawrence Wright, op. cit., p. 71.
300
Le Hedjaz est la région oust de l’actuelle Arabie saoudite comprenant les provinces de Tabuk,
Médine, La Mecque et Al Bahah, sa principale ville est Djeddah. En arabe le mot Djeddah
signifie « grand-mère » et selon la légende, le nom de la ville se réfère à Eve, grand-mère de
l’humanité laquelle, il est dit, est enterrée dans un spacieux complexe dans le voisinage où
Osama Binladen était né. Ibid.
301
Le Levant désigne traditionnellement les pays bordant la côte orientale de la mer Méditerranée
notamment le Liban, la Syrie, Israël, Palestine, Jordanie et même l’Egypte. Les autorités et la
presse américaines se référent à Daech par l’acronyme ISIS (Islamique state in Iraq and Syria)
ou l’acronyme ISIL (Islamique state in Iraq and the Levant)
302
Lawrence Wright, op., cit., p. 71.
303
C’est une ville d’Arabie saoudite située à l’extrême sud-ouest du pays sur les bords de la mer
rouge dans la province de Jizan dont elle est la capitale à une soixantaine de kilomètres de la
frontière avec le Yémen.
304
Lawrence Wright, op., cit., p. 71.
305
Ibid.
306
Ibid.
146
Cette découverte a donné lieu à un partenariat qui s’est soldé par la création
de « the Arabian Américan Oil Company- Aramco » (Compagnie américano
saoudienne de pétrole). Mohamed Binladen qui a commencé en tant que docker à
Djeddah a réussi à obtenir un travail à Aramco en tant que maçon à Dharan 307.
Il a été un homme de petite taille qui porte une lunette pour un seul œil
car aveuglé par un coup de poing de son instituteur lors de ses premiers jours à
l’école, à la suite de quoi il a quitté l’école et est resté illettré, même sa signature
ressemblait à celle d’un enfant 309.
Dans sa compagnie, il travaille aux côtés de ses ouvriers ce qui lui a permis
de gagner leur loyauté et fidélité. Il disait «j’ai grandi en tant qu’ouvrier, et j’aime
travailler et vivre avec les ouvriers» 310. Il savait la valeur du travail en équipe à tel
point qu’il acceptait des projets improfitables seulement pour garantir le travail
à ses ouvriers 311.
307
Lawrence Wrignt, op. cit., p. 74.
308
Ibid.
309
Ibid.
310
Ibid, p.75.
311
Ibid.
312
Ibid, p. 75.
147
Quand Mohamed Binladen a fini le travail il a conduit lui-même la voiture
vers la chambre à coucher pour montrer au roi la solidité du passage. C’est ainsi que
le roi le gratifia en lui assignant la mission de construire plusieurs d’autres palais
royaux et l’a désigné en tant que ministre honoraire des travaux publics 313.
Il est devenu ainsi très proche à la famille royale. Il était patient au regard
de son paiement et n’a jamais refusé d’accomplir un travail même dans le cas
où le trésor était vide. Il a compris qu’il a besoin de grandes machines pour la
construction des routes et pour concurrencer le géant américain Bechtel et au
cours d’un certain temps il est devenu le premier client du groupe industriel
américain fabriquant des machines Caterpillar 314.
313
Ibid.
314
Ibid.
315
Ibid, p. 78.
316
Ibid, p. 79.
317
Ibid, op. cit., p. 83. Il sied de dire qu’Osama Binladen s’est inspiré des aventures de son père
mais négativement en exploitant sa fortune dans des entreprises terroristes.
148
Le côté extravagant de Mohamed Binladen s’incarne dans sa vie conjugale.
Il est difficile de déterminer le nombre des femmes qu’il a épousées, en plus des
concubines qu’il avait. Parmi ces femmes il y avait une Syrienne avec qui il s’est
marié en 1956 à l’âge de 14 ans et avec laquelle il a eu un garçon nommé Osama.
Il est décédé suite à un crash de son avion en route pour aller épouser une autre
jeune femme. Son corps était calciné et n’a été identifié que par sa montre.
Osama Binladen est né à Riyad en janvier 1958. A l’âge de six ans sa famille
entière a déménagé à Médine où Mohamed Binladen était en train de rénover
la mosquée du prophète. Osama a vécu la plupart de sa vie à Djeddah dans une
maison modeste car son père n’aime pas les apparences, ce que Osama décrit
après comme suit : « mon père était très strict et il ne faisait pas attention aux
apparences…notre maison était d’un standard plus bas que la plupart des maisons
des ouvriers qui travaillent chez nous ».
149
Même les prétentions des salafistes djihadistes convergent avec cette
analyse puisque ces derniers appellent à l’adoption des premières préceptes de
l’Islam non pas par la prédication, mais par la voie des armes. Cela explique, à
notre avis, que ces terroristes ont un attachement inné à tout ce qui à trait au
passé de leurs pays ou nation.
« Tous les vendredis soir Abu Suheil donnent des leçons sur la théologie
et l’idéologie de Sayid Qotb, le théologien égyptien. J’ai y toujours assisté. Abu
Suheil nous récit des parties de son ouvrage Ma’alim fi t-tariq (signes de pistes).
J’étais absorbé par ces cours et par la méthode gentille avec laquelle Abu Suheil
318
Les terroristes islamistes de la mouvance Al-Qaeda rejettent tout dialogue et toute
communication, Abdellah Azzam, théoricien de l’islamisme radical et coordonnateur de la
participation arabe à la guerre d’Afghanistan, écrivait : « Le jihad et le fusil, pas de négociation,
pas de conférence, pas de dialogue ». Ils emploient une terminologie guerrière qui exclut par
définition tout espace de communication, ce qui a pour inconvénient de consolider la menace
et peut constituer la meilleure publicité pour le recrutement de nouveaux terroristes
319
Ce livre a été délivré aux étudiants de l’Académie du FBI de la session 253 parmi lesquels j’ai fait
partie par l’unité des cours antiterroristes, ce qui montre son importance dans l’appréhension
d’un grand volet de la vie des groupes terroristes.
150
nous éduquent, mais aussi par les idées. Abu Suheil explique que Qutb avait un
master d’une université américaine. Nous n’avons pas d’électricité au camp de
Khaldan et pendant la nuit on utilisait des lampes à gaz ou des bougies pour
l’éclairage. C’est pour cela que j’étais surpris de voir une télévision une nuit de
vendredi pour la première fois depuis mon arrivée qui a été reliée à un générateur
de diesel. Cette nuit là on a vu plusieurs discours d’Abdellah Azzam. On nous a
raconté qu’Azzam était né en Cisjordanie et a émigré vers la Jordanie en 1967
après Al- Naksah (connu dans l’Ouest par la guerre des six jours). Ensuite il a
rejoint le Caire pour avoir un doctorat et c’est ainsi qu’il est devenu un ami à la
famille de Qotb. Dans les années 70 il a voyagé en Arabie Saoudite et a commencé
de focaliser sur le Djihad global, tout en devenant convaincu que la Umma (la
nation) a besoin d’une force militaire organisée pour conquérir les infidèles.
Quand les Soviétiques ont occupé l’Afghanistan, il a émigré au Pakistan avec sa
famille pour être près du combat. Ainsi, Azzam a fini par s’installer à Peshawar où
il a fondé Maktab Al-Khadamat, une organisation dédiée à l’aide des mujahidins
luttant contre les Soviétiques et à entrainer les nouvelles recrues qui se déversent
sur le Pakistan des autres pays. Avant qu’il soit tué en 1989, il est devenu l’un des
propagandistes les plus importants du Djihad » 320.
320
Omar Nasiri, Inside the jihad, my life with Al-Qaeda, a spy’s story, Basic books, New York,
2006, p. 150-151.
321
Lawrence Wright, op. cit., p.3.
322
L’expression est utilisée par l’auteur Lawrence Wright dans son ouvrage précité comme suit :
«Saudi prince» dans la page 3. Normalement l’information circulait comme telle au début dans
le monde de l’information mais c’était fausse, Osama Binladen n’était pas un prince Saoudien.
151
New York y compris le siège de l’ONU, les tunnels de Lincoln et de Holland et
même le 26 Federal plaza où travaille Coleman 323.
323
Ibid.
324
Ibid.
325
Ibid.
326
Ibid.
327
Ibid.
152
Coleman a continué son enquête seul sur Binladen pour une année et demi
jusqu'à ce que le FBI l’ait presque oublié car il a été affecté à Alec station, et enfin
il a pu dresser une carte relative au réseau de l’organisation laquelle était étendue
au Moyen Orient, en Afrique, en Europe et en Asie centrale, tout en concluant
qu’il s’agit d’une organisation terroriste internationale visant la destruction des
USA 328.
B. L’internationalisation du terrorisme
Selon un bilan français, pas moins de 349 français étaient en Syrie, 221
apprentis combattants français manifestaient des velléités de départ et 154
étaient déjà en route, sachant que 946 compatriotes ou résidents français sont
concernés par les filières, soit une explosion dépassant les 60 % en six mois 330. Le
député socialiste Sébastien Pitrasanta, rapporteur du projet de loi antiterroriste 331
328
Ibid.
329
Dans un communiqué de l’Elysée le Président de la République François Hollande disait :
« L’odieux assassinat de David Haines montre une nouvelle fois combien la communauté
internationale doit se mobiliser contre Daech, organisation de la lâcheté et de l’abjection ». De
même, David Cameroun disait que : « Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour traquer
ces assassins et nous assurer qu’ils seront traduits en justice, quel que soit le temps que cela
prendra », Le Figaro, lundi 15 septembre 2014 n° 21805, p. 6-7. Notons que David Haines est le
troisième hottage occidental de nationalité Britannique à être décapité brutalement par Daech
le 13 septembre 2014. Il a été enlevé en mars 2013 en Syrie où il venait d’arriver pour travailler
au sein de l’ONG française Acted avec laquelle il avait mené depuis quinze ans des missions
dans les zones de conflit en Afrique, au Moyen- Orient et dans les Balkans.
330
Christophe Cornevin, « Djihadisme : la France renforce son arsenal », Le Figaro, op. ct., p.8
331
Cette projet de loi a été adopté par l’assemblée nationale et le Sénat le 13 novembre 2014 sous
le numéro 2014- 1353 et publiée au BORF N° 0263 du 14 novembre 2014.
153
prévoyant de punir les candidats au départ d’interdiction de sortie du territoire
et d’accentuer la traque sur internet a déclaré que : « Les volontaires partant de
France constituent le plus fort contingent» 333. De même, le mois d’août 2014 la
DGSI surveillait à la loupe 184 djihadistes revenus en France comme autant de
possibles bombes à retardement 334. Les chiffres cités plus haut s’accroissent avec
le temps et le Président Français a parlé de « 15 000 combattants étrangers parmi
lesquels 1 000 français- ou résidant en France- en Syrie et en Irak» 335.
On peut dire aussi que déjà l’affaire Mohamed Merah à Toulouse et les
attentats du janvier 2015 à Paris avaient démontré que le radicalisme a franchi
un nouveau pas. Il n’est plus importé du Maghreb ou du Moyen-Orient, il touche
aujourd’hui des personnes dans la France, toutes nées en France, plusieurs d’entre
elles sont converties 336.
La même chose peut être dite sur le Maroc dont plusieurs de ses citoyens
sont partis en Syrie pour combattre le régime Syrien avant de rallier l’EI. Les
réseaux de recrutement de ces individus opèrent dans certaines villes marocaines.
Dans ce cadre, la CA de Rabat a traité en janvier 2013 le cas d’une cellule composée
de 12 personnes arrêtées pour avoir recruté 40 individus au sein des groupes
terroristes combattant en Syrie. Ce groupe a opéré dans les villes de Meknès,
Hoceima, Tanger et Fnideq 337.
Au mois d’août, les services de police marocains ont démantelé une cellule
de 4 à 7 individus liés à Al-Qaeda dans les régions de Fès, Meknès, Taounate et
333
Ibid.
334
Ibid.
335
Discours du Président Français au Conseil de sécurité de l’ONU le 24 -9- 2014, franceonu.org.
336
Abdelhak Najib, «La France terre de jihad», Maroc Hebdo, n° 995 du 21 au 18 octobre 2012.
Louis Caprioli, responsable de la lutte anti-terroriste à la Direction de la Surveillance du
Territoire de 1998 à 2004 analyse la situation en disant que : « Nous sommes face à un leader
qui n’est pas issu des schémas classiques qui impliquent le plus souvent des Maghrébins. Le
leader est Français de souche. Un Antillais. Aujourd’hui, les recruteurs ciblent des individus de
moins en moins discernables ». De cette façon, les organisations terroristes puisent donc dans
le sol occidental. Le ciblage est l’étape la plus importante et peut durer des mois ou des années ,
les cibles sont des anciens délinquants, drogués, repris de justice c’est-à-dire des personnes au
profil psychologique fragile facile à manipuler. Amedy coulibaly, les frères Koachi et Djamel
Beghal en est un exemple très récent, lesquels étaient des délinquant multirécidivistes
337
The country reports on terrorism 2013, United States Department of state publication, Bureau
of Counterterrorism, avril 2014, p. 162-163.
154
Tiznit qui préparaient des attaques contre le Maroc. Selon l’enquête, la cellule
entendait rallier de nouvelles recrues dans le but de mener des attaques contre des
missions étrangères au Maroc, particulièrement les manœuvres du lion africain
et contre les avions français qui décollent de l’aéroport de la ville de Guelmim
pour supporter les forces intervenant au Mali 338. Selon le directeur du bureau
central d’investigations judiciaires, 500 marocains combattraient avec Daech,
286 seraient morts en Irak et en Syrie, 156 seraient rentrés au Maroc et ont été
appréhendés à leur retour.
Internet est le canal de recrutement privilégié par les terroristes. Ils y ont
affiné leurs techniques d’embrigadement. Ils en utilisent toutes les possibilités :
sites d’apologie du terrorisme, forums, services de messagerie directe (Skype,
WhatsApp), vidéos (YouTube, DailyMotion ou chaînes spécialisées), et même
des sites de rencontres pour célibataires. Les réseaux sociaux (Facebook, Twitter,
Instagram) sont utilisés pour prendre contact de proche en proche : ceux qui sont
sur place en charge de recruter y postent des messages et y discutent avec ceux
qui sont en France. Pour eux, Internet est le moyen de faire circuler massivement
leur propagande et de proposer aux jeunes un discours adapté à ceux qu’ils veulent
attirer dans leurs filets 339.
La situation est très grave puisque le monde tout entier avec tous ses
moyens technologiques, n’arrive pas encore à gagner la guerre de communication
contre les terroristes, et ce même depuis la création d’Al-Qaeda. Plus que ça,
cette organisation terroriste est jusqu'à présent capable de publier son magazine
intitulé « Inspire » (Inspirer) sur internet et on n’arrive pas à l’y stopper. C’est
la réalité confirmée déjà par le conseiller spécial Américain sur le Pakistan et
l’Afghanistan Richard Holbrooke par son constat très signifiant : « Nous perdons
la guerre de communication contre les extrémistes qui vivent dans les caves» 340.
338
Ibid.
339
STOP-DJIHADISME. gouv.fr sur http://www.stop-djihadisme.gouv.fr/decrypter.html.
340
Hillary Rodham Clinton, Hard Choices, Simon and Schuster, New York, 2014, p. 189.
155
Si dans les années 70-80, les groupuscules proches orientaux étaient très
professionnels, téléguidés ou soutenus par des Etats tels la Syrie ou l’Iran, poussant
les Etats occidentaux à négocier avec eux, dans les années 90 et la première
décennie de 2000, la terminologie a changé et est devenue « mouvements », et
peu à peu remplacée par « mouvance » ou « nébuleuse », et l’on constate qu’on est
passé du sponsoring étatique à un «mécénat de particuliers à l’image de l’action
du milliardaire saoudien Oussma Benladen 341».
341
Salim El Amrani, op. cit., p. 148.
342
Lawrence Wright, op. cit., p. 5-6.
343
The country report on terrorism 2013, op. cit., p. 6. A signaler que le rapport de 2014 n’est pas
encore sortie.
344
Ibid.
345
Ibid.
156
fois en lisant l’ouvrage récent de l’ex-secrétaire d’Etat américain Hillary Clinton.
Cette dernière souligne dans son ouvrage qu’elle a été étonnée elle-même de cette
méthode de financement.
346
Hillary Rodham Clinton, op.cit., p. 467.
347
Avant de changer son nom à Daech c’est-à-dire l’Etat islamique en Irak et en Syrie en 2013, ce
groupe était connu sous le nom d’Al-Qaeda en Irak. Ce groupe a augmenté sa fréquence d’actes
terroristes en 2013. Selon les estimations de l’ONU pour 2013, plus de 7800 civils on été tués
à cause des attaques terroristes perpétrées par L’EI, un moyen de 24 morts par jour et 68
attentats - suicides par mois The country reports on terrorism 2013, op. cit.,p. 137-138.
348
Voir déclaration du président irakien lors de la conférence internationale sur l’Irak tenue à
Paris à l’initiative de la France le 15 septembre 2014.
349
Le 15 août 2014 les terroristes combattants de Daech ont tué des dizaines d’habitants, des
hommes et des garçons pour la plupart. Ils s’adonnaient au viol et à la traite des êtres humains,
les femmes jeunes et belles ont été emmenées pour être vendues. Les plus âgés, les mères et les
laides restent séquestrées. Ces actes de barbarie sont pratiqués contre les Yazidies. Une femme
yazidie pourrait « rapporter » de 100 à 1000 dollars par tête. Selon le ministre irakien des
droits de l’homme, quelque 700 esclaves sexuelles auraient été ainsi vendues à Moussol en août
2014. Thierry Oberlé, « Ces yazidies prisonnières du désert », Le Figaro, 16 septembre 2014,
n° 21806, p.2.
157
Devant ces atrocités sans égal dans l’histoire moderne, un nombre d’Etats
se sont engagés à soutenir l’Irak par tous les moyens. A cet effet, à l’initiative de
la France, une trentaine de pays ont organisé la conférence internationale sur
l’Irak et se sont tenus dans la déclaration finale de fournir « une aide militaire
appropriée » aux autorités de Baghdad pour les aider à combattre Daech 350. Lors
de l’inauguration de cette conférence, le Président français François Hollande
avait appelé la communauté internationale à s’aligner aux côtés des autorités
irakiennes « clairement, loyalement et fortement », car il n’y a pas « de temps à
perdre » 351.
Les Etats arabes ont réalisé l’ampleur du danger que constitue la criminalité
en général, et le terrorisme en particulier et l’importance de la coopération
judiciaire et policière dans la lutte contre ce phénomène au début des années
cinquante 353. La lutte contre le terrorisme a ainsi commencé par la confection
d’une stratégie et l’adoption d’une convention plus large dans ce domaine.
350
Isabelle lasserne, «A paris, la guerre à l’EI est déclarée», Le Figaro, op. cit., p. 2.
351
Ibid.
352
Ibid. La faiblesse de la déclaration finale de cette conférence c’est qu’elle n’a pas pris en compte
la menace de Daech en Syrie car l’offensive des terroristes en Irak a commencé déjà trois mois
avant le début de la conférence, et à cette date 40 % du nord de l’Irak et 25 % de la Syrie sont
contrôlés par l’Etat islamique. Mais les Etats-Unis ont envisagé par la suite d’étendre leurs
frappes aériennes à la Syrie.
353
Mohamed Fathi, «Les législations pénales arabes relatives à la lutte contre le terrorisme sur
les plans de fond et de procédure», travaux du colloque scientifique au sujet des législations
relatives à la lutte contre le terrorisme dans le monde arabe, Soudan, 1999.
158
A. Stratégie arabe de lutte contre le terrorisme ridiculisée
par le manque d’unité
Le premier congrès des dirigeants arabes des services de police a été tenu
aux Emirats arabes unis les 18 et 21 décembre 1972 dans lequel ils ont discuté le
problème de l’extradition criminelle. En septembre 1977, les ministres de l’intérieur
des Etats arabes ont tenu leur premier congrès au Caire et il a été recommandé que
les Etats arabes prennent en considération les nouveaux phénomènes criminels
et tous les autres comportements criminogènes étrangers aux Etats arabes.
Ensuite, les efforts des Etats arabes se sont multipliés en vue de lutter
contre le terrorisme avec l’organisation de congrès annuels des dirigeants des
services de police et de sécurité qui se tiennent encore jusqu'à présent et dont
le principal thème discuté est celui de la lutte contre le terrorisme 355. En plus,
le conseil des ministres de l’intérieur des Etats arabes a élaboré une stratégie
sécuritaire qui vise la protection de la société arabe du terrorisme et de toutes
les autres catégories de crimes, et ce lors de sa deuxième réunion à Bagdad le 7
décembre 1983 356.
159
1 la lutte contre la criminalité dans toutes ses formes classiques et nouvelles
dans la société arabe ;
2 la préservation de la paix dans le monde arabe et sa protection de toutes les
tentatives terroristes orchestrées de l’intérieur ou de l’extérieur ;
3 la protection de la sécurité des institutions, organismes et services publics dans
le monde arabe et leur préservation de tout attentat ;
4 la protection de la sécurité de la personne humaine dans le monde arabe et la
garantie de sa sécurité physique, sa liberté, ses droits et ses biens.
160
Cette stratégie donne une définition au terrorisme et essaie de le différencier
de ce qu’elle appelle la lutte armée légitime 357. Elle vise aussi la préservation de la
paix, la sécurité et l’unité des Etats arabes, en plus de la souveraineté de la loi et
la lutte contre le terrorisme dans le cadre de la coopération arabe commune.
357
A notre avis les rédacteurs de la stratégie font référence ici à la lutte du peuple palestinien
contre l’occupation israélienne.
358
« Le Maroc préside la 17 ème conférence sur la lutte contre le terrorisme », article publié par la
MAP, 18 septembre 2014.
359
Ibid.
161
Oumma (la nation) arabe contre des répercussions dramatiques » 360.
360
Mohamed Ali Koumane, secrétaire du CMAI, travaux de la 17 ème conférence sur la lutte contre
le terrorisme.
361
Agence MAP ( MafhrebArab Press). C’est l’agence marocaine de presse ou le texte intégral du
discours a été publié. .
162
coordonne l’action des Etats membres dans la lutte contre le terrorisme, à travers
une Convention signée au Caire le 22 avril 1998.
262
Le cas de la Palestine n’est pas étrange à la présence de cette disposition, ce qui confirme
l’idée que nous avons souligné en haut selon laquelle les intérêts des Etats jouent en faveur
des uns ou des autres et entravent toute lutte efficace contre le phénomène du terrorisme.
Il faut souligner aussi dans ce cadre que l’OCI s’est inspirée de la convention du Caire par la
signature de ses membres d’une convention à Ouagadougo le 1er juillet 1999 sur la lutte contre
le terrorisme international qui se réfère à la charia et écarte de son champ d’application la lutte
contre les régimes racistes, les occupations étrangères, et les situations coloniales. Son contenu
est diamétralement calqué sur la convention du Caire et répond surtout à un souci des Etats
musulmans de démontrer leur bonne volonté dans la lutte contre le terrorisme, toujours en prenant
compte, par rapport à la Palestine, de réaffirmer le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
263
Article premier alinéa 2 de la Convention.
163
A notre avis, cette définition parait un peu limitée et restreinte par son
omission de souligner l’acte d’attentat à la vie des personnes. L’expression « …
visant à provoquer la terreur ou la peur parmi les gens en les blessant ou en
exposant leur vie, liberté ou sécurité au danger…) ne comporte pas l’acte de tuer
les personnes, et se contente de souligner le fait d’exposer leur vie au danger. Une
personne dont la vie est exposée au danger doit confronter ce danger, le dépasser
et survivre. Que dire alors si l’attentat a causé la mort d’une personne ou plus ?
364
Sottile A, «Le terrorisme international», RCADI, 1938 III, p. 95.
365
Ibid.
366
Salim El Amrani, op. cit., p. 155.
164
Bien plus, les rédacteurs de la convention de la Ligue arabe relative à la
lutte contre le terrorisme, qui semblent s’en être inspirés, opèrent une distinction
entre « terrorisme » et « crime terroriste » qui est considéré comme : « Tout
crime, entamé ou non, commis en exécution d’un but terroriste dans tout Etat
contractant ou contre les nationaux, les propriétés ou les intérêts de celui-ci et qui
est sanctionné par la loi nationale de cet Etat » 367.
367
Cette définition demeure vague et en l’appliquant on risque de tomber dans des contradictions
avec les droits fondamentaux de l’homme, et d’ailleurs cette réalité a été indiquée par l’ex
secrétaire général de l’ONU M. Kofi Annan, lors d’une allocution prononcée à Madrid à la
séance plénière de clôture du sommet international sur la démocratie, le terrorisme et la
sécurité : « Je dois malheureusement dire que les spécialistes des droits de l’homme, y compris
ceux du système des Nations Unies, considèrent tous, sans exception, que nombre de mesures
qu’adoptent actuellement les Etats pour lutter contre le terrorisme constituent une atteinte
aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales ». communiqué de presse, SG/SM/9757,
10/03/2005.
165
Conclusion du chapitre II
166
Conclusion du titre II
Face à cette situation et alors que les règles de droit interne se sont avérées
inefficaces devant l’ampleur de la menace, les Etats sont restés impuissants à la
confronter, ce qui a fait apparaitre la nécessité de coopérer dans leur lutte. La
communauté internationale va tenter de s’organiser sur les plans universel et
régional en vue d’apporter une réponse au phénomène.
368
Salim El Amrani, op. cit., p. 11.
167
Conclusion de la partie I
369
Yves Thréani, «éditorial», le Figaro, 2 juin 2014, p. 1.
370
Ibid.
168
la convention arabe de 1993 lesquels se bornent à déterminer limitativement
certains faits pouvant caractériser l’infraction terroriste. Il s’ensuit que des
difficultés d’interprétation surgissent lors de l’application des dispositions de ces
instruments.
169
Deuxième partie
170
Le développement du terrorisme international et la nécessité de la protection
de la continuité des Etats et des valeurs humaines ont entraîné logiquement la
réflexion profonde pour développer les moyens de lutte anti-terroriste de la part
des Etats visés. En effet, il était difficile pour les tribunaux français et marocains,
de lutter efficacement contre les mouvements terroristes dans le cadre des règles
du droit commun, c’est-à-dire, avant l’adoption de la loi relative à la lutte contre
le terrorisme. Les deux Etats ont répliqué par l'adoption de règles dérogatoires
lorsqu'il s'agit des crimes terroristes 371.
Ainsi, les législateurs français et marocain, de leur côté, ont été amenés à
cause des attentats terroristes ayant été perpétrés dans les deux pays à adopter
des lois réprimant les actes de terrorisme. Si la législation française relative à la
lutte contre le terrorisme a été adoptée progressivement comme nous allons voir
ci-dessous, au Maroc la notion a été introduite directement et expressément, mais
après une longue période d'hésitation tenue par certains opposants qui voyaient
dans cette loi un moyen de limiter les libertés personnelles.
171
Au Maroc ce n’est que le 23 janvier 2003 que le conseil des ministres 374 a
adopté et déposé auprès du parlement un projet de « loi contre le terrorisme ».
Mais, le mouvement de contestations, constitué par les acteurs de la société civile :
organisations de défense des droits de l'homme, des partis politiques, ont réussi
à le faire repousser.
374
Le conseil des ministres est présidé par Sa Majesté le Roi.
375
«Discours de Sa Majesté le Roi du Maroc adressé jeudi 29 mai 2003 à la suite des attentats de
terroristes de Casablanca le 16 mai 2003» , en ligne : www.bladi.net/text-integral-du-discours-
royal-du-29-mai-2003.html
172
incriminations terroristes, qui ont, selon lui, emprunté aux infractions de droit
commun leurs éléments constitutifs pour en prendre une qualification d’infraction
terroriste une fois leur réalisation motivée par un contexte d’intimidation et de
terreur (Titre II) 376.
376
Yves Mayaud, op. cité.
173
Titre I :
174
La procédure pénale est la mise en œuvre concrète du droit pénal, par
la recherche des auteurs d'infractions et par leur jugement. Elle constitue le
trait d’union entre l'infraction et la peine, le procès pénal s'intercalant entre
l'infraction commise et la peine infligée, en cas de condamnation. Il peut aussi y
avoir acquittement, ou, dans certains cas, déclaration de culpabilité avec dispense
de peine 377.
377
J. Larguier et P. Conte, Procédure pénale, Dalloz, 21 éd., 2006, p. 1.
175
Chapitre I :
176
Le droit pénal français relatif à la lutte contre le terrorisme s’est
progressivement établi. En réalité, la législation pénale antiterroriste ne prévoyait
aucune disposition renvoyant au phénomène du terrorisme avant 1986. Mais
contrairement au législateur marocain le législateur français est très actif dans la
production de lois en matière de lutte contre le terrorisme.
A. Le cas de la France
Nous retraçons l’évolution juridique qui s’est produite puis nous ferons
état de la nature des incriminations.
1. Evolution juridique
378
Jean- François Gayraud, David Sénat, op. cit. p. 62.
177
Ensuite, les modifications apportées au Code pénal en mars 1994 émanaient
d’un esprit plus développé, consacrant tout un chapitre au concept du terrorisme,
désormais considéré comme une infraction autonome. Il prévoit même une
nouvelle infraction terroriste spécifique : le terrorisme écologique 379.
Bien plus, le 29 décembre 1997, une autre loi qualifiée de loi facilitant le
jugement des actes terroristes s’ajoutait à l’arsenal juridique relatif à la lutte contre
le terrorisme. Elle permet le jugement des délits et des crimes terroristes, à titre
exceptionnel et pour des motifs de sécurité, dans tout autre lieu du ressort de la cour
d'appel que celui où ces juridictions tiennent habituellement leurs audiences 381.
La loi sur la sécurité quotidienne votée le 15 novembre 2001, à peine deux mois
après les attentats du 11 septembre est une loi sécuritaire pouvant apparaître comme
une panoplie de divers moyens de lutte contre le terrorisme. Elle fait référence à la
production et la possession d'armes, les trafics et les nuisances sociales et présente
aussi un aspect monétaire et financier, en étendant le champ des infractions
terroristes aux infractions de blanchiment et de délits d’initiés, et en créant une
nouvelle incrimination, en l’occurrence le financement d’actes terroristes 382
.
178
la durée maximale de garde à vue de 4 à 6 jours, en ce qui concerne les suspects
d'actes terroristes.
179
- la loi n° 97-1273 du 29 décembre 1997 tendant à faciliter le jugement des
actes de terrorisme ;
180
de certains actes de terrorisme 383. Certains auteurs, notamment Yves Mayaud
parlent de terrorisme dérivé pour qualifier les incriminations terroristes, qui ont,
selon lui, emprunté aux infractions de droit commun leurs éléments constitutifs
pour en prendre une qualification d’infraction terroriste une fois leur réalisation
est motivée par un contexte d’intimidation et de terreur 384.
En se référant à ces deux exemples, les deux auteurs partent d’une idée
descriptive liée au domaine d’intervention du droit que l’on veut qualifier, c'est-
à-dire l’objet qu’il traite, et non pas de mesures procédurales qui organisent la
poursuite des infractions terroristes. A notre avis, il existe des dispositions qui
permettent aux juridictions de Paris de dessaisir les autres juridictions du Pays et
en avoir la main forte pour connaître de ces infractions.
Cette situation nous amène à nous interroger s’il ne s’agit-il pas d’une
mesure exceptionnelle, ou tout simplement d’une nécessité procédurale dictée
par l’importance des moyens dont disposent les juridictions de Paris de nature
383
Cette nouvelle incrimination est créée par la loi du 13 novembre 2014 en réponse à l’évolution
de « la menace terroriste et la commission d’actes terroristes par des individus seuls agissant
d’initiative en ne s’appuyant sur aucune structure organisée ». Ainsi, a été inséré dans le code
pénal, par l’article 6 de la loi, un nouvel article 421-2-6 permettant, , à côté de l’association de
malfaiteurs en cas de pluralité d’auteurs, d’incriminer la préparation individuelle de certains
actes de terrorisme. Les comportements prévus par l’article 421-2-6 doivent être commis
intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ayant pour but de troubler l’ordre
public par l’intimidation ou la terreur. Il faut que l’entreprise a un caractère pensé, prémédité
et organisé. La notion d’entreprise est exclusive de toute idée d’improvisation : Circulaire du 5
décembre 2014 de présentation de la loi n° 2014-1353 renforçant les dispositions relatives à la
lutte contre le terrorisme, BOMJ n° 2014 du 31 décembre 2014 – JUSD 1429083C- PAGE 1/22.
384
Yves Mayaud, op. cité.
385
Jean-François Gayraud et David Sénat, op. cité.
181
à garantir une bonne administration de la justice ? Nous allons répondre à cette
question dans le volet réservé aux dispositions de saisine et de compétence en
matière des infractions terroristes.
Bien plus, Thierry S. RENOUX ne sort pas de la ligne analytique des auteurs
précités même s’il qualifie ce type de terrorisme, par commodité de langage, dit-
il, de « terrorisme classique ». Ce terrorisme désigne des infractions qui sont
prévues par le droit commun, , désignant les atteintes volontaires aux personnes
et aux biens, à la vie, à l'intégrité physique telles que, par exemple, l'enlèvement, la
séquestration, le détournement d'aéronef, de navire, de tout moyen de transport,
les vols, destructions, dégradations, les infractions en matière d'informatique,
les faux et usages de faux mais aussi en matière de groupes de combat et de
mouvements dissous, la fabrication, la détention, ou le transport illégaux d'armes,
d'engins meurtriers, explosifs, matériels de guerre, munitions, armes chimiques
ou à base de toxines ainsi que le recel du produit de ces infractions 386.
386
Thierry S. RENOUX, «Juger le terrorisme», les cahiers du conseil constitutionnel,n° 14,2002-
2003, en ligne : www.conseil-constitutionel.fr/conseil-constitutionnel/français/nouveaux-
cahiers-duconseil/cahier/-n-14/jugerle terrorisme-sup1-sup-52024html .
387
Contrairement au législateur marocain, le législateur français a réglementé la question de
l’indemnisation des victimes des actes terroristes par des textes spéciaux en vue de combler
les lacunes enregistrées dans les règles générales de la responsabilité civile. A cet affet, il a
créé un fond de garantie en vertu du Décret n° 86-1111 du 15/10/1986. Le fond est financé
à partir d’une cotisation introduite dans les polices d’assurance d’un taux qui varie selon le
nombre des activités terroristes. Ainsi, en 1989, la cotisation a été réduite de 5 francs à 1 franc
en raison de la réduction des attentats terroristes dans cette période. En 1995, la cotisation
a augmenté jusqu’à 10 francs par chaque police d’assurance en raison de l’augmentation des
attentats terroristes lors de cette période, et en 2000 la cotisation a atteint 20 francs, ensuite,
elle est devenue 4 euros, puis 3,30 euros en 2005. Au Maroc, en vue de combler la lacune
législative dans ce domaine, Sa Majesté le Roi a promulgué un Dahir portant n° 178-03-14 du
11 septembre 2003 en vertu duquel une indemnité totale forfaitaire de 500 mille dirhams a
été accordée du budget général de l’Etat aux ayants droit de chaque victime des attentats du
16 mai 2003 perpétrés à Casablanca. Quant aux indemnités des ayants droit des victimes de
l’attentat d’Argana à Marrakech elles ont été réglées sur la base d’une conciliation amicale entre
les parties et l’Agence judiciaire du Royaume. Les montants de cette conciliation sont restés
secrets jusqu’à présent : Rahal Bouchikhi, L’indemnisation des victimes du terrorisme, étude
comparée, thèse de Master, Faculté de droit, Salé, 2013-2014.
182
B. Le cas du Maroc
Entrée en vigueur dès le 7 mai 1999, la Convention n'a été ratifiée par
le Maroc que le 30 août 2004. Elle définit le terrorisme comme "tout acte de
violence ou de menace de violence, quels qu'en soient les mobiles ou les objectifs,
commis pour exécuter individuellement ou collectivement un projet criminel en
visant à semer la terreur parmi les populations en exposant leur vie, leur liberté
ou leur sécurité en danger, ou à cause des dommages à l'environnement ou aux
infrastructures et biens publics ou privés ou à les occuper ou s'en emparer, ou à
exposer l'une des ressources nationales au danger".
388
Au Maroc, le procureur du Roi est l’équivalent du procureur de la République en France.
183
les navires de l'OTAN croisant dans le détroit de Gibraltar ainsi que des attaques
terroristes contre des cafés de la place hautement touristique de Jammaa El Fna
à Marrakech et contre des bus interurbains.
Au mois de juillet 2002, le dénommé Youssef Fikri est arrêté à Tanger. Son
interpellation est suivie aux mois d'août et de septembre d'une série d'arrestations,
notamment à Casablanca, dans des conditions qui préfigurent celles pratiquées
après le 16mai 2003.Dans une lettre adressée à la presse marocaine, Yousf Fikri
revendique plusieurs assassinats commis par le groupe qu'il dirige dans différentes
villes marocaines, dont le meurtre de son propre oncle.
184
des crimes qui peuvent être considérés comme des actes de terrorisme. Ainsi,
les articles 163 à 207 relatifs aux crimes et délits contre la sûreté de l'Etat, les
articles 392 à 424 relatifs aux crimes et délits contre les personnes, les articles
436 à 441 concernant les atteintes à la liberté individuelle et la prise d'otages et les
articles 607 bis et 607 ter concernant le détournement d'aéronefs, la dégradation
d'aéronefs et les dégradations des installations aériennes, infligent des peines
délictuelles allant de 2 à 5 ans d'emprisonnement ou des peines criminelles allant
de 5 à 30 ans et qui peuvent atteindre la perpétuité ou la peine de mort selon la
gravité de l'infraction commise".
Peuvent encore être citées les dispositions des articles 293 à 299 du Code
pénal réprimant l'association de malfaiteurs et l'assistance aux criminels, comme
la non dénonciation des actes criminels. Ainsi, le rapport du Royaume du Maroc
a pu rappeler, d’une part, que le droit marocain ne donnait pas une définition
précise du terrorisme, et que les actes terroristes étaient sanctionnés comme des
infractions de droit commun, et souligner, d’autre part, que "les actes terroristes
et qualifiés comme tels par les législations étrangères et les instruments juridiques
internationaux sont considérés comme des actes criminels et sont passibles des
peines les plus sévères allant de 5 ans de prison ferme à la peine de mort".
Le Maroc disposait ainsi sur le plan des textes légaux applicables de moyens
largement suffisants pour poursuivre et réprimer les auteurs d'actes terroristes. La
meilleure preuve en est que, s'agissant d'actes commis avant la réforme législative
promulguée le 28 mai 2003, les terroristes présumés ont été jugés et condamnés
avec une extrême sévérité dans le cadre des dispositions antérieures.
185
Cette réforme élaborée par le gouvernement marocain s'est cependant
heurtée à de très fortes critiques et résistances, ayant empêché son adoption
jusqu'à l'intervention des attentats du 16 mai 2003.C'est ainsi que le Maroc s'est
doté d'une loi applicable aux actes terroristes postérieurs au 28 mai 2003.
Cette loi, hélas inspirée par certaines des dispositions de la législation anti-
terroriste française elle-même éminemment critiquable, contient des articles qui
concernent, d'une part, le Code Pénal et d'autre part, le Code de Procédure Pénale
marocain.
186
Dans la mesure où se trouvent visées par exemple "les destructions,
dégradations ou détériorations", les craintes les plus sérieuses peuvent être
émises sur l'utilisation de ce texte répressif dans certaines hypothèses telles que
des violences survenant lors d'une manifestation syndicale. Or, les sanctions
prévues sont très lourdes puisque l'article 218-7 également rajouté au Code Pénal
prévoit la relève de la peine, comme nous allons voir ci-dessous, lorsque les faits
commis constituent des infractions de terrorisme.
Bien plus, la loi complète aussi le Code de procédure pénale par plusieurs
mesures, notamment en ce qui concerne les perquisitions et visites de domiciles
qui peuvent avoir lieu, à titre exceptionnel, avant six heures du matin et après
neuf heures du soir sur autorisation écrite du ministère public, l'interception et
l'enregistrement des communications téléphoniques, la prolongation de la durée
de la garde à vue fixée à 96 heures renouvelable deux fois pour une durée de 96
heures, le report de la communication de l'avocat avec son client sans que ce retard
ne dépasse 48 heures à compter de la première prolongation, le gel, la saisie ou
la confiscation des fonds en cas de soupçons d'opérations ou de mouvements de
fonds liés au financement du terrorisme.
187
Section 2. Divergences et convergences générales entre les
droits français et marocain
A. Divergences générales
188
De la lecture minutieuse de la définition des actes de terrorisme adoptée
par le législateur marocain, il apparaît que ce dernier n'a pas déployé beaucoup
d'efforts pour trouver cette définition. Nous pensons que la définition adoptée
par le législateur français a été transposée par son homologue marocain, sauf que
ce dernier a modifié un seul terme utilisé par le législateur français et en a ajouté
un autre.
189
La différence de l’expression « troubler gravement », utilisé par le
législateur français, et l’expression « atteinte grave » utilisée par le législateur
marocain, n’est pas sans intérêt. Même si l’on s’aligne au premier niveau de
lecture au modèle de lecture d’un texte juridique avancé par Claude Thomasset ;
celui de la compréhension du sens commun, ou analyse lexicale, c’est-à-dire, que
nous lisons un texte écrit en langage naturel 390, on peut lire que chaque terme à
un sens nuancé de l’autre.
Troubler quelqu’un, c’est susciter chez lui un état émotif, une activité
psychique anormale ou pénible qui compromet le contrôle de soi 391. La quête
de la spécificité dans la linguistique juridique veut que le langage juridique soit
corrélatif. Ceci étant, l’emploi du terme « troubler » par le législateur français,
va parfaitement avec le contexte général des autres termes de la définition,
«entreprise, terreur, intimidation », lesquels procèdent tous d’une finalité
intimidante et terrorisante.
390
Miloudi HAMDOUCHI, Droit de la manifestation, en arabe, Remald, coll. « Manuels et
Traveaux Universitaires », n° 57, 2004, p.39.
391
Le Nouveau Petit Robert, op.cit.
392
Gérard Cornu, Linguistique juridique, Montchrestien, Paris, 2000, p.268.
393
Ibid.
394
Le Nouveau Petit Robert, op.cit.
395
Julie Alix, Terrorisme et Droit pénal, Etude critique des incriminations terroristes, op. cit.
p.33.
190
Cette situation est, sans doute, tributaire à la nouveauté du phénomène au
Maroc, et à la précipitation et au fait qu’il s’agit d’une première loi qui n’a pas encore
fait l’objet d’assez de modifications ou compléments, à l’instar de la loi française.
B. Convergences générales
Ensuite, il est exigé que les actes commis aient été réalisés intentionnellement,
en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler
ou d’atteindre gravement l’ordre public.
1. L’intention
396
Gérard Cornu, op. cit. p.297.
397
Yves Mayaud, Le terrorisme, op.cit., p. 31.
191
En droit français, c’est la loi du 22 juillet 1996, qui a bien défini le terrorisme,
en vue de ne pas recourir à des poursuites basées sur des référentiels juridiques
douteux. C’est ainsi que le législateur a été déterminé à éclaircir la définition
du terrorisme, en instituant expressément l’intentionnalité, en tant qu’élément
nécessaire pour la poursuite des actes terroristes.
398
Taher ATTAF, La politique criminelle en matière de lutte contre le terrorisme, op. cit. p. 101.
399
Yves Mayaud, Le terrorisme, op., cit., p.38.
400
Gérard Lopez et Stamatios Tzitzis, Dictionnaire des sciences criminelles, op.cit., p.556.
401
Arrêt non publié,n° 22, Cour d’appel de Rabat, 19 mars 2004.
192
Que ce soit en droit français ou en droit marocain, l’entreprise terroriste
doit avoir pour objectif de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou
la terreur, ou encore, la violence, s’agissant de la partie marocaine. L’auteur du
projet terroriste ne commet pas l’acte seulement volontairement, mais il en est
motivé par un mobile exclusif, un dol spécial tendant à réaliser un trouble grave
par la propagation de la terreur ou la peur, dans les esprits des personnes. Il doit
avoir l’intention d’atteindre un certain résultat prohibé par la loi pénale, qui est,
dans le cas d’espèce, le trouble grave à l’ordre public, par la peur.
2. L’entreprise
Les actes définis par les législateurs français et marocain, pour qu’ils
soient qualifiés d’actes de terrorismes, doivent être commis en relation avec une
entreprise individuelle ou collective. Cette notion n’est pas définie par les deux lois :
française et marocaine. Une relation entre l’acte et une entreprise individuelle ou
collective doit être recherchée. Nul doute que tout acte criminel lié à un objectif
déterminé, individuel ou collectif, est l’aboutissement d’une conception planifiée
et détermination antérieures à son exécution.
402
Yves Mayaud, op., cit.,p.32.
193
le cadre d’un groupe. Malheureusement, les législateurs français et marocain
n’ont pas opéré une distinction entre l’entreprise individuelle et collective. Cette
volonté, parait-il, est utilitariste et vise, avant tout, à étendre la qualification aux
terroristes agissant individuellement 403, loin de tout groupe ou organisation.
403
L’article 421-2-6 dispose que : « Constitue un acte de terrorisme le fait de préparer la commission
d’une des infractions mentionnées au II, dès lors que la préparation de ladite infraction est
intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ayant pour but de troubler
gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur et qu’elle est caractérisée par :
1° Le fait de détenir, de rechercher, de se procurer ou de fabriquer des objets ou des substances
de nature à créer un danger pour autrui ;
2° Et l’un des autres faits matériels suivants :
a) Recueillir des renseignements sur des lieux ou des personnes permettant de mener une
action dans ces lieux ou de porter atteinte à ces personnes ou exercer une surveillance sur
ces lieux ou ces personnes ;
b) S’entraîner ou se former au maniement des armes ou à toute forme de combat, à la fabrication
ou à l’utilisation de substances explosives, incendiaires, nucléaires, radiologiques, biologiques
ou chimiques ou au pilotage d’aéronefs ou à la conduite de navires ;
c) Consulter habituellement un ou plusieurs services de communication au public en ligne ou
détenir des documents provoquant directement à la commission d’actes de terrorisme ou en
faisant l’apologie ;
d) Avoir séjourné à l’étranger sur un théâtre d’opérations de groupements terroristes.
II.-Le I s’applique à la préparation de la commission des infractions suivantes :
1° Soit un des actes de terrorisme mentionnés au 1° de l’article 421-1;
2° Soit un des actes de terrorisme mentionnés au 2° du même article 421-1, lorsque l’acte préparé
consiste en des destructions, dégradations ou détériorations par substances explosives ou
incendiaires devant être réalisées dans des circonstances de temps ou de lieu susceptibles
d’entraîner des atteintes à l’intégrité physique d’une ou plusieurs personnes ;
3° Soit un des actes de terrorisme mentionnés à l’article 421-2 lorsque l’acte préparé est
susceptible d’entraîner des atteintes à l’intégrité physique d’une ou plusieurs personnes ».
J’ai inséré cet article ici pour faciliter la compréhension de l’interprétation suivante : à mon
avis je tiens à s’aligner avec l’avis de Yves Mayaud et dire que l’insertion de l’expression
« entreprise individuelle » dans le nouvel article 421-2-6 inséré au code pénal par la loi
du 13 novembre 2014 est superflue. La notion d’entreprise individuelle est déjà prévue en
droit français depuis la loi du 9 septembre 1986. Plus que ça, le fait de rattacher la notion
« d’entreprise individuelle » aux nouveaux actes prévus par l’article 421-2-6 peut signifier
que ces actes ne sont pas réprimés en tant qu’infractions terroristes lorsqu’ils sont commis
dans le cadre d’une entreprise collective. Ainsi, pour être réprimés, ces actes doivent avoir
une relation avec une entreprise individuelle et non pas avec une entreprise collective. Ce
qui corrobore notre idée, c’est le fait que les actes cités dans le I ne sont pas contenus dans
l’article 421-1.
404
Julie Alix, op., cit., p.228.
194
Les infractions terroristes sont si graves et si dangereuses pour la société,
que les législateurs français et marocain auraient dû de préciser cette notion, en
s’exprimant de façon comprise de tous. La lisibilité de la loi est un devoir envers
ses destinataires, les personnes, et répond objectivement au principe général
selon lequel nul n’est censé ignorer la loi. Elle doit leur être accessible 405.
Or, cette notion a été déjà utilisée dans les codes pénaux français et
marocain, et elle n’y est pas inconnue. Elle est utilisée pareillement par les deux
lois pour incriminer l’entreprise de démoralisation de l’armée. Dans le nouveau
Code pénal, l’article 413-4, prévoit : « Le fait de participer à une entreprise de
démoralisation de l’armée en vue de nuire à la défense nationale ».
195
les efforts que le ministère de la justice et des libertés entament dans ce sens, qui
sont, en effet plus focalisées sur les affaires matrimoniales.
3. L’ordre public
Il n’existe aucun texte, que ce soit en droit français ou en droit marocain, qui
définit la notion d’ordre public, qui reste, à notre avis une conception abstraite et
relative, liée à chaque société, et aux principes et doctrines intellectuels, sociaux
et politiques qui la gouvernent. Probablement, cette relativité qui caractérise la
notion d’ordre public peut être la cause derrière la volonté des deux législateurs
de ne pas la déterminer de manière expresse.
407
Alain Bauer et Emile Pérez, Les 100 mots de la police et du crime, Que sais-je ? p. 14, Puf, 1° éd.
Paris 2009.
408
Ibid.
196
Le concept d'ordre public connaît une multitude d'application en raison
de ce qu'il est commun à l'ensemble des disciplines juridiques : il existe l'ordre
public en droit privé, en droit public, en droit économique, en droit des contrats,
en droit administratif. L'ordre public est une notion fonctionnelle dont le contenu
est varié dans le temps et l'espace. Précisons d'emblée que seul nous intéresse
l'ordre public au sens du droit privé.
Mais, ce qui importe plus dans l’étude de cette notion dans le cadre des
incriminations terroristes, est la détermination du degré de gravité du trouble que
le fait porte à l’ordre public ; est-il grave ou simple. Un fait ne peut être qualifié de
terroriste que quand il trouble gravement l’ordre public. Au contraire, un fait qui
ne crée pas un trouble grave à l’ordre public ne peut être qualifié en tant qu’acte
terroriste.
Pour qu’un fait soit qualifié de terroriste, il doit être commis en relation avec
une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement
l’ordre public. Ce trouble doit être donc grave, ce qui pose la difficulté de déterminer
les critères d’après lesquels un trouble est considéré grave ou simple.
409
François Gayraud, Les cents mots du Droit, Que sais-je ?, p. 80, Puf, 1° éd. Paris, 2010.
410
Ibid.
197
La difficulté de déterminer la gravité du trouble à l’ordre public réside
pareillement dans la complexité même de définir la notion d’ordre public. Puisqu’il
s’agit d’une notion à diverses connotations, flexible et évasive, elle est floue. En
effet, l’indétermination de la notion d’ordre public ne permet pas l’identification
exacte du degré du trouble à l’ordre public ; grave ou ordinaire 411.
Selon Julix Alix, la gravité du trouble à l’ordre public est déduite des
moyens utilisés par l’entreprise. Lorsque le but est exprimé, les moyens d’actions
sont présumés : «Le but exprimé d’anéantir l’autorité de l’Etat est un trouble
potentiellement grave à l’ordre public, parce que son exécution nécessite la mise
en œuvre des moyens d’action intimidants ou terrorisants. Lorsque le but n’est
pas déterminé, la gravité du trouble à l’ordre public est tirée soit des moyens
d’exécution d’ores et déjà employés par les terroristes en cause, soit des moyens
d’exécution dont l’usage est prévisible ou envisagé 412».
Il en est de même pour Yves Mayaud qui avance que les textes ne se réfèrent
pas à n’importe quel trouble, mais à des actes causant de graves conséquences pour
l’ordre public, ce qui laisse au juge une marge d’appréciation fort appréciable 413.
A notre avis, nous voyons que la notion d’ordre public porte un sens plus
extensif, ne se bornant pas à contenir uniquement les infractions graves parce
que toute infraction constitue une atteinte à l’ordre et à la marche normale de
la société, ainsi qu’a son cohésion, peut importe son degré de gravité. L’ordre
public, entendu littéralement, n’est pas une notion qui renferme l’universalité
411
Julie Alix, op.,cit., p.269.
412
Ibid
413
Yves Mayaud, op. cit., p.36.
414
Laurent Greilsamer et Daniel Schneidermann, Les juges parlent, Fayard, 1993, p. 309. ( Pierre
Lyon-Caen était procureur de la République du Tribunal de grande instance à Nanterre).
198
des incriminations de la loi 415. Ainsi, nous pensons que la notion peut accueillir
l’ensemble des troubles à l’ordre public ; ensuite vient la mission de déterminer le
degré du trouble, grave ou pas, qui caractérise les infractions terroristes, lesquels
doivent porter gravement atteinte à l’ordre public.
Bien plus et dans le même sens, Wachsman définit l’ordre public comme
« l’ensemble des valeurs dont les pouvoirs publics jugent nécessaire d’imposer
le respect à un moment déterminé » 416. Ici, Washcman utilise l’expression
« l’ensemble des valeurs », qui va dans le sens de l’avis que nous avons avancé en
haut, selon lequel l’ordre public englobe toutes les infractions à la loi. Aussi, faut-
il indiquer que cette interprétation n’est pas absolue dans le temps et même dans
l’espace, car un intérêt protégé pénalement aujourd’hui pourrait ne pas l’être
demain, lorsque les raisons qui l’ont interdit cessent d’exister. Dans le même
sens, vis-à-vis de la circonstance de l’espace, un intérêt protégé en France peut ne
pas l’être au Maroc.
415
Adolphe Chauveau et Faustin Hélie, Théorie du Code pénal, Paris, 1852, p. 4.
416
Washcman Patrick, Libertés publics, Paris, Dalloz, 5° éd., 2005.
199
Conclusion du chapitre I
200
Chapitre II :
201
Selon Jean Larguier et Philippe Conte, l'importance de la procédure pénale
s'explique à deux points de vue. D'une part, la procédure pénale est étroitement
liée au droit pénal, plus que la procédure civile ne l'est au droit civil ; tout contrat,
par exemple, ne fait pas naître un procès ; au contraire, le droit pénal "en action"
suppose l'intervention de la procédure pénale 417.
Aussi, les Codes de procédure pénale français et marocain ont subi une
série d’adaptations spécifiques aux infractions terroristes, ou plutôt, des règles
dérogatoires, puisqu’elles dérogent aux règles de procédure prévues pour les
infractions ordinaires, s’agissant des différentes démarches procédurales suivies
depuis la constatation de l’infraction jusqu’au prononcé de la condamnation
définitive, à savoir la perquisition, la garde à vue, l'interception des écoutes
téléphoniques et la compétence.
Nous pensons que ces règles spécifiques, différentes de celles prévues pour
les infractions du droit commun, avaient été dictées par la nécessité de disposer
d’instruments juridiques plus répressifs, applicables à ce genre d’infractions, eu
égard à leur dangerosité et à leurs effets graves sur la société. Nous n’allons pas
évoquer toutes les règles de procédure relatives à la lutte contre le terrorisme car
certaines existent en droit français mais ne sont pas prévues en droit marocain,
417
Ibid.
418
Ibid.
202
comme l’infiltration, la surveillance, la fixation d’image, la technique d’enquête
sous pseudonyme dite cyberpatrouille, déchiffrements des données codées. Donc,
le droit marocain procédural en matière de lutte contre le terrorisme souffre de
plusieurs lacunes. Pour cette raison nous allons voir les règles de compétence
et de la garde à vue (section 1), ensuite la perquisition et l’interception de
correspondances émises par la voie des télécommunications (section 2).
En droit français, l'article de base qui fixe, de manière générale, les règles
de poursuite, d'instruction et du jugement des infractions terroristes est l'article
706-16 du Code de procédure pénale.
Selon cet article les actes de terrorisme incriminés par les articles 421-1 à
421-6 du code pénal, ainsi que les infractions connexes sont poursuivis, instruits
et jugés selon les règles du présent code sous réserve des dispositions du présent
titre.
203
les membres des forces armées françaises ou à l'encontre de celles-ci dans les cas
prévus au chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de justice militaire.
Cet article renvoie aux articles qui déterminent les règles de compétence en
matière d'infractions de droit commun, et l'expression "compétence concurrente"
utilisée par l'article 706-17 signifie que le procureur de la république, le pole de
l’instruction, le tribunal correctionnel et la Cour d'assises de Paris sont tous
compétents au même titre que les juridictions corollaires au niveau du lieu de
l'infraction, de la résidence des personnes soupçonnées d'avoir participé à
l'infraction ou du lieu d'arrestation d'une de ces personnes.
204
l'article 706-16, le procureur de la République et le pole de l'instruction de Paris
exercent leurs attributions sur toute l'étendue du territoire national. Ainsi, on se
trouve devant une double compétence de nature à engendrer des conflits entre les
juridictions de Paris et celles locales.
419
Y. Mayaud , op. it., p. 71. De même, le Conseil constitutionnel a statué sur la question
de savoir si le jugement des auteurs des infractions terroristes par une Cour d’assisses
constituée de magistrat professionnels sans jury ne contredit pas les règles de la conformité
à la Constitution de la loi du 3 septembre 1986 instituant cette Cour d’assises sans jurés pour
juger les crimes terroristes. le Conseil constitutionnel a souligné l’intérêt constitutionnel
que présentait au contraire, pour une bonne administration de la justice, l’absence de jury
populaire: « Considérant qu’il est loisible au législateur, compétent pour fixer les règles de la
procédure pénale en vertu de l’article 34 de la Constitution, de prévoir des règles de procédure
différentes selon les faits, les situations et les personnes auxquelles elles s’appliquent, pourvu
que ces différences ne procèdent pas de discriminations injustifiées et que soient assurées
aux justiciables des garanties égales, notamment quant au respect du principe des droits de
la défense; Considérant que la différence de traitement établie par l’article 706-25 nouveau du
code de procédure pénale (à l’égard de tous les auteurs d’infractions terroristes) tend, selon
l’intention du législateur, à déjouer l’effet des pressions ou des menaces pouvant altérer la
sérénité de la juridiction de jugement; que cette différence de traitement ne procède donc pas
d’une discrimination injustifiée; qu’en outre, par sa composition, la Cour d’assises instituée par
l’article 698-6 du code de procédure pénale présente les garanties requises d’indépendance et
d’impartialité; que devant cette juridiction les droits de la défense sont sauvegardés; que, dans
ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la justice doit
être écarté ». Les craintes pressenties par le Conseil constitutionnel étaient d’ailleurs loin d’être
infondées, puisque dès le 8 septembre 1986, soit pratiquement au lendemain du prononcé de sa
décision, un attentat perpétré à l’hôtel de ville de Paris causait la mort d’un passant et blessait
grièvement seize autres personnes. Le législateur dut intervenir une nouvelle fois pour rendre
la loi nouvelle immédiatement applicable aux procédures en cours, ce qu’il fit par l’adoption
d’une loi modificatrice n° 86-1322 du 30 décembre 1986. En droit marocain, la question de la
conformité des dispositions de la loi 03-03 relatives à la lutte contre le terrorisme n’ont pas été
soumises au contrôle de conformité avec la Constitution.
205
Le système de double compétence implique que soient déterminées des
procédures destinées à éviter tout conflit entre les différentes juridictions se
trouvant en situation de concurrence. La solution est prévue par les articles 706-
18 à 706-21, qui fixent les méthodes de règlement et les modes de dessaisissement
des juridictions locales au profit des instances parisiennes.
Un avis de cette requête est porté à la connaissance des parties qui sont
invitées à présenter leurs observations et le juge d'instruction doit respecter un
délai de huit jours au moins et un mois au plus tard, après que les intéressés aient
été avisés de ce droit, pour prendre sa décision et rendre son ordonnance.
206
relatives aux décisions de dessaisissement ou de compétence des magistrats
instructeurs concernés par la situation de concurrence.
Aussi, faut-il indiquer que le juge d'instruction local demeure saisi jusqu'à
ce que l'arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation soit porté à sa
connaissance. Une fois que l'ordonnance est devenue définitive, le procureur de la
République local adresse le dossier de la procédure au Procureur de la République
de Paris.
207
Toutefois, les juridictions de jugement pourraient décerner un mandat de
dépôt ou d'arrêt contre le prévenu prononcé par la même décision de la déclaration
de la non-compétence.
L'article 272 du Code précité dispose que le renvoi pour cause de sécurité
publique peut être ordonné par la chambre criminelle de la Cour suprême sur
requête du procureur général près ladite Cour.
Aussi, le renvoi peut être ordonné pour l'intérêt d'une bonne administration
de la justice pourvu qu'il n'en résulte aucun préjudice pour la manifestation de la
vérité ou l'exercice de droits de la défense 420.
420
Art. 272, CPPM.
208
Notons que l’article 7 de la loi 03-03 relative au terrorisme ne détermine
pas la partie compétente pour ordonner le renvoi devant une autre juridiction.
Pour cette raison, nous considérons que l’article 272 du Code de procédure pénale
s’applique dans ce cas.
Il parait donc, à mon avis, que le législateur marocain a bel et bien traité
cette question de compétence en évitant toute disposition de nature à alourdir la
procédure dans ce sens. De plus, la double compétence prévue par le droit français
est susceptible de créer une certaine lenteur dans la saisine du tribunal, ce qui va
à l’encontre des motifs derrières l’adoption d’une législation spécifique aux crimes
terroristes car ces derniers nécessitent une intervention rapide des instances
policières et judiciaires, chose qui ne peut être atteinte en cas de conflit de compétence.
Nous avons vu que le deuxième alinéa de l'article 706-16 énonce que les
dispositions du titre quinzième sont également applicables à la poursuite, à
209
l'instruction et au jugement des actes de terrorisme commis à l'étranger lorsque
la loi française est applicable en vertu des dispositions de la section 2 du chapitre
III du titre 1er du livre 1er du Code pénal.
C'est ainsi que la loi pénale française est applicable à tout crime commis
par un français hors du territoire de la République. Ici, l'applicabilité de la loi
française vise tous les crimes terroristes qu'elle qu'en soit la nature. Pour les délits,
ils ne sont réprimés par la loi pénale française que si les faits qui les constituent
sont aussi punis par la législation du pays où ils ont été commis 421.
Si cet article concerne le cas d'un crime ou délit dont l'auteur est français,
l'article 113-7 traite du cas de crime ou délit dont la victime est française peu
n'importe que l'auteur soit français ou étranger.
Ainsi, la loi pénale française est-elle applicable à tout crime, ainsi qu'à tout
délit puni d'emprisonnement, commis par un français ou par un étranger hors
du territoire de la République lorsque la victime est de nationalité française au
moment de l'infraction 422.
Aussi faut-il indiquer que la poursuite des délits ne peut être exercée qu'à
la requête du ministère public à condition qu'elle soit précédée d'une plainte de
la victime ou de ses ayants droit ou d'une dénonciation officielle par l'autorité du
pays où le fait a été commis 424.
421
Art. 113-6 du Code pénal.
422
Voir Art. 113-7 du Code pénal.
423
Voir Art. 113-9 du Code pénal.
424
Voir Art. 113-8 du Code pénal.
210
De surcroît, l'application de la loi pénale française pour des infractions
commises hors du territoire de la République vise aussi les crimes et délits contre
les agents ou les locaux diplomatiques ou consulaires français.
A cet effet, l’article 10 du CPM énonce ce qui suit : « Sont soumis à la loi
pénale marocaine, tous ceux qui, nationaux, étrangers, ou apatrides, se trouvent
sur le territoire du Royaume, sauf les exceptions établies par le droit public interne
ou le droit international » 426. L’article 11 ajoute que : « Sont considérés comme
faisant partie du territoire, les navires ou les aéronefs marocains quel que soit
425
Art. 113-11 du CPF.
426
Dans cet article le législateur marocain consacre le principe de la territorialité de la loi pénale,
mais le même législateur traite les exceptions à ce principe dans les articles 704 à 712 du CPPM,
notamment la compétence relative à certaines infractions commises hors du territoire marocain
et aux relations avec les autorités judiciaires étrangères. Ainsi, l’article 704 du CPPM consacre
le même principe de la territorialité de la loi pénale, en disposant que les tribunaux marocains
sont compétents pour connaître de toute infraction commise dans le territoire marocain
quelque soit la nationalité de son auteur. On constate donc que le même principe est consacré à
la fois par la loi du fond et la loi de la forme et il est normal puisque l’application de la loi pénale
nécessite l’application de la loi de procédure et c’est ce que le législateur a entendu par cette
double énonciation du principe de la territorialité de la loi pénale à la fois dans la loi du fond et
la loi de la forme. Habib BIHI, Code de procédure pénale annoté, en arabe, deuxième partie,
1ère éd., la Maison marocaine d’édition (Dar Annachre Almaghribiya), 2006, p. 99.
211
l’endroit où ils se trouvent, sauf s’ils sont soumis, en vertu du droit international,
à une loi étrangère ».
Nous pensons que cet article complète l’article 711 du CPPM car le premier
ne vise que les infractions qu’il énumère de manière limitative et ne peut être
appliqué aux auteurs, coauteurs ou complice des infractions terroristes. Mais, la
lecture minutieuse du nouvel article 711-1 du CPPM nous permet de constater que
l’alinéa 2 est superfétatoire et est une répétition flagrante.
212
L’expression «… ne visent pas à porter préjudice » de l’alinéa 2 est incluse
dans celle « …qu’elle vise ou non à porter préjudice » dans l’alinéa 1. De même,
le premier alinéa vise « tout Marocain ou étranger » et le deuxième vise aussi
« …un étranger ». Pourquoi donc réserver un alinéa indépendant à l’étranger
alors qu’il est cité lui aussi à côté du marocain dans le premier alinéa, et tous les
deux sont soumis aux mêmes conditions.
Nous pensons que le législateur marocain a prévu cet alinéa pour répondre
aux mésures d’extradition. Il veut entendre que dans le cas d’un étranger,
l’extradition ne peut être accordée, et de ce fait, il ne peut être jugé que lorsqu’il
se trouve au Maroc. Mais, même si on présume que le législateur avait cette
intention, il aurait dû parler de «l’étranger ayant la nationalié d’un Etat requis»,
et non pas de «l’étranger en général , car un étranger terroriste, se trouvant dans
un autre état autre que l’état de sa nationalité est extradable.
213
précitées du paragraphe 3 du présent article s’appliquent aux individus possédant
la nationalité de l’une et l’autre Partie.
B. La garde à vue
214
préliminaire ou enquête de flagrance. En droit français, les modalités de la garde
à vue sont généralement déterminées pour les deux régimes d’enquête par les
articles 77 et 63 à 63-4-3 du CPPF.
1. Enquête préliminaire
215
La duré de la garde à vue en droit marocain en matière préliminaire est 48
heures prise sur autorisation du ministère public. Une prolongation de la garde à
vue peut être décidée par le ministère public une seule fois pour une durée de 24
heures, après présentation et audition du suspectée. En droit français, la durée de
la garde à vue en matière préliminaire est 24 heures renouvelable une seule fois
pour une durée qui ne peut dépasser 24 heures sur autorisation écrite, et ce après
présentation de la personne suspectée devant le procureur de la République.
Notons que le législateur français utilise l’expression « nouveau délai dont il fixe
la durée, sans que celle-ci puisse dépasser vingt-quatre heures », ce qui signifie
que la durée de la garde à vue peut être de moins de 24 heures.
431
En droit marocain, le début de la garde à vue n’est pas déterminé, mais la jurisprudence a
essayé de fixer cette durée en énonçant que la garde à vue est la période de temps que le suspect
passe dans la détention administrative sous le contrôle et la supervision de l’officier chargé de
l’enquête. La période du transport du suspect du lieu de la détention au lieu de sa présentation
devant le parquet compétent ne rentre pas dans la durée de la garde à vue : Crim. CSM, n° 475,
Revue de la jurisprudence de la Cour suprême, 25 janvier 2001.
216
son 4° que la durée de la garde à vue lorsqu’il s’agit d’une infraction terroriste est
de 96 heures renouvelables deux fois pour la même durée sur autorisation écrite
du ministère public, ladite autorisation peut être accordée sans présentation
de la personne suspectée devant le ministère public dans des conditions
exceptionnelles 432. En droit français, les mesures de la garde à vue relatives aux
infractions terroristes sont prévues par l’article 706-88 du CPPF. Cet article
renvoie aux articles 63, 77 et 154 c'est-à-dire aux articles fixant les conditions des
régimes d’enquête préliminaire, de flagrance ou de commission rogatoire.
2. En cas de flagrance
Cette durée de garde à vue qui concerne les actes de terrorisme est la plus
longue durée dans la législation marocaine. Elle peut atteindre 288 heures, soit
12 jours dans le cas de deux prolongations.
432
En droit marocain, il n’existe aucune disposition qui parle des effets du non respect des modalités
de la garde à vue, surtout le dépassement de la durée de la garde à vue au delà de la période
prescrite par la loi. Mais, la jurisprudence s’est prononcée sur cette question en énonçant que
« la cour qui a constaté que la durée de la garde à vue a durée plus que le temps déterminé par
la loi et a écarté le procès verbal de la police judiciaire, puis elle a condamné le suspect sur la
base de son aveu dans ledit procès verbal, a pris sa décision sur la base de motifs paradoxales,
ce qui rend sa décision entachée d’un manque de motifs qui équivaut à son inexistence. Crim.
n° 6846, 1 nov.1983.
433
Art. 66, al. 5, CPPM.
217
la première prolongation à la demande de l’officier de police judiciaire. Ce qui
signifie donc concrètement une absence de toute communication avec l’avocat
pendant 6 jours 434.
En droit français, la garde à vue en matière des actes de terrorisme est prévue
par l’article 706-88 qui pose plusieurs modalités et conditions à respecter par les
OPJ lorsque cette mesure est décidée. Ainsi, l’article 706-88 organise la garde à
vue en matière d’infractions entrant dans le champ d’application de l’article 706-
73, parmi lesquelles on trouve les infractions terroristes mentionnées au 11° de
l’article 706-73, comme suit : crimes et délits constituant des actes de terrorisme
prévus par les articles 421-1 à 421-6 du code pénal.
434
Art. 66, al. 8,CPPM.
435
A notre avis, le choix adopté par le droit marocain laissant le soin au ministère public
d’autoriser les prolongations de la garde à vue est plus flexible et plus objectif que dans le cas
du droit français, car la requête de prolongation est formulée par les OPJ qui sont les seuls
impliqués directement et entièrement dans les infractions depuis la commission, l’arrestation
et l’audition, et de ce fait ils sont les premiers à avoir les plus d’informations sur l’infraction et
les auteurs, ce qui leur permettre au moins d’avoir une vue d’ensemble sur la nécessité ou non
de la prolongation.
436
Alinéa 5 de l’article 706-88 du CPPF.
437
Ibid., alinéa 10. Cette faculté était ouverte par la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la
lutte contre le terrorisme.
218
La personne gardée à vue doit être présentée au magistrat qui statue sur
la prolongation préalablement à cette décision. La seconde prolongation peut,
toutefois, à titre exceptionnel, être autorisée sans présentation préalable de la
personne en raison des nécessités des investigations en cours à effectuer. En droit
marocain et dans le cas de flagrance l’autorisation de prolongation de la garde à
vue est prise sans présentation de la personne devant le ministère public.
Nous estimons que l’examen médical de tout suspect avant son placement
en garde à vue est une disposition très utile à la protection des intérêts des deux
parties : utile pour les OPJ et les gardiens des chambres de sûretés qui deviennent
exempts de toute responsabilité en cas de décès ou d’allégations de mauvais
traitement à leur encontre, utile pour les personnes gardées à vue car elle les
438
“ L’examen médical présente plusieurs singularités. En premier lieu, le gardé à vue ne choisit pas
librement le médecin qui intervient. L’examen ne répond donc pas à un principe important de
la relation qui est : le consentement mutuel nécessaire à l’établissement du contrat de soins. En
effet, le médecin est désigné par l’autorité judiciaire. D’autre part, le moment de la consultation
dépend de la disponibilité du médecin et non de celle du gardé à vue. A la fin de sa consultation,
le médecin rédige un certificat, non pas à l’intention du patient, mais de l’autorité judiciaire.
Le contenu de ce certificat doit obligatoirement se prononcer sur l’aptitude à la poursuite de la
garde à vue dans les locaux de détention. Il ne doit comporter que les réponses aux questions
posées sur la réquisition. Toute autre information dont le médecin a connaissance pendant sa
visite et sans rapport direct avec les questions posées est couverte par le secret professionnel» :
Geérad Lopez et Stamatios Tzitzis, op.cit., p. 463.
219
protège contre toute complication sanitaire imprévue. C’est pour cela que nous
suggérons que cette disposition soit prévue par le droit marocain.
220
de l’avocat avec le gardé à vue peut être différé. Il dispose que « …l’intervention
de l’avocat peut être différée, en considération de raisons impérieuses tenant aux
circonstances particulières de l’enquête ou de l’instruction, soit pour permettre
le recueil ou la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte aux
personnes, pendant une durée maximale de quarante- huit heures ou, s’il s’agit
d’une infraction mentionnée aux 3° ou 11° du même article 706-73, pendant une
durée maximale de soixante-douze heures ».
La durée de quarante huit heures est une durée maximale, ce qui signifie
que le report de l’intervention de l’avocat peut être pour n’importe quelle durée :
une heure, deux heures, dix heures…à condition qu’elle ne dépasse pas 48. C’est
dans ces conditions que la loi décide de l’autorité habilitée à prendre la décision
du report. S’il s’agit d’un report jusqu’à la fin de la 24ème heures, la décision du
report revient au procureur de la République d’office, ou à la demande de l’OPJ.
Au-delà de 24 heures, le report est décidé par le juge des libertés et de la détention
à la requête du procureur de la République.
221
part, l’exercice des libertés constitutionnellement garanties ; qu’au nombre de
celles-ci figurent la liberté d’aller et venir, l’inviolabilité du domicile privé, ( la
perquisition (A) dans notre cas de cette section), le secret des correspondances
et le respect de la vie privée ( l’interception des écoutes téléphoniques dans notre
cas ici ( B) ) , protégés par les articles 2 et 4 de la Déclaration de 1789 » 440.
1. La notion du domicile
440
CC. n° 2004-492 DC, 02/03/2004, cons. 4 , in Vincent THIBAUD, «Législation antiterroriste,
lutte contre la criminalité organisée : le Conseil constitutionnel face aux politiques pénales
contemporaines», Association Française de Droit Constitutionnel, VII Congrès français de
droit constitutionnel – 25, 26 et 27 septembre 2008, Atelier n° 5 : « Justice et Constitution ».
441
Crim. 29 mars 1994, Bull. Crim. n°118. Dans un autre arrêt, la chambre criminelle de la Cour
de cassation a considéré qu’il n ya pas une perquisition, et n’a donc pas à respecter les règles
de celles-ci, l’observation, de l’extérieur, même à la jumelle ( pour un pavillon de chasse: Crim.,
1994), ou en prenant des photos ( pour des garages: Crim., 1994, à propos de l’exécution d’une
commission rogatoire); de même le fait d’obtenir la remise volontaire d’un colis vu dans un
véhicule ( Crim., 1995), ou d’un dossier médical (Crim., 1995) ; de même des constatations
faites à partir d’un chemin extérieur (Cim., 1995) ; de même, pour le fait de pousser un portail
pour s’enquérir de l’Etat de santé d’une personne allongée ( Crim., 2003).
442
G. Lopez et S. Tzitzis, op.cit.,p.696-697.
222
Le domicile est définit dans l'article 511 du CPM comme tout bâtiment,
logement, loge, tente, cabine même mobile, qui, même sans être actuellement
habité, est destiné à l'habitation et tout ce qui en dépend comme cours, basses-
cours, garages, écuries, édifices qui y sont enfermés, quel qu'en soit l'usage et quand
même ils auraient une clôture particulière dans la clôture ou enceinte générale.
Dans le CPF la notion du domicile n’est pas déterminée bien que le texte
accorde une protection juridique au domicile dans l’article 226-4 qui dispose que :
« L’introduction ou le maintien dans le domicile d’autrui à l’aide de manœuvres,
menaces, voies de fait ou contrainte, hors les cas où la loi le permet, est puni d’un
an d’emprisonnement et de 15000 euros d’amende ».
443
Crim. 22 janv. 1997 : Bull. crim. n° 31. Contrairement au CPM , le CPF prévoit deux incriminations
qui tendent à protéger l’inviolabilité du domicile, la première imputable au fonctionnaire et l’autre
concerne le simple particulier. Ainsi, en ce qui concerne le premier genre il est énoncé par l’article
432-8 du CPF comme suit : « Le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou
chargée d’une mission de service public, agissant dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses
fonctions ou de sa mission, de s’introduire ou de tenter de s’introduire dans le domicile d’autrui
contre le gré de celui-ci hors les cas prévus par la loi est puni de deux ans d’emprisonnement et
de 30 000 euros d’amende ». La jurisprudence française nous permet de savoir des cas où la loi
permet l’introduction dans un domicile sans que soit réalisée l’infraction de violation du domicile;
« Un huissier de justice régulièrement commis pour procéder à un constat d’adultère, peut avec
l’assistance d’un commissaire de police, pénétrer, au besoin par la force, au domicile d’un citoyen
pour accomplir sa mission ; quoique regrettable, le fait qu’il ait franchi, ainsi que le commissaire
de police, le mur de clôture du jardin, haut d’un mètre cinquante, en utilisant deux chaises, ne
constitue pas une violation de domicile et n’entache pas de nullité le constat d’adultère qu’il a
dressé ». Crim. 12 juill. 1972 : Bull. crim. n° 238. Dans la jurisprudence marocaine, on trouve
l’exemple suivant selon lequel les actes accomplis par un groupe de forces auxiliaires en tant que
violation du domicile : « Un groupe des forces auxiliaires s’est introduit dans l’appartement 13
et a porté le meuble qui y existe dans un garage situé près de l’immeuble. Et considérant que cet
acte accompli par l’administration défenderesse constitue une violation de domicile garantie par
la constitution qui prévoit dans son article 10 que le domicile est inviolable ». Cour admin. de
Rabat, jugement en référés n° 1066, 17 nov. 1999.
223
Dans le but de protéger le domicile, une partie de la doctrine estime que
la notion de domicile doit être interprétée si largement pour inclure les bureaux
d'avocats et de notaires, les cliniques médicales et les chambres d'hôtels louées à
des clients 444.
2. En Cas de flagrance
224
l’article 59, si les nécessités de l’enquête de flagrance relative à l’une des infractions
entrant dans le champ d’application de l’article 706-73 l’exigent.
446
Art. 62 al. 3 du CPPM.
447
Selon la circulaire de présentation des dispositions de procédure pénale immédiatement
applicables de la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, les
nécessités de l’enquête peuvent être caractérisées par référence aux dispositions de l’article 56
relatives à la perquisition en enquête de flagrance, en tant qu’éléments de fait déjà recueillis
par les enquêteurs et qui doivent laisser présumer qu’il existe dans les lieux où la perquisition
est entreprise des pièces ou objets dont la saisie est susceptible d’apporter la preuve de
l’infraction, soit que ceux-ci se trouvent en possession de la personne qui parait avoir participé
à la commission de cette infraction, soit qu’ils sont relatifs aux faits incriminés : Circulaire de
la Direction des affaires criminelles et des grâces, Présentation des dispositions de procédure
pénale immédiatement applicables de la loi n°2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la
sécurité quotidienne, Bull.of. du ministère de la jusitice, 1er avril -30 juin 2002.
225
Dans ce cadre, l’article précité énonce que l’autorisation doit déterminer
les perquisitions pour lesquelles l’autorisation est donnée, tout en précisant la
qualification de l’infraction dont la preuve est recherchée ainsi que l’adresse
des lieux dans lesquels les visites, perquisitions et saisies peuvent être faites.
L’ordonnance d’autorisation n’est pas susceptible d’appel et elle est motivée
par référence aux éléments de fait et de droit justifiant que ces opérations sont
nécessaires.
448
La forme juridique de l’autorisation de la perquisition en dehors des heures légales en droit
français est l’ordonnance, qui est « un jugement rendu par une juridiction constituée d’un
juge unique…rendent ainsi des ordonnances les présidents des chambres de l’instruction ou
de la chambre criminelle de la Cour de cassation pour admettre les recours formés devant
leur juridiction ; le président de la Cour d’assisses, le juge des enfants, ou encore le juge de
l’application des peines » : Gérard Lopez, Stamatios Tzitzis, op.cit., p.672. Dans notre cas il
s’agit du juge des libertés et de la détention seul habilité à rendre l’ordonnance autorisant la
perquisition en dehors des heures prévues à l’article 59 du CPPF dans le cas de l’enquête de
flagrance. Dans le cadre de la commission rogatoire c’est le juge d’instruction qui autorise ladite
ordonnance.
449
Art. 60 du CPP.
226
preuves pendant le temps nécessaire au transport ». Pour procéder ainsi, l’accord
préalable du procureur de la République ou du juge d’instruction et la présence
de deux témoins ou d’un représentant désigné par celui dont le domicile est en
cause sont des conditions à respecter.
227
En droit français, au contraire, même en cas d’infractions normales,
l’article 76 du CPPF prévoit que la perquisition en dehors des heures prévues par
l’article 59 peut se dérouler sans l’assentiment de la personne si les nécessités de
l'enquête relative à un crime ou à un délit puni d'une peine d'emprisonnement
d'une durée égale ou supérieure à cinq ans l'exigent ou si la recherche de biens
dont la confiscation est prévue à l' article 131-21 du code pénal le justifie, le juge
des libertés et de la détention du tribunal de grande instance peut, à la requête
du procureur de la République, décider, par une décision écrite et motivée, que
les opérations prévues au présent article seront effectuées sans l'assentiment de
la personne chez qui elles ont lieu. S’agissant des infractions terroristes, l’article
706-90 du CPPF autorise ce genre de perquisition lorsqu’elle ne concerne pas les
locaux d’habitation suivant les modalités énoncées par l’article 706-92 que nous
avons vu dans le cadre de l’enquête de flagrance.
450
L’interception des correspondances émises par la voie des télécommunications n’est pas définit
par les législateurs français ou marocain. C’est en fouillant dans la jurisprudence française
qu’on a trouvé la définition suivante : « Ne constitue pas une interception de correspondances
émise par la voie des télécommunications, au sens des articles 8 Conv. EDH ou 100 c.pr.pén.,
le simple compte –rendu de propos entendus par des policiers au cours d’une conversation
téléphonique qui s’est déroulée en leur présence, sans artifice ni stratagème». Crim. 2 avr.
1997 : Bull. crim. n° 131.
228
l'interception, l'enregistrement et la transcription de correspondances émises par
la voie des télécommunications. Ces opérations sont effectuées sous son autorité
et son contrôle. La décision d'interception est écrite. Elle n'a pas de caractère
juridictionnel et n'est susceptible d'aucun recours ».
Mais, à notre avis, l’article 108 du CPPM prête à équivoque par son premier
alinéa, libellé de façon générale, permettant ainsi au juge d’instruction, si les
nécessités de l’enquête l’exigent, d’ordonner l’interception, l’enregistrement et la
transcription des communications téléphoniques. Il convient de souligner que
ledit alinéa ne précise pas la catégorie d’infractions visées, ce qui laisse entendre
que l’écoute, lorsqu’elle est ordonnée par le juge d’instruction, peut concerner
toutes les infractions. D’ailleurs, c’est l’avis de la jurisprudence marocaine 451.
Donc, en droit marocain le crime terroriste figure à côté des autres infractions
prévues par l’article 108. Le droit français, par ailleurs consacre un autre article
relatif à l’écoute en matière d’infractions terroristes, à savoir le numéro 706-95
du CPPF.
Aux termes de cet article, le juge des libertés et de la détention peut autoriser,
à la requête du procureur de la République, en cas de flagrance ou en enquête
451
Plusieurs arrêts rendus par la Cour de cassation marocaine vont dans ce sens en énonçant
que : « L’article 108 du code de procédure pénale permet au juge d’instruction l’émission de
l’ordre de l’interception des communications téléphoniques sans aucun besoin de la requête du
procureur général et sans respect de la liste de la catégorie d’infractions prévues par l’article
108, dès lors que l’état de nécessité lui était réalisé des faits et circonstances de l’affaire et la
façon dont ont été commis les actes objet de l’instruction », Crim. CSM. n° 31817, du 11/7/2007,
RJCS, en arabe, n° 68, p. 355 et s.
229
préliminaire relative à l’une des infractions entrant dans le champ d’application
de l’article 706-73, pour une durée maximum d’un mois, renouvelable une fois,
l’interception, l’enregistrement et la transcription de correspondances émise
par la voie des télécommunications, « plus communément appelées écoute
téléphoniques » 452. Rappelant que l’alinéa n° 11 de cet article concerne les crimes et
délits constituant des actes de terrorisme prévus par les article 421-1 à 421-6 du CPF.
Etant admis que cette prérogative est très délicate, les législateurs français
et marocains l’ont accordé aux autorités judiciaires, avec bien sûr des divergences
qui font révéler que le législateur français réserve une protection accrue aux
libertés privées des personnes comme nous allons voir.
452
Syndicat de la magistrature, Contre-circulaire, Paris, le 10 juin 2004. Le Conseil constitutionnel
français a formulé des réserves au sujet de l’écoute téléphonique demandant ainsi aux magistrats
d’exercer effectivement la plénitude de leurs prérogatives constitutionnelles aux différents
stades de la procédure pénale en examinant les conditions tenant à la légalité, à la réalité et la
pertinence des raisons ayant motivé les mesures d’atteinte aux libertés privées : Syndicat de la
magistrature, op.cit.
453
Circulaire générale _ c. 1002 du 26 septembre 1991. En droit marocain, la durée de l’écoute est
renouvelée une seule fois soit pour les infractions normales ou les infractions terroristes.
230
En droit marocain la décision d’interception des communications en matière
générale est du ressort du juge d’instruction qui a le droit de le prendre dans le
domaine de toutes les infractions, terroristes ou normales comme nous avons vu
plus haut dans la note de bas de page n° 1 de la page précédente. L’opération se
déroule sous l’autorité du juge d’instruction et du procureur du Roi, selon les cas
que nous allons voir ci-dessous.
231
Lorsqu’il s’agit d’infractions terroristes, le pouvoir d’ordonner des
interceptions de communications est une attribution exclusive du juge des libertés
et de la détention, et ce à la requête du procureur de la République. Les législateurs
français et marocain ont tous deux soumis les interceptions de correspondance
à une condition stricte. Ainsi, les juges compétents ne peuvent ordonner cette
mesure que « si les nécessitée de l’enquête l’exigent ».
De plus, les lois française et marocaine ne précisent pas les catégories des
personnes susceptibles de faire l’objet d’une mesure d’interception. Il en résulte
qu’une interception de correspondances peut être prise à l’encontre d’un inculpé
et de toute personne paraissant avoir participé aux faits, objet de l’information,
ou susceptible de détenir des renseignements concernant ces faits 455.
Il s’agit de tous les éléments dont dispose le juge et qui permettent d’identifier
la liaison à intercepter comme le numéro de la ligne, et le cas échéant, le nom de
son titulaire 456. La décision doit être écrite que ce soit en droit marocain ou en
droit français, mais en droit français il n’est susceptible d’aucun recours 457. En
droit marocain le recours est possible lorsque la décision est prise par le procureur
général du Roi dans les conditions précisées en bas.
455
Circulaire générale_ c. 100, 26 sept. 1991.
456
Ibid.
457
Ibid.
232
la Cour d'appel pour que ce dernier ordonne l'acte de l'interception des appels
téléphoniques.
458
Art. 108, al. 4, CPPM.
459
Art 108, al. 5 et 6 CPP.
460
Le ministre de l’intérieur français M. Bernard Cazeneuve s’emporte devant quelques députés
opposant le projet de loi sur le renseignement : « Les opérateurs Internet détiennent nos
données personnelles, argue-t-il, et je suis convaincu que nombre d’entre eux utilisent des
techniques extraordinairement intrusives à l’égard de nos propres existences. » Or « cela ne
pose aucun problème lorsqu’il s’agit de grands trusts internationaux (…). Mais lorsqu’un Etat
se propose de prévenir le terrorisme sur Internet, il est nécessairement suspect de poursuivre
des objectifs indignes » : Tréguer Félix, «Loi sur le renseignement en France- Feu vert à la
surveillance de masse», Le monde diplomatique, n°735, juin 2015.
233
L’article 811-3.de la loi sur le renseignement prévoit que les services
spécialisés de renseignement peuvent, dans l’exercice de leurs missions, être
autorisés à recourir aux techniques prévues au titre V du présent livre pour le
recueil des renseignements relatifs aux intérêts publics parmi lesquels figure dans
l’alinéa 4 la prévention du terrorisme.
461
Le Conseil d’État a estimé qu’au regard du principe de proportionnalité, les techniques de
recueil du renseignement portant le plus atteinte à la vie privée (captation, transmission et
enregistrement de sons et d’images, captation de données informatiques, introduction dans des
lieux privés ou des véhicules pour y placer des dispositifs techniques) devaient être entourées
de garanties renforcées : utilisation dans les seuls cas où les renseignements ne peuvent être
recueillis par d’autres moyens (subsidiarité), obligation de motivation renforcée de la demande,
autorisation pour une durée plus limitée que la durée de quatre mois prévue en général pour les
autres techniques (30 jours pour l’introduction dans des lieux privés ou des véhicules), mise en
œuvre des opérations par des agents individuellement désignés et dûment habilités appartenant
à un nombre limité de services. Il a également encadré les conditions du recours aux dispositifs
techniques de proximité permettant de recueillir des données techniques de connexion et de
localisation d’équipements terminaux et, dans certaines hypothèses très limitées, d’intercepter
directement des correspondances. Il a limité à six mois la possibilité d’utiliser ces dispositifs
sur la base d’une autorisation portant sur un service, des lieux et une période déterminés et à
72 heures la validité de l’autorisation permettant d’intercepter des correspondances : Conseil
d’Etat, avis n°398.754 du 12 mars 2015, Légifrance.gouv.fr.
234
En plus des prérogatives citées plus haut, la loi permet l’introduction
dans un véhicule ou dans un lieu privé à la seule fin de mettre en place, d’utiliser
ou de retirer les dispositifs techniques susmentionnés, à condition que les
renseignements relatifs à la prévention du terrorisme ne peuvent être recueillis
par un autre moyen légalement autorisé.
462
Le Conseil d’État saisi le 20 février 2015 et le 5 mars 2015 du projet de loi relatif au renseignement
a fait savoir que l’avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement
constituant l’une des garanties essentielles entourant le recours aux techniques prévues, le
Conseil d’État a relevé qu’il ne pourrait être dérogé à son caractère préalable qu’en cas d’urgence
absolue. Il a par ailleurs admis, pour deux seulement des techniques prévues (dispositif
permettant la localisation en temps réel d’une personne, d’un véhicule ou d’un objet et dispositif
de proximité destiné à recueillir des données de connexion ou des correspondances), qu’elles
puissent être mises en œuvre sans autorisation préalable en cas d’urgence, sous réserve de
régularisation dans les 48 heures : Conseil d’Etat, avis n°398.754 du 12 mars 2015, Légifrance.
gouv.fr.
463
Didier Bigo estime que « les défenseurs du projet ont raison de rappeler que la France était
une des rares grandes démocraties à ne pas avoir un dispositif législatif encadrant les activités
de renseignement. Cette situation met les agents des services dans une situation d’insécurité
juridique et elle avait valu à la France une mise en garde de la Cour européenne des droits de
l’homme, qui a rappelé que si l’activité de renseignement peut impliquer des dérogations à la
protection de la vie privée, celles-ci doivent être strictement contrôlées. Il fallait donc une loi,
sur ce point-là, tout le monde est d’accord. Mais, cela ne suffit pas à en faire une bonne loi,
surtout lorsqu’on recourt à la procédure d’urgence, comme l’a fait le gouvernement. Depuis
toujours, les pouvoirs politiques utilisent l’impact émotionnel du terrorisme pour passer en
force. Mais, c’est une tactique contre-productive, même lorsqu’on veut donner le maximum
d’efficacité à la loi. Seul un débat démocratique permettra de trouver le bon équilibre entre la
nécessité de maintenir les libertés fondamentales et les dérogations qui sont acceptables au
nom de la sécurité. Plus on limite la discussion, plus on donnera l’impression qu’on cherche à
limiter la vie privée et les libertés. » : Didier Bigo, «Entretien avec Eric Aeschimann», L’OBS,
tempsreel.nouvelobs.com/ loi- renseignement/7/5/2015.
235
En droit marocain, les activités de collecte de renseignement par les services
de police doivent être encadrées par un texte juridique à l’instar de la France, et
ce pour réaliser une double finalité : protection des services de renseignements et
protections de la vie privée 464.
464
Quand le Sénat français a commencé l’éxamen du projet de loi sur le renseignement, le Sénat des
Etats-Unis a voté le 2 juin le Freedom Act qui met fin à certains des pouvoirs de surveillance de
la NSA, l’Agence Nationale de sécurité américaine, sachant bien que le Gouvernement français
s’est inspiré de la loi américaine dans l’élaboration de la loi sur le renseignement.
236
Conclusion du chapitre II
La différence est très large entre les droits français et marocain en ce qui
concerne les dispositions de procédure relatives à la lutte contre le terrorisme.
La législation française est abondante, claire et détaillée. C’est un droit où toutes
les mesures relatives aux interventions des autorités judiciaires, police et juges,
sont codifiées, ne laissant rien au hasard ou sous la merci des esprits de ceux
qui détiennent le pouvoir d’appréhender et de juger les personnes, et c’est par
là que commence la lutte contre le terrorisme ; par un droit où les obligations et
les devoirs sont bien définis. Et comme « le mauvais usage de la langue …nous
fait perdre la relation authentique aux choses » 465, le manque de choses nous fait
tomber dans les désirs personnels dans l’application de la loi.
465
Christian Atias, Devenir juriste, LexisNexis, Paris, 2011, p.40.
237
Conclusion du titre I
Ainsi, tous les moyens de lutte contre le terrorisme, notamment les règles
de compétence, la garde à vue, les perquisitions sont renforcées afin de faciliter la
découverte des preuves et assurer la prévention de la société contre d’éventuelles
menaces terroristes, et le jugement des auteurs devant des juridictions spécialisées.
238
Titre II :
239
La ressemblance entre les deux législations française et marocaine s’avère
assez claire au regard de la catégorie et l’objet des infractions, instituées en actes
de terrorisme s’ils sont commis en relation avec une entreprise individuelle ou
collective ayant pour but d’atteindre gravement l’ordre public par l’intimidation
ou la terreur.
467
Mikael Benillouche et Jean-Yves Maréchal, Leçons de droit pénal spécial, ellipses, p.155, Paris,
2011.
468
Ibid.
240
en dépit du retard enregistré dans la répression du phénomène, le législateur
avait déjà de quoi s’inspirer comme toujours d’ailleurs, de la législation française
riche et avancée.
241
Le législateur marocain, à l'instar du législateur français, a énuméré, de
manière limitative, les actes pouvant constituer des actes terroristes lorsqu'ils
sont en relation avec une entreprise individuelle ou collective, ayant pour but
l'atteinte grave à l'ordre public par l'intimidation, la terreur ou la violence. Par
cette méthode restrictive, les deux législateurs, français et marocain, entendaient
spécifier, expressément, les infractions terroristes ( Chapitre I), pour éviter
toute interprétation abusive, susceptible d’élargir le champ d’intervention des
autorités judiciaires, et restreindre ainsi l’exercice sain et sauf des libertés. En
ce qui concerne la répression de ces infractions, les deux législateurs français et
marocain ont opté pour l’aggravation de la peine vu la gravité de ces actes et leur
impact horrible sur la société (chapitre II).
242
Chapitre I :
243
Avant d’exposer les infractions terroristes en droit français 469 et marocain,
il sied d’en faire une comparaison pour déterminer la situation des infractions
terroristes dans les deux lois. L’importance de cette mise en contexte est essentielle
dans la spécification des visions qu’a chaque partie, s’agissant du degré de gravité
et de menace que présentent les actes terroristes dans chaque société.
Les actes terroristes ne sont pas toujours rangés dans la catégorie des
infractions violentes, car toute infraction violente n’est pas forcément une
infraction terroriste 470. En droit français, le législateur a qualifié dans l’article
421-1 du Code pénal des actes en tant qu’infractions terroristes non pas en raison
du danger qu’ils posent à la société, mais en fonction du bien juridique protégé.
En droit français, les infractions terroristes sont rangées dans le titre deux
du livre quatrième intitulé : « Des crimes et délits contre la Nation, l’Etat, et la
paix publique ». Ce livre est réparti en quatre titres, en l’occurrence le titre I
relatif aux atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation, le titre III portant
sur les atteintes à l’autorité de l’Etat, le titre IV ayant trait aux atteintes à la
confiance publique et le titre V concernant la participation à une association de
malfaiteurs.
469
Jusqu’à la loi du 9 septembre 1986, les infractions terroristes étaient condamnées par des
incriminations éparses tant dans leur contenu, alternant l’exceptionnalité et la clémence,
que dans leur localisation. Par exemple, le délit d’apologie des actes relevant du terrorisme,
toujours en vigueur, était prévu par l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la
presse. « Cependant, l’insuffisance de clarté de la double distinction consacrée par l’instauration
du nouveau Code Pénal et l’accumulation des réformes législatives sans modification de la
définition originelle, n’ont pas modifié le biais originel des incriminations politiques : leur
plasticité. « Il nous paraît alors difficile de considérer l’avènement de la notion de terrorisme
comme une avancée satisfaisante. En effet, ce qui en 1986 n’avait pu être considérée comme une
caractérisation opportune de l’acte de terrorisme est devenue aujourd’hui, de par son intégration
dans le Code pénal nouveau, la base tout à fait acceptable d’une nouvelle incrimination », Marie
Hèlène Gozzi, Le terrorisme, Ellipses, Paris, 2003, p. 55.
470
Julie Alix, op. cit., p. 95
244
En droit marocain, les infractions terroristes sont rangées dans un chapitre
premier bis du titre I du livre III du Code pénal. Ce livre est intitulé : « Des diverses
infractions et de leur sanction » et le titre premier de ce livre est intitulé : « Des
crimes, des délits correctionnels et des délits de police ».
Le choix du triple critère basé sur l’emprunt du droit commun, des textes
spéciaux et sur une nouvelle incrimination dans la d é t e r m i n a t i o n des
infractions terroristes, laissait une marge de manœuvre considérable aux
juges, toujours susceptibles d’être contraints par les pressions du corps
social ou politique. En outre, « la gravité des actes et le volontarisme politique
s’accordaient difficilement avec un régime pénal, procédurier et pénitentiaire
plus clément pour les crimes terroristes, au moment où la France devait faire
face à une série d’attentats meurtriers 471».
Ces infractions sont réparties dans différents titres des Codes pénaux
français et marocain. En ce qui concerne le Code pénal français il s’agit notamment
du titre premier du livre trois intitulé : « Des crimes, des délits correctionnels
et des délits de police » dont le chapitre 7 relatif aux crimes et délits contre les
personnes, le chapitre 9 relatif aux crimes et délits contre les biens et le chapitre
10 concernant l’atteinte aux systèmes de traitement automatisé des données.
471
Julien FRAGNON, La gestion politique du 11 septembre en France, thèse de doctorat de science
politique, Université Lumière, Lyon 2, p.86.
472
« Il est admis que le terrorisme ne présentait pas de spécificité en soi, mais en relation avec un
contexte particulier. Cela signifie qu’il ne faut pas rechercher dans la nature même de l’infraction
ce qui permet de déterminer sa qualification de terroriste. N’importe quel acte répressible du
droit commun (assassinat, destruction, prise d’otages…) peut donc dorénavant être défini
comme “terroriste”, à la condition toutefois qu’il intervienne dans un certain contexte c’est-à-
dire qui rende compte d’un but poursuivi, des conséquences de ces agissements, et des moyens
utilisés », Marchetti, 2003, p. 602.
245
Plusieurs crimes et délits contre les personnes sont retenus par l'article
421-1 du CPF. Il s'agit : "Des atteintes volontaires à la vie, les atteintes volontaires
à l'intégrité de la personne, l'enlèvement et la séquestration ainsi que le
détournement d'aéronef, de navire ou de tout autre moyen de transport. Ces
infractions sont définies par le livre II du présent Code" 473
.
246
ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation
ou la terreur, elles se rangeraient dans le cadre des actes de terrorisme 476.
247
Le livre II du CPF inclut dans son premier titre les crimes contre l’humanité
et le génocide prévus par les articles 211-1 à 212-3. En droit marocain, il n’y a
aucune notion ou mention aux crimes contre l’humanité ou au génocide 478.
248
nouveau- né. Elle n'est punie que de la réclusion de cinq à dix ans sans que cette
circonstance puisse bénéficier à ses complices ou co-auteurs 482.
Ensuite, le Code pénal prévoit le fait d'attenter à la vie d'une personne par
l'effet de substances qui peuvent donner la mort plus ou moins promptement,
de quelque manière que ces substances aient été employées ou administrées, et
quelles qu'en aient été les suites. C'est le crime d'empoisonnement qui est puni
de la peine de mort 483.
L'emploi des tortures ou des actes de barbarie dans l'exécution d'un fait
qualifié crime constitue un fait d'aggravation de peine, et quiconque est rendu
coupable de ce crime est puni de la peine de mort 484.
482
Art. 397 du Code pénal.
483
Art. 398 du Code pénal.
484
Art. 399 du Code pénal.
485
Art. 402 du Code pénal.
249
Lorsque les blessures ou les coups ou autres violences ou voies de faits
portés volontairement mais sans intention de donner la mort, l'ont pourtant
occasionné, la peine est la réclusion de dix à vingt ans 486.
La castration est un crime très grave étant admis que son but est de
priver la victime quelque soit son sexe, des facultés de procréation. Ainsi est
réprimé chez l'homme, l'ablation de la verge ou des testicules et chez la femme
l'ovariectomie 489.
Les crimes et délits portant atteinte aux libertés des personnes sont prévus
par les articles 219 à 223 du Code pénal. Parmi ces infractions on trouve celles
commises à l'occasion des élections ainsi qu'à l'occasion des opérations de
référendums, que ce soit avant, pendant ou après le scrutin. Elles sont punies
conformément à la législation réglementant les élections en l'occurrence la loi
numéro 9-97 relative au Code électoral 490.
Les infractions à la loi électorale visent des faits qui se produisent aux
différents stades de l'élection à savoir les périodes de l'inscription sur les listes
électorales, la campagne électorale ou au cours du vote.
486
Art. 403 du Code pénal.
487
Art. 405 du Code pénal.
488
Art. 412 du Code pénal.
489
Adolf Ruolt , Code pénal annoté, El maârif Al jadida, Rabat, 1996, p. 431.
490
Art. 219 du Code pénal.
250
Il convient de noter que le législateur marocain est engagé dans une
procédure de modification de la loi électorale conformément à la nouvelle
constitution. Par conséquent, les infractions à la loi électorale commises dans le
cadre d’une entreprise collective ou privée ayant pour but l’atteinte grave à l’ordre
public par l’intimidation, la terreur et la violence ne seront étudiées dans cette
recherche qu’ultérieurement après l’adoption de la nouvelle loi.
251
d. L'enlèvement des personnes et la prise d'otages
Ainsi, l'article 436 du CPM punit ceux qui, sans ordre des autorités
constituées et hors le cas où la loi permet ou ordonne de saisir des individus,
enlèvent, arrêtent, détiennent ou séquestrent une personne quelconque. Si la
détention ou la séquestration a duré trente jours ou plus, la peine est la réclusion
de dix à vingt ans.
493
Adolf Ruolt , op. cit., p. 450.
494
Ibid.
495
Ibid.
252
vengeance 496 ou dans un esprit de lucre 497. Elle peut même se comprendre sous
enlèvement ou arrestation préalable, dans le cas par exemple, d'une famille ayant
séquestré un de ses membres pour des motifs d'intérêt 498.
496
Les cas d’enlèvement et séquestration perpétrés contre des étrangers en Iraq.
497
Le cas d’enlèvement et séquestration contre des sud-coréens par les Talibans dont un porte
parole a déclaré que leur liberté était en contre partie de 20 millions de dollars.
498
Adolf Ruolt , op. Cit.
499
Tahar ATTAF souligne qu’étant donné que la finalité derrière les actes terroristes demeure
dans l’atteinte grave à l’ordre public par l’intimidation ou la terreur, l’on se demande comment
peut on imaginer que la terreur ou l’intimidation soient réalisées par la commission d’actes de
contrefaçon ou de falsification, dès lors qu’ils pourraient être consommés sans connaissance
de personne. Probablement que le législateur marocain vise les effets que ces actes produisent
après leur commission ( Tahar ATTAF, op. cit., p.45).
500
Yousf BENBASR, Le crime terroriste au Maroc et les instruments juridiques de lutte, partie I,
Dar Alkalam, 2004, p. 73.
253
porter atteinte au crédit de l'Etat, à la propriété publique et privée et à la sécurité
des transactions 501.
Il s'ensuit que le législateur marocain fait une analogie entre les infractions
de contrefaçon ou de falsification de monnaie ou de billets de banque nationaux
et celles relatives à la sûreté de l'Etat.
254
b. Les destructions, dégradations et détériorations
La volonté du législateur est bien claire dans ce cas. Le fait d'introduire ces
infractions de droit commun parmi les actes de terrorisme quand elles sont en
relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de porter
gravement atteinte à l'ordre public par l'intimidation, la terreur ou la violence est
dû à leur degré de gravité susceptible d'entraîner de graves effets sur les personnes
et les biens.
503
Art. 585 du CPM.
255
Il y a aussi l'attentat par l'usage des engins explosifs qui est particulièrement
dangereux étant admis qu'il a des effets graves que ce soit sur les personnes ou les
biens. Le dépôt d'un engin explosif volontairement dans un lieu public ou privé
constitue une infraction consommée, même si pour quelque raison que ce soit, il
n'a pas fonctionné 504.
Dans le CPF, l'alinéa 2 de l'article 421-1 concerne : "Les vols, les extorsions,
les destructions, dégradations et détériorations, ainsi que les infractions en
matière informatique définis par le livre II du présent code". En droit marocain,
« les destructions, dégradations ou détériorations » sont prévues à part dans
l’alinéa 3, et le « vol » est rangé dans l’alinéa 5 avec « l’extorsion des biens », les
infractions en matière informatique sont aussi rangées à part dans l’alinéa 7 sous
le titre « les infractions relatives aux systèmes de traitement automatisés des
données ».
Les infractions contre les biens sont retenues par le deuxième alinéa de
l'article 421-1. La même remarque soulevée au sujet des infractions contre les
personnes peut être retenue sur le plan des infractions contre les biens : ces
infractions sont prévues par le Code pénal comme infractions normales lorsqu'elles
sont commises dans des circonstances normales n'ayant aucune relation avec une
entreprise individuelle ou collective, dont le but est de troubler gravement l'ordre
public par l'intimidation ou la terreur.
504
Art. 587 du CPM.
505
Adolf Ruolt , op. cit., p. 597.
506
Art. 594 du CPM.
256
Les infractions prévues par cet article sont d'ailleurs toutes formulées au
pluriel. L'usage du pluriel traduit la volonté du législateur français de viser tous
les actes de soustraction, de destruction, de dégradation, ou de détérioration.
Par exemple, le terme "vols" au pluriel concerne aussi bien les vols simples
que les vols aggravés tels qu'ils sont énumérés aux articles 311-1 à 311-11, et ce
en retenant toutes les qualifications concernées, telle la soustraction frauduleuse
d'énergie, qui est assimilée à une hypothèse de vol (311-2) 507. Par ailleurs, le CPM
prévoit le « vol et l’extorsion » au singulier.
Après les vols, viennent les extorsions qui ne sont pas définies clairement
dans le CPF. Ainsi, l'article 312-1 énonce que : "L'extorsion est le fait d'obtenir par
violence, menace de violences ou contrainte soit une signature, un engagement
ou une renonciation, soit la révélation d'un secret, soit la remise de fonds, de
valeurs ou d'un bien quelconque".
Yves Mayaud ne l'entend pas comme tel. Il considère que la double référence
à l'extorsion, à la fois dans l'intitulé du chapitre et dans celui de la section devrait
être saisie de deux manières : soit l'extorsion renvoie aux seules qualifications
de la section qui lui est consacrée, à l'exclusion des délits de chantage, soit, au
contraire, il faut l'entendre plus largement, non plus par référence à la seule
division qui en traite à titre spécifique, mais par référence à l'intitulé même du
chapitre, ce qui a alors pour résultat d'inclure les hypothèses de chantage 509.
507
Y. Mayaud , op. cit, p. 12.
508
Voir article 312-10 du Code pénal.
509
Y. Mayaud , le terrorisme, op.cit., p. 12.
257
Il y a lieu d'indiquer que la circulaire générale n° 93.9/ F1 présentant les
dispositions du Code pénal semble opter pour la conception la plus étroite 510.
510
Ibid.
511
Voir CPF.
512
Ibid.
258
informatique", mais "des atteintes aux systèmes de traitement automatisé de
données" 513.
Et c’est cette formule qui est adoptée par le législateur marocain dans
l’alinéa 7 de l’article 218-1 de la loi 03-03 relative à la lutte contre le terrorisme.
Mais, contrairement au législateur français qui situe ce genre d’infractions avec
les vols, les extorsions, les destructions, dégradations et détériorations, son
homologue marocain leur consacre un alinéa indépendant 514.
513
Y. Mayaud, op. cit. p. 13.
514
Ces infractions sont énoncées dans l’alinéa 7 de l’article 218-1 du CPM lequel est rédigé
comme suit : « Les infractions relatives aux systèmes de traitement automatisé des données».
D’ailleurs, c’est le même intitulé qui est donné au chapitre 10 du titre 1 du livre 3 du CPM relatif
aux infractions concernant les systèmes informatiques et même par le CPF dans le chapitre 3
du titre 2 du livre 3.
259
par application des articles 392 et 403 qui concernent respectivement le cas de
meurtre intentionnel et non intentionnel.
Dans le cadre de la loi contre le terrorisme, ces infractions ont une relation
avec l’alinéa 4 de l’article 218 du Code pénal qui parle du détournement et de la
dégradation d’aéronefs. Elles sont qualifiées crimes terroristes lorsqu’elles sont
intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective
ayant pour but l’atteinte grave à l’ordre public par l’intimidation, la terreur ou la
violence.
Selon l’alinéa 3 de l’article 607 bis, un aéronef est considéré comme en vol
depuis le moment où l’embarquement étant terminé, toutes ses portes extérieures
ont été fermées, jusqu’au moment où l’une de ces portes est ouverte en vue de
débarquement.
Bien plus, l’incrimination ne vise pas seulement les actes commis contre un
aéronef en vol, mais aussi ceux visant un aéronef en service, selon le terme utilisé
par le législateur marocain. Ainsi, l’alinéa 4 de l’article 607 bis sanctionne l’acte
de causer volontairement à un aéronef en service des dommages qui le rendent
inapte au vol ou qui sont de nature à compromettre sa sécurité en vol.
Il convient de noter que le législateur marocain n’a pas envisagé le cas des
attentats contre des aéronefs en stationnement dans les gares d’un aéroport par
exemple. En se contentant d’incriminer les actes contre l’aéronef en vol ou en
service, le législateur marocain limite la protection des aéronefs à une période de
temps, allant du moment de sa préparation au vol, le temps du vol et 24 heures
après son atterrissage.
260
Mais, la lecture minutieuse de l’article 218-1 du Code pénal permet de
conclure que cette incrimination trouve son fondement dans l’alinéa 3 qui renvoie
aux destructions, dégradations ou détériorations. Ces actes sont susceptibles de
viser aussi bien les avions en vol, en service ou en stationnement.
261
des actes qui visent à s’emparer des aéronefs à bord desquels personne n’a encore
pris place 515 ?
Même si le singulier a une valeur dont l’emploi peut énoncer une disposition
générale, «il n’a pas le monopole de cette fonction. Le pluriel est porteur
d’indications variables et quand il exprime une pluralité il désigne parfois un
groupe défini, mais peut aussi designer un groupe indéfini » 516. Le pluriel propose
que la règle puisse être appliquée à chacun des éléments du groupe 517.
262
sans préciser l’état dans lequel il se trouve ; en vol ou en sol, avec ou sans personnes.
De cette manière, il est possible de réaliser une protection accrue aux moyens de
transport aériens qui se sont des cibles préférés pour les terroristes 518.
518
Yousf BENSABER, op. cit., p. 77. Eu égard à la gravité exceptionnelle des crimes perpétrés
contre l’aviation civile et son effet destructif sur la sécurité de la navigation aérienne nationale
ou internationale, une grande importance est accordée à la sécurité de cette sorte de navigation
par la communauté internationale qui s’est soldée par la confection de trois conventions
internationales dans ce domaine comme nous avons vu dans la première partie lesquelles sont
ratifiées par la France et le Maroc. De plus et à cause de la gravité de ces crimes, plus que 800
conventions bilatérales relatives à la navigation aérienne sont signées entre les Etats : Ibrahim
Ahmed, les principes du droit public international, Dar Jamiiya, 1985, p. 112.
519
Crim. 22 nov. 1983 : Bull. crim. N° 308.
263
B. le vol et l'extorsion des biens ainsi que l’'atteinte aux
systèmes de traitement automatisé des données
1. Le vol et l’extorsion
Les dispositions traitant du vol sont les articles 505 à 536 alors que celles
concernant l'extorsion sont les articles 537 à 539 du Code pénal. Le vol est la
soustraction frauduleuse d'une chose appartenant à autrui et celui qui en est
coupable est punit de l'emprisonnement d'un à cinq ans et d'une amende de 200
à 500 dirhams 520.
L'emploi d'une arme constitue le vol le plus dangereux parce qu'il débouche
très souvent sur un crime de sang au cas où la victime résiste et même au cas où
par ses cris elle provoque l'intervention de tiers ou de forces de police 521.
520
Art. 505 du Code pénal.
521
Adolf Ruolt , op. cit., p. 524.
264
La même peine est applicable si les coupables ou l'un d'eux détenaient
l'arme dans le véhicule motorisé qui les a conduits, sur le lieu de l'infraction ou
qu'ils auraient utilisé pour assurer leur fuite 522.
En ce qui concerne l'extorsion des biens, le Code pénal punit celui qui,
par force, violences ou contraintes extorque la signature ou la remise d'un écrit,
d'un acte, d'un titre, d'une pièce quelconque contenant ou opérant obligation,
disposition ou décharge de la réclusion de cinq à dix ans 523.
Sur le plan de la gravité, nous estimons que cet acte pourrait constituer
un danger et une menace graves contre la société. Les terroristes n’hésitent pas à
utiliser l’énergie soustraite dans la marche de machines de fabrication de matières
explosives biologiques, chimiques ou même nucléaires.
522
Art. 507 du Code pénal.
523
Art. 537 du Code pénal.
524
Art. 538 du Code pénal.
265
En outre, quelques indications linguistiques peuvent être données dans ce
sens. Celles-ci concernent la rédaction à la forme singulière de l’alinéa 5 de l’article
218-1 du Code pénal marocain « le vol et l’extorsion des biens », contrairement à
la forme pluriel de rédaction de l’alinéa 2 de l’article 421-1 du Code pénal français
« les vols, les extorsions … ».
Comme nous l’avons vu plus haut, même si le singulier a une valeur dont
l’emploi peut énoncer une disposition générale, « il n’a pas le monopole de cette
fonction. Le pluriel est porteur d’indications variables et quand il exprime une
pluralité il désigne parfois un groupe défini, mais peut aussi designer un groupe
indéfini » 525. Le pluriel propose que la règle puisse être appliquée à chacun des
éléments du groupe 526.
525
Gérard Cornu, op. cit., p.283.
526
Ibid.
266
il laisse subsister l’équivoque et la non clarté, s’agissant des infractions concernées
par la législation.
Depuis les attaques du 11 septembre aux Etats-Unis, toutes les nations ont
dirigé leur attention vers la création de méthodes de lutte contre le terrorisme
cybernétique, auquel les terroristes ne cessent de penser pour détruire les systèmes
de communication utilisés par les services vitaux des Etats 527. Aux Etats-Unis,
le FBI a estimé que le coût moyen supporté par l’Etat afférent à chaque crime
perpétré par Internet est 500,000 dollars. Alors que le coût supporté par chaque
utilisateur de computer varie entre 100 et 150 dollars. D’autres estimations
indiquent que les pertes résultant des crimes informatiques et technologiques
varient entre 10 et 15 milliards de dollars par an 528.
527
Tony Aeilts, «Defending against cybercrime and terrorism», FBI Law Enforcement Bulletin,
volume 74, janvier 2005 , p.14.
528
Ibid.
529
La loi n° 07-03 n’a été publiée au Bulletin Officiel qu’en date du 7/2/2004.
267
Les dispositions pénales de la loi n° 07-03 précitée ont été introduites
dans le Code pénal dans les articles 607-3 à 607-11. Les infractions d'atteinte aux
systèmes de traitement automatisé des données, qui ressortent du droit commun,
deviendront des actes de terrorisme quand elles sont commises dans le cadre
d'une entreprise individuelle ou collective dont le but est de porter gravement
atteinte à l'ordre public par l'intimidation, la terreur ou la violence, selon l’article
218-7 du Code pénal déterminant les actes de terrorisme.
In fine, nous estimons que les exemples d'infractions que nous avons
étudiées sont susceptibles de constituer un répertoire important pour tout
intéressé de l'étude des actes de terrorisme en droit marocain.
530
Art. 607-3 du Code pénal.
531
Art. 607-4 du Code pénal.
268
d'un des actes de terrorisme, le recel sciemment du produit d'une infraction de
terrorisme, l'apologie d'actes constituant des infractions de terrorisme, le fait
d'introduire ou de mettre dans l'atmosphère, sur le sol, dans le sous-sol ou dans
les eaux, y compris celles de la mer territoriale, une substance qui met en péril
la santé de l'homme ou des animaux ou le milieu naturel, le fait de persuader,
inciter ou provoquer autrui à commettre l'une des infractions de terrorisme et la
non-révélation d'infractions de terrorisme.
Aussi, faut-il mentionner que la loi 03-03 relative au terrorisme n'a pas
traité des infractions de blanchiment ; celles-ci n'étaient pas prévues dans le Code
pénal marocain comme c'est le cas dans le Code pénal français.
269
remonte au temps du protectorat 532. Il s’agit des Dahirs relatives aux armes,
explosives ou munitions du 13-03- 1937, à la navigation maritime de 1912 et
au Code de commerce, en ce qui concerne la falsification ou la contrefaçon des
chèques.
Il convient de signaler tout d’abord que les textes spéciaux en droit marocain
relatifs aux armes, explosifs ou munitions ont été adoptés au temps du protectorat.
Ils sont donc un produit de l’administration française, et de ce fait il n’ya pas
de différence entre les textes français et marocain, sauf en ce qui concerne les
complétions et les modifications survenues du côté français qui parle des armes
biologiques, chimiques ou nucléaires, lesquelles n’ont pas d’équivalent dans les
textes marocains. Et comme il a été annoncé plus haut, nous allons faire une
mention succincte des textes français, et nous focaliser plus sur le droit marocain,
étant admis que cette recherche est destinée principalement à une université
française et, par ricochet, aux lecteurs français.
532
Le protectorat français du Maroc est le régime politique mis en place au Maroc, sur une bonne
partie de son territoire, par le traité franco-marocain conclu à la ville de Fès entre la France
et le Sultan du Maroc Moulay Hafid. Officiellement, il était nommé protectorat français dans
l’empire chérifien ou protectorat de la République française au Maroc qui perdura jusqu’en
1956. Selon l’article premier du traité de Fès, ayant institué le régime du Protectorat, le
gouvernement de la République française et Sa Majesté le Sultan sont d’accord pour instituer
au Maroc un nouveau régime comportant les réformes administratives, judiciaires, scolaires,
économiques, financières et militaires que le gouvernement français jugera utile d’introduire
sur le territoire marocain. Voir Histoire du Maroc des origines à nos jours, Bernard Lugan,
éditions Ellipses, 2011, p. 245. Ainsi on peut dire, à bon droit, que les Dahirs remontant au
temps du Protectorat étaient une pure production des autorités françaises, representées par un
commissaire Résident- général dépositaire de tous les pouvoirs de la République au Maroc. Ces
textes demeurent en vigueur jusqu’à présent.
270
l'article 3 de la loi du 19 juin 1871 qui abroge le décret du 4 septembre 1870 sur
la fabrication des armes de guerre (alinéa 4 de l'article 421-1) ; la production, la
vente, l'importation ou l'exportation de substances explosives définies à l'article
6 de la loi n° 70-575 du 3 juillet 1970 portant réforme du régime des poudres et
substances explosives (point 2 de l'alinéa 4 de l'article 421-1) ; l'acquisition, la
détention, le transport ou le port illégitime de substances explosives ou d'engins
fabriqués à l'aide desdites substances, définis à l'article 38 du décret-loi du 18 avril
1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions (point 3, alinéa
4, article 422-1) ; la détention, le port et le transport d'armes et de munitions des
première et quatrième catégories, définis aux articles 24, 28, 31 et 32 du décret-
loi précité (point 4, alinéa 4, article 421-1) ; les infractions définies aux articles 1er
et 4 de la loi n° 72-467 du 9 juin 1972 interdisant la mise au point, la fabrication,
la détention, le stockage, l'acquisition et la cession d'armes biologiques ou à base
de toxines (point 5, alinéa 4, art. préc.).
Aussi et dans le but de combler les lacunes concernant la liste des infractions
susceptibles d’être commises à des fins terroristes énumérées par l’article
421-1 du code pénal, le législateur français a adopté la loi n° 2014-1353 du 13
novembre 2014 renforçant les dispositions de lutte contre le terrorisme. En effet,
ne figuraient pas dans cette liste limitative les infractions relatives aux produits
explosifs prévues et réprimées par les articles 332-6-1 et 322-11-1 du code pénal.
Selon l’article 421-2-6 de la même loi, il est exigé en premier lieu que
l’intention terroriste individuelle soit matérialisée par le fait de détenir, rechercher,
se procurer ou fabriquer des objets ou des substances de nature à créer un danger
pour autrui. D’après la circulaire du 5 décembre 2014 de présentation de la loi
n° 2014-1353 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme-
Renforcement de la coordination de la lutte antiterroriste, « la notion d’objets
ou substances de nature à créer un danger pour autrui renvoie notamment aux
armes de toutes catégories, aux engins ou produits incendiaires ou explosifs ou
encore aux substances biologiques ou chimiques » 533.
533
Circulaire du 5 décembre 2014 de présentation de la loi n° 2014-1353 renforçant les dispositions
relatives à la lutte contre le terrorisme- Renforcement de la coordination de la lutte antiterroriste,
BOMJ n° 2014-12 du 31 décembre 2014, p.8.
271
Ainsi, l’objet de l’article 421-2-6 du CPF est en effet plus large, d’une part,
par son objet, puisqu’il vise tout objet ou substance de nature à créer un danger
pour autrui, il permet notamment de viser les armes et munitions de catégorie D,
et d’autre part, par les agissements qu’il réprime ; puisque se situant en amont
de l’acquisition ou de la détention, il vise aussi la recherche en vue de se procurer
ces objets ou substances dangereuses 534. Il permet également d’inclure la
détention irrégulière d’armes. Concernant les produits inoffensifs en eux-mêmes
qui, mélangés à d’autres permettent de fabriquer des substances explosives ou
incendiaires, ils pourront être considérés comme des substances de nature à créer
un danger pour autrui dès lors que ce dernier but sera établi 535.
534
Ibid., p.9.
535
Ibid.
536
Circulaire de présentation de la loi n° 2014-1353 du 13 nov. 2014, p. 9.
537
Ibid.
272
entrainements purement physiques ou sportifs, sans relation direct avec une
forme de combat, ne paraissent pas entrer dans le cadre de la prévention 538.
En droit marocain, les infractions que nous venons de citer ont été recement
introduites dans le Code pénal marocain en vertu de la loi n° 86-14 modifiant et
complétant certaines dispositions du code pénal et du code de procédure pénale,
relatives à la lutte contre le terrorisme promulguée par Dahir n° 1.15.53 du 20
mai 2015, et de ce fait elles peuvent être jugées conformément aux dispositions de
cette loi. Toutefois, cette nouvelle loi ne prévoit pas les actes de surveillance, ou de
repérages préalables à l’acte terroriste, le fait de recueillir des renseignements sur
des lieux ou, personnes pour mener des actes terroristes à leur encontre. Aussi,
cette loi ne réprime pas de manière spècifique le fait de se former au maniement des
armes ou à toute forme de combat, à la fabrication ou à l’utilisation de substances
explosives, incendiaires, nucléaires, radiologiques, biologiques ou chimiques ou
au pilotage d’aéronefs ou à la conduite de navires.
On peut dire donc que les agissements réprimés par l’article 421-2-6 du
CPF en 2014 ont été pratiqués par le terroriste Adil El Atmani qui a perpétré
l’attentat terroriste du café Argana à Marrakech où 16 personnes dont 8 françaises
sont décédées. Après avoir échoué à rallier les groupes terroristes d’Al-Qaeda en
Tchétchénie ou en Irak, il a décidé de mener le Djihad dans le Royaume, et a
commencé à consulter les sites internet montrant les méthodes de fabrication
des explosifs, en vue de mener un attentat terroriste contre les ressortissants
occidentaux au Maroc 539.
538
Ibid.
539
«Marrakech autopsie d’un acte terroriste», Police Magazine, n° 77, 2011, p.25.
273
Ainsi, il a commencé par fabriquer un engin explosif à base de sucre glace
et de souffre d’allumettes, raccordé à un détonateur muni d’une batterie, tout
en testant une déflagration réussie dans un terrain vague situé à « Sidi Daniel »
dans la région de Safi. Grace aux informations qu’il puise dans les sites internet,
il a réussi à améliorer son savoir faire et a commencé à acquérir des matières
nécessaires à la composition d’une charge explosive, environ six mois avant
l’attentat, qu’il a déposées au domicile de son père, cheminot en France. Il a
mélangé ces matières avec du nitrate d’ammonium et a obtenu 120 grammes de
charge explosive, qu’il a actionné à l’aide d’un cellulaire modifié, d’une dynamo et
d’une batterie au cours d’un test effectué à la même localité « Sidi Daniel » 540.
Ces deux tests réussis, il s’est ensuite procuré deux autocuiseurs (de 11 et 20
litres), 15 kg de clous, 5 kg de colle, des produits chimiques, ainsi qu’un matériel
d’appoint. Après mélange de ces matières, il a pu faire des charges explosives de
9 et 6 kg, qu’il a placées dans deux marmites, il a modifié un cellulaire destiné
à actionner à distance ces charges. Après, il a commencé à faire des repérages
du site ciblé en cherchant un lieu public avec une forte affluence des touristes
occidentaux, puis il s’est déplacé à Marrakech un mois avant l’attentat en vue de
faire la reconnaissance du café « France » à Jamaa Lafna, avant de choisir le café
« Argana » 541.
540
Ibid.
541
Ibid.
274
Alors que le Dahir parle de l'importation, le commerce, le port, la détention
et le dépôt des armes et de leurs munitions, l'alinéa 6 de l'article 218-1 parle de
la fabrication, la détention, le transport, la mise en circulation ou l'utilisation
illégale d'armes, d'explosifs ou de munitions.
On remarque que le Dahir ne fait pas état de fabrication des armes sauf en
ce qui concerne les armes traditionnelles, le Maroc n'étant pas un pays fabricant
542
Art. 15 du Dahir du 31 mars 1937.
543
Art 19 du même Dahir.
275
d'armes. Mais l'article 218-6 évoque l'infraction de la fabrication d'armes ou de
munitions empruntée d'un autre Dahir qui sera cité ci-dessous.
Il y a lieu d'indiquer que le Dahir du 31 mars 1937 n'évoque pas les explosifs.
Ces matières dangereuses, lorsqu'elles sont utilisées pour des fins terroristes, sont
réprimées par le Dahir n° 1-58-286 du 2 septembre 1958 sur la répression des
infractions à la législation relative aux armes, munitions et engins explosifs.
Selon l'article premier dudit Dahir, tout individu qui, en violation des
dispositions législatives et réglementaires en vigueur, détiendra, constituera
en dépôt, fabriquera ou se livrera d'une manière quelconque au commerce, à
l'importation ou au trafic des armes, munitions, machines, engins meurtriers,
incendiaires ou explosifs, sera puni d'une peine de prison de cinq à vingt ans et
d'une amende de 100.000 francs à 2.000.000 de francs sans préjudice s'il y a
lieu, des peines encourues pour crime d'atteinte à la sûreté intérieure de l'Etat.
276
1. La sécurité maritime en droit français
C’est ainsi que l’article 224 - 6 de la loi pénale française ne concerne pas
seulement les actes criminels dirigés contre les aéronefs, mais aussi les navires.
Il réprime le fait de s’emparer ou de prendre le contrôle par violence ou menace
de violence d’un aéronef, d’un navire ou de tout autre moyen de transport à bord
desquels des personnes ont pris place … de vingt ans de réclusion criminelle.
Même si l’article n’utilise pas le mot piraterie, il n’en demeure pas moins que
le fait de s’emparer illégalement d’un navire avec des personnes sur place est un
acte de piraterie si l’on se permet de se référer à l’article 4 de la loi du 10 avril 1825
abrogée, et l’article 101 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.
Les pirates ont été arrêtés après la libération des otages et sont restés en
détention provisoire pendant quatre ans sur le sol français pour enlèvement,
séquestration et vol en bande organisée .A cette époque, la loi française ne donne
277
pas aux juridictions françaises une compétence quasi universelle pour juger les
pirates arrêtés par les agents français quelle que soit la nationalité du navire ou
des victimes.
Les circonstances qui viennent d’être citées ont amené le législateur français
a adopté la loi numéro 2011-13 du 5 janvier 2011relative à la lutte contre la piraterie
et à l’exercice des pouvoirs de police de l’Etat en mer. Il convient de noter que
cette loi tente de combler les lacunes juridiques constatées depuis l’abrogation
de la loi du 10 avril 1825 en se calquant sur le modèle de la législation en matière
de terrorisme. Mais, il ne définit ni n’incrimine spécifiquement l’infraction de
piraterie maritime. Elle fait le choix de renvoyer limitativement à des infractions
préexistantes et susceptibles d’être qualifiées d’actes de piraterie (C. pén.art.,
224-6, à 224-7 et 224-8-1) ; enlèvement et séquestration ( C.pén.,art.224-1à 224-
5-2et 224-8) ; participation à une association de malfaiteurs(C. pén.,art.450-1 et
450-5).
Cette loi donne aux tribunaux français le droit de poursuivre les auteurs
d’actes de piraterie, peu importe la nationalité des navires ou des victimes. Le texte
prévoit l’adaptation de la législation française aux conventions internationales
dont celle de Montego Bay relative au droit de la mer entrée en vigueur en 1994 et
réintroduit la piraterie en droit français.
En plus, la loi accorde aux commandants des navires français les pouvoirs
d’un officier de police judiciaire. Ils pourront contrôler les navires suspects,
ordonner l’ouverture du feu et le déroutement, procéder à des saisies, arrêter et
déférer des pirates, détruire des embarcations.
278
Les dispositions relatives à la répression des activités criminelles contre
la navigation et le commerce maritime sont prévues dans l’annexe 2 du Dahir du
31 mars 1919 portant Code disciplinaire et pénal de la marine marchande et sont
constituées de 27 articles.
279
ou de l’une de ces deux peines seulement. Notons que ce Dahir renvoie toujours
à des amendes dont le montant est calculé en franc 544, qui n’a plus cours légal au
Maroc depuis son indépendance.
L’annexe prévoit aussi des actes qu’elle qualifie comme crimes et qui sont
rangés sous le chapitre 2 intitulé : « Des crimes maritimes et de leur punition ».
Ces crimes sont tous indiqués dans l’article 23 qui commence par déterminer la
peine applicable à ces crimes, en l’occurrence les travaux forcés à temps. Les actes
visés dans ces articles sont le complot contre la sûreté, la liberté ou l’autorité du
capitaine, le refus collectif des officiers, maîtres et hommes d’équipage d’obéir à un
ordre formel du capitaine malgré une sommation expresse et le crime de piraterie.
544
La monnaie marocaine était le franc pendant le Protectorat français ; les Dahirs et lois qui
comportent encore cette référence à cette monnaie sont encore en vigueur et le législateur
marocain, malgré l’indépendance du Maroc il y a presque 57 ans, ne les a pas encore modifiés.
Dans l’application, les juridictions marocaines convertissent les francs en dirhams de sorte que
chaque franc est égal à un dirham. Les juridictions s’appuient en cela sur article 17 du Code
pénal qui dispose que les peines délictuelles principales sont l’emprisonnement et l’amende de
plus de 1200 dirhams. La même chose peut être dite en ce qui concerne l’existence dans certains
Dahir de référence à des responsables Français revenant au Protectorat comme le Commissaire
Résident général. Cette situation peut être comparée avec celle de la loi française du 10 avril
1825 relative à la piraterie, qui n’a pas été abrogée qu’en 2007, où on peut lire dans l’alinéa 1 de
l’article 3 « …tout Français ou naturalisé Français qui, sans l’autorisation du roi… » ; référence
à un régime politique révolu.
545
Le Commissaire Résident général était, au temps du Protectorat, le représentant du
Gouvernement Français auprès de Sa Majesté chérifienne, dépositaire de tous les pouvoirs de
la République au Maroc.
280
b. Tout individu faisant partie de l'équipage d'un navire marocain qui, sans
approbation ou commission régulière, commet des actes de dégradation ou de
violence envers un navire marocain ou étranger, son équipage, ses passagers ou
son chargement ; c. Tout individu faisant partie de l'équipage d'un navire étranger
qui sans approbation de leur gouvernement, commet des actes de dégradation
ou de violence envers un navire marocain, son équipage, ses passagers ou son
chargement ;
Bien plus, il convient de citer, comme il a été indiqué plus haut dans le
numéro relatif aux atteintes aux moyens de transport, le cas de l'article 580 du
CPM que nous avons vu lequel punit de mort quiconque met volontairement
le feu à des navires ou bateaux quand ils sont habités ou servent à l'habitation,
qu’ils appartiennent ou non à l’auteur du crime. Ici, l’acte constitue une sorte de
destruction par le feu de moyens de transport maritime, utilisés en tant que lieu
d’habitation, ou aménagé pour en servir. Il convient de noter que le législateur
marocain renvoie, à la fois, à un article de droit commun, et à un texte spécial,
pour réprimer les atteintes aux navires.
546
Julie Alix, op.cit., p.440.
281
nature et l’objet des infractions prévues dans le chapitre premier bis. C’est pour
cette raison que le législateur marocain a ajouté à son intitulé le terme «bis», en
le rattachant ainsi au chapitre premier sous le titre: «Des rimes et délits contre la
sûreté de l’Etat» 547.
Ces nouvelles infractions ont été retenues pour répondre aux attentes
des spécialistes de la lutte anti-terroriste qui ont fait remarquer que les groupes
de combat ou mouvements interdits sont toujours à même de poursuivre leurs
activités, particulièrement à des fins terroristes, en dépit de leur interdiction ou
dissolution 548.
547
La situation des chapitres au sein des livres du code pénal, ainsi que l’ordre de classement
nécessitent une attention particulière car ils révèlent « une hiérarchie des valeurs ou des biens
protégés, donc une position essentielle de politique législative ». Poncela et Pierre Lascoumes,
Réformer le Code pénal : où est passé l’architecte ?, cité par Julie Alix, op.cit., p.430.
548
Y. Mayaud , Le terrorisme, op.cit., p. 14.
282
1. qui provoqueraient à des manifestations armées dans la rue ;
2. Le terrorisme écologique
283
celles de la mer territoriale, une substance de nature à mettre en péril la santé de
l'homme ou des animaux ou le milieu naturel" 550.
Les infractions énoncées dans l'article précité n'ont pas leur équivalent
dans le droit commun. Yves Mayaud voit que le Code pénal va plus loin quand
il consacre la notion du terrorisme écologique. Ainsi, ces infractions ne sont
pas dérivées de crimes ou de délits de droit commun, mais elles constituent des
infractions originales et autonomes 551.
En outre, l'atmosphère naturelle visée par l'article précité n'est pas définie
malgré le fait que le législateur énumère, de manière précise, l'espace de la
commission de l'infraction terroriste visant la nature, à savoir l'atmosphère, le
sol, le sous-sol, les eaux y compris celles de la mer territoriale.
Dans ce cadre, l'article 410-1 du Code pénal prévoit ce qui suit : "Les
intérêts fondamentaux de la nation s'entendent au sens du présent titre de
son indépendance, de l'intégrité de son territoire, de sa sécurité, de la forme
républicaine de ses institutions, des moyens de sa défense et de sa diplomatie,
de la sauvegarde de sa population en France et à l’étranger, de l'équilibre de son
550
Le terme écologie est très large et comporte plusieurs significations. Elle est le cadre au sein
duquel vit l’homme comprenant tout ce qui l’entoure, à savoir l’air, l’eau, le sol, la lumière du
soleil, les mines dans le sous-sol, les matières botaniques et les animaux qui existent sur le sol,
dans les mers, les océans et les rivières. En général, toutes les ressources naturelles et les êtres
vivant qui existent à côté de l’être humain, ce dernier vient à leur tète, Le monde des sciences,
L’urbanisme islamique et l’écologie, en arabe, 2004, n° 304, p.8 .
551
Y. Mayaud , Le terrorisme, op. cit., p. 24.
284
milieu naturel et de son environnement et des éléments essentiels de son potentiel
scientifique et économique et de son patrimoine culturel".
Le CPM contient la même infraction dans l’article 218-3 qui est rédigée de la
même manière qu’en droit français sauf en ce qui concerne quelques modifications
linguistiques qui change, à notre avis, l’étendue de l’incrimination. Ainsi, l’article
218-3 du CPM dispose que : « Constitue également un acte de terrorisme au sens
du premier alinéa de l’article 218-1 ci-dessus, le fait d’introduire ou de mettre
dans l’atmosphère, sur le sol, dans le sous-sol ou dans les eaux, y compris celles
de la mer territoriale, une substance qui met en péril la santé de l’homme ou des
animaux ou le milieu naturel ».
552
Le rôle du droit pénal est de réprimer les troubles graves à l’ordre public, il permet ainsi d’assurer
l’ordre public dans la société, et donc la sécurité, laquelle constitue l’une des trois composantes
classiques de l’ordre public, au même titre que la salubrité et la tranquillité publique. La mission
de la sécurité publique est d’ordre général qui nécessite l’intervention du législateur en matière
pénale et l’action des autorités de lutte contre la criminalité en général. ( Julie Alix, op.cit.,
p.447. M. Vitu définit la sécurité publique au sens général come « une situation dans laquelle se
trouve la société lorsqu’elle est à l’abri de troubles nés, en particulier de la commission d’actes
délictueux », et au sens particulier, « situation vers laquelle tend l’ensemble des dispositions,
pénalement sanctionnées, qui ont pour but de neutraliser ou d’éliminer le potentiel dangereux
de certains individus ou de certaines choses ». ( cité par Julie Alix, op., cit., p. 447). C’est donc
la mission incombant à l’Etat d’assurer la protection des personnes et des biens par la mise
en place de systèmes juridiques, lois et règlements, tendant à réprimer tout acte visant à leur
porter atteinte. Cette sécurité tend à réglementer et organiser de manière générale la vie et
l’activité normale sans dommages ni troubles dans la société.
285
A notre avis, en faisant cela, le législateur français entend dire qu’il s’agit d’une
infraction autonome 553. De même, le CPM utilise l’expression « une substance
qui met en péril la santé de l’homme… », alors que le CPF utilise l’expression
plus large « une substance de nature à mettre en péril la santé de l’homme… ».
553
Il a été souligné maintes fois dans cette recherche que la méthode initiale retenue par le législateur
français suppose nécessairement une incrimination préalable dans le cadre du droit commun
des comportements sur lesquels pourra s’atteler, le cas échéant, une qualification terroriste.
Mais la question qui se posait ensuite au cours de l’application de la loi du 9 septembre 1986
c’est comment agir si le comportement que les tribunaux entendent qualifier de terroriste n’est
pas prévu en droit commun. La solution adoptée par le législateur français consistait donc à
créer des infractions exclusivement terroristes, des infractions de terrorisme autonome ( Julie
Alix, op. cit., p. 57). C’est dans ce cadre que le terrorisme écologique a été incriminé en vertu
de la loi du 22 juillet 1992. Quant au législateur marocain, il a emprunté cette incrimination,
comme toutes les autres d’ailleurs, au droit français dans la loi 03-03 relative au terrorisme,
lequel était la première législation en matière terroriste.
554
Y. Mayaud , Le terrorisme, op. cit., p. 26.
555
Que ce soit en droit français ou en droit marocain, la qualification de l’acte en tant que terroriste
ne se réalise qu’avec la réalisation du mobile derrière sa commission. Si le mobile consiste en
une finalité matériel de l’auteur, l’infraction demeure dans le cadre de droit commun, et si le
mobile de l’auteur est la destruction de l’écologie en vue de créer la terreur et l’intimidation
dans la société et troubler gravement l’ordre public, l’acte est qualifié en tant que terroriste.
L’acte est différent de l’usage des armes chimiques et biologiques en temps de guerre dont la
responsabilité revient aux Etats qui ordonnent à ses forces l’usage de telles matières prohibées
mondialement : Tahar Attaf, op.cit., p. 67).
286
terrorisme le fait de participer à un groupement formé ou à une entente établie
en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits, d'un des actes de
terrorisme mentionnés aux articles précédents".
Ainsi, on peut dire que depuis la loi du 22 juillet 1996, le CPF réprime,
sur le fondement de l’article 421-2-1, l’association de malfaiteurs en relation
avec une entreprise terroriste. Ces faits tombaient auparavant sous l’empire de
l’incrimination générale d’association de malfaiteurs prévue par l’article 450-1
du même code 556. Le législateur n’a pas souhaité faire figurer cette incrimination
dans la liste de l’article 421-1 pour éviter qu’elle soit passible de peines criminelles,
ce qui eût nuit à l’efficacité de la répression 557
.
287
On constate que l’article 293 du CPM relative à l’association de malfaiteurs
se contente de réprimer les crimes seulement, sans faire aucune référence aux
associations visant la commission de délits. Au contraire, le CPF mentionne
expressément les deux catégories d’infractions, crimes et délits commis par une
association de malfaiteurs.
Yves Mayaud remarque aussi qu'il s'agit des actes de terrorisme commis par
une association de malfaiteurs telle qu'elle est définie par l'article 450-1 du même
Code. L'article 421-2-1 reprend les mêmes expressions utilisées dans l'article 450-1
pour définir l'association de malfaiteurs, en l'occurrence "groupement formé ou
entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits
matériels".
558
Y. Mayaud, Le terrorisme, op. cit., p.29.
559
Sergio Losappio, «La répression de l’entente en droit pénal français et son application à la lutte
antiterroriste», www.village-justicie.com.
560
Ibid.
561
Voir les articles dans le Code pénal.
288
C'est un renvoi limitatif qui ne permet pas d'élargir l'application des
dispositions de cet article à tous les crimes et délits, mais il restreint son application
aux infractions citées par les articles 421-1 et 421-2, ce qui aurait un impact sur le
volet de la répression 562.
Aussi, faut-il préciser que l’entente suppose l’existence d’un plan concerté
et une organisation collective à l’origine de son élaboration. En conséquence,
cette infraction appartient, si l’on se permet d’utiliser l’expression du professeur
Philippe Conte, «à la catégorie des infractions collectives» ; sa commission par
un unique individu est juridiquement inconcevable 563.
562
Les actes de terrorisme par association de malfaiteurs sont réprimés par des sanctions plus
graves que celles réprimant les infractions de l’article 450-1 étant admis que ce dernier article
concerne aussi bien les crimes que les délits punis d’au moins cinq ans.
563
Philippe Conte, Droit pénal spécial, Litec, 3ème éd.2007.
564
Y. Mayaud , Le terrorisme, op. cit., p. 29. La jurisprudence française évoque que l’entente doit
être caractérisé par des faits matériels en énonçant que «celui qui, voulant faire défigurer au
vitriol une ancienne amie, commandite un homme de main, qu’il accompagne en repérage sur
les lieux de la mission projetée et auquel il fournit les instructions et renseignements nécessaires
à son exécution, peu importe que l’homme chargé de commettre l’infraction, ayant dilapidé
l’argent reçu, ait renoncé à l’action, commet le délit d’association » (Crim.30 avr. 1996 : Bull.
crim. n° 176. De son côté, la jurisprudence marocaine confirme que « toute association ou
entente, quelque soit sa durée ou ses participants formée en vue de préparer ou de commettre
un crime contre les personnes ou les biens constitue le crime d’association criminelle, dès lors
que le dessein d’attentat par entente commune est prouvé … en ce qui concerne la condition
de commission par habitude, la loi ne la prévoit pas» (Arrêt de la cour de cassation n° 7203 du
14 nov. 1983, recueil des décisions de la cour de cassation, 1966). De même, la jurisprudence
marocaine a considéré comme association terroriste le groupement dépendant du salafisme
djihadiste, qui vise à porter atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat et de semer la sédition
(Fitna), au sein de la société, par la commission d’actes terroristes ayant intentionnellement
relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but l’atteinte grave à l’ordre
public, par l’intimidation, la terreur ou la violence. (Jugement n° 540 rendu par la chambre
criminelle de première instance de Rabat le 18 sept. 2003).
289
Le fait de ne pouvoir justifier de ressources correspondant à son train de
vie, tout en étant en relations habituelles avec une ou plusieurs personnes se
livrant à l'un ou plusieurs des actes visés aux articles 421-1 à 421-2-2, est puni de
sept ans d'emprisonnement et de 100 000 euros d'amende.
Selon l’article 421-2-4, le fait d'adresser à une personne des offres ou des
promesses, de lui proposer des dons, présents ou avantages quelconques, de la
menacer ou d'exercer sur elle des pressions afin qu'elle participe à un groupement
ou une entente prévu à l'article 421-2-1 ou qu'elle commette un des actes de
terrorisme mentionnés aux articles 421-1 et 421-2 est puni, même lorsqu'il n'a
pas été suivi d'effet, de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende.
290
Conclusion du chapitre I
Par exemple, en droit français il ya toute une panoplie de notions qui ne sont
pas définies en droit marocain, en l’occurrence celle des intérêts fondamentaux de
la nation, définie à l’article 410-1 du Code pénal français. Malgré cela, les intérêts
protégés dans le cadre des infractions portant atteinte aux intérêts fondamentaux
de la nation, sont presque les mêmes que ceux protégés par le CPM dans le cadre
des crimes et délits contre la sûreté de l’Etat, prévus au chapitre premier rangé
avant le chapitre premier bis, relatif au terrorisme.
Les articles 401-1et 218-1 des Codes pénaux français et marocain relatifs à la
lutte contre le terrorisme prévoient un ensemble d’actes susceptibles d’être qualifiés
d’infractions terroristes s’il est prouvé qu’ils sont commis intentionnellement
291
dans le cadre d’une entreprise individuelle ou collective ayant pour but l’atteinte
grave à l’ordre public par l’intimidation, la terreur ou la violence. La source de ces
infractions n’est pas unique ; elle est puisée, dans le Code pénal, d’une part, et les
textes pénaux spéciaux, d’autre part.
565
Y. Mayaud, op. cit. p. 43.
292
Chapitre II :
293
Que ce soit en droit français ou en droit marocain, la répression en matière
terroriste s’inscrit dans une nouvelle perspective tendant à relever le maximum
des peines des infractions dérivées du droit commun, lorsqu’elles sont commises
intentionnellement, en relation avec une entreprise individuelle ou collective,
ayant pour but l’atteinte grave à l’ordre public par l’intimidation, la terreur ou
la violence. Les peines applicables aux auteurs de ces infractions sont de deux
catégories ; principales spécifiques à chacune des infractions terroristes, ou
complémentaires, applicables à tous les actes terroristes.
566
Selon F. Desportes et F. Le Gunehec, il ya trois sortes de peines. « La peine principale est une
peine qui, prévue par la loi à titre principal pour sanctionner un comportement déterminé,
caractérise à la fois l’existence d’une infraction pénale et la nature criminelle, correctionnelle
ou contraventionnelle de celle-ci …la privation de liberté et ( réclusion ou détention criminelle
et emprisonnement) et l’amende sont aujourd’hui les deux seules peines principales. Toute
infraction doit donc nécessairement être punie de l’une ou l’autre de ces deux peines. La peine
alternative est une peine qui, prévue dans une disposition de portée générale, peut toujours
être prononcée par le juge à titre principal pour remplacer l’une des peines principales
légalement encourues. Elle ne peut donc , par définition, être seule encourue et elle ne peut
aussi être prononcée en même temps que la peine qu’elle est censée remplacer…les peines
complémentaires sont des peines spécialement prévues pour chaque infraction et destinées,
comme leur nom l’indique, à compléter les peines principales…elles peuvent être prononcées
aussi bien en matière correctionnelle et contraventionnelle qu’en matière criminelle ». Frédéric
Desportes, Francis Le Gunehec, Droit pénal général, op. cit., p. 744 - 755.
294
A. Les peines principales
Nous allons voir dans ce point les peines principales en droit français
ensuite en droit marocain tout en relevant les similitudes et les différences.
1. Le droit français
L'article 421-3 du Code pénal énonce les peines réprimant les infractions
prévues par l'article 421-1. Il renvoie aux peines prévues pour ces infractions dans
le cadre du droit commun tout en optant pour la relève de la période de ces peines
dans le cas où lesdites infractions constituent des actes de terrorisme.
567
Article 421-3 du Code pénal.
568
Y. Mayaud , Le terrorisme, op. cit., p. 47.
295
En ce qui concerne le terrorisme visant l'écologie, l'article 421-4 en prévoit
une peine autonome sans pour autant faire référence à aucune autre sanction
aussi longtemps que ce genre de terrorisme n'est pas dérivé d'une infraction de
droit commun.
A cet effet, l'article 421-5 dispose que : "Les actes de terrorisme définis aux
articles 421-2-1 et 421-2-2 sont punis de dix ans d'emprisonnement et de 225.000
euros d'amende" 570.
Par ailleurs, on remarque que la peine fixée par l'article précité correspond
à celle déterminée par l'article 450-1 pour la préparation des crimes ou des délits
punis de dix ans d'emprisonnement. La seule différence qu'on trouve entre les
deux peines est celle de l'amende qui est de 225.000 euros pour le terrorisme
associatif et 150.000 euros en matière de droit commun 571.
2. Le droit marocain
569
Voir Art. 421-4 du Code pénal.
570
Voir Art. 421-5 du Code pénal.
571
Voir Art. 450-1 du Code pénal.
296
dont le but est d'atteindre gravement l'ordre public par l'intimidation, la terreur
ou la violence.
Ainsi, l'article 218-7 dispose que le maximum des peines prévues pour
les infractions visées à l'article 218-1 est relevé lorsque les faits constituent des
infractions de terrorisme.
Les peines que nous avons citées sont rangées dans un seul article à savoir
218-7 qui a une portée générale, alors que d'autres peines sont prévues dans
d'autres articles qui prévoient des infractions qui n'ont pas été prévues au Code
pénal avant la loi 03-03, c'est-à-dire qui ne sont pas dérivées du droit commun.
572
Art. 218-2 du Code pénal.
297
perte d'un oeil ou toutes autres infirmités permanentes pour une ou plusieurs
personnes. Lorsque la mort d'une ou de plusieurs personnes en est entraînée, le
coupable est punit de mort 573.
Par ailleurs, la peine est relevée à dix ans et à trente ans de réclusion et
l'amende au double quand les infractions sont commises en utilisant les facilités
que procure l'exercice d'une activité professionnelle, en bande organisée, ou en
cas de récidive 574.
Notant que, pour les infractions dérivées du droit commun, il apparaît que
le système de répression laisse penser qu'il s'agit des circonstances d'aggravation
de peines plutôt que d'infractions autonomes.
573
Art. 218-3 du Code pénal.
574
Art. 218-4 du Code pénal.
298
B. Les peines complémentaires
1. Le droit français
C'est l'article 422-3 du Code pénal qui prévoit les peines complémentaires
encourues également par les personnes physiques coupables de l'une des
infractions terroristes. Ce sont des peines complémentaires ayant le caractère
d'interdictions générales dès lorsqu'elles s'appliquent à tous les actes terroristes
énoncés par l'article 421-1 et suivant du Code pénal.
575
Voir Art. 422-3 du Code pénal.
299
l'article 422-3 prévoit l'élévation de la durée d'interdiction à dix ans contrairement
à ce qu'énonce l'article 131-27 qui dispose que l'interdiction temporaire ne peut
excéder une durée de cinq ans 576.
576
L’article 131-26 du Code pénal prévoit une période d’interdiction qui ne peut excéder dix ans en
cas de crime et cinq ans en cas de délit.
577
Selon l’article 131-26, ces droits sont le droit de vote, l’éligibilité, le droit d’exercer une fonction
juridictionnelle ou d’être expert devant une juridiction, de représenter ou d’assister une partie
devant la justice, le droit de témoigner en justice autrement que pour y faire de simples déclarations,
le droit d’être tuteur ou curateur; cette interdiction n’exclut pas le droit après avis conforme du
juge des tutelles, le conseil de famille entendu, d’être tuteur ou curateur de ses propres enfants.
300
territoire. Ainsi, l'article 422-4 reprend la même expression que l'article 131-30 en
l'occurrence "… soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus". Dans le
même sillage, la loi du 13 novembre 2014 a introduit un nouveau chapitre IV dans
le premier titre du livre II du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit
d’asile, l’interdiction administrative du territoire qui peut être décidée à l’égard
d’étrangers qui ne résident pas habituellement en France et ne s’y trouve pas.
La déchéance de la nationalité française est aussi une peine qui peut être
ajoutée à une condamnation pour un crime ou un délit constituant un acte de
terrorisme. C'est la loi du 22 juillet 1996 qui est à l'origine de cette mesure. Elle a
complété le deuxième alinéa de l'article 25 du code civil qui prévoit les différentes
hypothèses de déchéance de la nationalité française 578.
578
Y. Mayaud , Le terrorisme, op. cit., p. 54. Les décisions de déchéance de la nationalité française
sont très rares, mais avec les attentats de janvier 2015, nous pensons que les choses ont changé.
Ce constat peut être relevé de la décision du Conseil constitutionnel au sujet d’Ahmed Sahnouni,
déchu de la nationalité française par un décret du 28 mai 2014, pris sur le fondement des
articles 25 et 25-1 du code civil. Ces articles permettent de retirer la nationalité française à une
personne qui l’avait précédemment acquise et qui possède une autre nationalité (sans quoi la
déchéance aurait pour effet de la rendre apatride). La déchéance ne peut intervenir que pour
certains motifs d’une particulière gravité, en particulier en cas de condamnation pour un acte de
terrorisme, et seulement si ces faits ont été commis dans un certain délai après l’acquisition de
la nationalité française (15 ans en cas de terrorisme). En l’espèce, la déchéance était notamment
justifiée par le fait que l’intéressé avait été condamné par le tribunal de grande instance de
Paris pour avoir participé à « une association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un acte
de terrorisme », faits réprimés par l’article 421-2-1 du code pénal. Le Conseil d’État a écarté les
différentes critiques formulées par l’intéressé contre ce décret. Le Conseil d’État a notamment
rappelé que le Conseil constitutionnel, auquel il avait renvoyé une question prioritaire de
constitutionnalité formée par le requérant contre les articles 25 et 25-1 du code civil, a jugé ces
articles de loi conformes à la Constitution dans une décision du 23 janvier 2015. La critique
de constitutionnalité ne pouvait donc qu’être écartée. Le Conseil d’État a également jugé que,
compte tenu de l’encadrement strict, par la loi, de la déchéance de nationalité, ces mêmes
articles étaient compatibles avec le droit de l’Union européenne : Roger, http://www.fdesouche.
com/556371-conseil-constitutionnel-valide-decheance-nationalite-dun-djihadiste, 11 mai 2015.
301
2. Le droit marocain
579
Art. 37 du Code pénal.
580
Art. 38 du Code pénal.
581
Art. 26 du Code pénal.
302
de cette pension, alors que la suspension temporaire peut être prononcée en cas
de condamnation à une peine criminelle autre que celles indiquées en haut, et ce
pour une durée égale à celle de l'exécution de la peine.
C'est ainsi que toute personne qui a acquis la nationalité marocaine peut
en être déchue si elle est condamnée pour un acte constituant une infraction de
terrorisme 582. Le législateur utilise l'expression "infraction de terrorisme" pour
confirmer que cette peine peut être prononcée soit en cas de crimes ou en cas de
délits terroristes. Dans cela, le législateur marocain suit le même régime de peines
que celui français qui prévoit dans la loi du 22 juillet 1996 que la déchéance de la
nationalité française peut s'attacher à un crime ou un délit constituant un acte de
terrorisme 583.
582
Art. 22 du Code de la nationalité marocaine.
583
Y. Mayaud, op. cit., p. 54.
303
3. L'exemption et l’atténuation de la peine
L'article 422-1 du Code pénal prévoit que : "Toute personne qui a tenté de
commettre un acte de terrorisme est exempte de peine si, ayant averti l'autorité
administrative ou judiciaire, elle a permis d'éviter la réalisation de l'infraction et
d'identifier, le cas échéant, les autres coupables".
Donc, tous les actes de terrorisme sont concernés par l'article précité.
Mais, pour que la personne concernée soit exemptée de la peine, il faudrait que
certaines conditions se réalisent.
584
Y. Mayaud , Le terrorisme, op. cit., p. 59.
304
générale des peines encourues pour réprimer les infractions terroristes lorsqu’elles
sont commises en relation avec une entreprise terroriste 585.
A. En droit français
585
Gérard Lopez et Stamatios Tzitzis, op. cit. , p. 921.
586
Les auteurs défavorables à la responsabilité pénale des personnes morales, auteurs classiques
posent la question de l’aptitude des personnes morales à la responsabilité pénale, en avançant
que la personne morale est une fiction juridique incapable d’avoir une volonté personnelle, or
la volonté personnelle est la base de la responsabilité pénale. Ils invoquaient aussi que l’objet
social de la personne morale ne pouvait pas consister dans la commission d’infractions. De plus,
ils avancent qu’une personne morale ne pouvait pas faire l’objet d’une peine car la peine en
raison de sa nature (caractère intimidant, caractère rétributif) ne pouvait être prononcée qu’à
l’encontre des personnes physiques. Les auteurs favorables à cette responsabilité ont contré les
arguments présentés par la doctrine classique en indiquant que la fictivité ne faisait pas obstacle
à la responsabilité civile des personnes morales, leur responsabilité pénale pourrait donc être
retenue. Ils ajoutent que si l’objet déclaré de la personne morale ne pouvait pas consister dans
la commission d’infractions, son activité pouvait entrainer la réalisation d’infractions. En ce
qui concerne l’argument de la personnalité de la peine, ils avancent qu’une condamnation
peut toujours avoir une incidence sur des tiers innocents : une lourde amende peut priver une
famille entière de revenus, G. Danjaune- Racchini, Guide du droit pénal, Ellipses, Paris, 2007,
pp. 127-128.
305
responsables pénalement, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7, des
infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants.
La première condition posée par l'article précité pour que soit engagée la
responsabilité des personnes morales nécessite que les infractions soient commises
pour leur compte. L’infraction est commise pour le compte de la personne morale
quand elle apporte un bénéfice à cette personne, et la responsabilité pénale de la
personne morale n’est pas engagée quand le représentant agit pour son propre
compte et dans son intérêt personnel 587.
Il s'agit donc de toutes les instances légales ou statutaires qui sont censées
représenter la personne morale en l'occurrence les assemblées générales, les
conseils d'administration, les bureaux et toutes structures assimilées 590.
587
G. Danjaune-Racchini, op. cit., p. 133.
588
Y. Mayaud, op. cit., p. 61.
589
G. Danjaune- Racchini, op. cit., p. 133.
590
Y. Mayaud, op. cit.
306
S'agissant de la notion de représentant, elle concerne les personnes
physiques, disposant d'un pouvoir propre pour agir au nom et pour le compte de la
personne morale. Sont des représentants de la personne morale l’administrateur
provisoire, le liquidateur, le chef d’entreprise ou le mandataire de la personne
morale chargée de la représenter auprès des tiers 591.
En ce qui concerne les peines encourues par les personnes morales, l'article
422-5 renvoie à l'article 131-38 du Code pénal. Que dit cet article ? Il prévoit
591
G. Danjaune- Racchini, op. cit., p. 134.
592
Ibid. p. 130.
593
Ibid.
594
Ibid.
307
que : "Le taux maximum de l'amende applicable aux personnes morales est égal
au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques par la loi qui réprime
l'infraction. Lorsqu'il s'agit d'un crime pour lequel aucune peine d'amende n'est
prévue à l'encontre des personnes physiques, l'amende encourue par les personnes
morales est de 1 000 000 euros ».
Les autres peines de l'article 131-39 sont le placement, pour une durée
de cinq ans au plus, sous surveillance judiciaire ; fermeture définitive ou pour
une durée de cinq ans au plus des établissements ou de l'un ou de plusieurs
des établissements de l'entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ;
l'exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une durée de cinq ans
au plus ; l'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus,
de faire appel public à l'épargne ; l'interdiction pour une durée de cinq ans au
plus, d'émettre des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds
par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés ou d'utiliser des cartes de
paiement ; la confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre
595
Voir Art. 131-39, 1°.
596
Voir Art. 131-39, 2°.
308
l'infraction ou de la chose qui en est le produit ; l'affichage de la décision
prononcée ou la diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen
de communication audiovisuelle, la confiscation de l'animal ayant été utilisé
pour commettre l'infraction ou à l'encontre duquel l'infraction a été commise ;
l'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, de détenir un
animal ; l'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus de percevoir toute aide
publique attribuée par l'Etat, les collectivités territoriales, leurs établissements
ou leurs groupements ainsi que toute aide financière versée par une personne
privée chargée d'une mission de service public.
Si on fait le calcul des peines que les personnes morales peuvent encourir
en droit français, on trouve 14 peines réparties entre l’article 131-38 et 131-39
du CPF. Cela dénote la volonté du législateur d’assurer une protection large
contre l’usage des personnes morales aux fins terroristes, surtout sur le plan du
financement. De même, ces peines sont compilées dans un seul article, ce qui
rend leur revue par tout lecteur très facile, contrairement au CPM qui ne prévoit
que six peines contre les personnes morales dans quatre articles épars au sein de
différents chapitres.
B. En droit marocain
Il ne faut pas déduire de l'article premier du CPM qui énonce que la loi
pénale détermine et constitue en infractions les faits de l'homme qui, à raison du
trouble social qu'ils provoquent, justifient l'application à leur auteur de peines
309
ou de mesures de sûreté que seul l'homme, être physique, peut être sujet de droit
pénal.
C'est ce qu'il résulte de l'article 127 du CPM qui édicte que les personnes
morales ne peuvent être condamnées qu'à des peines pécuniaires et aux peines
accessoires prévues sous les numéros 5, 6 et 7 de l'article 36. Elles peuvent
également être soumises aux mesures de sûreté réelles de l'article 62.
En effet, l'article 218-4 prévoit que les personnes morales sont punies
d'une amende de 1.000.000 à 5.000.000 de dirhams lorsqu'elles se rendent
coupables du fait de fournir, de réunir ou de gérer, par quelque moyen que ce soit,
directement ou indirectement, des fonds, des valeurs ou des biens dans l'intention
597
A. Ruolt, op. cit. p. 116.
598
Ibid, p. 117.
310
de les voir utiliser ou en sachant qu'ils seront utilisés, en tout ou en partie, en vue
de commettre un acte de terrorisme.
311
Conclusion du chapitre II
602
Julie Alix, op., cit., p.332.
603
La peine de mort a été abolie en France dès 1981, mais elle existe encore en droit marocain malgré
le fait qu’elle n’a jamais été appliquée depuis 1993, dans l’affaire du commissaire de police Haj
Tabite. Il convient de souligner que le ministère de la justice a préparé un projet de code pénal
qui se discute encore au sein des instances gouvernementales et organismes de droit de l’homme
qui a vocation à durcir les conditions de condamnation et réduire le nombre d’infractions
réprimées par la peine de mort. Ainsi, l’article 430 dudit pojet prévoit que la peine capitale soit
prononcée si et seulement si « les juges décident à l’unanimité », et cela doit être marqué dans le
prononcé du jugement. En outre, le procès-verbal de la délibération, dûment signé par tous les
magistrats ayant statué, doit faire mention de la condamnation commune de l’accusé à la peine
de mort. Par ailleurs, cette réforme du code pénal prévoit de réduire de 36 actuellement à 12
le nombre d’infractions donnant lieu à la peine capitale. Parallèlement, le projet de loi n° 108-
13 modifiant le code de justice militaire et discuté au Parlement prévoit de réduire de 16 à 5 le
nombre d’infractions soumises à la peine de mort. Actuellement, la polémique est à son apogée
entre le conseil national des droits de l’homme et le ministre de la justice au Maroc sur la question
de l’abolition de cette peine ; les représentants des premiers défendent l’abolition alors que les
représentants du ministère sont pour son maintien. En France, les attentats de janvier 2015 ont
ressuscité le débat sur la nécessité du retour à la peine de mort, mais la classe politique est toute
contre l’idée. A notre avis, la peine de mort n’a rien à voir avec la démocratie ou les libertés, car
cette peine est toujours existante aux Etats-Unis, pays de la démocratie, surtout quand il s’agit
du terrorisme comme nous montre l’exemple de l’auteur de l’attentat du marathon de Boston,
que les procureurs ont décrit comme un terroriste sans remords : Katherine Q. «Dzhokhan
Tsarnaev given death penalty in Boston marathon bombing», The new York Times, 15 mai 2015.
Mais, avant de se mêler dans toute discussion sur cette question, toute personne doit poser la
question suivante : que faire contre le jeune homme ayant violé et assassiné deux jeunes fillettes
de 10 ans, ou contre les auteurs de l’attentat du café Argana à Marrakech? Il convient d’indiquer
que le premier a été condamné à mort ainsi que deux des auteurs de l’attentat d’Argana.
312
Conclusion du titre II
Il n’y a nul doute que les droits français et marocain comportent des
dispositions antiterroristes efficaces surtout pour le droit français, mais reste à
confirmer que la législation reste un moyen de dissuasion avant la commission, et
un outil de répression entre les mains des autorités de police et judiciaires, après
l’action. Partant de cette vérité, il faut reconnaître que les attentats terroristes
perpétrés en France et au Maroc étaient possible à cause du manque d’information.
Dans l’affaire de Toulouse, «les services de la DRI de Toulouse avaient exercé une
surveillance poussée sur MERAH, et le travail avait été réalisé avec beaucoup de
conscience professionnelle. Mais ce dernier extrêmement méfiant, allait réussir
à déjouer les dispositifs existants, qui dépassent sans doute la problématique
strictement toulousaine» 605. Même chose peut être dite au sujet de l’auteur de
l’attentat du café Argana, la connaissance de l’information concernant ses essaies
des charges explosives aurait permet à éviter l’attentat.
604
«Entretien avec Javier Zaragoza, procureur général de la cour nationale espagnole», réalisé
par Hakim Arif, L’Observateur du Maroc et d’Afrique, n° 290 du 16 au 22 janvier 2015. Ce
responsable se dit fier d’avoir traduit les auteurs des attentats de 2004 qui ont coûté la vie
à 200 personnes car «l’enquête et le procès ont été possibles grâce aux lois déjà existantes…
la réponse à cet acte était d’appliquer la loi, ainsi qu’on l’a fait avec d’autres phénomènes
terroristes, en particulier l’ETA» : Ibid.
605
Rapport de l’Inspection générale de la police nationale sur l’affaire MERAH, Synergie-officiers,
le Bureau national, 13 nov. 2012.
313
Conclusion de la partie II
314
Conclusion générale
315
donné, qu’une seule autorité. Comment donc obtenir une extradition pour des
faits qui ne sont pas qualifiés de la même façon dans les deux Etats ?
316
coopération est souvent limitée à l’échange d’informations, de formations et de
personnels. Il faudrait donc réfléchir à des coopérations d’actions communes.
317
Les conditions sociales constituent la principale cause de toute tendance
terroriste dans le monde. On entend par conditions sociales toute une panoplie de
conditions caractérisées par la pauvreté, le chômage, la discrimination, la haine,
la marginalisation, l’analphabétisme, l’intolérance, l’islamophobie, l’injustice,
l’habitat insalubre, anarchique et clandestin, l’enclavement des populations,
l’illégitimité…Le constat au Maroc nous démontre que lorsque une personne
souffre d’un des problèmes précédemment cités et ne trouve pas sur qui s’appuyer,
il recourt à Dieu. Il laisse sa barbe pousser et commence à prôner l’Islam radical et
à donner des interprétations erronées et tendancieuses des textes fondamentaux
de l’Islam.
Pour ce qui est de la France, la réalité nous fait savoir que l’islamophobie
et l’intolérance à l’égard des confessions minoritaires est flagrante. Selon la
commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), « 45 % des
sondés ont une opinion négative de l’Islam » 606.
Pour lutter contre le mal, il faut d’abord lutter contre les fléaux que
nous avons énumérés plus haut car la solution sécuritaire et juridique seule
est unidimensionnelle et de nature à nuire à l’unanimité sociale et profiter au
terrorisme. Pour éradiquer les causes du terrorisme, il serait souhaitable de
penser à un développement continu qui prend en considération tous les niveaux
sociétaux.
606
Sabrina KASSA, Le Courrier de l’Atlas, n° 92, mai 2015, p. 26.
318
Mais l’information sera sans valeur si elle ne circule pas avec célérité entre
les services de sécurité. Se serait souhaitable d’adopter quatre principes dans ce
sens : 1. dire ce que vous savez (savoir d’où vient l’information et la confirmer
par plusieurs sources), 2. dire ce que vous ne savez pas (ne pas garder le silence
lorsque vous devez parler), 3. dire ce que vous pensez (votre opinion est vitale
même si vous ne pouvez pas le prouver), 4. distinguer les informations (distinguer
les faits des opinions et des analyses).
La lutte contre le terrorisme n’est pas une tache facile et c’est pour cette raison
que les services chargés de cette mission doivent être pourvus des instruments
dont ils ont besoin pour mener leurs missions à bien, sinon ces services n’auront
aucune raison plausible de croire en l’importance de cette lutte et ne vont pas
accomplir leurs missions efficacement. Ceci est un principe essentiel dans la
gestion et le leadership des troupes.
319
Annexes
320
Annexe 1
Article 1
Article 2
Article 3
Article 4
321
NOTA :
Intitulé de la loi 86-1020 du 9 septembre 1986 modifié par la loi 86-1322 (article
3) du 30 décembre 1986 JORF 31 décembre 1986.
Article 5
Article 6
Article 7
Article 8
Article 9 :
I.- Les victimes d'actes de terrorisme commis sur le territoire national et les
personnes de nationalité française ayant leur résidence habituelle en France, ou
résidant habituellement hors de France et régulièrement immatriculées auprès
des autorités consulaires, victimes à l'étranger d'un acte de terrorisme, sont
indemnisées dans les conditions définies au présent article.
II.- La réparation intégrale des dommages corporels résultant des actes visés au I
du présent article est assurée par l'intermédiaire d'un fonds de garantie.
322
Ce fonds, doté de la personnalité civile, est alimenté par un prélèvement sur les
contrats d'assurance de biens dans des conditions définies par décret en Conseil
d'Etat.
Il est subrogé dans les droits que possède la victime contre la personne responsable
du dommage ainsi que contre les personnes tenues à un titre quelconque d'en
assurer la réparation totale ou partielle, dans la limite du montant des prestations
à la charge desdites personnes.
Un décret en Conseil d'Etat fixe ses conditions de constitution et ses règles de
fonctionnement.
III.- Le fonds de garantie est tenu, dans un délai d'un mois à compter de la
demande qui lui est faite, de verser une ou plusieurs provisions à la victime qui
a subi une atteinte à sa personne ou, en cas de décès de la victime, à ses ayants
droit, sans préjudice du droit pour ces victimes de saisir le juge des référés.
Le fonds de garantie est tenu de présenter à toute victime une offre d'indemnisation
dans un délai de trois mois à compter du jour où il reçoit de celle-ci la justification
de ses préjudices. Cette disposition est également applicable en cas d'aggravation
du dommage.
IV.- En cas de litige, le juge civil, si les faits générateurs du dommage ont donné
lieu à des poursuites pénales, n'est pas tenu de surseoir à statuer jusqu'à décision
définitive de la juridiction répressive.
Les victimes des dommages disposent, dans le délai prévu à l'article 2226 du code
civil, du droit d'action en justice contre le fonds institué au paragraphe II ci-dessus.
Si des poursuites pénales ont été engagées, ce droit d'action peut également
être exercé dans un délai d'un an à compter de la décision de la juridiction qui a
323
statué définitivement sur l'action publique ou sur l'action civile engagée devant la
juridiction répressive. Lorsque l'auteur de l'infraction est condamné à verser des
dommages et intérêts, la juridiction doit informer la partie civile de sa possibilité
de saisir le fonds et le délai d'un an ne court qu'à compter de cette information.
Dans tous les cas, le conseil d'administration du fonds peut relever le requérant
de la forclusion résultant de l'application des deuxième et troisième alinéas du
présent IV si celui-ci n'a pas été en mesure de faire valoir ses droits dans les délais
requis ou pour tout autre motif légitime.
VI. - Le ministre de la justice peut décider, avec l'accord des ayants droit, que la
mention "Victime du terrorisme" est portée sur l'acte de décès de toute personne
mentionnée au I.
Les enfants des personnes dont l'acte de décès porte la mention "Victime du
terrorisme" ont vocation à la qualité de pupille de la Nation.
NOTA :
L'intitulé de la loi 86-1020 du 9 septembre 1986 a été modifié par l'article 3 de la
loi 86-1322 du 30 décembre 1986 JORF 31 décembre 1986.
324
Article 10
La présente loi sera applicable aux faits commis postérieurement à son entrée en
vigueur.
I.- Toutefois, l'article 706-25 du code de procédure pénale est applicable aux
procédures en cours.
Lorsqu'un accusé majeur est renvoyé devant la cour d'assises par un arrêt devenu
définitif au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi, la chambre de
l'instruction peut-être à nouveau saisie afin de constater, s'il y a lieu, que les faits
entrent dans le champ d'application de l'article 706-16 et que le premier alinéa de
l'article 706-25 doit recevoir application.
1°- Avant l'ouverture des débats devant la cour d'assises ou en cas de renvoi de
l'affaire à une autre session, à la requête du ministère public, de l'accusé ou de la
partie civile ;
2°- Au cours des débats, par la cour agissant, soit d'office après avoir recueilli
les observations du ministère public et des parties, soit sur les réquisitions du
minstère public ou à la demande de l'accusé ou de la partie civile.
325
Annexe 2
326
9) la participation à une association formée ou à une entente établie en vue de la
préparation ou de la commission d'un des actes de terrorisme ;
Les faits prévus au premier alinéa ci-dessus sont punis de dix à vingt ans de
réclusion.
La peine est la réclusion à perpétuité, lorsque les faits ont entraîné une mutilation,
amputation ou privation de l'usage d'un membre, cécité, perte d'un oeil ou toutes
autres infirmités permanentes pour une ou plusieurs personnes.
Le coupable est puni de mort lorsque les faits ont entraîné la mort d'une ou de
plusieurs personnes. î
327
- le fait d'apporter un concours ou de donner des conseils à cette fin.
* pour les personnes physiques, de cinq à vingt ans de réclusion et d'une amende
de 500.000 à 2.000.000 de dirhams ;
La peine est portée à dix ans et à trente ans de réclusion et l'amende au double :
- lorsque les infractions sont commises en utilisant les facilités que procure
l'exercice d'une activité professionnelles ;
- lorsque les infractions sont commises en bande organisée° ;
- en cas de récidive.
Article 218-5. - Quiconque, par quelque moyen que ce soit, persuade, incite
ou provoque autrui à commettre l'une des infractions, prévues par le présent
chapitre, est passible des peines prescrites pour cette infraction. î
Article 218-6. - Outre les cas de complicité prévus à l'article 129 du présent
code, est puni de la réclusion de dix à vingt ans, quiconque, sciemment, fournit à
une personne auteur, coauteur ou complice d'un acte terroriste, soit des armes,
munitions ou instruments de l'infraction, soit des contributions pécuniaires,
des moyens de subsistance, de correspondance ou de transport, soit un lieu de
réunion, de logement ou de retraite ou qui les aide à disposer du produit de leurs
méfaits, ou qui, de toute autre manière, leur porte sciemment assistance.
328
d'un acte terroriste, lorsqu'ils ont seulement fourni à ce dernier logement ou
moyens de subsistance personnels. î
" Article 218-7. - Le maximum des peines prévues pour les infractions
visées à l'article 218-1 ci-dessus, est relevé comme suit, lorsque les faits commis
constituent des infractions de terrorisme :
- le maximum des peines privatives de liberté est relevé au double, sans dépasser
trente ans lorsque la peine prévue est la réclusion ou l'emprisonnement ;
- lorsque la peine prévue est une amende, le maximum de la peine est multiplié
par cent sans être inférieur à 100.000 dirhams ;
329
" Article 218-9. - Bénéficie d'une excuse absolutoire, dans les conditions
prévues aux articles 143 à 145 du présent code, l'auteur, le coauteur ou le complice
qui, avant toute tentative de commettre une infraction de terrorisme faisant
l'objet d'une entente ou d'une association et avant toute mise en mouvement
de l'action publique, a le premier, révélé aux autorités judiciaires, de sécurité,
administratives ou militaires l'entente établie ou l'existence de l'association.
Lorsque la peine prévue est la mort, elle est commuée à la peine de réclusion
perpétuelle, lorsqu'il s'agit de la peine de la réclusion perpétuelle, elle est commuée
à la réclusion de 20 à 30 ans. î
Article deux : Les articles 40, 70, 72 et 86 (1er alinéa) du code pénal précité
sont complétés comme suit :
" Article 40 (2e alinéa ajouté) : Les juridictions peuvent également appliquer
les dispositions du premier alinéa du présent article lorsqu'elles prononcent une
peine délictuelle pour une infraction de terrorisme. î
" (2e alinéa ajouté). - Lorsque l'acte commis constitue une infraction de terrorisme,
la juridiction peut assigner au condamné un lieu de résidence tel que prévu au
premier alinéa ci-dessus dont il ne pourra s'éloigner sans autorisation pendant la
durée fixée dans le jugement sans toutefois dépasser dix ans.
La décision d'assignation de résidence ..................... î (La suite sans
modification.)
330
(4e alinéa ajouté). - Toutefois, l'interdiction de séjour peut toujours être prononcée
lorsque la juridiction applique une peine d'emprisonnement pour une infraction
de terrorisme. î
Article trois :Le chapitre Il du titre I du livre premier du code pénal précité
est complété par l'article 44-1 suivant :
La confiscation doit toujours être prononcée, dans les cas prévus aux articles 43
et 44 du présent code, sous réserve des droits des tiers, en cas de condamnation
pour une infraction de terrorisme.î°
331
"°Article 79. - Les perquisitions ............................................................ a lieu.
Cet assentiment ........................................................................................................
que de son assentiment.
Les dispositions .............................. sont applicables.
332
stupéfiants et aux substances psychotropes, aux armes, munitions et explosifs ou
à la protection de la santé.
"°Article 115 (2e alinéa ajouté). - Sans préjudice des dispositions pénales
plus sévères, la peine est de cinq à dix ans de réclusion lorsque les faits prévus au
premier alinéa ci-dessus sont accomplis pour des fins de terrorisme.°î
Article cinq : Les dispositions des articles 66 (4e et 9e alinéas) et 80 (4e et
10e alinéas) de la loi relative à la procédure pénale précitée sont modifiées et
complétées comme suit :
(9e alinéa). - En cas d'une infraction de terrorisme ou des infractions visées à l'article
108 de la présente loi et si les nécessités de l'enquête l'exigent, le représentant du
ministère public peut, à la demande de l'officier de police judiciaire, retarder la
communication de l'avocat avec son client sans que ce retard ne dépasse quarante-
huit heures à compter de la première prolongation.°î
333
(10e alinéa). - En cas d'infractions de terrorisme ou des infractions visées à l'article
108 de la présente loi et si les nécessités de l'enquête l'exigent, le représentant du
ministère public peut retarder la communication de l'avocat avec son mandant à la
demande de l'officier de police judiciaire sans que ce retard ne dépasse quarante-
huit heures à compter de la première prolongation.°î
Elles notifient à Bank AI-Maghrib les mesures prises et la suite qui leur a été
donnée.°î
334
"°Article 595-4. - Les établissements bancaires visés à l'article 595-1 ci-
dessus, doivent fournir les renseignements demandés dans un délai maximum de
30 jours à compter de la date de réception de la demande.
Le secret professionnel ne peut être opposé aux autorités visées à l'article 595-1
ci-dessus ou à Bank AI-Maghrib par les banques.
Pour tous faits et actes accomplis à l'occasion de l'exercice des missions qui sont
dévolues à Bank AI-Maghrib ou aux banques par le présent titre, aucune poursuite
fondée sur l'article 446 du code pénal et aucune action en responsabilité civile ne
peuvent être engagées à l'encontre de ces établissements ou de leurs dirigeants
ou agents.°î
335
"°Article 595-7. - L'exécution sur le territoire national d'une décision de gel,
de saisie ou de confiscation prononcée par une autorité judiciaire étrangère et
faisant l'objet d'une demande présentée par ladite autorité, est subordonnée à
l'autorisation du procureur général du Roi.
336
"°Article 595-10. - Sont punis des peines prévues à l'article 446 du code pénal,
les dirigeants ou agents des banques qui auront sciemment porté à la connaissance
de la personne en cause ou de toute autre personne, par quelque moyen que ce
soit, des renseignements sur une enquête menée sur les mouvements de ses fonds
soupçonnés d'être liés au financement du terrorisme.
Est punie des mêmes peines toute personne qui aurait utilisé sciemment les
renseignements recueillis à d'autres fins que celles prévues par le présent titre.°î
Article sept : Nonobstant les règles de compétence prévues par le code de procédure
pénale ou par d'autres textes, la Cour d'appel de Rabat est compétente pour les
poursuites, l'instruction et le jugement des actes constituant des infractions de
terrorisme.
337
Annexe 3
Considérant que le but du Conseil de l'Europe est de réaliser une union plus
étroite entre ses membres;
Souhaitant que des mesures efficaces soient prises pour que les auteurs de tels
actes n'échappent pas à la poursuite et au châtiment;
Article 1
Pour les besoins de l'extradition entre Etats contractants, aucune des infractions
mentionnées ci-après ne sera considérée comme une infraction politique, comme
une infraction connexe à une infraction politique ou comme une infraction
inspirée par des mobiles politiques:
a- les infractions comprises dans le champ d'application de la Convention pour
la répression de la capture illicite d'aéronefs, signée à La Haye le 16 décembre
1970;
b- les infractions comprises dans le champ d'application de la Convention pour la
répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de l'aviation civile, signée
à Montréal le 23 septembre 1971;
c- les infractions graves constituées par une attaque contre la vie, l'intégrité
corporelle ou la liberté des personnes ayant droit à une protection internationale,
y compris les agents diplomatiques;
338
d- les infractions comportant l'enlèvement, la prise d'otage ou la séquestration
arbitraire:
e- les infractions comportant l'utilisation de bombes, grenades, fusées, armes
à feu automatiques, ou de lettres ou colis piégés dans la mesure où cette
utilisation présente un danger pour des personnes;
f- la tentative de commettre une des infractions précitées ou la participation
en tant que co-auteur ou complice d'une personne qui commet ou tente de
commettre une telle infraction.
Article 2
1- Pour les besoins de l'extradition entre Etats contractants, un Etat contractant
peut ne pas considérer comme infraction politique, comme infraction connexe
à une telle infraction ou comme infraction inspirée par des mobiles politiques
tout acte grave de violence qui n'est pas visé à l'article 1er et qui est dirigé
contre la vie, l'intégrité corporelle ou la liberté des personnes.
2- Il en sera de même en ce qui concerne tout acte grave contre les biens, autre
que ceux visés à l'article 1er, lorsqu'il a créé un danger collectif pour des
personnes.
3- Il en sera de même en ce qui concerne la tentative de commettre une des
infractions précitées ou la participation en tant que co-auteur ou complice
d'une personne qui commet ou tente de commettre une telle infraction.
Article 3
Les dispositions de tous traités et accords d'extradition applicables entre les Etats
contractants, y compris la Convention européenne d'extradition, sont en ce qui
concerne les relations entre Etats contractants modifiées dans la mesure où elles
sont incompatibles avec la présente Convention.
Article 4
Pour les besoins de la présente Convention et pour autant qu'une des infractions
visées aux articles 1 ou 2 ne figure pas sur la liste de cas d'extradition dans un
traité ou une convention d'extradition en vigueur entre les Etats contractants, elle
est considérée comme y étant comprise.
339
Article 5
Aucune disposition de la présente Convention ne doit être interprétée comme
impliquant une obligation d'extrader si l'Etat requis a des raisons sérieuses de croire
que la demande d'extradition motivée par une infraction visée à l'article 1 ou 2 a été
présentée aux fins de poursuivre ou de punir une personne pour des considérations
de race, de religion, de nationalité ou d'opinions politiques, ou que la situation
de cette personne risque d'être aggravée pour l'une ou l'autre de ces raisons.
Article 6
1- Tout Etat contractant prend les mesures nécessaires pour établir sa compétence
aux fins de connaître d'une infraction visée à l'article 1er dans le cas où l'auteur
soupçonné de l'infraction se trouve sur son territoire et où l'Etat ne l'extrade
pas après avoir reçu une demande d'extradition d'un Etat contractant dont la
compétence de poursuivre est fondée sur une règle de compétence existant
également dans la législation de l'Etat requis.
2- La présente Convention n'exclut aucune compétence pénale exercée
conformément aux lois nationales.
Article 7
Un Etat contractant sur le territoire duquel l'auteur soupçonné d'une infraction
visée à l'article 1er est découvert, et qui a reçu une demande d'extradition dans
les conditions mentionnées au paragraphe 1 de l'article 6, soumet, s'il n'extrade
pas l'auteur soupçonné de l'infraction, l'affaire, sans aucune exception et sans
retard injustifié, à ses autorités compétentes pour l'exercice de l'action pénale.
Ces autorités prennent leur décision dans les mêmes conditions que pour toute
infraction de caractère grave conformément aux lois de cet Etat.
Article 8
1- Les Etats contractants s'accordent l'entraide judiciaire la plus large possible en
matière pénale dans toute procédure relative aux infractions visées à l'article
1er ou 2. Dans tous les cas, la loi applicable en ce qui concerne l'assistance
mutuelle en matière pénale est celle de l'Etat requis. Toutefois, l'entraide
judiciaire ne pourra pas être refusée pour le seul motif qu'elle concerne une
infraction politique ou une infraction connexe à une telle infraction ou une
infraction inspirée par des mobiles politiques.
340
2- Aucune disposition de la présente Convention ne doit être interprétée comme
impliquant une obligation d'accorder l'entraide judiciaire si l'Etat requis a
des raisons sérieuses de croire que la demande d'entraide motivée par une
infraction visée à l'article 1er ou 2 a été présentée aux fins de poursuivre ou de
punir une personne pour des considérations de race, de religion, de nationalité
ou d'opinions politiques, ou que la situation de cette personne risque d'être
aggravée pour l'une ou l'autre de ces raisons.
3- Les dispositions de tous traités et accords d'entraide judiciaire en matière
pénale applicables entre les Etats contractants, y compris la Convention
européenne d'entraide judiciaire en matière pénale, sont en ce qui concerne
les relations entre Etats contractants modifiées dans la mesure où elles sont
incompatibles avec la présente Convention.
Article 9
1- Le Comité européen pour les problèmes criminels du Conseil de l'Europe suit
l'exécution de la présente Convention.
2- II facilite autant que de besoin le règlement amiable de toute difficulté à
laquelle l'exécution de la Convention donnerait lieu.
Article 10
1- Tout différend entre Etats contractants concernant l'interprétation ou
l'application de la présente Convention qui n'a pas été réglé dans le cadre du
paragraphe 2 de l'article 9 sera, à la requête de l'une des Parties au différend,
soumis à l'arbitrage. Chacune des Parties désignera un arbitre et les deux
arbitres désigneront un troisième arbitre. Si, dans un délai de trois mois à
compter de la requête d'arbitrage, l'une des Parties n'a pas procédé à la
désignation d'un arbitre, l'arbitre sera désigné à la demande de l'autre Partie,
par le Président de la Cour européenne des Droits de l'Homme. Si le Président
de la Cour européenne des Droits de l'Homme est le ressortissant de l'une des
Parties au différend, la désignation de l'arbitre incombera au Vice-Président
de la Cour ou, si le Vice-Président est le ressortissant de l'une des Parties au
différend, au membre le plus ancien de la Cour qui n'est pas le ressortissant de
l'une des Parties au différend. La même procédure s'appliquera au cas où les
deux arbitres ne pourraient pas se mettre d'accord sur le choix du troisième
arbitre.
341
2- Le tribunal arbitral arrêtera sa procédure. Ses décisions seront prises à la
majorité. Sa sentence sera définitive.
Article 11
1- La présente Convention est ouverte à la signature des Etats membres du Conseil
de l'Europe. Elle sera ratifiée, acceptée ou approuvée. Les instruments de
ratification, d'acceptation ou d'approbation seront déposés près le Secrétaire
Général du Conseil de l'Europe.
2- La Convention entrera en vigueur trois mois après la date du dépôt du troisième
instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation.
3- Elle entrera en vigueur à l'égard de tout Etat signataire qui la ratifiera,
l'acceptera ou l'approuvera ultérieurement, trois mois après la date du dépôt
de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation.
Article 12
1- Tout Etat peut, au moment de la signature ou au moment du dépôt de son
instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation, désigner le ou les
territoires auxquels s'appliquera la présente Convention.
2- Tout Etat peut, au moment du dépôt de son instrument de ratification,
d'acceptation ou d'approbation ou à tout autre moment par la suite, étendre
l'application de la présente Convention, par déclaration adressée au Secrétaire
Général du Conseil de l'Europe, à tout autre territoire désigné dans la
déclaration et dont il assure les relations internationales ou pour lequel il est
habilité à stipuler.
3- Toute déclaration faite en vertu du paragraphe précédent pourra être retirée, en
ce qui concerne tout territoire désigné dans cette déclaration, par notification
adressée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe. Le retrait prendra effet
immédiatement ou à une date ultérieure précisée dans la notification.
Article 13
1- Tout Etat peut, au moment de la signature ou au moment du dépôt de son
instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation, déclarer qu'il se
réserve le droit de refuser l'extradition en ce qui concerne toute infraction
énumérée dans l'article 1er qu'il considère comme une infraction politique,
comme une infraction connexe à une infraction politique ou comme une
342
infraction inspirée par des mobiles politiques, à condition qu'il s'engage
à prendre dûment en considération, lors de l'évaluation du caractère de
l'infraction, son caractère de particulière gravité, y compris:
a. qu'elle a créé un danger collectif pour la vie, l'intégrité corporelle ou la liberté
des personnes; ou bien
b. qu'elle a atteint des personnes étrangères aux mobiles qui l'ont inspirée; ou
bien
c. que des moyens cruels ou perfides ont été utilisés pour sa réalisation.
2- Tout Etat peut retirer en tout ou en partie une réserve formulée par lui en vertu
du paragraphe précédent, au moyen d'une déclaration adressée au Secrétaire
Général du Conseil de l'Europe et qui prendra effet à la date de sa réception.
3- Un Etat qui a formulé une réserve en vertu du paragraphe 1er de cet article
ne peut prétendre à l'application de l'article 1er par un autre Etat; toutefois, il
peut, si la réserve est partielle ou conditionnelle, prétendre à l'application de
cet article dans la mesure où il l'a lui-même accepté.
Article 14
Tout Etat contractant pourra dénoncer la présente Convention en adressant
une notification écrite au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe. Une telle
dénonciation prendra effet immédiatement ou à une date ultérieure précisée
dans la notification.
Article 15
La Convention cesse de produire ses effets à l'égard de tout Etat contractant qui
se retire du Conseil de l'Europe ou qui cesse d'y appartenir.
Article 16
Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe notifiera aux Etats membres du
Conseil:
a. toute signature;
b. le dépôt de tout instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation;
c. toute date d'entrée en vigueur de la présente Convention conformément à son
article 11;
d. toute déclaration ou notification reçue en application des dispositions de
l'article 12;
343
e. toute réserve formulée en application du paragraphe 1 de l'article 13;
f. le retrait de toute réserve effectué en application du paragraphe 2 de l'article
13;
g. toute notification reçue en application de l'article 14 et la date à laquelle la
dénonciation prendra effet;
h. toute cessation des effets de la Convention en application de l'article 15.
En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé la présente
Convention.
Fait à Strasbourg, le 27 janvier 1977, en français et en anglais, les deux textes faisant
également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives du Conseil
de l'Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe en communiquera copie
certifiée conforme à chacun des Etats signataires.
344
Annexe 4
Préambule
Article premier
Aux fins de la présente Convention,
1. "Etat contractant" s'entend de tout Etat membre de la Ligue des Etats arabes qui
a ratifié la présente Convention et déposé ses instruments de ratification auprès
du Secrétariat de la Ligue des Etats arabes.
345
2. "Terrorisme" s'entend de tout acte ou menace de violence, quels qu'en soient
les motifs ou les buts, qui serait l'instrument d'un projet criminel individuel ou
collectif, et viserait à semer la terreur dans la population, à lui inspirer de la peur,
en lui portant préjudice ou en mettant sa vie, sa liberté ou son indépendance en
péril, à causer des dommages à l'environnement, ou à une installation ou un bien,
tant public que privé, à occuper ces installations ou ces bien ou à s'en emparer, ou
à mettre en danger une ressource nationale.
3. "Infraction terroriste" s'entend de toute infraction ou tentative d'infraction
commise à des fins terroristes dans un Etat contractant, ou contre les ressortissants,
les biens ou les intérêts de cet Etat, et qui est punissable par son droit interne .
Sont également considérées comme infractions terroristes les infractions visées
dans les conventions ci-après, sauf si ces dernières n'ont pas été ratifiées par les
Etats contractants, ou si lesdites infractions sont exclues de la loi interne de ces
Etats :
a/ Convention de Tokyo relative aux infractions et à certains autres actes survenant
à bord des aéronefs, du 14 septembre 1963;
b/ Convention de La Haye pour la répression de la capture illicite d'aéronefs, du
16 décembre 1970;
c/ Convention de Montréal pour la répression d'actes illicites dirigés contre la
sécurité de l'aviation civile, du 23 septembre 1971, et Protocole complémentaire à
cette convention, du 10 mai 1984;
d/ Convention sur la prévention et la répression des infractions contre les personnes
jouissant d'une protection internationale, y compris les agents diplomatiques, du
14 décembre 1973;
e/ Convention internationale contre la prise d'otages, du 17 décembre 1979;
f/ Dispositions de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982
relatives à la piraterie en haute mer.
Article 2
a/ Ne sont pas considérés comme infractions tous les cas de lutte par tous
moyens, y compris la lutte armée, contre l'occupation et l'agression étrangères
et pour la libération et l'autodétermination, conformément aux principes du
droit international . La présente disposition exclut tous actes portant atteinte à
l'intégrité territoriale d'un Etat arabe.
b/ Aucune des infractions terroristes visées à l'article précédent ne constitue une
346
infraction politique. Aux fins de la présente Convention, aucune des infractions
ci-après – même lorsqu'elles sont inspirées par des mobiles politiques – ne sera
considérée comme une infraction politique : I/ Les attaques dirigées contre les
souverains, les chefs d'Etat et les dirigeants des Etats contractants, ou contre
leurs épouses, leurs ascendants ou leurs descendants; II/ Les attaques dirigées
contre les princes héritiers, les vice-présidents, les premiers ministres ou les
ministres, dans chacun des Etats contractants; III/ Les attaques contre les
personnes jouissant d'une protection internationale, y compris les ambassadeurs
et les diplomates qui sont en poste dans les Etats contractants ou sont accrédités
auprès de ces Etats; IV/ Le meurtre avec préméditation ou le vol accompagné
d'usage de la force, commis sur la personne de particuliers, ou commis contre
les autorités ou les moyens de transport et de communication; V/ Le sabotage
et la destruction de biens publics ou de biens affectés à un service public, même
s'ils appartiennent à un autre Etat contractant; VI/ La fabrication, le trafic ou
la possession d'armes, de munitions, d'engins explosifs ou de tout autre produit
pouvant servir à la commission d'infractions terroristes.
Article 3
Les Etats contractants s’engagent à ne pas organiser, ni financer ou perpétrer des
actes de terrorisme, ni en être complice de quelque façon que ce soit. Fermement
résolus à prévenir et à réprimer les infractions terroristes, dans le respect de leurs
lois et procédures internes, ils entreprendront :
I. Mesures préventives
1. De faire en sorte que leur territoire ne puisse pas être utilisé pour planifier,
organiser, commettre ou tenter de commettre des infractions terroristes ou y
participer, sous quelque forme que ce soit, notamment en s’efforçant d’empêcher
347
que des éléments terroristes, agissant à titre individuel ou en groupe, ne
s’infiltrent, ne séjournent, ne soient accueillis, ne trouvent refuge, ne suivent un
entraînement, ne soient armés ou financés, ou ne se voient offrir des facilités sur
leur territoire;
2. De coopérer entre eux et de coordonner leur action, notamment s’il s’agit
d’Etats voisins victimes d’infractions terroristes similaires ou communes;
3. De développer et renforcer les systèmes liés aux enquêtes sur le transport,
l’importation, l’exportation, le stockage et l’utilisation d’armes, de munitions,
d’explosifs et autres instruments d’agression, de mort et de destruction ainsi que
les procédures qui permettent de surveiller ces articles au passage de la douane
et des frontières, pour les empêcher de circuler d’un Etat contractant à l’autre, ou
d’être acheminés vers des Etats tiers, à moins que ce ne soit pour des raisons dont
on a la preuve qu’elles sont légitimes;
4. De développer et renforcer les organismes liés aux mesures de surveillance et
à la protection des frontières et des points d’entrée et de sortie du territoire, par
voie terrestre, maritime et aérienne, afin d’empêcher les infiltrations;
5. De renforcer les systèmes chargés de la sécurité et de la protections des
personnalités importantes, des installations vitales et des moyens de transport
publics;
6. De renforcer la protection, la sécurité et la sûreté des personnalités importantes
et des missions diplomatiques et consulaires, ainsi que des organisations
internationales et régionales accréditées auprès des Etats contractants,
conformément aux accords internationaux pertinents;
7. De renforcer les activités d’information touchant à la sécurité et les coordonner
avec celles qui sont menées dans chaque Etat conformément aux politiques
suivies par ces Etats en matière d’information, afin de démasquer les objectifs
des groupes et des organisations terroristes, de mettre leurs plans en échec, et de
montrer à quel point ils peuvent être dangereux pour la sécurité et la stabilité;
8. De faire en sorte que chaque Etat contractant puisse se doter d’une base de
données qui permette de rassembler et d’analyser les informations relatives aux
éléments, groupes, mouvements et organisations terroristes, à l’évolution du
phénomène de terrorisme et aux succès remportés dans le domaine de la lutte
antiterroriste, de tenir ces informations à jour, et de les mettre à la disposition
des Etats contractants, dans les limites autorisées par les lois et les procédures
internes de chaque Etat.
348
II. Mesures de répression
1. D’arrêter et de poursuivre les auteurs d’infractions terroristes conformément
au droit interne, ou de les extrader en application des dispositions de la présente
Convention, ou de toute convention bilatérale conclue entre l’Etat requérant et
l’Etat requis;
2. D’assurer une protection efficace à ceux qui travaillent dans le domaine de la
justice pénale;
3. D’assurer une protection efficace aux sources de renseignements sur les
infractions terroristes ainsi qu’aux témoins de ces infractions;
4. De fournir aux victimes du terrorisme l’aide dont elles ont besoin;
5. D’établir des liens de coopération effective entre les services compétents et le
public dans le domaine de la lutte antiterroriste, notamment en instituant des
garanties et des mesures d’incitation appropriées en vue d’encourager à dénoncer
les actes de terrorisme, à communiquer des informations de nature à concourir à
la détection de ces actes et à l’arrestation de leurs auteurs.
Article 4
Les Etats contractants coopéreront à la prévention et à la répression des infractions
terroristes, conformément à leurs lois et procédures internes, selon les modalités
ci-après :
I. Echanges de renseignements
1. Les Etats contractants s’engagent à favoriser leurs échanges mutuels de
renseignements concernant :
a/ les activités et délits commis par les dirigeants et les membres des groupes
terroristes, les lieux d’où ils opèrent et où ils s’entraînent, les moyens et sources de
financement et d’approvisionnement en armes, les types d’armes, de munitions,
d’engins explosifs et autres instruments d’agression, de meurtre et de destruction
qu’ils utilisent;
b/ les moyens de communication et de propagande utilisés par les groupes
terroristes, leurs méthodes d’action, les déplacements de leurs dirigeants et de
leurs membres, et les titres de voyage dont ils se servent;
2. Chaque Etat contractant s’engage à communiquer promptement à tout autre
Etat contractant les renseignements dont il dispose concernant toute infraction
349
terroriste commise sur son territoire et visant à nuire aux intérêts de cet autre
Etat ou de ses ressortissants, y compris les données touchant les circonstances de
l’infraction, la peine encourue, ses victimes, les pertes qu’elle a occasionnées et les
procédés et méthodes utilisés pour sa commission, pour autant que les exigences
de l’enquête et de l’information le permettent.
3. Les Etats contractants s’engagent à coopérer entre eux en vue d’échanger
des informations aux fins de la répression du terrorisme et à communiquer
promptement à tout autre Etat contractant tous renseignements ou données
en leur possession qui pourraient empêcher la commission d’une infraction
terroriste sur le territoire de cet Etat, ou contre ses ressortissants, ses résidents
ou ses intérêts.
4. Chaque Etat contractant s’engage à communiquer aux autres Etats contractants
tous renseignements ou données en sa possession de nature à :
a/ aider à l’arrestation d’une ou de plusieurs des personnes accusées d’avoir
commis une infraction terroriste dirigée contre les intérêts de cet Etat, ou d’y
avoir participé par fourniture d’aide ou assistance, entente ou incitation;
b/ déboucher sur la saisie d’armes, de munitions, d’explosifs, de tous autres engins
ou de fonds ayant servi ou destinés à servir à la commission d’une infraction
terroriste.
5. Les Etats contractants s’engagent à préserver le caractère confidentiel des
renseignements qu’ils échangent entre eux et à ne les communique à aucun Etat
tiers ou à aucune autre instance, sans le consentement préalable de l’Etat qui est
à l’origine de ces informations.
II. Enquêtes
Les Etats contractants s’engagent à renforcer leurs liens de coopération mutuelle
et à prêter un concours aux fins d’enquêtes sur les auteurs ou auteurs présumés
d’infractions terroristes en fuite et leur arrestation, conformément aux lois et
règlements de chaque Etat.
350
formation et d’organiser, conjointement ou, le cas échéant, par un ou plusieurs
Etats contractants, à l’intention des personnes engagées dans la lutte antiterroriste,
des stages de formation visant à développer les capacités de ces derniers sur les
plans scientifique et pratique, et à améliorer l’efficacité de leur action.
Article 5
Chaque Etat contractant s’engage à extrader les auteurs ou auteurs présumés
d’infractions terroristes dont l’extradition lui serait demandée par un autre Etat
contractant, conformément aux règles et conditions stipulées dans la présente
Convention.
Article 6
Il ne pourra être procédé à l’extradition dans tous les cas ci-après :
a/ si l’infraction objet de la demande d’extradition est considérée, au regard de la
loi en vigueur dans l’Etat contractant requis, comme une infraction politique;
b/ si l’infraction objet de la demande d’extradition consiste uniquement dans un
manquement à des obligations militaires;
c/ si l’infraction objet de la demande d’extradition a été commise sur le territoire
de l’Etat contractant requis, à moins que cette infraction n’ait nui aux intérêts de
l’Etat requérant, que les lois dudit Etat prévoient la poursuite et la punition de
l’infraction considérée et que l’Etat requis n’ait pas ouvert une enquête ni engagé
de poursuites judiciaires;
d/ si un jugement définitif passé en force de chose jugée a été rendu, relativement
à l’infraction, dans l’Etat contractant requis ou dans un autre Etat contractant;
e/ si à la date où la demande d’extradition est reçue l’instance a pris fin ou la
prescription est acquise en regard de la loi de l’Etat requis;
f/ si l’infraction a été commise hors du territoire de l’Etat contractant requérant,
par un individu qui n’est pas un ressortissant de cet Etat, et si la loi de l’Etat
requis n’autorise pas la poursuite des infractions de cette nature, lorsqu’elles ont
été commises hors de son territoire;
g/ si l’Etat requérant à accordé une amnistie aux auteurs d’infractions du type de
celle objet de la demande d’extradition;
351
h/ si le système juridique de l’Etat requis ne l’autorise pas à extrader ses
ressortissants. En ce cas, ce dernier Etat poursuivra ses ressortissants qui ont
commis une infraction terroriste dans un autre Etat contractant, à la condition
que dans les deux Etats cette infraction soit passible d’une peine privative de
liberté d’une durée égale ou supérieure à un an. Pour déterminer la nationalité
de la personne dont l’extradition est demandée, on se situera à la date à laquelle
l’infraction aura été commise et, à cet effet, on mettra à profit l’enquête menée
par l’Etat requérant.
Article 7
Si la personne dont l’extradition est demandée fait l’objet d’une enquête, est
en train d’être jugée ou a été jugée pour une autre infraction dans l’Etat requis,
l’extradition est différée jusqu’à ce que l’enquête soit menée à son terme, le procès
achevé ou la sentence prononcée. Néanmoins, l’Etat requis pourra procéder à titre
provisoire à l’extradition de la personne susmentionnée, aux fins d’interrogatoire
ou de jugement, à condition que cette personne lui soit retournée avant l’exécution
de la peine prononcée à son encontre dans l’Etat requérant.
Article 8
Aux fins de l’extradition des auteurs d’infractions en vertu de la présente
Convention, il n’est pas tenu compte des divergences qui, dans la loi interne des
Etats contractants, existeraient dans la qualification juridique de ces infractions,
soit comme crimes ou comme délits, ou dans la peine encourue, à condition
qu’au regard des lois des deux Etats, l’infraction considérée comporte une peine
privative de liberté d’une durée égale ou supérieure à un an.
Article 9
Tout Etat contractant pourra demander à tout autre Etat contractant d’accomplir,
sur son territoire et en son nom, un acte judiciaire en rapport avec une action
découlant d’une infraction terroriste, et en particulier :
a/ d’entendre des témoins et de recueillir des dépositions, à titre de preuve;
b/ de signer des actes judiciaires;
c/ d’effectuer des perquisitions et des saisies;
352
d/ de procéder à des expertises et d’examiner des éléments de preuve;
e/ de se procurer les pièces justificatives, documents ou registres nécessaires, ou
des copies de ces pièces certifiées conformes à l’original.
Article 10
Chaque Etat contractant s’engage à exécuter les commissions rogatoires relatives
à des infractions terroristes, mais peut se refuser à le faire dans l’un ou l’autre des
cas suivants :
a/ si l’infraction à laquelle la commission rogatoire fait l’objet de poursuites ou
d’une enquête dans l’Etat requis;
b/ si l’acquiescement à une demande de commission rogatoire risque de porter
atteinte à la souveraineté ou à la sécurité de l’Etat requis ou d’y troubler l’ordre
public.
Article 11
Il est fait droit rapidement à la demande de commission rogatoire, conformément
aux dispositions du droit interne de l’Etat requis; ce dernier doit surseoir à
l’exécution de la commission rogatoire jusqu’à l’achèvement d’éventuelles
poursuites ou enquêtes portant sur la même affaire ou jusqu’à ce que les raisons
impérieuses ayant motivé le report de ladite exécution cessent d’exister, sous
réserve que l’Etat requérant soit avisé de ce report.
Article 12
a/ Tout acte accompli en vertu d’une commission rogatoire, conformément aux
dispositions de la présente Convention, aura le même effet juridique que s’il l’avait
été par l’autorité compétente de l’Etat dont est émanée cette commission.
b/ Le résultat de l’exécution de la commission rogatoire ne pourra pas être utilisé
à des fins autres que celles pour lesquelles la commission a été délivrée.
Article 13
Chaque Etat contractant prêtera, dans la mesure du possible, aux autres Etats
l’assistance nécessaire aux enquêtes et poursuites judiciaires en rapport avec des
infractions terroristes.
353
Article 14
a/ L’Etat contractant compétent pour juger l’auteur présumé d’une infraction
terroriste pourra demander à l’Etat sur le territoire duquel se trouve cette personne
de la poursuivre du chef de cette infraction, sous réserve du consentement de cet
Etat et à la condition que, dans l’Etat poursuivant, ladite infraction soit passible
d’une peine privative de liberté d’une durée égale ou supérieure à un an. Dans
ce cas, l’Etat demandeur communiquera à l’Etat auquel sa demande est adressée
toutes les pièces de l’enquête et tous les éléments de preuve ayant trait à l’infraction.
b/ L’enquête ou les poursuites sont conduites sur la base de l’accusation ou des
accusations portées par l’Etat requérant contre l’auteur présumé de l’infraction,
conformément aux dispositions et procédures du droit interne de l’Etat
poursuivant.
Article 15
Le dépôt par un Etat contractant d’une demande de poursuite, en vertu de l’alinéa
a) de l’article 14 précédent, opérera la suspension de toutes les mesures prises par
cet Etat pour rechercher l’auteur présumé de l’infraction, ouvrir une enquête à son
sujet et le poursuivre, à l’exception de celles requises, aux fins de la commission
rogatoire et de coopération et d’entraide judiciaires, demandées par l’Etat auquel
la demande de poursuite aura été adressée.
Article 16
a/ Les actes accomplis soit dans l’Etat requérant soit dans celui où le procès aura
lieu sont soumis au droit interne de l’Etat où ils l’ont été et ont la force que leur
confère ce droit.
b/ L’Etat requérant ne pourra juger ou juger de nouveau une personne dont il a
demandé la poursuite que si l’Etat requis refuse de faire droit à cette demande.
c/ L’Etat auquel il est demandé d’exercer des poursuites doit, dans tous les cas,
s’engager à informer l’Etat requérant des mesures qu’il aura prises concernant cette
demande ainsi que des résultats de l’enquête et des poursuites qu’il a engagées.
Article 17
354
coupable, et ce, aussi bien avant qu’après que la demande de poursuite lui
parvienne.
Article 18
Article 19
a/ Tout Etat contractant qui décide de faire droit à une demande d’extradition
s’engagera à saisir et à remettre à l’Etat requérant les avoirs et le produit tirés de
l’infraction terroriste, qui ont servi ou ont trait à la commission de l’infraction,
que ces produits se trouvent en la possession de la personne dont l’extradition est
demandée ou en la possession d’une tierce personne.
b/ Dès lors qu’il a été établi qu’ils ont trait à une infraction terroriste, les articles
visés à l’alinéa a) ci-dessus seront remis même si la personne devant être extradée
n’a pu l’être, soit parce qu’elle s’est enfuie, soit parce qu’elle est décédée ou pour
toute autre raison.
c/ Les dispositions des deux alinéas précédents sont sans préjudice des
droits de tout Etat contractant ou tiers de bonne foi sur les biens ou produits
susmentionnés.
Article 20
L’Etat auquel il est demandé de remettre des biens et produits pourra prendre
toutes les dispositions et mesures conservatoires voulues pour s’acquitter de
l’obligation qu’il a de faire droit à cette demande. Il pourra aussi conserver, à titre
provisoire, ces biens et produits si ces derniers sont nécessaires à une instance
pénale pendante sur son territoire, ou remettre, pour le même motif, ces produits
à l’Etat requérant à condition qu’ils lui soient restitués.
355
SECTION E / ECHANGE DE PREUVES
Article 21
Les Etats contractants s’engagent à faire inspecter, par leurs services compétents,
tous les éléments de preuve d’une infraction terroriste commise sur leur territoire
contre un autre Etat contractant et pourront à cet effet solliciter l’assistance de
tout autre Etat contractant. Ils prendront les mesures voulues pour préserver
ces éléments de preuve et s’assurer de leur validité juridique. Ils auront seuls
le droit de communiquer, sur demande, les résultats de cette inspection à l’Etat
contre les intérêts duquel l’infraction était dirigée, et interdiction est faite à cet
Etat ou ces Etats contractants dont l’assistance est demandée de transmettre ces
informations à des tiers.
Article 22
Les demandes d’extradition sont faites entre autorités compétentes des Etats
contractants, soit directement, soit par l’intermédiaire des ministères de la justice
ou d’instances équivalentes, soit pas la voie diplomatique.
Article 23
La demande d’extradition sera formulée par écrit et devra être accompagnée des
pièces suivantes :
a/ l’original ou la photocopie certifiée conforme de l’acte d’accusation, du mandat
d’arrêt ou de tout autre document d’effet analogue délivré conformément à la
procédure établie par le droit de l’Etat requérant;
b/ un état indiquant les infractions objet de la demande d’extradition, indiquant
le moment et le lieu où elles ont été commises, leur qualification juridique et les
dispositions applicables de la loi, accompagné du texte de ces dispositions;
c/ une description aussi précise que possible de la personne dont l’extradition est
demandée et toute autre indication de nature à permettre d’établir l’identité et la
nationalité de la personne en cause.
356
Article 24
1. Les autorités judiciaires de l’Etat requérant pourront demander par toute
forme de communication écrite à l’Etat requis, en attendant que celui-ci soit
saisi de la demande d’extradition, de placer la personne recherchée en détention
provisoire.
2. Dans le cas visé au paragraphe ci-dessus, l’Etat requis pourra placer la personne
recherchée en détention provisoire, et si la demande d’extradition n’est pas
accompagnée des pièces exigées à l’article 23 ci-dessus, la durée de la détention
provisoire ne pourra dépasser trente jours, à compter de la date de l’arrestation.
Article 25
L’Etat requérant présentera une demande d’extradition accompagnée des pièces
visées à l’article 23 de la présente Convention. Si l’Etat requis juge que la demande
est valide, ses autorités compétentes y feront droit, conformément à sa propre
législation, l’Etat requérant étant promptement informé de la suite donnée à sa
demande.
Article 26
1. Dans tous les cas prévus aux articles 23 et 24 ci-dessus, la durée totale de la
détention provisoire ne pourra par être supérieure à soixante jours, à compter de
la date de l’arrestation.
2. L’Etat requis pourra décider la remise en liberté provisoire, pour la période
spécifiée au paragraphe 1 ci-dessus, à condition qu’il prenne toutes mesures qu’il
juge nécessaires pour empêcher la personne dont l’extradition est demandée de
s’enfuir.
3. Cette remise en liberté n’empêchera pas la réarrestation ou l’extradition de la
personne dont l’extradition est demandée si la demande d’extradition est reçue
ultérieurement.
Article 27
Si l’Etat requis estime qu’il a besoin d’un complément d’information pour
déterminer si toutes les conditions stipulées dans le présent chapitre sont
satisfaites, il en avisera l’Etat requérant, et un délai sera fixé pour la fourniture de
ces éclaircissements.
357
Article 28
Si l’Etat requis reçoit plusieurs demandes d’extradition émanant de différents
Etats et portant soit sur une même infraction ou sur des infractions différentes, il
se prononcera sur ces demandes en tenant compte de toutes les circonstances, et
en particulier de la possibilité d’extradition ultérieure, de la date de réception des
demandes, de la gravité des infractions et du lieu où elles ont été commises.
Article 29
Toute commission rogatoire comportera les indications suivantes :
a/ L’autorité dont elle émane;
b/ L’objet et le motif de la demande;
c/ L’identité et la nationalité de la personne visée par la commission rogatoire,
dans la mesure du possible;
d/ La description de l’infraction objet de la commission rogatoire, sa qualification
juridique, la peine encourue et autant d’informations que possible sur les
circonstances de l’infraction, de sorte que la commission puisse être exécutée en
bonne et due forme.
Article 30
1. La commission rogatoire est adressée au Ministère de la justice de l’Etat requis
par le Ministère de la justice de l’Etat requérant et est renvoyée par la même
voie.
2. En cas d’urgence, la commission rogatoire est adressée directement aux autorités
judiciaires de l’Etat requis par les autorités judiciaires de l’Etat requérant, copie de
la commission rogatoire étant simultanément envoyée au Ministère de la justice
de l’Etat requis. La commission rogatoire est renvoyée, accompagnée des pièces
relatives à son exécution, par la voie prévue au paragraphe 1 ci-dessus.
3. Les autorités judiciaires pourront adresser la demande de commission rogatoire
directement à l’autorité compétente de l’Etat requis, les réponses pouvant être
transmises directement par la voie de cette même autorité.
358
Article 31
La commission rogatoire et les pièces qui l’accompagnent devront être signées par
l’autorité compétente, qui devra soit y apposer son sceau soit les authentifier. Les
pièces susmentionnées seront exemptées de toutes les formalités qui pourraient
être exigées par la législation de l’Etat requis.
Article 32
Si l’autorité qui reçoit la commission rogatoire n’est pas compétente pour en
traiter, elle devra la renvoyer automatiquement devant l’autorité compétente,
dans l’Etat où elle se trouve, et si la demande a été envoyée directement, il devra
notifier l’Etat requérant par la même voie.
Article 33
Tout rejet de commission rogatoire devra être dûment motivé.
Article 34
Si un Etat requérant juge que la comparution d’un témoin ou d’un expert devant
l’autorité compétente est particulièrement importante, il devra le préciser dans
sa demande. La demande ou la citation à comparaître devra indiquer le montant
approximatif des indemnités et des frais de voyage et de séjour et contenir un
engagement à régler ces sommes. L’Etat requis invitera le témoin ou l’expert à
comparaître et informera l’Etat requérant de la réponse.
Article 35
1. Aucune sanction ou mesure à caractère coercitif ne peut être imposée aux
témoins ou experts qui refuseraient de déférer à une citation, même si cette
citation prévoit des sanctions en cas de non-comparution.
2. Si un témoin ou un expert se rend, de son propre gré, sur le territoire de l’Etat
requérant, la citation qui lui est adressée devra être conforme aux dispositions de
la législation interne dudit Etat.
359
Article 36
1. Aucun témoin ni expert – quelle que soit sa nationalité – ne pourra être
poursuivi, détenu ou soumis à des restrictions de sa liberté sur le territoire de
l’Etat requérant, à raison d’actes ou de condamnations antérieures à son départ
du territoire de l’Etat requis, tant que sa comparution devant les autorités
compétentes de l’Etat requérant défère à une citation.
2. Aucun témoin, ni expert – quelle que soit sa nationalité – comparaissant devant
les autorités compétentes de l’Etat requérant, en réponse à une citation, ne pourra
être poursuivi, ni détenu ou soumis à des restrictions de sa liberté sur le territoire
de cet Etat à raison d’actes ou de condamnations non spécifiés dans la citation et
qui seraient antérieurs à son départ du territoire de l’Etat requis.
3. L’immunité organisée par le présent article s’éteint si, libre de quitter le
territoire de l’Etat requérant, le témoin ou l’expert concerné y demeure pendant
trente jours consécutifs à compter de la date à laquelle les autorités compétentes
ont estimé que sa présence n’était désormais plus nécessaire, ou si, après avoir
quitté ce territoire, il y retourne de son plein gré.
Article 37
1. L’Etat requérant prendra toutes les mesures voulues pour protéger les témoins
ou les experts contre toute publicité qui, du fait de leur déposition ou de l’expertise
qu’ils ont fournies, pourrait exposer leur famille, leurs biens ou leur personne à
des dangers, et en particulier à préserver le caractère confidentiel des informations
concernant :
a/ la date et le lieu d’arrivée de ces témoins ou experts sur le territoire de l’Etat
requérant et les moyens utilisés à cet effet;
b/ leur lieu de résidence, leurs déplacements et les endroits qu’ils fréquentent;
c/ leur déposition ou les information qu’ils présentent devant les autorités
judiciaires compétentes.
2. L’Etat requérant s’engage à assurer aux témoins ou experts ainsi qu’aux
membres de leur famille la protection et la sécurité qu’exigent leur situation,
les circonstances de l’infraction qui a donné lieu à leur citation et la nature des
risques prévisibles.
360
Article 38
1. Si le témoin ou l’expert cité à comparaître dans un Etat requérant est détenu
dans l’Etat requis, il sera pour un temps transféré vers le lieu de l’audience durant
laquelle il doit être entendu, et ce dans les conditions et les délais fixés par l’Etat
requis. Ce transfert peut être refusé si :
a/ le témoin ou l’expert détenu s’y oppose;
b/ la présence du témoin ou de l’expert est indispensable à l’instance pénale
engagée sur le territoire de l’Etat requis;
c/ il risque de prolonger la période de détention du témoin ou de l’expert;
d/ certaines considérations militent contre cette mesure.
2. Le témoin ou l’expert transféré restera détenu sur le territoire de l’Etat
requérant jusqu’à ce que celui-ci le restitue à l’Etat requis, à moins que ce dernier
ne demande sa remise en liberté.
Article 39
La présente Convention sera ratifiée, acceptée ou approuvée par les Etats
signataires, et les instruments de ratification, d’acceptation ou d’approbation
seront déposés auprès du Secrétariat de la Ligue des Etats arabes, dans les trente
jours qui suivront cette ratification, cette acceptation ou cette approbation. Le
Secrétariat général notifiera aux Etats membres le dépôt et la date de dépôt de
chaque instrument.
Article 40
1. La présente Convention entrera en vigueur le trentième jour qui suivra la date de
dépôt du septième instrument de ratification, d’acceptation ou d’approbation.
2. Pour chaque Etat arabe qui ratifiera, acceptera ou approuvera la Convention après
le dépôt du septième instrument de ratification, d’acceptation ou d’approbation,
la Convention n’entrera en vigueur que le trentième jour après le dépôt par cet
Etat de son instrument de ratification, d’acceptation ou d’approbation.
361
Article 41
Aucun Etat contractant ne pourra formuler une réserve qui violerait expressément
ou implicitement les dispositions de la présente Convention, ou serait incompatible
avec ses objectifs.
Article 42
Un Etat contractant ne pourra dénoncer la présente Convention que par voie de
notification écrite adressée au Secrétaire général de la Ligue des Etats arabes.
La dénonciation prendra effet six mois après la date à laquelle la notification aura
été envoyée au Secrétaire général de la Ligue des Etats arabes.
Les dispositions de la présente Convention demeureront en vigueur en ce qui
concerne les demandes présentées avant l’expiration du délai susmentionné.
362
BIBLIOGRAPHIE
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2- Marocaine
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ou dégradants. Adoptée et ouverte à la signature, à la ratification et à l’adhésion
par l’Assemblée générale dans sa résolution 39/46 du 10 décembre 1984.
• Convention de l’Organisation de la conférence islamique sur la lutte contre le
terrorisme international. Adoptée à Ouagadougou le 1 juillet 1999 (Déposée
auprès du Secrétaire général de l’Organisation de la conférence islamique).
• Convention de l’OUA sur la prévention et la lutte contre le terrorisme.
Adoptée à Alger le 14 juillet 1999 (Déposée auprès du Secrétaire général de
l’Organisation de l’unité africaine.
• Convention de Vienne sur le droit des traités, conclue à Vienne le 23 mai 1969,
approuvée par l’Assemblée fédérale le 15 décembre 19891.
• Convention internationale contre la prise d’otages, conclue à New York le 17
décembre 1979, approuvée par l’Assemblée fédérale le 29 novembre 19841.
• Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme.
Adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1999.
• Convention pour la répression de la capture illicite d’aéronefs. Signée à
La Haye le 16 décembre 1970 (Déposée auprès des Gouvernements de la
Fédération de Russie, du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du
Nord et des États-Unis d’Amérique).
• Convention pour la répression d’actes illicites dirigés contre la sécurité de
l’aviation civile. Conclue à Montréal le 23 septembre 1971 (Déposée auprès
des Gouvernements de la Fédération de Russie, du Royaume-Uni de Grande-
Bretagne et d’Irlande du Nord et des États-Unis d’Amérique).
• Convention relative aux infractions et à certains autres actes survenant à
bord des aéronefs. Signée à Tokyo le 14 septembre 1963 (Déposée auprès du
Secrétaire général de l’Organisation de l’aviation civile internationale.
• Convention sur la prévention et la répression des infractions contre les
personnes jouissant d’une protection internationale, y compris les agents
diplomatiques conclue à New York le 14 décembre 1973.
• Convention sur la prévention et la répression des infractions contre les
personnes jouissant d’une protection internationale, y compris les agents
diplomatiques. Adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 14
décembre 1973.
• Déclaration du président irakien lors de la conférence internationale sur l’Irak
tenue à Paris à l’initiative de la France le 15 septembre 2014.
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séminaire organisé à l’Institut royal de police à Kenitra sur le thème du droit
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• CHABLE Julien, commissaire de police cantonal Suisse et conseiller auprès
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séminaire au sujet du droit international humanitaire organisé à l’Institut
royal de police à Kenitra au Maroc le premier avril 2014.
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378
Table des matières
INTRODUCTION GENERALE............................................................ 8
1. L’intérêt du sujet......................................................................................12
2. Evolution du terrorisme......................................................................... 15
3. Les formes modernes du terrorisme......................................................23
4. Définition du terrorisme....................................................................... 28
5. La problématique...................................................................................45
6. Plan du sujet.......................................................................................... 46
379
1. Sur le plan constitutionnel..................................................................... 69
2. Sur le plan législatif et judiciaire............................................................72
B. Les arguments en faveur ou contre la primauté des traités....74
1. Les défenseurs de la primauté des traités sur le droit interne..............75
2. Les défenseurs de la primauté du droit interne sur les traités.............75
380
Section 1. La Convention européenne pour la répression du terrorisme........109
A. Considérations générales................................................. 110
B. L’extradition. ....................................................................111
C. Exceptions motivées ou dispositions contradictoires ?...... 114
381
B. Convention arabe relative à la lutte contre le terrorisme
et ses limites.......................................................................... 162
1. Contenu et définition de la Convention................................................163
2. Dépolitisation des infractions..............................................................165
382
Chapitre II : Dispositions procédurales en matière de lutte
contre le terrorisme.....................................................................................201
383
2. La contrefaçon ou la falsification, les destructions, dégradations
ou détériorations......................................................................................253
a. La contrefaçon ou la falsification en droit marocain ........................253
b. Les destructions, dégradations et détériorations ..............................255
c. Les attentats contre les moyens de transport ou
de communication................................................................................... 259
B. le vol et l’extorsion des biens ainsi que l’’atteinte
aux systèmes de traitement automatisé des données................ 264
1. Le vol et l’extorsion.............................................................................. 264
2. L’atteinte aux systèmes de traitement automatisé des données.........267
384
Conclusion du chapitre II............................................................... 312
385
Résumés
386