Integration Lebesgue
Integration Lebesgue
Integration Lebesgue
Sommaire
15.1 Définition de l’intégrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
15.1.1 Intégration des fonctions étagées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
15.1.2 Intégration des fonctions à valeurs positives . . . . . . . . . . . . . 6
15.1.3 Intégration des fonctions à valeurs dans R . . . . . . . . . . . . . . 9
15.1.4 Intégration des fonctions à valeurs dans C . . . . . . . . . . . . . . 11
15.2 Exemples d’espaces mesurés et intégrales correspondantes . . 12
15.2.1 Mesure de Dirac . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
15.2.2 Restriction de l’intégrale sur une partie mesurable . . . . . . . . . 13
15.2.3 Cas de la mesure de Lebesgue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
15.2.4 Mesure de comptage et séries . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
15.2.5 Mesures définies par une densité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
15.3 Passage à la limite sous l’intégrale . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
15.3.1 Théorème de convergence monotone . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
15.3.2 Lemme de Fatou . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
15.3.3 Théorème de convergence dominée . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
15.4 Intégrales à paramètre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
15.4.1 Limites et continuité pour des intégrales à paramètre . . . . . . . . 20
15.4.2 Interlude : lien avec les intégrales de Riemann généralisées . . . . . 22
15.4.3 Théorème de dérivation sous l’intégrale . . . . . . . . . . . . . . . 23
15.5 Intégrales multiples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
15.5.1 Produits d’espaces mesurables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
15.5.2 Mesure produit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26
15.5.3 Théorèmes de Fubini . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
15.6 Changements de variables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
15.6.1 Formule abstraite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
15.6.2 Cas de Rd muni de la mesure de Lebesgue . . . . . . . . . . . . . . 32
15.6.3 Exemples importants de changements de variables . . . . . . . . . 37
15.7 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
15.7.1 Définition de l’intégrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
15.7.2 Passage à la limite sous l’intégrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
15.7.3 Intégrales à paramètres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
15.7.4 Intégrales multiples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
15.7.5 Changements de variables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
Le but de ce chapitre est de donner une nouvelle construction de l’intégrale. Par rapport
à la définition connue pour les fonctions continues par morceaux, ou même par rapport à
l’intégrale de Riemann, cette nouvelle approche va permettre de définir l’intégrale de fonctions
beaucoup plus générales.
1
Cette nécessité de généraliser si largement la définition de l’intégrale est motivée par une
changement de point de vue sur l’utilisation de cette intégrale. Il ne s’agit pas de calculer
l’aire sur la courbe de fonctions tellement compliquées qu’elles ne seraient pas intégrables au
sens de Riemann.
Un tournant dans l’utilisation de l’intégrale a été l’introduction par J. Fourier des séries qui
portent aujourd’hui son nom. Fourier affirmait que toute fonction périodique (en fait, toute
fonction sur r0, πs s’annulant aux extrémités) peut s’écrire comme somme éventuellement
infinie de fonctions trigonométriques. Les coefficients étaient alors donnés par une expression
faisant intervenir. . . l’intégrale de la fonction en question.
Alors que l’intégrale était à l’origine utilisée pour calculer des aires, ce qui n’impliquait que
des fonctions très simples, l’affirmation de Fourier devait concerner n’importe quelle fonction.
Cela a poussé les mathématiciens a clarifier la notion même de fonction, pour aboutir à la
définition très générale qu’on utilise aujourd’hui, et ensuite à définir l’intégrale pour cette
large classe de fonctions.
Il y a eu de nombreuses définitions améliorant au fil du temps la théorie de l’intégration.
La construction de l’intégrale au sens de Riemann est déjà très générale et permet de donner
un sens à l’intégrale de toutes les fonctions que l’on peut rencontrer dans des problèmes
concrêts.
Mais l’un des intérêts cruciaux de l’intégrale de Lebesgue qui sera définie dans ce chapitre
est le bon comportement par rapport au passage à la limite. Une question naturelle, et qui
sera au cœur de nombreuses discussions concernant la théorie de l’intégration, est la suivante.
Étant donnée une suite pfn qnPN de fonctions intégrables (quoi que cela puisse signifier) qui
admet une limite (à nouveau, en un sens à préciser), a-t-on
ż ż
lim fn “ lim fn ? (15.1)
nÑ`8 nÑ`8
Avant de se demander si l’égalité est vraie (et on verra que même dans des situations très
simples, elle ne l’est pas), il faut déjà s’assurer que les deux membres de cette égalité ont bien
un sens. En particulier, si on note f la limite de la suite pfn qnPN , est-on capable de donner
un sens à l’intégrale de f ? Si on considère simplement l’intégrale des fonctions continues, on
sait qu’à moins d’imposer une hypothèse de convergence très forte, comme une convergence
uniforme, la limite d’une suite de fonctions continues ne sera pas nécessairement continue. Et
la classe des fonctions Riemann intégrables, bien que relativement large, n’est pas non plus
stable par passage à la limite en un sens trop faible. C’est là que les notions que l’on utilisera
dans ce chapitre seront plus souples.
Malheureusement, même si le nouvel espace des fonctions intégrables sera plus adapté
pour se poser la question (15.1), cela n’implique pas que l’égalité sera vraie. En fait, des
contre-exemples très simples n’impliquant que des fonctions continues et à supports compacts
montrent qu’aucune définition raisonnable de l’intégrale ne peut assurer (15.1) en toute gé-
néralité. Un théorème de passage à la limite sous l’intégrale ne peut donc être énoncé qu’avec
des hypothèses restrictives. Les contre-exemples typiques qu’il est bon de garder à l’esprit
sont les suivants. Pour x P R on pose par exemple
$
&x
’ si x P r0, 1s,
φpxq “ 2 ´ x si x P r1, 2s,
’
0 si x R r0, 2s,
%
puis, pour n P N˚ ,
1 ´x¯
fn pxq “ φpx ´ nq, gn “ nφpnxq, hn “ φ . (15.2)
n n
On note tout d’abord que toutes ces fonctions sont continues et à supports compacts,
donc les intégrales correspondantes ont bien un sens, quelle que soit la définition choisie. On
note également que toutes ces fonctions sont d’intégrales égales à 1, mais que les trois suites
pfn qnPN , pgn qnPN et phn qnPN convergent simplement vers 0 (qui est également parfaitement
intégrable quelle que soit la théorie choisie). En particulier, l’égalité (15.1) n’a pas lieu. Ces
trois contre-exemples illustrent trois phénomènes différents. La fonction fn est un profil qui
s’échappe à l’infini, la fonction gn se concentre en un point et la fonction hn s’étale. On note
2 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
également que les fonctions gn sont à support dans un même compact, et que dans le cas de
hn on a convergence uniforme vers 0 (évidemment, aucun contre-exemple ne peut avoir ces
deux propriétés à la fois, puisque sur un compact et pour une suite de fonctions continues
convergeant uniformément, le passage à la limite sous l’intégrale est bien valable).
Ces trois phénomènes seront moralement les seules obstructions au passage à la limite
sous l’intégrale, et une hypothèse permettant d’exclure ces trois cas aura de bonnes chances
d’être suffisante pour montrer (15.1). Ce sera le cas pour les résultats du paragraphe 15.3. En
particulier, on peut considérer que le théorème de convergence dominée 15.34 est le résultat
principal de ce chapitre.
Au delà de simples calculs de limites, ces bonnes propriétés vis-à-vis du passage à la limite
auront des conséquences importantes sur la structure des espaces de fonctions intégrables.
On y reviendra au chapitre suivant sur les espaces de Lebesgue.
J. Royer 3
Figure 15.2 – Stratégies de Riemann et de Lebesgue
mesurable. L’intégrale sera même utilisée pour définir de nouvelles mesures, qui donneront
alors les intégrales à densité (voir le paragraphe 15.2.5).
Après avoir défini les fonctions mesurables et construit l’intégrale de Lebesgue, on mon-
trera les théorèmes de passage à la limite sous l’intégrale déjà évoqués. On terminera ensuite
ce chapitre avec deux outils importants permettant de simplifier des intégrales, afin de pou-
voir les calculer ou d’en donner de bonnes propriétés. On montrera les théorèmes de Fubini,
qui permettent typiquement d’exprimer des intégrales sur des domaines de Rd pour d ě 1 en
fonction d’intégrales unidimensionnelles, mais aussi d’intervertir l’ordre d’intégration pour
des intégrales multiples. Enfin on terminera par le théorème de changement de variable qui
permet, par un changement de coordonnées, de tenir compte des symétries d’un calcul pour le
simplifier (par exemple passer en coordonnées polaires pour un problème à symétrie radiale).
4 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
Soient j P J1, nK et k P J1, mK. On note que si Aj X Bk ‰ H alors αj “ βk , donc dans tous
les cas on a αj µpAj X Bk q “ βk µpAj X Bk q. On a alors
n
ÿ n ÿ
ÿ m m ÿ
ÿ n m
ÿ
αj µpAj q “ αj µpAj X Bk q “ βk µpAj X Bk q “ βk µpBk q.
j“1 j“1 k“1 k“1 j“1 k“1
Cela prouve que la définition ne dépend pas du choix d’une partition de X compatible avec
f.
où n, m P N, α1 , . . . , αn , β1 , . . . , βm P R˚` , A1 , . . . , An , B1 , . . . , Bm P M avec A1 , . . . , A
Ťnn deux
à deux disjoints et B1 , . . . , Bm deux à deux disjoints. On note α0 “ β0 “ 0, A0 “ Xz j“1 Aj
Ťm
et B0 “ Xz k“1 Bk . On peut encore écrire
n
ÿ m
ÿ
f“ αj 1Aj et g “ βj 1Bj .
j“0 k“0
On a alors ÿ
f `g “ pαj ` βk q1Aj XBk .
0ďjďn
0ďkďm
Puisque les ensembles pAj X Bk q pour pj, kq P J0, nK ˆ J0, mK sont mesurables et deux à deux
disjoints, on a ż ÿ
pf ` gq dµ “ pαj ` βk qµpAj X Bk q.
X 0ďjďn
0ďkďm
J. Royer 5
On obtient alors
ż ÿ ÿ
pf ` gq dµ “ αj µpAj X Bk q ` βk µpAj X Bk q
X 0ďjďn 0ďjďn
0ďkďm 0ďkďm
ÿn m
ÿ ÿm n
ÿ
“ αj µpAj X Bk q ` βk µpAj X Bk q
j“0 k“0 k“0 j“0
ÿn m
ÿ
“ αj µpAj q ` βk µpBk q
j“0 k“0
ż ż
“ f dµ ` g dµ.
X X
donc ż n
ÿ n
ÿ ż
λf dµ “ λαj µpAj q “ λ αj µpAj q “ λ f dµ.
X j“1 j“1 X
(iii) La fonction g ´ f est dans E` pX, Mq. En effet elle est mesurable et ne prend qu’un
nombre fini de valeurs, toutes positives ou nulles. On peut donc définir son intégrale, qui est
positive. Par linéarité on a alors
ż ż ż ż
g dµ “ f dµ ` pg ´ f q dµ ě f dµ.
X X X X
řm
Remarque 15.6. Soit f “ j“1 βj 1Bj une fonction étagée, où m P N, β1 , . . . , βm P R` et
B1 , . . . , Bm P M (non nécessairement deux à deux disjoints). Alors par linéarité de l’intégrale
on a ż m
ÿ ż ÿm
f dµ “ βj 1Bj dµ “ bj µpBj q.
X j“1 X j“1
6 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
Proposition 15.7. Soit f : X Ñ r0, `8s une fonction mesurable. Alors il existe une suite
croissante de fonctions étagées à valeurs positives qui converge ponctuellement vers f .
où E désigne la partie entière. Cela définit une suite croissante de fonctions qui ne prennent
chacune qu’un nombre fini de valeurs et telles que pour tout t P r0, `8s on a
ϕn ptq ÝÝÝÑ t.
nÑ8
Définition 15.8. Soit f : X Ñ r0, `8s une fonction mesurable. On appelle intégrale de f
(sur X et pour la mesure µ) la quantité
ż ż
f dµ “ sup h dµ P r0, `8s.
X hPE` pX,Mq X
hďf
donc An est mesurable. Comme la suite pfn qnPN est croissante, on a An Ă An`1 . En outre,
pour tout x P X on a
fn pxq ÝÝÝÑ f pxq ą γhpxq,
nÑ8
J. Royer 7
donc ď
An “ X.
nPN
On a alors
ż ż ż m
ÿ m
ÿ ż
`ě fn dµ ě fn dµ ě γ h dµ “ γ αj µpAn XBj q ÝÝÝÑ γ αj µpBj q “ γ h dµ.
X An An nÑ8 X
j“1 j“1
Démonstration. On considère des suites croissantes pfn qnPN et pgn qnPN dans E` pX, Mq qui
convergent vers f et g, respectivement. Alors la suite pfn ` λgn qnPN dans E` pX, MqN est
croissante et converge ponctuellement vers f ` λg. Pour tout n P N on a
ż ż ż
pfn ` λgn q dµ “ fn dµ ` λ gn dµ.
X X X
(ii) On suppose que şf “ 0 presque partout. Soit h P ş E` pX, Mq telle que h ď f . Alors h “ 0
presque
ş partout, donc X
h dµ “ 0. On en déduit
`“ 1 que X
‰˘ f dµ “ 0. Inversement, supposons que
˚ ´1
X
f dµ “ 0. Pour n P N on note An “ f n , `8 . D’après la proposition précédente on
a µpAn q “ 0 pour tout n P N˚ . Par ailleurs la suite pAn qnPN˚ est croissante pour l’inclusion.
On a alors
µpf ´1 ps0, `8sqq “ lim µpAn q “ 0.
nÑ8
8 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
(iii) On suppose qu’il existe A P M tel que µpAq ą 0 et f pxq “ `8 pour tout x P A. Pour
tout n P N on a alors n1A ď f , donc
ż
f dµ ě nµpAq.
X
soit ż ż
f dµ “ h´ dµ.
X X
De même, ż ż
g dµ “ h´ dµ.
X X
D’où ż ż
f dµ “ g dµ.
X X
Définition 15.14. Soit f une fonction de X dans R. On dit que f est intégrable (sur X, par
rapport à µ) si elle est mesurable et
ż
|f | dµ ă `8.
X
On note L1 pX, M, µq ou L1R pX, M, µq l’ensemble des fonctions intégrables sur X à valeurs
dans R.
J. Royer 9
(iii) Pour tout f P L1 pX, M, µq on a
ˇż ˇ ż
ˇ ˇ
ˇ f dµˇ ď |f | dµ.
ˇ ˇ
X X
1
Démonstration. ‚ Soient f, g P L pX, M, µq et λ P R. On sait que f ` g et λg sont me-
surables. En outre, |f ` g| ď |f | ` |g| et |λf | “ |λ| |f |. On en déduit que f ` g et λg sont
intégrables.
‚ On a $
&0
’ si λ “ 0,
pλf q` “ λf` si λ ą 0,
’
´λf´ si λ ă 0,
%
et $
&0
’ si λ “ 0,
pλf q´ “ λf´ si λ ą 0,
’
si λ ă 0.
%
´λf`
Si λ ď 0 on a alors
ż ż ż ż ż
λf dµ “ pλf q` dµ ´ pλf q´ dµ “ |λ| f´ dµ ´ |λ| f` dµ
X X X X X
ˆż ż ˙ ż
“ |λ| f´ dµ ´ f` dµ “ λ f dµ.
X X X
On conclut de même si λ ě 0.
‚ Pour la somme, on écrit
pf ` gq` ´ pf ` gq´ “ f ` g “ f` ´ f´ ` g` ´ g´ ,
ce qui donne
pf ` gq` ` f´ ` g´ “ pf ` gq´ ` f` ` g` .
Par linéarité de l’intégrale pour les fonctions à valeurs positives, on a
ż ż ż ż ż ż
pf ` gq` dµ ` f´ dµ ` g´ dµ “ pf ` gq´ dµ ` f` dµ ` g` dµ.
X X X X X X
Ainsi,
ż ż ż
pf ` gq dµ “ pf ` gq` dµ ´ pf ` gq´ dµ
X
żX ż X
ż ż
“ f` dµ ´ f´ dµ ` g` dµ ´ g´ dµ
X X X X
ż ż
“ f dµ ` g dµ.
X X
f` ´ f´ ď g` ´ g´ ,
soit
f` ` g´ ď g` ` f´ .
10 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
Cela donne ż ż ż ż
f` dµ ` g´ dµ ď g` dµ ` g´ dµ,
X X X X
et donc ż ż ż ż ż ż
f dµ “ f` dµ ´ f´ dµ ď g` dµ ´ g´ dµ “ g dµ.
X X X X X X
‚ Pour l’inégalité triangulaire on écrit simplement
ˇż ˇ ˇż ż ˇ ż ż ż
ˇ ˇ ˇ ˇ
ˇ f dµˇ “ ˇ f` dµ ´ f´ dµˇ ď
ˇ f` dµ ` f´ dµ “ |f | dµ.
ˇ ˇ ˇ
X X X X X X
Alors on dit que f est intégrable sur X si f˜ l’est et dans ce cas on pose
ż ż
f dµ “ f˜ dµ.
X X
On note L1 pX, M, µq ou L1C pX, M, µq l’ensemble des fonctions intégrables sur X à valeurs
dans C.
Remarque 15.18. Sişf : X Ñ C est mesurable,
ş alors Repf q et Impf
ş q sont mesurables de X
dans R. En outre si X |f | dµ ă `8 alors X |Repf q| dµ ă `8 et X |Impf q| dµ ă `8, donc
la définition a bien un sens.
Proposition 15.19. (i) L1C pX, M, µq est un C-espace vectoriel.
ż
(ii) L’application f ÞÑ f dµ est une forme linéaire sur L1C pX, M, µq.
X
(iii) Pour tout f P L1C pX, M, µq on a
ˇż ˇ ż
ˇ ˇ
ˇ f dµˇ ď |f | dµ.
ˇ ˇ
X X
J. Royer 11
Démonstration. Soient f, g P L1C pX, M, µq et λ “ α ` iβ P C (avec α, β P R). Par linéarité
des parties réelles et imaginaires et linéarité de l’intégrale d’une fonction à valeurs réelles on
a
ż ż ż
pf ` gq dµ “ Repf ` gq dµ ` i Impf ` gq dµ
X
żX ż X
ż ż
“ Repf q dµ ` i Impf q dµ ` Repgq dµ ` i Impgq dµ
żX ż X X X
“ f dµ ` g dµ.
X X
D’autre part
ż ż ż
pλf q dµ “ Repλf q dµ ` i Impλf q dµ
X
żX X
ż
“ pα Repf q ´ β Impf qq dµ ` i pβ Repf q ` α Impf qq dµ
X
ˆż ż X ˙
“ pα ` iβq Repf q dµ ` i Impf q dµ
X X
ż
“λ f dµ.
X
ş
Cela prouve la première assertion. Pour la seconde, on considère un argument θ de X
f dµ.
On a alors ˇż ˇ ż ż
ˇ ˇ
ˇ f dµˇ “ e´iθ f dµ “ e´iθ f dµ.
ˇ ˇ
X X X
Comme il s’agit d’égalités entre nombres réels positifs, on ne les modifie pas en prenant
la partie réelle puis la valeur absolue de chaque terme. En appliquant la définition d’une
intégrale complexe puis l’inégalité triangulaire pour une intégrale d’une intégrale réelle on
obtient
ˇż ˇ ˇ ˆż ˙ˇ ˇż ˇ ż ż
ˇ ˇ ˇ ´iθ
ˇ ˇ ´iθ
ˇ ˇ ˇ
ˇ f dµˇ “ ˇRe e f dµ ˇ “ ˇ Repe f q dµ ˇď ˇRepe´iθ f qˇ dµ ď |f | dµ.
ˇ ˇ ˇ ˇ ˇ ˇ
X X X X X
Cela prouve l’inégalité triangulaire. On déduit la dernière assertion comme dans le cas réel.
On peut de la même façon intégrer des fonctions à valeurs dans Rn pour n ě 2. On munit
n
R de l’une des normes }¨}1 , }¨}2 ou }¨}8 . Si f1 , . . . , fn sont des fonctions de X dans R et
f “ pf1 , . . . , fn q : X Ñ Rn , alors f est mesurable si et seulement si les fj , 1 ď j ď n le sont.
Dans ce cas la fonction f ÞÑ }f } est également mesurable. En outre, si
ż
}f } dµ ă `8
12 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
(iv) Soit f une fonction mesurable de pE, ME q dans R. On définit 1˚E f comme précédem-
ment. Alors f est intégrable sur pE, ME , µE q si et seulement si 1˚E f l’est sur pX, M, µq,
et dans ce cas on a ż ż
f dµE “ 1˚E f dµ.
E X
J. Royer 13
Puisque ces deux quantités coïncident, on pourra utiliser la notation de droite pour dési-
gner l’intégrale de gauche.
Cette proposition assure que tous les calculs d’intégrales vus dans R pour des fonctions
régulières (théorème fondamental de l’analyse, intégrations par parties, etc.) sont encore
valables pour l’intégrale de Lebesgue.
Démonstration. On commence par observer que f est borélienne car continue sur ra, bs. En
outre elle est bornée, donc
ż
|f | dλ ď pb ´ aq }f }8 ă `8.
ra,bs
Cela prouve que f est intégrable au sens de Lebesgue sur ra, bs.
Soit ε ą 0. Comme f est uniformément continue sur ra, bs, il existe δ ą 0 tel que pour
ε
tous x, y P ra, bs tels que |x ´ y| ď δ on a |f pxq ´ f pyq| ď b´a . Quitte à choisir δ plus petit,
on peut supposer que si
a “ x0 ă x1 ă ¨ ¨ ¨ ă xn “ b
une subdivision de ra, bs (avec n P N˚ ) de pas inférieur ou égal à δ ą 0 et si pour j P J1, nK
on considère ξj Psxj´1 , xj r, alors
ˇż ˇ
ˇ b ÿn ˇ
ˇ f pxq dx ´ f pξj qpxj ´ xj´1 qˇ ď ε.
ˇ ˇ
ˇ a j“1
ˇ
On a
ˇż ˇ ˇ ˜ż ¸ˇ
ˇ ÿn ˇ ˇÿ n ˇ
f dλ ´ f pξj qpxj ´ xj´1 qˇ “ ˇ f 1sxj´1 ,xj r dλ ´ f pξj qpxj ´ xj´1 q ˇ
ˇ ˇ ˇ ˇ
ˇ
ˇ ra,bs j“1
ˇ ˇ j“1 ra,bs ˇ
ˇż ˇ
ÿ n ˇ ˇ
f dλ ´ f pξj qpxj ´ xj´1 qˇ
ˇ ˇ
ď ˇ
j“1
ˇ sx ,x
j´1 j r ˇ
ÿ n ż
ď |f ´ f pξj q| dλ
j“1 sxj´1 ,xj r
n ż
ÿ ε
ď dλ
j“1 sxj´1 ,xj r
b´a
n
ε ÿ
ď pxj ´ xj´1 q
b ´ a j“1
ď ε.
Cela prouve que ˇż ˇ
ˇ żb ˇ
f dλ ´ f pxq dxˇ ď 2ε.
ˇ ˇ
ˇ
ˇ ra,bs a ˇ
Ceci étant valable pour tout ε ą 0, on a bien égalité.
14 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
Exercice 45. Soit a “ pan qnPN une suite de réels positifs. On considère sur N la mesure
ř ??. Soit f “ pfn qnPN . Montrer que f est intégrable sur pN, PpNq, µa q si et
µa de l’exemple
seulement si nPN an |fn |, et dans ce cas
ż ÿ
f dµa “ an fn .
N nPN
(iii) Soit f une fonction mesurable de X dans C. Alors f est intégrable sur pX, M, µw q si
et seulement si f w est intégrable sur pX, M, µq et dans ce cas
ż ż
f dµw “ f w dµ.
X X
Cela prouve que µA est bien une mesure sur pX, Mq.
‚ Puisque f est mesurable, f w est mesurable comme produit de deux fonctions mesurables.
L’égalité est vraie par définition de µw si f est l’indicatrice d’une partie mesurable A de
X. Par linéarité de l’intégrale (et du produit par w), elle est donc vraie pour les fonctions
étagées. Pour le cas général, on considère une suite croissante pfn qnPN de fonctions étagées
qui converge vers f . Pour tout n on a alors
ż ż
fn dµw “ fn w dµ.
X X
D’après le théorème de convergence monotone, on obtient alors l’égalité attendue par passage
à la limite.
‚ On considère maintenant une fonction mesurable f de X dans R. Comme précédemment,
f w est mesurable comme produit de fonctions mesurables. D’après (ii) on a
ż ż
|f | dµw “ |f | w dµ,
X X
J. Royer 15
donc f est intégrable sur pX, M, µw q si et seulement si f w l’est sur pX, M, µq. Et dans ce
cas, notant f` et f´ les parties positives et négatives de f on obtient, toujours d’après (ii),
ż ż ż ż ż ż
f dµw “ f` dµw ´ f´ dµw “ f` w dµ ´ f´ w dµ “ f w dµ.
X X X X X X
Cela définit une mesure de probabilité sur pR, BpRqq. En outre on observe que si les intervalles
rn, n ` 1s sont tous de longueur 1, la suite pµprn, n ` 1sqqnPN est strictement décroissante.
Cette mesure donne plus de poids au valeurs proche de 0 qu’aux grandes valeurs.
Corollaire 15.26.
ř Soient pfn qnPN une suite de fonctions mesurables de X dans r0, `8s.
Alors la série nPN fn définit une fonction mesurable de X dans r0, `8s et on a
ż ÿ ÿż
fn dµ “ fn dµ.
X nPN nPN X
Remarque 15.27. La limite du théorème 15.25 ou la série du corollaire 15.26 peuvent prendre
la valeurs `8.
Théorème 15.28 (Lemme de Fatou). Soit pfn qnPN une suite de fonctions mesurables de X
dans r0, `8s. Alors on a
ż ż
lim inf fn dµ ď lim inf fn dµ.
X nÑ8 nÑ8 X
16 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
Démonstration. La suite pinf kěn fk qkPN est croissante. Chacune de ces fonctions est mesu-
rable, et par le théorème de convergence monotone on a
ż ż ż
lim inf fn dµ “ lim inf fk dµ “ lim inf fk dµ.
X nÑ8 X nÑ8 kěn nÑ8 X kěn
D’où le résultat.
Remarque 15.29. Il peut y avoir inégalité stricte en (15.3) et donc pour l’inégalité donnée
par le lemme de Fatou. C’est par exemple le cas pour tous les contre-exemples (15.2). On
peut également considérer l’exemple suivant. Pour n P N on pose fn “ 1r0,1s si n est pair et
fn “ 1r´1,0r si n est impair. Alors on a
lim inf fn “ 0
nÑ`8
et ż
@n P N, fn dλ “ 1,
R
donc ż ˆ ˙ ż
lim inf fn dλ ă lim inf fn dλ.
R nÑ`8 nÑ`8 R
Remarque 15.30. L’hypothèse de positivité est nécessaire pour le lemme de Fatou. En effet,
1
si pour n P N˚ on pose fn “ ´ r0,ns
n , alors on a
ż ż
lim inf fn dλ “ 0 dλ “ 0
R nÑ`8 X
et ż
lim inf fn dλ “ lim inf p´1q “ ´1.
nÑ8 R nÑ`8
J. Royer 17
Remarque 15.33. On remarque que si E est un ensemble négligeable de R, alors la suite pfn q
de l’exemple précédent converge aussi presque partout vers la fonction indicatrice de E. Cela
permet d’une part de voir que la limite au sens de la convergence simple presque partout
n’est pas unique. D’autre part, en prenant une partie E qui n’est pas mesurable on voit que
la limite simple presque partout d’une suite de fonctions mesurables n’est pas nécessairement
mesurable. Il faudra donc être prudent, cette notion de limite simple presque partout appor-
tera de la souplesse qui sera bienvenue pour les applications, mais en contrepartie on devra
composer avec ces nouvelles subtilités de la théorie.
Théorème 15.34 (Théorème de convergence dominée). Soient pX, M, µq un espace mesuré
et pfn qnPN une suite de fonctions mesurables de X dans R convergeant simplement presque
partout vers une fonction f : X Ñ R mesurable. On suppose qu’il existe une fonction inté-
grable g : X Ñ r0, `8s telle que pour tout n P N on a pour presque tout x P X
On rappelle que si fn converge simplement vers f (partout) alors la limite f est automa-
tiquement mesurable.
Démonstration. ‚ D’après (15.4), fn est intégrable pour tout n P N. En outre, par passage
à la limite dans (15.4) on a aussi |f | ď g, donc f est également intégrable sur X.
‚ On suppose que fn converge simplement vers f et |fn pxq| ď gpxq pour tous n P N et x P R.
On considère la suite de fonctions positives mesurables p2g ´ |fn ´ f |q. D’après le lemme de
Fatou et par linéarité de l’intégrale on a
ż ż
2g dµ “ lim inf p2g ´ |fn ´ f |q dµ
X X nÑ8
ż
ď lim inf p2g ´ |fn ´ f |q dµ
nÑ8 X
ż ż
“ 2g dµ ` lim inf p´ |fn ´ f |q dµ.
X nÑ8 X
Puisque ˇż ż ˇ ż
ˇ ˇ
ˇ fn dµ ´ f dµˇˇ ď |fn ´ f | dµ,
ˇ
X X X
on en déduit que ż ż
fn dµ ÝÝÝÑ f dµ.
X nÑ8 X
‚ On considère maintenant le cas général. Soit A P M tel que µpAq “ 0 et fn pxq tend
vers f pxq pour tout x P XzA. Pour n P N on considère Bn PŤM tel que µpBn q “ 0 et
|fn pxq| ď gpxq pour tout x P XzBn . Enfin on note E “ A Y nPN Bn . Alors E P M et
µpEq “ 0 et le théorème de convergence dominée s’applique au fonctions 1XzE fn et 1XzE f
(dominées par g). Ainsi,
ż ż ż ż
fn dµ “ 1XzE fn dµ ÝÝÝÑ 1XzE f dµ “ f dµ.
X X nÑ8 X X
D’où le résultat.
Remarque 15.35. On observe que la fonction f du théorème est intégrable, donc contrairement
au théorème de convergence monotone, le théorème de convergence dominée ne permet pas
de conclure qu’une suite d’intégrales tend vers `8.
18 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
En outre pour n ě 2 et x ě 0 on a
ˇ ˇ
ˇ cospxq ˇ
ˇ 1 ` xn ˇ ď gpxq,
ˇ ˇ
où on a posé #
1 si x P r0, 1s,
gpxq “ 1
1`x2 si x ą 1.
Puisque la fonction g est intégrable sur R` , on obtient par le théorème de convergence dominée
que ż `8 ż 1
In ÝÝÝÝÝÑ f pxq dx “ cospxq dx “ sinp1q.
nÑ`8 0 0
Exemple 15.37. Soit f P L1 pR, BpRq, λq, où λ est la mesure de Lebesgue. Alors on a
ż
f pxq cospπxqn dλpxq ÝÝÝÝÝÑ 0.
R nÑ`8
Pour n P N et x P R on note fn pxq “ f pxq cospπxqn . On commence par observer que chacune
des intégrales est bien définie. En effet, pour tout n P N la fonction fn est mesurable comme
produit d’une fonction mesurable et d’une fonction continue et donc borélienne. En outre
pour tout x P R et n P N on a
|fn pxq| ď |f pxq| , (15.5)
donc par comparaison on obtient
ż ż
|fn | dλ ď |f | dλ ă `8.
R R
Puisque Z est de mesure de Lebesgue nulle (car dénombrable), la suite de fonction pfn qnPN
converge simplement presque partout vers 0. Or d’après (15.5) on peut appliquer le théorème
de converge dominée. Cela donne
ż ż
fn dλ ÝÝÝÝÝÑ 0 dλ “ 0.
R nÑ`8 R
J. Royer 19
ř
Démonstration. La fonction |fn | est mesurable et d’après le théorème de convergence
nPN
monotone ż ÿ ÿż
|fn | dµ “ |fn | dµ ă `8.
X nPN nPN X
ř
ă `8 pour presque tout x P X. En particulier il existe E P M tel
On a alors nPN |fn pxq| ř
que µpEq “ 0 et la série nPN fn pxq est (absolument) convergente pour tout x P XzE. Pour
n P N et x P X on note
ÿn
Sn pxq “ fk pxq.
k“0
Pour x P X on note #ř
`8
k“0 fk pxq si x P XzE,
Spxq “
0 si x P E.
Alors S est mesurable et Sn converge simplement presque partout vers S, et pour tous n P N
et x P X on a
`8
ÿ
|Sn pxq| ď |fk pxq| .
k“0
Le but de ce paragraphe est d’étudier la régularité de telles fonctions définies par une
intégrale. En passant, on discutera le lien entre les intégrales de Riemann généralisées et
l’intégration au sens de Lebesgue.
20 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
(iii) il existe g : X Ñ R` intégrable telle que pour tout y P I on a, pour µ-presque tout
x P X,
|f px, yq| ď gpxq. (15.8)
Démonstration. D’après (i) et (iii), l’application x ÞÑ f px, yq est intégrable sur X pour tout
y P I, donc la fonction F est bien définie. En outre, par passage à la limite dans (15.8), on
a |`pxq| ď gpxq pour presque tout x P X, donc ` est également intégrable. Soit pyn qnPN˚ une
suite d’éléments de I qui tend vers y0 . Alors pour tout n P N˚ et presque tout x P X on a
|f px, yn q| ď gpxq.
D’autre part f px, yn q ÝÝÝÝÝÑ `pxq pour presque tout x, donc par le théorème de convergence
nÑ`8
dominée on a ż ż
F pyn q “ f px, yn qdµpxq ÝÝÝÝÝÑ `pxq dµpxq.
X nÑ`8 X
La continuité n’étant rien d’autre qu’une proprité sur les limites, on en déduit immédia-
tement un résultat de continuité sous l’intégrale.
Remarque 15.41. Les théorèmes 15.39 et 15.40 sont en fait valables en remplaçant l’intervalle
I (muni de la topologie usuelle) par n’importe quel espace métrique.
Exemple 15.42. On considère la fonction Gamma (15.7). Pour tout s ą 0 la fonction x ÞÑ
xs´1 e´x est continue (et donc borélienne) et à valeurs positives. Soient a, b ą 0 tels que a ă b.
Pour x ą 0 et s P ra, bs on a
#
a´1 ´x
ˇx e ˇ ď gpxq “ x e si x ď 1,
ˇ s´1 ´x ˇ
b´1 ´x
x e si x ą 1.
La fonction g est continue sur s0, `8r, on a gpxq „ xa´1 et, par croissance comparée, gpxq “
xÑ0
x
O pe´ 2 q. La fonction g est donc intégrable sur s0, `8r. Par le théorème de continuité
xÑ`8
sous l’intégrale, Γ est continue sur ra, bs. Ceci étant valable pour tout segment de s0, `8r,
on obtient que Γ est continue sur s0, `8r.
On peut également donner une version continue sur théorème de convergence monotone.
J. Royer 21
Théorème 15.43. On suppose que I “ ra, br avec a P R et b Psa, `8s. On suppose que
pour tout x P X la fonction y ÞÑ f px, yq est positive et croissante sur ra, br et on note
`pxq P r0, `8s “ limyÑb f px, yq. Alors ` est mesurable sur X et
ż ż
f px, yq dµpxq ÝÝÝÑ `pxq dµpxq.
X yÑb X
Démonstration. Soit pyn qnPN une suite dans ra, br qui croit vers b. Pour n P N on note
fn pxq “ f px, yn q. Alors la suite pfn qnPN est croissante et converge simplement vers `. Par le
théorème 15.25 on a
ż ż ż
f px, yn q dµpxq “ fn pxq dµpxq ÝÝÝÝÝÑ `pxq dµpxq.
X X nÑ`8 X
Exemple 15.44. On revient sur l’exemple de la fonction Gamma et on s’intéresse aux limites
en 0 et en `8. Pour x ą 1 la fonction s ÞÑ xs´1 e´x est positive et croit vers `8, donc par
le théorème de convergence monotone on a
ż `8
Γpsq ě xs´1 e´x dx ÝÝÝÝÑ `8.
1 sÑ`8
De même, pour x Ps0, 1r la fonction s ÞÑ xs´1 e´x est positive, décroissante, et tend vers `8
en 0. On obtient ż1
Γpsq ě xs´1 e´x dx ÝÝÝÑ `8
0 sÑ0
x
(si sn ą 0 décroît vers 0 alors xsn ´1 e´x croît vers ex pour tout x Ps0, 1r). On note que dans
ce dernier cas on peut conclure directement en écrivant
ż1
e´1
Γpsq ě e´1 xs´1 dx “ ÝÝÝÑ `8.
0 s sÑ0
Soient a P R et b Psa, `8s (on pourrait de la même façon considérer un intervalle ouvert à
gauche). On considère une fonction f continue (par morceaux) sur ra, br. Pour tout x Psa, br,
l’intégrale de f sur le segment ra, bs est bien définie, que ce soit au sens de Riemann ou de
Lebesgue, et les deux intégrales coïncident. On dit que l’intégrale de f sur ra, br (au sens de
Riemann) est convergente si la limite
żx
lim f ptq dt
xÑb a
cette limite. Pour l’intégrale au sens de Lebesgue il n’y a pas de passage à la limite, la
définition 15.14 a un sens directement sur ra, br, et selon si f vérifie ces conditions elle sera
dite intégrable sur ra, br ou non. Le lien entre ces deux intégrales est le suivant.
22 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
Proposition 15.45. Soit a P R, b Psa, `8s et f une fonction continue par morceaux sur
şb
ra, br. Alors l’intégrale généralisée a f ptq dt est absolument convergente (au sens de Riemann)
si et seulement si f est intégrable sur ra, br (au sens de Lebesgue), et dans ce cas la valeur
şb
de l’intégrale généralisée a f ptq dt est l’intégrale (au sens de Lebesgue) de f sur ra, br.
Démonstration. Pout tout x P ra, br la fonction t ÞÑ 1ra,xs ptq |f ptq| est mesurable sur ra, br et
pour tout t P ra, br la fonction x ÞÑ 1ra,xs ptq |f ptq| est positive et croît vers |f ptq|, donc par le
théorème de convergence monotone on a
żx ż ż
|f ptq| dt “ 1ra,xs |f | dλ ÝÝÝÑ |f | dλ.
a ra,br xÑb ra,br
et |f | est intégrable sur ra, br. D’après le théorème de convergence dominée on a alors
żx ż ż
f ptq dt “ 1ra,xs f dλ ÝÝÝÑ f dλ.
a ra,br xÑb ra,br
Comme pour l’intégrale sur un segment, comme les deux valeurs coïncident on pourra
şb
noter a f ptq dt l’intégrale de f sur ra, br.
Ce résultat ne prend pas en compte les intégrales dites semi-convergente dans le cadre de
şb
l’intégration de Riemann. On rappelle que l’intégrale a f ptq dt est dite semi-convergente si elle
est convergente mais pas absolument convergente. C’est par exemple le cas pour l’intégrale
ż `8
cosptq
dt.
1 t
J. Royer 23
Démonstration. Soit y0 P I. Soit pyn qnPN˚ une suite d’éléments de I qui tend vers y0 et telle
que yn ‰ y0 pour tout n P N˚ . Pour n P N˚ et x P X on note
f px, yn q ´ f px, y0 q
hn pxq “ .
yn ´ y0
Soit A P M tel que µpXzAq “ 0 et y ÞÑ f px, yq est dérivable pour tout x P A. Ainsi pour
x P A on a
Bf
hn pxq ÝÝÝÑ px, y0 q.
nÑ8 By
On note #
Bf
px, y0 q si x P A,
hpxq “ By
0 si x P XzA,
de sorte que hn pxq Ñ hpxq pour presque tout x. Il existe B Ă A tel que µpXzBq “ 0 et (iii)
est vérifiée pour x P B. Par le théorème des accroissements finis on a pour x P B et n P N
ˇ ˇ
ˇ Bf ˇ
|hn pxq| ď sup ˇ px, yqˇˇ ď gpxq.
ˇ
yPI By
24 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
Lemme 15.49. Soit I un intervalle de R et f une fonction de I dans R. Alors f est continue
(respectivement dérivable) sur I si et seulement si elle est continue (respectivement dérivable)
sur tout segment de I.
Avant d’énoncer des théorèmes généraux, il faut introduire les structures adéquates. Si
on veut ramener une intégrale sur X ˆ Y à des intégrales simples sur X et Y , il faut que la
structure d’espace mesuré sur X ˆ Y soit compatible avec celles sur X et Y . Par exemple,
la mesure de Lebesgue sur R2 est construite à partir des mesures des rectangles, celle sur R
à partir des mesures des intervalles, et la mesure d’un rectangle est exactement le produit
des mesures de ses deux côtés (qui sont des intervalles de R). C’est ce schéma que l’on va
reproduire dans le cas général.
J. Royer 25
Étant donnée une fonction f de X dans un ensemble Y quelconque, on note pour x1 P X1
(et c’est une notation plus standard)
"
X2 Ñ Y
f px1 , ¨q :
x2 ÞÑ f px1 , x2 q.
Apx1 , ¨q P M2 et Ap¨, x2 q P M1 .
(ii) Soit f une fonction mesurable de X dans un ensemble mesurable Y . Alors pour x1 P X1
et x2 P X2 les fonctions f px1 , ¨q : X2 Ñ Y et f p¨, x2 q : X1 Ñ Y sont mesurables.
M2 px1 q “ tA P M | Apx1 , ¨q P M2 u .
Pour A1 P M1 et A2 P M2 on a
#
A2 si x1 P A1 ,
pA1 ˆ A2 qpx1 , ¨q “
H si x1 R A1 .
Dans tous les cas on a pA1 ˆA2 qpx1 , ¨q P M2 , donc M2 px1 q contient les rectangles mesurables
de X. On vérifie par ailleurs que M2 px1 q est une tribu de X, et on obtient bien que M2 px1 q “
M. De même Ap¨, x2 q P M1 pour tous x2 P X2 et A P M.
‚ Soient x1 P X1 et B une partie mesurable de Y . On note fx1 “ f px1 , ¨q. Puisque f ´1 pAq P
M, on obtient que
(
fx´1
1
pAq “ x2 P X2 | px1 , x2 q P f ´1 pAq “ pf ´1 pAqqpx1 , ¨q P M2 .
Cela prouve que fx1 est mesurable. On montre de même que f p¨, x2 q est mesurable de X1
dans Y pour tout x2 P X2 .
Théorème 15.54. On suppose que pX1 , M1 , µ1 q et pX2 , M2 , µ2 q sont σ-finis. Alors il existe
une unique mesure µ1 b µ2 sur pX, Mq telle que
mn1 pF q “ m1 pF X En q et mn2 pF q “ m2 pF X En q,
26 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
puis
Cn “ tF P M b N | mn1 pF q “ mn2 pF qu .
On note R la famille des rectangles mesurables de X ˆ Y . R est une famille stable par
intersection finie. Soit n P N. Par hypothèse, Cn contient R. Montrons que C est une classe
monotone. Comme m1 pEn q “ m2 pEn q on a X ˆ Y P Cn . Soient F1 , F2 P Cn avec F1 Ă F2 .
Alors on a
mn1 pF2 zF1 q “ m1 pEn X F2 q ´ m1 pEn X F1 q “ m2 pEn X F2 q ´ m2 pEn X F1 q “ mn2 pF2 zF1 q,
donc F2 zF1 P Cn . Enfin si pFm qmPN est une suite croissante d’élements de Cn on a
˜ ¸ ˜ ¸
ď ď
n n
m1 Fm “ lim µ1 pEn X Fm q “ lim µ2 pEn X Fm q “ m2 Fm .
mÑ8 mÑ8
mPN mPN
D’après le lemme des classes monotones, on obtient que Cn est la tribu engendrée par R,
c’est-à-dire M b N . Ainsi pour tout F P M b N et tout n P N on a
m1 pEn X F q “ m2 pEn X F q.
A la limite n Ñ 8 on obtient
m1 pF q “ m2 pF q.
D’où l’unicité.
‚ Soit A P M. D’après la proposition 15.53 la fonction x1 ÞÑ µ2 pEpx1 , ¨qq est bien définie
sur X1 . Montrons qu’elle est mesurable. Supposons dans un premier temps que µ2 est une
mesure finie. On note
C “ tA P M | x1 ÞÑ µ2 pEpx1 , ¨qq est mesurableu .
La famille C contient les rectangles mesurables de X, qui forment une famille stable par
intersection finie. En outre on peut vérifier que C est une classe monotone. D’après le lemme
des classes monotones, on obtient que C “ M.
Si µ2 n’estŤpas finie, on considère une suite croissante pBn qnPN de parties mesurables de
X2 telles que Bn “ X2 , et pour tous n P N et A2 P M2 on note µ2,n pBq “ νpBn X A2 q.
Par le raisonnement précédent on obtient que la fonction x1 ÞÑ µ2,n pApx1 , ¨qq est mesurable
pour tout A P M. Par passage à la limite on obtient que
x1 ÞÑ µ2 pApx1 , ¨qq “ lim µ2,n pApx1 , ¨qq
nÑ`8
Pour A1 P M1 et A2 P M2 on a bien
ż
µpA1 ˆ A2 q “ 1A1 px1 qµ2 pA2 q dµ1 px1 q “ µ1 pA1 qµ2 pA2 q.
x1 PX1
Reste à vérifier que µ est bien une mesure. On a bien µpHq “ 0. Si pAn qnPN est une famille
d’éléments de M deux à deux disjoints, alors pour tout x1 P X1 les An px1 , ¨q sont également
deux à deux disjoints et on a par le théorème de convergence monotone
˜ ¸ ż ˜˜ ¸ ¸
ď ď
µ An “ µ2 An px1 , ¨q dµ1 px1 q
nPN x1 PX1 nPN
ż ˜ ¸
ď
“ µ2 An px1 , ¨q dµ1 px1 q
x1 PX1 nPN
ż ÿ
“ µ2 pAn px1 , ¨qq dµ1 px1 q
x1 PX1 nPN
ÿż
“ µ2 pAn px1 , ¨qq dµ1 px1 q
nPN x1 PX1
ÿ
“ µpEn q.
nPN
J. Royer 27
Cela prouve l’existence.
‚ On montre de la même façon que l’on peut poser, pour tout A P M,
ż
µ̃pAq “ µ1 pAp¨, x2 qq dµ2 px2 q,
x2 PX2
et que cela définit une mesure sur pX, Mq vérifiant (15.9). Par unicité on obtient que µ et µ̃
sont égales, ce qui conclut la démonstration.
Exemple 15.55. On note λ la mesure de Lebesgue sur pR, BpRqq. Alors λ b λ est la mesure de
Lebesgue sur pR2 , BpR2 qq.
Remarque 15.56. Le résultat n’est plus vrai si on ne suppose pas que les espaces mesurés
sont σ-finis. Considérons par exemple X1 “ R muni de la mesure de comptage µ1 , X2 “ R
muni de la mesure de Lebesgue λ, et A “ tpx, xq, x P Ru. Alors on a
ż ż ż
λpApx1 , ¨qq dµ1 px1 q “ λptx1 uq dµ1 px1 q “ 0 dµ1 px1 q “ 0,
R R R
tandis que
ż ż ż
µ1 pAp¨, x2 qq dλpx2 q “ µptx2 uq dλpx2 q “ 1 dλpx2 q “ `8.
R R R
Remarque 15.57. De la même façon on peut définir le produit d’un nombre fini quelconque
de mesures. Par exemple, λ b pλ b λq “ pλ b λq b λ est la mesure de Lebesgue sur R3 .
(
Exemples. ‚ On considère le triangle T “ px, yq P r0, 1s2 | x ` y ď 1 . Pour x P R on a
#
H si x R r0, 1s,
λ1 pT px, ¨qq “
r0, 1 ´ xs si x P r0, 1s,
d’où
ż1
1
λ2 pT q “ p1 ´ xq dx “ .
0 2
‚ On considère le disque D ouvert de centre 0 et de rayon 1. Pour y P R on a
#
H si y Rs ´ 1, 1r,
λ1 pDp¨, yqq “ ‰ a 2
a
2
“
´ 1´y , 1´y si y Ps ´ 1, 1r,
d’où
ż1 a
λ2 pDq “ 2 1 ´ y 2 dy
y“´1
ż π b
2
“2 1 ´ sin2 pθq cospθq dθ
´π
2
ż π
2
“2 cos2 pθq dθ
´π
2
ż π
2 ` ˘
“ 1 ` cosp2θq dθ
´π
2
“ π.
Exemple 15.58. Soit f une fonction mesurable de R dans r0, `8s. On note
(
Epf q “ px, yq P R2 | 0 ď y ď f pxq .
Alors Epf q est un borélien de R2 comme image réciproque de r´8, 0s par la fonction mesu-
rable F : px, yq ÞÑ y ´ f pxq. En outre pour x P R on a
pEpf qqpx, ¨q “ r0, f pxqs.
On a donc ż ż
λ2 pEpf qq “ λ1 pr0, f pxqsq dλ1 pxq “ f pxq dλ1 pxq.
R R
28 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
sont bien définies et mesurables sur X1 et X2 , respectivement, à valeurs dans r0, `8s.
(ii) On a
ż ż ˆż ˙ ż ˆż ˙
f dµ “ f px1 , x2 q dµ2 px2 q dµ1 px1 q “ f px1 , x2 q dµ1 px1 q dµ2 px2 q.
X X1 X2 X2 X1
(15.11)
Démonstration. ‚ Pour x1 P X la fonction f px1 , ¨q est mesurable de X2 dans r0, `8s d’après
la Proposition 15.53. On note alors
ż
F1 px1 q “ f px1 , ¨q dµ2 .
X2
‚ Soit maintenant f une fonction étagée sur X à valeurs positives. Par linéarité de l’intégrale
on obtient que F1 est mesurable et (15.12) est encore vérifiée.
‚ Dans le cas général, on considère une suite croissante pfn qnPN de fonctions étagées qui
converge simplement vers f . Par le théorème de convergence monotone on a pour tout x1 P X
ż ż
F1 px1 q “ lim fn px1 , x2 q dµ2 px2 q “ lim fn px1 , x2 q dµ2 px2 q.
X2 nÑ`8 nÑ`8 X
2
F1 est donc mesurable comme limite simple d’une suite de fonctions mesurables. Pour tout
n P N on a ż ż ˆż ˙
fn dµ “ fn px1 , x2 q dµ2 px2 q dµ1 px1 q.
X X1 X2
Corollaire 15.60. Soit f une fonction mesurable de pX,şMq dans R. Pour tout x1 P X1 la
fonction |f px1 , ¨q| est mesurable sur X2 , la fonction x1 ÞÑ X2 |f px1 , ¨q| dµ2 est mesurable sur
X1 , et on a
ż ˆż ˙
1
f P L pX, M, µq ðñ |f px1 , x2 q| dµ2 px2 q dµ1 px1 q ă `8.
X1 X2
J. Royer 29
Théorème 15.61 (Théorème de Fubini-Lebesgue). On suppose que pX1 , M1 , µ1 q et pX2 , M2 , µ2 q
sont σ-finis. Soit f une fonction intégrable de pX, Mq dans R.
(i) La fonction şf px1 , ¨q est intégrable sur X2 pour presque tout x1 P X1 , et la fonc-
tion x1 ÞÑ X2 f px1 , x2 q dµ2 px2 q (définie µ1 -presque partout) est intégrable sur X1 .
De même,
ş f p¨, x2 q est intégrable sur X1 pour presque tout x2 P X2 , et la fonction
x2 ÞÑ X1 f px1 , x2 q dµ1 px1 q (définie µ2 -presque partout) est intégrable sur X2 .
(ii) On a
ż ż ˆż ˙ ż ˆż ˙
f dµ “ f px1 , x2 q dµ2 px2 q dµ1 px1 q “ f px1 , x2 q dµ1 px1 q dµ2 px2 q.
X X1 X2 X1 X2
30 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
et d’autre part
ż b ˜ż b ¸ żb
hpx, yq dx dy “ pF pbq ´ F pyqqgpyq dy
a a a
żb
“´ F pyqgpyq dy ` F pbqpGpbq ´ Gpaqq.
a
C’est la formule d’intégration par parties bien connue lorsque f et g sont continues.
La formule abstraite est relativement facile à obtenir. La part essentielle du travail qu’il
reste à effectuer ici est de voir ce qu’elle donne concrètement dans le cas d’un changement de
variable donné par un C 1 -difféomorphisme entre ouverts de Rd .
On note que, pour ces définitions, la fonction ϕ n’est pas nécessairement bijective (elle
peut être ni injective, ni surjective).
J. Royer 31
Exemple 15.64. On revient sur l’exemple de l’Exercice ??. On observe que la mesure ν sur
J2, 12K a précisément été définie comme étant la mesure image de la mesure uniforme sur
J1, 6K2 .
(ii) Soit f : Y Ñ R une fonction mesurable. Alors f est intégrable sur Y si et seulement si
pf ˝ ϕq est intégrable sur X, et dans ce cas on a
ż ż
f dν “ pf ˝ ϕq dµ.
Y X
Remarque 15.67. Si Ũ est un ouvert inclus dans U et Ṽ est l’image de Ũ par ϕ, alors ϕ réalise
un C 1 -difféomorphisme de Ũ dans Ṽ .
On considère un C 1 -difféomorphisme ϕ de U dans V . On note ψ : V Ñ U sa bijection
réciproque. On munit V de sa tribu borélienne BpV q et de la mesure de Lebesgue λ. On note
M la tribu image de BpV q et λϕ la mesure image de λ par ψ “ ϕ´1 . Autrement dit, BpV q
est la tribu image de M par ϕ et λ est la tribu image de λϕ par ϕ.
On cherche maintenant à identifier la mesure λϕ sur pU, BpU qq. On rappelle que λϕ est
définie par
@A P BpU q, λϕ pAq “ λpψ ´1 pAqq “ λpϕpAqq.
Autrement dit, on cherche à comprendre comment l’application ϕ dilate ou contracte les
ensembles. Commençons par considérer quelques exemples simples.
Exemples 15.69. On considère le cas U “ V “ R2 et A “ ra, bs ˆ rc, ds, pour différentes
applications ϕ. [Faire des dessins]
— Pour α ą 0 et ϕ : x ÞÑ αx, on a ϕpAq “ rαa, αbs ˆ rαc, αds et donc λpϕpAqq “
α2 λpAq. En dimension d, on aurait un facteur multiplicatif égal à αd . De même, pour
ϕ : px1 , x2 q ÞÑ pα1 x1 , α2 x2 q on a λpϕpAqq “ α1 α2 λpAq.
32 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
On a alors
żb żb
` ˘
λpϕpAqq “ pd ` βx1 q ´ pc ` βx1 q dx1 “ pd ´ cq dx1 “ λpAq.
a a
On observe que le coefficient β ne joue aucun rôle. En fait, ϕ ne fait que déplacer les
« tranches verticales » de A, ce qui ne change pas son aire.
En fait, comparer le volume de ϕpAq à celui de A est relativement simple dans le cas où ϕ
est une application linéaire. On a un outil qui fait précisément cela, il s’appelle déterminant de
ϕ. C’est l’occasion de faire un détour par l’algèbre linéaire, le temps de montrer la proposition
suivante.
Proposition 15.70. On suppose que ϕ est un isomorphisme linéaire sur Rd . Alors pour tout
A P BpRd q on a
λpϕpAqq “ |detpϕq| λpAq. (15.14)
Démonstration. ‚ Comme ϕ est linéaire, la mesure λϕ est, comme λ, une mesure inva-
riante par translation et finie sur les bornés. D’après le théorème d’unicité pour la mesure
de Lebesgue, cela implique qu’il existe une constante Cϕ telle que λϕ “ Cϕ λ. Montrons que
Cϕ “ |detpϕq|. Pour cela, il suffit de montrer qu’il existe un borélien A de Rd de mesure non
nulle et vérifiant (15.14). On note M P GLn pRq la matrice de ϕ dans la base canonique de Rd .
‚ On suppose que M est orthogonale pM M T “ In ). Alors ϕ laisse invariantes les boules
euclidiennes, et donc Cϕ “ 1 “ detpM q.
‚ On suppose maintenant que M est symétrique définie positive. Alors il existe P orthogo-
nale et D diagonale à coefficients α1 , . . . , αd strictement positifs telles que M “ P DP ´1 . On
note K “ r0, 1sd et A “ P K. Alors on a
et
` ˘
λpϕpAqq “ λpM P Kq “ λpP DKq “ λpDKq “ λ r0, α1 s ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ r0, αd s “ α1 . . . αd “ detpDq
“ detpM q “ |detpM q| .
?
‚ Dans le cas général, on écrit M “ RS avec S “ M T M symétrique définie positive et
R “ M S ´1 orthogonale (c’est la décomposition polaire de M ). Alors pour tout A P BpRd q
on a
λpϕpAqq “ λpRSAq “ λpSAq “ detpSqλpAq “ |detpM q| λpAq,
ce qui conclut la démonstration.
Après l’algèbre linéaire, on utilise maintenant un argument de calcul différentiel. En gé-
néral, une fonction quelconque n’est évidemment pas un isomophisme linéaire. Mais, une
application de classe C 1 sur U est par définition proche, au voisinage de chacun des points
de U , d’une application affine, c’est-à-dire la composée d’une application linéaire (dont on
vient d’expliciter l’action sur les volumes) et d’une translation (qui préserve les volumes) :
Soit }¨} une norme sur Rd . Pour x P Rd et r ą 0 on note Bpx, rq la boule (ouverte) de
centre x et de rayon r. Pour x P U on note |Jϕpxq| la valeur absolue du déterminant Jacobien
de ϕ en x.
J. Royer 33
Lemme 15.71. Soit K Ă U un compact. Soit ε ą 0. Alors il existe r0 ą 0 tel que pour
x P K et r Ps0, r0 s on a
p1 ` εq´d |Jϕpxq| λpBpx, rqq ď λpϕpBpx, rqqq ď p1 ` εqd |Jϕpxq| λpBpx, rqq.
Ce lemme dit que si on ne regarde que ce qui se passe dans un petit voisinage du point
x, alors ϕ dilate les volumes quasiment comme le ferait l’application différentielle dx ϕpxq, de
sorte que λpϕpBpx, rqqq est très proche de |Jϕpxq| λpBpx, rqq.
Démonstration. ‚ Pour x0 , x P U on note 1
où on a noté
x̃ “ x ` pdx0 ϕq´1 ζx0 pxq.
‚ Comme ϕ est de classe C 1 , la formule de Taylor avec reste intégral donne
ż1
` ˘ ` ˘
ζx0 pxq “ ϕpxq ´ ϕpx0 q ´ dx0 ϕpx ´ x0 q “ dx0 `tpx´x0 q ϕ ´ dx0 ϕ px ´ x0 q dt.
0
Comme
› l’application
› x0 ÞÑ pdx0 ϕq´1 est continue sur le compact K1 , il existe M ě 1 tel que
´1
›pdx ϕq › ď M pour tout x P K1 . D’autre part l’application x ÞÑ dx ϕ est uniformément
continue sur K1 , donc quitte à prendre r0 ą 0 plus petit on peut de plus supposer que pour
tous x0 P K et x P Bpx0 , r0 q on a
ε
}dx ϕ ´ dx0 ϕ} ď .
M
r0 ą 0 étant ainsi fixé, pour x0 P K et x P Bpx0 , r0 q on a
ε
}ζx0 pxq} ď }x ´ x0 } .
M
D’où › ›
}x̃ ´ x0 } ď }x ´ x0 } ` ›pdx0 ϕq´1 › }ζx0 pxq} ď p1 ` εq }x ´ x0 } ,
1. Il s’agit de l’application affine par laquelle on approche ϕ au voisinage de x0
34 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
Quitte à choisir M plus grand, on peut alors supposer que pour tout y P K2 on a
› ›
›dy ϕ´1 › ď M.
Pour x P Bpx0 , r0 q on a
ż1
´1 ´1 ´1
ϕ pϕx0 pxqq ´ x “ ϕ pϕx0 pxqq ´ ϕ pϕpxqq “ ´ dϕpxq´sζx0 pxq ϕ´1 pζx0 pxqq ds,
0
et donc › ´1 ›
›ϕ pϕx pxqq ´ x› ď ε }x ´ x0 } .
0
Ainsi › ´1 ›
›ϕ pϕx0 pxqq ´ x0 › ď p1 ` εq }x ´ x0 } ,
ce qui prouve (15.15) et donc la proposition.
Proposition 15.72. Pour tout A P BpU q on a
ż ż
λpϕpAqq “ |Jϕ| dλ “ |Jϕpxq| dx.
A A
Soient n0 P N et P0 P Qn0 tels que P0 Ă U . Soit ε Ps0, 1s. On considère n ě n0 tel que d’une
part le lemme précédent (appliqué avec la norme infinie) est vrai pour K “ P0 et r0 “ 2´n ,
et d’autre part
p1 ´ εq |Jϕpuq| ď |Jϕpvq| ď p1 ` εq |Jϕpuq|
pour tous u, v P P0 tels que }u ´ v} ď 2´n . On a alors
ÿ
λpϕpP0 qq “ λpϕpP qq
P PQn
P ĂP0
ÿ
ď p1 ` εqd |JϕpxP q| λpP q
P PQn
P ĂP0
ÿ ż
ď p1 ` εqd`1 |Jϕpxq| dx
P PQn P
P ĂP0
ż
ď p1 ` εqd`1 |Jϕpxq| dx.
P0
J. Royer 35
De même on a ż
λpϕpP0 qq ě p1 ´ εqd`1 |Jϕpxq| dx.
P0
Ces deux inégalités étant valables pour tout ε ą 0, cela prouve que
ż
λpϕpP0 qq “ |Jϕpxq| dx.
P0
Cela définit bien une mesure sur pU, BpU qq, à densité par rapport à la mesure de Lebesgue.
Les mesures λϕ et µ coïncident alors sur les pavés dans Qn (n P N) dont l’adhérence est
contenue dans U . Ces pavés sont stables par intersection finies et ils engendrent les boréliens
de U (comme dans Rd , on peut vérifier que tout ouvert de U est union dénombrable de tels
pavés). En outre si on note En l’union de ces pavés contenus dans U X tx | }x} ď nu, alors
µpEn q ă 8 et νpEn q ă 8. D’après le résultat d’unicité des mesures, on obtient que λϕ “ µ,
ce qui conclut la démonstration.
(ii) Soit f : V Ñ R une fonction mesurable. Alors pf ˝ ϕq |Jϕ| est une fonction mesurable
sur U . En outre f est intégrable sur V si et seulement si pf ˝ ϕq |Jϕ| est intégrable sur
U et dans ce cas on a
ż ż
f pyq dλpyq “ f pϕpxqq |Jϕpxq| dλpxq.
V U
Les deux différences sont les suivantes. Pour le Théorème 15.65, le changement de coordonnées
ϕ doit être une bijection, ce qui n’est pas nécessairement le cas pour (15.16). D’autre part, le
déterminant jacobien de ϕ (qui n’est autre que la dérivée de ϕ en dimension 1) vient avec une
valeur absolue au Théorème 15.65, alors que ce n’était pas le cas pour (15.16). Ces différences
sont toutes deux dues à la même cause : l’intégrale de Lebesgue est basée sur une mesure
qui donne aux ensembles une taille mais pas d’orientation, alors qu’en dimension 1 on fait
la différence entre l’intégrale de a à b et l’intégrale de b à a. Il est possible de tenir compte
de l’orientation en dimension supérieure en intégrant non plus des fonctions sur des espaces
mesurables, mais des formes différentielles (mais ce n’est pas l’objet de ce chapitre).
À ce stade, il n’est pas dramatique de ne pas saisir en profondeur les subtilités liées à ces
questions d’orientation, mais il est crucial d’avoir bien en tête les différences entre (15.16) et
le théorème 15.65 afin de ne pas tout mélanger au moment de les appliquer.
36 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
On commence par les coordonnées polaires. Il faut vérifier que la fonction ϕ correspon-
dante est bien un C 1 -difféomorphisme. Pour cela on note
JΦpr, θq “ r.
Démonstration. On commence par observer que Φ est une fonction de classe C 1 , car chaque
coordonnée est le produit de deux fonctions usuelles régulières. Vérifions que Φ est bien une
bijection. Pour pr, θq P R˚` ˆs ´ π, πr on a
}Φpr, θq} “ r,
où }¨} désigne la norme euclidienne sur R2 . Ainsi, si pr1 , θ1 q, pr2 , θ2 q P R˚` ˆs ´ π, πr sont
tels que Φpr1 , θ1 q “ Φpr2 , θ2 q on a nécessairement r1 “ r2 . On a alors cospθ1 q “ cospθ2 q
et sinpθ1 q “ sinpθ2 q, ce qui implique 2 que
a θ1 “ θ2 . Cela prouve l’injectivité de Φ. Soit
maintenant px, yq P R2 zD´ . On note r “ x2 ` y 2 . Si y “ 0 on note θ “ 0. Si y ą 0 on note
´x¯
θ “ arccos ,
r
` ˘
et si y ă 0 on note θ “ ´ arccos xr . Dans tous les cas on a bien pr, θq P R˚` ˆs ´ π, πr et
Φpr, θq “ px, yq. Cela assure que Φ est surjective.
Pour pr, θq P R˚` ˆs ´ π, πr on calcule
cospθq ´r sinpθq
JΦpr, θq “ “ r ‰ 0.
sinpθq r cospθq
2. Notez qu’une seule de ces deux égalités n’aurait pas suffit pour conclure
J. Royer 37
Si l’expression de la fonction Φ définissant les coordonnées polaires ne surprendra per-
sonne, les ensembles de départ et d’arrivée peuvent interpeler. Pourquoi ne pas considérer un
changement de variable tel que l’ouvert d’arrivée V soit R2 tout entier ? Premier point, si on
inclus r “ 0 dans l’ensemble de départ, alors pour tout θ on aura Φp0, θq “ 0, de sorte que
Φ n’est plus injective. Il n’est pas non plus possible d’avoir Φ d’image R2 z t0u. Si Φ est par
exemple définie sur s0, `8rˆs ´ π, πs (qui, soit dit en passant, n’est pas un ouvert), alors sa
réciproque ne sera pas continue. En effet, les points
` ˘ ` ˘
cospπ ´ εq, sinpπ ´ εq et cospπ ` εq, sinpπ ` εq
sont très proches pour ε ą 0 petit, tandis que leurs antécédents par Φ,
ne le sont pas. En utilisant cette observation, il est facile de montrer rigoureusement qu’on
ne peut pas avoir un C 1 -difféomorphisme Φ dont l’image serait R2 ou R2 z t0u. C’est pour-
quoi on se contente d’une définition de Φ dont l’image est tronquée d’une demi-droite. On
verra qu’en pratique ce n’est pas un véritable problème, du fait qu’une telle demi-droite est
de mesure de Lebesgue nulle dans R2 . On note toutefois que le choix de retrancher la demi-
droite D´ est arbitraire, et on aurait pu enlever n’importe quelle autre demi-droite issue de 0.
Le passage aux coordonnées polaires est agréable quand la frontière du domaine d’inté-
gration s’exprime plus facilement comme courbe paramétrée en polaire et/ou que la fonction
à intégrer présente une symétrie radiale. On commence par un exemple simple.
Exemple 15.75. Soit R ą 0. On veut calculer λpDR q, où DR est le disque centré en 0 et
de rayon R. On note D̃R “ DR zD´ . Puisque D´ est de mesure de Lebesgue nulle, on a
λpDr q “ λpD̃R q. L’application pr, θq ÞÑ pr cospθq, r sinpθqq réalise un C 1 -difféomorphisme de
s0, Rrˆs ´ π, πr dans D̃, donc par le théorème de changement de variable on a
ż ż
λpDq “ λpD̃q “ 1 dλ “ r dλpr, θq.
D̃ r0,Rsˆs´π,πr
L’application pr, θq ÞÑ r est intégrable (car continue et bornée) sur r0, Rsˆs ´ π, πr, donc
par le théorème de Fubini (l’une ou l’autre des deux versions, puisque par ailleurs on a une
fonction à valeurs positives) on obtient
żπ żR żπ
R2
λpDq “ r dr dθ “ dθ “ πR2 .
θ“´π r“0 ´π 2
38 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
D’où ?
I“ π.
On termine avec un exemple où le changement de variable à effectuer n’est pas évident.
Vu le domaine d’intégration, on est tenté de choisir les coordonnées polaires centrée au point
(1,0). Mais la fonction à intégrer suggère plutôt les coordonnées polaires usuelles.
Exemple 15.78. On calcule
ij a
(
x2 ` y 2 dx dy, D “ px, yq P R2 | x2 ` y 2 ´ 2x ă 0 .
D
On note que D est ouvert et donc borélien comme image réciproque de s ´ 8, 0r par la
fonction continue px, yq ÞÑ x2 ` y 2 ´ 2x. On observe que pour px, yq P R2 on a
px, yq P D ðñ px ´ 1q2 ` y 2 ă 1.
Ainsi D est le disque ouvert de centre (1,0) et de rayon 1. Pour pr, θq Ps0, `8rˆs ´ π, πr on
note φpr, θq “ pr cospθq, r sinpθqq. On cherche φ´1 pDq. On a
Ainsi on a D “ φpD̃q où
! ı π π” ˇ )
D̃ “ pr, θq Ps0, 2rˆ ´ , ˇ r ă 2 cospθq .
ˇ
2 2
Par le théorème de changement de variables et le théorème de Fubini on obtient
ż π2 ˜ż 2 cospθq ¸ ż π2
8 cospθq3
ż a ż
2 2 2 2
x ` y dλpx, yq “ r dλpr, θq “ r dr dθ “ dθ
D D̃ ´π 2 0 ´π 2
3
32
“ ¨¨¨ “ .
9
Le principe des coordonnées cylindriques est assez simple. On découpe le domaine d’inté-
gration (en dimension 3) en « tranches » selon l’une des variables. Chaque tranche est alors
une partie de R2 , sur laquelle on utilise les coordonnées polaires.
Proposition 15.79 (Coordonnées cylindriques). L’application
" ˚
R` ˆs ´ π, πrˆR Ñ R3 zpR´ ˆ t0u ˆ Rq
Φ:
pr, θ, zq ÞÑ pr cospθq, r sinpθq, zq
JΦpr, θ, zq “ r.
J. Royer 39
La preuve et la discussion sur les ensembles de départ et d’arrivée sont les mêmes que
pour les coordonnées polaires, on n’y revient pas en détail.
Exemple 15.80. On note
! )
A “ px, y, zq P R3 | y 2 ` z 2 ă e´|x| .
Enfin on termine avec les coordonnées sphériques, adaptées aux problèmes ayant des
symétries radiales en dimension 3.
Proposition 15.81 (Coordonnées sphériques). L’application
$ ˚ ‰ “
’
’ R` ˆs ´ π, πrˆ ´ π2 , π2 Ñ R¨3 zpR´ ˆ t0u ˆ Rq ˛
r cospθq cospϕq
&
Φ:
’
’ pr, θ, ϕq ÞÑ ˝ r sinpθq cospϕq ‚
r sinpϕq
%
‰ “
est un C 1 -difféomorphisme. En outre pour tout pr, θ, ϕq P R˚` ˆs ´ π, πrˆ ´ π2 , π2 on a
JΦpr, θ, ϕq “ r2 cospϕq.
‰ “
Démonstration. On vérifie le calcul du jacobien. Pour pr, θ, ϕq P R˚` ˆs ´ π, πrˆ ´ π2 , π2 on a
En guise d’exercice, on peut retrouver ce résultat en utilisant les coordonnées cylindriques (on
pourra vérifier au passage qu’elles sont évidemment moins bien adapté à ce contexte). Soit
z P R. Si |z| ě R alors on n’a px, y, zq P BR pour aucun px, yq P R2 (la tranche correspondante
est vide). On suppose maintenant que |z| ă R. Alors pour px, yq P R2 on a
px, y, zq P BR ðñ x2 ` y 2 ă R 2 ´ z 2 .
?
La tranche correspondante est le disque de R2 de centre 0 et de rayon R2 ´ z 2 . En utilisant
les coordonnées polaires, on obtient que l’air de cette tranche est égale à πpR2 ´ z 2 q. Ainsi
le volume de BR est donné par
żR
2R3 4πR3
ˆ ˙
VolpBR q “ πpR2 ´ z 2 q dz “ π 2R3 ´ “ .
´R 3 3
40 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
15.7 Exercices
15.7.1 Définition de l’intégrale
Exercice 46. Soient µ1 et µ2 deux mesures sur l’espace mesurable pX, Mq. Pour A P Mq
on pose µpAq “ µ1 pAq ` µ2 pAq.
1. Montrer que cela définit une mesure µ sur pX, Mq.
2. Soit f une fonction mesurable de X dans R. Montrer que f est intégrable pour la mesure
µ si et seulement si elle l’est pour les mesures µ1 et µ2 , et que dans ce cas on a
ż ż ż
f dµ “ f dµ1 ` f dµ2 .
X X X
Exercice 51. Soient pX, M, µq un espace mesuré et f une fonction intégrable de X dans R.
Montrer que pour tout ε ą 0 il existe δ ą 0 tel que pour tout A P M on a
ż
µpAq ď δ ùñ |f | dµ ď ε.
A
Exercice 52. Soit f P L1 pr0, 1sq. On suppose que pour tout x P r0, 1s on a
żx
f ptq dt “ 0.
0
Exercice 56. Étudier la limite éventuelle de la suite pIn qnPN définie par
ż `8
xn
@n P N, In “ dx.
0 1 ` xn`2
J. Royer 41
Exercice 57. Étudier la limite éventuelle de la suite pIn qnPN définie par
` ˘
n sin nx
ż `8
@n P N, In “ dx.
1 x3
Exercice 58. 1. Montrer que
ÿ ż1 ż1
1
2n
x p1 ´ xq dx “ dx.
nPN 0 0 1`x
2. En déduire que
ÿ p´1qn
“ lnp2q.
nPN
1`n
Exercice 60. Soit paj,k qj,kPN une famille de réels positifs. En utilisant le vocabulaire de la
théorie de l’intégration, redémontrer le fait que
8 ÿ
ÿ 8 8 ÿ
ÿ 8
aj,k “ aj,k .
j“0 k“0 k“0 j“0
Exercice 61. Soit pX, M, µq un espace mesuré et pfn qnPN une suite décroissante de fonctions
mesurables de X dans R` .
1. Montrer que la suite pfn qnPN admet une limite simple, qu’on notera f .
2. On suppose que f0 est intégrable. Montrer que
ż ż
fn dµ ÝÝÝÝÝÑ f dµ.
X nÑ`8 X
3. Montrer que la conclusion n’est plus valable si on retire l’hypothèse que f0 est intégrable.
Exercice 62. Étudier la limite
żn´
x ¯n
lim 1´ dx.
nÑ`8 0 n
Exercice 63. Soient pan qnPN et pbn qnPN . On suppose qu’il existe a, b P R avec a ă b tels que
la série trigonométrique
`8
a0 ÿ` ˘
` an cospnxq ` bn sinpnxq
2 n“1
converge simplement vers 0 pour tout x P ra, bs. On veut montrer que an et bn tendent vers
0 quand n tend vers `8.
1. Montrer que pour tout n P N˚ il existe ϕn P R tel que
@x P R, an cospnxq ` bn sinpnxq “ rn cospnx ` ϕn q,
a
où rn “ a2n ` b2n .
2. On suppose pour cette question que la fonction x ÞÑ rn cospnx`ϕn q converge uniformément
vers 0 sur ra, bs quand n tend vers `8. Montrer que rn Ñ 0 quand n Ñ 0.
3. On suppose que rn ne tend pas vers 0. Montrer qu’il existe une suite pnk qkPN d’entiers qui
tend vers `8 et telle que
żb
cospnk x ` ϕnk q2 dx ÝÝÝÝÑ 0.
a kÑ`8
4. Montrer que
żb
b´a
cospnx ` ϕn q2 dx ÝÝÝÝÝÑ
a nÑ`8 2
et conclure.
42 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
1. Montrer que les deux membres şde l’égalité sont bien définis.
1
2. Pour p, q P N on note Ipp, qq “ 0 xp lnpxqq dx.
a. Montrer que l’intégrale Ipp, qq est bien définie pour tous p, q P N.
b. Calculer Ipp, 0q pour tout p P N.
c. En déduire la valeur de Ipp, qq pour tous p, q P N.
3. En développant x1x en série, montrer que
ż1 ÿ p´1qn
1
x
dx “ Ipn, nq.
0 x nPN
n!
4. Conclure.
J. Royer 43
1. Montrer que pour tout t P R la fonction f pt, ¨q est intégrable sur R` . On note alors
ż ż `8
F ptq “ f pt, ¨q dλ “ f pt, xq dx.
R` 0
1. Montrer que cela définit une fonction borélienne de r0, 1s2 dans R.
2. Calculer (en justifiant)
ż 1 ˆż 1 ˙ ż 1 ˆż 1 ˙
f px, yq dy dx et f px, yq dx dy.
x“0 y“0 y“0 x“0
44 Université Toulouse 3
Intégration au sens de Lebesgue
Exercice 76 (Intégrales sur des rectangles). Après en avoir justifié l’existence, calculer les
intégrales suivantes :
x2
ż ż
I1 “ dx dy, I2 “ sinpx ` yq dx dy,
r´1,1sˆr1,2s y r0, π π
2 sˆr0, 2 s
ż
x
I3 “ a dx dy.
r3,7sˆr´2,2s 1 ` xy ` x2
Exercice 77. On note D “ tpx, yq P R2 | x ě 0, y ě 0, x ` y ď 1u. Calculer
ż ż ż
2 2
I1 “ 1 dx dy, I2 “ px ` y q dx dy, I3 “ xypx ` yq dx dy.
D D D
ij
Exercice 78. Calculer f px, yq dx dy dans les cas suivants :
D
J. Royer 45
Exercice 85. Soit D “ tpx, yq P R2 | 0 ď x, 0 ď y, 0 ă x2 ` y 2 ď 1u. Calculer
ij
1
dx dy.
1 ` x2 ` y 2
D
xy
ť
Exercice 86. Calculer D x2 `y 2
dx dy, où on a noté D “ tpx, yq P R2 | x ě 0, y ě 0, 1 ď
x2 ` y 2 ď 4u.
Exercice 87. On considère le domaine D ť borné délimité par les droites d’équations x “ 0,
y “ x ` 2 et y “ ´x. Calculer l’intégrale D px ` yq dx dy
1. par calcul direct,
2. en effectuant le changement de variable pu, vq “ px ` y, x ´ yq.
ť a
Exercice 88. Calculer D x2 ` y 2 dx dy, où D “ tpx, yq P R2 | x2 ` y 2 ´ 2x ď 0u.
¡
Exercice 89. Calculer f px, y, zq dx dy dz dans les cas suivants :
D
Exercice 90. Calculer l’intégrale de la fonction f : px, yq ÞÑ( py 2 ´ x2 qxy px2 ` y 2 q sur le
domaine D “ px, yq P R2 | 0 ă x ă y, a ă xy ă b, y 2 ´ x2 ă 1 , où b ą a ą 0. On pourra
effectuer le changement de variables u “ xy, v “ y 2 ´ x2 .
Exercice 91. Soit D un domaine de R2 . On rappelle que le centre de gravité de D est le
point pxG , yG q P R2 défini par
¨ ˛
ij ij
1
pxG , yG q “ ˝ x dx dy, y dx dy ‚.
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D D
46 Université Toulouse 3