2280444
2280444
2280444
Je ne doute pas que cette diffusion s’inscrira avec force à la fois dans la
mémoire de l’Occupation et dans les annales de la télévision.
Jean-Noël Jeanneney
Il a paru très important à la chaîne de constituer
d’abord un comité éditorial composé de
personnalités de référence dans les domaines de
l’histoire et du droit, pour définir le cadre
général du programme et en suivre l’évolution.
Le comité éditorial
Ce comité, mis en place au mois d’avril, s’est depuis réunit plusieurs fois
afin de procéder au choix des 70 heures qui sont diffusées sur les
185 heures de l’enregistrement. Ce comité a par ailleurs établi les principes
généraux de la construction du programme et de la communication de la
chaîne sur cet événement de télévision.
Une équipe d’historiens a été chargée, sous la direction de Dominique
Missika, rédactrice en chef de la chaîne, du travail de préparation des
émissions et de visionnage des archives. Cette équipe comprend :
Jean-Claude Lescure, agrégé d’histoire, professeur des universités à
Grenoble et à l’Institut d’études politiques de Paris en histoire
contemporaine.
David Schreiber, ancien élève de l’Ecole normale supérieure, agrégé
d’histoire.
Sabine Jansen, agrégée d’histoire, professeur au Conservatoire national
des arts et métiers et maître de conférences à l’Institut d’études politiques.
Barbie, Klaus et les réfugiés politiques allemands installés
Il est né le 25 octobre 1913 à Bad Godesberg, aux Pays-Bas. En 1942, il se rend à Dijon,
petite ville de la vallée du Rhin, près de Bonn. puis à Lyon, où il est chargé du Sipo SD de
Son père, instituteur comme sa mère, meurt Lyon, avec vingt-cinq officiers sous ses
en 1933. En 1934, il devient chef de ordres, une région qui comprend aussi le Jura,
patrouille aux Jeunesses hitlériennes, les Hautes-Alpes et jusqu’à Grenoble. Sa
dirigeant un groupe d’environ cent vingt section est chargée de la « lutte
jeunes garçons de 15 à 18 ans. C’est en anticommuniste, antisabotage et antijuive ».
septembre 1935 qu’il est recruté par le SD, le De 1942 à 1944, Klaus Barbie s’acquittera
service de renseignements du Parti national- consciencieusement de sa tâche.
socialiste. Sa « formation » de SS Mann durera Après la guerre, Barbie va bénéficier de la
deux ans, dans une école près de Berlin. Muté protection des services secrets américains,
au SD de Düsseldorf, il y rencontre son qui l’utilisent à partir de 1947 comme agent
supérieur, Helmut Knochen, que l’on retrouve dans leur lutte contre le communisme. Ils
quelques années plus tard à Paris, sera l’objet de plusieurs demandes
responsable, avec le général SS Oberg, du SD d’extradition de la France. Il gagne ensuite la
pour la France occupée. En mai 1937, à Bolivie. Il obtient la nationalité bolivienne,
23 ans, Barbie adhère au parti nazi. Dans le sous le nom de Klaus Altmann, le 3 octobre
dossier du SD — une des pièces produites lors 1957. En 1972, Beate et Serge Klarsfeld
du procès —, il est noté par ses chefs comme retrouvent sa piste. Christian Riss, juge
l’un de leurs meilleurs éléments : « Ses d’instruction au tribunal de grande instance
performances dans le service sont de Lyon, délivre le 5 novembre 1982 un
remarquables. Son comportement en tant mandat d’arrêt contre Barbie-Altmann.
PHOTO RUE DES ARCHIVES
que SS est irréprochable tant dans le service Le 5 février 1983, il est livré à la justice
que hors du service. (...) Son opinion relative française et conduit à la prison de Montluc,
à la conception du monde nazi est considérée à Lyon, réaménagée par Robert Badinter,
comme affirmée. » En 1940, il est envoyé à La alors ministre de la Justice.
Haye, où son rôle consiste à arrêter les juifs Cette prison même où il avait sévi.
K. Barbie pendant l’occupation à Lyon : 2e plan, au centre
Le procès
En 1952 et 1954, Klaus Barbie est condamné à mort par contumace. On énumérait dans les deux
procès ses exactions : tortures, exécutions, déportations, pillages. En 1987, plus de vingt années se
sont écoulées depuis ces condamnations : ces faits ne peuvent dès lors plus lui être reprochés. Mais
l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité, intégrée à la jurisprudence française depuis
décembre 1964, rend possible une nouvelle inculpation. Une instruction judiciaire est ouverte et
menée par le juge Christian Riss. Elle donne lieu à de nombreux débats sur l’interprétation de la
notion de crime contre l’humanité et sur l’extension des charges retenues contre Klaus Barbie.
Du 11 mai au 4 juillet 1987, devant la cour d’assises du département du Rhône, au palais de justice
de Lyon, se déroule le nouveau procès engagé contre Barbie. Ce fait constitue déjà un événement,
puisque c’est la première fois qu’on juge en France un homme accusé de crime contre l’humanité.
Les charges retenues contre lui concernent les chefs d’accusation de crimes contre l’humanité à
propos des faits suivants : les rafles de la rue Sainte-Catherine et d’Izieu, la déportation de plus
de six cents personnes dans le convoi du 11 août 1944, la torture de membres de la Résistance.
Le 9 juin 1943, 12, rue Sainte-Catherine à Lyon, quatre-vingt-six membres de l’Union générale des
israélites de France sont arrêtés et conduits à la prison du fort Montluc, à Lyon. Soixante-dix-huit
déportés aboutiront à Auschwitz.
Le 6 avril 1944, quarante-quatre enfants juifs réfugiés dans une maison d’Izieu, dans l’Ain, près de
Lyon, sont arrêtés, ainsi que leurs éducateurs. Neuf jours plus tard, ces enfants sont réduits en
cendres dans les fours crématoires du camp d’Auschwitz, les deux plus âgés sont fusillés.
Le 11 août 1944, plus de six cents détenus, juifs et résistants, de la prison de Montluc sont
embarqués dans ce qui sera le dernier train à quitter Lyon, trois semaines avant la libération de la
ville par les armées alliées. Le train 14 166 va s’arrêter successivement aux camps de Struthof,
Ravensbrück et Auschwitz.
Le 4 juillet 1987, la cour rend son verdict. Klaus Barbie est condamné à la réclusion criminelle
à perpétuité.
Constitution de la c our d’assises
DOCUMENT INA
et témoins, sont venues à la barre raconter
leurs souffrances, au nom de la justice et
de la mémoire.
Le président Cerdini, au centre, pendant le procès
La mission d’histoire
histoire, lancée en juillet 1997, est devenue la chaîne de référence dans le domaine de l’histoire.
En accord avec cette ambition, elle a engagé en septembre 1999 une longue procédure afin d’obtenir
l’autorisation de diffuser l’enregistrement du procès Barbie, sur son antenne et sur son site Internet.
Dans son ordonnance de janvier 2000, le vice-président du tribunal de grande instance a souligné
le profond intérêt de « ce projet de diffusion à vocation historique et pédagogique », qui « répond au
vœu du législateur ».
DOCUMENTS INA
Anne Sinclair aux côtés d’histoire
Pour cet événement unique que constitue la diffusion du procès Barbie,
PHOTO TF1/C. CHEVALIN
Anne Sinclair a exceptionnellement accepté de revenir à son activité de
journaliste politique. C’est elle qui conduira les débats des émissions
d’introduction et de conclusion, les dimanches 29 octobre et 3 décembre,
à 21 heures. C’est elle aussi qui, lors des trente-cinq rendez-vous quotidiens,
de 18h15 à 20h15, introduira le programme du jour, replaçant les audiences
dans leur contexte et en situant les enjeux.
Elle a bien voulu répondre à nos questions.
Pourquoi avez-vous accepté d’animer les débats sur la diffusion du procès Barbie ?
Anne Sinclair : Depuis que j’ai décidé de ne plus faire de journalisme politique à la télévision,
je m’occupe des activités Internet de TF1 ; c’est une tout autre vie, un travail différent, un nouveau
défi où un retour à la télévision n’a pas sa place.
Cette décision d’être présente sur histoire est donc très exceptionnelle, et elle n’est motivée
que par l’intérêt que je porte à la diffusion du procès. Parce que c’est le sujet et qu’il me touche,
parce que c’est un événement important pour la mémoire, celle des générations futures comme
celle des personnes qui ont vécu cette période très douloureuse de la guerre et de l’Occupation.
Dès lors, puisque mon concours était demandé, je l’apporte volontiers, mais je ne voudrais surtout
pas que ma participation, conjoncturelle, occulte le seul réel événement, qui est
la diffusion du procès.
Pour vous qui réagissiez dans vos émissions politiques sur des événements « à chauds », revenir
sur un événement du passé change-t-il votre démarche de journaliste ?
A. S. : Le travail du journaliste reste le même quelles que soient les circonstances. Il s’agit toujours
de donner à comprendre les enjeux et ce qui se passe. En 1987, pendant les sept semaines du
procès, les émissions de 7/7 établissaient un lien entre les différentes audiences, pour voir ce qui
restait de notre mémoire et ce que signifiait ce procès.
Aujourd’hui, avec les éminents historiens qui participent aux débats, nous nous efforcerons de
replacer les faits dans leur contexte, à la fois celui des années de la guerre et celui du moment du
procès, pour voir quelles leçons nous pouvons en tirer.
En second lieu, la chaîne diffuse près de 70 heures du procès. C’est donc une programmation d’une
ampleur exceptionnelle. Même si ce n’est pas l’intégralité de l’enregistrement. Bien entendu, tous
les moments importants du procès ont été retenus.
C’est, rappelons-le, le comité éditorial qui a présidé aux choix mis en œuvre par l’équipe
d’historiens sous la direction de madame Dominique Missika.
N’ont pas été retenues les quelques séquences dont l’enregistrement s’est révélé défectueux sur le
plan technique au point de les rendre inaudibles.
D’autre part, ne seront pas diffusés les nombreux moments de procédures qui ne sont pas
nécessaires à la compréhension du procès : les suspensions d’audience, l’arrivée et l’installation
des témoins, les prestations des serments de ceux-ci, la consultation des documents parmi les jurés
et les avocats...
Ensuite la plupart des témoignages seront diffusés. Ont été privilégiés, bien entendu, ceux qui sont
à charge. En ce qui concerne les témoins dits « d’intérêt général », on a parfois préféré le résumé,
accessible à tous, de leurs propos dans le cadre de l’éclairage historique et juridique évoqué dans le
paragraphe suivant. Les dépositions des témoins décédés au moment du procès, lues par les
greffiers, ne sont pas diffusées.
C’est l’essentiel et non l’intégralité de l’acte d’accusation, des témoignages, des plaidoiries des
parties civiles, du réquisitoire et des plaidoiries de la défense qui est programmé.
Enfin, précisons qu’il n’y a pas de montage. Une fois les séquences choisies, l’image de
l’enregistrement est intégralement respectée. La mise en page indique aux téléspectateurs en
permanence de quelle audience il s’agit, correspondant à quelle date et à quelle heure du procès,
et le nom des intervenants. Toutes ces informations étant inscrites à côté des images. Pas de voix
off, mais les interventions d’Henry Rousso et de Jean-Olivier Viout sont «face caméra ». Enfin,
toutes les coupes sont signalées.
Le suivi juridique du dossier a été assuré par maîtres Olivier Cousi et Charles-Edouard Renault,
du département média du cabinet Gide, Loyrette, Nouel.
S u r l e s i t e w w w. h i s t o i r e . f r
Toutes les émissions seront accessibles sur le site Internet de la chaîne, www.histoire.fr, dès le
début de la programmation sur l’antenne. Sur Internet, les émissions seront indexées. Il sera ainsi
possible de consulter la totalité du procès, ou certaines parties uniquement, comme par exemple
les interventions du procureur général ou de différents témoins...
La programmation détaillée du procès à l’antenne sera consultable sur le site.
L’internaute pourra aussi accéder à un ensemble d’informations complémentaires d’ordre général
sur les plans historique et juridique. Ce seront des éléments sur la Résistance et la déportation, sur
le déroulement du procès Barbie, avec notamment une biographie des principales parties
prenantes, ainsi qu’une filmographie.
www.histoire.fr proposera un annuaire sélectif de références disponibles sur Internet permettant
d’en savoir plus sur toutes ces questions.
Enfin, la chaîne ouvrira sur son site un forum mettant en relation les internautes avec des
historiens et des juristes.
histoire événement, directeur de la publication Philippe Chazal, conception rédaction histoire. Création graphique Andrea Marcelli.
Impression Kubis Print histoire 19, rue Cognacq-Jay 75007. - Tél 01 40 62 19 05/19 09. Fax 01 40 62 19 00.