Devant L'effondrement - Essai D - Yves Cochet
Devant L'effondrement - Essai D - Yves Cochet
Devant L'effondrement - Essai D - Yves Cochet
DEVANT
L’EFFONDREMENT
Essai de collapsologie
Cet ouvrage repose sur les recherches que je mène depuis dix
ans avec les membres de l’Institut Momentum autour des questions
d’Anthropocène1, d’effondrement, de décroissance. L’effondrement
me paraît être aujourd’hui le plus urgent des concepts à examiner, et
en même temps le plus dédaigné par la recherche universitaire, ainsi
que par les dirigeants politiques. Ce hiatus surprenant fut la première
motivation qui me pressa d’écrire. Je voulais comprendre comment
une matière aussi importante que l’éventuelle extinction prochaine2 de
l’espèce humaine pouvait être à ce point négligée par cette même
espèce humaine. Était-ce une question de connaissances, de
communication, d’insuffisance de preuves ? Ou plutôt un déni collectif
banal – mais funeste – dû à des invariants anthropologiques de
l’espèce humaine ? Lesquels ? Victoria Wariaro3 et ses collègues,
auteurs sérieux s’il en est, ont beau affirmer : « L’ampleur de la
destruction dépasse notre capacité de modélisation, avec une forte
probabilité que la civilisation humaine prenne fin », nos responsables
et commentateurs coutumiers proclament imperturbablement que le
business as usual, parfois mâtiné de discours verdâtres, continuera
et parviendra à surmonter les quelques problèmes sociaux et
environnementaux qui se présenteront, moyennant plus de
technologie, plus de marché, plus de croissance. Cette dissonance
cognitive, présente chez la quasi-totalité des décideurs à toutes les
échelles, me rappelle l’interrogation contée par Jared Diamond4 : à
quoi pouvait bien penser le bûcheron pascuan qui abattit le dernier
arbre de l’île de Pâques, au XVIIe siècle, afin de transporter les
immenses statues moaïs, achevant ainsi une déforestation qui
décima la population ? Nous sommes tous des bûcherons terrestres,
certains plus que d’autres.
Une deuxième motivation provint de la déception que je ressentais
souvent à la lecture de livres et documents sur la mal nommée « crise
écologique ». Si la plupart de ces textes en détaillaient assez bien les
multiples aspects (dérèglement climatique, érosion de la biodiversité,
raréfaction des ressources, perturbation des flux d’azote et de
phosphore, acidification des océans…), ils peinaient à expliquer le
pourquoi de cette crise, hormis les condamnations légitimes, mais
insuffisantes, des entreprises industrielles polluantes ou du système
capitaliste.
À ce propos : une partie des activistes écologistes considèrent
encore que le combat principal se nomme anticapitalisme et que,
conséquemment, la disparition espérée de ce système-là suffirait à
résoudre la plupart des problèmes sociaux et environnementaux. Ce
que je ne crois pas, comme nous le verrons plus loin. Bien sûr, je
n’occulte pas ainsi les responsabilités des firmes transnationales, de
la logique marchande et du système capitaliste lui-même dans
l’intensification des désastres actuels. Mais le cœur de l’explication
de ces désastres est ailleurs. Un seul contre-exemple suffit presque
à contredire les partisans du « Capitalocène » : quand bien même les
450 réacteurs nucléaires en service dans le monde seraient tous
autogérés par des coopératives ouvrières à but non lucratif, cela
n’enlèverait strictement rien à l’aberration politique et
environnementale que constituent de tels outils de production massive
d’électricité. Désormais, la question principale est le contenu même
et l’impact des productions de toute sorte, non la propriété du capital.
Ce n’est plus l’économique qui est déterminant en dernière instance,
c’est l’écologique.
Beaucoup de mes collègues et amis tiennent un discours censé
réduire, voire effacer, la violence de l’effondrement qui vient, en
affirmant que cet effondrement a déjà commencé depuis longtemps.
C’est la troisième raison de mon désir d’écrire : distinguer entre,
d’une part, la dégradation continue et perceptible des milieux naturels
depuis, disons, deux siècles, et, d’autre part, l’événement de rupture
assez rapide que constituera l’effondrement systémique mondial, au
sens que je préciserai au chapitre premier. Bien sûr, depuis le début
du XIXe siècle – et même bien avant –, il est possible de repérer des
signes de dégradation anthropique de la nature. Un exemple entre
mille : la déforestation massive en France du Moyen Âge à la fin du
XVIIIe siècle. Même les catastrophes écologiques et sanitaires
récentes telles que Seveso, Tchernobyl, Bhopal ou Fukushima ne
doivent pas entrer dans l’événement « effondrement » dont nous
parlerons, puisqu’elles ne sont pas globales et systémiques comme
l’est le dérèglement climatique, par exemple.
Une quatrième source d’irritation qui me conduisit à écrire est née
de la ritournelle des discours lénifiants affirmant que tout le monde
s’accorde sur l’état de santé du système Terre, mais que c’est au
sujet des types d’action à mettre en œuvre que nous nous
différencions. Malgré les rapports réguliers sur le climat des experts
onusiens du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur le
climat) et ceux sur la biodiversité de l’IPBES (Plate-forme
intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les
services écosystémiques), qui apparaissent comme le consensus
scientifique mondial au moment de leur publication, de nombreux
responsables politiques à travers le monde refusent encore de suivre
leurs recommandations, estimant sans doute qu’elles vont à
l’encontre des intérêts économiques de leur pays ou, plus
profondément, que les changements de politique publique qui en
résulteraient seraient attaqués par leurs adversaires et dégraderaient
leur réputation. Même chez ceux qui partagent le constat de la
catastrophe écologique, des divergences apparaissent vite quant aux
actions à entreprendre. Elles sont dues aux différentes visions du
monde des personnes concernées, c’est-à-dire aux idéologies dont
elles sont imbibées. En matière de dérèglement climatique, par
exemple, certains parieront sur le triptyque déjà rencontré
(technologie-croissance-marché), d’autres sur des législations
internationales et nationales beaucoup plus contraignantes
qu’aujourd’hui, d’autres encore sur la mobilisation d’une base
constituée de milliers de groupes d’activistes. Cependant, quelles que
soient ces idéologies inspiratrices, la totalité – ou presque – des
acteurs qui s’intéressent à la catastrophe écologique nourrit encore
l’espoir que l’effondrement pourra être évité.
Soyons clairs : par effondrement, j’entends un phénomène qui, en
matière démographique, verrait environ la moitié de la population
mondiale disparaître en moins de dix ans. Vers 2035, celle-ci
tournerait autour de trois milliards, au lieu des huit milliards postulés
par l’INED et l’ONU. Et, dans tous les autres domaines de la vie
individuelle et collective, l’ampleur du bouleversement serait du même
ordre. En d’autres termes, un effondrement comme jamais l’espèce
humaine n’en a connu, jusqu’à être confrontée à la possibilité de son
extinction.
À cela, tous les groupes politiques, toutes les associations
écologiques et tous les citoyens – ou presque – refusent de croire et
opposent un optimisme plus ou moins nuancé. Pourquoi cette
croyance persistante au salut ? Pourquoi cet espoir, alors que les
signaux objectifs de l’immensité (c’est-à-dire l’ampleur et l’imminence)
de la catastrophe sont de plus en plus évidents ? Souvent, les
réponses spontanées oscillent entre le simple « L’humanité a traversé
bien des épreuves depuis des millénaires, elle surmontera celle-ci
aussi », et le transhumaniste « Nous parviendrons bientôt, sous l’ère
de la Singularité qui arrive, à échapper à notre pesante condition
d’êtres biologiques terrestres grâce à de prodigieuses découvertes ».
En résumé, une foi inconditionnelle en la créativité humaine.
Mais, comme nous le verrons, cette fois-ci la question est
différente : elle concerne toute l’humanité solidairement (nul n’y
échappera), tous les domaines des activités humaines, individuelles
et collectives, locales et globales, et tous les milieux naturels, tout le
système Terre. Face à cette perspective incroyable, certains
estiment que, une fois encore, les riches s’en tireront, tandis que les
pauvres trinqueront, ainsi que cela se passe aujourd’hui, il est vrai,
avec les nuisances environnementales usuelles : les habitants du
Bangladesh endurent le dérèglement climatique et la déforestation
plus que ceux de la Belgique ; les Franciliens proches de la porte de
la Chapelle vivent dans de moins bonnes conditions que ceux de la
porte Dauphine. Beaucoup pensent aussi que ces mêmes privilégiés
parviendront à se construire des isolats protégés au sein desquels ils
échapperont à l’effondrement, tandis que la plèbe souffrira et mourra
dans le chaos environnemental et social. Ces arguments classiques,
basés sur les inégalités économiques criantes de notre époque, ne
tiennent pas lorsqu’on envisage l’effondrement au sens où nous
l’entendons. On pourrait presque les retourner. De fait, les
populations les moins « développées », les plus habituées à une
certaine rusticité dans leur vie courante, seront moins touchées par la
chute de la civilisation thermo-industrielle, parce qu’elles dépendent
moins, pour leur survie, de la mondialisation contemporaine et de
toute sa quincaillerie technologique. Un paysan albanais modeste en
polyculture-élevage agroécologique, utilisant la traction animale, est
plus résilient qu’un gros exploitant beauceron addict à l’agriculture
productiviste mécanisée ; une centaine de Tupinambas isolés dans la
forêt amazonienne survivront plus longtemps que les 650 000
habitants de Las Vegas.
Depuis une quinzaine d’années, au fur et à mesure de
l’approfondissement de mes recherches sur l’effondrement, je me
suis ainsi aperçu que tous les réflexes, toutes les idées reçues, tous
les clichés propagés aussi bien par l’idéologie dominante du libéral-
productivisme – qui ne cesse de s’étendre sur terre – que par les
écologistes eux-mêmes, souvent partisans du « développement
durable » ou de la « croissance verte », étaient des fables et des
illusions qu’il convenait d’examiner, de critiquer, de contredire
intellectuellement et politiquement au moyen de nouveaux angles de
vue sur la réalité géobiophysique de notre planète et de nouveaux
concepts beaucoup plus éclairants pour cette analyse. Il fallait
décoloniser l’imaginaire contemporain sous toutes ses formes et
construire une rationalité et une imagination nouvelles afin de penser
l’impensable.
Attention ! L’idée de l’effondrement est une drogue dure à
accoutumance rapide. La plupart des lecteurs de livres effondristes
n’en sortent pas complètement convaincus, mais pas indemnes non
plus. La pensée de la fin du monde, de la fin de tout notre
environnement et de toutes nos habitudes structurantes, peut se
développer en notre esprit jusqu’à en envahir une part indéfinie, telle
une obsession déprimante.
Attention ! L’idée de l’effondrement est un trou noir qui attire à lui
toute certitude passée pour la transformer, souvent, en son contraire.
Prenons la question du logement en France. L’opinion courante est
que les villes et agglomérations aujourd’hui en expansion économique
et démographique ne comptent pas assez de logements, tandis que
certaines communes périphériques ou rurales dépérissent et se
vident de leurs habitants. Il faut donc construire là où le manque est
patent. Cependant, lorsque l’effondrement systémique mondial se
déroulera en quelques années, les métropoles deviendront vite
inhabitables pour cause de pénurie de services de base (eau
courante, alimentation, énergie, transports…), tandis que les zones
rurales auparavant délaissées posséderont généralement
suffisamment d’aménités naturelles (eau de ruisseaux ou de mares,
bois et forêts, paysages comestibles, ruines rénovables…) pour
permettre de subvenir un certain temps aux besoins élémentaires.
Enfin, affirmons-le tout en le redoutant, les guerres civiles auront
anéanti une bonne partie de la population de la France, laissant de
nombreux habitats disponibles pour les survivants. Dans cette
perspective sinistre, mais proche et assurée, le problème actuel du
déficit de logements aura disparu.
Avant l’effondrement
CHAPITRE 1
De quoi parle-t-on ?
L’INTERACTION SPÉCULAIRE
L’EFFONDREMENT
LE MODÈLE PRODUCTIVISTE
La naissance du productivisme coïncide avec l’émergence des
sociétés industrielles au XVIIIe siècle7. Foi dans le progrès,
interprétation linéaire du déroulement temporel, démultiplication des
moyens de production, rationalisation et désenchantement des
sociétés : le productivisme conçoit les relations sociales comme étant
entièrement agencées autour du système de production-
consommation. L’être humain n’est plus qu’un sujet produisant ou
consommant. La production-consommation obsessionnelle se
substitue aux interactions sociales, les biens échangés sont vus
comme des extensions métonymiques des personnes qui les
échangent, le fétichisme de la marchandise réifie les liens
interpersonnels. Que les moyens de production soient collectifs,
comme dans l’ex-système soviétique, ou privés ne change rien à la
donne. Le productivisme n’est pas spécifiquement libéral. L’URSS
d’hier était aussi productiviste que les États-Unis. La Chine
communiste d’aujourd’hui l’est autant que le Japon. La soumission du
politique à l’économique est inhérente aux doctrines libérale et
marxiste. La première pose comme fondement de la société bonne la
production et la consommation, reliées par le marché. La seconde
affirme que les rapports de production sont au fondement de la
société et rejette les autres domaines dans des superstructures
secondaires déterminées, en dernière instance, par l’économique.
Cette hégémonie de l’économie, qui s’impose dans les
représentations, les décisions, les activités humaines, au détriment
des autres dimensions de l’être, est le premier attribut du
productivisme.
Un autre point commun entre les économies capitalistes et
socialistes est leur indifférence à l’environnement naturel. Il ne s’agit
pas d’un oubli accidentel au sein des pensées qui les sous-tendent,
mais d’un vice profond dans leurs architectures respectives, basées
l’une et l’autre sur une représentation erronée de la nature. La nature,
implicitement considérée comme inépuisable et indestructible, est en
fait ignorée par ces pensées, ou alors envisagée comme un
ensemble de ressources disponibles pour l’accroissement des forces
productives, et comme un milieu hostile (en raison des pénuries, des
maladies, du climat…) qu’il convient de maîtriser et de dominer. Cette
incomplétude des économies capitalistes et socialistes est le
deuxième attribut du productivisme.
Soustraite à tout débat public sur l’utilité de telle ou telle
production et insensible à toute considération sur ses impacts
écologiques en amont et en aval, l’économie s’est concentrée sur
l’efficacité à tout prix et la recherche systématique de la productivité
maximale (d’où le terme de « productivisme » ou, dans sa modalité
triomphaliste actuelle, de « libéral-productivisme »). Ce troisième
attribut du productivisme ne correspond donc pas seulement à la
croissance de la production, au « toujours plus » ; il englobe aussi un
objectif d’efficacité optimale, d’accroissement incessant de la
productivité, sous peine de périr. Le productivisme, c’est la
démesure, l’hubris, l’illimitation.
Plus généralement, nous qualifierons de « productiviste » toute
structure sociale recherchant la production et la productivité
maximales sans égard pour leur contenu ou leur environnement
social, culturel ou environnemental. De telles structures (les marchés,
General Motors, l’agriculture, l’école, la santé…) engendrent des
conséquences internes et externes néfastes, négligées par le modèle
productiviste. La notion de productivité d’une structure tente
d’agréger en une seule mesure un ensemble de facteurs de
production hétérogènes, tels ceux énumérés par le modèle de
Solow : le travail humain, le capital, le progrès technique. En fait,
dans le mythe productiviste, c’est l’ensemble de la science qui est
convoquée pour appuyer un projet démiurgique repris aujourd’hui par
le transhumanisme. Le domaine politique (la société des humains
réels) et le domaine naturel étant sources de désordres et d’aléas, il
convient de tout recréer, tout fabriquer, tout vendre selon des
méthodes prétendument incontestables, rationnelles, scientifiques. Y
compris les humains, actuellement si faillibles, si imparfaits, si
mortels. Retenons ce quatrième attribut du productivisme, d’ordre
métaphysique : la volonté de refabrication du monde. En somme, ce
premier modèle du monde est un totalitarisme.
LE MODÈLE AUGUSTINIEN
1. Ce chapitre est une extension d’un texte paru dans : Agnès Sinaï (dir.),
Penser la décroissance. Politiques de l’Anthropocène, Paris, Presses de Sciences
Po, 2013.
2. Conseil européen, conclusions adoptées le 22 mars 2019. Nos lecteurs les
plus exigeants peuvent consulter les « conclusions » du Conseil depuis le début de
ce siècle : la ritournelle de la croissance et de la compétitivité y est présente
chaque année.
3. Donella H. Meadows, Dennis Meadows, Jorgen Randers, William W.
Behrens III, The Limits to Growth, op. cit.
4. Saint Augustin, sermon 81, § 8, décembre 410.
5. Jean Laherrère, « What goes up must come down. When will it peak ? », Oil
and Gas Journal, vol. 97, no 5, février 1999, p. 57-64.
6. René Thom, « Théorie des catastrophes, sciences sociales et prospective »,
Futuribles, 9, janvier 1977.
7. Ce paragraphe reprend certaines des analyses contenues dans Yves Cochet
et Agnès Sinaï, Sauver la Terre, Paris, Fayard, 2003.
8. Philippe Bihouix, Benoît de Guillebon, Quel futur pour les métaux ?
Raréfaction des métaux : un nouveau défi pour la société, Les Ulis, EDP
Sciences, 2010.
9. Joseph Tainter, The Collapse of Complex Societies, op. cit., p. 119.
10. Voir chapitre 1.
11. Ainsi en est-il des rédacteurs du mensuel La Décroissance (52 rue Crillon,
à Lyon).
12. Ce passage est une extension de la préface au livre de Michel Sourrouille
(dir.), Moins nombreux, plus heureux, Paris, Sang de la Terre, 2014.
CHAPITRE 3
Y a-t-il une bonne économie pour
la planète et pour l’humanité1 ?
LE PEAK OIL
LE RETOUR ÉNERGÉTIQUE
Le taux de retour énergétique (Energy Return On Energy
Invested, EROEI) est la principale mesure de la qualité de l’énergie
(voir aussi chapitre suivant). Il s’agit du rapport entre l’énergie
utilisable par la société et l’énergie mise en œuvre pour la rendre
utilisable. Il se révèle être un pur chiffre, puisque les unités d’énergie
sont les mêmes pour le numérateur et le dénominateur.
Les coûts d’exploration et de production étaient faibles aux débuts
de la production de pétrole, donc l’EROEI était assez élevé. Plus
sophistiquées et plus coûteuses seront les technologies nécessaires
pour exploiter les réserves en eaux profondes et celles de l’Arctique.
L’EROEI a été estimé à 100 :1 lorsque de grandes découvertes de
pétrole ont été faites au Texas et dans l’Oklahoma dans les années
1930, la décennie de pointe des découvertes. Après que la
production de pétrole conventionnel étatsunien eut atteint un sommet
dans les années 1970, les coûts de production ont augmenté et
l’EROEI est tombé à environ 40 :1. Aujourd’hui, la moyenne mondiale
pour l’extraction du pétrole conventionnel est de l’ordre de 15:1.
La recherche sur le concept d’EROEI se poursuit. Les chiffres
que je viens de citer sont le rapport obtenu en tête de puits. Mais
doit-on aussi inclure les coûts de raffinage et de transport du
combustible, les coûts de transformation du pétrole en engrais, de la
production d’aliments et de l’alimentation des familles des travailleurs
du pétrole ? Ce sont des questions importantes. De quel niveau
d’EROEI aurons-nous besoin pour maintenir les systèmes d’éducation
et de santé ? Charles A.S. Hall et ses collègues estiment qu’un
EROEI d’au moins 5:1 est nécessaire pour soutenir une société civile
durable16. Dans sa récente thèse, Victor Court estime plutôt ce
minimum à 11:117. Comme le surplus énergétique diminue avec la
baisse de l’EROEI, le surplus économique sur lequel la société
moderne est construit est destiné à baisser aussi.
ÉCONOMIE POLITIQUE HÉTÉRODOXE
Plutôt que de prendre la rareté relative comme point de départ,
l’économie biophysique se concentre sur le surplus économique et la
pénurie absolue18. Un surplus économique est la différence entre la
valeur d’un produit et le coût de sa production. Une approche par le
surplus est clairement impliquée par une définition substantive de
l’économie. L’économie biophysique estime aussi que la rareté
absolue n’est pas facilement transcendée par le commerce ou la
technologie. Même si des substituts peuvent parfois être trouvés ou
de nouvelles technologies développées, les transitions sont souvent
difficiles et conflictuelles.
Le changement technologique dépend de l’énergie. La plupart des
grandes innovations qui marquèrent une époque au XIXe et au
XXe siècle, telles que la machine à vapeur, les chemins de fer,
1. Ce chapitre est une extension d’un texte paru dans Agnès Sinaï (dir.),
Économie de l’après-croissance. Politiques de l’Anthropocène II, Paris, Presses
de Sciences Po, 2015.
2. Le livre inaugural de cette économie est Charles A.S. Hall et Kent A.
Klitgaard, Energy and the Wealth of Nations. Understanding the Biophysical
Economy, New York, Springer, 2012.
3. L’ouvrage de référence sur cette économie est Herman E. Daly et Joshua
Farley, Ecological Economics : Principles and Applications, 2e éd., Washington,
DC, Island Press, 2011.
4. Voir Kent A. Klitgaard, « The Essence of Biophysical Economics », New
York State Economics Association Proceedings, vol. 5, 2012. Ce résumé des
thèses de l’économie biophysique a inspiré la structure du présent chapitre.
5. Pour une critique complète de cette approche, introduite par le Millennium
Ecosystem Assessment (2005), voir Virginie Maris, Nature à vendre, Paris, Quae,
2014.
6. Kent A. Klitgaard, « The Essence of Biophysical Economics », art. cité.
7. Will Steffen et al., Global Change and the Earth System, Berlin, Springer,
2004 ; Johan Rockström, Katherine Richardson, Will Steffen et al., « Planetary
boundaries : Guiding human development on a changing planet », Science, 15
janvier 2015.
8. Ivan Illich, Énergie et équité, Paris, Seuil, 1975.
9. Richard Heinberg, La Fin de la croissance, Plogastel Saint-Germain,
Éditions Demi-lune, 2012.
10. Thorstein Veblen, Théorie de la classe de loisir [1899], Paris, Gallimard,
1979.
11. Kent A. Klitgaard, « The Essence of Biophysical Economics », art. cité.
12. Kurt Cobb, « Has U.S. shale oil entered a death spiral ? », 27 janvier 2019,
https://www.resilience.org/stories/2019-01-27/has-u-s-shale-oil-entered-a-death-
spiral/.
13. J’ai examiné la non-substituabilité du pétrole dans mon livre Pétrole
apocalypse, Paris, Fayard, 2005.
14. Zentrum für Transformation der Bundeswehr, Peak Oil, Strausberg
(Allemagne), 2010, http://www.bundeswehr.de/.
15. David Hughes, Drilling Deeper, Post Carbon Institute, 2014.
16. Charles A.S. Hall, Stephen Balough, David J.R. Murphy, « What is the
Minimum EROI that a Sustainable Society Must Have ? », Energies, 2009, vol. 2,
p. 25-47.
17. Victor Court, Énergie, EROI et croissance économique dans une
perspective de long terme, thèse de sciences économiques, Université Paris-Ouest
Nanterre La Défense, 18 novembre 2016.
18. Kent A. Klitgaard, « The Essence of Biophysical Economics », art. cité.
19. Robert Ayres et Benjamin Warr, The Economic Growth Engine : How
Energy and Work Drive Material Prosperity, Cheltenham, GB, et Northampton, MA,
Edward Elgar Publishing, 2009.
20. François Roddier, De la thermodynamique à l’économie. Le tourbillon de la
vie, Artignosc-sur-Verdon, Parole éditions, 2018.
21. Karl Polanyi, La Grande Transformation. Aux origines politiques et
économiques de notre temps [1944], Paris, Gallimard, 1983.
22. Joseph Tainter, The Collapse of Complex Societies, op. cit.
23. Kent A. Klitgaard, « The Essence of Biophysical Economics », art. cité.
24. Graham M. Turner et al., « A tool for strategic biophysical assessment of a
national economy. The Australian stocks and flows framework », Environmental
Modelling and Software, 26 (2011), p. 1134-1149.
25. Nicholas Georgescu-Roegen, Demain la décroissance. Entropie, écologie,
économie, traduction, présentation et annotations de Jacques Grinevald et Ivo
Rens, Lausanne, Pierre-Marcel Favre, 1979.
26. René Passet, L’Économique et le Vivant, Paris, Payot, 1979.
27. Tim Morgan, Life After Growth, Petersfield, Harriman House Ltd, 2013.
28. Gaël Giraud et Zeynep Kahraman, « How Dependent is Growth from
Primary Energy ? Output Energy Elasticity in 50 Countries (1970-2011) », 10 avril
2014, https://www.parisschoolofeconomics.eu/IMG/pdf/article-pse-medde-juin2014-
giraud-kahraman.pdf.
CHAPITRE 4
Les prémisses : la crise de 2008
Notre analyse matérialiste rend mieux compte que les autres des
cinq récessions mondiales que nous avons connues depuis 1973. À
l’exception de la crise « asiatique » de 1998-1999, tous ces épisodes
de récession furent précédés de hausses fortes et rapides du cours
du baril4. La dernière hausse en date a atteint 500 % entre 2002 et la
mi-2008, soit trois à quatre fois plus que les hausses observées lors
des premier et deuxième chocs pétroliers des années 1970 ou lors
de la guerre du Golfe en 1991. Tandis que la bulle immobilière incitait
les ménages américains défavorisés à s’installer plus loin de leur lieu
de travail pour acquérir une maison moins chère, la hausse
concomitante des carburants les frappa plus lourdement, en
proportion de cet éloignement. Ce qu’ils avaient espéré gagner en
vivant loin de la ville avec un gallon d’essence à moins de 2 dollars, ils
le perdirent lorsque celui-ci dépassa les 3 dollars. L’implosion de la
bulle immobilière seule aurait pu ralentir l’économie américaine. Mais
la forte hausse des produits pétroliers de 2007 à la mi-2008 a
engendré la récession5.
La quasi-totalité des commentateurs de révérence, des
responsables politiques et des économistes orthodoxes s’en sont
tenus à une analyse interne des tares du système financier, alors que
celui-ci n’a constitué que le quatrième domino. Les plus prolixes
d’entre eux nous ont abreuvés de longs discours et de colonnes
outrées sur les scandales que représentent les revenus démesurés,
les bonus et autres parachutes dorés des dirigeants d’entreprise, sur
les dérégulations opérées au cours des dernières années par le
capitalisme financier sous l’égide du gourou Alan Greenspan, sur les
risques insensés pris par les investisseurs immobiliers, incapables
d’imaginer l’éventualité d’un retournement des prix. Les meilleurs de
ces analystes (Paul Jorion6, André Orléan7) nous ont aidés à penser
les mécanismes cognitifs de cet « aveuglement au désastre ».
Cependant, pour essayer d’évaluer l’ampleur et la durée de la
récession, nous devons complexifier un peu la chaîne causale des
dominos en examinant la façon dont la chute des derniers d’entre eux
a provoqué une accélération de la chute des premiers par une boucle
de rétroaction positive.
Avouons d’abord qu’il existe un domino zéro qui n’est autre que le
déclin de la production de pétrole brut conventionnel (c’est-à-dire peu
cher) depuis 2005. Face à une demande mondiale croissante, le
pétrole supplémentaire ne provient plus que de l’extraction des
réserves non conventionnelles (chères), ce qui entraîne la chute du
premier domino : la hausse des cours du baril et des prix des
produits pétroliers. Le deuxième domino se dédouble : d’un côté, la
crise du remboursement des crédits hypothécaires risqués (les
subprimes), puis la baisse des prix de l’immobilier ; de l’autre, les
difficultés des compagnies aériennes et des industries automobiles.
Ces deux facteurs provoquent la crise bancaire, le resserrement du
crédit, la récession. D’autres dominos tombent alors – affaissement
du marché des produits dérivés sur le marché pétrolier, diminution de
la demande mondiale de pétrole –, ce qui provoque une baisse des
prix du pétrole et une réduction de la production (l’OPEP tente de
faire remonter le cours du baril en fermant un peu les robinets).
S’ensuit un ralentissement des investissements dans l’exploration et la
production pétrolières (inutile d’extraire un baril pour 80 dollars si
vous ne le vendez que 60) afin de compenser la déplétion géologique.
Alors, la production mondiale de pétrole décroît et décroîtra, pour
conduire bientôt à quelques pénuries et à un deuxième choc sur les
prix, après celui de 2008.
La boucle se boucle : cette hausse rapprochée des prix des
produits pétroliers – et de toutes les énergies – reviendra heurter à la
baisse les prix de l’immobilier hors agglomération, à la hausse le coût
des transports et de l’alimentation, à la baisse la santé déjà
défaillante des compagnies aériennes et des industries automobiles.
La récession deviendra dépression par suite de quelques événements
économiques et sociaux importants (faillite d’un grand pays,
dislocation du système financier mondial, forte augmentation du
chômage…). Quand ? Bientôt.
Le scénario central
CHAPITRE 5
La fin du monde tel que nous
le connaissons
Tous les deux ans, pendant l’été, l’ONU publie ses projections
démographiques pour le siècle. En juin 2019, cette institution estimait
que nous serions 9,7 milliards d’habitants en 2050 et 11 milliards en
2100, contre 7,7 milliards aujourd’hui. Notre hypothèse principale,
celle d’un effondrement systémique mondial dans les toutes
prochaines années, nous incite à réfuter ces projections
croissancistes. Hélas, il est à craindre que les trois raisons majeures
qui, historiquement, ont fait baisser le nombre d’humains se
combineront pendant ce sombre futur : les guerres, les épidémies et
les famines.
Les scénarios envisageables sont légion. Verra-t-on une tension
internationale intense aboutir à l’utilisation d’armes nucléaires, rayant
de la carte plusieurs grandes villes du monde, tandis qu’un nuage de
poussières et de cendres envahira l’atmosphère pendant des années
et que l’amincissement de la couche d’ozone conduira les humains à
être brûlés par les UV, la diminution du flux solaire ayant en parallèle
un impact catastrophique sur les cultures1 ? Une souche virulente
aussi mortelle qu’Ebola et aussi contagieuse que la grippe se
propagera-t-elle rapidement au monde entier sans qu’une réponse
sanitaire ait pu être mise au point ? Le franchissement d’un seuil de
raréfaction des pollinisateurs sous l’effet conjoint de la transformation
des habitats, de l’excès de pesticides et de la prolifération d’espèces
invasives fera-t-il chuter brusquement la production agricole,
provoquant des famines massives2 ? Le déclin accéléré de
l’approvisionnement en pétrole après le passage du pic de Hubbert
mondial provoquera-t-il une panique sur les marchés des matières
premières et une pénurie de carburants, dont les conséquences se
diffuseraient bientôt aux autres volets cruciaux de l’économie
mondiale : la fourniture d’électricité, les communications, les
transports, l’eau courante et les services régaliens des États ? Un
nouveau choc systémique global de très grande ampleur au sein du
système bancaire, monétaire et de crédit prolongera-t-il ses effets
dans les chaînes de production mondiale de biens et services, par
contagion croisée intensifiante entre le système financier et les
réseaux de production et de commerce, même si les acheteurs et les
vendeurs sont liés par des monnaies fortes et une bonne
intermédiation bancaire ? Assistera-t-on à un relargage massif et
brusque de méthane dans l’atmosphère dû à la fonte des pergélisols
arctiques et sibériens ou à la libération des hydrates de méthane
sous-marins, au point que la température moyenne de la Terre
augmentera de plus de 1 °C en quelques années ? L’explosion d’une
bombe thermonucléaire à haute altitude au-dessus de territoires
cruciaux comme les États-Unis d’Amérique ou l’Europe créera-t-elle
une impulsion électromagnétique capable de paralyser toute
l’alimentation électrique du continent pendant plusieurs mois ? Le
basculement dans la mer d’Amundsen des glaciers de Pine Island
entraînera- t-il une montée du niveau de la mer de 3 mètres,
submergeant toutes les villes côtières de la planète3 ? Le brusque
arrêt du Gulf Stream marquera-t-il la fin de l’Europe tempérée, la
soumettant à des étés chauds et secs et à des hivers rigoureux4 ? La
déforestation rapide pour pallier le manque d’énergies fossiles en
déplétion accélérera-t-elle la chute de la civilisation occidentale par
pénurie de bois5 ?
Telles sont quelques-unes des causes plausibles de
l’effondrement du système et, conséquemment, de la population
humaine, par effet domino6. Plus intéressés par les arguments et les
raisonnements que par le spectaculaire hollywoodien, nous
n’insisterons pas davantage sur les atrocités probables7. Toutefois,
nous nous permettrons de renvoyer le lecteur à une œuvre artistique
qui décrit avec beaucoup de talent ce qui risque de se passer : le film
No Blade of Grass, de Cornell Wilde, sorti en 1970. Belle anticipation
réaliste !
Venons-en à l’essentiel : il nous faut estimer la taille de la
population mondiale et de celle de la France vers 2050, après les
étapes « fin du monde tel que nous le connaissons » et « intervalle de
survie ». Notre hypothèse est que moins de la moitié de ces
populations survivra, soit environ trois milliards d’êtres humains sur
terre et une trentaine de millions sur le territoire actuel de la France.
Dans cet espace, la répartition géographique envisagée – par
biorégions8 – sera de type exode urbain, c’est-à-dire que les milieux
ruraux seront plus peuplés, et les zones urbaines moins. De toutes
nos hypothèses de travail (détaillées plus loin), celle-ci semble sans
doute la plus surprenante, mais elle est aussi la plus fondamentale.
*
Notre démarche est holistique et systémique. La France est
considérée comme un tout inséré dans un système de contraintes
mondiales, et destinée à être peuplée d’habitants civilisés en 2050 et
en 2150. Si nous insistons beaucoup, dans cet ouvrage, sur les
conditions et les contraintes matérielles, nous estimons cependant
que le fondement de la vie bonne dans ces futurs résidera dans les
relations humaines et dans les activités culturelles et artistiques, qui
réjouissent par le seul plaisir de leur pratique. D’autant plus que nos
descendants auront été traumatisés par les années effroyables
d’avant 2050. Cependant, nous sommes convaincus que, sans une
base modeste de besoins matériels satisfaits, aucune civilité, aucune
civilisation, aucune cosmologie ne peut surgir et s’épanouir.
À la différence de nos amis des associations négaWatt, Solagro
et Greenpeace, nous partons donc d’une vision globale, et non des
prospectives plus sectorielles et plus continuistes de scénarios
énergétiques (négaWatt, Greenpeace) ou agroalimentaire (Afterres-
Solagro). Ces projections vont toutes très loin dans l’analyse et les
propositions pour 2050 sur leurs thématiques respectives, mais elles
raisonnent toutes choses étant égales par ailleurs. La croyance
induite par ce postulat nous semble illusoire.
Comme tous les amis précités, nous avons utilisé la méthode du
backcasting pour penser et articuler l’esquisse de perspective qui
constitue ce chapitre. Usuellement, cette méthode consiste à décrire
un objectif de société rêvée pour 2050, un futur désirable, puis les
étapes nécessaires pour y parvenir par réorientation continue,
réforme graduelle, transition souple à partir de l’existant. En ce qui
nous concerne, notre vision de 2050 tient compte de l’effondrement
inéluctable des années prochaines. Les étapes pour s’adapter à ce
futur sont donc inspirées par la nécessité plus que par la volonté,
sauf celle de minimiser les souffrances et les morts au cours des
trois décennies à venir.
Après l’effondrement
CHAPITRE 6
Faire société face à l’effondrement
L’ÉTAT DE NATURE
LE TERRORISME AUJOURD’HUI
1. Voir le chapitre 1.
2. David Korowicz, Trade-Off, op. cit.
3. Audrey Garric et Pascale Krémer, « Éco-anxiété, dépression verte ou
“solastalgie” : les Français gagnés par l’angoisse climatique », Le Monde, 21 juin
2019, https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2019/06/21/les-francais-gagnes-par-l-
angoisse-climatique_5479761_4497916.html.
4. Pablo Servigne et Gauthier Chapelle, L’Entraide. L’autre loi de la jungle,
Paris, Les Liens qui Libèrent, 2017 ; Pablo Servigne, Raphaël Stevens et Gauthier
Chapelle, Une autre fin du monde est possible, Paris, Seuil, 2018.
5. Frédérique Audoin-Rouzeau, Les Chemins de la peste. Le rat, la puce et
l’homme, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2003.
6. Boccace, Le Décaméron, Paris, Gallimard, coll. « Folio » (no 4352), 2006.
7. John Rawls, Théorie de la justice, Paris, Seuil, 1987.
8. Thomas Hobbes, Léviathan, Paris, Gallimard, coll. « Folio Essais », 2001 ;
Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social, Paris, Flammarion, 2001.
9. Sigmund Freud, Totem et tabou, Paris, Payot, 2001.
10. René Thom, Esquisse d’une sémiophysique, Paris, Inter-Éditions, 1988 ;
René Thom, Apologie du logos, Paris, Hachette, 1990.
11. René Thom, Esquisse d’une sémiophysique, op. cit.
12. Pablo Servigne et Gauthier Chapelle, L’Entraide, op. cit.
13. Serge Guérin, La solidarité, ça existe… et en plus ça rapporte !, Paris,
Michalon, 2013.
14. David Holmgren, Permaculture : principes et pistes d’action vers un mode
de vie soutenable, Paris, Rue de l’Échiquier, 2014.
15. Émilie Hache, « (Re)découvrir l’écoféminisme », Contretemps, 28 février
2017, https://www.contretemps.eu/redecouvrir-ecofeminisme/ ; voir aussi Joanna
Macy, « Agir avec le désespoir environnemental », in Émilie Hache (dir.), Reclaim,
Paris, Cambourakis, 2016.
16. Yves Cochet, « Urgence climatique : pour la simple et bonne ration »,
Libération, 12 février 2019.
17. Mathilde Szuba, « Régimes de justice énergétique », in Agnès Sinaï (dir.),
Penser la décroissance, op. cit.
18. Onofrio Romano, « Notion de dépense », in Giacomo D’Alisa, Federico
Demaria et Giorgos Kallis, Décroissance. Vocabulaire pour une nouvelle ère,
Paris, Le Passager clandestin, 2015, p. 195-201.
19. Pierre de Gasquet, « Olivier Roy et Gilles Kepel, le Prophète et le
Mandarin », Les Échos, 31 mars 2017.
20. Nafeez Mosaddeq Ahmed, Failing States, Collapsing Systems. Biophysical
Triggers of Political Violence, Springer, 2017.
21. Eric Schmitt, « Two Decades After 9/11, Militants Have Only Multiplied »,
The New York Times, 20 novembre 2018.
22. Jean-Louis Vullierme, Miroir de l’Occident. Le nazisme et la civilisation
occidentale, Paris, Éditions du Toucan, 2014.
CHAPITRE 7
La sécurité
1. Ce chapitre est une extension d’un texte paru dans la revue Entropia, no 13,
2012.
2. Joseph Tainter, The Collapse of Complex Societies, op. cit., p. 38.
3. Max Weber, Le Savant et le Politique, Paris, Union générale d’éditions,
1963, p. 28.
4. Paul Dumouchel, Le Sacrifice inutile, Paris, Flammarion, 2011.
5. Ibid., p. 12.
6. René Girard, La Violence et le Sacré, op. cit.
7. Jean-Louis Vullierme, Le Concept de système politique, op. cit.
8. Carl Schmitt, La Notion du politique, Paris, Calmann-Lévy, 1972 ; Carl
Schmitt, Le Nomos de la Terre, Paris, PUF, 2001.
9. Nafeez Mosaddeq Ahmed, Failing States, Collapsing Systems, op. cit.
10. Johan Rockström, Katherine Richardson, Will Steffen et al., « Planetary
boundaries : Guiding human development on a changing planet », Science, 15
janvier 2015.
11. Julien Bouissou, « Gurgaon, symbole terni des villes privées indiennes », Le
Monde, 15 mai 2012, p. 11.
12. Paul Dumouchel, Le Sacrifice inutile, op. cit., p. 124-133.
13. Marshall Sahlins, Stone Age Economics, Chicago, Aldine Publishing
Company, 1972, p. 185-276.
14. « Ma vie quotidienne, qui baigne dans le flux des purs vécus, se déroule
dans une alternance incessante de modèles du monde qui réorganise à chaque fois
l’ensemble de mon être au monde. […] Dans tous ces investissements, et il y en a
mille autres possibles, c’est la même personne qui peint sa vie en puisant dans sa
palette de modèles du monde celui qui correspond à son vécu de l’instant. Ces
modèles sont évolutifs, disparates, voire contradictoires entre eux. Un tel individu,
fragmenté et qui accepte cette fragmentation, est l’être le plus ordinaire qui soit.
L’être humain est multidimensionnel, bigarré, ambigu. Cette conception s’oppose à
la vision unidimensionnelle de l’Homo œconomicus, réduit à un moi unitaire
rationnel sans cesse à la recherche de sa cohérence et de la maximisation de son
utilité (libéralisme). Elle s’oppose aussi à la conception d’un individu massifié dont la
conscience serait entièrement déterminée par la position qu’il occupe dans les
rapports de classes (marxisme). » Yves Cochet, Antimanuel d’écologie, Paris,
Bréal, 2009, p. 130-131.
15. Cette distance peut être approximativement mesurée par l’inverse de
l’intensité et de la fréquence des interactions entre deux individus.
QUATRIÈME PARTIE
Le déni de l’effondrement
aujourd’hui
CHAPITRE 8
Alarmisme versus catastrophisme
ALARMISME
CATASTROPHISME
PSYCHOLOGIE DU DÉNI
CONSÉQUENCES POLITIQUES
ESCHATOLOGIE POLITIQUE